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"Metnext allège la ""météo dépendance"" des entreprises"
Le 8 janvier, les Franciliens ont souffert d'une chute de la température à - 8°.
Mais les foyers fournis en énergie par Poweo et assurés par le courtier Aon France ont réduit leur facture énergétique de 6 euros. Poweo et Aon se sont en effet associés pour proposer aux ménages de se prémunir contre les dépenses d'énergie additionnelle. Moyennant une assurance de 48 euros par an, leur facture se réduit quand la température chute sous une moyenne saisonnière. Cette offre commerciale ne pourrait exister sans les logiciels de Metnext. Cette start-up issue des "flancs" de Météo France voilà deux ans - 500 000 euros de chiffre d'affaires en 2009 - permet aux sociétés "météo dépendantes" "d'anticiper le comportement des consommateurs et de s'adapter", explique Frederic Bardoux, président de Metnext. Cette société, qui a peu d'équivalents dans le monde, propose des outils de prévision du risque météo prisés des énergéticiens. Bruno Millot, directeur des approvisionnements d'Altergaz, fournisseur de gaz aux entreprises et aux particuliers, assure avoir réduit le montant de ses pénalités "de moitié" grâce à Metnext. En effet, chaque fois que ce fournisseur de gaz évalue mal la consommation de ses clients, GRT Gaz, le gestionnaire du réseau, compense en fournissant plus ou moins, mais lui inflige une pénalité. Compte tenu du fait que la consommation varie de 5 % chaque fois que la température baisse de 1 °C, les entreprises de gaz et d'électricité sont les premières clientes de Metnext. A Bordeaux, un fournisseur de chaleur urbaine peut piocher dans les énergies les moins polluantes (biomasse) depuis qu'il peut anticiper les pics de consommation. Outre-mer, toute réduction du solaire ou de l'éolien peut désormais donner lieu à un meilleur calcul des énergies de complément. La prévision du risque météo, hors énergie, n'en est qu'à ses débuts. "Un distributeur de produits sportifs a pu proposer des tongs en tête de gondole avant une vague de chaleur", dit M. Bardoux. Les ventes de raclette ou de boissons gazeuse - elles varient fortement selon qu'il fait froid ou chaud - peuvent ainsi être anticipées par les distributeurs. Parcs de loisirs, cinémas... tout, ensuite, est affaire d'imagination. Yves Mamou
14/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/14/metnext-allege-la-meteo-dependance-des-entreprises_1291661_3234.html
Monnaies, gouvernance, marché intérieur : la feuille de route des nouveaux commissaires européens reste floue
Les titulaires des portefeuilles économiques de la nouvelle Commission ont été auditionnés par le Parlement. Michel Barnier s'est inscrit à contre-courant de son prédécesseur.
Michel Barnier veut donner, en tant que commissaire européen, un "nouvel élan" au marché unique, et réguler les services financiers, dont il a la charge ; Olli Rehn, aux affaires économiques et monétaires, veut renforcer la coordination, en particulier au sein de la zone euro ; Karel de Gucht, au commerce, s'en prend, avec un franc-parler inédit, à la "sous-évaluation" du yuan chinois. Joaquin Almunia n'entend pas modifier, ou seulement à la marge, la politique de concurrence. A mi-chemin des auditions de la nouvelle Commission par le Parlement européen, les quatre titulaires des principaux portefeuilles économiques ont plus ou moins bien réussi leur examen de passage. Ils cherchent, parfois en tâtonnant, à "tirer les leçons de la crise", comme l'a martelé M. Barnier, lors de son audition, le 13 janvier. Ce dernier s'affiche du côté des régulateurs, à contre-courant de la politique suivie par son prédécesseur, le libéral irlandais Charlie McCreevy. "Aucun marché ne doit échapper à la régulation", a répété l'ex-ministre de l'agriculture de Nicolas Sarkozy, dont la nomination avait déclenché des réactions hostiles au Royaume-Uni. Au Parlement européen, son discours a été applaudi. Les grands chantiers pour tirer les leçons de la crise sont peu ou prou déjà lancés par la Commission sortante. M. Barnier compte surtout sur les eurodéputés pour donner aux trois futurs superviseurs européens des Bourses, des banques et de l'assurance des "pouvoirs contraignants", qui iraient au-delà du compromis négocié entre les Etats. Il propose aussi de compléter l'arsenal européen, en encadrant par exemple les ventes à découvert, en particulier sur les matières premières. Olli Rehn joue, lui, la carte d'une plus grande concertation économique entre les capitales. Le commissaire finlandais espère que les Vingt-Sept pourront mettre en oeuvre des mécanismes "incitatifs" pour tenir les grands objectifs de la stratégie économique qu'ils veulent refondre d'ici au mois de juin. C'est une façon pour lui de tirer les leçons de l'échec de l'agenda de Lisbonne, censé faire de l'Europe la région la plus compétitive du monde en... 2010. Les poids lourds de la Commission européenne entendent, en choeur, réduire les risques de fragmentation du marché intérieur soumis à rude épreuve par la crise. Avec leur président, José Manuel Barroso, ils examinent la façon de célébrer, en 2012, les 20 ans de la mise en oeuvre de l'acte unique, à l'initiative de Jacques Delors. Un nouvel acte unique, susceptible de combler les lacunes du marché intérieur pour les PME et les consommateurs, pourrait être mis en chantier. La prochaine Commission tient, dans ce contexte, à ne pas modifier les fondamentaux de son action. Le commissaire au commerce, le libéral belge Karel de Gucht, maintient le cap de la négociation d'accords bilatéraux de libre-échange. A la concurrence, le socialiste espagnol Joaquin Almunia veut poursuivre l'action de son prédécesseur, la libérale néerlandaise Neelie Kroes. M. Barnier a rappelé qu'il tenait à l'application de la directive de libéralisation des services, tout en luttant contre "le dumping social". Cependant, la ligne de conduite de la commission "Barroso II" n'est pas encore très claire. Beaucoup dépendra du rapport sur le marché intérieur que l'ancien commissaire italien Mario Monti doit remettre à M. Barroso dans les prochaines semaines. "Le niveau est très inégal", constate un élu de droite au sujet des différents commissaires auditionnés. "Les uns et les autres font preuve de peu d'imagination, c'est très formaté", regrette une source socialiste. Si MM. Barnier, Almunia et de Gucht ont su tirer leur épingle du jeu, M. Rehn a eu plus de mal à aller au-delà des mémos préparés par ses services. De même, le commissaire en charge de la fiscalité, le Lituanien Algirdas Semeta, a été très évasif au sujet de la lutte contre les paradis fiscaux. Des lacunes critiquées par de nombreux élus. Philippe Ricard et Philippe Ricard
14/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/14/monnaies-gouvernance-marche-interieur-la-feuille-de-route-des-nouveaux-commissaires-europeens-reste-floue_1291660_3214.html
L'Etat tente de s'immiscer dans la stratégie de Renault
Nicolas Sarkozy a convoqué Carlos Ghosn pour qu'il s'explique sur le transfert de production de la Clio en Turquie.
L'Etat est-il en position d'influer sur la stratégie de Renault ? La question agite le chef de l'Etat et le gouvernement, qui, en pleine campagne pour les élections régionales du mois de mars, ont fait de la délocalisation de la Clio en Turquie l'un de leurs chevaux de bataille. Ces derniers jours, Nicolas Sarkozy ainsi que plusieurs ministres se sont relayés pour affirmer leur opposition au projet qu'aurait le constructeur français de transférer une partie de la production de la future Clio, qui sera lancée, en 2013, de Flins (Yvelines) vers Bursa, en Turquie. Leurs arguments : pendant la crise, l'Etat est venu au secours de Renault sous la forme d'un prêt bonifié de 3 milliards d'euros. De plus, Flins a obtenu une aide de 100 millions d'euros pour accompagner la production de la Zoé, un véhicule électrique, à partir de 2011. En retour, Renault devait s'engager à ne pas fermer d'usine en France et à ne pas licencier. "Nous ne mettons pas tant d'argent pour soutenir nos constructeurs pour que la totalité des usines s'en aillent à l'extérieur", a déclaré le chef de l'Etat, en présentant ses voeux aux parlementaires à l'Elysée. Carlos Ghosn, le PDG de Renault, actuellement aux Etats-Unis, a été convoqué dans l'urgence à l'Elysée, samedi 16 janvier après-midi, afin de s'expliquer. Depuis un article du quotidien La Tribune du 8 janvier, indiquant que Renault songerait à transférer une partie de la production de la Clio vers la Turquie, l'agitation politique est à son comble : "Nous avons le droit d'affirmer que lorsque l'on vend une Renault en France - et Renault, c'est un nom français, c'est une marque française - on ne la produit pas à l'étranger", s'est ému Christian Estrosi, le ministre de l'industrie. Cette polémique prend des accents étranges dans la mesure où les déclarations ne correspondent pas toujours aux faits. D'abord, la Clio est déjà largement produite en Turquie. N'en déplaise au gouvernement, en 2009, 179 500 exemplaires sont sortis des chaînes de Bursa contre 140 000 de celles de Flins (Clio II et III). Le "made in Turquie" n'est donc pas une crainte, mais déjà une réalité. Ensuite, il n'est pas question pour le constructeur de transférer l'activité d'une usine française vers un site étranger, c'est-à-dire de délocaliser proprement dit. Renault, comme d'autres constructeurs, est amené à repenser régulièrement la ventilation de sa production en fonction de l'évolution de sa gamme. En l'occurrence, si Renault songe à faire plus de Clio en Turquie, c'est parce qu'il doit faire de la place à Flins pour accueillir son nouveau modèle électrique, la Zoé, à partir de septembre 2011. "Nous nous sommes engagés à assurer l'avenir de Flins, c'est ce que nous faisons avec la production de Zoé, affirme au Monde M. Pelata, Maintenant, aucune décision n'est prise : le transfert de la Clio se fera en fonction de la montée en cadence de Zoé. Mais dans tous les cas de figure, il y aura encore des Clio à Flins." A cette occasion, le directeur général de Renault a rappelé qu'"il est plus difficile de produire en France dans le bas de gamme". D'ailleurs, l'Etat ne découvre pas le problème car c'était l'une des principales conclusions des Etats généraux de l'automobile, organisés sous son égide en 2009. Le constat établi à l'époque était sans appel : l'industrie française souffre d'un déclin de compétitivité, ferment de délocalisations. Ainsi entre 2000 et 2007, le taux de marge a chuté de 5,4 points, quand celui de l'Allemagne grimpait de 9,1 points et celui de l'Espagne de 1,5 point. Parallèlement, "le coût horaire de la main-d'oeuvre dans l'industrie manufacturière a beaucoup plus augmenté en France que dans la zone euro dans son ensemble", constatait le rapport. Enfin, le ratio prélèvements publics cumulés par rapport à la valeur ajoutée des entreprises s'élève à 14,5 % en France en 2008, contre 7,8 % en Allemagne. Autre volet de la polémique : la présence de l'Etat au capital de Renault. Actuellement, les pouvoirs publics détiennent 15 % de Renault et deux sièges sur dix-sept au conseil d'administration. "Renault n'est pas une entreprise comme une autre", a rappelé mercredi Laurent Wauquiez, le secrétaire d'Etat à l'emploi. "L'une des lignes du président de la République, c'est quand on est actionnaire, ce n'est pas pour regarder passer les trains", a-t-il ajouté. Pourtant, la veille, Dominique Bussereau, son collègue chargé des transports avait fait preuve de plus d'humilité à propos du rôle de l'Etat. Il s'exprimait sur les pertes accumulées par le comité d'entreprise d'Air France : "Naturellement, nous allons demander des explications au président d'Air France", promettait-t-il, tout en s'empressant d'ajouter qu'avec 16 % du capital l'Etat n'était plus majoritaire au sein de la compagnie aérienne. Alors, pour renforcer son influence l'Etat doit-il réclamer plus de représentants au sein du conseil d'administration ? Visiblement certains y pensent : RTL affirmait, mercredi, que les pouvoirs publics pourraient exiger six sièges. D'où qu'elle vienne, la proposition a toutefois peu de chance d'aboutir. L'article 2 du décret-loi du 30 octobre 1935 précise que, "lorsque l'Etat détient une participation au moins égale à 10 % du capital il lui est réservé au sein de l'organe délibérant un nombre de sièges proportionnel à sa participation sans que ce nombre puisse être supérieur aux deux tiers des sièges et inférieur à deux". Lorsque l'Etat détenait 44 % de Renault, il disposait de quatre sièges. Aujourd'hui avec 15 % il n'en a plus que deux. Pour espérer passer à six, deux solutions : monter au capital ou demander à des administrateurs de céder leur fauteuil avec l'assentiment des autres actionnaires... Peu probable. Dans ces conditions, l'Etat a-t-il les moyens de ses ambitions ? M. Estrosi veut croire que "Renault aura l'exigence d'apporter des réponses qui permettent au président de la République de confirmer (...) que c'est bien la volonté de l'Etat qui devrait être respectée dans les choix futurs de Renault". Rendez-vous, samedi en fin d'après-midi, sur le perron de l'Elysée. Stéphane Lauer
14/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/14/l-etat-tente-de-s-immiscer-dans-la-strategie-de-renault_1291657_3234.html
Orly : un vol sur deux annulé
Un vol sur deux était annulé jeudi matin conformément à la demande de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) à l'aéroport d'Orly et 15 % à Roissy, au deuxième jour de grève des contrôleurs aériens également marqué par une météo beaucoup plus clémente.
Un vol sur deux était annulé jeudi matin conformément à la demande de la direction générale de l'aviation civile (DGAC) à l'aéroport d'Orly et 15 % à Roissy, au deuxième jour de grève des contrôleurs aériens également marqué par une météo beaucoup plus clémente."réduction de vol de 50 % sur Orly et de 15 % sur Roissy-Charles de Gaulle toute la journée""grève du zèle""démantèlement de la DGAC""la grève a été très bien suivie hier avec 25 à 75 % de grévistes dans les centres de contrôle opérationnels. La mobilisation va se poursuivre mais pas sous forme de grève""nous allons probablement boycotter les négociations protocolaires qui doivent reprendre pour planifier les besoins de la DGAC en 2010 et 2011 et qui devaient aboutir en mars-avril" Mercredi, la DGAC avait demandé aux compagnies aériennes une , selon un communiqué. Contrairement à la veille, jeudi la neige n'est pas venue s'ajouter aux perturbation dues à la grève. La DGAC et Aéroports de Paris (ADP) demandent aux passagers de contacter leur compagnie aérienne avant de se rendre à l'aéroport. Les régions aussi étaient touchées comme la veille par la grève. A l'aéroport de Lille Lesquin, jeudi matin, trois vols ont été annulés (un Lille-Nantes, un Lille-Bordeaux, un Lille-Toulouse) et des retards oscillant entre 10 minutes et 1 h 30 sur plusieurs vols étaient également constatés. Pour l'après-midi, quatre autres vols reliant Lille à Lyon et Lille à Marseille, dans les sens aller et retour, devaient également être annulés, selon la communication de l'aéroport. A l'aéroport de Marseille Provence, 18 vols ont été annulés jeudi. Il s'agit notamment de vols de ou vers Paris-Orly, Lyon, Tunis, Casablanca, Prague ou Madrid. Il faut également compter des retards pour ceux qui sont maintenus en raison d'une , selon une porte-parole de l'aéroport. Les syndicats CGC-CGT-FO-UNSA/IESSA, d'un côté, et CFDT, de l'autre, ont déposé un préavis de grève de 48 heures à l'intention des contrôleurs aériens pour les journées de mercredi et jeudi. Les syndicats s'inquiètent d'un projet gouvernemental visant à promouvoir une structure européenne intégrée pour la navigation aérienne (Allemagne, Pays-Bas, Belgique, Suisse, Luxembourg), où ils redoutent un , dont les 12 000 salariés appartiennent à la fonction publique d'Etat. Jeudi en fin de matinée, la DGAC ne donnait aucun taux de grévistes. Mais selon Didier Pennes, délégué FO, et .
14/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/14/orly-un-vol-sur-deux-annule_1291776_3224.html
"Procès en appel des ""Conti"" : l'avocat général demande de la ""compréhension"""
Des peines de deux à cinq mois de prison avec sursis requises contre les "six" de Continental.
Les six "Conti" devront attendre le délibéré de la cour d'appel d'Amiens, le 5 février, pour connaître leur sort. Mercredi 13 janvier, l'avocat général a requis des peines d'emprisonnement avec sursis, de deux à cinq mois, contre les syndicalistes et membres du comité de lutte de l'usine Continental de Clairvoix (Oise). Ils comparaissaient pour des faits de violence et de destruction commis dans la sous-préfecture de Compiègne, le 21 avril 2009. L'avocat général, Pierre Avignon, a précisé qu'il ne s'opposerait pas à la transformation de ces peines en travaux d'intérêt général : "Je ne vous demande pas un verdict d'indulgence, a-t-il dit au président, mais un verdict de compréhension." Face à lui, une femme et cinq hommes, dont le très médiatique et charismatique leader syndical CGT, Alain Mathieu, espèrent, eux, la relaxe après avoir été condamnés en première instance à des peines de prison avec sursis. La violence, ils la reconnaissent. Difficile à nier alors que le président de la cour d'appel, Pierre Foucart, a demandé à visionner plusieurs fois les images des faits. Bureaux renversés, ordinateur jeté à terre, papiers dispersés... Des dégâts pour lesquels aucune facture, aucun devis n'ont été fournis par la partie civile, a pointé la défense. Les Continental étaient "en colère", selon les mots de M. Mathieu. Un "gros coup de colère" après avoir appris que la justice venait de confirmer la fermeture de leur usine de Clairvoix, entraînant le licenciement et "la peur pour 1 100 familles". "Il n'y a rien d'illégal à se défendre ", a affirmé M. Mathieu devant les magistrats. "Notre fierté, a-t-il confié, ému, c'est que, par notre action collective, nous avons contribué à ce qu'aucun suicide ne se soit produit parmi les 1 100 personnes licenciées." "Ne pas faire d'exemple" L'avocat général reconnaît cette action militante. Mais, dit-il, "le cadre politique et syndical ne peut vous exonérer de vos comportements individuels". Le contexte est lourd et il demande à la cour de "ne pas faire d'exemple", récusant toute consigne du pouvoir politique. "Je vous demande de ne pas pénaliser à travers eux un mouvement social qui a entraîné une forte solidarité", a-t-il conclu. Cette solidarité s'est exprimée tout au long de la journée. Dans les rues d'Amiens où quelque 1 500 personnes, venues de plusieurs régions, ont défilé pour accompagner les Conti devant la cour d'appel. Les boules de neige lancées sur les forces de police mobilisées étaient les seules manifestations d'une insolence bon enfant. A l'occasion d'un meeting devant le palais de justice, tous les leaders de gauche et d'extrême gauche (PS, PCF, NPA, Verts, Parti de gauche, LO...), et certains dirigeants syndicaux (CGT Chimie, Solidaires, FSU), appelés à témoigner par la défense, ont dénoncé la "criminalisation du mouvement social", l'acharnement du pouvoir et réclamé la relaxe. Xavier Mathieu a appelé à l'unité et regretté l'absence des leaders syndicaux, en particulier du sien, Bernard Thibault, qu'il avait traité de "racaille" en août 2009. De son côté, la confédération a publié un communiqué, lundi, réclamant la relaxe des six prévenus. Un service minimum justifié par la présence jugée trop encombrante des dirigeants politiques à quelques semaines des régionales. Un alibi récusé par les intéressés. "Depuis des années, les politiques sont dans les manifestations syndicales", estime Marie-George Buffet (PCF). "Au moment du CPE, les politiques et les syndicats étaient ensemble, cela permet de gagner", complète Olivier Besancenot (NPA). Rémi Barroux
14/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/14/proces-en-appel-des-conti-l-avocat-general-demande-de-la-comprehension_1291650_3224.html
Tensions entre juges et policiers sur la garde à vue
Des policiers refusent de procéder à des arrestations, car ils s'opposent à la présence des avocats aux côtés des suspects.
La police et la justice sont engagées dans un brutal bras-de-fer sur les conditions de la garde à vue. Les officiers de police judiciaire de Seine-Saint-Denis ont refusé de procéder à plusieurs interpellations, en décembre 2009 et en janvier dans trois affaires de trafics de drogue ou de criminalité organisée que leur demandaient les juges d'instructions du tribunal de Bobigny. Les magistrats demandaient la présence des avocats des suspects dès le début de la garde à vue en s'appuyant sur les jurisprudences récentes de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH), concernant la Turquie. L'ensemble des juges d'instruction de Bobigny a protesté contre l'attitude des policiers dans une lettre adressée le 11 janvier au directeur de la police judiciaire de la préfecture de police de Paris, Christian Flaesch. Dans ce courrier, un commissaire divisionnaire, Christophe Descoms, chef du service départemental de la police judiciaire (SDPJ) de Seine-Saint-Denis, est nommément cité pour avoir "indiqué verbalement qu'il ne serait pas donné suite à ces instructions compte-tenu des consignes contraires qui lui avaient été données par sa hiérarchie". La lettre précise que celui-ci a "refusé de confirmer sa position par écrit." "Je ne ferai pas de commentaires sur un courrier que je n'ai pas encore reçu", s'agaçait mercredi 13 janvier M. Flaesch. Il confirmait néanmoins l'annulation de l'intervention de la brigade de recherche et d'intervention (BRI) "occupée sur d'autres affaires". Dans leur lettre, les juges s'étonnaient de l'annulation de l'opération "au motif allégué de l'indisponibilité soudaine des effectifs de la BRI". Dans leur courrier, les magistrats rappellent que le code de procédure pénale dispose que "les officiers de police judiciaire (...) ne peuvent solliciter ou recevoir des ordres ou instructions que de l'autorité judiciaire dont ils dépendent". Les cas de refus de collaboration entre police judiciaire et magistrats sont extrêmement rares. Ils ont toujours visé des affaires sensibles comme le refus de perquisitionner chez l'ancien maire de Paris, Jean Tibéri, à la demande du juge Eric Halphen, en 1996 ou l'affaire Borrel, en 2007, quand la gendarmerie n'avait pas voulu perquisitionné des ministères. Les policiers font bloc Ce n'est pas la personnalité des personnes mises en cause dont il est question ici mais de divergences d'appréciation sur la procédure dans un contexte d'extrême tension entre police et justice sur la question de la garde à vue. Plusieurs juges des libertés et de la détention de Bobigny ou Créteil ont refusé de prolonger récemment des gardes à vue, en invoquant eux aussi la CEDH. Cette polémique intervient alors que la chancellerie prépare un projet de réforme de la procédure pénale qui prévoit la suppression du juge d'instruction. La question de la garde à vue, également visée par la réforme, mobilise fortement les avocats. Si la garde des sceaux, Michèle Alliot-Marie veut limiter son usage - le nombre de gardes à vue a dépassé les 585000 en 2009 -, les avancées sur la présence de l'avocat en garde à vue sont jugées trop modestes. L'institution policière fait bloc, convaincue d'avoir affaire à une offensive concertée des juges, qui prolonge celle des avocats. Sylvie Feucher, secrétaire générale du Syndicat des commissaires de la police nationale (SCPN) a vivement réagi à la mise en cause du chef de la SDPJ 93. "C'est une provocation. Christophe Descoms a respecté le code de procédure pénale, point", s'insurge-t-elle en mettant en avant la "théorie des baïonnettes intelligentes" - règle qui permet à des fonctionnaires de désobéir à un ordre illégal. "Ils veulent nous pousser à la faute et créer une polémique afin de peser sur les textes", analyse Mme Feucher. Les policiers s'appuient sur le code de procédure pénale, les juges sur la jurisprudence européenne, susceptible selon eux d'entâcher d'irrégularités les procédures de garde à vue. "Il serait utile que cette question puisse être tranchée par la Cour de cassation afin d'éviter que des errements juridiques abousissent à laisser des délinquants dehors", dit-on au ministère de l'intérieur. Pour les policiers, la SDPJ 93, qui comprend 130 fonctionnaires, ne peut pas donner des consignes différentes aux policiers en fonction des juges sur le même type d'affaires. Les magistrats de Bobigny s'appuient, eux, sur plusieurs décisions de la CEDH qui a condamné la Turquie, en 2008 et 2009, pour défaut de présence de l'avocat au début de la garde à vue. En France, l'avocat est présent pour une visite d'une demi-heure sans accès au dossier ni aux interrogatoires, au début de la mesure. Dans les cas de délinquance ou criminalité organisée, l'avocat ne peut intervenir qu'au bout de 48 heures de garde à vue délai augmenté jusqu'à 72 heures pour les stupéfiants et le terrorisme. Dans une note diffusée aux magistrats en novembre 2009, la chancellerie considère que "ce régime dérogatoire peut être justifié, au regard des faits de l'espèce et de la gravité des infractions qui lui sont reprochées : cette justification n'apparait pas contraire à la jurisprudence de la CEDH". Une interprétation qui est loin de faire l'unanimité chez les avocats et les magistrats.
14/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/14/tensions-entre-juges-et-policiers-sur-la-garde-a-vue_1291645_3224.html
"Fillon : ""Nous ne serons pas loin de doubler notre dernière prévision"" de croissance"
François Fillon a annoncé jeudi que la prévision de croissance pour 2010, actuellement de 0,75 %, allait être presque "doublée" à l'occasion de la loi de finances rectificative sur le grand emprunt, présentée mercredi prochain en conseil des ministres.
François Fillon a annoncé, jeudi 14 janvier, que la prévision de croissance pour 2010, actuellement de 0,75 %, allait être presque "doublée" à l'occasion de la loi de finances rectificative sur le grand emprunt présentée mercredi prochain en conseil des ministres. "En ce début d'année, l'activité repart. Je vous annonce que nous allons réviser à la hausse notre taux de croissance à l'occasion de la présentation de la loi de finances sur les investissements d'avenir, la semaine prochaine", a déclaré le chef du gouvernement à l'occasion de ses vœux à la presse. "Je pense que nous ne serons pas loin de doubler notre dernière prévision officielle qui était de 0,75 %", a-t-il ajouté, réaffirmant qu'"on est sorti de la récession". Par ailleurs, le premier ministre a indiqué qu'il préciserait "dans les prochaines semaines notre stratégie globale de sortie de la zone des déficits excessifs d'ici 2013", rappelant la tenue d'une conférence fin janvier sur les déficits publics avec "le Parlement, les collectivités locales, les organismes sociaux. Cette conférence doit permettre de faire un diagnostic, si possible, partagé. Mais elle devra aussi préparer des mesures concrètes. Nous allons continuer de tenir strictement les dépenses de l'Etat : déjà pour 2009, ces dépenses seront finalement légèrement inférieures au plafond qui avait été voté par le Parlement. Pour 2010, nous avons par ailleurs décidé que la charge d'intérêts du programme d'investissement sera compensée par une réduction équivalente des dépenses de l'Etat". La loi de finances actuelle prévoit pour cette année un déficit public à 8,5 % du PIB. Elle table sur un déficit public à 5 % en 2013 mais le gouvernement s'est depuis engagé à passer sous la limite européenne des 3 % à cette date, à condition qu'une forte croissance soit au rendez-vous.
14/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/14/fillon-nous-ne-serons-pas-loin-de-doubler-notre-derniere-prevision-de-croissance_1291774_3234.html
"François Bayrou (MoDem) : ""Une autre politique est possible"""
Le président du MoDem a défini deux priorités : l'emploi et l'éducation. Il estime possible d'organiser "la reconquête de l'outil de production, industriel et agricole de la France".
em a défini deux priorités : l'emploi et l'éducation. Il estime possible d'organiser "la reconquête de l'outil de production, industriel et agricole de la France". "Il faut tout faire pour organiser une politique de relocalisation", a déclaré M. Bayrou, prenant l'exemple de l'Allemagne, pays voisin, qui, a-t-il souligné, a la même monnaie et les mêmes règles économiques et sociales que la France mais demeure un grand pays producteur et exportateur. M. Bayrou a également dénoncé "le mouvement actuel de dévalorisation et de déclassement de l'école publique". Sophie Landrin
14/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/14/francois-bayrou-modem-une-autre-politique-est-possible_1291651_823448.html
Les voeux tout miel du chef de l'Etat aux parlementaires
Réforme des collectivités, taxe carbone, burqa, retraites... Nicolas Sarkozy a égrené le programme 2010.
Quelques minutes avant l'entrée en scène du président de la République, mercredi 13 janvier à l'Elysée, plusieurs rangées de chaises ont été promptement retirées. L'affluence n'était pas au rendez-vous de cette troisième cérémonie des voeux de Nicolas Sarkozy aux parlementaires et aux membres du Conseil de Paris. Les absents redoutaient-ils d'encourir une nouvelle fois les foudres du chef de l'Etat ? Ils ont eu tort. C'est un Nicolas Sarkozy tout miel qui s'est adressé à ses auditeurs, distribuant les bons points plutôt que les réprimandes, les oeillades au lieu des engueulades. Le message en ce début d'année 2010 se résume en un mot : "apaisé". Les ministres se sont chargé de le répercuter en écho, pour ceux qui ne l'auraient pas compris : "Vous avez vu, il n'a froissé personne. Il a fait un discours sans agressivité, sans provocations, avec beaucoup de calme", insistent deux d'entre eux en commentant la prestation du chef de l'Etat. "Conviction et réactivité" Avant d'évoquer les sujets qui vont nourrir l'actualité parlementaire à venir, M. Sarkozy a néanmoins tenu à effectuer un retour en arrière : "Il y a un an, a-t-il rappelé, le monde est passé proche de la catastrophe." Et il s'est félicité de tout ce qui avait été entrepris pour l'éviter. "On a bien travaillé", a-t-il conclu, associant le Parlement à ces louanges. Tout en appelant à faire preuve en 2010 du même "pragmatisme", de la même "réactivité", de la même "conviction". "2010 sera aussi dense que 2009", a-t-il promis. Il a donc dressé le programme de l'année à venir. De la sécurité, d'abord, avec, en sus des textes déjà dans les tuyaux, une "réflexion" sur "la protection de nos écoles pour en faire des sanctuaires à l'abri de la violence". Des collectivités territoriales, avec "beaucoup d'ouverture pour essayer d'arriver à un consensus" sur la réforme du mode de scrutin. De la fiscalité écologique : "Nous ne renoncerons pas à sa mise en oeuvre. Il a fallu revenir deux fois pour Hadopi, nous reviendrons deux fois pour la taxe carbone", a-t-il martelé, s'en prenant aux "forces du conservatisme, à tous les niveaux, (qui) s'opposent au changement". Sur les retraites, il a dit voir "avec intérêt" les déclarations d'intention de travailler en commun sur ce dossier. Puis est venue la question du voile intégral. Plaidant pour "une solution qui permette d'obtenir le plus large consensus possible", M. Sarkozy a jugé "sage d'attendre les conclusions de la mission parlementaire". Il souhaite que le Parlement utilise "pour la première fois" la possibilité d'adopter une résolution. "C'est parce que je veux avancer avec détermination que nous devons le faire avec le souci du rassemblement", a-t-il rappelé à l'intention de ceux qui auraient souhaité faire cavalier seul. "Dans ce débat, il ne peut pas y avoir les fermes et les mous, a-t-il prévenu. Il n'y a que des représentants du peuple qui essaient de se hisser à la hauteur de leurs responsabilités." Si dispositions législatives il doit y avoir, il faudra veiller, a-t-il insisté, à ce qu'elles n'offrent aucune prise à une éventuelle contestation. Les choses sont à présent "calées" dans la majorité. La proposition de loi élaborée par le président du groupe UMP, Jean-François Copé, et désormais présentée comme une "contribution", ne sera déposée formellement que le 3 février, après que la mission aura rendu son rapport, le 26 janvier. M. Sarkozy devrait quant à lui répondre prochainement à une "invitation" de TF1 pour se livrer à un exercice de "pédagogie" en direction du grand public. Et montrer comme il est "apaisé". Patrick Roger
14/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/14/les-voeux-tout-miel-du-chef-de-l-etat-aux-parlementaires_1291655_823448.html
Identité nationale : les Français sont partagés
Ni rejet ni plébiscite. Si 59 % des Français ne jugent pas le sujet scandaleux, ils se montrent cependant partagés sur la teneur que prend le débat sur l'identité nationale.
Ni rejet ni plébiscite. Si 59 % des Français ne jugent pas le sujet scandaleux, ils se montrent cependant partagés sur la teneur que prend le débat sur l'identité nationale. Selon une enquête spécifique TNS Sofres/Logica pour Le Monde et "A Vous de juger"/France 2, intitulée "Les Français et le débat sur l'identité nationale", 42 % se disent intéressés par le sujet quand 48 % (57 % à gauche) ne le sont pas. Si 4 sur 10 le jugent utile, 47 % (et même 58 % à gauche), ont un avis contraire. Ce clivage cache cependant un point de ralliement. Qu'ils en voient ou non l'intérêt, 46 % des Français approuvent l'affirmation selon laquelle ce débat "s'est écarté de ses objectifs initiaux", contre 22 % qui pensent le contraire. La moitié des personnes interrogées estiment qu'il y a eu un resserrement des discussions : 49 % des Français sont d'accord avec l'idée que le débat "tourne essentiellement autour de la question de l'islam". Alors que seuls 20 % pensent qu'"il aborde vraiment toutes les composantes de l'identité nationale (valeurs, culture, intégration, patrimoine, etc.)." Les sympathisants de gauche sont plus encore persuadés qu'il s'est resserré, soulignant à 64 % cette cristallisation sur la religion musulmane. Les vives critiques dont le ministre de l'immigration, Eric Besson, a été la cible pour avoir lancé ce débat ne se traduisent pas par un rejet catégorique de sa personne dans l'opinion. La première réaction que suscite le ministre est l'interrogation (36 % des citations), puis le malaise (25 % des citations), devant le rejet (19 %). Vient ensuite le respect (12 %) et bien loin derrière, l'admiration (2 %). Laetitia Van Eeckhout
14/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/14/identite-nationale-les-francais-sont-partages_1291648_823448.html
"Pascal Perrineau : ""Un parti peut s'user dans la contestation"""
Professeur à l'Institut d'études politiques de Paris et directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), Pascal Perrineau est un spécialiste de l'extrême droite.
Professeur à l'Institut d'études politiques de Paris et directeur du Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof), Pascal Perrineau est un spécialiste de l'extrême droite. A quoi attribuez-vous le recul des idées du FN dans l'opinion ? L'élection présidentielle de 2002 a marqué un double phénomène. On a vu le succès de Jean-Marie Le Pen au premier tour, en oubliant souvent la leçon du second tour : la marginalité du FN, son incapacité à représenter une alternative crédible, et à devenir un parti de pouvoir. Le Pen a été ramené à son image de marginal de la politique, incapable de sortir de la protestation. En 2007, les Français se sont tournés vers d'autres voies de protestation, plus insérées dans le système, comme François Bayrou, Ségolène Royal ou même Nicolas Sarkozy. Tout cela s'est accompagné d'une usure des crispations, notamment sur l'immigration : on voit une France moins tendue sur ce sujet qu'elle ne l'était dans les années 1980 et 1990. Ce thème s'est déplacé sur un terrain davantage culturel et religieux. La dimension xénophobe et parfois raciste s'est atténuée. Le grand changement, c'est qu'à partir des années 2000, la droite trouve en son sein un personnage, Nicolas Sarkozy, qui a acquis une certaine crédibilité sur des thématiques du Front national alors que la droite cherchait, en vain, depuis vingt-cinq ans, à casser le FN. Nicolas Sarkozy a-t-il tué le FN ? Non, car le FN n'est pas mort et reste dans le paysage. Mais c'est le seul qui a réussi de manière sensible à casser une dynamique que certains qualifiaient d'irrésistible. Le FN ne retrouvera pas sa capacité de blocage des années 1990, qu'il avait encore aux élections régionales de 2004. Sarkozy a vidé en partie de substance le discours du FN, en présentant une alternative plus ou moins crédible sur les questions qui préoccupaient ses électeurs, en particulier sur le terrain sécuritaire. On a eu, en 2007, un candidat avec cette stratégie "sans complexes", qui occupait pour la première fois tout l'espace de la droite. Le leadership de Marine Le Pen a-t-il entraîné une mue du FN ? Le terme est excessif. Le FN reste le parti qu'il est, le phénomène Marine Le Pen ne l'a pas changé profondément. En revanche, elle a su s'imposer dans l'espace occupé par son père depuis un quart de siècle. Elle a su se poser en héritière crédible, sans atteindre le niveau qu'avait M. Le Pen quand il est apparu sur la scène politique et médiatique dans les années 1980, au cours desquelles il était porteur d'une rupture avec le système politique et d'une stratégie de dénonciation tous azimuts. Marine Le Pen peut incarner cela, mais sur un mode mineur et sans doute avec moins d'efficacité. Quelle est la différence entre le discours de Marine Le Pen et celui de son père ? Jean-Marie Le Pen parle avec les mots de sa génération, avec les combats qui ont été les siens, avec des références comme celles de la seconde guerre mondiale. Marine Le Pen, elle, incarne bien une génération qui a des liens ténus et assez vagues avec cette période. Au fond, si les références politiques et historiques sont différentes, les fondamentaux sont les mêmes. Marine Le Pen parviendra-t-elle à redresser le FN ? Elle aura beaucoup de mal. Elle ne pourra qu'endiguer la nette érosion engagée depuis 2007, à l'exemple de ses résultats enregistrés lors des dernières européennes, en juin 2009, dans certains territoires du nord de la France. Aux régionales, on verra bien que Marine Le Pen ou pas, les listes FN seront en dessous du niveau qu'elles avaient atteint en 2004. Mme Le Pen pourrait-elle faire de son parti une sorte de Ligue du Nord à la française, entre droite extrême et extrême droite ? Etant donné la nature profonde du FN et sa ligne politique, on voit mal comment elle rentrerait dans une stratégie de respectabilité qui amènerait le FN dans une telle position. Surtout, elle n'a plus la dynamique électorale avec elle. Le FN est, depuis cinq ans, un parti en difficulté. Le FN n'a pas retrouvé le parfum de soufre qu'il a pu dégager dans le passé. Un parti peut aussi s'user dans la contestation. Propos recueillis par Abel Mestre et Jean-Baptiste de Montvalon
14/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/14/pascal-perrineau-un-parti-peut-s-user-dans-la-contestation_1291647_823448.html
L'adhésion des Français aux idées du FN est en recul
Le moindre attrait des thèses frontistes semble lié à la stratégie électorale de M. Sarkozy en 2007.
Victoire stratégique de Nicolas Sarkozy ? L'adhésion des Français aux idées du Front national a sensiblement reculé depuis 2006, pour s'établir à 18 % aujourd'hui. Tel est le principal enseignement du sondage TNS Sofres/Logica pour Le Monde et "A vous de juger"/France 2, réalisé les 4 et 5 janvier auprès de 1 000 personnes. Mené dans le prolongement d'une série d'enquêtes similaires débutée en 1984, ce sondage permet de mesurer l'évolution de l'image et des idées du FN dans l'opinion publique. La dernière vague avait été réalisée en décembre 2006, quelques mois avant que Nicolas Sarkozy ne sorte victorieux d'une campagne présidentielle menée pour partie sur des thématiques familières à l'extrême droite. Une stratégie électoralement payante, puisqu'elle avait permis à M. Sarkozy de conquérir, dès le premier tour de scrutin, une bonne partie de l'électorat FN. L'enquête de la Sofres permet d'évaluer l'impact de ce positionnement politique sur l'accueil fait aux idées frontistes dans le pays. Le taux d'adhésion global aux idées de Jean-Marie Le Pen est passé de 26 % en décembre 2006 à 18 % aujourd'hui, soit d'une personne sur quatre à une personne sur cinq. Dans le même temps, le taux de désaccord a augmenté de 7 points, pour atteindre 77 %. Le taux d'adhésion à toutes les propositions suggérées ("On ne défend pas assez les valeurs traditionnelles en France" ; "la justice n'est pas assez sévère avec les petits délinquants" ; "on ne se sent plus vraiment chez soi en France", etc.) a également connu un recul sensible depuis 2006, de - 3 points ("Il faut rétablir la peine de mort") à - 15 points ("Il y a trop d'immigrés en France"). Les niveaux d'adhésion à la plupart de ces mêmes propositions étaient restés stables entre 2000 et 2006. Seule exception : l'affirmation selon laquelle "il faut donner beaucoup plus de pouvoirs à la police" était passée de 64 % de "tout à fait ou plutôt d'accord" en mai 2000 à 76 % en mai 2002. Avant de chuter brutalement à 53 % en novembre 2003, alors que M. Sarkozy était ministre de l'intérieur depuis dix-huit mois. Au vu de ces différents chiffres, il semble manifeste que la méthode sarkozyste, appuyée sur un discours se revendiquant d'une droite décomplexée, a réduit sensiblement le champ d'influence du FN. "Le moment clé est la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, en 2007, qui a répondu aux angoisses des électeurs du FN en les ramenant dans une logique républicaine. Le Front national ne s'en est pas relevé", souligne Brice Teinturier, directeur adjoint de TNS-Sofres. "Les électeurs du FN ont eu l'impression, à tort ou à raison, qu'une partie de leurs préoccupations était entendue", renchérit le directeur du Cevipof, Pascal Perrineau. "La réinsertion dans l'arc démocratique de problèmes comme l'immigration ou la question identitaire, était une des choses essentielles que la France cherchait confusément depuis vingt-cinq ans", rappelle-t-il. Le moindre attrait des idées estampillées FN n'est-il pas dû à une banalisation de ce discours, notamment illustrée par le débat sur l'identité nationale ? "Banalisation est un terme piégé et inapproprié. Ce que l'on observe, c'est un recul de ces idées ", répond M. Teinturier, qui note que, "par rapport aux années 1990, la société française est beaucoup moins crispée sur la question de l'immigration, de l'autorité, du sentiment de dépossession. Ce qui fait que le FN a moins d'espace aujourd'hui". Ainsi, la préférence nationale en matière d'emploi, mesure phare du programme frontiste, reste largement désavouée par les Français : elle ne recueille que 17 % d'adhésion, 79 % se prononçant contre. Autre donnée intéressante révélée par cette étude : 52 % des sondés estiment que "le FN et Jean-Marie Le Pen représentent un danger pour la démocratie", contre 65 % en 2006. Et ils sont 42 % à estimer qu'il n'en est pas un, contre 29 % trois ans avant. Pour Brice Teinturier, cela s'explique par "la stratégie de "désextrémisation" du FN engagée lors de la campagne présidentielle de 2007. Ils avaient alors mis la pédale douce sur la question de la préférence nationale et sur celle des immigrés, notamment parce qu'ils avaient été marqués par l'ampleur de la mobilisation de l'entre-deux-tours en 2002". Une stratégie de "respectabilisation" portée déjà, à l'époque, par Marine Le Pen. Celle-ci jouit d'une image moins radicale que son père. Si 43 % des personnes interrogées estiment qu'elle représente une "extrême droite nationaliste et xénophobe" (alors que 65 % portaient cette appréciation sur son père en 2006), elles sont 36 % à juger qu'elle incarne "une droite patriote et attachée aux valeurs traditionnelles". Un chiffre qui grimpe à 55 % parmi les sympathisants de droite. La fille du président du FN semble, en outre, avoir déjà succédé à son père dans l'esprit des Français. Ils sont 39 % à estimer que c'est elle qui incarne le mieux le Front national. La vice-présidente du parti devance son père (30 %) de près de 10 points et est très loin devant son principal concurrent Bruno Gollnisch (4 %). En revanche, les avis sont moins tranchés en ce qui concerne l'impact de l'action de Marine Le Pen à la tête du FN. 37 % des sondés estiment qu'elle a "permis de moderniser le parti", contre 36 % qui sont de l'avis opposé. Si Mme Le Pen succède à son père lors du prochain congrès du parti - qui aura lieu soit à l'automne 2010, soit au printemps 2011 - il lui faudra renouveler un électorat frontiste vieillissant. En effet, selon ce baromètre, le groupe des adhérents aux idées du FN est plus âgé que la moyenne des Français : il est composé à 30 % d'individus de 50 à 64 ans, contre 24 % dans la population. Majoritairement masculin, ce groupe est également peu diplômé, et habite plus souvent que la moyenne des Français en zone rurale. Abel Mestre et Jean-Baptiste de Montvalon
14/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/14/l-adhesion-des-francais-aux-idees-du-fn-est-en-recul_1291646_823448.html
La diaspora haïtienne entre angoisse et mobilisation
Privés d'une grande partie des liaisons téléphoniques avec l'île, les Haïtiens de l'étranger ont cherché des nouvelles de leurs proches par Internet.
