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Baisse du prix de la publicité lors du Super Bowl
Le prix d'un spot de publicité à la télévision lors de la finale du championnat de football américain aux Etats-Unis est en baisse pour la deuxième fois de l'Histoire.
Le prix d'un spot de publicité à la télévision lors du Super Bowl, la finale du championnat de football américain aux Etats-Unis, est en baisse pour seulement la deuxième fois de l'Histoire, selon des chiffres communiqués, lundi 11 janvier, par l'agence TNS Media Intelligence. Une publicité de 30 secondes se vend entre 2,5 et 2,8 millions de dollars (entre 1,72 et 1,93 million d'euros), d'après des chiffres provisoires, alors qu'elle se vendait en moyenne 3 millions de dollars (2,06 millions d'euros) l'an passé, une somme record dans l'histoire de l'épreuve. Le prix moyen pourrait toutefois augmenter à l'approche du match car quatre espaces restent à vendre (sur soixante-deux), et le diffuseur CBS pourrait en profiter pour les négocier à la hausse avec des acheteurs de dernière minute. Le fabricant de sodas Pepsi, qui était présent sur les écrans du Super Bowl tous les ans depuis 1987 et avait été l'un des annonceurs les plus dépensiers en 2009, a décidé de faire l'impasse cette année en raison de la crise. UNE COMPÉTITION DANS LA COMPÉTITION Le Super Bowl, qui aura lieu le 7 février à Miami, est la première vitrine mondiale de la publicité. L'an passé, la rencontre avait attiré 98,7 millions de téléspectateurs, et les revenus publicitaires tirés de sa diffusion à la télévision par la chaîne NBC avaient été de 213 millions de dollars (146,8 millions d'euros). Le Super Bowl est, chaque année aux Etats-Unis, l'occasion pour les publicitaires de présenter des productions de niveau cinématographique, dont l'exclusivité est réservée à cette soirée à l'audience exceptionnelle. Depuis 1984, la compétition sportive se double d'une compétition publicitaire officieuse, surnommée "Super Bowl Commercials", arbitrée par les chiffres d'audience. La plus célèbre de ces publicité est certainement ce film pour le lancement du 128K, le premier ordinateur Macintosh d'Apple, réalisé par Ridley Scott et parodiant 1984 de George Orwell, qui rassembla plus de téléspectateurs que le match. Depuis, de nombreux concours des publicités du Super Bowl s'affrontent, parmi lesquels le concours lancé par la plate-forme d'hébergement de vidéos YouTube ou le classement des internautes publié chaque année par USA Today, appelé le Super Bowl Ad Meter.
12/01/2010
actualite-medias
https://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/01/12/baisse-du-prix-de-la-publicite-lors-du-super-bowl_1290409_3236.html
Pour Alastair Campbell, Tony Blair voulait une solution diplomatique en Irak
L'ancien conseiller en communication de Tony Blair est la première personnalité de poids à être interrogée par la commission menée par John Chilcot sur l'engagement britannique dans la guerre en Irak.
Alastair Campbell, qui fut conseiller en communication de Tony Blair, a témoigné, mardi 12 janvier, devant la commission d'enquête sur l'engagement britannique dans la guerre en Irak. Il est la première personnalité de poids à être interrogée par la commission menée par John Chilcot, un ancien haut fonctionnaire, sur les conditions d'entrée en guerre de la Grande-Bretagne. Il a notamment affirmé que l'ex-premier ministre avait souhaité jusqu'au bout que la diplomatie l'emporte. "Tony Blair a pensé, jusqu'au [vote sur la participation du Royaume-Uni à une action militaire à la Chambre des] Communes, que cela pourrait être résolu pacifiquement", a déclaré M. Campbell, ancien "spin doctor" controversé de Tony Blair. "IL N'A PAS AGI EN FONCTION DE CE QUE BUSH SOUHAITAIT" Selon lui, Tony Blair ne s'est pas engagé auprès du président George W. Bush à contribuer à une intervention militaire, lors de la rencontre des deux hommes à Crawford (Texas) en avril 2002, contrairement aux nombreux témoignages dans ce sens devant la commission d'enquête. "Son instinct était que nous devrions être aux côtés des Américains. Est-ce que cela signifie que vous bâtissez votre politique pour correspondre à la leur ? Non", a souligné M. Campbell. J'essaie de vous expliquer que le contexte n'était pas un George Bush disant à Tony Blair : 'Allez, viens Tony, faisons la guerre.' Ce n'était pas du tout comme ça." Selon lui, M. Blair a considéré avec le temps que, si Saddam Hussein refusait de détruire ses armes de destruction massive, un face à face était inévitable. "Il n'a pas agi en fonction de ce que George Bush souhaitait. C'était sa véritable conviction qu'il fallait affronter l'Irak à cause de son attitude continuelle de défi envers les Nations unies." Tony Blair, le premier ministre qui a engagé la Grande-Bretagne dans la guerre en Irak aux côtés des Etats-Unis, devrait témoigner fin janvier ou début février. L'ancien ministre Geoff Hoon, qui avait le portefeuille de la défense au moment de l'invasion en 2003, devrait témoigner le 19 janvier, tandis que l'ex-ministre des affaires étrangères Jack Straw devrait s'exprimer deux jours plus tard. La commission Chilcot, qui a commencé ses audiences publiques fin novembre, rendra son rapport final fin 2010 au plus tôt.
12/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/12/l-heure-de-verite-pour-alastair-campbell_1290407_3214.html
67% des Français n'ont plus confiance dans la politique
Les résultats du premier baromètre du Cevipof signent le retour de l'Etat régalien. Hôpitaux, école, armée, police figurent parmi les institutions ou organisations en lesquelles les Français disent avoir le plus confiance.
La "parenthèse" de l'élection présidentielle de 2007 est bel et bien refermée. L'engouement suscité par les campagnes de Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal et François Bayrou, ainsi que le fort taux de participation, qui avait été enregistré lors de ce scrutin, avaient été interprétés comme le signe d'une réconciliation entre les Français et la politique. Las ! La première édition du baromètre de la confiance politique, lancé par le Centre de recherche politique de Science Po (Cevipof) – en partenariat avec l'agence Edelman et l'Institut Pierre-Mendès-France –, confirme qu'il ne s'est agi que d'un feu de paille. Selon cette enquête, réalisée par la Sofres du 9 au 19 décembre 2009 auprès d'un échantillon de 1 500 personnes, et dont les résultats ont été rendus publics lundi 11 janvier, les deux tiers des Français (67 %) n'ont désormais confiance "ni dans la droite ni dans la gauche pour gouverner le pays"; un niveau comparable à ce qui était mesuré en 2006, un an avant le scrutin présidentiel. On mesure mieux encore l'ampleur du désenchantement en observant les réponses apportées à la question suivante : "A votre avis, est-ce que les responsables politiques, en général, se préoccupent beaucoup, assez, peu ou pas du tout de ce que pensent les gens comme vous ?" 78 % des sondés ont répondu par la négative (44 % "peu", 34 % "pas du tout") contre 22 % (2 % "beaucoup", 20 % "assez"). La confiance qui, comme l'a rappelé le directeur du Cevipof, Pascal Perrineau, était "un enjeu essentiel de la présidentielle de 2007", est donc de nouveau en lambeaux. Avec ce paradoxe : l'actuelle majorité suscite sensiblement moins de défiance dans son camp que l'opposition dans le sien. La gauche ne recueille "la confiance pour gouverner" que d'un de ses électeurs sur trois (49 % des électeurs du PS), alors que la droite a la confiance de 51 % des électeurs qui s'en disent proches (66 % des électeurs de l'UMP). "JEU DE MASSACRE" Dans ce "jeu de massacre", selon l'expression de M. Perrineau, les institutions locales sont les seules à tirer leur épingle du jeu. Conseils municipal, général et régional conservent la confiance des deux tiers des Français, alors qu'une proportion identique exprime de la défiance vis-à-vis de l'institution présidentielle et du gouvernement. On note que François Fillon est la seule personnalité politique à inspirer sensiblement plus de confiance (40 %) que la fonction qu'il occupe (31 % pour le gouvernement). Seule consolation : cette nouvelle illustration de la crise de la démocratie représentative montre des rouages grippés et des outils en panne, sans que – pour l'instant ? – le modèle soit remis en cause : une courte majorité des personnes interrogées (51 %) estiment, en effet, qu'en France, la démocratie fonctionne bien, contre 49 % qui pensent le contraire. La première vague de ce baromètre de la confiance, réalisée alors que les effets de la crise sont loin de s'être estompés, signe le retour de l'Etat régalien et/ou providence. Les hôpitaux (86 %), l'école (83 %), l'armée (75 %), la police (71 %) et – dans une moindre mesure – les grandes entreprises publiques, ainsi que la justice (60 %), figurent parmi les institutions ou organisations en lesquelles les Français ont le plus confiance. Dans la seconde moitié du tableau, les syndicats (47 %) devancent les grandes entreprises privées (43 %) et les banques (37 %). En queue de peloton de la confiance viennent… les médias (27 %), qui sont à peine mieux considérés que les partis politiques (23 %). Jean-Baptiste de Montvalon
12/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/12/67-des-francais-n-ont-plus-confiance-dans-la-politique_1290401_823448.html
CAN : le Togo disqualifié, une nouvelle revendication de l'attaque
Thomas Dossevi, milieu de terrain du Togo, a qualifié la décision de la Confédéraion africaine de football de "grave et ridicule".
Le Togo a été officiellement disqualifié de la Coupe d'Afrique des nations, lundi 11 janvier, n'ayant pas présenté de joueurs pour le match l'opposant au Ghana. De fait, l'équipe togolaise, victime d'une attaque dans l'enclave angolaise de Cabinda qui a coûté la vie à deux personnes vendredi, était rentrée dimanche à Lomé pour respecter une période de deuil. Plusieurs joueurs et responsables togolais avaient cependant laissé entendre qu'ils souhaitaient reprendre rapidement la compétition si un aménagement du calendrier était possible. Thomas Dossevi, milieu de terrain du Togo, a qualifié la décision de la Confédéraion africaine de football (CAF) de disqualifier le Togo de "grave et ridicule". "On voulait revenir et jouer le 21, ça aurait été simple et le Ghana aurait sûrement été d'accord", a déclaré le joueur à Reuters. Le groupe B ne compte donc plus désormais que trois équipes, pour deux places à prendre pour les quarts de finale. Les deux derniers matchs permettront aux équipes de se départager : la Côte d'Ivoire affrontera le Ghana le 15 janvier, puis le Burkina Faso sera opposé au Ghana le 18. Tous les matchs prévus en Cabinda – exception faite de ceux annulés du Togo – sont maintenus, avec en particulier un quart de finale programmé le 24 janvier.
12/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/12/le-togo-officiellement-disqualifie-de-la-can_1290405_3242.html
Un universitaire iranien tué dans l'explosion d'une bombe à Téhéran
Massoud Mohammadi a été tué dans l'explosion d'une moto piégée garée devant son domicile dans le quartier de Qeytariyeh.
Un professeur de physique nucléaire, Massoud Mohammadi, a été tué dans l'explosion d'une moto piégée garée devant son domicile dans le quartier de Qeytariyeh (nord de Téhéran), a rapporté mardi la télévision d'Etat iranienne en langue anglaise Press-TV. L'universitaire était un "professeur [spécialisé] dans le domaine de l'énergie nucléaire", a confirmé le procureur général de Téhéran, Abbas Jafari Dolatabadi, cité par l'agence ISNA. Il "était en train de monter dans sa voiture lorsqu'il a été tué par l'explosion de la moto qui était garée à côté", a expliqué le procureur. "Massoud Mohammad était un professeur révolutionnaire et engagé qui est devenu martyr dans un attentat terroriste commis par des contre-révolutionnaires et les éléments de l'oppression mondiale", indique de son côté la télévision d'Etat en persan, semblant indiquer que la victime était proche du pouvoir et occupait des responsabilités politiques. "Les responsables des services de sécurité et de la police ont commencé l'enquête pour identifier les responsables" de cet attentat, a ajouté la télévision d'Etat. Le procureur général de Téhéran a dit à l'agence FARS qu'il n'y avait aucune arrestation liée à cet attentat dans l'immédiat. L'agence officielle IRNA rapporte pour sa part que le nombre de victimes de l'attentat reste indéterminé, laissant entendre qu'il pourrait y avoir d'autres morts. Cet attentat intervient dans un contexte toujours tendu en Iran, sept mois après la réélection du président Mahmoud Ahmadinejad. Le scrutin, dont les résultats ont été contestés par l'opposition, a plongé l'Iran dans une crise sans précédent depuis la révolution islamique de 1979. Huit personnes, dont un neveu de l'opposant Mir Hossein Moussavi, ont été tuées lors des derniers troubles du 27 décembre, à l'occasion de l'Achoura, temps fort du calendrier religieux chiite. Les religieux de l'aile dure du régime ont encouragé les autorités à châtier impitoyablement les dirigeants d'opposition, qui, selon eux, fomentent les tensions en Iran. Ils ont été qualifiés de "mohareb", c'est-à-dire d'"ennemis de Dieu", ce qui, en République islamique, implique la peine de mort.
12/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/12/un-universitaire-iranien-tue-dans-l-explosion-d-une-bombe-a-teheran_1290390_3218.html
Français, vous avez dû prouver à l'administration votre nationalité. Témoignez.
Plusieurs centaines d'internautes du Monde.fr ont témoigné de leurs difficultés à faire refaire une pièce d'identité.
Les personnes nées de parents nés à l'étranger – dans les anciennes colonies, naturalisés... – ou nées elles-mêmes à l'étranger de parents français ont eu le plus grand mal à "prouver" leur nationalité française. C'est incompréhensible ou un scandale !, par Geneviève D. Née à l'étranger d'un père français et d'une mère vietnamienne, et ayant une carte de nationalité française précisant ma nationalité française, je suis contrainte par l'administration d'effectuer une demande de certificat de nationalité française – demandé par la préfecture – auprès du tribunal pour renouveler mon passeport. Afin de pouvoir remplir les conditions, il faut que je justifie d'extraits de naissance de mes parents, grands-parents et arrière-grands-parents, accompagnés des actes de mariage. J'ai 46 ans et je viens d'avoir un petit garçon né en France d'un père algérien, et la démarche sera la même pour mon fils. Adoption... un vide juridique lamentable..., par Antoine R. J'ai 19 ans. Je suis né au Gabon et j'ai été adopté à 2 ans par mes parents... français... Il y a deux ans, ayant besoin de passeport, confiant, je suis allé à la mairie avec les pièces demandées. Malheureusement, mon dossier est vite revenu, car il apparaît que je suis né à l'étranger de parents étrangers. (...) De multiples allers-retours, files d'attente, délais, etc. Evidemment, rien par correspondance, rien le week-end, rien en dehors des horaires d'ouverture (de 9 heures à 12 heures pour l'antenne de Lyon)... Vive les RTT ! Pour produire le sésame, factures (EDF, etc.), actes de naissance (des deux parents et de moi-même), pièces d'identité (des deux parents et de moi-même), papiers du jugement d'adoption, et d'autres pièces dont je ne me souviens plus (et heureusement, vu le stress qu'a engendré l'affaire !). Faux et usage de faux..., par Brasil Née au Brésil, de parents français d'Algérie, j'ai souhaité récemment renouveler mon passeport. Je précise bien "renouveler". A l'employée de la mairie, qui me demande mon certificat de nationalité française, j'explique que, pour preuve de ma nationalité, je peux lui montrer mon passeport, qui est quand même, enfin je le pensais, un argument tangible. Mais non, me réplique-t-elle, car ce passeport peut-être un faux. Ah bon... Donc voilà, ça fait sept ans que, à la barbe de la police française et de toutes les douanes des pays dans lesquels j'ai voyagé, je me trimballe avec un "faux passeport". Et à part ça, la France et son administration n'ont aucun problème avec leurs "étrangers" – ce que je ne suis pas, en plus ! Un vrai scandale... Merci d'en parler. Vous avez bien dit "liberté, égalité, fraternité" ?, par Michel P. Né en Tunisie de parents français nés en Tunisie, grands-parents paternels nés en Tunisie, grands-parents maternels nés en France, tous les arrière-grands-parents nés en France, le TGI (tribunal de grand instance) de Paris m'a demandé tous les actes de naissance des hommes du côté de mon père jusqu'à mon arrière-arrière-grand-père paternel né en 1816, tous les actes de naissance des hommes du côté maternel jusqu'à mon arrière-grand-père maternel, avec, bien évidemment, tous les actes de mariage, soit au total quatorze documents. Mon frère, dans la même situation que moi mais habitant le 94, n'a eu à fournir au TGI de Créteil que la lignée maternelle, soit cinq documents. Heureusement que mon père s'était amusé à reconstituer la généalogie de la famille jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, sinon j'aurais mis plus d'un an à effectuer les recherches et à trouver les documents. Son certificat de nationalité française n'a, au passage, absolument pas intéressé ces messieurs ! Egalité ? Ou sont-ils plus intelligents à Créteil ? Il est surtout très désagréable de s'apercevoir que la nationalité n'est finalement que très provisoire (jusqu'à une nouvelle loi) et que l'on peut se retrouver apatride du jour au lendemain sans aucun recours. (...) Mes impressions : stupéfaction, humiliation, colère et consternation face à la bêtise, tant de l'administration que des politiques. Cela ne date pas de maintenant !, par David M. Au début des années 1990, après les lois Pasqua, une fonctionnaire a déjà tiqué pour le dossier de ma carte d'identité, car mon grand-père était né italien. Cela m'avait passablement énervé à l'époque et, ayant quelques notions de droit, j'ai obtenu assez vite gain de cause en rappelant que mes deux parents étaient français et que j'étais né en France. Je précise que je suis, comme dirait Coluche, un mec "normal", "blanc" ! Mais qu'en est-il des "basanés", qui ont un nom un peu exotique ou qui s'expriment avec un fort accent ? (...) Je n'ose pas imaginer la situation actuelle de ceux qui ont un patronyme et/ou un physique "exotique"... et n'ont pas le support d'un conseiller juridique pour les épauler face à des fonctionnaires qui outrepassent leurs droits. Française de seconde catégorie, par Sophie V. Voilà quinze ans que je vis sans carte d'identité, car j'ai eu, à mes deux tentatives de faire ma carte informatisée, l'extrême surprise, voire l'humiliation, de devoir prouver ma nationalité française. Je suis née en Belgique, de parents belges, et j'ai acquis la nationalité française par naturalisation comme le reste de ma proche famille, avec évidemment un décret paru au Journal officiel. Malgré cela, l'administration me demandait, à ma première tentative, de confirmer ma nationalité française devant le tribunal d'instance ! A 30 ans passés, moi qui me croyais française, voilà que j'apprends que je suis, entre parenthèses, une sorte de citoyenne de seconde catégorie. J'abandonne. Quelques années plus tard, je tente une nouvelle demande ; cette fois-ci, l'administration me demande la photocopie des cartes d'identité de mes parents, prouvant qu'ils sont français. Problème : ils sont eux aussi nés à l'étranger. J'abandonne. Je n'ai toujours pas de carte nationale d'identité et vis très bien avec un passeport qui, lui, est renouvelé sans toutes ces tracasseries. Mais je me sens toujours citoyenne de seconde zone. J'en ai pleuré de rage, par Claudine V. Née en Tunisie en 1937, de parents français nés respectivement en Algérie et en Tunisie. Aïeux français originaires d'Auvergne, d'Isère, d'Aude, d'Alsace, installés en Algérie ; j'ai dû, dans les années 1990, alors que j'avais un passé de fonctionnaire, prouver ma nationalité à la faveur du renouvellement de ma carte d'identité, malgré la présentation du livret de famille de mes parents et grands-parents maternels, j'ai très mal vécu cet incident, j'en ai pleuré de rage… Je me suis crue dans les "Douze travaux d'Astérix", par Alice M. Pour renouveler ma carte d'identité, j'ai dû faire des démarches auprès du ministère des affaires étrangères, du tribunal d'instance, du pôle national d'identité et enfin de la police municipale (sans compter les problèmes avec La Poste). Ça m'a pris plus de six mois et un certain nombre de RTT, le principal obstacle étant le certificat de nationalité française, qu'on me demandait pour la première fois. Je me suis sentie un peu humiliée, moi née française, de devoir autant me justifier (même l'historique de mes grands-parents a été vérifié), surtout en plein débat sur l'identité nationale ! Est-ce que je suis une Française de seconde zone parce que je suis née à l'étranger ? Ou bien est-ce parce que ma mère est devenue française par le mariage ? Déjà en 2007, par Yvon H. J'ai reçu en octobre 2007 un coup de téléphone du bureau de la nationalité de la préfecture de Gironde me demandant si j'étais vraiment français, depuis combien de temps, si j'avais une carte d'électeur, car j'avais fait une demande de renouvellement de passeport. Mon nom : Hadjadj. Prénom : Yvon. Né en 1942 en Algérie. De plus, ma demande concernait le remplacement d'un passeport délivré en janvier 2006 par un passeport électronique pour pouvoir effectuer un voyage en Amérique du Sud et aux Etats Unis. Je me suis alors interrogé sur les consignes reçues par les préfectures entre janvier 2006 et septembre 2007. Lorsque j'ai fait état de mes qualités d'ancien haut fonctionnaire (directeur d'école normale d'instituteurs pendant vingt-cinq ans et d'inspecteur d'académie pendant dix ans ), le ton s'est radouci. J'ai reçu dans la semaine qui a suivi mon nouveau passeport, mais, deux ans après, je demeure choqué, car j'ai pensé à tous ceux qui sont les victimes de telles démarches pour délit de drôle de nom... Mon témoignage n'a pour objet que de faire cesser de telles procédures, car des personnes qui n'osent pas parler en sont victimes. Avoir une carte d'identité française et devoir prouver sa nationalité, par Pierre P. Je suis né en Belgique, en Europe je précise, d'un père belge et d'une mère française, et cela m'oblige, à chaque démarche touchant à la nationalité, de prouver ma nationalité française, obtenue à l'âge de 7 ans à mon arrivée en France. J'ai pourtant une carte d'identité nationale et un certificat de nationalité française valable à vie. Mais l'administration me le refuse à chaque fois et me demande de faire un nouveau certificat de nationalité française (certificat de naissance des parents et des grands-parents). Je vis à chaque fois cela comme une non-reconnaissance de ma nationalité, une véritable humiliation. Je me sens citoyen de seconde zone. Pour moi, pourtant, être français signifie avoir été reconnu français et être attaché à ce pays, ses coutumes, ses valeurs. Je trouve cette situation triste, d'autant que mes enfants nés sur le territoire national devront eux-même prouver leur nationalité par la suite, car leur père sera né à l'étranger. Combat pour un renouvellement de passeport, par Michel B. J'ai dû renouveler en 2007 mon passeport arrivé à échéance. Etant né à l'étranger (Varsovie, en Pologne), j'ai dû me présenter avec un extrait d'acte de naissance. Cela n'est pas en soi contraignant, car le processus est bien huilé. Tout se fait par Internet, et l'extrait d'acte de naissance est effectivement envoyé par Nantes en quelques jours. Mais voilà, en France, certains fonctionnaires sont malicieux et zélés. Lorsque je me suis présenté à la mairie du 20e arrondissement de Paris, avec l'ensemble des pièces réputées suffisantes, on m'a réclamé une preuve de nationalité française de mon grand-père paternel, alors que mon père est né en France de parents français. Eh oui, l'identité nationale, c'est aussi l'occasion pour certains guichetiers qui s'ennuient de prendre des initiatives sympa. A quand la prise de sang des arrière-grands-parents ou l'interprétation de La Marseillaise ? et en canon s'il vous plaît ! Français mais pas trop, par Grégoire C. Né en France de parents espagnols, je me suis vu, à 64 ans, obligé de prouver ma nationalité française en 2007. Obligé de me rendre au TGI de Paris. La greffière constate sur l'écran ma naturalisation automatique à l'époque à 18 ans, mais exige que je fasse une demande d'attestation de nationalité française au ministère de la cohésion sociale de Nantes, ce que j'ai fait. Un mois plus tard, avec cette attestation, on m'a remis un certificat de nationalité française et j'ai pu alors renouveler ma carte d'identité. Je dois dire que, régulièrement, je dois me rendre au TGI, car mon nom est effacé des listes électorales (à chaque déménagement de département). Je constate que ma nationalité française n'est pas une propriété personnelle, mais est un bail précaire. Comme les Gypsy Kings, je parle espagnol, mange espagnol, ai un nom espagnol, et de ce fait ne serai jamais français au yeux de l'administration. Certificat de nationalité, par C. R. En 2009, lors du renouvellement de ma carte d'identité française, à mon grand étonnement, j'ai dû fournir le certificat de nationalité qui m'avait été délivré lorsque j'avais acquis la nationalité française, à mes 17 ans. Née en France de parents portugais, j'ai réalisé l'ensemble de mes études en France et j'y travaille. Est-il indispensable de fournir un certificat de nationalité ? Aurais-je pu voler cette nationalité française, pour que cette demande soit justifiée ? Toujours est-il que je me suis sentie sous-française... Plus européenne que française, par Emilie C. Pour le renouvellement de mon passeport français, la pièce d'identité française m'a été demandée, ainsi qu'un acte de naissance, le livret de famille et une attestation de domicile prouvant que je réside bien en France. Malgré tous ces papiers et le fait que je possède ma carte d'identité et mon ancien passeport français, l'administration m'a tout de même demandé de prouver ma nationalité en demandant un certificat ! Alors que ma mère et mes grands-parents sont français depuis X générations. Mais il faut croire que naître en Italie et avoir un père italien font naître trop de doutes quant à mon appartenance nationale... Mais je me pose une question alors : ne sommes-nous pas censés être européens ? Circuler librement et être citoyens de l'Europe ? Certainement oui, peut-être la France ne se sent-elle pas encore tout à fait européenne malgré tous ses beaux discours ! Personnellement, je me sens plus européenne que française, au moins je n'ai pas à PROUVER que j'existe en tant que telle ! Une honte !!!, par Pierre Je suis français, né à l'étranger et dont un seul des parents est français. A chaque renouvellement de passeport ou de carte d'identité, l'ensemble des documents liés à mon état civil me sont demandés. A une occasion, en 2001, j'ai même dû fournir mes livrets de scolarité pour prouver que j'avais résidé en France alors même que j'étais venu avec une carte d'identité qui avait servi pendant dix ans ! Il me paraît évident que le procédé n'a qu'un but : tester votre "attachement" à votre nationalité et souligner qu'un nom de famille "exotique" n'est pas la norme. Je suis noir, cela se voit sur mon visage ; je suis d'origine africaine, cela se lit sur mes papiers, et jamais je n'ai eu l'impression d'être un Français comme les autres ; moi, j'ai un "certificat de nationalité française" difficile à obtenir et qui prouve que je ne suis pas là par hasard mais bien par filiation. Prouver que je suis français après quinze ans d'armée, par Hacen R. Cela s'est passé lors du renouvellement de ma carte d'identité. Oh, je n'en veux pas à l'employée de la mairie, elle n'a fait que son travail, elle a appliqué les consignes... En tout cas, au vu de mon patronyme exotique, une moue, une hésitation. "– Il va falloir fournir un certificat de nationalité, vos parents sont nés à l'étranger, votre père n'a pas la nationalité française. – Mais c'est ma troisième carte d'identité, les deux précédentes ont été établies à Toulon (FN à l'époque), il n'y a jamais eu de problèmes, madame. – C'est que vous avez eu de la chance, monsieur." J'insiste pour qu'elle présente ma demande telle quelle, elle s'exécute sous des airs "rira bien qui rira le dernier". Je décide tout de même de m'adresser au tribunal pour demander un certificat de nationalité française. J'ai de la chance, j'ai tous les papiers (mon grand-père est devenu français en 1962, avec reconnaissance automatique pour ses enfants). J'ai mon certificat sans problème – merci monsieur le greffier –, ma situation est limpide : français de naissance car né en France d'au moins un parent français. Au fait, la carte d'identité m'a été délivrée par la préfecture sans problème, même pas besoin de certificat. J'oubliais, j'ai fait quinze ans d'armée, huit opérations extérieures au compteur en antenne chirurgicale, failli y passer une fois. Je suis maintenant dans l'éducation nationale, vingt ans de fonction publique en tant qu'infirmier. En fait, je n'étais peut-être pas français. Apatride, par Laetitia I. Qu'est-ce qu'un Français ? Eh bien, je l'ai appris récemment. J'ai toujours cru que j'étais française, mais je ne le suis pas. En tout cas, pas à part entière. Un Français, m'a-t-on appris à la mairie du 17e arrondissement de Paris, c'est, depuis peu, une personne née en France, d'au moins un parent né en France ! Moi, je suis née en France, j'y ai passé l'essentiel de ma vie et je n'ai jamais eu d'autre nationalité que la nationalité française. Je suis allée à l'école de la République, j'ai toujours eu une carte d'identité et un passeport français. J'ai le droit de vote et je paie mes impôts. Eh bien aujourd'hui, si je veux faire refaire ma carte d'identité, je dois prouver la nationalité française de mes parents (tous deux nés à l'étranger). Il me faut fournir, en plus de mon acte d'état civil, des documents prouvant leur naturalisation à tous deux. A moi seule, je ne puis plus prétendre à la nationalité française. Il y a de quoi être ulcéré, je trouve.
12/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/12/je-constate-que-ma-nationalite-francaise-n-est-pas-une-propriete-mais-un-bail-precaire_1290367_3224.html
Christine Lagarde attend 360 millions de la taxe sur les bonus
Dans un entretien au "Figaro", la ministre de l'économie évoque une taxe qui devrait concerner environ 2 500 salariés du secteur financier.
La taxe sur les bonus devrait rapporter 360 millions d'euros, estime la ministre de l'économie, Christine Lagarde, dans un entretien publié, mardi 12 janvier, dans Le Figaro. "Nous escomptons une rentrée de 360 millions, dont 270 millions seront consacrés à alimenter le Fonds de garantie des dépots pour renforcer la sécurité des déposants", précise la ministre qui ajoute que "le solde, soit 90 millions, sera directement reversé au budget de l'Etat". Après avoir été transmis au Conseil d'Etat, ce texte, qui devrait être appliqué à la fin du premier trimestre, prévoit "de taxer à hauteur de 50 % tous les bonus quel que soit leur mode de distribution et quel que soit le calendrier", explique Mme Lagarde. "Cette disposition s'appliquera, comme au Royaune-Uni, aux bonus supérieurs à 27 500 euros réalisés par les opérateurs de marché payés depuis la France", précise-t-elle. "UNE SITUATION EXCEPTIONNELLE" Selon la ministre, "les banques devront payer la taxe pour environ 2 500 de leurs salariés". Interrogée sur le caractère exceptionnel de cette taxe, Mme Lagarde répond qu'elle "[s']interroge" et qu'elle jugera "sur pièces" de l'opportunité de renouveler la taxe en fonction "de la mesure et de la modération" dont feront preuve les banques. La ministre qui affirme avoir "voulu, par une taxe exceptionnelle, répondre à une situation exceptionnelle", rappelle que "sans les concours exceptionnels de l'Etat aux banques, elles n'auraient pas pu réaliser les bénéfices engrangés ces derniers mois", et qu'il lui semble donc légitime qu'une partie des bénéfices revienne aux contribuables par le biais de cette fiscalité d'exception.
12/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/12/christine-lagarde-attend-360-millions-de-la-taxe-sur-les-bonus_1290380_3234.html
Plusieurs quartiers de Bagdad bouclés dans la crainte d'attentats
Bagdad est paralysée mardi matin, aucun véhicule n'étant autorisé à circuler dans le centre de la ville.
Bagdad est paralysée, mardi 12 janvier au matin, aucun véhicule n'étant autorisé à circuler dans le centre de la ville. Les Irakiens se déplaçaient à pied aux premières heures de la matinée, un contraste avec les embouteillages qui encombrent habituellement la ville. Plusieurs hélicoptères survolaient le ciel de la capitale, des écoles ont été fermées et seul un pont au dessus du Tigre reliant le nord au sud de la ville était ouvert. Selon une source au ministère de l'intérieur, "il existe des craintes sur l'entrée de véhicules piégés et le commandement général des forces de sécurité a donné ordre de boucler toutes les entrées de la capitale". Les forces de sécurité irakiennes se sont lancées dans une vaste opération de fouille et de contrôle dans la ville. Un haut gradé irakien a confirmé à l'agence AP l'ampleur de cette opération sans en expliquer la raison. Selon AP, ce type d'opérations, devenues rares ces derniers mois, pourrait avoir un lien avec les prochaines élections législatives, qui doivent se tenir dans le pays en mars. L'agence rappelle que plusieurs mises en garde ont été lancées quant au risque accru d'attentats à mesure que les élections approchent. Affaiblis, les insurgés et le réseau Al-Qaida ont récemment changé de stratégie et décidé de viser les symboles du pouvoir plutôt que d'attaquer les communautés du pays et tenter de relancer une guerre confessionnelle. Les 19 août, 25 octobre et 8 décembre, des voitures piégées souvent conduites par des kamikazes ont attaqué les ministères des affaires étrangères, des finances, de la justice, le gouvernorat de Bagdad et un grand tribunal, tuant au moins 386 personnes et en blessant 1 500 autres. Après ces attaques, le gouvernement irakien a décidé renforcer la sécurité dans la capitale en réinstallant des dizaines de barrages à des points stratégiques et bloquant de nombreuses rues. Les hauts murs de béton anti-explosions qui avaient commencé à disparaître de Bagdad après une amélioration de la sécurité ont fait leur réapparition.
12/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/12/plusieurs-quartiers-de-bagdad-boucles_1290379_3218.html
Journal de bord d'une écoguerrière
Le 7 janvier dernier, dans le combat qu’elle mène contre la chasse illégale à la baleine, l’ONG Sea Shepherd perdait l’Ady Gil, son nouveau trimaran ultramoderne, percuté par un baleinier japonais dans les eaux glacées de l’océan Antarctique.
Lamya Essemlali est la présidente de Sea Shepherd France, la branche française de Sea Shepherd Conservation Society, l'ONG qui se bat pour la conservation des écosystèmes marins dans le monde, fondée par Paul Watson. Elle revient tout juste de la première phase de la campagne Waltzing Mathilda, la VIème campagne d’intervention directe de Sea Shepherd contre la chasse illégale à la baleine dans le sanctuaire baleinier de l’Antarctique. Quartier Maître à bord du Steve Irwin, elle a rédigé ce journal, non pas dans le but de constituer un rapport officiel de la campagne, mais plutôt de retranscrire les ressentis et les motivations personnelles d’une activiste de Sea Shepherd sur le terrain. 6 décembre 2009 Voici maintenant trois semaines que j’ai quitté Paris pour rejoindre le Steve Irwin à quai dans la ville de Fremantle, en Australie. Je ne connaissais pas le Steve, les précédentes campagnes que j’ai faites aux Galápagos et en Antarctique en 2005/06 ont été menées à bord du Farley Mowat, ce bateau que Sea Shepherd a perdu (réquisitionné illégalement par le gouvernement canadien) pendant la campagne contre le massacre des phoques en 2008. Le Farley avait une sorte d’aura, une vraie personnalité. Quelque chose qui faisait qu’on s’y sentait chez soi tout de suite. Je craignais de ne pas retrouver ça avec le Steve. Mais mes craintes ont été dissipées en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire. Quand j’arrive, Wietse, un jeune Hollandais charpentier du bateau, est à l’aéroport pour m’accueillir. En chemin vers le Steve, il me raconte les derniers événements de la vie à bord, l’inspecteur hollandais qui doit arriver dans quelques jours et dont la visite déterminera si nous garderons le pavillon des Pays-Bas ou non, l’accueil chaleureux des Australiens qui soutiennent Sea Shepherd depuis des années... Nous arrivons et il est là. Bien plus grand que le Farley, mais les mêmes couleurs, tout de noir vêtu, « SEA SHEPHERD » inscrit en grosses lettres jaunes. C’est le grand frère du bon vieux Farley. Ce bateau noir est l’allié de la vie marine, c’est tout un symbole. Et déjà, je l’aime. Un stand est monté sur le quai, des volontaires vendent des tee-shirts et collectent les dons pour la campagne. Des visites du bateau sont organisées pour le public qui fait la queue pour voir le seul bateau au monde qui défend les baleines en Antarctique. J’ai droit à une visite privée, menée par James, l’un des mousses de l’équipe, un Australien très sympa. Ce bateau en jette. Au fur et à mesure de la visite, je me rends compte qu’en fait, ce n’est pas le Farley qui était spécial. C’est Sea Shepherd. Ce que je craignais de ne pas retrouver est bien là. Cet esprit « roots », activiste et authentique qui caractérise si bien notre organisation flotte dans l’air. A la fin de la visite, je me sens déjà chez moi. Beaucoup de nouvelles têtes avec qui j’aurai le temps de faire connaissance pendant ces longs mois en mer. Et un vrai plaisir de retrouver Dan et Laura (2nd mécanicien et chef cuistot) qui avaient rejoint le Farley quasiment en même temps que moi en 2005. J’avais oublié à quel point Laura est bonne cuisinière. Ses plats vegan (végétaliens) sont un vrai bonheur pour les papilles. Enormément de nourriture a été généreusement donné par les Australiens pour l’équipage, des cartons entiers arrivent quasiment tous les jours. Dans la ville de Fremantle, les magasins et les cafés font la promotion de Sea Shepherd et offrent des remises aux membres de l’équipe. La mairie de la ville a même fait flotter le drapeau du Jolly Roger (le logo pirate) de Sea Shepherd en signe de soutien. Je me prends à espérer qu’un jour en France on verra une telle ferveur quand les bateaux seront à quai sur nos côtes. Ce qui est d’ailleurs prévu pour le printemps prochain : Sea Shepherd débarque en Méditerranée et ça risque de faire du bruit! Le Japon exerce toutes les pressions politiques possibles sur les Pays-Bas pour qu’ils nous retirent leur pavillon. L’inspecteur hollandais est venu, il est resté trois jours. Il fait son boulot mais on sent qu’il nous aime bien... nous garderons le pavillon hollandais... pour l’instant. Ça me fait penser à ce que racontait Paul : quand la police australienne est venue inspecter le bateau au retour de la dernière campagne antarctique parce que les braconniers japonais l’avaient exigé, l’inspecteur chargé d’enquêter avait en guise de fond d’écran de téléphone portable... notre logo ! « Mon boulot et mes opinions personnelles sont deux choses très différentes » avait-t-il dit. A bord, tout le monde travaille d’arrache-pied. Le départ est pour demain et nous sommes prêts. L’équipe télé d’Animal Planet est arrivée il y a quelques jours. Comme les deux années précédentes, ils filmeront les événements pour retranscrire, sous forme de série de plusieurs épisodes, le déroulement de la campagne, les confrontations, les réussites et les échecs. Tout y passe. La série Whale Wars (Justiciers des Mers en français) qui relate les campagnes de Sea Shepherd en Antarctique est le plus gros carton de la chaîne à ce jour. Elle a aussi permis à Sea Shepherd de gagner en notoriété et d’augmenter ainsi nos moyens d’action. Pour ce que j’ai vu des épisodes, il y a pas mal de mise en scène, grosse production oblige ! mais aucune action n’est entreprise « pour le show ». Disons plutôt que le show se nourrit de la réalité. Et pour avoir fait une campagne sans la présence de télés, à une époque où Sea Shepherd était beaucoup moins connu, je peux affirmer que le principe est exactement le même. Une campagne Sea Shepherd, c’est néanmoins du pain béni pour les médias : la méthode est sensationnelle, l’engagement, authentique et la cause, juste. Les médias sont les bienvenus à bord car toutes ces actions auraient beaucoup moins d’impact si elles n’étaient pas vues par des millions de personnes. « Ce qui n’est pas filmé n’est pas arrivé », dit-on. Si l’on parvient à faire parler de pêche illégale et de chasse à la baleine au Journal de 20h00, alors on est sur la bonne voie. Les baleiniers illégaux comptaient sur l’isolement géographique de l’Antarctique pour massacrer – en toute impunité et en plein sanctuaire baleinier – des baleines pourtant légalement protégées par un moratoire international et inscrites à la liste des espèces en voie de disparition. Une loi ne reste que quelques lignes écrites sur un bout de papier si aucun moyen n’est investi pour la faire appliquer. Les gens respecteraient-ils les limitations de vitesses s’il n’y avait aucun contrôle, aucune enquête et aucune sanction prévus pour les contrevenants ? Il y a fort à parier que non. Sea Shepherd a annoncé l’année dernière que nous renoncerions à nous rendre en Antarctique si le gouvernement australien acceptait ne serait-ce que de porter plainte contre le Japon devant un tribunal international pour chasse illégale à la baleine en territoire Antarctique australien. Mais à ce jour aucune plainte n’a jamais été déposée... Les lois de protection de la nature et des espèces ne devraient pas simplement servir à donner l’illusion aux gens que l’on protège efficacement ce qui doit l’être. Elles ne devraient pas servir à nous donner bonne conscience. A l’heure actuelle, nous disposons de toutes les lois et de tous les traités nécessaires pour protéger efficacement les océans. A lire ces bouts de papier, on a vraiment l’impression que l’humanité a compris les enjeux et agit de manière responsable. C’est à se demander, même, si les braconniers et les pêcheurs illégaux savent lire. En fait, ils savent surtout lire entre les lignes. Ils savent qu’il y a un monde entre ce qu’ils n’ont pas le droit de faire et ce qu’ils peuvent faire. Ils savent qu’ils ne seront pas punis. Et le comble, c’est que ces eaux où les baleines périssent chaque année d’une mort atroce ont été baptisées « sanctuaire ». C’est parce que Sea Shepherd ne se résout pas à cet état de fait que nous retournons chaque année dans ce lieu qui n’a de sanctuaire que le nom – pour que les baleines ne soient pas seules face à leurs bourreaux. Porté par un soutien grandissant, Sea Shepherd est un allié de plus en plus efficace pour les baleines. Chaque année, nous nous rapprochons du but : faire de ce sanctuaire une réalité. Demain matin, 7 décembre à 10h00, nous mettons les voiles vers le sud, cap sur la Mer de Ross. Après une longue migration, les baleines sont arrivées dans leur «sanctuaire». La flotte des braconniers est déjà en route. Retrouvez la suite du Journal de bord d'une écoguerrière la semaine prochaine... Lamya Essemlali
12/01/2010
voyage
https://www.lemonde.fr/voyage/article/2010/01/12/journal-de-bord-d-rsquo-une-ecoguerriere_1339768_3546.html
Ligue 1 : Monaco corrige Montpellier (4-0)
Monaco a humilié Montpellier (4-0) mercredi soir au Stade Louis-II lors d'un match en retard de la 15e journée du Championnat de Ligue 1, ce qui lui permet de remonter à la hauteur de Lyon avec 30 points et d'espérer jouer les trouble-fêtes dans le haut du tableau.
Monaco a humilié Montpellier (4-0) mercredi soir au Stade Louis-II lors d'un match en retard de la 15e journée du Championnat de Ligue 1, ce qui lui permet de remonter à la hauteur de Lyon avec 30 points et d'espérer jouer les trouble-fêtes dans le haut du tableau. Pour Montpellier, dont le jeu s'est progressivement délité et qui a, de plus, vu l'exclusion de Belhanda (72e minute) et de son entraîneur Girard (77e), ce déplacement en Principauté a été un calvaire. Si Montpellier, ambitieux dans son jeu, débutait mieux la rencontre que Monaco, les hommes de la Principauté prenaient rapidement l'avantage. Dangereux sur coups de pied arrêtés, les Monégasques se créaient une première opportunité par Park qui contrôlait, pivotait, mais perdait son duel avec Jourdren (11e). Nenê tirait directement le corner dans les buts adverses et obligeait Jourdren à se détendre (11e). Sur le corner suivant, Puygrenier devançait Spahic au duel et ouvrait la marque (1-0, 11e). Dès lors, Monaco restait sur ses gardes, laissant le monopole du ballon à son adversaire. Aït Fana frappait à côté (15e). Puis, sur un centre de Yanga-Mbiwa, une bonne reprise de Marveaux était détournée en corner par Perez (29e). Enfin, à la suite d'un une-deux avec Camara, Marveaux ne cadrait pas (34e). Montpellier avait laissé passer sa chance. Car Monaco restait dangereux. Une tentative de Nenê de 25 mètres, à la suite d'un rapide coup-franc, voyait Jourdren détourner sur le haut de sa transversale (32e). A la reprise, Monaco faisait le break, une fois encore à la suite d'un coup-franc. La tentative de Nenê était repoussée par Spahic. Le jeune Haruna effectuait une belle reprise sans contrôle du gauche hors-surface et marquait son premier but en L1 (2-0, 55e). Monaco gérait aisément la partie. Et sur un contre, Alonso servait idéalement Park, dont la reprise était détournée par Jourdren. Le Coréen, plus prompt à se relever, servait Haruna, qui, dans le but vide, scellait une victoire monégasque (3-0, 66) embellie par un dernier but de Perez (4-0, 87e). Après un énième corner, l'Uruguayen tentait sa chance de 22 mètres et son tir dévié par El Kaoutari trompait Jourdren. Dans le petit stade de la Libération, Boulogne-sur-Mer n'a pas profité de la mise à jour de son calendrier - le match contre Sochaux avait été annulé à cause de la neige mi-décembre (18e j.) - pour entretenir ses rêves de maintien. En concédant un nul (0-0) contre les Lionceaux, l'US Boulogne Côte-d'Opale est toujours avant-dernière, à désormais 2 points du Mans (17e) et de Saint-Etienne (18e).
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/ligue-1-monaco-corrige-montpellier-4-0_1291401_3242.html
Régionales en Ile-de-France : Pécresse en tête au premier tour, selon l'IFOP
Valérie Pécresse, chef de file de l'UMP, est créditée de 32 % des voix, la liste PS de Jean-Paul Huchon de 24 % et celle des Verts-Europe Ecologie conduite par Cécile Duflot de 17 %.
Valérie Pécresse, chef de file de l'UMP en Ile-de-France, arriverait en tête au premier tour des régionales, le 14 mars, avec 32 % des voix. Mais le total des voix de gauche au premier tour dépasserait nettement celui de la droite, selon un sondage IFOP pour Valeurs actuelles rendu public mercredi. La liste PS de Jean-Paul Huchon, qui brigue un troisième mandat à la tête de la région, obtiendrait 24 % au premier tour, devançant de sept points la liste Verts-Europe Ecologie conduite par Cécile Duflot, créditée de 17 %. L'IFOP n'a pas fait de scénario de second tour. Dans une enquête précédente, réalisée du 8 au 10 décembre, l'institut de sondage créditait l'UMP de 34 % au premier tour, le PS de 23 % et les Verts de 16 %. La liste du Front de gauche, conduite par Pierre Laurent et soutenue par le Parti communiste et le Parti de gauche de Jean-Luc Mélenchon, obtiendrait 6 %, et le NPA d'Olivier Besancenot 4%. La liste de l'Alliance écologiste indépendante de Jean-Marc Governatori est créditée de de 1,5 % et celle du MoDem d'Alain Dolium de 5 %. A droite, la liste Front national de Marie-Christine Arnautu obtiendrait 8 %, soit 1,5 point de plus que dans l'enquête réalisée par l'IFOP en décembre ; et la liste Debout la République de Nicolas Dupont-Aignan obtiendrait 2,5 %. 16 % des sondés ne se prononcent pas.
13/01/2010
elections-regionales
https://www.lemonde.fr/elections-regionales/article/2010/01/13/regionales-en-ile-de-france-pecresse-en-tete-au-premier-tour-selon-l-ifop_1291400_1293905.html
"Saccage d'une sous-préfecture : de la prison avec sursis requise contre six ""Conti"""
Des peines de deux à cinq mois de prison avec sursis, quasi équivalentes à celles prononcées en première instance, ont été requises en appel contre six ouvriers de Continental.
Des peines de deux à cinq mois de prison avec sursis, quasi équivalentes à celles prononcées en première instance, ont été requises mercredi en appel contre six ouvriers de Continental poursuivis pour le saccage de la sous-préfecture de Compiègne (Oise) en avril 2009. "Je vous demande un verdict d'indulgence", de "compréhension", a déclaré l'avocat général Pierre Avignon, en soulignant qu'une relaxe, réclamée de toutes parts par les soutiens des prévenus, "serait la porte ouverte à l'impunité". L'arrêt de la cour d'appel d'Amiens devait être mis en délibéré à une date ultérieure. Le 21 avril dernier, quelque deux cents ouvriers de l'usine de Clairoix, dont la fermeture avait été annoncée le 11 mars, avaient mis à sac des locaux de la sous-préfecture de Compiègne après avoir appris que la justice avait refusé d'annuler le plan social. Mercredi, de nombreux responsables politiques de gauche – Marie-George Buffet (PCF), Nathalie Arthaud (LO), Olivier Besancenot (NPA), Cécile Duflot (Verts), Benoît Hamon (PS) et Jean-Luc Mélenchon (Parti de gauche) – se sont succédé à la barre en tant que "témoins de moralité". En fin de matinée, entre 750 (selon la police) et 1 500 (selon la CGT) manifestants ont rallié la gare d'Amiens à la cour d'appel en demandant la relaxe pour les six prévenus, parmi lesquels figure le délégué CGT Xavier Mathieu, figure de la lutte des "Conti". En première instance, six ouvriers avaient été condamnés le 1er septembre par le tribunal correctionnel de Compiègne à des peines allant de trois à cinq mois de prison avec sursis, tandis qu'un septième avait été relaxé. Les six condamnés avaient fait appel.
