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Tro for !, par Robert Solé
Le groupe Auchan ouvrira en mars à Mulhouse (Haut-Rhin) le premier hypermarché hard discount de France.
Traduction : le groupe Auchan ouvrira en mars à Mulhouse (Haut-Rhin) la première grande surface à prix cassés de France. Dans ce magasin géant (9 000 m2), les clients se verront proposer quelque 30 000 références et pourront acheter sucre, farine et autres denrées en vrac, choisissant eux-mêmes la quantité dont ils ont besoin. Ce secteur de la distribution est, paraît-il, appelé à un bel avenir au cours des prochains mois en raison de la montée du chômage : de plus en plus de consommateurs vont devoir se serrer la ceinture, et donc recourir à des produits bon marché. Les créatifs du groupe Auchan ont d'ailleurs donné à la nouvelle enseigne (vert fluo et rose framboise) un nom évocateur : Priba. On imagine les cris d'enthousiasme qui ont dû saluer cette trouvaille. Génial, coco ! Trop fort ! Les amoureux de la langue auraient tort de s'en offusquer. On n'est pas à l'akadémi française. Il fallait faire simple. La misère du vocabulaire s'imposait même dans cette opération juteuse. N'oublions pas que le maxidiscompte est destiné à des acheteurs modestes. On ne donne pas de la confiture aux cochons. Robert Solé
07/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/07/tro-for-par-robert-sole_1288670_3232.html
Sauver les salles art et essai, par Franck Nouchi
Loin des débats sur le téléchargement, de tels lieux sont menacés de disparition.
Une dépêche de l'AFP au titre tonitruant : "Le triomphe planétaire d'Avatar promet un avenir radieux au cinéma en 3D." Un milliard de dollars de recettes en moins de trois semaines. Un clic plus loin, ce même mercredi, la page d'accueil du site Rue 89 : "Cinéma Le Balzac, 15 000 euros de bénéfices en 2008." Pour ceux qui ne connaissent pas, Le Balzac, c'est "la" salle de cinéma art et essai des Champs-Elysées. Cette semaine, outre Bright Star de Jane Campion, Les Chats persans de Bahman Ghobadi et Contes de l'âge d'or de Constantin Popescu, on peut y voir des films burlesques de Laurel et Hardy, Méliès et Chaplin ainsi que Kiki la petite sorcière de Hayao Miyazaki. Jean-Jacques Schpoliansky, le patron de ce cinéma inauguré en 1935 par son grand-père, a accepté d'ouvrir ses livres de comptes. Instructif : en 2009, un peu plus de 156 000 entrées ont été comptabilisées, contre plus de 400 000 dans les années 60. Moyennant mille astuces (location à des entreprises, cocktails, ciné-concerts, etc.) et quelques subventions, il parvient tout juste à équilibrer ses comptes. "Je me bats avec des bouts de ficelle depuis trente-six ans et je n'ai pas l'intention de m'arrêter. Un quartier comme celui-là a besoin d'un cinéma de proximité, d'un endroit où les gens se parlent et découvrent des choses." Loin des débats sur le téléchargement, de tels lieux sont aujourd'hui menacés de disparition. Dans Ballaciner, JMG Le Clézio décrivait le plaisir de ces salles "où l'on se cale dans son fauteuil, éprouvant le grain du velours, le bois des accoudoirs, où on cherche sa place pour dormir ou rêver, parfois pour une session d'autoérotisme, les pieds passés par-dessus le dossier du rang de devant. La nuit du cinéma sait être un refuge contre la brutalité du monde urbain..." Autre cinéphile, Roland Barthes, dans Le Bruissement de la langue, a magnifiquement décrit l'état d'"hypnose" dans lequel on se trouve lorsque l'on est plongé dans le noir d'une salle de cinéma. Rien à voir avec la télévision : "Nulle fascination ; le noir y est gommé, l'anonymat refoulé ; l'espace est familier, articulé (par les meubles, les objets connus), dressé : l'érotisme - disons mieux, pour en faire comprendre la légèreté, l'inachèvement -, l'érotisation du lieu est forclose : par la télévision, nous sommes condamnés à la Famille, dont elle est devenue l'instrument ménager, comme le fut autrefois l'âtre, flanqué de sa marmite commune." Intitulé "En sortant du cinéma", ce texte fut écrit en 1975, soit bien avant l'avènement d'Internet. Aujourd'hui, à l'écran de télé se sont ajoutés ceux des ordinateurs et autres appareils portables. Subsistent, mais pour combien de temps ?, quelques derniers îlots de connivence et de résistance. Jean-Jacques Schpoliansky aime citer Albert Camus : "Tout ce qui dégrade la culture raccourcit les chemins qui mènent à la servitude." Franck Nouchi
07/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/07/sauver-les-salles-art-et-essai-par-franck-nouchi_1288668_3238.html
Les rumeurs de Conakry, par Christophe Châtelot
Depuis l'attentat dont il a été victime, le 3 décembre 2009, le silence de "Dadis" est étourdissant.
A Conakry, lorsque je demande à mon ami Bangaly comment il se porte, il me répond invariablement : "Ça va un peu." Il ne faut pas se méprendre : "un peu" guinéen ne vaut pas "un peu" français. Notre interprétation se justifierait pourtant au regard du quotidien de la majorité des Guinéens. Entre les coupures de courant et l'eau non courante, la course aux taxis collectifs brinquebalants et surchargés, l'augmentation du prix du riz, les coups d'Etat et les massacres des militaires ou de militaires... Mais non, "un peu" veut plutôt dire "bien". Bangaly va bien. Partant de là, lorsque les cousins de "Dadis", confortablement installés au gouvernement, répètent que le chef de la junte "va bien et qu'il se remet", il faudrait comprendre qu'il pète la forme. Et là, on a du mal à y croire. Moussa Dadis Camara a été victime d'une tentative d'attentat le 3 décembre 2009 menée, pistolet au poing, par son aide de camp Aboubacar "Toumba" Diakite. Depuis, le tireur est en cavale. Il "va un peu", à en croire l'interview qu'il a donnée depuis l'une de ses planques à RFI. Quant à Dadis, évacué d'urgence vers un hôpital militaire de Rabat au Maroc, son état de santé est un secret jalousement gardé. Et manipulé. "Moi, personnellement, j'ai vu une image de Dadis sur son lit d'hôpital, avec son béret sur la tête, commente un internaute sur le site aminata.com. Je ne crois pas du tout à ça car c'est à la tête que le chef de la junte a reçu les balles de Toumba. Comment peut-il recevoir du plomb dans la tête et continuer à porter son béret comme si de rien n'était ?" La question vaut d'être posée. Que se passe-t-il sous le béret de Dadis ? Son silence n'est pas bon signe. Cet homme ne ratait jamais l'occasion de lancer d'interminables diatribes durant ses onze mois à la tête de la junte. Depuis le 3 décembre, son silence est étourdissant. Dadis aurait-il soudainement pris conscience que son hyperprésence médiatique durant ses "Dadis show" télévisés avait fini par le ridiculiser ? A moins qu'il ne pense que son mutisme lui permettra de se faire oublier des juges alors qu'un rapport de l'ONU vient de recommander à la Cour pénale internationale de l'inculper de crimes contre l'humanité pour son rôle dans le massacre d'au moins 156 opposants le 28 septembre 2009. "Tu sais, lui a rappelé l'impertinent journaliste ivoirien Venance Konan dans l'une de ses chroniques, la justice des Blancs est parfois lente, mais jamais amnésique." Beaucoup parient plutôt sur une lourde incapacité du président autoproclamé. "On ne peut rien en tirer", aurait confié, à des proches, le président intérimaire Sékouba Konaté après une visite au malade de Rabat. La source est anonyme, la déclaration invérifiable au royaume de la rumeur. Une chose est sûre. Dadis ne gouverne plus la Guinée, même depuis son lit d'hôpital, un béret vissé sur la tête. On se demande d'ailleurs qui gouverne, à Conakry. Courriel : chatelot@lemonde.fr. Christophe Châtelot
07/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/07/les-rumeurs-de-conakry-par-christophe-chatelot_1288581_3232.html
Le Sud-Soudan menacé par la guerre civile, selon des ONG
La combinaison de violences, de tensions politiques et d'une extrême pauvreté porte la région au bord de l'implosion, à l'approche du 5e anniversaire de l'accord de paix, estiment des ONG.
Le Sud-Soudan pourrait retomber dans la guerre civile si la communauté internationale n'intervient pas pour sauvegarder les acquis de l'accord de paix de 2005, mettent en garde dix organisations humanitaires dans un rapport intitulé Sauver la paix au Sud-Soudan, publié à Londres. La combinaison de violences, de tensions politiques et d'une extrême pauvreté a porté le Sud-Soudan au bord de l'implosion, à l'approche du 5e anniversaire de cet accord, estiment ces dix ONG. "Nous avons observé l'an passé une hausse des violences dans le sud du Soudan. Cela pourrait encore s'aggraver et devenir l'une des plus grosses urgences en Afrique en 2010", estime l'une des co-auteurs du rapport, Maya Mailer, d'Oxfam. Le nord du Soudan, majoritairement musulman, et le sud, en grande partie chrétien et animiste, ont signé en 2005 l'accord de paix global (CPA), qui a mis fin à une guerre civile de plus de vingt ans à l'origine de deux millions de morts. En 2009, environ 2 500 personnes sont mortes et 350 000 ont été déplacées en raison des combats tribaux au Sud-Soudan. Les dix ONG accusent la communauté internationale d'avoir délaissé un pays où, selon elles, les femmes et les enfants sont de plus en plus régulièrement pris pour cibles et où les forces de maintien de la paix sont impuissantes. Les premières élections multipartites depuis 1986, prévues en avril 2010, et le référendum d'autodétermination prévu en 2011 au Sud-Soudan pourraient fournir le prétexte à de nouvelles flambées de violence, redoutent les ONG. Elles plaident pour que la Mission des Nations unies au Soudan (Unmis) fasse de la protection des civils une de ses priorités et que la communauté internationale joue un rôle de médiateur entre les partis du Nord et du Sud afin d'éviter les tensions.
07/01/2010
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/01/07/le-sud-soudan-menace-par-la-guerre-civile-selon-des-ong_1288554_3212.html
"Sarkozy promet d'""enrichir"" et d'""amplifier"" le débat sur l'identité nationale"
Nicolas Sarkozy a promis, jeudi 7 janvier, de "poursuivre", "enrichir", "amplifier" le débat très controversé sur l'identité nationale, qu'il a jugé indispensable dans le contexte de l'après-crise pour "être au rendez-vous de l'histoire qui est en train de s'écrire".
"Ce débat, c'est bien mal me connaître que de croire qu'on va l'arrêter. Au contraire, nous allons le poursuivre, l'enrichir, l'amplifier, afin que pour chaque Français le mot nation et le mot république reprennent tout leur sens, quels que soient son origine, le quartier où l'on habite, le milieu social où l'on est né", a déclaré M. Sarkozy lors d'un colloque sur le "nouveau capitalisme" organisé par le ministre de l'immigration Eric Besson, également promoteur du débat sur l'identité nationale. "Le débat sur notre identité, c'est un débat pour être au rendez-vous de l'histoire qui est en train de s'écrire (...) la force de notre identité, c'est notre plus grand atout face aux défis du XXIe siècle." Dans une longue démonstration, le chef de l'Etat a expliqué que "dans la crise, les nations ont retrouvé leur rôle protecteur". "La nation a toute sa place parce que la nation est porteuse de valeurs, de cultures, d'identité et que la diversité est un moteur du progrès", a-t-il affirmé. "Mais si la diversité est un moteur de progrès, ne fuyez pas l'identité car sans identité, il n'y a pas de diversité." "Comme il est étrange ce débat où tout le monde est d'accord pour la diversité et où tant ont peur de l'identité. L'identité n'est pas une pathologie", a déclaré le président, en citant Claude Lévi-Strauss. "Avec une identité forte, on n'a pas peur des autres, avec une identité fragile, on a peur de tout ce qui semble différent (...) le débat sur l'identité nationale n'est pas le prélude à un repliement, à une fermeture, il est au contraire la condition de l'ouverture", a-t-il plaidé. "Notre place dans le monde dépendra demain de la confiance que nous aurons en nous-mêmes, de notre culture, et dans notre capacité à promouvoir un avenir commun", a conclu le chef de l'Etat. Lancé en novembre, le débat sur l'immigration nationale a suscité de nombreuses critiques, aussi bien à gauche qu'à droite. Selon M. Besson, Nicolas Sarkozy doit à nouveau s'exprimer sur ce thème "dans la première quinzaine de février".
07/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/07/sarkozy-promet-d-enrichir-et-d-amplifier-le-debat-sur-l-identite-nationale_1288742_823448.html
La dépendance fiscale croissante du marché immobilier français, par Isabelle Rey-Lefebvre
Les promoteurs ne peuvent décidément plus se passer d'adjuvants fiscaux.
Dans la loi de finances pour 2010, promulguée le 30 décembre 2009, le Parlement a reconduit presque à l'identique les mesures fiscales de soutien au marché immobilier. Les parlementaires sont donc allés contre la volonté du gouvernement d'alléger ces mesures, pour des problèmes de coût, et, surtout, de les "verdir", c'est-à-dire de conditionner leur bénéfice à des exigences de performances thermiques des logements achetés. Huit dispositifs fiscaux ponctionnent ainsi au budget de l'Etat 10,7 milliards d'euros, soit un tiers de l'effort national en faveur du logement. Parmi les dispositifs les plus chers et controversés figure la déduction des intérêts d'emprunts, plus justement le crédit d'impôt, accordée aux acheteurs de leur résidence principale, une promesse du candidat Sarkozy mise en oeuvre par la loi Tepa (21 août 2007). Elle a, en 2008, profité à 376 000 ménages, pour 249 millions d'euros, un coût qui est passé à 1,05 milliard d'euros, en 2009, et devrait atteindre 1,5 milliard d'euros en 2010. Cette mesure est présentée comme une aide à l'accession à la propriété alors qu'elle s'adresse à tous les ménages, même déjà propriétaires, d'où sa cherté. Le rapport parlementaire évaluant l'efficacité des dépenses fiscales en faveur du développement et de l'amélioration de l'offre de logements, annexé à la loi de finances 2010, estime qu'il "apparaît difficile de mesurer, dans ce contexte (de crise) l'effet dynamique de ce crédit d'impôt" qui consent un avantage de 6 800 euros par ménage. Le prêt à taux zéro (PTZ), très similaire dans son principe mais dont le mécanisme met à la disposition immédiate des accédants une somme d'argent qu'ils rembourseront à taux nul, est plus pertinent. Il est accordé aux seuls primo-accédants à revenus plafonnés et son montant a, dans le cadre du plan de relance, été doublé pour l'achat d'un logement neuf, en 2009, et, grâce à la nouvelle loi de finances, prolongé jusqu'au 30 juin 2010. Il a été distribué à environ 210 000 ménages, en 2009, pour un coût de 650 millions d'euros (900 millions en 2010). Le même rapport juge l'outil "particulièrement bien adapté à l'objectif de solvabilisation des ménages à revenu modeste". Selon le rapport de la loi de finances rédigé par Gilles Carrez, "plus de 80 % des bénéficiaires sont des employés (32,1 %), des ouvriers (27,8 %), des professions intermédiaires (21,2 %), et 43 % sont des familles de trois personnes ou plus". Le PTZ coûte à l'Etat entre 3 000 et 8 000 euros par emprunteur. La dépense est bien modeste en regard de celle consacrée à l'investissement locatif. Les dispositifs Périssol, Besson, Robien et Borloo ont, en 2008, grevé le budget de l'Etat de 490 millions d'euros, pour 475 000 bénéficiaires, et de 605 millions d'euros, en 2009. L'aide fiscale à un logement Robien de trois pièces et 65 mètres carrés s'élève à environ 16 000 euros. Le rapport trouve ce moyen "efficace pour susciter le supplément de production de logements neufs, favoriser l'augmentation de l'offre de logements locatifs", mais considère "qu'il ne contribue, en revanche, pas à la production de logements à loyer modéré". Les effets escomptés sont "très contrastés selon les situations locales (...) conduisant des investisseurs à des déconvenues, en raison des difficultés de location". Le dernier-né de ces dispositifs, baptisé Scellier du nom du parlementaire auteur de l'amendement, crève carrément les plafonds. La seule génération des 51 000 logements Scellier et Scellier intermédiaire, créés en 2009, coûtera à l'Etat 2,8 milliards d'euros, en valeur actualisée, sur la période 2010-2025, soit environ 60 000 euros par logement. Devant une telle facture, le gouvernement a cherché, en vain, à limiter les dégâts, en favorisant les logements basse consommation, ce qui aurait permis de susciter une offre dans ce domaine. Les parlementaires en ont décidé différemment, au prétexte que les professionnels ne sont pas prêts et par peur de casser la machine à produire des logements. Le comble est atteint par la réduction d'impôt Bouvard pour les résidences de tourisme, dont les acheteurs se voient théoriquement offrir par l'Etat 25 % du prix. Depuis 1984, et les premiers avantages à l'investissement locatif, les promoteurs ne peuvent décidément plus se passer d'adjuvants fiscaux, en doses de plus en plus fortes, pour vendre leurs programmes. Les premières années, les ventes aux investisseurs ne dépassaient pas 15 % à 20 % de la production, tandis qu'elles vont au-delà de 50 %, aujourd'hui. Et la qualité technique et environnementale n'est pas au rendez-vous, puisque Gilles Carrez estime que 20 % des logements Robien-Scellier ne remplissent même pas les exigences de la réglementation thermique, en vigueur depuis 2005. On produit donc des logements trop chers pour les locataires, pas toujours bien situés et en totale contradiction avec les objectifs fixés par le Grenelle de l'environnement. Ce soutien artificiel au marché a, en outre, cassé le mouvement de baisse des prix des terrains, entamé en 2008, qui aurait permis d'abaisser le coût final des logements, pour les accédants comme pour les investisseurs, ce qui est, finalement, la meilleure aide au logement et la plus économe pour les ménages comme pour l'Etat. Courriel : rey@lemonde.fr. Isabelle Rey-Lefebvre (Service Economie-Entreprises)
07/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/07/la-dependance-fiscale-croissante-du-marche-immobilier-francais-par-isabelle-rey-lefebvre_1288580_3232.html
Plusieurs morts dans une fusillade visant des coptes en Egypte
Ces morts risquent d'attiser les inquiétudes de la communauté copte en Egypte, qui constitue environ 8 % des 80 millions d'Egyptiens.
e commerçante, a annoncé jeudi une source de sécurité. Neuf autres coptes ont été blessés lors de cette fusillade, a ajouté la source, citée par l'agence officielle égyptienne MENA. Deux versions sont évoquées sur le déroulement de la fusillade. La version officielle indique qu'elle a eu lieu dans une rue commerçante où des coptes faisaient leurs courses à l'occasion de la fête de Noël qu'ils célèbrent le 7 janvier. Une seconde version, celle de témoins, indique que l'attaque a visé des coptes à leur sortie de la messe de minuit organisée dans l'église principale de Nagaa Hamadi, dans le gouvernorat de Qena, à quelque 700 km au sud du Caire. Ces morts risquent d'attiser les inquiétudes de la communauté copte en Egypte, qui constitue environ 8 % des 80 millions d'Egyptiens. Jeudi, des heurts ont eu lieu entre manifestants coptes et policiers. Les coptes se plaignent déjà depuis plus de vingt ans de discriminations et de harcèlement systématiques. Ils protestent également contre leur mise à l'écart de certains postes-clés au sein de l'armée, de la police, de la justice ou des universités. Le ministère de l'intérieur a envoyé des renforts à Nagaa Hamadi.
07/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/07/plusieurs-morts-dans-une-fusillade-visant-des-coptes-en-egypte_1288529_3218.html
Gazette du mercato : Arsenal prêt à échanger Fabregas avec Higuain ?
Les Gunners seraient prêts à discuter avec le Real pour Fabregas si Higuain est dans la balance, selon "Marca".
Le Real tente une approche vers Fabregas Le club anglais d'Arsenal est prêt à négocier avec le Real Madrid pour céder son capitaine espagnol Cesc Fabregas, à condition que les Merengue incluent dans la transaction leur attaquant argentin Gonzalo Higuain, selon le journal sportif espagnol Marca de jeudi. Le quotidien n'identifie pas ses sources, mais ajoute que le Real n'est pas disposé à se défaire aisément de son attaquant argentin, très efficace actuellement. Le club serait en revanche prêt à se défaire de son milieu offensif néerlandais Rafael Van Der Vaart en échange de Fabregas. Mais les Gunners ont déjà pléthore de milieux offensifs, et cherchent plutôt un goleador capable de tenir la baraque en attendant le retour de Van Persie, blessé pendant plusieurs mois. Pour que le Real cède Higuain, il faudrait qu'Arsenal le valorise à 35 millions d'euros. Un tel prix signifierait que Madrid ne débourserait que 10 millions d'euros pour le milieu espagnol d'Arsenal, estimé à 45 millions d'euros, selon la presse espagnole. Mais rien n'indique qu'Higuain, qui est le meilleur buteur du Real Madrid en Liga depuis le début de la saison, avec 10 réalisations, soit enclin à faire ses valises, ni qu'Arsène Wenger ne soit résigné à lâcher son Fabregas. Maxi Rodriguez dans le rouge ? Toujours selon Marca, l'attaquant argentin de l'Atletico Madrid, Maxi Rodriguez, est près de rallier le club britannique de Liverpool pour un million et demi d'euros. Le quotidien assure que le joueur a déjà annoncé la nouvelle à ses coéquipiers, et ajoute que la somme levée va permettre au club espagnol de boucler le financement nécessaire au recrutement d'un autre Argentin, l'attaquant de Lanus Eduardo Salvio, pour 8 millions d'euros. D'autre part, selon le journal As, le milieu portugais de la Juventus Tiago Mendes serait tout proche du club madrilène, qui a fait un début de saison catastrophique. Comme les Reds de Liverpool, qui espèrent toujours mettre la main sur le Madrilène Van Nistelrooy. Le Genoa sur Fernando Selon L'Equipe, les Italiens du Genoa auraient envoyé une offre concrète aux Girondins de Bordeaux pour attirer leur milieu de terrain Fernando. Le Brésilien, que les Bordelais avaient récupéré à Catane (Serie B), fait partie des intermittents de l'effectif de Laurent Blanc, qui lui fait cependant confiance lors des affiches de Ligue des champions dans son milieu renforcé. Après avoir émis depuis plusieurs saisons le souhait d'aller voir ailleurs, Fernando pourrait toutefois profiter de cette approche du Genoa, en mauvaise posture en Serie A, pour prolonger son contrat avec Bordeaux, avec une renégociation à la hausse de son salaire. Nice sur Civelli et Digard Les Aiglons, 16es de L1 et privés de 8 joueurs pendant la CAN, avancent sur les dossiers de deux anciens pensionnaires de L1, le défenseur argentin Renato Civelli (San Lorenzo, ex-OM), et le milieu défensif Didier Digard (Middlesbrough, ex-PSG). Les joueurs sont prêts à rejoindre le club de Didier Ollé-Nicolle, avec l'espoir pour Civelli de se relancer dans un grand championnat européen, et pour Digard, ex-espoir du foot tricolore, de revenir dans l'Hexagone après une expérience anglaise mitigée.
07/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/07/gazette-du-mercato-arsenal-pret-a-echanger-fabregas-avec-higuain_1288569_3242.html
"""Le Bêtisier du sociologue"", de Nathalie Heinich : vertigineuse bêtise !"
Un catalogue d'idioties savoureuses, de bêtises "même pas fausses" et de sottes ignorances.
Il faut avoir promené depuis plus de trente ans son carnet de notes et un regard amusé dans tous les couloirs où se pratique la sociologie en France pour oser commettre un Bêtisier du sociologue. C'est le cas de Nathalie Heinich, qui publie un catalogue d'idioties savoureuses, de bêtises "même pas fausses" et de sottes ignorances. Le sacrilège ne passera pas inaperçu au royaume du "fait social". La "réflexivité" et l'esprit de sérieux y règnent en maîtres, c'est bien connu... Et la bêtise n'y est jamais que feinte pour se rapprocher de ses objets d'étude, cela va de soi. Au long de vingt-deux chapitres écrits d'une plume alerte, l'auteur (surtout ne pas écrire "auteure", c'est une bêtise !) se livre donc à un véritable jeu de massacre. Elle y excelle. Le goût immodéré des généralités ("le social", "le pouvoir", etc.), la croyance dans les arrière-mondes où se trameraient des complots contre les individus, les divers abus qui bousculent les mots et les nombres, le goût de la critique (la sociologie comme "sport de combat") et la peur de la polémique (le "politiquement correct")... Dans ce livre, tout passe sous les fourches Caudines du bon sens et de la passion du réel qui animent Nathalie Heinich. "Est-ce bien raisonnable ?" : ainsi conclut-elle presque invariablement ces voyages en idiotie sociologique. On rétorquera à l'évidence que nombre de raisonnements sociologiques échappent au "détecteur de bêtises" de l'auteur, pour la bonne raison qu'ils n'en contiennent pas. Las ! Nathalie Heinich a prévu cette échappatoire suspecte. Ainsi du "tout se passe comme si" cher à la sociologie de Pierre Bourdieu, dont Heinich donne l'exemple suivant : "Tout se passe comme si le système scolaire faisait en sorte de reproduire les inégalités sociales." Le verdict de l'ancienne disciple convertie au scepticisme est sévère : "C'est le beurre de la paranoïa intentionnaliste avec l'argent du beurre de la caution scientifique." En somme, tous les raisonnements sociologiques ne sont pas bêtes, mais certains raisonnements intelligents peuvent rendre idiot. Il suffisait d'y penser ! Nathalie Heinich s'est fait une devise de fuir l'imbécillité en toutes circonstances. "Entre Charybde et Scylla, toujours prendre la tangente", écrit-elle ici habilement pour justifier de ne pas choisir entre deux genres de bêtise : le genre postmoderne ("tout se vaut") et le genre positiviste ("tout est mathématisable"). La posture est élégante, à défaut d'être toujours très juste pour ceux qui ont l'honneur d'être cités ici, et dont les "bêtises" ne se valent pourtant pas toutes. L'auteur, voulant "éviter d'être bête sans pour autant devenir méchante", ne donne en effet aucun nom. Les curieux s'amuseront à reconnaître, malgré tout, leurs auteurs préférés. D'autres regretteront que le propos tienne trop du catalogue. Mais, comme disait Flaubert, qui connaissait bien le sujet : "La bêtise consiste à vouloir conclure." LE BÊTISIER DU SOCIOLOGUE de Nathalie Heinich. Klincksieck, 154 p., 15 €. Gilles Bastin
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/le-betisier-du-sociologue-de-nathalie-heinich_1288470_3260.html
"""Conteurs, menteurs"" et ""Sylvia"", de Leonard Michaels : l'art de la situation"
Selon l'écrivain, l'humour est l'instrument idéal pour décaper le monde ou relever ses bizarreries.
Si la France excelle dans la séparation des disciplines, au pays de Jack Kerouac, on peut être un sage professeur et un écrivain - c'est-à-dire un sauvage, un déviant, dont l'art n'obéit qu'aux règles qu'il s'est fixées lui-même. Mais ces règles, il faut savoir les transgresser pour donner du sens et du souffle à l'écriture et l'écarter aussi de son pire ennemi : le ronron. Aucun risque de ce genre dans l'aventure de Leonard Michaels : Son anthologie, Conteurs, menteurs, est une résistance à toutes formes de conformisme. Les textes de Leonard Michaels (1933-2003), inconnu en France mais considéré aux Etats-Unis comme un maître de la nouvelle, sont aujourd'hui traduits et rassemblés dans un volume de plus de 600 pages qui contient une avalanche de fictions sans lien apparent - sinon ce souci de l'invention renouvelée. Cette passion de la forme, Leonard Michaels l'a d'abord vécue à travers les livres des autres : en rédigeant une thèse consacrée à la littérature romantique, et en enseignant l'écriture et la critique littéraire à Berkeley (Californie). Trente années séparent le premier du dernier texte publié. Quelle écriture imprévisible ! Chaque nouveau récit est une occasion de recommencer de zéro le voyage de la langue. Et celle-ci transporte le lecteur au bord de situations loufoques, à New York ou ailleurs, dans la nuit ouverte aux ivresses, aux errances. On y boit, on y copule aussi beaucoup. On croise un homme amoureux d'une prostituée qui préfère la compagnie d'un singe. On apprend que, dans les années 1950, le narrateur a bu de l'absinthe, assisté à un avortement, conduit une Chevrolet Bel Air, connu un homme qui repassait ses billets de banque et "se poudrait les testicules avant de sortir avec une fille". Tous les moyens sont bons pour s'écarter de la norme. Selon Leonard Michaels, l'humour est l'instrument idéal pour décaper le monde ou relever ses bizarreries. Que ce soit sur une dizaine de pages ou en trois phrases, ces récits sont toujours remarquables. "Un jour, alors qu'elle faisait l'amour, son lit s'est effondré sur son chat qui dormait en dessous et lui a brisé les reins. Elle raconte que, depuis, elle n'envisage plus le sexe de la même manière." Cependant, l'écriture de Michaels n'est pas seulement tournée vers la dérision. Il y a des moments de recueillement où elle s'éloigne de la fiction pour mieux explorer l'intimité de l'écrivain, comme c'est aussi le cas dans Sylvia, où l'auteur évoque le suicide de sa première épouse. Quelques fragments autobiographiques sont alors dévoilés à travers des phrases pudiques pour suggérer l'enfance ou attester d'une pensée tout à coup mise à nue : "Les sentiments m'envahissent sans raison. Ils me tyrannisent. Je vois tout à travers leur prisme jusqu'à ce qu'ils disparaissent. Sans plus de raison." On trouvera dans ces textes ce que l'on peut sans doute attendre d'un livre : qu'il fasse penser et rêver, au plus près comme au plus loin de soi-même. CONTEURS, MENTEURS (THE COLLECTED STORIES), traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Céline Leroy. Christian Bourgois, 606 p., 28 €. SYLVIA, traduit par Céline Leroy. Christian Bourgeois, 154 p., 17 €. Amaury da Cunha
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/conteurs-menteurs-et-sylvia-de-leonard-michaels_1288458_3260.html
A Kigali, Bernard Kouchner scelle la réconciliation franco-rwandaise
Un rapport rwandais exonère le président Kagamé de toute responsabilité dans l'attentat de 1994
La concomitance n'a probablement rien d'une coïncidence. Au moment même où Bernard Kouchner, en déplacement à Kigali, scellait la réconciliation entre la France et le Rwanda, les autorités rwandaises ont discrètement rendu public, jeudi 7 janvier, un rapport officiel démentant radicalement la thèse développée par le juge français Jean-Louis Bruguière. Une thèse qui attribuait à l'actuel président Paul Kagamé la responsabilité de l'attentat contre l'avion de son prédécesseur, considéré comme l'événement déclencheur du génocide des Tutsis en 1994. Cette analyse contenue dans une ordonnance du juge, en novembre 2006, avait provoqué la rupture, par Kigali, des relations diplomatiques avec Paris. Le document d'un "comité indépendant d'experts" rwandais, révélé par France Inter, jeudi, écarte la responsabilité du pouvoir actuel de Kigali, à dominante tutsie. Il analyse l'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion du président hutu Habyarimana, comme une "opération soigneusement murie par des politiciens et officiers extrémistes appartenant à la faction Hutu power (extrémistes)" opposés au partage du pouvoir imposé alors par les accords d'Arusha. Le rapport, rédigé sous la direction de Jean Mutsinzi, ancien président de la Cour suprême du rwanda, contredit les conclusions du juge Bruguière à propos du lieu d'où auraient été tirés les missiles contre l'avion présidentiel. Il le situe dans la zone de Kanombe contrôlée par les Forces armées rwandaises (FAR) du président Habyarimana. Le document affirme que les FAR disposaient d'armes lourdes, notamment de missiles "commandés en grande quantité à cinq Etats différents", parmi lesquels la France ne figure pas. En août 2008, Kigali avait publié un autre rapport qui accusait la France d'avoir "participé à l'exécution du génocide" et mettait en cause nommément Edouard Balladur, Alain Juppé et Dominique de Villepin. Aujourd'hui, le rapport Mutsinzi reste très discret sur le rôle de Paris. Entretemps, de nouveaux témoignages ont affaibli l'enquête du juge Bruguière, conduisant son successeur, Marc Trévidic, à la reprendre en grande partie, et permettant la reprise des relations diplomatiques, annoncée le 29 novembre dernier. Adhésion au Commonwealth Arrivé à Kigali, mercredi, en fin de journée pour une visite de vingt-quatre heures, première étape d'une tournée de cinq jours en Afrique, Bernard Kouchner a été accueilli non pas par son homologue rwandaise, mais par Rose Kabuye, directrice du protocole du président Kagamé. Dans ce changement protocolaire de dernière minute, qui pouvait être reçu comme un camouflet, la délégation française a préféré déceler, au contraire, une marque d'attention. Proche du président, Rose Kabuye, visée par un mandat d'arrêt du juge Bruguière, avait été interpellée puis remise en liberté, permettant au Rwanda d'entrer dans la procédure française et de passer à l'offensive contre l'enquête Bruguière. Avec Kigali, l'heure est désormais aux retrouvailles. A la mi-décembre, Paris et Kigali ont désigné leurs ambassadeurs. Bernard Kouchner, qui connaît de longue date le président Kagamé, a oeuvré personnellement au rétablissement des relations. La prochaine étape serait une visite du président Nicolas Sarkozy, peut-être à la fin de février. Au-delà, l'enjeu du rapprochement est moins économique que culturel. Les échanges entre les deux pays sont dérisoires (12 millions d'euros en 2008). En revanche, l'avenir du Rwanda comme pays francophone inquiète Paris. Kigali a rejoint le Commonwealth. Depuis la rentrée scolaire, l'enseignement de l'anglais a remplacé celui du français dans les écoles du primaire. "Dans trente ou quarante ans, on ne parlera plus le français au Rwanda", prédit un diplomate.
07/01/2010
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2010/01/07/a-kigali-bernard-kouchner-scelle-la-reconciliation-franco-rwandaise_1288605_3210.html
En Guinée, la junte militaire jette les bases d'une transition démocratique du pouvoir aux civils
Le général Konaté, président par intérim, propose de créer un gouvernement d'union nationale
Se dirige-t-on vers une sortie de crise en Guinée, un an après le coup d'Etat qui porta au pouvoir une junte militaire au bilan calamiteux ? Le discours prononcé, mercredi 7 janvier, par le président intérimaire, Sékouba Konaté, le laisse espérer. Ce général, surnommé "El Tigre", a en effet tendu la main à l'opposition et ouvert la voie au retour à un pouvoir civil dans le pays. La Guinée attendait que ce général d'un naturel taiseux sorte du mutisme dans lequel il se tenait depuis sa nomination, au lendemain de la tentative d'assassinat du chef de la junte. Le capitaine Moussa Dadis Camara a été grièvement blessé par balles, le 3 décembre. Il est, depuis, hospitalisé au Maroc. "Nous décidons du choix d'un premier ministre issu de l'opposition, désigné par elle-même et qui engagera avec l'ensemble des couches sociales et politiques du pays des discussions et consultations pour la mise en place d'un gouvernement de transition d'union nationale", a déclaré le général Konaté. "Il faut poser dès maintenant des actes allant dans le sens de l'apaisement", a-t-il ajouté. "Le temps et les modalités pour y arriver, la composition de cette nouvelle équipe basée sur l'unité dans la diversité incombe désormais à toutes les parties concernées, que j'invite à tout faire pour ne pas imposer au pays une attente longue et interminable", a-t-il insisté. "Le pays ne peut continuer à attendre et souffrir davantage. La communauté internationale nous presse de hâter le pas et attend de notre part des progrès significatifs", a-t-il poursuivi. C'est en effet le message que de hauts diplomates français et américains lui avaient transmis avec insistance, lundi, à Rabat en marge de la visite rendue par le général Konaté à Dadis Camara. Ce message avait également été délivré à Blaise Compaoré, le président du Burkina-Faso, médiateur africain dans la crise guinéenne. Depuis la capitale rwandaise, Kigali, où il a entamé, mercredi, une tournée africaine, le ministre français des affaires étrangères, Bernard Kouchner, a, quant à lui, salué "une très bonne surprise". Le ministre craignait, en effet, que la crise, en se prolongeant, ne débouche sur "une guerre civile". Le 28 septembre 2009, une manifestation pacifique de l'opposition protestant contre l'intention de Dadis Camara de se présenter à la présidentielle avait été réprimée dans le sang. Au moins 156 opposants avaient été tués par les "bérets rouges" de la garde présidentielle. Des dizaines de femmes avaient subi des violences sexuelles. Une enquête, menée avec une rapidité inhabituelle par l'ONU, a recommandé à la Cour pénale internationale (CPI) l'inculpation, pour crimes contre l'humanité, du capitaine Dadis et de trois autres officiers. "Le rapport d'enquête devrait être prochainement transmis par le secrétaire général de l'ONU au procureur général de la CPI, sans passer par le Conseil de sécurité", explique un diplomate français. Ce processus judiciaire place le capitaine Dadis hors du jeu politique guinéen, quel que soit son état de santé réel. Dans l'opposition, Oury Bah, numéro deux de l'UFDG, a salué les annonces faites par M. Konaté. "L'important n'est pas le choix de la personne pour le poste de premier ministre. Ce qui est fondamental, c'est le mandat, les pouvoirs et les responsabilités du nouveau premier ministre", a dit Oury Bah. Christophe Châtelot
07/01/2010
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2010/01/07/en-guinee-la-junte-militaire-jette-les-bases-d-une-transition-democratique-du-pouvoir-aux-civils_1288606_3210.html
La colère des Palestiniens de Gaza contre l'Egypte
Heurts à la frontière où les Egyptiens ont engagé des travaux pour bloquer les tunnels permettant d'atténuer les effets du blocus israélien
REPORTAGE Les soldats égyptiens casqués et arme à la main sont nerveux. Une douzaine d'entre eux sont postés à faible distance de la ligne de démarcation avec Gaza. Le terminal de Rafah a été ouvert lundi, mais, ce mercredi 6 janvier, le maigre trafic des passagers, que l'Egypte autorise en général une fois par mois, est interrompu. La tension qui ne cesse de monter entre le gouvernement du Mouvement de la résistance islamique (Hamas), qui contrôle Gaza, et l'Egypte, depuis que Le Caire a entrepris de construire une barrière métallique souterraine pour endiguer le flot de marchandises acheminées par les tunnels de contrebande, vient de dégénérer. Un échange de tirs entre gardes-frontières égyptiens et policiers du Hamas a fait un mort et une demi-douzaine de blessés côté égyptien, et une quinzaine de blessés côté palestinien. L'incident s'est produit à un peu plus d'un kilomètre de là, à la porte Salahuddin, le long du "couloir de Philadelphie" qui marque la frontière entre les deux territoires. Des manifestants palestiniens s'étaient rassemblés pour protester contre la construction de la barrière égyptienne. Les slogans hurlés par les adolescents palestiniens se sont accompagnés de jets de pierres, auxquels ont répondu des tirs de semonce, et puis tout s'est embrasé. Les gardes-frontières égyptiens avaient été rendus nerveux par la perspective de l'arrivée imminente d'un convoi humanitaire international à destination de Gaza, bloqué dans le port égyptien d'Al-Arich mercredi soir. Chez les Gazaouis, l'incompréhension le dispute à une sourde appréhension devant l'avenir : l'"économie des tunnels" est le cordon ombilical de la bande de Gaza. A Rafah, Ghazi Hamad, responsable de tous les points de passage officiels reliant Gaza à Israël et l'Egypte, se désole : "Nous espérons que nos frères égyptiens vont renoncer, insiste-t-il, qu'ils vont se souvenir que nous sommes comme eux des Arabes et des musulmans et qu'ils doivent nous aider, parce que la relation entre nos deux territoires est stratégique." Dans la ville de Gaza, Ahmad Youssef, conseiller politique du premier ministre du Hamas, Ismaïl Haniyeh, ne décolère pas : "Pourquoi les Egyptiens apportent-ils leur concours aux efforts des Israéliens pour nous étrangler ? Dans tout le monde arabe, on nous soutient, sauf en Egypte. J'espère que les Egyptiens vont comprendre que cette attitude nuit à leur image." M. Youssef remarque que "les gens" en concluent que Le Caire cède aux pressions des Etats-Unis et d'Israël. Cette vox populi sonne juste : l'administration américaine a manifestement décidé de rappeler à l'Egypte qu'en échange de son aide annuelle de quelque 1,7 milliard de dollars, elle attend du Caire une attitude plus ferme contre la contrebande d'armes, laquelle emprunte aussi le réseau des tunnels. L'Egypte se fait d'autant moins prier qu'elle s'inquiète depuis longtemps de l'influence du Hamas. Le régime du président égyptien Hosni Moubarak a, d'autre part, été ulcéré par l'attitude du mouvement, qui, contrairement au Fatah de Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne, a refusé de signer un plan de réconciliation interpalestinien négocié par l'Egypte. Omar Shaban, qui dirige à Gaza le centre d'analyses PalThink, n'a aucun doute : il y a bien, selon lui, une coordination entre Israël, l'Egypte et les Etats-Unis contre le Hamas : "L'Egypte n'avait pas besoin de construire un tel mur, au risque de précipiter une nouvelle catastrophe humanitaire à Gaza, pour adresser un message politique au Hamas. Si elle le fait, c'est parce que tout cela fait partie d'un plan plus vaste." Pour compenser à terme cet étranglement de la frontière, Israël, assure-t-il, va relâcher l'étreinte du blocus, dans le cadre d'un accord avec le Hamas sur la libération du soldat israélien Gilad Shalit. Cette perspective reste incertaine. La réalité, les adolescents de Rafah l'observent en grimpant sur les monticules de terre qui bordent la frontière : la "machine de guerre" égyptienne, cette gigantesque foreuse qui creuse la terre pour y enfouir des panneaux d'acier de 18 mètres de hauteur, poursuit son travail de sape contre les tunnels de Gaza. Laurent Zecchini et Laurent Zecchini
07/01/2010
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2010/01/07/la-colere-des-palestiniens-de-gaza-contre-l-egypte_1288594_3210.html
Lionel Jospin appelle à l'unité des socialistes et prône un retour à l'union de la gauche
Un entretien avec l'ancien premier ministre, qui publie un essai politique
Premier ministre de 1997 à 2002, Lionel Jospin cultivait, depuis, une certaine discrétion. Ce temps semble révolu Dans un livre, Lionel raconte Jospin (Seuil), qui paraît ce jeudi 7 janvier et qui est basé sur ses entretiens avec Patrick Rotman et Pierre Favier, en vue d'un documentaire programmé sur France 2, l'ancien premier secrétaire du Parti socialiste retrace ses cinquante ans de vie politique. Malgré l'échec de sa candidature à l'élection présidentielle de 2002 face à Jacques Chirac et son score inférieur à celui de Jean-Marie Le Pen à l'issue du premier tour, Lionel Jospin affirme n'avoir jamais été amer. Il estime d'ailleurs ne pas "avoir été la cause première de la défaite", qu'il attribue à la division de la gauche, une "leçon d'hier qui vaut pour aujourd'hui". Qualifiant le PS français de "parti influent" - un terme qu'il oppose à "parti dominant " -, il refuse cependant toute alliance avec le centre et continue de préconiser des accords à gauche. Selon lui, l'écologie ne saurait se substituer à la social-démocratie : "Elle n'efface pas le champ des interrogations sur les relations des hommes entre eux dans lequel s'inscrit la pensée socialiste", analyse-t-il. Rien de l'action de Nicolas Sarkozy ne semble trouver grâce à ses yeux. Lionel Jospin critique tant le style de l'homme ("son obstination à se mettre constamment seul en scène") que sa politique économique ("Il est condamné à la fuite en avant. Le réveil risque d'être brutal"). En revanche, il juge que la réforme des 35 heures n'a pas été une erreur et que, d'ailleurs, son gouvernement n'a pris aucune mesure "contraire à l'intérêt des milieux populaires".
07/01/2010
a-la-une
https://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2010/01/07/lionel-jospin-appelle-a-l-unite-des-socialistes-et-prone-un-retour-a-l-union-de-la-gauche_1288576_3208.html
Le thatchérisme a de nouveau les faveurs des conservateurs britanniques
Avec la crise, le chef des tories, David Cameron, renoue avec le discours de la Dame de fer, trente ans après son arrivée au pouvoir
Le thatchérisme est de retour en Grande-Bretagne. Le 4 mai 1979, Margaret Thatcher entrait au 10 Downing Street, où elle devait rester jusqu'au 28 novembre 1990, transformant radicalement son pays. Trente ans plus tard, la Dame de fer est atteinte de la maladie d'Alzheimer, et certains veulent croire que la récession économique qui touche la Grande-Bretagne et les tourmentes de la finance mondiale ont eu la peau de l'héritage thatchérien. La preuve en serait le retour d'un Etat interventionniste - avec la nationalisation des banques et la hausse de l'impôt sur le revenu décidées par Gordon Brown -, ou encore le consensus pour une City plus régulée. Mais le métal dont était faite l'ancienne première ministre est plus résistant qu'on peut le croire. La crise actuelle a probablement signé l'arrêt de mort du New Labour, ce Parti travailliste revu et corrigé par Tony Blair au milieu des années 1990, qui assumait une partie des valeurs libérales de la fille de l'épicier de Grantham. Chez les Tories, en revanche, elle a ramené un vent de thatchérisme qui s'était fait très faible depuis la victoire des travaillistes en 1997. Et plus encore depuis que David Cameron avait pris la tête du Parti conservateur en 2005. Lors de leur congrès de printemps, qui s'est tenu le 26 avril à Cheltentham, les Tories ont promis que, s'ils étaient appelés à gouverner, ils choisiraient l'austérité, avec au programme une forte réduction des dépenses publiques. Et s'il fallait augmenter les impôts pour financer ce retour à des finances plus saines, ils n'hésiteraient pas, comme Mme Thatcher l'avait fait dès son élection. M. Cameron a décrit une Grande-Bretagne malade après douze ans de travaillisme. Il a stigmatisé un Labour usé par le pouvoir et les querelles internes. Il a déploré une dette qui devrait atteindre 79 % du produit intérieur brut en 2014 contre 40 % en 2007, quand M. Brown a succédé à M. Blair. Même si la Grande-Bretagne s'est métamorphosée en trente ans et si ses maux d'hier ne sont pas ceux d'aujourd'hui, le discours du leader conservateur a rappelé la campagne de la Dame de fer à la fin des années 1970, quand son pays, gouverné par le travailliste James Callaghan, était au bord de la banqueroute.
07/01/2010
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2010/01/07/le-thatcherisme-a-de-nouveau-les-faveurs-des-conservateurs-britanniques_1286390_3210.html
Afghanistan : un démineur français grièvement blessé
Un démineur français a été grièvement blessé mercredi dans l'explosion d'un obus récupéré au cours d'une opération dans la province de Kapisa où sont déployées les forces françaises.
Un démineur français a été grièvement blessé, mercredi 6 janvier, dans l'explosion d'un obus récupéré au cours d'une opération dans la province de Kapisa où sont déployées les forces françaises, a annoncé jeudi l'armée française en Afghanistan. "Un obus récupéré par les forces françaises a explosé au cours des opérations précédant sa destruction. Un démineur français a été sévèrement blessé", a-t-elle indiqué. L'incident s'est produit mercredi sur la base militaire de Nijrab, dans la province de Kapisa, à l'est de Kaboul. Environ 3 750 militaires et 150 gendarmes français sont engagés dans le cadre de la guerre en Afghanistan. Parmi eux, 3 600 militaires sont déployés sur le territoire afghan. Trente-six soldats français sont morts dans le cadre des opérations.
07/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/07/afghanistan-un-demineur-francais-grievement-blesse_1288547_3216.html
"""Olimpia"", de Céline Minard : les mots meurtriers de Céline Minard"
Le dernier livre de Céline Minard se lit, d'un souffle, dans cette imprécation. La forme est familière aux lecteurs de l'écrivain.
Et tous les cataclysmes se sont déchaînés. Un tremblement s'ébrouant dans le sol a effondré d'un coup les temples et les églises. Une longue veine noire a crevé sous le fleuve. Elle a gonflé les eaux. Les a fait déborder. Souillé d'encre les marbres... Des profondeurs remonte un flux empoisonné. Le ciel manque. L'air bout. Il s'abîme en fournaise. Bientôt, il ne restera rien. Rien que les mots scandés d'une malédiction hurlante : "Que la peste les étouffe, que la peste les broie, les meule, les perce, qu'ils jettent leur dernier souffle en un pet par le cul en ensemble et qu'ainsi Rome en tremble !" Olimpia, le dernier livre de Céline Minard, se lit, d'un souffle, dans cette imprécation. La forme est familière aux lecteurs de l'écrivain. Dans Le Dernier Monde (Denoël, 2007, Folio, 2009) ou dans Bastard Battle (Leo Scheer, 2009), les mots partaient aussi en rafales meurtrières. Celle qui profère ici, c'est Olimpia Maidalchini, "Pimpaccia", suceuse et impie, comme en parlent ses ennemis, les protestants, les pamphlétaires, maîtresse du corps et de l'âme de Giovanni Battista Pamphili, son beau-frère, élu pape en 1644 sous le nom d'Innocent X. Elle, vraie papesse des dix années de règne d'un pontife falot. Céline Minard lui donne voix lorsqu'elle est bannie de la cité et contrainte à l'exil par le nouvel occupant du trône de Pierre. Au moment où son influence vient juste de se décomposer dans le cadavre de celui qu'elle avait hissé au premier rang de l'Eglise. Derniers soubresauts de la toute-puissance : "Ton corps crevé, pourrissant vert, omnia foetida, dans un réduit du Quirinal, veillé par les rats et deux bougies de graisse, les pieds plats, dépouillé jusqu'à la chemise, ton corps masquait encore mon pouvoir." Céline Minard est revenue d'un séjour d'une année à la Villa Médicis. Son texte prend ses racines à Rome. Il lui est même dédié. "J'avais mésestimé la puissance de cette ville, raconte-t-elle. Elle s'impose tellement. Alors que je n'avais jamais séjourné ici, je me suis rendu compte, comme beaucoup, que le Forum m'était très étrangement familier. On y retrouve en effet une culture commune, des références. La vraie surprise est finalement que ce soit un lieu réel... Mais ce qui m'a happée, c'est la Rome baroque. La statuaire, les édifices, sont triturés par les siècles. Le temps alterne les failles et les concrétions." C'est ainsi qu'elle s'en est imprégnée, insensiblement. "Un jour, continue-t-elle, où je visitais la Galleria Doria Pamphili, à l'angle d'une galerie, non loin du grand portrait d'Innocent X peint par Vélasquez, j'ai été arrêtée par le buste d'une matrone assez belle, sévère, la tête recouverte d'une coiffe s'écartant, large, autour de son visage. La fermeté des traits était telle que j'en ai été saisie. J'ai voulu savoir qui était cette femme." Le marbre, sculpté par Alessandro Algardi, représente Olimpia Maidalchini. "J'ignorais tout, ou presque, d'elle. J'ai cherché, j'ai lu, j'ai écouté. J'ai découvert sa vie et les légendes qui l'entouraient." Ses recherches lui ont permis d'approcher au plus près l'histoire d'une ambition sans partage. Dès l'adolescence, en effet, Olimpia aurait décidé de sa vocation : "Elle deviendrait sainte à Rome, lit-on, pêcheuse d'hommes comme Simon, elle multiplierait les pains dorés et tous la suivraient, la servant comme une reine." En exergue, Céline Minard a placé cette phrase de Marcel Schwob, extraite de sa préface des Vies imaginaires : "La science historique nous laisse dans l'incertitude sur les individus." Car le récit qu'elle fait ainsi de l'existence d'Olimpia ne ressemble que de loin à une notice biographique. Et, dans la structure du livre, il n'intervient qu'après une longue incantation violente, une déferlante, à la première personne. Emportée par la langue "De ce que j'avais appris d'elle, je n'ai vraiment inventé que cette exécration qu'elle vomit sur la ville. Appelant la peste et la mort noire sur ceux qui restent lorsqu'elle s'en va. Davantage que par son histoire, je me suis laissé emporter par la langue qui charrie tout cela." Une langue faisant partie du décor sonore de "cette ville de théâtre boursouflé, gonflée d'or et de stuc", réinventée, redite, sans cesse. "J'étais plongée dans Rome, explique Céline Minard. C'est peu de dire à quel point la parole y est prépondérante. Ici, d'abord, on parle. Il m'a semblé que tous les discours retentissaient différemment. Et plus encore la colère, l'avertissement lancé. L'écho se brisait, reprenait. Les mots sont venus ainsi de ce qui m'entourait." Un flot de mots, de phrases. Olimpia les crache comme une fontaine folle. "Par toutes ses bouches, bouches et bouches de marbre purulentes, la noierai, l'eau giclera, j'appelle au soulèvement. (...) Je vous appelle, mes gouttes, mes ruisseaux, mes eaux enfouies et jaillissantes, mes larmes, mes sombres torrents, mes tonitruantes." Dans le déferlement, l'eau et la langue sont liées. En épousant les formes, le fleuve, le Tibre, devient marbre veiné. Où l'on pourra graver les lettres des mots recommencés. OLIMPIA de Céline Minard. Denoël, 92 p., 10 €. Xavier Houssin
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/olimpia-de-celine-minard_1288446_3260.html
"""Petite histoire des colonies françaises. Tome 3 : La Décolonisation"", de Grégory Jarry et Otto T. : la décolonisation contée par un général de Gaulle converti à l'humour noir"
Les auteurs proposent une relecture décapante de l'histoire des colonies françaises.