Les premières images d'immeubles dévastés et d'habitants traumatisés ont plongé dans l'angoisse la diaspora haïtienne. Privés d'une grande partie des liaisons téléphoniques avec l'île, les Haïtiens de l'étranger ont cherché des nouvelles de leurs proches par Internet. Témoignages, photos et appels à l'aide ont déferlé sur le Web, notamment sur le service d'échange de photos Flickr, sur le site de socialisation Facebook et sur le site de microblogs Twitter. Des groupes de soutien et d'appels au don se sont également constitués. Malgré le manque d'informations, la diaspora s'est rapidement mobilisée. En France, près d'une centaine de membres de la communauté haïtienne se sont réunis à l'initiative de la Plateforme d'associations franco-haïtiennes (PAFHA), mercredi soir à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis) pour commencer à organiser l'aide. Entre 70 000 et 90 000 Haïtiens vivent en France métropolitaine, selon l'Agence haïtienne pour le développement local (AHDL). Au Canada, Michaëlle Jean, gouverneur général, dont la famille a fui Haïti en 1968, fédère les efforts du pays nord-américain et de la communauté haïtienne, tandis qu'aux Etats-Unis, le chanteur américano-haïtien Wyclef Jean a enrôlé une armée de célébrités du cinéma et de la musique, dont le couple d'acteurs Brad Pitt et Angelina Jolie, pour venir en aide à l'île dévastée. - (AFP.)
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/la-diaspora-haitienne-entre-angoisse-et-mobilisation_1291624_3222.html
L'activation d'une faille qui traverse l'île d'est en ouest
Le séisme de magnitude 7, qui a frappé Haïti, mardi 12 janvier à 16 h 53 (heure locale), est intervenu à la frontière entre deux plaques tectoniques.
Celle des Caraïbes se déplace de deux centimètres par an par rapport à la plaque nord-américaine, prenant en tenaille l'île d'Hispaniola, sur laquelle se trouve Haïti. L'île est parcourue d'est en ouest par un système de failles, notamment des failles "transformantes", situées entre deux plaques coulissant en sens inverse. Dans son plan national de gestion des risques et des désastres, en 2001, le ministère haïtien de l'intérieur citait la faille d'Enriquillo-Plantain Garden, qui traverse la presqu'île du sud d'Haïti. Il soulignait que l'activité sismique passée montrait une accumulation d'énergie due à la longue période de "silence sismique" dans ces failles. "Cette situation crée les conditions susceptibles de déclencher un événement de très grande envergure (7,5 ou plus dans l'échelle de Richter)", lit-on dans ce rapport. Selon l'US Geological Survey (USGS), c'est précisément sur la faille d'Enriquillo-Plantain Garden que le tremblement de terre est survenu. L'USGS a enregistré six répliques dans les heures qui ont suivi la secousse initiale, et il n'exclut pas, dans les jours et semaines à venir, de nouveaux séismes, de moindre ampleur. Hervé Morin
14/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/14/l-activation-d-une-faille-qui-traverse-l-ile-d-est-en-ouest_1291630_3244.html
"L'ambassadeur de France : une situation ""épouvantable"", des millions de sans-abri"
C'est une situation "épouvantable" qu'a décrite, mercredi 13 janvier, au lendemain du séisme dévastateur, l'ambassadeur de France en Haïti, Didier Le Bret.
Des corps sans vie jonchant les rues dans des quartiers rasés, des survivants sans moyens à la recherche de cadavres dans les décombres... C'est une situation "épouvantable" qu'a décrite, mercredi 13 janvier, au lendemain du séisme dévastateur, l'ambassadeur de France en Haïti, Didier Le Bret. "Il n'y a aucun moyen actuellement qui est mis en oeuvre, le peu de moyens dont disposait Port-au-Prince, à travers son service de pompiers, a été enseveli dès la première secousse ", a-t-il rapporté devant les caméras de France 2. "Certaines rues sont jonchées de cadavres et on voit des gens, on voit apparaître une jambe, un bras, dans des tas de ferraille et de béton, raconte-t-il. J'ai traversé à pied deux quartiers, l'un où se trouve la résidence de l'ambassade de France, qui est totalement détruite, et un autre quartier qui s'appelle le Canapé Vert, là où se trouve la résidence du président, et je n'ai quasiment pas croisé une maison qui tenait." "Il va falloir reloger 2 millions de personnes, poursuit l'ambassadeur. Les gens sont dans la rue et maintenant certains d'entre eux, avec leur seule bonne volonté, cherchent à retrouver les cadavres dans les décombres". Le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner, a indiqué, mercredi 13 janvier, qu'une cinquantaine de Français qui se trouvaient dans des secteurs particulièrement touchées par le tremblement de terre sont "activement" recherchés par les services de l'ambassade de France à Port-au-Prince. Selon une source diplomatique, ces personnes se trouvaient notamment dans la partie basse de la capitale, où la secousse semble avait fait le plus de dommages. "Il y a de l'espoir de retrouver des survivants dans les décombres, veut croire M. Kouchner. J'espère que nous en retrouverons quelques-uns." Quelque 1 400 ressortissants français vivent à Haïti, dont environ 1 200 à Port-au-Prince. Après le séisme, 200 d'entre eux ont été regroupés à l'ambassade de France et à la résidence de l'ambassadeur, a indiqué le ministre. Un hôpital mobile devait être dressé dans les jardins de cette résidence, les hôpitaux locaux étant "tous très endommagés". - (AFP.) A l'intention des familles des Français résidant à Haïti, le Quai d'Orsay a mis en place une cellule de renseignements et un numéro d'urgence : 01-45-50-34-60.
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/l-ambassadeur-de-france-une-situation-epouvantable-des-millions-de-sans-abri_1291625_3222.html
"François Hollande : ""Aujourd'hui j'ai cette liberté de faire des propositions"""
François Hollande, député et président du conseil général de Corrèze, était l'invité de l'émission "Les Questions du mercredi" aux côtés de Roland Cayrol, politologue, directeur du Cetan, Centre d'études et d'analyses.
Martine Aubry a annoncé que le Parti socialiste allait déposer une proposition de loi en faveur du droit de vote des étrangers aux élections locales. Etes-vous d'accord avec cette initiative ? François Hollande : Cela fait près de trente ans que la gauche a inscrit dans son programme le droit de vote pour les étrangers aux élections locales, les étrangers présents pendant cinq ans sur notre territoire, qui paient des impôts. Je pense qu'il est temps qu'on aboutisse. Mais on ne peut régler cette question que dans le consensus. Pourquoi ? Parce qu'il faut réviser la Constitution. Donc avoir non seulement une majorité à l'Assemblée, mais aussi au Sénat, et une majorité des trois cinquièmes dans l'ensemble de ce qu'on appelle le Congrès, c'est-à-dire le rassemblement de l'Assemblée et du Sénat. Ça ne peut être voté que si une partie de la droite y consent, la question lui est donc posée. On dit que les Français y seraient hostiles. Roland Cayrol : Ils fluctuent en fonction de la conjoncture politique et de l'image qu'ont les étrangers. Grosso modo, un Français sur deux y est favorable. Beaucoup plus largement à gauche qu'à droite. En avançant sa proposition, Martine Aubry prend un risque calculé. Elle sait très bien qu'il n'y aura pas de discussion parlementaire là-dessus. Elle s'en sert comme d'un marqueur idéologique. F. H. : Moi, je ne suis pas pour les marqueurs, je suis pour les avancées. C'est une différence. Vous avez redit il y a quelques jours que vous vous prépariez pour la présidentielle de 2012. C'est de nouveau la foire aux ambitions au PS ? F. H. : Depuis plusieurs mois, je dis que je me prépare à ces rencontres démocratiques que vont être les primaires. J'ai été premier secrétaire pendant plus de dix ans, j'ai une expérience, des idées à proposer, si je ne me préparais pas, je ne remplirais pas ma fonction politique, qui est celle de faire gagner la gauche en 2012. R. C. : Le problème du leadership au PS est devenu fondamental pour les électeurs. En ce qui concerne François Hollande, il y a un mystère. Les militants socialistes, depuis longtemps, disent qu'il est le meilleur. Les journalistes, les politologues qui ont l'occasion de discuter avec lui l'apprécient. Et, dans l'opinion, il n'atteint pas le niveau d'une candidature présidentielle. Il a peut-être trop été dans le passé l'homme des petites phrases. F. H. : Il se trouve que je suis arrivé au même constat. Pendant des années, j'ai porté je ne sais combien de critiques et d'attaques à l'égard de Jacques Chirac puis de Nicolas Sarkozy. J'ai eu ce rôle, il est terminé. Je veux maintenant m'adresser bien au-delà des socialistes et même parfois au-delà de la gauche pour montrer que je suis porteur d'un projet pour mon pays après une crise qui nous oblige à changer de perspective et de référence. Martine Aubry ne dit pas autre chose : elle aussi veut porter un projet. F. H. : Elle est premier secrétaire. Elle est dans son rôle lorsqu'elle dit : "Il faut qu'on travaille, qu'on avance unis" ; je la soutiendrai dans cette démarche. Mais aujourd'hui j'ai cette liberté de faire des propositions. Je vais donc marquer mon identité. Comment comptez-vous reconquérir l'électorat populaire qui vous a fait défaut en 2002 et dans une moindre mesure en 2007 ? F. H. : L'électorat populaire a deux soucis. Un souci de reconnaissance. Il faut qu'on mette des mots sur ses préoccupations, les conditions de vie, l'habitat, la sécurité, la promotion sociale, l'éducation. Il a aussi besoin de savoir où il va. Aujourd'hui, c'est la mondialisation qui pèse sur cet électorat populaire. Il sait que si on n'est pas apte à l'affronter, on est déclassé. Il faut donc lui donner une perspective, favoriser la croissance, la création de richesses. Que peut faire l'Etat quand Renault délocalise en Turquie une partie de sa production ? F. H. : Non seulement l'Etat est actionnaire de Renault, mais il lui a prêté de l'argent et l'a soutenu avec la prime à la casse. Il faudrait qu'une charte le lie à l'Etat, l'empêchant non pas de nouer des coopérations à l'étranger mais de délocaliser. C'est ça le donnant donnant. François Hollande est député et président du conseil général de Corrèze. Roland Cayrol est politologue, directeur du Cetan, Centre d'études et d'analyses. Propos recueillis par Jean-François Achilli et Françoise Fressoz
14/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/14/francois-hollande-aujourd-hui-j-ai-cette-liberte-de-faire-des-propositions_1291682_3232.html
"La Chine est-elle menacée par le ""syndrome soviétique"" ?, par Thierry Wolton"
Superpuissance dans les années 1960, l'URSS a été victime de ses fragilités.
Cette année 2010 doit consacrer l'aura internationale de la Chine avec l'Exposition universelle de Shanghaï, en mai. La manifestation est voulue par Pékin comme le point d'orgue d'une offensive de charme qui a commencé avec les Jeux olympiques de l'été 2008. L'événement sera sans doute une fois de plus remarquablement maîtrisé par les autorités et les superlatifs ne manqueront pas pour saluer l'extraordinaire réussite de ce pays. Tout cela n'est pas sans provoquer quelques réminiscences. Il y a un demi-siècle s'ouvrait une époque également triomphale - pour l'Union soviétique. La décennie 1960 avait été précédée par le voyage de Nikita Khrouchtchev aux Etats-Unis, en septembre 1959. Au cours de cette opération de relation publique, le numéro un soviétique avait promis que son pays ne tarderait pas à dépasser la puissance américaine. S'ensuivit une vaste campagne de propagande destinée à accréditer cette thèse, ponctuée de réussites époustouflantes, dont l'envoi en 1961 du premier homme dans l'espace fut la plus spectaculaire. Pendant les vingt années suivantes, Moscou fournit des statistiques flatteuses sur la production de blé, d'acier, etc., qui accréditaient l'incontestable supériorité du mode de production socialiste. On a appris récemment qu'un bureau spécial avait été créé par le Kremlin pour fournir les chiffres qu'attendait un Occident ébahi par cette success story. L'offensive fut complétée par un dégel sur le plan intérieur, puis par l'envoi à l'Ouest de quelques fleurons de la culture soviétique, comme les Choeurs de l'Armée rouge. A relire la presse de l'époque, convaincue que l'URSS serait, sans doute possible, la grande puissance de la fin du XXe siècle, on ne peut être qu'admiratif devant la force de conviction dont fit preuve Moscou ou stupéfait par notre extraordinaire naïveté. Il est intéressant de se souvenir de ce qu'a fait le Kremlin de cette "opération de marketing" réussie : il a cru à sa propre propagande, conforté par l'image que nous lui renvoyions de sa puissance irrépressible. Les décennies 1960-1970 furent marquées par une poussée significative de l'URSS, et du camp socialiste en général, sur la scène mondiale, jusqu'à l'invasion de l'Afghanistan, en décembre 1979. Ces avancées paraissaient d'autant plus victorieuses que le camp occidental était alors en crise économique, avec le premier choc pétrolier de 1973, et morale, à la suite de la défaite américaine au Vietnam en 1975. Sur le plan des rapports de forces internationaux, l'URSS pouvait réellement prétendre à un partage du leadership mondial avec les Etats-Unis. Sur le plan intérieur, l'"entrouverture" au monde qu'exigeait ce rôle de grande puissance se paya bien par quelques contestations. Elles furent promptement réprimées (Tchécoslovaquie en 1968, internement de dissidents...), souvent dans l'indifférence des démocraties qui ne voulaient pas se brouiller avec ce grand pays. Il y avait là une certaine logique dont tout le monde était en fin de compte victime : les peuples subissant le joug communiste, qui ne pouvaient guère, ou si peu, compter sur un soutien occidental ; les opinions publiques de l'Ouest, tétanisées par une puissance que leur vantaient les médias ; les responsables des pays démocratiques, dont la pusillanimité encouragea le Kremlin à pousser toujours plus loin ses avantages ; enfin, les dirigeants soviétiques eux-mêmes, qui finirent par oublier combien leur empire était fragile. La suite est connue. Or la "sinomania" actuelle est bien plus forte que ne le fut jamais la "soviétomania" d'antan. Elle s'est accentuée ces dernières années grâce à des mécanismes qui rappellent ceux qui firent la splendeur de l'URSS : une remarquable réussite économique soulignée par des statistiques flatteuses ; une certaine fascination des Occidentaux pour une culture, un mode de vie (voire une multitude) exotiques pour eux ; une montée en puissance sur la scène mondiale favorisée, voulue même, par les autres grands au nom de l'équité. Il est devenu banal de prédire que l'empire du Milieu sera le leader de notre planète avant la mi-temps de ce siècle. Croyance d'autant plus ferme que le monde occidental est à nouveau en crise. La Chine nous apparaît aujourd'hui tellement éloignée de ce que fut la Russie soviétique d'hier qu'il peut sembler hasardeux d'établir le parallèle. Et pourtant... L'URSS et la Chine communiste ont suivi des voies similaires une grande partie du XXe siècle et, même lorsque leurs chemins ont divergé, elles ont poursuivi des politiques analogues, inspirées par la même idéologie. La poigne de Mao ne fut pas moins sanglante que celle de Staline. L'un et l'autre se lancèrent dans une industrialisation forcée au prix de millions de paysans morts, l'un et l'autre s'assurèrent d'un pouvoir absolu en terrorisant leur population. Par la suite, le jovial Deng Xiaoping ne fut pas sans rappeler le débonnaire Khrouchtchev, l'un et l'autre rêvant de faire décoller une économie socialiste en panne grâce à la technologie occidentale. A partir des années 1990, l'offensive de charme de la Chine n'est pas sans similitude avec celle de l'URSS dans les années 1960-1970. Certes, les actuels dirigeants chinois ne ressemblent pas aux gérontes retranchés dans le Kremlin jusqu'à l'arrivée de Gorbatchev en 1985. Mais, justement, leur dynamisme ne rappelle-t-il pas, peu ou prou, le volontarisme de ce dernier, ultime espoir du communisme soviétique pour tenter de sauver le régime ? Ils s'en sortent, il est vrai, autrement mieux que lui en la matière. Comparaison n'est pas raison, mais des systèmes de même nature peuvent générer des comportements politiques similaires. Le Parti communiste chinois a beau être le premier parti léniniste darwinien, comme l'a joliment dit Nicolas Bequelin, chercheur auprès de Human Rights Watch, c'est-à-dire capable d'évolution, il n'en reste pas moins un parti d'esprit totalitaire, engendrant des réflexes policiers pour ceux qui sont à sa tête. Du Tibet au Xinjiang, contre les intellectuels dissidents ou les paysans spoliés, la chronique de la répression durant les dernières années illustre le raidissement du régime. A l'instar de l'URSS, la Chine réclame désormais sa part de gouvernance du monde que mérite sa réussite économique. Dans les années 1970, Moscou parlait de détente ; Pékin rassure en évoquant sa montée en puissance pacifique tout en consacrant des moyens de plus en plus importants à son armement (même si ce budget est encore loin d'égaler celui des Etats-Unis). Si on escamote la part communiste de cette Chine-là, ces parallèles n'ont aucun sens. Mais, jusqu'à preuve du contraire, ce pays reste gouverné par un parti unique, dirigé par des hommes formés à son unique moule, qui gardent la haute main sur l'économie et qui s'en partagent les fruits, de manière quasi héréditaire. Dans ce type de régime, l'essentiel demeure le pouvoir, qui décide de tout. Il est donc pertinent de se demander si la Chine, aussi mirifique qu'elle nous paraisse, ne risque pas d'être victime du syndrome soviétique, ses dirigeants finissant par être atteints des mêmes maux qui ont conduit à la chute de l'URSS. La combinaison entre notre admiration béate et un pouvoir sans partage, indifférent aux douleurs de son peuple, obsédé par ses intérêts de puissance, le tout attisé par les doutes des pays occidentaux sur le modèle libéral, autant de facteurs qui pourraient déboucher sur des lendemains difficiles. Le jeu de miroirs entre des communistes chinois trop sûrs d'eux, convaincus par leurs propres statistiques de la réussite de leur régime, et des dirigeants occidentaux obsédés par leurs balances commerciales et leurs déficits, qui ne pensent qu'à les amadouer pour quelques parts de marché, peut faire oublier à Pékin ses fragilités intrinsèques : obsolescence d'une partie de son appareil industriel, discrimination sociale, déséquilibre entre l'offre et la demande, inflation, bulle spéculative, vieillissement de la population, catastrophes écologiques. En somme, tout ce qui caractérise une économie socialiste. Cet aveuglement réciproque, entre Occident et Orient cette fois, pourrait conduire la Chine à vouloir aller trop loin, comme l'URSS jadis. Thierry Wolton est historien, spécialiste des systèmes communistes.
14/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/14/la-chine-est-elle-menacee-par-le-syndrome-sovietique-par-thierry-wolton_1291681_3232.html
Afghanistan : au moins 21 personnes ont été tuées dans deux attentats
Au moins 15 civils ont été tués, jeudi 14 janvier, dans un attentat sur un marché bondé du sud de l'Afghanistan, et un policier a péri dans l'explosion d'une bombe dans une province voisine, a-t-on appris de sources officielles.
Au moins 20 civils ont été tués jeudi dans un attentat-suicide sur un marché bondé du sud de l'Afghanistan et un policier a péri dans l'explosion d'une voiture piégée conduite par un kamikaze dans une province voisine, a-t-on appris de sources officielles. Un kamikaze à pied a déclenché sa bombe à l'entrée d'une partie d'un marché dédié aux changeurs de devises du district de Dihrawud, dans la province d'Uruzgan, a déclaré le général Abdul Hameed, commandant de l'armée dans la province."Au moins 20 civils ont été tués et 13 blessés." Dans la province du Helmand, bastion des talibans, un policier a également péri dans un autre attentat-suicide, à la voiture piégée, dans le district de Musa-Qalah, un fief taliban, a indiqué dans un communiqué la force internationale de l'OTAN (ISAF). Quatre personnes ont également été blessées dans cette attaque. Les attaques n'ont pas encore été revendiquées mais l'attentat-suicide est l'une des armes favorites des talibans, qui ont considérablement intensifié leur insurrection ces deux dernières années malgré la présence des forces internationales, aujourd'hui fortes de 113 000 soldats.
14/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/14/afghanistan-au-moins-21-personnes-ont-ete-tuees-dans-deux-attentats_1291612_3216.html
Le ballon tourne rond, par Jean-Philippe Rémy
Danny Jordaan, président du comité d'organisation du Mondial : " S'il y a une guerre au Kosovo et une Coupe du monde en Allemagne, personne ne se demande si la Coupe du Monde peut avoir lieu en Allemagne ?".
Il y a quelques jours, mon propriétaire, un riche Sud-Africain a eu l'idée (amusante) pour gagner un peu (plus) d'argent. "Pour rire, bien sûr", il suggère que je vienne m'installer chez lui pendant la durée de la Coupe du monde de football, qui aura lieu ici, en Afrique du Sud, du 11 juin au 11 juillet, afin de pouvoir sous-louer mon logement - à prix d'or -, aux supporters. Au final, nous pourrions "partager les bénéfices", imagine-t-il déjà. Ce n'est qu'une demi-plaisanterie, j'en ai bien peur, tant l'approche de cette poule aux oeufs d'or nommée Coupe du monde est en train de faire travailler les imaginations spéculatives dans le pays. Un mélange déconcertant de pessimisme et de capacité à faire feu de tout bois est la marque de fabrique du pays de Nelson Mandela, sorti de l'apartheid par le haut. En conséquence, les Sud-Africains ont choisi de considérer que le premier Mondial organisé en Afrique serait à la fois un motif de fierté et une opportunité pour gagner un argent fou. Un pays issu de quatre décennies d'apartheid et de 350 années de ségrégation ne se raccommode pas comme par magie en quinze ans. Que le sentiment national ait des hauts et des bas semble donc la moindre des choses. Depuis 1994, nombreux ont été ceux qui se sont persuadés que l'effondrement du miracle sud-africain était imminent. Face à ce mal, quelques événements particuliers sont comme un baume apaisant. En 1995, il avait fallu que le pays gagne la Coupe du monde de rugby pour remonter le moral national dans l'effusion mêlant Noirs et Blancs, ainsi que le raconte le film de Clint Eastwood, Invictus. On espère que le Mondial aura les mêmes vertus. A ce sujet, on sera bientôt fixés. Il ne reste, jeudi 14 janvier, que 147 jours avant le coup d'envoi du premier match. Les prophètes du malheur qui avaient imaginé que les stades ne seraient pas prêts à temps doivent manger leur casquette. Les dix stades sont terminés. Pour la plupart, ils sont magnifiques, tout particulièrement Soccer City, à Johannesburg, où auront lieu match d'ouverture et finale. La première phase de vente des tickets prendra fin le 22 janvier, il est donc temps de se précipiter. En l'état actuel, plus de places ont été préachetées pour les matches joués par l'Angleterre que pour ceux de l'équipe nationale d'Afrique du Sud, les Bafana Bafana, dont les performances sont, disons, irrégulières. Dans le bruit des vuvuzelas (trompettes que font sonner par gradins entiers les spectateurs sud-africains pendant les matches), l'élan effusif va sans doute monter en puissance. Le 22 juin, les Bafana Bafana joueront contre l'équipe de France. Je redoute les réactions de mon propriétaire ce jour-là, mais c'est une autre histoire. L'heure n'est pas encore aux tourments du jeu, mais plutôt aux dernières interrogations concernant la logistique, ravivées de manière inattendue par l'attaque vendredi 8 janvier dans la province du Cabinda, en Angola, de l'équipe togolaise et son encadrement par un groupe de guérilleros indépendantistes. Une poignée de commentaires malheureux dans la presse étrangère établissant un vague lien entre ce drame et le Mondial, la décision de l'Allemagne de se livrer, à la suite de l'attaque, à une étude approfondie des conditions de sécurité en Afrique du Sud qui, aux dernières nouvelles, n'est le terrain d'aucune rébellion indépendantiste, tout cela a enflammé les esprits dans le pays, partagé entre indignation et incrédulité devant tant de confusion. Danny Jordaan, président du comité d'organisation du Mondial s'en est ému lors d'une conférence de presse : "S'il y a une guerre au Kosovo et une Coupe du monde en Allemagne, personne ne se demande si la Coupe du Monde peut avoir lieu en Allemagne, non ?" On a toutes les raisons de se désoler de l'amalgame fait entre l'Afrique du Sud et le Cabinda, qui se trouve à plus de 2 500 kilomètres et à plusieurs frontières de distance. Mais on remarquera que, d'ores et déjà, les Sud-Africains ont commencé à se retrouver sur le terrain de l'outrage fait à la fois à la géographie africaine et à la réputation de leur pays. Peut-être est-ce déjà le miracle du ballon rond. Ce ne sont pas ces questions qui arrêteront les supporters de venir participer à la fête du football. Leur nombre atteint un demi-million, et ce n'est pas fini. Parallèlement, l'Afrique du Sud dévoile son organisation. La police a augmenté ses effectifs d'environ 50 000 personnes (recrues et réservistes). L'armée sera aussi de la partie, ne serait-ce que pour accueillir sur les aéroports militaires, pour les garer, les avions en provenance de la planète entière. Le risque d'embouteillage aérien sera d'ailleurs l'un des risques de la période de la Coupe. Un homme d'affaires avisé a déjà eu l'idée d'acheter à crédit du matériel de débarquement et de le louer - à prix d'or, on l'avait deviné -, pour faire face à la multiplication des arrivées de vols internationaux. Courriel : jpremy@lemonde.fr. Sur le Web : Les stades : http://www.fifa.com/worldcup/destination/stadiums/index.html Les réservations : http://fr.fifa.com/worldcup/organisation/ticketing/index.html
14/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/14/le-ballon-tourne-rond-par-jean-philippe-remy_1291701_3242.html
Derrière le barreau, par Robert Solé
Mais qu'est-ce qu'ils ont tous à vouloir devenir avocat ? Après Noël Mamère et Jean-François Copé, après Dominique de Villepin et Frédéric Lefebvre, après Jean Glavany, c'est l'ex-garde des sceaux, Rachida Dati, qui prêtera serment le 27 janvier.
Mais qu'est-ce qu'ils ont tous à vouloir devenir avocat ? Après Noël Mamère et Jean-François Copé, après Dominique de Villepin et Frédéric Lefebvre, après Jean Glavany, c'est l'ex-garde des sceaux, Rachida Dati, qui prêtera serment le 27 janvier. Et l'on dit que Julien Dray, sorti de ses ennuis judiciaires, est sur le point de les imiter. Le titre de "maître" peut séduire. La toge aussi. Mais Rachida Dati, maîtresse d'elle-même comme de l'univers, n'en est quand même pas à courir après une robe noire à trente-trois boutons ! Et que dire des autres ? Les Villepin et compagnie ? Nul besoin d'être avocat pour faire des effets de manches ! L'éloquence se pratique en toutes circonstances, aussi bien dans l'Hémicycle que sous les préaux. Surtout quand il s'agit de plaidoyers pro domo : je ne parlerai qu'en présence de moi-même... Un responsable politique qualifié est dispensé du serment d'avocat. Ses mérites plaident pour lui. Commis d'office au dézingage d'adversaires, il est souvent spécialisé dans les divorces ou dans les affaires. On doit cependant rappeler sans cesse aux députés de l'opposition convertis au barreau qu'ils ne sont pas des procureurs. Et aux députés de la majorité qu'un avocat à la cour n'est pas forcément un courtisan. Robert Solé
14/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/14/derriere-le-barreau-par-robert-sole_1291702_3232.html
Haïti nous oblige, par Franck Nouchi
Une capitale a été en grande partie détruite ; une ville francophone de plus de deux millions d'habitants.
"Le sort semble s'être acharné sur cette île maudite des Caraïbes", commenta Laurence Ferrari pendant le "20 heures" de TF1, mercredi soir. Emissions spéciales, "live from Port-au-Prince", soudainement, sur toutes les télévisions du monde, il n'y en avait plus que pour Haïti. Des morts, des blessés, des immeubles effondrés, des habitants hagards, la désolation. A l'écran, c'était le défilé habituel des spécialistes en tout, en approvisionnement en eau, en lutte contre les pillages, en sismologie... Les grands de ce monde se succédaient derrière micros et caméras pour affirmer leur solidarité. "J'ai une pensée toute particulière pour le peuple haïtien que tant de liens unissent à la France. Nous sommes solidaires de ses peines, de ses souffrances", déclara Nicolas Sarkozy. Promettant une réaction rapide, coordonnée et énergique, Barack Obama annonça pour sa part l'envoi sur la zone d'un porte-avions nucléaire. Aux images des cameramen de télévision s'ajoutaient celles des habitants qui, avec un simple téléphone portable, rendaient compte du drame qu'ils enduraient. Une catastrophe naturelle, dit-on. Habituellement, là-bas, ce sont plutôt des ouragans ou des tempêtes tropicales affublés de leurs drôles de noms (Fay, Gustav, Hanna, Ike, rien qu'en 2008). La fatalité ? Il y a quelques mois, Edouard Glissant et Patrick Chamoiseau avaient publié L'Intraitable Beauté du monde (Galaade Editions), une courte adresse à M. Obama dans laquelle ces deux écrivains formulaient ce souhait, cette exigence : "Haïti inscrite dans l'urgence totale, contre l'insupportable odieux, tout de suite !" C'était avant le 13 janvier, et déjà Haïti ne pouvait plus attendre. Mais, au fond, tout le monde s'en fichait. Ce pays, on ne s'aperçoit qu'il est un des plus pauvres du monde que lorsqu'il est frappé par un désastre naturel. "La moitié de la population vit avec moins de 1 dollar par jour", précisait-on sur TF1. On compatit le temps de quelques émissions spéciales, et on oublie. Une actualité chasse l'autre. Sauf que, cette fois-ci, il ne faudra pas que ça se passe ainsi. Une capitale a été en grande partie détruite ; une ville de plus de deux millions d'habitants créée par des Français en 1749 ; une ville francophone. Les liens évoqués par le chef de l'Etat nous obligent, comme ils obligent les Etats-Unis. Dans Vers le sud, l'un de ses romans édité chez Grasset, l'écrivain haïtien Dany Laferrière dresse le portrait d'un certain Albert dont toute la famille avait combattu les Américains durant l'occupation de 1915. Son père était mort sans avoir serré la main d'un Blanc. "Le Blanc, écrit Laferrière, était pour lui moins qu'un singe. Il disait toujours : "Quand je rencontre un Blanc, j'essaie toujours de le contourner pour voir s'il n'a pas une queue"." A nous, durablement, de savoir tendre la main aux Haïtiens. Post-scriptum Regrettable erreur dans la chronique d'hier : l'actuel secrétaire général de l'UMP se nomme Xavier Bertrand. Franck Nouchi
14/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/14/haiti-nous-oblige-par-franck-nouchi_1291700_3232.html
"Petits ""conseils"" russes, par Natalie Nougayrède"
On ne savait pas la Russie à ce point angoissée à l'idée d'un affaiblissement de l'OTAN. C'est un scoop.
les extrémistes islamiques, un combat qu'elle estime avoir conduit et mené à bien de 1979 à 1989. Elle aurait alors lutté contre les "pères des militants talibans d'aujourd'hui". C'est ce que nous assure un texte fascinant, publié mardi 12 janvier par l'International Herald Tribune, intitulé "Conseils russes sur l'Afghanistan". L'opus est cosigné par le représentant de la Russie auprès de l'OTAN, Dmitri Rogozine, et le dernier commandant des troupes soviétiques en Afghanistan, le général Boris Gromov. Et quels conseils ! "Si l'Alliance n'accomplit pas sa tâche, écrivent-ils, (elle) perdra sa base morale et sa raison d'être." Un "retrait sans victoire pourrait provoquer un effondrement des structures de sécurité occidentales". On ne savait pas la Russie à ce point angoissée à l'idée d'un affaiblissement de l'OTAN. C'est un scoop. Surtout si l'on se souvient que la dernière version de la doctrine de sécurité nationale russe désigne l'OTAN comme une sourde menace visant à l'encercler. Nos auteurs prennent soin de préciser qu'un tel "effondrement" ne serait pas aussi "troublant" pour la Russie que les conséquences régionales d'un échec en Afghanistan : la "déstabilisation des Républiques d'Asie centrale", avec des "flots de réfugiés". En Afghanistan, l'OTAN répond aux intérêts nationaux bien compris de la Russie. A tel point que MM. Rogozine et Gromov dénoncent une "humeur de capitulation au sein de l'OTAN". La Russie n'a pas contribué par l'envoi de troupes à l'opération internationale lancée en 2001 sous l'égide de l'ONU. Elle aide pour le transit des équipements. L'Afghanistan, "nous y avons déjà été, et nous n'avons pas aimé", commentent nos auteurs, en référence à la guerre de 1979-1989. Et de se lancer dans une formidable réécriture de l'Histoire : "Nous étions les premiers à défendre la civilisation occidentale contre les attaques des musulmans fanatiques. Personne ne nous a remerciés." Surtout pas les civils afghans ! Un million d'entre eux ont péri de 1979 à 1989, sur une population d'environ 20 millions d'habitants. L'URSS a envahi unilatéralement l'Afghanistan et l'a dévasté. C'était un acte d'agression pure, pour étendre la sphère d'influence de Moscou. La guerre soviétique, par sa cruauté inouïe contre les civils, a poussé 5 millions d'Afghans à fuir vers l'étranger. Loin de le combattre, elle a nourri l'islamisme radical, semant les germes de nouvelles violences. L'URSS, selon nos auteurs, aurait évité d'employer la force aérienne contre des civils. Quel beau mensonge ! En réalité, c'étaient des tapis incessants de bombes sur les villages, à l'aveuglette. MM. Rogozine et Gromov nous font une annonce tonitruante : "en cas de fiasco de l'OTAN", la Russie "et ses alliés en Asie centrale" seraient prêts à déployer en Afghanistan une "force de réaction rapide". On reste songeur. Courriel : nougayrede@lemonde.fr. Natalie Nougayrède
14/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/14/petits-conseils-russes-par-natalie-nougayrede_1291621_3232.html
Crise financière : Barack Obama veut taxer les banques
Le président Barack Obama a dévoilé un projet de taxation d'une cinquantaine de grandes banques afin de rembourser intégralement l'argent public engagé pendant la crise.
Le président américain Barack Obama a annoncé, jeudi, un projet de taxation d'une cinquantaine de grandes banques afin de récupérer les fonds publics dépensés lors du sauvetage du système financier, dénonçant au passage les primes "obscènes" que s'octroierait Wall Street. "Je suis déterminé a récupérer chaque centime dû au peuple américain, et ma détermination ne peut être que renforcée lorsque je vois les profits énormes et les bonus obscènes dans les sociétés mêmes qui doivent leur survie au peuple américain", a déclaré M. Obama lors d'une intervention à la télévision. La cotisation envisagée est intitulée sans ambiguïté "taxe sur la responsabilité de la crise financière", une façon de souligner que les banques ont joué un rôle déterminant dans la tourmente qui a failli emporter le système financier du pays. Censé s'appliquer pendant dix ans ou aussi longtemps que nécessaire pour un remboursement intégral de l'argent public engagé, cet impôt doit permettre à l'Etat de récupérer jusqu'à 117 milliards de dollars (plus de 80 milliards d'euros), somme qui correspond au montant maximal des pertes envisagées par le Trésor sur le plan de sauvetage du système financier. DES BONUS COMPARABLES AUX ANNÉES FASTES La taxe devrait figurer en février dans le projet de budget fédéral pour l'exercice 2010-2011 qui commencera en octobre, et devra obtenir l'aval du Congrès, ce qui n'a rien d'acquis. Les banques ont déjà indiqué qu'elles feraient tout pour s'y opposer, laissant présager des batailles de couloir au Capitole. La taxe envisagée ne concernerait que les entreprises financières dont l'actif est supérieur à 50 milliards de dollars d'avoirs, soit une cinquantaine d'entreprises, essentiellement américaines, mais aussi des filiales de banques étrangères. Elle s'appliquerait sur les dettes des sociétés financières en question. Le plan de sauvetage du secteur financier américain a été permis en octobre 2008 par le Congrès, qui a alloué pour cela 700 milliards de dollars au Trésor. Cette somme est disponible jusqu'au mois d'octobre. Sauf imprévu majeur, le Trésor ne compte pas la dépenser dans son intégralité. L'annonce de M. Obama revêt un caractère politique de nature à calmer l'opinion publique. Selon le New York Times, les banques "se préparent à verser des bonus qui rivaliseront avec ceux des années fastes d'avant la crise", au risque de s'aliéner une population aux prises avec ses retombées. Le président américain a d'ailleurs conseillé aux grandes banques de baisser les bonus versés à leurs traders afin d'être en mesure de pouvoir payer la taxe que son administration veut leur imposer. "Nous voulons récupérer notre argent et nous l'aurons", a-t-il martelé.
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/crise-financiere-barack-obama-veut-taxer-les-banques_1291614_3222.html
"Philippe Séguin, ministre modèle de la ""rupture"", par Michel Noblecourt"
Aux affaires sociales de 1986 à 1988, il a recherché "obstinément" auprès des syndicats un "minimum d'acceptabilité".
Pour un gouvernement censé mener, notamment sur le plan économique et social, une politique de "rupture", et qui risque d'être confronté, en 2010, en particulier lors du rendez-vous sur les retraites, à de fortes turbulences sociales, Philippe Séguin peut-il être une référence, un exemple à suivre ? Le premier président de la Cour des comptes, décédé le 7 janvier, a exercé, du 20 mars 1986 au 10 mai 1988, les fonctions de ministre des affaires sociales et de l'emploi. Cinq ans après l'élection de François Mitterrand, le retour de la droite au pouvoir n'est pas une banale alternance. La cohabitation qui s'ouvre sonne comme une revanche sur 1981. Une rupture. En 1986, l'heure est à la dérégulation, la déréglementation, le moins d'Etat. Initié par Ronald Reagan, aux Etats-Unis, et Margaret Thatcher, en Grande-Bretagne, le courant ultra-libéral est à la mode. Loin du "travaillisme à la française", qu'il avait naguère défendu, Jacques Chirac s'engouffre dans l'ultra-libéralisme. La nouvelle majorité RPR-UDF s'est fait élire sur une plate-forme qui fait feu de tout bois - "Au secours, la droite revient !", clame le PS pendant la campagne - avec la suppression de l'autorisation administrative de licenciement, pourtant instituée par le premier gouvernement Chirac en 1975, l'aménagement du temps de travail et la flexibilité, la mise en cause du traitement social du chômage et du smic, le gel des effets des seuils sociaux contraignant les entreprises à l'élection de délégués du personnel ou de comité d'entreprise. Pour mettre en oeuvre cette politique sociale très libérale, M. Chirac fait appel à Philippe Séguin, député des Vosges, secrétaire national du RPR chargé de la décentralisation, un quadra rénovateur qui se réclame du gaullisme social. Un ministre à contre-emploi ? Dès avril 1986, Philippe Séguin confie, en privé, qu'il n'entend pas "agir méchamment, mais tenter de trouver des marges de négociations". "On m'a pris tel que je suis, assure-t-il, avec ma non-orthodoxie au sein du RPR et mes réserves sur la plate-forme programmatique. On aurait pu faire l'économie de certaines mesures, comme la suppression de l'autorisation administrative de licenciement, qui n'ont pas apporté une seule voix en plus." Philippe Séguin va jouer l'artisan de la "rupture" avec retenue et modération. Il donne un premier signal d'ouverture en résistant à une majorité qui réclame des têtes, à commencer par celle de Martine Aubry, alors directrice des relations du travail. Non seulement le ministre maintient la fille de Jacques Delors, proche du PS et de la CFDT, coauteur des lois Auroux de 1982 sur les nouveaux droits des salariés - vilipendées par la droite - dans ses fonctions, mais il l'écoute. Spécialiste reconnue en droit du travail, Mme Aubry modère les ardeurs libérales et évite des bévues. Loyale, elle s'abstient toutefois de participer aux réunions interministérielles. La cohabitation durera dix-sept mois. Le 9 septembre 1987, Mme Aubry quitte ses fonctions, à l'amiable, et est nommée maître des requêtes au Conseil d'Etat. La "méthode Séguin", c'est aussi le dialogue avec les syndicats. Bien qu'affaiblis par les premiers ravages de la désyndicalisation, les syndicats sont plus puissants qu'aujourd'hui, et surtout, enhardis par les conquêtes sociales engrangées depuis 1981, ils sont plus combatifs. "Les syndicats peuvent choisir de se faire hara-kiri, mais ils devraient voir à quel ministre ils ont échappé, observe-t-il en pensant au très libéral Alain Madelin. J'ai besoin de leur concours." Il noue de bonnes relations avec Henri Krasucki, l'inflexible "patron" de la CGT, mais privilégie celui de FO, André Bergeron. Avec Edmond Maire, le secrétaire général de la CFDT, il a "plus de mal", car, dit-il, "il se méfie de ma modération". Au lendemain de sa mort, l'hommage des syndicats a été unanime. La "méthode Séguin" paie. Etroitement surveillé par Matignon, confronté à un chef de l'Etat qui ne reste pas inerte - François Mitterrand assure d'emblée qu'il ne signera "que des ordonnances qui présenteraient un progrès par rapport aux acquis" -, Philippe Séguin affirme, dans un entretien au Monde du 8 août 1986, que "la nouvelle politique économique et sociale du pays ne peut se faire contre les salariés". "La rupture, ajoute-t-il, réside dans le fait que nous considérions l'emploi comme le premier des acquis sociaux et l'entreprise comme la priorité." Pour Philippe Séguin, cette politique "n'est possible que sous réserve d'un minimum d'acceptabilité, dont il faut créer patiemment, obstinément, les conditions". Au final, Philippe Séguin se heurte à François Mitterrand sur les réformes les plus emblématiques de la rupture - l'autorisation administrative de licenciement et le temps de travail -, qu'il refuse d'avaliser par la voie d'ordonnances. "On en a plaisanté", notait le ministre, qui a recouru, chaque fois, à la loi, après négociations avec les partenaires sociaux. Quand la rupture est socialement accompagnée, ça passe. Quand elle n'est pas négociable, ça casse. Philippe Séguin a poursuivi le traitement social - en proclamant que "l'objectif n'est plus le plein-emploi productif" -, il a renoncé à supprimer les seuils sociaux et il a résisté à la mise en cause du smic. Un modèle Séguin ? Xavier Darcos pourrait s'en inspirer pour réussir ses réformes. Courriel : noblecourt@lemonde.fr. Michel Noblecourt (Editorialiste)
14/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/14/philippe-seguin-ministre-modele-de-la-rupture-par-michel-noblecourt_1291620_3232.html
Contre-pouvoir
Haro sur le Conseil constitutionnel ! C'est peu dire que sa décision du 29 décembre 2009 annulant la "taxe carbone" a exaspéré le président de la République. Au point de laisser se développer une offensive en bonne et due forme contre les juges constitutionnels.
Haro sur le Conseil constitutionnel ! C'est peu dire que sa décision du 29 décembre 2009 annulant la "taxe carbone" a exaspéré le président de la République. Au point de laisser se développer une offensive en bonne et due forme contre les juges constitutionnels. Ce sont des "conservateurs", a lancé Frédéric Lefebvre, porte-parole de l'UMP et qui dit tout haut ce que le président pense à mi-voix. Puis Patrick Devedjian, ministre du gouvernement, a dénoncé dans ces colonnes le manque d'"autorité" des décisions du Conseil et sa propension coupable "à vouloir faire la loi en lieu et place du Parlement". Enfin, mardi 12 janvier, dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, le premier ministre, François Fillon, a fait part de la "surprise" du gouvernement devant une décision dont le fondement juridique ne lui paraît "pas évident". Cette irritation est compréhensible. Comme lors de chacune des précédentes censures importantes du Conseil constitutionnel depuis 2007 - contre la loi Hadopi sur l'Internet, contre l'application de la rétention de sûreté, contre les tests ADN pour les étrangers, contre le projet de redécoupage électoral, etc. -, c'est en effet la mauvaise qualité du travail du gouvernement et de sa majorité parlementaire qui est condamnée par les gardiens de la Constitution. Mais c'est leur rôle ! Cette irritation n'est pas originale. Bien des gouvernements, depuis trente ans, ont dénoncé des décisions qu'ils jugeaient politiques, partisanes ou conservatrices. En 1993, par exemple, Edouard Balladur avait lancé une charge sévère contre le Conseil constitutionnel. Son président de l'époque, Robert Badinter, lui avait répliqué sèchement : "L'impatience qui saisit toute majorité politique face au juge constitutionnel est celle de tout pouvoir face à un contre-pouvoir." On ne saurait mieux dire. Comme ses prédécesseurs - ou plus encore tant son "impatience" est grande -, le pouvoir actuel supporte mal de voir sa volonté surveillée, contrariée ou entravée. Comme eux, ou plus encore, il est tenté de dresser le procès en illégitimité du Conseil constitutionnel - en dépit même du fait que dix de ses onze membres actuels appartiennent à son camp politique. Il a tort. L'article 5 de la Constitution fixe comme premier devoir au président de la République de "veiller au respect" de la Loi fondamentale. Pour l'excellente raison que celle-ci est faite pour le protéger non seulement contre ses propres erreurs, mais aussi contre toute tentation de l'arbitraire.
14/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/14/contre-pouvoir_1291618_3232.html
La Chine prudente face aux menaces de Google
Sous pression des Etats-Unis après la menace de Google de se retirer de Chine, Pékin maintient sa politique actuelle, alors même que Google a cessé de censurer ses résultats de recherche dans le pays.