13/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/13/saccage-d-une-sous-prefecture-de-la-prison-avec-sursis-requise-contre-six-conti_1291399_3224.html
Quel avenir pour le fournisseur d'accès à Internet Alice ?
Selon le directeur d'Iliad, l'offre à moins de 20 euros du fournisseur d'accès ne rencontre "aucune demande", mais de très nombreux foyers ne sont pas éligibles à l'offre.
C'était un peu présenté comme l'opération de la dernière chance pour Alice : le lancement, en décembre dernier, d'un abonnement "triple play" Internet, télévision et téléphonie, pour 19,99 euros par mois. Le fournisseur d'accès, propriété d'Iliad-Free, comptait sur cette offre "low-cost" pour enrayer la fuite des abonnés, estimée à 57 000 départs pour le seul dernier trimestre 2009. Mais aussi pour concurrencer Numéricable, qui venait d'annoncer le lancement d'une offre proche à moins de 20 euros. Mais le directeur général d'Iliad, Maxime Lombardini, a annoncé ce mardi que cette offre était un échec, et qu'il n'y avait "aucune demande pour ce produit". M. Lombardini n'a cependant pas précisé si l'offre d'Alice serait maintenue, ni quels étaient les chiffres d'abonnement. PROBLÈME DE DEMANDE... OU D'OFFRE ? Mais si l'abonnement à moins de 20 euros ne décolle pas, ce n'est peut-être pas en raison d'un manque de demande, mais en raison d'une absence d'offre. Les foyers éligibles à cet abonnement semblent en effet rares : les forums et sites spécialisés regorgent de témoignages de personnes ayant testé leur ligne, y compris au sein de zones entièrement dégroupées par Alice, pour découvrir qu'ils ne pouvaient s'abonner. Quels sont les critères pour souscrire à cette offre ? Alice précise qu'elle est "proposée aux nouveaux abonnés sous réserve de compatibilité technique et d'éligibilité". En pratique, le critère d'éligibilité principal semble bien être... d'habiter dans une zone éligible à l'offre concurrente de Numéricable. C'est d'ailleurs l'explication avancée par le service commercial d'Alice à plusieurs personnes s'étonnant de ne pas pouvoir souscrire cet abonnement. Plutôt que le recrutement, la finalité première de l'offre serait donc bien de concurrencer Numéricable sur son terrain. L'opérateur a en effet lancé en décembre sa propre offre à moins de 20 euros, qui combine les chaînes gratuites de la TNT, la téléphonie fixe et l'Internet haut débit. "Nous proposions déjà depuis juin une offre double play, téléphonie et Internet à 19,90 euros par mois, explique Jérôme Yomtov, secrétaire général de Numéricable. Lorsque les pouvoirs publics nous ont demandé de participer au passage au tout numérique, nous avons décidé de diffuser la TNT de manière transparente. Cela nous permet de combiner les trois services. L'offre est commercialisée depuis décembre sur notre site Internet, et nous sommes satisfaits du lancement ; en ce qui nous concerne, nous continuerons à la proposer." ARRÊTER LA FUITE DES ABONNÉS L'avenir d'Alice semble aujourd'hui incertain, ce qui provoque l'inquiétude des abonnés. "Beaucoup ont été déçus de voir que l'offre à 20 euros était réservée aux nouveaux inscrits", note Michel Gambin, administrateur de Forum-alice.info, un forum non officiel d'utilisateurs. "Et pour ces nouveaux abonnés, l'accès à la hotline devient payant : c'est dommage, parce que supprimer les points forts d'Alice n'est pas un bon moyen de conquérir de nouveaux clients." Alice avait été le premier fournisseur d'accès à Internet à proposer une hotline gratuite. Aujourd'hui, la loi Chatel interdit aux fournisseurs d'accès d'utiliser un numéro surtaxé. Free et Alice facturent toutefois ces appels 0,34 euro la minute, arguant qu'il ne s'agit pas d'une surtaxation, mais des frais liés à la fourniture du service. Une pratique dénoncée par l'UFC-Que choisir, qui a déjà porté plainte contre Free. Une harmonisation des pratiques qui préfigure une fusion entre Free et Alice ? "Chez Iliad, on continue de nous assurer que leur souhait est de garder deux entités séparées, rapporte Michel Gambin. Mais on ne voit pas comment ils vont pouvoir garder Alice si l'hémorragie d'abonnés se poursuit. Iliad se lance dans la fibre, dans la téléphonie mobile : tout cela demande des capitaux importants." Sollicité par Le Monde.fr, Alice ne nous avait pas répondu à l'heure où nous publions cet article. Damien Leloup
13/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/13/quel-avenir-pour-le-fournisseur-d-acces-a-internet-alice_1291344_651865.html
Rugby : la suspension de Julien Dupuy réduite... d'une semaine
Le demi de mêlée du Stade Français écope de 23 semaines de suspension. Sa saison est terminée.
La suspension de vingt-quatre semaines du demi de mêlée du Stade Français Julien Dupuy, pour une "fourchette" lors d'un match de Coupe d'Europe, a été réduite mercredi en appel à vingt-trois semaines, a annoncé à l'AFP le président du club parisien, Max Guazzini. Le 18 décembre, Julien Dupuy avait été suspendu en première instance pour une durée de vingt-quatre semaines (six mois) après avoir été reconnu coupable d'un "acte d'anti-jeu pour être rentré en contact dans la zone des yeux/ou dans les yeux du joueur de l'Ulster Stephen Ferris" lors d'un match de Coupe d'Europe joué le 12 décembre. Cette suspension met un terme à la saison de Julien Dupuy, tant avec son club qu'avec le XV de France.
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/rugby-la-suspension-de-julien-dupuy-reduite-d-une-semaine_1291398_3242.html
Michel Barnier plaide pour plus de régulation devant le Parlement européen
Lors de son audition au Parlement européen, le futur commissaire européen au marché intérieur et aux services financiers a promis de donner une dimension "sociale" à l'Europe.
L'Union européenne doit se doter d'une régulation financière plus pertinente et d'une surveillance plus efficace, a estimé, mercredi 13 janvier, le futur commissaire européen au marché intérieur et aux services financiers, Michel Barnier. Lors de son audition au Parlement européen, qui précède le vote d'investiture du prochain exécutif européen le 26 janvier, l'ancien ministre des affaires étrangères et de l'agriculture a par ailleurs plaidé pour un nouvel élan et pour le renforcement du marché intérieur via des projets tels que la création d'un système de brevet européen. "Aucun marché, aucun acteur, aucun produit, aucun territoire ne doit désormais échapper à une régulation pertinente et à une surveillance efficace", a-t-il déclaré. "Il faut tourner la page d'une ère d'irresponsabilité. Remettre la transparence, la responsabilité, la morale au cœur du système financier", a-t-il dit. LUTTER CONTRE LE DUMPING SOCIAL Michel Barnier a également promis de donner une dimension "sociale" à l'Europe et de lutter contre les régressions en ce domaine. "Je n'ai pas l'intention d'attacher mon nom et mon action à ce qui pourrait provoquer des régressions sociales", a-t-il assuré aux eurodéputés, précisant que cela passait entre autres par "la lutte contre le dumping social". Il a également promis de présenter "des études d'impact social" pour ses futures législations, et d'être "attentif à la préservation des services publics ou des missions de service public". Rappelant que sa feuille de route serait celle décidée lors de la réunion du G20 de Pittsburgh en septembre 2009, Michel Barnier a aussi tenu à rassurer les milieux financiers anglo-saxons qui avaient frémi en décembre à l'annonce de sa nomination par José Manuel Barroso. Une polémique avait même éclaté entre la France et la Grande-Bretagne après que Nicolas Sarkozy eut déclaré qu'il s'agissait de la victoire d'une approche "continentale" en matière de régulation. "Notre économie a durablement besoin des marchés (...). Nous rendrons notre industrie financière plus compétitive avec de bonnes règles", a-t-il dit.
13/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/13/michel-barnier-plaide-pour-plus-de-regulation-devant-le-parlement-europeen_1291390_3214.html
"Voile intégral : Sarkozy veut ""une résolution sans ambiguïté"" avant un texte de loi"
Le président appelle le Parlement à débattre d'un texte de loi "adapté à la situation", et a répété que "le voile intégral n'est pas le bienvenu en France".
Nicolas Sarkozy a déclaré mercredi, en adressant ses vœux aux parlementaires, qu'il souhaitait une résolution du Parlement "sans ambiguïté", avant un texte de loi, pour interdire le port du voile islamique intégral en France. La résolution, inscrite dans la Constitution, permet aux parlementaires de s'exprimer solennellement sur une question de leur choix. Elle a longtemps été limitée aux questions liées à l'Union européenne, avant d'être élargie à tous les sujets lors de la révision constitutionnelle de 2008. Evoquant la mission d'information parlementaire sur ce sujet, le chef de l'Etat a indiqué "souhaiter que le Parlement en tire des conclusions par une résolution sans ambiguïté parce que la réforme constitutionnelle vous en a donné le pouvoir". "Il faudra ensuite tirer les conséquences de cette résolution, d'un point de vue dispositif législatif et réglementaire. Le Parlement aura alors à débattre d'un texte de loi adapté à la situation", a-t-il ajouté, en réaffirmant que "le voile intégral n'est pas le bienvenu en France". "Prenons garde de ne pas offrir aux adversaires de la démocratie, de la dignité et de l'égalité entre les sexes l'opportunité d'une victoire qui mettrait notre société dans une situation bien difficile", a également déclaré Nicolas Sarkozy, en affirmant qu'"il est essentiel que personne ne se sente stigmatisé".
13/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/13/voile-integral-sarkozy-veut-une-resolution-sans-ambiguite-avant-un-texte-de-loi_1291389_3224.html
CAN : le Gabon dompte le Cameroun
Le Gabon a créé la suprise en infligeant, mercredi, une défaite 1-0 au Cameroun lors du premier match du groupe D de la Coupe d'Afrique des nations. La Tunisie partage les points avec la Zambie (1-1).
Le Gabon a créé la suprise en infligeant, mercredi, une défaite 1-0 au Cameroun lors du premier match du groupe D de la Coupe d'Afrique des nations. L'ancien Lensois Daniel Cousin a offert la victoire aux Panthères à la 17e minute d'un match disputé à Lubango. Aucune équipe qualifiée pour le Mondial 2010 n'a encore gagné un match dans cette CAN, le Cameroun subissant le même sort que l'Algérie et le Nigeria, battus lors de leur première rencontre, tandis que la Côte d'Ivoire a commencé par un nul. Le Gabon a pris sa revanche sur le Cameroun, qui l'avait privé en novembre dernier de la qualification pour la Coupe du monde en Afrique du Sud. Alain Giresse, sélectionneur du Gabon, a remporté pour sa part la bataille des entraîneurs français face à Paul Le Guen, chargé du Cameroun. "ETO'O DEMANDE DE RESTER TRANQUILLE" La satisfaction était bien réelle, mais mesurée du côté d'Alain Giresse, le sélectionneur du Gabon. "Tout le système a bien fonctionné: on avait décidé un cadre tactique qui nous semblait le plus adapté pour contrer le jeu des Camerounais, ça nous a souri, a expliqué l'ancien international français."Tout le système a bien fonctionné: on avait décidé un cadre tactique qui nous semblait le plus adapté pour contrer le jeu des Camerounais, ça nous a souri (en éliminatoires du Mondial 2010 ndlr)"Tout le système a bien fonctionné: on avait décidé un cadre tactique qui nous semblait le plus adapté pour contrer le jeu des Camerounais, ça nous a souri. Son homologue Paul Le Guen a pour sa part reconnu le match raté des siens. "On n'a pas été très bons, on n'a pas réussi à mettre du rythme pour contourner cette équipe, a concédé le sélectionneur du Cameroun. "Lors de notre double confrontation (en septembre) nous avions réussi à les déstabiliser. Là, on a eu des occasions, mais l'ouverture du score par les Gabonais nous a découragés. Il ne faut surtout pas se démobiliser : les deux derniers matches de la poule peuvent nous permettre de passer." L'ancien coach du PSG a ensuite précisé que "certains joueurs (camerounais) n'ont pas montré le niveau qu'ils ont affiché auparavant en club ou en sélection. Ce n'était pas de la suffisance, mais un niveau inférieur par rapport au potentiel qu'ils ont habituellement". En s'adressant aux journalistes camerounais, Samuel Eto'o a prévenu que les Lions allaient se réveiller : "Dites aux Camerounais qu'Eto'o demande de rester tranquille, car nous jouerons notre quart de finale", a lancé le joueur de l'Inter Milan. LA ZAMBIE ACCROCHE LES AIGLES DE CARTHAGE Si les "petits Zambiens" ont regardé la rencontre avant de disputer la leur face à la Tunisie, cela a dû leur donner des idées car Mulenga a également rapidement ouvert la marque (19e). Les Tunisiens, qui avaient déjà bêtement laissé filer la qualification pour le Mondial en s'inclinant étonnamment au Mozambique lors de la dernière journée des éliminatoires, ont bien réussi à égaliser grâce à un beau mouvement de Msakni conclu par Dhaouadhi (40e). Ils n'ont ensuite jamais pu passer en tête. Pire, ils auraient également pu s'incliner en fin de match, les Chipolopolos d'Hervé Renard bénéficiant de plusieurs ballons chauds. Suite au retrait du Togo du groupe B réduit donc trois équipes seulement, seul le Ghana se retrouve sans avoir encore joué son 1er match. S'il ne veut pas allonger la série des Mondialistes incapables de s'imposer, il sait ce qu'il lui reste à faire vendredi contre la Côte d'Ivoire pour un choc de costauds qui promet.
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/can-le-gabon-dompte-le-cameroun_1291394_3242.html
Coupe de la Ligue : Guingamp sort le PSG, l'OL et l'OM passent
Paris a perdu à Guingamp (1-0), alors que Lyon passent en quarts après avoir sorti Metz (3-0). Marseille s'impose à St-Etienne dans les arrêts de jeu (3-2).
L'En Avant Guingamp a réussi l'exploit de ces 8es de finale de la Coupe de la Ligue, mercredi 13 janvier, en sortant le PSG. Dans les autres matchs, Toulouse a facilement disposé de Nancy (3-0), comme Lyon de Metz (3-0) alors que Lorient s'est imposé à Bollaert contre Lens (2-1). Les Lillois ont patienté jusqu'au prolongations pour venir à bout de coriaces Rennais (3-1, ap), tandis que l'OM a attendu le retour de son buteur providentiel Mamadou Niang pour vaincre St-Etienne (3-2). Dans un match équilibré, et parfois débridé, les Marseillais ont gagné au métier contre des Verts un peu tendres, notamment sur des contres bien mal négociés en fin de match. C'est pourtant St-Etienne qui avait ouvert la marque par Sako, avant que Brandao n'égalise à bout portant. Mais entre deux équipes à la recherche de leur équilibre, les failles défensives se révélaient parfois criantes, et St-Etienne reprenait l'avantage à peine deux minutes après le but du Brésilien. Cette fois c'était l'Argentin Bergessio qui se montrait le plus prompt pour dévier un coup franc. Après la pause, Marseille imposait sa domination au milieu de terrain, et trouvait la récompense à son pressing sur une erreur défensive entre Benalouane et le gardien Coulibaly, lesquels se heurtaient pour laisser Brandao filer à l'égalisation. Après avoir raté deux énormes contres, les Verts se laissaient définitivement débordés à la 93e minute, lorsque Niang croisait parfaitement sa frappe pour offrir une qualification au forceps à un OM encore fragile. PARIS COULÉ Au contraire des Phocéens, les Parisiens n'ont pas réussi à forcer leur destin. A 10 contre 11 durant le dernier quart d'heure, Guingamp (L2) a donc tenu le choc contre un Paris-SG (1-0) malchanceux, battu sur un but contre son camp du défenseur parisien Mamadou Sakho. Vainqueurs de la Coupe de France en mai dernier, les Bretons peuvent s'enorgueillir d'un nouvel exploit dans leur antre du Roudourou, finalement apte après un épisode neigeux d'importance qui avait fait craindre un report ces deux derniers jours. Les Parisiens peuvent se mordre les doigts de n'avoir pas concrétisé leurs quelques occasions, notamment une frappe sur la barre de Giuly (70e minute) et surtout regretter l'incroyable maladresse de Sakho sur le but. Deux minutes après l'exclusion de Moustapha Diallo pour un tacle rugueux sur Jean-Eudes Maurice (76e), Gilmar se présentait seul devant le portier parisien Edel. Celui-ci réalisait un arrêt remarquable et repoussait le ballon vers Sakho, dont le dégagement totalement raté finissait sa course dans son propre but (1-0, 80e). Ce n'était finalement que la concrétisation logique d'une fébrilité défensive affichée à de nombreuses reprises côté parisien. Après un premier acte anecdotique, les joueurs d'Antoine Kombouaré avaient pourtant su hausser le rythme et leur niveau de jeu en seconde période. Mais sans afficher le même engagement que leur adversaire du jour. Les Parisiens ont en tout cas engrangé un peu de doute supplémentaire avant d'enchaîner en championnat un délicat déplacement à Lille, puis la réception de Monaco. Pour Guingamp, qui entrait en lice à ce stade de la compétition grâce à sa victoire la saison passée en Coupe de France, le calendrier reste donc chargé : pas forcément une bonne chose dans l'optique de son opération maintien en L2, mais qu'importe ! Guingamp est une équipe de Coupe et l'a une nouvelle fois prouvé.
13/01/2010
sport
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Trente ans de tergiversations sur le droit de vote des étrangers
François Mitterrand avait inclus cette réforme, pour les élections locales, dans son programme en 1981. Régulièrement ébauchée depuis, y compris parfois par la droite, elle n'a jamais abouti.
L'idée d'accorder le droit de vote aux étrangers lors des élections locales, relancée par Martine Aubry, est l'un des grands serpents de mer de la politique française. En 1981, François Mitterrand en avait fait une de ses 101 propositions. Mais une fois élu président, il s'était gardé de la mettre en œuvre. A nouveau candidat en 1988, il se contente, dans sa Lettre à tous les Français, de "déplorer" l'hostilité de l'opinion à une telle mesure. La revendication sera longtemps portée par les associations et la gauche de la gauche. En 1998, ce droit de vote est accordé aux ressortissants de l'Union européenne, en application d'une directive européenne. L'année suivante, pour la première fois, une majorité de Français (52 %) s'y déclare favorable pour tous les étrangers, toujours aux élections locales. En 2000, une proposition de loi constitutionnelle en ce sens, déposée par les Verts à l'Assemblée nationale, est adoptée par la gauche et les centristes Gilles de Robien et Jean-Louis Borloo. Mais en cette période de cohabitation, le premier ministre Lionel Jospin n'inscrit pas le texte à l'ordre du jour du Sénat, considérant qu'il n'a aucune chance de passer devant la Haute Assemblée, tenue par la droite, et arguant "d'autres priorités" à la veille des municipales. Sous la pression du PS, il mettra toutefois le sujet dans son programmeen vue de la présidentielle de 2002. La même année, le député UMP Yves Jégo recommande à Jean-Pierre Raffarin la participation des résidents extracommunautaires aux scrutins locaux. Mais le premier ministre répondra que, pour intégrer les immigrés, la naturalisation est une réponse "plus adéquate". Et une nouvelle proposition de loi constitutionnelle, cette fois déposée par les socialistes, est immédiatement rejetée par la droite. A nouveau, les associations se mobilisent. Une consultation pour ou contre le droit de vote des étrangers, sans valeur légale, est organisée dans une centaine de villes. Même chose fin 2005, avec cette fois une participation supérieure de moitié, puis en 2006, où 75 000 personnes répondent à l'appel (à plus de 91 %, les participants s'étaient prononcés pour le droit de vote des étrangers). La même année, plusieurs maires de Seine-Saint-Denis organisent de tels "référendums" dans leur commune, et les sénateurs socialistes présentent sans succès une nouvelle proposition de loi. Entre-temps, des personnalités de droite, tels Philippe Séguin, Nicolas Sarkozy et Françoise de Panafieu, se déclarent favorables à une telle réforme. Mais face aux réactions très mitigées au sein de l'UMP, son candidat renonce à en faire une de ses propositions pour la présidentielle de 2007, à la différence de Ségolène Royal. En 2008, les socialistes échouent à faire figurer le droit de vote des étrangers aux élections locales dans la réforme de la Constitution. Claire Ané
13/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/13/trente-ans-de-tergiversations-sur-le-droit-de-vote-des-etrangers_1291263_3224.html
"A Jacmel, ""on vient de retirer 35 corps des décombres"""
Alors que les secours s'organisent progressivement en Haïti, des témoignages nous sont parvenus de Port-au-Prince, mais aussi de Pétionville et de Jacmel. Tous racontent l'horreur de villes en plein chaos. Nous livrons leur récit brut.
Alors que les secours s'organisent progressivement en Haïti, des témoignages nous sont parvenus de Port-au-Prince, mais aussi de Pétionville et de Jacmel. Français ou Haïtiens, tous décrivent leur nuit, racontent l'horreur de villes en plein chaos. Nous livrons leur récit brut. Les communications téléphoniques demeurent extrêmement difficiles à établir. "Ils viennent de retirer 35 corps des décombres d'une école", Florian Delerue à Jacmel Ici aussi les dégâts sont extraordinaires, toute une partie de la ville est détruite. Ils viennent de retirer 35 corps des décombres d'une école. Beaucoup d'établissements sont tombés. La ville a retenu son souffle toute la nuit alors que les répliques et les secousses se faisaient encore sentir. Nous avons tous dormi dans la rue, avec quelques draps. La Minustah [mission des Nations unies pour la stabilisation en Haïti] a mis en place un premier campement d'urgence sur la piste du petit aéroport local. L'hôpital principal Saint-Michel est très touché. J'ai emprunté aujourd'hui la route de Port-au-Prince à moto, à la recherche de la mère d'un ami. Elle va bien, mais je suis passé dans une petite localité de Tom Gato : toutes les maisons qui longent la route sont en ruine. La chaussée ne s'est pas effondrée, mais les éboulements sont impressionnants. La route va sûrement rester coupée longtemps. Beaucoup de zones sont dans un état apocalyptique : Port-au-Prince, Gressier, Léogane et l'ouest du département du Sud-Est, dont Jacmel. "Les autorités n'ont aucuns moyens", Marie-Florcie Modestil à Jacmel Les autorités n'arrivent pas à faire le décompte des blessés et cadavres. Tous les hôtels, stations de service et résidences sont détruits à 70 %. Les malades affluent vers la base des Nations unies, alors qu'il n'y a qu'un médecin et deux infirmiers sri-lankais. Quelques médecins cubains et haïtiens s'efforcent de soigner les cas les plus graves. Ils manquent de tout : médicaments, matériel, ressources humaines. Les blessés sont accueillis dans la cour de l'hôpital, allongés à même le sol et immédiatement couverts de mouches. Leur corps endolori côtoie les cadavres des personnes moins chanceuses. Les rescapés, eux, dorment en pleine rue car les répliques sont ressenties toutes les trente minutes en moyenne. Beaucoup de gens sont encore coincés sous les décombres. Il faudrait que la communauté internationale s'active rapidement pour les sauver étant donné que les autorités haïtiennes, déjà bloquées au niveau de Port-au-Prince, n'ont aucuns moyens et qu'aucun plan de gestion des désastres n'a été établi. "Nous n'avons rien mangé depuis hier soir",Antoine Engnand, 36 ans, responsable du programme de Handicap International en Haïti, situé à Port-au-Prince Notre bureau se situe dans le quartier de Paco, en plein centre-ville. Dès que les murs ont commencé à trembler, nous nous sommes précipités dehors. Dans la rue, les maisons ont commencé à se fissurer, puis plusieurs bâtiments se sont effondrés. Des dizaines de blessés affluaient de partout dans des états plus ou moins graves. Certains se sont mis à prier, d'autres dévalisaient les magasins. Aujourd'hui, la plupart des gens cherchent à joindre leurs proches. L'heure est au décompte. Il y a d'énormes embouteillages à cause des éboulements. L'électricité n'a pas été complètement rétablie et il n'y a plus d'eau courante parce que les pompes à eau sont en rade. Je sais que des groupes de médecins essaient de s'organiser pour secourir les blessés. Plusieurs hôpitaux de la ville ont été touchés et nous attendons avec impatience l'arrivée des équipes d'urgence envoyées de France. Dans le quartier, plusieurs épiceries ont également été détruites. Nous n'avons rien mangé depuis hier soir. Avec d'autres, nous allons essayer de rejoindre la résidence de l'ambassade de France. Nous devrions y passer la nuit. Pour l'instant, les rues sont calmes. Les gens pleurent et attendent. "A Port-au-Prince, toutes les maison ont été touchées", Carel Pedre, animateur radio à Port-au-Prince Son témoignage a été publiée par Les Observateurs de France 24. "L'aéroport était noyé sous un nuage de poussière", Daniel Locoro, 67 ans, ingénieur civil à Port-au-Prince J'étais à l'aéroport quand s'est produite la première secousse. En partance pour Paris via Air Caraïbes, ma femme et moi venions d'atteindre la salle d'embarquement. Nous étions assis au fond, près du mur. Je me suis levé pour embarquer quand, tout à coup, les chaises se sont mises à bondir. Je me suis accroché au mur, mais impossible de tenir debout. La lumière s'est éteinte, et le faux plafond nous est tombé dessus. Ma femme et d'autres personnes priaient. J'ai cherché du regard un endroit où nous abriter. Il y avait cette poutre épaisse au plafond. Nous sommes restés dessous jusqu'à ce que ça se calme. Au bout d'une minute, le sol a cessé de trembler et j'ai tiré ma femme vers la sortie. Dans l'aéroport, les gens hurlaient. La foule avait pris d'assaut les portes. Nous avons à peine eu le temps de faire 20 mètres puis la seconde secousse s'est produite. C'était terrible. Au-dessus de moi, j'ai aperçu des gens qui s'écroulaient, frappés par des débris tombés des murs ou du plafond. Avec ma femme, nous avons miraculeusement réussi à sortir en courant, évitant les morceaux de béton qui pleuvaient çà et là. L'aéroport était noyé sous un nuage de poussière. Les gens pleuraient, tout le monde cherchait des parents, des proches. Les nouvelles que nous entendions grâce aux postes radio des policiers étaient terribles : le palais national en partie détruit, des dizaines de bâtiments effondrés... J'essayais de garder mon calme jusqu'à ce que je me rende compte qu'aucune voiture ne circulait dans les environs. J'ai pensé que c'était mauvais signe. Nous avons attendu quatre heures, assis devant l'aéroport, subissant toutes les deux ou trois minutes une réplique terrifiante du tremblement. Tous les vols en partance de Port-au-Prince ont été annulés. Impossible d'appeler une voiture pour qu'on vienne nous chercher. Les communications téléphoniques étaient coupées. Finalement, j'ai réussi à joindre quelqu'un. Le conducteur avait l'air paniqué. Il nous parlait de maisons effondrées, de scènes horribles, de destruction. Le long de la route que nous avons prise pour rejoindre les hauteurs de Port-au-Prince, les gens couchaient dehors à même le sol. J'ai aperçu des familles qui essayaient de déterrer leurs proches et leurs amis. Nous arrivions difficilement à avancer. Les ruines des maisons écroulées bloquaient le passage. Le sol continuait de trembler. Nous avons mis une heure pour rejoindre Pétionville. Le spectacle sur place est effroyable. Les dégâts sont terribles. Une épicerie que je fréquente est littéralement coupée en deux. Les voitures ont été écrasées par des pans de mur tombés des maisons. Les gens sont hagards. Ils traînent dans la rue. Chez moi, l'accès au garage est bloqué par les débris d'un mur. Je n'ai toujours pas de téléphone. Le jour se lève sur Port-au-Prince. D'où je suis, j'aperçois la ville couverte d'un lourd nuage de poussière. Toute ma famille est saine et sauve. Des hélicoptères survolent les environs. La journée va être dure. "Jamais une minute ne m'avait paru aussi longue", Francis Hilaire, 67 ans, expert-comptable vivant à Thomassin Nous étions chez nous en famille quand le sol s'est mis à trembler. Jamais une minute ne m'avait paru aussi longue. C'était réellement inimaginable. Comme un cyclone qui s'abat, mais sans vent, sans bruit. Dans notre quartier, les dégâts sont minimes. La maison est à une quinzaine de kilomètres du centre-ville de Port-au-Prince, dans les hauteurs de Pétionville. Nous avons ressenti plusieurs répliques, mais le bâtiment a tenu bon. Immédiatement après la première secousse, des dizaines de personnes se sont précipitées vers le terrain de football qui se trouve à côté de l'église. La plupart d'entre elles ont passé la nuit dehors, de peur d'être ensevelies en cas de réplique violente. Impossible d'avoir des nouvelles de mes amis à Port-au-Prince, toutes les lignes de téléphone étaient saturées ou coupées. Une seule station de radio haïtienne a continué à diffuser pendant la soirée et, à partir de 21 heures, nous sommes passés sur RFI. La télévision et le câble ne marchent pas. Heureusement, Internet fonctionne. J'attends toujours de pouvoir me rendre à Port-au-Prince pour en savoir plus. A l'heure où nous parlons, le jour se lève et j'aperçois les gens rassemblés sur le terrain de football qui s'éveillent et commencent à rentrer chez eux. Quelques murs sont tombés, mais les maisons tiennent toujours debout. Par contre, beaucoup de voisins qui travaillent dans la capitale ne sont pas revenus de la nuit. Nous sommes très inquiets. Propos recueillis par Elise Barthet
13/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/13/a-haiti-jamais-une-minute-n-avait-paru-si-longue_1291221_3222.html
"Julien Dray se dit victime ""d'une dénonciation calomnieuse venant de la gauche"""
Dans un chat sur Le Monde.fr, Julien Dray, député socialiste et tête de liste départemental pour les prochaînes élections régionales, se dit victime "d'une dénonciation calomnieuse" en provenance de sa propre famille politique.
X : Avez-vous l'intention de vous présenter aux primaires du PS pour la candidature à la présidentielle 2012 ? Julien Dray : Non. XM : Les militants se sont prononcés sur le non-cumul. Pourtant, comme d'autres au sein du parti, vous cumulez ? Julien Dray : Non, car le vote des militants est un vote qui interdit le cumul entre le mandat de parlementaire et la direction d'une collectivité locale (maire, président de conseil régional). Ce n'est pas mon cas. D'autre part, j'ai déjà à plusieurs reprises expliqué que pendant plus de dix ans, je n'ai pas cumulé de mandat, et que je l'avais même théorisé. Et qu'à l'usage du temps, on ne pouvait pas avoir une vision dogmatique de la question, et que pour un parlementaire comme moi, par exemple, l'idée d'être intégré à une équipe qui dirige une collectivité locale est un apport utile dans mon action. Donc, pour moi, il y a cumul et cumul. Il y a des cumuls compatibles, voire complémentaires. Jacques C : Mediapart vient de remporter hier le procès que lui ont attenté les Caisses d'épargne pour une série d'articles montrant des dysfonctionnement. Cela va-t-il vous faire changer d'avis quant aux suites judiciaires que vous vouliez donner après les quelques articles qu'ils ont publiés à votre propos ? Julien Dray : Non seulement cela ne va pas me faire changer d'avis, mais Edwy Plenel a pris la responsabilité de faire de cette affaire une affaire personnelle, réglant ainsi des comptes trente ans après. Et je n'ai pas l'habitude de me laisser impressionner par ce genre d'attitude. Mediapart a dit des choses fausses. Si je suis poli, je dis qu'il s'est trompé. L'honneur serait pour eux de le reconnaître. Mais faire admettre à Edwy Plenel qu'il s'est trompé ou qu'il a eu tort, et qu'il n'est donc pas le dépositaire de la vérité et de la pureté idéologique, est une mission quasi impossible. F. Tinville : Dans votre affaire, le rappel à la loi minimise la faute mais ne la nie pas. Ne serait-ce pas une raison pour ne pas endosser le rôle de l'offusqué ? Julien Dray : Le rappel à la loi me concernant est extrêmement circonstancié, puisqu'il concerne non pas un ensemble d'infractions, ou une attitude en général, mais simplement un fait particulier que je n'ai jamais nié et qui, s'il avait donné lieu à une poursuite, aurait donné lieu, dans le procès, vraisemblablement à un acquittement. Le fait est le suivant, et je l'assume : nous n'avons pas réuni le bureau d'une association qui gère ma circonscription et qui est financée par mes dotations budgétaires personnelles pour prendre une décision. Voilà le rappel à la loi. Et je vois bien que certains essaient d'organiser une session de rattrapage en disant : Oui, il n'a pas été vraiment blanchi, puisqu'il y a une infraction. Mais vous remarquerez que jamais ils n'évoquent la nature de l'infraction en cause. Car évidemment, elle mettrait à bas toute la suspicion qu'on essaie d'entretenir sur l'issue de cette affaire. Le but du jeu, c'est pour ces gens-là de ne pas avoir à rendre des comptes sur la campagne qu'ils ont organisée. Je prends un exemple : le rapport final du procureur reconnaît que l'ensemble de mes comptes sont équilibrés, et qu'il n'y a pas de mode de vie dispendieux de la part de Julien Dray. On est donc loin des sommes folles et des portraits décrits à l'époque. Mais c'est dur de l'admettre quand on en a fait des pages et des pages. Christophe : Bonjour Monsieur Dray, question d'un Belge avec un "œil extérieur" : que pensez-vous de la proximité entre les médias et le pouvoir en France? Julien Dray : Le problème, ce n'est pas la proximité. Le problème, c'est la qualité du travail et les moyens qui sont donnés pour que cette qualité soit effective. Trop souvent, la proximité s'explique par la facilité, par le manque de temps et parfois, par une certaine complaisance, c'est vrai. Money Penny : Ne pensez-vous pas que Nicolas Sarkozy, via le parquet, vous a épargné afin de vous laisser dans le marigot socialiste pour vous laisser régler vos comptes au sein du PS ? Julien Dray : C'est une méthode que je connais, qui est vieille comme le monde, qui porte un nom : cela s'appelle, chez les marxistes, la vision policière de l'Histoire. Bref, tout s'interprète à travers le prisme de Sherlock Holmes. Le procureur de la République ne peut pas prendre une décision comme celle que vous évoquez sans qu'immédiatement, autour de lui, à ce moment-là, des voix s'élèvent pour dénoncer une telle décision. Ce n'est pas le cas, vous l'avez remarqué. Et pour cause, parce qu'il n'y a pas matière à suspecter cela. Et c'est mal me connaître que de penser que je puisse me laisser instrumentaliser par les uns ou les autres. Quelque part, si cette affaire a eu lieu, c'est bien justement parce que pour certains, je n'étais pas maîtrisable ou domesticable. Julien B : La candidature de Jean Sarkozy à la présidence de l'EPAD ne vous a pas choqué ? Julien Dray : Je vois ce que vous insinuez. J'ai déjà dit qu'elle arrivait comme un point d'aboutissement d'une démarche présidentielle qui multipliait les nominations circonstancielles, avec un objectif : tisser une toile. A ce titre-là, elle était dérangeante. Mais je n'admets pas les procès qui ont été faits quant à la personne sur son âge ou sur ses compétences. Ce n'est pas parce qu'on n'a pas fait l'ENA ou qu'on n'a pas des diplômes bac + 6 qu'on n'est pas capable d'exercer son mandat électoral. Fabien : Si le gouvernement actuel, dans sa volonté affichée d'ouverture à gauche, vous avait proposé un poste ou confié une mission, l'auriez-vous accepté ? Julien Dray : J'ai déjà refusé deux fois un poste ministériel, donc je ne crois pas que Nicolas Sarkozy va s'entêter dans cette voie. Onaissi : Pouvez-vous dire clairement qui sont vos ennemis ? Julien Dray : Quand se forme une meute de ce genre, il n'y a pas de cabinet secret ou de chef d'orchestre. C'est d'ailleurs pour cela que j'ai employé le terme de "lapidation". Chacun prend sa pierre et y contribue. Au départ, je l'ai dit, il y a eu une dénonciation calomnieuse venant de la gauche. C'est tombé dans l'escarcelle de M. Woerth (ministre du budget) et de ses services, qui ont cru à l'histoire qu'on leur racontait et qu'ils ont contribué à écrire dans le rapport Tracfin (organisme rattaché au ministère des finances, chargé de lutter contre la corruption financière). Par la suite, se sont jointes toute une série de personnes qui se sont dit : si on peut s'en débarrasser, pourquoi pas ? Ceux qui, par exemple, n'avaient pas digéré la désignation de Ségolène Royal, ceux qui n'avaient jamais accepté mon statut de porte-parole du Parti socialiste, ou, plus loin encore – parce que visiblement on est remonté très loin –, pour régler les vieux comptes du mitterrandisme et de la fondation de SOS-Racisme. Yohann Marcet : Avez-vous eu peur de ne jamais revenir sur le devant de la scène politique ? Julien Dray : La question n'est pas la question de la peur. La question est de savoir si on a encore envie. Et la réponse à cette question, je vais la trouver chez mes électrices et mes électeurs de ma circonscription, sur le terrain, comme on dit. Ce qui m'a le plus surpris, et agréablement cette fois, c'est tous ces gens, souvent d'ailleurs inconnus de ma part, qui n'ont pas hésité, tout au long des mois qui viennent de s'écouler, à se manifester et à m'encourager. Ça, c'est le bon côté d'Internet et de Facebook. Lionel Karman : Considérez-vous la condamnation de Jean-Paul Huchon pour prise illégale d'intérêts comme un handicap dans cette élection ? Julien Dray : Non, parce que cette affaire était minable, et que ce n'est ni l'honneur ni l'honnêteté de Jean-Paul Huchon qui sont en cause. Pour moi, Jean-Paul Huchon est un bon président de région, et dans la phase qui vient, il peut être très utile pour faire de l'Ile-de-France une grande région. Yohann Marcet : Etes-vous favorable à la candidature de Dominique Strauss-Kahn pour les primaires du PS ? Julien Dray : A ce stade, je me suis astreint à être équidistant de toutes ces candidatures annoncées, car pour moi, la question la plus importante pour la gauche française, c'est d'abord de retrouver une démarche idéologique et programmatique. C'est, avouons-le, ce qui nous a en partie fait défaut en 2007, et je ne parle pas de 2002. Miss : Pensez-vous que Ségolène Royal pourrait créer son propre parti pour contourner la difficulté des primaires socialistes en 2012 ? Julien Dray : S'il n'y a pas des primaires honnêtes, transparentes et dépassant le cadre limité de quelques milliers de sympathisants socialistes, Ségolène Royal peut légitimement penser à ce moment-là qu'elle ne servirait que d'alibi à des primaires où tout serait joué à l'avance. Marsex : La rejoindriez-vous ? Julien Dray : Je n'ai pas à la rejoindre, je ne l'ai jamais quittée. Mais je considère que Ségolène a fait, dans des conditions particulières en 2007, une belle campagne, ce qui ne veut pas dire que je recommencerais la même chose en 2012. Mais je ne suis pas de ceux qui considèrent qu'elle est une "has been" de la politique, qu'il faut s'en débarrasser le plus vite possible. Marc : Avez-vous des contacts avec Dominique Strauss-Kahn ? Si oui, vous parle-t-il de 2012 et de sa possible candidature à la présidentielle ? Julien Dray : J'ai des contacts lointains avec lui, et je pense que pour l'instant il n'en est pas là, et il a raison. Même s'il doit – et nous le devons aussi – être attentif au fait qu'un certain nombre de responsables socialistes s'apprêtent à écrire un calendrier et une histoire dans laquelle il n'a plus de rôle. Julien B : Avez-vous lu le dernier livre de Lionel Jospin ? Qu'en pensez-vous ? Julien Dray : C'est un livre qui est destiné, je crois, d'abord et avant tout à ceux qui ont accompagné tout le combat politique de Lionel Jospin. Forcément, il suscite des débats et des interrogations pour ceux qui, comme moi, n'ont pas toujours été d'accord avec lui. Notamment, je ne me retrouve pas dans la grille de lecture qu'il donne de la défaite de 2002. Nous n'avons pas perdu en 2002 par défaut d'unité, mais plutôt par défaut de crédibilité de nos propositions, une sorte d'usure du pouvoir qui donnait le sentiment que nous étions devenus un peu fatalistes, ou que nous n'avions plus le génie qui avait présidé aux premières années du quinquennat de Lionel Jospin. C'était le cas sur la montée de la violence, sur la montée de la précarité et la question des bas salaires. Gambus : Avez-vous oui ou non emprunté personnellement des sommes aux associations que vous gérez ? Julien Dray : Non. Paul-Henri Rossignol : Qu'envisagez-vous pour les régionales ? Julien Dray : De faire que l'Essonne, mon département, soit comme d'habitude en tête pour la gauche. C'est-à-dire qu'elle contribue fortement à garder la région Ile-de-France à gauche. Pour cela, je vais m'appuyer sur les spécificités de ce département, notamment de toute cette génération de jeunes élus, aussi bien à Evry, à Palaiseau, Sainte-Geneviève-des-Bois, qui fabriquent aujourd'hui un département solidaire et innovant. Pierre : Comment qualifieriez-vous vos rapports actuels avec Martine Aubry ? Julien Dray : Distants. Mais elle a son caractère, et c'est sûr que j'ai aussi le mien. Nous n'avons pas du tout la même histoire, donc ce n'est pas facile forcément de nous comprendre mutuellement spontanément. Mais contrairement à ce que certains croient, malgré mon caractère bougon, je ne suis pas un sectaire. Comme c'est la nouvelle année, on va essayer de prendre des bonnes résolutions, et donc, peut-être que nous aurons des occasions de travailler ensemble. Jaurés : Vous avez dit regarder avec intérêt ce que fait Jean-Luc Mélenchon et le Parti de gauche. Pourquoi ne pas les avoir rejoints ? Julien Dray : Moi, j'ai une longue histoire politique commune avec Jean-Luc Mélenchon, et j'en suis fier, parce qu'elle est jalonnée de réflexions, de combats qui ont été utiles pour les idéaux que nous défendons. Je suis de ceux qui sont triste de l'avoir vu partir du Parti socialiste. Et je pense que la responsabilité première ne lui incombe pas. Maintenant, il a commencé une nouvelle aventure. J'ai un doute sur le débouché de celle-ci, car soit il s'agit de fracturer la gauche en deux entre une gauche "gestionnaire" et une gauche idéaliste, et là, ce serait l'impasse ; soit il s'agit de refonder toute la gauche, et là, on en voit les limites, avec tous ces groupuscules d'extrême gauche qui n'ont fait aucune mutation et restent persuadés qu'ils sont les seuls détenteurs de la vérité, et donc ne sont prêts à aucun compromis. Pierre : Etes-vous pour ou contre une loi sur le port de la burqa ? Pourquoi ? Julien Dray : Je suis, au terme de beaucoup de doutes et d'hésitations, je l'avoue, désormais pour une loi, non pas contre la burqa en tant que telle, mais pour la dignité, l'égalité et le respect des individus. C'est-à-dire que je formulerais la loi en positif. Mais je pense que la burqa n'est en rien un signe religieux, qu'elle est d'abord et avant tout un signe contraire à l'un des fondamentaux de la République qui est l'égalité. Julien B : Vous êtes vice-président du conseil régional [d'Ile-de-France], chargé de la sécurité. Que peut-on faire concrètement pour améliorer la sécurité dans les lycées ? Julien Dray : La question aujourd'hui la plus importante n'est ni technique ni technologique. On a installé, grâce à la région Ile-de-France, beaucoup de vidéosurveillance, fait des diagnostics de sécurité conduisant à restructurer les entrées et les sorties des établissements scolaires, mais le problème essentiel aujourd'hui est un problème humain. D'abord, il n'y a pas assez de surveillants, et de surveillants qui connaissent leur établissement scolaire parce que, souvent, anciens élèves de cet établissement. C'est la priorité. L'autre élément, c'est de faire que l'école n'apparaisse plus pour certaines catégories de jeunes comme un lieu qui perpétue ou entérine les discriminations et l'échec. J'ai souvent dit que le lycée devait être la deuxième maison pour les jeunes, mais une maison qu'ils n'ont pas envie de fuir. Fabien : Comment jugez-vous l'action de Nicolas Sarkozy depuis sa prise de fonctions à la présidence de la France, en 2007 ? Julien Dray : Il avait fait une campagne contradictoire mais qui, sur le plan individuel, avait donné le sentiment qu'il y avait, pour certains, à partir d'une volonté affichée, des possibilités de reprendre l'ascenseur social. Deux ans après, la réalité a rattrapé ces illusions. Il y a aujourd'hui de la colère, de la déception, car les résultats ne sont pas au rendez-vous. Ce qui conduit à ce qui au départ était considéré comme une volonté nouvelle devient anxiogène pour nos concitoyens. Et ce président qui aime être aimé et reconnu est désormais inquiet. François Moisan : Pensez-vous aussi que si on n'a pas de Rolex à 50 ans, c'est qu'on a raté sa vie ? Quelle montre portez-vous aujourd'hui ? Julien Dray : Je ne suis pas un fan des Rolex, même si je considère que, pour ceux qui aiment les montres, c'est une référence incontournable. Mais il y a des vieilles Rolex très sympathiques, et si Le Monde.fr veut ouvrir une rubrique sur ces questions-là, je suis candidat au poste de journaliste. Aujourd'hui, je porte une petite Calatrava en acier (Patek Philippe). Chat modéré par Eric Nunès
13/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/13/julien-dray-se-dit-victime-d-une-denonciation-calomnieuse-venant-de-la-gauche_1291359_823448.html
La Grande-Bretagne boxe la barbe hors des rings
Des associations musulmanes et sikhs s'offusquent de l'interdiction de se présenter barbu sur les rings britanniques.
Des associations musulmanes et sikhs s'offusquent de l'interdiction de se présenter barbu sur les rings britanniques, un règlement récemment imposé par la fédération nationale de boxe amateur (ABAE), rapporte mercredi la BBC. Un responsable de l'ABAE, Barry Jones, a expliqué que cette interdiction n'avait "rien à voir avec l'origine" des boxeurs, "uniquement la santé et la sécurité". Un visage glabre permet de repérer les coupures sur le visage, qui conduisent à l'arrêt des combats en boxe amateur. La polémique est née après qu'un boxeur de Bolton, Mohammed Patel, a été empêché de combattre en janvier. "A l'époque moderne, il faut qu'ils apprennent à accepter de travailler avec les différentes communautés", a déclaré sur la BBC Inayat Omarji, un responsable du Conseil des mosquées de Bolton. "Quand j'ai appris qu'ils établissaient un règlement manquant autant de tact, en sachant que cela désavantagerait au moins une communauté religieuse, j'ai été estomaqué", a regretté un représentant des sikhs de Grande-Bretagne, Indarjit Singh, qui ne comprend pas "comment une barbe peut accroître les risques de blessures". "C'est une décision perverse et rétrograde qui doit être combattue", a-t-il ajouté.
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/la-grande-bretagne-boxe-la-barbe-hors-des-rings_1291382_3242.html
La gazette du mercato : Lovren à l'OL, Maxi à Liverpool
Le défenseur croate Dejan Lovren (Dinamo Zagreb) a signé, mercredi, un contrat avec l'Olympique lyonnais.