Les pieds-noirs ? Les Français de métropole "avaient reçu consigne de ne jamais se moquer d'eux à cause de leur accent ridicule". Marcel Bigeard ? "Le plus grand militaire de tous les temps." Les DOM-TOM ? "On n'a gardé de nos colonies que le strict minimum, pour aller passer nos vacances dans les mers chaudes ou pour mener nos essais nucléaires." Telles sont quelques-unes des sentences - apocryphes - d'un Charles de Gaulle racontant la décolonisation. De la guerre du Rif, dans les années 1920, à l'indépendance de Madagascar et des ex-colonies africaines, en 1960, ce troisième tome de la Petite histoire des colonies françaises titré La Décolonisation ne rompt pas avec les deux ouvrages qui l'ont précédé (L'Amérique française et L'Empire). Les deux auteurs, Grégory Jarry et Otto T., y manient un humour noir et un ton à l'opposé du politiquement correct qui font de cette BD au format à l'italienne un petit bijou d'histoire, d'humour et d'ouverture d'esprit. Car si les commentaires de ce général de Gaulle intronisé conteur d'histoire(s) sont tout sauf véridiques, ils se fondent sur des faits et des chiffres irréfutables. Outre l'humour grinçant et la salubrité de son propos qui décrypte sans à priori les événements d'Indochine, d'Algérie ou d'ailleurs, l'album étonne par le décalage entre ses dessins en bichromie, au style minimaliste mais très expressif, et le texte truffé de faits et de chiffres présentés avec une réjouissante irrévérence. Celle-ci fait un peu oublier le nombre des morts de la décolonisation, surtout civils, et le véritable sort de cette après-guerre qui, si l'on en croit un général de Gaulle visionnaire, n'est que "la privatisation de la colonisation". La Petite histoire des colonies françaises ? Une façon de comprendre et d'apprendre en s'amusant et en riant. Jaune. PETITE HISTOIRE DES COLONIES FRANÇAISES. TOME 3 : LA DÉCOLONISATION de Grégory Jarry et Otto T. Editions Flblb, 128 p., 13 €. Yves-Marie Labé
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/petite-histoire-des-colonies-francaises-tome-3-la-decolonisation-de-gregory-jarry-et-otto-t_1288441_3260.html
Le nombre de chômeurs a continué d'augmenter en novembre
Ils étaient 2,47 millions à être indemnisés par l'Etat ou l'assurance-chômage, soit une hausse de 0,5 % sur un mois et de 13,8 % par rapport à novembre 2008, selon Pôle emploi.
Le nombre de chômeurs indemnisés par l'assurance-chômage ou par l'Etat a atteint 2,47 millions en novembre 2009, soit une hausse de 0,5 % sur un mois et de 13,8 % par rapport à novembre 2008, selon des chiffres diffusés jeudi 7 janvier par Pôle emploi. Cette nouvelle progression mensuelle s'explique par "la hausse du nombre de bénéficiaires de l'assurance-chômage (+ 0,7 % sur un mois, à 2,066 millions) légèrement atténuée par la baisse du nombre de bénéficiaires des allocations de solidarité-Etat (– 0,2 %, à 404 000)", en données corrigées des variations saisonnières (CVS), indique Pôle emploi dans un communiqué. Toutes allocations confondues, y compris chômage, formation et préretraite, le nombre de personnes indemnisées par Pôle emploi a crû de 0,8 % sur un mois (données CVS) et de 14,8 % en un an pour atteindre 2,66 millions, contre 2,31 millions en novembre 2008. En forte hausse sur un an, le nombre de bénéficiaires de la convention de reclassement personnalisée (CRP) a atteint 67 800 en octobre et celui des bénéficiaires du contrat de transition professionnelle (CTP) s'est élevé à 12 800. Ils sont comptés comme stagiaires de la formation professionnelle. Globalement, le nombre de personnes en formation ou en reconversion indemnisées par l'organisme issu de la fusion ANPE-Assedic a augmenté de 4,3 % sur un mois mais a bondi de 38,9 % sur un an. En revanche, le nombre de préretraités indemnisés a continué de chuter pour s'établir à 12 000, soit un recul de 1,6 % en un mois et de 31,8 % en un an.
07/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/07/le-nombre-de-chomeurs-a-continue-d-augmenter-en-novembre_1288514_3234.html
"""Paris Blues"", de Maurice Attia : enquête à la fac de Vincennes, section cinéma"
Au début des années 1970, une plongée pleine de références cinématographiques dans le milieu soixante-huitard.
En plus de son parfum nostalgique, le titre du dernier roman de Maurice Attia, qui clôt sa trilogie policière entamée avec Alger la noire et poursuivie avec Pointe rouge, a le mérite de plonger immédiatement le lecteur dans une atmosphère cinématographique : c'est aussi le titre d'un film de Martin Ritt avec une étonnante distribution qui compte entre autres Paul Newman, Sidney Poitier, Louis Armstrong, Serge Reggiani et Michel Portal, et qui date de 1961. Le roman, lui, se déroule dans les années 1970, plus particulièrement dans le cadre de l'université de Vincennes. Paco Martinez, flic de Bab el-Oued qui a déjà pris de sérieux coups lors de ses précédentes aventures à Alger puis à Marseille, se voit confier cette fois un boulot de tout repos. Il s'agit d'infiltrer la section cinéma de l'université de Vincennes où un projectionniste a été retrouvé assassiné d'une manière originale, tué par la piqûre d'une mygale. Même s'il n'a plus tout à fait l'âge d'être étudiant, Paco parvient sans trop de mal à se faire passer pour un sympathisant de la Gauche prolétarienne : il se plie à l'exercice de l'autocritique en participant au pillage de l'épicerie Fauchon, place de la Madeleine. Ce qui fait le charme de Paris Blues, plus que l'intrigue elle-même, c'est la manière dont Maurice Attia recrée l'atmosphère d'une époque. 1970, c'est l'année où les Halles quittent le ventre de Paris pour s'installer à Rungis, où l'on voit s'ouvrir les premiers sex-shops en pleine libération sexuelle, c'est l'année du procès d'Alain Geismar, des grèves et manifestations de petits commerçants organisées par le Cidunati, de la mort du général de Gaulle, du spectaculaire incendie d'une discothèque, le 5-7 à Saint-Laurent-du-Pont, survenu quelques jours plus tôt - ce qui amena Hara-Kiri à annoncer la mort de l'ancien président de la République par le titre "Bal tragique à Colombey, un mort" qui lui valut d'être interdit... Tous ces événements ne servent pas seulement de décor, ils deviennent de véritables éléments de l'intrigue. Mais au-delà des rebondissements qui en constituent nécessairement la trame, Maurice Attia apporte au genre policier un regard original, inspiré de sa double activité de cinéaste et de psychanalyste. Parmi les joyeux cinglés qui peuplent cet épisode, il brosse en particulier le portrait de deux véritables cas cliniques, celui d'une militante maoïste qui se prend pour une sorcière et celui d'un officier de cavalerie nostalgique de l'Algérie française. Le sens du cadrage Mais c'est surtout à sa passion du cinéma que l'auteur se livre sans retenue. Les références explicites dans ce domaine sont tellement nombreuses qu'il a fallu en dresser une liste en annexe au roman - sans parler des allusions implicites et des clins d'oeil. Maurice Attia a le sens du cadrage, de l'image éloquente quand il décrit les couloirs de l'université de Vincennes ou le quartier des Halles avant le départ du marché de gros, mais aussi quand il évoque une visite éclair à la Sagrada Familia de Barcelone ou la découverte étonnante du Musée Fragonard au sein de l'école vétérinaire de Maisons-Alfort. On a l'impression de voir défiler un film d'actualités vieux d'une quarantaine d'années. Les images tremblent un peu parfois, mais elles ne manqueront pas d'éveiller quantité de souvenirs dans la génération des soixante-huitards. PARIS BLUES de Maurice Attia. Babel noir, 558 p., 12,50 €. Gérard Meudal
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/paris-blues-de-maurice-attia_1288440_3260.html
Critique pessimiste contre critique humaniste, par Pierre Assouline
Certains l'appellent "la seconde rentrée" dans le fol espoir de conjurer le spectre d'une troisième ; d'autres, "la petite rentrée", dans l'illusion de conférer à celle de septembre une grandeur qui lui fait défaut.
Certains l'appellent "la seconde rentrée" dans le fol espoir de conjurer le spectre d'une troisième ; d'autres, "la petite rentrée", dans l'illusion de conférer à celle de septembre une grandeur qui lui fait défaut. Elle se traduira par la parution de bien plus de livres que les rubriques littéraires ne peuvent en traiter. On mesurera alors la solitude du critique littéraire au moment du choix. Car en garder un, c'est en écarter dix, ce qui ne manquera d'être pris comme une exclusion. Je pensais avoir ainsi liquidé le problème lorsque la livraison d'hiver de la Nouvelle Revue française m'est tombée dessus. Comme un fait exprès, un article de 17 pages y est consacré à "Situations de la critique". Son auteur, Donatien Grau, est inconnu au bataillon. Raison de plus pour y aller voir, bien qu'il se présente sobrement comme "normalien et agrégé de lettres", ce qui n'est pas nécessairement bon signe dans une revue (disons que, s'il est bon d'en avoir été, il n'est pas indispensable d'en faire état). Un moteur de recherche nous apprendra qu'il a co-organisé une semaine de la tragédie à son école en 2009, année au cours de laquelle il se sera étendu sur Proust dans Commentaire, sur Henri de Régnier dans Critique, et sur Catherine Millet dans La Règle du jeu. On voit par là que c'est un jeune homme de revues, en quoi il a parfaitement assimilé la leçon de Léon-Paul Fargue qui voyait dans ces recueils à la périodicité aussi incertaine que leur économie "le laboratoire des idées de demain". Elles le sont restées avec des bonheurs divers ; souvent, c'est là que ça se passe, mais il faut bien chercher. "Totalitarisme oligarchique" Que nous dit donc Donatien Grau de la critique ? Qu'elle est en crise, ce qui n'est pas vraiment nouveau. Qu'elle ne s'autorise que d'elle-même et relève d'un "totalitarisme oligarchique", air connu. En revanche, il établit d'une plume brillante une typologie qui vaut d'être méditée : critique versus journaliste, une autorité contre une humilité, un créateur à sa manière contre un informateur droit dans ses bottes, et partant, une critique pessimiste fondée sur l'argument d'autorité contre une critique humaniste confiante dans l'intelligence de son lecteur. Car la donne a changé et les fils se sont entremêlés : "La critique s'est faite journalisme." Désormais tout en un, elle informe, interprète, juge et se justifie. L'observant à la lueur de son Flambeau en ligne, un Karl Kraus ressuscité s'y livrerait à un jeu de massacre des plus réjouissants. Donatien Grau tient que la New York Review of Books est le lieu où elle s'exerce en majesté. Parce que ses collaborateurs sont souvent du bâtiment (écrivains, intellectuels, créateurs), qu'ils sont payés pour développer leur point de vue (ce qui ne va pas de soi) et qu'ils bénéficient de toute la place requise pour s'exprimer (un luxe). "La corrélation se fait tout naturellement entre ampleur de la forme et ambition du fond", note-t-il avant de relever que la dilution de l'expertise littéraire par les forums en ligne constitue "une ouverture du champ du dire", formulation moins heureuse que le fameux "grain d'une voix" par lequel Roland Barthes signalait une volonté de se distinguer. De toutes les critiques (artistique, cinématographique, théâtrale...), la littéraire est la seule qui utilise l'écriture pour critiquer l'écriture. Ce qui ajoute à l'ambiguïté de son statut. Voilà pourquoi les réflexions de Donatien Grau dans la NRF valent le détour (gardons-nous de jamais critiquer un article sur la critique !). A propos, il cite au passage Pascal Quignard parmi les écrivains qui ont aussi pratiqué la critique dans la mesure où elle consiste à "lire avec les yeux et l'esprit d'un artiste". Ce qui m'a poussé à me procurer son Requiem, paru en 2006 chez Galilée. Ce livret était une commande du compositeur Thierry Lancino. L'écrivain le conçut comme un requiem athée : "Je désirais qu'au fur et à mesure que les répons liturgiques alterneraient, il ne fût pas possible de choisir entre anéantissement et éternité." Las ! Trois ans après, au vu de la partition, il semble que le compositeur l'ait rechristianisé. On serait étonné de découvrir l'écrivain parmi les spectateurs qui assisteront ce vendredi à la création mondiale de l'oeuvre à la Salle Pleyel. Mais n'en va-t-il pas ainsi dès qu'un artiste se réapproprie le travail d'un autre artiste ? Umberto Eco avait trouvé la parade en imposant dans le générique et sur l'affiche du film tiré du Nom de la rose la mention : "Sur un palimpseste du roman..." Pierre Assouline
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/critique-pessimiste-contre-critique-humaniste-par-pierre-assouline_1288476_3260.html
"""Ton visage demain. Tome III : Poison et ombre et adieu"", de Javier Marias : quand le ""roman sans fin"" s'achève"
Aujourd'hui, Javier Marias vient pourtant de mettre un point final à "Ton visage demain", une trilogie de près de 2 000 pages, à laquelle il travaillait depuis 1998.
Il disait que ce serait "un roman sans fin". "Du type dont le Quichotte ou La Recherche seraient l'exemple." Un livre sur la mémoire, l'amour, la peur, la violence, l'autre... Comment pareil ouvrage pourrait-il d'ailleurs s'achever ? Aujourd'hui, Javier Marias vient pourtant de mettre un point final à Ton visage demain, une trilogie de près de 2 000 pages, à laquelle il travaillait depuis 1998. "Comme disait Borges, le point final, on le met sûrement par fatigue !" Avec d'innombrables sauts, digressions, dilatations de la pensée et des phrases, ce troisième tome, comme les précédents, fourmille d'histoires dans l'histoire. On y retrouve Jaime - alias Jacobo ou Jack -, agent du MI6 à Londres, travaillant pour l'énigmatique Tupra au sein d'une mystérieuse équipe de traducteurs-analystes-espions où ses talents d'interprète des visages font merveille - il doit rendre "des avis sur les gens, dire s'ils peuvent être utiles ou non et à quoi". En l'occurrence, le voici aux prises avec la superbe Perez Nuix, dont le bas file de façon troublante à mesure que la nuit avance. De fil en aiguille, pris dans un imbroglio madrilène, l'agent secret philosophe finira par découvrir une vérité essentielle le concernant, c'est-à-dire par voir son propre visage demain. TON VISAGE DEMAIN (TU ROSTRO MAÑANA). TOME III : POISON ET OMBRE ET ADIEU de Javier Marias. Traduit de l'espagnol par Jean-Marie Saint-Lu. Gallimard, "Du monde entier", 620 p., 29 €. Signalons également, chez Gallimard ("Arcades"), la parution de Littérature et fantôme, où Javier Marias brosse, de Joyce à Nabokov, le portrait de ses écrivains préférés (326 p., 22 €). Florence Noiville
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/ton-visage-demain-tome-iii-poison-et-ombre-et-adieu-de-javier-marias_1288475_3260.html
"Javier Marias : ""Nous avons tous expérimenté la trahison"""
L'écrivain espagnol clôt sa trilogie "Ton visage demain", dans laquelle la lâcheté tient une place centrale. On y retrouve le héros-narrateur, capable d'imaginer la façon dont les gens vont vieillir.
Face à face. Rarement expression aura été plus appropriée. Quand Javier Marias vous ouvre la porte de son appartement, dans un immeuble médiéval du centre historique de Madrid, il est impossible de ne pas le fixer avec attention. Non pour s'assurer qu'on ne s'est pas trompé d'étage. Ou parce qu'on a appris à regarder dans les yeux les gens que l'on salue. Mais parce qu'on arrive tout imprégné de ses livres et que, pour cette raison même, on se prend soudain, comme son héros, à détailler et "interpréter" chaque visage... Un ovale parfait, trois rides bien parallèles barrant un front un peu dégarni de quinquagénaire, une paupière légèrement tombante... Se peut-il que tout cela puisse, comme on dit, "faire sens" ? Plus tard, alors qu'il est assis dans le canapé du salon et propose du chocolat noir, l'idée revient avec insistance. Menton, joues, sourcils, oreilles... Comment un simple assemblage de chairs peut vraiment dire, prédire ou trahir quelque chose ? Depuis plus de huit ans, Javier Marias travaille sur le visage. Aucun lien avec la moindre démarche morphopsychologique ou physiognomonique douteuse ! Aucun rapport non plus avec l'oeuvre de Levinas, pour qui le visage de l'autre nous investit d'une responsabilité. Non. Ton visage demain, une trilogie commencée en 1998, est bien d'abord une entreprise romanesque - touffue, complexe, très complexe même parfois et qui sollicite sans cesse le lecteur -, mais où, comme le titre l'indique, le visage joue un rôle central. On peut le comprendre, d'ailleurs. Le visage n'est-il pas au fond le thème privilégié de l'art depuis le paléolithique ? Celui qui hante le dessin, la peinture, la sculpture depuis La Dame à la Capuche de nos lointains cours de préhistoire ? En littérature, ce motif est sans doute moins présent, et l'approche de Marias n'en est que plus singulière. Dans les trois tomes de Ton visage demain, le héros-narrateur, Jaime, a la capacité de percer à jour les êtres en observant leurs traits et en imaginant la façon dont ils vont vieillir, bref de les "voir" vraiment, de les jauger, de savoir - c'est ce qui obsède Marias et son narrateur par-dessus tout - s'ils se comporteront plus tard en héros ou en lâches. "La lâcheté. Oui, Perez Nuix avait raison : on ne sait presque jamais ce que c'est, remarque Jaime, page 110. Elle ne se présente jamais à l'état pur. Le plus souvent (...), il n'y a pas moyen de la séparer de l'ensemble de ce qui nous constitue, de l'arracher au noyau de chacun de nous, ni de l'isoler." Sera-t-on fort ou faible ? En général, nul n'en a la moindre idée, surtout pour soi-même. Et Marias note qu'il est d'ailleurs "oppressant d'ignorer cela et de savoir en plus qu'on ne l'apprendra jamais. Mais, dit-il, c'est ainsi que nous vivons". Jaime, lui, sait. A force de déshabiller les âmes, et "aussi fuyante que soit la lâcheté", il ne la laisse pas échapper, il la capture. A travers "son visage demain", il a cette faculté étrange de dire à (ou de) quiconque : "Tu es celui qui trahira. Tu es Judas. Tu es Iago..." D'où vient donc cette étrange obsession ? Certes, dans de nombreux romans précédents, Marias procédait déjà par associations d'images ou d'idées - Un coeur si blanc (Rivages poche, 2004), Demain dans la bataille pense à moi (Rivages, 1996). Mais la trahison ? Avant de se lancer dans l'explication - et peut-être parce qu'il s'agit d'un passage délicat de son histoire familiale -, Javier Marias allume une nouvelle cigarette. Puis : "C'est un des principaux désirs que nous avons tous, dit-il, savoir de quoi l'autre est capable. Peut-être parce que nous avons tous expérimenté la déception ou la trahison. C'est exactement ce qui est arrivé à mon père, pendant la guerre civile espagnole... " Marias explique comment son père, le philosophe et sociologue Julian Marias, mort en 1995, a été trahi par son "meilleur ami", qui, pendant la guerre d'Espagne, le livra aux phalangistes comme "agent de Moscou". Le destin du père, la façon dont il a meurtri le fils, est donc ce qui sous-tend toute l'entreprise de Ton visage demain. Et cette interrogation qui revient comme un leitmotiv : "Comment peut-on ne pas voir (...) que celui qui finira et finit par nous perdre nous perdra ?, écrivait déjà Marias dans le premier tome, Fièvre et lance. Comment puis-je ne pas connaître aujourd'hui ton visage demain, celui (...) que tu ne me montreras que lorsque je ne m'y attendrai pas ?" Plus loin, il ajoutait : "Rare est la confiance qui n'est pas trahie tôt ou tard, rare est le lien qui ne s'emmêle pas ou ne fait pas de noeuds, et alors il finit par être trop serré et il faut tirer son couteau pour le trancher net." Quand on demande à Marias quel type d'existence on peut mener lorsqu'on est ainsi habité par le doute et la méfiance constante envers autrui, il préfère botter en touche. Expliquer, comme dans son livre, que le personnage de Jaime est aussi une métaphore de l'écrivain. "Aussi brillant et heureux qu'il ait été, le passé nous semble entaché d'ingénuité, note-t-il. C'est pourquoi il comporte toujours un élément d'irrémédiable fadaise, et nous fait sentir honteux d'être resté dans les nuages, d'avoir cru alors ce qu'aujourd'hui nous savons être faux, ou qui ne l'était peut-être pas, mais ne l'est plus, pour n'avoir ni résisté ni persévéré. L'amour qui semblait solide, l'amitié dont nous ne doutions pas..." A cet égard, Jaime est comme l'écrivain, celui qui a les yeux décillés parce qu'il connaît le dénouement de l'histoire. Même si, précise Marias dans son français impeccable, "j'applique à l'écriture de mes romans le même principe de connaissances qui règle la vie". Traduction ? "A 40 ans, on peut regretter de s'être marié avec telle personne ou d'avoir choisi tel métier, mais il faut s'y tenir. En littérature, c'est différent. Un romancier, lui, peut changer la page 10 si, page 300, il s'aperçoit qu'elle ne lui convient plus. Or moi, je ne fais pas cela. Je m'applique au contraire à rendre nécessaire ce qui, au début du livre, a pu me venir par hasard. Je le fais parce que ça m'amuse, c'est un défi supplémentaire. D'ailleurs, dans cette trilogie, il y a depuis le premier tome une tache de sang. On a beau frotter, il reste toujours une auréole. Preuve qu'on n'efface jamais rien." Parvenu au terme de son énorme trilogie, Marias avoue un sentiment de "videment", comme il dit. Ses personnages lui manquent. Même Jaime ? "Personne n'aime savoir à l'avance. Cela nous fait horreur, une horreur biographique et une horreur morale", écrit-il à la fin du livre. A moins, suggère-t-il, que "personne n'ose reconnaître qu'il voit ce qu'il voit". Ce n'est peut-être pas faux. Depuis qu'on a lu et rencontré Marias, on a beau se montrer vigilant et regarder les visages, force est d'avouer que souvent on n'y voit rien. On n'y apprend rien. Et peut-être est-ce mieux comme cela ? Florence Noiville
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/javier-marias-nous-avons-tous-experimente-la-trahison_1288474_3260.html
Le chef d'orchestre Seiji Ozawa traité pour un cancer de l'œsophage
Le chef d'orchestre japonais Seiji Ozawa annonce, jeudi 7 janvier, qu'il va subir un traitement contre un cancer de l'œsophage, le contraignant à annuler toutes ses représentations pendant six mois.
Le chef d'orchestre japonais Seiji Ozawa a annoncé, jeudi 7 janvier, qu'il va subir un traitement contre un cancer de l'œsophage, le contraignant à annuler toutes ses représentations pendant six mois. Le directeur musical de l'Opéra de Vienne, l'un des plus brillants mæstros vivants, âgé de 74 ans, est venu lui-même annoncer sa maladie lors d'une conférence de presse à Tokyo, où il est apparu en bonne forme physique et regrettant de ne pouvoir être à Vienne le 15 janvier pour conduire comme prévu les Noces de Figaro, de Mozart. Le chef a annulé une trentaine d'engagements conclus pour les six mois à venir, notamment auprès du Mahler Chamber Orchestra en février et mars, de l'orchestre Philharmonique de Vienne en mai et de celui de Berlin en juin. Il n'est pas certain de pouvoir diriger, toujours en juin, un concert donné à l'Opéra de Vienne pour le départ de son directeur, Ioan Holender. Il a promis de reprendre sa baguette au plus tard en août, pour le festival annuel Saito Kinen de Matsumoto qu'il a lui-même créé en 1992. Le médecin de M. Ozawa, Masato Okada, a précisé que le cancer de son patient, dépisté le mois dernier, était dans une phase précoce. Ancien assistant des grands Herbert von Karajan et Leonard Bernstein, Seiji Ozawa a dirigé les orchestres de Toronto et de San Francisco dans sa jeunesse, avant de succéder en 1973 au chef français Charles Münch à la tête de l'Orchestre symphonique de Boston, qu'il a dirigé pendant 29 ans. Il est à la tête de l'Opéra de Vienne depuis 2002.
07/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/07/le-chef-d-orchestre-seiji-ozawa-traite-pour-un-cancer-de-l-sophage_1288541_3246.html
Un touche-à-tout précoce et brillant
Louis Pasteur (1822-1895) est le prototype du grand homme, du savant devenu patrimoine national.
Une image renforcée par ce visage d'homme âgé, austère mais humain. C'est oublier qu'il a accompli beaucoup de choses très jeune. Il a 25 ans quand il fait sa première communication à l'Académie des sciences. Il en a 32 lorsqu'il est nommé doyen de la faculté des sciences à Lille. Trois ans plus tard, il devient administrateur et directeur des études scientifiques de l'Ecole normale supérieure. A 40 ans, il est élu à l'Académie des sciences. Outre cette précocité, l'enfant de Dole (Jura) a pour caractéristique d'avoir été un touche-à-tout : chimie, physique, biologie, médecine, il investit successivement ces disciplines, comme le montrent les textes rassemblés dans ce volume d'Ecrits scientifiques et médicaux. Loin d'être la marque d'une instabilité ou d'un dilettantisme, cet éclectisme reflète une démarche extrêmement logique de résolution de problèmes scientifiques nouveaux émergeant au fur et à mesure de ceux qui sont élucidés. La démarche de Pasteur le conduit ainsi de la fermentation lactique aux maladies de la bière et du vin, puis à celles des animaux, avant d'en arriver aux pathologies humaines. Ce faisant, il multiplie les apports nouveaux : l'identification des micro-organismes comme cause des maladies infectieuses, les notions de contagion, des moyens de prévention comme la pasteurisation et l'asepsie, l'isolement du staphylocoque, du streptocoque et du pneumocoque, l'immunisation... Il a été en capacité de tout faire : recherche fondamentale, recherche appliquée, jusqu'à préfigurer les essais cliniques. La technique qu'il a mise au point pour produire le vaccin contre la rage est encore utilisée dans certains pays. Pasteur va aussi combattre et vaincre la théorie de la génération spontanée des germes. Il commence ses travaux sur ce sujet en 1858, soit un an avant la publication de L'Origine des espèces, de Charles Darwin. Les deux théories ont engendré de profonds débats au sein de la société, notamment par leurs répercussions dans les domaines philosophique et religieux. Si certains des textes de Pasteur se plient à une rigueur scientifique de mise, quelques communications à l'Académie des sciences montrent un orateur extrêmement brillant, doté d'un puissant pouvoir de conviction. En particulier le récit des circonstances dans lesquelles il appliqua sa "méthode pour prévenir la rage après morsure" valent leur pesant de littérature. Paul Benkimoun
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/un-touche-a-tout-precoce-et-brillant_1288473_3260.html
"""Le créateur de la médecine scientifique"""
De la chimie à la médecine en passant par la physique, Louis Pasteur, l'inventeur de la microbiologie, s'est imposé comme l'incarnation du grand savant. L'ancien directeur de l'Institut Pasteur revient sur l'oeuvre et l'héritage de ce chercheur de génie.
Au cours de sa carrière, Louis Pasteur a balayé un vaste champ scientifique et de nombreuses disciplines. Qu'est-ce qui vous frappe en premier lieu chez lui ? Louis Pasteur était avant tout un observateur. C'est dans le monde réel qu'il puisait les problèmes et par l'observation qu'il les résolvait de façon remarquablement méthodique, tout en s'efforçant de quantifier ce qu'il observait. Je suis frappé par sa capacité à regarder et à déduire. Il ne s'agit pas là d'une différence entre recherche fondamentale et recherche appliquée, car on peut faire de la recherche fondamentale en se saisissant de problèmes pratiques. Lui a été en capacité de tout faire : recherche fondamentale, recherche appliquée, jusqu'à préfigurer les essais cliniques. Pasteur a souvent répondu aux incitations venant des autorités publiques ou du secteur privé pour résoudre des problèmes d'importance économique qui lui étaient posés. Ainsi, plusieurs de ses percées majeures sont nées de demandes venues de l'Etat, y compris de Napoléon III, ou de secteurs agricoles ou industriels. Dans le même temps, il craignait que faire commerce de ses recherches "paralyse en lui tout esprit d'invention pour l'avenir". Comment jugez-vous son attitude en termes d'indépendance de la recherche ? De façon ironique, certains trouveraient peut-être aujourd'hui qu'il était un scientifique "vendu" au privé et que son attitude mettait en péril la liberté de la recherche... Politiquement, Pasteur était un conservateur bon teint. Si, au début, il a traité de plusieurs problèmes ayant des enjeux économiques, il a ensuite embrassé des questions d'importance médicale essentielle. C'est qu'en fait, rien de ce qui était utile à l'homme ne lui était étranger. Pour ma part, j'ai toujours été sensible à cette question de l'utilité de la recherche, ce qui m'a, par exemple, conduit à créer avec Pierre Chambon la société Transgène, une société biopharmaceutique intégrée qui conçoit et développe des produits d'immunothérapie pour le traitement des cancers et des maladies infectieuses chroniques. C'est une évidence dans certains milieux de recherche, en Asie notamment, mais pas toujours en France. Cela dit, le bénéfice collectif n'est pas synonyme de profit. Pasteur était totalement désintéressé. Il a pris des brevets sur ses travaux afin de protéger ses découvertes, pas pour s'enrichir. Distinguez-vous une logique dans sa carrière, qui l'a fait passer de la chimie à la physique, puis à la biologie et à la médecine ? Juste après ses premiers travaux en chimie, il a trouvé ce fil conducteur extraordinaire : les microbes. Il y a quelque chose de vertigineux à donner naissance à la microbiologie en partant de la fermentation du vinaigre, puis en passant aux maladies des animaux et enfin à celles des hommes. Les microbes étaient partout. Pasteur a exploré aussi loin qu'il le pouvait tous les fronts de recherche ouverts par cette immense découverte. Ses travaux sur les germes et la vaccination, en particulier ceux sur la rage, au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, sont étonnants. Nous ne savons ce que sont les virus que depuis le XXe siècle. Le microscope avait permis de visualiser les bactéries, mais à l'époque de Pasteur on ne voyait pas les virus. De plus, contrairement aux bactéries, on ne pouvait les multiplier qu'en infectant des animaux. Pasteur s'est heurté au conservatisme, notamment à celui du corps médical... Il n'était pas du sérail. Pire, il n'était pas médecin, même s'il obtint son diplôme de docteur en médecine à l'université de Bonn, en 1868, à l'âge de 46 ans. Certains pontes médicaux le lui rappelaient en le traitant de "chimiatre" ! Membre de l'Académie des sciences depuis 1862, il n'a été élu à l'Académie de médecine, en 1873, qu'à une voix de majorité. Mais son cas n'est pas isolé. Rappelons par exemple que, malgré son prix Nobel de médecine en 1965, le biologiste André Lwoff n'a pu être élu à l'Académie de médecine... Dans son texte "Microbes pathogènes et vaccins", Pasteur pointe une limite intangible pour lui, en écrivant que "l'expérimentation, permise sur les animaux, est criminelle quand il s'agit de l'homme"... Oui, il ne s'y résout dans le cas de la rage que de manière compassionnelle, compte tenu de la gravité de la maladie qui justifiait à ses yeux de prendre le risque. Il était très inquiet à ce sujet et, heureusement, les faits lui ont donné raison. Au départ, il pensait s'auto-inoculer sa préparation vaccinale, puis il avait envisagé de le faire sur des condamnés à mort. Et le cas du petit Joseph Meister s'est présenté... Cet enfant alsacien avait 9 ans quand il est venu avec sa mère, le 6 juillet 1885, dans le laboratoire de Pasteur. Deux jours plus tôt, il avait été mordu par un chien. "La mort de cet enfant paraissant inévitable, je me décidai, non sans de vives et cruelles inquiétudes, on doit bien le penser, à tenter sur Joseph Meister la méthode qui m'avait constamment réussi sur des chiens", écrit Pasteur, faisant allusion à sa technique pour "rendre réfractaire à la rage". L'enfant fut sauvé : "Joseph Meister a donc échappé non seulement à la rage que ses morsures auraient pu développer, mais à celle que je lui ai inoculée pour contrôle de l'immunité due au traitement, rage plus virulente que celle du chien des rues." A propos de la rage, il indique dans un autre texte qu'il avait "pris la précaution de dresser des statistiques très sévères". Cette attitude était-elle également novatrice ? Oui. Pasteur a été le créateur de la médecine scientifique et dans une large mesure de l'hygiène. La rigueur imposait la quantification. Vous avez dirigé l'Institut Pasteur. Quel était son projet en le fondant, en 1887 ? Il a créé un centre de traitement antirabique et de recherche sur les microbes. En en faisant une fondation privée, il a voulu garantir son indépendance et le tenir à l'écart de l'université, dont il jugeait le conservatisme propre à brider l'innovation scientifique. Toutefois, il considérait la mission d'enseignement comme importante, ainsi qu'en témoigne la création du cours de "microbie" en 1880. Ce conservatisme a perduré dans certains domaines. Lorsque je me suis tourné vers la biologie, en 1964, en sortant de Polytechnique, et que j'ai voulu apprendre ce qu'étaient les virus des bactéries ou bactériophages, j'ai dû aller à l'étranger. L'enseignement de la génétique était cantonné au maïs et à la mouche drosophile. La génétique des micro-organismes était à peine abordée. L'Institut Pasteur, c'est une fondation privée, mais d'intérêt public. Cela ramène à la question de l'utilité de la recherche, de son financement et de son objet social. Sa création a été immédiatement suivie de celles de nombreux centres antirabiques dans le monde. Car même si on en trouve peu trace dans ses écrits, Pasteur avait adopté une politique internationale. D'abord, pour isoler les agents infectieux, il fallait aller là où ils sévissaient. D'où une série de missions menées par ses chercheurs, entre autres celle sur la peste à Hongkong, en 1893, au cours de laquelle Alexandre Yersin isola le bacille responsable de la maladie. Mais il avait également le souci humaniste essentiel de diffuser la "méthode" pour sauver des vies dans tous les pays, riches ou pauvres. Aujourd'hui, que reste-t-il de l'esprit pasteurien ? Le souci de l'excellence scientifique, une volonté de soigner les gens dans le monde entier, un humanisme sincère. En ce sens, je me sens profondément pasteurien. Lors d'un gala annuel donné par la Fondation Pasteur à New York auquel l'ex-président Bill Clinton avait accepté de participer bénévolement, je lui ai remis une gravure allégorique de 1886 : elle représentait l'un de ses prédécesseurs, et elle était intitulée "Le président Grover Cleveland en train de vacciner la jeune démocratie américaine contre la corruption". Philippe Kourilsky est professeur au Collège de France. Propos recueillis par Paul Benkimoun
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/philippe-kourilsky-le-createur-de-la-medecine-scientifique_1288472_3260.html
"ASO met la main sur le critérium du ""Dauphiné libéré"""
Le quotidien régional français se sépare de son épreuve pour des raisons financières. ASO assoit son hégémonie sur le milieu du cyclisme.
Le critérium du Dauphiné Libéré change de main et devient propriété du groupe Amaury Sport Organisation (ASO), organisateur du Tour de France. C'est le quotidien espagnol El Pais qui a révélé en début de semaine la cession de l'épreuve alpine. Dans son édition de jeudi, le quotidien régional précise qu'ASO sera responsable de son organisation dès la prochaine édition, qui se déroulera du 6 au 13 juin. "Un mandat portant sur l'organisation de l'édition 2010 a été confié à ASO. En outre, des négociations très avancées sont en cours pour la cession de l'épreuve", indique Henri-Pierre Guilbert, PDG du groupe Dauphiné libéré, dans un entretien. "C'est une décision stratégique. Le Dauphiné Libéré souhaite recentrer ses activités sur son cœur de métier", poursuit-il, réfutant au passage toute idée d'abandon. "Notre objectif est la pérennité du Critérium, qui est une part importante du patrimoine sportif de notre région", a poursuivit Henri-Pierre Guilbert, avant de préciser que les deux parties resteraient "étroitement liées en tant que partenaire". La course, selon des sources internes au jounal, accusait un déficit. ASO GÉANT DU CYCLISME L'épreuve était dirigée depuis vingt et un ans par le journaliste Thierry Cazeneuve, neveu du créateur Georges Cazeneuve et ancien président de la Ligue du cyclisme professionnel. Avec ASO, le critérium intègre un géant de l'événementiel sportif. La société présidée par Jean-Etienne Amaury, propriétaire notamment des quotidiens français L'Equipe et Le Parisien, s'est en effet imposée depuis de nombreuses années comme le principal opérateur du cyclisme mondial. En mettant la main sur le Critérium, inscrit au programme du Pro Tour, ASO va désormais détenir la totalité des grandes courses par étapes qui se déroulent en France. "Le choix d'ASO est le plus légitime du fait de son savoir-faire et de ses compétences en la matière", a déclaré Henri-Pierre Guilbert. Outre les épreuves cyclistes (Paris-Nice, Critérium international, Paris-Roubaix, Tour de l'Avenir, Paris-Tours), ASO est associée à d'autres événements sportifs tels que le Dakar et le Marathon de Paris.
07/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/07/aso-met-la-main-sur-le-criterium-du-dauphine-libere_1288524_3242.html
"""La Mémoire culturelle. Ecriture, souvenir et imaginaire politique dans les civilisations antiques"", de Jan Assmann : commenter pour transmettre"
Le grand égyptologue allemand montre le rôle décisif de la discussion des textes sacrés dans la mémoire culturelle des civilisations.
Pourquoi les cultures de la Grèce antique ou de l'ancien Israël continuent-elles d'irriguer la pensée contemporaine alors que les civilisations de l'Egypte (ou de la Mésopotamie) nous paraissent comme mortes, en tout cas étrangères et sans incidence réelle sur notre propre culture ? Le grand égyptologue allemand Jan Assmann, dans un livre paru en 1992 et enfin traduit en français, tente d'apporter une réponse dont on devine qu'elle ne peut se réduire à des concepts simples. Cela explique l'importance de la première partie, consacrée aux fondements théoriques de la démarche, qui emprunte au sociologue français Maurice Halbwachs (1877-1945) les notions essentielles de "mémoire collective" et de "construction sociale du passé", à partir desquelles Assmann élabore les concepts de "figures-souvenirs", de "mémoire communicationnelle" ou de "mémoire culturelle". Mais c'est de Lévi-Strauss que provient une autre idée-force du livre : l'opposition entre sociétés "froides", qui annulent "de façon quasi automatique l'effet que les facteurs historiques pourraient avoir sur leur équilibre et leur continuité", et les sociétés "chaudes", qui manifestent un "besoin irrépressible de changement". Les trois cultures placées au centre du livre (même s'il aborde à l'occasion la Mésopotamie, les Hittites, la Perse, l'Inde ou la Chine) ont en commun d'avoir su constituer des collections de livres. C'est vrai de façon éclatante pour la Grèce ou pour Israël, mais l'Egypte n'en est pas dépourvue (avec cette particularité que son écriture est restée indéchiffrable pendant quatorze siècles, jusqu'à la découverte de Champollion en 1822). Pourtant, tandis qu'Israël (avec le canon des Ecritures fixé dès l'époque hellénistique) et la Grèce (grâce aux savants d'Alexandrie) entreprenaient de canoniser leur littérature non pour la figer mais pour la stabiliser et en faire une base assurée de commentaires, la civilisation égyptienne, à la même époque ou peu avant, canonisait son corpus textuel en le pétrifiant. Et ce au sens propre, dans le temple égyptien tardif, celui d'époque gréco-romaine, dont elle faisait, par l'architecture et le décor, la mémoire d'une tradition désormais immuable. A la mémoire chaude des juifs ou des Grecs, pour qui l'injonction "souviens-toi" constitue à la fois un impératif de l'identité collective (sans mémoire, les juifs en exil à Babylone se seraient fondus dans les populations indigènes) et un point de départ pour une compréhension du passé et du présent, Assmann oppose la mémoire froide de l'Egypte, qui se borne à consigner. La mémoire chaude, qui est à l'origine de l'histoire, repose sur un lien indissoluble entre l'explication des événements et la notion de justice et de faute : la faute justifie le malheur, le succès découle du respect du contrat avec Dieu. Cette mémoire chaude n'a donc rien à voir avec les annales royales, égyptiennes ou assyriennes, qui enregistrent une chronologie pour établir des généalogies, non pour donner un sens à une histoire en mouvement. "Figure-souvenir" Si le lecteur peut peiner à lire la partie théorique, quoiqu'elle soit nourrie d'exemples concrets toujours éclairants, les quatre chapitres de la seconde partie, plus directement consacrés aux trois civilisations, emportent la conviction, tant ils abondent en formules justes et frappantes. Assmann met en évidence combien l'Egypte a canonisé ses arts figuratifs et leur grammaire "au service de la répétabilité, non de la prolongeabilité (c'est-à-dire de la variation maîtrisée des règles)". C'est ainsi que "tous les grands temples construits durant la période gréco-romaine peuvent être vus comme les variantes d'un type unique dont le temple d'Horus à Edfou serait la réalisation la plus complète". Or le plan de ces temples traduit un profond sentiment de menace, qui s'exprime ailleurs, dans les textes tardifs, par une xénophobie exacerbée. Dans le même temps, l'écriture hiéroglyphique, écriture sacerdotale aussi ésotérique que le savoir qu'elle codifie, conduit à une cléricalisation de la culture, à sa sacralisation. C'est certes par ce moyen que l'Egypte, seule région du Proche-Orient hellénisée, a pu survivre à la "rupture culturelle majeure provoquée par l'hellénisation", mais elle n'a pas su fonder sur cette tradition canonisée une culture exégétique qui aurait permis de lui conserver un sens jusqu'à aujourd'hui. Il en va tout autrement d'Israël et de la Grèce, même si leurs exemples diffèrent largement sur des points essentiels. Israël a créé "la religion au sens fort", estime Assmann, qui se dresse telle un "mur d'airain" entre le peuple et les cultures environnantes. La religion devient résistance, et le passé, réel ou supposé - ce qu'Assmann nomme une "figure-souvenir" - fonde la mémoire collective. Mais l'historiographie ainsi constituée ne vise pas à fournir de simples points de repère dans la succession répétitive du temps, elle est chargée de sens ; elle "se sémiotise, cesse d'être triviale". "Les événements sont des manifestations de la puissance divine", qui peut se traduire aussi bien par le châtiment que par le salut. C'est de cette façon que naît en Israël une histoire charismatique, où tout ce qui advient "devient lisible à la lumière de (...) l'alliance" conclue entre Dieu et son peuple. L'histoire n'est pas simple curiosité, elle "relève du travail civilisateur opéré sur l'homme". Si Israël apporte un élément fondamental (le souvenir sémiotisé), les Grecs introduisent nombre de nouveautés essentielles. Eux aussi eurent le souci de canoniser des textes, c'est-à-dire de les stabiliser, mais chez eux point d'écritures saintes : comme l'observait déjà Flavius Josèphe au Ier siècle de notre ère, alors que les juifs se contentent de 22 livres "qui contiennent les annales de tous les temps" et sont cohérents entre eux (du moins le croit-il), les Grecs disposent d'innombrables livres qui se contredisent. Or c'est bien de cette polyphonie discordante que naît une pratique fondamentale aux yeux d'Assmann pour qu'une culture reste vivante : l'hypolepse. Sur un corpus de textes stabilisés (chaque lecteur a sous les yeux le même texte d'Homère, de Platon ou d'Euripide), chacun introduit le doute que lui inspire sa propre recherche de la vérité. Les textes, contradictoires, invitent en quelque sorte à la joute, à l'agôn, notion centrale dans l'hellénisme : on entre dans une culture du conflit, une "intertextualité agonistique" pour reprendre une expression d'Heinrich von Staden. En ce sens, le discours "hypoleptique" consiste à repartir de ce qu'ont dit les prédécesseurs afin d'approcher la vérité, avec la conscience de l'impossibilité de pouvoir jamais y parvenir. On est ici aux antipodes de la conception égyptienne, où l'écrit est ancré "dans les institutions de la cohérence rituelle, dont le principe est la répétition, non la variation disciplinée". A partir de la tradition canonique, Israël et les Grecs ont fondé le commentaire, l'Egypte la vénération rituelle. Là sans doute repose toute la différence. LA MÉMOIRE CULTURELLE. ECRITURE, SOUVENIR ET IMAGINAIRE POLITIQUE DANS LES CIVILISATIONS ANTIQUES (DAS KULTURELLE GEDÄCHTNIS) de Jan Assmann. Traduit de l'allemand par Diane Meur. Aubier, "Collection historique", 372 p., 30 €. Maurice Sartre
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/la-memoire-culturelle-ecriture-souvenir-et-imaginaire-politique-dans-les-civilisations-antiques-de-jan-assmann_1288469_3260.html
"""Peur"" ou ""angoisse"" ? Trois traducteurs s'expliquent"
S'agissant d'un auteur comme Freud, tout choix de traduction engage des enjeux non seulement linguisitiques, mais aussi théoriques et conceptuels. Nous avons demandé à trois traducteurs d'expliquer leurs options.
S'agissant d'un auteur comme Freud, tout choix de traduction engage des enjeux non seulement linguisitiques, mais aussi théoriques et conceptuels. Nous avons demandé à trois traducteurs d'expliquer leurs options, en prenant un exemple : le livre de Freud intitulé Das Unbehagen in der Kultur (1930). François Robert appartient au comité éditorial qui supervise la parution des Œuvres complètes de Freud aux Presses universitaires de France, où ce texte a été publié en 1994 sous le titre Le Malaise dans la culture. Deux nouvelles traductions paraissent ces jours-ci : chez Garnier-Flammarion, Dorian Astor a conservé le même titre ; au Seuil, Bernard Lortholary a préféré, quant à lui, Le Malaise dans la civilisation. Entretiens croisés. Comment envisagez-vous l'avenir du texte freudien, à présent que chacun peut en publier une nouvelle traduction ? Bernard Lortholary : A chaque fois qu'on publie une nouvelle traduction d'un grand écrivain, cela augmente mécaniquement son audience, et cela offre aussi à ceux qui le connaissent déjà un matériau qui nourrit l'échange, la réflexion. Pour Freud, c'est une chance d'échapper à la pierre tombale jargonnante qui a jusqu'ici dissuadé le grand public de le lire, alors même qu'il écrit un allemand tout à fait fluide, et qu'il mérite d'être traduit de façon limpide. Or il l'a essentiellement été par des gens qui connaissaient mieux la psychanalyse que l'allemand. Il s'y sont attelés avec un incontestable courage, mais sans réelle compréhension de la langue. Dorian Astor : Cette concurrence des traductions permet un travail critique qui oblige à revenir au texte. En France, l'oeuvre freudienne a longtemps été enfermée dans une forteresse psychanalytique qui prétendait détenir sa vérité. Il y avait l'idée que, si l'on n'était pas psychanalyste, on ne pouvait pas traduire Freud. Or dire qu'une traduction est définitive, c'est un réflexe totalitaire. Pour ma part, je suis germaniste, traducteur littéraire, et je refuse de me battre avec les psychanalystes sur le terrain de l'orthodoxie. Mais je peux les affronter sur le terrain de la langue... François Robert : Nous attendons la confrontation avec sérénité. Toute nouvelle traduction est la bienvenue. Mais attention, il ne faut pas régresser. Chacun peut proposer une traduction qu'on dira plus "lisible", mais l'important est de ne pas revenir en arrière en nivelant tout, au mépris de la rigueur théorique. Notre équipe travaille sur l'ensemble des oeuvres. Il est plus facile de dire "allez, je vais traduire Malaise dans la culture !", ponctuellement, sans se préoccuper de savoir si tel ou tel terme revient dans un autre livre. On nous a beaucoup reproché de chercher à uniformiser le vocabulaire de Freud. Mais notre but est d'abord de faire apparaître des discontinuités et des continuités dans cette langue qui est faussement simple, car Freud a une manière très spécifique de conceptualiser les mots. Il faut en tenir compte. La diversité, oui ; l'éclectisme, non ! Pourquoi avoir choisi de traduire Das Unbehagen in der Kultur par Malaise dans la civilisation ou par Malaise dans la culture ? Bernard Lortholary : La langue allemande dispose des deux termes, "Kultur" et "Zivilization". Quand on traduit, il faut toujours se demander : ce texte, de quoi il parle, à quelle date, et à qui s'adresse-t-il maintenant ? Freud parle du malaise engendré par la civilisation. Mais il écrit à un moment où les idéologues accusent la "Zivilisation" d'être française, voire juive, par opposition à la "Kultur" allemande. Il met les pieds en terrain miné. Nous n'en sommes plus là. Aujourd'hui, si un journal titre "Malaise dans la culture", on se dit : ah, Frédéric Mitterrand doit avoir de gros soucis... Le terme "culture" a été réquisitionné par ce sens institutionnel. Donc, j'ai choisi Malaise dans la civilisation. Dorian Astor : Il y a ici un jeu de miroirs. En allemand, le mot "Kultur" est mélioratif, il signifie supérieur. En français, c'est plutôt "civilisation" : on ne parle pas de civilisation papoue, mais de culture papoue. Dans L'Avenir d'une illusion, Freud dit : "Je dédaigne de faire la différence entre Kultur et Zivilization." A partir de là, il faut savoir comment les choses s'articulent conceptuellement. Freud est l'héritier d'une philosophie où l'on oppose nature et culture. Pour lui, tout ce qui éloigne l'homme de la nature est un fait culturel. Utiliser le terme "civilisation" pour traduire le titre, ce serait en revenir au vieux sentiment de supériorité français façon années 1930. J'ai opté pour Malaise dans la culture. François Robert : La distinction Kultur/Zivilization appartient à l'univers de pensée allemand. Pourtant, il est possible d'importer le concept de Kultur dans la traduction, où ce mot va prendre une nouvelle acception, parfaitement cohérente avec celle qu'il a aujourd'hui en français. "La culture est édifiée sur le renoncement pulsionnel", répète Freud. Telle est l'opposition pertinente chez lui. Si on traduit par "civilisation", on perd donc le sens nouveau que Freud a donné au mot "Kultur" : la grande nouveauté freudienne, c'est d'assimiler la nature à la pulsion, et la culture à son refoulement. Pourquoi avoir choisi de traduire le mot allemand "Angst" par "angoisse" ou par "peur" ? Bernard Lortholary : Souvent, en traduction, il n'y a pas de solution idéale, on doit choisir la moins mauvaise. D'abord, il faut éviter ce qu'a fait l'équipe des oeuvres complètes : parce que l'allemand dit "das Kind hat Angst vor dem Pferd", ils traduisent "l'enfant a de l'angoisse devant le cheval". Sous prétexte de cohérence terminologique, on écrit des choses ridicules. Le mot "Angst" recouvre un sens large, depuis la peur de ceci ou cela jusqu'à l'angoisse existentielle. Il faut donc se résoudre à ne pas toujours traduire par le même mot : j'ai choisi tantôt "peur", tantôt "angoisse". Le contexte donne la solution. Dorian Astor : La distinction que le français opère entre "angoisse" et "peur" n'existe pas en allemand. J'ai donc choisi "peur", afin de garder la généralité du terme. Par ailleurs, l'angoisse se définit comme une peur dont on ignore l'objet. Freud dit que l'"Angst" se cache derrière tous les symptômes. Parler d'une "angoisse inconsciente", comme le font certains traducteurs, n'a pas de sens. Ce qui est inconscient, c'est l'objet de la peur. Un enfant dit "j'ai peur", il ne dit pas "je suis angoissé". Et de quoi mon chéri ?, lui demande-t-on. "Je sais pas"... François Robert : Chez Freud, la théorie de l'angoisse présuppose qu'on puisse parler d'"angoisse inconsciente", comme on parle de "culpabilité inconsciente". Ce n'est pas le traducteur qui est en cause, c'est Freud lui-même ! Quand on dit "Ich habe Angst vor", on est tenté de traduire par "j'ai peur de". Mais Freud vient toujours compliquer les choses. Il faut prendre le risque d'une périphrase, pour montrer comment le concept se déploie. Lorsque le petit Hans dit "j'ai peur du cheval", Freud explique que c'est de l'angoisse ("Angst") et non de la peur ("Furcht"). Si vous passez indistinctement de l'une à l'autre, vous perdez la richesse de la théorie. Il faut donc dire que Hans "a de l'angoisse devant le cheval". Il y a une grande différence entre le sens courant d'un mot et celui que Freud lui donne. Il est piégeant, vous savez ! Propos recueillis par Jean Birnbaum
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/peur-ou-angoisse-trois-traducteurs-s-expliquent_1288467_3260.html
Un même extrait, des versions différentes
Trois traductions différentes d'un même extrait de l'oeuvre de Sigmund Freud.