"La Chine accueille les opérations (sur son sol) conformes à la loi (chinoise) des entreprises Internet internationales." La réaction officielle de Pékin, au lendemain des accusations du géant de l'Internet Google, qui accuse à mots couverts la Chine d'être derrière une importante tentative de piratage, a été pour le moins mesurée. Le moteur de recherche a affirmé mardi avoir été la cible d'une attaque informatique de grande ampleur en provenance de Chine, et dit envisager sérieusement de fermer ses bureaux dans le pays ainsi que la version chinoise de son site. Google a par ailleurs levé la censure des résultats de recherche qu'il avait mis en place pour se conformer à la loi chinoise. Mais si Pékin a de nouveau insisté sur la nécessité, pour les entreprises étrangères opérant en Chine, de pratiquer la censure, le gouvernement n'a pas précisé s'il entendait sanctionner le moteur de recherche. "L'Internet en Chine est ouvert et le gouvernement chinois encourage son développement et s'efforce de créer un environnement favorable pour cela", a déclaré une porte-parole du gouvernement, tandis que le secrétariat d'Etat américain, qui a demandé "des explications" à Pékin, a réitéré sa volonté de "discuter" avec le gouvernement chinois de "la capacité de la Chine de continuer à respecter les standards internationaux" du monde économique. UN CHEVAL DE TROIE DANS DES DOCUMENTS PDF Deux jours après la révélation de ce piratage de grande ampleur, les informations commencent à filtrer sur le modus operandi des assaillants ainsi que sur leurs cibles. Outre Google, au moins une trentaine d'entreprises auraient été la cible de l'attaque, qui visait principalement des entreprises liées aux défenseurs des droits de l'homme ou en conflit avec les autorités chinoises. Google explique que l'attaque sur ses serveurs visait à pénétrer dans les boîtes e-mail utilisées par des opposants au gouvernement chinois, tandis qu'un cabinet d'avocats de Los Angeles, qui défend les intérêts d'une entreprise qui a porté plainte contre la Chine pour violation de brevet, a affirmé avoir également été attaqué. Les pirates auraient également tenté de mettre la main sur le code-source du moteur de recherche, un secret industriel à la valeur inestimable. D'après les premières révélations d'entreprises visées, les pirates auraient utilisé une faille de sécurité dans les logiciels Adobe, et notamment le Reader de l'entreprise, utilisé pour lire des documents au format pdf. La faille, découverte mi-décembre, n'a été corrigée que mardi dernier ; elle permettait d'insérer un code malicieux dans un document pdf. Lorsqu'un utilisateur ouvrait le document piégé, il installait à l'insu de l'utilisateur un logiciel-espion ou cheval de Troie sur l'ordinateur. Le programme transmettait alors des données contenues sur l'ordinateur à l'extérieur de l'entreprise, et créait une "porte dérobée" ou backdoor permettant de se connecter à distance à l'ordinateur.
14/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/14/la-chine-prudente-face-aux-menaces-de-google_1291499_651865.html
Le Conseil d'Etat donne raison à M. Delanoë dans l'affaire du stade Jean-Bouin
Le maire de Paris était menacé de poursuites pour délit de favoritisme
Bertrand Delanoë a bon espoir d'échapper à une mise en examen pour délit de favoritisme qui le menace depuis décembre 2009. Le Conseil d'Etat a rendu, mercredi 13 janvier, une décision qui pourrait avoir une incidence sur l'information judiciaire conduite par les juges financiers Sophie Clément et Brigitte Brun. La Haute juridiction a suspendu un jugement du tribunal administratif sur lequel les juges du pénal se fondaient pour poursuivre le maire de Paris mais aussi Arnaud Lagardère, partenaire de l'association Paris-Jean-Bouin. En 2004, ce club sportif, qui occupe les terrains autour du stade Jean Bouin dans le 16e arrondissement de Paris, avait reconduit la convention qui la lie à la Ville depuis 1927. S'estimant lésé alors qu'il était sur les rangs, Hervé Picard, président de la société Paris-Tennis a porté plainte devant le tribunal administratif. En mars, le tribunal a considéré que "la réalité des intentions des parties et leurs pratiques en 2004 confèrent à la convention le caractère d'une délégation de service public". Par conséquent, la Ville aurait dû, conformément à la règle dans ce type de procédure, procéder à un appel d'offres. Le Conseil d'Etat a suspendu, mercredi, ce jugement en première instance. Il a suivi les conclusions du rapporteur public, Laurent Olléon. Celui-ci estime que le tribunal administratif a commis "une erreur de droit grossière " en requalifiant la convention de 2004 en délégation de service public. Selon lui, deux critères n'étaient pas remplis pour qu'il en soit ainsi : l'association Jean-Bouin ne s'acquitte pas d'un "service public" qui relève de la compétence de la Ville. Le tribunal n'a pas "vérifié" que ce club tirait une part "substantielle" de ses ressources de la subvention municipale. La cour administrative d'appel doit se prononcer sur le fond dans les prochains mois. Si sa décision infirmait celle rendue mercredi, la Ville irait en cassation devant le Conseil d'Etat. "Sans objet" En 2007, M. Picard avait introduit une seconde plainte devant la justice pénale contre la même convention. Le délit de favoritisme qu'auraient pu reprocher les juges à M. Delanoë ne peut être constitué que s'il s'agit d'une délégation de service public. Or, le Conseil d'Etat considère qu'il est impossible de l'affirmer. "L'arrêt du Conseil d'Etat rend sans objet les poursuites pénales d'autant plus scandaleuses qu'elles ne reposaient que sur des considérations de droit public que le Conseil d'Etat a écartées", s'est félicité, mercredi, le cabinet du maire. Défait sur le plan juridique, M. Picard, a tenté de semer le doute sur l'impartialité du rapporteur public, M. Olléon, en indiquant à la presse qu'il avait été l'un des signataires, en 2008, d'une motion en faveur de M. Delanoë au congrès du PS à Reims. "M. Olléon n'a aucun lien avec M. Delanoë qui justifie qu'il n'ait pas été saisi du dossier", a répondu le Conseil d'Etat. M. Delanoë n'aura peut-être pas à se défendre devant le tribunal correctionnel. En revanche, les adversaires du nouveau stade de rugby ne désarment pas. L'association Jean-Bouin a déposé un recours suspensif pour bloquer les travaux qui devraient commencer le 20 janvier. Béatrice Jérôme
14/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/14/le-conseil-d-etat-donne-raison-a-m-delanoe-dans-l-affaire-du-stade-jean-bouin_1291649_3224.html
Le gouvernement néerlandais esquive une crise politique après la publication d'un rapport sur la guerre en Irak
Une commission d'enquête affirme que le conflit était illégal au regard du droit international
Les Pays-Bas ont frôlé de très près une crise politique, mercredi 13 janvier. La publication, la veille, du rapport d'une commission d'enquête sur l'attitude du premier gouvernement de Jan Peter Balkenende, en 2002, avant le début de la guerre en Irak, a failli avoir raison de la coalition que dirige aujourd'hui le leader chrétien-démocrate. Seules les concessions faites par son parti, peu avant le début d'un débat parlementaire convoqué d'urgence, ont permis au ministre-président de sauver son actuel gouvernement. La commission d'enquête dirigée par Willibrord Davids, un ancien haut magistrat, a estimé, dans un document de plus de 500 pages, que la coalition au pouvoir en 2002-2003 avait appuyé l'intervention en Irak alors qu'elle n'était pas légitime au regard du droit international, faute d'un mandat des Nations unies. Essentiellement basée sur des considérations comme la " solidarité atlantique", la position de l'exécutif a été définie à la va-vite plusieurs mois avant l'invasion, et n'a pas été étayée par la suite, juge la commission. Le rapport relève que le gouvernement n'a pas tenu compte des réserves des services de renseignement sur l'hypothèse de la présence d'armes de destruction massive en Irak, et a transmis une information incomplète aux députés. M. Davids a également reproché à M. Balkenende d'avoir, à l'époque, laissé la gestion du dossier à son ministre des affaires étrangères, Jaap de Hoop Scheffer. Piqué au vif, le chef de l'exécutif a contesté ces conclusions. D'après lui, les experts étaient divisés, à l'époque, sur la légitimité de l'intervention. M. Balkenende a assuré, par ailleurs, que son gouvernement avait toujours informé au mieux le Parlement. Et il a défendu les "objectifs politiques" de son équipe, qui regroupait alors, outre son parti, la Liste Pim Fortuyn et le Parti libéral. Mettant en exergue les réserves de l'un des onze membres de la commission à propos du rapport, M. Balkenende a préféré s'en tenir à deux points positifs pour lui. A savoir que les Pays-Bas n'ont, selon le rapport Davids, pas pris "une part active" au conflit armé et que M. de Hoop Scheffer n'a pas dû à son attitude favorable à la guerre son accession au poste de secrétaire général de l'OTAN, en 2004. "Leçon pour l'avenir" Les partenaires travaillistes de M. Balkenende se sont dit "désagréablement surpris" par l'attitude du premier ministre. Et l'opposition a invoqué la Constitution pour obtenir un débat d'urgence et des éclaircissements. La Loi fondamentale néerlandaise dispose, en effet, qu'un gouvernement doit s'exprimer d'une seule voix sur toutes les grandes questions. Il a fallu douze heures de négociations et la menace d'une crise pour que M. Balkenende accepte de faire marche arrière et transmette, mercredi soir, aux députés une lettre cosignée par ses deux premiers ministres. Dans ce document, le leader chrétien-démocrate admet que le rapport Davids est "une critique du passé et une leçon pour l'avenir". Il endosse ses conclusions et promet une réponse circonstanciée pour le mois de février.
14/01/2010
international
https://www.lemonde.fr/international/article/2010/01/14/le-gouvernement-neerlandais-esquive-une-crise-politique-apres-la-publication-d-un-rapport-sur-la-guerre-en-irak_1291644_3210.html
Des gendarmes français pour protéger les secouristes et empêcher les pillages
Le très haut niveau d'insécurité d'Haïti inquiète les ONG qui arrivent sur l'île sinistrée
Depuis mardi soir, nous sommes sur le pied d'alerte. Douze heures après le séisme, les premières équipes étaient prêtes à partir à Haïti." Adjoint au chef du Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (Cogic), installé à Asnières (Hauts-de-Seine), le colonel Brossard souligne "la rapidité" du dispositif de secours et de sécurité mis en place par la France. Mercredi 13 janvier en début d'après-midi, 62 sapeurs-pompiers de Martinique et de Guadeloupe, accompagnés de médecins urgentistes, ont décollé de Fort-de-France pour rejoindre l'île des Caraïbes dévastée. Un détachement de 36 militaires de l'escadron de gendarmerie mobile d'Antibes, basés en Martinique, les escorte. D'autre part, dans la soirée de mercredi, un avion s'est envolé de l'aéroport de Roissy en direction d'Istres (Bouches-du-Rhône), pour embarquer, à destination d'Haïti, 70 militaires de la sécurité civile. Parmi eux, des spécialistes des situations de crise et des systèmes de communication. Six équipes cynophiles font partie de ce détachement. Le ministère de l'intérieur devait décider, dans la journée de jeudi 14 janvier, de l'éventuel envoi d'un contingent supplémentaire d'une centaine de sapeurs-pompiers de la région parisienne et du sud de la France, assistés de onze gendarmes et de militaires spécialistes du traitement de l'eau, afin d'installer des postes médicaux avancés dispensant des premiers soins à la population. En fonction de l'évolution de la situation, un hôpital de campagne pourrait aussi être acheminé vers Port-au-Prince, avec une équipe de 80 médecins, chirurgiens, radiologues et anesthésistes. Ce qui porterait à plus de 350 personnes les forces totales mobilisées par la France. La mission des premiers groupes de secouristes, décrit le colonel Brossard, est de participer aux opérations de sauvetage et de fouille des décombres. Les renforts auront pour tâche l'assistance médicale et sanitaire à la population haïtienne. La présence des militaires, elle, s'explique par le très haut niveau d'insécurité qui règne en Haïti, l'un des pays les plus pauvres du monde. Leur mission est de "se placer à la disposition des autorités locales dans une démarche liée à la sécurité des personnes et des biens", indique la gendarmerie nationale. Ils devront, tout en participant aux opérations de secours, assurer la protection des sauveteurs "face à des actes d'agression", et prévenir "toute tentative de pillage" dans les secteurs dévastés. Bien évidemment, ils ont aussi pour consigne d'assurer la protection des quelque 1 400 ressortissants français, dont 1 200 dans la capitale. La gendarmerie nationale dispose en temps normal d'un contingent de 31 militaires basés en Haïti, dont 25, chargés de former et d'assister la police locale, participent à la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), les six autres étant affectés à la protection de l'ambassade de France. Pierre Le Hir
14/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/14/des-gendarmes-francais-pour-proteger-les-secouristes-et-empecher-les-pillages_1291631_3244.html
Rétablir l'accès à l'eau potable, une priorité pour les ONG
La question de l'organisation des secours et de l'accès aux sinistrés inquiète les humanitaires
Lancer des appels aux dons, tenter d'évaluer l'ampleur des besoins, et, surtout, envoyer sur place équipes et matériels : durant toute la journée du mercredi 13 janvier, les principales organisations non gouvernementales (ONG) françaises se sont mobilisées pour venir en aide aux Haïtiens. Médecins sans frontières (MSF), qui a déjà accueilli un millier de blessés dans ses différents centres de soins de Port-au-Prince, devait envoyer dans la soirée un hôpital gonflable d'une capacité de 100 lits. Médecins du monde, face à "la gravité de la situation", annonçait l'envoi d'un charter de 40 tonnes de matériel logistique et d'équipements médicaux, ainsi qu'une équipe d'urgence d'une dizaine de médecins, chirurgiens, infirmiers et logisticiens. La Croix-Rouge française (CRF) va distribuer des produits de première nécessité (couvertures, tentes, bâches, jerrycans) pour 20 000 personnes, et "installer dès que possible" une première unité de traitement d'eau pour 40 000 personnes. L'eau, telle est aussi la priorité d'Action contre la faim (ACF). Pour cette ONG très présente à Haïti (une centaine de salariés dans le pays, dont une trentaine dans la capitale), l'aide alimentaire viendra ensuite. "Compte-tenu de l'urbanisation anarchique de Port-au-Prince, de la pauvreté endémique et de la manière dont fonctionne l'approvisionnement en eau dans la ville, il faut s'attendre à de grandes difficultés pour accéder à l'eau potable", estime son directeur, François Danel, en rappelant qu'après le passage des violents cyclones qui avaient affecté Haïti fin 2008, ce problème avait rapidement posé "une question de vie ou de mort" pour les populations. L'ONG, qui a fait partir, mercredi, une équipe d'urgence de six personnes dans l'avion affrété par le Quai d'Orsay, prévoit un nouveau départ d'ici la fin de la semaine, qui permettra d'acheminer mini-usines de filtration et produits chimiques de purification de l'eau. Bidonvilles Reste, sur place, à organiser les secours. Avec deux écueils majeurs. Le premier, qui risque d'être particulièrement aigu dans les zones de distribution alimentaire, a trait à la sécurité. Les pillages se sont multipliés dès la survenue du séisme et risquent, dans les prochains jours, de constituer un handicap supplémentaire pour les équipes d'aide humanitaire. Le second écueil concerne l'accès aux victimes et aux zones les plus détruites. Port-au-Prince compte en effet deux millions d'habitants, logés pour la plupart dans des bidonvilles situés au-dessus de la ville et inaccessibles aux véhicules... quand il en reste. "La plupart de nos véhicules ayant été endommagés, notre première urgence va être de trouver les moyens de circuler dans la ville", précise M. Danel. Affirmant que "la structure urbaine de Port-au-Prince et de ses routes d'accès va rendre extrêmement difficile l'accès aux sinistrés", la société française Geosciences Consultants (GSC), spécialisée dans la prévention des risques et des catastrophes naturelles, a mis gratuitement des cartes de Port-au-Prince et de sa région à la disposition des ONG afin de faciliter leur travail. Catherine Vincent
14/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/14/retablir-l-acces-a-l-eau-potable-une-priorite-pour-les-ong_1291626_3244.html
Fragile comme du béton
Un "architecte de l'urgence" explique pourquoi Port-au-Prince s'est écroulée, des palais aux bidonvilles, et comment il faudra reconstruire
Patrick Coulombel est un spécialiste de la reconstruction des villes et villages dévastés par des séismes, des cyclones ou des tsunamis. Il préside la fondation Architectes de l'urgence qui, depuis 2001, s'attache à "reconstruire vite mais pas précaire, en adéquation avec l'habitat local, les usages sociaux et les contraintes environnementales". Elle est déjà intervenue au Sri Lanka, à Sumatra (Indonésie), en Iran, en Afghanistan ou à Madagascar. Patrick Coulombel, qui avait mené une mission en Haïti après le passage de l'ouragan Jeanne, en 2004, devait partir pour Port-au-Prince jeudi 14 janvier. Quel type de constructions trouvait-on à Port-au-Prince ? Il y a trois grandes familles de bâtiments. D'abord, un important patrimoine de style colonial, assez beau. Ensuite, beaucoup de gros édifices à ossature en béton construits au XXe siècle. Enfin, il y a l'habitat populaire, des bidonvilles plus ou moins consolidés, souvent situés dans les ravines et à flanc de colline, avec des maisons de tôles, de planches, de briques. Aucune de ces catégories n'a semble-t-il résisté au séisme : une secousse de 7 degrés, c'est monstrueux. Plus on est proche de l'épicentre, plus les bâtiments subissent un effet de cisaillement par le bas. Plus on s'en éloigne, plus ils entrent en résonance par le haut. Quelles constructions représentent le principal danger ? Les bidonvilles ne sont pas ce qui nous inquiète le plus. Les matériaux sont en général assez légers, les constructions sont basses. En revanche, elles n'ont pas d'accroche au sol. Le risque avec les bidonvilles, c'est le glissement de terrain qui peut tout emporter. Les bâtiments en béton, eux, ont un poids bien plus considérable et ils n'ont pas été construits selon des normes parasismiques. Ce sont de simples structures de poteaux et de poutres. On construit en béton parce que c'est beaucoup moins cher que des structures en acier, qui résistent mieux aux séismes. Le problème, c'est que contrairement aux apparences, la mise en oeuvre du béton est très technique. Mal fait, il peut avoir des conséquences dramatiques. Or la plupart des gens compétents sont partis d'Haïti. Il y a peu d'architectes et d'ingénieurs sur place pour construire bien. En 2008, une école s'était écroulée toute seule à Pétionville, une banlieue de Port-au-Prince. Le gouvernement avait alors estimé que 60 % des constructions ne respectaient pas les normes de base. Comment va s'organiser le travail de reconstruction ? On va d'abord établir des périmètres de sécurité, analyser l'état des édifices, interdire des bâtiments, en renforcer d'autres, dégager les décombres. Essayer de remettre en fonctionnement les centres de santé, les écoles, les infrastructures. Et il va falloir commencer à penser à l'hébergement de la population. D'abord dans des tentes, au pire sous des bâches en plastique. Enfin, on devra aider les gens à reconstruire leur logement. Faudrait-il interdire de reconstruire dans les ravines ? On ne peut pas interdire la construction sur un terrain sans fournir une alternative qui offre la même proximité avec le centre-ville, l'économie. Haïti est une société rurale, où les gens vont s'installer en ville pour avoir accès aux services de santé et d'éducation. Si vous les en éloignez, ils se réinstalleront sur les terrains à risque. C'est un pays où les gens survivent, celui où j'ai vu les situations les plus dures. Ils prendront le risque. Peut-on reconstruire l'habitat populaire de manière plus résistante sans atteindre des coûts inabordables ? Oui, bien sûr. Quand on n'a pas de moyens et très peu de matériaux, il faut construire léger et bas. Si l'aide internationale finance des programmes de reconstruction à grande échelle, on peut mettre en place des systèmes d'auto-construction qui reviennent à 2 000 euros pour une maison de 50 mètres carrés, nous l'avons fait en Indonésie par exemple. C'est le principe du "cash for work" : on définit un modèle de construction avec la population et on paie les gens pour bâtir leur propre logement, avec l'aide de quelques ouvriers spécialisés et notre encadrement, par groupes de cinquante maisons. Cela permet de distribuer des revenus, c'est essentiel pour relancer la machine économique et pour donner à des gens qui ont faim le temps de se consacrer à leur logement. Quels sont les pièges à éviter dans ce genre de situation ? Le premier piège, c'est l'identification du foncier. C'est très difficile de savoir qui exactement a des droits sur quel sol, soit parce que personne ne le sait effectivement, soit parce que les gens sont prêts à tout pour avoir une maison. Ensuite, il faut faire attention à la manière dont on aborde la communauté. Il faut identifier les interlocuteurs légitimes et faire valider par tout le monde le choix des bénéficiaires des nouvelles maisons, sachant qu'on ne reconstruit jamais tout mais seulement les habitations les plus touchées. Sans ce travail d'enquête sociale, on risque de créer de graves conflits. Propos recueillis par Grégoire Allix
14/01/2010
a-la-une
https://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2010/01/14/fragile-comme-du-beton_1291623_3208.html
En Haïti, la mort, la désolation et la ruine
Le séisme de force 7 qui a frappé mardi 12 janvier Port-au-Prince, la capitale, a tué des milliers de personnes et causé d'immenses dégâts La détresse d'un pays misérable, une population démunie de tout, l'afflux des secours : le récit de l'envoyé spécial du "Monde"
Partout, ce ne sont que des amas de décombres, des cadavres allongés sur les trottoirs, des cris de douleur et des appels à l'aide. Au lendemain du séisme, le plus violent depuis deux siècles, qui a dévasté Haïti, mardi 12 janvier, sa capitale, Port-au-Prince, offre un visage de désolation. Les autorités de ce pays des Caraïbes, le plus pauvre des Amériques, sont dépassées par l'ampleur de la catastrophe. Difficile de compter sur l'aide de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), durement frappée, qui compte elle aussi ses morts. Le siège de l'ONU, l'Hôtel Christopher, un bâtiment de cinq étages, s'est effondré. Jusqu'à 200 employés sont portés disparus, dont le chef de la délégation, le Tunisien Hedi Annabi. Son décès a été annoncé par René Préval, le président haïtien. Les communications téléphoniques sont coupées ; seules quelques radios continuent à informer la population. Les témoignages éplorés se succèdent sur les ondes, de personnes à la recherche de parents enfouis lors de l'effondrement des édifices qui sont tombés par centaines. Sur l'une des stations de la capitale, le cinéaste Arnold Antonin, l'un des porte-parole de la société civile, a lancé un appel urgent aux autorités toujours silencieuses vingt-quatre heures après le drame. Si le président haïtien et son premier ministre, Jean-Max Bellerive, ont été épargnés, de nombreuses autres personnalités sont mortes ou portées disparues. A l'instar du président du Parlement, Kelly Bastien, enseveli sous les décombres de l'édifice officiel ou de l'archevêque de Port-au-Prince, de plusieurs ministres du gouvernement, ou encore de Mgr Joseph Serge Miot, tué dans l'effondrement de la résidence des évêques haïtiens, située à proximité de la cathédrale, elle-même totalement détruite. Mercredi, alors que les premiers secours venus de l'étranger n'étaient toujours pas arrivés, aucun engin n'était à l'oeuvre pour dégager les tonnes de gravats. En réalité, personne n'est en mesure d'avancer un premier bilan du désastre. Des milliers de morts ? Des dizaines de milliers ? A en croire les témoignages recueillis dans les rues de la capitale, il reste un peu partout de très nombreux cadavres sous les immeubles effondrés. "Plus de 20 % du parc immobilier de la capitale est détruit ou sévèrement endommagé", évalue Georges Michel, journaliste, historien et médecin, qui vient de sillonner les quartiers de Port-au-Prince. "C'est dantesque, on n'avait jamais vu ça", ajoute-t-il. Tout au long du boulevard de Delmas, une large avenue reliant le centre de Port-au-Prince à la banlieue de Pétionville, des milliers d'habitants errent, serrant dans leurs bras les quelques affaires qu'ils ont réussi à sauver. L'air hagard, ils montent ou ils descendent l'avenue sans savoir où se réfugier. L'un a chargé un cadavre, enveloppé à la hâte dans des sacs de jute, sur une charrette à bras. Deux jeunes transportent sur une chaise en plastique leur grand-mère, blessée à la tête, et simplement vêtue d'une chemise de nuit rose. "Tous les hôpitaux du bas de la ville sont détruits", dit l'un d'eux. Quant aux morgues, elles sont déjà pleines. Effrayés par les fortes répliques qui continuent de se faire sentir, la plupart des habitants ont dormi dehors. Le parc du collège Saint-Louis-de-Gonzague, non loin d'un commissariat de police entièrement détruit, est transformé en un vaste campement improvisé. Les habitants dont les maisonnettes ont été balayées par le tremblement de terre sont allongés sur des cartons, souvent à même le sol, parfois protégés du soleil par des draps. Ici un terrain de foot, plus loin le terre-plein d'un carrefour... tous les espaces libres abritent désormais des campements improvisés où des centaines de milliers de sinistrés sont privés de tout, d'eau, de nourriture et de médicaments. Avenue Christophe, le lycée Jean-Jacques-Dessalines s'est effondré. "Il avait plusieurs étages, de nombreux élèves sont morts", affirme Jean Exeme Lundy, un rescapé. "J'ai perdu mon frère Auguste et mon filleul Nick", ajoute-t-il. Un peu plus loin, rue Capois, le chaos règne à l'hôpital Saint-Esprit. Le bâtiment, ébranlé par le séisme, est fermé et des dizaines de personnes, souvent grièvement blessées, attendent en gémissant, allongées à même le sol, devant l'entrée. Fransa Jety, une très jeune femme, se précipite en hurlant : "Aidez-moi à trouver des antibiotiques, ma fillette est en train de mourir d'une crise de tétanos", implore-t-elle. La fillette, dévêtue, allongée sur un bout de carton, est agitée de violents frissons. Le docteur Sintécile Benjamin s'avoue impuissante. "Je suis venue comme bénévole, mais nous n'avons rien, aucun équipement, pas de médicament", soupire-t-elle. Beaucoup ont les membres brisés, comme Richard Sony, dont les deux jambes sont cassées, ou Monine Leblanc, enceinte de quatre mois, qui pousse de longs gémissements. La situation est tout aussi chaotique à l'hôpital installé par Médecins sans frontières (MSF), une imposante bâtisse, dans le quartier de Pacot. Des dizaines de personnes tambourinent sur la grande porte métallique de l'établissement. Une femme, le pied transpercé par une grosse latte de bois, gît, inconsciente, devant l'entrée. L'autre hôpital de MSF, au bas de la ville, Trinité, a été détruit par le tremblement de terre, de même que l'hôpital général. Un pick-up approche, chargé de cadavres. A l'intérieur, la cour est jonchée de blessés. "Nous sommes débordés, heureusement que des renforts vont arriver", dit un jeune français de MSF. Lionel Dervil, un commerçant de 38 ans, est venu avec un voisin pour tenter de récupérer le cadavre de son épouse. "Ils nous disent qu'ils doivent d'abord s'occuper des blessés, qu'ils n'ont pas le temps pour les morts", s'impatiente le voisin, Samuel Alexandre. Sur la route qui descend vers le quartier de Canapé Vert, les cadavres sont alignés sur les bas-côtés. Le bidonville qui ronge la montagne, vers la gauche, semble avoir été bombardé. Une grande partie des petites maisons improvisées, en parpaings, se sont effondrées. La plupart des stations-service n'ont plus de carburant. Une longue file de véhicules s'est formée devant l'une des rares qui en distribue encore. Des spéculateurs à la petite semaine proposent déjà le précieux carburant dans des bidons d'un galon... au double du prix affiché. Jean-Michel Caroit
14/01/2010
a-la-une
https://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2010/01/14/en-haiti-la-mort-la-desolation-et-la-ruine_1291616_3208.html
Suicide d'un salarié : Renault fait appel
Le groupe automobile Renault, reconnu coupable de "faute inexcusable" en décembre dernier dans le suicide d'un ingénieur en 2006, a fait appel de la décision rendue par le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Nanterre.
Le groupe automobile Renault, reconnu coupable de "faute inexcusable""Ce n'était pas une décision facile à prendre""il est difficile d'admettre l'idée que Renault puisse mettre ses salariés en danger"e"faute inexcusable""la société Renault aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé dans le cadre de son activité professionnelle""n'a pas pris les mesures nécessaires pour préserver son salarié du risque qu'il encourait du fait de l'exercice de son activité professionnelle""pas alerté le médecin du travail""faute inexcusable""au maximum" en décembre dernier dans le suicide d'un ingénieur en 2006, a fait appel de la décision rendue par le tribunal des affaires de sécurité sociale (TASS) de Nanterre, a-t-on appris jeudi 14 janvier du groupe. , a expliqué un porte-parole du groupe, mais . Antonio B., ingénieur en informatique de 39 ans, s'était jeté du 5 étage du bâtiment principal du Technocentre de Renault à Guyancourt, le 20 octobre 2006. Il s'agissait du premier des trois suicides en quatre mois de salariés du Technocentre, dont deux sur le lieu de travail. En reconnaissant la de l'employeur, le TASS avait donné gain de cause à la veuve de l'ingénieur, pour qui le suicide de son époux était directement lié à son stress professionnel et à sa charge de travail. Selon le jugement rendu le 17 décembre par le TASS, . Renault , ajoutait le TASS. Le tribunal relevait notamment que les responsables de l'ingénieur s'étaient inquiétés mais n'avaient . En conséquence de la reconnaissance de la , le TASS a majoré la rente allouée à la veuve et au fils du défunt et a condamné Renault à un euro de préjudice moral. L'appel exercé par Renault sera examiné par la cour d'appel de Versailles, à une date pour l'instant indéterminée.
14/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/14/suicide-d-un-salarie-renault-fait-appel_1291609_3224.html
La France est prête à payer une partie des surcoûts de l'Airbus A400M
La France est prête à supporter une partie des surcoûts de l'avion de transport militaire Airbus A400M, qui atteindraient un total de 5 milliards d'euros, a déclaré jeudi le ministre de la défense, Hervé Morin.
La France est prête à supporter une partie des surcoûts de l'avion de transport militaire Airbus A400M, qui atteindraient un total de 5 milliards d'euros, a déclaré jeudi 14 janvier le ministre de la défense, Hervé Morin. "Le fait de porter une partie des surcoûts ne me dérange pas, parce que je pense que ce programme est un programme magnifique", explique le ministre sur la radio RFI, au moment où doit se tenir une réunion des pays clients à Londres. Aujourd'hui, il "reste à négocier la question des surcoûts, et ces surcoûts, il faut qu'ils soient partagés entre les pays et le constructeur", a toutefois ajouté M. Morin. La discussion actuelle "porte sur 5 milliards [d'euros] à peu près", a-t-il précisé. Selon certaines sources, les surcoûts pourraient même atteindre 11 milliards d'euros, en comptant une évaluation des risques de développement futurs du programme, qui est déjà en retard d'au moins trois ans. Une réunion à huis clos doit se tenir jeudi à Londres, rassemblant des représentants de l'Allemagne, de la France, de l'Espagne, du Royaume-Uni, de la Belgique, du Luxembourg et de la Turquie, qui ont commandé au total cent quatre-vingts exemplaires de l'A400M à EADS, la maison mère d'Airbus. Airbus et EADS menacent d'arrêter le programme si un accord financier n'était pas trouvé d'ici à la fin du mois. L'Allemagne, premier client de l'appareil avec soixante exemplaires commandés, apparaît comme le pays le moins disposé à accorder une rallonge financière à EADS.
14/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/14/la-france-est-prete-a-payer-une-partie-des-surcouts-de-l-airbus-a400m_1291608_3234.html
"""La Méthode Coué. Histoire d'une pratique de guérison au XXe siècle"", d'Hervé Guillemain : Coué, sa méthode et ses couacs"
Le docteur Emile Coué (1857-1926, pharmacien de son état) n'est plus crédible. Ce ne fut pas toujours le cas.
x haute, matin et soir. L'aide d'une cordelette à noeuds est la bienvenue. Quant à la durée de la prescription, toute la vie fera bien l'affaire. Car cette panacée est "préventive autant que curative". Voilà pratiquement tout le contenu de la célébrissime méthode Coué. Elle est devenue synonyme, dans le langage courant, d'illusion risible et de persuasion inefficace. Voulez-vous brocarder une politique ? Faire comprendre qu'elle se contente de psalmodier que son bilan est positif ? Traitez-la simplement de "méthode Coué", version ringarde et ridicule, en France, du wishful thinking. Le docteur Emile Coué (1857-1926, pharmacien de son état) n'est plus crédible. Ce ne fut pas toujours le cas. Voilà ce qu'on découvre, avec autant d'intérêt que d'amusement, en lisant l'original travail d'historien conduit par Hervé Guillemain. Autour d'un objet mince, diaphane, presque invisible, il parvient à construire une enquête féconde, qui dessine à sa manière un paysage instructif. Au départ, un fait banal : un pharmacien de province pratique l'hypnose dans son arrière-boutique, avant la première guerre mondiale. Voilà qu'il s'installe à Nancy, suggère avoir des liens avec l'école où s'illustrèrent Bernheim et Liébeault. Dans les années 1920, son succès devient foudroyant. Les patientes affluent du Royaume-Uni. Des sociétés "couéistes" se fondent un peu partout en Europe comme aux Etats-Unis. Dans les cliniques du lac Léman, on propose soudain, au même menu, à une clientèle plutôt lasse, la méthode Coué et la psychanalyse ! Relayée par les sociétés de théosophie, discrètement parée d'oripeaux indo-bouddhistes, la méthode Coué semble rappeler la répétition des mantras orientaux. Après cette courte gloire, la vaine méthode tombe dans l'oubli et ne subsiste qu'à l'état de proverbe. Jusqu'à ce que le retour de l'hypnose et le revival des suggestions en tout genre viennent amorcer des tentatives de réhabilitation. Tout l'attrait de cette belle enquête est finalement de faire comprendre comment la gloire, l'éclipse, puis le retour de Coué sont autant de signes de la composition, de la décomposition et de la recomposition du paysage psychothérapeutique. Evincée par le triomphe de la psychanalyse, la méthode Coué réapparaît. On recommence, dans les années 1990, à célébrer ses vertus, et la gloire de son créateur. Car cet homme sans intérêt, qui avait sans doute fini par se convaincre lui-même d'avoir inventé quelque chose, est bien l'un des grands précurseurs de cette soupe éclectique qu'on nous sert aujourd'hui à grandes louches sous le nom de "développement personnel". L'idée est toujours la même : positivez, tout va changer. Persuadez-vous que tout va bien, ça finira vite par être le cas. En juillet 1921, le quotidien Le Matin décrétait qu'Emile Coué était "le plus grand optimiste de France". Depuis, il y a de la concurrence. Décidément, tout va de mieux en mieux. LA MÉTHODE COUÉ. HISTOIRE D'UNE PRATIQUE DE GUÉRISON AU XXE SIÈCLE d'Hervé Guillemain. Seuil, "L'Univers historique", 396 p., 21 €. Roger-Pol Droit
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/la-methode-coue-histoire-d-une-pratique-de-guerison-au-xxe-siecle-d-herve-guillemain_1291548_3260.html
Mian Mian déclenche un second conflit entre la Chine et Google
Mian Mian, que son livre "Les Bonbons chinois" avait fait connaître du grand public, traîne en justice Google, accusant le moteur de recherche américain d'avoir scanné son dernier ouvrage, "Acid Lovers", et de l'avoir mis en ligne sans la prévenir ni lui verser des droits d'auteur.
Cette fois-ci, ce n'est pas parce qu'elle continue d'écrire sur le sexe, la drogue et la décadence dans le Shanghaï postmoderne du début du XXIe siècle que l'enfant terrible d'une certaine littérature chinoise contemporaine est de nouveau celle par qui le scandale arrive : Mian Mian, que son livre Les Bonbons chinois (L'Olivier, 2001) avait fait connaître du grand public, traîne en justice Google, accusant le moteur de recherche américain d'avoir scanné son dernier ouvrage, Acid Lovers, et de l'avoir mis en ligne sans la prévenir ni lui verser des droits d'auteur. Elle demande l'équivalent de 6 000 euros de dommages et intérêts et exige de solennelles excuses. Cette fois-ci, Mian Mian, 40 ans, qui fut il y a une décennie l'une des figures centrales d'une "nouvelle vague" chinoise de jeunes femmes écrivains, est du côté de la loi et se pose en défenseur de la littérature à l'heure d'Internet. Fin décembre, lors d'une audition qui a eu lieu dans un tribunal de Pékin - sans la présence de l'intéressée -, le juge a conseillé aux deux parties de négocier un compromis. Une porte-parole de Google Chine, Marsha Wang, avait fait savoir au préalable que sitôt la plainte déposée, la compagnie s'était empressée de retirer ce troisième roman de Mian Mian de son site. L'avocat de l'écrivain, Sun Jingwei, a répliqué que le livre pouvait encore en partie être consulté au moyen de mots-clés. Google doit supprimer "l'intégralité de tous les passages du livre", a précisé Maître Sun, qui estime qu'"un tel comportement (de la part du géant américain) est une claire violation des droits de l'auteur : nous exigeons des excuses publiques !" En ce début 2010, il reste donc à attendre les résultats des négociations en cours entre l'écrivain et Google. Mais l'affaire dépasse le simple et justifié courroux d'une romancière dont les trois livres, tous jugés trop pernicieux par la censure, restent interdits en Chine : elle pose plus généralement le problème de la façon dont Google se permet librement de mettre en ligne des ouvrages, une attitude qui a provoqué de virulentes réactions dans les milieux littéraires des Etats-Unis et d'Europe. Cette fois-ci, c'est en Chine, par ailleurs empire de la contrefaçon, royaume des droits de propriété intellectuels bafoués, que les milieux du livre ont réagi : la China Written Works Copyright Society, une association dépendant du gouvernement, a demandé à Google de négocier des compensations pour les auteurs chinois victimes de ces mises en ligne "sauvages". Même si Mian Mian est le seul écrivain à avoir pour l'instant traîné Google en justice, la compagnie américaine avait pris dans un premier temps les mesures qui s'imposent : le 9 janvier, cédant aux pressions de Pékin, elle avait envoyé à l'Association des écrivains chinois une lettre dans laquelle des excuses étaient adressées aux auteurs victimes de son indélicatesse et où elle proposait à son tour de négocier avec ces derniers des montants de copyright... Censure et copyright Mercredi 13 janvier, tout est brutalement remis en question : Google, qui aurait dû dresser la liste des 18 000 ouvrages qu'elle a scannés, annonce que les négociations sont repoussées sine die. La raison de ce retournement est vraisemblablement liée à une décision beaucoup plus spectaculaire annoncée le même jour : le plus grand moteur de recherche mondial a décidé de ne plus se plier à la censure chinoise, comme il l'avait accepté en 2006 pour faciliter sa percée sur le marché (lire page 12). La polémique sur les droits de copyright en littérature aura suscité les sarcasmes d'un jeune écrivain connu, l'ineffable Han Han qui, de livres en blogs provocateurs, ne cesse de dénoncer les travers de ses concitoyens, et notamment leur penchant pour le nationalisme. "Moi, j'aimerais bien que Google scanne mes livres, grince-t-il sur son blog. Rien que pour une table des matières, on peut leur demander 60 dollars ! Mais quand l'un de mes romans, un livre de 220 000 caractères, a été repris en entier par des sites chinois, personne ne m'a rien payé, et jusqu'à aujourd'hui, ils font la sourde oreille. Non seulement je n'ai rien touché, mais mon livre reste consultable sur leurs sites !" Han Han souligne aussi que le comportement de Google a déclenché des réactions à la fois prévisibles et extrêmes, certains internautes comparant l'attitude du moteur de recherche américain à celle des "impérialistes" au temps des guerres de l'opium... Le bloggeur 88yuhs se félicite ainsi que la Chine, "humiliée dans le passé, soit aujourd'hui une puissance qui peut désormais dire non à haute voix au lieu de rester silencieuse comme elle le faisait auparavant". Mais, pour l'heure, c'est Google qui dit non, et la polémique provoquée par Mian Mian est supplantée par l'attitude soudainement rebelle de la compagnie qu'elle avait attaquée... Bruno Philip (Bangkok, correspondant en Asie du Sud-Est) et Bruno Philip
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/mian-mian-declenche-un-second-conflit-entre-la-chine-et-google_1291535_3260.html
"""L'Espion de Staline"", d'Isabel Kreitz : Richard Sorge, grandeurs et bassesses de l'espionnage en temps de guerre"
L'auteur de BD allemande restitue d'un trait posé la double vie, à Tokyo, du célèbre espion allemand à la solde de Staline.
Tokyo, nid d'espions aurait pu être le titre choisi par l'auteur de BD allemande Isabel Kreitz. Mais elle n'a pas réalisé un roman d'espionnage ou historique. L'Espion de Staline n'est "que" le récit de la double vie de Richard Sorge à Tokyo, de 1933 à 1944. Ce qui est déjà beaucoup... Sorge aurait pu servir de modèle à Malraux ou Greeen. Cet Allemand, fils de bonne famille, découvre Kant, Marx et Schopenhauer après avoir été blessé durant la Grande Guerre. Inscrit au Parti communiste allemand, il entre ensuite en 1933 au Parti national-socialiste et mène une double vie, sous le signe de l'autodestruction (l'alcool notamment) et de la soumission au Komintern, de Kiel à Moscou et de Shanghaï à Tokyo. Devenu intime de l'ambassadeur d'Allemagne au Japon, Sorge révèle au pouvoir soviétique la date de l'opération "Barbarossa" - invasion de la Russie par l'armée hitlérienne -, mais Staline balaie l'information d'un revers de moustache. Le Petit Père des peuples s'intéresse, toutefois, à une autre révélation de Sorge et de son réseau - le refus nippon d'attaquer l'URSS en 1941 -, ce qui l'incitera à concentrer ses forces à l'Ouest. C'est le destin personnel de Sorge, empreint de désespoir et de mégalomanie, dans une capitale japonaise éloignée du coeur du conflit mondial et en proie aux fantasmes et aux plaisirs, que raconte Isabel Kreitz. Des amis, des membres de son réseau et, bien sûr, sa maîtresse en titre, la pianiste antifasciste Eta Harich-Schneider, décrivent cet homme d'ombre et de lumière, qui confie fièrement être "un parfait apatride dont la route est le seul domicile". En multipliant les plans, Isabel Kreitz dessine d'un trait posé un univers expressionniste en noir et blanc, où rictus et sourires, soûleries et marivaudages dans les salons d'ambassades et les bars de grands hôtels, cachent les drames à venir. Richard Sorge a été pendu en 1944 par les Japonais. L'ESPION DE STALINE (DIE SOCHE MIT SORGE) d'Isabel Kreitz. Traduit de l'allemand par Paul Derouet. Casterman, "Ecritures", 256 p., 16 €. Yves-Marie Labé
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/l-espion-de-staline-d-isabel-kreitz_1291531_3260.html
"""Le Supplice des week-ends"", de Robert Benchley : le misanthrope désopilant"
Une savoureuse sélection de textes du maître du "nonsense" de la première moitié du XXe siècle.
Il est des cataclysmes (plus ou moins) naturels dont on ne parle pas assez. Prenez le "Petit Camarade de Classe en Visite", par exemple. En voilà un qui a l'air anodin, pensez-vous ? Erreur grave ! "Il débarque généralement chez vous parce que ses parents habitent au Nevada, et que s'il allait passer Noël là-bas, il serait obligé de faire demi-tour à peine arrivé - système idéal, si l'on y songe." Au bout de vingt-quatre heures, Georges (c'est son nom) se met à tout critiquer, à faire des comparaisons désobligeantes avec sa propre famille ("Papa, lui, découpe l'agneau contre le sens de la fibre, à l'inverse de ce que vous faites. (...) Il dit qu'il n'y a que les vieilles dames pour le couper tout droit comme ça"), à inventer des blagues désastreuses... et il reste encore dix jours à tirer. Sans compter que Georges n'est qu'un parmi d'autres - un fléau parmi les dizaines que le grand humoriste américain Robert Benchley s'amusait à passer au moulin de son hilarante misanthropie, dans les revues les plus célèbres de son temps : Le New Yorker, surtout, mais aussi Vanity Fair, où il succéda comme chroniqueur à P. G. Wodehouse. Les enfants figurent en bonne place dans ce panthéon. En digne contemporain de W. C. Fields, pour qui "un homme qui n'aime pas les enfants et les chiens ne peut être foncièrement mauvais", Benchley (1889-1945) ne manque pas une occasion d'écharper ces monstres - par exemple cette jeune Dolly, dans "Oncle Edith et son histoire de revenant" : "Une petite fille désagréable et replète qu'on n'aurait jamais dû mettre au monde." Ennemi avant l'heure du politiquement correct, le chroniqueur identifie les sujets tabous, ceux qui font vibrer à tort et à travers la corde sensible ou l'indignation de bon ton. Une formidable paresse De manière générale, il attaque avec délectation certaines conventions et hypocrisies, comme dans la chronique qui donne son nom au recueil. Que faire quand vous êtes invité en week-end chez des amis qui ne vous ont pas précisé l'heure du petit déjeuner (par politesse : "Oh ! Le dimanche, à l'heure qu'on veut") ? Le supplice peut-être long, voire inextricable, l'invité restant dans sa chambre jusqu'en milieu d'après-midi et les hôtes tournant en rond comme des fauves autour de la table où fument (puis refroidissent) les toasts. Connu pour son talent, pour sa générosité légendaire, mais aussi pour sa formidable paresse, Robert Benchley fut un acteur éphémère (on le voit, paraît-il, dans Ma femme est une sorcière, de René Clair), un réalisateur de courts métrages (entre 1935 et 1938) et aussi un compagnon très apprécié, au sein du célèbre "Round Table" de l'Hôtel Algonquin (un cercle qui rassemblait quelques-uns des beaux esprits de l'époque, parmi lesquels Dorothy Parker et James Thurber). Mais il était surtout un excellent écrivain, qui réussissait à mêler l'humour, une certaine forme de poésie, la critique de la vie sociale et culturelle (sur le roman réaliste américain ou l'opéra) et, bien sûr, ce merveilleux sens de l'absurde, le fameux "nonsense". Que l'on songe à cette chronique intitulée "Est-ce que les insectes pensent ?" : "Au cours de l'été 1889, alors que j'élaborais mon traité Du rire chez les larves, nous avons élevé une guêpe femelle dans notre maison de campagne des Adirondacks. C'était d'ailleurs plus notre enfant que notre guêpe, à ceci près qu'elle avait plus l'aspect d'une guêpe que d'un enfant, détail qui nous permettait, entre autres, de faire la distinction." LE SUPPLICE DES WEEK-ENDS (THE BENCHLEY ROUND UP) de Robert Benchley. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Paulette Vieilhomme. Pavillons poche, 304 p., 8,90 €. Signalons également la publication, chez Omnibus, de Jeeves merci !, troisième volume des aventures du célèbre majordome créé par P. G. Wodehouse (1 312 p., 27 €.). Raphaëlle Rérolle
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/le-misanthrope-desopilant_1291530_3260.html
"""Les Vies Lewis"", de Louis-Henri de la Rochefoucauld : la mélancolie en héritage"
Le héros de ce premier roman n'a que 20 ans, à peine moins que son auteur.