Le défenseur croate Dejan Lovren (Dinamo Zagreb) a signé, mercredi, un contrat avec l'Olympique lyonnais, a affirmé le champion de Croatie sur son site internet. "A partir d'aujourd'hui (mercredi), Dejan Lovren fait officiellement partie de l'effectif [de Lyon] après avoir signé son contrat à midi", précise le communiqué du Dinamo. Le défenseur central de 20 ans, espoir international, était à Lyon depuis mardi pour négocier son transfert. "On a signé un contrat fantastique, satisfaisant pour toutes les parties", a déclaré par téléphone depuis Lyon le directeur sportif de Dinamo Zagreb, Zoran Mamic. Le montant du transfert et la durée du contrat n'ont pas été révélés. Capable de jouer dans l'axe ou à droite, Lovren présente le profil type du défenseur moderne, à la fois athlétique et rapide, et doté d'une bonne technique. Il devrait venir renforcer un secteur défensif lyonnais miné par les blessures. Par ailleurs, Nice a recruté le défenseur argentin Renato Civelli dans le cadre d'un prêt de six mois avec option d'achat, a annoncé mercredi le club azuréen. Civelli, 26 ans, arrive de San Lorenzo, en Argentine. Il jouait la saison dernière à Marseille et souhaitait revenir en France. Et Monaco tient son renfort offensif, puisque le CSKA Moscou a annoncé le prêt de son attaquant nigérien Moussa Maazou sur le Rocher, avec une option d'achat à terme de 5 millions d'euros. Maazou, 21 ans, s'était illustré avec l'équipe belge de Lokeren il y a deux saisons, avant de s'engager pour une longue durée au CSKA Moscou en mars 2009. Maxi est rouge L'ailier international argentin Maxi Rodriguez est arrivé mercredi à Liverpool pour y conclure son transfert avec le club anglais, rapportent les médias britanniques. Agé de 29 ans, Maxi Rodriguez portait jusqu'alors les couleurs de l'Atletico Madrid. Il doit passer une visite médicale en préalable à la signature d'un contrat qui devrait le lier aux Reds jusqu'en juin 2011. Maxi est la première recrue hivernale de Liverpool qui s'est séparé de son attaquant Andreï Voronin (Dinamo Moscou) et de son arrière latéral Andrea Dossena (Naples).
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/la-gazette-du-mercato-lovren-a-l-ol-maxi-a-liverpool_1291386_3242.html
Fin de l'épidémie de grippe H1N1 en France métropolitaine
Le nombre de cas de grippe A avec fièvre à plus de 39° est "passé sous le seuil épidémique depuis deux semaines", selon l'Inserm.
L'épidémie de grippe A(H1N1) est terminée en France métropolitaine, a annoncé, mercredi 13 janvier, le réseau Sentinelles Inserm. Le nombre de cas de grippe (avec fièvre à plus de 39°) qui a conduit à consulter un médecin généraliste est "passé sous le seuil épidémique depuis deux semaines", a indiqué le docteur Thierry Blanchon, du réseau Sentinelles. "Le virus circule sûrement encore, mais c'est une circulation véritablement faible. Cela ne veut pas dire pour autant qu'il faut arrêter de se vacciner, car personne ne peut garantir que cette pandémie ne fera pas de rebond", a-t-il souligné. "Et puis on s'attend à ce que ce virus, qui a été quasi exclusif, revienne la saison prochaine", poursuit-il. Pour sa part, le réseau GROG (Groupes régionaux d'observation de la grippe), qui prend en compte les grippes avec fièvre inférieure à 39°, a expliqué que la grippe pandémique est "en baisse mais toujours là", avec 144 000 cas la semaine dernière en France métropolitaine, contre respectivement 307 000 et 398 000 les deux semaines précédentes. 6,5 MILLIONS DE PERSONNES INFECTÉES "Les indicateurs d'activité sanitaire relevés par les médecins vigies du réseau sont en baisse dans toutes les régions, confirmant le reflux de la vague pandémique", selon le GROG. Les détections de grippe restent rares chez les 65 ans et plus ; cependant, parmi eux, "les consultations pour infections respiratoires aiguës sont en hausse depuis deux semaines, et à des valeurs supérieures à celles observées au pic épidémique de la grippe". D'autres agents infectieux respiratoires non grippaux sont probablement à l'origine de ces infections respiratoires chez les 65 ans et plus, avancent les GROG. En prenant en compte les nouveaux cas de grippe et l'estimation délivrée la semaine dernière par les GROG, ce sont un peu plus de 6,5 millions de personnes qui ont été infectées par le virus grippal pandémique en France depuis le début du mois d'août. La grippe pandémique a tué 240 personnes au total en France métropolitaine depuis le début de l'épidémie, selon les dernières données de l'Institut de veille sanitaire remontant à lundi. Avec les décès survenus dans les territoires français ultramarins, cette grippe a occasionné au total 269 morts en France depuis le début de l'épidémie.
13/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/13/fin-de-l-epidemie-de-grippe-h1n1-en-france-metropolitaine_1291387_3224.html
Déroute de la taxe carbone : faisons place aux vraies solutions, par Bjorn Lomborg
"Tenter d'arrêter le réchauffement climatique en appliquant des taxes draconiennes sur les émissions de carbone revient à mettre le feu à sa maison pour se débarrasser d'une infestation de souris", estime Bjorn Lomborg, directeur du Copenhagen Consensus Center.
Suite à la fracassante décision du Conseil Constitutionnel sur la proposition de loi du président Sarkozy sur la taxe carbone, le gouvernement n'a pas chômé pour afficher son désir de la faire passer. Il a affirmé qu'il reviendrait à la charge avec une nouvelle version du projet qui serait acceptée. La France veut être "un leader dans le combat contre le réchauffement climatique", a déclaré un porte-parole du gouvernement. Certes, c'est une aspiration plus que noble. Mais pour faire de ce rêve une réalité, encore faudrait-il arrêter de légiférer, ou mieux, abandonner entièrement ce concept. Tenter d'arrêter le réchauffement climatique en appliquant des taxes draconiennes sur les émissions de carbone revient à mettre le feu à sa maison pour se débarrasser d'une infestation de souris. C'est une solution qui, au final, coûte bien plus cher que le problème initial. Regardons de plus près les chiffres. La proposition originale du président Sarkozy voulait taxer 17 euros par tonne de carbone émis. Pour les consommateurs, cela voudrait dire augmenter le prix de l'essence à près de 4 centimes par litre. Et qu'aurions-nous pour cette somme ? D'après le consensus d'économistes climatiques, si nous ne prenons aucune mesure pour contrer le réchauffement climatique, nous aurons 5 euros de dégâts par tonne de carbone émis. Ce qui voudrait dire que la proposition de loi de Sarkozy nous ferait dépenser 17 euros pour en sauver 5 euros. Qui plus est, si le gouvernement souhaite réellement tenir ses promesses, et limiter la hausse de température à seulement deux degrés Celsius, il devra commencer par appliquer une taxe bien plus élevée, ensuite faire en sorte que le monde entier la suive, pour finir par augmenter cette même taxe drastiquement jusqu'à la fin de ce siècle. Une étude récente d'un l'économiste climatique, le professeur Richard Tol, pour le Centre de consensus de Copenhague, a démontré que seule une taxe de 71 euros par tonne pour commencer (ou bien 12 centimes par litre d'essence) suffirait pour contrer le réchauffement climatique. Cette même taxe devrait ensuite s'élever à 2,800 euros par tonne (donc 6,62 euros par litre d'essence) d'ici à la fin du siècle. En tout, cela coûterait au monde entier la somme phénoménale de 28 000 milliards d'euros par an. Bien évidemment, en augmentant les prix de fiouls émettant des émissions de carbone, nous serions encouragés à nous tourner vers des alternatives moins polluantes. Mais quelles alternatives ? Certes, il y a beaucoup de technologies "vertes" prometteuses à l'horizon ; cependant, le fait est qu'à l'heure actuelle elles ne pourront fournir qu'une petite fraction du poids d'énergie consumé par la France. Même le réseau célébré d'EDF et de ses centrales nucléaires a ses limites. Le fait est que la France a besoin de charbon, de pétrole et de gaz naturel pour plus de la moitié d'énergie utilisée. Et pas une seule personne ne pourrait croire qu'il existe un moyen de changer cette situation rapidement sans grande conséquence pour l'économie. Le gouvernement Sarkozy semble reconnaître cette réalité, puisqu'il a exempté les entreprises et centrales de sa proposition de loi, alors que celles-ci représentent plus de 93 % d'émissions industrielles. Manifestement, le gouvernement est inquiet – pour des raisons valables – de ce qui pourrait arriver à l'économie si, soudainement, toutes les industries françaises devaient payer des taxes d'énergies astronomiques. Ironiquement, c'est la prudence même du gouvernement qui le conduit à l'annulation du projet de loi. D'après le Conseil constitutionnel, un nombre important d'exemptions a non seulement créé "une violation sur le principe d'égalité de la taxe", mais va "à l'encontre du but, qui est de contrer le réchauffement climatique."Sur cette base, il a rejeté cette proposition de loi. Etrangement, le Conseil a fait le bon choix pour les mauvaises raisons. Même sans les exemptions, l'idée de taxer lourdement les émissions de carbone est inefficace pour arrêter le réchauffement climatique. Ce dont la France – et le monde – a besoin sont des énergies vertes plus pratiques et à prix abordables, et non pas du fioul hors de prix. Il n'y a qu'une seule manière d'obtenir cela : nous devons augmenter de façon radicale le montant dépensé pour la recherche et le développement d'énergies propres. Imaginez ce que nous pourrions accomplir si, au lieu d'essayer de forcer la main à une planète qui obtient 80 % de son énergie du charbon, les leaders du monde entier décidaient de consacrer juste 0,2 % du PIB mondial – environ 70 milliards d'euros par an – à la recherche et au développement d'énergies alternatives. Cela pourrait changer la donne, et nous amener à des avancements technologiques qui nous feront profiter d'une énergie propre moins chère et nous mener vers un avenir sans émissions de carbone. Dépenser 17 euros ou plus pour éviter 5 euros de dégâts n'a pas de sens. Cela devient complètement illogique lorsque l'on sait que dépenser le même montant pour la recherche d'énergies alternatives éviterait 187 euros de dégâts, ce qui n'est pas une exagération. Une étude par l'économiste climatique Chris Green pour le Centre de consensus de Copenhague a montré que pour chaque euro investi dans la recherche, nous pouvons nous attendre à une amélioration de 11 euros. Dix-huit ans après le Sommet de la Terre à Rio, en 1992, la campagne internationale pour contrer le réchauffement climatique a été dominée par une idée fixe : l'unique solution est de réduire nos émissions de carbone drastiquement. Le président Sarkozy est un des nombreux leaders politiques favorables à cette idée. Mais il est peut-être temps que lui et ses homologues de par le monde passent aux actes. Pour sérieusement contrer le réchauffement climatique, nous devons agir pour faire le bien – au lieu de légiférer et prendre des postures morales illusoires. Bjorn Lomborg est "environnementaliste sceptique", directeur du Copenhagen Consensus Center, ancien directeur de l'Institut danois d'évaluation de l'environnement.
13/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/13/deroute-de-la-taxe-carbone-faisons-place-aux-vraies-solutions-par-bjorn-lomborg_1291277_3232.html
Usain Bolt, le sprinteur de tous les records
En 2008, aux Jeux olympiques de Pékin, le jeune Jamaïcain, encore inconnu du grand public, obtient l'or en améliorant le record du monde de trois centièmes de seconde sur 100 mètres en 9''69.
Usain Bolt après la finale du 200 m le 20 août 2008 à Pékin. AFP/CARL DE SOUZA Il est surnommé "l'Eclair" car il est l'homme le plus rapide de tous les temps sur les pistes d'athlétisme. A 23 ans, Usain Bolt est un tombeur de records. En 2008, aux Jeux olympiques de Pékin, le jeune Jamaïcain, encore inconnu du grand public, obtient l'or en améliorant le record du monde de trois centièmes de seconde sur 100 mètres en 9''69. Puis, il s'offre l'or sur 200 m en 19''30 : un nouveau chrono jamais réalisé. Il bat de deux centièmes le record de la distance que détenait l'Américain Michael Johnson depuis 1996.Un an plus tard, aux Mondiaux d'athlétisme de Berlin, Usain Bolt récidive en pulvérisant ses propres records : 9''58 sur 100 m et 19''19 sur 200 m. Avec son 1,96 mètre et ses 86 kilogrammes, Bolt casse l'image du sprinteur, celle d'un petit coureur bodybuildé, et remet en cause les théories scientifiques qui assuraient que la limite sur 100 m tournait autour des 9''50. Le Jamaïcain vise les... 9''40. Il s'est imposé comme l'athlète de la première décennie du XXIe siècle. Usain Bolt est seul sur les pistes, reléguant les anciens recordmen du 100 m au rang de figurants : tels Ben Johnson et Tim Montgomery, qui avaient pourtant eu recours au dopage pour établir leurs performances. Selon les calculs de l'Institut de recherche biomédicale et d'épidémiologie du sport (Irmes), en un siècle, l'être humain a atteint 99 % de ses capacités physiques. Dès lors, seul le dopage permettrait de repousser encore les limites. Un dopage qui peut aussi être technologique, comme l'a montré la pluie de records (43) aux Mondiaux de natation de 2009 grâce aux combinaisons en polyuréthane. Depuis, la Fédération internationale a décidé de remettre les compteurs à zéro en les interdisant. Usain Bolt, lui, ne se pose qu'une question : va-t-il désormais s'attaquer au record du monde du 400 mètres ? Et transformer le tour de piste en une épreuve de sprint court... Mustapha Kessous
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/usain-bolt-le-sprinteur-de-tous-les-records_1291307_3242.html
Les mirages de la lutte antidopage
Dix ans après la création de l'Agence mondiale antidopage, les impératifs du spectacle sportif semblent l'avoir définitivement emporté sur l'exigence éthique.
Les commémorations de la chute du mur de Berlin ont éclipsé un autre anniversaire, les dix ans de l'Agence mondiale antidopage (AMA), créée le 10 novembre 1999. Ni cérémonie ni feu d'artifice pour saluer l'événement. Pour célébrer son anniversaire, l'AMA, dont le siège est à Montréal, avait simplement délocalisé ses traditionnelles réunions de fin d'année à Stockholm, début décembre 2009, à l'invitation du gouvernement suédois. Est-ce à dire que le mouvement sportif et les Etats, qui, dans la foulée de l'affaire Festina sur le Tour de France 1998, avaient décidé de créer une organisation indépendante pour coordonner et superviser la lutte contre le dopage au niveau international, estiment aujourd'hui qu'il n'y a pas grand-chose à fêter ? Depuis la création de l'AMA, des avancées non négligeables ont pourtant été réalisées. L'adoption d'un code mondial, en 2004, a marqué une étape décisive dans l'harmonisation des règles antidopage en imposant une liste de substances interdites et un barème de sanctions pour toutes les disciplines sportives. En dix ans, la stratégie de contrôle s'est affinée avec l'élaboration d'un passeport biologique pour surveiller d'éventuelles manipulations sanguines et l'obligation désormais faite aux athlètes de premier rang d'être localisable afin de pouvoir être mieux ciblés. La recherche scientifique a également progressé avec la mise au point de tests toujours plus poussés pour détecter les nouvelles molécules de la performance utilisées par les sportifs. Mais au jeu du chat et de la souris, les dopés et les dopeurs mènent toujours la partie. La chute du mur de Berlin et l'effondrement du bloc soviétique ont certes mis à mal le dopage d'Etat mais n'ont pas stoppé la "course à l'armement". Avec la montée en puissance de l'argent dans le sport durant cette décennie, les réseaux de dopage se sont sophistiqués. Les années 2008 et 2009 marquent peut-être, à ce titre, un tournant dans la lutte antidopage avec la victoire finale du spectacle. Lors des Jeux olympiques de Pékin, en 2008, 32 records du monde ont ainsi été battus, dont certains pulvérisés. Depuis les Jeux de Munich, en 1972, du temps de la splendeur du bloc de l'Est, on n'avait pas vu pareille hécatombe. "Tous ces records enregistrés à Pékin sont à la fois intéressants et troublants" ; le commentaire est de Dick Pound, président de l'AMA de 1999 à 2007. Une perte d'influence Des résultats d'autant plus "troublants" que le nombre de cas positifs à Pékin (douze) a été deux fois plus faible qu'à Athènes (vingt-six), quatre ans plus tôt, malgré le discours de "tolérance zéro" affiché par le président du Comité international olympique (CIO), Jacques Rogge. Orpheline de l'emblématique Dick Pound (remplacé par un ancien ministre des finances australien, John Fahey) depuis 2008, l'AMA a perdu de son influence sur la scène internationale. Elle ne fait plus peur. Le virage à 180 degrés pris par le Tour de France entre les éditions 2008 et 2009 illustre aussi le recul de l'exigence de la lutte antidopage devant celle du spectacle. Petit rappel. En 2008, l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) est seule aux commandes des contrôles. Résultat : sept cas positifs ! En 2009, l'Union cycliste internationale (UCI) reprend la main. Résultat : aucun coureur rattrapé par la patrouille. L'AFLD a dénoncé un traitement de faveur accordé par l'UCI à Astana, l'équipe du vainqueur Alberto Contador et du revenant Lance Armstrong. Réponse de l'instance dirigeante du cyclisme mondial : en 2010, elle se passera des bons services de l'AFLD sur la Grande Boucle. Cette issue illustre la principale limite de la lutte antidopage telle qu'elle reste organisée aujourd'hui : son manque d'indépendance. La Fédération internationale de football (FIFA) peut se vanter d'être l'instance qui effectue le plus de contrôles avec un taux de positifs ridiculement bas sans trouver utile de réaliser, pendant la Coupe du monde, des tests sanguins - seuls pourtant à même de détecter les transfusions sanguines -, la méthode de dopage la plus prisée des sportifs. Pour être réellement efficaces, les contrôles antidopage devraient relever de la responsabilité d'agences antidopage indépendantes et non de fédérations à la fois juges et parties. Mais on imagine mal les fédérations, qui ont pris l'habitude de laver leur linge sale en famille, laisser filer cette prérogative. Ce serait prendre le risque de scier la branche sur laquelle elles sont assises. L'AMA devrait pourtant pousser dans cette direction, mais l'agence est financée à parts égales par les fédérations et les Etats. Ces derniers, dont devrait venir l'impulsion, ne mettent pas tous la même détermination à combattre le dopage. A l'instar de la France, plusieurs pays se sont dotés de législation pour lutter contre les trafics de produits dopants. L'enquête ouverte par le parquet de Paris sur l'équipe Astana se substitue ainsi, en quelque sorte, à l'incurie des contrôles antidopage sur le dernier Tour de France. Aux Etats-Unis, les enquêteurs de l'"affaire Balco" ont révélé, en 2003, que la reine et le roi du sprint mondial, Marion Jones et Tim Montgomery, utilisaient un stéroïde, la THG, qu'aucun contrôle n'avait été capable de repérer. Et, en Espagne, la Guardia civil a mis au jour un vaste réseau de dopage sanguin à la veille du Tour 2006 dans le cadre de la désormais célèbre "opération Puerto". Reste que, même sur le terrain judiciaire, la lutte contre le dopage se heurte à un mur : le football. En 2004, le procès de la Juventus Turin, qui avait pourtant révélé l'utilisation d'érythropoïétine (EPO) et de transfusions sanguines quand le club dominait l'Europe, s'est soldé par un non-lieu. Deux ans plus tard, en Espagne, "l'opération Puerto" ne s'est pas intéressée aux clients footballeurs du médecin Eufemiano Fuentes. "Certains PV d'audition montraient que ceux qui fournissaient le cyclisme en produits dopants fournissaient aussi des joueurs de football, déclarait, il y a quelques semaines au Point, Patrick Keil, le juge qui a instruit l'affaire Festina. Mais comme nous étions en 1998, que la France venait de gagner la Coupe du monde, ce volet n'a pu être exploré." Plus de dix ans après, rien n'a changé. Stéphane Mandard
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/les-mirages-de-la-lutte-antidopage_1291306_3242.html
Des Galactiques I aux Galactiques II, dix ans de foot business
Constituée à coups de millions d'euros, la légion de stars du Real Madrid a pour finalité de vendre des maillots avant de gagner des matches.
Si le football est une question de cycle, comme le suggère Florentino Perez, le richissime président du club du Real Madrid, alors c'est un cycle inflationniste qui a marqué le football professionnel ces dix dernières années. Inflation des salaires des joueurs de l'élite et de leurs entraîneurs ; inflation des droits de retransmission des matches ; inflation des recettes commerciales, en tout cas pour les "marques" les plus prestigieuses (Real Madrid, Manchester United, FC Barcelone, Bayern Munich ou Chelsea, pour ne citer que les têtes de gondole) ; inflation, enfin, des prix des places... jusqu'à priver certains supporteurs des joies du stade. La flambée des prix ne fait pas que des heureux. Elle réjouit en tout cas M. Perez. L'homme d'affaires espagnol, revenu aux commandes de l'équipe des Merengues à l'été 2009 (après une première mandature entre 2000 et 2006), semble très à l'aise dans le maniement des chèques à six chiffres. A l'intersaison, l'entrepreneur qui a fait fortune dans le BTP a déboursé plus de 200 millions d'euros afin d'étoffer l'effectif madrilène en manque de réussite, dont 94 millions pour le seule achat de la star portugaise Cristiano Ronaldo. Ce n'est pas la première fois que l'argentier du Real pulvérise ainsi le montant du transfert le plus coûteux de l'histoire. En 2000, il verse 62 millions d'euros au FC Barcelone pour s'allouer les services de Luis Figo. Record battu ! En 2001, il convainc la direction de la Juventus de Turin de laisser filer Zinédine Zidane pour 75 millions. Record encore battu ! Le Brésilien Ronaldo, David Beckham et Michael Owen rejoignent ensuite les "Galactiques", l'équipe de rêve façonnée par M. Perez à prix d'or. Pour quels résultats ? Sportivement, les Galactiques ont rapporté au cours de leurs premières saisons trois trophées majeurs au Real (une victoire européenne en Ligue des champions et deux titres de champion d'Espagne) avant de s'essouffler. En revanche, ils ont dopé durablement les finances du club, Zinédine Zidane et consorts représentant de formidables produits d'appel en termes de contrats publicitaires, de ventes de maillots ou de droits télé. Le président Perez mise aujourd'hui sur un "retour sur investissement" du même ordre avec le recrutement de Cristiano Ronaldo - la star générerait 80 millions de recettes publicaires par an - Kaka ou Karim Benzema, ses nouveaux Galactiques, en se souciant toujours aussi peu de lier la réussite sportive et la bonne santé économique du club merengue. Interpellé sur le sujet, Michel Platini a confié sa gêne face aux moeurs des clubs les plus riches. Il est temps de s'atteler à "l'assainissement des fondements financiers de notre football, a lancé le patron de l'UEFA, avant de préciser : mais ça prendra un peu de temps". Dix ans de plus ? Simon Roger
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/des-galactiques-i-aux-galactiques-ii-dix-ans-de-foot-business_1291308_3242.html
Les dix événements culturels qui ébranlèrent les années 2000
"Le Monde" a sélectionné les créations qui ont marqué chacune des disciplines artistiques.
PHOTOGRAPHIE "Exposition Jeff Wall", à Bâle, en 2005. C'était en 2005 et il n'y a eu rien de plus beau, de plus spectaculaire depuis dans la photographie : la rétrospective en 75 diapositives encastrées dans des caissons lumineux, souvent géants, du Canadien Jeff Wall, au Musée Schaulager de Bâle, en Suisse. L'artiste révolutionnait la photographie documentaire et bouleversait la perception de la réalité au moyen de "tableaux" mis en scène avec des acteurs - comme au cinéma - ou des paysages et vues de ville. Un ambitieux catalogue garde la trace de cette fresque sur les blessures de l'homme moderne. ARCHITECTURE "Le Nid d'oiseau", de Pékin, par Herzog et de Meuron, en 2007. Le Stade olympique de Pékin, dessiné par les Suisses Jacques Herzog et Pierre de Meuron, avec le concours de l'artiste Ai Weiwei, commencé en 2003, a ébloui les centaines de millions de téléspectateurs des Jeux 2008. Sa structure en poutres de béton et métal croisées, presque tissées, d'où son surnom de "Nid d'oiseau", est devenue le support d'une mise en scène qui enthousiasma la population et contribua, malgré une atmosphère de surveillance constante, à redorer le statut international de la capitale chinoise. Il serait entré en compétition avec le siège de la télévision chinoise comme première icône architecturale de la nouvelle puissance du XXIe siècle, s'il n'avait été partiellement endommagé par un incendie en 2009. BEAUX-ARTS "Split-Rocker", de Jeff Koons, exposé à Versailles, en 2008. Mi-dinosaure, mi-cheval à bascule, Split-Rocker, de l'artiste américain Jeff Koons, a trôné à Versailles en septembre 2008, après avoir siégé au Palais des papes, en Avignon, en mai 2000. Propriété de l'industriel François Pinault, cette structure - en acier inoxydable de 11 mètres de haut et 22 tonnes à vide, qui reçoit 120 tonnes de terre et quelque 100 000 fleurs -, témoigne du grand retour des collectionneurs privés français sur la scène internationale. Mais aussi d'un nouveau rapport entre l'art le plus contemporain et le grand public. Selon Jeff Koons : "Le monde de l'art utilise le goût comme forme de ségrégation. J'essaye de faire un travail que tout le monde puisse aimer, que les gens les plus simples n'imaginent pas ne pas pouvoir comprendre. L'art doit être accessible à tous." THéâTRE "L'Enfer", "Le Purgatoire", "Le Paradis", de Romeo Castellucci, à Avignon, en 2008. Des chiens qui hurlent à la mort dans la Cour d'honneur ; les rêves vénéneux et monstrueux d'un enfant pris dans l'enfer familial ; un piano reposant sur le sol d'une église baignée d'eau... Avec La Divine comédie, de Dante, créée au Festival d'Avignon en 2008, le metteur en scène et plasticien italien Romeo Castellucci illustre les évolutions théâtrales de la décennie : un regard personnel sur l'histoire, le goût de la déconstruction et de la méditation, l'inscription naturelle des arts plastiques sur scène. LITTÉRATURE "La Route", de Cormac McCarthy (éditions de l'Olivier), en 2008. Prix Pulitzer en 2007, le roman de Cormac McCarthy fait partie de ces livres qui ont conjugué de façon spectaculaire un immense succès commercial et une très grande force littéraire. Non seulement parce que son auteur est l'un plus grands écrivains contemporains, mais parce que le sujet même de l'ouvrage avait de quoi frapper les imaginations : dans un monde absolument dévasté par une catastrophe, un homme et son petit garçon traversent les Etats-Unis en essayant de survivre au désespoir et à la barbarie. DANSE "VSPRS", d'Alain Platel, en 2006. En 2006, VSPRS (Vespers) du chorégraphe Alain Platel s'impose comme son oeuvre majeure, un concentré époustouflant de ses obsessions. Sur du Monteverdi secoué par le jazz, onze rescapés de la vie, secoués de spasmes, tentent une ultime cordée sur un glacier de slips blancs. Sous l'étendard de la fougue flamande, Platel réinvente le mouvement à l'aune du chaos intime et pose la danse au croisement de l'art et du social. De la folie et de la défaite, il offre une image douloureuse et sublimée qui coupe le souffle tout en faisant du bien. Un coup de maître. MUSIQUE CLASSIQUE "El Niño", de John Adams, en 2000. On aurait pu retenir Le Conte d'hiver, de Philippe Boesmans, un chef-d'oeuvre, mais créé en 1999... Ou Massacre (2003), de Wolfgang Mitterer, ouvrage splendidement ardu et violent, ou encore les réussites que sont Passion (2008), de Pascal Dusapin, et Da Gelo a gelo (2006), de Salvatore Sciarrino, etc. Mais El Niño, créé en 2000 au Théâtre du Châtelet, est l'une des oeuvres les plus riches et les plus réussies de John Adams. Son inventivité poétique plaira aux oreilles savantes sans effrayer celles des novices. MUSIQUE ACTUELLE "Discovery", de Daft Punk, en 2001. A la pointe des bacchanales électroniques des années 1990, grâce à leur premier album, Homework (1997), le duo composé de Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo accorda le don de parole et de mémoire à leurs personnages de robot dans Discovery (2001), leur deuxième opus. La même année où The Strokes lançaient le retour du rock (l'album Is This It), les stars visionnaires de la "french touch" redonnaient le goût des refrains à la techno, brassaient sans contrainte pop, funk, disco et électro, à l'aube d'une décennie qui allait se repaître de nostalgie autant que de futurisme. CINÉMA "Still Life", de Jia Zhang Ke, en 2006. Le quatrième film du cinéaste chinois est un aboutissement : Lion d'or à Venise en 2006, succès critique et, dans une moindre mesure, public. Tourné en images numériques, Still Life met en scène par la fiction la réalité de la construction du barrage des Trois-Gorges, qui déplace des centaines de milliers de Chinois. A la frontière entre cinéma et arts plastiques, Jia Zhang Ke, né en 1970, est l'un des plus brillants cinéastes de la génération qui s'épanouit sur les ruines du système qui a dominé le cinéma d'auteur, de Rossellini à Almodovar. "Avatar", de James Cameron, en 2009. Sorti deux semaines avant la fin de la décennie, Avatar a eu le temps de gagner 1 milliard de dollars. En imposant sur le marché son énorme film fait d'images de synthèse sorties de son imagination - qui transforme des acteurs humains en extraterrestres numériques -, James Cameron laisse entrevoir l'espoir que le cinéma industriel peut aussi laisser une place aux créateurs. Le service Culture et "Le Monde des livres"
13/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/13/les-dix-evenements-culturels-qui-ebranlerent-les-annees-2000_1291303_3246.html
Connecté, partout, n'importe quand, avec tout le monde
En 2007, Apple lance l'iPhone et révolutionne la téléphonie et l'Internet mobiles.
Le 9 janvier 2007, lors d'une conférence de presse à San Francisco, l'emblématique patron d'Apple, Steve Jobs, sort de sa poche ce qui, de loin, ressemble à un nouvel iPod (le baladeur numérique de la marque) avec un écran panoramique. Dans la salle, le public s'enthousiasme : voilà enfin le téléphone d'Apple dont tout le monde parle depuis plusieurs mois, mais que personne n'a encore vu. L'iPhone associe trois appareils dans un petit boîtier : un téléphone mobile, un baladeur numérique et un mini-ordinateur qui permet de surfer sur Internet, lire ses mails ou encore consulter des plans de ville en ligne. De plus, l'appareil se pilote du bout des doigts, grâce à un écran tactile. "L'iPhone est un produit révolutionnaire et magique qui a littéralement cinq ans d'avance sur tous les autres téléphones mobiles", lance Steve Jobs. Bien qu'invisible sur les stands du Consumer Electronic Show de Las Vegas - la grand-messe annuelle qui réunit les professionnels du monde entier de l'électronique grand public -, tout le monde ne parle que de lui. L'iPhone suscite, lui, un engouement dès son lancement en juin 2007 aux Etats-Unis : des queues se forment devant les magasins, du jamais-vu pour un téléphone. En dépit de quelques faiblesses, l'iPhone s'impose sur le marché naissant des smartphones, ces téléphones multifonctions. En moins de trois ans, il s'écoule à plus de 30 millions d'exemplaires. Le marché des smartphones aiguise les appétits d'acteurs de l'univers de l'informatique comme Microsoft ou Google qui veulent imposer leur système d'exploitation sur téléphone ou même des appareils qui portent leur nom. S'imposer sur le téléphone est vital, car la frontière entre l'ordinateur et le mobile s'estompe. Une étude du cabinet GfK montre que l'accès à Internet depuis le mobile concerne 83 % des utilisateurs d'iPhone contre à peine 10 % en moyenne pour les autres téléphones portables. C'est un score proche de celui des PC ! "Preuve de la fusion rapide des deux mondes de l'Internet PC et mobile, les possesseurs d'iPhone désertent davantage les sites spécifiquement conçus pour les mobiles et vont directement surfer sur les sites Web depuis leur smartphone", note GfK. L'arrivée des smartphones permet le développement de logiciels, de jeux, de nouveaux services en ligne. Au total, plus de trois milliards d'applications ont été téléchargées sur la plate-forme d'Apple. Parmi les plus téléchargées : celles qui permettent l'accès à des réseaux sociaux, comme Facebook. Exister sur le Web Apparu en 2004, ce réseau social permet à ses utilisateurs d'entrer des informations personnelles et d'interagir avec d'autres membres (amis) du réseau. Les informations publiées concernent l'état civil, les études, mais aussi les goûts, les opinions politiques, la religion ou l'orientation sexuelle... Des indications qui permettent de retrouver facilement les utilisateurs partageant les mêmes centres d'intérêt, se félicitent les adeptes du réseau. Des données qui permettent d'espionner tout un chacun, dénoncent ses pourfendeurs. En 2010, l'envie de rester connecté partout avec ses amis virtuels ou réels est plus forte. Facebook est un des sites les plus consultés au monde : il compte plus de 350 millions de membres actifs et fait de nombreux émules. Twitter permet (en 140 signes) de partager à chaque instant tous les moments de la vie, des plus importants aux plus banals. Linkedin permet, quant à lui, de se constituer un réseau professionnel en quelques clics. Pour exister sur le Web, il est indispensable d'avoir ouvert une page sur un réseau social. Les hommes politiques l'ont compris : ils sont désormais investi ce nouveau média. Joël Morio et Joël Morio
13/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/13/connecte-partout-n-importe-quand-avec-tout-le-monde_1291304_651865.html
Le pacs, union à géométrie variable
Instauré en 1999 pour les partenaires homosexuels, le pacte civil de solidarité a séduit plus de 500 000 couples, à 95 % hétérosexuels.
Il y a dix ans, la droite avait combattu le pacte civil de solidarité (pacs) avec une ferveur souvent teintée d'homophobie : des dizaines de milliers de manifestants avaient défilé dans les rues aux cris de "Pédés au bûcher !", le député (UDF) Henri Plagnol avait dénoncé la création d'un "contrat de bon plaisir" et Christine Boutin, la Bible à la main, avait solennellement invoqué à la tribune de l'Assemblée nationale le spectre des "ruptures Kleenex". Pendant les débats parlementaires, un élu du RPR avait même failli déposer un amendement ouvrant la possibilité de se "pacser avec son chien". Dix ans plus tard, le pacs s'est tranquillement installé dans le paysage matrimonial français. Depuis l'adoption, le 13 octobre 1999, de la proposition de loi des députés (PS) Jean-Pierre Michel et Patrick Bloche, le nombre de contrats, en effet, ne cesse de s'envoler : il est passé de 20 000 en 2001 à 150 000 en 2008 ! "Le pacs est une forme d'union qui se banalise", résumait Valérie Carrasco, en 2007, dans le bulletin d'information statistique de la chancellerie, Infostat Justice. Conçu au départ pour les couples de même sexe, le pacs a massivement séduit les couples hétérosexuels : en 2008, près de 95 % des contrats concernaient un homme et une femme. Les pacsés ont bien vite adopté les rituels des mariés, s'unissant en moyenne à l'âge de 30 ans et célébrant leur union pendant l'été. Le traditionnel Salon du mariage qui a lieu tous les ans à l'Espace Champerret en a tiré les conséquences : depuis 2008, il a été rebaptisé le "Salon du mariage et du pacs". Au fil des ans, ce formidable engouement a fait du pacs un concurrent sérieux du mariage. Les unions célébrées en mairie restent majoritaires - en 2008, la France recensait 267 000 mariages pour 144 000 pacs -, mais les courbes pourraient bien un jour se croiser : au cours des huit dernières années, les mariages ont baissé de 11 % tandis que les pacs, eux, progressaient de... 155 % ! "Le succès toujours croissant du pacs n'est probablement pas étranger à la baisse des mariages", analysait France Prioux dans un article publié en 2008 dans Population, la revue de l'INED. Si tant de couples s'orientent aujourd'hui vers le pacs, une forme d'union que Jacques Chirac jugeait pourtant "inadaptée à la société française", c'est parce qu'ils y trouvent un outil parfaitement adapté à leurs besoins. Le pacs reste discret - il n'y a pas de publication des bans -, il n'impose aucun des rituels traditionnels du mariage - nul n'est tenu d'inviter parents et alliés autour d'une pièce montée -, mais il offre un cadre juridique à tous ceux qui souhaitent organiser leur vie commune. Les contractants bénéficient ainsi d'une imposition fiscale commune dès la première année, peuvent devenir l'ayant droit de leur partenaire auprès de l'assurance-maladie et rester gratuitement dans le logement commun si l'un des membres du couple décède. Durant toute la durée du contrat, les membres du couple se doivent en outre "une aide matérielle et une assistance réciproque" et sont solidaires des dettes contractées pour les besoins de la vie courante à condition qu'elles ne soient pas "manifestement excessives". Aux yeux de beaucoup de couples, le pacs offre en outre un atout décisif : contrairement au mariage, il n'oblige pas les partenaires à se lancer dans une procédure judiciaire longue et coûteuse en cas de rupture. Le contrat peut en effet être dissous par une simple déclaration conjointe des deux partenaires, voire une décision unilatérale de l'un d'eux. Contrairement à ce que craignait la droite, cette souplesse n'a pas rendu les pacs plus fragiles que les mariages : le taux de rupture des pacs hétérosexuels au bout de six ans est très proche de celui des mariages au bout de sept ans : 18,9 % contre 18,2 %. Au fil des ans, les droits associés au pacs se sont élargis, rapprochant de plus en plus le pacs du mariage. Depuis novembre 2009, les partenaires d'un fonctionnaire d'Etat ou hospitalier décédé peuvent ainsi, comme les mariés, bénéficier d'un capital-décès. Le médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, souhaiterait que le gouvernement aille plus loin encore en ouvrant les pensions de réversion aux couples pacsés depuis deux ans. Il s'agit, souligne l'association Inter-LGBT (lesbienne, gay, bi, trans), de "défendre l'égalité complète entre toutes les formes d'union". Anne Chemin
13/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/13/le-pacs-union-a-geometrie-variable_1291305_3238.html
"De Napster à ""Avatar"", une décennie numérique"
Musique, cinéma, édition... La culture se dématérialise. Créateurs et artistes cherchent à renouer avec leur public.
Que faisait Shawn Fanning à l'été 1999 ? Cet étudiant de Boston développait un logiciel permettant à des individus d'échanger par Internet des fichiers lourds, des morceaux de musique, par exemple. Napster a disparu en 2001 et Shawn Fanning est retourné à l'obscurité. Mais le site et son inventeur avaient eu le temps de mettre en branle le bouleversement qui a ruiné l'industrie musicale et transformé celle du cinéma. En dix ans, la piraterie numérique et la commercialisation d'appareils capables de lire des produits culturels numérisés (musique, films, livres) ont changé les méthodes de production d'oeuvres et de consommation de masse. Gratuité et compilations Il y a dix ans, l'honnête homme lisait des livres et écoutait de la musique sur sa chaîne stéréo. Il est devenu un geek qui navigue de site en site, au gré de logiciels de téléchargement. L'artiste, lui, s'est changé en travailleur précaire, et ne peut plus compter sur les multinationales qui assuraient naguère sa fortune. Qui aurait cru, en l'an 2000, que Paramount remercierait sans ménagement Tom Cruise, ou que Paul McCartney enregistrerait un album pour une chaîne de cafétérias ? Pendant ce temps, les formes artistiques, elles, sont restées d'une étonnante stabilité. La révolution numérique avait déjà eu lieu sur les contenus. La musique populaire a fait la connaissance des logiciels spécialisés dès le début des années 1980. Au cinéma, le premier film d'animation numérique, Toy Story, est sorti en 1995. Au même moment, on réalisait les premiers longs métrages (encore un terme obsolète : il n'y a plus de pellicule à métrer) à l'aide de petites caméras DV. C'est donc bien la vie du consommateur qui a changé, avec l'irruption des lecteurs numériques et des sites de téléchargement. Avant que l'équipement en connexions haut débit à Internet se généralise, le phénomène a surtout touché la musique. Dès l'introduction des lecteurs MP3 (le premier modèle RIO date de 1998), l'industrie du disque a réagi violemment à l'agression. L'Association américaine des producteurs de disques, la RIAA, attaque en justice Diamond Multimedia, le fabricant du RIO, demandant l'interdiction du lecteur. Les maisons de disques remportent des victoires judiciaires, obtenant l'arrêt de Napster et la condamnation de téléchargeurs à de lourdes amendes. En pure perte. Les ventes de musique enregistrée s'effondrent (en France, elles ont été divisées par 2,5 entre 2002 et 2009). Pourtant, la consommation individuelle de musique n'a jamais été aussi répandue. Simplement, le nouveau mélomane ne veut plus payer. L'habitude de la gratuité s'est répandue et l'objet qui a porté la musique pendant quatre décennies, le disque de longue durée (vinyle, puis CD), a perdu sa raison d'être. Les compilations faites à la maison ont pris sa place. On est toujours à la recherche d'un artiste nouveau, mais on le trouve ailleurs que dans un magasin de disques : sur la bande-son d'une publicité, un blog musical, au générique d'une des versions de l'émission télévisée "American Idol". Les artistes sont les grands perdants. Les maisons de disques, qui licencient à tour de bras, ne peuvent plus porter leur carrière. Ils se tournent vers des producteurs de spectacle (jusqu'à la crise financière de 2009, les tournées ont pallié pour les superstars l'effondrement du disque), ou des entreprises qui n'ont rien à voir avec la musique. Bob Dylan a enregistré ou tournée des spots publicitaires pour Pepsi, la marque de lingerie Victoria Secret et General Motors... D'abord préservé, le cinéma est emporté dans la tourmente de la piraterie par la généralisation du haut débit, la diffusion de la technologie BitTorrent (système d'échange permanent de fichiers et de données entre internautes). En 2009, pour la première fois depuis le milieu des années 1990, le revenu des salles américaines dépasse celui des DVD. Car les salles de cinéma attirent de plus en plus de spectateurs. Les décideurs d'Hollywood sont convaincus qu'on ne remplira les multiplexes qu'avec de grands spectacles en relief qui usent des effets numériques et ne peuvent être vus qu'en salle. Ils se sont aperçus que le spectacle de la fin du monde (comme dans le récent 2012) ne nécessitait pas la présence de Julia Roberts pour attirer la foule. Les patrons de studio préfèrent un accord de licence avec une marque de jouets à un contrat d'exclusivité avec une étoile capricieuse. Le reste du cinéma - films modestes ou films d'auteurs - est devenu vulnérable. La diffusion en salle est menacée par la grande consommation, les supports enregistrés sont en perte de vitesse et le téléchargement légal peine autant à s'imposer que dans la musique. En 2010, l'heureux propriétaire d'un iPod, d'un ordinateur personnel performant et d'un écran plat accompagné d'un système home cinéma peut avoir l'impression d'avoir le monde au bout de ses télécommandes. De l'autre côté des écrans, entre les pirates et les capitaines d'industrie, les artistes se battent pour survivre. Et conserver leurs droits d'auteurs. Thomas Sotinel
13/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/13/de-napster-a-avatar-une-decennie-numerique_1291302_3246.html
Apprendre à vivre sur la planète Pandora..., par Bruno Latour
Le film de James Cameron, "Avatar", offre un commentaire particulièrement frappant de cet objet non identifié qu'on appelle depuis une vingtaine d'années "le principe de précaution".
Charte de l'environnement, article 4, qui a valeur constitutionnelle : "Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attribution, à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage." Le film de James Cameron Avatar offre un commentaire particulièrement frappant de cet objet non identifié qu'on appelle depuis une vingtaine d'années "le principe de précaution". Le complexe militaro-industriel qui exploite sans remords apparents les ressources de la planète Pandora applique un principe exactement contraire de totale indifférence aux conséquences lointaines de ses actions. Pillons d'abord, on discutera plus tard. Ou plus exactement un principe de connaissance certaine : je sais, donc je n'ai pas - ou plus - à apprendre. "Je sais quelle est la véritable valeur de la planète (le minerai qui fait sa richesse et que les sauvages ignorants n'exploitent même pas), et j'agis donc en conséquence. Je sais que la planète Pandora, comme la Terre, ne peut qu'être inanimée, et donc je peux agir pour détruire les obstacles qui gênent l'exploitation sans avoir à prendre aucune précaution particulière." Pour une fois, les cow-boys perdent, les Indiens gagnent. Pandora rétablit l'équilibre à son profit et se défait des encombrants pionniers qui ont refusé d'apprendre à composer avec elle. Entre-temps, Jake, le héros paraplégique, a basculé du côté des sauvages en trahissant les siens. Les modernisateurs fous se retirent la queue basse sur leur planète invivable. Il faut abandonner la Frontière. Seul Jake, le traître sauveur, celui qui a accepté de tout réapprendre, demeure sur Pandora, mais parce qu'il accepte d'échanger son corps d'infirme au profit de son avatar. Cette mutation est une question de survie. Il y aurait quelque exagération à faire de Jacques Chirac la préfiguration de Jake... Et pourtant, quelle surprise de voir ce président complètement immobile introduire dans la Constitution, tout en haut de la hiérarchie des normes, en 2005, une mutation aussi bizarre de la philosophie politique usuelle : l'action précéderait la connaissance ; l'action ne se déroulerait pas toujours en situation de complète connaissance ; il faudrait apprendre de son expérience tâtonnante ; seule l'analyse méticuleuse des conséquences de l'action permettrait dorénavant de remettre en cause les décisions initiales. Je crois vraiment que l'introduction du principe de précaution est un signal aussi important d'un changement d'époque que la grande dramaturgie du film de Cameron : si nous ne nous équipons pas d'une autre façon de penser - d'un autre avatar -, nous ne pourrons pas survivre. Le temps de l'avancée inéluctable du progrès est terminé. Il nous faut réussir à conjoindre deux passions opposées jusque-là : le goût de l'innovation et celui de la précaution. Le principe de précaution suscite les interprétations les plus diverses et les inimitiés les plus fortes. Il a toute l'ambiguïté d'un symptôme. C'est ce qui explique qu'il reste indéchiffrable, aussi bien par ceux qui veulent l'appliquer à tout que par leurs adversaires, qui veulent l'effacer de la Constitution. Les premiers en font un principe d'inertie et d'abstention : tant que nous ne sommes pas absolument certains qu'il n'y a pas de risque, nous devons refuser d'introduire quelque innovation que ce soit. Les seconds en font une barrière à la créativité : tant que nous ne sommes pas absolument certains qu'il y a un risque, il n'y a aucune raison de nous arrêter d'innover. Les deux camps sont d'accord au moins sur une chose : l'action n'est possible qu'après la connaissance absolue. Or, ce que nie le principe de précaution, c'est justement qu'il faille attendre une connaissance absolue pour agir. Nous sommes obligés d'agir d'abord, à tâtons, pour pouvoir ensuite réviser nos certitudes. Oui, il faut bien l'admettre, ce principe est relativiste : l'action ne peut jamais être fondée sur une connaissance préalable complète et totale. Ce n'est pas dans cinquante ans, quand nous aurons enfin la connaissance pleine et entière des causes du réchauffement climatique, qu'il conviendra d'agir, mais maintenant, fût-ce en l'absence de certitudes absolues. Le principe de précaution devrait plutôt s'appeler principe d'expérimentation collective. Son application repose en effet sur la rapidité avec laquelle une société se donne les moyens d'apprendre des conséquences inattendues de ses actions. C'est donc un principe de vigilance, d'attention à l'enquête, de construction de capteurs idoines, de révision rapide des hypothèses. Bref, un principe éminemment scientifique. A condition de définir la science par l'enquête collective et non par la Raison avec un grand R. Ce qui explique peut-être pourquoi seule la République française a trouvé bon d'inscrire ce principe de pur bon sens au fronton de ses valeurs suprêmes : aucune autre nation ne s'était définie à ce point par le culte de la Raison. En ce sens, oui, il s'agit d'un geste irréparable de réparation pour lever un obstacle que les Français avaient mis dans la définition de leur vie commune : l'attente d'une connaissance absolue pour se décider à agir. N'oublions pas que, dans Avatar, Jake n'est pas un obscurantiste : c'est lui - aidé des anthropologues et des biologistes - qui enquête avec soin sur l'écosystème si fragile que les tenants de l'absolu et de la Raison veulent simplement exploiter. Attention, Jacques - pardon, Jake - mutation en cours... Bruno Latour est professeur et directeur scientifique à Sciences Po.
13/01/2010
idees
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Barack Obama : réussir comme Roosevelt, ou échouer comme Carter ?, par Francis Fukuyama
Barack Obama pourrait marcher sur les traces de trois de ses prédécesseurs démocrates.