"Peut-être est-il opportun de remarquer ici que le sentiment de culpabilité n'est au fond rien d'autre qu'une variété topique de l'angoisse ; dans ses phases tardives, il coïncide tout à fait avec l'angoisse devant le sur-moi. Et dans l'angoisse les mêmes extraordinaires variations se rencontrent dans son rapport à la conscience. D'une manière ou d'une autre, l'angoisse se cache derrière tous les symptômes, mais tantôt elle accapare bruyamment la conscience, tantôt elle se dissimule si parfaitement que nous sommes obligés de parler d'angoisse inconsciente, ou - si nous voulons garder plus pure notre conscience morale de psychologue, puisqu'en en effet l'angoisse n'est au premier chef, il est vrai, qu'une sensation - , de possibilités d'angoisse." "Le Malaise dans la culture", PUF-"Quadrige", traduction de l'équipe éditoriale en charge des Oeuvres complètes, p. 78-79. "Peut-être est-il bienvenu de faire remarquer ici que le sentiment de culpabilité n'est au fond qu'une dégénérescence topique de la peur, dans ses phases ultérieures il coïncide tout à fait avec la peur du surmoi. Et dans la peur se révèlent les mêmes extraordinaires variations du rapport à la conscience. D'une certaine façon, la peur se cache derrière tous les symptômes, mais tantôt elle accapare la conscience avec bruit, tantôt elle se cache si parfaitement que nous sommes obligés de parler d'une peur inconsciente, ou - si nous voulons garder plus pure notre conscience de psychologue, car la peur n'est d'abord, il est vrai, qu'une sensation - de possibilités de peur." "Le Malaise dans la culture", Garnier-Flammarion, traduction de Dorian Astor, p. 163. "Peut-être serait-ce ici le bon moment de remarquer que le sentiment de culpabilité, au fond, n'est rien qu'une forme topique d'angoisse, sous ses formes ultimes il coïncide entièrement avec la peur du Surmoi. Et, s'agissant de l'angoisse, les mêmes variations extraordinaires se manifestent par rapport à la conscience claire. D'une certaine façon, l'angoisse est derrière tous les symptômes, mais tantôt elle réquisitionne à grand tapage la conscience entière, tantôt elle se cache si parfaitement que nous sommes forcés de parler d'angoisse inconsciente ou bien - si nous tenons à avoir meilleure conscience vis-à-vis de la psychologie, car enfin l'angoisse n'est d'abord qu'une sensation - de possibilités d'angoisse." "Le Malaise dans la civilisation", Points "essais", traduction de Bernard Lortholary, p. 155.
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/un-meme-extrait-des-versions-differentes_1288468_3260.html
La guerre des éditeurs au format poche
La guerre des Freud est déclarée ! Désormais dans le domaine public, l'oeuvre du père de la psychanalyse attise les convoitises éditoriales.
C'est pour les sciences humaines "un événement comparable à la fin des droits d'auteur pour Proust en littérature", estime Michel Prigent, patron des Presses universitaires de France (PUF), qui revendiquent la place de premier éditeur de Freud en France. "Il va y avoir une véritable redistribution des cartes, et la question des traductions redevient centrale", poursuit-il. Aux PUF, Freud représente aujourd'hui 10 % du chiffre d'affaires. La maison s'est mise en ordre de marche pour défendre sa part de marché. "Je préfère les traductions de notre équipe dirigée par Jean Laplanche, mais j'attends avec impatience celle de Jean-Pierre Lefebvre au Seuil", précise encore Michel Prigent. A côté de la poursuite des oeuvres complètes qui devrait se terminer en 2014 ou 2015, les PUF ont lancé une offensive en "Quadrige", la collection de poche maison, avec la parution de douze titres en janvier, qui seront suivis d'autres au cours de l'année. Car c'est au format de poche, et dans un certain désordre, que se joue cette bataille entre éditeurs. "La disponibilité immédiate et le prix sont les deux clés du succès", reconnaît Eric Vigne, qui dirige "Folio Essais" chez Gallimard. Dès janvier, l'éditeur affichera quinze titres en poche, dont cinq nouvelles reprises de l'édition courante. "Freud est un auteur qui tourne très bien", avoue-t-il. Chez Gallimard, le titre phare demeure Sur le rêve, qui, depuis vingt ans, s'est écoulé à 321 000 exemplaires. "Pas question de se laisser manger la laine sur le dos par les autres éditeurs", avertit de son côté Benoîte Mourot, directrice générale de Payot, qui peut se targuer d'être l'"éditeur historique de Freud". Huit titres sont présents en "Petite bibliothèque Payot", dont deux nouveautés (voir ci-contre) et une réédition actualisée : Cinq leçons sur la psychanalyse, leur texte le plus célèbre et le plus vendu. "Le titre lui-même est une trouvaille de Gustave Payot, qui l'a inventé lors de la première publication, en 1921", précise-t-elle. Pour ces trois éditeurs, qui se partageaient jusqu'à présent l'oeuvre de Freud, l'impératif est d'occuper le terrain avant l'arrivée des nouveaux entrants. Ceux-ci ne sont pour l'instant qu'au nombre de deux : Le Seuil et Flammarion. Editeur de Lacan, Le Seuil est attendu avec intérêt sur ce terrain. Deux des trois premiers titres sont publiés en "Points". Quant aux éditions Flammarion, elles publient d'ores et déjà un volume en "GF", et l'éditrice Sylvie Fenczak annonce, à partir du mois de mai, "une quinzaine de titres dans la collection "Champs", avec, au centre du projet, le traducteur Fernand Cambon". Alain Beuve-Méry
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/la-guerre-des-editeurs-au-format-poche_1288466_3260.html
Nouvelles traductions et révisions
Trois éditeurs sont présents pour la publication du nouveau Freud en France et d'autres se mettront sans doute au travail en 2010.
Trois éditeurs sont présents pour la publication du nouveau Freud en France et d'autres se mettront sans doute au travail en 2010. Pour l'heure, c'est au Seuil que se dessine, avec trois ouvrages, un vrai programme. Néanmoins, la présentation éditoriale de l'ensemble n'est pas encore au point : la liste des traductions antérieures n'est pas indiquée au début de chaque volume, et les deux préfaces de Clotilde Leguil, qui font de Freud une sorte de naturaliste néokantien, tranchent par leur légèreté avec le sérieux de l'entreprise. C'est à Jean-Pierre Lefebvre, éminent germaniste, titulaire de la chaire de littérature allemande à l'Ecole normale supérieure (Paris), traducteur de La Phénoménologie de l'esprit d'Hegel et du Capital de Marx, qu'a été confiée la supervision des trois traductions, sans que l'on sache encore quels autres volumes paraîtront. Lefebvre donne une version magistrale de l'ouvrage majeur de Freud, L'Interprétation du rêve (Die Traumdeutung). On retrouve ici comme ailleurs tous les termes qui avaient été évacués par le couperet "freudologique" : désir, fantasme, psyché, etc. Cette traduction devrait être désormais l'édition de référence, puisque celle de Meyerson de 1926, révisée par Denise Berger en 1967, n'est plus disponible aux PUF et a été remplacée par la version "freudologique" (OCSF, t. IV). Non seulement les annotations de Lefebvre tiennent compte de l'appareil critique de la Standard, mais le parti pris bibliographique est audacieux. Seuls sont retenus les ouvrages cités par Freud au fil des sept rééditions de ce texte, publié en novembre 1899. Un délice pour les érudits. Politique freudienne Tout aussi remarquable est le travail de Bernard Lortholary, qui a choisi pour Das Unbehagen in der Kultur (1930) de traduire kultur par "civilisation" : Le Malaise dans la civilisation. Moins bonne, mais honorable, est la traduction de Totem et tabou (1912-1913) par Dominique Tassel. Chez Garnier-Flammarion, Dorian Astor, excellent traducteur, a choisi le mot "culture" : Le Malaise dans la culture. Dans sa présentation, presque aussi longue que le texte de Freud, Pierre Pellegin, spécialiste d'Aristote, livre une analyse serrée de ce que devrait être une politique freudienne face au malaise civilisationnel des sociétés postmodernes : ni hédonisme ni réaction conservatrice. Chez Payot, on trouvera une traduction inédite du cas Dora (Ida Bauer) et deux versions révisées de plusieurs textes. Si l'ensemble est correct, deux des présentations sont extravagantes. Sylvie Pons-Nicolas explique que l'exposé par Freud du cas Dora est une "observation magistrale", alors que tous les spécialistes savent que cette cure fut un échec, reconnu par Freud lui-même. Quant à Jean Maisondieu, il semble convaincu que les oublis et les lapsus seraient le signe avant-coureur, pour chacun d'entre nous, de la présence d'une future maladie Alzheimer. Plutôt que de frissonner, en opposant les neurones à l'inconscient, mieux vaut lire le texte de Freud. On y découvrira qu'en visitant la cathédrale d'Orvieto, après avoir oublié le nom de Signorelli, il avait su réinventer l'art du voyage romantique en Italie : quel plaisir pour le lecteur d'aujourd'hui ! Aux éditions du Seuil : L'Interprétation du rêve, traduit, annoté et présenté par Jean-Pierre Lefebvre, 696 p., 25 € ; Totem et tabou, traduit par Dominique Tassel, présenté par Clotilde Leguil, "Points", 302 p., 7 € ; Le Malaise dans la civilisation, traduit par Bernard Lortholary, présenté par Clotilde Leguil, "Points", 176 p., 6,30 €. Chez Garnier-Flammarion : Le Malaise dans la culture, traduit par Dorian Astor, présentation, dossier et notes de Pierre Pellegrin, 216 p., 4,80 €, en librairie le 20 janvier. Dans la "Petite bibliothèque Payot" : Cinq leçons sur la psychanalyse, suivi de Contribution à l'histoire du mouvement psychanalytique, traduction d'Yves Le Lay et Samuel Jankélévitch, révisée par Gisèle Harrus-Révidi, présenté par Frédérique Debout, 204 p., 6 € ; Dora. Fragment d'une analyse d'hystérie, traduit par Cédric Cohen-Skalli, présenté par Sylvie Pons-Nicolas, 228 p., 8 € ; Mémoire, souvenirs, oublis, traduction d'Yves Le Lay et Samuel Jankélévitch, révisée par Gisèle Harrus-Révidi, présenté par Jean Maisondieu, 188 p, 7,50 €. Elisabeth Roudinesco
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/nouvelles-traductions-et-revisions_1288465_3260.html
Freud, une passion publique
Depuis le 1er janvier, l'oeuvre de Sigmund Freud est libre de droits. Soixante-dix ans après la mort du maître viennois, ses textes font donc l'objet de traductions inédites, échappant désormais au seul milieu psychanalytique et à ses querelles.
Depuis le 1er janvier 2010, les oeuvres de Freud entrent dans le domaine public, devenant, soixante-dix ans après sa mort, des "biens non susceptibles d'appropriation privée". A ce jour, et alors qu'elles sont partiellement traduites en une soixantaine de langues, l'établissement d'une édition intégrale (vingt volumes environ), organisée de façon cohérente et dans l'ordre chronologique, n'a été effectuée que dans cinq langues : l'allemand, l'anglais, l'italien, l'espagnol et le japonais. Les correspondances ne sont pas encore disponibles dans leur totalité, mais régulièrement traduites. Après de longues batailles, elles commencent à être accessibles à la Library of Congress de Washington où ont été déposés les manuscrits de Freud. On évalue à 15 000 le nombre de lettres écrites par lui : 5 000 ont été perdues et plus de 3 000 ont été déjà publiées ou sont en cours de traduction dans plusieurs langues. Deux éditions complètes de l'oeuvre ont été réalisées en allemand : l'une du vivant de Freud, l'autre après sa mort. Publiées à Londres entre 1940 et 1952, les Gesammelte Werke (GW) sont devenues l'édition de référence, complétée ensuite par un index et un volume de suppléments. La destruction de la psychanalyse par les nazis, qui a eu pour conséquence l'émigration de la majorité des freudiens allemands, autrichiens et hongrois vers les Etats-Unis, a été un désastre pour l'évolution du mouvement psychanalytique, mais aussi pour la publication des oeuvres de Freud. En devenant américains, les psychanalystes européens, contraints à être médecins et à adopter l'idéal adaptatif de l'american way of life, se sont orientés exclusivement vers la clinique, délaissant la partie spéculative de la pensée du maître et les travaux érudits. Jamais le mouvement psychanalytique allemand n'est parvenu, après 1945, à retrouver son ancienne splendeur : d'autant moins que les quelques freudiens non juifs, demeurés à Berlin, avaient collaboré avec le régime. Seul Alexander Mitscherlich (1908-1982) parvint à sauver l'honneur en créant à Francfort le prestigieux Institut Freud et en obligeant les nouvelles générations à réfléchir sur le passé. C'est sous son impulsion que furent mises en chantier les Studienausgaben (ou textes choisis) destinées à un public un peu plus large que celui des GW. Mais comme Freud n'est plus considéré en Allemagne comme un penseur et que son oeuvre n'a guère été étudiée à l'université, elle n'est pas suffisamment lue pour qu'une nouvelle édition critique ait pu être entreprise chez Fischer Verlag, l'éditeur actuel de Freud. Partout dans le monde, aujourd'hui, cette oeuvre est donc lue en anglais. Et ce d'autant plus que la plupart des psychanalystes contemporains, inféodés à l'idéologie utilitariste venue d'outre-Atlantique, s'intéressent moins à la genèse des textes du père fondateur qu'à l'exploration des circonvolutions cérébrales. Ils ont presque oublié que celui-ci était d'abord un juif viennois, savant et écrivain, contemporain de Theodor Herzl, ami de Stefan Zweig et de Thomas Mann, héritier de la tradition philosophique allemande : un penseur des lumières sombres. En conséquence, depuis la seconde guerre mondiale, l'International Psychoanalytical Association (IPA), fondée par Freud en 1910, est une association corporatiste, même si les Latino-Américains, plus puissants que les Européens et les Nord-Américains, résistent à cette orientation, tout en étant parfaitement anglophones. Et pourtant, c'est au psychanalyste anglais James Strachey (1887-1967) que l'on doit la plus belle traduction de l'oeuvre de Freud : la fameuse Standard Edition (SE), dont l'appareil critique est un chef-d'oeuvre. Proche de Virginia Woolf et du groupe de Bloomsbury, analysé par Freud à Vienne, Strachey a réussi à investir, par amour, l'oeuvre d'un autre, au point de la faire sienne toute sa vie. Certes, la Standard a des défauts - latinisation des concepts, effacement d'un certain style littéraire -, mais elle a le mérite d'avoir unifié les concepts en anglais et elle est la seule à témoigner de ce que peut être la passion d'un traducteur. Au fil des années, elle a été révisée et corrigée. Sa qualité, liée à la domination de la langue anglaise sur le mouvement psychanalytique, a donné lieu à quelques aberrations : ainsi les Obras completas publiées en portugais au Brésil, de 1970 à 1977, ont-elles été traduites de l'anglais. Il est probable qu'avec le passage au domaine public, une nouvelle traduction pourra enfin voir le jour dans l'un des pays où la psychanalyse est une culture nationale. La situation de la France est unique au monde. Les premiers traducteurs - Samuel Jankélévitch, Yves Le Lay, Ignace Meyerson, Blanche Reverchon-Jouve, Marie Bonaparte - ont été excellents. Mais ils n'ont pas eu le souci d'unifier la conceptualité : les uns étaient psychanalystes, les autres philosophes ou germanistes. De son côté, Edouard Pichon, grammairien, membre de l'Action française et cofondateur de la Société psychanalytique de Paris (SPP), en 1926, créa une commission pour l'unification du vocabulaire psychanalytique français dont l'objectif était de débarrasser la psychanalyse de son "caractère germanique" pour en faire l'expression d'un "génie français" : la civilisation contre la Kultur. Au sein de la SPP, affiliée à l'IPA, la princesse Bonaparte traduisait donc les textes de Freud avec talent sans proposer de travail théorique. Contre elle, Pichon pensait une conceptualité sans traduire le moindre texte. Durant les années 1950, un nouveau clivage se produisit quand Jacques Lacan effectua sa refonte de la pensée freudienne. Il incita ses élèves à lire Freud en allemand, actualisant du même coup l'idée d'une unification de la conceptualité, dont on trouve la trace dans le célèbre Vocabulaire de la psychanalyse (Presses universitaires de France, 1968), réalisé par Jean Laplanche et Jean-Bertrand Pontalis, sous la direction de Daniel Lagache, lequel mit en chantier aux PUF, à la même époque, un projet d'opus magnum qui ne se réalisa jamais, du fait des désaccords survenus entre les différents protagonistes. Ayant quitté l'IPA en 1963, Lacan, installé aux éditions du Seuil, n'obtint jamais la permission de traduire certaines oeuvres de Freud : les droits étaient réservés à trois éditeurs - PUF, Gallimard, Payot - et aux psychanalystes membres de l'IPA, seuls habilités à y désigner une équipe. Installé chez Gallimard, Pontalis renonça, lui, à publier des oeuvres complètes, refusa tout projet de passage de Freud dans la collection "La Pléiade" et se contenta de faire traduire, retraduire ou réviser un grand nombre d'ouvrages dans la collection "Connaissance de l'inconscient". Malgré des préfaces insuffisantes, ces textes sont remarquablement traduits, notamment par Cornélius Heim et Fernand Cambon. Ils mériteraient d'être republiés, avec des commentaires et des notes adéquates, dans la collection de poche "Quarto", comme cela avait été prévu. Hélas, ce projet a été ajourné lui aussi. Mise en chantier en 1988 par une équipe composée de Jean Laplanche, Pierre Cotet, André Bourguignon (1920-1996) et François Robert, l'édition des Œuvres complètes de Sigmund Freud (OCSF) n'est pas encore achevée aux PUF, avec 15 volumes parus (sur 21) en édition courante et en poche (dans la collection "Quadrige"). En contradiction avec l'esprit du Vocabulaire de la psychanalyse, cette édition, fruit d'un travail d'équipe et non pas d'une rencontre entre un traducteur et une oeuvre, a été unanimement critiquée. Voulant se situer en symétrie inverse de Pichon, les artisans de cette entreprise ont prétendu faire retour à une sorte de germanité archaïque du texte freudien. Aussi se sont-ils donné le titre de "freudologues", convaincus que la langue freudienne n'était pas l'allemand mais le "freudien", c'est-à-dire un "idiome de l'allemand qui n'est pas l'allemand mais une langue inventée par Freud". Ainsi traduite en freudien, l'oeuvre de Freud n'est guère lisible en français : tournures incompréhensibles, néologismes, etc. Parmi les inventions, notons "souhait" ou "désirance" à la place de "désir" (wunsch), "animique" à la place d'"âme" (seele) ou de psyché, "fantaisie" au lieu de "fantasme" (fantasie). Face d'un côté à cette version pathologique de l'oeuvre freudienne, et, de l'autre, à l'immobilisme de Gallimard, on comprend que l'entrée dans le domaine public soit en France un événement : un moment de bonheur et de liberté. Si les traductions françaises publiées aujourd'hui sont différentes les unes des autres, elles ont pour point commun un rejet de toute théorie "freudologique", un retour au classicisme, un refus des dérives interprétatives. Le nouveau Freud français est désormais l'oeuvre d'universitaires patentés. D'où un certain académisme : les traducteurs et commentateurs, normaliens, agrégés, professeurs de lettres, germanistes, philosophes ne se soucient guère des travaux des psychanalystes ou même des historiens du freudisme, et pas du tout des innovations issues du monde anglophone : retour à la langue de Freud, à l'allemand de Freud et à l'Europe continentale qui a vu naître la psychanalyse. Le nouveau Freud français n'est ni lacanien, ni freudien orthodoxe, ni scientiste, ni affilié à l'IPA, il est un auteur du patrimoine philologique franco-allemand, revu et corrigé à la lumière de la philosophie et de la littérature : un Freud de la République des professeurs, démédicalisé, dépsychologisé, dépsychanalysé, peu historisé. Cette perspective est très différente de celle adoptée par les Britanniques. Puisque la Standard Edition révisée est une merveille, les responsables de la nouvelle édition anglaise ont pris un parti inverse de celui de la France. Chez Penguin, les traductions ne visent pas à corriger les erreurs du passé mais plutôt à donner une autre image de l'oeuvre en l'immergeant dans l'histoire de la culture politique, des études de genre ou des débats historiographiques. Aussi bien sont-elles désormais présentées par d'excellents auteurs anglophones ayant eux-mêmes produit des travaux critiques ou historiques : John Forrester, Jacqueline Rose, Mark Edmundson, Leo Bersani, Malcolm Bowie. Adam Philips est le seul psychanalyste à faire partie de cette entreprise, mais il est aussi un essayiste iconoclaste peu apprécié de ses collègues praticiens. Une chose est certaine en tout cas : dans le monde entier, l'édition des oeuvres de Freud est désormais l'affaire des écrivains, des universitaires et des historiens. Après des décennies de querelles ou de charabia, Freud est désormais regardé, hors du milieu psychanalytique - et à l'exception notable de l'Allemagne -, comme l'un des grands penseurs de son temps. Cela ne manquera pas de provoquer de nouvelles campagnes antifreudiennes semblables à celles orchestrées depuis vingt ans par les tenants d'un comportementalisme barbare. Car il en va de Freud comme de Darwin ou de Marx. Les déferlements de haine à leur égard semblent être la preuve que leur invention touche à une vérité universelle : quelque chose comme le propre de l'homme. L'être humain est en effet le produit d'une évolution biologique, d'une détermination psychique conflitctuelle et d'un environnement social conçu en termes de classes. Elisabeth Roudinesco
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/freud-une-passion-publique_1288464_3260.html
"Les ambiguïtés du ""séguinisme"""
En 1993, "Le Monde" décryptait les spécificités du positionnement politique de Philippe Séguin, politique au tempérament fougueux se réclamant de Charles de Gaulle et André Malraux.
A l'occasion de la parution d'un article dans la presse allemande qualifiant le "séguinisme" de "mélange explosif de l'empereur Napoléon III et du président Charles de Gaulle", Le Monde décryptait, dans une analyse parue le 13 octobre 1993, les spécificités et contradictions du positionnement politique de Philippe Séguin, alors président de l'Assemblée nationale. On y lit que M. Séguin a un temps été conseillé par un certain Henri Guaino, avant que celui-ci ne se détourne de l'animal politique au franc-parler pour rejoindre le cabinet de Charles Pasqua. S'il a lu l'article que lui a consacré dernièrement, sous la signature de Ludwig Siegele, l'hebdomadaire de Hambourg Die Zeit et qu'a repris en France Courrier international dans son numéro daté 16-22 septembre, Philippe Séguin s'est sûrement étranglé de colère. Le journaliste allemand a utilisé en effet, pour qualifier le "séguinisme", tous les termes qui mettent en fureur le président de l'Assemblée nationale : le comparant à Ross Perot aux Etats-Unis et Umberto Bossi, fondateur de la Ligue lombarde, en Italie, il classe Philippe Séguin parmi les "populistes" et définit sa doctrine comme une combinaison de "protectionnisme", de "dirigisme" et de "nationalisme". Il est vrai que la tradition politique dont se réclame ouvertement l'ancien ministre, en qui Die Zeit voit, non sans malice, "un mélange explosif de l'empereur Napoléon III et du président Charles de Gaulle", n'est pas exclusive de certaines formes de nationalisme, de populisme ou de dirigisme. Mais il serait injuste de s'en tenir à ces simplifications. Les références intellectuelles de Philippe Séguin, celles qui sous-tendent son discours et inspirent sa philosophie, sont, en effet, fort éloignées de l'extrême droite et rien ne serait plus offensant pour le président de l'Assemblée nationale que de confondre, si peu que ce fût, le "séguinisme" avec le lepénisme – même si Charles Pasqua, qui fut son allié privilégié pendant la campagne du référendum sur Maastricht, s'est découvert naguère des "valeurs communes" avec le président du Front national. Philippe Séguin, pour sa part, n'a jamais accepté la moindre compromission avec le parti de Jean-Marie Le Pen. Les sources de sa pensée sont, sans nul doute, ailleurs. L'autorité constamment invoquée est, bien sûr, le général de Gaulle, suivi de près par son principal exégète, André Malraux. Ainsi, le discours prononcé le 14 juin 1993 par le président de l'Assemblée nationale devant le cercle Périclès se clôt-il par deux citations portant l'une et l'autre sur la notion de "grandeur". La première est de l'auteur de la Condition humaine. "Malraux n'a pas dit que la France n'était grande que lorsqu'elle portait une part de l'espérance du monde, souligne Philippe Séguin. Il a dit exactement que la France n'était elle-même que lorsqu'elle portait une part de l'espérance du monde. Pas de malentendu sur le mot 'grandeur' !" La seconde est du chef de la France libre : "On peut être grand même sans beaucoup de moyens ; il suffit d'être à la hauteur de l'Histoire." Rappeler les grands principes est une chose, définir un projet politique en est une autre. Philippe Séguin a été aidé dans cette tâche par quelques conseillers. Parmi eux, un jeune économiste de trente-six ans, Henri Guaino, qui, avant de prendre ses distances, il y a quelques mois, avec le député des Vosges, a pris part à ses côtés à la campagne contre la ratification du traité de Maastricht. Cet ancien chargé de mission à la direction du Trésor, aujourd'hui directeur au groupe MAAF Assurances et maître de conférences à Sciences-Po, séduit par son agilité d'esprit et sa maîtrise des bons auteurs, de Michel Serres à Michel Crozier en passant par Edgar Morin. De ses lectures et de ses expériences il a tiré quelques idées fortes grâce auxquelles il souhaiterait, dit-il, "rebâtir la synthèse de 1958", celle du plan Rueff, qui, au prix d'une dévaluation et des relèvements d'impôts, lança, "contre tous les technocrates de l'époque" et contre les groupes de pression, la politique économique de la V République, marquée par l'ouverture des frontières. Toutefois, Henri Guaino, qui s'apprête aujourd'hui à rejoindre le cabinet de Charles Pasqua, s'inquiète de l'évolution de Philippe Séguin. Il considère qu'à la différence du Discours pour la France, lu par le député des Vosges à l'Assemblée nationale dans la nuit du 5 au 6 mai 1992, à l'occasion du débat sur la révision constitutionnelle préalable à la ratification des accords de Maastricht, les deux discours de juin 1993, prononcés l'un devant le cercle Périclès, l'autre devant le Forum du futur, ne sont pas loin de céder aux tentations du nationalisme et du protectionnisme. Les deux nouvelles "plumes" de Philippe Séguin, qui ont mis la main à ces deux derniers discours, sont deux jeunes énarques aux profils nettement différenciés. Membre du comité de rédaction de la revue Commentaire, Nicolas Baverez, trente-deux ans, publie ces jours-ci une biographie de Raymond Aron (Raymond Aron, un moraliste au temps des idéologies, Flammarion) : c'est à lui que l'on doit, au début du discours du cercle Périclès, l'hommage rendu à la lucidité de celui qui, à l'époque de la guerre froide, "annonçait prophétiquement la convergence des systèmes". Mais hormis son "aronisme" qui, quoi qu'il en dise, ne ressemble guère au "séguinisme", Nicolas Baverez, qui est aussi normalien et agrégé de sciences économiques et sociales, apporte à Philippe Séguin, à travers deux livres dont il est le coauteur, une double réflexion sur le chômage (L'Invention du chômage, PUF, 1986) et sur l'Etat (L'Impuissance publique, Calmann-Lévy, 1989). Paul-Marie Couteaux, trente-sept ans, est plus proche du "gaullisme de gauche", puisqu'il a dirigé le cabinet de Philippe de Saint-Robert au Commissariat général de la langue française et participé, en 1990, aux côtés de Jean Charbonnel, à la fondation de la Convention pour la V République. Mais il a fait aussi partie du cabinet de Jean-Pierre Chevènement au ministère de la défense. Henri Guaino n'hésite pas à attribuer à cette double filiation les infléchissements qu'il observe dans le langage de Philippe Séguin et dont il relève des signes dans son discours sur l'emploi devant le Forum du futur, en particulier l'idée qu'il faut changer les finalités de l'acte économique. La version originale du texte accentuait même ces tendances. Inachevée, parfois contradictoire, ambiguë, la pensée de Philippe Séguin se cherche encore. Directeur de son cabinet, Bernadette Malgorn, une énarque de quarante-deux ans, qui fut sa collaboratrice au ministère des affaires sociales après avoir travaillé, comme secrétaire générale de la Lorraine, auprès de Jacques Chérèque, chargé du redéploiement industriel de la région, contribue à nourrir la réflexion du président de l'Assemblée nationale. Quoique femme de terrain, elle s'intéresse en particulier aux théoriciens du travail. Elle a lu Robert Reich, le nouveau secrétaire d'Etat au travail de l'équipe Clinton, cité par Philippe Séguin dans son discours sur l'emploi, mais aussi André Gorz, Alain Lipietz ou Bernard Perret, qu'elle a reçu récemment à déjeuner en compagnie d'Alain Finkielkraut. De ces rencontres et de ces lectures elle fait bénéficier Philippe Séguin. Avec cette triple précision : le président de l'Assemblée nationale "aime le débat intellectuel", mais il "n'est pas un idéologue" ; il écrit lui-même ses discours ; il n'a besoin de personne pour "penser à sa place" et n'a donc "aucun gourou". Les proches de Philippe Séguin soulignent à l'envi que celui-ci travaille d'une manière très personnelle et que, dans les discussions internes, il apporte plus d'idées – issues notamment de son expérience d'élu local ou de ses conversations avec des spécialistes tels qu'Alexandre Adler ou Paul-Marie de La Gorce – qu'il n'en reçoit. Grand lecteur lui-même, il s'ouvre à de multiples influences, mais c'est lui, et lui seul, qui en fait la synthèse. Thomas Ferenczi
07/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/07/les-ambiguites-du-seguinisme_1288526_823448.html
"""Le Goût des pépins de pomme"", de Katharina Hagena : une odeur de pommes et de vieilles pierres"
Autour d'une maison, le récit tantôt grave, tantôt léger de cinq destins de femmes.
Ne sachant plus "comment elle s'appelait, ni si c'était l'hiver ou l'été", Bertha Lünnschen est morte. Elle avait trois filles. Harriet, qui porte une robe jaune et se nomme Mohani depuis qu'elle est adepte de la secte du gourou Bhagwan, hérite de l'argent ; Inga, qui retrouve à l'enterrement d'anciens soupirants qu'elle accueille avec ironie, reçoit, elle, des valeurs mobilières ; Christa, "trop anguleuse pour être une beauté dans les années cinquante", hérite des terrains et sa fille, Iris Berger, "trop potelée pour être une beauté dans les années quatre-vingt-dix", de la maison. De l'argent, "il n'y en avait guère" ; les valeurs étaient de peu de valeur ; les terres "n'avaient d'attrait que pour les vaches". Reste la demeure que Bertha n'avait quittée que pour la maison de retraite, et qu'elle confie à sa petite-fille Iris, bibliothécaire à l'université de Fribourg. Emouvant et inattendu cadeau que cette maison d'un petit village du Bade-Wurtemberg qui se présente "comme un casier sombre et délabré". Iris l'a toujours aimée. Elle en fait un inventaire qui devient une espèce de conquête. De pièce en pièce et d'un point à l'autre du jardin, une prise en main et une prise en esprit. Cette exploration crée deux appropriations, l'une bien concrète, celle des lieux, de leur "odeur de pomme et de vieilles pierres", l'autre plus abstraite sans être moins réelle, celle des secrets comme surgis de la maison. Iris nous fait part de ses découvertes en narratrice non dépourvue d'un humour qui porte sans peser. Le passé reprend forme et force comme une réponse affirmative à l'interrogation de Lamartine, "Objets inanimés avez-vous donc une âme/Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer ?" Katharina Hegena en donne une à son récit dans son évocation des aléas de la vie de ses quatre femmes, avec ce que cela comporte de bonheurs et de tragédies, de douleurs et de bouffonneries. De la grand-mère à sa petite-fille, c'est une saga qui s'étend sur trois générations. L'écrivain organise son récit en une succession de situations tantôt graves, tantôt légères, où voisinent les tonalités : l'émotion, Iris et sa mère découvrent les tricots extravagants que Bertha cachait dans un carton - "tout le monde a besoin d'un endroit pour conserver ses larmes" ; le sourire, quand Inga s'amuse à flirter avec le jeune pompiste d'une station-service qui l'emmène à la pêche aux anguilles ; la tendresse et la nostalgie quand M. Lexow, le vieil instituteur qui fut amoureux de la grand-mère, se souvient d'une jeune fille et de caresses sous un pommier qui firent aller les langues du village. Et ainsi nous avançons, comme pas après pas, dans ces existences dont les faces cachées se révèlent. Ces événements disparates pourraient être autant de juxtapositions d'historiettes, mais la romancière construit un récit d'une parfaite unité, à partir de ces vies dont chacune est intimement liée à toutes les autres. LE GOÛT DES PÉPINS DE POMME (DER GESCHMACK VON APFELKERNEN) de Katharina Hagena. Traduit de l'allemand par Bernard Kreiss. Anne Carrière, 268 p., 19,50 €. Pierre-Robert Leclercq
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/le-gout-des-pepins-de-pomme-de-katharina-hagena_1288463_3260.html
"""Cristallisation secrète"" et ""La Mer"", de Yoko Ogawa : Yoko Ogawa et la désertion absolue"
Des nouvelles, un roman, et maintenant un recueil de ses premières oeuvres : trois manières de pénétrer dans le monde de l'écrivain.
Voici quinze ans que Rose-Marie Makino-Fayolle traduit la romancière Yoko Ogawa, née en 1962, et a fait d'elle une sorte de phénomène littéraire en France, où elle a acquis une notoriété qui dépasse les passionnés de littérature japonaise. Son oeuvre, dont on peut maintenant lire la première partie en un seul volume (dans la collection "Thesaurus" chez Actes Sud, 912 p., 28 €) ou séparément (dans la collection de poche "Babel"), offre un prisme qui va du réalisme quotidien au fantastique. Narratrice fluide, Ogawa a l'art d'imposer son ton dans tous les registres possibles et de donner de la crédibilité à chacune de ses intrigues, qu'elle soit d'ordre sentimental, familial ou métaphysique. Cristallisation secrète appartient à ce dernier genre, où ont excellé Ray Bradbury et Bioy Casares, mais surtout le Japonais Kôbô Abé, auquel il semble qu'Ogawa rende hommage. Sur une île, les objets disparaissent sans crier gare. Ne demeure que la mémoire, elle-même de plus en plus fragile. La narratrice est une romancière qui n'écrit, précisément, que sur la disparition. Et le roman qu'on est en train de lire se mêle à l'intrigue de celui qu'elle rédige et qui raconte son aphonie et son aphasie progressives. Dans un climat réaliste et angoissant, la vie sur l'île s'amenuise jusqu'à l'ultime désertion de l'auteur lui-même. Paru au Japon en 1994, ce roman n'est pas le plus représentatif du style d'Ogawa, plus à l'aise dans le récit quotidien ou dans la fiction très intellectualisée, comme Le Musée du silence ou La Formule préférée du professeur (qui ne figurent pas dans le premier volume de "Thesaurus"), mais il permet d'évaluer la vaste gamme de son auteur. Au début de l'année 2009 ont également paru les sept nouvelles de La Mer, qui donnent du style et du monde de Yoko Ogawa une idée juste et douloureuse. Il s'agit, dans les sept cas, de rencontres entre des personnages qui appartiennent à des univers presque incompatibles et dont la confrontation procure un sens non seulement au récit, mais à la sensibilité et à la psychologie de son auteur. C'est incontestablement Voyage à Vienne qui structure l'ensemble. La jeune narratrice, en voyage organisé, est contrainte de partager sa chambre avec une vieille femme venue revoir, après toute une vie de séparation, un ancien amant autrichien avec qui elle a eu une brève liaison dans sa jeunesse au Japon. Il est en train de mourir dans un asile et a laissé son nom pour que le personnel soignant la prévienne avant son agonie. La vieille maîtresse, qui n'a connu qu'un jeune homme dans de lointaines années, se rend en compagnie de sa nouvelle amie dans le mouroir. Peu habile dans la lecture de l'alphabet occidental, elle a besoin de son aide. Dans le dortoir, elles assistent toutes deux à l'agonie d'un vieillard. Et quand il a rendu son dernier soupir, la narratrice se rend compte que le véritable amant était le voisin de chambrée. Ce quiproquo n'est finalement pas grave. Car tous les vieux mourants solitaires se valent. Ce qui comptait était l'élan d'amour de la vieille amoureuse, non l'identité de celui qu'elle a étreint avant la mort. Nul écrivain comme Yoko Ogawa ne communique au lecteur ce mélange de sentiment poétique et de désespoir dans la solitude. Même si Ogawa fait appel à des accessoires narratifs légèrement appuyés (un camion de poussins qui se renverse, un vieux typographe dans une imprimerie ancienne manière, un instrument de musique imaginaire), elle en revient toujours à l'essentiel, qui est constitué par les relations humaines. CRISTALLISATION SECRÈTE (HISOYAKANA KESSHÔ) de Yoko Ogawa. Traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle. Actes Sud, 352 p., 22 €. LA MER (UMI). Traduit du japonais par Rose-Marie Makino-Fayolle. Actes Sud, 154 p., 16 €. René de Ceccatty
07/01/2010
livres
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"""Histoire secrète du Costaguana"", de Juan Gabriel Vasquez : Colombie, l'amère patrie"
Avec un superbe roman placé sous la figure tutélaire de Joseph Conrad, l'écrivain nous entraîne dans l'histoire tumultueuse de son pays natal.
Un recueil de nouvelles et deux romans ont suffi à Juan Gabriel Vasquez pour s'imposer, à 37 ans, comme l'un des plus brillants romanciers latino-américains de sa génération. Une réputation en rien usurpée, comme on peut en juger à la lecture d'Histoire secrète du Costaguana, époustouflant de maîtrise narrative et stylistique. Ecrite sous l'aile tutélaire de Conrad, cette fresque burlesque, épique et familiale aussi drolatique qu'émouvante nous entraîne au coeur des séismes politiques qui aboutiren, en 1903, à la séparation entre le Panama et la Colombie. Un pays que ne cesse d'explorer le romancier depuis qu'il l'a quitté, il y a une dizaine d'années (il réside à présent à Barcelone) pour mettre ses pas dans ceux de ses aînés : Garcia Marquez, Fuentes, Cortazar... Avant cela, élevé au sein d'une famille d'avocats anglophiles, "humaniste et éprise de culture", Juan Gabriel Vasquez a suivi des études de droit. "Dans les années 1990, explique-t-il dans un français soigné, dire que l'on voulait écrire paraissait étrange." Aussi, pour assouvir sa passion, décide-t-il sitôt diplômé de partir pour Paris. "C'est dans cette ville qu'ont été écrits par des écrivains expatriés tous les romans que j'aime. Que ce soit Ulysse, de Joyce, ou ceux des auteurs de la génération du boom latino-américain, exception faite de Cent ans de solitude. Octavio Paz n'a-t-il pas dit, d'ailleurs : "Si les papes sont choisis à Rome, les Nobel de littérature le sont à Paris." C'est donc là, naturellement, que je voulais être." Et c'est là qu'il va "redécouvrir" la littérature latino-américaine, et aussi, bien qu'il déteste le mot, l'identité latino-américaine. "Lorsque j'ai quitté Bogota, je venais d'achever un premier roman qui se situe en Italie. Ecrire sur mon pays m'était impossible, car je ne comprenais rien de son histoire, ni de sa politique. Or après huit ans à l'étranger, j'y suis parvenu, grâce à la distance mais aussi en saisissant que la meilleure raison que l'on a d'écrire est de ne pas savoir, d'être en proie aux doutes et aux interrogations. En ce sens, le roman est un objet magnifique pour jeter un peu de lumière sur les zones obscures de nos expériences individuelles et collectives." Dès lors, le romancier, par ailleurs traducteur de Victor Hugo et de E. M. Forster, Juan Gabriel Vasquez va s'immerger dans l'histoire colombienne pour en explorer les parts les plus tumultueuses et les plus sombres. Ce sera tout d'abord Les Dénonciateurs (Actes Sud, 2008), où un jeune journaliste découvre le passé trouble de son père pendant la deuxième guerre mondiale. Puis, remontant le temps, Histoire secrète du Costaguana, dont l'idée lui est venue en composant un court essai sur Joseph Conrad. "Il est un modèle pour moi, car il n'a pas eu peur de rompre avec les loyautés nationale, familiale, littéraire pour se réinventer et transformer ses expériences en littérature. En Colombie, une légende prétend que Conrad est venu tout jeune faire de la contrebande d'armes. Il n'y a aucune preuve de cela, pour autant je reste persuadé qu'il a puisé dans ses souvenirs pour composer l'un de ses chefs-d'oeuvre : Nostromo. Découvrir que mon écrivain tutélaire s'est intéressé à l'histoire de mon pays m'a intrigué et poussé à aller voir plus loin." Après s'être plongé dans une cinquantaine de livres, Juan Gabriel Vasquez va entamer une longue réflexion sur le pouvoir de l'Histoire et de la littérature dont son narrateur, José Altarimano, homme complexe et ambigu, se fait le porte-voix. Exilé à Londres depuis vingt ans, de surcroît "dépossédé de sa vie" par Conrad à qui il a confié ses souvenirs, Altarimano ne vit plus que dans l'attente du grand jour : celui de la mort du romancier, auquel il s'est étrangement identifié, pour enfin se réapproprier son histoire. Truculence et drôlerie Une histoire inséparable de celle de la Colombie, dont il a pourtant tenté de demeurer à l'écart. Et dont il décrit non sans ironie les premières années, ponctuées de coups d'Etat et de guerres civiles - le tout avec une débauche étourdissante de faits et de personnages que l'on devine moins motivée par le souci de véracité que par l'envie d'expurger une colère longtemps contenue. Car peu à peu, à la voix pleine de verve, de truculence et de drôlerie de ce narrateur facétieux vient se joindre une autre, grave et amère, qui raconte l'enfance d'un petit garçon, José, né d'amours illicites ; sa quête pour retrouver son père et leurs retrouvailles manquées au Panama. Là, loin de l'activiste, idéaliste et radical, qui mit en déroute les troupes conservatrices, du journaliste pourchassant l'obscurantisme religieux, José va découvrir en Miguel Altarimano, son père, un homme fantasque, aveuglé par les idéaux de progrès et prêt à tout pour les faire triompher. Quitte à distordre la réalité, voire à sublimer une entreprise désastreuse et meurtrière, celle du Canal transocéanique. Un échec humain et financier qui conduira à la rupture entre le Panama et la Colombie. Et à celle d'un homme avec son pays... HISTOIRE SECRÈTE DU COSTAGUANA (HISTORIA SECRETA DE COSTAGUANA) de Juan Gabriel Vasquez. Traduit de l'espagnol (Colombie) par Isabelle Gugnon. Seuil, 320 p., 22 €. Christine Rousseau
07/01/2010
livres
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"""Le Bateau-usine"", de Takiji Kobayashi : l'enfer des mers russo-japonaises"
Ecrit en 1929 et redécouvert en 2008, "Le Bateau-usine" est un roman politico-social puissant et radical.
Quatre-vingts ans après sa première édition, un roman "prolétarien" a connu au Japon, en 2008, un succès inattendu, suscité par une "relecture" faite en milieu scolaire (lire "Le Monde des livres" du 11 juillet 2008). A la surprise générale de la critique, ce roman, très marqué par l'époque où il fut écrit, apparaissait comme une traduction limpide et frappante des préoccupations des jeunes générations actuelles. Certes, l'auteur, assassiné en 1933, à l'âge de 30 ans, dans des conditions mystérieuses (il fut probablement tabassé par la police qui l'avait arrêté pour ses activités subversives procommunistes), n'était pas un inconnu : son courage était souvent cité en exemple. Mais qui pouvait penser que le triomphe trompeur du libéralisme, avec les conséquences désastreuses que l'on sait pour la quasi-totalité de la population des pays jusque-là classés comme "avancés", allait à ce point faire resurgir les angoisses d'il y a un siècle ? Takiji Kobayashi consacra les quelques années de sa jeunesse mutilée à observer les milieux paysan et ouvrier, à enquêter dans les champs, dans les usines et dans les ports d'Hokkaido et du nord de l'île principale d'Honshu, région dont il était originaire, pour dénoncer les conditions de travail inhumaines qui étaient imposées aux agriculteurs, aux employés d'usine, aux pêcheurs, pour augmenter la rentabilité des entreprises ou des propriétaires. S'inspirant d'un fait divers réel - la mutinerie d'un navire de pêche et de conserverie de crabes et le naufrage d'un bateau en détresse auquel, pour ne pas perdre de temps, le capitaine du "bateau-usine" refusa de porter secours -, il publiait en 1929, d'abord en revue sous forme légèrement censurée par la rédaction, puis en volume (sous le manteau, car le livre fut interdit jusqu'après la guerre), ce roman remarquable non seulement par son sujet, mais par sa forme, comme le souligne, dans son excellente postface, la traductrice, Evelyne Lesigne-Audoly. Curieusement, en dépit d'un objectif ouvertement politique qui aurait pu conduire à un style naturaliste et édifiant, l'auteur cherche dans l'avant-garde européenne des modèles (notamment chez Benjamin Fondane, nous dit-on). Bien sûr, c'est ce qui donne sa force au roman. Il s'agit, en effet, pour le jeune écrivain de rédiger un roman politico-social, dont les personnages sont, pour la plupart, désignés par leur fonction ou leur âge, mais non par leur nom. Le grand romancier Naoya Shiga (1883-1971), auteur d'Errances dans la nuit (Gallimard, 2008), de vingt ans l'aîné de Kobayashi, remarqua tout de suite son talent, qui dépassait la simple prise de conscience politique. Car la reconstitution du travail dans cet enfer flottant et des rapports entre pêcheurs, ouvriers et personnel d'encadrement est d'une vérité glaçante. Très cru dans ses descriptions (notamment sur l'hygiène épouvantable, les frustrations, les abus sexuels entre hommes et la violence intolérable de la répression et des châtiments corporels allant jusqu'au meurtre), le romancier laisse sourdre chez le lecteur et chez ses personnages une colère qui aboutit à la mutinerie. Les rares moments d'humanité sont fournis par une famille russe qui vient au secours d'une chaloupe perdue et par quelques gestes d'entraide entre les pêcheurs martyrs. Bien entendu, un lecteur occidental pensera à Joseph Conrad. Mais on n'est pas sur le fleuve Congo. On navigue au large du Kamtchatka. Les employeurs (et surtout un monstrueux intendant) mêlent sournoisement discours nationalistes, intimidations professionnelles et sévices corporels afin de forcer les marins, parmi lesquels se trouvent de nombreux ouvriers agricoles au chômage et des étudiants désargentés, à renoncer à toute dignité humaine pour enrichir les investisseurs qui ont réhabilité des rafiots vétustes commandés par des capitaines ivrognes. Il ne fait aucun doute que ce Bateau-usine doit compter parmi les grandes oeuvres japonaises, à la fois littéraires et humanistes, à effet politique et social : au même titre que Les Feux (1951), de Shohei Ooka (1909-1988), et que Pluie noire (1966), de Masuji Ibusé (1898-1993). Mais, d'une certaine manière, le récit de Kobayashi est plus radical, par son mélange de violence et de sobriété, d'hyperréalisme et de refus de toute psychologie romanesque, de lyrisme poétique et de froideur intraitable. LE BATEAU-USINE (KANIKÔSEN) de Takiji Kobayashi. Traduit du japonais et postfacé par Evelyne Lesigne-Audoly. Yago (diffusion De Borée), 144 p., 18 €. René de Ceccatty
07/01/2010
livres
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"""Méditations en vert"" et ""La Polka des bâtards"", de Stephen Wright : Stephen Wright, ou la tentation de l'accessoire"
Sur les séquelles de la guerre du Vietnam et le racisme dans le Sud esclavagiste, deux récits ambitieux et brillants mais affaiblis par quelques procédés.