Le héros du premier roman de Louis-Henri de la Rochefoucauld n'a que 20 ans, à peine moins que son auteur. Lorsqu'il se décrit, pourtant, c'est sa lassitude et son malaise qu'il met en avant : "Je sais que cette tristesse de vieillard est mon problème depuis toujours, mon pays natal, mais j'ignore pourquoi j'ai été si vite vaincu par la vie." A l'ouverture des Vies Lewis, il porte sa fatigue et son sac sur l'épaule, n'étant pas "sûr d'avoir enfin trouvé (s)a place dans la vie". Quoi de plus fréquent, dans un premier texte, que l'auteur cherche à interroger sa place, puisque c'est aussi son entrée en littérature qui se joue ? Quoi de plus risqué néanmoins, tant les chemins littéraires de la quête de soi ou du roman d'apprentissage sont balisés ? Louis-Henri de la Rochefoucauld contourne habilement tous les écueils du genre, et évite les facilités et les clichés qui y sont parfois attachés. Sans doute ne pouvait-il pas, d'ailleurs, se laisser glisser sur des rails posés par d'autres que lui : Lewis, le grand-père du héros, que celui-ci considère comme un modèle, est né "dans la vieille noblesse comme une mauvaise herbe dans un jardin à la française. (...) Cette vie en marge, on la lisait encore sur son visage, dans sa dégaine de dandy clodo ou d'aristo de gouttière". Lui-même a tranché définitivement : "Un milieu, c'est forcément moyen, à mi-distance de la vérité. Il faut savoir en sortir vite." Venu passer quelques jours chez Lewis, sous le vague prétexte de faire les vendanges dans le village voisin, le jeune homme essaye de percer les mystères de la vie de cet aïeul dont il se sent si proche. Le grand-père ne cesse évidemment de se dérober, préférant passer avec son petit-fils des soirées alcoolisées, et évacuer les questions par des boutades face auxquelles le héros s'avoue vaincu : "Mais même ses blagues les plus nulles me faisaient rire. Cet homme était indéfendable, pourtant je l'aimais plus que tous les gens irréprochables." Comment expliquer que cet homme au passé si libre et au mode de vie encore excentrique, soit par ailleurs si mélancolique ? Quel secret et quel regret cache-t-il ? Pourquoi, à l'approche de la quarantaine, est-il à peu près rentré dans le rang ? "Alors que sa famille, c'est tout ce qui l'a tué. Il se laissera aussi aller à se marier, et à prolonger cette histoire familiale. Il aura des enfants, et des réunions de parents d'élèves." Venu renouer avec celui qui faisait office de figure paternelle pour lui, le héros découvre progressivement que Lewis, si flamboyant paraisse-t-il, lui a en fait légué le poison de la mélancolie, et s'est contenté de "céder toujours, tout en se cachant pour rêver sa vie". Le grand-père idéal tombe de son piédestal. Et c'est donc bien une renaissance qui couronnera cette découverte : "Je me suis convaincu qu'on n'a aucun besoin de père, mieux vaut se trouver quelques frères avec qui se serrer les coudes et tenir le coup." LES VIES LEWIS de Louis-Henri de la Rochefoucauld. Léo Scheer, 190 p., 17 €.
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/les-vies-lewis-de-louis-henri-de-la-rochefoucauld_1291536_3260.html
Les ventes d'ordinateurs ont progressé de 5,2 % en 2009
Les ventes d'ordinateurs dans le monde ont finalement progressé de 5,2 % l'an dernier, grâce à une croissance enregistrée dans toutes les régions de la planète au quatrième trimestre.
Les ventes d'ordinateurs dans le monde ont progressé de 5,2 % l'an dernier, grâce à une croissance enregistrée dans toutes les régions de la planète au quatrième trimestre, selon des chiffres provisoires du cabinet Gartner. Selon le cabinet d'étude, 306 millions d'ordinateurs ont été vendus dans le monde en 2009. Ce sont essentiellement les très bonnes ventes réalisées au quatrième trimestre qui ont soutenu le marché. Les ventes ont, en effet, bondi de 22,1 % sur les trois derniers mois de l'année, mais avec une base de comparaison très favorable : le monde s'enfonçait dans la crise un an plus tôt, fin 2008. La progression des ventes a essentiellement profité aux ordinateurs à bas prix, dont les netbooks. Cette tendance a profité principalement au taïwanais Acer, qui se classe pour la première fois au deuxième rang des producteurs d'ordinateurs sur l'année, après avoir enlevé cette place à l'américain Dell, à la fois au troisième et au quatrième trimestre. Autre facteur ayant bénéficié à Acer, c'est la demande des particuliers qui a le plus progressé. Par opposition, Dell, centré sur le marché des entreprises, a été pénalisé par la croissance plus faible de ce secteur. L'américain Hewlett-Packard a conforté sa place de numéro un mondial, avec 58,947 millions d'ordinateurs vendus (+11,3 %) et 19,3 % de parts de marché (contre 18,2 % en 2008). Le lancement du nouveau système d'exploitation de Microsoft Windows 7 "n'a pas créé de demande supplémentaire, mais il a été un bon outil marketing pendant les ventes des fêtes," estime l'analyste de Gartner, Mikako Kitagawa. Au niveau des seuls Etats-Unis, Dell est passé au quatrième trimestre de la première à la deuxième place (avec 22,6 % de parts de marché), derrière Hewlett-Packard (30 %) mais largement devant Acer (15,6 %). Apple, en revanche, est passé de la quatrième à la cinquième place derrière Toshiba (7,5 % contre 8,7 % de parts de marché).
14/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/14/les-ventes-d-ordinateurs-ont-progresse-de-5-2-en-2009_1291466_651865.html
L'hommage du cinéma et de l'édition à la poésie, par Pierre Assouline
Le film de Jane Campion, splendeur miniature, retrace la fin, à 25 ans, d'un grand poète romantique, John Keats (1795-1821).
Les éditeurs ne voient pas assez de films. Non pas au cinéma au moment de leur sortie, comme tout le monde, mais bien en amont dans les festivals et les projections privées, comme personne. Le feraient-ils un crayon à la main qu'ils anticiperaient davantage l'air du temps, même si l'on ne sait jamais rien du sort d'une oeuvre. Le fait est qu'ils ont peu préparé la révélation de John Keats (1795-1821) au public français ; il n'était pas lu et, dans le meilleur des cas, souffrait d'être confondu avec le dramaturge W.B. Yeats. Jusqu'à la récente sortie de Bright Star. Le film de Jane Campion, splendeur miniature, retrace la fin, à 25 ans, d'un grand poète romantique qui avait eu à peine le temps de commencer, à travers la passion contrariée qui le lia à sa voisine Fanny Brawne (Rivages publiera en avril les lettres qu'il lui adressa de l'île de Wight et de Rome). Dans le cinéma du Quartier latin où je l'ai vu, un phénomène rare m'a frappé : alors que la lumière était rallumée, bon nombre de spectateurs sont restés assis jusqu'à la toute fin du déroulé du générique pour y guetter les références des oeuvres, et y écouter une fois encore l'un des poèmes que la réalisatrice avait eu le bon goût de superposer à la liste des techniciens. Peut-être ont-ils relevé que leur traduction sous-titrée avait été confiée à Fouad El-Etr. Les odes et poèmes de Keats ont fait l'objet de maintes traductions en français depuis celle d'un fervent amateur du nom de Paul Gallimard, arrière-grand-père de l'actuel patron de la maison d'édition, publiée il y a cent ans au Mercure de France. Beaucoup sont épuisées, quelques-unes ont été rééditées par Arfuyen et Points. Mais s'il est un livre que l'on va quérir fébrilement à la sortie du cinéma, c'est bien Ode à un rossignol & autres poèmes (62 p., 25 euros) traduit de l'anglais par Fouad El-Etr. Une merveille de délicatesse Publié par sa revue faite maison d'édition à l'enseigne de La Délirante, composé au plomb en Baskerville corps 12 romain et italique, imprimé sur vergé avant d'être broché, ce recueil bilingue est une merveille de délicatesse. Comme si l'éditeur l'avait voulu à la hauteur du film, digne de lui, il l'a rehaussé d'une aquarelle originale de Gérard Barthélémy qui prolonge le paysage mental de Keats, même si la Dordogne l'a inspiré plutôt que la verdure d'Hampstead à la fin des années 1810. On y retrouve les mots de Keats tels qu'ils nous ont enivrés dans le film. Lui qui éprouvait la dissolution de son être dès qu'il était éloigné de l'aimée conservait la mémoire de sa peau pour avoir si souvent de ses doigts effleuré son visage. Il disait avoir connu des femmes qui épouseraient un poème et se perdraient pour un roman. On n'ose plus s'écrire des choses pareilles depuis que l'on s'écrit par courriel. Le recueil s'achève logiquement sur le dernier poème de John Keats. Celui qui résonne dans toutes les séquences du film Bright Star même lorsqu'on ne l'entend pas. "Brillante étoile ! Que ne suis-je comme toi immuable -/ Non seul dans la splendeur tout en haut de la nuit,/ Observant, paupières éternelles ouvertes,/ Comme de Nature le patient Ermite sans sommeil/ Les eaux mouvantes dans leur tâche rituelle/ Purifier les rivages de l'homme sur la terre,/ Ou fixant le nouveau léger masque jeté/ De la neige sur les montagnes et les landes..." Le Cercle des poètes disparus avait popularisé "A Leuconoé", l'Ode d'Horace dont le professeur Keating avait tiré son fameux "Carpe diem quam minimum credula postero" ; Quatre mariages et un enterrement en fit autant pour le bouleversant poème de W.H. Auden "Arrêter les pendules" lu à l'enterrement de Gareth ; Bright Star, film sur la part du rêve lorsqu'elle se fait regards, caresses et paroles, donnera-t-il le goût de lire Keats ? C'est tout le mal qu'on lui souhaite. En Angleterre, ils n'ont jamais cessé. Là-bas, un poète, c'est quelqu'un ; les Français préfèrent les intellectuels. Ce qui ne rend pas le même son. Shakespeare était le maître de Keats. Son ombre tutélaire lui fit escorte toute sa courte vie. Le Guardian a récemment consacré un article aux meilleures applications culturelles pour iPhone. On y découvre qu'il est possible d'avoir pour l'équivalent de 3 euros un condensé des 40 pièces, 154 sonnets et 6 poèmes de Shakespeare sur son téléphone mobile. Pratique et pourquoi pas ? Mais pour les poèmes de Keats, nous préférerons la subtile édition à l'ancienne de La Délirante, son grain et l'émotion qui s'en dégage. Parfois, pour être touché, il faut toucher. Permettez à quelques-uns, qui ne sont pas technophobes, d'en être encore là. Pierre Assouline
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/l-hommage-du-cinema-et-de-l-edition-a-la-poesie-par-pierre-assouline_1291556_3260.html
"Jean-Jacques Schuhl : ""Une espèce d'histoire, et un peu de mon histoire"""
L'auteur d'"Ingrid Caven", Goncourt 2000, revient avec un roman drôle et magique où les spectres se croisent dans un jeu de hasard très maîtrisé.
Qu'allait donc pouvoir écrire Jean-Jacques Schuhl après Ingrid Caven, ce roman enchanteur qui a obtenu un Goncourt inattendu en 2000, année symbolique ? Il avait laissé passer près de trente ans, après Rose poussière et Télex n° 1, pour publier de nouveau, et il lui devenait difficile de prendre le même chemin - il est né en 1941. Heureusement, dix ans ont suffi pour qu'on découvre cet étonnant Entrée des fantômes, deux histoires aux liens subtils, "Le mannequin" et "La nuit des fantômes". "Deux volets plutôt, dit Schuhl, le premier est une espèce d'histoire et le second un peu de mon histoire." Cette "espèce d'histoire" est ce qui reste d'un roman imaginé avant Ingrid Caven, un récit de science-fiction, très noir, "à la Blade Runner", avec une atmosphère comme on les aime chez David Lynch. "L'un des personnages était un peu mon double, explique Schuhl. Je me faisais une simulation d'identification à la Warhol. Très vite, je me suis aperçu que j'écrivais faux, que mon "il" était en fait un "je", que je n'étais pas fait pour ce type de narration, pour ce genre de fiction, et j'ai abandonné." De ce livre délaissé demeurent une trentaine de pages, qui sont comme une ouverture, au sens musical du terme, à Entrée des fantômes. Un texte étrange, "sans vraiment de début, mais avec une vraie fin", marqué par la fascination de Schuhl pour la figure du mannequin. "Pas au sens de top model, comme on l'entend aujourd'hui. Mais quelque chose de vide. Ce peut être une marionnette, un acteur de théâtre japonais, une danseuse balinaise, tout ce qui représente une certaine grâce, sans psychologie, sans pathos." C'est seulement en lisant le second volet du roman que l'on comprend vraiment le premier, embryon du livre que ne parvient pas à écrire le narrateur, Charles - double de Schuhl qui apparaissait aussi dans Ingrid Caven. Ce que Jean-Jacques Schuhl désigne comme "un peu de mon histoire" est un magnifique autoportrait décalé, sans complaisance, avec ce qu'il faut d'autodérision, un livre de Mémoires fait d'éclats de mémoire, où il déploie son art des dialogues, son sens du burlesque - "mais pas de l'humour, qui est pour moi la face souriante du nihilisme" - et son plaisir à jouer sur le réel et la fiction, en faisant bouger les frontières - il est recommandé de faire bien attention à un stylo très particulier, que l'on retrouve d'une histoire à l'autre. Tout commence par une rencontre, qui a réellement eu lieu, avec le metteur en scène Raoul Ruiz. Un soir, dans un restaurant chinois - lieu important dans ce roman -, il propose à Charles de jouer le rôle du chirurgien dans un remake du film fantastique Les Mains d'Orlac (une adaptation d'un roman de 1921 de Maurice Renard), où un chirurgien greffe à un pianiste victime d'un accident les mains d'un assassin qu'on vient de guillotiner. Ce film ne s'est pas fait, mais, écrit Schuhl, "je remercie ce montreur d'ombres à la lanterne magique d'avoir prononcé, sur un ton d'évidence désinvolte, cette drôle de phrase, car elle m'a été le déclencheur d'interrogations et de divagations sur certains aspects de moi-même. Il arrive que quelques mots semblant une blague frivole aient, par la suite, des répercussions inattendues". Il était assez ironique de proposer un rôle de chirurgien à un homme qui depuis des années refuse de se faire opérer de la hanche, préférant continuer de boiter. Il accepte cependant quelques rendez-vous médicaux, qui sont un morceau de bravoure et de drôlerie. Ses radiographies lui évoquent un tableau de Francis Bacon, un peu effrayant. Après avoir confié à un premier médecin son refus de l'anesthésie par peur de ne pas se réveiller, ("c'est irrationnel"), il rend visite à un ostéopathe qui croit bon de lui dire qu'il écrirait mieux avec "un corps en bon état", ce qui suffit à le convaincre du contraire. "Et je me suis retrouvé dans la rue, je me suis éloigné lentement, mon Bacon à la main, j'ai avancé vers le fleuve, c'était déjà la nuit, je marchais très mal, de travers. Lorsque j'étais triste de ma boiterie, je songeais à des boiteux célèbres. On se sent moins seul comme ça. Je m'étais fait ma petite liste : Ignace de Loyola, lord Byron... Y figurait aussi mon voisin, son excellence l'ambassadeur, ministre des affaires étrangères, amateur de belles femmes, le lord Profumo de l'époque, le duc de Talleyrand." Suit un surprenant portrait de ce "grand séducteur plein d'esprit". Et on apprendra plus tard que Charles voudrait jouer Richard III, de Shakespeare, juste un soir, dans un petit théâtre parisien, sans doute pour pouvoir boiter en scène... Il faut se laisser porter par le rêve, par le jeu, déambuler avec Jean-Jacques Schuhl et son double, "dans une atmosphère hypnotique, peut-être liée à la noirceur de la période pendant laquelle j'écrivais, un moment de dépression. En outre je ne suis pas fait pour la narration, pour camper des personnages, ficeler une histoire. Ce n'est pas cela qui m'intéresse. Je n'aime pas les histoires, j'aime l'alchimie de l'écriture. Et les détails, les objets, les lieux". Avec lui, on va et vient, de Paris à Rome, de Cannes à New York, dans un monde perdu, les années 1970 et la fin du XXe siècle. Les amoureux de New York s'enchanteront de boire un margarita dans un bar lui aussi disparu, le One/5, sur la Ve Avenue. On croise en effet beaucoup de fantômes, dont le producteur Jean-Pierre Rassam - sous le nom de Mazar -, le cinéaste Jean Eustache, mais aussi des fantômes littéraires, dont Lafcadio, "dandy froid, désespéré, qui vient comme un cheveu sur la soupe, dans cet abominable Caves du Vatican, de Gide, que j'avais pourtant aimé dans ma jeunesse, et que j'ai relu ad nauseam. Il joue tout sur un coup de dés, et il est beaucoup question de hasard et de jeu dans Entrée des fantômes. Et puis les fantômes surgissent partout en littérature. J'en ai rencontré un récemment, que je n'avais pas vu, en relisant Proust. Dans Albertine disparue, le narrateur est à Venise, avec sa mère. Soudain, il aperçoit Mme de Villeparisis. Or, elle est morte près de 250 pages plus tôt. Un fantôme..." Mais pourquoi ce titre, Entrée des fantômes ? Serait-ce pour répondre au Philip Roth d'Exit le fantôme, où l'on évoque aussi un monde évanoui ? "Non, j'ai plutôt pensé à un texte de Breton, Entrée des médiums. Le surréalisme était très présent en moi quand j'écrivais ce livre. S'il y a un hommage à Philip Roth, il est dans ma pratique du sampling. Pourquoi dire sampling, échantillonnage, et pas collage, ou citation ? La citation doit être désignée, sourcée, le collage se voit. Moi j'aime voler, introduire en secret des phrases, des passages que je prends à d'autres auteurs, et que l'on ne voit pas, ou difficilement. Parfois, j'associe deux phrases, de deux auteurs différents, et j'intercale seulement, au milieu, quelques mots de moi. Ce geste me plaît. Ici, j'ai dérobé un paragraphe d'Opération Shylock, un de mes romans préférés de Roth (bien lire un moment où il est question de Richard III), mais il y a quelques autres emprunts, à Borges et à Rimbaud notamment. Flaubert aurait aimé faire un livre entier ainsi, c'est aussi mon cas. Construire un texte qui soit, comme la créature de Frankenstein,entièrement constitué de propos pris à d'autres." Du sampling, de l'amour du hasard, de l'aléatoire, de la mémoire fragmentée, de la passion revendiquée par Jean-Jacques Schuhl du "mélange des genres, du tragique et du comique, du burlesque et du drame", il ne faudrait pas déduire que ce roman n'est pas composé avec une extrême rigueur. Le hasard est un hasard très programmé, jusque dans la maison de jeu, où, précise Schuhl, Charles, "ayant accepté une sorte de vacuité, rafle tout. Et va sans doute se remettre à écrire". "J'aime la variété, conclut Jean-Jacques Schuhl, mais je détesterais tomber dans une sorte de pot-pourri poétique." Et il cite Baudelaire, pour qui "l'imagination est la reine des facultés", "une faculté quasi divine qui perçoit les rapports intimes et secrets des choses, les correspondances et les analogies". "Ce n'est pas ce qu'on entend trop souvent par imagination, avec ce que cela peut porter de flou ou de vague, commente-t-il. Il me faut un fil, autour duquel se construit le livre. Et tous les éléments, finalement, sont reliés à ce fil, et par là même reliés entre eux." D'où ce roman magique, qui se veut pour "happy fous", pour tous ceux qui aiment lire pour rêver, pour rire, pour comprendre "quelques moments de grâce du XXe siècle". ENTRÉE DES FANTÔMES de Jean-Jacques Schuhl. Gallimard, "L'infini", 150 p., 13,90 €. Josyane Savigneau
14/01/2010
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https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/jean-jacques-schuhl-une-espece-d-histoire-et-un-peu-de-mon-histoire_1291555_3260.html
"L'aventure rédactionnelle et éditoriale d'un ""best-seller"""
De près ou de loin, quelque 160 auteurs ont contribué aux près de 72 000 articles réunis par les 17 volumes de textes de la première édition.
"Parmi quelques hommes excellents, il y en eut de faibles, de médiocres et de tout à fait mauvais. De là cette bigarrure dans l'ouvrage où l'on trouve une ébauche d'écolier à côté d'un morceau de maître ; une sottise voisine d'une chose sublime, une page écrite avec force, pureté, chaleur, jugement, raison, élégance, au verso d'une page pauvre, mesquine, plate et misérable." Ainsi Diderot présente-t-il la "société des gens de lettres" - et le fruit de son travail collectif - mobilisée par la rédaction de l'Encyclopédie. De près ou de loin, quelque 160 auteurs ont contribué aux près de 72 000 articles réunis par les 17 volumes de textes de la première édition. On y trouve, aux côtés de Diderot et d'Alembert, quelques représentants de la noblesse (comme le chevalier de Jaucourt ou le comte lituanien Oginski), des membres de la bourgeoisie, mais aussi des fils d'artisans. Beaucoup sont enseignants ou exercent des professions libérales (médecin, juge, avocat), d'autres étant fonctionnaires royaux, ou ecclésiastiques. Cette entreprise rédactionnelle inédite est aussi une aventure éditoriale singulière. Celle d'un "best-seller au siècle des Lumières", comme le note l'historien américain Robert Darnton. La première édition, dont la parution s'échelonne de 1751 à 1765, pour les volumes de textes, et qui se poursuit jusqu'en 1772 pour les 11 volumes d'illustrations, est publiée à plus de 4 000 exemplaires. Un tirage considérable pour le XVIIIe siècle, où les ouvrages ordinaires ne dépassent pas 1 500 exemplaires. De multiples rééditions (et parfois contrefaçons) amplifient ce succès et étendent l'influence de l'Encyclopédie en Europe. Notamment celle, in-quarto, de Genève et Neuchâtel (8 500 exemplaires) et celle, de format encore plus réduit et donc plus maniable, in-octavo, de Lausanne et Berne (6 000 exemplaires). Lorsqu'éclate la Révolution française, quelque 25 000 exemplaires sont vendus et circulent, à l'intérieur du royaume de France et hors de ses frontières. La pensée des Lumières y trouve un écho à la hauteur de l'objectif que s'était assigné Diderot : "Rassembler les connaissances éparses sur la surface de la Terre, (...) afin que les travaux des siècles passés n'aient pas été des travaux inutiles pour les siècles qui succéderont." Dans une lettre du 6 septembre 1762 à Sophie Volland, il écrivait : "Cet ouvrage produira sûrement avec le temps une révolution dans les esprits, et j'espère que les tyrans, les oppresseurs, les fanatiques et les intolérants n'y gagneront pas. Nous aurons servi l'humanité." Pierre Le Hir
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/l-aventure-redactionnelle-et-editoriale-d-un-best-seller_1291554_3260.html
"""L'Encyclopédie a rendu pensable une rupture"""
Publié entre 1751 et 1772, objet de nombreuses rééditions, le "Dictionnaire raisonné des sciences, des arts et des métiers", de Diderot et d'Alembert, somme de 17 volumes de textes et 11 volumes d'illustrations, instille les idées des Lumières dans l'ordre de l'Ancien Régime. Roger Chartier, historien de la culture écrite, analyse son influence et sa postérité.
Avez-vous lu l'"Encyclopédie" ? Qui l'a lue dans sa totalité ? Peut-être deux personnes : Diderot et l'éditeur Le Breton, à l'origine du projet. La question est intéressante, parce qu'elle touche à la structure même de l'ouvrage, c'est-à-dire au système de renvoi d'un article à l'autre utilisé par Diderot pour les idées les plus audacieuses. Comme l'article "anthropophagie" renvoyant à "eucharistie". Quand on est en présence des 17 volumes de textes, complétés de 11 volumes de planches d'illustrations, dont la publication s'est étalée entre 1751 et 1772, cette utilisation des renvois devient problématique. Paradoxalement, c'est la version électronique de la première édition de l'Encyclopédie, mise en ligne par l'Université de Chicago, qui, d'un simple clic, rend aujourd'hui efficace un dispositif conçu par Diderot comme l'un des plus philosophiques, c'est-à-dire subversifs, qui soient. En quoi ce système de renvois est-il subversif ? L'Encyclopédie est publiée dans une époque de censure, qu'elle subit par deux fois. En 1752, après la parution des deux premiers volumes, par décision du Conseil d'Etat qui y voit un ferment d'erreur, de corruption des moeurs et d'irréligion. Puis en 1759, à la demande du Parlement qui mène la chasse aux livres "philosophiques" et les brûle. A chaque fois, c'est Malesherbes, directeur de la librairie, qui sauve l'entreprise. Dans un tel contexte, où le privilège autorisant la publication est en permanence menacé de révocation, le jeu des renvois permet de contourner la censure. Nombre d'articles dont le titre pourrait laisser penser qu'ils sont parmi les plus corrosifs, comme l'article "censure" justement, sont en réalité d'un ton très modéré, d'une teneur purement historique, tandis que d'autres, d'apparence plus anodine, recèlent les intentions les plus philosophiques et les critiques des autorités les plus acérées. L'"Encyclopédie" de Diderot et d'Alembert n'était pas la première. Qu'est-ce qui fonde sa singularité ? Il s'agit, au départ, de la simple traduction de la Cyclopaedia, d'Ephraïm Chambers, publiée en 1728 en Angleterre (où l'on trouve déjà le renvoi à l'eucharistie dans l'article sur les anthropophages). Mais le projet bascule ensuite. L'Encyclopédie française devient une production collective, celle d'une société de gens de lettres, dont l'ambition est d'exprimer la philosophie des Lumières et de couvrir tous les champs du savoir. Même si l'ouvrage suit un ordre alphabétique, le "Discours préliminaire" de d'Alembert organise ces connaissances de façon thématique, autour des trois grandes facultés de l'esprit humain : mémoire, raison et imagination. Ainsi se trouvent opérés des rapprochements inattendus, par exemple entre "religion" et "superstition", "théologie" et "divination", comme relevant de la même famille thématique. Cette approche rompt, aussi, avec un ordonnancement hiérarchique où la théologie était toujours première. Dans quelle mesure ce manifeste des Lumières sape-t-il les valeurs de l'Ancien Régime ? Beaucoup d'articles, au-delà de celui consacré à la "tolération", tournent autour de la notion de tolérance : on ne doit pas persécuter les individus pour leurs croyances. La répression exercée contre les protestants est ainsi condamnée. Il s'agit d'une idée très forte, dans une France où existent une seule religion, le catholicisme, et une seule autorité, la Faculté de théologie. Autre mise en cause de la doxa dominante : la critique des violences et de la soumission imposées aux peuples d'Afrique ou d'Amérique. Nous ne sommes pas dans les condamnations radicales du XXe siècle mais, tout de même, dans une interrogation de la conquête et de la colonisation. A l'égard du politique, l'ouvrage est plus prudent. Mais on y lit que "la fin de la souveraineté est la félicité du peuple", ce qui n'est pas précisément le langage de l'absolutisme. Quelle a été l'influence de l'"Encyclopédie" ? Peut-on y voir les prémices de la Révolution française ? Disons plutôt qu'elle a rendu possible ou plutôt pensable une rupture. Il n'y a rien de révolutionnaire, ou même de prérévolutionnaire dans l'Encyclopédie qui reste très éloignée de la virulence des libelles, pamphlets et autres satires autrement séditieux qui paraissent à la même époque. Mais elle contribue à instiller, diffuser, disséminer une manière de penser qui prend ses distances vis-à-vis des autorités, politique et plus encore religieuse. Tocqueville était frappé de la façon dont le régime monarchique s'était effondré en quelques semaines. Il y a fallu une adhésion au processus révolutionnaire, ou à tout le moins une acceptation. Les lecteurs de l'Encyclopédie n'étaient certes pas le peuple : comme l'a montré Robert Darnton, ils appartenaient à l'aristocratie éclairée, aux professions libérales, au monde des négociants, en somme aux milieux les plus traditionnels de l'Ancien Régime. Dans ces milieux, elle a, avec d'autres écrits, imposé des idées et des représentations collectives qui ont non pas causé, mais permis 1789. Le rêve encyclopédique ne s'est-il pas brisé, depuis, sur le morcellement des savoirs ? Le tournant est pris à la fin du XVIIIe siècle, avec l'Encyclopédie méthodique, du libraire-éditeur Panckoucke, qui refond celle de Diderot et d'Alembert en adoptant un agencement par domaines de savoir. Dès lors, la vivacité de provocation intellectuelle de l'ouvrage initial est perdue : elle tenait, pour partie, à son organisation "raisonnée", qui bousculait les classements anciens. C'en est fini de l'effort magnifique de Diderot et d'Alembert pour produire un livre des livres, une somme des connaissances où l'honnête homme pourrait circuler sans cloisonnement. Le morcellement des connaissances est sans doute le prix à payer pour leur approfondissement. L'érudition y gagne. Mais il conduit à l'antinomie des cultures, d'un côté scientifique, de l'autre littéraire, qui traverse les débats actuels sur les programmes scolaires. L'encyclopédie en ligne Wikipédia n'est-elle pas l'aboutissement du projet de Diderot et d'Alembert ? Dans un sens oui, puisqu'elle repose sur les contributions multiples d'une sorte de société de gens de lettres invisibles. Mais Diderot n'aurait sûrement pas accepté la simple juxtaposition des articles, sans arbre des connaissances ni ordre raisonné, qui caractérise Wikipédia. C'est une entreprise démocratique, ouverte, et en même temps très vulnérable, très exposée à l'erreur ou à la falsification. Est ainsi rendue visible la tension entre le désir de constitution d'un savoir collectif et la professionnalisation des connaissances. Avec le recul, l'"Encyclopédie" a-t-elle changé le monde ? Un livre peut-il changer la face du monde ? Les auteurs aiment à le penser. Je dirais plutôt qu'un livre peut, dans un lieu et un temps donnés puis, par sa trajectoire dans d'autres lieux, d'autres temps, changer les représentations et la relation aux dogmes, aux autorités. L'Encyclopédie a joué ce rôle, au-delà des frontières du royaume de France. Mais ce qui fait qu'un livre peut avoir un impact, ce sont les appropriations, multiples et parfois contradictoires, dont il est l'objet. L'Encyclopédie a peut-être été l'un des germes de la rupture révolutionnaire, mais en même temps, elle a été honnie par les révolutionnaires les plus radicaux. Cinquante ans après la publication des premiers volumes, Robespierre affichait sa haine de "la secte des Encyclopédistes", trop bien installés dans la société d'Ancien Régime. C'est dire qu'un livre trouve, non par sa lettre même, mais par les discours qu'il produit, une force qui le dépasse et qui, elle, transforme les manières de penser et de croire. Roger Chartier est professeur au Collège de France, directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales. Propos recueillis par Pierre Le Hir
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/roger-chartier-l-encyclopedie-a-rendu-pensable-une-rupture_1291553_3260.html
"""La Bourse"", de Max Weber et ""Max Weber et Karl Marx"", de Karl Löwith : la Bourse ou le tragique de répétition"
Deux livres pour éclairer la conception de la modernité développée par le grand sociologue allemand Max Weber.
L'histoire aime à se répéter, dit-on. Celle du capitalisme moderne encore plus : elle a fait des crises boursières, jusqu'à aujourd'hui, l'un des principaux ressorts du goût tragique pour le pastiche qui semble parfois être sa marque. La Bourse emporte ainsi régulièrement, avec elle, son lot d'entrepreneurs aventureux et de pères de famille mal conseillés. Aujourd'hui comme hier, son destin illustre le sort ironique de ceux qui sont enfermés dans la "carapace d'acier" du capitalisme, selon l'expression du sociologue allemand Max Weber (1864-1920). "L'organisation actuelle (de l'économie) lie chaque individu par des fils innombrables à d'innombrables autres individus", avance-t-il dans La Bourse, qui regroupe deux textes lumineux signés en 1894-1896 par celui qui n'était alors que jeune professeur d'économie. "Chacun tire sur le réseau de fils pour arriver à la place à laquelle il aspire et qu'il croit être la sienne, mais même si c'est un géant, et qu'il prend dans sa main un bon nombre des fils, ce sont bien plutôt les autres qui le tirent là où précisément il y a de la place pour lui." Le sociologue ne pouvait manquer de rencontrer l'institution boursière sur le chemin du bourgeois entreprenant et besogneux qui incarnait pour lui "l'esprit" du capitalisme. Alors que l'Allemagne était touchée par une grave crise financière, il se fit un devoir d'en expliquer les mécanismes aux lecteurs de la Bibliothèque ouvrière de Göttingen. "Les longues rangées de chiffres à la fin des journaux que saute le lecteur qui n'est ni capitaliste ni homme d'affaires n'importent pas qu'aux capitalistes et aux hommes d'affaires", rappelait-il dans ce texte lucide et provocateur. Un objet de controverses Car, avec ses arcanes et ses mécanismes complexes, la Bourse est un objet de controverses. A chaque manifestation du désordre boursier, c'est une morale naïve qui ressurgit, stigmatisant pour solde de tout compte les spéculateurs véreux et les banquiers irresponsables. Toutefois, pour un sociologue réaliste, aux yeux duquel "les capitaux des grandes banques ne sont pas plus des institutions de bienfaisance que ne le sont les fusils et les canons", les voeux pieux des "apôtres ingénus de la paix économique" et les "lamentations à propos de pratiques frauduleuses isolées" ne sont qu'écran de fumée. Puisqu'il s'agit de réguler les marchés dans l'intérêt de tous, pourquoi ne pas restreindre l'accès de la Bourse aux courtiers pouvant faire état d'une importante fortune ? Cela permettrait d'en finir avec ce "micmac" que sont pour lui les places allemandes où, comme à Hambourg, "l'ensemble du public masculin décent" peut faire son entrée. Qu'au moins les choses soient claires : "La Bourse est le monopole des riches ; il n'est rien de plus sot que d'oublier ce fait en y acceptant des spéculateurs dépourvus de moyens, et donc de pouvoir, et en donnant ainsi au grand capital la possibilité de se décharger sur eux de sa responsabilité." La solution paraîtra peut-être décalée au lecteur contemporain. Elle se comprend mieux en regard d'un autre livre qui paraît en même temps : le portrait croisé que le philosophe allemand Karl Löwith (1897-1973) consacra, en 1932, à Max Weber et Karl Marx. La lecture de ce classique de l'histoire des idées, publié pour la première fois en français, aurait pu épargner bien du mal à tous ceux qui ont voulu opposer Weber, le sociologue bourgeois, à Marx, le penseur révolutionnaire. Pour Löwith, cet "expert de l'exploration des abîmes que l'espérance politique a pu creuser au cours des siècles", selon Enrico Donaggio dans la préface qu'il consacre au texte, ces deux monstres sacrés ont oeuvré à répondre à la même question : celle de "notre manière actuelle d'être humains" dans un monde dominé non plus par l'homme mais par la mécanique des choses - "rationalisation" pour Weber, "aliénation" selon Marx. Entre la folle utopie marxienne, visant à libérer toute l'humanité du système capitaliste, et l'héroïsme tragique wébérien, qui se contente de préserver la dignité de quelques-uns malgré ce système, Löwith ne choisit pas. Il préfère voir dans ces deux attitudes une même "véhémence" à l'égard du monde : impatience révolutionnaire d'un côté et passion désespérée de la lucidité de l'autre. "A chaque fois, il en allait d'un "tout" et, pour cette raison, toujours de la même chose - chez Weber, du sauvetage de la "dignité" humaine ; chez Marx de la cause du prolétariat ; dans les deux cas donc, de quelque chose qui ressemblerait à une "émancipation" de l'homme." Les conditions de cette émancipation sont-elles réunies, dans un monde qui a confié aux marchés financiers le destin d'une part de plus en plus importante de sa population ? Gageons que la question méritera encore d'être posée, quand auront été punis les responsables de la dernière faillite boursière et que les cours auront repris leur hausse. LA BOURSE (DIE BÖRSE) de Max Weber. Traduit de l'allemand et présenté par Pierre de Larminat. Allia, 148 p., 6,10 €. MAX WEBER ET KARL MARX de Karl Löwith. Traduit de l'allemand par Marianne Dautrey. Payot, "Critique de la politique", 188 p., 20 €. On signalera aussi la parution d'une nouvelle traduction (par Isabelle Kalinowski), augmentée d'une introduction et d'un glossaire, du Judaïsme antique, de Max Weber (Flammarion, "Champs", 762 p., 15 €). Gilles Bastin
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/la-bourse-de-max-weber-et-max-weber-et-karl-marx-de-karl-lowith_1291549_3260.html
"""Le Sexe politique. Genre et sexualité au miroir transatlantique"", d'Eric Fassin : séduction en deçà de l'Atlantique, viol au-delà ?"
En France comme aux Etats-Unis, comme l'explique l'auteur, les enjeux de pouvoir liés aux rapports de sexe reviennent au coeur des débats.
Le 17 août 1998, Bill Clinton dut avouer à ses concitoyens sa liaison avec Monica Lewinsky. Trois jours plus tard, il faisait bombarder le Soudan et l'Afghanistan. Les commentateurs n'y virent alors qu'une simple manoeuvre de diversion : l'essentiel se jouait à Washington, où une procédure d'"impeachment" risquait de faire de Clinton le digne (ou l'indigne, selon le point de vue) successeur de Nixon - version libertine. Depuis le 11-Septembre, note toutefois Eric Fassin dans Le Sexe politique, "lorsque les commentateurs reviennent sur les raids d'aviation du 20 août 1998, le contexte sexuel a disparu : Monica est bien oubliée, reléguée à la chronique des potins mondains. Reste seulement le fait qu'à une heure près, le bombardement a manqué d'atteindre Oussama Ben Laden". Comment interpréter ce brusque renversement ? On peut, bien entendu, juger que par sa gravité le 11-Septembre a balayé des débats obsolètes et superficiels. Une telle lecture entretient toutefois l'un des malentendus les plus tenaces du dialogue franco-américain : croire que les polémiques sur les questions de sexe et de genre dont les Américains semblent raffoler s'expliquent par un mélange explosif de puritanisme, de féminisme et de politically correct. Mariage gay, procès tonitruants pour harcèlement sexuel, ou polémiques autour du date rape (viol survenu lors d'un rendez-vous amoureux) sont autant de débats où, politisés, les rapports amoureux se verraient inévitablement radicalisés, et par conséquent déformés. Ainsi de la définition outrancièrement élargie que les féministes américaines auraient donnée du viol, susceptible de survenir à chaque fois qu'un homme s'enhardit à interpréter un "non" comme un "oui" tacite. "Séduction en deçà de l'Atlantique, viol au-delà", se plaisent à penser les Français, ainsi rassurés sur la bonne santé de l'économie amoureuse nationale... Mais c'est ignorer, montre Fassin de la manière la plus convaincante, que la politisation des questions sexuelles, si elle fut bien l'une des constantes essentielles de la vie politique et médiatique américaine durant les années 1980 et 1990, ne se réduit pas aux stéréotypes que nous aimerions y voir. Bien plus, qu'elle n'est pas sans intérêt pour comprendre ce qui survint, en France, à la fin des années 1990. N'oublions pas, en effet, que si les débats autour du foulard islamique, lors du bicentenaire de la Révolution, tournaient autour des valeurs de laïcité et d'universalité, en 2003, la même question prit un tour bien différent : le voile est alors dénoncé comme une forme de viol symbolique imposé par l'homme, dont la violence atteint même celles qui refusent de le porter en les rejetant du côté des filles légères. Cette sexualisation du voile survient à un moment où le vote du pacs, les polémiques autour de la parité, les débats sur la prostitution ou encore l'apparition d'une "littérature sexuelle" dont Les Particules élémentaires, de Michel Houellebecq ou L'Inceste, de Christine Angot sont représentatifs, suffisent à prouver que le sexe en France, loin de n'être qu'une question de moeurs, est à son tour devenu éminemment politique. Eric Fassin s'emploie donc à déjouer les stéréotypes qui obstruent les échanges transatlantiques. Il montre que les "différends sexuels" déplacent, lorsque surviennent de grands débats publics, les lignes de partage organisant les représentations qu'une société se fait d'elle-même. Car les guerres sexuelles autour du mariage gay, du date rape ou même des rapports exacts qu'entretinrent Bill Clinton et Monica Lewinsky ont bien le statut de véritables "événements" : ils marquent des "ruptures d'intelligibilité" entre les membres d'une communauté, incapables de s'accorder sur le sens à donner aux mots ou aux gestes échangés. De ces crises résultent des redistributions, où les enjeux de pouvoir inhérents aux rapports entre les sexes aussi bien qu'aux rapports sexuels se négocient de manière toujours renouvelée. Ainsi de l'apparition en France, à la fin des années 1990, de romans ou d'autofictions brutalement érotiques... La "bonne littérature" naît-elle de "mauvais sentiments" ? La postérité le dira - du moins le sexe se sera-t-il réinstallé un temps au coeur des débats nationaux dans la presse, les salons parisiens et à l'Université. LE SEXE POLITIQUE. GENRE ET SEXUALITÉ AU MIROIR TRANSATLANTIQUE d'Eric Fassin. Ed. de l'EHESS, "Cas de figure", 314 p., 15 €. Jean-Louis Jeannelle
14/01/2010
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Recensement 2010, mode d'emploi
Comme tous les dix ans, le "Census bureau" a lancé son effort national - inscrit dans une loi de mars 1790 - pour compter tous les individus - citoyens ou non - qui vivent aux Etats-Unis.
La campagne pour le recensement 2010 est partie de Times Square début janvier. Comme tous les dix ans, le "Census bureau" a lancé son effort national - inscrit dans une loi de mars 1790 - pour compter tous les individus - citoyens ou non - qui vivent aux Etats-Unis. C'est la plus vaste entreprise du gouvernement fédéral en temps de paix. Coût de ce 23e recensement depuis la création de la république : 14 milliards de dollars. Le questionnaire à remplir ne sera envoyé par courrier aux Américains qu'entre le 15 et le 17 mars. Mais deux mois ne sont pas de trop pour les mobiliser. Le recensement 2000 n'a donné lieu qu'à une participation de 67 %. L'édition 2010 entend faire mieux. 800 000 travailleurs temporaires seront recrutés au printemps pour relancer les retardataires. Le formulaire doit être rempli avant le 1er avril, déclaré "census day", sous peine d'amende (rarement infligée). Dans une grande parade patriotique, treize bus ont commencé à sillonner le pays pour diffuser le message censé rassurer les populations : le recensement 2010 ne comptera que 10 questions et il ne faudra que 10 minutes pour y répondre. C'est le plus court, de mémoire récente. Les organisateurs rappellent que le recensement est de la plus haute importance pour la démocratie américaine, qu'il affecte le découpage des circonscriptions électorales, la répartition de 400 milliards de subventions fédérales, et qu'il est entièrement confidentiel. Mais les résistances sont nombreuses. Les immigrants clandestins craignent de se signaler aux autorités. Les conservateurs purs et durs voient le questionnaire comme une intrusion du gouvernement. Leurs représentants au Congrès ont essayé - sans succès - de faire inclure une question sur le statut légal des immigrants. Les questions incluent le nom, l'âge, le sexe, le numéro de téléphone, le statut dans la maison (locataire, propriétaire, avec un nouvel élément pour mesurer l'impact des saisies immobilières) et la "race" (Blanc, Noir, Amérindien, Chinois, Philippin, Indien, Coréen, Vietnamien, Hawaïen... avec plusieurs choix possibles). Depuis 1970, une question séparée est consacrée à l'origine hispanique. Si un débat existe sur le respect de la vie privée, celui sur les statistiques ethniques est inexistant.