Barack Obama pourrait marcher sur les traces de trois de ses prédécesseurs démocrates : celles de Jimmy Carter, dont l'action fut jugée comme un échec tant sur le plan intérieur qu'international ; de Lyndon Johnson, qui remporta des succès sur le front intérieur mais échoua à l'étranger ; ou enfin de Franklin Roosevelt, qui réalisa de grandes choses sur les deux plans. Si Obama parvient à faire adopter par le Congrès une réforme raisonnable du système de santé, ce qui sera probablement le cas, il se hissera au moins au niveau de Lyndon Johnson. Qu'il le dépasse et acquière une plus grande envergure dépendra de la façon dont il gérera ses succès sur le front intérieur pour répondre aux défis de politique extérieure auxquels il est confronté. L'économiste Albert O. Hirschman a forgé le concept de "main qui cache" (hiding hand, par référence à la hidden hand, "main invisible" d'Adam Smith) afin de cerner cette vérité qui veut que les hommes ne peuvent jamais anticiper les vicissitudes probables et les conséquences involontaires de leurs actions lorsqu'ils tentent d'améliorer les choses. A la différence des conservateurs, qui prennent prétexte du caractère imprévisible de l'avenir pour ne rien faire, Hirschman estime que la Hiding Hand est en fait providentielle, car si l'on savait à l'avance combien les choses s'avéreront difficiles, plus personne n'entreprendrait quoi que ce soit d'ambitieux. Obama pourrait fort bien être victime de la "Main qui cache". Il est évident qu'il a fait plusieurs mauvais calculs au départ. Il semble avoir considéré sa victoire de novembre 2008 comme un mandat lui permettant de mettre en oeuvre un large calendrier de changements, à l'image de la victoire électorale de Franklin Roosevelt en 1932, qui avait également vu l'arrivée de solides majorités démocrates dans les deux Chambres du Congrès. Le problème, comme l'a souligné Karl Rove, est que le pays, lui, demeure ancré au centre droit et qu'il est beaucoup plus polarisé que dans les années 1930. Un grand nombre de centristes et d'indépendants ont voté Obama, non parce qu'ils approuvaient un accroissement marqué des pouvoirs du gouvernement, mais parce qu'ils étaient dégoûtés par George W. Bush et le Parti républicain. Dès que l'administration Obama a entrepris de faire voter un vaste plan de relance, de sauver l'industrie automobile et de tout faire pour que la réforme du système de santé comprenne à la fois l'obligation personnelle de s'assurer et une option d'assurance publique, ces mêmes centristes ont commencé à prendre leurs distances. L'extrême droite, de son côté, a sombré dans une véritable hystérie, en se demandant si Obama n'était pas en fait un agent ennemi qui lui aurait volé son pays bien aimé. A la suite de la formidable crise financière que nous avons connue, on est en droit de se demander si le nouveau président n'a pas eu les yeux plus gros que le ventre et s'il n'aurait pas mieux fait de se préoccuper en premier lieu de ramener l'Amérique sur le chemin de la croissance économique. Car malgré cet arrière-fond de crise, Obama s'est lancé à corps perdu dans la réforme du système de santé. Cette décision a absorbé tout l'oxygène à Washington, asphyxiant du même coup la réforme du secteur financier, le marché du carbone et la question de l'énergie, l'immigration et, au-delà, la politique étrangère. Nous n'avons guère entendu de propositions novatrices concernant la réforme du système financier international après la crise qui l'a frappé ; nous avons assisté à une longue valse-hésitation sur ce qu'il convenait de faire en Afghanistan ; et l'Agence américaine pour le développement international (Usaid) attend depuis près d'un an la nomination de son directeur. Si vous vous préoccupez de ces questions, vous allez être déçu. Et si Obama ne parvient pas à faire adopter une réforme significative du système de santé par le Congrès avant le printemps 2010, il risque de subir une perte fatale de popularité qui le fera ressembler à Jimmy Carter. C'est là que se manifeste la hiding hand : si Obama avait prévu tout cela, se serait-il aventuré dans cette voie ? Peut-être que non, et c'eût été regrettable. Si Obama réussit à faire passer une loi significative sur la couverture santé, il aura accompli quelque chose d'énorme. Lancer une telle réforme est important en soi, mais c'est aussi un signe essentiel qui montre que le système politique du pays est capable de prendre à bras-le-corps quelques-uns des problèmes à long terme auxquels il est confronté. Le système américain des checks and balances s'est métastasé en un mécanisme de plus en plus dysfonctionnel qui permet de différer indéfiniment la résolution des problèmes difficiles, la quasi-faillite de l'Etat de Californie offrant un exemple de ce qui pourrait advenir un jour au pays tout entier. La loi sur la santé qui émergera peut-être du Congrès ne "réparera" pas le système de santé une fois pour toutes, elle ne le guérira peut-être même pas des maux dont il souffre, mais, comme aime à le rappeler Hirschman, ce n'est pas ainsi que la réforme fonctionne dans les sociétés démocratiques. Si Obama fait avancer le pays vers quelque chose qui se rapproche d'une couverture santé universelle, il aura réalisé un succès important et se sera ménagé un capital politique qui lui procurera une certaine marge de manoeuvre sur d'autres questions (ainsi que sur cette même question du système de santé, qui ne manquera pas de resurgir par la suite). Selon toute probabilité, le problème pour Obama sera donc d'éviter de devenir un nouveau Lyndon Johnson, dont les réussites sur le plan intérieur furent assombries par son échec au Vietnam. Je ne suis pas particulièrement consterné par le temps qu'a mis Obama à décider de la façon de progresser en Afghanistan. La situation dans ce pays est très différente de ce qu'elle était en Irak en 2007, où l'action des renforts sur dix-huit mois a été facilitée par la volonté d'un nombre significatif de forces irakiennes de changer de camp, dans le sillage du mouvement de l'Eveil sunnite. Nous ne disposons pas de tels alliés potentiels en Afghanistan, et, durant un nombre indéterminé d'années, risquons de devoir assumer seuls le fardeau de la lutte contre les Pachtounes sur leur territoire. Comme il existe probablement d'autres moyens de combattre la menace d'Al-Qaida que d'occuper la plus grande partie du sud de l'Afghanistan, cela vaut la peine de prendre le temps de réfléchir à ces moyens. L'autre bombe à retardement de notre politique étrangère, l'Iran, pourrait, soit faire long feu au terme de changements intérieurs, soit exploser au cours de cette année 2010. Je pense depuis un certain temps que nous n'avons guère de leviers disponibles pour influencer le cours des événements dans ce pays, qu'il s'agisse de négociations, de sanctions, d'encouragement à un changement de régime ou d'action militaire. Le jugement de l'Histoire sur Obama face à cette question reposera donc en grande partie sur la façon dont il réagira à une situation mouvante que les Etats-Unis, pour l'essentiel, ne contrôlent pas. L'autre grand problème auquel il doit faire face est l'économie américaine, un défi sur le plan intérieur comme sur le plan de la politique étrangère. Le succès rapide du plan Paulson-Geithner de sauvetage des banques a fait passer au second plan la nécessité de prendre des mesures vigoureuses de régulation du système financier afin d'éviter de nouvelles crises. Simon Johnson a montré que, même si nous avons du mal à l'admettre, nous vivons dans une véritable oligarchie, avec des banques qui versent des millions de dollars à des lobbyistes déterminés à faire capoter toute mesure sérieuse de réglementation. Autant que je puisse en juger, aucune des réformes présentées au Congrès ne cherche à régler réellement le problème d'établissements financiers "trop gros pour sombrer", problème qui, l'hiver dernier, a rendu nécessaires le Troubled Asset Relief Program, plan de sauvetage des actifs pourris (TARP) et les gigantesques plans de sauvetages financés par les contribuables. Washington n'a pas non plus avancé la moindre idée en faveur d'un renforcement de la coordination internationale. Il est probable que la sortie de l'actuelle récession sera bien plus longue et bien plus lente que, disons, le redressement qui a suivi la récession de 1981-1982 au début de l'administration Reagan. Par conséquent, les ressources budgétaires disponibles au cours des prochaines années pour une politique extérieure ambitieuse seront plus limitées que durant les années Reagan. Mais, d'abord, Obama doit faire adopter sa réforme du système de santé par le Congrès... Traduit de l'anglais par Gilles Berton "The American Interest" a publié cette analyse dans son numéro de janvier-février. Francis Fukuyama est professeur d'économie politique internationale à la Johns Hopkins School. Il préside le conseil éditorial du bimestriel "The American Interest".
13/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/13/barack-obama-reussir-comme-roosevelt-ou-echouer-comme-carter-par-francis-fukuyama_1291300_3232.html
Chine, de l'atelier à la locomotive du monde
Grisé par l'hypercroissance, l'empire du Milieu pourrait entraîner la planète vers une nouvelle crise économique.
Lorsque, après de longues années de négociations, la Chine est officiellement admise comme membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), le 17 septembre 2001, l'économie mondiale amorce un rééquilibrage spectaculaire en faveur du géant asiatique. La singulière dynamique commerciale qui se met en place entre "l'atelier du monde" et ses pays clients est un surgénérateur de croissance, qui conduira indirectement à la crise financière globale de 2008. Les atouts de la Chine (excédents courants, taille de ses marchés, compétitivité), ses besoins (énergie et matières premières, débouchés) et ses fragilités (surcapacités industrielles, rigidité politique) font de la deuxième puissance économique mondiale (courant 2010) un acteur incontournable des enjeux planétaires, qu'ils soient géopolitiques ou environnementaux. En cassant les monopoles d'Etat qui régissaient le commerce avec l'extérieur, en levant les discriminations qui corsetaient les sociétés étrangères vis-à-vis de leurs rivales locales et en introduisant la concurrence dans une grande partie des secteurs autrefois protégés, l'accession à l'OMC a un effet multiplicateur de richesses : grâce à la mise au travail d'un tiers-monde rural dont les salaires sont en deçà des moyennes urbaines, les usines implantées en Chine siphonnent les commandes en provenance des pays riches mais aussi en développement. Parallèlement, les excédents courants explosent (de 1 % ou 1,5 % du PIB dans les années 1990, à 3,6 % en 2003, puis 11 % en 2007). Une bulle de réserves de change s'est formée : 2 500 milliards de dollars (1 730 milliards d'euros), en incluant les sommes allouées au fonds souverain. Ces surplus colossaux vont nourrir la dette et soutenir la consommation des Américains. Ils permettent aussi à la Chine d'acquérir des actifs hors de son territoire, de nouer des alliances et, ce faisant, d'élargir le périmètre de ses intérêts nationaux, avec des conséquences géo-stratégiques futures. Le maintien de la non-convertibilité du yuan et de son lien fixe au dollar a préservé la Chine des ajustements qu'aurait dû provoquer son intégration express dans le commerce mondial. Les pays riches profitent de ce pacte : les consommateurs occidentaux voient baisser sans cesse les prix des produits made in China ; les entreprises génèrent de nouveaux profits en délocalisant ou en s'approvisionnant à bas coût en Chine ; les gouvernants parviennent à donner le change le temps d'un mandat. Pourtant, des déséquilibres s'accumulent. L'industrie chinoise a, pendant les années 1990, atteint un niveau inquiétant de surcapacité. Les restructurations, mais aussi l'envol des exportations les résorbent en partie. Et en créent de nouvelles : à force de renforcer et de moderniser son appareil productif, la Chine fabrique et exporte plus d'acier, de produits chimiques, de ciment et de machinerie lourde qu'elle et le reste du monde ne peuvent en consommer. "Après 2002, l'industrie lourde chinoise a connu un boom extraordinaire, note une étude détaillée de la Chambre de commerce européenne en Chine sur les surcapacités chinoises. En cinq ans, la taille relative de la production de l'industrie lourde a presque triplé." L'économie croule sous les liquidités : les ménages mettent de côté, certes, mais dans une proportion somme toute comparable aux autres pays asiatiques. C'est essentiellement l'épargne brute des entreprises qui gonfle de manière disproportionnée, passant de 15 % du PIB au début de la décennie à 26 % en 2007. Signe d'une trop faible redistribution. Délocalisations internes Avec la crise financière mondiale, cette tendance s'aggrave : le gouvernement ordonne aux banques de soutenir la croissance en finançant des projets d'infrastructures. Les surplus d'épargne se dirigent vers ceux-là mêmes qui sont la cause des surcapacités ! Déconnectés des réalités du marché financier, censé sanctionner la chute imminente des profits, les industriels produisent davantage, dans un cycle sans fin qui a créé aujourd'hui une économie de bulle. Les dix années d'intégration de la Chine dans l'économie mondiale l'ont hissée vers un paroxysme de croissance. Ont-elles fait mûrir le régime ? Donner davantage de pouvoir d'achat aux consommateurs chinois sert les intérêts du Parti communiste au pouvoir, qui craint plus que tout le mécontentement populaire. Comment y parvenir sans perdre l'avantage comparatif de la main-d'oeuvre bon marché chinoise ? Pékin peine à mettre au pas les lobbies extrêmement puissants que sont les bureaucraties provinciales et les sociétés d'Etat (SOE), organiquement liées au pouvoir. A la fin de la décennie, les délocalisations internes d'usines vers les régions intérieures se sont précipitées. Quant au citoyen chinois, ouvert à toutes les influences et à toutes les expériences, il est sans aucun doute plus avisé, plus revendicatif, et plus conscient de ses droits qu'il ne l'était au début de la décennie. Avec la plus grande liberté d'expression favorisée par Internet (350 millions d'internautes en Chine) et l'ébauche d'une professionnalisation de la presse et de la justice, la société civile a pris son essor. Elle attend le hors-jeu d'un parti unique grisé par l'hypercroissance. Brice Pedroletti et Brice Pedroletti
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/chine-de-l-atelier-a-la-locomotive-du-monde_1291298_3234.html
"""Le débat sur la sécurité reste intimement lié au poids de l'Etat jacobin"""
Le sociologue et directeur de recherche au CNRS rappelle que cinquante réformes du droit pénal ont eu lieu depuis 2002.
Comment ont évolué les libertés publiques lors de la décennie écoulée ? La société française des années 2000 aura notamment été marquée par une véritable frénésie sécuritaire. Depuis 2002, il y a eu plus de cinquante réformes du droit pénal. L'extension du fichage de la population par la police n'a jamais cessé au point que le système de traitement des infractions constatées (STIC) - fichier qui recense les personnes impliquées dans des procédures policières, victimes et auteurs - concerne désormais un Français sur dix ! Le nombre de gardes à vue a augmenté de 72 % entre 2001 et 2008. La population carcérale a progressé de 36 % sur les sept dernières années. Le nombre de caméras de vidéosurveillance explose. Tous ces chiffres suggèrent l'instauration progressive d'une société de surveillance. Une idéologie sécuritaire qui justifie, au nom de la défense des victimes, la remise en cause de quelques-uns de nos grands principes généraux du droit, s'est mise en place. L'individualisation des peines ? La loi sur les bandes la bouscule. L'indépendance de la justice ? C'est la loi sur les peines planchers ou la suppression des juges d'instruction qui la mettent en cause. Le principe d'atténuation de responsabilité pour les mineurs ? Ce sont, depuis dix ans, toutes les réformes de l'ordonnance de 1945 qui l'affaiblissent. On voit bien qu'on se trouve dans un mouvement continu et puissant. Il y a quinze ans, les propos les plus radicaux passaient pour des discours d'extrême droite. Aujourd'hui, au mieux, ils sont perçus comme une simple exagération. On ne voit pas réellement d'opposition politique sur ces questions. Ce mouvement touche-t-il la France plus que les autres pays occidentaux ? Avec la "guerre contre le terrorisme", tous les pays occidentaux sont concernés, mais à des rythmes et selon des modes d'organisation différents. Le clivage essentiel tient à la nature des régimes politiques qui peuvent être très décentralisés, comme en Allemagne, ou particulièrement centralisés, comme en France. D'où ce particularisme français : le débat sur la sécurité reste intimement lié au poids de l'Etat jacobin. Cela nous conduit à réaffirmer sans cesse le rôle et la responsabilité de l'Etat central, paradoxalement beaucoup plus sur un plan symbolique, au niveau des discours, que dans la réalité. Car ce qui caractérise les dernières années, malgré les déclarations de Nicolas Sarkozy, c'est le désengagement important de l'Etat dans le domaine de la sécurité : réduction des fonctionnaires sur le terrain, développement des polices municipales, boom de la sécurité privée, extension de la vidéosurveillance... Avez-vous repéré une inflexion récente dans le discours sécuritaire ? Non. J'en veux pour preuve que quatre textes législatifs sont en cours de discussion. Sur ce sujet, malheureusement, des digues ont sauté et les critiques des intellectuels, des syndicats ou des associations ne rencontrent pas d'écho suffisant dans le monde politique, notamment à gauche. Au final, les politiques, droite et gauche confondues, tiennent un discours assez homogène. Et comme c'est le politique qui fixe l'agenda médiatique, le gouvernement actuel peut donc continuer à faire du marketing électoral en rebondissant sur tous les faits divers. Une fois, c'est la violence à l'école. Puis les bandes de jeunes ; les violences conjugales ; la récidive ; les fous dangereux ; les armes dans les cités... Autant d'alarmes qui justifient ensuite l'étape suivante dans le durcissement pénal. Propos recueillis par Luc Bronner
13/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/13/laurent-mucchielli-le-debat-sur-la-securite-reste-intimement-lie-au-poids-de-l-etat-jacobin_1291297_823448.html
Crise financière : Goldman Sachs, l'arroseur jamais arrosé
A Wall Street comme à la Maison Blanche, l'histoire d'une banque qui, incarnant la planète finance dans la première décennie du XXIe siècle, a concentré sur son seul nom autant d'admiration que de jalousie, et parfois de haine.
C'est l'histoire d'un arroseur jamais arrosé. L'histoire d'une banque qui, incarnant la planète finance dans la première décennie du XXIe siècle, a concentré sur son seul nom autant d'admiration que de jalousie, de haine parfois... Goldman Sachs (GS) ne symbolise pas toutes les dérives de cette décennie, puisqu'elle n'en est pas morte : première banque d'affaires au monde elle y est entrée, première elle en est sortie. Mais elle en a accompagné les fortunes et les abîmes, quand elle ne les a pas devancés. Financièrement parlant, le millénaire américain a commencé, en décembre 2001, par la faillite frauduleuse du courtier en énergie Enron, qui entraîna dans sa chute le numéro un de l'audit, Arthur Andersen. Les signes annonciateurs du grand dérapage n'avaient pas manqué au siècle dernier : faillite de 1 600 Caisses d'épargne entre 1985 et 1991, puis de Drexel Burnham Lambert, plombée par les "obligations pourries" (junk bonds) de son trader star Michael Milken... Une expression nouvelle fera bientôt fureur : le "risque systémique"... En matière de débâcle financière, on n'avait encore rien vu. Le "cirque" de l'argent-roi a poursuivi sa tournée, GS en a été la princesse consort. Une réputation injuste : sans être plus vertueuse, cette banque a souvent été plus sage que les autres. Si le président Reagan (président de 1981 à 1989) avait été à l'origine de la dérégulation, c'est Ronald Rubin, coprésident de GS, qui va déréguler les produits financiers dérivés après avoir été désigné en 1995 secrétaire au Trésor par le président Bill Clinton (1993-2001). La rumeur selon laquelle Goldman bénéficiait d'entrées privilégiées à la Maison Blanche devenait démonstration. Personne ne fut surpris lorsque George Bush nomma aussi, en 2006, un PDG de GS, Henry Paulson, au Trésor. GS a suivi le mouvement d'un Wall Street dont rien ne semblait menacer l'expansion sans limite. Le trading devenait sa première activité. Son action, tombée à 62 dollars un an après le 11 septembre 2001, n'allait plus cesser de grimper pour atteindre un pic à 235,92 dollars, le 22 octobre 2007. Un an plus tard, après la faillite de sa rivale Lehman Brothers, le titre GS ne valait plus que 53,31 dollars. Le renflouement bancaire généralisé mis en oeuvre par l'équipe Obama le fit remonter entre 164 et 190 dollars fin 2009. Relations consanguines Politiquement, la situation de la banque d'affaires est moins pimpante. Avec la crise, est venue la rage du "contribuable américain" contre les gros bonnets/gros bonus de la finance - les fat cats ("chats gras"), dira Barack Obama pour désigner les dirigeants et traders des milieux financiers. Là aussi, Goldman avait précédé le mouvement. En 1998, son PDG, Jon Corzine, percevait tout compris 19 millions de dollars. Deux fois moins que son successeur Paulson en 2005 (38,8 millions)... L'actuel patron de GS, Lloyd Blankfein, a perçu 73,72 millions de dollars pour l'année fiscale 2007-2008, dont 27,59 millions en cash. L'opinion, qui s'en émerveillait tant que l'emploi, le crédit et la consommation étaient là, s'en horrifie aujourd'hui. Les relations consanguines de Goldman Sachs et du pouvoir exaspèrent. Le 10 novembre 2009, ayant provisionné 21 milliards de dollars pour rémunérer ses 29 000 salariés, M. Blankfein rappelait benoîtement : "Nous croyons au principe de la rémunération pour la performance." En clair : pas question de modifier les bonus de ses ouailles. Ni le sien. Devant le tollé, le PDG a dû reculer. Le 20 novembre, les actionnaires de référence de la banque lui faisaient comprendre qu'avec un chômage à plus de 10 %, le moment était venu de faire montre de subtilité politique. Le 10 décembre, Goldman Sachs annoncera que ses trente principaux dirigeants ne percevront pas leur prime en numéraire, mais sous forme d'actions interdites à la vente avant cinq ans. Bien que contrainte, la banque d'affaires montre encore la voie à ses pairs. Sylvain Cypel et Sylvain Cypel
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/crise-financiere-goldman-sachs-l-arroseur-jamais-arrose_1291299_3234.html
21 avril 2002, le jour où la gauche a disparu des écrans
Dix ans après le 21 avril 2002, qui a vu Lionel Jospin disqualifié à l'issue du premier tour de la présidentielle au profit de Jean-Marie Le Pen, nous republions un article d'analyse paru en 2010 dans "Le Monde".
Le 21 avril 2002, Lionel Jospin annonce son retrait de la vie politique. AFP/JACK GUEZ Faut-il vraiment le croire lorsqu'il assure dans son dernier livre Lionel raconte Jospin (Seuil, 18,50 euros) que "ça ne (le) hante pas" ? Faut-il le suivre lorsqu'il ajoute que la nuit, il "rêve souvent de meetings, de réunions, de rencontres politiques, de visages", mais pas de l'Elysée ? Ses amis politiques assurent, eux, que Lionel Jospin ne s'est jamais remis du 21 avril 2002. Pas plus que le PS, devenu ce jour-là, dit Pierre Moscovici, "l'homme malade de la politique française". Un parti qui collectionne les victoires locales mais échoue à la présidentielle, l'élection reine de la Ve République ; reléguant la double performance de François Mitterrand (1981 et 1988) au rang de simple parenthèse. Ce 21 avril, au soir du premier tour de l'élection présidentielle de 2002, une tragédie se noue à l'Atelier, siège de campagne du candidat Jospin, situé rue Saint-Martin dans le 3e arrondissement de Paris. A 17 heures, les sondages dits "de sortie des urnes" situent Chirac et Jospin en dessous de 20 % et Le Pen à 15-16 %. "Coup de tonnerre" Mais à partir de 18 h 45, un autre tiercé s'impose. Les militants rassemblés dans la rue n'en savent encore rien. Ils réservent une ovation à Lionel Jospin, arrivé sur le coup des 19 heures. A l'intérieur, par contraste, têtes d'enterrement et silence de mort. Gérard Le Gall, spécialiste des sondages, se dévoue et annonce l'inénarrable : Le Pen devant Jospin ! L'extrême droite plus forte que le PS ! Plus qu'un échec, une humiliation. Dix ans plus tard, Pierre Moscovici, alors en charge du projet, ne parvient pas à se sortir de la tête cette scène au ralenti d'"un Jospin qui s'affaisse". Le candidat annoncera le soir même aux Français qu'il quitte la vie politique. Il parle de "coup de tonnerre", mais refuse d'appeler à voter pour son rival Jacques Chirac, auprès duquel il vient de cohabiter cinq ans. On sait, aujourd'hui, que le premier ministre socialiste, si fier de son bilan, n'était pas parti fleur au fusil dans cette campagne qui devait être largement dominée par les questions d'insécurité. Lionel Jospin avait hésité un long mois avant de prendre sa décision parce qu'il avait compris "mieux que d'autres, le bouleversement provoqué par le 11 septembre 2001" - dixit François Hollande, dans son livre Droit d'inventaires (Seuil, 20 euros). Le samedi, veille du premier tour, Lionel Jospin était soucieux, conscient des ratés de sa campagne. Mais à aucun moment il n'imaginait être éliminé. Et surtout pas par Jean-Marie Le Pen. Aujourd'hui encore, les historiens se disputent sur le point de savoir si le "coup de tonnerre" du 21 avril 2002 a été un simple accident ou la conséquence inéluctable d'une série de faiblesses. Car entre Jospin et Le Pen, le rapport de forces s'est joué à très peu : 194 800 voix. Il aurait pu être facilement inversé si la gauche, dans l'insouciance générale, ne s'était pas éparpillée entre huit candidats. En outre, la dynamique Le Pen a tourné court, "dès le lendemain du premier tour", souligne Pascal Perrineau, directeur du Cevipof (centre de recherches politiques de Sciences Po), faisant de Jacques Chirac le grand vainqueur du second tour (82,2 % des voix). Un point en revanche fait consensus : le 21 avril 2002 a eu un effet déflagrateur sur le paysage politique. "A gauche, le choc a affaibli à la fois le leadership et la cohérence idéologique", souligne l'historien Alain Bergounioux. Chargé de tenir le gouvernail du PS, François Hollande a vécu, entre 2002 et 2008, dans la hantise d'une dislocation de son parti, tant étaient ébranlées les certitudes. C'est que Lionel Jospin n'était pas n'importe qui. Socialiste aguerri, il avait voulu gouverner dans la durée et pouvait se vanter de quelques résultats : les emplois-jeunes, les 35 heures. Il avait, malgré tout, été balayé par une vague populiste de grande ampleur. De quoi perdre la boussole idéologique. Ce que fit le parti dès 2005, en se déchirant à belles dents sur la construction européenne, jugée trop libérale non seulement par l'aile gauche du parti, mais aussi par Laurent Fabius. S'agissant du leadership, "le choc de 2002 a été tel qu'il a ouvert la voie à de nouveaux profils et de nouvelles stratégies", estime Pascal Perrineau. Allusion à la candidature quasi hors parti de Ségolène Royal en 2007, qui non seulement rompt avec l'héritage Jospin mais pratique un style de campagne qui heurte la tradition socialiste. Son échec ouvrira à son tour la voie à de nouveaux prétendants, compliquant un peu plus la donne. "Un sérieux avertissement" A droite, le 21 avril a eu l'effet strictement inverse. Il a d'abord clos la guerre des droites qui perdurait depuis les années Giscard. Dès le 24 avril, Jacques Chirac impose à son camp la création de l'UMP, le parti de la droite et du centre. Un événement majeur qui, ironie de l'histoire, profitera non pas à l'héritier désigné, Alain Juppé, mais à son challenger, Nicolas Sarkozy. Ce dernier réalise l'autre partie du travail : séduire l'électorat populaire, qui a lâché le PS au milieu des années 1980, après le tournant de la rigueur. "Cet électorat ouvrier, jeune, déboussolé, jaloux socialement, devenu xénophobe, nous avait adressé un sérieux avertissement lors des municipales de mars 2001, mais nous n'en avions pas tenu compte", déplore Pierre Moscovici. A partir du printemps 2006, Nicolas Sarkozy s'emploie à le séduire. Avec l'aide de son conseiller Henri Guaino, il prend un virage "social national" qui se révèle électoralement payant. Jean-Marie Le Pen voit ses électeurs fuir, tandis que la droite classique réalise une alliance de classe à la fois improbable et redoutablement efficace : en haut de l'échelle la bourgeoise mondialisée, en bas les catégories populaires en quête désespérée d'ascenseur social. Françoise Fressoz
13/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/13/21-avril-2002-le-jour-ou-la-gauche-a-disparu-des-ecrans_1291296_823448.html
L'euro, un défi pour le dollar... et pour 329 millions d'Européens
En dix ans d'existence, la monnaie unique a permis de conjurer sept crises majeures. Un premier pas vers une Europe politique ?
Quelle serait la valeur de la monnaie française après plus d'un an et demi de crise économique et financière mondiale si le franc existait encore ? Celle du mark dans une période de ralentissement économique sans précédent depuis les années 1930 ? Ou encore celle de la drachme grecque dont le pays fait face à de graves difficultés financières ? Un des bienfaits reconnu de l'introduction de l'euro reste la stabilité de la monnaie. En 1999, la mise en place de la monnaie unique consacrait la naissance de l'Union économique et monétaire (UEM) pour onze pays au départ (la Grèce ne fit son entrée qu'en 2001). La Banque de France recense sept crises qui, sans l'euro, auraient pu créer de sévères tensions dans le système monétaire européen en général ou pour certaines des devises des pays de l'UEM : la période 1999-2002, avec la forte appréciation du dollar et l'éclatement de la bulle Internet ; les attentats du 11 septembre 2001, qui ont entraîné de fortes turbulences sur les marchés financiers ; le résultat négatif, en mai 2005, du référendum en France sur la Constitution européenne (puis aux Pays-Bas en juin) ; la polémique, en 2004, sur les chiffres budgétaires en Grèce ; la forte dépréciation du dollar entre 2007 et 2008 ; sur la même période, la forte hausse des prix des matières premières ; et, enfin, la crise des mauvais crédits (les subprimes ) qui débuta en 2007. Une stabilité qui a aussi permis, au travers d'une monnaie commune, de masquer le dérapage des finances publiques des pays de la zone euro. Un pays moins discipliné que les autres aura certes vu ses taux d'intérêt à long terme sanctionnés mais le bouclier unificateur de l'euro l'aura protégé, là où autrefois la sanction des investisseurs sur sa monnaie l'aurait rappelé à l'ordre. Plus de dix ans d'utilisation d'une monnaie commune en Europe ont également été une source d'opportunités. Elle a permis, durant la décennie, de fluidifier et d'unifier les marchés financiers. Avec la même monnaie, les investisseurs peuvent, depuis plus de dix ans, acheter et vendre des actifs financiers partout en Europe, comparer et arbitrer. L'unification de la monnaie a d'ailleurs permis la création d'une Bourse paneuropéenne, Euronext, par la fusion des Bourses d'Amsterdam, Bruxelles et Paris en 2000 puis, plus tard, de l'intégration de celle de Lisbonne et de l'achat du Liffe de Londres. Une seule devise pour toute la zone euro a également accéléré le rapprochement entre les entreprises, et intensifié la concurrence au sein de la zone. Pour les particuliers, l'euro ne s'est installé que le 1er janvier 2002 dans le porte-monnaie des premiers Européens, après trois ans d'utilisation par les marchés financiers. Aujourd'hui, 329 millions de personnes dans seize pays vivent sous un même régime monétaire, ce qui représente 16,5 % de la richesse mondiale. L'euro s'est hissé au rang de deuxième devise dans les échanges commerciaux et financiers mondiaux, derrière le dollar. Et, pour certains, cet ordre pourrait même s'inverser dans les dix ans. Les particuliers y ont vu des bénéfices, certes, comme un tourisme intra-européen facilité par exemple, mais aussi des préoccupations, notamment au sujet de l'inflation. La population, parfois nostalgique de son ancien régime monétaire, accuse souvent l'euro - même si de nombreuses études tendent à démontrer le contraire - d'avoir masqué la hausse des prix de leur quotidien. Fin 2006, lors du dernier sondage effectué par la Commission européenne, plus de 30 % des Français estimaient que l'euro présentait plus d'inconvénients que d'avantages. Après un bilan néanmoins globalement positif, il reste encore de nombreuses améliorations. Après plus de dix ans d'utilisation, les observateurs ont pu constater les inefficiences de la zone : certes l'efficacité de la Banque centrale unique est incontestée et le Parlement et le Conseil européens sont bien installés, mais il n'existe pas de gouvernement européen, et donc pas de politique de change unique pour la zone, face à des grandes puissances comme les Etats-Unis et la Chine qui, elles, agissent sur l'orientation de leurs devises. Cécile Prudhomme
13/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/13/l-euro-un-defi-pour-le-dollar-et-pour-329-millions-d-europeens_1291295_3214.html
L'Europe avance et cherche sa voix
Avec vingt-sept Etats membres, le géant économique se veut un modèle de démocratie, mais reste fragile sur la scène internationale.
Le 1er mai 2004, l'Europe a changé. Obligée, après la chute du mur de Berlin quinze ans plus tôt, de réintégrer en son sein les pays de l'ancien bloc soviétique punis par l'Histoire. D'un coup, la communauté, qui s'était élargie à petits pas de six à quinze Etats, est devenue celle des Vingt-Cinq puis des Vingt-Sept. D'un coup, ce furent dix pays et 80 millions d'habitants en plus dans l'Union européenne, d'énormes écarts de développement entre nouveaux et anciens membres. Autant de défis économiques et politiques. Et des peurs : les délocalisations d'usines à l'Est, l'arrivée à l'Ouest de "plombiers polonais" susceptibles d'instaurer le dumping social, les migrations incontrôlées, le démantèlement de la politique agricole commune (PAC), les surcoûts budgétaires pour les anciens pays membres... Comme à chaque élargissement, la France s'est montrée la plus hostile. Le président de Gaulle avait déjà empêché l'adhésion du Royaume-Uni, qui dut attendre 1973. Valéry Giscard d'Estaing avait imposé l'entrée de la Grèce en 1981, pour stabiliser son retour à la démocratie, mais retardé celle de l'Espagne et du Portugal dont il redoutait, comme les Irlandais, la concurrence agricole. En 2004, l'Allemagne trouvait naturel d'accueillir ses voisins et voyait s'agrandir son cercle d'influence. Le Royaume-Uni, quoique très réticent à ouvrir son portefeuille, se montrait favorable à l'élargissement par hostilité à l'Europe politique, pour la diluer dans une zone de paix et de libre-échange aussi vaste que possible. Pas les Français : une fois de plus, ils se satisfaisaient du vieux noyau franco-allemand et plus encore d'une Europe faite, comme à ses débuts, à l'image de la France. Jacques Chirac avait une double crainte : voir émerger une Europe allemande et/ou une vaste zone économique acquise aux idées anglo-saxonnes. L'opinion publique française a emboîté le pas. Les "eurosceptiques" de la droite conservatrice comme ceux de la gauche traditionnelle y ont vu une entaille de plus à la souveraineté française, la toute-puissance du marché contre l'Europe sociale. Même si tous n'eurent pas l'élégance du socialiste Jean-Luc Mélenchon pour qualifier à la télévision, en 2005, les nouveaux entrants de l'Est : "Qu'ils aillent se faire foutre ! Lituaniens ? T'en connais, toi, des Lituaniens ? J'en ai jamais vu un, moi !" Cinq ans après, les motifs des craintes se sont-ils vérifiés ? Les études montrent le contraire. Pour Jean-Pierre Jouyet, ancien secrétaire d'Etat aux affaires européennes, "l'élargissement ne s'est pas fait au détriment de l'approfondissement. Au contraire." Economiquement, jusqu'à la crise mondiale, la croissance n'a jamais été aussi forte qu'entre 2004 et 2008, grâce à l'effet de rattrapage de ces nouvelles économies. Politiquement, l'élargissement a contribué à ancrer l'Etat de droit et la démocratie en Europe orientale. Les divergences entre l'Est et l'Ouest vis-à-vis de la Russie n'ont pas empêché une position commune sur la guerre russe en Géorgie (2008). Malgré quelques dirigeants eurosceptiques, côté tchèque et polonais, les adhérents de 2004 n'ont remis en cause aucune des réformes ou politiques communes (traité de Lisbonne, perspectives financières, paquet énergie-climat, adaptation de la PAC, mesures de lutte contre la crise financière et de régulation des marchés, politiques d'immigration...). L'Europe politique semble certes avoir atteint ses limites, mais l'élargissement en est-il la cause ? La solidarité politique du "club" a été entamée par les Britanniques, qui ont multiplié les dérogations aux traités institutionnels. Par les Français, qui ont refusé en 1994 le projet allemand Schaüble-Lamers destiné à créer un noyau dur via des délégations de souveraineté supplémentaires, puis en 2000, les propositions fédérales de Joschka Fischer, ministre (Vert) des affaires étrangères. Par l'Allemagne qui, en passe de devenir la quatrième puissance économique mondiale, s'est ensuite éloignée de l'Europe : le pays développe les relations bilatérales avec la Russie et la Chine et sa cour constitutionnelle, en 2009, a donné un coup d'arrêt à l'intégration européenne. Et l'élargissement n'y est pour rien. Comme le rappelle le socialiste français Jacques Delors, le plus influent des présidents de la Commission européenne (1985-1994) : "L'Europe des douze peinait déjà à s'accorder. Il suffit de voir l'article du traité de Maastricht sur la défense européenne : un chef-d'oeuvre d'hypocrisie !" Economiquement, l'élargissement à des pays au niveau économique plus faible a favorisé les délocalisations vers l'Est et les importations au détriment des productions locales. Ont-elles nui au droit du travail et aux conditions salariales ? "Il y avait un grand risque de laisser faire le dumping social", admet la socialiste allemande Evelyne Gebhardt. Grâce au travail de cette parlementaire, la "directive Bolkestein", qui libéralise le marché des prestations de service au sein de l'UE, a été aménagée pour éviter la mise en concurrence des systèmes sociaux. "Le problème du marché intérieur n'est pas strictement européen, il est, sous forme légère, celui de la mondialisation", renchérit M. Delors. Il est plus critique sur la jurisprudence de la Cour de justice de Luxembourg, qui laisse prédominer la liberté de circulation sur les autres libertés fondamentales et les droits sociaux. Institutionnellement, l'élargissement a amoindri l'influence de la Commission européenne, porteuse de l'intérêt général, au profit d'une reprise en main par les grands Etats membres au sein du Conseil. En revanche, celui-ci est en passe de devenir plus efficace. "Le nombre nous a obligés à revoir nos méthodes de travail et à réduire les marathons interminables des Conseils européens", se réjouit un diplomate, qui constate un autre effet positif de l'élargissement : l'obligation de tenir compte de situations économiques disparates implique celle d'intérioriser dans le débat européen les questions posées par la mondialisation. Et de bâtir des stratégies réalistes, plus représentatives des besoins du monde. Marion Van Renterghem
13/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/13/l-europe-avance-et-cherche-sa-voix_1291294_3214.html
Réchauffement climatique : les scientifiques alertent, les opinions s'inquiètent, les Etats temporisent
Enjeu majeur du XXIe siècle, la question écologique, alimentée par les rapports du GIEC, tourne au débat économique, idéologique et géopolitique, et réactive le face-à-face Nord-Sud.
Les attentes puis la déception provoquées par la conférence de Copenhague sur le climat, en décembre 2009, témoignent de la place qu'occupe désormais la question du réchauffement sur l'agenda international et parmi les préoccupations des opinions publiques. Cette situation est nouvelle. Si les scientifiques ont commencé d'alerter sur les risques liés aux concentrations plus élevées de gaz à effet de serre (GES) dans l'atmosphère depuis les années 1970, ils ont dû attendre près d'une trentaine d'années avant que leurs mises en garde ne recueillent une large attention. L'attribution conjointe en 2007 du prix Nobel de la paix au Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat (GIEC) et à l'ancien vice-président américain Al Gore, pour son documentaire Une vérité qui dérange, constitue de ce point de vue un tournant. Peu de temps avant, le travail de l'économiste britannique Nicholas Stern sur le coût économique du changement climatique avait aussi marqué les esprits. Les prévisions des scientifiques du GIEC, jusqu'alors destinées aux cercles fermés des décideurs, deviennent à partir de 2007 une référence commune largement relayée par les médias généralistes. Les prises de parole du président du GIEC, l'Indien Rajendra Pachauri, au physique de sage, sont guettées. Cette organisation, qui réunit plus de 2 500 scientifiques, a été créée en 1988 à la demande du G7 par l'Organisation météorologique mondiale et le Programme des Nations unies pour l'environnement. Sa mission : synthétiser l'état de la recherche mondiale sur les risques de changement climatique provoqué par l'homme. Résultat décevant Après trois rapports publiés en 1990, 1995 et 2001, celui de 2007 qualifie de "très probable" la responsabilité des activités humaines dans le réchauffement moyen des températures depuis le milieu du XXe siècle. Il évalue cette probabilité à plus de 90 %, contre 66 % en 2001. Il prend acte d'une hausse moyenne des températures de 0,7 % au cours des cent dernières années, supérieure aux chiffres avancés jusqu'alors. L'inertie du gouvernement américain de George W. Bush, qui marquera toute cette décennie, n'en devient que plus incompréhensible. C'est autour des conclusions de ce quatrième rapport du GIEC que s'est en grande partie structurée la négociation climatique jusqu'à la conférence de Copenhague. Le seul objectif chiffré contenu dans l'accord à minima élaboré au Danemark : limiter l'élévation moyenne des températures à 2 degrés Celsius par rapport à l'ère préindustrielle découle de ses recommandations. Le résultat est pourtant décevant. Les chefs d'Etat, réunis au Danemark pour fixer le cadre de la lutte contre le changement climatique après l'expiration du protocole de Kyoto en 2013, ne sont pas parvenus à s'entendre sur un plan mondial contraignant qui engage chacun à hauteur de ses responsabilités. Le protocole de Kyoto, signé en 1997, mais entré seulement en vigueur en 2005 après la ratification par la Russie, est loin d'être parfait, mais il est le premier instrument juridique à organiser l'action internationale et à se donner un objectif de réduction des émissions de CO 2 : 5,2 % pour les pays industrialisés. Il a aussi tracé l'ébauche d'une coopération financière entre les pays développés et les pays en développement au travers des mécanismes de développement propres (MDP), qui permettent de réaliser des investissements "propres" au Sud. Après Copenhague, leur avenir devient incertain. Tout comme l'ensemble de l'architecture de cette diplomatie climatique construite au cours des années 2000. Si presque tous les grands pays pollueurs promettent de devenir des champions de "l'économie verte" - les plans de relance votés en réponse à la crise financière de 2008 en furent l'illustration -, ils rechignent à soumettre leur ambition au jugement des autres nations. L'Union européenne, qui a adopté en 2008 un plan prévoyant de réduire de 20 % ses émissions de GES d'ici à 2020, est une des rares régions à ne pas contester la nécessité de cette discipline collective. L'action internationale risque ainsi de se ramener à un menu à la carte où chacun fera ce qu'il voudra. Et non pas ce qu'il devrait faire pour se mettre à l'abri d'un possible emballement climatique dans les décennies à venir. Pour cela, le GIEC estime qu'au minimum, les émissions mondiales de GES devraient être divisées par deux, les pays industrialisés - responsables historiques du réchauffement - devant pour leur part aller jusqu'à 80 % de réduction. Les engagements annoncés jusqu'à présent sont loin d'être suffisants, notamment de la part des Etats-Unis, dépassés en 2006 par la Chine au rang des nations les plus polluantes. La Chine, justement, mais aussi le Brésil et l'Inde, jusqu'alors retranchés derrière leur statut de pays en développement, admettent désormais l'idée qu'il leur faut aussi agir pour limiter leurs émissions futures. C'est évidemment un progrès. En 2010, la négociation climatique va se poursuivre avec toujours l'espoir de boucler l'accord inachevé de Copenhague. Sous la pression des pays et régions les plus vulnérables - petites îles et Afrique - qui ont montré leur capacité à se faire entendre pour rappeler que la lutte contre le réchauffement est pour certains d'entre eux une affaire de survie. Laurence Caramel
13/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/13/rechauffement-climatique-les-scientifiques-alertent-les-opinions-s-inquietent-les-etats-temporisent_1291290_3244.html
Le séquençage du génome humain ouvre la voie à la médecine personnalisée
Les recherches ont démontré que l'être humain est constitué de 25 000 gènes, à 99 % identiques entre deux individus, d'où qu'ils viennent.
Le XXIe siècle s'est ouvert sur un événement scientifique majeur : le séquençage et l'assemblage du génome (ensemble des gènes portés par les chromosomes) humain, en 2000. La publication de ces travaux, à l'état d'ébauches en 2001, puis sous une forme complète en 2003, révélera la dimension historique de l'événement. C'est en effet l'aboutissement des efforts et des investissements accomplis depuis la découverte en 1953 de la structure de l'ADN, support de l'hérédité, par James Watson et Francis Crick. Le séquençage constituait également le point de départ d'une nouvelle ère pour la recherche et les applications médicales vers une médecine plus personnalisée. Mener à bien la tâche a été le fait d'une collaboration internationale à travers le consortium "projet du génome humain". Lancé en 1990, après une impulsion américaine, le projet réunissait, pour une durée prévue de quinze ans, différentes entités : le département (ministère) américain de l'énergie, les instituts nationaux de la santé des Etats-Unis (NIH), la Fondation Wellcome (Royaume-Uni), le Génoscope, centre national de séquençage français, le Centre du génome humain de Pékin, l'Institut Max Planck de génétique moléculaire de Berlin... Les NIH pilotaient le tout et la direction était confiée à James Watson. Objectif : séquencer les trois milliards de paires de bases - l'alphabet du génome : A, C, G, T - que comporte notre patrimoine génétique. Budget : 3 milliards de dollars. Patrimoine de l'humanité La mission sera accomplie avec deux ans d'avance et en restant dans les clous budgétaires, avec un coût de 2,7 milliards de dollars. Le génome présenté résulte de l'assemblage de celui de plusieurs donneurs anonymes. Les séquences sont déposées dans le domaine public, afin de respecter la déclaration de l'Unesco, qui, en 1997, a décidé que le génome faisait partie du patrimoine de l'humanité et n'était donc pas brevetable. Le projet du secteur public coiffe au poteau l'initiative privée de Craig Venter et de sa société Celera. Celle-ci utilise en effet les résultats du consortium pour les intégrer dans le séquençage qu'elle poursuit de son côté. Les résultats publiés en 2003 poussent à un peu d'humilité. Les scientifiques pensaient que nous possédions quelque 50 000 gènes, voire 100 000 ; nous nous révélons en avoir moins de 25 000. Les caractères apparents, le phénotype, font que l'humanité apparaît comme extrêmement diverse ; notre génome apparaît en fait identique à plus de 99 % entre deux individus, quelle que soit leur origine ethnique. Le rouleau compresseur du séquençage du génome humain reflète le bond en avant technologique des outils et machines utilisées. De même que, selon la loi énoncée par le fondateur d'Intel Gordon Moore, les performances des microprocesseurs doublaient tous les dix-huit mois à prix constant, le coût du séquençage a baissé à une vitesse vertigineuse. En 2004, il n'en coûtait plus que 10 millions de dollars pour un séquençage complet. En août 2009, Stephen Quake, un ingénieur de Stanford (Etats-Unis), affirmait qu'il ne lui avait fallu que 50 000 dollars pour séquencer le sien. L'objectif d'un séquençage complet pour 1 000 dollars n'a plus rien d'une chimère... Cette démocratisation rend de plus en plus crédible une démarche de médecine personnalisée, où les variations (polymorphismes) ne portant que sur un seul nucléotide - soit une seule lettre A, C, G ou T - renseignent sur le fait qu'un traitement donné sera efficace ou non chez un individu. De même, l'examen des facteurs de prédisposition génétique à des maladies pourrait entrer dans la pratique courante, avec des conséquences dans la mise en oeuvre de mesures de prévention. Sur le plan de la recherche, les avancées du séquençage ont donné un élan aux études portant sur l'ensemble du génome, afin d'étudier les variations génétiques associées à un trait donné : la pression artérielle ou un autre paramètre. Reste à savoir si l'utilisation des marqueurs génétiques ne comporte pas des risques de dérive sur le plan éthique et si elles ne creuseront pas davantage, au moins dans un premier temps, les inégalités entre pays riches - où elles pourront être appliquées - et pays pauvres. Paul Benkimoun
13/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/13/le-sequencage-du-genome-humain-ouvre-la-voie-a-la-medecine-personnalisee_1291292_3244.html
Le spectre du 11-Septembre plane sur l'Amérique
Pour 53 % des Américains, les attentats d'Al-Qaida sont l'événement le plus important de la décennie, loin devant l'élection de leur premier président noir, Barack Obama.