Trois livres, semble-t-il, en trente ans : voilà un écrivain parcimonieux. Ambitieux aussi, qui cherche à troubler, à mettre le lecteur mal à l'aise en le conduisant dans des périples complexes, en lui présentant des embûches afin d'établir sur lui une sorte de maîtrise presque sectaire, supposée propice à la compréhension d'une Vérité. Certes, les récits sur la guerre du Vietnam ne manquent pas, mais ces Méditations parues en 1981 ne prétendent pas narrer, il s'agit d'autre chose : de prendre le pouvoir sur le lecteur. Avec un but évident, celui de montrer l'horreur de la violence et d'étudier ses conséquences à long terme sur le cerveau humain. Wright utilise dans ce but une variété d'instruments et de procédés, dont la représentation d'images violentes est le plus évident. Mais il ne s'agit pas tant de montrer la guerre comme l'ont fait tant d'autres avant lui, depuis Barbusse, que d'étudier la persistance de ces images dans la conscience, leurs ravages des années après la première exposition. C'est ici qu'interviennent les procédés, indispensables pour cet auteur, déroutants pour le lecteur. Mais le lecteur a-t-il encore une importance pour cet écrivain alchimiste qui a fixé ses objectifs et tient à la réussite de sa démonstration ? Vers 1970, au Vietnam, le soldat Griffin, personnage central en poste dans une unité de recherche et d'évaluation au coeur des hostilités, est chargé d'interpréter les photos aériennes : des images. Avec ses collègues, il est exposé aux attaques ennemies comme à l'incurie de ses officiers. L'auteur le met également en scène quelques années après sa démobilisation, afin de constater son état : Griffin, incapable d'oublier, croupit à New York, sans travail, en proie aux médecins et aux assistantes sociales qui observent sa déliquescence. La narration alterne donc les époques pour mieux expliquer la profondeur des ravages. Elle montre le personnage sous les bombes, puis écrasé par le souvenir et fasciné par les plantes dont il encombre son domicile : ce "vert" du titre, on peut le soupçonner, est une sorte de revanche sur le sinistre "agent orange", le défoliant méphitique sur lequel on comptait pour empoisonner les Vietcongs en détruisant leurs forêts. Enfin, comme pour valider cette structure déjà complexe, de petits poèmes en prose apparaissent ça et là sous le nom de Méditations, sans apporter grand-chose. Il reste un admirable talent narratif, un récit de guerre cruel et grandiose, qu'on aurait préféré plus dépouillé et moins démonstratif. Idéaux et généalogie Publiée vingt ans plus tard, La Polka a des ambitions plus évidentes puisqu'il s'agit d'y étudier le racisme. Quelques années avant la guerre de Sécession, de bonnes âmes s'efforcent, même dans les Etats du Sud, de rapprocher les hommes indépendamment de leur couleur de peau. Le roman présente une jeune Sudiste, intelligente et sensible, qui refuse l'esclavage imposé sur la plantation par sa famille. Ecoeurée par les pratiques de son entourage, elle va rejoindre et épouser dans le Nord un militant de l'abolition, dont elle aura un fils, élevé dans les mêmes idées de fraternité raciale, et qu'elle a nommé Liberty. Lorsque éclate la guerre, ce jeune homme combat dans les armées du Nord, pour ses idées libérales, contre son ascendance raciste. Mais, au fur et à mesure que la ligne de front se rapproche de la plantation ancestrale, qu'il n'a jamais vue, ses allégeances vacillent : il ne s'agit plus de discourir en faveur des esclaves, mais de ressentir le poids de la généalogie. Il déserte, rejoint enfin le domaine familial et fait la connaissance de son grand-père, vieillard ignoble et dérangé, obsédé par d'épouvantables expériences sur le blanchiment des nègres, alors que les armées du Nord ravagent la Virginie. L'histoire aurait été superbe si l'auteur avait pu maîtriser son indéniable talent. Mais il a du mal à résister aux tentations de l'accessoire : le long récit d'un voyage sur le canal de l'Erié n'apporte guère, et les derniers chapitres au cours desquels Liberty finit par rallier New York sur un corsaire anglais sont bien difficiles à justifier. Ils confirment l'impression d'un talent considérable bousculé, et peut-être gâché, par ses propres excès. MÉDITATIONS EN VERT (MEDITATIONS IN GREEN) de Stephen Wright. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par François Happe. Gallmeister, 400 p., 24 €. LA POLKA DES BÂTARDS (THE AMALGAMATION POLKA). Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Serge Chauvin. Gallimard, 414 p., 23 €. Jean Soublin
07/01/2010
livres
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Un Eurostar a été bloqué sous la Manche
Les services d'Eurostar ont été interrompus, jeudi 7 janvier, après qu'un train est resté bloqué deux heures, dans le tunnel sous la Manche, annonce un porte-parole d'Eurotunnel.
Les services d'Eurostar ont été interrompus, jeudi 7 janvier, après qu'un train est resté bloqué dans le tunnel sous la Manche, annonce un porte-parole d'Eurotunnel. Le train qui reliait Bruxelles à Londres, avec 260 voyageurs à son bord, est resté bloqué pendant environ deux heures, avant de sortir du tunnel côté britannique, a indiqué en fin de matinée un porte-parole de la compagnie. Les services d'Eurostar avaient été suspendus durant trois jours en décembre à cause d'une panne imputée aux chutes de neige et sur laquelle une enquête a été ouverte, avec l'aval des autorités françaises et britanniques. Mercredi, quatre trains Eurostar avaient été annulés en raison des intempéries qui s'abattent depuis mardi sur le nord-ouest de la France. La société avait demandé à ses clients de repousser si possible leur voyage prévu dans la journée.
07/01/2010
economie
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A Kigali, Bernard Kouchner scelle la réconciliation franco-rwandaise
Un rapport rwandais exonère le président Kagamé de toute responsabilité dans l'attentat de 1994.
La concomitance n'a probablement rien d'une coïncidence. Au moment même où Bernard Kouchner, en déplacement à Kigali, scellait la réconciliation entre la France et le Rwanda, les autorités rwandaises ont discrètement rendu public, jeudi 7 janvier, un rapport officiel démentant radicalement la thèse développée par le juge français Jean-Louis Bruguière. Une thèse qui attribuait à l'actuel président Paul Kagamé la responsabilité de l'attentat contre l'avion de son prédécesseur, considéré comme l'événement déclencheur du génocide des Tutsis en 1994. Cette analyse contenue dans une ordonnance du juge, en novembre 2006, avait provoqué la rupture, par Kigali, des relations diplomatiques avec Paris. Le document d'un "comité indépendant d'experts" rwandais, révélé par France Inter, jeudi, écarte la responsabilité du pouvoir actuel de Kigali, à dominante tutsie. Il analyse l'attentat du 6 avril 1994 contre l'avion du président hutu Habyarimana, comme une "opération soigneusement murie par des politiciens et officiers extrémistes appartenant à la faction Hutu power [extrémistes]" opposés au partage du pouvoir imposé alors par les accords d'Arusha. Le rapport, rédigé sous la direction de Jean Mutsinzi, ancien président de la Cour suprême du rwanda, contredit les conclusions du juge Bruguière à propos du lieu d'où auraient été tirés les missiles contre l'avion présidentiel. Il le situe dans la zone de Kanombe contrôlée par les Forces armées rwandaises (FAR) du président Habyarimana. Le document affirme que les FAR disposaient d'armes lourdes, notamment de missiles "commandés en grande quantité à cinq Etats différents", parmi lesquels la France ne figure pas. En août 2008, Kigali avait publié un autre rapport qui accusait la France d'avoir "participé à l'exécution du génocide" et mettait en cause nommément Edouard Balladur, Alain Juppé et Dominique de Villepin. Aujourd'hui, le rapport Mutsinzi reste très discret sur le rôle de Paris. Entretemps, de nouveaux témoignages ont affaibli l'enquête du juge Bruguière, conduisant son successeur, Marc Trévidic, à la reprendre en grande partie, et permettant la reprise des relations diplomatiques, annoncée le 29 novembre dernier. Arrivé à Kigali, mercredi, en fin de journée pour une visite de vingt-quatre heures, première étape d'une tournée de cinq jours en Afrique, Bernard Kouchner a été accueilli non pas par son homologue rwandaise, mais par Rose Kabuye, directrice du protocole du président Kagamé. Dans ce changement protocolaire de dernière minute, qui pouvait être reçu comme un camouflet, la délégation française a préféré déceler, au contraire, une marque d'attention. Proche du président, Rose Kabuye, visée par un mandat d'arrêt du juge Bruguière, avait été interpellée puis remise en liberté, permettant au Rwanda d'entrer dans la procédure française et de passer à l'offensive contre l'enquête Bruguière. Avec Kigali, l'heure est désormais aux retrouvailles. A la mi-décembre, Paris et Kigali ont désigné leurs ambassadeurs. Bernard Kouchner, qui connaît de longue date le président Kagamé, a œuvré personnellement au rétablissement des relations. La prochaine étape serait une visite du président Nicolas Sarkozy, peut-être à la fin de février. Au-delà, l'enjeu du rapprochement est moins économique que culturel. Les échanges entre les deux pays sont dérisoires (12 millions d'euros en 2008). En revanche, l'avenir du Rwanda comme pays francophone inquiète Paris. Kigali a rejoint le Commonwealth. Depuis la rentrée scolaire, l'enseignement de l'anglais a remplacé celui du français dans les écoles du primaire. "Dans trente ou quarante ans, on ne parlera plus le français au Rwanda", prédit un diplomate.
07/01/2010
afrique
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"""Théorie du chiffon"", de Marc Lambron : femmes et falbalas"
L'auteur déploie une fable sur le monde de la mode, pimentée de formules définitives souvent hilarantes.
Amplement déployé naguère dans Les Menteurs (2004), roman générationnel narrant les destins croisés d'un trio d'amis qui, chacun dans sa partie (université, communication, mode), traversait les bouleversements des moeurs opérés dans les trois dernières décennies du XXe siècle, le formidable radar sociologique de Marc Lambron s'est ensuite focalisé sur deux autres quinquagénaires : Ségolène Royal (Mignonne, allons voir..., 2006) et Nicolas Sarkozy (Eh bien, dansez maintenant..., 2008), à propos desquels sa fine culture historique, son talent de portraitiste et son brio stylistique firent les mêmes étincelles en matière d'intelligent décryptage des tendances contemporaines. Des qualités qu'on retrouve dans Théorie du chiffon mais comme chauffées à blanc, l'auteur n'ayant pas hésité à recycler pensées, observations et même quelques aphorismes déjà présents dans ses précédents opus pour les développer, les étoffer, mais surtout les légitimer par la bouche d'un personnage possédant la crédibilité suprême en matière de perception du zeitgeist (esprit du temps) : soit un grand couturier brillant et redouté que sa célébrité planétaire a transformé en "oracle" pluriculturel, "gourou" multimédiatique, saint patron des "fashion victims", ces "derviches tourneurs de la carte de crédit". "Portraits foudre" Partant du juste principe selon lequel "le monde, c'est la mode avec un N en plus", Jean-Louis Beaujour qui emprunte à Saint-Laurent pour la conception du chic moderne et à Karl Lagerfeld pour l'humour vachard, s'entretient donc de tout et de rien avec une de ses amies romancière qui, hélas !, tient davantage, ici, le rôle de faire-valoir que d'égale partenaire. S'il n'a pas son pareil pour établir la typologie des égéries utilisables dans les différents segments du marché cosmétique, disserter sur les anorexiques ("les gladiateurs de nos jeux du cirque"), les hystériques ("d'excellents baromètres sociaux, gouvernés par des tempéraments de tournesols"), la substance de l'actrice ("d'abord une angoisse"), les médias ("la télévision aime les imposteurs comme les chatons aiment jouer à la pelote") ou le gotha ("il faut que les cerveaux soient vides pour que les berceaux soient pleins"), Beaujour excelle surtout dans le "portrait foudre" façon Saint-Simon (voyez cet "air de perroquet en train de croquer une cerise") et la maxime tendance Chamfort ("ce qui rend malheureux, ce n'est pas la vie, mais son commentaire"). Ces deux registres alternant non stop au rythme crépitant du dialogue, en résulte un effet "canon à formules" (comme il est des canons à neige) laissant le lecteur parfois commotionné mais souvent hilare. Comme il se doit, Beaujour déteste tous ses concurrents. Nello ? Il "croit qu'il est devenu un maître parce qu'il dîne à la table de ses clients... Son truc est de corseter à la taille pour donner de l'ampleur à la corolle, comme si chacune de ses clientes aspirait à être Miss Beyrouth 1955". Wolfgang ? "Il prend les femmes pour des bégonias de concours qu'il rêverait de tailler au sécateur... Comme il dessine avec un râteau, ses robes ressemblent à des casiers à homards." Mais au-delà de ces références obligées au "chiffon", cette "théorie" s'avère avant tout (et dans l'autre sens du mot) un carrousel de femmes et, au fond, un livre qui leur est entièrement dédié. Qu'elles soient brossées (et rossées) en rédactrices ou clientes, divorcées ou adultères, quadras ou néo-quinquagénaires, "nouvelles Russes" ou femmes de footballeurs ; observées au prisme du shopping, de la guerre des sexes ou de l'angoisse du temps qui passe, Beaujour ne les châtie qu'en proportion de l'amour qu'il leur porte. Estimant qu'"on les rend cinglées", fustigeant "la Propagandastaffel des magazines féminins", ces "panthéons de misogynie", cet "univers où tout est commandé jusqu'à l'angoisse par la finitude physique", il en appelle à une nouvelle civilité tissée de livres, de conversation délicate et d'un "savoir aimer" défini comme "l'intégrité éthique alliée à la liberté sexuelle". La femme idéale ? Un alliage d'"intelligence", de "gaieté", d'"indulgence", "une femme qui ne ferait jamais de saloperies concrètes, se comporterait bien en tout et sur le fond, mais n'aurait pas de limites dans son plaisir". On aura reconnu le programme libertin de haute époque. Et dans Beaujour-le-moraliste (qui ne pouvait être que français) le double de Lambron lui-même. Vous vous croyiez chez Prada ? Vous êtes chez La Fontaine. L'avantage ? Indémodable. THÉORIE DU CHIFFON de Marc Lambron. Grasset, 164 p., 19,90 €. Cécile Guilbert
07/01/2010
livres
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"""Cet homme-là"", d'Eve de Castro : une langue pour mentir, se taire ou se sauver"
La romancière imagine l'amour fou d'une bourgeoise parisienne pour un immigré mauricien.
Un homme, une femme... En décidant de raconter la formation d'un couple improbable, Eve de Castro n'a pas choisi l'originalité. Elle pousse le risque jusqu'à nous offrir un récit linéaire, sans flash-back, avec une alternance de chapitres toute simple : Roméo, puis Marie, puis Roméo, puis Marie... Pis : cette dernière est une jeune bourgeoise française devenue écrivain, un type de personnage qui inspire particulièrement... certaines romancières françaises. Mais le livre s'ouvre sur tout autre chose : un petit garçon de 5 ans, à l'île Maurice, qui passe son temps à compter. Roméo compte tout ce qui passe : les fourmis rouges, les grains de maïs qu'elles trimballent, les coups de balai qui seront nécessaires pour nettoyer le plancher... Rien ne vaut les chiffres pour jouer et pour rêver quand on a un père à l'allure de géant qui boit trop de bière ou d'alcool jaune et sait surtout donner des taloches, et une mère en mauvais état qui ne répond pas aux questions et fait des ménages chez les Anglais, bien qu'ayant "des serpents sur les mollets et des limaces sous les paupières". Ecrivain et scénariste, Eve de Castro est aussi à l'aise dans le roman d'aventures (Ayez pitié du coeur des hommes, Lattès, prix des libraires, 1992), que la fresque historique (Nous serons comme des dieux, Albin Michel, prix des Deux Magots, 1997) ou le thriller (La Trahison de l'ange, Robert Laffont, 2006). Ici, elle passe ses personnages au scanner en se mettant dans leur peau. Ce roman est un ruissellement de mots, avec des parenthèses, des incises, des répétitions, dans un style nerveux qui ménage des surprises... Si certains paragraphes font une ligne, d'autres occupent plusieurs pages. Le lecteur découvre successivement les petits et les grands tourments de Roméo et de Marie, à chaque étape de leur vie, jusqu'à leur rencontre inattendue dans une boîte de nuit. Comment la jeune mère de trois enfants échapperait-elle aux contradictions ? Sa famille lui a enseigné "des valeurs", plus exactement des règles de "tenue", en s'ingéniant à ne pas les respecter. On révèle brutalement à la petite Marie, surnommée Mouchon, que son beau-père est son vrai père. "- Il ne faut plus dire "Bernard", Mouchon. Maintenant, il faut dire "papa". - Et Papa, comment je l'appelle ? - T'as qu'à pas l'appeler." Trois mois après la régularisation de son état civil, ses parents se marient. Mais, moins d'un an plus tard, sans explication, les voilà séparés. Marie elle-même va rater un premier mariage, puis un second, malgré toutes les apparences d'un bonheur paisible. Rien ne filtre à l'extérieur. Le contrôle, la maîtrise de soi, elle en a l'habitude, on l'a dressée pour ça. Le petit Roméo, lui, se débrouille tout seul depuis que sa mère est partie faire des ménages en France. "Moi dois aller là-bas. Toi vas habiter chez tante Mireille." C'est comme ça, on ne discute pas. Pour rejoindre sa mère à Paris, l'enfant décide de passer du créole au français : une langue pour être raisonnable, accepter parfois l'inacceptable, et aussi une langue pour mentir et pour se taire. En France, un parcours de combattant lui donnera un BEP, puis un travail de réparateur en chaudières, enfin un statut de tout petit entrepreneur. Marie choisit Roméo comme on se jette dans le vide. Ce n'est pas de son mari qu'elle divorce, mais d'elle-même. Le Mauricien n'a pas besoin de courir après les femmes : elles tombent comme des mouches, il a l'habitude d'être follement désiré. Cet amant exceptionnel, auquel l'auteur attribue des compétences étonnantes, veut emmener Marie "là où elle n'est jamais allée, lui faire dépasser ses limites". A corps perdu A défaut de vraiment nous surprendre, Eve de Castro sait éviter le manichéisme et l'angélisme : aimer de tout son corps, sinon de tout son coeur, ne suffit pas à effacer les barrières sociales. La romancière donne l'impression de s'être mise tout entière dans cette histoire. Page 173, on ne sait plus si c'est elle ou Marie qui précise comment naissent ses livres... Ce roman d'amour est aussi un roman sur le pouvoir salvateur des mots. Prenant conscience qu'écrire ne lui suffit plus ("maintenant j'ai besoin de vivre"), Marie s'est jetée à corps perdu dans les bras de Roméo, avec le désir "d'être prise en charge, d'être prise en mains, d'être prise tout court". Elle devra traverser l'enfer pour comprendre, à l'inverse, qu'écrire, c'est retrouver le chemin de sa vie. CET HOMME-LÀ d'Eve de Castro. Robert Laffont, 326 p., 20 €. Robert Solé
07/01/2010
livres
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"""Mon couronnement"", de Véronique Bizot : les aléas de la célébrité tardive"
Il faut se méfier du mot chef-d'oeuvre, mais il y a de cela dans ce premier roman qui amorce une carrière d'écrivain aux dons multiples.
De la renommée et d'un plat de lentilles. Cela aurait pu être le titre de cet époustouflant roman dont les situations, souvent absurdes, sont le reflet exact de ce qu'il y a de plus raisonnable dans nos vies. Si l'occupation apparemment préférée de Mme Ambrunaz est de cuisiner "inlassablement des lentilles (du Puy)", c'est qu'elle confère à cette légumineuse les vertus que Popeye attribue à l'épinard. Femme de ménage, cuisinière et gouvernante, elle veille ainsi à donner des forces à son patron. Quatre-vingt ans, veuf, un fils, cet ancien physicien fit naguère une découverte permettant "à l'espèce humaine (d'être) soulagée de l'un de ses maux". Le temps a passé. Il ne sait plus ce qu'il a découvert. L'annonce inattendue d'une célébration ne suffit pas à lui rendre la mémoire. Pire, ce couronnement tardif de sa carrière l'accable et l'idée d'être la proie des admirateurs et des journalistes l'épouvante. Une telle épreuve le pousse "à envisager de mourir avant la date de cette réception", mais il n'est "pas si facile de mourir". "Les marées du passé" Pour l'aider à affronter les honneurs et la célébrité, Mme Ambrunaz leur organise un séjour au Touquet cependant qu'il se laisse emporter par "les marées du passé", soit les vies de ses soeurs et de son frère. L'une, Alice, a vécu un an chez lui, obsédée de nettoyage ; l'autre, Louise, disparue depuis quarante ans, avait quitté son fiancé le jour de leurs fiançailles pour parcourir le monde avec un évêque sans diocèse mais "remarquable surfeur" ; quant à Victor, le frère, écrivain à succès et introverti, il suit la mode qui veut "des gros livres avec des thèmes forts". Une après-midi, au Touquet, tandis qu'il se prépare à être honoré, Mme Ambrunaz et son savant se regardent. Soudain, il constate qu'elle a "définitivement cessé de (le) voir". Sur l'enterrement de la préparatrice de lentilles, il achève le récit qu'il se faisait à lui-même. Si ce récit ne fait pas un "gros livre", ses thèmes, "forts", sont traités avec la finesse d'un humour qui ne les réduit en rien. Avec des saynètes légères de fond et de forme, et où se retrouve la nouvelliste, Véronique Bizot a cet art rare de n'avoir point besoin de grandiloquence pour dire les grands événements qui ponctuent une existence. Son héros et sa "dame aux lentilles" nous dévoilent les faces cachées de vies où nous pouvons apercevoir, ici et là, un peu de toutes les vies. Rarement le désespoir a été décrit avec une telle jubilation. Il faut se méfier du mot chef-d'oeuvre, mais il y a de cela dans ce premier roman qui amorce une carrière d'écrivain aux dons multiples. MON COURONNEMENT de Véronique Bizot. Actes Sud, 108 p., 13 €. Pierre-Robert Leclercq
07/01/2010
livres
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"""Le Londres-Louxor"", de Jakuta Alikavazovic : beauté de l'incertitude"
Dans les ombres du "Londres-Louxor", la lauréate du Prix Goncourt du premier roman en 2008 pour le beau "Corps volatils", en état de grâce à la frontière du visible et de l'invisible.
On connaît pourtant les théâtres d'ombres et les lanternes magiques. En littérature, les personnages sont des êtres de papier et de pensée. Au cinéma, de lumière et d'ombre. L'illusion est sans illusion, rien ne saurait nous surprendre - à l'exception du second roman de Jakuta Alikavazovic, long poème romanesque aux formes et aux couleurs indécises, et pourtant précises. On le lit comme on joue à ne pas attraper la fumée qui se dérobe à notre main tendue. Au beau milieu d'une colonie de spectres, en équilibre sur le fil frontière du visible et de l'invisible. Un cinéma, deux soeurs. L'une est introuvable, l'autre travaille à paraître. On pense à un film d'Alfred Hitchcock, ce qui tombe bien : dès la première scène, la cadette, Esme, surgit, teinte en blonde, silencieuse et raide. Plus tard, la référence est confirmée : "Elle ressemblait aux hitchcockiennes à mi-parcours (quand la panique commence à les gagner)." Prête-nom d'un écrivain d'âge mûr, la "jeune fille spectrale" est à la recherche de sa soeur aînée, Ariana, disparue sans laisser de traces. Jakuta Alikavazovic, née en 1979, Prix Goncourt du premier roman en 2008 pour le beau Corps volatils (L'Olivier, 2007), prend le prétexte de l'intrigue la plus simple - une femme disparaît - pour un texte libéré, subtil, aux émotions raffinées. Deux personnages complètent le carré romanesque : l'amant d'Esme, l'horripilant Anton (un critique littéraire), et un cinéma qui ne projette plus de films, le Londres-Louxor, centre de gravité et scène de crime. Devenu le quartier général de la diaspora bosniaque de Paris, dont les deux soeurs font partie, le Londres-Louxor est un bâtiment classique du renouveau égyptien fin XIXe, début XXe. Le premier plan du livre en est d'ailleurs le commentaire historique et architectural, voire mythologique, mélange à doses égales de réel et d'imaginaire, à l'image du livre à venir. Un programme, en quelque sorte. Comme un avertissement, mais de même nature que ceux que l'on trouve à l'entrée des tombeaux et des nécropoles. Car l'une des grandes beautés de ce livre tient à son incertitude. Celle de ses personnages qui naviguent à vue, en deux dimensions, sans réelle consistance, points de passage et de confusion entre le visible et l'invisible. L'intime est au coeur du texte mais à la façon d'une scène, d'un espace. Ce n'est pas un roman psychologique, ou alors sans psychologie, et ses personnages ne sont que des ombres projetées sur la surface lisse d'une langue a priori impeccable. Dans un cinéma, rien de bien surprenant finalement, mais, quand même, il faut un sacré talent pour faire croire à la danse de ces ombres-là. On pourrait douter de l'histoire sentimentale entre le faux écrivain et le critique, mais, comme dans Corps volatils, la naïveté des évidences et des apparences n'existe que pour dire au lecteur que l'essentiel est ailleurs. Un procédé de cinéma, en l'occurrence, un lieu commun qui contribue à l'équilibre miraculeux du roman. On se méfie des apparences au Londres-Louxor (les enfants de la guerre apprennent vite la dissimulation), on se méfiera également des pseudo-lieux communs du roman. C'est dans la vitalité des détails, les mouvements infimes de la langue, que s'affirme la seule vraie évidence du livre : le talent de Jakuta Alikavazovic. Toucher un fantôme Progressivement prisonnier d'un charme qui l'étrangle comme un lierre, lentement, au fil des pages, le lecteur reste pourtant toujours à la surface du texte, comme en apesanteur. Le personnage principal du Londres-Louxor en est en grande partie responsable. Glissant sans bruit dans le labyrinthe d'un cinéma déserté qui est celui de la mémoire, elle ressemble de plus en plus à une femme de pellicule descendue de l'écran, immatérielle, fascinante. Les espaces qu'Esme traverse lui permettent de voyager dans un temps intime et collectif. De remonter jusqu'à la guerre des Balkans, jusqu'au siège de Sarajevo - dont le livre répète qu'il est "le plus long de l'Europe moderne". En réalité, il est sans fin, prolongé ici et maintenant, dans un lieu oublié, dans une autre ville, dans la mémoire commune et les rumeurs. Le style égyptien a son importance car il est artificiel, fabriqué, copié, à l'antique. La rumeur est dans la pierre. A la fin du livre, on ne sait plus du tout distinguer le réel de l'irréel et, plus important encore, le tangible de l'intangible. A tout prendre, il ne reste que le texte lui-même, momie patiemment emmaillotée d'un changement et d'une errance, à l'égyptienne. La disparition inaugurale d'Ariana ressemble de plus en plus à une évasion. A fréquenter les vieux enfants de la diaspora bosniaque (ils se rajeunissent pour ne pas être les témoins de la guerre), à feuilleter les faux livres d'Esme et le quotidien fantaisiste et vain de sa relation avec Anton, on saisit peu à peu le sentiment d'une urgence, un désir. La main se referme sur une poignée de fumée, on vient de toucher un fantôme. Architecture de lumière Authentique palais des vents, le Londres-Louxor (autant le roman que la salle) n'est qu'une façade. Ce qui se passe à l'intérieur n'a rien à voir. Mais certainement parce qu'elle est si belle (si bien écrite, en l'occurrence), l'illusion ne se défend pas d'en être une. Au contraire. En mettant à nu son architecture de lumière, comme en transparence, elle prend le lecteur par la main, le guide vers une autre vérité, immatérielle et littéraire. Valery Larbaud (auquel il est fait référence de manière sibylline) faisait de même. Chose rare et précieuse, pour une fois, la comparaison stylistique n'est pas trop lourde à porter. Surtout, il ne s'agit pas d'un ersatz larbaldien de plus, sans saveur, confondant le coeur et le vêtement. Les origines littéraires de Jakuta Alikavazovic sont ailleurs, certainement en partie de l'autre côté de l'Atlantique. Sa langue en revanche est surchargée de références et de modèles français. On la croirait complice, légère, ironique, elle est tout le contraire - heureusement. Elle n'est pas qu'une langue, elle est un livre, elle est Le Londres-Louxor. LE LONDRES-LOUXOR de Jakuta Alikavazovic. L'Olivier, 191 p., 16,50 €. Nils C. Ahl
07/01/2010
livres
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Un logiciel pour traquer les plagiaires
S'attachant à la "modélisation du style", il devrait être bien plus efficace que les outils actuels, qui se bornent à établir des calculs de similitudes destinés à piéger notamment les élèves et étudiants adeptes du "copié-collé".
Que les plagiaires prennent garde, leurs jours pourraient être comptés. A l'initiative d'Hélène Maurel-Indart, professeur de littérature et auteur de Plagiats, les coulisses de l'écriture (La Différence), un programme de recherches visant à créer un logiciel redoutable vient d'être lancé à l'université de Tours, sous les auspices du CNRS. S'attachant à la "modélisation du style", il devrait être bien plus efficace que les outils actuels, qui se bornent à établir des calculs de similitudes destinés à piéger notamment les élèves et étudiants adeptes du "copié-collé". Dans le domaine littéraire, l'emprunt peut revêtir de multiples formes, ainsi que l'explique Hélène Maurel-Indart. "Dans le cas de plagiat élaboré où il y a un travail de démarquage et de transformation pour masquer la source, les logiciels comme Pl@giarism sont inefficaces car ils ont une approche quantitative et non qualitative. En outre, ils peuvent conduire à des erreurs, notamment face aux pastiches." D'où l'idée de cette spécialiste du plagiat littéraire de partir des logiciels de lexicométrie déjà existants, tels Hyperbase, Lexico ou Alceste, pour adapter un nouveau programme informatique opérant non seulement sur le vocabulaire ou les mots employés mais sur la nature même du style. Aidée par Frédéric Calas, stylisticien, et par Nathalie Garric, linguiste, Hélène Maurel-Indart a ouvert en mai 2009 la première phase de recherches - sans doute la plus longue et la plus délicate - visant à établir les critères stylistiques. "Pour l'heure, précise-t-elle, nous réfléchissons à l'élaboration d'un référentiel textuel qui permettra d'établir les caractéristiques les plus discriminantes pour identifier les marqueurs stylistiques. Dans une seconde phase, nous travaillerons avec les informaticiens pour codifier ces marqueurs, avant d'entrer dans une dernière phase, celle de l'expérimentation." On imagine aisément les possibilités que pourrait offrir un tel logiciel au monde judiciaire. "Aujourd'hui, explique Emmanuel Pierrat, avocat spécialisé dans les affaires de plagiat, pour convaincre un juge, il nous faut établir un tableau comparatif portant sur les reprises d'expressions ou de composition. Il est long, fastidieux et pas toujours aisé de trouver et de corréler les différents points de contact. Un tel logiciel faciliterait grandement notre travail." Quant aux chercheurs, cet outil leur permettrait de résoudre quelques mystères sur l'authentification ou l'attribution de certains textes. On pense notamment à La Princesse de Clèves, de Madame de La Fayette, derrière laquelle certains voient la main de La Rochefoucauld. Ou à l'affaire Corneille-Molière, qui divise le monde universitaire. "Si le programme de numérisation des bibliothèques est mené à bien et si ce logiciel y est relié, estime Emmanuel Pierrat, on pourrait avoir des surprises et l'histoire littéraire pourrait en être changée !" A toutes les époques, des écrivains se sont inspirés, parfois sans en avoir conscience, d'oeuvres de leurs prédécesseurs. Qui nous dit que dans le panthéon des lettres ne se cachent quelques habiles plagiaires ? Christine Rousseau
07/01/2010
livres
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2010, année numérique : un enjeu capital pour l'édition et la librairie
En France, l'équipement en liseuses et la structuration de la distribution des livres numériques restent très timides.
L'année 2010 marquera-t-elle un décollage du numérique pour le secteur du livre ? Beaucoup d'indices le laissent penser, mais qu'en est-il dans la réalité ? La vente de livres sous forme de fichiers numériques a atteint 3 % du marché en 2009 aux Etats-Unis, contre 0,5 % en 2008. D'une année sur l'autre, le rythme de progression apparaît comme important (une multiplication par 6). Reste que 97 % du marché du livre américain demeure encore physique, les ventes d'ouvrages se faisant en hardback (grand format) ou en paperback (poche). Le 25 décembre, jour de Noël, Amazon a aussi annoncé avoir "vendu" aux Etats-Unis plus de livres numériques que de livres papier. Mais comme d'habitude, le cyberlibraire n'a donné aucun chiffre. Et, surtout, il mêle livres vendus et livres téléchargés gratuitement. Sur le continent américain, la bataille du livre électronique se double d'une guerre des prix. Amazon pratique le dumping et utilise le livre comme produit d'appel pour mieux commercialiser le Kindle, sa liseuse électronique. La firme a choisi de vendre tous ses fichiers de livres au prix unique de 9,99 dollars. Face à cette concurrence, la chaîne de distribution Wal-Mart a réagi en proposant à 5 dollars des nouveautés en hardback (soit 4 fois moins cher que le prix courant). Dans ces conditions, "la progression nette et continue du livre numérique aux Etats-Unis est-elle due à une appétence forte pour les usages numériques ou bien à l'attrait du prix à 9,99 dollars, voire à moins ?", s'interroge Arnaud Nourry, PDG d'Hachette Livre. Pour lutter contre cette dérive et sauver le modèle économique de la création littéraire, plusieurs éditeurs américains, dont Hachette, ont décidé de geler l'envoi des fichiers numériques de livres neufs à Amazon et d'imposer un décalage de six mois entre les versions papier et électronique. Ce qui a été fait, notamment, pour True Compass, les Mémoires de Ted Kennedy. Qu'en est-il en France ? La vente de livres sous forme de fichiers numériques se situe entre 0,1 % et 0,2 % du chiffre d'affaires des éditeurs en 2009. La raison en est simple : la proportion des fonds des éditeurs à la fois numérisés et accessibles en ligne est extrêmement faible. En France, pour que le livre numérique s'impose auprès du grand public, il faut que l'équipement en liseuses s'élargisse et que la distribution des livres numériques se structure. Mais pour le moment, c'est l'impasse sur ces deux points. La distribution de livres numériques butte sur les difficultés de création d'une plate-forme commune. Pour le moment, chacun des grands groupes - Hachette, Editis et enfin Gallimard associé avec Le Seuil et Flammarion - a lancé la sienne. D'autres plate-formes ont été inaugurées : L'Harmattan, Polinum. Les éditeurs français feraient bien toutefois de s'inspirer de Libreka, la plate-forme commune des éditeurs allemands dont le succès a permis une forte progression des ventes de livres numériques outre-Rhin. Le deuxième obstacle est l'échec de la vente de liseuses. Malgré la multiplication du nombre d'appareils, aucun n'a percé. Lancé en novembre 2009 en France, le Kindle d'Amazon ne propose aucun livre neuf en français. Quant au Sony Reader ou au Cybook, leurs ventes s'établissent à environ 20 000 exemplaires chacun. Ces appareils sont utilisés soit par les passionnés de nouvelles technologies, soit par des professionnels de l'édition. Mais cet échec n'est pas celui de la lecture en ligne. Au contraire. Les Français lisent de plus en plus de livres sur les écrans de leurs ordinateurs, mais aussi sur leurs téléphones portables. Le succès de sites comme ceux du Routard, de Larousse, mais aussi des sites consacrés aux bandes dessinées et aux mangas le prouve. Tout comme les ventes record de l'iPhone d'Apple en France (6 millions sur 17 millions dans le monde). C'est d'ailleurs sur des formats courts destinés aux iPhone que se sont créées des petites maisons d'édition numériques comme Leezam ou Smartnovel. Aujourd'hui, comme le résume Alain Kouck, PDG d'Editis, "il n'y a pas de réalité économique du numérique, mais c'est un phénomène mondial et c'est le potentiel de demain". Un des vrais changements pour le livre est qu'avec Internet les libraires ne sont plus un intermédiaire obligé entre les lecteurs et les livres. Dans ces conditions, l'enjeu principal concerne l'avenir de la librairie en France : si, demain, 5 % du chiffre d'affaires de l'édition se fait dans le numérique, il faut que les libraires soient associés aux bénéfices de la vente en ligne. Alain Beuve-Méry
07/01/2010
livres
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"""Romance nerveuse"", de Camille Laurens : les vérités à risque de Camille Laurens"
Un roman plein de fièvre, né de la rupture avec son éditeur.
A la fin de l'été 2007, en pleine rentrée littéraire, l'affaire avait secoué la petite planète des lettres parisiennes : Camille Laurens, auteur en vue des éditions POL, accusait Marie Darrieussecq, autre auteur à succès, elle aussi publiée chez POL, d'un crime encore non répertorié par le code de la propriété intellectuelle : le "plagiat psychique". Qu'est-ce qu'un "plagiat psychique" ? Notion troublante, explosive et surtout fragile comme le cristal. En l'occurrence, la première reprochait à la seconde un certain nombre de ressemblances, d'ordre à la fois stylistiques et surtout psychologiques, entre leurs deux livres (Philippe, pour Camille Laurens, et Tom est mort, pour Marie Darrieussecq) consacrés à la mort d'un bébé. Et aussi, en filigrane, le fait d'avoir composé sur ce thème à la première personne, sans avoir elle-même vécu ce drame. Peut-on écrire sur ce que l'on n'a jamais éprouvé personnellement ? Pas du point de vue de Camille Laurens - pas dans ce cas-là. "Parfois, le sens n'advient que du vécu", soutient-elle encore dans son dernier roman, Romance nerveuse. Depuis ses débuts, la romancière a brouillé les frontières entre la vie et la fiction. Ce qu'elle écrit part de ce qu'elle a éprouvé, dans un savant mouvement de restitution-transformation. Opération subtile, recouverte par le terme d'"autofiction" : le matériau brut de l'expérience est passé au feu de la littérature, dans une réaction chimique à la fois dangereuse (à l'échelle personnelle) et hautement "ratable" sur le plan littéraire. On peut être en désaccord avec cette conception des choses, qui réduit dramatiquement le champ de la littérature, mais il faut avouer que cette posture a la grandeur un peu trouble des manoeuvres à risques. S'il va au bout de sa logique, l'écrivain met sa vie dans la balance. Plutôt que d'avancer sous le couvert d'une existence d'emprunt, il cherche la "vérité" sur le terrain de l'intime. Il s'expose et, ce faisant, force les autres, ses personnages au premier chef mais aussi ses lecteurs, à s'exposer avec lui. Impossible de répertorier le nombre d'oeuvres médiocres élaborées entre les murs de cette école, notamment en France, patrie incontestée de l'autofiction. Il arrive pourtant que l'entreprise réussisse, et de manière spectaculaire, quand le risque n'est pas seulement d'ordre factuel (l'aspect reality show, plus ou moins glauque), mais littéraire. C'est sans doute ce qui fait du dernier roman de Camille Laurens un livre fort et stimulant, particulièrement réussi : "Laurence R., alias Camille L.", sa narratrice ne se contente pas de dévoiler un épisode de son existence - au demeurant peu reluisant. Elle se met en danger dans son maniement de la langue, dans l'usage d'une forme de vulgarité dynamique et dans la structure même de son récit. Partant de sa rupture professionnelle avec Paul Otchakovsky-Laurens, patron des éditions POL (la similitude des noms est une pure coïncidence), elle raconte une liaison pseudo-amoureuse avec un paparazzi terrifiant. Relation tordue, absurde et pourtant féconde : à travers elle, l'auteur réfléchit aux mécanismes de la création, à ses implications et à ce qu'est, finalement, la vérité d'un écrivain. Etrange créature, ce Luc, paparazzi à la petite semaine, "franco-russo-polonais, ex-taulard, interdit de séjour aux Etats-Unis" - infiniment plus romanesque que bien des personnages de pure fiction. Pressé, gourmand, avide même, oublieux, grossier jusqu'à l'outrage, infantile, vaniteux, voyeur, animé d'un mouvement perpétuel et perpétuellement vain, menteur comme un arracheur de dents, fuyant - désespéré, complètement, existentiellement désespéré. Un "personnage ultracontemporain", commente Camille Laurens. "Partout, chacun veut son quart d'heure de célébrité. Le paparazzi est l'emblème de ce phénomène, un pur produit de notre société." Ce qui tombe à pic : Camille Laurens est, elle-même, un écrivain à l'affût de l'ultracontemporain. Tout ce qui vit, frémit, bouge ou germe sous ses yeux, tout ce qui fait de son temps une époque, la sienne, est un matériau digne d'intérêt. La preuve : Nicolas Sarkozy revient souvent comme symptôme dans ce roman. Ravagée par la rupture avec son éditeur "historique" et consumée de douleur par l'affaire de plagiat dont elle dit être la victime, la narratrice s'avance à petits pas, mais sans presque jamais reculer, dans cette relation bancale, où le plus retors des deux n'est pas forcément celui que l'on croit. Luc, bien sûr, a contre lui son comportement, ses délits de fuite, sa manière de toujours sourire au plus offrant, de raconter tout et son contraire, de ne jamais être là pour de bon, en tout cas pas plus d'une seconde. Mais elle, Camille L. ? N'a-t-elle pas flairé en lui, depuis le début, "le personnage" ? N'est-elle pas un écrivain, c'est-à-dire, comme le lui lance Luc à la figure, "quelqu'un qui sacrifie les gens à lui-même" ? Et ne voit-elle pas dans son amant "à la fois l'artiste et l'oeuvre" ? "Regard aimant" Interrogée sur ces questions, Camille Laurens répond par une phrase de Mallarmé : "Le monde est fait pour aboutir à un beau livre." Mais au sujet de l'accusation proférée par Luc, elle se défend : "Je laisse toujours à mes personnages leur dignité et leur complexité, mon regard est aimant et, en tout cas je le crois, respectueux : chaque mot est pesé. Si sacrifice il y a, c'est celui d'une existence confortable au profit d'un travail continuel." Au-delà des questions morales (respect du sujet, dignité), le choix des mots fait effectivement toute la différence. Non seulement Camille Laurens ne se départ jamais d'une certaine tendresse pour son personnage, quels que soient ses défauts, mais elle parvient, par la forme de son récit, à entrer dans son humanité d'une manière extrêmement troublante. Quand il s'agit de Luc, le texte devient pressé, glouton, saisi par une fièvre qui correspond exactement à l'individu, même lorsqu'il est proféré par la narratrice. L'écrivain prend le risque de la vulgarité, non seulement dans certaines expressions, mais dans des tournures, un "air du temps" stylistique à la mode, savamment relâché, suffisamment libre et inventif pour être à la fois parfaitement crédible et extrêmement dynamique. Ailleurs, c'est la raison qui prend le relais, sous les traits de Ruel, "mon sosie, mon double social, ma marionnette pour la galerie", écrit Camille Laurens. Ruel, c'est l'agrégée de lettres (ce qu'est aussi l'auteur), celle qui sait faire des conférences et tenir sa place dans des débats, celle qui voit, décortique, analyse, psychanalyse ou se moque - et condamne, à l'occasion. La grande force du livre tient à la manière dont Camille Laurens fait cohabiter ces deux mondes, celui de l'écrivain et celui de son personnage. Luc est à la fois sujet et objet, se rapprochant et s'éloignant au fil d'un texte qui, lui, ne faiblit pas, même quand les situations franchissent les bornes du crédible. Est-ce "vrai" ? S'agit-il de ce que Luc appelle avec gourmandise la "vraie vie", celle qui excite les papilles et les pupilles des voyeurs qui sommeillent en nous ? Aucune importance. Une chose est sûre : vrai ou pas vrai, ce texte fait surgir, de façon vibrante, ce que la littérature peut atteindre, parfois - la vérité. ROMANCE NERVEUSE de Camille Laurens. Gallimard, 218 p., 16,90 €. En librairie le 14 janvier. Raphaëlle Rérolle
07/01/2010
livres
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"""Rapport de police"", de Marie Darrieussecq : Marie Darrieussecq publie un essai pour défendre son ""honneur d'écrivain"""
Une analyse érudite et contestable du plagiat et des rapports entre auteurs.
Face à l'adversité, Marie Darrieussecq a changé son fusil d'épaule. Elle s'est déplacée du terrain sur lequel elle est attaquée (le roman) vers celui de ses compétences de base : la recherche universitaire et le savoir psychanalytique. C'est donc par un essai qu'elle a décidé de répondre aux accusations de plagiat dont elle est l'objet depuis plusieurs années : en 1998, à la sortie de son livre Naissance des fantômes, quand Marie NDiaye lui a reproché de s'être largement inspirée de deux de ses propres romans, Un temps de saison et La Sorcière (Minuit, 1994 et 1996). Puis en 2007, à la parution de Tom est mort (POL), taxé de "plagiat psychique" par Camille Laurens. Un essai très personnel, certes, entièrement conduit par un "je" qui commente, donne son avis, émet des thèses, mais un essai quand même, pour "réfléchir calmement en réservant l'émotionnel et l'imaginaire à mes romans". Ce qu'elle voulait, dit-elle quand on l'interroge, c'est "comprendre pourquoi cela fait si mal et à quoi cela sert dans le champ littéraire". Très perturbée par ces attaques, elle a, dit-elle, "passé deux ans à écrire ce livre, au lieu de me consacrer au roman que j'ai en tête. Le plagiat en lui-même ne m'intéresse pas, mais il en allait de mon honneur d'écrivain". Derrière l'accusation de plagiat, soutient Marie Darrieussecq, se cache toujours le crime de "plagiomnie" : "le désir fou d'être plagié", mais aussi d'éliminer "l'autre", le concurrent. Partant de son expérience, l'écrivain recense les cas historiques d'accusation de plagiat. Zola, Freud, Celan, Mandelstam, la liste est longue de ceux qui connurent un jour (ou une grande partie de leur vie, dans le cas de Celan) les affres engendrées par ce soupçon. Se trouvant "en très bonne compagnie", la romancière analyse avec beaucoup de minutie les cas des uns et des autres, quitte à pratiquer une forme d'amalgame assez gênante, quand elle observe la manière dont le plagiat peut servir d'arme à ceux qui veulent abattre les créateurs, dans le contexte d'une dictature. Le fait de suggérer, même implicitement, que, dans d'autres contextes, l'accusation pourrait avoir des conséquences aussi dramatiques que la prison ou la mort est un acte grave. L'aspect le plus intéressant de ce livre érudit concerne finalement moins la question du plagiat que la réflexion de l'auteur sur la création et le rapport des écrivains à leurs pairs. "Le plagiat recoupe tous les lieux de la psychanalyse, observe Marie Darrieussecq : le transfert, l'oedipe, le double, l'inquiétante étrangeté, la projection paranoïaque, la "machine à influencer", les voix du psychotique, la télépathie, le rapport à l'écrit et à la transmission, le duo don-dette, la plainte et la faute, la culpabilité et l'inhibition, l'aveu et le désaveu, la mémoire et le langage..." A partir de là, on comprend bien la complexité de l'acte créatif lui-même : le style, cette singularité d'ordre presque biologique, comme le disait Barthes, l'origine des idées, l'originalité. "Tous les livres de Barthes et de Genette n'expliqueront pas pourquoi ça écrit, note Marie Darrieussecq, pourquoi cette main écrit ainsi. Cette main au bout de ce corps-là, surgit ce jour-là, dans ce monde-là, dans cette histoire et sous ce ciel-là." Et avec cette douleur-là, bien souvent. RAPPORT DE POLICE de Marie Darrieussecq. POL, 324 p., 19,50 €. Raphaëlle Rérolle
07/01/2010
livres
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Drame passionnel autour d'un éditeur
Plus de deux ans après la querelle qui a opposé Camille Laurens et Marie Darrieussecq, la colère reste vive, y compris pour celui qui les a publiées.
C'est un drame à trois personnages, dont l'épicentre se trouve au fond d'une cour, dans le 6e arrondissement parisien - un long couloir et quelques bureaux tapissés de livres, à l'enseigne discrète des éditions POL. L'une de ces catastrophes sans mort et sans hémoglobine qui peuvent causer des blessures profondes, douloureuses, infiniment longues à cicatriser. Et, même quand la peau retrouve son aspect normal, même quand la vie reprend son cours, la chair conserve une sensibilité particulière, à l'endroit où elle a été meurtrie. Deux ans et demi après leur querelle, les trois protagonistes de "l'affaire POL" n'en parlent pas sans un léger tremblement de la voix : Marie Darrieussecq, dans le rôle de la (supposée) plagiaire, Camille Laurens, dans celui de la victime, et Paul Otchakovsky-Laurens dans la position centrale (et très inconfortable) de l'éditeur poussé à choisir entre deux auteurs. Preuve concrète que les braises ne sont pas devenues cendres, la parution simultanée de deux ouvrages directement nés du drame : l'essai consacré au plagiat par Marie Darrieussecq et le roman de Camille Laurens, qui part de sa rupture avec un éditeur auquel elle était très attachée. Dans le livre, il s'appelle Georges et occupe une place centrale pour la narratrice, "Laurence R., alias Camille L." : il était son éditeur depuis dix-sept ans, quand l'affaire a éclaté. Exactement comme dans la "vraie vie" : un jour, en 2007, Camille Laurens a découvert que Marie Darrieussecq, autre auteur POL, s'apprêtait à publier un texte à la première personne sur la mort d'un bébé, exactement comme elle-même l'avait fait dans Philippe, quelques années auparavant. Sauf qu'elle, Camille Laurens, avait vraiment connu cette tragédie avant d'en faire un livre, paru sous la couverture blanche et légèrement gaufrée de POL en 1995. Personne ne l'a prévenue, ou alors trop tard et "avec embarras", soutient-elle. Elle s'émeut, puis s'emporte. En août 2007, elle donne un texte à La Revue littéraire de Léo Scheer, pour dénoncer le "plagiat psychique" dont se serait rendue coupable Marie Darrieussecq. Une colère en déclenche une autre : Paul Otchakovsky-Laurens, qui a vainement tenté de la dissuader, prend aussitôt la plume pour publier, dans Le Monde du 31 août, une tribune intitulée : "Non, Marie Darrieussecq n'a pas "piraté" Camille Laurens". L'article se termine comme une porte qui claque : "Et nous continuerons tous notre travail. Sans Camille Laurens, que je ne souhaite ni ne puis évidemment plus publier." La manière dont Camille Laurens évoque cette rupture, dans Romance nerveuse, montre bien l'aspect passionnel de cette affaire. "Pendant plus d'un an après la rupture avec mon éditeur, affirme la narratrice, je n'ai pas écrit - pas une ligne, je ne pouvais pas. Je m'installais à ma table, je jetais des mots, je balançais des phrases qui faisaient un bruit de sac-poubelle, ça tombait dans le vide, ça basculait dans l'oreille d'un sourd, écrit vain. Plus d'adresse, je n'avais plus d'adresse, plus personne à qui raconter l'histoire, personne qui joue le jeu, je n'habitais plus la langue puisque je n'avais plus de maison, je ne faisais plus partie de la maison." On se frotte les yeux. Quoi, l'écriture dépendrait à ce point d'une seule structure ? D'une seule personne ? "La relation auteur-éditeur n'est pas une relation professionnelle comme les autres, explique Camille Laurens, parce qu'un livre n'est pas un objet de consommation ordinaire : y sont engagés l'être et le sens." Installée dans un café parisien, la romancière évoque cette aventure "qui dépasse l'histoire éditoriale classique". Tous ses livres, jusqu'à cet été 2007, étaient sortis chez Paul Otchakovsky-Laurens, qui l'avait, dit-elle, encouragée à faire paraître Philippe. Parlant du lien de confiance "indestructible" qu'elle croyait entretenir avec "Paul", elle insiste sur le fait que "POL est une petite maison, où tout est fait pour donner l'illusion d'une famille". Pas du tout, proteste Paul Otchakovsky-Laurens, qui affirme n'avoir "jamais conçu cette maison comme une famille". C'est à la Brasserie Balzar, rue des Ecoles, à Paris. L'éditeur revient sans plaisir sur cette affaire, mais sans se dérober non plus. "POL est une petite maison non cloisonnée, où chacun remplit ses fonctions sans intermédiaire et où une seule personne s'occupe de la création des auteurs, moi." Selon lui, il y a eu "quelque chose d'insolent dans les débuts de Marie Darrieussecq, qui a beaucoup excité les jalousies". Jeune normalienne, cette romancière avait connu un succès spectaculaire avec Truismes (POL, 1996), son premier roman, vendu à près d'un million d'exemplaires. Interrogée, elle reconnaît d'ailleurs que tout le monde ne "s'est occupé que d'elle pendant un an et demi", ce qui a pu en froisser certains. "Moi-même je serais agacée si une petite jeunette débarquait maintenant et accaparait Paul !" Cet épisode l'a "épuisée", dit-elle. "Paul a eu le cran de se séparer de Camille Laurens. Je ne sais pas comment j'aurais tenu psychologiquement sans cela." Et lui, Paul Otchakovsky-Laurens ? Lui, le patron charismatique de cette maison convoitée, où "tellement d'écrivains voudraient être publiés", comme l'observe à juste titre Marie Darrieussecq ? Ceux qu'il publie ont en commun de "mettre leur création avant toute chose et, plus qu'ailleurs, de donner ce qu'ils ont de plus précieux, observe-t-il. Camille Laurens s'est sentie spoliée de ce qu'elle avait vécu". Rétrospectivement, il considère toujours que le texte paru dans La Revue Littéraire était "d'une violence inouïe". L'accusation de plagiat "constitue une tentative de meurtre pas si symbolique : c'est la négation de l'autre comme écrivain". Si les circonstances se représentaient, dit-il, "je réécrirais le même papier". Ce qu'il ne supporte pas, c'est que les auteurs de sa maison puissent s'insulter entre eux. Ils "ont le droit d'avoir des réticences, mais pas de dire des méchancetés, et ils le savent", affirme-t-il, avant d'ajouter : "Je ne me suis pas révolté sur un plan théorique, mais humain." Pour un homme qui se met "très rarement en colère", l'épisode a été extrêmement pénible. "Normalement, je choisis des textes, pas des personnes, mais, là, je l'ai fait, même si je regrette que Camille Laurens ne publie plus chez nous. C'est une perte énorme." Tout est question de passion, dans sa conception du métier : "Je ne publie que ce que j'aime vraiment, affirme-t-il. Les écrivains le savent et ont un sentiment d'élection. Je ne choisis que des auteurs dont je ne peux pas me dire : "Il est mieux ou moins bien qu'untel." Ça m'est impossible. POL est une maison où on prête autant d'attention à celui qui vend 200 exemplaires que 200 000." C'est aussi une maison à fleur de peau, qui brasse plus de "je" que les autres : les écrivains d'autofiction y sont nombreux et la matière, forcément, très inflammable. Ce qui "pose des problèmes nouveaux", reconnaît Paul Otchakovsky-Laurens : tout est plus douloureux quand il s'agit de votre propre vie. Tout est aussi plus fusionnel - un peu comme dans ces familles nombreuses, où chacun rêve, en secret, d'être l'enfant unique, le préféré, le plus proche du père... Raphaëlle Rérolle
07/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/07/drame-passionnel-autour-d-un-editeur_1288453_3260.html
Attentat contre le gouverneur intérimaire de la province de Khost
Cet attentat intervient plus d'une semaine après l'attentat-suicide sur une base de la CIA à Khost qui a tué huit agents travaillant pour la CIA.
tentat à l'intérieur de sa résidence, a annoncé le chef de la police de la province. "Le gouverneur par intérim, son chef de cabinet, le chef des services scolaires et cinq autres personnes dont des policiers ont été blessés dans l'explosion", a précisé le général Mohammed Nawab devant la presse. Cet attentat intervient plus d'une semaine après l'attentat-suicide sur une base de la CIA à Khost qui a tué huit agents travaillant pour la CIA. Al-Qaida a revendiqué la responsabilité de cet attentat qui, a-t-elle dit, visait à venger la mort de leurs chefs. "Il a déclenché sa ceinture d'explosifs, cachée des regards de ceux qui ne croient pas à l'au-delà, lors d'une réunion d'hommes des renseignements américain et jordanien", selon le chef d'Al-Qaida en Afghanistan, Mustafa Abu al-Yazid, cité par le centre américain de surveillance des sites islamistes SITE. Le kamikaze avait indiqué dans son testament que l'attentat-suicide vengeait les "martyrs", citant une série de combattants talibans tués dans des frappes de missiles lancés par des drones américains.