14/01/2010
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"""Compter et classer. Histoire des recensements américains"", de Paul Schor : la fabrique du peuple américain"
L'auteur souligne le rôle des statistiques raciales dans la construction des identités aux Etats-Unis.
La formation des Etats modernes se caractérise par le développement d'une statistique économique et sociale qui a pris son essor au XIXe siècle. Les recensements de la population ont joué un rôle important dans cette volonté de savoir des bureaucraties étatiques. En 1790, les Etats-Unis furent le deuxième pays au monde à les pratiquer sous leur forme moderne, plus de dix ans avant la France ou l'Angleterre. En comptant les "habitants libres" et les esclaves, mais pas les Indiens, il s'agissait de "répartir les taxes et les sièges des représentants" entre Etats fédérés du pays. En liant ces deux aspects, la Constitution faisait en sorte que les Etats n'essaient "ni de surévaluer les chiffres ni de les diminuer". Il est vrai que les pratiques de recensement ont toujours eu dans l'Histoire des fonctions autres qu'exclusivement démographiques : lever l'impôt, contrôler les futurs conscrits, évaluer les richesses... Issue d'une thèse, l'histoire des recensements américains publiée par Paul Schor montre comment cette pratique du dénombrement fut bien plus qu'un outil de rationalisation de l'Etat : un instrument violent de construction de la nation et de hiérarchisation des races et des groupes. "Le recensement, écrit cet américaniste, participe à la production d'une communauté nationale définie par l'inclusion de certains et l'exclusion d'autres." Alors que débute actuellement le 23e recensement du pays sous le mandat d'un président dont on espère un desserrement des inégalités raciales, le panorama proposé par Schor permet d'apprécier la permanence des clivages identitaires américains. Grâce à un travail d'archives important, l'originalité de sa démarche consiste à entrer dans la machinerie du dénombrement de la population afin de mesurer les écarts entre "pratiques de classement" et discours du Bureau du recensement ou des parlementaires américains chargés d'en redéfinir les principes et le questionnaire. Comme l'indique le titre de l'ouvrage en forme d'hommage à Surveiller et Punir, de Michel Foucault, l'auteur s'est situé autant que possible au niveau des opérations concrètes de catégorisation des habitants par les agents en charge du recensement. De 1850 à 1970 en effet, le décompte puis l'attribution de l'identité raciale ou de l'origine ethnique sont faits par des employés du Bureau. Ils sont soumis par exemple à leur appréciation sur la couleur de peau. Ainsi, dans "la famille de Shirley Taylor Hazlipp, (...) plusieurs membres ont été classés successivement comme mulatto en 1880, black en 1900, mulatto à nouveau en 1910, avant d'être white en 1920". Aux variations subjectives et géographiques de classements s'ajoutent les différences de catégorisations d'un recensement à l'autre ou les effets des corrections des "cas douteux" auxquelles Schor attache une importance particulière. Et comme, jusqu'en 1850, un esclave valait pour le recensement trois cinquièmes d'individu et un Indien aucun, on comprend pourquoi l'auteur affirme que "la population ne préexiste pas au recensement". Quel portrait du peuple américain ressort de ces opérations successives de dénombrement ? Une première continuité fondamentale apparaît : la "réfutation des fondements biologiques et anthropométriques des distinctions raciales n'a pas eu pour conséquence la contestation de l'usage de la race comme catégorie sociale". Deuxièmement, même si les Noirs et les Indiens ont peu à peu été intégrés pleinement, il reste que "l'identité blanche s'est construite comme en permanence menacée de corruption par ce qui n'est pas elle". Le recensement "segmente" la population américaine et hiérarchise ses groupes en fonction de critères raciaux puis, à partir de 1870, ethniques. Une fois l'esclavage aboli, sa pratique témoigne aussi d'une peur du métis qu'on assigne toujours "aux groupes dominés". Ce sera ensuite le tour des étrangers, le décompte de la population nourrissantvers 1900 la peur d'un "suicide de la race" américaine et une "racialisation des immigrés les plus récents" comme les Chinois et les Japonais. Schor démontre que les "statistiques ethniques" de groupes d'origine étrangère sont pensées avec les mêmes techniques que les catégories raciales et visent tout autant à exclure et à "purifier". Il consacre à ce sujet de belles pages sur les recensements "coloniaux" effectués à Porto Rico ou à Hawaï ou sur les résistances des groupes concernés face à l'émergence d'une hypothétique "race mexicaine" dans les recensements de l'entre-deux-guerres. Discrimination positive La fermeture progressive des frontières aux migrants et la crise de 1929 vont diminuer le recours aux "statistiques ethniques" et le poids des données non économiques sur la population. Mais entre 1900 et 1940, en même temps que l'activité de recensement se rationalise, elle est aussi plus perméable aux revendications des minorités. Une section consacrée aux Negro Statistics est créée. Le recensement de la communauté noire est alors confié à des employés noirs. Le Bureau travaille de plus en plus "en direction des consommateurs de statistiques". Avec la mise en place des politiques de discrimination positive, à partir de 1965, "l'immigration et la composition ethnique et raciale de la population (...) vont redevenir une préoccupation importante du recensement". Le fait que les habitants remplissent eux-mêmes le questionnaire du recensement à partir de 1970 ou que, depuis 2000, ils puissent choisir d'appartenir à plusieurs races aura cependant des conséquences limitées sur les identifications. "Près de deux siècles d'imposition des normes raciales officielles, explique Schor, avaient produit une grande inertie." Sans ce détour historique, on ne comprendrait pas comment, d'instrument du darwinisme racial et social de l'Etat, le recensement s'est transformé, avec les mêmes outils, en technologie participative de reconnaissance des minorités. Ce sont en général les conservateurs, pas les progressistes, qui demandent aujourd'hui qu'on supprime "la race dans le recensement". Mais aucun de ces deux camps ne semble prêter attention aux nouvelles exclusions qu'il opère et à l'Amérique imaginaire qu'il construit. Le cas américain permet aussi de regarder d'un autre oeil le débat français autour des statistiques ethniques. Il demande de s'interroger sur les techniques et les critères qui doivent être retenus pour définir des groupes homogènes, mais aussi sur leurs limites et les conditions de leur évolution dans le temps. Car s'il est vrai que, sans les statistiques ethniques, des formes d'inégalités restent invisibles, à long terme des catégories trop rigides fixent les identités légitimes ou ignorent les identités multiples. La vie de ces catégories ne peut donc pas dépendre que de l'Etat : elle repose aussi sur la mobilisation des minorités. COMPTER ET CLASSER. HISTOIRE DES RECENSEMENTS AMÉRICAINS de Paul Schor. Ed. de l'EHESS, "En temps & lieux", 384 p., 22 €. Laurent Jeanpierre
14/01/2010
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"""La Scène"", de Maryline Desbiolles : les tablées généreuses de Maryline Desbiolles"
D'invisibles remous circulent sous les nappes des repas de famille.
De La Seiche à La Scène : un écho entre deux titres, une correspondance entre deux livres, réunis "par la grâce d'une assonance commune à leurs noms". On se souvient de La Seiche, roman remarquable qui fit connaître Maryline Desbiolles en 1998 (réédité en Points), après plusieurs récits et recueils de poèmes, et avant Anchise, qui lui valut le prix Femina en 1999. Le roman progressait au fil de la préparation de seiches farcies, en suivant les douze injonctions de la recette - tandis que la transformation culinaire faisait surgir les "mots de la mémoire" et de la rêverie. "Il m'est souvent apparu, écrivait la romancière, qu'une sensation, pourvu qu'elle fût éprouvée avec force, renfermait beaucoup d'autres sensations, sinon toutes, comme si les sensations étaient imbriquées les unes dans les autres, découlaient les unes des autres." Dans La Scène, les invités sont à table - et les souvenirs de repas et les tablées diverses semblent s'imbriquer et se superposer, comme autant de variations. Rappelant la passion que lui inspira au collège la découverte de la théorie des ensembles, Maryline Desbiolles lui emprunte ses titres : intersections, unions et inclusions. Car le désir de composer des ensembles "n'est autre au fond que celui de l'écriture". Voyageuse attirée par une ardoise "alléchante" dans une trattoria de la côte ligure, la narratrice observe onze hommes prenant leur repas à une table rectangulaire - scène initiale qui oriente son regard et sa pensée : comment ne pas penser aux "tableaux de la Cène que nous avons tant vus en Italie ?". Celui du Perugino, la fresque de Leonardo ou le tableau plus sombre du Tintoretto. En italien, rappelle-t-elle, tavola désigne à la fois la table et le tableau, le support du tableau "dipinto su tavola". Puis, les temps se mêlant, apparaissent sur une ancienne photo en noir et blanc, dans un paysage toscan, onze convives : onze, "nombre d'or de la tablée, alexandrin boiteux, j'aime Verlaine pour son goût de l'impair". Sur cette photographie "surexposée" par la mémoire, sa famille italienne - du côté de sa mère - figure autour de la table en bois de cerisier, au milieu de la terrasse : la grand-mère évoquée dans Primo (Seuil, 2005), les grands-oncles "beaux comme des acteurs de cinéma", la petite nièce française qu'ils invitent à danser sur la table et surnomment "farfalla", papillon. La grande table du monde Banquets de communion, de mariage, de vernissage, table en formica rouge des repas quotidiens, souvenir de deux petites fugueuses qui, à 14 ans, marchent "sur la grande table du monde" : la romancière revendique son "amour fou des scènes répétées, à l'envi, sur tous les tons, ce qui les empêche, croyons-nous, d'être jamais figées, gelées". A ces scènes remémorées se mêlent de nouveau des tableaux : Le Déjeuner, de Monet, Tischgesellschaft, d'Oskar Schlemmer, un peintre du Bauhaus, ou un tableau hollandais de Dirck Hals, au début du XVIIe siècle. Ici ou là, la table est "périlleuse", propice aux superstitions. "Drôles de festins censés célébrer les grands moments de la vie et nous rappelant ainsi à chaque fois (...) notre fin prochaine." La violence n'est jamais loin dans les romans brefs et tendus de Maryline Desbiolles. Elle est ici enfouie dans les "odeurs de cuisine qui réveillent de la mort, qui réveillent la mort". Ainsi revient brutalement, comme un "Memento mori", la vision de l'accident de scooter dont la narratrice a été récemment le témoin, et le jeune homme "tellement laid, parce que mort, malgré sa jeunesse". Car à toutes ces tables on se nourrit du beau, on "mange des yeux". L'ogre ou Le Goinfre (Seuil, 2004) ne sont jamais loin, et d'invisibles remous circulent sous les nappes, comme si les corps étaient "coupés en deux", au-dessus et en dessous de la table. "Une affaire d'appétit ? Peut-être. Nous connaissons l'issue de la cérémonie, nous connaissons la défaite la plus noire, nous connaissons même l'amertume, mais nous avons de l'appétit." LA SCÈNE de Maryline Desbiolles. Seuil, "Fiction & Cie", 130 p., 15 €. Monique Petillon
14/01/2010
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"""Mort de Bunny Munro"", de Nick Cave : mort dérisoire et sublime d'un commis voyageur"
Le second roman de Nick Cave frappe fort - et juste.
A la surface, des mots qui tombent dru, avec une régularité de métronome, une architecture savante faite d'obscénité et de désespoir. Plus en profondeur, un grand sentiment de vanité et de vacuité, un vertige métaphysique, l'impression désagréable d'être au bord d'un précipice et de regarder avec délectation un homme tomber. La recette de Nick Cave est simple, voire simpliste - le sexe, la mort. Pourtant, il évite la plupart des poncifs du genre grâce à une écriture exigeante et à un formidable personnage principal : Bunny Munro, commis voyageur, dont la femme vient de se suicider. Seul avec son fils, un peu d'alcool et son pénis constamment en érection, il prend la route. A la rencontre des ménagères du sud de l'Angleterre, pour un peu d'argent ou une étreinte violente. Presque vingt ans après la parution d'Et l'âne vit l'ange (Serpent à plumes, 1995), le second roman de Nick Cave, musicien, chanteur et poète né en 1957, vient confirmer un talent rare et protéiforme. On souhaite seulement qu'il n'attende pas encore vingt ans pour un troisième livre. Car si l'on peut, certes, trouver parfois quelques naïvetés, quelques révérences trop appuyées dans cette Mort de Bunny Munro, l'énergie et la subtilité de l'écrivain ne souffrent aucune discussion. En d'autres temps, Bunny Munro aurait été la figure rêvée d'un certain féminisme radical. Caricature masculine, antihéros pathétique et obsédé, l'homme est déjà mort quand commence le roman, condamné par son désir dévorant de posséder le plus grand nombre de femmes possible. Phallus en manque constant de vagins, il se confond avec ses actes, toujours les mêmes, répétés à l'infini. Pourtant, Bunny Munro se débat avec quelque chose qui le sauve, un reliquat obsédant d'humanité incarné par son fils, Bunny Junior, et par le souvenir (ou le fantôme) de sa femme. Dans la tempête de sexe et de mort orchestrée par le texte, il y a des paragraphes presque apaisés, comme dans l'oeil d'un cyclone. "C'est juste que j'ai trouvé ça dur d'être bon, en ce monde", lâche-t-il finalement dans un dernier souffle. De fait, il ne l'a pas vraiment été. La Mort de Bunny Munro est autant une descente aux enfers qu'une montée au paradis (qui a de faux airs de club de vacances si l'on en croit le roman). Sous le rythme entêtant d'une écriture habile et compulsive, la référence religieuse est constante, ce qui ne surprendra personne. Bunny est un possédé plus encore qu'un malade. C'est un être abandonné de Dieu, un pécheur réflexe, drogué par sa propre fin. Ses pathétiques tentatives de transmission et de paternité relèvent autant du dérisoire que du sublime. Par moments proche d'un Brett Easton Ellis ou d'un Hubert Selby Jr., Nick Cave est d'un tempérament plus classique - plus sobre. La fluidité et l'équilibre du récit, son humour noir et la justesse de ses situations délirantes, démontrent une étonnante maîtrise de la part d'un écrivain qui n'est déjà plus tout à fait (encore) à venir. MORT DE BUNNY MUNRO (THE DEATH OF BUNNY MUNRO) de Nick Cave. Traduit de l'anglais par Nicolas Richard. Flammarion, 334 p., 20 €. Nils C. Ahl
14/01/2010
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"""Ça n'existe pas l'Amérique. Carnet de route"", de Dominique Falkner : on the road again"
Entre candeur et culot, Dominique Falkner a sillonné le Grand Ouest américain pour en rapporter des "bribes anonymes, chapardées à droite et à gauche".
Il a osé. Un jour, Dominique Falkner a pris son sac, a atterri à Chicago et s'est lancé à toute berzingue sur la route littéraire la plus encombrée du monde, celle du Grand Ouest. Les paysans affamés de Steinbeck l'ont empruntée avant lui ? Les pionniers en ont noirci des cahiers entiers ? Kerouac y a fait bourlinguer son alter ego Sal Paradise ? Qu'à cela ne tienne. Dans son carnet de route, Ça n'existe pas l'Amérique, le traducteur et écrivain français les salue au passage. Pour partir une nouvelle fois à la conquête d'une vérité américaine, il faut soit beaucoup de culot, soit une certaine candeur. C'est, en apparence, cette dernière attitude qu'adopte Falkner. Il s'émerveille devant les gratte-ciel. Il écoute deux hommes d'affaires discuter d'amour et se dit que c'est cela, l'essence du voyage, lorsque "le quotidien mijote". Ses Américains, il les regarde vivre. Il est l'observateur invisible, caché derrière des beignets à l'huile dans la station-service. L'homme-plume, votre humble serviteur, qui n'existe que pour retranscrire "des bribes anonymes, chapardées à droite et à gauche, qui servent de combustible" à ses journées. Les Etats défilent et on le suivrait au bout du monde. Dans le Wisconsin, où un homme assis au volant de sa voiture, moteur allumé sur une route déserte, refuse de le prendre en stop ("Je ne vais nulle part. Je lis le journal"). Dans l'Iowa rural, où deux citadines se disent que l'héroïne de Sur la route de Madison, de Clint Eastwood, aurait mieux fait de partir à la fin. Dans le Minnesota, où un rancher a construit l'exacte réplique de Stonehenge en remplaçant les menhirs par des Cadillac et des Mustang. Souvent, l'écrivain profite du silence pour décrire des paysages magnifiques, avec un sens du détail ahurissant - il faudrait avoir sous la main une encyclopédie de la flore et des oiseaux pour s'en faire une représentation exacte. Figé dans un temps universel Le rythme du voyage plonge le récit dans une sorte de torpeur. Les remarques sur l'opposition française à la guerre en Irak donnent une indication sur la période, mais le pays décrit est figé dans un temps universel. Les Etats-Unis défilent, parfois surprenants, parfois conformes aux clichés, et on les regarde avec un émerveillement d'enfant. Falkner se compose un pot-pourri d'Américains : cow-boys, Indiens, filles topless dans les bars, professeurs de philosophie... Les plus intéressants ne sont pas toujours les plus bavards. Trois mots d'un mineur de charbon taciturne suffisent à nourrir un chapitre. Dans sa voiture remplie de carabines de chasse, il n'ouvre la bouche que pour nommer les animaux qui traversent la route. "Badger" (blaireau), dit-il d'abord. "Weasel" (belette), poursuit-il quelques kilomètres plus loin. "Raccoon" (raton laveur), conclut-il. Bien sûr, il y a ruse. Les paroles recueillies sont des morceaux choisis. On irait même jusqu'à soupçonner Falkner d'en inventer. Ces petits arrangements avec la réalité ouvrent une fenêtre sur un autre récit, très documenté. L'écrivain dissémine dans ses conversations des citations d'auteurs sur les Etats-Unis - le titre de son ouvrage est emprunté à Henry Miller. Il consacre un chapitre à l'origine de la communauté utopiste icarienne, un autre à l'histoire d'amour entre Simone de Beauvoir et l'écrivain de Chicago Nelson Algren. Il intègre aussi à son carnet de route de longs extraits des journaux des pionniers Meriwether Lewis et William Clark, qui ont traversé le pays de 1804 à 1806 à la demande du président Thomas Jefferson. Falkner, qui, en réalité, est installé aux Etats-Unis depuis 1986, n'est pas parti dans son périple nez au vent. Ses étapes sont conçues pour montrer la diversité des habitants, se détacher un peu du mythe. Rien à faire : en refermant son livre, on entend toujours résonner le cliquetis des santiags et grincer les portes battantes du bar d'autoroute. Mais on a passé un moment formidable. Et on n'a qu'une envie : atterrir à Chicago et partir à l'Ouest, pour comprendre enfin ces satanés Américains. ÇA N'EXISTE PAS L'AMÉRIQUE. CARNET DE ROUTE de Dominique Falkner. Arléa, 224 p., 18 €. Clara Georges
14/01/2010
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"""L'Absence d'oiseaux d'eau"", d'Emmanuelle Pagano : les jeux de l'amour et de l'écriture"
La romancière consacre des pages d'une rare intensité à une aventure littéraire avec un autre écrivain.
Et si on essayait ? Si on essayait de s'envoyer des lettres d'amour qui deviendraient un roman ? Un homme et une femme, écrivains tous les deux, se sont lancés dans l'aventure. Et nous voilà, en fin de compte, avec un livre à une seule voix, celle d'Emmanuelle Pagano, à peine remise d'une rupture amoureuse, et qui s'en explique dès la première page : "Ce roman était à l'origine un échange de lettres avec un autre écrivain. Nous nous l'étions représenté comme une oeuvre de fiction que nous construisions chaque jour, à deux, et dans laquelle nous inventions que nous nous aimions. Nous ne savions pas jusqu'où le pouvoir du roman nous amènerait. Nous ne connaissions pas la fin de l'histoire. Il est sorti de ma vie brutalement, abandonnant ce texte en cours d'écriture. En partant, il a repris ses lettres..." Ce roman épistolaire est loin d'être un demi-livre pour autant. L'une de ses forces réside justement dans l'absence de l'autre voix, présente en creux. On devine les mots, les élans, les hésitations de l'homme dont le nom n'est pas révélé et qui s'est laissé entraîner dans cette aventure. Le corps, avec ses emportements et ses souffrances, occupe une place centrale dans les romans d'Emmanuelle Pagano, qu'il s'agisse de l'histoire d'un handicap physique (Le Tiroir à cheveux, 2005), d'une femme née dans un corps de garçon (Les Adolescents troglodytes, 2007) ou d'une fillette violée par ses camarades de classe (Les Mains gamines, 2008). D'origine paysanne, exerçant le métier d'enseignante en arts plastiques, cette romancière de 40 ans, mère de trois enfants, a besoin "d'entrer dans ses personnages, par leurs failles, blessures, orifices". Elle a tenu un blog qui s'appelait "Les corps empêchés" : une sorte d'atelier d'écriture, dans lequel elle exposait ses idées, montrait ses brouillons, et qu'elle a interrompu à l'occasion de ce projet très particulier, pour ne pas y livrer sa vie privée. Projet d'écriture ou projet amoureux ? La narratrice donne l'impression d'avoir eu dès le départ une très forte attirance pour son complice. C'est elle qui mène le jeu. "N'aie pas peur de moi, lui écrit-elle. Fais-moi confiance. Je ne te ferai aucun mal." Et, plus loin : "Tu dis que c'est moi qui fais tout. Ce n'est pas ça, c'est juste qu'il y a ce décalage entre toi et moi, cette sorte d'avance que j'ai sur toi, une avance que je garderai peut-être tout le long de notre histoire." Nulle vantardise ici, mais un constat : elle est réellement amoureuse, elle, ce qui donne plus de force à sa plume. "Tu risques ton écriture" L'exercice est donc un peu faussé dès le départ. Faussé à l'envers, si l'on peut dire, puisque les lettres de la femme sont plus sincères qu'elles ne devraient l'être. Mais cela contribue au caractère littéraire de l'entreprise, le réel venant continuellement s'immiscer dans la fiction. Et cela donne un livre à fleur de peau, d'une rare intensité. Ils s'écrivent, dans les deux sens du terme, s'adressant l'un à l'autre, et fixant sur l'écran leurs propres sentiments. Car nous ne sommes plus à l'ère du facteur, de la feuille glissée dans l'enveloppe et portée jusqu'à la boîte aux lettres. Internet communique les mots instantanément et permet des conversations visuelles, en direct, grâce à la Webcam. "Tu risques ton écriture en la croisant avec la mienne, et moi aussi, je risque la mienne, écrit Emmanuelle Pagano à son interlocuteur. Nos écritures se mélangent, interfèrent l'une avec l'autre." Mais, très vite, ce sont le livre et la vie qui vont s'emmêler, "sans couture, sans séparation". Toujours à distance, elle précise à son compagnon d'écriture : "Je voudrais prendre les mots dans mes mains, et les tordre, les mots, jusqu'à ce qu'ils suivent les contours de ton corps, les malaxer jusqu'à ce qu'ils soient chauds, et qu'ils aient la bonne texture, qu'ils soient suffisamment tendres pour recouvrir ta chair d'une seconde peau. Dans mon écriture, je me donne à toi." Bientôt, le début de la phrase ne sera plus nécessaire. Elle se donnera tout entière : "Serre-moi plus fort que tu l'écris, je voudrais que tes bras soient plus puissants que tes mots, tes pensées plus fortes que tes phrases." Lettres d'amoureuse, folle du corps de l'autre, dont le lecteur découvre l'anatomie dans les moindres détails. Lettres impudiques, mais sauvées de la vulgarité ou de la banalité par une écriture magnifique. "Je peux te lire avec mes mains, mes lèvres, mes yeux, ma langue", écrit-elle à son coauteur et amant. "Maintenant, je sais ce que je voulais, je voulais me glisser dans ta parenthèse." Ce livre, elle a l'impression de l'habiter avec lui, de le construire comme une maison, de l'aménager lettre par lettre. Elle sent, depuis que leurs corps se sont découverts, que son écriture à lui a gagné en puissance, comme si le souvenir des caresses, déposé sur le clavier, lui donnait une autre dimension. Elle n'est pas entièrement dupe, pourtant : "Je sais parfaitement que tu n'es pas fou de moi. (...) Je sais comment je te tiens, par les mots et par le sexe." N'écrit-elle pas d'abord pour le séduire, et le garder ? La romancière quitte mari et enfants pour habiter avec le romancier. Et c'est là que les choses commencent à se gâter. Comme si cet exercice littéraire ne supportait pas la cohabitation. Leurs lectures respectives n'ont plus la même qualité. Le compagnon a tendance à se refermer sur ses cahiers, se cloîtrer pour écrire. A vrai dire, il l'a déjà quittée, avant d'être parti. Une fausse couche semble avoir été déterminante dans cette rupture. Emmanuelle Pagano y consacre un chapitre terrible, écrit en lettres de sang. Lecteurs et lectrices sensibles, attention ! Elle a continué à lui écrire. Il n'a répondu que par des courriels "rares, imprécis, d'une cruauté affûtée au déni, à l'oubli". Elle ne peut plus faire l'amour avec lui que dans ce livre, en le relisant, en ajoutant des pages. Un livre un peu irréel, comme un paysage de carte postale : un lac silencieux, sans oiseaux d'eau. "Le moins réel de tous mes livres", constate, étonnée ou soulagée, Emmanuelle Pagano. L'ABSENCE D'OISEAUX D'EAU d'Emmanuelle Pagano. POL, 298 p., 18 €. Robert Solé
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/l-absence-d-oiseaux-d-eau-d-emmanuelle-pagano_1291534_3260.html
Thrillers en kit sur Internet
Pour les éditeurs et les auteurs pressés, Internet est un vivier tentant de "prêt-à-écrire".
n soulevée par le dernier livre de Jean-Paul Jody. Comme dans les précédents, l'auteur affirme utiliser la forme du thriller pour populariser des sujets d'actualité. La Route de Gakona (Seuil, "Romans noirs", 490 p., 21,50 €) exploite les dangers supposés des ondes électromagnétiques sur l'homme et le climat. Il développe une thèse abondamment colportée sur la Toile, suggérant que des cataclysmes "naturels" (tsunamis, séismes, ouragans) seraient délibérément provoqués par l'armée américaine à des fins politiques. L'outil serait une station émettrice, d'une puissance inégalée, située à Gakona, en Alaska. "Science-fiction ? Pas du tout", écrit l'écrivain sur son site, précisant que l'intrigue est fondée sur des faits et une abondante documentation, qu'il a trouvée en "fouinant" sur Internet. Fouiner est un grand mot. Il suffit d'une heure à un internaute moyennement doué pour trouver la principale source de ce thriller (non citée, hélas !, dans les 9 pages d'annexes). C'est un rapport de 98 pages du Groupe de recherche et d'information sur la paix et la sécurité (GRIP). Intitulé "Le programme Haarp, science ou désastre ?", il détaille les activités du "High Frequency Active Auroral Research Program" (Haarp) américain, et de la station de Gakona. Haarp, conclut-il, n'est qu'un programme de recherche, mais, couplé à d'autres programmes militaires, il pourrait être dangereux. Hors cette conclusion prudente, on trouve dans ce rapport toute la matière du livre : les soupçons mais aussi les faits (les sociétés impliquées par exemple), les plans, les cartes, les données scientifiques, les chiffres, les brevets - abondamment détaillés. Au point que, après avoir lu le rapport, on ne peut s'empêcher de voir dans le roman un clone, hâtivement maquillé en thriller. On objectera que la fiction puise souvent son inspiration dans les médias. Combien de polars basés sur des faits divers ? De romans d'espionnage sur de vraies affaires ? Cependant, en général, la documentation nourrit l'imagination, elle ne la supplée pas. Pour les meilleurs, la trame n'est qu'un prétexte à recréer un univers, à faire vivre un personnage, une époque ou un milieu. Tel n'est pas le cas de La Route de Gakona, thriller certes, mais d'une facture très banale. Sa seule originalité tient précisément à son sujet, nourri d'un nombre impressionnant d'informations, le tout puisé dans le rapport précité. Ce n'est pas interdit. Juste troublant. A ce compte-là, pourquoi lire le livre ? Pour s'épargner une lecture plus fastidieuse ? On y gagne certes en facilité, mais pas en temps ni, surtout, en véracité. Comme si l'emballage remplaçait le produit... Ce "Web thriller" n'est sans doute pas le premier ni malheureusement le dernier. Pour les éditeurs et les auteurs pressés, Internet est un vivier tentant de "prêt-à-écrire". C'est aussi une illusion : il faut très bien connaître un sujet pour y puiser une solide base documentaire. A fortiori s'agissant d'un"buzz". Mais qui décèlera l'artifice ? Véronique Maurus
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/thrillers-en-kit-sur-internet_1291529_3260.html
Cinquante ans après sa mort, Camus fait toujours tourner le fonds Gallimard
Derrière l'éditeur des oeuvres complètes, beaucoup de petites maisons cherchent à innover.
Le 4 janvier 1960, Albert Camus disparaissait dans un accident de voiture. Pour les éditions Gallimard, il s'agit d'"une histoire symbolique très lourde", rappelle Yvon Girard, adjoint d'Antoine Gallimard à la direction éditoriale : Michel Gallimard, neveu du fondateur de la maison et proche ami du Prix Nobel de littérature, à ses côtés dans la voiture, mourra cinq jours plus tard. Cinquante ans après, cette double disparition reste un traumatisme, mais cet anniversaire permet de faire vivre l'oeuvre de l'écrivain. Et dans l'avalanche des titres liés à l'actualité Camus (une trentaine), Gallimard se taille toujours la part du lion, non pas tant par l'importance des nouveaux titres publiés que par sa capacité à redéployer le fonds. "C'est le plaisir du ressassement", commente Yvon Girard. Albert Camus est, de loin, le premier auteur "poche" de la maison. Depuis 1972, date de leur première exploitation en Folio, les trois titres les plus connus de l'écrivain, L'Etranger, La Peste et La Chute, se sont vendus respectivement à 6,6 millions, 3,6 millions et 1,25 million d'exemplaires. L'Etranger, qui est prescrit dans les collèges, s'écoule à 180 000 exemplaires par an. Le titre a été traduit en 56 langues. L'exemple de Camus illustre parfaitement la particularité de Gallimard au sein de l'édition française : une maison qui réalise 60 % de son chiffre d'affaires grâce à son fonds. "Les occasions médiatiques sont de plus en plus nombreuses, mais il faut savoir les saisir", souligne Yvon Girard. Gallimard s'est mis en ordre de marche dès mars 2009. Louis Chevalier, responsable de Folio (collection qui comprend 29 titres de Camus), a proposé de publier séparément La Mort heureuse (176 p., 5,60 €), le premier roman de l'écrivain. A côté de la biographie de référence d'Olivier Todd, parue d'abord chez Gallimard puis reprise en Folio, la maison publie en outre cette année, en "Folio Biographie", Albert Camus, de Virgil Tanase (416 p., 8,20 €), destiné à un public plus large. La nouvelle publication des oeuvres complètes en "Pléiade", soit quatre volumes dont le premier est paru en 2006, s'est aussi achevée au printemps 2009. Enfin, pour les amateurs de beaux livres, Gallimard a réédité La Postérité du soleil (80 p., 22,50 €), grand format paru initialement en 1965 grâce à René Char, avec 30 photos d'Henriette Grindat. Par son occupation méthodique du terrain, Gallimard laisse peu d'espace à ses concurrents, qui ne peuvent grappiller que quelques miettes du gâteau éditorial. Biographe réputé, Alain Vircondelet s'y est pourtant essayé : il propose, chez Fayard, Albert Camus, fils d'Alger (680 p., 19,90 €), une nouvelle biographie de l'écrivain où l'accent est mis sur la terre natale du Prix Nobel. C'est aussi le choix retenu par Stéphane Babey, dans Camus, une passion algérienne (Koutoubia, 192 p., 24 €), et par José Lenzini avec Camus et l'Algérie (Edisud, 160 p., 18 €). Ce dernier publie aussi chez Actes Sud Les derniers jours de la vie d'Albert Camus. Pour se distinguer au sein de la très abondante actualité Camus, le choix de beaucoup de petits éditeurs consiste à traiter un aspect jusqu'à présent ignoré, voire périphérique, de la vie de l'auteur, quitte à le monter en épingle. Lou Marin, issu du mouvement anarchiste non-violent, s'est ainsi intéressé à la postérité d'Albert Camus chez les libertaires, avec deux titres publiés chez de petits éditeurs : Albert Camus et les libertaires (1948-1960), aux éditions Egrégores (366 p., 15 €), et Camus et sa critique libertaire de la violence, à paraître en février chez Indigène éditions. Toujours dans cette petite maison d'édition reparaît une version revue et corrigée de Camus et l'Inde, de Sharad Chandra (240 p., 22 €). L'autre moyen de se démarquer consiste par exemple à intégrer l'oeuvre de Camus dans une collection déjà réputée. C'est le choix opéré par "Bouquins", qui propose un Dictionnaire Albert Camus (992 p., 30 €), sous la direction de Jeanyves Guérin. On se reportera avec intérêt à l'entrée "Gallimard", où l'on apprend que Jean Paulhan, achevant de lire le manuscrit de L'Etranger, écrit dans son rapport qu'il faut "prendre le livre sans hésiter". Le texte paraîtra en mai 1942, avec la postérité qu'on lui connaît. Alain Beuve-Méry
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/cinquante-ans-apres-sa-mort-camus-fait-toujours-tourner-le-fonds-gallimard_1291532_3260.html
Baisse légère de la délinquance mais hausse des violences aux personnes
La délinquance a baissé de 1,04 % en 2009 par rapport à 2008, mais les violences aux personnes ont augmenté de 2,8 %, a annoncé, jeudi 14 janvier, le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux.
La délinquance a baissé de 1,04 % en 2009 par rapport à 2008, mais les violences aux personnes ont augmenté de 2,8 %, a annoncé, jeudi 14 janvier, le ministre de l'intérieur, Brice Hortefeux. Au cours de ses vœux à la presse, le ministre a présenté et commenté le bilan des crimes et délits recensés par la police et la gendarmerie, dont les chiffres ont été communiqués dans le détail par l'Observatoire national de la délinquance et de la réponse pénale (ONDRP). Tandis que les atteintes aux biens ont diminué de près de 1 % en 2009 par rapport à 2008, une baisse cependant moins sensible qu'en 2008 (– 5,08 %), le nombre de violences aux personnes a augmenté de 2,8 % environ en 2009. La hausse est légèrement supérieure à celle enregistrée en 2008 par rapport à 2007 (2,4 %), confirmant une tendance relevée depuis plusieurs années et reprochée par l'opposition au gouvernement. Les violences aux personnes sont en effet de longue date le point noir de la délinquance. Il y a toutefois une évolution de celles-ci en 2009, année qui a vu les violences crapuleuses (commises pour le profit) augmenter alors qu'elles étaient à la baisse les années précédentes. Ce sont les trois derniers mois de 2009 qui semblent permettre d'arriver à ces résultats en baisse de la délinquance générale. En septembre, il y avait eu un renversement de tendance qui avait valu de vives critiques au ministre de l'intérieur. Les cambriolages de résidences principales avaient alors augmenté de 12 %, et les violences aux personnes de 5 % en un an, une tendance qui semble avoir été moindre sur l'année 2009.
14/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/14/baisse-legere-de-la-delinquance-mais-hausse-des-violences-aux-personnes_1291478_3224.html
"""Pont de l'Alma"" et ""Monstruaire"", de Julian Rios : le jeu d'osselets de Julian Rios"
L'accident tragique de la princesse Diana à Paris en août 1997 est le prétexte d'un roman-rébus, encyclopédique et funèbre.
En espagnol, le service des objets trouvés s'appelle Oficina de objetos perdidos, le bureau des objets perdus. Un des narrateurs de Pont de l'Alma, le dernier roman de Julian Rios, évoque cette différence, l'air de ne pas insister. En fait d'objets, il s'agit surtout de temps dans ce livre. Car le temps perdu, le temps passé, devient, dès que l'on se retourne sur lui, du temps retrouvé. Tout se noue ici dans un drame souterrain, entre minuit et une heure du matin. A Paris, le 31 août 1997, la Mercedes de la princesse Diana, pourchassée par des photographes, heurte le treizième pilier du tunnel de l'Alma. Son compagnon, Dodi Al-Fayed, et le chauffeur de la voiture, Henri Paul, sont tués sur le coup. Diana mourra dans la nuit à l'hôpital de La Pitié-Salpêtrière. Apothéose d'un mythe. L'histoire ne fait que débuter. Mais les premières pages de celle qui nous concerne ont déjà pris place, en surface, avant l'accident. Trois amis y achèvent de dîner chez Francis, la grande brasserie de la place de l'Alma. Ils en attendent un quatrième pour le café. Un paparazzi, qui, tiens, se vante d'avoir pris, quelques semaines plus tôt, quatre photos de la princesse nue, sur le pont d'un yacht en Sardaigne. Malheureusement pour lui, les clichés lui ont été volés avec sa mallette, à l'aéroport de Rome, alors qu'il rentrait pour les négocier. Une histoire embrouillée "Tangled tale", dirait Lewis Carroll, que l'on croise souvent dans l'oeuvre de Rios : une histoire embrouillée... Elle l'est, en effet. Au lecteur de démêler la pelote d'un fantastique récit, serré, où tout se boucle en passerelles entre les époques, en hasards qui semblent nécessaires, dans un jeu incessant de noms, de lieux et de dates. En même temps que la publication de Pont de l'Alma, les éditions Tristram, dans une nouvelle traduction, viennent de rééditer Monstruaire, paru une première fois en 1998 chez José Corti. "Ces deux livres ont un lien, précise Julian Rios. Pont de l'Alma continue une narration déjà ébauchée dans le précédent." Au chapitre intitulé "Paris pour Paradis" de Monstruaire, le personnage du professeur Reck, spécialiste acharné de Joyce, s'en va, en effet, comme son mentor, manger des huîtres chez Francis, place de l'Alma... Des personnages comme lui, attachés aux détails les plus précis des existences, il y en a foule dans le roman. A commencer par Emil Alia, figure récurrente de bien des textes précédents. Mais point n'est besoin de connaître son Rios par coeur pour avancer dans l'étonnant dédale dont il nous ouvre la grille et dont la princesse Diana est l'Ariane, au fil tendu. Ainsi retrouve-t-on une Camille (peut-être plongée dans le coma...) embarquée dans une fantomatique croisière sur la Seine. Sont rassemblés à bord, parmi d'étranges invités, Joséphine Baker et André Malraux. Man Ray, Duchamp, Soutine. Proust. Rien que des acteurs tenant chacun le rôle de personnalités disparues. A l'entrée, Camille s'est vu remettre un ticket portant le numéro 318. A y mieux regarder c'est le 31.8. Autour d'une table se tiennent ceux que la mort a réunis dans cette date. La princesse de Galles, mais aussi Charles Baudelaire, Georges Braque et Conrad Moricand, occultiste et ami de Max Jacob. Troublant. Plus encore, puisqu'il s'agit de dates, on va découvrir après que celle de la naissance de Diana Spencer correspond à celle du décès de Louis-Ferdinand Céline. Que cela ouvre d'étranges pistes... Promenade au cimetière Montmartre, à la recherche de la tombe d'une ballerine embrochée vive sur scène, en 1913. Le récit court, souterrain comme dans les catacombes. "Paris est un palimpseste de morts", insiste Julian Rios. Pas seulement Paris. Nous voilà dans les allées d'autres cimetières. Celui de Varengeville, où est enterré Braque justement. Celui des chiens à Asnières. Près du paysage du Pont de Mantes, peint par Corot, aussi. A l'endroit où un jeune soldat américain perdit la vie, en août 1944, pour s'être attardé en souvenir du tableau. "Il existe des liaisons très solides entre ces événements, ces éléments, explique-t-il. Je les ai estompées quelquefois pour rendre le texte plus souple. L'oeil du lecteur ne peut pas forcément tout voir." Pris dans la spirale de ces associations permanentes, on parviendra quand même à apercevoir le reflet de Nabokov. D'autres présences aussi. Qui sait, d'ailleurs, si certaines ne s'inventent pas ? Pourtant, Pont de l'Alma n'est pas un livre à clé. Plutôt un rébus de fins terribles, de noyades, de suicides. Une charade tragi-comique, où Julian Rios nous fait deviner la mort. Comme dans les comptines qu'affectionnait, paraît-il, la défunte princesse Diana. Je t'ai perdu. Tu m'as trouvé ! PONT DE L'ALMA (PUENTE DE ALMA) de Julian Rios. Traduit de l'espagnol par Albert Bensoussan et Geneviève Duchêne. Tristram, 310 p., 21 €. MONSTRUAIRE (MONSTRUARIO). Traduit de l'espagnol par Geneviève Duchêne. Tristram, 186 p., 18 €. Xavier Houssin
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/pont-de-l-alma-et-monstruaire-de-julian-rios_1291542_3260.html
"""Le Troisième Acte"", de Glenn Patterson : les flâneries hantées d'un Irlandais à Hiroshima"
Profond et désinvolte, étrange et familier, un récit tout en ambivalence de Glenn Patterson.
Avertissement : une fois lu Le Troisième Acte, de Glenn Patterson, il faudra immédiatement le relire. Manière de dire que ce roman-là, le septième de l'auteur, a de la densité et ménage des surprises en dépit de son apparente désinvolture. Le titre suggère une geste théâtrale, comme s'il s'agissait d'un décor bâti pour leurrer le lecteur et qu'il n'y avait rien d'aléatoire dans les événements sans importance s'enchaînant au cours d'une même journée. Le Japon de Glenn Patterson ne ressemble en rien à celui qu'ont dépeint Jean-Philippe Toussaint et Amélie Nothomb. Il n'en a ni les motos rutilantes ni les trottoirs mouillés de flaques de lumière, encore moins l'atmosphère industrieuse. En revanche, il tient du film Lost in Translation, de Sofia Coppola. Même bifurcation de destins, nonchalance du temps au sein d'un grand hôtel. A ceci près que l'histoire du Troisième Acte ne se déroule pas à Tokyo mais à Hiroshima. Drôle d'endroit pour une rencontre. Ce jeu de chat et de souris réunit deux hommes qui n'ont rien en commun, hormis le fait qu'ils sont compatriotes. Le narrateur nord-irlandais est en voyage d'affaires. Représentant d'une entreprise de plastique, il est venu vanter le U-bag, sac autoscellable censé renvoyer à la poubelle le film étirable. Ne lui restent que quelques heures à tuer, des emplettes à faire avant de reprendre l'avion pour Belfast. Au buffet du petit déjeuner, il retrouve Ike, ramassé la veille, éméché, dans les couloirs de l'hôtel. Dès lors, malgré leurs réticences, l'animosité qui perce entre le commercial et le romancier (lequel doit intervenir lors d'un colloque intitulé "Ecrire pour sortir du conflit"), l'ironie que trahit chacun de leurs échanges, une amitié conflictuelle va se nouer. Le narrateur suit Ike, curieux de découvrir le panorama depuis le mont Ogon-zan, la vue du tableau d'Hirayama, Holocauste. Après quoi, il retourne, pour la troisième fois, au Musée de la bombe A pour contempler ledit tableau, "se sentant réduit à une chose proche de (son) essence. Pas à un cadre commercial, pas à un père, pas même à un nom. Mais à la personne à qui une inconnue avait souri dans un couloir désert. La personne qui a quitté sa chambre d'hôtel ce matin en caressant l'idée de ne jamais revenir, mais qui devait à présent remonter l'escalier et sortir pour retrouver tout ça : maison, famille, travail...". Obsession et culpabilité La veille, dans ce musée, il a été frappé d'un coup de foudre. Fantasme d'un homme désorienté. Les motifs de son obsession pour ce lieu de mémoire, l'expression de sa culpabilité personnelle seront dévoilés ultérieurement. Est-ce vraiment un jour comme un autre, ce jour de préparatifs vécu sous l'emprise grandissante de l'alcool où le narrateur s'égare, retrouve Ike, divague sur la complicité qui l'unit, à des kilomètres de là, à sa secrétaire et sur la ténuité du lien entre lui, sa femme et leurs grands enfants ? Deux slogans, l'un forgé par le narrateur - "l'emballage fait les neuf dixièmes du produit" -, l'autre en devanture d'un centre commercial - "it's a small world after all" -, peuvent servir à résumer l'ambivalence logée au coeur de l'écriture de Glenn Patterson, non qu'elle soit calibrée à des fins marchandes, mais qui joue habilement et avec drôlerie de l'indolence liée à la flânerie, mine les instants de flottement d'une angoisse diffuse, transpire la mélancolie et réserve des coups de théâtre. Comme Robert McLiam Wilson, Eoin McNamee ou Ciaran Carson, autres romanciers de Belfast, Glenn Patterson se plaît à marier l'étrange et le familier. Il y a là, sous forme de vertige ou de chute libre annoncée par de subtils indices, un violent rappel de l'Histoire et des tragédies du XXe siècle. LE TROISIÈME ACTE (THE THIRD PARTY) de Glenn Patterson. Traduit de l'anglais (Irlande du Nord) par Céline Schwaller. Actes Sud, 224 p., 19,50 €. Macha Séry
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/le-troisieme-acte-de-glenn-patterson_1291543_3260.html
"""L'Obscure Ennemie"", d'Elisabetta Rasy : maladie, mal à dire"
Une mère, sa fille et la tumeur : autour de ce trio, l'écrivain italienne brode un récit qui conjugue grâce et profondeur.