A la minute où le deuxième avion a percuté le World Trade Center, le 11 septembre 2001 est entré dans l'Histoire. Il était 9 h 03 à New York. Devant leurs téléviseurs, les millions de personnes qui ont vu le vol United Airlines 175 se précipiter contre la tour sud ont compris instinctivement que rien ne serait plus comme avant. Dès 2003, la Bibliothèque du Congrès accumulait déjà les archives du 11-Septembre. Une collection de milliers de témoignages, d'e-mails et de récits inscrits à jamais dans les mémoires. "J'ai réalisé que l'Amérique n'était pas invincible", dit l'un d'eux... Après la décennie de l'hyperpuissance et de la prospérité, le 11-Septembre a révélé aux Américains leur vulnérabilité. La poussière est retombée mais "le 11-Septembre" n'a plus quitté l'Amérique. En anglais : 9/11. Nine-Eleven. En 2006, pour le cinquième anniversaire des attaques, le Washington Post a publié un sondage : 30 % des personnes ne se rappelaient plus que les attentats avaient eu lieu en 2001. Mais 95 % se souvenaient du jour : Nine-Eleven. Un tiers des New Yorkais déclaraient penser encore tous les jours au 11-Septembre. Aujourd'hui, la moitié des Américains y voient toujours la pire période depuis la fin de la seconde guerre mondiale. Un new normal s'est rapidement installé dans la vie de tous les jours. Une "nouvelle normalité" faite de fouilles dans les aéroports, d'angoisses subites quand le métro s'arrête... Plus de huit ans après, les médecins légistes continuent de reconstituer les restes des 2 749 disparus, avec les 21 744 morceaux qui leur ont été confiés. Grâce à l'ADN, deux victimes ont encore été identifiées début janvier 2010. Découverte, aussi, du monde musulman, de ses arcanes complexes. Ces talibans, ces wahhabites, dont nul ne se souciait jusque-là. L'affrontement avec les extrémistes islamiques a consacré la nouvelle ligne de fracture des mondes et des idéologies. D'un côté, Oussama Ben Laden, une sorte de "Che Guevara du XXIe siècle" aux yeux des radicaux musulmans. De l'autre, des démocraties frappées à Bali (2002), à Madrid (2004), à Londres (2005), à Bombay (2006), et cherchant à renforcer leur sécurité en évitant d'entrer dans le jeu de l'ennemi avec une spirale de représailles disproportionnées. L'Amérique était en paix. Du jour au lendemain, elle s'est retrouvée en guerre, une "guerre longue", comme disent les militaires qui aiment l'analogie avec la guerre froide. Une guerre perpétuelle, dénoncent les défenseurs des libertés. Pour le Lawyers Committee for Human Rights ("comité des avocats pour les droits de l'homme"), "le new normal a introduit des changements spectaculaires dans la relation entre le gouvernement et la population". Selon ce comité, les Etats-Unis "ne se sont plus sentis liés par les principes qu'ils avaient longtemps pris pour étendard". Le tandem Bush-Cheney, à la Maison Blanche, a durablement transformé les Etats-Unis. Une administration tentaculaire de plus de 200 000 employés issus de 22 agences, le département de la sécurité intérieure, a été créée. "La plus grande extension du gouvernement depuis cinquante ans", selon les critiques. Hypnotisés par la crainte de nouveaux attentats, les membres du Congrès ont autorisé une surveillance renforcée des citoyens, par le biais de la loi Patriot, et donné les pleins pouvoirs au président pour renverser Saddam Hussein en Irak. Une guerre soutenue à 66 % par les Américains, selon le Washington Post. Se sentaient-ils pour autant plus en sécurité ? En octobre 2001, 73 % d'entre eux s'attendaient à une nouvelle attaque contre leur sol ; en 2006, ils étaient encore 67 %. De la peur est née la tentation du repli. Le besoin de se protéger de l'extérieur, de l'étranger. L'envie de construire un mur, à la frontière sud. De rester chez soi, entre soi. Pour beaucoup, ce qui vient de l'extérieur est devenu une menace potentielle. Que ce soit la main-d'oeuvre du Mexique, les investissements de Dubaï ou les jouets made in China. Après en avoir été les champions, les Américains se sont mis à douter de la mondialisation. Ce n'est qu'en 2006, lorsque les démocrates ont gagné les élections au Congrès, que le vocabulaire de la peur a reflué. Cette année-là, les films qui sont sortis sur les attentats ont été boudés. Le New York Times a évoqué une "fatigue du 11-Septembre" : les Américains en avaient assez de l'exploitation politique et médiatique du terrorisme. Ils relativisaient. Le reste de la planète avait connu bien d'autres épreuves, à commencer par les 200 000 morts du tsunami en Asie, en décembre 2004. En 2007, le nombre de touristes étrangers à New York est revenu à son niveau d'avant 2001 (8,5 millions). Geste impensable quelques années plus tôt, l'Empire State Building a été illuminé en vert pour la fin du ramadan. Après avoir choisi George Bush en 2004, les Américains se sont pris d'enthousiasme pour un jeune sénateur qui semblait être en mesure de tourner la page : un démocrate qui avait toujours été contre la guerre en Irak et proposait la réconciliation avec le monde musulman. "Enfants de Ben Laden" Après les années d'exception, Barack Obama a promis le retour aux normes. Guantanamo serait fermée. Le "machisme" diplomatique remplacé par le "respect". Le terrorisme a été largement absent de la campagne électorale 2008, même si Barack Obama s'est engagé à concentrer les efforts sur la guerre "nécessaire" - en Afghanistan - par opposition à la guerre "choisie", en Irak. C'est le "président de l'après-11-Septembre" que l'on élit, a commenté la presse. Un an après l'investiture de Barack Obama, l'Amérique, nation d'immigration et d'assimilation, fondée sur le melting-pot, s'inquiète de la possible émergence d'un "terrorisme maison", à l'européenne. En décembre 2009, le Pakistan a arrêté cinq jeunes Américains musulmans de Virginie qui s'y étaient rendus pour "aider au Djihad". Le FBI a démantelé plusieurs réseaux à l'intérieur même du pays. Perplexe, l'hebdomadaire Newsweek a consacré sa "une" aux "enfants de Ben Laden". L'attentat manqué, le jour de Noël, contre le vol Amsterdam-Detroit a provoqué un choc. Pour la première fois depuis la tentative du Britannique Richard Reid, en 2001, un individu parvenait à introduire un explosif dans un avion de ligne en partance pour les Etats-Unis. Les systèmes d'alerte n'ont pas fonctionné, malgré l'hydre bureaucratique qui avait toutes les informations sur un coup en préparation... Le spectre du 11-Septembre ressurgit. Selon une enquête du Pew Research Center, 53 % des Américains citent Nine-Eleven comme l'événement le plus important de la décennie, loin devant l'élection de Barack Obama (16 %). Une décennie perdue ?
13/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/13/le-spectre-du-11-septembre-plane-sur-l-amerique_1291293_3222.html
De Titan à Mars, l'homme en quête d'une autre planète
Huygens, Mars Express, Spirit, Opportunity... Un défilé de robots et de sondes à la recherche de la vie ailleurs.
Titan, la plus importante des 47 lunes de Saturne, compte de vastes régions recouvertes de dunes, probablement composées de cristaux de glace, de sable ou d'une composante indéterminée, viennent de rapporter les astronomes. AP On ne pénètre pas tous les jours dans un monde inconnu. Le 14 janvier 2005, les humains ont passé trois heures et quart sur la surface molle d'un astre dont ils ignoraient presque tout. Sur ce sol à consistance de "crème brûlée", dans un étrange halo de brume orangée, ils ont distingué comme de gros galets de glace salie. Au loin, ils ont aperçu des collines et ce qui ressemblait à un réseau fluvial. Pour la première fois, ils pouvaient glisser un oeil sous les épaisses couches d'atmosphère qui leur ont toujours dérobé Titan, la plus grosse des lunes de Saturne. Ce séjour par procuration, ce spectacle furtif, l'humanité le doit à une sonde de l'Agence spatiale européenne (ESA), nommée Huygens en hommage à l'astronome néerlandais qui découvrit le corps céleste en 1655. Après plus de sept années de voyage, en compagnie de Cassini, son vaisseau porteur américano-européen, Huygens est devenu l'engin humain qui a touché la surface la plus éloignée de la Terre, à 1,2 milliard de kilomètres. Pendant ses trois heures et quart de survie sur place, il a connu le plus grand froid - moins 180 degrés - après avoir essuyé la chaleur la plus intense au cours de sa descente : 12 000 degrés à l'entrée dans l'atmosphère. Sa réussite ne se résume toutefois pas à des performances. Grâce à ses observations locales et aux survols quasi mensuels qu'a depuis réalisés Cassini, observant de ses multiples instruments de mesure la totalité de la surface, Titan n'est plus un monde inconnu, même s'il est encore très loin d'être compris. Les scientifiques ont pu esquisser une climatologie de l'astre où chaque saison dure sept ans. Ils ont reconstitué son étonnant cycle hydrologique, où des hydrocarbures, méthane et éthane liquéfiés par les températures glaciales, jouent le rôle de l'eau, et font de Titan le seul astre connu, avec la Terre, à porter des liquides à sa surface. Ceux-ci s'assemblent en grands lacs, où ils s'évaporent pour former des nuages qui finissent par crever en pluies noires. Planétologie comparée Récemment, les astronomes ont détecté du propane - le combustible de nos gazinières terrestres - dans l'atmosphère azotée de cette lune, nouveau jalon dans la connaissance d'une chimie organique complexe qui pourrait ressembler à celle qui a précédé l'apparition de la vie sur Terre. Et c'est bien cela qui place l'exploration de Titan au premier rang des faits astronomiques d'une décennie marquée par l'essor d'une nouvelle discipline, la planétologie comparée. Dans le lointain, les télescopes les plus sophistiqués parviennent à distinguer un nombre de plus en plus significatif d'exoplanètes, tournant autour d'étoiles très distantes de notre Soleil. Ces découvertes commencent à nous permettre de mieux concevoir les spécificités de notre système solaire. Plus près, Titan ou Mars nous donnent la possibilité d'approcher des conditions qui ont pu conduire à l'émergence de formes de vies sur Terre, de comprendre ce qui a favorisé le processus ici, et l'a empêché là. Sur Mars, depuis 2004, une autre sonde européenne, Mars Express, a apporté une contribution cruciale à ces études comparatives, en réécrivant entièrement l'histoire géologique de l'astre. Pendant que, sur la surface de la planète rouge, deux increvables explorateurs américains, Spirit et Opportunity, corroboraient localement ces observations tout au long d'une ballade qui ne veut pas prendre fin. Le point commun entre toutes ces prouesses ? Elles ont été réalisées par des engins robotisés qui servent au mieux l'homme dans l'espace en montrant que l'on peut très bien s'y passer de lui. L'arrivée de Huygens sur Titan aura aussi marqué le point d'orgue d'une décennie où le spectacle et les avancées scientifiques ont été assurés, à moindre coût, par des machines, tandis que les astronautes cumulaient, à grands frais, frustrations et échecs. Parfois dramatiques, comme lors de l'accident de la navette Columbia, en février 2003, fatal à sept hommes et femmes et aux navettes spatiales américaines, qui ne devraient plus voler après 2010. Jérôme Fenoglio
13/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/13/de-titan-a-mars-l-homme-en-quete-d-une-autre-planete_1291291_3244.html
Inde : une classe moyenne à la fois mondialisée et patriote
Derrière la fine couche de milliardaires rituellement glorifiés par le magazine "Forbes", s'épanouit en Inde une classe moyenne dopée par la mondialisation.
Derrière la fine couche de milliardaires rituellement glorifiés par le magazine Forbes, s'épanouit en Inde une classe moyenne dopée par la mondialisation. De mieux en mieux formée, parfaitement anglophone - héritage britannique aidant - et ouverte sur le grand large, cette nouvelle élite consommatrice et innovante incarne l'Inde émergente. De New Delhi à Calcutta, en passant par Bombay et les foyers technologiques que sont devenus Bangalore ou Hyderabad, 60 millions d'Indiens se mettent à l'heure du nouveau millénaire. En valeur absolue, le chiffre est impressionnant : il correspond à la population française. En valeur relative - 5 % de la population indienne -, il est moins reluisant : il souligne la permanence de vertigineuses inégalités sociales. Face à l'opulence des nouvelles villes scintillantes, 300 millions de personnes, en Inde, continuent de survivre avec moins d'un dollar par jour, concentrant à elles seules le quart de la pauvreté mondiale... L'existence d'une classe moyenne indienne est une vieille histoire. Sa formation est étroitement liée à l'histoire coloniale, les Britanniques ayant favorisé l'essor d'un groupe indigène voué à relayer leur tutelle. C'est de son sein qu'émergea l'élite nationaliste qui présida à l'Inde nouvelle indépendante en 1947, à l'instar de l'avocat Jawaharlal Nehru. Après une longue période d'économie socialisante, le lancement de réformes économiques au début des années 1990 libéra de nouvelles forces, nourries des retrouvailles avec la diaspora de 20 millions de personnes installées en Grande-Bretagne ou aux Etats-Unis. Globalisation et mutations internes - notamment la montée en puissance des castes intermédiaires - conjuguèrent leurs effets pour alimenter l'expansion de cette classe moyenne. Le cabinet de conseil McKinsey anticipe qu'au rythme actuel de la croissance (autour de 7,3 %), 583 millions d'Indiens pourront être assimilés en 2025 à la classe moyenne - soit 41 % de la population à cette date. Cette élite émergente est à la fois aspirée par les nouveaux réseaux mondiaux et psychologiquement très attachée à son indianité. Il y a une décennie, elle s'identifiait sans mal au discours nationaliste du parti de la droite dure, le Bharatiya Janata Party (BJP). Inquiète des désordres créés par ce nationalisme hindou, elle s'en est éloignée ces dernières années pour retourner dans le giron du vieux Parti du Congrès, revigoré après une longue éclipse. Frédéric Bobin (Tunis, correspondant) et Frédéric Bobin
13/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/13/inde-une-classe-moyenne-a-la-fois-mondialisee-et-patriote_1291288_3216.html
Citoyen du village global
Né en Inde, professeur à Paris, Oxford, Los Angeles... L'historien Sanjay Subrahmanyam ne sait plus où il habite. Et c'est tant mieux...
Des distances réduites, des modes de vie entremêlés, des informations à la circulation toujours plus rapide. En dix ans, la planète a changé de visage. Le village global, si souvent annoncé, semble une évidence sur la Toile. Ailleurs, il étend chaque jour ses frontières, abaisse les barrières culturelles, métisse les traditions. A quoi ressemblent alors ses habitants ? Autrement dit, qui pourrait bien figurer ce "citoyen du monde" de la première décennie du XXIe siècle ? Un industriel américain ou chinois parcourant le monde de filiale en joint-venture ? Un mannequin vénézuélien ou russe, défilant sur les cinq continents ? Un sans-papiers de n'importe où, prêt à traverser la moitié du globe pour trouver une terre plus fertile ? Sanjay Subrahmanyam n'est rien de tout ça. Ce petit homme à la chevelure en bataille et la barbe de gourou hindou affiche la sage profession d'historien. Pourtant, à 48 ans, cet explorateur du monde intellectuel, polyglotte émérite et voyageur perpétuel, aujourd'hui professeur à l'université de Californie à Los Angeles (UCLA), et membre de l'Académie des sciences américaine, présente un parcours qui le qualifie aisément pour le rôle. D'ailleurs, l'idée d'avoir été retenu dans ce casting mondial et improvisé paraît à peine le surprendre. De passage deux jours à Paris, où il vient de participer à la publication de l'Histoire du monde au XVe siècle (Ed. Fayard), il dévide patiemment la pelote d'une existence aussi singulière qu'exemplaire. Comme souvent en pareil cas, l'histoire n'était pas écrite d'avance. Né en Inde, dans une famille brahmane de fonctionnaires originaires du sud du pays mais installés à New Delhi, le jeune étudiant en économie qu'il est peut même paraître casanier en ce début d'années 1980. Quand nombre de ses congénères s'envolent vers la Grande-Bretagne ou les Etats-Unis pour achever leur doctorat et intégrer une banque, lui achève sa formation à l'université de Delhi. Il y commence sa carrière d'enseignant, dans la nouvelle discipline qu'il a choisie : l'histoire économique. La sage trajectoire s'incurve pourtant rapidement. Spécialiste de l'Inde du Sud aux XVIe et XVIIe siècles, il se passionne pour les échanges avec l'extérieur. Dans un pays marqué par les explorateurs et les conquêtes, il se trouve naturellement confronté à des sources multiples, produites dans diverses langues, conservées dans divers pays. Alors il visite les seconds et apprend les premières. "Multiplier les points de vue" Aujourd'hui, il parle couramment neuf langues (tamoul, hindi, ourdou, anglais, français, portugais, espagnol, italien, allemand), en lit trois supplémentaires (néerlandais, persan, danois) et admet avoir "quelques notions" dans une poignée d'autres... De quoi affronter la complexité du monde et "multiplier les points de vue", dit-il. Là, est en effet sa grande affaire. Pour lui, pas plus la vision européenne que la vision indienne des grandes expéditions ne peuvent rendre compte de la rencontre de deux civilisations. Non seulement il importe de croiser les regards, mais de redonner à chacun d'entre eux sa diversité. Ainsi, dans une retentissante biographie de Vasco de Gama - le Portugais qui "découvrit" les Indes en franchissant le cap de Bonne-Espérance -, publiée en 1997 en Grande-Bretagne, puis au Portugal et en Espagne, il règle son compte tout à la fois aux mythes portugais qui, aujourd'hui encore, célèbrent la pureté des motivations du navigateur, mais aussi aux diverses théories nationalistes indiennes dénonçant les conséquences funestes de l'expansion européenne sur l'intégrité de la culture locale. Pour ce faire, il puise dans les sources de part et d'autre, mais aussi chez les chrétiens syriens, les mamelouks égyptiens et autres observateurs italiens... Le voilà globe-trotteur, professeur invité un peu partout, du Japon aux Etats-Unis, des Pays-Bas à l'Australie. C'est pourtant la France qui lui fait quitter pour de bon le pays natal. En 1994, à33 ans, il est élu directeur d'études à l'Ecole des hautes études en sciences sociales (EHESS). Il y passe sept ans, avant de céder aux sirènes britanniques et d'accepter la chaire d'histoire indienne à l'institut d'études orientales d'Oxford. Pendant trois ans, il tente de convaincre ses collègues que l'Inde n'est pas seulement l'ancien joyau de la couronne d'Angleterre. "Je me suis heurté au nombrilisme britannique, sourit-il. Sans rencontrer le moindre conflit. Juste une indifférence complète." Aussi lorsqu'en 2004 l'université californienne lui propose un poste sur mesure, il n'hésite pas longtemps. "Autrefois aux Etats-Unis, le prestige allait aux Européens. Aujourd'hui, ce sont les Asiatiques qui sont choyés." Et puis, l'établissement offre également un poste à sa femme, historienne américaine spécialiste de la France. Il décide donc de franchir l'Atlantique. L'immigration par les femmes ? Déjà en 1995, c'était pour suivre son épouse d'alors qu'il était venu en France. Un constat bien dans l'air du temps qui fait sourire Sanjay Subrahmanyam, lui qui assure ne devoir ses mouvements incessants qu'aux "hasards de la vie", et à la volonté d'aller au bout des choses, de ne jamais oublier le contexte, dans le travail historique comme dans l'existence réelle. Alors, citoyen du monde ? Il hésite. Le terme ne le convainc pas tout à fait. "Il me fait trop penser à Che Guevara ou à Claude Lévi-Strauss, pour qui la théorie passait avant toute chose." Mais pas question d'accepter l'étiquette d'"exilé", cette "tarte à la crème" devenue indigeste à force d'être servie. Ni celle d'immigré, trop décalée. "On est passé en dix ans de l'immigration à la circulation. Les pays riches ont fermé leurs frontières et les businessmen occidentaux parcourent le monde en retrouvant partout le même Hôtel Sheraton." Lui s'adapte, s'imprègne, "écoute", comme il aime à dire, en mélomane émérite. Sur ce dernier terrain, il n'a guère eu d'efforts à faire en arrivant aux Etats-Unis. Car s'il a grandi bercé de musique classique indienne et de succès de Bollywood, il s'abreuve de jazz et peut chanter par coeur, en s'accompagnant à la guitare, une cinquantaine de chansons de Bob Dylan. Tout juste a-t-il dû expliquer à son agent immobilier qu'après neuf ans passés en Europe il voulait continuer à faire ses courses à pied et qu'il serait donc très bien en appartement. "Une hérésie", sourit-il. Alors indien, européen, américain ? Ou plutôt "citoyen du monde" ? Il sourit : "Par défaut." Nathaniel Herzberg
13/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/13/citoyen-du-village-global_1291287_3216.html
Batailles navales au pôle Nord
Etats-Unis, Russie, Canada et Danemark convoitent leur part de richesses en Arctique.
En août 2007, alors que la fonte de la banquise arctique battait des records, des plongeurs d'une expédition scientifique russe, dans un geste aussi symbolique que spectaculaire, ont planté le drapeau russe à 4 200 mètres sous la calotte glaciaire, à la verticale du pôle Nord. Réplique immédiate du ministre canadien des affaires étrangères, Peter MacKay : "Nous ne sommes plus au XVe siècle. Nous ne pouvons plus voyager à travers le monde, planter des drapeaux et proclamer que ce territoire nous appartient." La bataille de l'Arctique sera l'un des grands dossiers sensibles du XXIe siècle. La fonte de la banquise suscite depuis l'an 2000 un fort regain d'intérêt des pays riverains - Russie, Etats-Unis, Canada, Danemark et Norvège - et du monde des affaires. Les enjeux, géopolitiques, économiques, environnementaux, sont à la mesure du changement majeur que va provoquer le réchauffement climatique. On prédit ainsi que le mythique passage du Nord-Ouest sera en eau entre 2015 et 2050, que la limite de la calotte glaciaire sera 100 kilomètres plus au nord d'ici dix à quinze ans et que le pôle Nord sera libre de glace durant l'été d'ici à 2030 ! Les avantages commerciaux de la liquéfaction de la banquise sont évidents. Une route transpolaire reliant Churchill et Mourmansk, les deux grands ports nordiques canadien et russe, sera ouverte avant dix ans. Deux autres routes arctiques se dessinent : le passage du Nord-Ouest, côté canadien, et la "route du Nord" ou passage du Nord-Est, côté russe. De spectaculaires raccourcis, comparés aux canaux de Suez et Panama. La route maritime du pôle Nord permettra de réduire de 40 % les trajets des navires marchands entre Asie et Europe. La navigation y restera cependant plus dangereuse qu'ailleurs, avec des risques d'accidents et de pollution majeure. L'océan Arctique cache un autre trésor inestimable : 22 % des ressources énergétiques mondiales "non découvertes mais techniquement exploitables", dont 13 % des réserves de pétrole et 30 % de celles de gaz, selon la Commission géologique américaine. Sans compter le plomb, le zinc, l'or et les diamants... Les pays du pourtour arctique revendiquent désormais leur part du gâteau. En mer de Beaufort, Américains et Canadiens ne s'entendent pas sur le tracé de la ligne de partage des eaux au large du Yukon et de l'Alaska, avec de riches réserves de pétrole en jeu. Le long de la côte sibérienne, les Russes veulent étendre leur souveraineté jusqu'à 200 milles des côtes. Mais les Etats-Unis considèrent que ce passage doit devenir un axe de navigation libre d'accès, tout comme le passage du Nord-Ouest vu comme un détroit international ouvrant sur deux océans. Le Canada estime que la route, qui serpente sur 5 000 kilomètres dans son archipel arctique, fait partie de ses eaux territoriales. Canadiens et Danois se disputent, depuis trente ans, la propriété de l'île de Hans, entre le Groenland et l'île canadienne d'Ellesmere, avec à la clé la souveraineté sur une zone économique de 200 milles marins... Le découpage du plateau continental de l'Arctique est l'enjeu le plus crucial, si l'on en juge par la course engagée entre la Russie, les Etats-Unis, le Canada et le Danemark pour cartographier les fonds marins entourant la dorsale de Lomonossov, une zone de 1,75 million de km2. Cette chaîne de montagnes sous-marines s'étend sur 2 000 kilomètres. Prouver que la dorsale constitue le prolongement naturel de son propre plateau continental permettrait d'étendre la souveraineté économique de 200 à 350 milles des côtes. Les Russes estiment en avoir le droit : dans un dossier, déposé en 2001 à la Commission des Nations unies sur les limites du plateau continental, ils réclament 45 % de la zone litigieuse ! Le Canada a conclu en 2008 que la dorsale de Lomonossov était aussi le prolongement naturel de son territoire, position qu'il défendra dans un dossier à présenter à l'ONU avant 2013. Des experts américains estiment que la dorsale est une structure géologique autonome. La bataille navale ne fait que commencer. Anne Pélouas
13/01/2010
planete
https://www.lemonde.fr/planete/article/2010/01/13/batailles-navales-au-pole-nord_1291289_3244.html
L'Afrique, à nouveau convoitée, cherche la voie de son rebond, par Philippe Bernard
Le retentissement qu'a eu en Afrique l'élection de Barack Obama confirme le besoin inassouvi des Africains de reconnaissance et leur manque de figure emblématique.
Pour l'Afrique, les années 1990 avaient été marquées par une terrible descente aux enfers. Livré à ses démons suite au désengagement des grandes puissances libérées de leur guerre froide, étranglée par une orthodoxie financière imposée par les pays riches, le continent avait vécu une longue plongée "au coeur des ténèbres". Le génocide des Tutsi au Rwanda en 1994 s'était prolongé par une interminable guerre civile (1996-2002) dans l'immense Zaïre voisin (actuelle République démocratique du Congo, RDC). Du Liberia à la Sierra Leone, des chefs de guerre mus par une folie meurtrière alimentée par les richesses du sous-sol avaient transformé des enfants en machines à tuer (1989-2003). Du Soudan à l'Angola et de la Somalie au Congo, l'Afrique était une mosaïque de guerres civiles pour le contrôle des ressources et du pouvoir. Dans de nombreux pays, la conquête du multipartisme, en exacerbant les rivalités ethniques, avait débouché sur la violence. Même la Côte d'Ivoire, vitrine de la France en Afrique, offrait le triste spectacle de l'éclatement sous les coups d'une xénophobie érigée en stratégie politique. Seule la fin de l'apartheid sud-africain (1994), elle aussi facilitée par la fin de la rivalité Est-Ouest, apportait une lueur d'espoir en offrant le spectacle du triomphe de la raison humaine. A l'orée du XXIe siècle, le continent semblait aspiré par une spirale autodestructrice. Une décennie plus tard, nul ne se hasarderait à prétendre que le chaos appartient définitivement au passé. Il suffit de tourner les yeux vers le Soudan (Darfour et Sud-Soudan), vers l'est de la RDC, la Somalie, Madagascar ou la Guinée, pour constater que tous les feux sont loin d'être éteints. Il suffit de considérer les piètres indicateurs sociaux du continent : 52 ans d'espérance de vie, 37 % d'illettrés - pour se rappeler que l'Afrique demeure une planète à part. Pourtant, il est difficile de nier que, aujourd'hui, le tableau a notablement changé. En Afrique même, d'abord, où, des Grands Lacs au Liberia, en passant par l'Angola et le Congo, les principaux conflits ont pris fin ou se sont apaisés. La victoire de Paul Kagamé au Rwanda, comme celle de Laurent-Désiré Kabila en RDC, de Denis Sassou-Nguesso au Congo ou d'Eduardo Dos Santos en Angola sont d'abord militaires. La chute de Charles Taylor au Liberia résulte à la fois de pressions internationales et de l'épuisement du pays, saigné à blanc. Les premières années de la décennie 2000 auront été marquées par un réveil lent, inégal, incertain, mais manifeste. Certes, la carte de l'Afrique démocratique reste étriquée. Hormis l'Afrique du Sud, seuls des pays comme le Ghana, le Bénin ou le Mali apparaissent comme des démocraties à peu près établies et apaisées. Même au Sénégal, pays qui, en 2000, avait offert à l'Afrique sa première alternance politique pacifique, la pratique démocratique s'est étiolée. Ailleurs, les élections qui ont suivi les conflits civils ont débouché sur une démocratie de façade qui masque la domination d'un homme fort prêt à tout pour la conserver, y compris en changeant la Constitution à sa guise, en achetant des voix ou en restreignant les libertés. Une génération nouvelle de dirigeants a émergé, ici et là, sans qu'aucun puisse être considéré sérieusement comme une figure exemplaire par la population du continent : un milliard d'hommes et de femmes dont 43 % (au sud du Sahara) ont moins de 15 ans. Le retentissement qu'a eu en Afrique l'élection de Barack Obama, dont le père était un émigré kényan, confirme le besoin inassouvi des Africains de reconnaissance et leur manque de figure emblématique. Considéré à tort par les Africains comme l'un des leurs, le président américain a comblé, un temps, une partie de la frustration des foules du continent. Dans le monde aussi, le statut de l'Afrique a changé. De continent ignoré et maudit, il est devenu en ce début de XXIe siècle l'un des lieux les plus convoités de la planète. La Chine, dont les investissements en Afrique ont été multipliés par 15 entre 2003 et 2008, a, la première, donné le signal de cette ruée sur les matières premières, entraînant d'autres pays émergents comme l'Inde et le Brésil. L'Afrique représente moins de 2 % du commerce mondial, mais, en diversifiant ses partenaires, elle est sortie de son tête-à-tête malsain avec les anciens colonisateurs. Les Américains, soucieux de diversifier leurs approvisionnements pétroliers et de lutter contre le terrorisme, ont eux aussi réinvesti le continent au cours de la dernière décennie. Curieusement, la France, pourtant très marquée par des siècles d'histoire commune, tarde à rénover ses liens avec l'Afrique et à moderniser les instruments d'une présence contestée. Il est vrai que les Africains lui reprochent, de façon contradictoire, tantôt sa passivité, tantôt son interventionnisme, comme pour prolonger une histoire franco-africaine faite d'amour et de haine. Il est trop tôt pour savoir si les artisans africains du "rebond" sauront tirer à leur profit la concurrence que se font désormais de nombreuses puissances pour les séduire. Ou si, comme on le voit à travers certains contrats léonins signés pour l'accès aux ressources du sous-sol, ou avec l'achat massif de terres par des sociétés asiatiques, la nouvelle ruée sur l'Afrique va prendre, cinquante ans après les indépendances, les allures d'une nouvelle colonisation. Courriel : bernard@lemonde.fr. Philippe Bernard (Londres, correspondant) et Philippe Bernard (Service international)
13/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/13/l-afrique-a-nouveau-convoitee-cherche-la-voie-de-son-rebond-par-philippe-bernard_1291285_3232.html
"La décennie ""Loft Story"", par Sylvie Kerviel"
Qui aurait pu imaginer que les ébats aquatiques de deux jeunes inconnus, Jean-Edouard et Loana, dans la piscine d'un loft préfabriqué de la Plaine Saint-Denis, rencontreraient un tel écho médiatique ?
Qui aurait pu imaginer que les ébats aquatiques de deux jeunes inconnus, Jean-Edouard et Loana, dans la piscine d'un loft préfabriqué de la Plaine Saint-Denis, rencontreraient un tel écho médiatique ? Cette scène, diffusée sur M6 où elle a été vue par des millions de personnes, symbolise l'irruption de la télé-réalité dans le paysage audiovisuel hexagonal. C'était au printemps 2001 et la "petite chaîne qui monte" était la première en France à oser mettre à l'antenne un genre controversé, apparu un an auparavant aux Pays-Bas sous le nom de "Big Brother", en référence au livre de George Orwell, 1984. Un concept inventé par le producteur néerlandais John de Mol, fondateur de la société de production Endemol, pour qui, derrière tout téléspectateur, il y a un voyeur qui sommeille. Le principe ? Des individus des deux sexes, qui ne se connaissent pas, sont enfermés dans une villa et filmés en continu 24 heures sur 24 pendant plusieurs mois. Des éliminations, chaque semaine, mettent en rivalité les candidats, créant ainsi un semblant de dramaturgie. Cette occasion offerte à des anonymes de vivre, selon l'expression d'Andy Warhol, leur "quart d'heure de célébrité", a suscité un engouement planétaire pour ce concept de "télé-réalité", tout au long de la décennie. "Si je lançais un appel pour recruter dix candidats à une émission de télé-réalité prêts à sauter d'un avion sachant qu'on ne compte que neuf parachutes, les gens se précipiteraient tant ils sont avides de notoriété", se plaît à raconter John de Mol. Après avoir essaimé de Rotterdam à Rio, d'Istanbul au Cap, connu de multiples avatars et déclinaisons, musicales, gastronomiques, agraires voire pornographiques, suscité des polémiques (les candidats doivent-ils être payés au même titre que des acteurs ?), la télé-réalité, avec son ton et sa manière de propulser au rang de vedettes des individus lambda, s'est immiscée dans tous les genres de programmes, des jeux à l'information en passant par les fictions. Internet et la presse people ont accompagné la déferlante, relayant l'éphémère ascension vers la célébrité d'inconnus vite remplacés par d'autres. Annoncé à de multiples reprises, le déclin de ce genre télévisuel aux ficelles plus qu'usées n'est pas encore perceptible, si l'on en croit le nombre de projets présentés par les sociétés de production lors des marchés internationaux des programmes. TF1 a certes annoncé en ce début d'année qu'il n'y aurait pas de saison 8 de la "Star Academy", les candidats ayant désormais intégré les règles du jeu, "au point qu'ils sont devenus plus forts que nous", a justifié le directeur de programmes de la chaîne française. TF1 avait en 2001 dans Le Monde, par la voix de son patron de l'époque, Patrick Le Lay, accusé M6 de se vautrer dans la fange avec "Loft Story", symbole de "la télé-poubelle". La chaîne est devenue, dès l'année suivante et jusqu'à aujourd'hui, la plus friande du genre en France. Courriel : kerviel@lemonde.fr. Sylvie Kerviel
13/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/13/la-decennie-loft-story-par-sylvie-kerviel_1291286_3232.html
ONU ou G20 ?
Ce siècle s'affirme d'abord comme celui de la perte de puissance des Occidentaux ; celui de l'ébranlement de la domination - politique, idéologique, économique, culturelle - de l'alliance américano-européenne qui façonna la dernière moitié du XXe.
Le combat contre le terrorisme islamiste masque les véritables enjeux. Cette bataille est certes importante : les djihadistes peuvent encore faire beaucoup de mal. Ils s'y emploient chaque jour depuis les attentats réussis du 11 septembre 2001. Ils vont continuer. Mais parions que cet affrontement ne sera pas l'affaire stratégique du XXIe siècle. Ce siècle s'affirme d'abord comme celui de la perte de puissance des Occidentaux ; celui de l'ébranlement de la domination - politique, idéologique, économique, culturelle - de l'alliance américano-européenne qui façonna la dernière moitié du XXe. Ce siècle est celui du glissement non pas progressif, mais ultrarapide des plaques tectoniques de la géopolitique du pouvoir. Il est celui d'une redistribution des cartes qui voit la prépondérance occidentale chaque jour un peu plus ébranlée. La Chine, le Brésil, l'Inde, la Russie émergent, aux côtés d'autres plus petits mais pas moins décidés à asseoir leur parcelle de pouvoir régional, comme l'Iran, le Mexique, le Nigeria ou l'Afrique du Sud. Ils ont leurs atouts. Ils ont "faim" de succès ; ils n'éprouvent aucune fatigue existentielle ; ils croient en leur avenir. Quand la situation l'exige, c'est-à-dire quand ils ont quelque chose à perdre, ils jouent le jeu d'un multilatéralisme informel. C'est ce qui s'est passé avec la constitution du G20 à l'occasion de la crise économique et financière : anciennes et nouvelles puissances se sont réunies pour empêcher un effondrement de l'économie mondiale. Le problème est qu'il n'y a pas l'équivalent du G20 sur bien d'autres sujets qui requerraient un tel forum : lutte contre la prolifération nucléaire ; terrorisme et Etats défaillants ; réchauffement climatique - toutes questions qui marqueront l'époque. L'ONU, inventée au sortir de la seconde guerre mondiale, n'est plus un forum adapté. Son Assemblée générale - plus de 200 membres - est impuissante. Son Conseil de sécurité, organe plus réduit chargé du maintien de la paix, n'est plus représentatif de la géographie du pouvoir actuel : ni l'Inde, ni le Brésil, ni aucun grand pays du Moyen-Orient n'y dispose d'un siège permanent. Comme il est peu probable qu'une épidémie d'angélisme kantien se propage dans les décennies à venir, le monde restera une affaire de conflits - de pouvoir, d'influence, d'intérêts. Pour que ces conflits dégénèrent le moins possible, il faut, dans un système international réformé, faire une place aux puissances émergentes - la Chine, l'Inde, le Brésil notamment -, afin de les mettre face à leurs responsabilités de Grands. Reconnaître leurs droits, c'est leur assigner des devoirs, du désarmement nucléaire à l'environnement.
13/01/2010
idees
https://www.lemonde.fr/idees/article/2010/01/13/onu-ou-g20_1291283_3232.html
Ce siècle avait dix ans...
Un numéro spécial pour raconter et analyser les événements marquants de la première décennie du XXIe siècle. Réchauffement climatique, généralisation des usages d'Internet, menaces terroristes... Portrait d'une planète en pleine mutation.
"Ce siècle avait deux ans ! Rome remplaçait Sparte Déjà Napoléon perçait sous Bonaparte..." Quand Victor Hugo écrivit ce poème, en 1831, il savait déjà ce que son siècle - le XIXe - laisserait comme trace dans l'Histoire. Le siècle de toutes les révolutions, populaire, scientifique, industrielle, qui enfanteront le monde moderne, celui du XXe siècle. Que peut-on dire, en 2010, sur ce XXIe siècle qui "a dix ans" ? Et d'abord : à quel moment commence vraiment un nouveau siècle ? Jamais le 1er janvier de la première année, évidemment... D'autant que, on l'a vu lors du passage à l'an 2000, la querelle calendaire oppose parfois vivement religieux, scientifiques, historiens : il n'existe pas d'année zéro dans le calendrier grégorien, une année en double zéro devrait donc être considérée comme la dernière du siècle finissant ! Qu'importe le flacon, pourvu qu'on ait l'ivresse... Le Monde et ses journalistes ont relu jusqu'à la lie l'actualité de ces dix dernières années pour se poser "la" question : au cours de la décennie 2000 qui vient de s'écouler, quels sont les événements fondateurs du XXIe siècle ? La date du 11 septembre 2001, ce jour où des avions de ligne s'écrasaient sur les gratte-ciel de New York et sur le Pentagone, en direct sur les écrans de télévision du monde entier, vient évidemment tout de suite à l'esprit. Pour la première fois depuis Pearl Harbour, en 1941, les Etats-Unis d'Amérique étaient frappés sur leur territoire. Les attentats perpétrés par les terroristes islamistes d'Al-Qaida semaient l'effroi et le doute au coeur de la seule superpuissance de la planète, la Rome des temps modernes, annonçant un nouveau siècle de feu et de fer. Peut-être... ou peut-être pas. La fin de l'Histoire, prophétisée par Francis Fukuyama après la chute du mur de Berlin, en 1989, n'a pas eu lieu. Reste à savoir ce que l'Histoire nous réserve en ce siècle. En 2001, elle donnait une résonance tragique à la fameuse phrase attribuée naguère à Malraux : le XXIe siècle serait religieux ou ne serait pas... Telles que les journalistes du Monde les ont décryptées dans ce supplément exceptionnel, les dix premières années du siècle ont vu, de fait, émerger toutes sortes de religions. De la mondialisation à Internet, de l'économie à l'écologie, de l'infiniment petit à l'infiniment grand, les lecteurs de notre quotidien pourront découvrir ou redécouvrir une planète et une humanité en mutation, pour le meilleur ou pour le pire. Le citoyen du monde, affranchi des Etats-nations sans l'être pour autant de ses racines, verra l'Afrique se réveiller, le climat se réchauffer, le génome se décrypter, l'Europe se déployer, la Chine s'imposer, le sport se dévoyer. Peut-être... ou peut-être pas. Comme le siècle cher à Hugo, le XXIe est déjà celui de nombre de révolutions. Certaines bousculent déjà nos certitudes, nos traditions, notre mode de vie. La révolution de la télé-réalité, celle du numérique, celle de ce nouveau mariage civilisé qu'est le pacs, celle du "risque zéro"... Le risque zéro n'existe pas pour ce siècle balbutiant. Qui, en 1910, imaginait que quatre ans plus tard commencerait l'effroyable boucherie de la Grande Guerre ? Mais qui envisageait que l'homme marcherait sur la Lune ? Le Monde ne vous promet pas la Lune. Mais vous présente ses meilleurs voeux pour les 90 ans à venir... Pascal Galinier
13/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/13/ce-siecle-avait-dix-ans_1291282_3238.html
Deux enfants retrouvés morts dans une baignoire à Bastia, la mère s'accuse
Deux enfants de 3 et 6 ans ont été découverts morts immergés dans une baignoire dans l'appartement familial, mercredi 13 janvier à Bastia, après l'alerte de leur mère, qui dit les avoir tués, a-t-on appris de sources proches de l'enquête.
Deux enfants de 3 et 6 ans ont été découverts morts immergés dans une baignoire dans l'appartement familial, mercredi 13 janvier à Bastia (Corse), après l'alerte de leur mère qui dit les avoir tués, a-t-on appris de sources proches de l'enquête."qu'elle venait de tuer ses enfants""La thèse de l'homicide semble la plus probable, mais doit être validée par les investigations" La mère a alerté la police à la mi-journée en indiquant , selon une source proche de l'enquête. , a indiqué de son côté le procureur de la République de Bastia, Jean-Jacques Fagni. Malgré les déclarations de la mère, l'hypothèse d'un accident n'est pas exclue. Agée de 37 ans, la mère a été placée en garde à vue au commissariat de Bastia. Deux médecins devraient l'examiner afin d'établir son état physique, psychologique et psychiatrique. Le père devrait être auditionné également mercredi après-midi. Le couple était en instance de divorce. La mère vivait avec ses deux enfants dans un appartement à Cardo, un hameau situé sur les hauteurs de Bastia. Selon une source proche de l'enquête, la séparation du couple pourrait être à l'origine du drame. Les enquêteurs de la police judiciaire, chargés de l'enquête, procédaient à des prélèvements techniques et scientifiques dans l'appartement, situé au rez-de-chaussée d'un immeuble. Les instituteurs des deux enfants et l'adjoint au maire de Bastia se sont immédiatement rendus sur place. Les corps des deux victimes devaient être conduits au dépositoire de l'hôpital Falconaja de Bastia avant d'être autopsiés, vraisemblablement dans un institut médico-légal sur le continent.
13/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/13/deux-enfants-retrouves-morts-dans-une-baignoire-a-bastia-la-mere-s-accuse_1291355_3224.html
Le photographe américain Dennis Stock est mort
Il était notamment l'auteur d'une célèbre image de James Dean marchant transi, le col relevé sous la pluie à Times Square en 1955.
Le photographe américain Dennis Stock, membre de l'agence Magnum, est mort, lundi 11 janvier, en Floride, à 81 ans. De lui, on connaît forcément une image, inoubliable : James Dean marchant transi, le col relevé sous la pluie à Times Square en 1955. Les deux jeunes gens étaient amis, et le photographe a aussi réalisé un reportage pour le magazine Life en Indiana, dans la ferme familiale de James Dean, au milieu des cochons. Après la mort de l'acteur, le photographe quitte la Californie pour se consacrer à sa passion de la musique. Il photographie alors les plus grands noms du jazz, de Louis Armstrong à Billie Holiday en passant par Sidney Bechet. Parmi les images mémorables de Dennis Stock, qui n'a jamais photographié que des sujets en accord avec ses convictions, il faut citer son travail sur les hippies. Le photographe les présentait comme des êtres libres et respectables, en quête de spiritualité. A partir des années 1970, après avoir réalisé plusieurs films, le photographe installé à Woodstock passe à la couleur et publie de nombreux livres consacrés aussi bien à des paysages naturels qu'urbains. Ses derniers travaux étaient des images de fleurs presque abstraites. Claire Guillot
13/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/13/le-photographe-americain-dennis-stock-est-mort_1291350_3246.html
"""Dans tous les cas, il y aura des Clio produites à Flins"""
Patrick Pelata, directeur général de Renault, confirme que le constructeur étudie une nouvelle répartition de la production entre ses usines de Flins et de Bursa (Turquie). Elle sera fonction de la montée en puissance à Flins de la Zoé, une voiture électrique.
La polémique sur la possible délocalisation de la production de la Renault Clio vers la Turquie se réglera au plus haut sommet de l'Etat. Nicolas Sarkozy a convoqué à l'Elysée Carlos Ghosn, PDG de Renault, samedi 16 janvier. La rencontre devrait avoir lieu dans l'après-midi. Son but : entendre les arguments du constructeur sur ses projets à propos du futur modèle de Clio, la Clio IV, qui sera lancé en 2013. Depuis plusieurs jours, les membres de gouvernement se relaient pour mettre en garde le constructeur sur le respect des engagements qu'il avait pris en plein cœur de la crise de 2009. En échange d'un prêt bonifié de 3 milliards d'euros, Renault avait promis qu'il ne procéderait à aucune fermeture d'usine ou aucun licenciement en France. Mais des rumeurs sur un possible basculement de la production de Clio de Flins (Yvelines) vers l'usine de Bursa, en Turquie, ont fait craindre au gouvernement que ces engagements ne soient pas tenus. En toile de fond, la campagne des élections régionales rend sensible la question du maintien des emplois sur le territoire français. Une rencontre a eu lieu mercredi entre Patrick Pelata, directeur général de Renault, et Christian Estrosi, ministre de l'industrie. Mais peu de chosea filtré dans l'attente du rendez-vous entre M. Ghosn et M. Sarkozy. "J'ai fait savoir [à Patrick Pelata] que nous n'étions pas favorables à ce que la Clio IV soit produite en Turquie", a affirmé M. Estrosi. LA CLIO DÉJÀ LARGEMENT PRODUITE EN TURQUIE La Clio actuelle est déjà largement produite dans l'usine de Bursa. Ainsi, en 2009, ce modèle a été fabriqué à 179 500 exemplaires en Turquie, contre 125 400 à Flins et 25 450 en Espagne. Au chiffre de production de Flins, il faut ajouter 14 600 Clio II, l'ancien modèle qui a été rapatrié de Slovénie vers la France en 2009. Partant de ce constat, M. Pelata a annoncé que le constructeur était en train d'étudier une nouvelle ventilation de cette répartition en fonction de la montée en puissance de la production de la Zoé, une voiture électrique qui sera lancée en septembre 2011. Quelle sera le volume de production de ce modèle ? Aujourd'hui personne n'est capable de le dire. D'où les conjectures actuelles. "Dans tous les cas, il y aura des Clio produites à Flins", a affirmé M. Pelata, qui souligne que l'avenir du site de Flins (3 300 salariés), avec plus ou moins de Clio, est de toute façon pérennisé grâce au véhicule électrique. Stéphane Lauer
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/dans-tous-les-cas-il-y-aura-des-clio-produites-a-flins_1291345_3234.html
Le prix Simone-de-Beauvoir attribué à deux Chinoises
Le prix, qui vise à récompenser des personnalités s'étant illustrées par leur action en faveur de la liberté des femmes dans le monde, a été attribué à Guo Jianmei et Ai Xiaoming.