07/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/07/attentat-contre-le-gouverneur-interimaire-de-la-province-de-khost_1288430_3216.html
Philippe Séguin, porteur de l'héritage gaulliste
Philippe séguin a entamé en 1978 une carrière politique qui le conduira successivement au ministère des affaires sociales et de l'emploi, à la présidence de l'Assemblée nationale et à la présidence du RPR.
C'est aux élections législatives de 1978, en se faisant élire député des Vosges, que Philippe Séguin entame une carrière politique qui le conduira successivement au ministère des affaires sociales et de l'emploi (1986-1988), à la présidence de l'Assemblée nationale (1993-1997) et à la présidence du RPR (1997-1999). Le "non" à Maastricht Mais c'est en 1992, lors de la campagne pour le référendum sur le traité de Maastricht, que la carrière politique de Philippe Séguin bascule. Revendiquant l'héritage gaulliste et estimant que ce traité porte atteinte à l'indépendance de la France, Philippe Séguin prend la tête du "non". Lors d'une émission organisée début septembre 1992 à la Sorbonne par TF1, il s'oppose au président de la République, François Mitterrand, partisan du "oui". Dans son ouvrage Itinéraire dans la France d'en bas et d'en haut (éditions du Seuil, 2003), Philippe Séguin relate cet épisode. "Une personne m'avait annoncé que le président serait hospitalisé au lendemain même de l'émission pour une opération lourde. (…) Outre que je n'avais aucunement l'intention de ferrailler et de polémiquer avec un homme malade, dont je pressentais l'effort qu'il consentait déjà pour être simplement là, je me disais qu'une fois l'hospitalisation confirmée, qu'une fois le cancer confirmé à la face du monde, qu'une fois l'émotion à son comble, toute méconduite de ma part serait d'autant plus sévèrement jugée", écrit-il. Le débat eut lieu et Philippe Séguin raconte qu'au lendemain de ce "face-à-face [il eut] droit à la plus extraordinaire volée de bois vert [qu'il ait] jamais reçue…". Le oui et le non étaient "au coude au coude", explique-il, et "toute la presse était pro-maastrichienne. (…) Il ne pouvait être question pour elle d'affirmer que j'avais été convaincant". De ce jour, les relations entre les deux hommes "prirent un tour nouveau", assure M. Séguin. "Nous nous sommes vus régulièrement, en particulier après mon élection au perchoir, et je crois que nous tenions également à ces rencontres." La campagne présidentielle de 1995 En 1995, Philippe Séguin prit une part active à la campagne présidentielle de Jacques Chirac. Il fut alors l'un des principaux inspirateurs du thème de la "fracture sociale" qui permit à l'ancien maire de Paris de triompher de son duel face à son rival Edouard Balladur et de décrocher son premier mandat de président de la République. Elu en 1997 à la présidence du RPR en remplacement d'Alain Juppé, Philippe Séguin démissionnera spectaculairement de cette fonction en avril 1999. L'échec aux municipales à Paris en 2001 Après une période de recul, Philippe Séguin revient sur le devant de la scène politique à l'occasion des élections municipales de 2001. Désigné tête de liste du RPR à Paris, il présente sa candidature dans le XVIIIe arrondissement en quatrième position de la liste conduite par Roxane Decorte. Avant de se raviser et d'en prendre la tête. A l'issue d'une bataille fratricide contre le maire sortant Jean Tiberi (RPR dissident), Philippe Séguin échoue face à M. Delanoë. En 2002, au lendemain de la deuxième élection de Jacques Chirac à l'Elysée, Philippe Séguin refuse d'intégrer l'UMP que le président de la République vient de créer. Il abandonne alors son ultime mandat de conseiller de Paris et quitte définitivement la vie politique. Yves Bordenave
07/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/07/philippe-seguin-porteur-de-l-heritage-gaulliste_1288509_823448.html
Jean-François Copé va proposer une loi interdisant le port du voile intégral dans les lieux publics
Il va proposer une résolution parlementaire et la proposition de loi cosignées par ses collègues UMP François Baroin et Nicole Ameline qui seront discutées au lendemain des régionales.
Le président du groupe UMP à l'Assemblée, Jean-François Copé, va dévoiler le contenu d'une proposition de loi interdisant le port du voile intégral dans les "lieux ouverts au public" sous peine de lourdes sanctions financières. Il compte déposer "dans les quinze jours" à la fois la résolution parlementaire et la proposition de loi cosignées par ses collègues UMP François Baroin et Nicole Ameline ainsi que "tous les députés qui le souhaiteront", "afin qu'elles soient discutées au lendemain des élections régionales" prévues les 14 et 21 mars, précise-t-il au Figaro Magazine qui sera publié samedi 9 janvier. Cette proposition vise à "interdire de dissimuler son visage dans les lieux ouverts au public et sur la voie publique, sauf quelques exceptions du type événements culturels ou carnavals dont on déterminera la liste", précise M. Copé. Selon lui, la proposition de loi va prévoir "un temps de dialogue de six mois entre la date d'application de la loi et la date de promulgation pour permettre une phase de discussion et de médiation avec les personnes concernées". Il a précisé par la suite que le débat n'aura pas lieu "avant les régionales". Le thème n'est pas encore à l'ordre du jour à l'Assemblée nationale. Selon l'ordre du jour, deux semaines sont dévolues, d'ici le 14 mars, premier tour des régionales, aux groupes politiques. Plusieurs propositions de loi UMP sont inscrites en janvier, notamment un texte sur la parité homme/femme dans les conseils d'administration. Une nouvelle semaine d'initiative parlementaire est prévue dès le lendemain du 2e tour des régionales, du 22 au 28 mars. Deux autres sont inscrites à l'ordre du jour de l'Assemblée, en mai et juin. UNE CONTRAVENTION DE 750 EUROS Le texte défendu par Jean-François Copé prévoit que "le port de la burqa serait passible d'une contravention, probablement de 4e classe, c'est-à-dire de 750 euros". Cette contravention, selon le député de Seine-et-Marne, serait appliquée "à toute personne sur la voie publique dont on constaterait que le visage serait intégralement masqué". La proposition de loi prévoit également une "contravention aggravée pour une personne qui obligerait une femme à porter un voile intégral", précise M. Copé à l'hebdomadaire. Invité de l'émission "Les questions du mercredi" sur France Inter, il a réaffirmé mercredi que le port du voile intégral soulevait une double question, "le respect des femmes" et "la sécurité". "Par rapport à cela nous faisons une résolution, un texte de principe (non contraignant) dans lequel nous réaffirmons les valeurs de la République par rapport à la protection et au respect des femmes". Pour la question de sécurité, a-t-il ajouté, "il faut une loi d'interdiction".
07/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/07/jean-francois-cope-va-proposer-une-loi-interdisant-le-port-du-voile-integral-dans-les-lieux-publics_1288411_823448.html
La colère des Palestiniens de Gaza contre l'Egypte
Des heurts ont eu lieu sur la frontière où les Egyptiens ont engagé des travaux pour bloquer les tunnels qui permettent d'atténuer les effets du blocus israélien.
Les soldats égyptiens casqués et arme à la main sont nerveux. Une douzaine d'entre eux sont postés à faible distance de la ligne de démarcation avec Gaza. Le terminal de Rafah a été ouvert lundi, mais, ce mercredi 6 janvier, le maigre trafic des passagers, que l'Egypte autorise en général une fois par mois, est interrompu. La tension qui ne cesse de monter entre le gouvernement du Mouvement de la résistance islamique (Hamas), qui contrôle Gaza, et l'Egypte, depuis que Le Caire a entrepris de construire une barrière métallique souterraine pour endiguer le flot de marchandises acheminées par les tunnels de contrebande, vient de dégénérer. Un échange de tirs entre gardes-frontières égyptiens et policiers du Hamas a fait un mort et une demi-douzaine de blessés côté égyptien, et une quinzaine de blessés côté palestinien. CORDON OMBILICAL L'incident s'est produit à un peu plus d'un kilomètre de là, à la porte Salahuddin, le long du "couloir de Philadelphie" qui marque la frontière entre les deux territoires. Des manifestants palestiniens s'étaient rassemblés pour protester contre la construction de la barrière égyptienne. Les slogans hurlés par les adolescents palestiniens se sont accompagnés de jets de pierres, auxquels ont répondu des tirs de semonce, et puis tout s'est embrasé. Les gardes-frontières égyptiens avaient été rendus nerveux par la perspective de l'arrivée imminente d'un convoi humanitaire international à destination de Gaza, bloqué dans le port égyptien d'Al-Arich mercredi soir. Chez les Gazaouis, l'incompréhension le dispute à une sourde appréhension devant l'avenir : l'"économie des tunnels" est le cordon ombilical de la bande de Gaza. A Rafah, Ghazi Hamad, responsable de tous les points de passage officiels reliant Gaza à Israël et l'Egypte, se désole : "Nous espérons que nos frères égyptiens vont renoncer, insiste-t-il, qu'ils vont se souvenir que nous sommes comme eux des Arabes et des musulmans et qu'ils doivent nous aider, parce que la relation entre nos deux territoires est stratégique." Dans la ville de Gaza, Ahmad Youssef, conseiller politique du premier ministre du Hamas, Ismaïl Haniyeh, ne décolère pas : "Pourquoi les Egyptiens apportent-ils leur concours aux efforts des Israéliens pour nous étrangler ? Dans tout le monde arabe, on nous soutient, sauf en Egypte. J'espère que les Egyptiens vont comprendre que cette attitude nuit à leur image." M. Youssef remarque que "les gens" en concluent que Le Caire cède aux pressions des Etats-Unis et d'Israël. L'EGYPTE INQUIÈTE DE L'INFLUENCE DU HAMAS Cette vox populi sonne juste : l'administration américaine a manifestement décidé de rappeler à l'Egypte qu'en échange de son aide annuelle de quelque 1,7 milliard de dollars, elle attend du Caire une attitude plus ferme contre la contrebande d'armes, laquelle emprunte aussi le réseau des tunnels. L'Egypte se fait d'autant moins prier qu'elle s'inquiète depuis longtemps de l'influence du Hamas. Le régime du président égyptien Hosni Moubarak a, d'autre part, été ulcéré par l'attitude du mouvement, qui, contrairement au Fatah de Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne, a refusé de signer un plan de réconciliation interpalestinien négocié par l'Egypte. Omar Shaban, qui dirige à Gaza le centre d'analyses Pal Think, n'a aucun doute : il y a bien, selon lui, une coordination entre Israël, l'Egypte et les Etats-Unis contre le Hamas : "L'Egypte n'avait pas besoin de construire un tel mur, au risque de précipiter une nouvelle catastrophe humanitaire à Gaza, pour adresser un message politique au Hamas. Si elle le fait, c'est parce que tout cela fait partie d'un plan plus vaste." Pour compenser à terme cet étranglement de la frontière, Israël, assure-t-il, va relâcher l'étreinte du blocus, dans le cadre d'un accord avec le Hamas sur la libération du soldat israélien Gilad Shalit. Cette perspective reste incertaine. La réalité, les adolescents de Rafah l'observent en grimpant sur les monticules de terre qui bordent la frontière: la "machine de guerre" égyptienne, cette gigantesque foreuse qui creuse la terre pour y enfouir des panneaux d'acier de 18 mètres de hauteur, poursuit son travail de sape contre les tunnels de Gaza. Laurent Zecchini et Laurent Zecchini
07/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/07/la-colere-des-palestiniens-de-gaza-contre-l-egypte_1288408_3218.html
En Guinée, la junte militaire jette les bases d'une transition démocratique du pouvoir aux civils
Le général Konaté, président par intérim, propose de créer un gouvernement d'union nationale.
Se dirige-t-on vers une sortie de crise en Guinée, un an après le coup d'Etat qui porta au pouvoir une junte militaire au bilan calamiteux ? Le discours prononcé, mercredi 7 janvier, par le président intérimaire, Sékouba Konaté, le laisse espérer. Ce général, surnommé "El Tigre", a en effet tendu la main à l'opposition et ouvert la voie au retour à un pouvoir civil dans le pays. La Guinée attendait que ce général d'un naturel taiseux sorte du mutisme dans lequel il se tenait depuis sa nomination, au lendemain de la tentative d'assassinat du chef de la junte. Le capitaine Moussa Dadis Camara a été grièvement blessé par balles, le 3 décembre. Il est, depuis, hospitalisé au Maroc. "Nous décidons du choix d'un premier ministre issu de l'opposition, désigné par elle-même et qui engagera avec l'ensemble des couches sociales et politiques du pays des discussions et consultations pour la mise en place d'un gouvernement de transition d'union nationale", a déclaré le général Konaté. "Il faut poser dès maintenant des actes allant dans le sens de l'apaisement", a-t-il ajouté. "Le temps et les modalités pour y arriver, la composition de cette nouvelle équipe basée sur l'unité dans la diversité incombe désormais à toutes les parties concernées, que j'invite à tout faire pour ne pas imposer au pays une attente longue et interminable", a-t-il insisté. "Le pays ne peut continuer à attendre et souffrir davantage. La communauté internationale nous presse de hâter le pas et attend de notre part des progrès significatifs", a-t-il poursuivi. C'est en effet le message que de hauts diplomates français et américains lui avaient transmis avec insistance, lundi, à Rabat en marge de la visite rendue par le général Konaté à Dadis Camara. Ce message avait également été délivré à Blaise Compaoré, le président du Burkina-Faso, médiateur africain dans la crise guinéenne. Depuis la capitale rwandaise, Kigali, où il a entamé, mercredi, une tournée africaine, le ministre français des affaires étrangères, Bernard Kouchner, a, quant à lui, salué "une très bonne surprise". Le ministre craignait, en effet, que la crise, en se prolongeant, ne débouche sur "une guerre civile". Le 28 septembre 2009, une manifestation pacifique de l'opposition protestant contre l'intention de Dadis Camara de se présenter à la présidentielle avait été réprimée dans le sang. Au moins 156 opposants avaient été tués par les "bérets rouges" de la garde présidentielle. Des dizaines de femmes avaient subi des violences sexuelles. Une enquête, menée avec une rapidité inhabituelle par l'ONU, a recommandé à la Cour pénale international (CPI) l'inculpation, pour crimes contre l'humanité, du capitaine Dadis et de trois autres officiers. "Le rapport d'enquête devrait être prochainement transmis par le secrétaire général de l'ONU au procureur général de la CPI, sans passer par le Conseil de sécurité", explique un diplomate français. Ce processus judiciaire place le capitaine Dadis hors du jeu politique guinéen, quel que soit son état de santé réel. Dans l'opposition, Oury Bah, numéro deux de l'UFDG, a salué les annonces faites par M. Konaté. "L'important n'est pas le choix de la personne pour le poste de premier ministre. Ce qui est fondamental, c'est le mandat, les pouvoirs et les responsabilités du nouveau premier ministre", a dit Oury Bah. Christophe Châtelot
07/01/2010
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/01/07/en-guinee-la-junte-militaire-jette-les-bases-d-une-transition-democratique-du-pouvoir-aux-civils_1288434_3212.html
Un parcours en politique
Philippe Séguin s'était retiré de la vie politique après son échec aux élections municipales de Paris en 2001.
L'ancien ministre avait alors été confronté à la candidature "dissidente" du maire sortant, Jean Tiberi, et finalement devancé par le socialiste Bertrand Delanoë. Ancien ministre des affaires sociales et de l'emploi (1986-1988), il a présidé l'Assemblée nationale (1993-1997) et le RPR (1997-1999) après avoir été l'un des inspirateurs de la campagne présidentielle de Jacques Chirac en 1995. Il avait ensuite pris ses distances avec le chef de l'Etat. En 2002, Philippe Séguin avait renoncé à se représenter aux législatives, puis abandonné son siège au Conseil de Paris. La même année, il avait réintégré la Cour des comptes, où il avait été auditeur dès 1970 à sa sortie de l'Ecole nationale d'administration, puis avait été nommé délégué du gouvernement français au conseil d'administration du Bureau international du travail à Genève. Né le 21 avril 1943 à Tunis, Philippe Séguin est promu conseiller référendaire en 1977. Il est notamment chargé de mission au secrétariat général de l'Elysée (1973-1974) sous Georges Pompidou, puis au cabinet du premier ministre Raymond Barre (1977-1978). Député des Vosges durant vingt-quatre ans à partir de 1978, il devient maire d'Epinal en 1983. Mais en 1997, il abandonne son mandat de maire pour se consacrer à la présidence du RPR, où il succède à Alain Juppé après la défaite de la droite aux élections législatives anticipées. Le 16 avril 1999, Philippe Séguin démissionne avec fracas de la présidence du mouvement gaulliste, en raison d'"un désaccord politique profond" avec le président Chirac sur la place du RPR en période de cohabitation. Il renonce simultanément à conduire la liste RPR-DL aux élections européennes. Déjà en 1990, il s'était opposé à M. Chirac, s'alliant alors à Charles Pasqua, pour dénoncer une certaine "dérive" du RPR et appeler à "un nouveau rassemblement". Deux ans plus tard, Philippe Séguin avait gagné une stature nationale, en prenant la tête de la campagne contre le traité de Maastricht. En 2007, il est nommé président du comité des commissaires aux comptes de l'ONU puis de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) et, en 2008, commissaire aux comptes de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). En 2008, il devient président de la commission "Grands Stades Euro 2016". Il est l'auteur notamment d'Itinéraire dans la France d'en bas, d'en haut et d'ailleurs (2003).
07/01/2010
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2010/01/07/un-parcours-en-politique_1288432_3382.html
Eric Besson annonce qu'il y a eu 29 000 expulsions en 2009
Le chiffre qui avait été assigné au ministre de l'immigration dans sa lettre de mission par Nicolas Sarkozy était de 27 000.
Le ministre de l'immigration, Eric Besson, a annoncé jeudi, sur Europe 1, que 29 000 étrangers en situation irrégulière avaient été expulsés en 2009 alors que le chiffre qui lui avait été assigné dans sa lettre de mission par Nicolas Sarkozy était de 27 000. Il a précisé que douze Afghans seulement avaient été expulsés alors que les Britanniques ont "reconduit mille Afghans". 250 Afghans ont par ailleurs bénéficié de l'asile politique en France, a ajouté Eric Besson. Le ministre de l'immigration a aussi dit que 108 000 étrangers avaient été naturalisés et 175 000 sont "entrés régulièrement en France avec un visa long séjour".
07/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/07/eric-besson-annonce-qu-il-y-a-eu-29-000-expulsions-en-2009_1288407_823448.html
"La classe politique française salue un ""grand serviteur de l'Etat"""
Les hommages se multiplient à l'annonce de la mort du premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin.
Le président de la République, Nicolas Sarkozy, salue dans un communiqué un homme "passionné surtout par la France, sa République et son Etat, il a consacré toute sa vie, toute l'étendue de ses talents et la force exceptionnelle de ses convictions à la chose publique", "l'une des grandes figures et l'une des grandes voix de notre vie nationale. Elles nous manqueront" (en lire plus). François Fillon souligne que "la France perd l'un de ses plus grands serviteurs et l'une de ses plus belles voix politiques".Le président de la Cour des comptes fut une figure tutélaire pour François Fillon lorsqu'il s'engagea en politique dans les années 1970. Le premier ministre avait notamment combattu aux côtés de Philippe Séguin dans la campagne contre le référendum du traité de Maastricht en 1992. Il faisait partie de sa garde rapprochée lorsque celui-ci présidait le RPR, entre 1997 et 1999 (en lire plus). L'ancien président de la République Jacques Chirac et son épouse Bernadette ont salué la mémoire de Philippe Séguin, en rendant hommage à "l'homme d'honneur", et à "un homme d'Etat d'une exceptionnelle intelligence". "Mon épouse, Bernadette, et moi avons appris avec une infinie tristesse la brutale disparition de Philippe Séguin", écrit M. Chirac dans un communiqué. "La France perd aujourd'hui un homme d'honneur, un homme d'Etat d'une exceptionnelle intelligence." "Philippe Séguin aura consacré sa vie au service de la France et à l'intérêt général", dit-il. "Avec lui, les mots de république, de nation et d'Etat prenaient tout leur sens." "Je perds, pour ma part, un ami pour lequel j'avais un grand respect et une profonde affection", conclut M. Chirac Philippe Séguin, présenté comme l'un des piliers du gaullisme social, "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a salué le porte-parole adjoint de l'UMP Dominique Paillé, sur LCI. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a-t-il souligné. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat" et "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a déclaré sur RTL l'ancien ministre de l'intérieur Charles Pasqua, sénateur UMP des Hauts-de-Seine, qui était très proche de Philippe Séguin. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a-t-il dit saluant sa personnalité "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat". "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat" "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a déclaré l'ancien premier ministre Jean-Pierre Raffarin, sur Radio Classique. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a-t-il ajouté. Le président du Sénat, Gérard Larcher, a salué un "compagnon gaulliste avec lequel il partageait nombre de valeurs". M. Larcher rappelle dans un communiqué leur parcours au sein du RPR, leur "fibre sociale", leur "conception de l'Europe qui les ont unis dans un même courant de pensée". "Il avait donné à la Cour des comptes une dimension inédite. Son exigence et son indépendance, qualités unanimement reconnues, faisaient de lui une personnalité respectée". "Sa fougue et sa passion vont nous manquer. Avec lui, disparaît un grand serviteur de l'Etat, un républicain imprégné de valeurs de résistance et de respect", conclut le président de la Haute Assemblée. Le ministre de l'immigration, Eric Besson, a insisté sur Europe 1 sur "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat" qu'avait Philippe Séguin. Le président de l'Assemblée nationale, Bernard Accoyer, s'est dit "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat" et "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", à l'annonce du décès de Philippe Séguin. Réagissant sur Europe 1, M. Accoyer a fait part de "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat". "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a-t-il ajouté. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a déclaré sur France Info l'ancien premier ministre Alain Juppé, disant sa "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat" à l'annonce de cette mort "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat"."avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a salué sur i-Télé Jean-Louis Debré, président du Conseil constitutionnel. La mort de Philippe Séguin "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a déclaré le porte-parole de l'UMP, Frédéric Lefebvre, saluant "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat"."avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a déclaré de son côté à quelques journalistes le secrétaire d'Etat aux affaires européennes, Pierre Lellouche. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a réagi l'ancien premier ministre socialiste Lionel Jospin sur France Inter, en apprenant la mort de Philippe Séguin. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a-t-il ajouté. Martine Aubry, première secrétaire du PS, a estimé qu'avec Philippe Séguin "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", et un "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat" dont "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat". "Je suis très triste d'apprendre ce décès brutal d'un homme jeune et qui est une personnalité très attachante. Nous avons la Tunisie en commun, le foot", a souligné sur RTL le maire de Paris, Bertrand Delanoë. "J'ai aimé faire de la politique avec lui sans avoir les mêmes convictions que lui. Je veux garder de lui une trace très positive parce que c'est un homme qui a une personnalité importante, une envergure et qui a une vraie sensibilité même si je crois que c'était un timide." Pour la présidente PS de Poitou-Charente, Ségolène Royal, Philippe Séguin "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat". Le président du Mouvement démocrate (MoDem), François Bayrou, a salué en Philippe Séguin "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat" qui "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat"."avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a déclaré M. Bayrou. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a-t-il ajouté. "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", a souligné le leader centriste.Jean-Pierre Chevènement, président du Mouvement républicain et citoyen (MRC), a salué en Philippe Séguin un "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", un "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat", tout en regrettant que "avait des amitiés et surtout des convictions, c'était un grand serviteur de l'Etat".
07/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/07/la-classe-politique-francaise-salue-un-grand-serviteur-de-l-etat_1288406_823448.html
Patrick Vieira annonce son départ pour Manchester City
Le Français souhaite gagner en temps de jeu pour retrouver sa place en équipe de France avant le Mondial.
Le Français Patrick Vieira a confirmé jeudi 7 janvier dans une interview à Infosport, chaîne sportive de Canal+, son départ pour Manchester City, départ retardé par les conditions météo et la neige qui l'ont empêché de rejoindre dès jeudi l'Angleterre. "L'important pour moi est d'aller à Manchester City, de montrer à l'entraîneur [Roberto Mancini] que je suis le même qu'à l'époque où il était à l'Inter". "J'avais envie d'aller à la Coupe du monde [en Afrique du Sud], et j'ai besoin de temps de jeu", explique le milieu de terrain pour justifier sa décision de quitter l'Inter de Milan, où il était depuis trois ans et demi. "J'ai des objectifs et je ne peux pas les atteindre en restant à l'Inter où je ne fais pas partie des choix de l'entraîneur [José Mourinho]". L'ex-idole d'Arsenal, 33 ans, n'est plus appelé en équipe de France par le sélectionneur Raymond Domenech faute de jouer régulièrement en club. Cette saison, il a pris part à douze rencontres en championnat (7 titularisations, 1 but marqué) et deux en Ligue des champions (aucune titularisation), pour un total de 702 minutes de jeu (soit 50 minutes par match en moyenne). Vieira quitte l'Inter sur une victoire acquise mercredi contre Chievo (1-0) lors de la 18e journée du Championnat d'Italie. Pour l'instant, Manchester City n'a pas confirmé officiellement l'arrivée du joueur.
07/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/07/patrick-vieira-annonce-son-depart-pour-manchester-city_1288404_3242.html
Auchan va ouvrir un hypermarché à prix cassés près de Mulhouse
Cet hypermarché, baptisé "Priba", sera le plus grand magasin hard discount de France. Il proposera entre 28 000 et 30 000 références, au lieu de 700 à 1 100 dans les enseignes concurrentes.
Le distributeur Auchan va ouvrir, fin mars près de Mulhouse, le premier hypermarché à prix cassés de France, rapporte le Figaro. "Nous allons tester un nouveau format de distribution discount inédit en France, à la fois alimentaire et non alimentaire", a déclaré au quotidien un porte-parole du groupe de distribution, confirmant une information parue sur le site leblogmulliez.com. Cet hypermarché, baptisé "Priba", sera le plus grand magasin hard discount de France. Il proposera entre 28 000 et 30 000 références, alors que les distributeurs discount actuels comme Aldi ou Lidl en comptent seulement 700 à 1 100. Le magasin sera entièrement en libre-service et proposera aussi un espace "self-discount" où les clients pourront s'acheter du sucre ou de la farine en vrac, en choisissant eux-mêmes les quantités dont ils ont besoin. Cependant, contrairement aux "hard discounters" traditionnels, Priba proposera aussi un très large assortiment d'articles de grande marque.
07/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/07/auchan-va-ouvrir-un-hypermarche-a-prix-casses-pres-de-mulhouse_1288402_3234.html
Interdiction du port de la burqa : Bayrou en faveur d'une résolution parlementaire
"Ce n'est pas la loi qui est la réponse. La bonne réponse, c'est la réaffirmation sereine, calme, par tout le monde que notre pays c'est le pays des visages dévoilés, que c'est notre manière de vivre ensemble", a souligné jeudi le président du MoDem.
François Bayrou a prôné jeudi l'adoption d'une résolution parlementaire et non d'une loi pour interdire le port du voile islamique intégral. "Je suis assez proche de ce que pense Nicolas Sarkozy, de ce qu'on dit qu'en pense Nicolas Sarkozy, de l'idée qu'il faut une résolution du Parlement", a déclaré le président du MoDem sur France 2. "Ce n'est pas la loi qui est la réponse. La bonne réponse, c'est la réaffirmation sereine, calme, par tout le monde que notre pays c'est le pays des visages dévoilés, que c'est notre manière de vivre ensemble", a-t-il souligné. Selon lui, une loi "présente un risque d'interprétation, de déstabilisation d'un certain nombre de choses". Le Parti socialiste s'est prononcé mercredi contre une loi sur la burqa. L'UMP doit faire connaître sa position vendredi, à la demande de la mission parlementaire sur le voile intégral qui doit rendre ses conclusions à la fin du mois. Prenant de court le gouvernement, le président du groupe UMP à l'Assemblée, Jean-François Copé, a annoncé le dépôt d'une proposition de loi pour la mi-janvier.
07/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/07/interdiction-du-port-de-la-burqa-bayrou-en-faveur-d-une-resolution-parlementaire_1288401_3224.html
Mehdi Baala médaillé de bronze plus d'un an après les JO de Pékin
Arrivé 4e du 1500 m à Pékin, il profite du déclassement du Bahreni Rachid Ramzi, testé positif à l'EPO-Cera huit mois après la course.
Les médailles à retardement, après révision des classements suite à des cas avérés de dopage, sont de nos jours de plus en plus courantes. C'est ainsi que, mercredi 6 janvier, le Strasbourgeois Mehdi Baala a reçu une médaille de bronze pour sa performance sur 1 500 m aux JO de Pékin... le 19 août 2008. Arrivé 4e ce jour-là sur la ligne d'arrivée, il profite du déclassement du Bahreni Rachid Ramzi arrivé en tête de la course, mais testé positif huit mois plus tard à l'EPO-Cera. "Je n'ai jamais été ému à ce point", a dit Baala, après avoir reçu sa médaille des mains de Guy Drut, membre du Comité international olympique. "J'ai loupé les 85 000 personnes et le podium à Pékin, mais, quelque part, ce n'est pas plus mal. J'ai gagné des certitudes. (...) Ne pas avoir eu ma médaille à Pékin m'a permis de continuer". Double champion d'Europe, médaillé d'argent aux Mondiaux de Paris en 2003 et donc de bronze aux JO, Mehdi Baala fait désormais partie du club très fermé des athlètes français médaillés dans tous les grands championnats, où seuls se trouvent aussi Marie-José Perec et le perchiste Jean Galfione. "LES GARS SE DÉCOURAGENT" "Mon premier objectif maintenant est de conserver mon titre de champion d'Europe, ça ferait trois et cela n'est jamais arrivé. L'autre, c'est [les JO de] Londres. (...) Je ferai tout pour être à Londres [en 2012], pour aller chercher une médaille et monter enfin sur le podium". De Ramzi, Baala a dit : "J'espère que personne n'aura plus l'occasion de le voir sur une piste. (...) On savait tous qu'il était le plus fort, maintenant on sait pourquoi. (...) Le dopage tue le sport. Beaucoup de gens arrêtent le sport car les gars se découragent en se disant que tout le monde est chargé."
07/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/07/mehdi-baala-medaille-de-bronze-plus-d-un-apres-le-jo-de-pekin_1288398_3242.html
Philippe Séguin, grande figure politique de la Ve République
Le premier président de la Cour des comptes, Philippe Séguin, figure marquante de la vie politique, solitaire et excessif, est mort dans la nuit du 6 au 7 janvier, à Paris, à l'âge de 66 ans, d'une crise cardiaque.
Philippe Séguin, premier président de la Cour des comptes, est mort dans la nuit de mercredi à jeudi à l'âge de 66 ans. M. Séguin est décédé à son domicile à Paris, dans le 15e arrondissement, d'une crise cardiaque. Ses obsèques auront lieu lundi 11 janvier, dans un lieu encore indéterminé, a-t-on appris auprès de la Cour des comptes. Excessif, Philippe Séguin l'était en tout : dans la passion politique, dans la colère, dans le rire, dans le nombre de kilos qu'il perdait et regagnait, dans celui des cigarettes qu'il fumait. Solitaire, aussi. Quarante-cinq ans de vie politique en ont fait un homme respecté, parfois craint, mais profondément seul. D'une carrière qui lui a fait traverser les honneurs ministériels, la présidence de l'Assemblée nationale, celle de la Cour des comptes, il est resté jusqu'au bout l'enfant né à Tunis en 1943, pupille de la nation après que son père, soldat, eut été fauché par la guerre en septembre 1944. Cette histoire personnelle dominera toute la vision politique d'un homme profondément attaché à cette République qui l'avait pris sous son aile. Elle fera aussi de lui un éternel orphelin, qui toujours cherchera un père politique. Dans cette quête personnelle s'est nouée toute la difficulté de ses relations tumultueuses avec Jacques Chirac, le père toujours insuffisant, et Alain Juppé, le frère trop préféré. CARRIÈRE BRILLANTE ET PLEINE D'ÉCLIPSES Avec Nicolas Sarkozy, les relations seront paradoxalement plus faciles. L'actuel président de la République a dressé de lui, en 2001, dans son livre, Libre, l'un des portraits les plus justes de Philippe Séguin : "Il est ainsi fait que seuls les contrastes semblent lui convenir. (…) Son tempérament peut le faire passer du plus odieux au plus charmant. Du plus exaspérant au plus amical. Du plus brillant au plus obscur aussi.(…)" Ce caractère est la clé d'une carrière politique à la fois brillante et pleine d'éclipses. Enarque, il est repéré le 30 mai 1968 au matin, lorsque, avec trois autres condisciples, il vient frapper à la porte de Roger Frey, ministre d'Etat chargé des relations avec le Parlement, pour lui demander ce qu'ils peuvent faire pour le général de Gaulle. Son rang de sortie ne lui permet pas de choisir le Conseil d'Etat, où il aurait rejoint son camarade de promotion Jacques Attali. Alors, va pour la Cour des comptes. En mars 1973, il entre comme chargé de mission au secrétariat général de la présidence de la République dans l'Elysée de Georges Pompidou. C'est dans cette période qu'il rencontre Edouard Balladur et Jacques Chirac, d'une dizaine d'années ses aînés. Il poursuit sa carrière dans les cabinets ministériels, mais la politique le tente. En 1978, il espère une circonscription législative dans le Var, mais à lui, le Méditerranéen, on ne propose que les Vosges. "On ne se bousculait pas pour y aller, j'y suis allé", racontait-il. Il la conservera toujours à la droite. Notamment trois ans plus tard, en 1981, où Philippe Séguin compte parmi les rares rescapés de la droite parlementaire face au raz-de-marée de la gauche. CHAMPION DE L'OPPOSITION Là commence sa première vraie période politique. Avec une poignée de quadras, servi par une connaissance redoutable du Parlement, de ses dossiers, et par un immense talent d'orateur, il contre-attaque, amende, freine, déboussole quelquefois l'armée parlementaire socialiste. Il se dressera parfois même presque seul face à elle, comme dans le débat sur la décentralisation. La reconnaissance arrive enfin en 1986, lorsque Jacques Chirac, devenu premier ministre de cohabitation, le nomme ministre des affaires sociales. Il se soucie de peaufiner son image sociale et de rassurer les syndicats. Ses colères font trembler ses collègues du gouvernement. Mais lui, le gaulliste de gauche, fait voter la suppression de l'autorisation administrative de licenciement. La réélection de François Mitterrand en 1988 menace de le rejeter dans l'ombre. Convaincu que Jacques Chirac n'est plus le bon candidat de la droite et qu'il est le seul à pouvoir renouer avec le gaullisme social et populaire, Philippe Séguin s'impose avec Charles Pasqua comme le champion de l'opposition. Après un mémorable discours à la tribune de l'Assemblée nationale contre la ratification du traité de Maastricht en 1992, il est choisi par François Mitterrand comme contradicteur lors du seul grand débat télévisé de la campagne, à la Sorbonne, le 3 septembre. Face à un président malade, le grand orateur retient ses coups. Le divorce avec Jacques Chirac aurait dû être consommé. Mais le maire de Paris va se découvrir un adversaire autrement plus dangereux : Edouard Balladur. Pour Séguin aussi, le nouveau premier ministre de la cohabitation est tout ce qu'il exècre en politique: "Balladur existe puisqu'il se trompe à chaque fois qu'il prend une décision", lâche-t-il. Du haut de la présidence de l'Assemblée nationale, où il a été élu en 1993, c'est lui qui va redonner publiquement de l'oxygène à un Jacques Chirac en perdition en accusant Edouard Balladur de préparer un "Munich social". La phrase fait florès. Jacques Chirac comprend qu'il a besoin de Séguin. "ASSOURDISSANT SILENCE" Les relations entre les deux hommes, pourtant, restent tendues. Philippe Séguin ne lui pardonnera jamais la blessure d'amour-propre que Jacques Chirac lui inflige devant les jeunes du RPR à Strasbourg, alors qu'il invitait le candidat pour la première à "montrer et à ouvrir la route". En réponse, Chirac avait rendu un hommage appuyé à… Alain Juppé, "probablement le meilleur d'entre nous". Mais "l'homme qui sait faire monter les sondages de 20 points", comme on appelle alors Séguin au RPR, va s'engager tout de même corps et âme aux côtés de Jacques Chirac pour la campagne présidentielle de 1995. C'est sans doute l'une des plus belles périodes politiques de sa vie. Il va de ville en ville, porte le thème de la fracture sociale et croit qu'il a enfin éclipsé Alain Juppé. Mais, le 7 mai 1995, lorsque Jacques Chirac compose son gouvernement, c'est son rival, si cérébral quand lui n'est que sentimentalité, si mince quand il est obèse, si discipliné quand il est épicurien, qui devient premier ministre. Rongé d'amertume, il rejoint son bureau de l'hôtel de Lassay et s'enferme dans un "assourdissant silence", selon sa formule. PHOTOS DE CHIRAC Deux ans plus tard, le 21 avril 1997, le jour de ses 54 ans, Jacques Chirac annonce la dissolution de l'Assemblée nationale. Philippe Séguin y était opposé et le lui avait dit. Mais il va tout de même voir dans cette campagne une nouvelle occasion de se rendre indispensable. Le charme, cette fois, n'opère pas. Il est trop tard. La gauche triomphe. En 1999, il doit conduire la campagne des élections européennes, mais lâche l'affaire aux dernier moment, obligeant Nicolas Sarkozy à prendre au débotté la tête de liste RPR. Curieusement datera de là leur amitié. Philippe Séguin ratera aussi la campagne pour les municipales à Paris en 2001 et ne retrouvera vraiment un rôle à sa mesure qu'à la Cour des comptes, où Jacques Chirac le nomme en 2004. Dans son bureau, Philippe Séguin avait gardé les photos de Chirac. Service France
07/01/2010
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2010/01/07/philippe-seguin-est-mort_1288395_3382.html
"Lionel Jospin critique la ""désinvolture"" de Nicolas Sarkozy"
Dans un entretien au "Monde", en janvier, l'ex-premier ministre socialiste estime que "l'obsession de l'effet d'annonce et la prise de décision sans débat font négliger l'expertise et le sérieux dans la préparation des textes".
Un film qui sera diffusé sur France 2 les 14 et 21 janvier, un livre, Lionel raconte Jospin (Seuil, 288 p., 18,50 euros) : l'ancien premier ministre fait son grand retour. Ce n'est pas la première fois. Depuis l'annonce de son retrait de la vie politique, Lionel Jospin reste en réalité un acteur politique très présent. Son but est moins d'exorciser le choc du 21 avril 2002 qui, selon nombre de socialistes, n'est toujours pas surmonté, que de réhabiliter le bilan de la gauche, et singulièrement de son gouvernement pendant la période 1997-2002 au moment où la dépression économique née de la crise des subprimes réhabilite l'intervention de l'Etat. Quelles joies, quels regrets tirez-vous de votre parcours politique ? Quand je regarde en arrière, c'est le plaisir qui domine, parfois, la fierté, jamais l'amertume. Je sais que j'ai mêlé ma vie à une grande aventure collective : celle de la renaissance en France du courant socialiste et du rassemblement de la gauche. Or, dans ce mouvement, je me suis personnellement accompli et j'ai servi mon pays. Des regrets ? Quelques-uns, bien sûr, et parmi eux, le 21 avril 2002 ; car nous savons tous qu'avec un peu moins de légèreté et d'imprudence à gauche, le sort de l'élection pouvait être tout autre. On sait aujourd'hui que vous avez hésité un long mois avant de vous présenter. Oui, à cause des divisions de la gauche. Je me suis interrogé avec François Hollande : "Dois-je y aller dans ces conditions ?" Vous admettez "votre responsabilité entière" dans la défaite de 2002. Etait-ce la défaite d'un homme ou d'un camp ? J'ai pris cette responsabilité, moi qui partais, pour en dégager les autres et donner toutes leurs chances à mes successeurs socialistes. Mais je n'ai pas été la cause première de la défaite. A l'évidence, si la gauche était partie groupée, il n'y aurait pas eu d'éviction au premier tour et la victoire était ensuite possible. La leçon d'hier vaut pour aujourd'hui. Vous avez annoncé votre retrait de la vie politique le soir du 21 avril 2002 mais, depuis, vous faites de fréquentes réapparitions. Quelle place vous réservez-vous dans la vie politique ? Je ne me réserve aucune place. Mais s'il existe un paysage politique, peut-être suis-je une butte témoin, un témoin engagé. Et parfois plus que cela. En 2007, vous avez bien failli revenir. J'ai vu qu'il y avait un problème de leadership pour conduire la campagne présidentielle. Un certain nombre d'amis ont souhaité que je revienne dans le jeu. Je me suis donc interrogé. François Hollande, le premier secrétaire, ne s'est pas déterminé. Il y a eu la candidature de Ségolène Royal. J'ai alors évoqué avec Dominique Strauss-Kahn et Laurent Fabius l'hypothèse de ma candidature, mais ils m'ont proposé de concourir tous les trois. Je ne les ai pas suivis. Vous souhaitez que votre livre soit "utile à tous ceux qui, à gauche, veulent retrouver le chemin du pouvoir". De quelle façon peut-il l'être ? C'est un récit personnel, mais c'est aussi une histoire des socialistes et de la gauche sur un demi-siècle, écrite de l'intérieur par un de ses acteurs. Or nous avons besoin de connaître et de nous approprier notre histoire. Ce récit donne des analyses, souligne le rôle des hommes, éclaire des moments-clés qui montrent peut-être ce qui pour la gauche permet la victoire ou entraîne la défaite. Si ce livre comporte des enseignements, notamment l'importance de l'unité, c'est aux responsables actuels de les tirer. Pourquoi François Mitterrand est-il le seul socialiste à avoir gagné une présidentielle sous la Ve République ? Sans doute en raison de son exceptionnel talent. Mais après lui, la victoire a été deux fois possible. L'unité a fait défaut en 2002 et la crédibilité en 2007. Vous insistez sur le sens du collectif et la notion de transmission. Est-ce parce que ces liens se sont distendus que le second septennat Mitterrand a été beaucoup moins réussi que le premier ? Cela a pu jouer. Aussi, quand je vois la désinvolture avec laquelle le président Sarkozy traite son gouvernement et sa majorité, son obstination à se mettre seul constamment en scène, je me dis que la deuxième partie de son quinquennat peut être difficile. Vous avez pratiqué "le droit d'inventaire" à l'égard de François Mitterrand. Quel est votre jugement aujourd'hui ? Je lui dois quelques-unes des plus belles années de ma vie, un enseignement politique, la direction du PS, une formation à l'exercice du pouvoir. En retour, je lui ai donné beaucoup de moi-même. Aujourd'hui, je ne le juge pas. Je le raconte. Je reviens sur des années de grande intimité politique. Gouverner, est-ce forcément décevoir ? Si on croyait à la fatalité de la déception, on se laisserait pénétrer par la mélancolie, ce qui n'est pas le sentiment le plus propice à l'action. Est-ce par crainte de cette mélancolie que vous avez eu du mal à assumer en 1983 le tournant de la rigueur ? Mon livre montre au contraire que je l'ai accepté parce qu'il était la seule manière d'éviter la débâcle économique et financière. Quand j'ai évoqué "une parenthèse", c'était pour marquer qu'un ajustement n'est pas forcément une politique durable. Aujourd'hui, Nicolas Sarkozy peut-il échapper à la rigueur ? Comme il ne veut pas modifier sa politique économique en demandant plus d'efforts à ceux qui ne souffrent pas de la crise et parfois l'ont provoquée, il est condamné à la fuite en avant. Le réveil risque d'être brutal. Auriez-vous accepté de coprésider une commission comme celle sur l'emprunt, à l'instar de Michel Rocard et d'Alain Juppé ? Non. J'ai vu le président de la République deux fois, à sa demande, dans le cadre de consultations républicaines. Il a évoqué des possibilités de ce genre. Je lui ai dit en souriant que je n'avais pas l'intention d'être un scalp de plus à sa ceinture. Le PS n'a-t-il pas trop tardé à faire son aggiornamento idéologique sous les septennats Mitterrand ? Ce qu'on peut nous reprocher, c'est, après les illusions de 1981, d'être ensuite parti trop loin dans l'autre sens. Nous avons défendu le franc fort, accepté la dérégulation pendant le second septennat. D'une certaine façon, mon gouvernement, en 1997, a refermé la "parenthèse" en conciliant croissance et respect des équilibres, réduction massive du chômage et réalisme économique. Mais sans jamais clarifier la doctrine. Contrairement à M. Sarkozy qui nous noie sous les discours - mais il ne théorise pas, il verbalise -, j'ai peut-être eu un peu trop tendance à penser que les actes parlaient pour nous. Une partie de la gauche ne s'est pas retrouvée dans votre bilan. Pourquoi ? Cette partie de la gauche, à savoir l'extrême gauche, ne s'y retrouvera jamais. Elle n'est à l'aise que sous la droite. Vous regrettez d'avoir attendu mai 2001 pour admettre votre passé trotskiste. Pourquoi avoir tant tardé ? Sans doute parce que je suis rebelle devant les interrogations et les confessions. Et puis je pensais que tout cela était derrière moi. Si c'est un regret, il est mineur, car cela n'a pesé que sur moi. "La pensée socialiste correspond aux exigences de l'époque", écrivez-vous. N'a-t-elle pas, au contraire, fait son temps ? Aujourd'hui, nous touchons aux limites du libéralisme économique. Quels sont ses présupposés ? La dérégulation économique, la déréglementation sociale, le prétendu autocontrôle des marchés, l'inévitabilité de la financiarisation, l'obligation de serrer les salaires au bénéfice des profits, la non-intervention de l'Etat dans l'économie, l'inéluctabilité des inégalités. Or tout cela a débouché sur la crise mondiale la plus grave depuis les années 1930. Nous avons besoin aujourd'hui d'une réduction et d'une mise sous contrôle de la sphère financière et de la spéculation, d'une régulation raisonnable de la vie économique, d'une intervention raisonnée des Etats et des organisations internationales dans la sphère économique - on les a appelées comme pompiers, il faut les accepter comme architectes - et d'un partage des revenus moins défavorable aux salariés. Or ce sont là des idées centrales de la pensée socialiste. La social-démocratie n'est-elle pas débordée à gauche par la vague écologiste ? L'écologie est une des idées neuves de la fin du XXe siècle. Mais elle n'efface pas le champ des interrogations sur les relations des hommes entre eux dans lequel s'inscrit la pensée socialiste. Ne venons-nous pas de voir la "vague écologiste" se briser à Copenhague sur le mur des égoïsmes et des intérêts corporatistes de court terme ? Le courant socialiste reste, à mes yeux, irremplaçable. Quel est votre jugement sur la taxe carbone ? Telle qu'elle a été préparée, et annulée par le Conseil constitutionnel, la taxe carbone signe surtout la façon désastreuse avec laquelle travaillent le président, le gouvernement et la majorité. L'obsession de l'effet d'annonce et la prise de décision sans débat, dans un cercle restreint tout en haut à l'Elysée, font négliger l'expertise et le sérieux dans la préparation des textes. Le nombre de projets qui ont été censurés faute de solidité juridique, hâtivement transformés devant les réactions hostiles ou abandonnés en route parce que non praticables, commence à faire masse. L'équipe au pouvoir gouverne mal. A quelles conditions le PS peut-il imposer son leadership sur la gauche ? Il ne s'agit pas d'imposer mais de convaincre. Si le Parti socialiste traduit ses valeurs et ses idées en un programme d'action, rassemble ses talents (nombreux) autour d'un leader reconnu, s'oppose à la droite de façon pertinente et clarifie sa stratégie d'alliances, il convaincra. C'est, me semble-t-il, ce qu'il cherche à faire. J'espère qu'il y parviendra pour l'échéance de 2012. Vous insistez sur la crédibilité de la gauche. Qu'est-ce qu'une gauche crédible ? C'est une gauche qui offre aux Français une construction politique capable de présenter une alternative à la droite. Nous l'avions réussi avec l'union de la gauche, puis avec la gauche plurielle. Cela reste à refaire. Pourquoi refusez-vous toujours aussi fermement une alliance avec le centre ? Je pars d'une réflexion plus large. Dans le socialisme européen, il y a trois types de partis : les partis dominants, les partis influents, les partis d'appoint. Le PS français n'a jamais été un parti dominant capable de gouverner seul comme le Labour britannique, la social-démocratie suédoise ou le Pasok grec. A partir des années 1970, et grâce à la rénovation conduite autour de François Mitterrand, le PS est devenu un parti influent, capable de rassembler la gauche et de la mener au pouvoir. Ce que je crains, c'est qu'un jeu de dupes avec le centre nous fasse perdre notre crédit et nous ramène au statut de force d'appoint. Le quinquennat, pour lequel vous avez milité, vous donne-t-il satisfaction ? Le quinquennat en général, oui ; l'actuel, non. Le quinquennat et l'inversion du calendrier électoral n'ont-ils pas dévié vers l'hyperprésidence ? Le quinquennat nous rapproche des autres pays et est un bon rythme pour la démocratie. Tenir l'élection présidentielle avant les législatives est logique tant que le président est élu au suffrage universel. Quant à "l'hyperprésidence", elle n'est pas conforme à l'esprit des institutions et elle provoque bien des dysfonctionnements au sein du pouvoir. J'espère quelle prendra fin dans deux ans. N'y a-t-il pas, aujourd'hui, une nostalgie de la "dream team" de votre gouvernement ? J'aime bien qu'on regrette un peu l'équipe gouvernementale que je conduisais. C'était un temps où, en matière de gouvernance, chacun était à l'aise dans sa fonction : les ministres, le premier ministre, le Parlement, les collectivités locales, les corps intermédiaires... et même le président, car nous respections son rôle. La France progressait et la vie était moins injuste. J'espère que la gauche nous offrira, un jour, une nouvelle "dream team". Propos recueillis par Françoise Fressoz et Michel Noblecourt
07/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/07/lionel-jospin-critique-la-desinvolture-de-nicolas-sarkozy_1288378_823448.html
Distribution perturbée des quotidiens nationaux
Des actions ponctuelles de blocage ont été menées dans les six centres de traitement et certains éditeurs ont décidé selon les cas de ne pas imprimer la totalité des exemplaires destinés à la vente au numéro.