Le mal court en littérature. Et cela ne date pas d'hier. Qu'elles soient infectieuses ou insidieuses, chroniques ou endémiques, héréditaires ou imaginaires, les maladies ont toujours inspiré les écrivains. Ecrire avec des maux, quoi de plus naturel ? "Le poumon vous dis-je !" Peste chez Camus, syphilis chez Baudelaire, tuberculose chez Thomas Mann, syndrome de Clérambault ou chorée d'Huntington chez Ian McEwan, cancer du sein chez Annie Ernaux, sida chez Hervé Guibert... : la littérature, au fond, n'est qu'un vaste hôpital où les corps esquintés, rongés, mutilés, rappellent ce que disait Italo Svevo - la vie est la pire des maladies mortelles. Parfois, cela donne lieu à des clins d'oeil humoristiques - comme Hans et Claudia, dans La Montagne magique, échangeant non leurs photographies mais leurs radiographies. Parfois, le mal se fait entendre dans l'écriture elle-même, comme chez Proust lorsque la cadence de la phrase semble traduire un accès de suffocation. D'autres fois enfin, la souffrance restaure le lien avec l'essentiel, on goûte chaque instant volé comme dans le subtil et vivifiant récit de Sylvia Tabet, Les Patientes, qui sort ces jours-ci à La Découverte. Lorsqu'une maladie en révèle une autre qu'on ne soupçonnait pas, ou qu'elle met à nu une forme de malaise chez autrui, en principe bien portant, la perspective devient plus passionnante encore. C'est le cas dans ce court et saisissant roman d'Elisabetta Rasy qui met en scène trois "personnages", une mère, une fille et "l'obscure ennemie" - en l'occurrence, la tumeur. Au lieu de rapprocher les deux femmes, comme l'une et l'autre le voudraient, cette force maligne va briser "le fil de la compréhension profonde" qui les unissait. Bouleverser les équilibres. Montrer une mère étonnamment insoumise bien que malade. Et une fille - pourtant écrivain - à qui le langage fait subitement défaut. Tant et si bien que le vrai sujet du livre va se déplacer insensiblement de la maladie de la mère vers "le mal à dire" de la fille. L'auteur n'en fait pas mystère. L'écrivain, c'est elle, Elisabetta Rasy. Depuis ses débuts, cette Napolitaine installée à Rome signe des ouvrages conjuguant profondeur et grâce, souvent à mi-chemin entre roman et autobiographie. De l'autofiction à l'italienne pourrait-on dire, au meilleur et lumineux sens du terme, lorsque le texte pèse son juste poids d'universalité grâce notamment à ce que l'auteur appelle "un passeport de réalité" (on pourrait dire aussi d'authenticité). Ici, la réalité surgit dès les premières lignes. Nous sommes à l'enterrement de la mère - autour d'une cavité "inutilement profonde", "un gouffre insensé" - avec "l'employé des pompes funèbres (...) aussi jovial qu'un agent immobilier". Il fait un froid sec en ce jour de février. Sec comme le style d'Elisabetta Rasy, sans effets de manches ni fioritures. "Il n'est pas facile d'avoir affaire à un mourant, et il n'est pas facile, pour un être qui meurt, d'avoir affaire à soi-même", écrit l'auteur page 13. D'une certaine façon tout est dit. Le livre entier va tenir dans cette vérité simple. Dans un va-et-vient constant entre mère et fille, dans la reconstitution pas à pas de leurs contradictions ou de leurs malentendus. Et tout ça, millimètre par millimètre... La mère : (elle) "redoutait la peur plus que la maladie. C'est à cette époque qu'elle décida d'utiliser des serviettes de table en papier rouge à la place des mouchoirs blancs, sans penser que la couleur du sang se distingue sur n'importe quelle autre, rouge inclus". La fille parlant de sa mère : "Il m'arrivait de détester toute la souffrance que son corps irradiait telle une lumière noire. Ou sa voix. Je frissonnais quand elle laissait un message sur mon répondeur. On aurait dit le halètement d'un fantôme." La mère : "Elle se mettait à présent à déchiffrer un réseau de traces mystérieuses, de gestes qui la perdraient ou la sauveraient selon l'ordre inflexible d'une religion archaïque exhumée des ténèbres enfantines." La fille : "Mon désir de bien agir, de consulter les médecins appropriés, (...) amenait peut-être ma mère à me considérer encore comme une bourgeoise qui essaie de se conformer aux règles de la vie, perdant de vue l'essentiel." La fille encore : "J'aurais voulu mettre ma tête à son service, mais elle ne savait que faire de ma tête, elle voulait mon coeur qui s'efforçait de ne pas s'en mêler. (...) Pour elle la maladie était un voyage à l'intérieur d'elle-même, une question personnelle et non une affaire médicale à expédier." Qu'est-ce que cela fait à une mère de voir son autorité sapée par la maladie ? Et à une fille de transporter, entre deux lamelles de biopsie, quelques "bouts infinitésimaux" de sa mère dans son sac à main ? Qu'est-ce que cela fait à un écrivain de voir que ses mots ne circulent plus, qu'ils sont comme coagulés, anémiés, définitivement privés de sens ? Il y a beaucoup de questions chez Elisabetta Rasy. Et peu de réponses, heureusement. Mais de la modestie, de la finesse, de l'humanité à revendre. Administré en lente perfusion, un jour d'hiver sous la couette, ce texte est un puissant et délicieux analgésique. L'OBSCURE ENNEMIE (L'ESTRANEA) d'Elisabetta Rasy. Traduit de l'italien par Nathalie Bauer, Seuil, 132 p., 17 €. Florence Noiville
14/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/14/l-obscure-ennemie-d-elisabetta-rasy_1291528_3260.html
CAN 2010 : les favoris bousculés
Après quatre jours, la compétition a livré de nombreuses surprises. Les favoris vont devoir se reprendre.
Qui aurait imaginé un tel scénario après quatre jours de CAN ? Les favoris malmenés, les petits au rendez-vous, un match d'ouverture surréaliste, 22 buts inscrits, tous les éléments sont réunis pour que l'édition 2010 fasse date. Groupe A : On ne pouvait rêver mieux pour un premier match. L'Angola et le Mali (4-4), meilleures attaques mais également plus faibles défenses, ont démontré pourquoi la CAN est une compétition à part, débridée et surprenante. Mais quel effet aura ce résultat sur les deux formations ? On peut se demander si l'Angola ne subira pas le contre-coup d'une fin de match en eau de boudin et, à l'inverse, si le Mali ne va pas tirer profit d'un crash évité in extremis. L'Algérie a pour sa part été humiliée par le Malawi. Une défaite 3-0 qui a fait jaser, au pays, et qui ne laisse déjà plus le choix aux hommes de Rabah Saâdane. Pour se qualifier, ils doivent impérativement battre le Mali ce jeudi. Enfin, impossible n'est pas Malawi. Réussiront-ils la passe de deux face à l'Angola ? Groupe B : Le Togo n'est plus. La délégation togolaise a été disqualifiée, faute de présenter, une équipe au coup d'envoi du match contre le Ghana. Et pour cause : victime d'une attaque meurtrière qui aura jeté une ombre funeste sur la compétition, l'équipe respectait à cet instant un deuil national en mémoire des victimes. Ils ne sont donc que trois, dans le groupe B, à se disputer les deux places qualificatives pour la phase finale. Les Eléphants ivoiriens se sont compliqué la vie en butant sur le Burkina Faso (0-0). La réaction de Didier Drogba est attendue vendredi face au Ghana, qui fera son entrée dans la compétition, emmené par Michael Essien. Le Burkina Faso a clairement une carte à jouer, d'autant que, malgré le désistement du Togo, le Ghana n'a pas empoché les points d'une défaite sur tapis vert, comme cela aurait pu se produire dans d'autres circonstances. Groupe C : Double tenante du titre mais non qualifiée pour la Coupe du monde, l'Egypte est la seule grande nation du football africain à avoir répondu présent. Les Pharaons ont tranquillement dominé le Nigeria (3-1) et profité du match nul entre le Mozambique et le Bénin (2-2) pour prendre la tête du groupe. Une lutte à trois se dessine donc derrière, sans qu'aucun favori se détache. On en saura plus après la prestation du Nigeria devant le Bénin, samedi. Groupe D : Daniel Cousin, attaquant du Gabon et ancien du RC Lens, avait prévenu : il voulait prendre sa revanche sur le Cameroun, bourreau des Panthères lors des qualifications à la Coupe du monde. C'est désormais chose faite. Un but lui a suffi pour mettre au tapis des Camerounais amorphes. Samuel Eto'o, auteur d'un non-match, portera-t-il son record de réalisations dans la CAN à 17, dimanche contre la Zambie ? Paul Le Guen l'espère, lui qui en a fait son relais sur le terrain. La Tunisie, malmenée par la Zambie (1-1), est en ballottage. Son objectif reste les quarts de finale, et plus si affinités. Son match face au Gabon vaudra le détour.
14/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/14/can-2010-les-favoris-bouscules_1291509_3242.html
Les ventes du constructeur ont reculé en 2009
Le constructeur a annoncé, jeudi, une baisse de ses ventes de 3,1%, à 2,3 millions de véhicules. Pour les seules voitures particulières, la performance est toutefois positive (+ 0,7 %, à 2,03 millions).
Renault a annoncé, jeudi 14 janvier, une baisse de ses ventes totales de 3,1 %, à 2,3 millions de véhicules. Pour les seules voitures particulières, la performance est toutefois positive (+ 0,7 %, à 2,03 millions). Le groupe (marques Renault, Dacia, Samsung et Lada) a bénéficié des plans de relance gouvernementaux, dont les primes à la casse, qui ont dynamisé les ventes et ainsi limité les effets de la récession mondiale et amélioré ses positions en Europe, à l'exception du Royaume-Uni. Hors d'Europe, les ventes baissent, pour la première fois depuis dix ans. La marque Renault est redevenue troisième marque en Europe occidentale, après avoir occupé la quatrième place, "principalement grâce au succès de la famille Mégane et de Twingo". Sur le marché des véhicules utilitaires, la marque est depuis 1998 numéro 1 sur ce même marché, précise le groupe. Pour 2010, l'objectif du groupe "reste l'augmentation de part de marché" au niveau mondial, ajoute le constructeur qui s'attend par ailleurs à une baisse de 8 à 10% du marché européen. "Avec la fin du plein effet des aides gouvernementales, le contexte de l'industrie automobile va demeurer tendu", estime le constructeur français. Renault a accusé une plus forte baisse de ses ventes que PSA, qui a enregistré une baisse de 2,2 % à 3,19 millions d'unités et qui détient 5,1 % de part de marché mondial. Il est en outre plus pessimiste sur les perspectives en Europe, PSA tablant sur un repli européen proche de 8 %
14/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/14/les-ventes-de-renault-ont-recule-en-2009_1291475_3234.html
Irak : onze condamnations à mort pour un double attentat
Deux explosions avaient fait cent six morts et plus de six cents blessés le 19 août devant les ministères des finances et des affaires étrangères.
Un tribunal irakien a condamné à la pendaison, jeudi 14 janvier, onze hommes accusés d'être impliqués dans le double attentat qui a frappé Bagdad le 19 août. "Ils ont été condamnés à mort pour le crime qu'ils ont planifié", a déclaré le président de la cour criminelle siégeant à Bagdad, Ali Abdel Sattar. Les deux attentats au camion piégé avaient visé le ministère des affaires étrangères et celui des finances, faisant cent six morts et près de six cents blessés. Parmi les condamnés figure Salem Abed Jassem, qui a reconnu avoir reçu des fonds pour les attentats du général de brigade Nabil Abdel Rahmane, un officier de l'armée irakienne sous le règne de Saddam Hussein et qui séjourne actuellement en Syrie, selon la justice. Deux membres du réseau Al-Qaida, Ishaq Mohammed Abbas et son frère Moustapha, sont également au nombre des condamnés à mort. Ils avaient été détenus dans le passé dans le camp d'internement de Bucca, au sud de Bagdad, géré par l'armée américaine et aujourd'hui fermé. LA MAJORITÉ DES SUSPECTS AVAIENT TRANSITÉ PAR UN MÊME CAMP D'INTERNEMENT Selon la police irakienne et d'anciens prisonniers, le camp de Bucca, où près de cent mille détenus avaient transité en six ans, s'est révélé être un formidable vivier pour Al-Qaida. En novembre, un haut responsable du ministère de l'intérieur avait indiqué que "les deux kamikazes ainsi que la majorité des suspects arrêtés après le double attentat du 19 août avaient été relâchés peu avant la fermeture de Bucca", en septembre. Les autorités irakiennes avaient également arrêté onze hauts gradés de la sécurité soupçonnés d'avoir failli dans la protection de Bagdad, où les habitants avaient crié leur colère devant l'incurie du gouvernement. Le gouvernement, qui a accusé Al-Qaida et les fidèles de Saddam Hussein, avait à l'époque admis des carences dans la sécurité, notamment une négligence au niveau des barrages routiers qui a permis aux assaillants d'entrer dans Bagdad avec trois véhicules piégés.
14/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/14/irak-onze-condamnations-a-mort-pour-un-double-attentat_1291489_3218.html
Haïti, la malédiction
Depuis deux siècles, l'histoire de l'ancienne "Perle des Antilles" est marquée par une litanie de tragédies, sur fond de tensions sociales, de violences et de crises politiques.
C’est un pays dont la naissance sonnait comme une promesse universelle, et qui semble depuis plus de deux siècles condamné au malheur. La proclamation de l’indépendance d’Haïti, première république noire, le 1er janvier 1804, couronnait la première révolte d’esclaves victorieuse de l’histoire. Les dirigeants avaient décidé de baptiser leur nouvel Etat d’un nom emprunté à la langue des Taïnos, habitants de l’île exterminés par les conquérants espagnols au XVIe siècle: Ayiti, «la terre des hautes montagnes». Signe que leur liberté, chèrement acquise, était la revanche de tous les opprimés de l’histoire. Pourtant, depuis ce jour lumineux, le pays est marqué par une longue suite de drames et de tragédies, entrecoupée de rares périodes de calme. Une histoire scandée de catastrophes, dont le tremblement de terre du 12 janvier est sans doute l’exemple le plus tragique, mais aussi de tensions sociales, de violences et de crises politiques qui ont fait en deux siècles de la «perle des Antilles» l’Etat le plus pauvre du continent américain. Au commencement était une colonie, la plus prospère d’entre toutes. Les Français ont commencé à s’installer à Saint-Domingue, sur la partie occidentale de l’île d’Hispaniola, au milieu du XVIIe siècle. La région était déserte, laissée à l’abandon par les Espagnols après la disparition progressive des Indiens, dans le demi-siècle suivant la découverte de l’île par Christophe Colomb. Les Français y développent avec succès la culture du café et surtout celle de la canne à sucre. A la veille de la Révolution, Saint-Domingue représente les trois quarts de la production sucrière mondiale. Vue de la métropole, la colonie a tout du pays de cocagne : des fortunes inimaginables s’y bâtissent. Mais, sur place, c’est un enfer à ciel ouvert. ANTAGONISME ENTRE DEUX CLASSES SUBSISTANTES 30 000 colons blancs y règnent sur 500 000 esclaves noirs. Une classe de mulâtres, de 30 000 personnes environ, s’est formée. Elle jouit de tous les droits économiques, mais reste exclue de la sphère politique, au nom de la supériorité absolue des Blancs. Chaque année, 50 000 esclaves sont acheminés sur les côtes du pays, pour pallier le manque de bras et l’effroyable mortalité régnant chez les esclaves. L’ordre, dans une société si fragile, ne peut être que précaire, fondé sur la terreur et la violence : la Révolution française l’ébranle irrémédiablement. A Paris, alors que le club des amis des Noirs plaide pour l’égalité civique de tous les hommes libres et l’émancipation progressive des esclaves, un puissant parti colonial s’emploie à maintenir le statu quo, au nom du réalisme économique. Les premiers troubles commencent en 1790, quand un riche mulâtre, Ogé, débarque à Saint-Domingue avec la volonté d’imposer l’égalité civique entre Blancs et mulâtres. Il est capturé et soumis au supplice de la roue le 25 février 1791. Les colons ne perçoivent pas ce coup de semonce. Ils s’enferment dans la défense de la supériorité blanche. Jusqu’à l’explosion d’une révolte d’esclaves, le 23 août 1791, dans le nord de l’île, à Bois Caïman. En quelques mois, la colonie se désagrège. Une figure forte se dégage à la tête de l’insurrection: celle d’un affranchi d’âge mûr, Toussaint Louverture. La révolution de Saint-Domingue est engagée. Le 29 août 1793, le représentant de la Convention, Santhonax, proclame la fin de l’esclavage, quelques mois avant son abolition officielle par la Convention, le 16 pluviôse an II (4 février 1794). Toussaint Louverture, revenu dans le camp français après avoir un temps trouvé refuge dans l’armée espagnole, devient vite l’homme fort de l’île. Il rétablit un semblant d’ordre, soutient le redémarrage de l’activité économique et parvient même à annexer la partie espagnole de Saint-Domingue. Mais la tutelle de Paris sur la colonie devient de plus en plus théorique, ce que Napoléon ne peut tolérer. Il envoie une armée dirigée par son beau-frère, le général Leclerc, et annule l’abolition de l’esclavage, le 20 mai 1802. L’expédition est un désastre : les Français s’emparent de Toussaint Louverture, qui mourra captif au fort de Joux en 1803. Mais ils multiplient les exactions et, décimés par la fièvre jaune, ils sont définitivement vaincus à l’automne 1803. Le général Jean-Jacques Dessalines déclarera l’indépendance d’Haïti le 1er janvier 1804, avant de se faire couronner empereur le 8 octobre. Mais cette victoire laisse le pays exsangue, désorganisé. Alors que Toussaint Louverture avait longuement tenté de rassurer les colons pour les faire revenir, les nouveaux maîtres d’Haïti font massacrer les derniers Blancs, à l’exception des prêtres et des médecins, en février et mars 1804, creusant un fossé de sang infranchissable avec la métropole. La Constitution impériale du 20 mai 1805 stipule qu’"aucun Blanc, quelle que soit sa nation, ne mettra pied sur ce territoire à titre de maître ou de propriétaire et ne pourra à l’avenir y acquérir aucune propriété". Le nouvel Etat, traité avec la plus grande méfiance par les voisins, se construit comme un monde inversé de la société coloniale. Les plantations sont désertées : les anciens esclaves refusent de travailler sur le lieu de leur asservissement. L’agriculture haïtienne, naguère exportatrice, se tourne vers des cultures de subsistance moins productives et plus extensives, ce qui entraînera bientôt un mouvement de déforestation désastreux. Dans le même temps monte un antagonisme entre les deux classes subsistantes, celle de l’élite des mulâtres, qui possède tous les leviers du pouvoir, et celle des descendants d’esclaves noirs. Cet affrontement structurera la société haïtienne, jusqu’à aujourd’hui. Dessalines est assassiné en 1806, et Haïti se scinde en deux entre la République modérée de Pétion, au Sud, et le royaume autocratique du roi Christophe, bâtisseur du chimérique palais de Sans-Souci, censé rivaliser avec Versailles et détruit – déjà – par un séisme en 1842. Le pays retrouve l’unité en 1820, sous la présidence de Jean-Pierre Boyer, qui lui fait connaître un quart de siècle de paix relative avant d’être renversé en 1843. Il parvient surtout à écarter définitivement le danger d’une reconquête française : en 1825, Charles X reconnaît l’indépendance d’Haïti en l’échange du paiement de 150 millions de francs-or d’indemnités. Une somme exorbitante, bientôt ramenée à 90millions, qui plombera durablement les finances de la jeune République, définitivement séparée de sa partie orientale en 1844. Haïti réglera cette dette par échéances jusqu’en… 1888 ! De coup de force militaire en révolution de palais, les chefs d’Etat qui se succéderont en Haïti au XIXe siècle, tous issus de l’armée, échoueront à remettre l’économie à flot et à mettre fin aux jacqueries ensanglantant les zones rurales. Les Etats-Unis tenteront à leur tour d’y mettre bon ordre durant une brève période d’occupation (1915-1934). Ils parviennent à pacifier les campagnes, mais la présence américaine est très mal ressentie par les intellectuels, et bientôt par toute la société haïtienne, jalouse de son indépendance. Elle cessera bientôt, les Etats-Unis rendant le pouvoir à la bourgeoisie mulâtre qui fera connaître au pays une brève (et très relative) période de prospérité. Une nouvelle période de troubles, en 1956-1957, porte au pouvoir un médecin de campagne, connu pour ses travaux d’ethnologue, François Duvalier. Peu d’observateurs soupçonnent qu’avec lui vont s’ouvrir trois décennies d’une dictature qui achèvera de mettre le pays à genoux. S’appuyant sur la majorité noire, ennemie des mulâtres, qui fournit les gros bataillons de sa milice privée, les «tontons macoutes», Duvalier, dit «Papa Doc» règne sans partage par la terreur et la corruption jusqu’à sa mort, en 1971. Son fils Jean-Claude («Baby Doc»), 19ans, lui succède. Après une parenthèse de libéralisation, il suit les traces de son père. En 1986, il doit quitter le pouvoir, et se réfugie en France, laissant le pays plus exsangue que jamais. Après une nouvelle période de troubles, marquée par plusieurs coups d’Etat militaires, une nouvelle figure charismatique apparaît: celle d’un prêtre engagé dans la théologie de la libération, Jean-Bertrand Aristide, président en 1991 et de 1994 à 1996, puis réélu en 2000 et chassé du pouvoir en 2004. Aristide ne sera pas à la hauteur des attentes qu’il a soulevées: s’appuyant sur les «chimères», des bandes armées assez comparables aux "tontons macoutes", il n’apporte aucune solution aux maux qui rongeaient son pays, de plus en plus gangrené par la corruption et dépendant de l’aide internationale. L’année 2004, qui aurait dû être dominée par les commémorations du bicentenaire de l’indépendance d’Haïti, est comme un condensé de son histoire tragique ; après que des manifestations ont forcé le président Aristide à quitter le pouvoir en février, des pluies torrentielles, aggravées par la déforestation, frappent le pays en mai, faisant des milliers de morts. Puis vient la saison des cyclones, en septembre. Le cyclone Jeanne est le plus violent: il fait 1 800 morts environ, le 20 septembre. Pendant quelques heures, une folle rumeur court la planète: l’île de la Tortue aurait été submergée. La nouvelle est totalement invraisemblable, car l’île culmine à 700 mètres d’altitude. Il s’agit juste d’une erreur visuelle d’un pilote d’hélicoptère. Pourtant, le démenti a mis plus de douze heures à venir. Comme si Haïti n’était à l’abri d’aucune catastrophe, même la plus inimaginable. Jérôme Gautheret
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/haiti-la-malediction_1291437_3222.html
Rétablir l’accès à l’eau potable, une priorité pour les ONG
Lancer des appels aux dons, tenter d'évaluer l'ampleur des besoins, et envoyer sur place équipes et matériel : les ONG françaises se mobilisent pour venir en aide aux Haïtiens.
Lancer des appels aux dons, tenter d'évaluer l'ampleur des besoins, et, surtout, envoyer sur place équipes et matériels : durant toute la journée du mercredi 13 janvier, les principales organisations non gouvernementales (ONG) françaises se sont mobilisées pour venir en aide aux Haïtiens. Médecins sans frontières (MSF), qui a déjà accueilli un millier de blessés dans ses différents centres de soins de Port-au-Prince, devait envoyer dans la soirée un hôpital gonflable d'une capacité de 100 lits. Médecins du monde, face à "la gravité de la situation", annonçait l'envoi d'un charter de 40 tonnes de matériel logistique et d'équipements médicaux, ainsi qu'une équipe d'urgence d'une dizaine de médecins, chirurgiens, infirmiers et logisticiens. La Croix-Rouge française (CRF) va distribuer des produits de première nécessité (couvertures, tentes, bâches, jerrycans) pour 20000 personnes, et "installer dès que possible" une première unité de traitement d'eau pour 40000 personnes. L'eau, telle est aussi la priorité d'Action contre la faim (ACF). Pour cette ONG très présente à Haïti (une centaine de salariés dans le pays, dont une trentaine dans la capitale), l'aide alimentaire viendra ensuite. "Compte-tenu de l'urbanisation anarchique de Port-au-Prince, de la pauvreté endémique et de la manière dont fonctionne l'approvisionnement en eau dans la ville, il faut s'attendre à de grandes difficultés pour accéder à l'eau potable", estime son directeur, François Danel, en rappelant qu'après le passage des violents cyclones qui avaient affecté Haïti fin 2008, ce problème avait rapidement posé "une question de vie ou de mort" pour les populations. L'ONG, qui a fait partir, mercredi, une équipe d'urgence de six personnes dans l'avion affrété par le Quai d'Orsay, prévoit un nouveau départ d'ici la fin de la semaine, qui permettra d'acheminer mini-usines de filtration et produits chimiques de purification de l'eau. BIDONVILLES Reste, sur place, à organiser les secours. Avec deux écueils majeurs. Le premier, qui risque d'être particulièrement aigu dans les zones de distribution alimentaire, a trait à la sécurité. Les pillages se sont multipliés dès la survenue du séisme et risquent, dans les prochains jours, de constituer un handicap supplémentaire pour les équipes d'aide humanitaire. Le second écueil concerne l'accès aux victimes et aux zones les plus détruites. Port-au-Prince compte en effet deux millions d'habitants, logés pour la plupart dans des bidonvilles situés au-dessus de la ville et inaccessibles aux véhicules… quand il en reste. "La plupart de nos véhicules ayant été endommagés, notre première urgence va être de trouver les moyens de circuler dans la ville", précise M. Danel. Affirmant que "la structure urbaine de Port-au-Prince et de ses routes d'accès va rendre extrêmement difficile l'accès aux sinistrés", la société française Geosciences Consultants (GSC), spécialisée dans la prévention des risques et des catastrophes naturelles, a mis gratuitement des cartes de Port-au-Prince et de sa région à la disposition des ONG afin de faciliter leur travail Catherine Vincent
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/retablir-l-acces-a-l-eau-potable-une-priorite-pour-les-ong_1291463_3222.html
Le président mongol veut abolir la peine de mort
En annonçant qu'il graciera systématiquement les condamnés à mort, M. Elbegdorj prend le risque de se mettre à dos un Parlement qui lui est déjà opposé.
"A compter de demain, je gracierai les condamnés à mort." L'annonce faite par le président mongol, Tsakhiagiin Elbegdorj, jeudi 14 janvier, face à un Parlement qui lui est majoritairement opposé, a été qualifiée par son ministre de la justice de "rupture politique risquée". "La majorité des pays à travers le monde ont choisi d'abolir la peine de mort, et nous devrions suivre cette voie", a justifié le président, qui suggère de "commuer la peine de mort en une peine sévère de trente ans de réclusion". Après cette annonce, nombre de députés ont refusé d'applaudir le discours du chef de l'Etat, rompant avec la tradition. Si M. Elbegdorj a le pouvoir de faire appliquer un moratoire sur les exécutions, il risque de lui être beaucoup plus difficile de faire modifier la loi, héritée de l'ancien système législatif soviétique. HUIT CRIMES PASSIBLES DE LA PEINE CAPITALE M. Elbegdorj a déjà commué au moins trois condamnations à mort en peine de prison depuis sa prise de fonctions, en mai, selon Roseann Rife, le directrice adjointe du bureau d'Amnesty International en Asie-Pacifique, qui craint cependant que, si le président n'est pas réélu au terme de son mandat de quatre ans, cette abolition pourrait tomber. Le nombre d'exécutions en Mongolie est considéré comme un secret d'Etat, mais Amnesty estime que cinq condamnés ont été exécutés en 2008 et qu'au moins neuf attendaient l'application de leur peine au mois de juillet. La Mongolie fait partie des cinquante-neuf pays qui pratiquent encore régulièrement la peine de mort pour des crimes ordinaires. Actuellement, huit crimes sont passibles de la peine capitale, parmi lesquels la trahison, l'espionnage, le viol dans certaines conditions et le meurtre prémédité. Récemment, Oulan-Bator a étudié la possibilité que ce dernier crime demeure le seul passible de condamnation à mort. Les condamnés, qui ne peuvent être ni des femmes ni des hommes de moins de 18 ans ou de plus de 60 ans, sont tués d'une balle derrière la tête. Leurs familles ne sont pas averties de la date de l'exécution et n'ont pas connaissance du lieu où est enterré le corps du condamné.
14/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/14/le-president-mongol-veut-abolir-la-peine-de-mort_1291441_3216.html
Le Conseil d'Etat donne raison à M. Delanoë dans l'affaire du stade Jean-Bouin
Bertrand Delanoë a bon espoir d'échapper à une mise en examen pour délit de favoritisme qui le menace depuis décembre 2009.
Bertrand Delanoë a bon espoir d'échapper à une mise en examen pour délit de favoritisme qui le menace depuis décembre 2009. Le Conseil d'Etat a rendu, mercredi 13 janvier, une décision qui pourrait avoir une incidence sur l'information judiciaire conduite par les juges financiers Sophie Clément et Brigitte Brun. La Haute juridiction a suspendu un jugement du tribunal administratif sur lequel les juges du pénal se fondaient pour poursuivre le maire de Paris mais aussi Arnaud Lagardère, partenaire de l'association Paris-Jean-Bouin. En 2004, ce club sportif, qui occupe les terrains autour du stade Jean Bouin dans le 16e arrondissement de Paris, avait reconduit la convention qui la lie à la Ville depuis 1927. S'estimant lésé alors qu'il était sur les rangs, Hervé Picard, président de la société Paris-Tennis a porté plainte devant le tribunal administratif. En mars, le tribunal a considéré que "la réalité des intentions des parties et leurs pratiques en 2004 confèrent à la convention le caractère d'une délégation de service public". Par conséquent, la Ville aurait dû, conformément à la règle dans ce type de procédure, procéder à un appel d'offres. Le Conseil d'Etat a suspendu, mercredi, ce jugement en première instance. Il a suivi les conclusions du rapporteur public, Laurent Olléon. Celui-ci estime que le tribunal administratif a commis "une erreur de droit grossière" en requalifiant la convention de 2004 en délégation de service public. Selon lui, deux critères n'étaient pas remplis pour qu'il en soit ainsi : l'association Jean-Bouin ne s'acquitte pas d'un "service public" qui relève de la compétence de la Ville. Le tribunal n'a pas "vérifié" que ce club tirait une part "substantielle" de ses ressources de la subvention municipale. La cour administrative d'appel doit se prononcer sur le fond dans les prochains mois. Si sa décision infirmait celle rendue mercredi, la Ville irait en cassation devant le Conseil d'Etat. "SANS OBJET" En 2007, M. Picard avait introduit une seconde plainte devant la justice pénale contre la même convention. Le délit de favoritisme qu'auraient pu reprocher les juges à M. Delanoë ne peut être constitué que s'il s'agit d'une délégation de service public. Or, le Conseil d'Etat considère qu'il est impossible de l'affirmer. "L'arrêt du Conseil d'Etat rend sans objet les poursuites pénales d'autant plus scandaleuses qu'elles ne reposaient que sur des considérations de droit public que le Conseil d'Etat a écartées", s'est félicité, mercredi, le cabinet du maire. Défait sur le plan juridique, M. Picard, a tenté de semer le doute sur l'impartialité du rapporteur public, M. Olléon, en indiquant à la presse qu'il avait été l'un des signataires, en 2008, d'une motion en faveur de M. Delanoë au congrès du PS à Reims. "M. Olléon n'a aucun lien avec M. Delanoë qui justifie qu'il n'ait pas été saisi du dossier", a répondu le Conseil d'Etat. M. Delanoë n'aura peut-être pas à se défendre devant le tribunal correctionnel. En revanche, les adversaires du nouveau stade de rugby ne désarment pas. L'association Jean-Bouin a déposé un recours suspensif pour bloquer les travaux qui devraient commencer le 20janvier. Béatrice Jérôme
14/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/14/le-conseil-d-etat-donne-raison-a-m-delanoe-dans-l-affaire-du-stade-jean-bouin_1291467_3242.html
"A Haïti, ""il y a peu d'architectes et d'ingénieurs pour construire bien"""
Patrick Coulombel, "architecte de l'urgence", explique pourquoi Port-au-Prince s'est écroulée, des palais aux bidonvilles, et comment il faudra reconstruire.
Patrick Coulombel est un spécialiste de la reconstruction des villes et villages dévastés par des séismes, des cyclones ou des tsunamis. Il préside la fondation Architectes de l'urgence qui, depuis 2001, s'attache à "reconstruire vite mais pas précaire, en adéquation avec l'habitat local, les usages sociaux et les contraintes environnementales". Elle est déjà intervenue au Sri Lanka, à Sumatra (Indonésie), en Iran, en Afghanistan ou à Madagascar. Patrick Coulombel, qui avait mené une mission en Haïti après le passage de l'ouragan Jeanne, en 2004, devait partir pour Port-au-Prince jeudi 14 janvier. Quel type de constructions trouvait-on à Port-au-Prince ? Il y a trois grandes familles de bâtiments. D'abord, un important patrimoine de style colonial, assez beau. Ensuite, beaucoup de gros édifices à ossature en béton construits au XXe siècle. Enfin, il y a l'habitat populaire, des bidonvilles plus ou moins consolidés, souvent situés dans les ravines et à flanc de colline, avec des maisons de tôles, de planches, de briques. Aucune de ces catégories n'a semble-t-il résisté au séisme : une secousse de 7 degrés, c'est monstrueux. Plus on est proche de l'épicentre, plus les bâtiments subissent un effet de cisaillement par le bas. Plus on s'en éloigne, plus ils entrent en résonance par le haut. Quelles constructions représentent le principal danger ? Les bidonvilles ne sont pas ce qui nous inquiète le plus. Les matériaux sont en général assez légers, les constructions sont basses. En revanche, elles n'ont pas d'accroche au sol. Le risque avec les bidonvilles, c'est le glissement de terrain qui peut tout emporter. Les bâtiments en béton, eux, ont un poids bien plus considérable et ils n'ont pas été construits selon des normes parasismiques. Ce sont de simples structures de poteaux et de poutres. On construit en béton parce que c'est beaucoup moins cher que des structures en acier, qui résistent mieux aux séismes. Le problème, c'est que contrairement aux apparences, la mise en œuvre du béton est très technique. Mal fait, il peut avoir des conséquences dramatiques. Or la plupart des gens compétents sont partis d'Haïti. Il y a peu d'architectes et d'ingénieurs sur place pour construire bien. En 2008, une école s'était écroulée toute seule à Pétionville, une banlieue de Port-au-Prince. Le gouvernement avait alors estimé que 60 % des constructions ne respectaient pas les normes de base. Comment va s'organiser le travail de reconstruction ? On va d'abord établir des périmètres de sécurité, analyser l'état des édifices, interdire des bâtiments, en renforcer d'autres, dégager les décombres. Essayer de remettre en fonctionnement les centres de santé, les écoles, les infrastructures. Et il va falloir commencer à penser à l'hébergement de la population. D'abord dans des tentes, au pire sous des bâches en plastique. Enfin, on devra aider les gens à reconstruire leur logement. Faudrait-il interdire de reconstruire dans les ravines ? On ne peut pas interdire la construction sur un terrain sans fournir une alternative qui offre la même proximité avec le centre-ville, l'économie. Haïti est une société rurale, où les gens vont s'installer en ville pour avoir accès aux services de santé et d'éducation. Si vous les en éloignez, ils se réinstalleront sur les terrains à risque. C'est un pays où les gens survivent, celui où j'ai vu les situations les plus dures. Ils prendront le risque. Peut-on reconstruire l'habitat populaire de manière plus résistante sans atteindre des coûts inabordables ? Oui, bien sûr. Quand on n'a pas de moyens et très peu de matériaux, il faut construire léger et bas. Si l'aide internationale finance des programmes de reconstruction à grande échelle, on peut mettre en place des systèmes d'auto-construction qui reviennent à 2 000 euros pour une maison de 50 mètres carrés, nous l'avons fait en Indonésie par exemple. C'est le principe du "cash for work": on définit un modèle de construction avec la population et on paie les gens pour bâtir leur propre logement, avec l'aide de quelques ouvriers spécialisés et notre encadrement, par groupes de cinquante maisons. Cela permet de distribuer des revenus, c'est essentiel pour relancer la machine économique et pour donner à des gens qui ont faim le temps de se consacrer à leur logement. Quels sont les pièges à éviter dans ce genre de situation ? Le premier piège, c'est l'identification du foncier. C'est très difficile de savoir qui exactement a des droits sur quel sol, soit parce que personne ne le sait effectivement, soit parce que les gens sont prêts à tout pour avoir une maison. Ensuite, il faut faire attention à la manière dont on aborde la communauté. Il faut identifier les interlocuteurs légitimes et faire valider par tout le monde le choix des bénéficiaires des nouvelles maisons, sachant qu'on ne reconstruit jamais tout mais seulement les habitations les plus touchées. Sans ce travail d'enquête sociale, on risque de créer de graves conflits. Propos recueillis par Grégoire Allix
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/a-haiti-il-y-a-peu-d-architectes-et-d-ingenieurs-pour-construire-bien_1291439_3222.html
Le gouvernement néerlandais esquive une crise politique après la publication d'un rapport sur la guerre en Irak
Une commission d'enquête affirme que le conflit était illégal au regard du droit international.
Les Pays-Bas ont frôlé de très près une crise politique, mercredi 13 janvier. La publication, la veille, du rapport d'une commission d'enquête sur l'attitude du premier gouvernement de Jan Peter Balkenende, en 2002, avant le début de la guerre en Irak, a failli avoir raison de la coalition que dirige aujourd'hui le leader chrétien-démocrate. Seules les concessions faites par son parti, peu avant le début d'un débat parlementaire convoqué d'urgence, ont permis au ministre-président de sauver son actuel gouvernement. La commission d'enquête dirigée par Willibrord Davids, un ancien haut magistrat, a estimé, dans un document de plus de 500 pages, que la coalition au pouvoir en 2002-2003 avait appuyé l'intervention en Irak alors qu'elle n'était pas légitime au regard du droit international, faute d'un mandat des Nations unies. Essentiellement basée sur des considérations comme la "solidarité atlantique", la position de l'exécutif a été définie à la va-vite plusieurs mois avant l'invasion, et n'a pas été étayée par la suite, juge la commission. Le rapport relève que le gouvernement n'a pas tenu compte des réserves des services de renseignement sur l'hypothèse de la présence d'armes de destruction massive en Irak, et a transmis une information incomplète aux députés. M. Davids a également reproché à M. Balkenende d'avoir, à l'époque, laissé la gestion du dossier à son ministre des affaires étrangères, Jaap de Hoop Scheffer. Piqué au vif, le chef de l'exécutif a contesté ces conclusions. D'après lui, les experts étaient divisés, à l'époque, sur la légitimité de l'intervention. M.Balkenende a assuré, par ailleurs, que son gouvernement avait toujours informé au mieux le Parlement. Et il a défendu les "objectifs politiques" de son équipe, qui regroupait alors, outre son parti, la Liste Pim Fortuyn et le Parti libéral. Mettant en exergue les réserves de l'un des onze membres de la commission à propos du rapport, M. Balkenende a préféré s'en tenir à deux points positifs pour lui. A savoir que les Pays-Bas n'ont, selon le rapport Davids, pas pris "une part active" au conflit armé et que M. de Hoop Scheffer n'a pas dû à son attitude favorable à la guerre son accession au poste de secrétaire général de l'OTAN, en 2004. "LEÇON POUR L'AVENIR" Les partenaires travaillistes de M. Balkenende se sont dit "désagréablement surpris" par l'attitude du premier ministre. Et l'opposition a invoqué la Constitution pour obtenir un débat d'urgence et des éclaircissements. La Loi fondamentale néerlandaise dispose, en effet, qu'un gouvernement doit s'exprimer d'une seule voix sur toutes les grandes questions. Il a fallu douze heures de négociations et la menace d'une crise pour que M. Balkenende accepte de faire marche arrière et transmette, mercredi soir, aux députés une lettre cosignée par ses deux premiers ministres. Dans ce document, le leader chrétien-démocrate admet que le rapport Davids est "une critique du passé et une leçon pour l'avenir". Il endosse ses conclusions et promet une réponse circonstanciée pour le mois de février.
14/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/14/le-gouvernement-neerlandais-esquive-une-crise-politique-apres-la-publication-d-un-rapport-sur-la-guerre-en-irak_1291418_3214.html
Des gendarmes français pour protéger les secouristes et empêcher les pillages
Le très haut niveau d'insécurité d'Haïti inquiète les ONG qui arrivent sur l'île sinistrée.
Des gendarmes français pour protéger les secouristes et empêcher les pillages Le très haut niveau d'insécurité d'Haïti inquiète les ONG qui arrivent sur l'île sinistrée "Depuis mardi soir, nous sommes sur le pied d'alerte. Douze heures après le séisme, les premières équipes étaient prêtes à partir à Haïti." Adjoint au chef du Centre opérationnel de gestion interministérielle des crises (Cogic), installé à Asnières (Hauts-de-Seine), le colonel Brossard souligne "la rapidité" du dispositif de secours et de sécurité mis en place par la France. Mercredi 13 janvier en début d'après-midi, 62 sapeurs-pompiers de Martinique et de Guadeloupe, accompagnés de médecins urgentistes, ont décollé de Fort-de-France pour rejoindre l'île des Caraïbes dévastée. Un détachement de 36 militaires de l'escadron de gendarmerie mobile d'Antibes, basés en Martinique, les escorte. D'autre part, dans la soirée de mercredi, un avion s'est envolé de l'aéroport de Roissy en direction d'Istres (Bouches-du-Rhône), pour embarquer, à destination d'Haïti, 70 militaires de la sécurité civile. Parmi eux, des spécialistes des situations de crise et des systèmes de communication. Six équipes cynophiles font partie de ce détachement. PLUS DE 350 PERSONNES MOBILISÉES PAR LA FRANCE Le ministère de l'intérieur devait décider, dans la journée de jeudi 14 janvier, de l'éventuel envoi d'un contingent supplémentaire d'une centaine de sapeurs-pompiers de la région parisienne et du sud de la France, assistés de onze gendarmes et de militaires spécialistes du traitement de l'eau, afin d'installer des postes médicaux avancés dispensant des premiers soins à la population. En fonction de l'évolution de la situation, un hôpital de campagne pourrait aussi être acheminé vers Port-au-Prince, avec une équipe de 80 médecins, chirurgiens, radiologues et anesthésistes. Ce qui porterait à plus de 350 personnes les forces totales mobilisées par la France. La mission des premiers groupes de secouristes, décrit le colonel Brossard, est de participer aux opérations de sauvetage et de fouille des décombres. Les renforts auront pour tâche l'assistance médicale et sanitaire à la population haïtienne. La présence des militaires, elle, s'explique par le très haut niveau d'insécurité qui règne en Haïti, l'un des pays les plus pauvres du monde. Leur mission est de "se placer à la disposition des autorités locales dans une démarche liée à la sécurité des personnes et des biens", indique la gendarmerie nationale. Ils devront, tout en participant aux opérations de secours, assurer la protection des sauveteurs "face à des actes d'agression", et prévenir "toute tentative de pillage" dans les secteurs dévastés. Bien évidemment, ils ont aussi pour consigne d'assurer la protection des quelque 1 400 ressortissants français, dont 1 200 dans la capitale. La gendarmerie nationale dispose en temps normal d'un contingent de 31 militaires basés en Haïti, dont 25, chargés de former et d'assister la police locale, participent à la Mission des Nations Unies pour la stabilisation en Haïti (Minustah), les six autres étant affectés à la protection de l'ambassade de France. Pierre Le Hir
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/des-gendarmes-francais-pour-proteger-les-secouristes-et-empecher-les-pillages_1291429_3222.html
Rezai échoue en demi-finales à Sydney contre Serena Williams
Chez les hommes, Richard Gasquet et Julien Benneteau se sont qualifiés jeudi pour les demi-finales.
Aravane Rezai ne disputera pas sa première finale de l'année à Sydney. La Française a été sortie en demi-finales, jeudi 14 janvier, par l'Américaine Serena Williams, tête de série numéro un du tournoi, au terme d'une rencontre disputée (3-6 7-5 6-4). Une performance encourageante, à quelques jours de l'Open d'Australie, premier Grand Chelem de la saison. D'autant qu'il ne s'agit pas là d'un coup d'éclat isolé. Cité mercredi par Fance Soir, le nouvel entraîneur de Rezai, Patrick Mouratoglou, rappelait : "Il y a un an, elle était 110e mondiale. Là, elle va être au moins 22e lundi prochain, et il y a trois mois elle était 50e. Les choses vont vite." De son côté, Serena Williams essaiera de décrocher un nouveau titre en finale face à la Russe Elena Dementieva, tombeuse de la Biélorusse Victoria Azarenka. Du côté des Français, Richard Gasquet – qui effectue un beau retour à la compétition après une année noire – et Julien Benneteau se sont qualifiés jeudi pour les demi-finales du tournoi de Sydney. Gasquet s'est imposé en deux sets face à l'Italien Potito Starace 6-3 7-6 tandis que Benneteau a dominé l'Argentin Leonardo Mayer 6-4 6-7 6-0.