Après la romancière bangladaise Taslima Nasreen et l'ex-députée néerlandaise d'origine somalienne Ayaan Hirsi Ali en, puis en 2009, les militantes iraniennes du collectif "Un million de signatures pour l'abrogation des lois discriminatoires envers les femmes en Iran", le jury présidé par Julia Kristeva et Sylvie Le Bon de Beauvoir a décerné, lundi 11 janvier, le prix Simone-de-Beauvoir pour la liberté des femmes conjointement à Guo Jianmei et Ai Xiaoming. Créé le 9 janvier 2008 dans le cadre d'un colloque célébrant la naissance de l'auteur du Deuxième Sexe, ce prix a été créé pour récompenser des personnalités s'étant illustrées par leur œuvre artistique ou leur action à promouvoir la liberté des femmes dans le monde. " Aujourd'hui, comme l'a rappelé Julia Kristeva, la Chine est un pays qui fascine autant qu'il fait peur et dans lequel les femmes ne craignent pas de prendre leur destin en main. " Précisant : " Les actions de Guo Jianmei, qui œuvre à la promotion d'une évolution du droit dans son pays, et Ai Xioming, professeur et vidéaste qui braque son objectif sur les tragédies chinoises touchant les femmes mais pas seulement, sont parfaitement complémentaires. Toutes deux incarnent un discours moderne et nouveau, un esprit humaniste qu'elles propagent de manière concrète, à leur niveau. Et c'est cela que nous avons voulu saluer et soutenir. Car les droits de l'homme ne s'exportent pas de l'extérieur, et ne se bradent pas à coups de contrats." Responsable et avocate au sein de l'ONG " Women's law studies and legal aid center ", Guo Jianmei travaille à la promotion de changements dans le dispositif législatif chinois afin d'améliorer la condition des femmes, notamment en matière de violence, de harcèlement sexuel ou discrimination au travail. Professeur au Département de langue et littérature chinoise, directrice de littérature comparée, spécialiste de l'histoire du féminisme, actrice virulente du " mouvement de défense des droits ", Ai Xiaoming est également connue pour ses documentaires traitant des violences faites aux femmes (White Ribbon, 2004) ; des conflits opposant paysans et administrations locales (Taishicun, 2005) ou encore de la contamination par le virus du sida des populations du Henan et du Hebei (The Epic of Central Plains, 2007). N'ayant pas obtenu l'autorisation de se rendre en France pour recevoir sa récompense, elle a fait parvenir au jury un texte que nous publions ici dans son intégralité. Une fleur sous un ciel de neige, discours de remerciement de Mme AI Xiaoming Un soir, à la fin du mois de décembre, un appel téléphonique m’apprit que j’étais lauréate du Prix Simone de Beauvoir. Cette année, les deux lauréates sont chinoises : Mme Guo Jianmei, juriste à Pékin, et moi-même. Lorsque je recevais cet appel, j’étais dans la salle d’attente d’une gare. J’étais trop légèrement habillée et je frissonnais. J’étais au milieu d’une foule de voyageurs encombrés de bagages. Les trains étaient retardés par un front froid venu du Nord. Comment croire à une pareille nouvelle ? J’ai ensuite envoyé des messages à ma famille et à mes amis. J’ai aussi informé mon université. Certains m’ont fait part de leurs chaleureuses félicitations. D’autres ont éclaté de joie. D’autres encore ne comprenaient pas. J’ai dû leur expliquer qui était Simone de Beauvoir, que son combat pour les droits des femmes ne se limitait pas à l’Europe, et ne s’arrêtait pas aujourd’hui, 100 ans plus tard. Qu’un prix d’une telle importance me soit attribué provoque chez moi un sentiment étrange. Je suis un peu gêné pour en parler. Ces dernières années, je n’ai pas eu une compréhension claire de ma propre situation. Parce que je réalise des films, mes amis avocats et moi avons été confrontés à la violence de la criminalité organisée, mais aussi à celle de la police officielle et de ses services spécialisés. Certains me disent : le jour où le filet se resserrera, il sera toujours temps d’aviser (je ne peux alors pas m’empêcher de penser à une scène d’un roman de Gabriel Garcia Marquez : un couteau à la main, un chef de clan cuisine une personne gênante en un plat de poisson aux légumes marinés ; ce mets, décoré de coriandre, est ensuite servi à un banquet officiel). De ce point de vue, l’attribution de ce prix m’est très précieuse. En plein hiver, au coeur de la saison la plus froide, voilà qu’une fleur tombe du ciel. C’est un honneur comme on ne m’en avait pas fait depuis bien longtemps. Cette considération venue de loin est comme une bénédiction. Comme si la lumière des idéaux de Simone de Beauvoir soudain m’éclairait. Ma famille, mes amis, moi-même, nous savons que, malgré la paranoïa de tous les chefs de clan, l’indifférence généralisée, la prudence et l’isolement, nombreux sont ceux qui sont attentifs à notre action et nous soutiennent. Nombreux sont ceux qui partagent avec nous l’amour de la liberté, la liberté du poisson qui nage comme il l’entend, et l’amour de la dignité humaine, aussi immense que la mer agitée par les vagues. À l’automne 2008, je suis venue en France pour participer à Paris au festival Shadow du cinéma chinois indépendant. Je marchais dans les rues de Paris avec un ami et celui-ci m’a emmené dans un café. Nous avons bu du rhum. À l’entrée garnie de feuillages et de fleurs, deux jeunes filles souriantes, originaires du Moyen-Orient, nous ont laissés prendre des photos en guise de souvenir. C’est un de ces cafés qui jalonnent les charmants coins de rue de Paris. Mon ami m’apprit que c’était dans ce café, les Deux Magots, que Simone de Beauvoir et Jean Paul Sartre venaient discuter et écrire. La remise du prix a lieu aux Deux Magots. Malheureusement, la police m’a empêché de renouveler mon passeport et je ne peux pas être aujourd’hui présente parmi vous. Je me suis battue de toutes mes forces, mais ce fut en vain, et j’ai dû abandonner tout espoir d’être présente. Au même moment, dans notre merveilleux pays, surviennent tant d’événements majeurs. Un écrivain [Lu Xiaobo] est mis en cause pour six articles qu’il a signés et est condamné à passer 4021 jours en prison ; alors que Shéhérazade n’a besoin que de 1001 nuits de contes pour échapper à son despote. Ailleurs en Chine, une femme chef d’entreprise, dont la maison était menacée de démolition, pour empêcher que sa famille ne soit battue par les voyous que recrutent les promoteurs, s’est immolée par le feu. Le premier jour de cette année, ma collaboratrice pour la réalisation des documentaires a été à nouveau arrêtée par la police. J’avais tellement envie de rédiger tranquillement ce discours de remerciements, mais j’ai été sans cesse interrompue par ces nouvelles. Devant l’avalanche d’événements imprévus, alors que le monde est partout en crise, je ne suis qu’un acteur très modeste. Permettez-moi d’exprimer ma gratitude à tous les membres du comité de ce prix et en particulier à sa présidente, le professeur Julia Kristeva. Ce prix qui célèbre “la liberté des femmes” porte le nom d’un penseur et d’une combattante qui a immensément contribué à l’émancipation des femmes et des êtres humains. Aujourd’hui, vous accordez ce prix à une femme chinoise, simple universitaire, qui s’est récemment consacrée à la réalisation de films documentaires indépendants. C’est avec une grande humilité que j’accepte cette fleur venue du ciel. Le refrain d’une chanson chinoise de l’époque de la guerre anti-japonaise dit : “Au mois de mai, les fleurs éclosent et viennent couvrir le sang des patriotes”. Voilà ce que cette fleur venue de la capitale de la liberté nous dit : la liberté et l’émancipation sont possibles. Je remercie Simone de Beauvoir Je remercie la fleur pleine d’esprit qu’elle m’envoie. Alors que, dans ce nouveau siècle, la neige recouvre la Chine, une fleur vient éclairer notre chemin épineux vers l’honneur. Le 5 janvier 2010 Traduction de Gilles GUIHEUX Copyright AI Xiaoming
13/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/13/le-prix-simone-de-beauvoir-attribue-a-deux-chinoises_1290456_3246.html
Grippe A : chronique d’un échec
Roselyne Bachelot a été entendue par la commission des affaires sociales de l'Assemblée, mardi, afin d'évoquer l'évolution de l'épidémie de grippe A
Roselyne Bachelot a été entendue par la commission des affaires sociales de l'Assemblée, mardi 12 janvier, afin d'évoquer l'évolution de l'épidémie de grippe A et le surplus de stocks de vaccins visant à lutter contre celle-ci. La ministre se retrouve accusée de gestion catastrophiste de l'épidémie et d'avoir agi précipitamment en signant les contrats de vaccins avec les laboratoires pharmaceutiques. Une grosse opération financière qualifiée aujourd'hui de gâchis colossal. Roselyne Bachelot a donc annoncé que les commandes en cours, "ni livrées, ni payées", seraient résiliées. 50 millions de doses, sur 94 commandées, seraient donc annulées. Le gouvernement a-t-il vu trop grand ? N'aurait-il pas été accusé de négligence si ses commandes de vaccins et de Tamiflu avaient été moins massives ? Qu'en est-il de la mission d'information parlementaire réclamée par le PS pour faire le point sur la gestion gouvernementale de l'épidémie annoncée ? Ca vous regarde fait le point ce soir. Invités : Valérie Boyer, députée UMP Michel Chassang, président de la confédération des syndicats médicaux français Antoine Flahault, directeur de l'Ecole des hautes études en santé publique Jean-Marie Le Guen, député PS <a href="http://www.coveritlive.com/mobile.php?option=com_mobile&task=viewaltcast&altcast_code=6766bcf64c" mce_href="http://www.coveritlive.com/mobile.php?option=com_mobile&amp;task=viewaltcast&amp;altcast_code=6766bcf64c" >Grippe A : chronique d’un échec</a>
13/01/2010
a-la-une
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Le taux du Livret A est maintenu
La Banque de France a annoncé, mercredi, recommander le maintien à 1,25 % du taux de rémunération du Livret A, placement préféré des Français.
La Banque de France a annoncé, mercredi, recommander le maintien à 1,25 % du taux de rémunération du Livret A, placement préféré des Français. Cette recommandation vise à préserver le pouvoir d'achat des épargnants, précise la BdF dans un communiqué. Le taux du Livret A est calculé quatre fois par an – en janvier, avril, juillet et octobre – par la Banque de France qui fait une recommandation, la décision finale revenant au gouvernement. Il avait été réduit à 1,25 % le 1er août 2009, puis laissé inchangé en octobre. "La stricte application de la formule de calcul des taux de l'épargne réglementée conduirait à abaisser le taux du Livret A de 1,25 % à 1,00 % au 1er février 2010, ce qui pourrait engendrer une légère érosion du pouvoir d'achat des épargnants au cours des prochains mois, indique la Banque de France dans son communiqué. En conséquence, Christian Noyer, gouverneur de la Banque de France (...), recommande de laisser inchangé à 1,25 % le taux du Livret A, ce qui permettra de maintenir la rémunération de l'épargne réglementée à un taux positif en termes réels." Le taux restera donc inchangé ; la ministre de l'économie, Christine Lagarde, l'a confirmé dans les couloirs de l'Assemblée nationale: "Il m'a paru nécessaire de maintenir ce taux à 1,25 % parce que c'est un taux rémunérateur raisonnable." Ecoutez Christine Lagarde (propos recueillis à l'Assemblée nationale par Patrick Roger) :
13/01/2010
economie
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Ruth Lilly, milliardaire philanthrope
Dernière héritière du géant de l'industrie pharmaceutique Eli Lilly, elle est morte à l'âge de 94 ans, mercredi 30 décembre 2009, dans sa ville natale d'Indianapolis.
La milliardaire philanthrope Ruth Lilly, dernière héritière du géant de l'industrie pharmaceutique Eli Lilly, est morte à l'âge de 94 ans, mercredi 30 décembre 2009, dans sa ville natale d'Indianapolis. Dans la tradition de la philanthropie américaine, Ruth Lilly avait discrètement dispensé autour d'elle des centaines de millions de dollars, dont ont bénéficié musées, hôpitaux, bibliothèques, écoles ou universités de l'Indiana. Férue de poésie, Ruth Lilly avait notamment fait une donation d'un montant de près de 100 millions de dollars au magazine Poetry, une obscure publication littéraire qui n'employait que quatre personnes mais était devenue du jour au lendemain une des institutions culturelles les mieux dotées du pays. Le don avait d'autant plus surpris que le magazine avait à plusieurs reprises refusé de publier les poésies que Ruth Lilly écrivait depuis les années 1930. Antidépresseur Née le 2 août 1915 à Indianapolis, aînée des deux enfants de Josiah K. Lilly Jr., le petit-fils du fondateur de l'empire familial, Ruth Lilly était décrite comme une enfant enjouée, avec un talent particulier pour le français, mais qui aurait connu une adolescence recluse. La jeune fille se déplaçait souvent, selon le Chicago Tribune, sous la protection de gardes armés, peut-être de peur qu'elle soit enlevée par des criminels à la recherche d'une rançon. Mariée à l'âge de 26 ans à un écrivain, Guernsey Van Riper, Ruth Lilly a souffert toute sa vie de dépression et de troubles psychologiques, passant la majeure partie de son temps dans des hôpitaux. Elle n'a pas eu d'enfants et immédiatement après son divorce, en octobre 1981, son frère a fait placer sa fortune sous tutelle. L'héritière, alors âgée de 66 ans, ne pouvait plus faire signer ses chèques que par son avocat. Dans un article publié par Businessweek en 2004, ce dernier, Thomas Ewbank, affirmait toutefois que Ruth Lilly prenait elle-même ses décisions. Le Prozac, mis sur le marché par les laboratoires Lilly en 1988, "a changé sa vie", selon son médecin, Jack Hall, cité dans l'Indianapolis Star. D'après sa famille, grâce au médicament antidépresseur, la dernière partie de sa vie fut aussi la plus enrichissante, notamment à travers ses activités philanthropiques. Ruth Lilly vivait alors à l'abri des regards dans un hôtel particulier d'un quartier chic d'Indianapolis, avec une cinquantaine de personnes à son service. Contrairement à d'autres philanthropes, qui font une donation spectaculaire à une cause unique, Ruth Lilly a choisi d'aider de nombreuses institutions de sa ville natale, sans jamais demander que son nom fût sur les bâtiments qu'elle finançait (même si les bénéficiaires l'ont souvent fait par choix). Elle visitait rarement les fondations qui recevaient ses dons, préférant simplement demander à son chauffeur de passer devant leurs bâtiments, souvent en compagnie de ses infirmières (elle était dans un siège roulant durant ses dernières années). Selon Businessweek, Ruth Lilly gardait une liste des demandes de fonds dans l'ordre où elle les avait reçues et se réunissait au printemps, chaque année, avec son avocat, un représentant de sa banque et ses neveux, pour distribuer ses largesses, au terme d'un processus d'attribution beaucoup moins contraignant que celui de nombreuses autres institutions philanthropiques. Selon l'Indianapolis Star, Ruth Lilly aurait distribué au cours de sa vie près de 800 millions de dollars, soit près de la moitié du montant estimé de sa fortune en 2002. Cela ferait d'elle une des philanthropes les plus généreuses des Etats-Unis. Philippe Bolopion et Philippe Bolopion
13/01/2010
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2010/01/13/ruth-lilly-milliardaire-philanthrope_1291149_3382.html
Tsutomu Yamaguchi, rescapé d'Hiroshima et Nagasaki
Décédé le 4 janvier à Nagasaki à l'âge de 93 ans, il était le seul Japonais reconnu avoir été atomisé à deux reprises : à Hiroshima puis à Nagasaki.
Rarement, le sort se sera autant acharné sur un être. Tsutomu Yamaguchi, décédé le 4 janvier à Nagasaki à l'âge de 93 ans, était le seul Japonais reconnu avoir été atomisé à deux reprises : à Hiroshima puis à Nagasaki. Ingénieur des chantiers navals Mitsubishi Heavy Industries de Nagasaki, il était en voyage pour son entreprise à Hiroshima le 6 août 1945 lorsque le B-29 américain largua sa bombe. Il marchait dans la rue, à 3 kilomètres de l'épicentre de la déflagration. En dépit de graves brûlures sur la partie supérieure du corps, les tympans percés, il avait regagné Nagasaki le lendemain, à 300 kilomètres au sud-ouest. Le 9 août, il rendait compte à son chef de ce qui s'était passé à Hiroshima lorsque eut lieu le second bombardement. Il se trouvait une nouvelle fois à 3 kilomètres du point zéro. Comme tous les Japonais victimes reconnues des bombardements atomiques, Tsutomu Yamaguchi avait un livret, délivré par la municipalité de Nagasaki, attestant qu'il avait été irradié, et qui lui permettait de recevoir des indemnités et de bénéficier d'un suivi médical. Depuis mars 2009, sur son livret figurait la mention certifant qu'il avait également été atomisé à Hiroshima. D'autres atomisés - plus d'une centaine - sont sans doute dans le même cas et ont survécu aux deux explosions, mais ne se sont jamais fait connaître ou n'ont pas été reconnus comme tels. Le bombardement à Hiroshima fit 140 000 morts et celui de Nagasaki 70 000, sur le coup et dans les semaines qui suivirent. Six jours plus tard, le Japon capitulait. Aujourd'hui, le nombre des morts victimes des bombardements s'élève à 250 000 pour Hiroshima et 140 000 pour Nagasaki. Tsutomu Yamaguchi était l'un des 260 000 survivants souffrant de nos jours encore des suites de leur exposition aux radiations. Après la guerre, il travailla comme interprète pour les forces américaines à Nagasaki, puis il enseigna dans une école secondaire. En 2005, il avait commencé à raconter le drame qu'il avait vécu, à la suite de la mort d'un cancer de son deuxième fils, victime des radiations lorsqu'il était âgé de 6 mois. En 2006, il avait participé à un documentaire, Niju Hibaku ("double irradiation"), sur son expérience et lancé un appel aux Nations unies demandant l'abolition des armes nucléaires. Il était l'auteur d'un livre retraçant sa tragique expérience ("Nagasaki-Hiroshima : deux fois atomisé"). Philippe Pons (Tokyo, correspondant) et Philippe Pons
13/01/2010
disparitions
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Daniel Bensaïd, philosophe, cofondateur de la Ligue communiste révolutionnaire
Militant révolutionnaire et théoricien de l'émancipation, figure de Mai-68 et cofondateur de la Ligue communiste révolutionnaire, il est mort à Paris, le 12 janvier, des suites d'une longue maladie.
Militant révolutionnaire et théoricien de l'émancipation, figure de Mai-68 et cofondateur de la Ligue communiste révolutionnaire, Daniel Bensaïd est mort à Paris, le 12 janvier, des suites d'une longue maladie. Il avait soixante-trois ans. En janvier 2001, alors qu'il était encore maître de conférences à l'université Paris-VIII, Daniel Bensaïd avait soutenu son habilitation à diriger des recherches en philosophie. Souriant, d'une voix à laquelle son accent du Sud-Ouest donnait une intonation joueuse, il avait exposé les étapes de son itinéraire intellectuel, comme le veut l'usage. A la fin de son intervention, le philosophe Jacques Derrida (1930-2004), qui faisait partie du jury, prit la parole. Il releva l'insistance d'un motif : celui du "rendez-vous". Quand vous parlez révolution, lui fit-il remarquer en substance, vous faites comme si les militants avaient un "rendez-vous" avec elle ; or, ajouta-t-il, l'événement authentique, en tant qu'il est imprévisible, exclut toute rencontre assurée... Que l'espérance révolutionnaire fasse alterner exaltations brûlantes et rendez-vous manqués, voilà une vérité que Daniel Bensaïd n'aura jamais cessé d'endurer. Cette dialectique de l'élan absolu et de l'illusion déçue, il l'avait reçue en héritage. Né le 25 mars 1946, à Toulouse, il grandit dans un milieu populaire et révolté. Sa mère est fille de communards, son père, un juif né à Oran, est un "miraculé" de Drancy. Dans les faubourgs toulousains, tous deux tiennent le Bar des Amis, où se côtoient postiers communistes, antifascistes italiens et anciens des Brigades internationales. Adolescent, ce "rejeton du bistrot" se prend d'amitié pour le fils du médecin de famille. Ce dernier est membre du Parti communiste et ancien résistant, et sa maison est bientôt plastiquée par les ultras de l'Algérie française. Pour le jeune Bensaïd, c'est le déclic. Après la répression sanglante à la station Charonne, le 8 février 1962, il adhère aux Jeunesses communistes. Bensaïd appartient donc à cette génération qui est née à la politique en réaction aux guerres coloniales. Il est aussi de ceux dont la radicalisation s'est opérée contre les "trahisons" de la gauche traditionnelle, en particulier du PCF. Pour avoir refusé de voter Mitterrand dès le premier tour de l'élection présidentielle de décembre 1965, il se trouve exclu de l'Union des étudiants communistes en avril 1966. Avec Alain Krivine et Henri Weber, il fait partie du noyau qui fonde alors la Jeunesse communiste révolutionnaire (JCR). Trois ans plus tard, en 1969, celle-ci devient la Ligue communiste, section française de la IVe Internationale. Les jeunes militants trotskistes se jettent à corps perdu dans le combat sans frontières, en solidarité avec la révolution cubaine et contre la guerre du Vietnam. Ayant gagné Paris et intégré l'Ecole normale supérieure de Saint-Cloud, Daniel Bensaïd devient l'un des dirigeants les plus influents de son organisation : "Il était très beau, très séducteur, se souvient Janette Habel, cofondatrice de la Ligue communiste. Par ses qualités d'orateur, par sa culture littéraire aussi, il dominait tout le monde du point de vue théorique. Il était très radical, très léniniste. A ses yeux, la construction du parti révolutionnaire était à l'ordre du jour. Il avait une vision de révolutionnaire pressé." Bensaïd avait hâte, il voulait être à l'heure au rendez-vous. Durant ces "années rouges", toute son existence est placée sous le signe d'une attente enthousiaste et angoissée. Au lendemain de Mai-68, dont il est l'une des figures, et alors que les groupes d'extrême gauche sont interdits, il se réfugie chez Marguerite Duras pour écrire, avec Henri Weber, un livre qui qualifie le mouvement de "répétition générale". Convaincu que la révolution mondiale est imminente, il signe ensuite un texte dans lequel il affirme : "L'histoire nous mord la nuque." La formule résume l'emballement gauchiste de l'époque. Dans les années 1970, c'est elle qui fonde l'engagement de Bensaïd aux côtés des militants espagnols comme des guérilleros latino-américains ; c'est encore elle qui nourrit les pulsions militaristes de son organisation, rebaptisée Ligue communiste révolutionnaire (LCR) en 1974. De défaite en désillusion, pourtant, l'Histoire se dérobe. Viennent les années 1980, l'hégémonie libérale, le reflux de la question sociale : "L'idée même de révolution, hier rayonnante d'utopie heureuse, de libération et de fête, semble avoir viré au soleil noir", constate-t-il en 1988. Peu à peu, tout en conservant des tâches dirigeantes, et sans jamais manquer un Forum social ou une manif pour les sans-papiers, le militant se tourne néanmoins vers une activité plus théorique. Les objectifs : renouveler la pensée stratégique, puis assurer le passage du témoin. Comment maintenir une perspective radicale d'émancipation, après les désastres du stalinisme, malgré le triomphe du capitalisme ? Livre après livre, Daniel Bensaïd a tenté d'apporter des éléments de réponse à cette question. Martelant que la marchandise "n'est pas le dernier mot de l'aventure humaine", il souligne la nécessité d'en finir avec une certaine conception mécanique du progrès, et d'envisager l'Histoire non plus comme un flux linéaire, mais comme un agencement de rythmes "désaccordés". Il plaide pour un marxisme moins dogmatique, plus "mélancolique", attentif à l'inouï de l'événement comme aux "misères du présent" (Péguy), rajeuni par le pari pascalien ou le messianisme de Walter Benjamin (Le Pari mélancolique, Fayard, 1997). La renaissance d'une gauche radicale et l'émergence du mouvement altermondialiste précipitent l'effort de transmission auquel Daniel Bensaïd a consacré ses dernières années. Polémiste impitoyable et parfois injuste, il dialogue volontiers avec ses contemporains, en France comme à l'étranger, discutant Alain Badiou, Slavoj Zizek, Antonio Negri et John Holloway. Mais ce passeur a aussi à coeur de favoriser l'émergence d'une nouvelle génération. En 2001, il crée la revue Contretemps, qui vise à confronter recherche universitaire et critique sociale. "Son souci de la transmission était très présent, tant dans ses textes que dans les discussions informelles, qui mêlaient de manière joyeuse ou sérieuse échanges politiques et anecdotes truculentes", témoigne le jeune économiste Cédric Durand, l'un des animateurs de la revue. Plus tard, lui qui se présente toujours comme un "simple militant" souhaite partager son expérience pratique et sa réflexion théorique avec les membres du Nouveau Parti anticapitaliste, au sein duquel la LCR s'est dissoute en 2009. Internationaliste intransigeant, lecteur de Musset, de Proust et de Bernanos, auteur d'essais consacrés à Jeanne d'Arc ou à la Révolution française, il se présentait aussi comme un "hussard rouge de la République". Avec Walter Benjamin, il affirmait que la fidélité aux opprimés et aux "vaincus" d'autrefois constitue un premier pas vers la justice à venir. Tel était le principe de la "lente impatience" qui avait tant frappé Derrida. Jean Birnbaum
13/01/2010
disparitions
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2010/01/13/daniel-bensaid-philosophe-cofondateur-de-la-ligue-communiste-revolutionnaire_1291147_3382.html
Richard Bona, le blues sans frontières
D'origine camerounaise, le bassiste de jazz est passé par l'Allemagne et la France avant de s'installer aux Etats-Unis. Il vient de sortir un album dans lequel il explore les expressions musicales, du Mississippi à l'Irlande.
Le blues n'est né ni en Afrique ni dans le delta du Mississippi. Parole de Bona ! Gonflé, le gaillard ! Un peu radical, à côté de la plaque, Richard Bona ? Suspecté de dire n'importe quoi pour se faire remarquer ? Ce n'est pas le genre. Bassiste de jazz et chanteur au talent sûr, apprécié autant pour ses qualités humaines que musicales, Richard Bona est une crème. Un type bien, gentil, humble, généreux. Une belle âme. Tous ceux qui le fréquentent et l'ont approché s'accordent à le dire. Depuis le Cameroun, où il naît en 1967 et qu'il quitte à l'âge de 20 ans pour l'Europe (l'Allemagne, pendant deux mois, puis la France), jusqu'aux Etats-Unis, où il s'installe au mitan des années 1990. Alors quoi ? Le blues est partout, affirme-t-il. Universel, dirait-on pour simplifier. C'est ce qu'il entend démontrer à travers The Ten Shades of Blues ("Les dix nuances du blues"), son nouvel album (Universal Jazz). Le blues, il le voit d'abord "comme une gamme de cinq notes, présente dans différentes traditions et expressions musicales. On le trouve dans le Mississippi, en Afrique de l'Ouest, mais aussi en Irlande, dans le flamenco, dans des endroits où il n'y a aucune traçabilité pouvant démontrer que ce sont des Noirs qui l'ont amené là. Les origines du blues sont très mystérieuses..." Richard Bona est friand de ce genre d'énigme. Il porte en lui quelque chose de mystérieux, assure son compatriote, le saxophoniste Manu Dibango, l'une des nombreuses célébrités avec lesquelles Richard Bona a joué. "Il est sur une autre planète. D'ailleurs il chante des textes en douala (une des langues du Cameroun) que très peu de gens qui le parlent arrivent à comprendre. On ne sait jamais où il va avec ses paroles. C'est un mec habité d'une solitude assez spéciale. " Richard Bona en convient. S'il vit de belles amitiés, il n'en est pas moins plutôt solitaire. Il n'avance pas dans des brumes improbables le matin, il a les idées claires, le contact facile et le sourire avenant, car il ne traîne guère dans les lieux de la nuit. "D'ailleurs, j'ai horreur de la fumée, de la foule. Quand je n'ai pas de concert, j'aime être chez moi, jouer, composer." Il se lève à la première heure. Ce besoin de solitude, cette habitude de ne pas s'attarder au lit lui viennent peut-être de son enfance au Cameroun, raconte le musicien. "J'accompagnais mon grand-père, un modeste agriculteur, très tôt aux champs et je n'aimais pas me joindre aux autres gamins. Je préférais jouer ma musique dans mon coin, tout seul." Son refuge aujourd'hui, son nid, c'est un loft à Brooklyn, "le plus beau quartier du monde". Manu Dibango avait jeté l'ancre en France en 1949. Richard Bona, lui, l'a fait quarante ans plus tard - "J'avais soif de rencontres musicales " - avant de déguerpir pour les Etats-Unis, en 1995. Les autorités françaises avaient refusé de lui renouveler sa carte de séjour, parce qu'il y avait trop de bassistes français inscrits à l'ANPE. Il n'y a pas de place pour les musiciens étrangers quand le marché est saturé. La décision administrative aura comme effet collatéral de lui muscler les mollets. "Pour éviter les contrôles dans le métro, je me déplaçais en vélo." Il avait une frousse dingue de "Charlie Pasqua. Yes, man !". Depuis qu'il vit aux Etats-Unis, il bifurque souvent ainsi vers sa langue d'adoption. Richard Bona adore s'amuser. "Les gens qui me font rire me sont précieux. Avec Manu Dibango, par exemple, on rigole beaucoup. C'est un ancien, il a toujours plein d'histoires à raconter." Le chanteur congolais Lokua Kanza assure qu'"en dehors d'être un excellent artiste Richard est aussi un comique de premier ordre. En tournée avec lui, on était morts de rire". Le pianiste de jazz Jean-Michel Pilc renchérit : "Richard est un monument de musicalité, de groove et de joie de vivre." Il s'est installé aux Etats-Unis la même année que lui. Tous deux se sont rencontrés au début des années 1990, dans le groupe du batteur Francis Lassus, Bohé Combo, puis ils ont joué quelques mois avec le trompettiste Eric Le Lann. "Notre amitié et notre complicité musicale se sont approfondies avec les années." Aux Etats-Unis, ils jouent avec Harry Belafonte, pour lequel Richard Bona sera directeur musical. A New York, il devient le bassiste en vue. Tout le monde le réclame. Il travaille avec George Benson, Paul Simon, Chaka Khan, Chick Corea, Bobby McFerrin, Joe Zawinul... Il prend la nationalité américaine et, pour la première fois, en 2008, a voté à l'élection présidentielle. La politique n'a jamais été son affaire, mais un jour, dans un taxi, tout bascule. "J'entends à la radio un sénateur qui s'oppose à la guerre en Irak." Surprise : l'orateur s'appelle Obama. "Un nom de chez nous, il y a des Obama dans le sud du Cameroun. Il parlait de non-violence, du mensonge de la présence d'armes de destruction massive, comme prétexte à l'invasion de l'Irak." Barack Obama, futur candidat à l'élection présidentielle, gagne ce jour-là la voix d'un abstentionniste récurrent. Richard Bona participera à des concerts de soutien. Après la victoire, quand Barak Obama décidera d'envoyer des renforts en Afghanistan, la pilule ne passe pas. "Il avait oublié ses paroles sur la non-violence." Le musicien adresse alors un courriel au président pour lui dire sa désapprobation, sans lui retirer pour autant sa confiance. Richard Bona est du genre positif. Sa manière de voir la vie, toujours du bon côté, son aptitude à la légèreté, il les doit à son grand-père, Messanga Engong Innocent, celui qui l'a poussé vers la musique. "Il était rock'n'roll, man ! J'ai eu la chance de connaître un grand-père fantastique." Ayant remarqué la fascination du bambin pour le balafon - un instrument traditionnel fait de lamelles de bois fixées sur des calebasses - à 3 ans, il lui en colle un, fait maison, dans les mains. Ce sera le premier instrument de Richard Bona, avant qu'il ne craque, des années plus tard, pour la basse, en entendant Jaco Pastorius, l'idole de tous les bassistes (décédé en 1987). Le grand-père, c'était un drôle. "Chaque fois qu'un avion passait dans le ciel du village, il disait : "Ah, ils s'en vont encore dans la lune !"" Un sage aussi, "comme tous les anciens en Afrique". Un jour où le gamin refusait d'aller jouer à l'église, considérant que son niveau, désormais, méritait mieux, le grand-père l'a pris entre quatre yeux, le soir, à la maison. "Il m'a dit : "Tu sais, le talent que tu peux avoir, c'est cadeau, on te l'a donné. Il va te faire monter. Quand tu seras au sommet, le seul endroit qu'il te restera où aller, c'est vers le bas. Pendant que tu montais, tu as croisé des gens. Si tu leur as manqué de respect, quand tu redescendras, ils ne t'accompagneront pas."" Richard Bona a retenu la leçon. Patrick Labesse
13/01/2010
culture
https://www.lemonde.fr/culture/article/2010/01/13/richard-bona-le-blues-sans-frontieres_1291136_3246.html
Jeffrey Deitch dirigera le MOCA de Los Angeles
Le marchand d'art new-yorkais devra assainir les finances du musée.
Le Musée d'art contemporain de Los Angeles (MOCA), un des plus importants des Etats-Unis, a annoncé avoir recruté comme directeur le marchand d'art new-yorkais Jeffrey Deitch. Il entrera en fonctions le 1er juin, le temps pour lui de clore ou de se séparer des trois galeries qu'il possède à New York - deux dans le quartier de SoHo, une à Long Island City. Il s'agit d'éviter les conflits d'intérêts. Ce passage du marché au musée n'est pas exceptionnel aux Etats-Unis. A la fin des années 1950, un autre galeriste, Walter Hopps, avait quitté les affaires pour diriger successivement le Musée de Pasadena, la Washington Gallery, puis la fondation de Mesnil, à Houston. D'anciens experts de maisons de vente aux enchères sont devenus de très honorables conservateurs. Mélange des genres Mais la personnalité de Jeffrey Deitch est d'un tout autre calibre, et sa nomination a surpris la presse américaine. A 57 ans, il a contribué à profondément changer les règles du marché de l'art. Il fut ainsi parmi les premiers à comprendre la nécessité de lever de grosses sommes pour aider les artistes à produire des oeuvres coûteuses, ou monumentales. C'est ainsi qu'il trouva, dans les années 1990, plus d'un million de dollars pour financer une installation de l'artiste japonaise Mariko Mori à la Biennale de Venise. L'artiste était alors toute jeune, sinon débutante. Elle est aussi apparentée au magnat de l'immobilier Minoru Mori, l'un des plus grands collectionneurs japonais. Qui, lorsqu'il eut besoin d'un conseiller pour ouvrir son propre musée dans la Mori Tower, se tourna naturellement vers Jeffrey Deitch. Un mélange des genres que M. Deitch pratique en maître. Après un MBA à Harvard, il fut tour à tour critique d'art, assistant à la John Weber Gallery de New York, puis vice-président de Citibank, en charge du département art, avant d'ouvrir sa propre société de conseil en investissement artistique, en 1988. C'est vers cette époque qu'il aide un tout jeune artiste, Jeff Koons, et lui présente son premier gros collectionneur, le Grec Dakis Joannou. Il ouvre sa propre galerie, Deitch Project, en 1996, y organise des expositions parmi les plus provocantes que Manhattan ait jamais connues, au point que la presse new-yorkaise le compare à Barnum. Il devra assainir les finances du MOCA, récemment sauvé de la faillite par un don du collectionneur Eli Broad, un ami de Jeff Koons, qui ne doit pas être pour rien dans le choix de M. Deitch. Harry Bellet
13/01/2010
culture
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Benoît Jacquot traque l'instant magique
Le cinéaste met en scène le "Werther", de Jules Massenet, à l'Opéra Bastille, à Paris.
En 2004, le cinéaste Benoît Jacquot (né en 1947) faisait ses débuts de metteur en scène d'opéra avec Werther, chef-d'oeuvre de Jules Massenet (1842-1912), monté au Covent Garden de Londres sous la direction d'Antonio Pappano. Cette production sera présentée à l'Opéra Bastille, du 14 janvier au 4 février, avec une distribution de rêve : Sophie Koch en Charlotte, Jonas Kaufmann en Werther, Anne-Catherine Gillet en Sophie et Ludovic Tézier en Albert. L'unique incursion de Benoît Jacquot à l'opéra avait été le film Tosca, tourné en 2001 d'après Tosca, de Puccini, avec Angela Gheorghiu, Roberto Alagna et Ruggero Raimondi. Comment le projet de ce "Werther" s'est-il intégré dans votre travail de cinéaste ? Tout est parti de Tosca, que j'ai filmé en 2001 à la requête de Daniel Toscan du Plantier et que dirigeait le chef d'orchestre Antonio Pappano, à l'époque directeur musical à La Monnaie de Bruxelles. Il avait suggéré que je passe à la mise en scène d'opéra. Devenu directeur musical de Covent Garden en 2002, il m'a aussitôt proposé de faire Werther, pensant sans doute que la délicatesse de mon travail visuel compenserait son énergie musicale. Autrement dit : il se chargeait de traiter le wagnérisme de Massenet, à moi d'en assumer la part intime et le debussysme ! Ce fut oui sans réticences ? J'ai d'abord hésité, car je pensais que cette musique était fade. J'ai dû aussi lutter contre ce que Louis Jouvet appelle le "sentiment", ce point sentimental plus nerveux qu'affectif, quasi névrotique : quand j'étais petit, ma grand-mère me chantait l'"Air des larmes", de Charlotte, et le fameux "Pourquoi me réveiller", de Werther. Comment aborder la scène ? Les différences entre le cinéma et l'opéra ne m'intéressent pas. Pour moi, la mise en scène est une position existentielle. Depuis que je suis enfant, j'ai toujours mis en scène : le cinéma, l'opéra, la vie, ce sont toujours les mêmes gestes pour d'autres effets. D'une manière générale, je suis toujours à la recherche de l'instant magique, celui qui ne se monte pas, pas plus qu'il ne se démonte d'ailleurs, et qui fait que tout le reste s'induit à partir de lui. Ce sont donc les artistes qui guident votre regard ? J'essaye d'être le moins méthodique et le plus opportuniste possible, dans une sorte de guet permanent. Un guet d'incitation et d'observation. Je me suis rendu compte que les chanteurs sont aussi mouvants que les acteurs et qu'il faut les capter de la même façon. Mais il y a en plus le fait que le chant offre toute une base de données sensibles, dont il faut savoir profiter. Si vous parvenez à établir confiance et complicité dès le départ, vous allez pouvoir avancer au bord de tous les gouffres. C'est subtil chez les acteurs, beaucoup plus violent avec les chanteurs, qui sont des athlètes de haut niveau. Le chant vous fascine-t-il ? Il y a quelque chose de phénoménal, au sens propre, dans le fait de chanter sur une scène. Quand j'ai filmé Tosca, Toscan du Plantier, qui était un fou d'art lyrique, m'a beaucoup renseigné là-dessus, non sans un certain mysticisme d'ailleurs. Je pensais qu'il en faisait des tonnes, j'avais tort. Il y a une fascination à l'épreuve de la musique chantée qui peut emporter celui qui l'écoute et celui qui chante. Le mieux est de se laisser faire et de voir ensuite comment construire avec cet emportement. A propos de "Werther", on a parlé d'une mise en scène de cinéaste... C'est vrai qu'il y a des gros plans, des hors-champ. Je me suis aperçu que Jules Massenet avait composé une partition où les personnages sont le plus souvent seuls ou s'isolent des autres. J'ai donc mis les chanteurs à l'endroit qu'ils aiment et dont ils ont peur, tout au bord de la fosse, près des musiciens, du public et du chef d'orchestre. Cela crée une tension particulière. J'ai aussi travaillé les entrées et les sorties afin que le chant soit dans le mouvement de l'action. Qu'avez-vous gardé, vous le littéraire, du "Werther" de Goethe ? Rien, sinon le bleu pâle du costume et le gilet jaune de Werther. Pour moi, il n'y a pas plus de Goethe dans le Werther de Massenet que de Mérimée dans le Carmen de Bizet. Toscan du Plantier vous a dépêché "Tosca" ; Antonio Pappano "Werther". Vous avez besoin du désir des autres ? J'aime que l'on m'amène des projets. Sur la vingtaine de films que j'ai tournés, seul un sur trois vient de moi. Je compte sur les autres pour m'étonner, me donner le sentiment de la première fois. J'agis très peu par nécessité et par calcul. Je suis en revanche un affamé de chance et de hasard. "Werther", de Jules Massenet. Opéra Bastille, 120, rue de Lyon, Paris-12e. Du 14 janvier au 4 février. De 5 € à 172 €. Sur le Web : www.operadeparis.fr. Propos recueillis par Marie-Aude Roux
13/01/2010
culture
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Air analogique au Casino de Paris
Sortant pianos et synthés millésimés, le duo versaillais a choisi le dépouillement.
Pour la mise en scène de ses sons et des tournées aux dimensions toujours internationales, Air a souvent misé sur l'apport de musiciens extérieurs. Alors que la diversité pop de leur nouvel album, Love 2, laissait imaginer une déclinaison live animée par une pléthore d'instrumentistes, le duo versaillais a choisi de prendre la route en trio. Sur la scène du Casino de Paris, pour le premier des deux concerts des 11 et 12 janvier, cette formule minimale fait prendre un risque à Jean-Benoît Dunckel et Nicolas Godin. Dandys du son, laborantins des studios, ces élégants timides n'ont pas le charisme des brûleurs de planches. D'autant que leurs instrumentaux au psychédélisme feutré ont souvent fait l'éloge de la désincarnation, de la transparence. Séparées par le batteur anglais Alex Thomas, placé au centre du plateau, les fines silhouettes des deux Air ne dégagent pas l'impression d'habiter la scène. En angelot blanc, Jean-Benoît pilote une petite forteresse de vieux claviers, en chantant des vocaux elliptiques, d'un timbre rêveur, légèrement zozotant, souvent trafiqué par les machines. A sa gauche, Nicolas Godin passe studieusement de la basse à la guitare sèche, avec des étapes plus rares derrière le micro et les synthétiseurs. Sans les arrangements du studio, les morceaux s'assèchent jusqu'à paraître squelettiques. Puis le charme finit par opérer. Car, dans ce dépouillement, l'artisanat d'Air s'humanise et révèle son essence. Les instruments vintage collectionnés par le duo focalisent l'attention en exprimant une sensualité analogique palpable même dans ses imperfections. Pianos électriques et synthés millésimés participent même à la scénographie quand, avec ses petites lampes torches au coin des yeux, le roadie personnel de Jean-Benoît Dunckel vient régler entre les morceaux le vieux tableau de bord d'un Korg MS-20 rétif à toute programmation. Moins de polissage, plus d'aspérités donnent une vitalité attachante à beaucoup de mélodies, qu'elles batifolent dans une brume David-Hamiltonienne (Cherry Blossom Girl), s'excitent sur des tempos hypnotiques (Be a Bee), s'alanguissent dans l'espace (How Does It Make You Feel) ou la fluidité folk (Radian). Le public choisi (Etienne Daho, Sébastien Tellier, le groupe Phoenix, Dominique Dalcan...) prouve qu'Air reste un groupe dans le vent mais, loin du vernis de la French touch, le trio s'approche ici de l'art naïf ou de l'émouvante fragilité d'un Robert Wyatt. Entre le 1er et le 6 juin, à Paris, Cité de la musique et Salle Pleyel, quatre créations devraient montrer d'autres facettes du groupe, grâce à des collaborations chaque soir changeantes avec des musiciens classiques, rock et électro. Stéphane Davet
13/01/2010
culture
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Un enfant tué par l'explosion d'une bombe sur un terrain de jeu au Pakistan
Au moins un enfant a été tué et cinq blessés, mercredi 13 janvier, par l'explosion d'une bombe sur un terrain de jeu dans le nord-ouest du Pakistan, non loin des zones tribales où l'armée combat les talibans alliés à Al-Qaida, a annoncé la police.
Au moins un enfant a été tué et cinq blessés, mercredi 13 janvier, par l'explosion d'une bombe sur un terrain de jeu dans le nord-ouest du Pakistan, non loin des zones tribales où l'armée combat les talibans alliés à Al-Qaida, a annoncé la police."Un enfant de 9 ans est mort dans l'explosion, et les cinq blessés sont âgés de 5 à 12 ans""Il s'agissait d'une bombe""Des enfants jouaient sur un terrain de jeu quand une explosion s'est produite près d'une poubelle" , a déclaré au téléphone à l'AFP un officier de la police de Tank, une ville-garnison où s'est produit le drame. , a précisé le chef de la police de Tank, confirmant la mort d'au moins un enfant. , a-t-il précisé. Tank est située à 18 km du Waziristan du Sud, un district tribal bastion des talibans pakistanais alliés à Al-Qaida, et où l'armée est engagée depuis trois mois. L'explosion de la bombe mercredi n'a pas été revendiquée, mais les talibans sont responsables d'une vague sans précédent d'attentats-suicides pour la plupart – qui a fait près de 3 000 morts dans tout le Pakistan depuis deux ans et demi.
13/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/13/un-enfant-tue-par-l-explosion-d-une-bombe-sur-un-terrain-de-jeu-au-pakistan_1291278_3216.html
"""Fritz Lang, Ladykiller"", de Jean-Loup Bourget : vérité et mensonges sur Fritz Lang"
Essentiel pour qui partage sa passion de l'oeuvre de Fritz Lang, l'essai de Jean-Loup Bourget ouvre des dossiers trop vite classés, remet en question des légendes abusivement édifiées.
Ainsi du récit élaboré par le cinéaste sur une entrevue avec Goebbels qui voulait lui confier la responsabilité de l'industrie cinématographique du nouveau Reich. "Je suis à moitié juif", aurait répondu Lang. "C'est nous qui décidons qui est juif et qui ne l'est pas", aurait répliqué le responsable nazi de la culture. Il semble certain aujourd'hui que cette rencontre est une fiction. Explorant les documents, revisitant les films, Jean-Loup Bourget dément aussi que, fils d'un architecte, Lang ait lui-même entamé des études d'architecture (on a beaucoup glosé sur son goût pour les décors monumentaux). Son analyse des Nibelungen, de Metropolis, des Dr Mabuse, de M. le maudit (admiré par Goebbels parce que Peter Lorre y a "le faciès criminogène du juif"), puis des films tournés aux Etats-Unis, rend plus complexe la perception de l'engagement politique de Lang, ses rapports avec l'idéologie nazie, ses références équivoques à la culture allemande, ses rapports avec l'espionnage, le FBI, le maccarthysme. Dans un chapitre consacré à ses complicités artistiques avec d'autres cinéastes, de Murnau à Eisenstein en passant par la Nouvelle Vague, on retiendra en particulier les pages passionnantes consacrées à des parallèles avec les films d'Hitchcock. Apparemment plus frivole, intitulée "Tueur de dames", la partie du livre qui lui donne son titre est digne d'un film noir. Bourget y explore les rapports de Fritz Lang avec les femmes, son goût pour la femme fatale dont la Kitty de La Rue rouge est l'emblème. Prototype de ces séductrices jouant les innocentes pour faire "tomber" des hommes d'âge mûr qu'on croyait d'une probité à toute épreuve, Joan Bennett hanta ainsi, outre La Rue rouge, La Femme au portrait, ou Chasse à l'homme, tandis qu'on trouve une Kitty dans Les Espions. Nombre de légendes courent aussi sur la vie privée du "maître". En particulier sur l'accusation de meurtre de sa première épouse, Lisa Rosenthal, dont Lang fit l'objet. Mais, là encore, il se peut que Lang ait lui-même inventé cette anecdote, qui apparaît comme la scène primitive d'une oeuvre hantée par le crime, la culpabilité qu'il engendre, l'interdit de l'adultère voire de la sexualité, l'instant où un homme commet un acte qui lui échappe. D'un bout à l'autre, ce livre est captivant. FRITZ LANG, LADYKILLER de Jean-Loup Bourget. PUF, 288 p., 26 €. Jean-Luc Douin
13/01/2010
livres
https://www.lemonde.fr/livres/article/2010/01/13/fritz-lang-ladykiller-de-jean-loup-bourget_1291153_3260.html
Voyagez découverts
Il s'agit du dernier happening organisé par le groupe Improv Everywhere qui s'est donné pour objectif de répandre les "scènes de chaos et de joie dans des lieux publics".
Ce n'est pas la dernière campagne publicitaire d'un marchand de sous-vêtements. Encore moins une opération de communication de la RATP destinée à dérider les usagers du métro parisien, lassés de voyager collés-serrés dans des rames bondées. Il s'agit du dernier happening organisé par le groupe Improv Everywhere qui s'est donné pour objectif de répandre les "scènes de chaos et de joie dans des lieux publics". Dimanche 10 janvier, quelque 3 000 New-Yorkais ont bravé le froid et vaincu leur pudeur pour prendre le métro sans pantalon à l'occasion de la neuvième édition de la No Pants Subway Ride ("journée du métro sans pantalon"). Le principe de cette joyeuse manifestation est simple : vaquer à des occupations habituelles dans le métro, mais en caleçon ou en culotte. Le tout sous le regard amusé, surpris ou choqué des usagers traditionnels. Une façon minimaliste de voyager qui s'exporte bien, puisqu'elle a été expérimentée simultanément dans 43 autres villes du monde. Mais pas dans le métro parisien. Sur le Web : Improveverywhere.com. Yann Sternis
13/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/13/voyagez-decouverts_1291145_3238.html
Irak : sept morts dans un attentat-suicide au camion piégé
Sept Irakiens, dont cinq policiers, ont été tués mercredi et six blessés dans un attentat au camion piégé dans une localité au nord de Fallouja, à 60 km à l'ouest de Bagdad, selon un nouveau bilan fourni par une source au ministère de l'intérieur.
Sept Irakiens, dont cinq policiers, ont été tués et six blessés dans un attentat au camion piégé, mercredi 13 janvier, dans une localité au nord de Fallouja, à 60 km à l'ouest de Bagdad, selon un nouveau bilan fourni par une source au ministère de l'intérieur. Un précédent bilan fourni par une source policière faisait état de deux morts et six blessés. Un kamikaze a fait exploser les charges contenues dans le camion qu'il conduisait près d'un commissariat en construction dans la localité de Saqlawiya vers 9 heures, selon une source de la police locale. Deux civils figurent également parmi les tués.
13/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/13/irak-sept-morts-dans-un-attentat-suicide-au-camion-piege_1291264_3218.html
"Les jeunes : une cible ""sensible"""
IAM en décembre 2008, Massilia Sound System et Oai Star fin 2009. La station de ski de Vars (Hautes-Alpes) ouvre chaque saison par un concert gratuit donné face aux pistes.