La distribution des quotidiens nationaux a été sérieusement perturbée dans la nuit de mercredi à jeudi à travers la France, a l'exception du tiers nord et du Sud-Ouest, apprend-on jeudi auprès de Presstalis (ex-NMPP), principale entreprise de messageries de presse. Des actions ponctuelles de blocage ont été menées dans les six centres de traitement et certains éditeurs ont décidé selon les cas de ne pas imprimer la totalité des exemplaires destinés à la vente au numéro. Contrairement à la veille, le centre de Gonesse (Val-d'Oise) n'a pas été totalement bloqué et le tiers nord de la France (dont Paris) a pu être servi en journaux. Seuls Le Figaro et France Soir ne sont diffusés que très partiellement. Sur les cinq autres zones de distribution, la situation est très contrastée. Dans l'Est, qui dépend du centre de Nancy, la situation semble la plus difficile, à l'instar du Grand Ouest et du Sud-Est, selon un porte-parole de Presstalis. Les actions de blocage ont été menées essentiellement par le Syndicat général du livre et de la communication écrite (SGLCE), une des composantes du Syndicat du livre (majoritaire chez Presstalis). Le SGLCE entend protester contre la mise en place prévue en janvier du plan d'économies de Presstalis et particulièrement le non-renouvellement, au centre de Gonesse, de certains contrats à durée déterminée de personnels chargés initialement du lancement de l'activité de ce nouveau centre de traitement. Ces embauches temporaires n'avaient pas vocation à être pérennisées, fait-on valoir chez Presstalis.
07/01/2010
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/01/07/distribution-perturbee-des-quotidiens-nationaux_1288388_3236.html
Attentat sur le vol Amsterdam-Detroit : la police des frontières attendait le kamikaze pour l'interroger
La police américaine aux frontières savait qu'un extrémiste présumé se trouvait le 25 décembre à bord du vol Amsterdam-Detroit, cible d'un attentat raté, et l'attendait à l'aéroport pour l'interroger.
Selon le site Internet du Los Angeles Times mercredi, la police américaine aux frontières savait qu'un extrémiste présumé se trouvait le 25 décembre à bord du vol Amsterdam-Detroit, cible d'un attentat raté, et l'attendait à l'aéroport pour l'interroger. Un haut responsable des forces de sécurité ayant requis l'anonymat a en effet indiqué au quotidien américain que des responsables de la police américaine n'ont découvert le nom d'Omar Farouk Abdulmutallab sur la base de donnée des douanes et de la protection des frontières qu'après son embarquement à Amsterdam sur le vol Northwest 253. La "base de données a signalé les inquiétudes du département d'Etat concernant ce gars, qu'il pourrait avoir fréquenté des éléments extrémistes au Yémen", a-t-il déclaré, précisant que si ces données avaient été découvertes plus tôt, les services de sécurité auraient pu "l'empêcher de monter dans l'avion".Une fois l'avion atterri,"la décision avait été prise", précise-t-il de "procéder sur lui à une seconde inspection". Le délai pour détecter qu'un passager représente une menace potentielle avant l'embarquement est limité, a expliqué sous le couvert de l'anonymat un haut responsable des services de la sécurité intérieure, soulignant que l'analyse en profondeur de la liste des passagers ne commence qu'une fois le manifeste de vol émis, quelques heures seulement avant le décollage. Le président Barack Obama a sévèrement critiqué les services américains de renseignement et de sécurité, qui avaient selon lui "suffisamment d'informations pour déjouer ce complot et peut-être empêcher l'attaque du jour de Noël". Le 25 décembre, Omar Farouk Abdulmutallab, jeune Nigérian de 23 ans, a réussi à monter avec des explosifs dans le vol Northwest 253, transportant 290 personnes. Sa bombe artisanale n'a pas complètement fonctionné et il a été maîtrisé par des passagers.
07/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/07/attentat-sur-le-vol-amsterdam-detroit-la-police-des-frontieres-attendait-le-kamikaze-pour-l-interroger_1288379_3222.html
Neige et verglas au programme dans 31 départements
Trente et un départements, dont plusieurs dans le Sud, ont été placés en alerte orange pour des chutes de neige et du verglas jeudi matin par Météo France.
Trente et un départements, dont plusieurs dans le Sud, ont été placés en alerte orange pour des chutes de neige et du verglas jeudi matin par Météo France. Aux départements et régions déjà concernés mercredi comme la Basse et la Haute-Normandie, l'Ile-de-France, les Côtes-d'Armor, l'Eure-et-Loir, la Nièvre, le Pas-de-Calais et l'Yonne sont venus s'ajouter Andorre, les Alpes-de-Haute-Provence, l'Ariège, l'Aube, l'Aude, les Bouches-du-Rhône, la Drôme, la Haute-Garonne, l'Isère, les Hautes-Pyrénées, les Pyrénées-Orientales, le Var et le Vaucluse. La fin d'événement est prévue au plus tôt vendredi à 21 heures. Selon Météo France, la partie la plus active de la perturbation neigeuse se décale vers la région Centre et le sud de l'Ile-de-France. La circulation était difficile jeudi en début de matinée, en raison des conditions météorologiques défavorables, notamment en région parisienne, dans le Nord, dans la région de Grenoble et à Bordeaux, selon le centre national et les centres régionaux d'information routière. L'A6 en région parsienne est à éviter, en raison notamment d'accidents de circulation à Grigny, Courcouronnes (Essonne) et Fresnes (Val-de-Marne), en direction de la province. Des poids lourds se sont notamment mis en travers de la chaussée, provoquant des embouteillages sur les principaux axes. Il fallait ainsi en début de matinée une heure pour faire le trajet Wissous/Savigny-sur-Orge (Essonne). Il était recommandé d'éviter la Francilienne, en particulier dans sa portion sud. Sur les abords de la Manche, le régime de giboulées de neige persistera durant la matinée de jeudi. Ces chutes de neige donneront facilement par endroits 2 à 5 cm supplémentaires. De la Normandie au sud du bassin parisien et à la Bourgogne, une zone neigeuse quasi stationnaire va persister jusqu'en milieu de matinée, en perdant progressivement de l'intensité. Elle pourra par endroit donner quelques centimètres de neige supplémentaires. Les températures demeureront le plus souvent négatives et les sols resteront glissants. D'autre part, un nouvel épisode neigeux va se mettre en place par le sud où une profonde dépression se dirige actuellement depuis les Baléares vers les côtes méditerranéennes. Dès le début d'après-midi de jeudi, elle entraînera des chutes de neige le long des Pyrénées (des Pyrénées-Orientales au sud de la Haute-Garonne). Ces chutes de neige s'étendront en soirée vers le région PACA et vers l'est du Rhône durant la nuit. La couche attendue est de 5 à 10 cm en plaine, 15 à 20 cm en montagne vers 500 mètres, dépassant les 40 cm au-dessus de 500 mètres, selon Météo France. Par ailleurs, l'alerte orange a été levée dans 14 départements et régions dont le Poitou-Charente, le Cher, le Finistère, la Gironde, l'Ille-et-Vilaine, l'Indre, l'Indre-et-Loire, le Loir-et-Cher, le Loiret, la Mayenne et la Sarthe. En Eure-et-Loir, où l'on observe souvent autour de 10 cm de neige et localement jusqu'à 30 cm, suite à un arrêté préfectoral, la circulation des véhicules de transport de marchandises et de voyageurs de plus de 7,5 tonnes est interdite sur l'ensemble du réseau routier communal, départemental et national du département, exception faite de l'autoroute A11. Cette mesure est prise jusqu'à jeudi minuit.
07/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/07/neige-et-verglas-au-programme-dans-31-departements_1288376_3224.html
Attentat contre la CIA en Afghanistan : Al-Qaida parle de vengeance contre les frappes au Pakistan
Le réseau Al-Qaida a déclaré que l'attentat qui a fait huit morts sur une base de la CIA en Afghanistan fin décembre était une "vengeance" pour les victimes de frappes de drones américains au Pakistan.
Le réseau Al-Qaida a déclaré que l'attentat qui a fait huit morts sur une base de la CIA en Afghanistan fin décembre était une "vengeance" pour les victimes de frappes de drones américains au Pakistan, a indiqué, jeudi 7 janvier, le centre américain de surveillance des sites islamistes SITE. L'auteur présumé de l'attentat-suicide, un Jordanien du nom de Humam Khalil Abou-Mulal al-Balawi, présenté comme un agent double, s'est fait exploser le 30 décembre sur une base de la CIA à Khost, dans l'attaque la plus meurtrière contre les services de renseignement américains depuis 1983. Le kamikaze avait indiqué dans son testament que l'attentat-suicide vengeait les "martyrs", citant une série de combattants talibans tués dans des frappes de missiles lancés par des drones américains, selon le chef d'Al-Qaida en Afghanistan, Mustafa Abou al-Yazid, cité par SITE. Selon la chaîne de télévision américaine NBC, l'auteur de l'attentat-suicide aurait été recruté par les services de renseignement de son pays, mais travaillait en secret pour Al-Qaida. Parmi les victimes de ces frappes de missiles figure le chef taliban pakistanais Baïtullah Mehsud, accusé d'une vague d'attentats notamment celui qui avait tué le premier ministre pakistanais, Benazir Bhutto, en décembre 2007. Baïtullah Mehsud avait été tué dans une attaque de missile américain en août 2009. Un autre chef taliban, Abu Saleh al-Somali, présenté comme membre de l'état-major d'Al-Qaida et soupçonné d'être responsable d'attentats en Europe et aux Etats-Unis, avait été tué dans une autre frappe en décembre dans le Waziristan du Nord, instable zone tribale du nord-ouest frontalière de l'Afghanistan. Le Waziristan du Nord borde la province afghane de Khost, lieu de l'attaque du 30 décembre contre la CIA.
07/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/07/attentat-contre-la-cia-en-afghanistan-al-qaida-parle-de-vengeance-contre-les-frappes-au-pakistan_1288375_3216.html
Calme précaire en Calabre après des violences anti-immigrés
Tentre-huit personnes, dont 20 immigrés et 18 policiers, ont été blessés lors des heurts avec la population locale, vendredi.
Le calme est revenu à Rosarno, petite ville de Calabre, après de violentes attaques contre des immigrés par la population locale. Le bilan de ces violences s'établit à 67 blessés, dont 31 étrangers, 17 habitants italiens et 19 policiers, selon l'agence de presse Ansa. Certains étrangers ont été frappé avec des barres de fer, d'autres ont été renversés volontairement par des voitures, d'autres essuyant des tirs de fusil. Deux blessés graves ont été comptabilisés, selon les services hospitaliers. Les incidents ont débuté après des manifestations d'immigrés qui avaient dégénéré en affrontements avec la police. Jeudi soir, plusieurs centaines d'ouvriers agricoles, pour la plupart employés illégalement dans la région et provenant d'Afrique noire, avaient incendié des voitures et brisé des vitrines à coups de bâtons pour protester contre l'agression de plusieurs d'entre eux qui avaient été les cibles de tirs de fusils à air comprimé. "CES TYPES NOUS TIRAIENT DESSUS COMME S'ILS ÉTAIENT À LA FÊTE FORAINE" Vendredi matin, 2 000 migrants se sont rassemblés devant l'hôtel de ville de Rosarno pour protester contre le comportement, à leurs yeux raciste, de certains habitants de la région à leur égard. La veille, deux hommes avaient essuyé des tirs de carabine depuis une voiture. "Ces types nous tiraient dessus comme s'ils étaient à la fête foraine, et ils riaient. Je hurlais, d'autres voitures sont passées mais personne ne s'est arrêté, personne n'a appelé la police", a témoigné Kamal, un Marocain, au journal La Repubblica. Par la suite, des centaines d'habitants de Rosarno se sont rassemblés devant la mairie pour une contre-manifestation, demandant, pour une grande part, à ce que le gouvernement prenne des mesures contre les immigrés. Quelques 900 immigrés ont quitté la ville dans la nuit vers un centre d'accueil d'urgence à Crotone et Bari. Au total, près d'un millier devraient quitter Rosarno avant dimanche soir. Face à la tension, la police a envoyé "un important contingent de policiers" pour "assurer un meilleur contrôle du territoire et garantir la sérénité à toute la population présente". Le ministre de l'intérieur, Roberto Maroni, a mis en place une cellule de crise pour traiter des racines de ces violences. Issu de la Ligue du Nord, M. Maroni a déclaré par le passé que l'une des causes de la violence en Italie résidait dans le fait que l'immigration clandestine avait été tolérée pendant de trop nombreuses années. Huit mille immigrés clandestins vivent actuellement en Calabre, où le gouverneur local, Agazio Loiero, a reconnu que les violences déclenchées par les immigrés, même si elles étaient injustifiées, était le résultat d'une "une forte provocation". La presse italienne estime que la motié d'entre-eux étaient employés, en général illégalement, pour cueillir clémentines et mandarines pendant quelques mois.
08/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/08/trente-sept-personnes-blessees-lors-d-emeutes-dans-le-sud-de-l-italie_1289431_3214.html
"Obama pourrait décaler un discours pour contenter les fans de la série ""Lost"""
Barack Obama avait prévu de prononcer le traditionnel discours sur l'état de l'Union le 2 février, en même que le premier épisode de l'ultime saison de la série "Lost, les disparus"
Le porte-parole de Barack Obama a laissé entendre, vendredi 8 janvier, que le président des Etats-Unis devrait décaler son discours annuel sur l'état de l'Union, prévu le 2 février, pour ne pas le prononcer en même temps qu'un épisode crucial de la série Lost, les disparus. La chaîne ABC a prévu de consacrer trois heures, le 2 février, à cette série qui relate les aventures de rescapés d'un accident d'avion isolés sur une île mystérieuse. Il s'agira du premier épisode de la sixième et dernière saison de cette saga qui devrait donner des réponses aux dizaines de questions que se posent les fans depuis que la série est diffusée. "Je ne prévois pas un scénario où des millions de gens qui espèrent assister à une sorte de conclusion à Lost se verront empêchés [de le faire] par le président", a déclaré le porte-parole, Robert Gibbs, lors de son point de presse quotidien. Il répondait à une question d'une journaliste d'ABC, justement, qui se faisait l'écho de groupes d'internautes récemment constitués sur Facebook ou Twitter afin d'implorer M. Obama de ne pas choisir le 2 février pour prononcer ce discours. M. Gibbs s'est toutefois refusé à préciser dans l'immédiat quand aurait lieu ce discours, qui intervient traditionnellement un mardi à la fin du mois de janvier.
08/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/08/obama-pourrait-decaler-un-discours-pour-contenter-les-fans-de-la-serie-lost_1289430_3222.html
Top 14, 18e journée : chocs en stock
Toulouse accueille Clermont dans le match de haut de tableau, dans une 18e journée riche en enjeux.
La 18e journée du Top 14 propose de nombreuses oppositions entre prétendants aux demi-finales avec Clermont (2e), qui se déplace à Toulouse (3e) dans le choc du week-end ; Perpignan (5e), qui accueille le Racing (4e) ; ou encore le Stade Français (8e) et Biarritz (6e), qui s'affrontent au stade de France. En bas de tableau, le match de la peur opposera Bourgoin (12e) à Bayonne (13e). Stade Toulousain (3e) – Clermont (2e) : Les deux ogres du Top 14 s'affrontent dans le choc de la journée. Même en reconstruction, le Stade Toulousain n'a pas perdu ses bonnes habitudes et cherchera à préparer au mieux son rendez-vous européen de la semaine prochaine. Seule interrogation, la possible absence de son capitaine sécateur, Thierry Dusautoir. Vern Cotter a pour sa part décidé de faire tourner le collectif auvergnat, mais n'en a pas pour autant perdu ses ambitions. Ça sent la poudre. Perpignan (5e) – Racing-Métro (4e) : Perpignan reste sur 4 défaites toutes compétitions confondues. Passé de la 2e à la 5e place du Top 14 en l'espace d'un mois, le club catalan, revanchard, pourrait bien glisser au-delà de la 6e place qualificative pour la phase finale en cas de défaite. Le Racing-Métro, qui restait sur 9 succès de rang, veut reprendre sa marche en avant après l'accroc berjalien. Lionel Nallet, souffrant d'une contusion à l'épaule, est très incertain pour la partie. Stade Français (8e) – Biarritz (6e) : Jacques Delmas, entraîneur du Stade Français, retrouve le club avec lequel il a été champion de France en 2005 et en 2006. Sa connaissance du XV basque peut s'avérer décisive. Les Parisiens se trouvent dans l'obligation de l'emporter, sous peine de voir le peloton de tête prendre le large. Mais pour Imanol Harinordoquy, de retour de blessure, Biarritz a perdu trop de matches à sa portée. Vu l'état actuel du club de la capitale, ce match est à la portée du BO. Montpellier (10e) – Castres (1er) : Castres, surprenant mais incontestable leader du championnat grâce à un turnover maîtrisé, a un bilan comptable de 11 victoires, 2 nuls et seulement 4 défaites. La blessure de son maître à jouer Cameron McIntyre pourrait néanmoins permettre à Montpellier de créer la surprise. Les Héraultais comptent sur le retour de leur fer de lance, Fulgence Ouedraogo, pour percer la muraille tarnaise. Toulon (7e) – Montauban (11e) : Après 17 journées, Toulon est toujours invaincu à domicile et souhaite continuer sur sa lancée. Mais la déroute subie à Clermont a laissé des traces. Le demi de mêlée Pierre Mignoni souffre d'une déchirure aux ischio-jambiers et sera absent pendant trois semaines. Côté montalbanais, les entraîneurs vont procéder à une revue d'effectif et se rendront sur la rade avec des ambitions revues à la baisse. Albi (14e) – Brive (9e) : Lanterne rouge du championnat depuis la 3e journée, Albi croit toujours en ses chances de maintien, comme l'a une nouvelle fois répété le coentraîneur Daniel Blach ce vendredi dans Midi olympique. Mais le maintien passe par une victoire sur Brive, en net regain de forme depuis quelques semaines. Un collectif retrouvé, un jeune Alexis Palisson qui s'épanouit enfin en Corrèze et l'ambition de celui qui revient de loin, c'est sûr, Albi va souffrir. Bourgoin (12e) – Bayonne (13e) : Le match a été annulé à cause de la vague de froid qui touche le pays.
08/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/08/top-14-chocs-en-stock_1288995_3242.html
"Clinton en faveur d'une reprise ""sans conditions"" du dialogue au Proche-Orient"
La secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton espère que Palestiniens et Israéliens mettront fin au conflit qui les oppose en donnant aux premiers un Etat et aux seconds la sécurité.
La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a dit vendredi 8 janvier travailler à une reprise du dialogue "dès que possible et sans conditions préalables" entre Israéliens et Palestiniens. "Nous travaillons avec les Israéliens, l'Autorité palestinienne, la Jordanie et les Etats arabes pour faire les démarches nécessaires à la relance de négociations", a-t-elle déclaré lors d'un point de presse conjoint avec son homologue jordanien, Nasser Jawdeh. Mme Clinton a souhaité un accord "mettant fin au conflit en conciliant l'objectif palestinien d'un Etat indépendant et viable fondé sur les bases de 1967, avec des échanges [de territoires] amiables, et le but israélien de frontières reconnues qui reflètent les évolutions postérieures" à 1967 et seraient compatibles avec la sécurité de l'Etat juif. Hillary Clinton a offert "les garanties et l'assistance" de la communauté internationale une fois la négociation reprise entre les parties sur les éléments d'une solution à deux Etats, qu'elle a énumérés : "Les frontières, la sécurité, Jérusalem, les réfugiés, l'eau." Elle n'a en revanche pas confirmé l'existence d'un nouveau plan américain prévoyant un cycle de négociations sur deux ans, et qui a été révélé lundi par le quotidien israélien Maariv. Mais le ministre jordanien a soutenu l'importance de "mettre sur la table des dates butoir". "Aujourd'hui, a insisté M. Jawdeh, nous n'avons surtout pas besoin d'un processus illimité dans le temps".
08/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/08/clinton-en-faveur-d-une-reprise-sans-conditions-du-dialogue-au-proche-orient_1289421_3218.html
Gazette du mercato : Kapo signe à Boulogne, Digard renforce Nice
En France, Olivier Kapo et Didier Digard traversent la Manche pour revenir en Ligue 1, en prêt respectivement à Boulogne et à Nice.
Olivier Kapo revient en France En difficulté à Wigan, l'ancien Auxerrois a trouvé une porte de sortie hivernale en rejoignant la Ligue 1 et Boulogne-sur-Mer. Olivier Kapo s'est engagé pour l'USBCO jusqu'à la fin de la saison sous forme de prêt. Le club présidé par Jacques Wattez, promu cette saison, aura bien besoin des qualités offensives de percussion de l'ancien international français de 29 ans (9 sélections). Didier Digard à Nice Le milieu de terrain défensif a été prêté à l'OGC Nice pour six mois avec une option d'achat d'un montant de 6 millions d'euros. Didier Digard, 23 ans, qui s'est entraîné vendredi avec les Niçois, était sous contrat jusqu'en 2012 avec Middlesbrough, club anglais relégué en deuxième division au printemps dernier. Si la Fédération anglaise transmet les documents rapidement, Digard pourra participer dimanche à la rencontre opposant Plabennec (National) à Nice en 32es de finale de la Coupe de France. Ziaya fait faux bond à Sochaux L'attaquant algérien de l'ES Sétif Abdelmalek Ziaya, en contact avec Sochaux (L1) depuis plusieurs semaines, a finalement signé pour deux ans avec le club saoudien d'Ittihad Djeddah. Sélectionné pour la première fois en équipe d'Algérie pour la CAN 2010, qui va débuter en Angola, le joueur a été transféré pour une somme estimée à 2 millions d'euros. Les dirigeants sochaliens avaient proposé au club de Sétif un prêt de six mois, payant avec option d'achat et un contrat de trois ans à partir du mois de juin si Ziaya confirmait, en France, ses talents de buteur. L'insistance du club saoudien à proposer un transfert définitif à Ziaya a finalement poussé le président de l'ES Sétif, Abdelhakim Serrar, à accepter ses propositions. "C'est le plus gros transfert à ce jour du championnat algérien. Comme ça, on ne pourra jamais me dire que j'ai mal négocié", a déclaré le président de Sétif au journal algérien Le Buteur. Dossena quitte les Reds pour Naples Le défenseur italien met fin à son aventure anglaise contrastée avec Liverpool. Andrea Dossena a signé pour quatre ans avec Naples. Depuis ses débuts, en 2008, Dossena n'avait été que peu utilisé par l'entraîneur des Reds, Rafael Benitez. Il avait joué auparavant au Chievo Verone, Trévise et Udinese. Wolfsburg nie les négociations avec Milan pour Dzeko Le nouveau directeur général de Wolfsburg, Dieter Hoeness, a démenti vendredi être en train de négocier avec l'AC Milan pour le transfert de son buteur vedette Edin Dzeko. "Il n'y a rien de vrai dans tout cela", a déclaré Hoeness, en référence à des informations de la presse italienne selon lesquelles Hoeness aurait dîné avec les dirigeants de l'AC Milan et aurait reçu une offre de 25 millions d'euros du club lombard. L'attaquant bosniaque, élu par ses pairs meilleur joueur de la saison 2008-2009, est activement convoité par l'AC Milan depuis des mois, même s'il a prolongé, au début d'août, son contrat avec Wolfsburg jusqu'en 2013. Dzeko s'est révélé la saison dernière avec ses 26 buts qui, conjugués aux 28 réalisations du Brésilien Grafite, ont permis aux Loups d'empocher à la surprise générale le premier titre de champion d'Allemagne de leur histoire. Cette saison, le Bosniaque de 23 ans a plus de mal, à l'image de son équipe, huitième du championnat. Il a inscrit 7 buts en 17 matches de Bundesliga.
08/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/08/gazette-du-mercato-kapo-signe-a-boulogne-digard-renforce-nice_1289392_3242.html
"""Les quatre grandes majors ont imposé des conditions qui rendent les services de musique en ligne non rentables"""
Pour l'ancien ministre de la culture, membre de la mission Zelnik sur l'offre culturelle en ligne, la gestion des droits d'auteurs doit être remise à plat.
Martin : Bonjour, à qui s'adressera la "carte musique jeune" ? Pourra-t-on en acheter plusieurs ? Jacques Toubon : Si le gouvernement décide de faire cette carte musique, il lancera un appel d'offres auprès de sociétés spécialisées dans les paiements en ligne, et en particulier dans les micro-paiements en ligne, pour définir toutes les modalités pratiques. Nous ne pouvions pas le faire dans notre mission. On imagine qu'il s'agira d'une carte de crédit, de 50, 100, 150 euros, qui sera éditée par un service de musique en ligne, qui permettra d'acheter autant de musique, par exemple de télécharger autant d'albums, de titres que l'on souhaitera. L'internaute, lorsqu'il achètera cette carte, n'en paiera que la moitié, l'autre moitié sera financée par l'Etat et peut-être pour une petite partie par les services en ligne qui en bénéficieront. Ceux que nous visons, ce sont les jeunes de 16 à 24 ans, car cette carte est en quelque sorte une incitation pédagogique à quitter la consommation gratuite, et en particulier la consommation par piratage, pour se tourner vers une consommation légale et payante à un prix abordable. Notre idée est que la carte pourrait commencer à être vendue au début de l'été 2010. Nicolas : Pourquoi le rapport parle-t-il principalement de la musique ? Le cinéma est aussi concerné, il me semble étrange d'accuser le piratage de la chute de la musique alors que les autres secteurs ont l'air de se porter comme des charmes... Les médias ont davantage insisté sur nos propositions pour la musique, mais en réalité, nous faisons des propositions aussi nombreuses et aussi importantes pour le cinéma et l'audiovisuel, et pour le livre. Le rapport est en ligne ici. Pour le cinéma et l'audiovisuel, le piratage est également très important, et c'est pour cela que nous voulons favoriser les services légaux tels que Universciné ou Canalplay, en prévoyant que les films seront disponibles plus rapidement après leur sortie en salle. Nous voulons aussi favoriser la numérisation des films pour qu'ils soient plus facilement disponibles. Nicolas : Et le livre ? Le livre, c'est différent. Il y a encore très peu de consommation de livres en ligne : on l'estime à 3 % du marché total du livre aux Etats-Unis. En Europe, beaucoup moins. Mais nous savons que la lecture de livres numériques va se développer très rapidement, car le Kindle ou le Sony Reader vont se répandre très vite. Nous avons donc voulu prendre les devants en évitant que le développement de la lecture numérique se fasse au détriment des écrivains et des éditeurs. C'est pourquoi nous avons proposé, d'une part, de mettre la TVA sur les livres numériques au même niveau que sur les livres en papier (c'est-à-dire 5,5 %), et, d'autre part, d'appliquer aux livres numériques le prix unique du livre qui existe pour les livres en papier, ce qui empêchera les sites de vente de brader les livres. Spike : Pourquoi ne pas évoquer les jeux video et les logiciels en général ? Qu'avez-vous proposé pour ce marché frappé au moins autant par le piratage ? Vous avez tout à fait raison. Il faut prendre en considération la situation des jeux vidéo. Nous ne l'avons pas fait parce que, tout simplement, nous n'avions pas le temps de tout étudier. Je pense qu'il faut confier à une personnalité ou à un groupe de travail cette question, qui est très importante, en particulier pour les éditeurs français, qui tiennent une grande place sur le marché des jeux vidéo. Cela étant, il me paraît possible d'envisager d'étendre, dans certaines conditions, nos propositions sur certains problèmes qui concernent les jeux vidéo. J'ajoute que nous n'avons pas non plus traité la question de la presse en ligne, qui est pourtant essentielle pour le droit à l'information de tous nos concitoyens. Mais nous avons écrit dans le rapport qu'il fallait que le gouvernement mette à l'étude cette question : comment faire payer aux lecteurs les quotidiens ou les magazines en ligne qui sont aujourd'hui mis à disposition gratuitement ? Ce qui, tout le monde le comprendra, finira par faire disparaître les entreprises de presse, Le Monde en particulier. Olivier : Pourquoi avez-vous écarté la proposition de la Sacem d'une taxe sur les fournisseurs d'accès à Internet ? Est-ce que cela n'aurait pas été une meilleure solution qu'une hypothétique taxe sur les moteurs de recherche ? Nous l'avons écartée, parce que, tout simplement, la contribution proposée par la Sacem et l'Adami présente exactement les mêmes inconvénients que ce qu'on a appelé la licence globale, c'est-à-dire qu'elle légalise les échanges illégaux : elle dit "payons et nous pourrons pirater". Deuxièmement, elle met en cause le droit d'auteur, puisque le droit d'auteur, c'est d'abord un droit moral, le droit d'autoriser ou d'interdire la diffusion de l'œuvre qu'on a créée ou produite. Et puis, sur le plan économique, cela reviendrait à ruiner les efforts de tous ces nouveaux services culturels en ligne, qui sont des éditeurs de contenus, et qui cherchent à équilibrer leur modèle économique ; si on légalise la fourniture gratuite, il est évident qu'ils n'auront plus aucune ressource. Avec la proposition Sacem-Adami, que nous avons étudiée très soigneusement, nous créerions pour les auteurs, les compositeurs, les éditeurs dont s'occupe justement la Sacem, une confusion complète, puisqu'en versant cette contribution de quelques euros, telle que l'a proposé la Sacem, on ferait croire aux internautes que ce qui est illicite est devenu licite, pour peu qu'on l'ait payé avec cette petite contribution. Enfin, comme la licence globale, la contribution Sacem-Adami a le défaut majeur de déconnecter la rémunération des créateurs de toute logique d'usage et de marché, c'est-à-dire qu'on enlève la corrélation entre la rémunération des ayants droit et l'usage de la musique et la consommation de musique. C'est justement tout le travail de notre mission : essayer de trouver des moyens d'élargir l'accès à la musique par Internet, mais en même temps, faire que les auteurs, compositeurs, producteurs de musique, artistes-interprètes soient rémunérés, qu'ils reçoivent le fruit de leur travail en fonction du succès de leurs oeuvres. Abolibibelot : Vous rejetez la licence globale et la taxe sur les FAI parce qu'elles encouragent le "payons et nous pourrons pirater". Pourtant, je ne vois pas dans les propositions de votre commission l'abrogation de la taxe sur les supports de copie. Pouvez-vous expliquer ce paradoxe ? La taxe sur les supports de copie, c'est ce qu'on appelle la taxe sur la copie privée, créée il y a une vingtaine d'années. Elle correspond très exactement à la notion suivante : lorsqu'une œuvre est reproduite et diffusée après avoir été reproduite, sur un appareil de reproduction, le titulaire du droit d'auteur ou des droits voisins (ce sont les droits des artistes-interprètes) ne va pas recevoir de rémunération, comme lorsque, par exemple, on a réalisé un disque avec son oeuvre. Il a été prévu ce qu'on appelle une compensation pour cette perte de rémunération. Cette compensation est une taxe que l'on prélève sur les appareils qui servent à copier et qui permet de reverser une certaine somme aux sociétés civiles de gestion des droits des artistes-interprètes et des auteurs. La copie privée représente en Europe environ 30 % des revenus des artistes-interprètes. Et il ne s'agit pas d'une négation du droit d'auteur, mais au contraire, d'une compensation au fait qu'il n'est pas directement respecté et rémunéré. C'est pour cela que la copie privée n'a rien à voir avec la licence globale ou un prélèvement forfaitaire. J.L.: Quelle est l'activité de Google qui devrait être taxée ? L'activité d'outil de recherche, celle d'hébergeur, celle de régie publicitaire ? Ce que nous voulons taxer, c'est l'acte de vision d'une publicité quand on accède aux moteurs de recherche, qu'il s'agisse d'une bannière publicitaire, ou d'un lien sponsorisé. Cet acte se déroule en France et est réalisé par un internaute qui a son adresse IP en France. Cet acte procure aux moteurs de recherche des revenus. Ce que nous voulons, c'est que le moteur de recherche en question déclare les revenus qu'il tire de cette activité. Nous ne voulons pas taxer les entreprises françaises qui font appel à la publicité, sinon elles se délocaliseront sur le plan fiscal. Nous ne voulons pas non plus taxer la régie publicitaire. L'acte de vision est parfaitement appréhendable, il est parfaitement détachable, et nous comptons simplement sur le sentiment légaliste de Google et des autres moteurs de recherche, ou des autres hébergeurs qui ne sont pas éditeurs de contenus, pour déclarer les revenus qu'ils tirent en France de cette activité. Aujourd'hui, on estime que cela représente 800 à 900 millions d'euros par an, et nous pensons qu'il n'est pas juste que cette ressource soit monopolisée au détriment des autres espaces publicitaires, par exemple ceux de la presse ou de la télévision, et au détriment de la création artistique, puisque ces énormes sommes ne donnent lieu à aucun reversement pour financer les investissements des industries culturelles ou les activités des créateurs. J. L. : Si on taxe Google, il faudra également taxer ses concurrents. Est-ce que cela ne risque pas d'être compliqué ? Une taxe française des revenus d'entreprises étrangères serait-elle compatible avec les règles du marché intérieur ? Nous avons proposé de fixer un seuil assez élevé de manière à ce que les sociétés en voie de création ne soient pas frappées, puisque toute notre volonté est d'accroître la concurrence. Nous avons un précédent qui permet de taxer des activités en France même pour des entreprises dont le siège fiscal est à l'étranger : ce sont les conventions d'assurance. Un Anglais assure la maison qu'il possède en Dordogne à une compagnie d'assurance allemande, aujourd'hui, nous pouvons prélever un impôt sur le revenu que cette compagnie d'assurance tire de la souscription de cette prime en France. Jean Sans Terre : Si l'on accepte le principe de taxer les revenus réalisés en France par des sociétés établies à l'étranger, ne faudrait-il pas également taxer le iTunes Store français d'Apple, établi au Luxembourg ? Deux réponses. Je rappelle que le seul impôt qui est harmonisé au plan européen, c'est la TVA. C'est pour cela qu'il faut obtenir l'autorisation de Bruxelles pour manipuler les taux de TVA en France ou dans un autre pays d'Europe. Ce n'est pas le cas pour les impôts sur le revenu, que ce soit impôt sur les bénéfices, impôt sur les sociétés ou impôts sur le revenu des particuliers. Nous pouvons donc le faire nous-mêmes. Mais bien entendu, la question de Google étant posée partout en Europe, nous souhaitons que nos alliés européens se joignent à nous dans une stratégie de l'Europe à l'égard des grandes multinationales de l'Internet et, de manière générale, une stratégie pour la diffusion de la culture sur Internet. La situation d'Apple relève d'une disposition différente. C'est justement de la TVA, c'est-à-dire harmonisée, et le Luxembourg bénéficie, par une décision unanime de tous les Etats membres, d'une dérogation jusqu'en 2015, qui lui permet d'appliquer une TVA réduite et qui a donc poussé Apple à installer iTunes au Luxembourg. Ce que nous demandons, ce n'est pas que cette dérogation soit abolie, nous n'avons aucune chance de l'obtenir, mais c'est que dans les années qui viennent, c'est-à-dire d'ici à 2015, soit mise en place une TVA réduite pour la diffusion numérique des œuvres culturelles. Ce n'est pas gagné, mais je sais que de nombreux pays, l'Espagne, la Grande-Bretagne, l'Allemagne par exemple, réfléchissent dans le même sens que nous. Guest : Je suis partisan de l'économie de marché, c'est à dire de la loi de l'offre et de la demande. Or les "marchands de disques" n'ont pas su prévoir la révolution internet et numérique. Pourquoi est-ce à l'État de pallier ce défaut de vision commerciale par des taxes supplémentaires ? Les producteurs de disques, on peut leur faire porter tout le chapeau. Ce serait aussi inexact que de considérer qu'ils n'ont aucune responsabilité dans la situation actuelle. C'est pourquoi la mission Zelnik a affronté la réalité avec lucidité : une des raisons de l'insuffisance des services de musique en ligne, c'est que les quatre grandes majors ont imposé des conditions qui rendent ces services non rentables économiquement, et donc, au bout du compte, non accessibles aux internautes. Nous avons donc pensé qu'il fallait changer la donne et remplacer la négociation entre les forts et les faibles par ce que l'on appelle la gestion collective des droits voisins, c'est-à-dire les droits des producteurs et les droits des artistes et des interprètes. La gestion collective, par des sociétés civiles dont sont membres les professionnels intéressés, apportera la transparence et créera en quelque sorte l'égalité des chances entre majors et producteurs indépendants, entre producteurs et services en ligne, et entre producteurs et diffuseurs et artistes-interprètes. C'est une petite révolution, et elle ne sera pas facile à mettre en oeuvre. Dwarfpower : Lors de la discussion de la loi Hadopi 2, un amendement avait été déposé pour gérer sous licence collective la diffusion sur Internet (dans la majorité, les députés Dionis et Tardy, de mémoire, avaient soutenu cet amendement). Pourquoi avoir, à l'époque, rejeté cette possibilité, pour en faire maintenant une des mesures phares du rapport ? Attention à ne pas confondre, il y a trois choses bien différentes : La licence globale (ou contribution créative), qui en réalité supprime l'exercice du droit d'auteur. La licence légale ou rémunération équitable, qui permet, pour un service donné, de se substituer à l'exercice du droit d'auteur et des droits voisins et qui est le système actuellement appliqué depuis vingt-cinq ans pour les radios, et en particulier les radios musicales. Nous proposons d'étendre cette licence légale aux radios numériques (Webcasting) parce que, en gros, la situation est la même. La gestion collective des droits voisins : contrairement à la licence légale, le caractère exclusif des droits est maintenu. Les ayants droit continuent à pouvoir autoriser ou interdire, ils négocient collectivement à travers des sociétés civiles de gestion (celles qui existent ou d'autres nouvelles qu'ils pourront créer) les droits que chacun paie pour l'usage de l'œuvre de l'autre. C'est le système qui s'applique aujourd'hui aux auteurs, compositeurs et éditeurs. Nous proposons de l'appliquer pour les services nouveaux qui sont la lecture en continu à la demande et le téléchargement à la demande. La différence avec la radio numérique, c'est que c'est l'internaute qui fait sa playlist, en quelque sorte, et non pas la radio qui détermine ce qu'elle diffuse. La gestion collective a le grand avantage d'obliger chacun à ouvrir les livres de comptes et à prendre en considération les intérêts des autres catégories en même temps que ses intérêts propres. Steno : Plus généralement, dans l'univers de la gratuité instituée et de la facilité d'accès aux contenus qu'est devenu Internet, ne croyez-vous que l'objectif de faire revenir notamment les jeunes vers une culture fondée sur la juste rémunération des créateurs, constitue un "combat" perdu d'avance ? Je ne le crois pas du tout. Nous avons il y a quelques années gagné le combat de l'exception culturelle : les Américains voulaient qu'on considère les services culturels comme l'acier ou les produits financiers. Nous avons dit : l'Europe refuse et veut pouvoir appliquer aux services culturels des mesures de régulation et de soutien qui tiennent compte de la valeur non marchande des œuvres d'art et de culture. Nous avons gagné, et aujourd'hui, c'est une chose acquise. De la même façon, nous croyons que les principes qui fondent le droit moral et le droit à rémunération des créateurs, des producteurs et des diffuseurs de l'art et de la culture peuvent parfaitement être mis en œuvre dans l'univers numérique, avec les adaptations nécessaires, ce que propose le rapport Zelnik, et avec l'éducation indispensable du public et en particulier un enseignement à l'école de ce que sont les chances formidables, mais aussi les risques incontestables, de la généralisation de l'Internet et, de manière générale, de toutes les plates-formes et réseaux numériques. Pour y parvenir, il faut sortir de la situation de conflit, de simplification et d'imprécations dans laquelle on était depuis quelques années. Il faut voir et accepter la réalité des pratiques, il faut rendre équitable le partage de la valeur et définir des règles en commun. Dans cette affaire, il ne peut pas y avoir de vainqueur ou de vaincu, car si l'art ne se renouvelle plus, il n'y aura plus d'œuvres à admirer, et si l'art ne se diffuse pas sur les nouveaux réseaux, il sera enfermé peu à peu dans une grotte préhistorique. Chat modéré par Damien Leloup
08/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/08/jacques-toubon-les-majors-ont-rendu-les-services-de-musique-en-ligne-non-rentables_1289345_651865.html
CAN 2010 : le bus de la sélection togolaise mitraillé
L'équipe nationale du Togo a été prise pour cible vendredi, à la frontière entre le Congo et l'Angola. L'attaque a été revendiquée par les Forces de libération de l'Etat du Cabinda.
A deux jours de l'ouverture de la Coupe d'Afrique des nations, en Angola, le bus de la sélection togolaise a été mitraillé, vendredi 8 janvier, à la frontière entre le Congo et l'Angola. Le chauffeur de l'un des bus a été tué, et neuf personnes, dont deux joueurs, ont été blessés. Les joueurs togolais devaient commencer la compétition face au Ghana, lundi à Cabinda. L'attaque a été revendiquée, dans un communiqué, par les Forces de libération de l'Etat du Cabinda (FLEC). La province angolaise est déchirée par un conflit séparatiste depuis l'indépendance de l'Angola, en 1975. Les rebelles demandent l'autonomie de l'enclave de Cabinda, située au nord du pays. "TOUT LE MONDE S'EST JETÉ SOUS LES SIÈGES" "On a deux joueurs blessés. On venait de passer la frontière, on avait rempli les formalités. On était encadrés par la police. Tout était clean. Il y a eu un mitraillage puissant. Tout le monde s'est jeté sous les sièges", a déclaré Thomas Dossevi, joueur togolais joint par téléphone par la radio RMC. "La police a riposté. On se serait cru à la guerre. On est choqués. Quand on sort du bus, on se dit : 'Pourquoi nous ?' On n'a pas beaucoup envie de jouer la CAN. On pense aux copains, aux joueurs blessés", a-t-il ajouté. Dossevi a cité comme joueurs blessés le gardien Kodjovi Obilalé (GSI Pontivy) et le défenseur Serge Akakpo (Vaslui FC, en Roumanie), "qui a pris une balle dans le dos". "L'intendant chargé de la communication a aussi pris une balle, a-t-il ajouté. [Il] a perdu beaucoup de sang." "On n'a pas de nouvelles [d'Obilalé], il saignait beaucoup, a-t-il précisé. Prendre des balles pour un match de foot, c'est dégueulasse." La Fédération togolaise de football n'avait pas répondu aux organisateurs de la CAN pour les informer que son équipe viendrait en bus. "Nous avions demandé à toutes les délégations de nous dire comment et quand elles viendraient. Le Togo est la seule équipe qui ne nous a pas répondu et il n'avait pas notifié au Cocan [le comité organisateur]"Nous avions demandé à toutes les délégations de nous dire comment et quand elles viendraient. Le Togo est la seule équipe qui ne nous a pas répondu et il n'avait pas notifié au Cocan ,a expliqué Virgilio Santos, du comité d'organisation. "SI ON PEUT BOYCOTTER LA CAN, AUTANT LE FAIRE" Emmanuel Adebayor, joueur évoluant à Manchester City et considéré comme le meilleur joueur de l'équipe, avait été interrogé sur les dangers potentiels de la présence de l'équipe dans le Cabinda. "Nous sommes nés en Afrique, donc nous savons de quoi il s'agit, avait-il lancé à la presse anglaise. Certaines personnes ont peut-être peur, ce que je peux comprendre. Mais moi, je retourne en Afrique (...) et je suis prêt pour le Cabinda." "Si on peut boycotter la CAN, autant le faire. Si on peut annuler tous les matches, pourquoi pas. On ne pense qu'à rentrer à la maison", a estimé le milieu Alaixys Romao, qui évolue à Grenoble. Les organisateurs ont exclu toute annulation de la CAN. "Notre grande préoccupation concerne les joueurs, mais la Coupe va avoir lieu", a déclaré Souleymane Habuba, directeur de la communication de la Confédération africaine de football (CAF). La division Afrique de la FIFPro, syndicat mondial des joueurs, a demandé "aux organisateurs angolais et à la CAF de mettre tout en œuvre pour assurer (...) la sécurité des joueurs et de leur encadrement" et a rappelé que "le football était un instrument de paix, une fête, et qu'il ne devait pas servir d'exutoire à la violence aveugle, quelles que soient les revendications de ceux qui cherchent à le prendre en otage".
08/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/08/can-2010-le-bus-de-la-selection-togolaise-mitraille_1289415_3242.html
"Les premiers courriers de l'Hadopi envoyés ""entre avril et juillet"""
La loi Hadopi, la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet, a été officiellement installée ce vendredi.
La Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet (Hadopi), est officiellement en place. Le ministre de la culture, Frédéric Mitterrand, a nommé ce vendredi les membres de l'organisme, qui sera notamment chargé d'envoyer les courriers d'avertissement aux internautes téléchargeant illégalement et de saisir les tribunaux en cas de récidive. Le ministre de la culture a précisé que les premiers messages d'avertissement seraient envoyés aux internautes entre "avril selon l'option basse et juillet selon l'option haute". La loi Hadopi ne peut entrer en activité immédiatement, car les deux derniers décrets d'application de la loi la créant n'ont pas encore été publiés. Frédéric Mitterrand a annoncé qu'ils seraient "soumis au collège Hadopi dans les plus brefs délais" pour recueillir ses observations et publiés "incessamment sous peu". Ces textes, qui sont encore "à l'étude", n'ont pas encore été transmis au Conseil d'Etat et à la CNIL, a-t-il ajouté. Des obstacles techniques restent également à régler, les fournisseurs d'accès à Internet devant notamment mettre en place des adaptations à leurs services. "Certains fournisseurs d'accès ont admis qu'il fallait le faire, mais pas tous", a reconnu le ministre de la culture, sans se prononcer sur le coût de ces évolutions. La Haute Autorité sera présidée par Marie-Françoise Marais, conseillère à la Cour de cassation au sein de la première chambre, en charge des affaires de propriété littéraire et artistique.
08/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/08/les-premiers-courriers-de-la-loi-hadopi-envoyes-entre-avril-et-juillet_1289396_651865.html
"Lutte anti-grippe A : ""Un échec du catastrophisme"""
Pour le chercheur Frédéric Keck, la campagne de vaccination en France a été minée par des erreurs de communication
ENTRETIEN Bien que le gouvernement ait massivement communiqué sur la nécessité de se faire immuniser contre la grippe A(H1N1), la France est un des pays d'Europe où la vaccination volontaire a rencontré le moins de succès (moins de 10 % de la population totale) par rapport à l'objectif visé. Anthropologue au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et spécialiste des crises sanitaires dues aux maladies d'origine animale, Frédéric Keck commente ce paradoxe. La campagne de vaccination contre le virus A(H1N1) peut être considérée comme un échec. Comment l'expliquez-vous ? Cet échec peut être imputé à diverses causes, la plus importante étant que ce virus, considéré comme potentiellement dangereux lors de son émergence, s'est finalement révélé peu virulent. A cela s'ajoutent au moins deux singularités de notre politique nationale. La première est d'avoir, en achetant massivement des doses de vaccin, joué à fond la carte du principe de précaution : c'est une conséquence du traumatisme créé par l'affaire du sang contaminé, qui pousse désormais les pouvoirs publics, lors d'une crise sanitaire, à prendre le minimum de risques. La seconde vient de ce que nous sommes un des rares pays à ne pas parler de grippe porcine, mais de grippe A. C'est-à-dire à avoir supprimé dans sa nomination même, en partie sans doute sous la pression des éleveurs qui craignaient une baisse de la consommation de viande de porc, l'origine animale de la maladie. "Porcine" ou "A", est-ce si important ? En termes de communication, c'est essentiel. Tant qu'on employait le mot "porcine", on savait pourquoi ce virus faisait peur : parce qu'il était d'origine animale, nouveau et inconnu. En devenant "A", il s'est mis à ressembler à n'importe quel virus grippal. D'autant plus que, dans le même temps, les politiques comme les médias ont cessé de rappeler qu'il s'agissait d'un nouveau virus, et que c'était pour cela qu'il fallait prendre des mesures de vaccination exceptionnelles. Ils ont communiqué sur le mode de l'action, pas sur celui de la rationalité scientifique. Voyez-vous d'autres raisons aux réticences des Français à se faire vacciner ? Plusieurs. L'absence criante de médiation, tout d'abord. Cette campagne a été menée dans un face-à-face entre l'Etat et l'individu, sans que ce dernier soit aidé par aucun intermédiaire pour prendre une décision. Ni par les médecins généralistes, qui n'ont pas été impliqués et auraient pu recommander la vaccination, ni par les parlementaires, qui auraient pu contrôler l'investissement de l'Etat, ni par les experts, qui auraient pu expliquer pourquoi l'Organisation mondiale de la santé (OMS) avait lancé un tel signal d'alarme. L'organisation de la vaccination ensuite. Cette campagne a été menée sur le mode militaire, selon une mobilisation à l'ancienne telle qu'on la concevait au temps de Pasteur : une guerre déclarée contre un virus clairement identifié comme l'ennemi dont il faut se débarrasser. Or, la situation a changé. Du fait de l'intensification des relations entre les humains et les animaux, que les animaux circulent plus vite qu'ils ne l'ont jamais fait, on assiste désormais à l'apparition régulière de nouvelles maladies infectieuses, produites par de nouveaux virus que l'on ne pourra plus éliminer totalement. Dès lors, la vaccination n'apparaît plus comme un moyen de se débarrasser de l'ennemi, mais comme une façon d'instaurer un rapport équilibré avec lui. Mais ce message n'a pas été clairement envoyé à la population. On en revient donc, une fois encore, à un problème de communication ? Quand on dit aux citoyens : "On agit parce que c'est grave, mais rien n'est grave puisqu'on agit", il ne faut pas oublier d'expliquer ce qui est grave. Les enjeux réels de la vaccination, dont tous les experts s'accordaient à dire qu'elle était préférable, compte tenu de l'incertitude inhérente à la nouveauté de ce virus, n'ont pas été assez expliqués. On n'a pas assez fait valoir que se faire vacciner, c'était contribuer à limiter la propagation du virus dans la population humaine - autrement dit, faire acte d'écologie sociale. Du point de vue de la rationalité des experts, tout a parfaitement fonctionné ; la seule chose qui a manqué, c'est la mobilisation des citoyens. C'est vraiment un échec de la participation, de la démocratie sanitaire. Dans le cadre de vos recherches, vous avez mené à l'automne plusieurs dizaines d'entretiens avec le personnel d'un centre hospitalier invité à se faire vacciner contre la grippe A(H1N1). Quels enseignements en avez-vous tirés ? Je voulais comprendre la motivation des médecins, infirmiers et aides-soignants qui allaient se faire vacciner avant la population générale. Comprendre comment ces professionnels, qui possédaient a priori la meilleure information sur le virus et ses traitements, aboutissaient à prendre, à un moment donné, une décision pour eux-mêmes. C'est cette délibération que j'ai tenté de retracer. Parmi le personnel médical acceptant la vaccination, j'ai trouvé trois typologies différentes : ceux qui le faisaient pour donner l'exemple, ceux qui le faisaient pour leurs enfants, et ceux qui se considéraient comme des cobayes chargés de vérifier l'innocuité du vaccin. Etrangement, presqu'aucune de ces personnes ne m'a dit s'être fait vacciner pour se protéger elle-même... On m'a en revanche souvent exprimé le sentiment d'être tout petit face aux grands intérêts pharmaceutiques, et une lassitude causée par l'injonction de se vacciner pour maintenir la continuité de l'activité en cas de pandémie. Dans un contexte de réduction des budgets des hôpitaux, la vaccination apparaissait comme une contrainte supplémentaire. La vache folle, la grippe aviaire, maintenant la grippe A : l'échec de cette campagne de vaccination ne témoigne-t-elle pas aussi d'une certaine lassitude des citoyens vis-à-vis de ces menaces sanitaires ? Cet échec, c'est vrai, est aussi un échec du catastrophisme, que l'on peut d'ailleurs comparer avec celui du sommet de Copenhague. Que l'on parle d'une pandémie de grippe d'origine animale ou du réchauffement climatique, de quoi s'agit-il, en effet ? D'une catastrophe possible, sur laquelle un grand nombre d'experts se sont mis d'accord, dans laquelle sont impliquées des instances internationales, mais qui réclame pour être combattue un changement de comportement des citoyens. Changement que les gens n'ont pas forcément envie de faire. Entre la prévision d'une catastrophe complètement virtuelle et la vie quotidienne, faite de routine et d'habitude, il y a une rupture. Et pour combler cette rupture, il faut beaucoup de médiation et de pédagogie. Vous êtes-vous fait vacciner ? Oui. C'est une mesure d'autant plus justifiée à mes yeux, notamment pour les jeunes, que cette vaccination peut protéger du virus A(H1N1) pendant plusieurs années. Et que ce virus, on le sait désormais, sera encore là dans notre avenir proche. Propos recueillis par Catherine Vincent
08/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/08/lutte-anti-grippe-a-un-echec-du-catastrophisme_1289090_3244.html
"Vie privée : le point de vue des ""petits cons"""
Les jeunes internautes ont-ils vraiment perdu toute notion de vie privée, ou mettent-ils simplement en application les libertés conquises par leurs parents ?