14/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/14/rezai-echoue-en-demi-finale-a-sydney-contre-serena-williams_1291434_3242.html
Etats-Unis : trois hommes soupçonnés d'exportation de matériel à potentiel nucléaire vers l'Iran
Trois hommes ont été inculpés aux Etats-Unis pour avoir exporté illégalement des équipements technologiques pouvant servir "au développement de capacités nucléaires".
Trois hommes ont été inculpés aux Etats-Unis pour avoir exporté illégalement des équipements technologiques vers l'Iran, dont le programme nucléaire inquiète les Occidentaux. L'information a été diffusée mercredi 13 janvier par la justice américaine. Un tribunal fédéral de Los Angeles a accusé un Américain de 56 ans et un Iranien de 42 ans d'association de malfaiteurs, contrebande et blanchiment, entre autres chefs d'inculpation. L'Américain a été arrêté lundi à son domicile de la banlieue de Los Angeles. Un mandat d'arrêt à été émis à l'encontre de l'Iranien. Un troisième homme a été arrêté en début de semaine à Francfort, en Allemagne, sur mandat des Etats-Unis. Selon la plainte des autorités, le suspect américain, natif d'Iran, est propriétaire d'une entreprise californienne. Il aurait correspondu électroniquement avec les deux autres inculpés depuis deux ans pour exporter des pompes à vide et d'autres équipements vers l'Iran, via une zone de libre-échange située dans les Emirats. Ces pompes peuvent servir "au développement de capacités nucléaires", selon le quotidien Los Angeles Times, qui cite des sources judiciaires. L'exportation de tels produits nécessite un permis en vertu de la législation américaine. Or, selon un responsable des douanes interrogé par le quotidien californien, "ce sont des hommes instruits, [ils] savaient de qu'ils étaient en train de faire". S'ils sont reconnus coupables de tous les chefs d'inculpation, les accusés risquent plusieurs centaines d'années de prison.
14/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/14/etats-unis-trois-hommes-soupconnes-d-exportation-de-materiel-a-potentiel-nucleaire-vers-l-iran_1291416_3218.html
Dix morts au Pakistan après le raid d'un drone américain
Au moins dix personnes, "des insurgés pour la plupart", ont été tuées jeudi par les missiles d'un avion sans pilote américain dans un district tribal du nord-ouest du Pakistan.
Au moins dix personnes ont été tuées, jeudi 14 janvier, par les missiles d'un avion sans pilote américain dans un district tribal du nord-ouest du Pakistan, où Washington cible régulièrement des cadres d'Al-Qaida et des talibans, selon des officiers pakistanais. L'attaque s'est produite dans le village de Pasalkot, dans le district du Waziristan du Nord, frontalier avec l'Afghanistan, un bastion des talibans pakistanais alliés à Al-Qaida et aux talibans afghans. "Au moins dix personnes, des insurgés islamistes pour la plupart, ont été tuées dans ce tir de missiles, et il se pourrait que le bilan s'alourdisse", a confirmé à l'AFP un officier de l'armée pakistanaise qui a requis l'anonymat. "La cible était un camp d'entraînement de combattants islamistes", a-t-il ajouté. QUATRE-VINGTS RAIDS DE DRONES DEPUIS AOÛT 2008 Aucune source n'a été en mesure de dire si des cadres importants d'Al-Qaida ou des talibans étaient les cibles de cette nouvelle attaque de drone américaine, la septième depuis le 1er janvier dans le nord-ouest du Pakistan. Près de quatre-vingts bombardements menés par des drones, dont seules la CIA et l'armée américaine basées en Afghanistan disposent dans la région, ont été recensés depuis août 2008, faisant plus de sept cents morts, dont des civils selon les militaires pakistanais. Le rythme de ces tirs s'est accéléré ces dernières semaines. Washington refuse de reconnaître officiellement ces frappes, et Islamabad proteste publiquement contre ces violations de sa souveraineté nationale. Mais les médias américains et pakistanais rapportent régulièrement qu'elles sont le fruit d'une entente secrète entre les deux pays. Depuis 2001, les talibans pakistanais mènent une vague sans précédent d'attaques – attentats-suicides pour la plupart – qui a fait près de trois mille morts dans tout le pays en deux ans et demi.
14/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/14/dix-morts-au-pakistan-apres-le-raid-d-un-drone-americain_1291412_3216.html
Une série d'attaques et une vingtaine de victimes en Thaïlande
Trois personnes ont été tuées et dix-sept autres blessées dans une série d'attaques perpétrées dans le sud de la Thaïlande, à majorité musulmane.
Trois personnes ont été tuées et dix-sept autres blessées dans une série d'attaques perpétrées dans le sud de la Thaïlande, à majorité musulmane, a annoncé la police, jeudi 14 janvier. Des agresseurs ont abattu un couple de bouddhistes qui se rendaient au travail en moto et ont ensuite brûlé leurs corps dans la province de Pattani, a précisé la police. Trois personnes, dont une adolescente de 12 ans, appartenant à une famille bouddhiste ont été blessées lorsque des individus leur ont tiré dessus dans la même province. Mercredi, des employés de la compagnie publique d'électricité ont été pris dans une embuscade alors qu'ils travaillaient à Pattani. L'un d'eux a été tué, et quatre autres ont été blessés. Une bombe a ensuite explosé devant un magasin de thé, toujours dans la même province, blessant quatre civils. Un engin explosif a blessé trois soldats et trois civils sur un marché à Yala. Plus de trois mille neuf cents personnes, parmi lesquelles des bouddhistes et des musulmans, ont été tuées depuis six ans dans les mouvements d'insurrection qui agitent cette région proche de la Malaisie. Ces attaques sont imputées à des séparatistes qui prennent pour cible des bouddhistes et des musulmans collaborant avec les autorités thaïlandaises.
14/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/14/une-serie-d-attaques-et-une-vingtaine-de-victimes-en-thailande_1291409_3216.html
L'évolution de la situation en Haïti au fil de la journée
En Haïti, l'arrivée de l'aide se heurte à un casse-tête logistique et tarde à parvenir aux habitants.
Suivez en direct l'évolution de la situation en Haïti, trois jours après le séisme de magnitude 7 qui a frappé l'ouest de l'île. <a href="http://www.coveritlive.com/mobile.php?option=com_mobile&task=viewaltcast&altcast_code=3db019649d" mce_href="http://www.coveritlive.com/mobile.php?option=com_mobile&task=viewaltcast&altcast_code=3db019649d" >Suivez l'évolution de la situation en Haïti</a> Ce flux inclut des informations de la rédaction du Monde.fr et des témoignages d'internautes présents sur place via Twitter. Vous pouvez également poser vos questions ou publier vos commentaires. Pour retrouver la synthèse des événements survenus depuis mardi soir, cliquez ici.
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/l-evolution-de-la-situation-en-haiti-au-fil-de-la-journee_1291419_3222.html
"A Port-au-Prince, une situation ""dantesque"""
Partout ce ne sont que des amas de décombres, des cadavres allongés sur les trottoirs, des cris de douleur et des appels à l'aide. Aucun bilan officiel n'est encore disponible.
Partout ce ne sont que des amas de décombres, des cadavres allongés sur les trottoirs, des cris de douleur et des appels à l'aide. Mercredi après-midi, au lendemain du violent tremblement de terre qui a dévasté Haïti, la capitale, Port-au-Prince, offre un visage de désolation et aucun secours n'est encore arrivé. Les autorités haïtiennes et la Mission de stabilisation des Nations Unies en Haïti (Minustah) apparaissent totalement dépassées par l'ampleur de la catastrophe qui a brutalement frappé le pays le plus pauvre des Amériques. Les communications téléphoniques sont coupées, et seules quelques radios continuent à informer la population. Les témoignages éplorés se succèdent sur les ondes, de personnes à la recherche de parents enfouis lors de l'effondrement de centaines d'édifices. Sur l'une des stations de la capitale, le cinéaste Arnold Antonin, l'un des porte-paroles de la société civile, a lancé un appel urgent aux autorités toujours silencieuses 24 heures après le drame. Aucun engin n'était à l'œuvre pour dégager les tonnes de gravats. La Minustah n'a pas été épargnée par le séisme : une centaine de ses membres a péri lorsque l'hôtel Christopher, qui abritait son quartier général s'est effondré. Selon des rumeurs non confirmées qui circulaient dans la capitale haïtienne, son chef, le tunisien Hedi Hannabi pourrait figurer parmi les victimes. Personne n'est en mesure d'avancer un premier bilan du désastre. A en croire les témoignages recueillis dans les rues de la capitale, il reste un peu partout de très nombreux cadavres sous les immeubles effondrés. "Plus de 20 % du parc immobilier de la capitale est détruit ou sévèrement endommagé", évalue Georges Michel, journaliste, historien et médecin, qui vient de sillonner les quartiers de Port-au-Prince. "C'est dantesque, on n'avait jamais vu ça", ajoute-t-il. CAMPEMENT IMPROVISÉ Tout au long du boulevard de Delmas, large avenue reliant le centre de Port-au-Prince à la banlieue de Pétionville, des milliers d'habitants cheminent avec les maigres possessions qu'ils ont pu sauver, dans les bras ou sur la tête. L'air hagard, ils montent ou ils descendent l'avenue sans savoir où se réfugier. L'un a chargé un cadavre, enveloppé à la hâte dans des sacs de jute, sur une charrette à bras. Deux jeunes transportent leur grand-mère, blessée à la tête et vêtue d'une chemise de nuit rose, sur une chaise en plastique. "Tous les hôpitaux du bas de la ville sont détruits", dit l'un d'eux. Effrayés par les fortes répliques, qui continuaient 24 heures après la première secousse, la plupart des habitants ont dormi dehors. Le parc du collège Saint-Louis de Gonzague, non loin d'un commissariat de police complètement détruit, est transformé en un vaste campement improvisé. Les habitants, dont les maisonnettes ont été balayées par le tremblement de terre, sont allongés sur des cartons, souvent à même le sol, parfois protégés du soleil par des draps. Ici un terrain de foot, plus loin le terre-plein d'un carrefour, tous les espaces libres abritent désormais ces campements improvisés où des centaines de milliers de sinistrés sont privés de tout, y compris d'eau et de nourriture. Avenue Christophe, le lycée Jean-Jacques Dessalines s'est effondré. "Il avait plusieurs étages, de nombreux élèves sont morts", affirme Jean Exeme Lundy. "J'ai perdu mon frère Auguste et mon filleul Nick", ajoute-t-il. Un peu plus loin, rue Capois, le chaos règne à l'hôpital Saint Esprit. Le bâtiment, ébranlé par le séisme, est fermé et des dizaines de personnes, souvent grièvement blessées attendent en gémissant, allongées sur le sol devant l'hôpital. Fransa Jety, une très jeune femme, se précipite en hurlant : "Aidez moi à trouver des antibiotiques, ma fillette est en train de mourir d'une crise de tétanos", implore-t-elle. La fillette, dévêtue, sur un bout de carton, est agitée de violents frissons. Le docteur Sintécile Benjamin apparaît impuissante. "Je suis venue comme bénévole, mais nous n'avons rien, aucun équipement, pas de médicament", soupire-t-elle. Beaucoup ont les membres brisés, comme Richard Sony, dont les deux jambes sont cassées, ou Monine Leblanc, enceinte de quatre mois, qui pousse de longs gémissements. DES CADAVRES ALIGNÉS SUR LES BAS-CÔTÉS La situation n'est pas moins chaotique à l'hôpital installé par Médecins sans frontières (MSF) dans une grande bâtisse à Pacot. L'autre hôpital ouvert par MSF au bas de la ville, Trinité, a été détruit par le tremblement de terre, de même que l'hôpital général. Des dizaines de personnes tambourinent sur la grande porte métallique de l'hôpital de Pacot. Une femme, le pied transpercé par une grosse latte de bois, git devant la porte. Un pick-up approche chargé de cadavres. A l'intérieur la cour est jonchée de blessés. "Nous sommes débordés, heureusement que des renforts vont arriver", dit un jeune français de MSF. Lionel Dervil, un commerçant de 38 ans, est venu avec un voisin pour tenter de récupérer le cadavre de son épouse. "Ils nous disent qu'ils doivent d'abord s'occuper des blessés, qu'ils n'ont pas le temps pour les morts", s'impatiente le voisin, Samuel Alexandre. Sur la route qui descend vers le quartier de Canapé Vert, les cadavres sont alignés sur les bas-côtés. Le bidonville qui ronge la montagne, vers la gauche, semble avoir été bombardé. Une grande partie des petites maisons improvisées en parpaings s'est effondrée. La plupart des stations service n'ont plus de carburant. Une longue file de véhicules s'est formée devant l'une des rares qui en distribue encore. De spéculateurs à la petite semaine proposent le précieux liquide dans des bidons d'un galon, au double du prix affiché. Jean-Michel Caroit
14/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/14/a-port-au-prince-une-situation-dantesque_1291414_3222.html
L’adhésion des Français aux idées du FN est en recul
Le moindre attrait des thèses frontistes semble lié à la stratégie électorale de M.Sarkozy en 2007
Victoire stratégique de Nicolas Sarkozy? L'adhésion des Français aux idées du Front national a sensiblement reculé depuis 2006, pour s'établir à 18% aujourd'hui. Tel est le principal enseignement du sondage TNS Sofres/Logica pour Le Monde et "A vous de juger"/France 2, réalisé les 4 et 5janvier auprès de 1000personnes. Mené dans le prolongement d'une série d'enquêtes similaires débutée en 1984, ce sondage permet de mesurer l'évolution de l'image et des idées du FN dans l'opinion publique. La dernière vague avait été réalisée en décembre2006, quelques mois avant que Nicolas Sarkozy ne sorte victorieux d'une campagne présidentielle menée pour partie sur des thématiques familières à l'extrême droite. Une stratégie électoralement payante, puisqu'elle avait permis à M.Sarkozy de conquérir, dès le premier tour de scrutin, une bonne partie de l'électorat FN. L'enquête de la Sofres permet d'évaluer l'impact de ce positionnement politique sur l'accueil fait aux idées frontistes dans le pays. Le taux d'adhésion global aux idées de Jean-Marie Le Pen est passé de 26% en décembre2006 à 18% aujourd'hui, soit d'une personne sur quatre à une personne sur cinq. Dans le même temps, le taux de désaccord a augmenté de 7points, pour atteindre 77%. Le taux d'adhésion à toutes les propositions suggérées ("On ne défend pas assez les valeurs traditionnelles en France"; "la justice n'est pas assez sévère avec les petits délinquants"; "on ne se sent plus vraiment chez soi en France", etc.) a également connu un recul sensible depuis 2006, de – 3 points ("Il faut rétablir la peine de mort") à – 15 points ("Il y a trop d'immigrés en France"). Les niveaux d'adhésion à la plupart de ces mêmes propositions étaient restés stables entre2000 et 2006. Seule exception: l'affirmation selon laquelle "il faut donner beaucoup plus de pouvoirs à la police" était passée de 64% de "tout à fait ou plutôt d'accord" en mai2000 à 76% en mai2002. Avant de chuter brutalement à 53% en novembre2003, alors que M.Sarkozy était ministre de l'intérieur depuis dix-huit mois. Au vu de ces différents chiffres, il semble manifeste que la méthode sarkozyste, appuyée sur un discours se revendiquant d'une droite décomplexée, a réduit sensiblement le champ d'influence du FN. "Le moment clé est la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy, en 2007, qui a répondu aux angoisses des électeurs du FN en les ramenant dans une logique républicaine. Le Front national ne s'en est pas relevé", souligne Brice Teinturier, directeur adjoint de TNS-Sofres. "Les électeurs du FN ont eu l'impression, à tort ou à raison, qu'une partie de leurs préoccupations était entendue", renchérit le directeur du Cevipof, Pascal Perrineau. "La réinsertion dans l'arc démocratique de problèmes comme l'immigration ou la question identitaire, était une des choses essentielles que la France cherchait confusément depuis vingt-cinq ans", rappelle-t-il. Le moindre attrait des idées estampillées FN n'est-il pas dû à une banalisation de ce discours, notamment illustrée par le débat sur l'identité nationale? "Banalisation est un terme piégé et inapproprié. Ce que l'on observe, c'est un recul de ces idées", répond M.Teinturier, qui note que, "par rapport aux années 1990, la société française est beaucoup moins crispée sur la question de l'immigration, de l'autorité, du sentiment de dépossession.Ce qui fait que le FN a moins d'espace aujourd'hui". Ainsi, la préférence nationale en matière d'emploi, mesure phare du programme frontiste, reste largement désavouée par les Français: elle ne recueille que 17% d'adhésion, 79% se prononçant contre. Autre donnée intéressante révélée par cette étude: 52% des sondés estiment que "le FN et Jean-Marie Le Pen représentent un danger pour la démocratie", contre 65% en 2006. Et ils sont 42% à estimer qu'il n'en est pas un, contre 29% trois ans avant. Pour Brice Teinturier, cela s'explique par "la stratégie de “désextrémisation” du FN engagée lors de la campagne présidentielle de 2007. Ils avaient alors mis la pédale douce sur la question de la préférence nationale et sur celle des immigrés, notamment parce qu'ils avaient été marqués par l'ampleur de la mobilisation de l'entre-deux-tours en 2002". Une stratégie de "respectabilisation" portée déjà, à l'époque, par Marine Le Pen. Celle-ci jouit d'une image moins radicale que son père. Si 43% des personnes interrogées estiment qu'elle représente une "extrême droite nationaliste et xénophobe" (alors que 65% portaient cette appréciation sur son père en 2006), elles sont 36% à juger qu'elle incarne "une droite patriote et attachée aux valeurs traditionnelles". Un chiffre qui grimpe à 55% parmi les sympathisants de droite. La fille du président du FN semble, en outre, avoir déjà succédé à son père dans l'esprit des Français. Ils sont 39% à estimer que c'est elle qui incarne le mieux le Front national. La vice-présidente du parti devance son père (30%) de près de 10 points et est très loin devant son principal concurrent Bruno Gollnisch (4%). En revanche, les avis sont moins tranchés en ce qui concerne l'impact de l'action de Marine Le Pen à la tête du FN. 37% des sondés estiment qu'elle a "permis de moderniser le parti", contre 36% qui sont de l'avis opposé. Si Mme Le Pen succède à son père lors du prochain congrès du parti – qui aura lieu soit à l'automne 2010, soit au printemps 2011 – il lui faudra renouveler un électorat frontiste vieillissant. En effet, selon ce baromètre, le groupe des adhérents aux idées du FN est plus âgé que la moyenne des Français: il est composé à 30% d'individus de 50 à 64 ans, contre 24% dans la population. Majoritairement masculin, ce groupe est également peu diplômé, et habite plus souvent que la moyenne des Français en zone rurale. Abel Mestre et Jean-Baptiste de Montvalon
14/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/14/l-adhesion-aux-idees-du-fn-recule_1291275_823448.html
Fiat-Chrysler fermera son usine sicilienne quelles que soient les protestations
Le directeur général, Sergio Marchionne, a affirmé mercredi que la décision de fermer l'usine de Fiat en Sicile était "irréversible" malgré l'énorme controverse qu'elle créée.
Le directeur général de Fiat et de Chrysler, Sergio Marchionne, a affirmé, mercredi à Detroit (nord des Etats-Unis) que la décision de fermer l'usine de Fiat en Sicile était "irréversible" malgré l'énorme controverse qu'elle créée. Il a par ailleurs laissé entendre que les ventes de Chrysler risquaient de baisser pendant encore quatre ou cinq mois, par rapport à leur niveau de la même période en 2009, car elles avaient alors été dopées par des ristournes. M. Marchionne, qui s'exprimait lors de la conférence d'Automotive News, en marge du salon de l'automobile de Detroit, a été interrompu deux fois par des manifestants, dont l'un protestait contre la fermeture de l'usine sicilienne. Le patron de Fiat a affirmé que, bien qu'il y ait eu "énormément de controverse (...) autour du fait que nous avons décidé de fermer une usine en Sicile", "cette décision est irréversible". Il a ensuite rappelé que l'usine fermerait à la fin 2011, mais qu'un projet pour sa transformation était en cours. "Cette usine n'est pas compétitive de façon structurelle, nous perdons de l'argent pour chaque voiture que nous y fabriquons", a-t-il ajouté. Plusieurs centaines d'ouvriers de l'usine Fiat de Termini Imerese, en Sicile, ont fait grève mercredi pour protester une nouvelle fois contre la décision du groupe italien d'arrêter la production d'automobiles sur ce site. "LA DERNIÈRE FOIS QU'UNE USINE ALLEMANDE A FERMÉ, LA SECONDE GUERRE MONDIALE N'AVAIT PAS COMMENCÉ" Sergio Marchionne avait annoncé en juin la décision du groupe de ne plus produire d'automobiles à Termini Imerese à partir de 2012 pour des raisons de coûts. Le patron de Fiat et de Chrysler a répété plusieurs fois ces derniers jours qu'il recherchait non la croissance, mais la rentabilité et qu'il était prêt à réduire la production pour l'atteindre. "Si le but de notre secteur est de parvenir à une renaissance durable, nous devons rationaliser nos capacités et restructurer notre production", a-t-il insisté. Au "niveau mondial, notre industrie a la capacité de produire 94 millions de voitures par an, environ 30 millions de plus que ce que nous pouvons vendre de manière générale", a-t-il ajouté. "Environ un tiers" de cette surcapacité de production "se trouve en Europe", car "les fabricants européens ne ferment tout simplement pas d'usines", a-t-il argumenté, affirmant que "la dernière fois qu'une usine allemande avait fermé, la seconde guerre mondiale n'avait pas commencé". Un manifestant a interrompu M. Marchionne en plein discours en criant "Honte ! Honte ! Honte à vous, Chrysler et Fiat, de détruire des emplois !", en italien puis en anglais, avant d'être escorté hors de la salle. Une jeune femme est ensuite montée sur la scène au début d'une séance de questions et réponses, apostrophant M. Marchionne. "Ma mère a été tuée par un véhicule Chrysler défectueux !", a-t-elle lancé, avant d'être elle aussi escortée vers la sortie. La faillite de Chrysler a mis fin à de nombreux procès contre le constructeur, intentés pour dénoncer des défauts de fabrication. A la question de savoir quand les ventes de Chrysler, qui ont continué à baisser fortement ces derniers mois, repartiraient à la hausse, M. Marchionne a répondu qu'au cours "des quatre ou cinq mois de l'année dernière toutes les ventes étaient dopées par des ristournes pour gonfler les volumes de ventes". "Jusqu'à ce que ce cycle soit terminé", c'est-à-dire jusqu'à la période de 2010 comparable avec celle où Chrysler est sorti de faillite l'an dernier, c'est-à-dire juin 2009, les ventes du groupe risquent de pâtir d'une comparaison défavorable et d'être négative sur un an. Quand les ventes auront retrouvé "une base de comparaison pertinente" et donc "un niveau normal", elles devraient "commencer à remonter" en rythme annuel, a-t-il conclu.
14/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/14/fiat-chrysler-fermera-son-usine-sicilienne-quelles-que-soient-les-protestations_1291406_3234.html
Haïti : le gouvernement évoque plus de 50 000 morts
La situation en Haïti est critique, les secours peinent à atteindre des sinistrés livrés à eux-mêmes. La colère monte dans la population.
Trois jours après le séisme qui a ravagé Haïti, la situation sur place apparaît toujours aussi catastrophique. Dans les rues de Port-au-Prince dévastées, les Haïtiens sont gagnés par la colère et le désespoir. Alors que les promesses de dons et annonces d'aides internationales s'amassent, les secours peinent toujours à arriver aux survivants. Les autorités haïtiennes ont déjà ramassé près de 15 000 corps dans les artères principales de la capitale, annonce vendredi soir le premier ministre haïtien, Jean-Max Bellerive (lire le reportage Port-au-Prince commence à compter ses morts). Vendredi, le ministre haïtien de la santé publique, Alex Larsen, a évoqué un bilan qui pourrait atteindre 50 000 morts et plus de 250 000 blessés. Une branche de l'OMS annonce quant à elle un bilan pouvant atteindre 100 000 morts si les conditions sanitaires ne s'améliorent pas. Les cadavres jonchent toujours la ville. "Il y a tant de corps dans les rues que les morgues sont pleines, les cimetières sont pleins", a témoigné le chanteur américano-haïtien Wyclef Jean, venu prêter main-forte à ses compatriotes. Si rien n'est fait pour satisfaire les besoins urgents de la population, tels que le logement, l'accès à l'eau et à la nourriture, "on court le risque d'avoir des émeutes", a mis en garde le ministre de la défense brésilien, Nelson Jobim, à son retour de la capitale haïtienne. PROBLÈMES DE COORDINATION DE L'AIDE Le principal problème auquel les sauveteurs doivent faire face reste la difficulté à coordonner les secours (lire l'article L'aide humanitaire confrontée au double défi de la logistique et de la coordination). L'Etat haïtien est quasiment décapité, même si le président René Préval et son premier ministre sont toujours en vie (voir le portfolio Des bâtiments publics détruits ou endommagés). L'aéroport est toujours saturé et les avions ne peuvent y atterrir qu'au compte-gouttes. Les organisations humanitaires craignent aussi de travailler dans des conditions de sécurité précaires (voir le reportage Avec les pompiers français en route pour Haïti). L'information selon laquelle les entrepôts du Programme alimentaire mondial ont été dévalisés a un temps couru avant d'être démentie. Le PAM pense que deux millions d'Haïtiens auront besoin d'une aide alimentaire dans les mois qui viennent, mais il ne peut pour le moment pas utiliser le port de la capitale, qui a été gravement endommagé. Pendant ce temps, la situation à l'aéroport de Port-au-Prince est toujours difficile malgré la prise en main de la situation par l'armée américaine. L'un des conseillers à la sécurité nationale du président américain, Barack Obama, a été envoyé, jeudi, avec un responsable du Pentagone pour coordonner l'aide américaine sur le terrain (lire sur notre blog Les Américains prennent en charge la coordination de l’aide). Les Etats-Unis devraient disposer de 9 000 à 10 000 soldats sur le terrain ainsi que sur des navires autour de l'île. LES ÉQUIPES DE RECHERCHE DÉBORDÉES Dans un communiqué, l'ONU a précisé que plus de 25 équipes de recherche et de secours étaient désormais déployées et que treize autres sont attendues. Mais pour le moment, l'aide se concentre sur les grands bâtiments de la capitale haïtienne, les écoles, les hôpitaux et les hôtels. Dans les rues, les survivants s'improvisent parfois sauveteurs, mais c'est la désorganisation qui règne. Les sinistrés déambulent au milieu des ruines et de la puanteur des cadavres, rendue encore plus insoutenable par la chaleur tropicale qui règne dans l'île (voir le Télézapping Morts et vivants se partagent les trottoirs). L'ONU s'apprêtait à lancer dans la journée un appel d'urgence à la communauté internationale pour récolter 560 millions de dollars pour Haïti. Ces fonds seront débloqués en urgence pour fournir des vivres, du matériel médical, de l'eau et des tentes. L'organisation a déjà reçu des promesses d'aide à hauteur de 268,5 millions de dollars d'une vingtaine de pays, institutions et entreprises. La moitié de la somme récoltée sera destinée à l'aide alimentaire, a précisé John Holmes, coordinateur à l'ONU des opérations de secours d'urgence. Alain Joyandet a annoncé vendredi soir que huit français sont morts dans la catastrophe. Quelque 1 400 Français vivent en Haïti, dont 1 200 à Port-au-Prince. Le ministre français de la coopération a dit nourrir de "vives inquiétudes" pour 20 à 30 d'entre-eux que les services consulaires n'arrivent pas joindre. Vendredi près de 150 ressortissants français ont été évacués et ont atterri à Orly (lire l'article Ça ressemblait à un bombardement pendant une guerre).
15/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/15/haiti-le-gouvernement-evoque-plus-de-50-000-morts_1292454_3222.html
La Côte d'Ivoire bat le Ghana et se qualifie pour les quarts
La Côte d'Ivoire est le premier pays qualifié pour les quarts de finale après sa victoire 3-1 contre le Ghana.
Parfois nerveuse et en infériorité numérique, la Côte d'Ivoire a souffert pour gagner contre le Ghana – qui aura une autre occasion de se qualifier mardi face au Burkina Faso –, une victoire précieuse (3-1) qui lui permet d'être le premier pays qualifié pour les quarts de finale de la Coupe d'Afrique des nations 2010. Si les Eléphants montent en puissance après leur nul contre le Burkina, ils ont encore laissé entrevoir des moments d'absence et peuvent remercier les Ghanéens de ne pas en avoir profité. Ces derniers doivent se mordre les doigts d'avoir attendu la pause pour faire entrer Essien et Gyan, auteur d'un but inutile en toute fin (90e). A l'inverse, les hommes d'Halilhodzic ont cette fois-ci eu 100 % de réalisme, même s'ils se sont fait bêtement peur à dix après l'expulsion d'Eboué (55e) pour un tacle violent. Un coup franc direct de Tiene (67e), puis le caviar de Keita pour le premier but de Drogba (89e), qui va lui donner confiance après une performance globalement décevante, leur a permis de doucher le moral de leur adversaire au plus fort de sa poussée, alors que Amoah a trouvé la base du poteau (57e). En l'absence de Baky Koné, Kalou a marqué des points en offrant l'ouverture du score au remuant Gervinho (22e). Les Ghanéens n'ont pas à rougir de cette défaite. Une simple victoire mardi contre un Burkina Faso leur suffirait pour rejoindre les Eléphants. Les Ivoiriens, qui profitent de l'absence du Togo dans un groupe B réduit à trois équipes pour être officiellement les premiers qualifiés, sont désormais confrontés à un autre problème : ils devront patienter plus d'une semaine avant de disputer leur premier match couperet.
15/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/15/la-cote-d-ivoire-bat-le-ghana-et-se-qualifie-pour-les-quarts_1292457_3242.html
Deux enquêtes visant des suspects de crimes nazis bouclées en Allemagne
Ces enquêtes préliminaires visant des suspects de crimes commis sous le IIIe Reich sont susceptibles de déboucher sur deux nouveaux procès.
L'Office d'enquête allemand sur les crimes nazis a bouclé deux enquêtes préliminaires visant des suspects de crimes commis sous le IIIe Reich, qui sont susceptibles de déboucher sur de nouveaux procès en Allemagne. Selon Kurt Schrimm, directeur de l'Office – qui avait mené l'enquête contre l'ancien officier John Demjanjuk, actuellement jugé à Munich –, un dossier concerne Samuel K., 89 ans, qui vit près de Bonn, et l'autre Iwan Kalymon, alias John Kalymon, né en Pologne en 1921 et établi aux Etats-Unis. Samuel K., qui a la nationalité allemande, est soupçonné de complicité de meurtre dans un nombre de cas indéterminé au camp d'extermination de Belzec (Pologne), où ont péri plus de 400 000 personnes. Iwan Kalymon est quant à lui soupçonné du meurtre "d'au moins un juif" en 1942 alors qu'il était policier en Ukraine et auxiliaire des nazis, précise M. Schrimm au quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung, dans une interview à paraître samedi 16 janvier. Samuel K. semble être Samuel Kunz, témoin dans le dossier Demjanjuk et qui, interrogé en juin par des enquêteurs bavarois chargés du dossier Demjanjuk, avait reconnu avoir travaillé au camp d'extermination de Belzec entre 1941 et 1943 : Kunz avait notamment déclaré, selon un article du Spiegel en novembre, qu'"il était évident pour nous que les juifs y étaient exterminés et ensuite également brûlés". Le parquet de Munich avait décidé de poursuivre John Demjanjuk pour participation au meurtre de 27 900 juifs au camp nazi de Sobibor. Demjanjuk avait été expulsé des Etats-Unis vers l'Allemagne. Son procès est en cours.
15/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/15/deux-enquetes-bouclees-visant-des-suspects-de-crimes-nazis-en-allemagne_1292455_3214.html
Création d'une première force mixte Tchad-Soudan en février
Le Tchad et le Soudan ont établi un calendrier sur la création de leur première force mixte, prévoyant notamment la "sécurisation" de leur frontière.
Le Tchad et le Soudan ont établi vendredi 15 janvier à N'Djamena un calendrier sur la création de leur première force mixte, prévoyant notamment "l'occupation des postes et la sécurisation" de leur frontière au 20 février, selon un document officiel. Le calendrier a été arrêté par les deux parties dans le cadre d'un protocole d'accord "portant sur les mesures concrètes de normalisation des relations entre le Tchad et le Soudan", selon les termes d'un communiqué conjoint. "L'occupation des postes et la sécurisation de la frontière des deux pays" devraient être effectives "du 15 au 20 février 2010", pendant que se tiendra une "réunion de la commission mixte militaire et de sécurité", selon le texte. Côté tchadien, un poste d'observation est prévu à Abéché (est). Pour le Soudan, il sera installé à El-Geneina, dans la région du Darfour (ouest). Le Tchad et le Soudan "se sont donné un délai de deux mois pour prendre chacun les mesures qu'il faut pour mettre un terme à toute présence, tout soutien et de toute action des groupes armés à l'un ou l'autre pays", a précisé un diplomate ayant requis l'anonymat.
15/01/2010
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/01/15/creation-d-une-premiere-force-mixte-tchad-soudan-en-fevrier_1292453_3212.html
Le FMI relève ses prévisions de croissance pour la France en 2010
Le Fonds monétaire international prévoit entre 1 et 2 % de croissance, et non plus 0,9 % comme en octobre.
Le Fonds monétaire international a relevé sa prévision de croissance pour la France en 2010, estimant qu'elle serait comprise entre 1 et 2 %, a annoncé vendredi à Washington le directeur général du FMI, Dominique Strauss-Kahn. "La reprise sera significative, mais vulnérable. Nous prévoyons quelque chose entre 1 et 2 % de croissance" en 2010, a déclaré M. Strauss-Kahn lors d'une conférence organisée par la Chambre de commerce franco-américaine. "C'est mieux qu'en 2009. A l'évidence, ce n'est pas assez", a-t-il poursuivi. Le FMI tablait en octobre sur une croissance de 0,9 % pour la France. "La croissance est revenue au deuxième trimestre de 2009. Principalement par le biais des mesures qui ont été mises en œuvre par le gouvernement, le plan de relance d'une part, le soutien au secteur financier, qui ont à l'évidence joué un rôle très important", estime le dirigeant de l'institution internationale. Le premier ministre François Fillon a annoncé jeudi que la prévision de croissance pour 2010, actuellement de 0,75 %, serait presque "doublée" à l'occasion de la loi de finances rectificative sur le grand emprunt qui doit être présentée mercredi prochain en conseil des ministres.
15/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/15/le-fmi-releve-ses-previsions-de-croissance-pour-la-france-en-2010_1292452_3234.html
Estrosi écrit à Bruxelles pour justifier les pressions de l'Etat sur Renault
La Commission européenne a demandé des clarifications à la France sur les pressions exercées pour que Renault ne produise pas la nouvelle Clio en Turquie.
Le ministre de l'industrie Christian Estrosi a écrit vendredi à la commissaire européenne Neelie Kroes pour l'assurer du respect par la France des règles communautaires, tout en justifiant l'attitude du gouvernement vis-à-vis de Renault, a-t-on appris auprès du ministère. Le président de la République Nicolas Sarkozy doit recevoir samedi le PDG de Renault, Carlos Ghosn, pour le dissuader de délocaliser en Turquie la production de la prochaine génération de la Clio. Dans son courrier, M. Estrosi explique à Mme Kroes, chargée de la concurrence, que les mesures de soutien à l'automobile mises en œuvre en France "respectent les obligations incombant à la France en vertu de la réglementation communautaire et notamment des règles relatives au marché unique", indique-t-on dans l'entourage du ministre. Les prêts accordés au constructeur Renault "ne sont liés à aucune condition préalable", souligne encore le ministre. La Commission européenne, gardienne de la concurrence en Europe, a demandé des clarifications à la France sur les pressions exercées sur ses constructeurs automobiles. Pour obtenir le feu vert de Bruxelles à son plan de soutien au secteur automobile touché par la crise, Paris avait dû renoncer à exiger des constructeurs qu'ils ne ferment aucun site en France pendant la durée des prêts. Christian Estrosi rappelle par ailleurs, dans sa lettre à Neelie Kroes, que l'Etat est le principal actionnaire de Renault, avec une participation de 15 % au capital de l'entreprise. "A ce titre, comme tout actionnaire, il ne peut pas être indifférent aux décisions d'avenir de l'entreprise et participe ainsi à la définition de la stratégie du groupe", explique le ministre dans cette missive, selon son entourage.
15/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/15/estrosi-ecrit-a-bruxelles-pour-justifier-les-pressions-de-l-etat-sur-renault_1292451_3234.html
Affrontements entre nationalistes corses et forces de l'ordre à Bastia
Des affrontements ponctués de jets de cocktails Molotov et de tirs de grenades lacrymogènes ont opposé des militants nationalistes corses aux CRS et gendarmes mobiles.
Des affrontements ponctués de jets de cocktails Molotov et de tirs de grenades lacrymogènes ont opposé vendredi soir au centre de Bastia des militants nationalistes corses aux CRS et gendarmes mobiles. Les manifestants s'étaient rassemblés vers 19 heures à l'appel de la commission antirépressive du parti indépendantiste Corsica Libera pour dénoncer le transfèrement à Paris, jeudi, de cinq hommes dans le cadre d'une enquête pour terrorisme. Certains d'entre eux, parfois encagoulés ou masqués, ont lancé des cocktails Molotov en direction des CRS et des gendarmes mobiles en tenue anti-émeutes qui ont riposté par des tirs de grenades lacrymogènes. Quelques dizaines de jeunes manifestants ont incendié des poubelles sur le boulevard Paoli, principale artère de la ville. Ils ont aussi arraché le rideau métallique d'une agence du Crédit mutuel, d'où s'échappait une épaisse fumée à 20 h 30. Ils avaient auparavant allumé un feu de planches de palettes de bois devant l'entrée du Trésor public, proche du commissariat. Des dizaines de personnes se sont rassemblées tous les soirs depuis mardi devant le camp militaire de Borgo (Haute-Corse) où sont cantonnés des gendarmes, à 15 km au sud de Bastia. Un gendarme avait été blessé à la face mercredi soir, en marge du rassemblement. Les manifestants avaient lancé jeudi des cocktails Molotov sur le poste de garde du camp et allumé des feux à proximité. Les gendarmes avaient tiré des grenades lacrymogènes, provoquant la dispersion du rassemblement. Cinq des dix personnes placées en garde à vue cette semaine à Borgo dans le cadre d'une enquête préliminaire du parquet antiterroriste de Paris ont été transférées dans la capitale jeudi. Selon une source proche de l'enquête, les personnes transférées sont soupçonnées d'avoir participé en juillet à un attentat à la voiture piégée, qui n'avait pas fait de blessé, contre la gendarmerie de Vescovato (Haute-Corse). Il avait été revendiqué par deux hommes encagoulés se présentant comme membres d'un Front de libération nationale de la Corse (FLNC) réunifié en août à Corte (Haute-Corse).
15/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/15/affrontements-entre-nationalistes-corses-et-forces-de-l-ordre-a-bastia_1292450_3224.html
Un Américain arrêté après avoir affirmé être porteur d'une bombe dans un avion
Un Américain a été arrêté après s'être enfermé dans les toilettes d'un avion en affirmant qu'il était porteur d'une bombe.
Un Américain originaire de Californie a été arrêté vendredi après s'être enfermé dans les toilettes d'un avion de la compagnie United à destination du Michigan (nord), affirmant qu'il portait une bombe, ont rapporté les autorités et des médias locaux. "Le vol a atterri sans encombre à l'aéroport TVC (Traverse City, Michigan), tous les passagers sont descendus et l'avion a été fouillé sans que rien n'ait été trouvé", a précisé l'Autorité américaine des transports (TSA) dans un communiqué. "Selon les procédures standard, les forces de l'ordre et des agents du TSA étaient présents à l'arrivée de l'appareil, et le passager en question est actuellement interrogé", a ajouté le TSA, précisant avoir été informé d'un problème à bord de l'avion alors qu'il faisait route vers Traverse City en provenance de Chicago (Illinois, nord). Le TSA n'a pas divulgué l'identité du passager perturbateur, ni les détails des événements ayant eu lieu à bord. L'alerte sur le vol United a conduit les autorités à fermer l'aéroport Cherry Capital de Traverse City de 10 h 30 à 10 h 56, selon le TSA.
15/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/15/un-americain-arrete-apres-avoir-affirme-etre-porteur-d-une-bombe-dans-un-avion_1292412_3222.html
Les e-mails d'un fonctionnaire peuvent-ils être une correspondance privée ?
Une décision de la cour d'appel de Rennes considère que les courriels envoyés par un fonctionnaire sur sa messagerie de travail sont "a priori" de nature professionnelle.
Dans un arrêt rendu jeudi 14 janvier, la cour d'appel de Rennes estime que les courriels envoyés par un fonctionnaire depuis sa messagerie de travail sont "a priori" de nature professionnelle. Cette décision devrait faire jurisprudence, le droit étant relativement peu clair sur le statut des courriels dans la fonction publique. L'affaire remonte à 2004, quand un salarié de la ville de Douarnenez (Finistère) envoie, depuis son poste de travail et avec la messagerie de la mairie, un e-mail à son chef de service dans lequel il critique les autorités de la Ville. A l'époque, le directeur général des services de la Ville, Gil Schmitt, demande au chef de service de lui transmettre le message en question, qu'il verse au dossier administratif du salarié en vue d'une procédure de sanction. Pour l'employé, il s'agit d'un abus d'autorité : ce dernier estime en effet que cet e-mail est une correspondance privée, et il porte plainte pour "révélation par personne dépositaire de l'autorité publique d'une correspondance à caractère personnel". En première instance, le tribunal lui donne raison et, en 2008, M. Schmitt est condamné à une peine de 3 000 euros d'amende avec sursis. CONTENU PRIVÉ CONTRE "PRÉSOMPTION DE NATURE PROFESSIONNELLE" Mais le directeur général des services, considérant ne pas avoir "révélé" de correspondance privée, fait appel de cette condamnation. La cour d'appel de Rennes vient de lui donner raison. "La cour a considéré que M. Schmitt n'avait pas contrevenu à l'article 432-9 du code pénal, qui interdit aux personnes chargées d'une mission de service public 'le détournement, la suppression ou l'ouverture de correspondances ou la révélation du contenu de ces correspondances'", explique son avocat, Me Ronan Garet. Pour la cour, le "détournement, la suppression ou l'ouverture" ne sont constitués que si le courriel a été intercepté avant que son destinataire ne le reçoive, sans qu'il ne le sache. "Si M. Schmitt avait fouillé dans l'ordinateur du destinataire à son insu, le cas aurait été différent ; mais M. Schmitt a demandé que cet e-mail lui soit remis une fois que son destinataire l'avait reçu, et sans se cacher", note Me Garet. Cette analyse n'a pas convaincu Me Vincent Omez, l'avocat de l'employé. "Si le destinataire était bien au courant, ce n'était pas le cas de l'expéditeur ; et surtout, le contenu du message, destiné à une seule personne, était à plus de 50 % de nature personnelle", estime-t-il. La cour d'appel de Rennes note dans sa décision qu'une partie du message pouvait bien être considérée comme personnelle. Mais elle juge que le message étant rédigé sur le lieu de travail et sur la boîte mail de la mairie, il est "a priori de caractère professionnel, sauf à ce que son contenu intéresse de manière évidente la vie privée de son auteur dans les aspects que la loi protège de manière privilégiée, à savoir la santé, le patrimoine et la vie affective ou sexuelle". Le titre du message, "Re: Budget", était suffisamment ambigu pour qu'il soit considéré comme étant directement lié au travail. CLARIFIER LA LOI Même si le tribunal lui a donné raison, M. Schmitt, rejoint par un comité de soutien, estime qu'il est nécessaire qu'une loi vienne préciser le statut des e-mails échangés au sein de la fonction publique. "Dans de nombreuses administrations, il existe des chartes, mais elles sont insuffisantes : il faut trouver le bon équilibre entre la liberté d'expression, le devoir de réserve, la protection de la vie privée… C'est le rôle d'une loi", juge Me Garet. De son côté, Me Omez s'inquiète des conséquences de cette décision. "On ne peut pas considérer que l'arrêt interdise les échanges privés par e-mail au sein de la fonction publique, mais il est tout de même assez restrictif. Si cette tendance se poursuit, on va aboutir à une interdiction de communiquer par e-mail autrement que de manière professionnelle. Dans ce cas, quid des échanges par téléphone, ou même à la machine à café ?" Damien Leloup
15/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/15/les-e-mails-d-un-fonctionnaire-peuvent-ils-etre-une-correspondance-privee_1292396_651865.html
Quatre compagnons d'Emmaüs sans papiers arrêtés
Quatre compagnons d'Emmaüs sans papiers ont été arrêtés en une semaine et l'un d'entre eux a été expulsé, a indiqué vendredi le mouvement.