IAM en décembre 2008, Massilia Sound System et Oai Star fin 2009. La station de ski de Vars (Hautes-Alpes) ouvre chaque saison par un concert gratuit donné face aux pistes. Couplé à des compétitions de sports extrêmes, cet événement inaugural vise à séduire "les jeunes de la région", affirme Nicole Gaillan, la directrice de l'office du tourisme. Sur le marché des sports d'hiver, les 20-30 ans font figure de "leaders d'opinion", poursuit la responsable. Au contraire des stations élégantes qui s'équipent en établissements luxueux, Vars mise sur le public de demain. Le marketing de la station branchée définit toutefois précisément sa cible : les adolescents et jeunes adultes de bonne famille qui rêvent d'améliorer leur style de glisse, saison après saison. Les fans d'IAM des quartiers nord de Marseille seraient-ils trop voyants aux sports d'hiver ? Leur présence en nombre pourrait "faire peur à des gens qui viennent en famille et n'ont pas envie de retrouver, pendant leurs vacances, certains phénomènes urbains", répond Mme Gaillan. Réfutant toute "discrimination", elle tient à rappeler que Vars ne connaît "pas de concentration d'une population spécifique", qui serait - selon elle - "mauvaise pour l'image" de la station. Bagarres et dégradations La crainte de voir se reproduire, en altitude, les violences propres aux banlieues, hante les professionnels de la montagne. "Chaque hiver, les stations réclament un renforcement des effectifs de gendarmerie", révèle Hugues François, spécialiste de l'économie touristique au Cemagref, un institut grenoblois de recherche en sciences et technologies pour l'environnement. Il y a trois ans, bagarres et dégradations s'étaient produites à Châtel (Haute-Savoie) suite à une banale altercation, sur les pistes, entre des adolescents de Seine-Saint-Denis et un touriste néerlandais. La localité - qui s'est remise de ses émotions - accueille toujours volontiers "des groupes caractérisés comme étant de provenance de zones sensibles", explique, dans une drôle de périphrase, Jean-François Vuarand, le directeur de l'office de tourisme. Mais désormais ces groupes suscitent "une attention toute particulière", poursuit-il. Les commerces et les remontées mécaniques sont "informés" et invités à se montrer "vigilants". La montagne demeure malgré tout consciente de la nécessité de renouveler sa clientèle. Le département de Savoie finance ainsi le séjour de 3 000 collégiens dans 33 stations du département. L'opération permet de sensibiliser "certaines populations qui diabolisaient le ski et qui ne s'étaient jamais intéressées aux sports d'hiver", affirme Pierre Charvoz, vice-président du conseil général. Equipée de parcs pour surfeurs, proposés à des tarifs préférentiels, la station des Sept-Laux (Isère) cible depuis longtemps les jeunes, "y compris des banlieues de Grenoble, et ça ne pose aucun problème de cohabitation", témoigne Jean Picchioni, le responsable de la station. "Mais on sait désormais d'où viennent les groupes, qui paient leur séjour, comment ils sont organisés", affirme-t-il. Olivier Razemon
13/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/13/les-jeunes-une-cible-sensible_1291146_3238.html
Les stations aux petits soins pour les familles
Quarante sites de sports d'hiver ont reçu le label Famille Plus, une alternative à la formule club hôtel.
A l'image de leurs voisines suisses et autrichiennes, quarante stations françaises ont décidé de jouer la carte de la famille en obtenant le label Famille Plus Montagne : vingt et une en Savoie et en Haute-Savoie, trois en Isère, onze dans les Alpes du Sud, deux dans les Pyrénées, deux en Auvergne et une dans le Jura. Le gage d'un accueil adapté pour ces publics (foyers recomposés ou pas) de plus en plus nombreux à vouloir profiter de la montagne, hiver comme été. L'époque où les parents laissaient les enfants aux aînés pour aller skier est révolue. On voyage désormais ensemble, mais en choisissant des sites équipés pour tous les âges. "La famille a des attentes spécifiques, auxquelles il faut répondre", explique Pascal Favier, conseil en aménagement de montagne. Le label Famille Plus, créé en 2006 est né de cette constatation. Il étend les compétences de l'association Les P'tits Montagnards, réservée aux enfants de 3 mois à 12 ans, tout en étant plus contraignant. Les stations doivent répondre à des critères stricts en matière d'accueil et d'information, d'animations et d'activités, d'hébergement, de restauration, d'équipement, de transport et de sécurité. Elles doivent aussi impliquer des professionnels de la petite enfance et des moniteurs diplômés de l'Ecole du ski français (ESF), offrir des formules d'hébergement au centre du village et disposer d'un centre médical à proximité. Certaines stations n'ont pas réussi leur examen de passage. Si Courchevel (Savoie) et La Bresse (Vosges) envisagent de récupérer la petite étoile bleue associée au label, Chamonix (Haute-Savoie) se contente pour l'heure d'y réfléchir. "L'accueil des enfants fait partie des services les plus demandés par les parents qui veulent à la fois être libres dans la journée et pouvoir partager des activités avec leurs enfants, déclare Patrick Dole, maire des Houches et membre du GIE France Montagnes. On offre une palette de services dans laquelle chacun pioche." Le choix des services est large : ski, luge, patinage, promenade en traîneau, visite à la ferme, ateliers artistiques... Ainsi, à Villard-de-Lans (Isère), le premier parc de glisse de France alloué à la pratique de la luge et du ski offre un espace accessible aux enfants dès 3 ans, avec leurs parents. Dans l'esprit des grands parcs ludiques autrichiens, Les Gets (Haute-Savoie) ont ouvert un village indien avec tipis pour les 5- 12 ans. Un circuit de bosses traverse la forêt et permet aux skieurs en herbe de s'initier à cette pratique. Même offre à Saint-Lary-Soulan (Hautes-Pyrénées) avec un "kidpark" parsemé de bosses et un tapis roulant pour aider les débutants à remonter. Des forfaits "Pitchoune" "Plus les enfants découvrent jeunes le ski, plus ils ont envie de revenir", déclare Gilles Vanheule, directeur de l'office du tourisme des Deux-Alpes (Isère). Pendant les vacances scolaires de février, la station Le Corbier (Savoie) propose, pour 156 euros la semaine, un forfait "Pitchoune" comprenant une heure trente de garderie, deux heures de cours (repas du midi possible mais non compris). En dehors de ces périodes, et pour les élèves en classe de primaire, quelques sites dont Orcières (Hautes-Alpes) et Corrençon-en-Vercors (Isère) proposent une formule "Cartable à la neige" avec cours le matin et ski l'après-midi. Compter respectivement 205 euros et 219 euros la semaine. Plus de la moitié des stations labélisées sont reliées à un grand domaine skiable en altitude. C'est le cas de Val-Thorens et des Menuires aux Trois Vallées, des Houches dans le massif du Mont-Blanc, ainsi que de La Plagne, au départ de Montchavin-les-Coches... Le label serait-il réservé aux seules stations de montagne destinées aux skieurs peu confirmés ? "Non, répond Patrick Dole. L'offre d'une station doit couvrir le champ le plus complet possible." Autre engagement pris par ces stations : accès libre aux remontées mécaniques pour les moins de 5 ans et tarif réduit pour les jeunes jusqu'à 14-16 ans, voire forfait gratuit pour les moins de 10 ou 12 ans pour l'achat d'un forfait adulte ; idem pour l'accès à la patinoire ou à la bibliothèque locale... Mais, attention, les places sont comptées, surtout pendant les vacances scolaires. Il est donc conseillé de s'y prendre à l'avance pour profiter de cette alternative à la formule club hôtel. Sur le Web : Familleplus.fr ; Skifrance.com ; France-montagnes.com. Martine Picouët
13/01/2010
vous
https://www.lemonde.fr/vous/article/2010/01/13/les-stations-aux-petits-soins-pour-les-familles_1291144_3238.html
Bras de fer économique et politique entre Google et Pékin
Le moteur de recherche menace de se retirer de Chine et accuse à demi-mot le gouvernement d'être derrière un piratage dont il a été l'une des cibles.
Le moteur de recherche Google a engagé, ce mercredi, un bras de fer avec les autorités chinoises, concernant la politique de censure de Pékin et un piratage informatique dont l'entreprise dit avoir été l'objet. Le numéro un de la recherche au monde – mais qui est minoritaire en Chine, derrière Baidu.cn – a affirmé envisager sérieusement de fermer la version chinoise de son site et de fermer ses bureaux dans le pays, où il emploie 700 personnes. Google explique avoir fait l'objet d'un piratage de grande ampleur, provenant de Chine, fin décembre. Une ou plusieurs personnes se seraient attaquées à son service de messagerie Gmail, visant les messageries de plusieurs dissidents chinois. L'attaque aurait également concerné une vingtaine d'autres entreprises. Sur son blog officiel, le moteur de recherche laisse entendre, sans jamais le dire clairement, que le gouvernement chinois pourrait avoir une part de responsabilité dans ces attaques ; la secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a également demandé à Pékin de fournir "des explications" sur ce piratage. BRAS DE FER POLITIQUE ET DIPLOMATIQUE Le moteur de recherche a donc tapé du poing sur la table. Outre la menace de fermeture, il a annoncé qu'il cesserait désormais de censurer les résultats de recherche de son site chinois, comme il le faisait jusqu'à présent pour se conformer à la loi chinoise. Depuis ce matin, une recherche d'images sur Google.cn permet de voir la célèbre photo du manifestant brandissant le poing place Tiananmen, une image qui était jusqu'ici censurée. Pékin est jusqu'ici resté très prudent sur ces annonces de Google. Un responsable cité anonymement par l'agence officielle Xinhua estimait ce matin que rien n'est encore décidé, mais pour Jean-Luc Domenach, directeur de recherche au Centre d'études et de recherches internationales et spécialiste de la Chine, Pékin ne peut pas laisser Google partir. "Ce serait une claque terrible pour le pouvoir : toute sa politique internationale est justement fondée sur l'idée qu'il peut imposer ses propres règles", explique-t-il. En termes symboliques, la fermeture de Google.cn serait désastreuse, "d'autant plus qu'aux yeux des Chinois, Google, c'est le seigneur d'Internet, "le" grand moteur de recherche, même s'il reste moins utilisé que Baidu à l'échelle du pays". CONTRE-OFFENSIVE Jusqu'ici, c'est plutôt Google qui avait été la cible de la colère de Pékin. A plusieurs reprises, les autorités chinoises s'en étaient prises au moteur de recherche, l'accusant notamment de filtrer insuffisamment ses résultats de recherche. Ces dernières semaines, Google avait également été la cible de critiques véhémentes concernant son service de recherche de livres. Comme aux Etats-Unis ou en Europe, l'Association des écrivains chinois l'accusait d'avoir scanné sans autorisation des dizaines de milliers de livres. Mais contrairement aux autres pays, où il subit les mêmes accusations, Google a dû présenter ce lundi ses excuses aux écrivains chinois. Jusqu'à peu, les relations entre le gouvernement chinois et Google étaient cependant tempérées par la présence du fondateur et directeur de Google Chine, Kai-Fu Lee. Mais ce dernier a quitté l'entreprise en septembre dernier pour fonder sa propre société, annonçant la fin d'une ère dans la présence de Google en Chine. ÉQUILIBRE ÉCONOMIQUE Mais derrière les considérations politico-diplomatiques, les motivations de Google pourraient également être économiques. Google n'a jamais réussi à s'imposer complètement en Chine, l'un des rares pays où il ne domine pas le marché de la recherche en ligne. L'entreprise n'a pu capter que 30 % du marché environ, alors que son rival Baidu, dont les résultats sont soumis à la censure de Pékin, en représente le double. Google espérait parvenir à conquérir ce marché en se pliant aux règles édictées par le gouvernement chinois, notamment en censurant ses résultats de recherche, mais n'a pas atteint son but. Pour Shaun Rein, directeur général de China Market Research Group à Shanghaï, interrogé par l'AFP, les menaces pourraient être une excuse pour préparer un départ de Google. "Google cherche à sortir de Chine sans perdre la face", estime-t-il. Damien Leloup
13/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/13/bras-de-fer-economique-et-politique-entre-google-et-pekin_1291030_651865.html
Londres et Dublin veulent sauver la coalition au pouvoir en Irlande du Nord
Le scandale qui touche le premier ministre accentue les désaccords au sein de l'exécutif.
Dublin et Londres, qui parrainent le processus de paix en Irlande du Nord, veulent à tout prix sauver la fragile coalition entre protestants unionistes et catholiques séparatistes au pouvoir depuis mai 2007 à Belfast, mise à mal par un scandale touchant le premier ministre, Peter Robinson. Mardi 12 janvier, Shaun Woodward, le ministre britannique chargé du dossier nord-irlandais, et Micheal Martin, le chef de la diplomatie irlandaise, se sont rencontrés pour évoquer ce sujet. La situation politique à Belfast était déjà compliquée, le Democratic Union Party (DUP) et le Sinn Fein ayant du mal à gouverner ensemble. Les aventures extra-conjugales d'Iris Robinson, l'épouse du premier ministre, et les irrégularités financières qui les ont accompagnées, l'ont rendue explosive. Lundi, Peter Robinson, soupçonné d'avoir été au courant des infractions commises par sa femme et de ne pas les avoir signalées à l'administration, a renoncé à ses fonctions pour six semaines. Arlene Foster, la ministre des entreprises, également issue du DUP, le remplace le temps qu'aboutissent les enquêtes parlementaires en cours. Martin McGuinness, un ancien commandant de l'IRA, reste vice-premier ministre. Pour l'heure, le pire a été évité. Mais les prochaines semaines s'annoncent à haut risque pour l'exécutif bipartite. L'issue des négociations entre le DUP et le Sinn Fein sur le transfert des pouvoirs de justice et de police de Westminster à l'Assemblée nord-irlandaise de Stormont sera déterminante. Le DUP freine le processus voulu par Londres. Alors que les 108 sièges de Stormont doivent être renouvelés en 2011, le parti de Peter Robinson a durci ses positions ces dernières semaines. Pour le Sinn Fein, l'enjeu est crucial : il s'agit de montrer à ses troupes que l'autonomisation de l'Irlande du Nord, désormais indépendante de Londres en matière d'éducation, de santé, d'emploi, d'environnement et d'agriculture, se poursuit. Aujourd'hui, le parti de Gerry Adams se sait en position de force. S'il claquait la porte du gouvernement, des élections anticipées seraient organisées. Compte tenu des divisions protestantes, le Sinn Fein deviendrait sans doute premier parti d'Irlande du Nord et obtiendrait ainsi le poste de premier ministre, le DUP devant se contenter du poste de vice-premier ministre. Le Sinn Fein a laissé trois semaines aux unionistes pour trouver une solution. Passé ce délai, que M. Robinson revienne ou pas, M. McGuinness quittera le navire. Virginie Malingre
13/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/13/londres-et-dublin-veulent-sauver-la-coalition-au-pouvoir-en-irlande-du-nord_1291090_3214.html
En Autriche, l'extrême droite se lance à l'assaut de Vienne aux élections locales
Le chef du Parti autrichien de la liberté (FPÖ), Heinz-Christian Strache, se veut l'héritier de Jörg Haider.
"Nous voulons le pouvoir. Nous voulons devenir numéro un. L'Autriche d'abord !" La voix rauque après deux heures de discours, l'oeil bleu glacier et le sourire ravageur, Heinz-Christian Strache conclut sur une note de défi la "rencontre de Nouvel An" du Parti autrichien de la liberté, le FPÖ, l'une des forces montantes de l'extrême droite en Europe. Les sondages lui donnent entre 22 % et 24 % des voix, deux fois plus que les Verts. Surtout, le fossé ne semble plus infranchissable entre le FPÖ et son principal rival auprès des couches populaires, le Parti social-démocrate SPÖ, tombé sous les 30 %. Attablées au centre des congrès de Vienne, ce dimanche 10 janvier, 4 000 personnes agitent de petits drapeaux rouge-blanc-rouge, les couleurs nationales. Le spectacle a commencé dans des volutes de fumée dignes d'un show à Las Vegas, rythmé par les accords du Carmina Burana de Carl Orff et les flonflons du Beau Danube bleu. Il s'achève sur l'hymne autrichien. Le FPÖ se présente comme "le parti social patriotique". Pour mieux défendre la "civilisation occidentale", menacée par une "islamisation" rampante, ses militants réclament, à l'instar de la Suisse, l'interdiction de construire des minarets. Le public mêle les messieurs en veste de loden aux jeunes ouvriers en blouson, anneau à l'oreille. On voit aussi des mères veillant sur leur bébé endormi. M. Strache est applaudi lorsqu'il rappelle que, dans la capitale, 65 000 femmes élèvent seules leurs enfants. Mais bien plus encore lorsqu'il évoque les cours de récréation où, selon lui, les rares jeunes Autrichiens "n'osent même plus parler allemand". Il est temps, dit-il, de mettre fin à cette "contre-société" que l'actuel maire et gouverneur de Vienne, le social-démocrate Michael Häupl, a laissé prospérer depuis seize ans qu'il est aux commandes de la capitale, où un tiers de la population est originaire d'autres pays - surtout de Turquie, d'Europe centrale et d'ex-Yougoslavie. Comme dans la Vienne du début du XXe siècle, qui se sentait assiégée par les immigrés juifs ou slaves venus de l'Est, le décor est planté pour un affrontement entre une droite xénophobe et une gauche sur la défensive. Trois élections régionales sont prévues cette année en Autriche, mais la "mère des batailles" aura lieu le 10 octobre à Vienne : le SPÖ de M. Häupl va sans doute y perdre la majorité absolue, tandis que le FPÖ a des chances de devenir la deuxième force dans la capitale, devant les démocrates-chrétiens du Parti du peuple ÖVP. Avec son allure juvénile et une propagande qui séduit les adolescents (le droit de vote a été abaissé à 16 ans), M. Strache, 40 ans, s'affirme comme l'héritier de Jörg Haider, mort en 2008. La frange radicale du parti que ce dernier avait fondé en 2005, l'Union pour l'avenir de l'Autriche (BZÖ), et qui ne survit que dans son fief de Carinthie, a décidé de se réconcilier avec le FPÖ. Le FPÖ pousse ses pions, celui du syndicalisme ouvrier comme celui de la représentation des petites entreprises à la chambre patronale de Vienne. "Mais on a du mal à monter une liste, soupire Rudolf Schmidhofer, un entrepreneur. Voter FPÖ, c'est comme se masturber : tout le monde le fait, personne n'ose le dire !" En jupe froncée et corselet, la blonde dirigeante de l'Union familiale du parti en Basse-Autriche, Elke Nachtmann, s'insurge contre le projet social-démocrate de rendre obligatoire le jardin d'enfants dès 3 ans afin d'accélérer l'intégration linguistique des familles immigrées. La question des immigrés va déterminer le destin politique et économique de l'Autriche pour les vingt ans à venir, souligne l'éditorialiste Hans Rauscher dans le quotidien libéral Der Standard. Car si ce pays ne fait pas un réel effort pour les intégrer, il s'expose à vivre "le triomphe des extrémistes de droite", dont les arguments sont repris par les partis classiques. A Salzbourg, les responsables du SPÖ ont ainsi fermé aux étrangers les asiles de vieillards, tandis qu'à l'est, le gouverneur social-démocrate du Burgenland (1,6 % des délits commis en Autriche) se réjouit que l'armée patrouille dans les rues pour rassurer les citoyens. Le SPÖ refuse d'accepter sur "ses" terres un nouveau centre d'accueil pour les demandeurs d'asile, que la ministre de l'intérieur, la conservatrice Maria Fekter, veut lui imposer. Assumant son rôle de "Mère Fouettard", dans l'espoir que l'ÖVP en retirera des bénéfices électoraux, Mme Fekter vient de proposer que les demandeurs soient confinés pendant un mois dans les centres. Depuis le 1er janvier, les règles du droit d'asile ont été durcies. Joëlle Stolz (Vienne, correspondante) et Joëlle Stolz
13/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/13/en-autriche-l-extreme-droite-se-lance-a-l-assaut-de-vienne-aux-elections-locales_1291089_3214.html
Des commissaires européens sous pression au Parlement
Un parfum de scandale a flotté sur l'audition, par le Parlement européen, de la candidate bulgare Roumiana Jeleva au poste de commissaire, mardi 12 janvier, à Bruxelles.
Un parfum de scandale a flotté sur l'audition, par le Parlement européen, de la candidate bulgare Roumiana Jeleva au poste de commissaire, mardi 12 janvier, à Bruxelles. Pressentie pour piloter l'aide humanitaire, l'actuelle ministre des affaires étrangères de son pays a été accusée d'irrégularités financières. Documents à l'appui, l'une de ses compatriotes a affirmé que la candidate conservatrice aurait omis de déclarer ses activités au sein d'une société de conseil dont elle était actionnaire quand elle est devenue eurodéputée, en 2007 : "Une attitude contraire aux règles européennes, et illégale au regard du droit bulgare", selon la députée libérale, Antonyia Parvanova, issue d'une formation opposée en Bulgarie au gouvernement en place. Mme Jeleva a tenté de se défendre. D'après elle, la société en question n'était plus "active" pendant la durée de son mandat parlementaire. Elle aurait aussi vendu ses parts en avril 2009, quelques mois avant d'être choisie par le premier ministre bulgare, Boïko Borissov, pour siéger à la commission. La candidate a également jugé "infondées" les rumeurs portant sur les liens présumés entre son mari et le crime organisé. Dans une ambiance houleuse, plusieurs élus ont demandé à Mme Jeleva "la transparence". L'écologiste Eva Joly, qui présidait la séance, a dû rétablir le calme. Cette offensive compromet la nomination de Mme Jeleva. Mardi soir, le Parlement européen a décidé de réserver son avis. La principale formation du Parlement, le Parti populaire européen (PPE), dont est membre Mme Jeleva, dénonce "un acharnement ", mais soutient la demande d'une "expertise". Les eurodéputés doivent confirmer l'équipe du président de la commission, José Manuel Barroso, le 26 janvier. D'ici là, ils peuvent exiger une modification de la répartition des postes, ou le retrait d'un candidat. La pression est d'autant plus forte qu'un autre candidat, le Lituanien Algirdas Semeta (fiscalité, lutte contre la fraude, union douanière) a lui aussi connu un examen de passage délicat. Après son audition, les socialistes ont fait part de leurs "sérieux doutes" au sujet d'un homme dont les réponses sur le fond des dossiers ont été jugées "non convaincantes". Philippe Ricard et Philippe Ricard
13/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/13/des-commissaires-europeens-sous-pression-au-parlement_1291088_3214.html
Emeutes racistes en Calabre : une piste mafieuse à l'étude
Après l'agression contre des journaliers immigrés, la 'Ndrangheta serait mise en cause pour avoir voulu influencer les prix agricoles.
La ville renoue lentement avec la vie. Les petits bus pourvoyeurs de journaliers agricoles, les "caporaux", comme on les appelle en Italie, ont repris leur service, au petit matin, pour conduire aux champs les immigrés. Les non-Africains. Dans les conversations, les bars, on ne parle que du coup de filet de la police, mardi 12 janvier, contre le clan local de la Ndrangheta, la mafia calabraise . Le parquet a cru bon de préciser que l'opération n'était pas liée aux violences du 8 janvier contre un groupe de journaliers africains, qui avaient dégénéré en bataille rangée entre immigrés et habitants de Rosarno, faisant une quarantaine de blessés.. L'un des membres de la famille mafieuse qui contrôle la ville a pourtant été arrêté, avec deux habitants de la ville pour avoir participé à "la chasse aux Noirs " . Une enquête a été ouverte. Mais avant de parler de responsabilité directe des clans mafieux, le procureur de la République de Palmi, Giuseppe Greazzo, attend d'en savoir plus. En revanche, pour les journalistes locaux qui stationnent devant le tribunal, le scénario est clair : les jeunes du clan, par bravade ou pour faire leurs preuves, se seraient "amusés à tirer sur les Noirs", provoquant le soulèvement des immigrés. Obligeant ensuite la Ndrangheta à prendre part à la riposte de la population. La défense de l'honneur de la ville ? L'explication ne convainc pas don Pino de Masi, curé de Polistena, près de Rosarno, référent de l'association anti-mafia Libera : "La Ndrangheta pense à son statut auprès de la population", reconnaît-il. "Mais sa motivation pourrait être beaucoup plus pratique : le secteur oranger est en crise et l'on est à un pas de demander la reconnaissance de l'état de calamité agricole, ce qui poussera les producteurs à laisser pourrir les fruits sur les arbres. A quoi bon, alors, garder des bras superflus, mieux vaut se débarrasser des journaliers..." Voilà ce qui arrive, conclut le curé, quand on laisse la Mafia gérer les conditions de travail. Un autre élément va dans ce sens. Rosarno a connu le scandale dit des "oranges de papier" : "les producteurs ont triché sur les chiffres pour empocher les fonds européens avec la complicité de petits fonctionnaires", explique un agriculteur qui veut garder l'anonymat. Depuis un an, le système d'aides est basé désormais sur le nombre d'hectares cultivés et non sur la quantité de fruits cueillis. Et les journaliers deviennent inutiles. Tout cela alors que Rosarno était devenu un lieu de refuge, en cette période de l'année, pour les immigrés, avec ou sans permis de séjour. Personne ne s'arrêtait à ces détails. Comme pour les tomates dans les Pouilles ou en Campanie, il y avait toujours besoin de bras. Un travail à bas prix bien sûr et non déclaré. En échange, il fallait accepter de vivre sans eau courante, sans électricité ni toilettes et se soumettre aux règles dictées par la Ndrangheta. "Les conditions de vie étaient ce qu'elles étaient, mais un salaire de 20-25 euros par jour avait du bon pour eux. D'autant que nous leur donnions tout : vêtements, nourriture. Et voici comment ils nous ont remerciés", enrage Giuseppe, du comité citoyen de Rosarno, créé pour défendre l'image de la ville. Ces conditions de vie dégradantes, l'organisation Médecins sans frontière (MSF), présente sur place jusqu'aux émeutes, en parle en connaissance de cause. "Nous avons distribué le nécessaire pour survivre dans ces conditions précaires, mais comme nous l'avions écrit dans un rapport en 2008, intitulé "Une saison en enfer", c'était intenable", rappelle-t-on au bureau romain de l'association. Laura Boldrini, porte-parole en Italie du Haut-Commissariat pour les réfugiés des Nations unies (HCR), était aussi sur place : "Il fallait avant toute chose ramener le calme et faire en sorte que les départs, sur base volontaire, se fassent pacifiquement." Les volontaires des associations locales avaient été chassés, et seuls ceux du HCR se sont interposés dans les cas les plus graves. "Des immigrés s'étaient réfugiés dans un cabanon, encerclé par des Italiens munis de bidons d'essence. Terrorisés, ils ont appelé au secours. Alertés, nous avons pu les sauver de justesse avec la police et les pompiers." D'autres immigrés ont été confrontés au dilemme de choisir entre leur propre sécurité et leur salaire : "Beaucoup attendaient encore d'être payés, mais la peur a pris le dessus", ajoute Mme Boldrini qui confirme que, parmi ceux obligés de quitter précipitamment Rosarno, beaucoup avaient leurs papiers en règle ou étaient sous protection internationale en tant que réfugiés. Dans son homélie, don Pino n'a pas mâché pas ses mots. "Nous les avons aidés, mais la charité ne suffit pas. L'Etat a été absent." C'est ce dont parlent aussi les habitants de Rosarno. Pendant vingt ans de cohabitation avec les immigrés, ils ont été laissés seuls, clament-ils. Aujourd'hui les voici taxés de "racisme". Lors d'une marche silencieuse, lundi, ils ont placé en tête de cortège une femme blessée par les immigrés lors des affrontements et aussi des Africains qui vivent depuis des années à Rosarno. Pour montrer qu'il n'y a pas forcément de confrontation. D'ailleurs, dans l'église de la ville, la vierge est noire, elle aussi. Salvatore Aloïse
13/01/2010
europe
https://www.lemonde.fr/europe/article/2010/01/13/emeutes-racistes-en-calabre-une-piste-mafieuse-a-l-etude_1291087_3214.html
Le Yémen propose de dialoguer avec les djihadistes s'ils désarment
Une conférence internationale sur la crise yéménite est prévue le 28 janvier à Londres.
Après les déclarations alarmistes sur le Yémen consécutives à l'attentat manqué sur le vol Amsterdam-Detroit revendiqué, le 28 décembre 2009, par Al-Qaida pour la péninsule Arabique (AQPA), les autorités de Sanaa tentent d'obtenir le maximum d'aide des pays occidentaux sans pour autant apparaître comme leurs obligées. Le régime du président Ali Abdallah Saleh assure attendre beaucoup de la conférence annoncée par le premier ministre britannique Gordon Brown et prévue à Londres le 28 janvier. Confronté dans le nord du pays, depuis 2004, à une rébellion armée, et à une mobilisation des provinces du Sud sur des mots d'ordre sécessionnistes, le gouvernement yéménite a cependant fait savoir qu'il refusait par avance que sa gestion, très décriée par l'opposition yéménite, de ces deux crises internes soit évoquée à cette occasion, pas plus que la question des droits de l'homme ou de la liberté de la presse. Illustration du raidissement des autorités face à la question du Sud, Hicham Bachrahil, directeur d'un quotidien influent d'Aden interdit de parution depuis mai 2009, Al-Ayyam, a été arrêté ainsi que son fils début janvier. En dépit des raids meurtriers menés en décembre 2009 - avant la tentative d'attentat du 25 décembre - contre des bases supposées de l'AQPA, le président Saleh a adressé, le 9 janvier, une offre de dialogue au groupe djihadiste, subordonnée à son désarmement. Cette ouverture, que Washington s'est refusé à commenter, a été explicitée le 12 janvier par le ministre des affaires étrangères yéménites, Abou Bakr Al-Kourbi, qui a assuré que l'option militaire "n'est pas le seul moyen" pour défaire Al-Qaida, ajoutant que la "lutte contre le terrorisme" menée par les pays occidentaux "a échoué après une expérience de près dix ans". Aide accrue Le régime yéménite a toujours pratiqué la cooptation, avec des succès variables, vis-à-vis de ses adversaires les plus déterminés. Il doit également tenir compte des sentiments antiaméricains d'une partie de sa population. En dépit des déclarations du gouvernement écartant par avance toute présence étrangère massive sur son sol, dénoncée comme une ingérence, l'un des responsables religieux radicaux les plus influents, Abdul Majid Al-Zindani, accusé par les Etats-Unis de soutenir le terrorisme, a mis en garde les autorités contre une "occupation étrangère" du Yémen au nom de la lutte contre Al-Qaida. Washington a pourtant pris soin d'annoncer, tout en s'engageant à augmenter l'aide apportée au gouvernement au nom de la lutte contre le terrorisme, qu'ils n'entendaient pas déployer de troupes sur le sol yéménite, où se trouvent déjà, selon la presse américaine, des éléments des forces spéciales. Ce souci de discrétion aurait également conduit, selon des sources diplomatiques, à réviser le format de la conférence de Londres annoncée par M. Brown sans concertations préalables avec ses alliés. Il était ainsi envisagé, au début de cette semaine, que cette conférence se transforme en simple échange de vues informel, en marge de la conférence prévue de longue date sur l'Afghanistan. Sans doute pour éviter toute forme de comparaison entre les deux pays. Gilles Paris
13/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/13/le-yemen-propose-de-dialoguer-avec-les-djihadistes-s-ils-desarment_1291079_3218.html
Un sous-officier français est mort en Afghanistan
Un sous-officier français a été tué par un engin explosif mercredi 13 janvier, en Afghanistan, a annoncé le ministère de la défense, ce qui porte à trois en trois jours le nombre de soldats français morts dans ce pays.
Un sous-officier français a été tué par un engin explosif mercredi 13 janvier, en Afghanistan, a annoncé le ministère de la défense, ce qui porte à trois en trois jours le nombre de soldats français morts dans ce pays. Ce décès porte par ailleurs à 39 le nombre de militaires français ayant trouvé la mort en Afghanistan depuis le déploiement des premières troupes alliées, fin 2001. Un convoi logistique de l'armée nationale afghane, accompagné par des militaires français chargés de leur formation, a subi une attaque d'un engin explosif improvisé (IED) sur la route reliant Bagram à Nijrab (Est), a précisé le ministère dans un communiqué. "Un sous-officier français qui se trouvait dans un véhicule blindé a été mortellement blessé après l'explosion de cet IED", ajoute le texte. "Le ministre de la défense, Hervé Morin, s'associe étroitement à la douleur de sa famille. Alors que l'armée française est endeuillée pour la troisième fois en quelques jours", il "renouvelle toute sa confiance aux militaires et il les sait convaincus de l'utilité de leur mission et de l'efficacité de leur action". Lundi, un soldat avait été tué lors d'un accrochage survenu dans la vallée d'Alasay, dans la province de la Kapisa. Un officier grièvement blessé avait succombé le lendemain.
13/01/2010
asie-pacifique
https://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2010/01/13/un-sous-officier-francais-est-mort-en-afghanistan_1291268_3216.html
Israël veut édifier une barrière de sécurité sur une partie de sa frontière avec l'Egypte
En janvier, le premier ministre, Benyamin Nétanyahou, avait justifié cette décision "stratégique" par la nécessité de "préserver le caractère juif et démocratique d'Israël" face à l'immigration illégale. A terme, avait-il précisé, "le pays tout entier devrait être entouré d'une barrière". Une perspective que rejettent certains, craignant que l'Etat hébreu, loin d'épouser le modèle de l'Athènes antique, ne se transforme plutôt en "Sparte moderne".
Puisque c'est une gageure que de tenter de contrôler les 260 km de la frontière avec l'Egypte, et puisque Israël est souvent critiqué par les organisations de défense des droits de l'homme pour sa politique de hot return ("retour à chaud") consistant à déporter sans délai les immigrants illégaux venus du Sinaï, la meilleure façon de protéger l'Etat juif contre toute immigration intempestive est de construire une barrière de sécurité sur la frontière, entre les déserts du Néguev et du Sinaï. Telle est la conclusion à laquelle est arrivé le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, le 10 janvier. "J'ai pris la décision de fermer la frontière sud d'Israël aux éléments infiltrés et aux terroristes. C'est une décision stratégique visant à préserver le caractère juif et démocratique d'Israël", a-t-il expliqué, en assurant que, à terme, "le pays tout entier doit être entouré d'une barrière". Consultées, les autorités égyptiennes n'ont fait aucune objection, dès lors qu'Israël financera intégralement les travaux. Ceux-ci seront onéreux - jusqu'à 1,5 milliard de dollars (1 milliard d'euros) -, et c'est l'une des raisons qui font douter de la réalisation d'un tel projet. Celui-ci, qui consiste à dresser une barrière de sécurité grillagée munie de radars pour détecter les intrus, a suscité de vives critiques des associations des droits de l'homme et des organisations qui s'occupent des réfugiés. A Tel-Aviv, Yael Dayan, présidente du conseil municipal et pacifiste réputée, ne voit aucune justification à une telle décision : "C'est un fait qu'il y a un échec pour arrêter ces entrées illégales, mais cela ne peut pas être une décision unilatérale. Beaucoup dépend des Egyptiens, qui ne font rien ; au contraire, ils encouragent ces étrangers à aller en Israël, pour s'en débarrasser." Le phénomène est accentué par les tribus bédouines qui, de chaque côté de la frontière, vivent de la contrebande, que celle-ci soit humaine ou liée à la drogue et aux armes. La fille de feu le général Moshé Dayan, le héros de la guerre des Six-Jours, s'inquiète des conséquences humanitaires de ce projet : "Une fois la barrière construite, que va-t-on faire ? Ouvrir le feu sur ces civils, qui sont d'abord des réfugiés économiques ?" Les diplomates israéliens expliquent que les immigrants illégaux, en majorité soudanais et érythréens, résident parfois plusieurs années en Egypte avant de se décider à passer en Israël. "Le pays enfermé" "La plupart d'entre eux recherchent une meilleure qualité de vie, explique un haut fonctionnaire, et une petite minorité est constituée de réfugiés politiques. L'Europe est également confrontée à ce problème, mais Israël est le seul pays où il n'y a aucun obstacle pour franchir la frontière : il suffit de marcher dans le désert." Selon l'armée israélienne, 5 169 immigrants illégaux ont franchi la frontière (qui n'est pas matérialisée) entre l'Egypte et Israël, en 2007. Ils étaient 7 554 en 2008, mais leur nombre a été ramené à 3 190 en 2009, à la suite d'une politique de refoulement et de déportation. Les autorités israéliennes estiment que près de 300 000 travailleurs illégaux résident dans le pays, et elles craignent d'assister à terme à un déséquilibre démographique au détriment des juifs. Le ministre israélien de l'intérieur et président du parti Shass (droite religieuse), Eli Yischai, avait provoqué une vive polémique, en novembre 2009, en affirmant que des milliers de travailleurs étrangers porteurs de maladies dont le sida, attendaient d'entrer en Israël. Le propos avait été critiqué pour sa xénophobie, mais il confortait les sentiments d'une opinion hostile aux travailleurs immigrés, dont l'économie israélienne a besoin. Yael Dayan explique qu'une autre politique est possible vis-à-vis des immigrés. A Tel-Aviv, la municipalité apporte une aide à 8 000 réfugiés et à environ 30 000 immigrants économiques, souvent originaires de Thaïlande et des Philippines. Parler de 300 000 illégaux vivant en Israël n'est pas sérieux, ajoute-t-elle, parce que dans ce chiffre le gouvernement compte les Palestiniens. Elle conteste également l'affirmation des autorités selon laquelle des "terroristes" venus de Gaza passent en Egypte via les tunnels creusés sous la frontière, pour ensuite entrer en Israël par le Sinaï : "Il n'y a aucune preuve d'un tel phénomène." Dans le quotidien Yedioth Aharonoth, l'éditorialiste Eitan Haber note qu'Israël dispose d'une barrière de sécurité sur le Golan pour l'isoler de la Syrie, d'une autre le long de la frontière libanaise, d'une autre encore le long de la frontière jordanienne, enfin que la bande de Gaza est totalement isolée. Avec ce projet à la frontière sud, "le pays tout entier sera enfermé". "Nous voulions être Athènes, conclut-il, nous devenons une Sparte moderne." Laurent Zecchini et Laurent Zecchini
13/01/2010
proche-orient
https://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2010/01/13/israel-veut-edifier-une-barriere-de-securite-sur-une-partie-de-sa-frontiere-avec-l-egypte_1291078_3218.html
Argentine : la présidente Cristina Kirchner se dit victime d'une conspiration
Des réserves de la Banque centrale de la République argentine, d'un montant de 1,7 million de dollars (1,17 million d'euros), ont été saisies par un juge aux Etats-Unis, a annoncé, mardi 12 janvier, le ministre argentin de l'économie, Amado Boudou.
Cet embargo répond à la demande de porteurs de titres argentins ayant refusé l'accord de renégociation de la dette de juin 2005. Le directeur de la Banque centrale, Martin Redrado, a déclaré qu'il ferait appel de cette mesure. Situation rocambolesque, puisque M. Redrado a été limogé par décret par la présidente péroniste Cristina Kirchner le 7 janvier, puis maintenu à son poste par une juge fédérale. Mme Kirchner dénonce une "conspiration" orchestrée par les médias, la justice et l'opposition. Mardi 12 janvier, elle a accusé le vice-président Julio Cobos (radical) de vouloir lui succéder avant la fin de son mandat en 2011. M. Cobos a entamé des consultations avec les chefs de l'opposition, convaincus que Mme Kirchner a violé la Constitution en limogeant M. Redrado sans consulter le Congrès. Partage Partager sur Facebook Partager sur Facebook Envoyer par e-mail Envoyer par e-mail Partager sur Messenger Partager sur Messenger Partager sur Whatsapp Partager sur Whatsapp Plus d’options Plus d’options Plus d’options Twitter Linkedin Copier le lien
13/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/13/argentine-la-presidente-cristina-kirchner-se-dit-victime-d-une-conspiration_1291082_3222.html
En Colombie, le président Uribe alimente l'incertitude sur une nouvelle candidature
Des observateurs internationaux demandent au chef de l'Etat de renoncer à un troisième mandat.
Le président colombien Alvaro Uribe sera-t-il candidat à un troisième mandat ? A quatre mois de l'élection présidentielle, l'incertitude alimente les spéculations et paralyse la campagne électorale. La question n'est plus de savoir si M. Uribe, arrivé au pouvoir en 2002, souhaite y rester jusqu'en 2014. Le chef de l'Etat a longtemps et savamment entretenu le suspense sur la question. Mais ses intentions ne font plus guère de doute. En décembre 2009, M. Uribe déclarait que sa réélection était entre les mains de "la Cour constitutionnelle, du peuple et de Dieu". Les sondages créditent le président colombien de plus de 60 % d'opinions favorables. C'est dire si, dans les urnes, sa réélection semble assurée. Cet homme à poigne, austère et travailleur, se targue d'avoir fait reculer les guérillas d'extrême gauche, démobilisé les milices paramilitaires d'extrême droite et rétabli la confiance des investisseurs. Contestée par les organisations de défense des droits de l'homme et l'opposition - du Parti libéral à la gauche démocratique -, sa politique sécuritaire continue de séduire les électeurs. Le problème est de savoir si M. Uribe peut, d'ici au mois de mai, faire modifier la Constitution pour briguer un nouveau mandat, comme il l'avait déjà fait en 2006. La balle est dans le camp de la Cour constitutionnelle, qui doit - d'ici trois mois - se prononcer sur la légalité du référendum constitutionnel, approuvé par le Congrès en septembre 2009, au prix de nombreuses irrégularités. L'opposition en a relevé dix-sept. Mardi 12 janvier, le procureur de la République Alejandro Ordoñez, chargé de veiller au bon fonctionnement de l'administration, s'est prononcé en faveur de ce référendum. "Ordoñez, allié du gouvernement, a rendu une décision politique, juge Rafael Pardo, candidat présidentiel du Parti libéral. La surprise aurait été de le voir statuer en droit, c'était pourtant son devoir." L'avis consultatif du procureur n'oblige pas la Cour constitutionnelle, mais pourrait faire pencher la balance en faveur des partisans de la réélection. Les "uribistes" ont évidemment applaudi la décision du procureur. "L'opposition qui sait Uribe invincible dans les urnes veut tenter par tous les moyens de l'empêcher d'être candidat", estime l'un d'eux. Pour que le président puisse briguer un troisième mandat, la Cour constitutionnelle ne doit pas seulement donner un avis favorable à la tenue du référendum : elle doit le faire très vite. Faute de quoi la consultation ne pourra pas être organisée dans les temps. Aux yeux de l'opposition, un éventuel report de l'élection présidentielle pour permettre à M. Uribe d'être candidat constituerait un véritable "coup d'Etat". Au-delà des arguties juridiques et des enjeux conjoncturels, le débat sur la réélection porte sur la démocratie elle-même. Pour justifier une nouvelle réforme de la Constitution, les partisans de M. Uribe invoquent en effet la volonté du peuple, ultime détenteur de la légitimité démocratique. Le président colombien a forgé pour sa part le concept d'"Etat de l'opinion publique", supérieur à l'Etat de droit sur son échelle de la démocratie. "Si tout le monde veut qu'Uribe reste au pouvoir, pourquoi les juges s'en mêlent ?", résume, à sa façon, Marcela Gomez, commerçante à Bogota, reflétant un sentiment largement partagé. L'opposition invoque, elle, le respect de l'Etat de droit et des institutions, en rappelant que la volonté populaire n'est pas toujours gage de démocratie. C'est aussi la position de nombreux observateurs. Les quotidiens Washington Post et El Pais (Espagne), ainsi que l'hebdomadaire britannique The Economist, ont recommandé à M. Uribe de renoncer à un nouveau mandat. Le président américain Barack Obama a discrètement abondé dans le même sens. Tous reconnaissent les succès de la politique sécuritaire de M. Uribe. Tous s'inquiètent de le voir suivre les pas de son collègue vénézuélien, Hugo Chavez. "A la droite de l'échiquier politique, aligné sur Washington, Alvaro Uribe fait figure d'exception idéologique en Amérique du Sud. Mais, comme ses voisins, il joue la carte du populisme présidentialiste", note le politologue Ricardo Garcia. "La question du troisième mandat d'Alvaro Uribe occulte malheureusement le débat sur les grandes politiques à mettre en oeuvre, souligne de son côté Markus Schultz, directeur de l'International Crisis Group pour l'Amérique latine. Le prochain président, que ce soit Alvaro Uribe ou un autre, devra mettre en oeuvre une stratégie sécuritaire qui dépasse la seule logique militaire, et s'attaquer aux causes du conflit armé." Marie Delcas
13/01/2010
ameriques
https://www.lemonde.fr/ameriques/article/2010/01/13/en-colombie-le-president-uribe-alimente-l-incertitude-sur-une-nouvelle-candidature_1291081_3222.html
Devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone, l'ancien président libérien Taylor se pose en victime d'un complot
L'ex-chef d'Etat est inculpé à La Haye pour des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité.
Charles Taylor serait-il le héros d'un mauvais scénario ? Un complot "écrit comme le script d'un film a été monté contre moi", a expliqué l'ancien président du Liberia aux juges du Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) qui siègent à La Haye, aux Pays-Bas. Jugé pour crimes contre l'humanité et crimes de guerre commis entre 1996 et 2002 lors de la guerre civile en Sierra Leone, Charles Taylor, témoin de sa propre histoire, dépose depuis cinq mois. Pour lui, "tout ce qui se joue dans cette affaire est fondé sur un complot, avec des acteurs clés, des responsables majeurs de gouvernements et de services de renseignement". Ils devaient trouver "un bouc émissaire", et "je suis censé être le crétin auquel les gens apportaient des diamants dans des pots de mayonnaise !", a-t-il lancé, il y a quelques semaines, avec sa gouaille de "Libérien Américain", ces descendants d'esclaves affranchis d'Afrique de l'Ouest. Son procès est une oeuvre signée du Pentagone, affirmait-t-il encore. Il en veut pour preuve l'itinéraire professionnel des membres du parquet, où figurent des anciens de l'armée américaine, dont la procureure en chef, Brenda Hollis, qui a longtemps émargé à l'US Air Force. Dans ce mauvais scénario, deux stars d'Hollywood jouent un second rôle. A la demande du procureur, l'actrice américaine Mia Farrow a témoigné, par écrit, d'une rencontre en Afrique du Sud avec l'ex-chef de guerre, au cours de laquelle il aurait offert, en sa présence, un diamant au top-modèle Naomi Campbell. Or l'accusé affirme n'avoir jamais touché un seul de ces diamants quand, en face, le procureur soutient qu'il s'est allié aux rebelles du Front révolutionnaire uni (RUF) en Sierra Leone, au nord-ouest du Liberia, pour s'emparer des richesses du pays. Mi-décembre 2009, l'avocat de Charles Taylor, Me Courtenay Griffiths, a obtenu une courte suspension du procès. Sous le feu des questions et des preuves présentées par le procureur, l'accusé a dû revoir sa défense. L'ex-chef d'Etat, qui parfois parle de lui-même à la troisième personne, avait mis au défi "les Nations unies, tout être humain ou toute organisation, de montrer un seul compte en banque sur lequel Charles Taylor aurait déposé de l'argent". Un défi relevé, au cours des dernières audiences, par le substitut, Nicholas Koumjian. A la cour, il a présenté les pièces du compte numéro 00201-32851-01, ouvert au nom de Charles Taylor à la Banque libérienne pour le développement et l'investissement. Plus de 14 millions de dollars l'ont alimenté pendant trois ans. Pourquoi ce compte était-il ouvert au nom de Charles Taylor ? Pour l'accusé, il s'agissait d'un compte secret du gouvernement, destiné à contourner l'embargo sur les armes décidé par les Nations unies. "C'est secret parce que cela allait directement dans votre poche ?", avait demandé le substitut Nicholas Koumjian. "Ce n'est pas votre affaire, avait rétorqué Taylor, il appartient au peuple du Liberia de déterminer si cet argent est allé directement dans ma poche ou non. Ce que je vous dis, c'est que ce montant était utilisé secrètement, et je n'ai aucune obligation de vous dire quelles étaient ces opérations secrètes." Déférent envers ses trois juges, face auxquels il se fait pédagogue lorsqu'ils se perdent dans ses nombreuses conquêtes féminines, Charles Taylor expose depuis des jours son propre scénario de la guerre : "Les embargos servent en général à neutraliser l'ennemi, tout en approvisionnant ceux élus pour gagner". Dix ans de guerre, plus de 150 000 morts, des dizaines de milliers de personnes amputées : un sombre bilan qui ne plaît guère à celui qui se rêve en héros de la révolution panafricaine. "Une révolution manquée" aux yeux de nombre des acteurs du procès. Une question taraude l'accusé depuis son arrestation, le 29 mars 2006, au Nigeria. En voyage à Washington, le président nigérian, Olusegun Obasanjo, qui depuis sa mise en accusation trois ans plus tôt lui avait offert un exil confortable, affirme que le chef de guerre s'est enfui. "Pourquoi a-t-il menti ? En tant qu'ami et frère, je pense qu'il doit dire la vérité." L'ex-président nigérian viendra-t-il témoigner en sa faveur à La Haye ? Quelle que soit sa décision, le scénario qui se joue depuis les premières audiences, en janvier 2008, ne promet pas un heureux dénouement pour Charles Taylor, dont le jugement est attendu fin 2010. Stéphanie Maupas
13/01/2010
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/01/13/devant-le-tribunal-special-pour-la-sierra-leone-l-ancien-president-liberien-taylor-se-pose-en-victime-d-un-complot_1291080_3212.html
Les Chabab somaliens rêvent d'exporter leur djihad
Les ambitions de ce mouvement de combattants islamistes sont limitées par sa composition hétérogène.