Nombreux sont ceux qui pensent que les jeunes internautes ont perdu toute notion de vie privée. Impudiques, voire exhibitionnistes, ils ne feraient plus la différence entre vie publique et vie privée. Et si, a contrario, ils ne faisaient qu'appliquer à l'internet ce que leurs grands-parents ont conquis, en terme de libertés, dans la société ? Dans "La vie privée, un problème de vieux cons ?", je dressais un parallèle entre la façon désinhibée qu'ont les jeunes internautes de se dévoiler sur le Net et la révolution sexuelle, et me demandais si ceux qui sont gênés par cette façon décomplexée de s'exprimer ne seraient pas un peu coincés. Au-delà des problèmes d'inhibition des "vieux cons", il est difficile d'aborder la question sans essayer de regarder de plus près comment, et pourquoi, les jeunes qui ont grandi avec le Net évoquent ainsi leurs vies privées dans des espaces publics. Une démarche somme toute… "rock'n roll" que n'auraient peut-être pas renié nos (grands) parents, en moins rebelle cependant. Pour Josh Freed, célèbre éditorialiste canadien, c'est la plus importante fracture générationelle depuis des décennies, qu'il résume ainsi : d'un côté, nous avons la "génération des parents", de l'autre, la "génération des transparents" : L'une cherche à protéger sa vie privée de manière quasi-obsessionnelle, l'autre sait à peine ce qu'est la "vie privée". La génération des transparents a passé toute sa vie sur scène, depuis que leurs embryons ont été filmés par une échographie alors qu'ils n'avaient que huit semaines… de gestation. Ils adorent partager leurs expériences avec la planète entière sur MySpace, Facebook ou Twitter et pour eux, Big Brother est un reality show. La génération des parents voit cette transparence comme un cauchemar. Elle a grandi à l'ombre de Mac Carthy et des espions de la CIA, et est plutôt paranoïaque dès qu'il s'agit de partager des données personnelles, de passer à la banque en ligne ou même d'acheter un livre sur Amazon. Josh Freed raconte ainsi qu'à peine rentré de vacances, son fils mit en ligne toutes les photos de famille, en maillot de bain, avant que sa mère, l'apprenant, ne les en retire "plus rapidement qu'un censeur du gouvernement chinois". Comme le souligne Elizabeth Denham, commissaire adjointe à la protection de la vie privée du Canada, habitués à être regardés, filmés, et photographiés, avant même que d'être nés, les jeunes se retrouvent aujourd'hui à "se demander si les choses se passent réellement quand personne ne les regarde". En 2006 déjà, Danah Boyd, l'une des plus fines observatrices de ce que font les jeunes sur le Net, remarquait elle aussi que les adolescents étaient d'autant plus "blasés" par la notion de vie privée, et qu'ils avaient d'autant plus de mal à percevoir les risques posés par la "société de surveillance", qu'ils ont eux-mêmes grandi en étant constamment surveillés par ceux qui, parents et enseignants notamment, affectent, dirigent ou contrôlent directement leur vie privée : Leur panoptique personnel (administré par des personnes qu'ils connaissent et voient quotidiennement) est bien plus intrusif, menaçant, direct et traumatique que ne pourraient l'être des panoptiques gouvernementaux ou contrôlés par des entreprises privées. L'érosion de la vie privée commence à la maison, pas au niveau gouvernemental ou marchand. Et tant que nous ne trouverons pas un moyen d'offrir plus de vie privée à ces jeunes, dans leur vie intime, ils n'aspireront pas à plus de vie privée dans leurs vies publiques. LA VIE PRIVÉE ? UNE COURSE À L'ARMEMENT Citant Jürgen Habermas et son essai sur L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, ainsi que la notion de "contre-publics" (regroupements sociaux formés en opposition aux discours et aux intérêts de la sphère publique officielle) du théoricien du mouvement queer et des questions de genre Michael Warner, danah boyd rappelle que la vie privée est un privilège acquis il n'y a pas si longtemps que cela, et partagé essentiellement par les hétérosexuels blancs de sexe masculin… Et si la déclaration universelle des droits de l'homme affirme bien, dans son article 12, que "nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes à son honneur et à sa réputation", force est de constater qu'il ne s'applique guère aux mineurs : Votre enfant a peut-être sa propre chambre dotée d'une porte qui ferme à clef, et de son propre ordinateur. Mais il n'a pas d'espace privé. Et c'est pour cela que les enfants se ruent dans l'arène publique pour se libérer de la façon qu'ont leurs parents et administrations scolaires de leur dicter leur façon de se mouvoir et de communiquer. Dans l'arène publique, ou via une interface technique. Le New York Times raconte ainsi l'étonnement du président de Walt Disney qui, convoyant sa fille et deux de ses amies en voiture, s'étonnait de ne pas les entendre parler, mais de la voir taper des SMS : "- Tes amies sont là, ça ne se fait pas ! - Mais papa, nous sommes en train de nous écrire, je ne veux pas que tu entendes ce que j'ai à leur dire !" Danah Boyd, pour qui la notion de vie privée renvoie à ces moments où l'on a le sentiment de contrôler la façon -et le moment- où l'on peut communiquer avec quelqu'un en particulier, qualifie ainsi d'espaces interstitiels ces moments "volés" dont ils profitent pour communiquer, en toute confidentialité. Pour elle, la parentalité a, ces dernières années, été de plus en plus associée au fait de surveiller ses enfants. Au point qu'on assisterait à une "course à l'armement entre la surveillance parentale et l'utilisation des technologies pour protéger sa vie privée" : Les parents surveillent l'ordinateur de leurs enfants ? Les enfants s'envoient des textos. Et après, on fait quoi ? Combien de temps faudra-t-il attendre avant que les parents ne réclament aux opérateurs de télécommunication la transcription de tout ce qu'ils font et partagent ? Nous sommes au beau milieu d'une guerre à la vie privée qui va bien plus loin que l'opposition entre "où est ma vie privée ?" et "les enfants sont tellement impudiques". La distinction même entre vie publique et vie privée s'en trouve bousculée. Alors que les enfants cherchent à se rendre invisibles de ceux qui disposent d'un pouvoir direct sur eux (parents, enseignants, etc.), ils s'exposent joyeusement auprès de leurs pairs. Danah Boyd note d'ailleurs dans sa thèse, Sortie du contexte : la sociabilité des adolescents américains dans les espaces publics en réseaux (.pdf), que lorsqu'on les interroge, les adolescents déclarent systématiquement qu'ils préféreraient des espaces physiques plutôt que virtuels de socialisation, mais sans contrôle parental… Au final, et alors que les adultes doivent réapprendre à se comporter en public, du fait des changements indus par les technologies, les ados, eux, apprennent à se comporter en public grâce aux (et avec les) technologies. Contrairement à ce que l'on entend souvent, ils n'ont pas particulièrement pour autant de facilités "naturelles" vis-à-vis des technologies, mais c'est effectivement souvent par leur truchement qu'ils apprennent, dans un monde d'adultes, à vivre ensemble, entre eux, et à être un peu seuls, tout simplement. Ce qui leur offre de nombreuses (et nouvelles) libertés mais aussi, et invariablement, angoisse leurs parents en particulier, et les adultes en général. UNE GÉNÉRATION "ROCK'N ROLL"… En 2007, la journaliste Emily Nussbaum (compagne de Clive Thompson, dont nous avions déjà évoqué le Nouveau Monde de l'intimité numérique) avait tiré un magnifique portrait de ces enfants du numérique, qui ont grandi de concert avec la numérisation de la société, et qui ont une toute autre approche de la vie privée. Son article, intitulé "Say everything" (tout dire, en VF), et paru en février 2007 dans le New York Magazine, devrait être inscrit au programme de formation continue de tous les enseignants (et, bien évidemment, des parents). Le début est volontairement caricatural, la suite nettement plus stimulante : "Les enfants d'aujourd'hui n'ont aucune pudeur, sentiment de honte, ni de vie privée. Ce sont des frimeurs, des putains de la célébrité, de petits vauriens pornographiques qui mettent en ligne leurs journaux intimes, numéros de téléphone, poésies stupides et photos cochonnes. Ils ont plus d'amis virtuels que d'amis réels. Ils se parlent par messages instantanés et illettrés. Ils ne s'intéressent qu'à l'attention qu'ils peuvent engendrer, et pourtant, ils sont au degré zéro de la concentration, comme des colibris voletant d'une scène virtuelle à l'autre." Pour mieux comprendre ce dont il retourne, elle a été voir Clay Shirky, qui observe ce phénomène depuis qu'il a découvert le Net, en 1993, et qui enseigne le "climat social" au programme des télécommunications interactives de la New York University. Sa théorie a tout de la querelle des anciens et des modernes, et repose sur le postulat que nos comportements relèvent moins de la moralité que de la chronologie : "Chaque fois que les jeunes sont autorisés à se livrer à des activités qui échappent aux anciens, ces derniers s'en trouvent amers. Qu'avions-nous ? Des centres commerciaux et des parkings ? Ce n'est rien en comparaison de ce à quoi ils ont accès, et nous en sommes malades. Au-delà d'un certain âge, mettons 30 ans, il apparaît toujours surprenant que des pans entiers de notre vie puissent se retrouver en ligne. Mais ce n'est pas quelque chose que ceux qui ont moins de 30 ans ont à désapprendre. Si nous n'agissions pas comme eux, c'est parce que nous n'en avions pas la possibilité." VERS LA CRÉOLISATION DES MÉDIAS Si, pour les ados, il peut sembler plus important d'être vu que d'avoir du talent, on aurait tort, pour autant, de croire que leur horizon se limite à la télé-réalité et à la "peoplisation", souligne Emily Nussbaum : "Nous discutons de quelque chose de plus radical parce que plus ordinaire : nous sommes au centre d'une vaste expérimentation psychologique, qui commence à peine à produire des résultats. Un nombre considérable de jeunes gens partagent publiquement plus de données personnelles qu'aucune personne plus âgée ne l'a jamais fait, et ils semblent pourtant mystérieusement en bonne santé et normaux, et dotés d'une définition totalement différente de la vie privée. De leur point de vue, le narcissisme, c'est la prudence extrême de l'ancienne génération. Comme le résume Kitty : oui, je suis nue sur l'Internet, mais j'ai toujours dit que je n'y mettrai jamais rien que je ne voudrais pas que ma mère puisse voir. Qu'est-ce que je risque ? Que quelqu'un retrouve ma photo dans 20 ans ? Autant faire de sorte qu'il s'agisse d'une belle photo !" Filmés avant même que d'être nés, placés sous constante surveillance depuis par ceux qui les aiment ou sont chargés de les éduquer, ils se sont fait à l'idée que la vie privée est une illusion : vidéosurveillance, traçabilité des communications et paiements bancaires… la dématérialisation des procédures, et la numérisation de la société, font que nos traces sont dorénavant enregistrées et stockées, souvent par des entreprises privées, et généralement au nom de la loi. "Il serait peut-être donc temps d'envisager la possibilité que ces jeunes, qui agissent comme si la vie privée n'existait pas, sont de fait des personnes saines, et que les plus aliénés ne sont pas ceux qu'on croit. Pour quelqu'un comme moi, qui a grandi en fermant à clef mon journal intime, ça risque d'être difficile à accepter. Mais dans les circonstances actuelles, une attitude de déni consistant à garder les choses pour soi n'est peut-être pas très noble. C'est peut-être un artefact, vieillot et naïf, comme de croire que la virginité rend les jeunes filles pures. Mais ceux qui ont grandi "en se montrant" ont aussi découvert que les bénéfices de la transparence valaient la peine d'être tentés." Clay Shirky décrit cette fracture générationnelle en comparant le sabir, créé par des gens apprenant à communiquer en assemblant des mots et expressions de différentes langues, et le créole, qui est la langue parlée par les enfants de ceux qui parlent le sabir, et qui y imposent des règles et structures cohérentes. Pour lui, nous assistons aujourd'hui à la "créolisation des médias, et je ne pense pas qu'il s'agisse d'une métaphore. Je pense que cela peut aussi entraîner de réels changements neurologiques" : "Et quid de toutes ces choses que nous racontaient nos aînés au sujet du rock'n roll ? Ils ont tout déchiré. Le métissage, les adolescents libres de faire ce qu'ils veulent, la fin du mariage !" UN NOUVEAU ROMANTISME Cherchant à mieux appréhender ce qui a changé, Emily Nussbaum observe trois principales restructurations propres à ces individus sociaux, résumées par François Guité, enseignant et spécialiste de l'internet, comme suit : 1. Ils se perçoivent comme ayant un auditoire. C'est la conséquence logique d'une génération MySpace qui ne craint pas de s'afficher en ligne et de publier ses états d'âme. 2. Ils ont archivé leur adolescence. Tout y est : textes, photos, vidéos, musique. Leur mémoire est non seulement consignée dans un album numérique, mais elle est partagée. 3. Leur carapace est plus épaisse que la nôtre. Que ce soit dans la messagerie instantanée ou les blogues (le courrier électronique est une technologie de dinosaures), ils sont habitués au flaming (engueulades et insultes en ligne, Ndlr). Cela explique sans doute le peu de cas qu'ils font de « ta gueule! » et « va chier! ». Pour eux, il ne sert à rien d'aller à une soirée si ce n'est pas, aussi, pour en faire des photos et les partager, ce en quoi ils ne sont pas très différents des générations d'avant, qui gardaient en Super8, VHS ou en photos papier les traces de leurs histoires. La différence est que ces documents sont souvent partagés sur des réseaux sociaux, et non gardés chez soi, pour soi. Pour autant, cette "extimité" relève moins de l'exhibitionnisme qu'elle ne dépend des outils qu'ils utilisent (il est plus simple et moins coûteux de mettre ses photos en ligne que de les développer sur support papier) mais aussi voire surtout d'une forme de romantisme qui ne relève pas que de la crise d'adolescence, comme l'explique Caitlin Oppermann, 17 ans, qui avait commencé à bloguer à l'âge de 12 ans : "Si je ne l'efface pas, je serai toujours là. Ma génération aura accès à toute son histoire, nous pouvons documenter les choses si facilement. Je suis très sentimentale, je suis sûre que cela a quelque chose à voir avec ça." Son ami Jakob Lodwick, co-fondateur de Vimeo.com (qui est à YouTube ce que la DVD est au VHS, en -gros- résumé) et de CollegeHumor.com (une sorte de Groland US, en bien plus geek), partage lui aussi cette vision romantique : "En me mettant en ligne, j'ai reçu un peu d'attention, et je me sentais bien; c'était un réel retour sur investissement (…) Je filmais ce que je voyais et ce qui résonnait en moi. Je ne leur montrais pas ce que c'était que de sortir avec moi, mais ce que c'était que d'être moi." Pour Jackson, note Emily Nussbaum, l'internet est un espace où le fait de se montrer les seins nus n'a pas grande importance, mais où tout un chacun peut se faire connaître, gagner de l'attention et de la réputation, en se montrant sous un jour un peu plus vulnérable. Dans le même temps, ceux qui y agissent comme des porcs seront aussi perçus comme des porcs. MAIS QUID DES PERVERS ? Ils sont certes plus ou moins conscients que ces documents et traces pourraient leur être un jour reprochés, par un employeur notamment -sans parler de la façon qu'auront leurs propres enfants de découvrir ces souvenirs, et les quelques frasques qu'ils n'auront pas effacées. Mais le fait de s'exposer est d'abord et avant tout, comme dans la rue ou la cour de récréation, un moyen d'entrer en contact avec les autres, ou de maintenir et prolonger ce contact, de trouver un(e) petit(e) ami(e), d'être félicité pour la qualité des photographies, voire d'être repéré par un futur employeur… pourquoi dès lors faudrait-il s'en priver et ne se focaliser que sur le (faible) risque associé ? Jusqu'à preuve du contraire, on court plus de risque en sortant de chez soi, à pied ou en voiture, qu'en allant sur Facebook ou Flickr ! Depuis qu'ils communiquent, ils sont habitués à être confrontés à ce que danah boyd qualifie d'"audiences invisibles", à savoir tous ceux qui, sans être pour autant leurs "amis" à qui sont destinés, a priori, ce qu'ils mettent en ligne, n'en peuvent pas moins en devenir les lecteurs, critiques ou laudateurs… et donc aussi les "juger", plutôt que seulement les lire ou les regarder. Ils ont ainsi appris à moduler leur ton pour s'adresser à ces différents types d'auditeurs, sachant également qu'un message instantané ou un email peuvent être copiés/collés et qu'un "chat" peut être archivé : "Cette façon de communiquer oblige les gens à être constamment conscient du fait que tout ce qu'ils publient pourra, et sera, retenu contre eux." En ce sens, les adolescents sont confrontés aux mêmes types de problèmes et précautions que les hommes politiques et les "people" : ils sont, eux aussi, devenus -au sens littéral- des personnalités publiques. A ce titre, ils ont aussi adopté les mêmes réflexes que les célébrités, et savent donc qu'il vaut mieux tenter de profiter de l'attention de ceux qui s'intéressent à vous, mais aussi devancer l'appel en contrôlant votre communication plutôt que de voir quelqu'un d'autre le faire à votre place, et donc risquer d'en faire les frais. A l'instar des personnalités publiques, les ados doivent également apprendre à être jugés, mal compris, caricaturés, critiqués… Le sexe n'étant pas l'apanage des célébrités, certaines jeunes filles anonymes ont ainsi elles aussi droit à "leur" sex-tape, mise en ligne par leur ex-petit ami généralement, profitant du fait que 10 à 20% des jeunes reconnaissent avoir déjà envoyé des photos (ou "sextos") d'eux, nus, sur le Net ou via leurs téléphones mobiles. Mises à nues sur les réseaux, certaines décident de s'en déconnecter, pour ne plus risquer d'être confrontées à cette "mauvaise réputation" qui leur collerait au Net. D'autres pourraient décider d'en profiter, pour faire parler d'elles, ou gagner de l'argent, mais cela semble encore rester l'apanage des seuls "people" type Paris Hilton. D'autres enfin décident plus simplement que le plus important, c'est d'apprendre à vivre avec, comme cela se passe à l'occasion de n'importe quel autre type d'agression, et de garder sa dignité. Il n'est pas inutile, cela dit, de rappeler que le nombre de violences sexuelles dues à l'exposition de soi sur le Net est infime en comparaison du nombre d'agressions sexuelles (notamment dans les sphères intra-familiales) auxquelles les jeunes peuvent être confrontés "IRL" (dans "leur vraie vie", pour reprendre l'acronyme consacré sur le Net). Par contre, elles font l'objet de toutes les attentions médiatiques, au point de devenir un nouveau "marronnier journalistique" habilement exploité par ceux qui voient d'un mauvais oeil ces nouvelles libertés que s'arrogent les jeunes ou qui, faute de savoir utiliser le Net ou d'en comprendre les tenants et aboutissants, ont peur des réseaux, tout simplement. Emily Nussbaum note ainsi justement que la quasi-totalité des personnes de plus de 40 ans, dès lors qu'on leur parle de l'internet, sont littéralement obsédés par le fait qu'il serait infesté de pédophiles, et qu'elles n'ont qu'une idée en tête : "Mais quid des pervers ?"… Les adolescents sont habitués à cette vision particulièrement anxiogène et caricaturale de l'univers dans lequel ils vivent, et préfèrent généralement en rigoler, ce qui ne les empêche aucunement de penser que ceux qui caricaturent ainsi le Net, et donc leur vie, ne sont jamais que des "vieux cons"… Au-delà de cette diabolisation qui ne fait qu'entraver ou retarder le fait d'entrer de plain-pied dans la société de l'information, danah boyd souligne que cette peur de l'espace public qu'est le Net, et ce désir de contrôler la vie des adolescents, empêchent les parents de donner à leurs enfants les outils susceptibles de les aider à aborder leur transition vers le monde des adultes, et peut s'avérer contre-productif : "les restrictions et mesures de contrôle maximum infantilisent les adolescents, les rendant plus dépendants, voire haineux, des adultes et de leur monde". IL FAUT SAVOIR CHOISIR SON CAMP GenderIT.org, site créé par le réseau féministe de l'Association pour le progrès des communications (APC) (voir Prohibition 2.0 : qu'est-ce qu'un contenu préjudiciable ?), s'en est largement fait l'écho à l'occasion de sa couverture du Forum de la gouvernance Internet (IGF) des Nations Unies qui s'est tenu à Sharm El Sheikh en novembre 2009. On aurait pu attendre de la table ronde consacrée à la protection et la sécurité des enfants sur l'internet qu'elle mette en avant, classiquement, mesures de filtrage gouvernemental, et contrôle parental. A contrario, Dorothy Attwood, vice-présidente des politiques publiques et responsable des questions de vie privée chez AT&T, y déclara que la maltraitance des enfants et la violation de la vie privée avaient ceci de similaires qu'elles ne peuvent pas être réglées par un contrôle accru des flux d'information : "bloquer et contrôler l'information ne sont que des moyens fractionnés de traiter le problème, la solution ne peut pas consister à ajouter de nouveaux contrôles parentaux". Pour elle, apprendre à gérer ses données et à "orienter" son identité en ligne sont des compétences essentielles que les enfants doivent apprendre dès qu'ils abordent l'internet : "nous devons tous connaître nos responsabilités et nos droits dans les espaces en ligne". Et pour cela, mieux vaut être créatif plutôt que menaçant, proposer aux enfants des jeux et usages tirant les technologies (et leurs usages) vers le haut, plutôt que de les menacer, leur faire peur, ou chercher à les contrôler. Alors que les médias agitent régulièrement le chiffon rouge du "sexting" (voir "Le sexting, c'est (nor)mal"), un autre intervenant déclarait, lui, que "les jeunes en sont vraiment blasés", témoignant bien du décalage existant entre la perception fantasmatique des "adultes" et la réalité de ce que vivent les jeunes sur l'Internet, comme l'écrit Maya Ganesh, jeune journaliste de GenderIT : "Pourquoi les responsables n'écoutent-ils pas les enfants au lieu de se contenter d'en parler ? Pourquoi n'a-t-on pas entendu la perspective des jeunes et pourquoi n'y avait-il pas de représentants des jeunes à ce panel ? Si les jeunes sont effectivement blasés au sujet du sexting ou excités par les possibilités sexuelles en ligne (les jeunes de chaque génération se sont-ils pas excités par ces possibilités ?), pourquoi les adultes ne peuvent-ils pas le comprendre plutôt que de donner une image générale de victimisation à la sexualité des enfants ? Alors que la pornographie en ligne peut faire courir un danger aux enfants, le risque le plus important n'est-il pas celui des abus sexuels à la maison par des adultes connus ? Ne risque t-on pas de jeter le bébé avec l'eau du bain en créant ce genre de binarisation ? Pourquoi les risques en ligne et hors ligne sont-ils séparés ?" Wieke Vink, 18 ans, membre de la Youth Coalition, une ONG internationale réunissant des jeunes de 15 à 29 ans militant pour le droit à la sexualité et à la reproduction des jeunes, ne cache pas, elle non plus, sa consternation devant tant d'infantilisation : "Quand il y a un problème de connexion internet à la maison, ce ne sont pas mes grands-parents qui le réparent, pas plus que mon père ni ma mère. C'est mon petit ami. Ce sont mes frères. C'est moi. Nous sommes la première génération à avoir grandi à l'ère numérique, dans un vaste monde en réseau ("world wide web" en VO) où Wikipedia est notre bibliothèque, et Skype notre téléphone. En matière d'Internet, ce ne sont pas nécessairement les parents qui éduquent leurs enfants, mais nous qui leur expliquons ce qu'est YouTube ou Facebook. Nous devons reconnaître que l'Internet est un endroit où les gens se réunissent, partagent et se connectent – et les jeunes sont à l'avant-garde de tout cela. J'étais donc ravi de voir que l'IGF consacraient nombre de ses panels aux questions relatives aux enfants et aux jeunes, jusqu'à ce que je découvre que les ateliers sur la protection des droits des enfants n'évoquaient quasi-exclusivement que les problèmes tels que les abus sexuels, et que les panelistes avaient tous plus de 50 ans. Comment se fait-il que la majeure partie des débats au sujet de l'internet et de la sexualité sont empreints de négativité, truffés de mots tels que "filtrage, pédo-pornographie et contenus obscènes" ? Les jeunes, tout comme n'importe quels autres êtres humains, sont curieux dès qu'il s'agit de sexualité. Et laissez-moi vous dire qu'il y a beaucoup de sexe sur le Net -tout comme il y avait probablement un exemplaire de Playboy sous le lit de mon père. Et c'est très bien. C'est normal. C'est naturel. C'est sain." Relatant deux autres tables rondes de l'IGF, sur la vie privée et la gouvernance de l'Internet, Jac SM Kee, artiste et féministe malaysienne responsable de TakeBackTheTech ("Réapproprie-toi la technologie!"), campagne de l'APC incitant "à prendre le contrôle de la technologie pour mettre fin à la violence à l'égard des femmes", note ainsi que la situation pourrait bien s'inverser : "Où est le problème? Un exemple a été donné lors de la séance d'hier au sujet d'une enseignante stagiaire qui a placé sur un site de réseautage social une photo d'elle-même tenant une tasse en plastique avec la légende « pirate ivre ». Par la suite, elle n'a pas pu trouver un emploi comme enseignante car, surprise, ils ont tapé son nom sur Google, ont trouvé la photo et ont porté un jugement. Le dernier point est important, car comme l'a fait remarquer Wolfgang Kleinwaechter (professeur à l'université d'Aarhus au Danemark, et expert reconnu des questions de régulation de l'internet, ndlr), les normes changent. Ceux qui prendront les décisions à l'avenir seront des gens élevés avec les plateformes de réseautage social. Ils penseront peut-être que le fait de ne pas avoir une photo de vous quelque part lorsque vous étiez jeune est une bonne raison de ne pas vous engager. Il ne faut donc pas prendre ces leçons trop au pied de la lettre. J'ai bien aimé cet argument car il complique une hypothèse en reconnaissant que les enfants ont une responsabilité et un pouvoir – ils sont plus que des victimes sans défense qui ont besoin de protection ou « d'éducation ». Wolfgang a parlé du fait que les données personnelles constituent une identité et que chacun a la responsabilité de gérer sa propre identité. C'est un bien qui nous appartient et ne peut pas appartenir à quelqu'un d'autre, même si ce bien est stocké ou situé ailleurs. Il incombe donc à chacun de décider de ce qu'il faut faire de son identité, qui ne peut pas être déléguée à quelqu'un d'autre, comme l'État (par la régulation) ou une entité privée (par des contrats ou l'application de solutions technologiques). (…) La capacité d'exercer autant de contrôle que possible sur mes données personnelles est l'aspect le plus fondamental des approches qui seront adoptées pour protéger la vie privée. Si je ne peux pas contrôler ce qui arrive à mon corps, je n'ai pas de « droit à la vie privée »." Tout comme on ne peut empêcher les adolescents d'avoir leur propre sexualité, il est vain de chercher à vouloir les empêcher de s'ébattre sur le Net. Et de même que les cours d'éducation sexuelle ne se limitent pas à l'évocation des MST, du sida, des agressions sexuelles et des grossesses non désirées, il serait bon de commencer à envisager la possibilité de ne plus ni diaboliser le Net, ni d'infantiliser les internautes adolescents (d'autant qu'ils en savent souvent bien plus que les adultes). La question de savoir à quoi le Net peut bien servir ne se pose pas pour eux : leurs amis sont connectés, c'est plutôt marrant, il y a plein de choses à y faire et à y apprendre qu'on ne trouve pas ailleurs, ou qu'on ne peut pas faire autrement, c'est du spectacle, mais aussi de la vie en société, voire en communauté, on peut s'y exprimer librement, et être entendu, écouté, commenté… D'ailleurs, pour Emily Nussbaum, la question est moins de savoir s'ils ont raison, ou non : "bien sûr, tous les changements sociaux entraînent des dommages collatéraux. Mais la vraie question est, comme avec toute révolution, de savoir choisir son camp." jean.marc.manach@manhack (sur Facebook) & (sur Twitter) Jean-Marc Manach
08/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/08/vie-privee-le-point-de-vue-des-petits-cons_1289411_651865.html
Gasquet éliminé du tournoi de Brisbane par Roddick
Le Français, à créditer d'un bon parcours, s'est incliné 6-3, 7-6 face à l'Américain Andy Roddick en quarts de finale du tournoi de Brisbane.
C'est fini pour Richard Gasquet au tournoi de Brisbane. Blanchi à la mi-décembre par le Tribunal arbitral du sport (TAS) des accusations de dopage, le Biterrois a été éliminé par l'Américain Andy Roddick en quarts de finale en deux sets 6-3, 7-6 (7-5), vendredi. Malmené durant le premier acte, le Français a bien réagi par la suite, sans jamais toutefois parvenir à prendre le service adverse. Gasquet, ancien numéro 1 français tombé au 52e rang mondial, n'a pas à rougir de sa défaite puisqu'il s'incline contre la tête de série numéro 1. Il avait auparavant battu au premier tour (6-3, 4-6, 6-4) le Finlandais Jarkko Nieminen, 88e joueur mondial, avant une victoire facile face à l'Australien Matthew Ebden (6-3, 6-4) au tour suivant. Roddick rencontrera en demi-finale le Tchèque Tomas Berdych, numéro 14, qui a difficilement battu le Brésilien Thomaz Bellucci, 7-6, 2-6, 7-6. Le prochain objectif de Richard Gasquet est l'Open d'Australie (18-31 janvier).
08/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/08/richard-gasquet-elimine-du-tournoi-de-brisbane-par-roddick_1289074_3242.html
Attentat déjoué du vol 253 : le suspect a plaidé non coupable
L'homme qui a tenté de faire exploser un vol Amsterdam-Detroit le jour de Noël a comparu pour la première fois, vendredi 8 janvier, devant la justice fédérale.
L'homme qui a fait vaciller le sentiment de sécurité des Américains, toujours fragile depuis le 11-Septembre, en tentant de faire exploser un vol Amsterdam-Detroit le jour de Noël a plaidé non coupable. Il a comparu pour la première fois, vendredi 8 janvier devant la justice fédérale dans un tribunal placé sous haute surveillance. "Tous les efforts ont été faits pour garantir un maximum de sécurité" pendant l'audience, a déclaré au Detroit Free Press un porte-parole de la police fédérale. Le juge lui a lu l'acte d'accusation et lui a posé quelques questions auxquelles il a répondu de manière très brève. Omar Farouk Abdulmutallab a été formellement inculpé, mercredi par un tribunal, de six chefs d'accusation, parmi lesquels "tentative de meurtre" et "tentative d'utilisation d'une arme de destruction massive" contre les deux cent quatre-vingt-dix passagers et membres d'équipage du vol 253. Il risque vingt à trente ans de réclusion pour chaque accusation, donc la prison à vie s'il est reconnu coupable de plusieurs d'entre elles. Le 25 décembre, alors que l'avion de la Northwest Airlines engageait sa descente, Omar Farouk Abdulmutallab a tenté de déclencher un engin explosif dissimulé dans ses sous-vêtements. Il a été empêché d'agir par des passagers puis isolé par l'équipage. Il a ensuite assuré aux enquêteurs avoir suivi un entraînement terroriste au Yémen dans un camp d'Al-Qaida. La branche du réseau dans la péninsule Arabique a, depuis, revendiqué la tentative d'attaque. Les défaillances du renseignement américain, qui avait été prévenu par le père du jeune Nigérian que celui-ci pouvait représenter un danger, ont conduit le président américain, Barack Obama, à ordonner, jeudi, une vaste réforme de ces services. M. Obama, qui a endossé la responsabilité du fiasco, a reproché aux différentes branches impliquées d'avoir échoué à assembler et comprendre les signes montrant qu'Al-Qaida au Yémen préparait une attaque, et qu'Omar Abdulmutallab se radicalisait. Omar Farouk Abdulmutallab, fils d'un banquier nigérian, avait réussi à embarquer à bord du vol de Northwest Airlines avec des explosifs sans être repéré, alors que son nom figurait sur la liste élargie dite "TIDE", qui regroupe environ cinq cent mille personnes considérées à risque. Le jeune homme, qui a été sévèrement brûlé lors de sa tentative, a passé plusieurs jours à l'hôpital puis a été transféré dans un centre de détention fédéral à Milan dans le Michigan. Un groupe de religieux musulmans américains ont d'ores et déjà prévu de se rassembler devant le tribunal et de brandir des panneaux clamant "Pas en notre nom !" pour dénoncer les agissements d'Al-Qaida.
08/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/08/attentat-dejoue-du-vol-253-le-suspect-va-comparaitre-pour-la-premiere-fois_1289391_3222.html
Un imam égyptien exerçant en Seine-Saint-Denis expulsé en urgence
Le ministère de l'intérieur a procédé, jeudi 7 janvier, à l'expulsion en urgence d'Ali Ibrahim El Soudany, un imam radical qui pratiquait de manière itinérante dans plusieurs villes de Seine-Saint-Denis.
Arrêté dans l'après-midi, l'homme de 35 ans, qui avait été repéré il y a plusieurs mois, a immédiatement été conduit dans un avion à destination de l'Egypte, dont il est originaire. Selon le ministère de l'intérieur, l'imam se livrait à des prêches "appelant à la lutte contre l'Occident, méprisant les valeurs de notre société et incitant à la violence", glorifiant notamment les jeunes "qui donnent leur sang". L'homme n'a reçu aucun soutien de la communauté musulmane organisée. "Les prêcheurs de haine, qui n'ont rien à voir avec la liberté religieuse, n'ont pas leur place sur notre territoire", ajoute le ministère dans un communiqué, qui précise aussi que depuis 2001, "129 islamistes radicaux, dont 29 imams, ont été expulsés". Cette expulsion intervient dans un contexte international tendu en terme de terrorisme islamiste et alors que l'opportunité de légiférer contre le voile intégral fait toujours débat en France. De telles expulsions sont devenues rares, notamment depuis 2004. Stéphanie Le Bars
08/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/08/un-imam-egyptien-exercant-en-seine-saint-denis-expulse-en-urgence_1289278_3224.html
"""Lionel raconte Jospin"", de Lionel Jospin : haro sur la ""frivolité"" politique"
L'ancien premier ministre n'a pas écrit ses Mémoires. Si cela avait été le cas, son livre, réalisé à partir d'entretiens avec Patrick Rotman et Pierre Favier, aurait fourmillé d'anecdotes et de révélations.
Lionel Jospin n'a pas écrit ses Mémoires. Si cela avait été le cas, son livre, réalisé à partir d'entretiens avec Patrick Rotman et Pierre Favier, aurait fourmillé d'anecdotes et de révélations. L'ancien premier ministre n'en est pas amateur. Il n'aime pas le "ressassement". S'il raconte quelques histoires inédites à propos de son "intimité politique" avec François Mitterrand, de ses désaccords à répétition avec Laurent Fabius ou de son passé trotskiste, il revisite, sur le fond, son parcours politique jusqu'à sa sortie de route du 21 avril 2002, au soir de son échec à l'élection présidentielle. S'il reconnaît "des erreurs", il ne manifeste pas un goût prononcé pour l'autocritique. Lionel, qui "a la chance de pouvoir vivre heureux hors de toute fonction politique", est globalement satisfait de Jospin. Au terme de sa vie politique, il se sent "non pas apprécié par tous, mais aimé de certains et respecté par beaucoup". Et à un jeune de 20 ans tenté par la politique, lui qui rêve encore de meetings lancerait un martial : "Vas-y, ça vaut le coup." Le parcours politique raconté par lui-même "vaut le coup". Lionel Jospin réussit même, par la précision et la sincérité de son récit, à tenir le lecteur en haleine alors qu'il lui conte une histoire archi-connue. L'ancien premier secrétaire du PS prend la politique au sérieux et déteste la frivolité. Il n'a pas aimé la "dissymétrie" d'une cohabitation qui l'obligeait au silence sur l'exercice de la fonction présidentielle mais qui permettait à Jacques Chirac de "critiquer le gouvernement", ce dont il a "usé et abusé". Il a encore moins aimé "ce côté crasseux de la politique" qui a vu la droite, à propos des affaires, "créer une suspicion pour relativiser les mises en cause réelles de Jacques Chirac et essayer de ternir (son) image". On l'a compris, Lionel Jospin ne s'associe pas au choeur consensuel autour de l'ancien président. Il n'a pas davantage goûté la "frivolité" de la gauche plurielle en 2002. Ses coups les plus sévères sont pour Jean-Pierre Chevènement, le ministre qui l'a déçu, voire trahi, et dont la candidature "était suicidaire, et pour lui et pour la gauche". Au soir du 21 avril, le candidat défait juge "ridicule" le ralliement unanime à M. Chirac : "Faire barrage à Le Pen allait de soi pour le peuple français. Il n'avait pas besoin du lyrisme masochiste d'une gauche défaite pour y veiller." Ennemi de la frivolité et du cynisme, Lionel Jospin réhabilite, avec ce bon livre, une noble vision du combat politique. LIONEL RACONTE JOSPIN de Lionel Jospin. Seuil, 288 p., 18,50 €. Michel Noblecourt
08/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/08/lionel-raconte-jospin-de-lionel-jospin_1289185_3260.html
Entrées record pour le cinéma en France
La barre des 200 millions de spectateurs a été franchie en 2009. Une première depuis 1982.
Voilà plus d'un quart de siècle qu'on n'était pas autant allé au cinéma en France. Le Centre national de la cinématographie a annoncé, jeudi 7 janvier, qu'on avait comptabilisé 200,85 millions d'entrées dans les salles françaises. La barre des 200 millions n'avait pas été franchie depuis 1982 (l'année de E.T. et de L'As des as). Ce succès s'inscrit dans un mouvement mondial : aux Etats-Unis les recettes ont dépassé pour la première fois 10 milliards de dollars (près de 7 milliards d'euros). Record battu également en Espagne (675 millions d'euros de recettes, environ 110 millions d'entrées). En Chine aussi, le box-office a augmenté de 40 % et devrait atteindre 800 millions de dollars (560 millions d'euros), un chiffre sans précédent. Là-bas comme en France, on peut attribuer une grande part de cet engouement pour les salles obscures aux films en images numériques et en relief. C'est le succès d'Avatar au mois de décembre (7,5 millions d'entrées en trois semaines) qui a permis au box-office de battre des records. Le film de James Cameron (dont la carrière est très loin d'être terminée) fait jeu égal avec L'Age de glace 3, un dessin animé numérique, et se place devant Harry Potter et le prince de sang mêlé, le sixième épisode d'un feuilleton (en langage de marketing cinéma, on dit une franchise) qui fait largement appel aux effets numériques. A la quatrième place, on trouve le premier film français, Le Petit Nicolas, avec 5,5 millions d'entrées. En 2009, la part de marché des films français a reculé de huit points, à 36,5 %. Le nombre d'entrées a aussi baissé de 13,5 %, s'établissant à 74,46 millions d'entrées. C'est que 2008 avait été l'année de Bienvenue chez les Ch'tis. Quatre films français ont dépassé trois millions d'entrées (Le Petit Nicolas, LOL, Arthur et la vengeance de Maltazard et Coco). La moitié des spectateurs (49,8 %) sont allés voir des films américains, parmi lesquels six comptabilisent plus de trois millions d'entrées. Les films d'autres pays représentent 13,1 % des entrées. "Petite exploitation" Le succès du Petit Nicolas est venu atténuer un phénomène qui avait pris une grande ampleur au premier semestre 2009 : alors que la fréquentation augmentait dans les grandes agglomérations et dans les multiplexes, les petites salles des petites villes voyaient leur public s'enfuir. Le succès de l'adaptation du classique de Sempé et Goscinny et celui d'Arthur et la vengeance de Maltazard (les films pour enfants sont plus vus en région que dans la capitale et sa couronne) ont en partie corrigé la tendance. Dans les villes de moins de 20 000 habitants, on a vendu 2,4 % de tickets en moins. Alors que la baisse était de 13,9 % au premier semestre. La "petite exploitation" (les salles qui réalisent moins de 80 000 entrées par an) a vu sa fréquentation stagner. Thomas Sotinel
08/01/2010
cinema
https://www.lemonde.fr/cinema/article/2010/01/08/entrees-record-pour-le-cinema-en-france_1289175_3476.html
"En Suisse, l'ultime livre de Jacques Chessex ""réservé aux adultes"""
Le grand écrivain suisse, mort le 9 octobre 2009, à 75 ans, n'aurait sans doute pas imaginé mésaventure plus à son goût que celle qui accompagne la sortie de son ultime roman.
Le grand écrivain suisse Jacques Chessex, mort le 9 octobre 2009, à 75 ans, n'aurait sans doute pas imaginé mésaventure plus à son goût que celle qui accompagne la sortie de son ultime roman. En France, Le Dernier Crâne de M. de Sade (Ed. Grasset) est disponible depuis mercredi 6 janvier dans les librairies, présenté comme tout livre, alors qu'en Suisse l'ouvrage posthume est vendu sous cellophane avec un macaron : "Réservé aux adultes". Le livre, texte provocateur et vigoureux qui contient des "scènes sales", dixit Jacques Chessex lui-même, raconte les six derniers mois de Donatien Alphonse François, marquis de Sade - alors âgé de 74 ans et enfermé depuis onze ans avec les fous à l'hospice de Charenton -, sa fureur de transgresser et de blasphémer jusqu'à sa mort, en décembre 1814, ses frénésies sexuelles et ses ébats scatophiles avec une jeune fille de quinze ans et demi. Suit le récit de ce qu'il advint du crâne du Divin Marquis, récupéré en 1818 dans sa tombe par son propre médecin. C'est devant le caractère particulièrement sulfureux des chapitres VII, VIII et IX, qui mettent en scène le vieillard libertin et la jeune fille, apprentie repasseuse à l'hospice de Charenton, que la maison vaudoise Diffulivre, chargée de commercialiser en Suisse les productions des éditions Grasset, a pris peur, choisissant sur les conseils de juristes d'appliquer le "principe de précaution" aux 10 000 exemplaires suisses du roman. Il y a quelques mois, la bande dessinée pour adultes de Zep, Happy Sex, autrement plus anodine que le livre de Chessex, avait aussi été vendue avec les mêmes précautions, sous cellophane. "La loi suisse est beaucoup plus contraignante qu'en France", explique Frédéric Auburtin, directeur commercial de Diffulivre, qui se défend farouchement d'avoir ainsi voulu faire un coup de marketing, comme l'en accusent certains. "Nous nous serions bien passés de cette opération, qui a entraîné un gros surplus de travail pour emballer les livres", dit-il. Avec un gorille Au nom de la lutte contre la pornographie dure, l'article 197 du code pénal helvétique énonce que celui qui aura fabriqué ou diffusé auprès des moins de 16 ans des "objets et des représentations (...) ayant comme contenu des actes d'ordre sexuel avec des enfants, des animaux, des excréments humains ou comprenant des actes de violence" pourra être condamné à une peine maximale de prison de trois ans et à une amende, et ses productions confisquées. En quoi le roman de Jacques Chessex était-il concerné, puisque le même article du code pénal indique que les oeuvres qui ont "une valeur culturelle ou scientifique digne de protection" ne peuvent être considérées comme pornographiques ? "Nous avons estimé que nous risquions quelque chose. Il suffit qu'une personne dépose une plainte pour qu'un diffuseur ou même un libraire puisse être condamné, explique M. Auburtin. Je ne m'attendais pas à ce que Chessex sorte un roman comme celui-là, en mentionnant en particulier l'âge de la jeune fille", ajoute-t-il. Il rappelle ainsi que, en 2000, le directeur de Diffulivre avait écopé d'une peine de prison avec sursis et d'une amende personnelle pour avoir commercialisé une bande dessinée où l'on voyait les ébats d'une jeune fille et d'un gorille. D'autres précédents ont été recensés ces dernières années. En septembre 2008, une descente de police avait eu lieu dans la librairie Payot de La Chaux-de-fonds (canton de Neuchâtel). Se fondant cette fois-ci sur une loi cantonale de 2006 contre la prostitution et la pornographie, les forces de l'ordre avaient estimé que cinq livres érotiques, mais également deux livres d'art, l'un sur Modigliani et l'autre contenant les carnets érotiques de Picasso, ne devaient pas tomber entre toutes les mains. Le gérant de la librairie était entendu par la police et on lui suggérait de déplacer le "matériel" en question, voire de le mettre sous cellophane. L'affaire avait ensuite été transmise au parquet, se soldant finalement par un non-lieu. Agathe Duparc
08/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/08/en-suisse-l-ultime-livre-de-jacques-chessex-reserve-aux-adultes_1289176_3260.html
Hip-hop, rock ou jazz : panorama des concerts de rentrée
De Sanseverino à Oumou Sangaré, des spectacles musicaux dans toute la France.
En janvier, la rentrée jazz sera dominée par le centenaire de la naissance du guitariste Django Reinhardt (1910-1953) avec de nombreux concerts hommages, en particulier à Paris. Christian Escoudé présentera ainsi son nouveau trio gitan avec David Reinhardt et Jean-Baptiste Laya aux guitares le 19 janvier, au Sunside, avant de rejoindre le 20 janvier, cette fois avec Rocky Gresset, les Nuits manouches organisées à L'Alhambra du 19 au 30 janvier. Parmi les invités de ces Nuits, Tchavolo Schmitt (le 19), Angelo Debarre (le 26) - qui sera aussi le 15 au Carré Belle-Feuille de Boulogne-Billancourt et le 16 au Manège de Maubeuge - Raphaël Fays les 22 et 30 janvier ou le violoniste Costel Nitescu, le 28 janvier. Au Théâtre du Châtelet, le 21 janvier, une partie de ces musiciens seront présents aux côtés de Romane, Boulou et Elios Ferré, Marcel Azzola ou deux représentants de la chanson qui ont beaucoup fait pour re-populariser Django, Thomas Dutronc et Sanseverino. Enfin, à La Bourse du travail de Lyon, Biréli Lagrène est attendu le 29 janvier. Autre événement, toujours du côté de la guitare, mais cette fois dans son approche la plus moderne, avec l'Américain Pat Metheny, qui débute sa tournée mondiale en France, à Coutances (Manche), où il sera en résidence du 27 au 31 janvier, avec deux concerts, les 30 et 31, au Théâtre municipal. Puis passage à La Comète de Châlons-en Champagne le 1er février, à l'Olympia le 13, à l'Opéra Berlioz de Montpellier le 15 et au Théâtre Fémina de Bordeaux le 16 février. Un concert solo durant lequel Metheny présentera son nouvel album, Orchestrion, conçu avec un accompagnement instrumental généré par sa guitare. Côté festivals, Sons d'hiver, organisé du 29 janvier au 20 février dans une dizaine de salles du Val-de-Marne, a mis à son copieux programme free-rock-jazz des orchestres comprenant Hamid Drake, William Parker, Neneh Cherry, Régis Huby, Sarah Murcia, Roscoe Mitchell, Michel Edelin ou les groupes Living Colour avec The Last Poets et le World Saxophone Quartet. Autre festival, Banlieues Bleues, en Seine-Saint-Denis, est prévu du 12 mars au 16 avril avec peu d'informations à ce jour sur son programme, mais déjà l'annonce de la venue du tromboniste George Lewis et du saxophoniste Archie Shepp. Des "Musiques en résistance" seront reçues du 12 au 16 février à la Cité de la musique (les groupes touaregs Tartit et Tinariwen, les Indiens navajos de Black Fire, la chanteuse tibétaine Yungchen Lhamo et Sainkho Namtchylak, originaire de Touva...). Le 25 avril, ce sera le tour des traditions et des modernités d'un territoire mal connu, Mayotte, de s'inviter à La Villette. L'événement chanson de la rentrée, c'est le retour sur scène de Jacques Dutronc, 66 ans, pour une longue tournée de plus de cinquante dates, prévue du 8 janvier (Théâtre de l'Agora d'Evry) au 5 juin (Palais des sports de Paris) dans des grandes salles de type Zénith (dont celui de Paris, du 12 au 16 janvier). En espérant que le je-m'en-foutiste Dutronc donnera un spectacle musicalement un peu plus tenu que lors de sa précédente tournée, en 1993. Autre retour, après une absence moins longue, celui de Jacques Higelin, pour une tournée d'une vingtaine de dates du 20 janvier (La Cigalière, à Sérignan) au 4 juin (Cité des congrès de Nantes) avec installation du 9 au 14 mars à La Cigale, à Paris, le genre de salle moyenne qui réussit particulièrement à Higelin. On prêtera aussi une oreille attentive aux concerts parisiens de quelques jours consécutifs de Sanseverino, au Bataclan du 3 au 6 février, et Richard Gotainer, au New Morning, du 23 au 27 février. Dans des univers artistiques différents, deux façons de mêler l'humour et le clin d'oeil à la musique. Camille, qui aime les projets parallèles et déviants, bénéficie d'une carte blanche au Louvre, jusqu'en juin, et crée un spectacle quelque peu baroque à la Chapelle royale de Versailles, les 3 et 4 février. Pour la planète rock, une curiosité avec l'acteur Kevin Costner et son groupe de country rock, Modern West, pour une date unique en France, le 22 février, à La Cigale, à Paris. Au rayon grosse bastonnade rap efficace, l'impressionnant 50 Cent sera le 25 février au Zénith de Paris. Le chanteur Peter Gabriel annonce deux concerts en Europe, avec un orchestre à cordes, mais sans guitares électriques ou batterie, comme dans son nouvel album, Scratch My Back (à paraître en février). Il s'agira, le 22 mars, de vérifier si ce machin d'un grand ennui prend un peu de vie et d'émotion sur la scène du Palais-omnisports de Paris-Bercy. Leonard Cohen brise les règles de rareté qu'il s'était imposées pour sillonner la France et ses Zénith (Caen, Lille, Strasbourg, Marseille, Grenoble et Tours, du 1er au 11 mars). Cohen est cosmopolite et poète, comme le sont les chanteurs, chanteuses et danseurs de flamenco convoqués à Nîmes pour fêter les vingt ans du Festival Flamenco (jusqu'au 23 janvier, avec Israël Galvan, Diego Carrasco, Inès Bacan, etc.) La Malienne Oumou Sangaré viendra chanter à Créteil, à l'occasion du Festival de film de femmes le 2 avril, et le 12, le Malien Salif Keita qui vient de publier un très beau disque, La Différence, fera son Olympia. Service musique
08/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/08/hip-hop-rock-ou-jazz-panorama-des-concerts-de-rentree_1289174_3246.html
Emeutes en Italie après une attaque raciste
Des immigrés ont incendié des voitures dans le sud de l'Italie pour protester contre l'attaque d'ouvriers africains par une bande de jeunes gens de la région.