Quatre compagnons d'Emmaüs sans papiers ont été arrêtés en une semaine et l'un d'entre eux a été expulsé, a indiqué vendredi le mouvement dans un communiqué, en se disant "profondément choqué et indigné par cet état de fait". "Les cas d'arrestations de compagnons Emmaüs se multiplient en ce début d'année : en l'espace d'une semaine, pas moins de quatre compagnons, dont un père de famille, ont été arrêtés à travers toute la France", indique le mouvement. Ainsi, un membre de la communauté de Bourg-en-Bresse, originaire du Kosovo, a été interpellé par les gendarmes, a-t-il détaillé. L'homme, ses deux enfants de 5 et 7 ans, sa femme enceinte et soignée pour des troubles psychiques ont été expulsés. Les trois autres compagnons ont été placés en centre de rétention. Ils sont originaires de l'Angola, du Congo et de Sierra Leone. "Emmaüs demande l'abandon d'une politique aveugle qui ne prend pas en compte la situation particulière de chaque personne, chaque famille sans papiers et qui privilégie les chiffres de reconduction au détriment du respect de la personne humaine", selon le communiqué.
15/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/15/quatre-compagnons-d-emmaus-sans-papiers-arretes_1292443_3224.html
"Airy Routier quitte le ""Nouvel Observateur"""
Ce journaliste est surtout connu pour être à l'origine de l'affaire du SMS que Nicolas Sarkozy aurait envoyé à son ancienne épouse, Cécilia.
Airy Routier, 64 ans, prend - officiellement - sa retraite. Ce journaliste d'investigation, devenu une figure du Nouvel Observateur, est surtout connu pour être à l'origine d'une information diffusée en février 2008, sur le site Internet de l'hebdomadaire, et qui prêtait à Nicolas Sarkozy l'envoi d'un SMS à son ancienne épouse, Cécilia, dans lequel il aurait écrit : "Si tu reviens, j'annule tout." Le chef de l'Etat avait, dans un premier temps, déposé plainte contre le site Internet du Nouvel Observateur, avant de la retirer, ouvrant ainsi la voie à un classement du dossier. M. Routier, entendu par les policiers comme témoin, avait indiqué avoir écrit son article sur la foi d'informations "verbales fiables", admettant ainsi qu'il n'avait pas eu entre les mains le SMS controversé. Airy Routier avait un titre de rédacteur en chef, mais fonctionnait dans la rédaction en "électron libre". Le directeur de l'hebdomadaire, Denis Olivennes, parle d'un départ négocié : "Je ne retiens pas les personnes qui veulent partir en retraite dans la situation actuelle de la presse", déclare-t-il au Monde. Depuis un an, une vingtaine de personnes ont quitté Le Nouvel Observateur, soit près de 10 % de l'effectif. "Il s'agit de départs sans annonce, ni pots d'adieu, mais avec de confortables indemnités", commente un journaliste de l'hebdomadaire, qui évoque un "nettoyage au silencieux". Xavier Ternisien
15/01/2010
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/01/15/airy-routier-quitte-le-nouvel-observateur_1292383_3236.html
Un accord de sortie de crise signé en Guinée
L'accord prévoit un maintien "en convalescence" du chef de la junte, qui reste donc en exil, et l'organisation d'élections dans "six mois".
Un accord de sortie de crise en Guinée a été signé vendredi 15 janvier à Ouagadougou, prévoyant un maintien "en convalescence" à l'étranger du chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, et la tenue d'une présidentielle dans "six mois". Après deux jours de difficiles tractations, l'accord a été signé par le capitaine Camara, le général Sékouba Konaté, président intérimaire, et le médiateur dans la crise guinéenne, le président burkinabé Blaise Compaoré. Le chef de la junte, blessé à la tête par balle lors d'une tentative d'assassinat le 3 décembre, "prend librement un temps de convalescence tout en restant disponible pour apporter sa contribution aux acteurs de la transition", selon le texte. L'accord prévoit également la création d'un "conseil national de transition", la mise en place d'un "gouvernement d'union" dirigé par un "premier ministre, président du conseil des ministres, issu du Forces vives [opposition, syndicats et société civile]", et l'organisation d'élections "dans six mois". La communauté internationale soutient le chef intérimaire de la junte, le général Sékouba Konaté, qui s'est dit prêt à partager le pouvoir avec l'opposition. Le 6 janvier, il avait annoncé que le premier ministre de la transition serait "issu de l'opposition" et "désigné par elle-même". Mais les opposants à la junte, incapables de s'entendre, ont dans le même temps proposé deux noms au poste de premier ministre : l'opposant Jean-Marie Doré et la leader syndicaliste Rabiatou Sérah Diallo. Ils laissent ainsi le choix au général Konaté de le désigner à leur place. Après avoir été hospitalisé au Maroc pendant cinq semaines, Camara a été déposé, contre son gré, à Ouagadougou mardi 12 janvier. Le chef de la junte avait été blessé par balle le 3 décembre 2009 par son aide de camp, Aboubacar "Toumba" Diakité. Les deux hommes se rejetaient la responsabilité du massacre d'au moins 156 opposants, le 28 septembre 2009. L'éventualité de son retour en Guinée provoquait une certaine nervosité à Conakry où la transmission du pouvoir des militaires aux civils a pris forme avec son éloignement. La communauté internationale, France et Etats-Unis en tête, redoutait également son retour en Guinée. Le capitaine Moussa Dadis Camara est apparu amaigri vendredi (première photo) avec une longue cicatrice sur le coté droit du crâne, lors de sa première sortie publique depuis la tentative d'assassinat du 3 décembre. Il était en tenue civile, avec un blouson beige sur un pantalon de toile vert, avec des lunettes de vue. Cette tenue contrastait avec celles de commando parachutiste, larges lunettes de soleil et béret rouge, qu'il affectionnait en public avant le 3 décembre (deuxième photo). Il marchait seul, sans aide, mais lentement. Le visage figé, il n'a pas parlé durant la cérémonie, se contentant de signer le document de sortie de crise pour la Guinée.
15/01/2010
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/01/15/un-accord-de-sortie-de-crise-signe-en-guinee_1292419_3212.html
Avec les pompiers français en route pour Haïti
Des pompiers français devaient arriver vendredi à Port-au-Prince. A leurs côtés, un psychologue, officier de la marine nationale.
La mission sera difficile. Ils le savent tous. Exceptionnelle, estiment même les officiers en charge du détachement. Et dans cet avion affrété par la Sécurité civile, rempli essentiellement de pompiers de la région Ile-de-France et du département des Bouches-du-Rhône (médecine, logistique, transmissions), chacun a conscience à la fois du défi technique lancé par la tragédie haïtienne et de l'épreuve personnelle qu'elle peut représenter. Un homme, peut-être, le sait mieux que quiconque. Un officier de la marine nationale, dont la présence n'allait pas de soi s'il n'avait fait lui-même la demande, arguant de la gravité de la circonstance pour justifier l'intérêt de sa spécialité, sinon l'imposer. Le commandant Thierry Cruz, dont l'uniforme précise "marin-pompier de Marseille", est psychologue. Sa mission, rapidement approuvée par la direction de la Sécurité civile, est d'assurer le soutien psychologique des acteurs du secours français. "IL PEUT Y AVOIR PSYCHO-TRAUMATISME" "Nul ne sait précisément ce qui nous attend, comment s'organisera notre tâche, dans quels lieux, avec quelles structures, explique-t-il. Nous nous adapterons au terrain et aux caprices de la nature. Mais nous serons tous, inévitablement, confrontés à la mort. Il y aura des visions de corps ensevelis, des odeurs de cadavres, des cris, des pleurs, des craquements. Il peut y avoir psycho-traumatisme. Mon rôle est d'éviter sa conséquence : le syndrome de répétition, ce phénomène de flashs, visuels ou sonores, qui, longtemps après le choc, peuvent hanter, miner, détruire un individu." L'intervention du commandant Cruz, auprès des pompiers, n'est pas encore structurée. Comment l'organiser ? L'avion qui est parti de Paris, jeudi 14 janvier à 17 heures, et s'est posé à Istres pour y embarquer un détachement des Bouches-du-Rhône, n'a appris que vers 21 heures, et après moult contre-ordres, sa destination réelle : Fort-de-France (Martinique)... Escale imposée, en pleine nuit, avant de rejoindre Port-au-Prince vendredi, en début d'après-midi, par un vol de l'armée. Le commandant Cruz souhaite cependant parler aux hommes avant l'action, afin de les informer de ce à quoi il seront peut-être confrontés, et leur faire élaborer "des stratégies" permettant d'y faire face. Il entend ensuite les accompagner le plus possible dans les missions de sauvetage, et s'imprégner avec eux des situations "pour être en empathie" et toujours accessible. Il prévoit enfin, pendant les pauses par exemple, des débriefings collectifs. "Un travail de suture de la blessure psychologique", précise-t-il : "Panser les ressentis en les verbalisant." Un pompier de Paris, habitué des grandes catastrophes, incendies majeurs, explosions, accidents dans le métro, sourit. "L'esprit de corps, lance-t-il ; c'est en général ce qui nous sauve ! On parle ensemble, on peut tout se dire. Et puis il y a l'aumonier, prêt à aider les plus désemparés." On verra bien, dit Thierry Cruz. Sa mission est un peu inédite, presque exploratoire… A croiser le regard des quelques pompiers déjà informés de la présence d'un psychologue, et souvent munis des journaux de jeudi titrant sur l'horreur haïtienne, on pressent qu'elle ne sera ni anodine ni superflue. Annick Cojean
15/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/15/avec-les-pompiers-francais-en-route-pour-haiti_1292416_3222.html
"L'Alsace dans le top 10 des ""régions incontournables"", selon Lonely Planet"
L'Alsace a été propulsée dans le top 10 des "régions incontournables" à visiter dans la sélection 2010 du célèbre guide de voyages.
L'Alsace a été propulsée dans le top 10 des "régions incontournables" à visiter en 2010 par l'un des plus célèbres éditeurs de guides de voyages, l'australien Lonely Planet, a-t-on appris vendredi auprès du Comité régional du tourisme d'Alsace. Chaque année, l'éditeur situé à Melbourne publie dans Best in Travel une sélection des 10 pays, régions et villes incontournables. Dans le classement 2010 des régions, l'Alsace figure en compagnie de Bali (Indonésie), Fernando de Noronha (Brésil), Goa (Inde), le corridor de Koh Kong (Cambodge), le lac Baïkal (Russie), Oaxaca (Mexique), le Sud de l'Afrique, le district des lacs (Angleterre) et le sud-est de l'Australie de l'Ouest. 11 MILLIONS DE TOURISTES "C'est une consécration, nous passons de la quatrième région la plus visitée en France à l''incontournable mondial' pour 2010", s'est réjoui Jacques Dreyfuss, président du CRT d'Alsace, qui compte bien utiliser cet engouement pour sa prochaine campagne de communication. Parmi les critères de sélection figurent "des destinations hors des sentiers battus, qui peuvent intéresser des voyageurs indépendants", a expliqué Christophe Corbel, auteur pour Lonely Planet. Dans cette bible des routards internationaux, quatre pages au total ont été consacrées à Strasbourg, capitale de Noël, à la cuisine alsacienne, son authenticité, son caractère, son style de vie transfrontalier. Deux pages entières sont dédiées à son vignoble, a précisé la filiale française de Lonely Planet. Depuis quatre ans, le nombre de touristes en Alsace a considérablement augmenté, passant de 8,5 millions à 11 millions, selon les dernières estimations du CRT.
15/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/15/l-alsace-dans-le-top-10-des-regions-incontournables-selon-lonely-planet_1292415_3244.html
Grippe A : la Belgique résilie sans indemnité un tiers de sa commande de vaccins
La Belgique a obtenu une diminution de "près d'un tiers" de sa commande de 12,6 millions de doses de vaccins auprès du groupe pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline (GSK).
Alors que l'épidémie de grippe A est officiellement terminée en France métropolitaine (258 morts en France, 13 554 dans le monde, selon un dernier bilan publié vendredi), l'heure des comptes est arrivée pour plusieurs capitales européennes. Les gouvernements de l'UE tentent de résilier une partie de leurs commandes auprès des laboratoires, avec plus ou moins de bonheur. La Belgique a obtenu une diminution de "près d'un tiers" de sa commande de 12,6 millions de doses de vaccins contre la grippe H1N1 passée au groupe pharmaceutique britannique GlaxoSmithKline (GSK), a indiqué vendredi la ministre de la santé, Laurette Onkelinx. Elle a précisé que cela représenterait une économie de 33 millions d'euros et qu'il n'y aura pas d'indemnité de résiliation. Au pic de l'épidémie l'an dernier, la Belgique est sortie de la phase épidémique à la mi-décembre, avait commandé à GSK 12,6 millions de doses de vaccins Pandemrix, dont 4,3 millions ont déjà été livrés. Selon l'accord intervenu jeudi, 4 des 8 millions de doses supplémentaires ne seront donc pas livrés. En Italie, l'association de consommateurs Codacons a annoncé le lancement d'une action collective visant à obtenir le remboursement des vaccins commandés par le gouvernement. "L'action a pour but de faire obtenir aux usagers du service national de santé [plus de 60 millions de citoyens] la somme déjà payée par l'Italie pour l'achat de 24 millions de doses, une somme qui représente un énorme gaspillage, vu la faible adhésion à la campagne de vaccination." Environ 875 000 doses de vaccins ont été administrées en Italie jusqu'à présent. La demande de remboursement porte sur 186 millions d'euros, a précisé l'organisation. La France, qui avait initialement commandé 94 millions de doses de vaccin (50 millions au britannique GSK, 28 au français Sanofi Pasteur, 16 au suisse Novartis et 50 000 à l'américain Baxter), a annoncé son intention de résilier des commandes à hauteur de 50 millions de doses. Le gouvernement a déjà résilié une commande de 9 millions de doses auprès de Sanofi, officiellement sans indemnité, et des négociations sont en cours concernant deux autres millions de doses. Mais Roselyne Bachelot a concédé lors d'une séance de questions à la commission des affaires sociales de l'Assemblée qu'il pourrait y avoir des indemnisations.
15/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/15/grippe-a-la-belgique-resilie-sans-indemnite-un-tiers-de-sa-commande-de-vaccins_1292405_3244.html
H-Cup : Toulouse, le Stade Français et Biarritz proches de la qualification, Brive du ridicule
Le Stade Toulousain et le Stade Français peuvent se qualifier dès ce week-end, à l'instar de Biarritz. Brive joue pour l'honneur.
La Coupe d'Europe entre dans la dernière ligne droite, et les clubs français disputent samedi et dimanche la 5e journée, avec en ligne de mire la qualification pour les quarts de finale. Biarritz, le Stade Français et Toulouse peuvent l'accrocher dès ce week-end. Faux pas interdit pour les autres. Poule 1 Perpignan, décevant ces dernières semaines en Top 14 malgré son succès sur le Racing-Métro 92, traîne comme un boulet sa défaite initiale à Trévise. Avec 6 points dans l'escarcelle, contre 15 au Munster, leader de la poule, les Catalans sont quasiment éliminés. Et la perspective d'affronter Northampton dimanche a de quoi effrayer le collectif sang et or. Les Saints (2es), qui réalisent un excellent début de parcours en Premiership (3es), n'ont a priori pas oublié la correction (29-13) que leur avaient infligé les coéquipiers de Maxime Mermoz à l'aller. Mauvais présage, le centre international manquera le deuxième acte pour cause de blessure. Le Munster ferait de son côté un grand pas vers la qualification en s'imposant sur les Italiens. Poule 2 Il existe deux Biarritz cette saison. Le Français, faiblard sur les fondamentaux, en manque de confiance, et l'Européen, dynamique et à portée de drop d'un quart de finale à domicile. Un point de bonus défensif obtenu sur la pelouse de Gloucester suffirait au bonheur des Basques, qui affichent 18 points au compteur. Laurent Rodriguez a donc décidé de faire tourner l'effectif et alignera une charnière inédite, Lesgourgues-Courrent. A noter également le retour en huit d'Imanol Harinordoquy. Poule 3 Si Clermont (3e avec 12 points) a encore son destin entre ses mains, il lui faut pour se qualifier battre ses deux prochains adversaires, à commencer par les Ospreys samedi. Vern Cotter avait en prévision de ce choc envoyé une équipe A prime à Toulouse (16-15), le week-end dernier. Rougerie, Malzieu, Domingo, Cudmore et Zirakachvili, laissés au repos, reviennent dans le groupe. La charnière sera, elle, occupée par Parra et James, chefs d'orchestre d'une formation tout-terrain. Les Gallois de l'ancien toulonnais Jerry Collins, en tête avec 4 points d'avance, sont prévenus. Tout comme Viadana, sparring-partner tout désigné des Tigres de Leicester, 12 points également. Poule 4 Les roses de Guazzini accueillent Bath à Jean-Bouin. Un rendez-vous capital que le Stade Français (1er, 4 points devant l'Ulster) aborde avec un demi-de-mêlée tout neuf en la personne d'Hugo Southwell, plus habitué au poste d'arrière. "Ce n'est pas l'inconnu car c'est son poste de formation", explique Faugeron dans L'Equipe. "Son problème, c'est la vision du jeu, poursuit-il. Elle est plus panoramique à l'arrière. Là il faudra qu'il ait le nez sur le ballon." Un conseil à méditer pour l'Ecossais, qui n'a plus occupé le poste depuis le collège. Par chance, les Anglais n'ont plus rien à espérer de cette compétition européenne. La voie est libre... Poule 5 Toulouse a-t-il digéré la défaite contre Clermont avant de recevoir dimanche les Harlequins ? Cabossés en conquête, fébriles dans les moments clés, les rouge et noir ont enregistré cette semaine les forfaits du massif pilier Census Johnston et de l'ouvreur David Skrela, une nouvelle fois piégé par ses adducteurs. Un état des lieux alarmiste, qui n'inquiète pourtant pas l'entraîneur des lignes arrière Philippe Rougé-Thomas : "Nous sommes dans la bonne direction concernant notre qualité de jeu, il nous reste à être un peu plus performants sur certains détails. Les joueurs sont avertis, c'est un match qualificatif et ils ont les cartes en main pour rester maîtres de leur destin." Poule 6 Quel est le point (noir) commun entre Brive et Viadana ? Zéro, comme le nombre de points engrangés par les deux formations lors des quatre premières journées. Une hémorragie que Brive aimerait stopper, mais pas facile quand on se déplace chez les champions d'Europe en titre, les Irlandais du Leinster, idéalement placés pour poursuivre l'aventure (15 points). Au moins, le Leinster ne fera pas peur à Kinchagichvili, Garcia, Zimmerman, Méla, Vosloo et Pic, tous absents pour la réception des Irlandais ! Vous l'aurez compris, l'orgueil corrézien ne devrait pas suffire samedi. Viadana se frotte les mains.
15/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/15/rugby-les-clubs-francais-ont-les-quarts-en-ligne-de-mire_1292098_3242.html
Les dix notes de blogs qu'il ne fallait pas rater cette semaine
Chaque vendredi, retrouvez la sélection de la rédaction parmi l'ensemble des blogs invités du Monde.fr.
Chaque vendredi, retrouvez la sélection de la rédaction parmi l'ensemble des blogs invités du Monde.fr : Les alertes des géologues haïtiens "En 1751 et en 1771, cette ville a été complètement détruite par un séisme et je parie mes yeux que cela se reproduira", confiait le géologue Patrick Charles, 67 ans, ancien professeur à l'Institut de géologie appliquée de La Havane. A lire sur le blog "En 1751 et en 1771, cette ville a été complètement détruite par un séisme et je parie mes yeux que cela se reproduira", confiait le géologue Patrick Charles, 67 ans, ancien professeur à l'Institut de géologie appliquée de La Havane.A lire sur le blog Veilleur de jour Un bilan humain difficile à établir Le 12 janvier 2010, un violent tremblement de terre de 7,3 sur l'échelle de Richter a frappé Haïti, transformant des quartiers entiers en cimetières à ciel ouvert. A lire sur le blog Haïti, après le séisme "Le deuil national a été vraiment respecté au Togo" Patrick Agbefle, animateur sur la radio Planète Plus, à Kpalimé, au Togo, nous livre son point de vue sur l'attaque meurtrière qui a frappé les Eperviers. A lire sur le blog La CAN 2010 en VO Banques : Obama a décidé d'en découdre Les banques américaines ont commencé à étudier tous les moyens possibles et imaginables de ne pas payer cette "commission de responsabilité de la crise", qui n’est qu’un remboursement des pertes de l'Etat fédéral depuis ses interventions de sauvetage. A lire sur le blog Démystifier la finance Votre poubelle peut rapporter gros Comment inciter le bon citoyen à trier ses déchets ? En France, on compte sur des leçons de civisme et de bonne conscience. Aux Etats-Unis, c’est à d’autres instincts que l’on fait appel, mais ça marche ! A lire sur le blog Bonne nouvelle Bien gérer l'après-réveillon Une petite soupe légère après les fêtes, rien de tel. Et vous pouvez la faire tous les jours si ça vous chante, votre mine n’en sera que meilleure, paraît-il. A lire sur le blog A boire et à manger Les risques liés aux scanners corporels En dehors de leur utilité (et de leur coût), l'installation de ces engins pose deux questions fondamentales qui touchent à leur innocuité et à la confidentialité des données. A lire sur le blog Police et cetera Doisneau à découvrir Un témoignage social, mais aussi architectural où les barres d’immeubles des années 50 se confrontent à la zone et au pavillon en meulière, où la modernité se heurte à la misère et à l’intemporel. A lire sur le blog Amateur d'art Supplique d'un éditeur aux libraires Les éditions Terre humaine continuent à être reléguées par les libraires au rayon des sciences sociales, lequel voit ses ventes s’affaisser dangereusement, sa visibilité disparaître. A lire sur le blog La république des livres Nouvelle année, nouvelle Aubry ? La Martine Aubry version 2010 n’est plus tout à fait la même. La dame a pris de l’assurance. Le contexte politique, qui lui est doublement favorable, lui permet d’exercer un certain ascendant sans craindre d’être contredite. A lire sur le blog Puzzle socialiste
15/01/2010
a-la-une
https://www.lemonde.fr/a-la-une/article/2010/01/15/les-dix-notes-qu-il-ne-fallait-pas-rater-cette-semaine_1291961_3208.html
Le coup d'éclat de Vincent Peillon embarrasse le PS
Si Martine Aubry soutient Vincent Peillon, d'autres responsables du PS comme Pierre Moscovici désapprouvent son "coup d'éclat".
Martine Aubry a soutenu vendredi le coup d'éclat de Vincent Peillon, qui a fait faux bond la veille à France 2 lors d'un débat sur l'identité nationale, mais, en coulisses, des ténors socialistes, embarrassés, critiquaient l'eurodéputé, qui a décidé seul et engagé tout le parti. "Il m'a prévenu de sa décision et je la soutiens pleinement", a déclaré la première secrétaire à Lille, au lendemain de la chaise laissée vide par M. Peillon lors de l'émission "A vous de juger" opposant le ministre de l'immigration Eric Besson et Marine Le Pen (FN). La patronne du PS ne demande cependant pas le départ d'Arlette Chabot, estimant que l'eurodéputé l'a réclamée sous "le coup de la colère". Une déclaration qui n'a pas suffi à France Télévisions, dont le PDG Patrick de Carolis a demandé publiquement vendredi à Mme Aubry si elle "cautionne" la demande de démission formulée par l'eurodéputé. MOSCOVICI DÉSAPPROUVE PEILLON Le PS a mis du temps à défendre M. Peillon. Un communiqué publié jeudi à 22 h 50 se contentait d'attaquer Eric Besson, sans mentionner l'incident. Un premier soutien est venu vendredi du sénateur David Assouline, pour qui le geste de M. Peillon est "tout à son honneur". Mais, explique un haut responsable du parti, c'est une affaire "entre Peillon et France 2", "le PS ne peut pas y être associé". L'ex-socialiste Jean-Luc Mélenchon (PG) estime qu'il "n'est jamais trop tard pour refuser de se laisser prendre dans un guet-apens", qualifiant l'émission de "télé-poubelle". Dans l'entourage d'un ténor du parti, on dénonce la "méthode extrêmement contestable" de Vincent Peillon, qui "engage un collectif sans se concerter au préalable avec lui". Selon ce même responsable, il aurait été préférable de venir à France 2 exprimer la position socialiste. Le député Pierre Moscovici désapprouve la défection de son collègue en émettant des doutes sur "la politique de la chaise vide" et le "coup d'éclat", dans un entretien au Parisien-Aujourd'hui en France à paraître samedi. "Arlette Chabot n'a tout de même pas commis un crime de lèse-majesté ! Donc demander sa démission me paraît infondé", ajoute-t-il. Du côté de Ségolène Royal, on n'est pas mécontent d'épingler l'ex-lieutenant devenu adversaire. Les Français, "pleins de bons sens et d'intelligence, sauront tirer d'eux-mêmes les conclusions de cet épisode", a glissé sur le site Le Post Dominique Bertinotti, maire du IVe arrondissement de Paris, dénonçant une "posture", "une polémique d'un niveau médiocre". Alors que l'UMP a qualifié M. Peillon de "fourbe", dans l'entourage de Nicolas Sarkozy on s'indignait vendredi d'un "scandale, une pure manipulation", assurant : "L'affaire n'en restera pas là."
15/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/15/le-coup-d-eclat-de-vincent-peillon-embarrasse-le-ps_1292398_823448.html
La généralisation du téléphone mobile transforme-t-elle les comportements ?
La manière dont on utilise son téléphone mobile a longtemps été influencée par les différences culturelles, explique The Economist, mais "l’esprit des machines" n’est-il pas en train de réduire ces différences ?
La manière dont on utilise son téléphone mobile a longtemps été influencée par les différences culturelles, explique The Economist, mais "l’esprit des machines" n’est-il pas en train de réduire ces différences ? Si les technologies ont tendances à être mondiales, elles sont aussi des marqueurs de différences culturelles car les usages sont loin d’être parfaitement homogènes. C’est le cas des téléphones mobiles notamment. Tout d’abord, on ne parle pas d’eux de la même manière selon l’endroit d’où on en parle : on parle de Mobiles en Allemagne ou en Espagne pour désigner des appareils qui s’inscrivent dans l’itinérance ; on parle d’Handys, de Kännykät ou de Sho Ji, en Allemagne, Finlande et Chine pour désigner ses appareils qui tiennent dans la main, soulignant ainsi leur fonctionnalité. Les Japonais parlent de Ketaï pour désigner ces appareils qu’on peut emporter avec soi. Les Cellular américains traduisent une vision plus technologique. "Ces distinctions sont révélatrices d’objets qui, en l’espace d’une décennie, sont devenus aussi essentiels au fonctionnement de l’homme qu’une paire de chaussures." COMMENT LA CULTURE DÉTERMINE DES PRATIQUES DIFFÉRENTES ? En 10 ans, on est passé de 500 millions de mobiles à 4,6 milliards. Si dans les pays riches on trouve plus d’abonnements que d’habitants, force est de constater que plus de la moitié des habitants des pays pauvres sont désormais équipés en téléphones mobiles, donnant une toute autre configuration à la question de la fracture numérique. Le temps d’utilisation moyen est en progression : nous sommes passés de 174 minutes de télécommunication par mois en 2000 depuis nos mobiles à quelques 261 minutes en 2009, sans compter l’explosion de l’usage des SMS ou des échanges d’images ou de vidéos. Et la révolution des téléphones permettant de se connecter à l’internet et de télécharger des applications est encore appelée à bouleverser nos modes d’utilisation de ces appareils. Morgan Stanley ne vient-il pas de souligner que l’internet mobile était en train de nous faire entrer dans un nouveau cycle technologique ? Ces tendances mondiales masquent pourtant des différences régionales parfois encore assez contrastées. "La culture influe sur le mode de vie et le mode de vie influence la façon dont nous communiquons", rappelle Vittorio Colao, le patron de Vodafone. Les technologies sont "à la fois constitutives et construites par des facteurs historiques, sociaux et des contextes culturels", explique l’anthropologue Mimi Ito, auteure d’un livre sur la sous-culture mobile au Japon. Pour elle, le boom des services mobiles au Japon, lancé notamment par l’i-mode est à relier au harcèlement social que subissent les adolescents : la société japonaise laisse peu de place pour les conversations privées et l’usage du téléphone en public, même dans les transports en commun, y est très mal vu, quand il n’est pas puni par la loi. Cela explique en partie le développement de services de données mobiles, d’autant que l’écriture japonaise permet d’afficher davantage d’information sur un écran de petite taille que les langues qui utilisent l’alphabet romain. En 2009, les Japonais ne conversaient en moyenne que 133 minutes sur leur téléphone (bien moins que la moyenne mondiale et même bien moins qu’en 2002, où ils conversaient 181 minutes en moyenne). Ils compensent par une frénésie textuelle : certains opérateurs ont des moyenne de quelque 1000 SMS par mois par abonnés ! "Pas étonnant que les adolescents de Tokyo aient été appelés la "génération du pouce"." Les Allemands sont également économes : ils parlent en moyenne seulement quelque 89 minutes par mois, mais la raison en incombe surtout au prix des communications mobiles. En revanche, les Américains passent quelque 788 minutes à parler sur leurs mobiles ! Outre le biais statistique (les abonnés paient aussi pour les appels entrants), l’une des explications repose sur le fait que les conversations téléphoniques sont peu chères et qu’ils privilégient les transports individuels leur permettant de s’affranchir des règles sociales. Le record est détenu par les Portoricains (1875 minutes !) grâce à des tarifs imbattables et au fait que le pays soit un noeud du routage des appels internationaux. Les différences comportementales dans l’utilisation du mobile ont longtemps été une question de culture, explique la sociologue Amparo Lasèn de l’université d’informatique de Madrid et du groupe de recherche CiberSomosAguas (blog) qui a comparé l’usage du mobile en Europe, montrant que Parisiens et Madrilènes se sentaient plus libres de parler dans la rue dans les années 2000 que les Londoniens. Les comportements sont différents : en Espagne, les utilisateurs désactivent massivement leur messagerie vocale, considérant qu’il est impoli de laisser un message sans réponse, même si l’appel dérange. Ces variations reflètent les différences d’utilisation traditionnelles de l’espace urbain, estime Mme Lasèn. En Chine également on laisse rarement un appel sans réponse, alors qu’en Ouzbékistan on ne répond jamais à un appel en public. On note également des différences dans les façons de porter les téléphones explique Younghee Jung, designer chez Nokia. Les t-shirts des hommes en Inde se sont dotés de poches pour accueillir de petits téléphones, alors que les femmes les portent dans des sacs colorés, plus pour les protéger et prolonger leur valeur de revente que pour être à la mode. Au Japon, on le personnalise aussi facilement qu’on en change. Les travailleurs en ont d’ailleurs souvent deux : l’un privé, l’autre pour le travail. Les managers latino-américains aussi en ont plusieurs, mais plutôt pour démontrer l’importance d’être connecté. Reste à savoir si ces différences sont en train de céder la place à une culture mondiale et globale ? Si ces différences culturelles vont persister ou au contraire si elles vont avoir tendance à s’estomper ? VERS UNE GLOBALISATION DES COMPORTEMENTS ? Cette question a suscité quelques controverses. Tout le monde n’est pas d’accord avec l’argument de Mimi Ito selon lequel la technologie est toujours socialement construite. James Katz, un professeur de communication de l’université Rutgers défend l’idée qu’il existerait un "esprit de la machine" (Apparatgeist, en allemand). "Indépendemment de la culture, quand les gens interagissent avec des technologies de communication personnelles, ils ont tendance à standardiser l’infrastructure et à graviter vers des goûts cohérents et des fonctionnalités universelles." Le professeur Amparo Lasèn constate également que les différences qu’elle observait en 2000 en Europe ont eu tendance à s’estomper (hormis le rejet de la messagerie vocale par les Espagnols). Mais il n’y a pas que l’esprit de la machine qui est en cause, modère-t-elle. "Partout en Europe, les gens font face à des vies de plus en plus complexes et ont besoin du téléphone mobile pour les gérer." Pour Mimi Ito également : la vie de plus en plus réglementée des adolescents américains tend à leur faire utiliser les communications textuelles autant que les jeunes Japonais. Et il y a de fortes chances que cette convergence des comportements se poursuive, notamment parce qu’il est de l’intérêt des industriels de trouver des réponses globales. Chez Nokia,Younghee Jung travaille notamment à un projet d’esperanto des gestes pour contrôler son mobile et trouver un geste internationalement acceptable pour rendre simplement silencieux son mobile quand il sonne. À long terme, les différences d’usages nationales vont disparaître, estime Scott Campbell, chercheur à l’université du Michigan, mais les différences économiques, elles ne vont pas s’estomper comme cela. En Afrique les temps de communication vont demeurer prépayés et la pratique du signal pour se faire rappeler devrait perdurer. Plutôt que des différences culturelles, Nokia envisage d’ailleurs de mieux distinguer ses utilisateurs selon leurs pratiques : entre ceux qui veulent de la simplicité et ceux qui souhaitent des fonctionnalités. Dans les pays pauvres, Nokia développe une gamme de services appelée "Life Tools" allant de l’information agricole à des services éducatifs… alors que dans les pays riches les combinés sont plutôt livrés avec des abonnements pour télécharger de la musique. A croire que certains ont plus à gagner que d’autre dans cette globalisation des pratiques. Comme le dit Luke Allnutt, rédacteur en chef de Radio Free Europe, dans un intéressant édito sur la révolution mobile : "Ce n’est pas la technologie par elle-même qui a le pouvoir de changer le monde (en bien ou en mal), mais plutôt l’innovation et la créativité des gens qui l’utilisent". Hubert Guillaud
15/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/15/la-generalisation-du-telephone-mobile-transforme-t-elle-les-comportements_1292385_651865.html
"La Corée du Sud accueille le premier ""Masters"" de judo de l'histoire"
La compétition réunira les 16 meilleurs judokas de chaque catégorie, ce week-end en Corée du Sud.
Sur le modèle du tennis, la Corée du Sud organise samedi 16 et dimanche 17 janvier à Suwon le premier Masters mondial de judo. Cette nouvelle compétition réunit les 16 premiers de chaque catégorie au classement mondial. Clairement inspiré des Masters de tennis, les enjeux financiers ne sont pour autant pas du même ordre. Le Masters judo offre 138 000 euros de primes, dont 4 200 euros pour chaque vainqueur. Avec seulement 16 engagés par catégorie et l'absence de repêchages, la compétition sera écourtée et mettra aux prises d'entrée de jeu les tout meilleurs, qui n'auront pas le droit à l'erreur. L'équipe de France aborde le rendez-vous coréen avec 19 judokas, 12 filles et 7 garçons. LONDRES 2012 EN LIGNE DE MIRE "Lors de la coupe Kano [en décembre], le comportement de l'équipe de France n'a pas été satisfaisant. J'attends un sursaut dans le résultat mais surtout dans le comportement au Masters", a expliqué René Rambier, qui veut voir de l'engagement dans chaque combat. "Ce Masters est un plus. Après tout repart à zéro. On part pour les Jeux de Londres [en 2012]", a-t-il prévenu. Les vedettes du judo français seront bien présentes en Corée : Teddy Riner, Morgane Ribout, championne du monde en titre des -57 kg, Lucie Décosse, vice-championne olympique en -63 kg et passée depuis en -70 kg, ou encore Gévrise Emane, championne du monde 2007 (-70 kg), qui est descendue d'une catégorie, ou Frédérique Jossinet, vice-championne olympique 2004 (-48 kg). Riner, no 1 mondial, retrouvera Oscar Bryson, le Cubain monté avec lui sur la troisième marche du podium aux JO 2008 et qu'il a battu en finale des Mondiaux 2009. En revanche, l'Ouzbek Abdullo Trangriev, no 2 mondial, n'honorera pas ce premier rendez-vous de l'histoire, tout comme certains athlètes qui n'ont pas fait le déplacement pour des raisons de coût. Les Japonais et les Sud-Coréens, à domicile, partent en grand favoris de la compétition.
15/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/15/la-coree-du-sud-accueille-le-premier-masters-de-judo-de-l-histoire_1292356_3242.html
La Russie cesse de bloquer la réforme de la Cour européenne des droits de l'homme
La Russie était le seul des 47 Etats du Conseil de l'Europe à ne pas avoir ratifié cette réforme.
Après des années de blocage, la Russie a approuvé vendredi 15 janvier la réforme de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH). Les députés de la Douma, chambre basse du Parlement, se sont prononcés par 392 voix contre 56 en faveur du protocole 14, déjà ratifié par les 46 autres Etats membres du Conseil de l'Europe. Moscou avait donné son accord en 2004, mais la Douma s'était opposée deux ans plus tard à ce texte jugé contraire aux intérêts du pays. La réforme de la CEDH vise notamment à simplifier la procédure de recevabilité pour les affaires dites "répétitives" qui restent sans réponse devant les tribunaux nationaux. Cela fait craindre à la Russie une inflation des plaintes la visant. Or, elle est déjà l'un des pays les plus sanctionnés par la Cour, notamment pour des affaires concernant la Tchétchénie. Et les requêtes ont augmenté de 20 % en 2008, principalement en raison du conflit armé avec la Géorgie. Le président de la Douma a expliqué que le pays avait obtenu satisfaction sur le fait qu'un de ses représentants serait présent au cours de l'examen de plaintes concernant la Russie. Mais le revirement apparaît surtout dû à la volonté du président Dmitri Medvedev d'imposer une vaste réforme du système judiciaire russe, et à des pressions européennes.
15/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/15/la-russie-cesse-de-bloquer-la-reforme-de-la-cour-europeenne-des-droits-de-l-homme_1292377_3214.html
Le sport américain se mobilise pour Haïti
Les principales ligues nord-américaines ont annoncé 1,1 million de dollars de dons. Lance Armstrong a, lui, promis 250 000 dollars.
Le sport professionnel américain s'organise pour venir en aide à Haïti, dévasté par un séisme mardi, et les principales ligues sportives ont annoncé plus de 1,1 million de dollars de dons. Une générosité à mettre avant tout à l'actif de la Fédération nord-américaine de baseball (MLB), prête à verser 1 million de dollars à l'Unicef en faveur des victimes du tremblement de terre qui a ravagé Haïti. "Nous espérons que ce don aidera les efforts faits pour venir au secours des victimes et nous encourageons nos fans à faire aussi un don. Nous adressons nos sincères condoléances à tous ceux qui ont été touchés par cette catastrophe naturelle inimaginable", a déclaré le commissaire de la MLB, Bud Selig. "Ce don généreux de la MLB aidera à sauver la vie des enfants haïtiens", a remercié la directrice générale du Fonds des Nations unies pour l'enfance (Unicef), Ann Veneman, ajoutant que "les Haïtiens ont besoin de nourriture, d'eau potable, d'abris et de matériel médical en urgence et les premiers jours sont cruciaux". A un moindre degré, la Ligue nationale de hockey-sur-glace (NHL) a fait un don de 100 000 dollars, également à l'Unicef. TWITTER, FACEBOOK ET ARMSTRONG... Des sportifs américano-haïtiens avaient fait part mercredi de leurs grandes inquiétudes et de leur désarroi après la catastrophe, confiant leur difficulté à joindre leurs proches sur place. "J'imagine facilement ce que les gens traversent, ça me tue… C'est inimaginable. Je vois tous ces gens à l'intérieur et les bâtiments qui s'écroulent…", avait notamment déclaré Samuel Dalembert, pivot de la franchise NBA des Philadelphia Sixers. Pierre Garçon, receveur de l'équipe de football américain des Indianapolis Colts, qui jouera samedi le premier match de play-off de sa prometteuse carrière, n'avait, lui, pas hésité à sensibiliser ses fans sur les réseaux sociaux Facebook et Twitter, leur demandant de venir en aide aux sinistrés. Le cycliste américain Lance Armstrong n'est pas en reste, puisqu'il a de son côté annoncé un don de 250 000 dollars, via sa fondation Livestrong, à plusieurs fondations, dont celle de l'ancien président Bill Clinton.
15/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/15/le-sport-americain-se-mobilise-pour-haiti_1292360_3242.html
L'industrie du disque américaine accusée d'entente illégale
Cinq majors sont accusées d'avoir conclu un accord pour fixer un prix minimal de 70 cents par titre et imposer des mesures techniques de protection aux distributeurs de musique en ligne.
La plainte était en suspens depuis 2008, mais le procès aura bien lieu : BMG, Sony, Vivendi, Warner, EMI et Bertelsmann vont comparaître, à une date qui n'est pas encore fixée, pour entente illicite. Les majors sont accusées par un groupe d'Américains, réunis dans une procédure de class action (action de groupe), d'avoir conclu un accord secret et illégal pour s'accaparer le marché de la musique en ligne. Les plaignants accusaient les maisons de disques d'avoir conclu un accord pour imposer l'utilisation de mesures techniques de protection (digital rights management systems, DRM). Elles se seraient également entendues sur l'établissement d'un prix minimal de 70 cents par titre, seuil en dessous duquel elles refuseraient de céder leurs licences à des distributeurs. Un tel accord serait une violation directe de la législation anti-monopoles américaine, le Sherman Antitrust Act. Mais si l'affaire n'a pas encore été jugée, c'est que les plaignants ne détiennent aucune preuve concrète de l'existence d'un tel accord. Leur argument principal est que seule une entente sur les prix pourrait expliquer la stabilité étonnante des tarifs dans la musique en ligne. Les majors, de leur côté, affirment que leurs politiques de prix sont uniquement tributaires de l'offre et de la demande. Dans un premier temps, le tribunal fédéral de New York avait estimé que la plainte ne reposait pas sur des éléments suffisamment solides. Mais une cour d'appel a renversé cette décision mercredi, partant du principe que les faits exposés étaient "de nature plausible".
15/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/15/l-industrie-du-disque-americaine-accusee-d-entente-illegale_1292047_651865.html
"""La Gauche après la crise"", de Guillaume Bachelay et Nicolas Mayer-Rossignol : le syndrome de Narcisse"
Guillaume Bachelay est secrétaire national du Parti socialiste à la politique industrielle et Nicolas Mayer-Rossignol, fonctionnaire européen.
La plume est acérée, les formules sont joliment ciselées, les flèches sont drôlement féroces. Réformistes mais pas sociaux-démocrates, Guillaume Bachelay, secrétaire national du Parti socialiste à la politique industrielle, jeune fabiusien pur sucre, et Nicolas Mayer-Rossignol, fonctionnaire européen, scrutent une gauche guettée par "les dangers du syndrome de Narcisse", où "tout le monde s'imagine en roi du quartier ou enreine de bal". "Narcisse est tombé dans l'eau, la gauche peut tomber dans l'urne", écrivent-ils, craignant, si l'idée socialiste continue de "s'égarer" ou de "s'abîmer", un "remake de 2002" en 2012. Pour ces trentenaires, le PS affiche, en plein "avènement de la vulgarité" avec un individu qui "jouit de sa splendeur individuelle" et face à un "président à la fois cash et kitsch", un "tout à l'ego qui est (sa) ciguë". A la faveur d'un double "glissement des plaques sociales" - le 21 avril 2002 (échec de Lionel Jospin) et le 29 mai 2005 (victoire du non au référendum européen) -, "les prolétaires ont disparu du radar de la gauche gestionnaire qui, à son tour, est sortie de leur champ de vision électoral". Ni résignés ni défaitistes, Guillaume Bachelay et Nicolas Mayer-Rossignol plaident pour "une spiritualité laïque", citant Jaurès, qui voulait que les hommes s'élèvent "à une conception religieuse de la vie par la science, la raison et la liberté". "Pour revenir au pouvoir, soulignent-ils, pour en faire bon usage et s'y maintenir, la gauche devra placer sa politique sous le signe de cette spiritualité humaniste, mélange de sympathie du coeur et d'altruisme intéressé." Ils esquissent les contours d'un "socialisme post-libéral", qui "mêle, sans les hiérarchiser, développement économique, sauvegarde de l'environnement, progrès social, innovation, recherche, diversité culturelle, démocratie". Pour rendre crédible cette "utopie réaliste", les auteurs la dotent de dix clés pour gagner en 2012, souvent innovantes et parfois iconoclastes, du lancement d'un plan national ou européen de "remboursement de la dette par des revenus verts" à la semaine de 32 heures, en passant par la suppression des grandes écoles, le droit de vote à 16 ans et, en 2050, l'avènement d'un "gouvernement mondial". Partisans d'une VIe République, ils rêvent d'une démocratie de "bonne vie" où "tout avant-projet de loi sans caractère d'urgence" serait soumis à "une consultation publique d'au moins deux mois". Une démocratie participative ? LA GAUCHE APRÈS LA CRISE de Guillaume Bachelay et Nicolas Mayer-Rossignol. Jean-Claude Gawsewitch. 254 p., 17,90 €. Michel Noblecourt
15/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/15/la-gauche-apres-la-crise-de-guillaume-bachelay-et-nicolas-mayer-rossignol_1292202_3260.html