Des immigrés ont incendié des voitures et brisé des vitrines, jeudi soir, dans le sud de l'Italie pour protester contre l'attaque d'ouvriers agricoles africains par une bande de jeunes gens de la région, a rapporté la police. La télévision a diffusé des images montrant des dizaines d'Africains brisant les vitres de voitures à l'aide de barres de fer et de pierres, et mettant le feu à des véhicules et à des poubelles. La police de Rosarno, en Calabre, a rapporté qu'une voiture au moins avait été attaquée alors que des passagers se trouvaient à l'intérieur et que plusieurs personnes avaient été blessées. Les immigrés, dont certains brandissaient des pancartes "Nous ne sommes pas des animaux" et "Les Italiens ici sont racistes", ont bloqué des routes et se sont heurtés à la police anti-émeutes. Plusieurs d'entre eux ont été arrêtés. A l'origine de ces incidents, des jeunes gens circulant en voiture avaient tiré avec une carabine à air comprimé sur un groupe d'immmigrés rentrant du travail, blessant plusieurs d'entre eux. Dans cette région, les immigrés sont employés comme journaliers pour la récolte des fruits et des légumes. Quelque 1 500 d'entre eux vivent dans des usines abandonnées, sans eau courante ni électricité, et des mouvements des droits de l'homme disent qu'ils sont exploités par le crime organisé.
08/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/08/emeutes-en-italie-apres-une-attaque-raciste_1289366_3214.html
Nicolas Sarkozy dégèle le budget de la culture
A la Cité de la musique, le président affirme sa volonté de passer aux actes en 2010.
En présentant, jeudi 7 janvier, à la Cité de la musique, à Paris, pour la première fois depuis son élection à la présidence de la République, ses voeux au monde de la culture, Nicolas Sarkozy venait en terrain hostile. "Certains doivent être étonnés de se trouver ici", s'amusait-il, provocateur. Alors il a apporté des cadeaux. Il a ainsi annoncé que "la totalité du budget du ministère de la culture" serait dégelé en 2010 "pour aider l'accomplissement des différents chantiers et réformes". Fini donc les 6 % bloqués, puis souvent amputés en fin de saison. La Rue de Valois et, par ricochet, les organismes subventionnés, devraient pouvoir compter sur l'intégralité des crédits. "La culture est une réponse à la crise", a-t-il défendu. Le président de la République a également voulu "tordre le cou aux insinuations malveillantes selon lesquelles l'Etat voudrait retirer aux collectivités locales leurs prérogatives en matière culturelle". La gauche et les employeurs du spectacle vivant réunis dans le Syndeac s'étaient alarmés des conséquences de la réforme en cours des collectivités territoriales. "Toutes les collectivités, des communes aux régions en passant par les intercommunalités et les départements, continueront à exercer leur compétence culturelle", a-t-il martelé. Fort de ces bonnes nouvelles, de son soutien affirmé aux mesures du rapport Zelnik en faveur du téléchargement légal ou de son engagement à remettre les architectes au coeur du projet de Grand Paris, Nicolas Sarkozy a évoqué un sujet moins consensuel : les subventions. "J'ai demandé l'an dernier que les aides soient accordées en fonction de l'excellence artistique des projets, de leurs vertus pédagogiques et éducatives, de la qualité de leur gestion, et non pas en fonction des traditions et des habitudes." Maintenant, "il faut aller au-delà et passer aux actes", a-t-il réclamé : "Redéfinir les programmes nationaux, revoir la carte des labels, les cahiers des charges." Est-il prêt à multiplier les mécontents en retirant ici ou là un statut de Centre dramatique-national ou de Scène nationale ? Dans l'assistance, de nombreuses personnes en doutaient. Les mêmes soupiraient devant un énième couplet, entendu depuis des années et peu suivi de faits, sur la "question essentielle : l'éducation artistique". Nicolas Sarkozy a recommandé que "tous les efforts" soient mobilisés, en 2010, sur la pratique. Que les écoles assument l'initiation dès le plus jeune âge par les chorales et les orchestres scolaires. Que les conservatoires prennent le relais. Enfin, M. Sarkozy a dit que le siège de la future "Maison de l'histoire de France" et les équipes pour la diriger seront choisis "d'ici au printemps". Nathaniel Herzberg
08/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/08/nicolas-sarkozy-degele-le-budget-de-la-culture_1289173_3246.html
Les bouleversements de la commande publique
Il y a vingt ans, la commande publique consistait essentiellement en monuments aux morts créés par des artistes dont on se demandait parfois s'ils étaient encore vivants.
Il y a vingt ans, la commande publique consistait essentiellement en monuments aux morts créés par des artistes dont on se demandait parfois s'ils étaient encore vivants : des lieux où la nation se fabriquait une mémoire, laissant place de temps en temps à quelques coups d'éclat, comme les fameuses colonnes de Daniel Buren. Aujourd'hui, ladite commande consiste aussi bien en broderies, photographies, murmures de voix dans un tramway, créations typographiques, compositions radiophoniques... Cette vision est certes caricaturale. Mais il n'en demeure pas moins vrai que ce processus de création a considérablement évolué depuis le début des années 1990. Son principe : un acteur public - qu'il s'agisse du ministère de la culture, sous la forme de son opérateur le Centre national des arts plastiques, ou des collectivités territoriales - invite un artiste à réaliser une oeuvre dans l'espace public. Après avoir connu un nouvel essor dans les années 1980 sous l'impulsion de Jack Lang, la commande publique s'est peu à peu modifiée en profondeur dans ses principes et surtout dans ses formes. Aujourd'hui, c'en est quasiment fini des "sculptures de rond-point". La dynamique de la décentralisation y est pour beaucoup, de nombreuses collectivités locales étant entrées dans la danse, notamment dans le cadre de grands chantiers comme les tramways ou les métros. Strasbourg, Bordeaux, Toulouse, Montpellier, Nice ont fait appel à d'importants plasticiens français ou internationaux, de Valérie Mréjen à Jaume Plensa, pour donner une autre forme de vie aux centres urbains. "Lieu de rencontre" "Ces changements ont bel et bien été désirés par les artistes, analyse Olivier Kaeppelin, à la tête de la délégation aux arts plastiques qui joue un rôle décisif dans ce type de commandes. Toute action publique en termes de création doit savoir s'adapter, ne jamais présupposer ce qu'est aujourd'hui la création." Selon lui, les artistes invités se sont mis à considérer dans toute leur envergure ces lieux où ils interviennent, qui ne sont pas dédiés à l'art, mais "permettent un autre type de rencontre et de mise sous tension, un nouveau rapport aux citoyens". Désormais, les artistes font de la ville un théâtre, conscients de ses flux et de ses mouvements. Fabrice Hyber a ainsi répondu à une commande du ministère de la culture et de l'association Sidaction, en évitant le monument allégorique, pour proposer plutôt "un lieu de rencontre", vaste sol de céramique dessinée que l'on peut arpenter. "Les plasticiens se sont mis à créer des oeuvres qui répondent au droit de tout promeneur à un appel à l'imaginaire, poursuit Olivier Kaeppelin. Buren en est le précurseur. Aujourd'hui, ils se refusent à poser une forme fonctionnelle ou décorative, même si certaines peuvent l'être magnifiquement, pour créer une oeuvre qui appartienne vraiment au tissu urbain." Toutes les formes sont désormais envisageables : une fontaine traversable, offerte par Jeppe Hein à Lorient ; des photographies témoignant de la jeunesse en France, commandées dans le cadre du festival de photojournalisme de Perpignan ; une horloge lumineuse créée dans une piscine de Belleville par Melik Ohanian ; une sculpture d'Antony Gormley dans le village de Caumont... De 1999 à 2009, plus de 5 000 oeuvres ont été commandées par l'Etat, elles se répartissent de la manière suivante: graphisme 5%, objets design et mobilier 6%, design textile 2%, nouveaux médias 3%, installation -sculpture 35%, aménagement paysager 5%, vitraux 7%, aménagement urbain 22%, peintures 6%, aménagement intérieur 3%, décor et chorégraphie 6%. Phénomène marquant de ces dix dernières années : l'oeuvre d'art s'est dématérialisée. La vidéo et la création numérique sont parvenues à s'imposer, notamment dans le cadre d'Entrée libre, espace virtuel d'oeuvres à télécharger, commandé par le ministère à une vingtaine d'artistes. Même les spectacles sont désormais de la partie. "Les collectivités territoriales n'ont plus peur de réaliser des commandes éphémères, qui ne durent que le temps d'un festival", remarque Olivier Kaeppelin. Ainsi de la passerelle du Japonais Tadashi Kawamata, réalisée pour Bordeaux en octobre 2009, ou de la projection de visages réalisée à Marseille par Beat Streuli en 1999. Le graphisme, la bibliophilie ou la céramique ne sont pas non plus négligés, pas plus que le textile, qui fait l'objet d'un travail très novateur depuis dix ans. Ce qui n'empêche pas l'apparition de quelques chefs-d'oeuvre de la monumentalité, comme l'ancienne aciérie lorraine d'Uckange transformée en 2008 par Claude Lévêque en sublime son et lumière. Lieu de mémoire, par un artiste magnifiquement vivant. Emmanuelle Lequeux
08/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/08/les-bouleversements-de-la-commande-publique_1289172_3246.html
Les colonnes de Buren retrouvent leur lustre
L'oeuvre du sculpteur, qui avait suscité tant de polémiques en 1986, a été restaurée dans la cour du Palais-Royal.
Il faut écarter la neige avec le pied pour découvrir l'asphalte. Et tâtonner un peu avant de trouver les "lucioles", ces petites lumières scellées dans le sol qui éclaireront à nouveau les colonnes de Buren, la nuit venue : rouge d'un côté, vert de l'autre. Jusqu'au dernier moment, le chantier aura été épique, mais il est terminé. Vendredi 8 janvier, le ministre de la culture, Frédéric Mitterrand, qui a ses bureaux juste au-dessus, devait dévoiler, place du Palais-Royal, à Paris, l'oeuvre restaurée de l'artiste Daniel Buren, intitulée Les Deux Plateaux, ouverte au public depuis l'été 1986, et dont l'installation avait suscité la polémique. Jeudi, à la veille de la cérémonie, l'architecte Jean-Christophe Denise, un proche de Daniel Buren qui a supervisé le chantier, se retrouvait seul à déblayer "la patinoire". Pas un seul employé du ministère pour nettoyer la cour d'honneur où se dressent les 260 colonnes zébrées de marbre noir et de granito blanc. Mais peu importe : "L'Etat a fait les travaux en grand, mieux qu'à l'époque de la construction des colonnes", se félicite Jean-Christophe Denise. Il en sait quelque chose : au milieu des années 1980, jeune stagiaire de Buren, c'est lui qui avait réalisé la maquette des Deux Plateaux. L'architecte Patrick Bouchain avait assuré la maîtrise d'oeuvre : "Les colonnes avaient déchaîné une telle polémique qu'il avait fallu terminer dans l'urgence. Je les ai mal finies", explique-t-il aujourd'hui. L'Etat avait également rogné sur le budget de la chape : "Je voulais une étanchéité durable, d'au moins soixante-dix ans. Mais on m'avait répondu : si ça tient douze ou quinze ans, ce sera déjà ça...", raconte Daniel Buren. Ce qui devait arriver arriva : l'installation s'est dégradée, de l'eau s'est infiltrée dans les sous-sols, où la Comédie-Française dispose de locaux. Très fréquentées, notamment par les skate-boarders, les Colonnes ont aussi été victimes de leur succès. "Avant la réfection, cela faisait douze ans que le système électrique et la fontainerie ne fonctionnaient plus", résume l'artiste. Depuis le milieu des années 1990, les ministres de la culture se sont succédé. Certains ont promis des travaux qui ne venaient pas... Daniel Buren préfère retenir le nom du ministre "qui a eu le courage d'aller jusqu'au bout" : "C'est Christine Albanel, il y a deux ans. J'avais menacé de faire un procès contre l'Etat pour défaut d'entretien." Le chantier a démarré en novembre 2008. Classée monument historique, l'oeuvre a dû être rénovée sous la direction de l'architecte en chef des monuments historiques, Alain-Charles Perrot. Sur le terrain, Jean-Christophe Denise veillait au grain. Pas question de toucher à l'oeuvre. Certains, au ministère, ont ainsi proposé de remplacer le sol en asphalte par du granit. "Je m'y suis opposé, c'était contraire à l'esprit de l'oeuvre, inscrite dans l'urbain", indique Daniel Buren. La réfection a essentiellement porté sur des aspects techniques : circulation de l'eau en sous-sol, circuit électrique, étanchéité, nettoyage des colonnes, etc. Le coût s'élève à 5,3 millions d'euros pour l'Etat, auxquels s'ajoutent 500 000 euros de mécénat. Cette fois-ci, les palissades de chantier n'ont pas été graphitées par des opposants, comme ce fut le cas en 1985-1986. "Pierre Guyotat avait alors écrit un très beau texte en écho à ces palissades. Mais il n'avait pas réussi à le faire éditer. Là, le livre va sans doute sortir dans deux ou trois mois", se réjouit Daniel Buren. Tout arrive. Clarisse Fabre
08/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/08/les-colonnes-de-buren-retrouvent-leur-lustre_1289171_3246.html
Saab est placé en liquidation judiciaire
Le constructeur d'automobiles suédois, en difficulté, a été placé en liquidation judiciaire, a annoncé le principal syndicat de l'industrie suédois.
Le constructeur d'automobiles suédois en difficulté Saab, pour lequel le propriétaire américain General Motors vient de recevoir plusieurs offres, a été placé en liquidation judiciaire, vendredi 8 janvier, a annoncé le principal syndicat de l'industrie suédois. "La direction de Saab Automobile a décidé aujourd'hui de placer l'entreprise en liquidation judiciaire", indique IF Metall, dont un représentant est membre du conseil d'administration de Saab, dans un communiqué dénonçant une décision "irresponsable". "GM fait ainsi un pas de plus dans le démantèlement de Saab", poursuit le syndicat. "C'est irresponsable de la part de GM d'avoir tiré dans deux directions différentes, celle d'une vente et celle d'un démantèlement", dénonce le président d'IF Metall, Stefan Lijfven, cité dans le communiqué. Plusieurs groupes, dont le néerlandais Spyker et un fonds associé à l'argentier de la F1 Bernie Ecclestone, ont exprimé leur intérêt pour une reprise de dernière minute de Saab, sans changer dans l'immédiat l'intention de General Motors de continuer à démanteler sa filiale.
08/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/08/saab-est-place-en-liquidation-judiciaire_1289342_3234.html
Pulsions identitaires dans les assiettes
Les esprits sont si échauffés que la nourriture des sujets du royaume est sujet de disputes qui embrasent jusqu'aux lucarnes officielles.
De Usbek à Roxane au sérail d'Ispahan. A la façon des Lettres persanes, considérations sur la comédie identitaire des Français. Lettre XXXVI supplémentaire. De Paris, le 7 de la lune de Moharram. Je vous envie, chère Roxane, d'être dans le doux pays de Perse, et non pas dans ces climats empoisonnés où l'on ne connaît ni la pudeur ni la vertu. De beaux esprits s'affrontent ici sur les sujets les plus minces et parfois les plus graves par le truchement d'étranges lucarnes où chacun peut sans dévoiler son nom, donner un avis incongru sur un sujet d'importance à l'occasion d'un étrange débat sur l'identité des habitants de ce pays, provoqué par l'un des vizirs sur ordre du Grand Shah. Les esprits sont si échauffés que la nourriture des sujets du royaume - dont la réputation, chère Roxane, est parvenue jusqu'à vos chastes oreilles - est sujet de disputes qui embrasent jusqu'aux lucarnes officielles. Un quidam mal intentionné ayant rapporté que plusieurs auberges à l'enseigne de Quick avaient décidé de ne servir à leurs hôtes que des viandes licites - halal, selon notre Coran, "c'est-à-dire issues de bêtes égorgées têtes tournées vers La Mecque" - se voit aussitôt répondre : "Ben, moi, j'en veux pas de la viande sur laquelle on a procédé au rite d'une religion à laquelle je n'adhère pas du tout... mais pas du tout !" Un troisième stigmatise "un trouble à l'ordre public (qui) appelle une action." Laquelle grand Dieu ? Celle peut-être que l'on faisait subir aux hérétiques au temps de la Sainte Inquisition en les revêtant d'une chemise de soufre avant d'y mettre le feu ? Faut-il alors comme antidote, dit un autre, "faire bénir la bûche de Noël par le pape ?" Ceux dont je viens de parler disputent en langue vulgaire ; il faut les distinguer d'une autre sorte de disputeurs qui se servent d'une langue savante : "La vache, le mouton, la chèvre, l'orignal, le poulet, le canard, etc., sont halal (autorisés), mais ils doivent être zabihah (égorgés selon le rite islamique) pour être bons à la consommation", commente un prosélyte. Cette juste opinion, chère Roxane, ne fait qu'ajouter à l'opiniâtreté des combattants : "Je suis végétarienne, les carottes halal c'est pas pour demain", écrit l'une ; "On devrait aussi imposer la charia !", et encore : "Je ne mangerai plus chez Quick, je suis catholique et français." Il rejoint l'opinion de celui pour qui "être français, c'est tartiner avec délicatesse une fine part de camembert sur une tranche de pain croustillant, le tout accompagné d'un bon rouge qui tache (sic)". Querelle d'ivrogne, avait prévenu Rabelais, en racontant la guerre picrocholine. Le débat identitaire sur la cuisine tourne à la chasse au mahométan. Comment pouvait-il en être autrement dans ce pays querelleur, où Toulouse, Carcassonne et Castelnaudary revendiquent chacun l'authenticité du cassoulet ? La gastronomie est le révélateur des pulsions d'un peuple. Beaucoup dénoncent ici ce débat comme un calcul politique destiné à exacerber les passions. Je ne crains rien pour une nation dont l'un des présidents du Conseil disait : "La politique, c'est comme l'andouillette, ça doit sentir un peu la merde mais pas trop." Réjouissez-vous, Roxane, en notre sérail d'Ispahan, de savoir que le couscous de nos coreligionnaires du Maghreb, ici, reste plébiscité dans les cantines des manufactures de France. Sur le Web : Ribaut.blog.lemonde.fr. Jean-Claude Ribaut
08/01/2010
vous
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Le sport et la culture hauts en couleur
Nous ne sommes ni à Rotterdam ni à Berlin, mais à Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), sur l'ancien site des usines Dassault.
Les hangars où furent construits les fameux avions ont cédé la place à une singulière construction bigarrée : le Centre sportif et culturel Saint-Exupéry. Un audacieux bâtiment en béton, pourvu de deux blocs suspendus et revêtus de vitrages colorés du rouge au vert, qui ne passe pas inaperçu dans ce quartier résidentiel proche de la station des Coteaux. Un même code couleur permet, à l'intérieur, de "se laisser guider", explique Christophe Ouhayoun, architecte de l'agence Koz, lauréat avec Nicolas Ziesel du concours lancé par la municipalité. D'un côté du bâtiment, des pistes d'escrime, une salle de pan à 40 % pour les amateurs d'escalade et plusieurs terrains de sport ; de l'autre, le coin des activités de loisirs et la bibliothèque. Au total : quelque 1 600 mètres carrés (dont une terrasse de 300 m2), pour accueillir les Clodoaldiens friands de sensations et de connaissances. Martine Picouët
08/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/08/le-sport-et-la-culture-hauts-en-couleur_1289179_3238.html
Des souris sauvées d'Alzheimer par la téléphonie mobile ?
L'exposition à des radiofréquences aurait amélioré la mémoire de rongeurs souffrant de neurodégénérescence.
Utilisées pour la téléphonie mobile, les ondes de radiofréquences auraient-elles des effets bénéfiques sur la maladie d'Alzheimer ? Aussi surprenante qu'elle paraisse, la question est soulevée par une étude menée sur des souris par une équipe composée de chercheurs de l'université de la Floride du Sud (Etats-Unis), de l'université médicale de Saitama (Japon) et de l'université médicale de Dalian (Chine). Le travail de ces scientifiques, qui déclarent n'avoir aucun conflit d'intérêts avec l'industrie téléphonique, est publié mercredi 6 janvier dans le Journal of Alzheimer's Disease. "Cet article rapporte la première preuve qu'une exposition à long terme à un champ électromagnétique (CEM) directement associé à l'utilisation d'un téléphone mobile (918 MHz ; 0,25 W/kg) entraîne un bénéfice cognitif", écrivent Gary Arendash et ses collègues. Les chercheurs indiquent que des effets cognitifs protecteurs et des effets renforçant les performances cognitives ont été découverts tant chez des souris normales que chez celles génétiquement modifiées pour développer des anomalies de type Alzheimer. En pratique, 96 souris, réparties en quatre groupes, ont été utilisées. L'exposition de deux fois une heure par jour aux ondes de radiofréquences était standardisée et a duré de sept à neuf mois : les cages où se trouvaient les animaux comportaient une antenne centrale générant un signal de téléphonie mobile. Soumises au CEM lorsqu'elles étaient de jeunes adultes, avant que des symptômes d'Alzheimer n'apparaissent, les souris transgéniques n'ont pas eu d'altération de leurs capacités cognitives. Lorsque l'exposition intervenait à un âge plus avancé, alors que les symptômes de la maladie étaient apparus, les atteintes de la mémoire, évaluée par des tests, ont disparu. Plus étonnant encore, les souris normales ont montré une amélioration de leurs performances mnésiques. Pour expliquer des résultats qu'ils qualifient eux-mêmes d'étonnants, les auteurs évoquent plusieurs mécanismes possibles, qui peuvent se compléter : suppression de l'agrégation des plaques amyloïdes, phénomène-clé dans l'installation de la maladie d'Alzheimer ; augmentation de l'activité des neurones, mais aussi augmentation de la température de 1 degré dans le cerveau des souris exposées. Des études avaient déjà indiqué une amélioration de performance de la mémoire et certaines thérapeutiques reposent sur les CEM, mais il est prématuré d'en tirer des conclusions définitives. "Il faut être prudent dans l'extrapolation de nos résultats à l'utilisation du téléphone mobile et à l'exposition aux CEM chez les humains", mettent en garde les auteurs. Paul Benkimoun
08/01/2010
planete
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Il y a 400 millions d'années, les traces boueuses de nos origines
Des traces de pas, retrouvées dans la zone de Zachelmie, au sud-est de la Pologne, bouleversent la théorie de la sortie des eaux en prouvant qu'il existait des animaux à quatre membres, ou tétrapodes, il y a 400 millions d'années.
Des traces de pas, retrouvées dans la zone de Zachelmie, au sud-est de la Pologne, bouleversent la théorie de la sortie des eaux en prouvant qu'il existait des animaux à quatre membres, ou tétrapodes, il y a 400 millions d'années. Une équipe internationale s'est penchée sur ces traces, où des marques de doigts se laissent deviner. Les chercheurs ont pu prouver qu'elles ont été laissées par des tétrapodes de 0,5 à 2 mètres de long, dans la boue d'un milieu marin peu profond, probablement un lagon ou une zone soumise à l'action des marées. Cette découverte chamboule complètement la théorie classique de la sortie des eaux, c'est-à-dire de la transition entre les poissons aquatiques et les tétrapodes terrestres, à une période jusqu'alors située entre 391 et 359 millions d'années. Le squelette le plus ancien d'un tétrapode découvert à ce jour est plus récent de 18 millions d'années que ces traces de pas. En outre, l'environnement écologique invoqué pour justifier la transition entre poissons et tétrapodes est classiquement celui d'un delta de rivière ou d'un lac ; l'étude incite plutôt à envisager un milieu marin, voire lagunaire. Cette étude montre enfin que les poissons "tétrapodomorphes" et les tétrapodes ont coexisté, contrairement à la pensée en vigueur qui fait de ces poissons des formes de transition entre poissons "à nageoires" et tétrapodes "à membres". Les tétrapodes de Zachelmie seraient même plus anciens que ces poissons "tétrapodomorphes". De quoi relancer les études de terrain sur leurs mystérieux ancêtres communs. (Niedziwiedzki et al., in "Nature" du 7 janvier). Agathe Chaigne
08/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/08/il-y-a-400-millions-d-annees-les-traces-boueuses-de-nos-origines_1289150_3244.html
Un nouvel ancêtre viral de l'homme
La découverte dans nos gènes du fossile génétique d'un bornavirus responsable d'encéphalites interroge la virologie, la théorie de l'évolution et peut-être... la psychiatrie.
Exhumer de nouveaux ancêtres d'Homo sapiens n'implique pas forcément de gratter la terre. On peut, aussi, fouiller ses chromosomes à la recherche de gènes exotiques et découvrir des branches singulières à son arbre généalogique. En témoignent les travaux de chercheurs américains et japonais, dirigés par Masayuki Horie et Tomoyuki Honda (université d'Osaka), publiés jeudi 7 janvier dans la revue Nature, qui documentent l'existence de l'un de nos aïeux jusqu'ici inconnu. Celui-ci est un petit virus, de la famille des bornavirus ; il a légué, il y a quelque 40 millions d'années, quatre séquences génétiques à l'ancêtre des primates. Qu'un virus compte au nombre des ancêtres d'animaux ou de plantes n'est cependant pas une surprise en soi. On sait déjà qu'environ 8 % du génome humain est composé de séquences génétiques virales. Mais celles-ci proviennent exclusivement de rétrovirus : ceux-ci ont en effet la propriété d'insérer leur génome dans celui des cellules qu'ils infectent. Imaginons que les cellules germinales (spermatozoïdes ou ovules) d'un animal sont infectées par de tels virus : la descendance de l'animal en question reçoit un patrimoine génétique modifié, agrémenté des gènes du microscopique parasite. Cette modification génétique sera, ensuite, transmise verticalement à l'ensemble de la descendance de l'être touché par l'infection... "Ici, la nouveauté est que les séquences détectées dans des génomes de mammifères proviennent d'un virus qui n'est pas un rétrovirus, explique le biologiste Cédric Feschotte (université du Texas à Arlington). La première question posée par ces travaux est donc de savoir comment un bornavirus a été capable de s'intégrer dans le génome de nos ancêtres." D'abord, contrairement aux rétrovirus, les bornavirus ne sont pas outillés pour mener à bien cette invasion génétique. Il leur manque la capacité à produire eux-mêmes une enzyme nécessaire à transformer leur patrimoine génétique en ADN "compatible" avec celui de leur hôte. Pour ce faire, il est probable, expliquent les auteurs, que le petit bornavirus soit parvenu à utiliser à son profit les outils du génome même qu'il allait coloniser. Une telle capacité à "pirater" le matériel génétique de son hôte a déjà été mis en évidence chez un autre virus. D'autre part, les bornavirus sont réputés infecter le cerveau de leur victime, non leurs cellules germinales. Les virus semblables qui circulent aujourd'hui sont ainsi responsables de foudroyantes encéphalites chez les chevaux et d'autres grands herbivores... Depuis quelques années, certaines équipes de recherche suggèrent même un lien entre infection par un bornavirus et apparition, chez l'homme, de sévères troubles psychiatriques, comme la schizophrénie. Ces travaux sont toutefois encore préliminaires et très débattus. Comment un virus à ce point porté à infecter les cellules cérébrales s'est-il retrouvé dans les cellules germinales de son hôte, pour se transmettre à la descendance de celui-ci ? Cette question demeure ouverte. "Elle est d'autant plus troublante que l'introduction, il y a 40 millions d'années, d'un bornavirus dans le génome des primates n'est pas un cas isolé, dit le biologiste Christophe Terzian (Ecole pratique des hautes études). La même équipe montre par exemple l'insertion d'un bornavirus, il y a 10 millions d'années, dans le génome de l'écureuil..." Autre fait étonnant, ajoute Cédric Feschotte, "sur les quatre séquences génétiques identifiées (chez les primates) comme issues du bornavirus, deux sont des gènes potentiellement fonctionnels et sont donc théoriquement capables de produire des protéines". Ces protéines sont-elles bien synthétisées ? A quoi servent-elles ? "Le travail publié ne permet pas de le dire, répond Christophe Terzian. Mais si elles se sont conservées au cours de l'évolution, c'est vraisemblablement qu'elles avaient une utilité : peut-être offrent-elles une forme d'immunité contre les bornavirus, ou peut-être leur fonction a-t-elle été "domestiquée" par l'hôte." De tels exemples de "domestication" existent bel et bien. Ainsi, les gènes qui permettent la synthèse du placenta chez l'homme (c'est aussi le cas chez la majorité des mammifères) sont directement hérités de rétrovirus. Pour autant, si certaines fonctions génétiques héritées du monde viral sont effectivement actives - et utiles - au fonctionnement de notre organisme, la majorité d'entre elles sont réduites au silence par des mécanismes de répression de l'expression des gènes. Or certains travaux montrent que, en cas de défaut de ces processus de répression, certaines maladies peuvent se déclencher. "C'est très spéculatif, mais il est désormais possible d'imaginer que des dérèglements de l'expression des séquences du bornavirus insérées dans nos chromosomes puissent provoquer certaines maladies neurologiques", conclut M. Terzian. Stéphane Foucart
08/01/2010
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https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/08/un-nouvel-ancetre-viral-de-l-homme_1289146_3244.html
Les vertus cachées du khôl égyptien
Les textes antiques soulignaient les pouvoirs curatifs des cosmétiques à base de plomb, considéré aujourd'hui comme toxique. Une équipe française vient de confirmer la sapience des Anciens.
L'art médical, dans l'Egypte ancienne, faisait déjà l'objet d'une codification poussée. En témoigne le papyrus Ebers, trouvé en 1862 à Louxor. Long de 20 mètres sur 30 centimètres de large, il rassemble en 877 paragraphes la connaissance déjà accumulée entre les XVIIe et XIVe siècles avant l'ère chrétienne (selon les datations). Ainsi de l'ophtalmologie : "Autre (remède), pour chasser l'exsudat-khent qui est dans les yeux : galène : 1/32 ; suc de baumi r : 1/16 ; calamine : 1/16 ; ocre rouge (tjerou) : 1/64 ; minéral-sia du Sud : 1/64. (Ce) sera broyé finement, préparé en masse homogène, et placé dans les yeux jusqu'à ce qu'ils guérissent parfaitement." (Traduction de Thierry Bardinet, 1995.) Toute la difficulté, pour les chercheurs qui souhaiteraient vérifier l'efficacité de ces remèdes - et s'en inspirer, comme certains le font à travers l'ethnopharmacologie -, est de déterminer la nature exacte des multiples ingrédients cités dans ces manuscrits. La chimie moderne peut les y aider, comme le prouve une aventure scientifique de longue haleine, conduite par des équipes françaises, et qui vient de trouver son épilogue dans la revue Analytical Chemistry de janvier. Elle aboutit à la conclusion que le plomb qui entrait dans la composition des khôls, loin de menacer la santé des Egyptiens - comme le laisserait supposer la toxicologie moderne -, leur assurait au contraire une protection contre les infections oculaires. "Nous sommes partis des flacons" : il y a dix ans, Philippe Walter (Centre de recherche et de restauration des musées de France-CNRS) et ses collègues avaient analysé les résidus trouvés dans des dizaines de "trousses à maquillage" tirées des collections égyptiennes du Musée du Louvre. Ils avaient montré que quatre composés à base de plomb entraient dans la composition de ces khôls : la galène, qui assure les tons noirs et le brillant, ainsi que trois matières blanches, la cérussite, la phosgénite et la laurionite. La présence de ces deux derniers composés constituait une surprise, car ils n'existent pas à l'état naturel. En revanche, des auteurs comme le Romain Pline l'Ancien (23-79 après J.-C.) ou le Grec Dioscoride (40-90 après J.-C.) indiquent qu'ils étaient synthétisés intentionnellement pour leur propriété médicale, rappelle Philippe Walter. "Certains écrasent une livre de sel avec une quantité égale d'écume d'argent (oxyde de plomb ou litharge), sous le soleil, avec de l'eau continuellement décantée, jusqu'à ce qu'elle devienne blanche", précisait même ce dernier dans son De materia medica. Durée des opérations : quarante jours... Philippe Walter et sa collègue Pauline Martinetto ont suivi la recette et ont bien abouti à la production de laurionite. Avec un mélange de sel et de natron, un carbonate de sodium aussi utilisé dans la momification, on obtient la phosgénite. Mais que l'on s'écarte un tant soit peu du taux d'acidité voulu, et de tous autres composés dériveront de cette "chimie douce", à base de solutions non chauffées (Le Monde du 7 février 1999). Les Egyptiens, lorsqu'ils cernaient leurs paupières de ces fards sombres, si complexes à formuler et à obtenir, faisaient-ils seulement preuve de coquetterie ? Ou cherchaient-ils par là à se protéger des multiples infections microbiennes qui les menaçaient, dans un environnement de marais gonflés par les respirations du Nil ? "Il faut noter que l'ensemble de la population, hommes, femmes et enfants, de toutes classes sociales, employaient ces cosmétiques", rappelle Philippe Walter. Et deux millénaires plus tard, les Romains avaient, semble-t-il, retenu la leçon, indique le chercheur : "On s'en sert pour les collyres, et en pommade pour faire disparaître chez les femmes les cicatrices disgracieuses et les taches de la peau, et pour se laver les cheveux", écrivait ainsi Pline l'Ancien dans son Histoire naturelle. Pour tester les vertus prophylactiques des composés de plomb, les chercheurs du Louvre se sont associés aux chimistes de l'équipe de Christian Amatore (ENS, CNRS, université Pierre-et-Marie-Curie). "Quand Philippe Walter m'a parlé de cet aspect médical, j'ai pensé que les ions plomb ressemblaient à ceux du calcium, et qu'ils pouvaient induire une confusion biochimique vis-à-vis des cellules", raconte celui-ci. Les ions calcium sont eux-mêmes impliqués dans l'activation des défenses immunitaires. Se pouvait-il que le plomb du khôl joue le même rôle ? Pour valider cette hypothèse, Issa Tapsoba, de l'équipe de Christian Amatore, a utilisé une "synapse artificielle", capable de flairer les moindres composés émis par une cellule soumise à un stimulus (lire ci-dessous). En l'occurrence, il a testé la réponse de dizaines de kératinocytes, des cellules de peau humaine, à des bouffées de diverses concentrations de laurionite. "Ces cellules étaient effectivement stimulées, et émettaient jusqu'à 2,5 fois plus de monoxyde d'azote", résume Christian Amatore. Or le monoxyde d'azote est un composé qui induit la dilatation des capillaires, ce qui aide les macrophages, ces cellules tueuses de microbes, à accéder au lieu d'infection éventuel. "Cela confirme le rôle protecteur de ce maquillage, qui n'était pas disposé sur les cils, mais sur l'épaisseur même de la bordure de la paupière. Si bien qu'à chaque fois que l'on fermait l'oeil, celui-ci était balayé par l'onguent", explique Christian Amatore. Selon lui, il faut imaginer les Egyptiens avec les yeux injectés de sang, le système immunitaire non spécifique sans arrêt en éveil : "S'il y avait en permanence des "patrouilleurs" macrophages dans l'oeil, les bactéries n'avaient aucune chance", avance-t-il. Resterait, pour parfaire la démonstration, à tester in vivo l'efficacité de la recette égyptienne en présence de bactéries. "Sur le plan éthique, ce serait irrecevable", rappelle Christian Amatore Faut-il supposer que les Egyptiens avaient conscience du mécanisme en jeu ? "Pas plus que les peuples qui se soignaient avec de l'écorce de saule ne savaient qu'ils ingéraient en fait de l'aspirine", répond Christian Amatore. Pour autant, il faut bien envisager que l'usage d'une chimie synthétique élaborée à des fins médicales n'a pas été fortuit. "Ont-ils fait des expériences ?, s'interroge Philippe Walter. Nous ne le saurons jamais." Etaient-ils conscients qu'en utilisant le plomb de façon moins parcimonieuse, ils se seraient exposés à d'autres maladies, comme c'est le cas de certains enfants d'aujourd'hui, quand ils ingèrent le surma (un khôl indien) qui a coulé sur leurs mains ? C'est probable. Des siècles plus tard, l'héritier de la sagesse égyptienne, Pline l'Ancien, avait noté que les femmes employaient le carbonate de plomb "pour se blanchir le teint". Mais il précisait bien que "prise à l'intérieur, la céruse est un poison, comme l'écume d'argent". Hervé Morin
08/01/2010
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Tensions diplomatiques après un accrochage entre baleiniers japonais et écologistes
Le trimaran d'une association de défense des cétacés a sombré le 6 janvier, provoquant la colère en Australie et en Nouvelle-Zélande.
Chaque année, durant l'été austral, la campagne de chasse à la baleine menée par les Japonais dans les eaux antarctiques suscite l'émoi en Australie et en Nouvelle-Zélande. Le naufrage de l'Ady-Gil, trimaran de l'association Sea Sheperd heurté en pleine mer par un vaisseau nippon, le Shonan-Maru-n°2, mercredi 6 janvier, dans lequel les deux parties se rejettent la responsabilité de l'incident, marque une escalade dans la bataille que se livrent pêcheurs et défenseurs des baleines. Depuis quelques années, les affrontements se multiplient entre les baleiniers et l'organisation Sea Sheperd, menée par le médiatique Paul Watson. Les six personnes embarquées à bord du trimaran ont pu être secourues. La Nouvelle-Zélande, pays dont l'Ady-Gil porte pavillon, et l'Australie - l'accident a eu lieu dans une zone où celle-ci est responsable des secours - vont mener une enquête. Le ministre néo-zélandais des affaires étrangères, Murray McCully, a rappelé que "le gouvernement néo-zélandais est totalement opposé à la campagne à la baleine japonaise, mais nous sommes aussi opposés à ce que des êtres humains soient tués là-bas". "Guerre de la baleine" Côté australien, la question embarrasse le gouvernement de Kevin Rudd. En 2007, lors des dernières élections, le Parti travailliste avait menacé de déposer une plainte internationale contre le Japon s'il arrivait au pouvoir. Un navire des douanes a collecté des images de la campagne de pêche en 2008, afin de les utiliser en cas de litige avec le Japon, pour le gouvernement qui a choisi de privilégier, jusqu'à présent, la voie diplomatique. Jeudi 7 janvier, la vice-premier ministre, Julia Gillard, a déclaré que le gouvernement allait continuer de défendre sa position auprès de Tokyo. "Si, finalement, la question de la pêche à la baleine ne peut être résolue par la diplomatie, nous nous conservons le droit de mener une action légale internationale", a-t-elle commenté, alors que de nombreuses voix s'élèvent en Australie pour réclamer une réaction plus virulente. Le porte-parole de Sea Sheperd, Paul Watson, a estimé que la confrontation était en train de se transformer en "vraie guerre de la baleine". L'Andy-Gil, un trimaran futuriste noir en carbone et kevlar pouvant atteindre la vitesse de 93 km/h, a sombré alors qu'il était en voie de remorquage. Côté japonais, les réactions ont été également été très vives. Jeudi, Tokyo a adressé une protestation officielle à la Nouvelle-Zélande et demandé l'ouverture d'une enquête. La flotte japonaise avait appareillé pour les mers australes le 3 décembre de Shimonoseki, port de tradition baleinière, pour sa campagne annuelle de chasse, avec pour objectif de prendre 935 baleines de Minke et 50 rorquals communs. Tokyo affirme agir "à des fins scientifiques", ce qui lui permet de profiter de dérogations au moratoire sur la chasse commerciale, décidé en 1986 par la Commission baleinière internationale. Depuis la reprise de la chasse, en 1988, les Japonais ont pêché près de dix mille baleines. "Et aucune donnée scientifique utile n'a été produite", déplore Jun Hoshikawa, directeur exécutif de Greenpeace Japon. L'argument scientifique peine donc à convaincre. Mais le gouvernement japonais campe sur ses positions, et ce malgré le changement de majorité survenu en août. L'attitude de la nouvelle administration est d'autant plus surprenante qu'elle s'est engagée à lutter contre le gaspillage des deniers publics. Or les campagnes baleinières coûtent cher au contribuable : pour cette année, l'enveloppe allouée atteint 795 millions de yens (6 millions d'euros). Dans le même temps, les ventes ne décollent pas, les Japonais ne prisant plus autant qu'autrefois la chair de cétacé. Leur consommation est tombée à 50,6 g par personne et par an, contre 2,3 kg avant le moratoire sur la chasse. En novembre, les prix de la viande de baleine ont baissé de 17 %. Et les stocks augmentent : ils atteignaient 4 800 tonnes en avril 2009. Greenpeace Japon dénonce la défense des intérêts particuliers pratiquée par les élus des zones de tradition baleinière, ainsi que la collusion entre l'Agence gouvernementale de la pêche, l'Institut de recherche sur les cétacés et le groupe privé Kyodo Senpaku, qui gère les campagnes de chasse, afin de relancer la consommation de viande de baleine dans l'archipel.
08/01/2010
planete
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L'Espagne connaît une forte baisse de l'immigration
La crise économique mais aussi des accords avec les pays d'émigration expliquent ce recul.
Calme plat au large des Canaries. Il y a près de trois mois que les gardes-côtes de l'archipel espagnol n'ont pas vu arriver un cayuco, cette frêle embarcation où s'entassent généralement les migrants clandestins partis des côtes africaines à destination de l'Europe. Selon les statistiques rendues publiques samedi 2 janvier par la préfecture des Canaries, le nombre des arrivées enregistrées en 2009 est le plus bas depuis dix ans. Au total, 2 242 personnes ont rallié l'archipel lors des douze derniers mois contre plus de 9 000 en 2008, qui marquait déjà une nette décrue. En 2006, l'année de tous les records, les autorités canariennes avaient dû faire face à un afflux de 31 600 arrivants. Certes, les trafiquants d'êtres humains semblent expérimenter de nouveaux itinéraires, puisque les embarcations de fortune arrivent désormais en plus grand nombre (4 200 en 2009) sur la côte andalouse, notamment dans la région d'Alicante. Selon le quotidien ABC, la Guardia Civil s'attend, dans cette zone, à une recrudescence de débarquements après le 15 janvier avec l'amélioration des conditions météorologiques en Méditerranée. Toutefois, le nombre global des clandestins arrivés en Espagne en 2009 aurait diminué de moitié par rapport à 2008 (environ 7 000 au lieu de 14 000). "Après avoir connu des années extraordinairement difficiles, nous sommes en train de gagner le combat contre l'immigration illégale", s'est félicité le chef du gouvernement espagnol, José Luis Rodriguez Zapatero. Destructions d'emplois La grave crise économique que connaît le pays depuis deux ans, avec près de 4 millions de chômeurs, explique en partie cette baisse spectaculaire. Les immigrés, qu'ils soient en situation régulière ou non, ont été les premiers concernés par les destructions d'emploi. Mais pour le gouvernement espagnol, la diminution est surtout le fruit de sa "politique globale" de l'immigration : "La Grèce connaît une situation économique pire que la nôtre, mais elle n'en reste pas moins soumise à une forte pression migratoire", souligne le ministre espagnol des affaires étrangères, Miguel Angel Moratinos. Le renforcement des moyens de lutte contre l'immigration clandestine, que ce soit le système de radars mis en place par Madrid ou les patrouilles communes du dispositif européen Frontex, a été complété par des accords de coopération avec les pays africains d'origine. Il y a quelques jours, les autorités mauritaniennes ont intercepté un cayuco qui comptait 17 clandestins à son bord et mettait le cap sur les Canaries. Et le chef de la diplomatie espagnole cite en exemple la collaboration avec Dakar : "En 2008, 3 000 clandestins ont atteint les Canaries depuis le Sénégal, mais aucun en 2009." Chaque vendredi, les ministres espagnols concernés se réunissent pour un suivi hebdomadaire des flux migratoires : "Il ne faut pas baisser la garde, car la problématique de l'immigration va continuer à exister", avertit M. Moratinos. Madrid compte profiter de sa réussite en la matière pour "renforcer et impulser une politique concertée de l'immigration de l'Union européenne" (UE). Le contrôle de l'immigration clandestine, mais aussi la protection des mineurs étrangers non accompagnés et l'intégration des travailleurs immigrés seront les principaux chantiers que souhaite proposer l'Espagne à ses partenaires lors du sommet informel des ministres de la justice et de l'intérieur de l'UE, du 20 au 22 janvier à Tolède. Jean-Jacques Bozonnet
08/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/08/l-espagne-connait-une-forte-baisse-de-l-immigration_1289105_3214.html
Le pouvoir russe s'attaque aux syndicats, sous couvert de lutte antiterroriste
Un projet de loi prévoit de punir sévèrement les manifestants bloquant les axes de circulation.
Le projet de loi a été présenté en lecture à la Douma, la Chambre basse du Parlement, quelques jours avant la période de vacances annuelles, début janvier. Sous couvert de protection antiterroriste, le gouvernement russe entend punir sévèrement les personnes qui bloquent les voies publiques, routes ou chemins de fer. Cet acte législatif semble s'adresser directement aux manifestants, notamment dans les villes mono-industrielles particulièrement frappées par la crise économique. Le projet de loi, présenté par le ministre des transports et le vice-premier ministre Sergueï Ivanov, est particulièrement répressif. Le contrevenant qui bloque un grand axe routier ou ferroviaire risque jusqu'à deux ans de prison et l'équivalent de 2 300 euros d'amende. Les fonctionnaires qui ne respectent pas la procédure lors de tels incidents sont également passibles d'amendes et de peines d'emprisonnement. Avec une célérité surprenante, la Cour suprême a donné son aval aux articles du projet de loi en moins d'une semaine. L'exemple de Pikaliovo Quelques semaines à peine après l'attentat contre le train rapide Nevski-Express entre Moscou et Saint-Pétersbourg, le 27 novembre 2009, le gouvernement russe présente cette mesure comme une réponse à la "menace croissance d'actes de malfaisance, notamment de nature terroriste". Depuis 2005, il y aurait eu officiellement près de 4 000 actes de dégradation de matériel sur les routes et voies ferrées, parmi lesquels près de 400 gestes "à caractère terroriste, factice ou avéré". La presse russe a cependant trouvé une autre interprétation au projet législatif, baptisé par ses détracteurs "loi anti-Pikaliovo". A Pikaliovo, petite ville mono-industrielle de la région de Saint-Pétersbourg, les ouvriers d'une usine de ciment frappée par la crise avaient bloqué la voie d'accès au bourg en juin 2009. L'affaire avait fait grand bruit dans le pays. Le premier ministre, Vladimir Poutine, avait dû se rendre sur place pour présenter à la hâte un projet de redressement de la région et rappeler à l'ordre actionnaire et fonctionnaires. Le "précédent" de Pikaliovo a ensuite essaimé, à moindre échelle, à travers le pays ; les menaces de blocage des grands axes routiers et ferroviaires sont devenues à la mode. A Baïkalsk, en Sibérie, des grévistes envisageaient d'interrompre le parcours du Transsibérien qui passe à proximité. A Kirov, dans l'Altaï, à Ivanovo, des petits groupes de travailleurs bloquaient des axes de circulation afin d'attirer l'attention sur des arriérés de salaire de plusieurs mois ou sur un passage forcé au travail à temps partiel, en raison de la crise. Le projet de loi, qui devrait être adopté sans difficulté en janvier par la Douma, prévoit que ces délits relèveront du code pénal. Les autorités s'inquiéteraient-elles d'une montée de fièvre sociale ? A l'automne 2009, la presse évoquait des manoeuvres policières à grande échelle. En guise d'entraînement, les forces de l'ordre simulaient une importante manifestation de retraités dans un faubourg de Moscou. Ce scénario rappelle la dernière grande vague de manifestations similaire, en 2005, qui avait connu un certain succès. Les grands axes de circulation avaient alors été bloqués. Alexandre Billette
08/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/08/le-pouvoir-russe-s-attaque-aux-syndicats-sous-couvert-de-lutte-antiterroriste_1289097_3214.html
La détente entre les Etats-Unis et Cuba est compromise
Les espoirs de normalisation, nés de l'élection de Barack Obama, ne se sont pas concrétisés.
Les espoirs de normalisation entre les Etats-Unis et Cuba, après l'accession de Barack Obama à la Maison Blanche, se sont envolés. L'arrestation d'un Américain accusé d'espionnage à Cuba, le 4 décembre 2009, puis la protestation de La Havane contre les mesures de sécurité aérienne des autorités américaines visant les passagers de quatorze pays, dont Cuba, sont les signes d'un raidissement entre les deux voisins. Le 5 janvier, La Havane a dénoncé "cette nouvelle action hostile du gouvernement des Etats-Unis", répondant à "des motifs politiques visant à justifier l'embargo" imposé depuis 47 ans par les Etats-Unis. Les mesures annoncées par Washington après la tentative d'attentat déjouée le jour de Noël sur un vol reliant Amsterdam à Detroit prévoient l'inspection des bagages à main et la fouille au corps des passagers de quatorze pays, tous à majorité musulmane, sauf Cuba. L'île figure, aux côtés de l'Iran, du Soudan et de la Syrie, sur la liste des pays soutenant le terrorisme, établie par le département d'Etat. L'inclusion de Cuba sur cette liste noire est justifiée, selon Washington, par le soutien apporté par le régime communiste à la guérilla colombienne et au groupe séparatiste basque ETA. Les autorités cubaines rejettent ces accusations, affirmant qu'elles prennent part à la lutte internationale contre le terrorisme. Elles dénoncent "le double langage" des Etats-Unis "qui abritent des terroristes" comme les anticastristes Luis Posada Carriles et Orlando Bosch, accusés par La Havane d'être responsables de l'explosion en vol d'un avion cubain près de l'île de la Barbade en 1976. Peu après sa prestation de serment, le président Obama a éliminé les restrictions aux voyages des Cubano-Américains et aux envois de fonds à leurs familles. Lors du sommet des Amériques, en avril 2009 à Trinité-et-Tobago, il avait annoncé "un nouveau commencement" des relations avec Cuba. Des conversations ont été engagées pour rétablir le service postal et faciliter les télécommunications entre les deux pays. Le dialogue a repris sur le dossier migratoire. Raul Castro, qui a succédé à son frère Fidel, malade, s'est dit "disposé à discuter de tout, dans le respect de la souveraineté de Cuba". Mais Barack Obama a refusé de lever l'embargo tandis que la répression de La Havane contre les dissidents et les jeunes blogueurs critiquant le régime se poursuivait. L'arrestation d'un citoyen américain accusé par les autorités cubaines de distribuer "des équipements de communication sophistiqués" à l'opposition pour le compte du gouvernement des Etats-Unis a tendu les relations. "Cette personne n'est pas associée à nos services de renseignement", a affirmé, jeudi 7 janvier, le porte-parole du département d'Etat, démentant les accusations lancées la veille par le président du Parlement cubain, Ricardo Alarcon. Cette affaire prouve que "le gouvernement américain n'a pas renoncé à détruire la révolution", avait déclaré Raul Castro. Les "Réflexions" publiées par Fidel Castro dans la presse sont de plus en plus critiques à l'égard de Barack Obama. Après avoir loué "l'intelligence et l'honnêteté" du nouveau président au début de son mandat, il dénonce désormais "le cynisme et l'arrogance du président "yankee"". "Les intentions réelles de l'empire sont évidentes, sous le sourire amical et le visage afro-américain de Barack Obama", écrivait-il le 14 décembre 2009, se référant au coup d'Etat au Honduras et à la signature d'un accord sur la présence de militaires américains dans des bases colombiennes. Jean-Michel Caroit
08/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/08/la-detente-entre-les-etats-unis-et-cuba-est-compromise_1289096_3222.html