La poursuite du djihad somalien sur le sol du Yémen a commencé en chansons, et semble en être restée là. Début janvier, dans un camp du nord de Mogadiscio, la capitale somalienne, plusieurs centaines de jeunes recrues du groupe harakat Al-Chabab mujahidin (mouvement des combattants sacrés de la jeunesse), classé par les Etats-Unis comme un groupe terroriste, terminaient leur formation. Défilant drapeau noir au vent, ils ont pu écouter l'un de leurs chefs, Cheikh Mukhtar Robow Abu Mansur, célébrer leur future intervention au Yémen voisin, où "leurs frères devaient se préparer à les accueillir". Le Yémen se trouve à quelques jours de mer des régions côtières somaliennes accessibles à ces Chabab. Les boutres sont nombreux sur ces routes maritimes, fréquentées notamment par les trafiquants d'armes et d'êtres humains. En théorie, l'océan Indien n'est donc pas un obstacle à un débarquement chabab au Yémen. En théorie, également, les affiliations revendiquées par les groupes armés islamistes yéménites et somaliens, qui incluent des liens avec le réseau Al-Qaida pourraient en faire des frères d'arme. Du reste, rien ne pourrait sans doute faire plus plaisir aux commandants chabab que de mettre ce plan à exécution, qui prouverait que le groupe somalien peut se hisser dans les tout premiers rôles djihadistes à l'échelle de la planète. Mais s'il y a mouvement de Somaliens vers le Yémen, c'est essentiellement à bord d'embarcations de trafiquants emportant des clandestins, jetés sur les côtes yéménites au péril de leur vie. 32 000 Somaliens ont trouvé refuge chez l'inhospitalier voisin de la péninsule Arabique en 2009. Plus de 100 000 personnes au total ont quitté la Somalie au cours de l'année, fuyant les combats entre une coalition fluctuante de groupes islamistes, dont font partie les Chabab, et les forces du Gouvernement fédéral de transition (TFG), fragile entité bénéficiant de soutiens internationaux, et de l'appui des troupes de l'Union africaine, l'Amisom. La menace du fouet Revendiquant une affiliation à Al-Qaida, hébergeant des responsables de la cellule d'Afrique de l'Est de la nébuleuse d'Oussama Ben Laden, qui leur a rendu hommage dans un enregistrement audio assez bref diffusé en mars, les Chabab ont importé des techniques d'autres terrains djihadistes, notamment les attentats-suicides. Leur influence demeure cependant bornée par les frontières somaliennes. Ils contrôlent une grande partie du sud du pays, et sont engagés depuis début janvier dans une nouvelle offensive contre le TFG et d'autres mouvements, dont certains sont d'anciens alliés. Le but, selon des sources bien informées, est d'étendre leur influence dans le centre du pays pour étouffer progressivement Mogadiscio. Dans ce cadre, l'intervention des Chabab au Yémen a toutes les chances de rester au stade des chansons et des promesses, tout comme l'avait été la formation en octobre d'une brigade des Mujahidin d'Al-Quds qui se promettait, sous les ordres d'Abdifatah Aweys Abu Hamasa, un "Afghan" somalien, de porter la guerre sainte à Jérusalem pour y "défendre la mosquée Al-Aqsa contre Israël". Ces limites dissimulent-elles une emprise accrue de responsables d'Al-Qaida sur le mouvement ? Depuis novembre, Cheikh Mohammed Abou Faid, un responsable d'Al-Qaida de nationalité saoudienne aurait pris le contrôle du commandement des Chabab. Mais cette information repose sur la confession d'un commandant chabab "retourné" et nécessite de sérieuses confirmations. Au cours des derniers mois, le groupe a donné des preuves de son rigorisme. Les Chabab menacent de fouet les hommes qui refusent de porter la barbe ou négligent de coudre l'ourlet des pantalons assez haut pour dégager les chevilles. Lapidations, amputations et séances de fouet se sont multipliées. Les Chabab ont également détruit des tombes de saints, dont les anniversaires sont d'importantes fêtes religieuses dans la Somalie des confréries soufies, s'aliénant une partie de la population. Les Chabab entretiennent des relations complexes avec la société somalienne, où les alliances dépassent les notions religieuses. Des responsables du TFG rejoignent le milieu insurgé aussi facilement que des insurgés font défection à l'autre camp. Le chercheur du CERI (Sciences Po), Roland Marchal, spécialiste de la Somalie, distingue trois tendances parmi les Chabab. Les uns appartenant à une tendance néosalafiste (retour à l'islam des origines). D'autres étant issus du mouvement des Cours islamiques (au pouvoir pendant six mois en 2006 avant d'être chassés par l'Ethiopie). Le troisième groupe étant constitué d'anciens d'Afghanistan. Pour le chercheur français, seuls ces derniers retiendraient, à tort, l'attention de l'extérieur. Internationalisé, le conflit somalien l'est depuis plusieurs années, avec l'intervention à des degrés divers de l'Ethiopie, de l'Erythrée, du Kenya et des Etats-Unis aux côtés du TFG. Côté Chabab, des combattants étrangers ont rejoint leurs rangs. Or, selon les estimations de l'Union africaine, le nombre de ces étrangers se monterait à 1 200, et tous ne sont pas des djihadistes aguerris. La moitié d'entre eux sont originaires du Kenya voisin, où vit une forte population somalie.
13/01/2010
afrique
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2010/01/13/les-chabab-somaliens-revent-d-exporter-leur-djihad_1291077_3212.html
"Google s'estime victime d'une ""attaque ciblée"" et menace de quitter la Chine"
Le géant de l'Internet possède 31 % du marché, loin derrière le groupe local Baidu (64 %).
Google va-t-il quitter la Chine ? Le géant de l'Internet en a brandi la menace, mardi 12 janvier, dans un communiqué de David Drummond, le vice-président chargé du développement et des affaires juridiques, publié sur le blog officiel de Google en détaillant ses griefs contre les autorités chinoises. M. Drummond évoque d'abord une "attaque ciblée et très sophistiquée de notre infrastructure en provenance de la Chine qui s'est traduite par un vol de propriété intellectuelle de Google". Elle aurait été détectée mi-décembre 2009 et ne serait pas un acte isolé, mais la manifestation d'une opération plus large touchant une vingtaine de grandes entreprises dans les secteurs de l'Internet, de la finance, de la technologie, des médias et de l'industrie chimique. Ces sociétés devraient d'ailleurs saisir de concert les autorités américaines compétentes sur le sujet. Pour Google, "le but premier des attaquants était d'accéder aux comptes de messagerie Gmail de militants chinois des droits de l'homme". Il précise toutefois que le but recherché n'a pas été atteint faute d'accès au contenu des messages. Le géant du Net affirme également qu'indépendamment de cette attaque, il a découvert que des "tierces parties" avaient eu accès régulièrement à des dizaines de comptes de messagerie Gmail d'avocats de la cause des droits de l'homme en Chine, basés aux Etats-Unis, en Europe et en Chine. Non pas en violant les codes de sécurité de Google, mais par des méthodes classiques de piratage. La société américaine explique qu'elle a décidé de rendre ces informations publiques pour lancer le débat sur la liberté d'expression. Elle reconnaît qu'elle a accepté de censurer certains résultats de requêtes sur son moteur de recherche lorsqu'elle a fait le choix de lancer son service en Chine en janvier 2006. "Nous pensions que les bénéfices d'un accès accru à l'information pour les gens en Chine et un Internet plus ouvert compenserait la gêne suscitée par le fait d'accepter de censurer certains résultats", selon M. Drummond. Négociations Google affirme aujourd'hui avoir pris la décision de ne plus censurer son moteur de recherche en Chine et d'engager des discussions avec Pékin en ce sens. Il précise également que la fermeture du moteur de recherche, voire même de ses bureaux en Chine, n'est pas exclue, en fonction de l'issue des négociations. Ce contentieux avec Pékin intervient alors que Google n'a pas réusssi à s'imposer en Chine. Le fondateur de Google China, Kai-Fu Lee, qui avait été débauché de chez Microsoft, a démissionné en septembre 2009. Le pays, qui compte le plus d'internautes au monde (environ 338 millions), fait figure d'exception. Avec le soutien du gouvernement, désireux à la fois de contrôler Internet mais aussi de favoriser l'émergence d'acteurs de poids dans ce secteur, ce sont des entreprises chinoises qui dominent. A l'instar du moteur de recherche Baidu, qui a 63,9 % de parts de marché, selon la société d'études Analysis International. Loin devant Google, qui est crédité de 31,3 %. Laurence Girard
13/01/2010
technologies
https://www.lemonde.fr/technologies/article/2010/01/13/google-s-estime-victime-d-une-attaque-ciblee-et-menace-de-quitter-la-chine_1291117_651865.html
Le distributeur Tesco a passé d'excellentes fêtes de Noël
Les consommateurs britanniques vivront peut-être une "annus horribilis" en 2010, mais cette triste perspective ne les a pas empêchés de participer à l'assaut annuel des commerces, et des supermarchés Tesco plus particulièrement.
Quand on a le moral qui flanche, on fait les magasins. Les consommateurs britanniques vivront peut-être une annus horribilis en 2010, mais cette triste perspective ne les a pas empêchés de participer à l'assaut annuel des commerces, et des supermarchés Tesco plus particulièrement. On pensait que le numéro quatre mondial de la distribution, qui réalise une marge de 12,5 % sur le chiffre d'affaires de ses magasins au Royaume-Uni, aurait fort à faire pour se défendre contre des concurrents de plus en plus dangereux. Eh bien, non : une fois de plus, Tesco a montré la marche à suivre, enregistrant les meilleures ventes de Noël des trois dernières années. Les groupes de distribution britanniques connaissent une embellie extraordinaire depuis quelques mois, car les taux d'intérêt sont bas, la TVA est temporairement réduite et l'Etat a forcé sur la dépense. Les supermarchés ont développé la surface des rayons non alimentaires, et ainsi taillé des croupières à des chaînes comme Marks & Spencer. Les groupes britanniques se sont souvent cassé les dents sur les marchés étrangers, mais Tesco fait apparemment exception : la succursale américaine elle-même, qui n'avait pas été épargnée par les quolibets à ses débuts, affiche une progression des ventes "fortement positive". Il n'y a qu'à voir les performances du distributeur allemand Metro, qui a pu ravir à Tesco la place de numéro trois mondial grâce à la faiblesse de la livre, pour s'en convaincre : son chiffre d'affaires a reculé de 3,4 % au quatrième trimestre 2009, quand celui de Tesco augmentait de 6,9 %. Services bancaires Tesco a déjà réinventé la façon de commercialiser l'habillement et les produits électroniques. Les services bancaires pourraient maintenant lui offrir un champ d'action à potentiel élevé. Les banques n'ont jamais suscité autant de défiance chez leurs clients, et le gouvernement tente désespérément de favoriser l'arrivée de nouveaux venus. Les banques déjà établies s'évertuent à expliquer que leur métier est bien plus difficile qu'il n'y paraît, mais Tesco a l'envergure, la compétence et la conjoncture qu'il faut pour révolutionner ce secteur. Si les banquiers s'imaginent que des épiciers sont incapables de l'emporter, c'est qu'ils ne sont pas attentifs. Une analyse, conduite par la maison de courtage Nomura en octobre 2009, a conclu qu'à 389 pence l'action Tesco était une bonne affaire. Elle vaudrait en fait un tiers de plus, si l'on prend pour hypothèse que le chiffre d'affaires progressera de près de 50 % au cours des cinq prochaines années. Jeudi matin, le titre cotait à 421 pence, soit encore une livre sterling au-dessous du cours cible fixé par Nomura. (Traduction de Christine Lahuec.) Plus de commentaires sur l'actualité économique et financière sur Breakingviews.com . Neil Collins
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/le-distributeur-tesco-a-passe-d-excellentes-fetes-de-noel_1291129_3234.html
Barack Obama doit fixer un but précis au futur impôt sur les banques
Si l'administration de Barack Obama veut lever une taxe spéciale sur les activités financières aux Etats-Unis, il faut que ce dernier en définisse l'objectif.
Il pourrait par exemple décider que les contribuables doivent intégralement récupérer les fonds qui ont été engagés dans les plans de sauvetage bancaires pour le plus grand profit de Wall Street. Car créer un impôt sans finalité et sans limitation dans le temps, c'est prendre le risque que l'Etat grève durablement les bénéfices du secteur. On ne connaît pas encore en détail les modalités du projet que la Maison Blanche présentera en février en même temps que son budget, mais il semble qu'elle ait déjà écarté un certain nombre d'idées, comme celle qui consisterait à taxer les transactions sur les titres. Le secrétaire au Trésor, Timothy Geithner, a expliqué que cette méthode reviendrait à transférer la charge de l'impôt sur les clients. On ne devrait pas non plus entendre parler d'une taxe directe sur les primes des financiers comme les supertaxes britannique ou française de 50 %, car la Constitution américaine n'admet pas la discrimination fiscale. De toute façon, la motion aurait peu de chances d'être votée par le Congrès. Ne reste plus que la solution d'imposer l'ensemble des bénéfices du secteur financier. Oui, mais pour quel résultat ? Bien sûr, il est légitime de vouloir recouvrer l'argent investi dans le TARP - le gigantesque plan public de sauvetage des banques de 700 milliards de dollars. Si la plupart des établissements majeurs, comme Goldman Sachs, Bank of America et JPMorgan, ont déjà remboursé l'aide qu'ils ont reçue, le bilan global du plan sera déficitaire. Toutefois, il n'est pas nécessaire de légiférer à nouveau pour combler ce déficit. Le texte qui a institué le TARP en octobre 2008 précisait déjà que le président était habilité à intervenir pour récupérer les fonds au bout de cinq ans. L'inconvénient d'une mesure fiscale généralisée au secteur, c'est que la Maison Blanche et le Congrès pourront puiser à loisir dans cette manne pour financer ce que bon leur semblera, peut-être bien ad vitam aeternam. Cela ressemble plus à une ruse du gouvernement qu'à un plan d'action destiné à réduire la dépense publique, le déficit budgétaire, ou même les effets pervers du système de primes en usage dans la sphère financière. D'un autre côté, ce serait là une décision avantageuse sur le plan politique. On a beaucoup reproché à la Maison Blanche de s'être montrée trop indulgente à l'égard de Wall Street. Sa réforme financière a été critiquée en ce qu'elle ne s'attaque pas vraiment aux banques géantes : elle ne les pousse pas à diminuer leur taille ou à clarifier leur fonctionnement. Finalement, M. Obama aura la lourde tâche de démontrer que le projet de nouvelle taxe n'est pas inspiré par la seule démagogie. (Traduction de Christine Lahuec.) Plus de commentaires sur l'actualité économique et financière sur Breakingviews.com . James Pethotoukis
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/barack-obama-doit-fixer-un-but-precis-au-futur-impot-sur-les-banques_1291118_3234.html
JP Morgan : les conquérants
La grande banque américaine dirigée par Jamie Dimon est celle qui a le mieux surmonté la crise. Elle s'apprête à distribuer des bonus record à ses employés.
Vingt-neuf milliards de dollars (19,9 milliards d'euros). Le 15 janvier, la banque américaine JP Morgan Chase & Co doit annoncer l'octroi de ce bonus record à ses 220 861 employés. L'une des rares institutions financières à être sortie renforcée de la crise, l'établissement du 475 Park Avenue affiche aujourd'hui une santé insolente. Présent dans tous les métiers, ce groupe prolifique est la plus grande banque des Etats-Unis en termes de capitalisation boursière, d'actifs sous gestion ou d'émission de cartes de crédit. Le joyau de sa couronne, la banque de dépôts Chase, vit une incroyable success story. Et ses principaux rivaux se trouvent dans l'embarras, à commencer par Goldman Sachs qui, malgré sa belle performance financière, paraît bien petite en comparaison. Le PDG de JP Morgan Chase, Jamie Dimon, 53 ans, est, selon l'expression américaine, "assis sur le toit du monde". Ce New-Yorkais de souche domine Wall Street d'une bonne tête. Ce professionnel hors pair, qui protège férocement sa vie privée en se tenant à l'écart de la gloire médiatique, est propulsé sous les feux de la rampe, à la "une" de toute la presse. Et pour cause : quand ce manager à l'intelligence racée arrive, à la mi-2004, à la tête de JP Morgan, il hérite d'une maison sclérosée qui dort sur ses lauriers et sa morgue. Le scandale Enron (le plus gros courtier en énergie au monde miné par l'endettement s'est effondré en 2001) et l'éclatement de la bulle technologique menacent l'avenir de la vieille enseigne. Passer de Bank One, une banque de détail régionale basée à Chicago, aux sphères de la haute finance de Wall Street : le défi est énorme, même pour Jamie Dimon, qui avait participé à l'édification du géant Citygroup dans les années 1990. Son parcours chez JP Morgan est spectaculaire. Sous sa direction, les cadres disent au revoir au train de vie fastueux et aux notes de frais trop généreuses. En lui assignant un plan de travail précis et méthodique - renforcement du bilan, refus du risque, réduction de l'exposition au marché hypothécaire - le nouveau venu "muscle" la firme. En cette période de boom, les analystes critiquent sévèrement le manque d'audace du nouveau dirigeant. Le titre est sous-évalué et les actionnaires ronchonnent. Jamie Dimon n'en a cure. Pas d'étincelles. La gestion bling-bling est pour les autres. Comment fait-il ? Le PDG sait motiver ses cadres. Ce n'est pas un homme de réseaux - pas de coteries ni de dîners en ville -, mais un homme d'équipe qui prend les dossiers cruciaux à bras-le-corps. Rapide dans les décisions, ce diplômé de la Harvard Business School est un "matheux" hors pair qui n'a pas son pareil pour décortiquer les comptes des sociétés. De par sa formation, Dimon est un banquier commercial à l'ancienne, pas un trader. Ce décideur ne doute pas de lui. Tout au plus ce dirigeant, dépourvu, dit-on, d'intérêts - intellectuels ou artistiques - en dehors du travail, accepte-t-il quelques conseils. Pour compenser son manque d'expérience internationale, il copréside le forum de Davos et s'attache les services de l'ancien premier ministre britannique Tony Blair. Ce n'est pas un tendre. Son équipe avoue filer doux devant ses colères. Ce fils de banquier sorti du moule d'une école privée et passé par Harvard peut parler un langage de charretier digne des bas-fonds de Brooklyn. N'a-t-il pas traité en public Vikram Pandit, patron du Citygroup, de "pauvre con", sans jamais s'excuser ? Qu'importe que l'esprit monarchique ait peu à peu envahi son "règne", que son entourage se soit progressivement transformé en une cour. Quand la tourmente s'abat sur la planète financière, à la fin de l'été 2008, JP Morgan est en position de force. Dotée d'un formidable bilan, débarrassée depuis 2007 des crédits à risque, les subprimes, l'institution surfe sur la crise. En mars 2008, avec la garantie du gouvernement fédéral, JP Morgan rachète pour une bouchée de pain le courtier Bear Stearns en banqueroute. Cette acquisition, obtenue avec l'aide du gouvernement fédéral, lui permet d'ajouter à son portefeuille le prime brokerage (principal courtage), une activité très rémunératrice de services aux fonds spéculatifs. Par la suite, cet animal à sang-froid n'hésite pas à précipiter la faillite de Lehman Brothers en gelant, le 13 septembre 2008, des milliards de dollars d'actifs. "Il s'agit de préserver l'intérêt de mes actionnaires", répond invariablement celui que les critiques portées contre le comportement de son entreprise laissent de marbre. Alors que ses concurrents luttent pour leur survie, le 25 septembre 2008, Jamie-le-conquérant reprend les beaux restes de la banque commerciale Washington Mutual, déclarée en faillite. Conforté dans son aura de pompier du plus grand incendie du siècle, ce démocrate de longue date est proche du président Obama. Malheureusement, son manque de diplomatie dans la défense des bonus accordés aux traders lui a barré la route d'un poste au gouvernement. Malgré cette déception, Jamie Dimon pourrait faire sienne l'exclamation d'Auguste dans Cinna de Corneille : "Je suis maître de moi comme de l'univers." Pourtant, ils sont nombreux à l'affirmer : Jamie Dimon a manqué son rendez-vous avec l'Histoire. Le 18 septembre 2008, peu après la chute de Lehman Brothers, le téléphone sonne. Au bout du fil, la voix rauque du secrétaire du Trésor, Henry Paulson, qui l'appelle en catastrophe : "Jamie, par pitié, fais quelque chose. Achète Morgan Stanley. Elle est au bord du précipice." Après quelques heures de réflexion, Dimon décline l'offre de Paulson. Ce grand échalas à la silhouette solidement charpentée estime qu'en raison des doublons, pareille fusion ne peut qu'aboutir à une épouvantable usine à gaz. In extremis, une injection de capitaux japonais sauvera la Morgan Stanley. C'est que "Hank" Paulson s'est lourdement trompé sur la personnalité de son ami. Le grand argentier pense que Dimon se voit en digne successeur de J. Pierpont Morgan, fondateur de ce qui fut sans doute le plus grand empire financier de la planète. En rachetant Morgan Stanley, Jamie aurait rendu son rayonnement à la mythique maison Morgan, "un nom qui a représenté au XXe siècle pour les Etats-Unis ce que la famille Rothschild avait symbolisé au XIXe siècle pour l'Europe", à lire Ron Chernow dans The House of Morgan. Peut-être a-t-il manqué à ce surdoué le désir d'un destin historique ? Pour le journaliste Duff McDonald, auteur de la biographie autorisée de Jamie Dimon, The Last Man Standing ("Le dernier homme debout"), l'intéressé n'a jamais été habité d'un tel dessein : "Ce n'est pas un affectif. Il n'a pas d'ego surdimensionné et n'a rien d'un visionnaire." Il travaille dans le réel, en praticien tout simplement. Réunifier la famille Morgan ? Un petit rappel historique s'impose. A partir d'une petite charge d'agent de change fondée en 1871 à New York, J. Pierpont Morgan crée le capitalisme financier américain de toutes pièces. Aux côtés d'Andrew Carnegie, John D. Rockefeller et une poignée d'autres barons voleurs, ce pirate rusé des affaires pilote la formation d'énormes trusts industriels, à l'instar de la General Electric, l'US Steel ou ATT. La culture de cette enseigne transatlantique mêlant grandes familles WASP (white anglo-saxon protestant) de la Côte est des Etats-Unis, lords britanniques formés à Eton et à Oxford et continentaux au sang bleu, est résolument aristocratique. La Grande Dépression des années 1930 et le Glass Steagall Act de 1934, qui sépare les fonctions de banque commerciale et de banque d'investissement, font éclater le conglomérat. Un groupe de directeurs dissidents mené par le propre petit-fils de J. Pierpont lance une banque d'affaires au nom de Morgan Stanley. La filiale anglaise, Morgan Grenfell, fait alors sécession. Ramenée à un rang ordinaire, JP Morgan se languit pendant des décennies en milieu de classement au hit-parade bancaire. La JP Morgan incarne aussi un autre versant, moins glorieux, du capitalisme américain. A la fin du XIXe siècle, c'est sous l'impulsion de ses dirigeants que les grands établissements bancaires protestants ont voulu contrer l'émergence des banques juives, comme Goldman Sachs, Loeb Kuhn, Salomon Brothers ou Lehman. Constituées en réseau, ces dernières sont alors exclues, à l'initiative de J. Pierpont Morgan, des grands financements industriels, l'automobile, l'acier, le pétrole. Elles doivent se contenter des secteurs moins nobles : la distribution, le textile ou l'agroalimentaire. A New York comme à Londres, les différentes enseignes Morgan, comme au demeurant bon nombre de fleurons bancaires protestants, emploient peu de juifs. Dans les années 1960, la disparition du poids de l'actionnariat familial ainsi que l'avènement d'une nouvelle génération de dirigeants, à l'instar de Lewis Preston, futur président de la Banque mondiale, ouvriront JP Morgan au vent du changement. "Aujourd'hui, à l'heure de la société multiculturelle, ces divisions religieuses ou ethniques ne sont plus de saison à Wall Street comme dans le reste du pays", insiste Richard Sylla, professeur d'histoire financière à la New York Business School. A l'évocation de cette période trouble, le porte-parole de Jamie Dimon répond par des cris d'honneur souillé : "De vieilles histoires." La porte du siège restera fermée à l'envoyé spécial du Monde. Officiellement, à cause d'un emploi du temps trop chargé. Mais, plus vraisemblablement, parce que Jamie Dimon avait été courroucé par un article publié lors de la chute de Lehman, qui faisait écho à l'antisémitisme d'antan de la famille Morgan. Marc Roche et Marc Roche
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/jp-morgan-les-conquerants_1291130_3234.html
D'autres affaires montrent l'insuffisance des contrôles
Le scandale qui éclabousse le comité central d'entreprise (CCE) d'Air France n'est pas un cas isolé. D'autres affaires similaires ont eu un écho retentissant au cours des dernières années.
Le scandale qui éclabousse le comité central d'entreprise (CCE) d'Air France n'est pas un cas isolé. D'autres affaires similaires ont eu un écho retentissant au cours des dernières années. En février 2004, le parquet de Paris a ouvert une information judiciaire pour "abus de confiance, escroquerie, faux et usage de faux, complicité et recel" à propos de la gestion de la caisse centrale des activités sociales (CCAS) des industries électriques et gazières (IEG) - fréquemment présentée comme le CE d'EDF et de GDF Suez. Un ancien président CGT de cette instance, Jean Lavielle, a été mis en examen dans ce dossier. La CCAS, qui brasse des sommes considérables (483 millions d'euros pour l'exercice 2005-2006), est soupçonnée - entre autres - d'avoir pris en charge le salaire de collaborateurs de la CGT et des dépenses effectuées lors de la fête annuelle de L'Humanité. Trois ans plus tard, en avril 2007, les "institutions sociales" des IEG ont de nouveau été épinglées dans un rapport au vitriol de la Cour des comptes : gestion opaque, absence de comptes consolidés, charges administratives très lourdes, etc. Plus récemment, le comité d'entreprise (CE) de Disneyland Paris, dont le secrétaire appartient à la CGT, a été mis en cause. Suite à une plainte déposée par Force ouvrière, le parquet de Meaux (Seine-et-Marne) a ouvert une enquête préliminaire et demandé au service régional de la police judiciaire (SRPJ) de Versailles de vérifier si des fonds avaient été détournés. Saisi en référé par la direction de Disneyland, le tribunal de grande instance de Meaux a ordonné, le 8 janvier, une expertise des comptes du CE. "Acheter la paix sociale" Plusieurs chercheurs considèrent que de telles dérives demeurent marginales. Elles n'en soulèvent pas moins des questions sur le contrôle de ces institutions. A l'heure actuelle, les comptes d'un "comité doivent être affichés tous les ans", écrit Maurice Cohen, dans son livre sur Le Droit des comités d'entreprise et des comités de groupe (LGDJ, 2009). Mais un CE, ajoute-t-il, "n'est pas tenu d'avoir un commissaire aux comptes" (CAC) ni "de faire certifier ses propres comptes par le commissaire aux comptes de l'employeur". D'après la Compagnie nationale des commissaires aux comptes, il existe un texte qui impose aux CE de faire "approuver" leurs comptes par un CAC. Mais cette disposition n'est pas appliquée à l'heure actuelle. "C'est une question juridique en suspens", confirme-t-on dans l'entourage du ministre du travail, Xavier Darcos. Elle sera peut-être résolue dans le cadre des négociations sur "la modernisation du dialogue social" que les partenaires sociaux ont engagées il y a quelques mois. Quant aux employeurs, leur pouvoir d'intervention est limité, car les CE et CCE sont des organisations "totalement autonomes", selon la formule d'une porte-parole d'Air France. "Nous n'avons pas à les contrôler, ajoute-t-elle. Sinon, nous commettrions un délit d'entrave." Même discours chez Disneyland Paris : "Le CE est une entité distincte de l'entreprise. Nous n'avons pas le droit de nous immiscer dans sa gestion", explique-t-on à la direction. Pour plusieurs syndicalistes, les employeurs cherchent surtout à se montrer bienveillants à l'égard de leur CE dans l'espoir d'avoir des représentants du personnel moins revendicatifs. "C'est une façon d'acheter la paix sociale", confie une salariée de Disneyland. Bertrand Bissuel
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/d-autres-affaires-montrent-l-insuffisance-des-controles_1291111_3234.html
L'expertise sur la gestion du comité central d'entreprise d'Air France est sévère
Un rapport révèle des dépenses anormales, insuffisamment justifiées ou à "vocation personnelle".
Une trésorerie "structurellement déficitaire", des effectifs dont la progression n'est pas maîtrisée, un "environnement comptable et financier sinistré"... Le "rapport d'expertise" sur les comptes du comité central d'entreprise (CCE) d'Air France est sévère. Présenté, mardi 12 janvier, lors d'une réunion extraordinaire du CCE, ce document, dont Le Monde a pris connaissance, ne confirme pas l'existence d'"un trou dans les caisses de 21 à 24 millions d'euros", comme Le Figaro l'évoquait la veille. Mais il dépeint une situation dégradée qui pose question sur la gestion de cette instance dont le secrétariat général était assuré par la CFDT, du printemps 2007 à l'automne 2009. Comme n'importe quelle autre entreprise employant au moins 50 personnes, Air France a mis en place des institutions sociales. Organisées autour d'un CCE et de huit comités d'établissement (CE), elles sont financés, pour une large part, par des dotations de la compagnie aérienne : en 2009, celles-ci s'élevaient à 87 millions d'euros, précise une porte-parole du groupe (dont 45 millions pour le CCE). S'y ajoutent d'autres recettes issues de l'activité de restaurants d'entreprise et de boutiques du CCE. Ces structures offrent aux salariés une large palette d'activités (villages de vacances, spectacles, etc.). Tous les CE ont mandaté le CCE pour recevoir et gérer la subvention allouée par le groupe. Tous les CE sauf un : celui des "opérations aériennes", qui s'occupe des navigants. Après une bataille judiciaire, il a, en effet, obtenu, il y a plusieurs années, qu'Air France lui verse directement sa contribution. Cette sécession s'explique, en partie, par le fait que, dès les années 1990, la gestion du CCE était contestée. "Elle était déjà désastreuse à l'époque", assure un syndicaliste. Depuis, les critiques n'ont pas cessé. Aux commandes du CCE de 2003 à 2007, la CGT s'est vu reprocher d'avoir laissé une trésorerie exsangue et un déficit important - ce que le syndicat conteste. Début septembre 2009, face aux rumeurs de plus en plus insistantes sur la situation de quasi-faillite qui prévaudrait au CCE, une expertise des comptes a été demandée au cabinet INA. Concomitamment, la coalition syndicale qui contrôlait le bureau du CCE a volé en éclats : lâchée par ses alliés de la CFE-CGC et de FO, la CFDT s'est retrouvée toute seule avant d'être débarquée en novembre 2009. Bilan préoccupant Deux mois plus tard, le cabinet INA vient donc de rendre ses conclusions dans un rapport de plusieurs centaines de pages. Le bilan est préoccupant. Sur les quatre derniers exercices, le CCE a enregistré des "déficits budgétaires chroniques" (près de 15 millions d'euros depuis 2005). Il vit au-dessus de ses moyens, souligne INA, "les emplois étant structurellement supérieurs aux ressources". Entre 1999 et 2007, les effectifs du CCE se sont accrus de 48 % (passant de 208 à 308 emplois temps plein). Toutefois, cette augmentation résulte en partie de la réduction du temps de travail et de l'intégration d'Air Inter - ce dont la direction du CCE ne peut pas être tenue pour responsable. En outre, le nombre de salariés a commencé à diminuer depuis 2008. Le cabinet INA pointe également un besoin de trésorerie "chronique à partir du troisième trimestre de chaque exercice", que la compagnie aérienne comble "au travers de versements exceptionnels". Enfin, il énumère sur plusieurs pages des dépenses anormales, insuffisamment justifiées ou à "vocation personnelle" : achats de bouteilles de champagne, soirées sur des bateaux à Paris, prise en charge de frais de nourrice, de loyers et de contraventions, versement de rémunération à des personnes qui n'ont plus aucune activité au sein du CCE, sans compter un séjour au "César Palace" de Las Vegas, qui s'est soldé par une note de 28 000 euros. Implicitement mise en cause par cet audit, la CFDT estime qu'INA a enquêté "à charge", sans toujours prendre en considération les éléments de réponse qu'elle avait fait valoir, notamment sur les dépenses jugées abusives. Celles-ci ont une justification valable, plaide Gilles Nicoli, secrétaire général de la CFDT d'Air France. Exemple : le paiement de loyers concerne des "élus" du CCE domiciliés en province qui ont besoin d'un toit lorsqu'ils viennent en région parisienne pour exercer leur mandat. M. Nicoli met aussi en avant les réformes mises en place depuis 2007, notamment en matière de procédures informatiques, qui devraient permettre de recouvrer des recettes plus rapidement - et donc de résoudre le déséquilibre structurel des comptes du CCE. Enfin, rappelle M. Nicoli, "le commissaire aux comptes a validé les comptes 2008". A l'issue du CCE qui s'est achevé mardi vers 23 heures, une majorité de représentants syndicaux a décidé que le rapport de l'INA ne serait pas diffusé, rapporte le syndicat de navigants UNAC, qui, lui, était favorable à la publication de ce document (tout comme le SNPL, le SNPNC et l'UNSA). Une synthèse devrait être transmise, mercredi, aux salariés d'Air France. Bertrand Bissuel
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/l-expertise-sur-la-gestion-du-comite-central-d-entreprise-d-air-france-est-severe_1291110_3234.html
Coupe de la Ligue : l'ultime report du match Le Mans-Bordeaux irrite le président Legarda
La mairie du Mans a pris un arrêté qui empêche la tenue du match cet après-midi. Le président Legarda demande la mise en place d'"une réflexion sur le calendrier".
Quand se tiendra la rencontre Le Mans-Bordeaux, qui compte pour les huitièmes de finale de la Coupe de la Ligue ? Prévu mardi et dans un premier temps reporté au lendemain, 15 heures, en raison des fortes chutes de neige, le match a de nouveau été ajourné à une date indéterminée, a indiqué, mercredi, la mairie. La municipalité du Mans a en effet pris un arrêté pour protéger le terrain de Léon-Bollée, pourtant jugé praticable après coup par les délégués. "Le match Le Mans-Bordeaux est reporté en application de l'arrêté municipal du 13 janvier 2010 de la ville du Mans, qui en empêche la tenue et qui s'impose aux instances sportives en vertu du protocole du 22 janvier 2008 entre l'Association des maires de France et la Fédération française de football, a précisé la Ligue de football professionnel (LFP) dans un communiqué. Le dossier est transmis à la commission des compétitions de la LFP." Une nouvelle date va maintenant être fixée. Ce nouveau report a fait réagir Henri Legarda, président du Mans, qui demande "la mise en place d'une véritable réflexion de fond sur la mise en place du calendrier." "Un constat s'impose : le fonctionnement actuel débouche sur une impasse et sur des situations défiant tout bon sens. Comment imaginer qu'on puisse programmer trois rencontres à 20 h 45 ou 21 heures en janvier sans s'exposer à de nombreux reports ? Comment imaginer qu'on persiste à prendre des décisions au dernier moment au mépris des prévisions météorologiques ?", questionne le président manceau. "Je constate enfin que ce sont une nouvelle fois les clubs et les supporteurs qui sont les seuls pénalisés par ces tergiversations, ajoute-t-il"Je constate enfin que ce sont une nouvelle fois les clubs et les supporteurs qui sont les seuls pénalisés par ces tergiversations, peste encore Henri Legarda, avant de conclure :"Je constate enfin que ce sont une nouvelle fois les clubs et les supporteurs qui sont les seuls pénalisés par ces tergiversations,
13/01/2010
sport
https://www.lemonde.fr/sport/article/2010/01/13/coupe-de-la-ligue-le-mans-bordeaux-reporte-pour-la-2e-fois_1291245_3242.html
Olivier François, le Français chargé par le patron de Fiat de sauver Chrysler
Poète à ses heures, cet as du marketing a fait ses preuves chez Citroën avant d'aller à Detroit.
Il a deux maisons, deux bureaux et... deux BlackBerry. Un qui lui parle de Lancia (groupe Fiat), l'autre de Chrysler. Et pour son premier Salon de l'automobile à Detroit (Michigan), Olivier François enchaîne les rendez-vous. Depuis octobre 2009, ce Français de 48 ans partage sa vie entre Turin (Italie) et Detroit où il dirige Chrysler. Quand il est aux Etats-Unis, quinze jours par mois, ses journées commencent vers 4 h 30 du matin ; s'il est en Italie, elles se terminent tard dans la nuit... Car en plus de ses deux fonctions, ce "kid" - c'est ainsi qu'on appelle ceux qui forment la garde rapprochée de Sergio Marchionne, le patron de Fiat - est aussi responsable marketing de toutes les marques des groupes Fiat et Chrysler. "Je n'ai pas une minute à moi !", avoue ce père de trois garçons. Cet expert en marketing a rejoint l'industrie automobile à presque 30 ans. "J'allais me marier, il fallait que je me pose", dit-il. Car ce diplômé de Sciences Po et titulaire d'une maîtrise de gestion à Dauphine a eu une vie avant l'automobile. Il a écrit des chansons, fondé une maison de disques (Version française), exporté de la confiture et vendu des skis aux Emirats arabes ! Embauché par Citroën à un niveau qu'il qualifie de "modeste", il monte vite les échelons. En 1999, on l'envoie au Danemark. "La direction ne prenait pas beaucoup de risques, c'était notre plus petit marché. Elle se disait "on verra bien, il l'air d'avoir des idées. S'il réussit tant mieux, s'il se plante, ça ne sera pas bien grave"." Pour augmenter les ventes : il casse les codes de la société danoise et concocte des campagnes publicitaires axées sur le plaisir. Le résultat est immédiat : la marque double sa part de marché, de 5 % à 10%. Mais c'est surtout en Italie qu'Olivier François a bâti son CV dans l'automobile. En 2001, le voilà propulsé à la tête de Citroën en Italie. "Potentiellement, ce pouvait être notre plus grosse filiale, mais elle marchait mal", se souvient-il. Là aussi, il double la part de marché (3 % à 7 % entre 2001 et 2005). "J'ai profité de la faiblesse de Fiat pour conquérir des clients." Mais au bout de quatre ans, quand on lui propose le même job en Angleterre, il est moins enthousiaste. "J'avais envie d'autre chose. J'avais envie de concevoir des voitures." Hasard du calendrier, il publie à la même époque un recueil d'une soixantaine de poèmes intitulé Elissi smemorate (Ellipses oublieuses). La critique n'est pas mauvaise. Sergio Marchionne, qui vient de prendre la tête de Fiat, le lit. Lui aussi est un amoureux de la poésie. Les deux hommes se rencontrent plusieurs fois. "Il s'est plus intéressé à ma personnalité qu'à mes résultats chez Citroën", dit Olivier François. M. Marchionne lui propose alors de prendre la tête de Lancia. La marque est en perdition et hormis l'Italie n'a pratiquement plus de visibilité. Nous sommes en 2005. Olivier François invente alors de nouveaux services, fait plancher la pub sur des campagnes glamour : Carla Bruni pour le lancement de la nouvelle Musa ou Richard Gere pour la Delta... Néanmoins, la feuille de route - vendre 300 000 voitures en 2010 contre 100 000 en 2005 - que lui avait donnée M. Marchionne ne devrait pas être tenue. "La crise est passée par là !", lance Olivier François. "Et puis si j'étais vraiment mauvais, il ne m'aurait pas nommé chez Chrysler...", ajoute-t-il aussitôt. Chez Chrysler, la tâche s'annonce peut-être encore plus rude. Le plus petit des constructeurs américains, dont Fiat contrôle 20 % du capital, est le plus mal en point des Big Three (General Motors, Ford, Chrysler). Ses ventes ont chuté de 36 % (931 000 véhicules) en 2009. Avec 8,4 % de part de marché, il pointe à la cinquième place, derrière Honda. Et les prochains nouveaux modèles ne seront présentés qu'en 2011. En attendant, M. François prévoit d'augmenter légèrement les ventes (1,1 million en 2010) en misant sur la publicité et non plus sur les remises aux clients. "Ce n'est pas très ambitieux, concède-t-il, mais au moins on gagnera de l'argent." Et pour l'instant, c'est ce qui compte. Nathalie Brafman
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/olivier-francois-le-francais-charge-par-le-patron-de-fiat-de-sauver-chrysler_1291109_3234.html
"A Paris, les banquiers français se disent agacés par la ""taxe Sarkozy"""
Le ministère des finances, qui s'attend à une baisse d'environ 16 % des primes versées aux traders par rapport aux sommes distribuées il y a deux ans, veut croire à l'effet dissuasif.
A Paris, le coup de colère des pouvoirs publics contre "la folie des bonus" aura-t-il plus de succès qu'à Londres ou New York ? Le ministère des finances, qui s'attend à une baisse d'environ 16 % des primes versées aux traders par rapport aux sommes distribuées il y a deux ans, veut croire à l'effet dissuasif. L'entourage de Christine Lagarde l'attribue autant à la pression constante du chef de l'Etat sur les dirigeants des grandes banques - maintes fois convoqués à l'Elysée - qu'à la taxe exceptionnelle sur les bonus. "L'appel à la modération a été bien reçu par les banques françaises. Elles ont parfaitement compris que le gouvernement est très sérieux quand il demande de la mesure", souligne un proche de Mme Lagarde. Calquée sur la "taxe Brown", du nom du premier ministre britannique, la "taxe Sarkozy" s'appliquera pour la seule année 2010 et sa reconduction n'est pas envisagée à ce stade. Elle devrait rapporter 360 millions d'euros à l'Etat, qui l'affectera à hauteur de 270 millions d'euros au Fonds de garantie des dépôts, pour renforcer la sécurité des clients des banques. Le reste ira alimenter le budget de l'Etat. Cette surtaxe suscite la colère des banques françaises. "La taxe devait être planétaire, elle ne l'est pas. De plus, elle s'applique à toutes les composantes de la rémunération, cash et actions, quand, à Londres, seule la partie versée en espèces est concernée", dit un banquier. De surcroît la taxe sera due en totalité en 2010, même si le paiement des bonus est différé sur plusieurs années. "Imaginons qu'un bonus soit revu en baisse, du fait de mauvais résultats, comme le demande le G20. Les banques auront payé pour de l'argent qu'elles n'ont pas versé", poursuit-il. Enfin, les banques françaises s'étonnent d'être traitées sur le même plan que les banques de la City de Londres et de Wall Street. En France, soulignent-elles, le soutien financier de l'Etat a servi à maintenir l'offre de crédit à l'économie et non à les sauver de la faillite. De plus, les sommes distribuées sont sans commune mesure avec les bonus de Londres et New York. Ce que reflète le produit de la taxe : 360 millions d'euros à Paris contre 5 milliards à 8 milliards de livres à Londres et... 120 milliards de dollars pour la "TVA" sur les profits des banques envisagée aux Etats-Unis. "La taxe n'est pas indolore, elle va pénaliser nos résultats", indiquent les banques. Du côté des traders, c'est la perplexité. "On ne sait pas à quelle sauce on sera mangé, mais je ne vois pas comment tout cela pourrait avoir une influence positive sur les bonus", explique un opérateur de la Société générale. Au Crédit agricole, les "ressources humaines sont en train de définir ce qu'est très exactement un trader, explique un autre trader, car, pour le moment, on ne sait pas très bien qui sera concerné." Celui-ci songe à partir travailler dans un fonds d'investissement, à Londres, pour gérer les sommes des fonds souverains du Moyen-Orient : "Je ne toucherai plus de bonus mais 10 % du capital de la société. Ca me rapportera plus d'argent mais personne n'aura rien à y redire." Claire Gatinois et Anne Michel
13/01/2010
economie
https://www.lemonde.fr/economie/article/2010/01/13/a-paris-les-banquiers-francais-se-disent-agaces-par-la-taxe-sarkozy_1291108_3234.html
Les traders retrouvent les bonus géants d'avant-crise
Début 2010, les banques américaines et européennes, grâce à des profits historiques sur les marchés, s'apprêtent à distribuer des primes record.
L'histoire se répète : en ce début d'année 2010, renouant avec les excès d'avant la crise financière, les grandes banques, aux Etats-Unis et en Europe, s'apprêtent à verser des milliards de dollars, de livres ou d'euros de bonus à leurs traders. Si l'on en croit la tendance observée à Wall Street, les appels à la modération des dirigeants du G20 ne seront pas suivis des effets espérés. Pas plus que les projets de taxation exceptionnelle conçus par certains Etats, comme le Royaume-Uni et la France, pour l'année 2010, qui pourraient, surtout à Londres, manquer leur objectif dissuasif. Ainsi, outre-Atlantique, les bonus devraient atteindre les niveaux de 2007, avant le choc financier. Les cinq plus gros établissements - Citigroup, Bank of America, Goldman Sachs, JP Morgan Chase et Morgan Stanley - avaient déjà, fin septembre 2009, mis de côté 90 milliards de dollars (62 milliards d'euros), pour rémunérer leurs équipes au titre de l'année écoulée. Selon le New York Times, les bonus pourraient représenter la moitié de cette somme. Dans la toute-puissante banque d'affaires Goldman Sachs, dix traders stars pourraient percevoir plus de 10 millions de dollars chacun ! A Londres, le Trésor doit déjà constater l'échec de la "super-taxe" sur les bonus. A quelques exceptions près - dont HSBC et Barclays, qui promettent la modération -, les banques préfèrent payer plutôt que de réduire ou différer les primes de fin d'année. Les bonus garantis, pourtant interdits par le G20, font discrètement leur retour. Pis, des mesures de contournement sont à l'étude, pour éluder la nouvelle taxe. Certains établissements envisagent ainsi de scinder en deux l'enveloppe de primes, avec un premier versement en mars et le second en janvier 2011... Lorsque la taxe aura disparu. Retours aux dérives passées Dans ce paysage, la France occupe une place à part. Si les meilleurs traders peuvent s'attendre à de belles primes, le montant global des bonus devrait reculer d'environ 16 %, selon la ministre de l'économie, Christine Lagarde, par rapport aux sommes distribuées en 2008 au titre des résultats 2007. Cette estimation se fonde sur les données fournies mi-décembre 2009. En outre, d'une manière générale, en France, les sommes en jeu sont loin d'atteindre les dizaines de millions de dollars versés aux vedettes de Wall Street et de la City. Partout dans le monde, d'une banque à l'autre, le discours est le même. L'année écoulée a été excellente. Les traders ont fait gagner beaucoup d'argent à leurs entreprises. Ils doivent être récompensés comme le prévoient leurs contrats de travail. C'est oublier, toutefois, que les profits réalisés par les banques en 2009 l'ont été grâce aux aides d'Etat, à l'argent à taux zéro que leur ont prêté les banques centrales pour passer la crise. Le retour aux dérives passées devrait accentuer un divorce déjà consommé entre les banques et l'opinion publique. "La saison des grosses primes (...) va scandaliser le peuple américain", a averti la conseillère économique en chef du président Barack Obama, Cristina Romer. "La colère est immense partout aux Etats-Unis, même si on n'en prend pas toujours la mesure à New York", souligne de son côté l'économiste Thomas Philippon, professeur à l'université de New York et à l'Ecole d'économie de Paris (PSE). Au Royaume-Uni, le ressentiment est d'autant plus vif que les contribuables redoutent de ne jamais revoir la couleur de l'argent public alloué au sauvetage du secteur bancaire. Il reste que l'intervention des Etats pour discipliner les pratiques n'a pas été totalement vaine. Si, en valeur absolue, les sommes prévues restent colossales, le montant des primes des professionnels des marchés rapporté au chiffre d'affaires qu'ils réalisent semble diminuer. Selon de premières estimations, ce "taux de bonus" pourrait passer de 50 % à 40 % dans les grandes banques américaines. En France, où ce taux a toujours été plus bas, il pourrait être encore réduit, à moins de 20 % cette année contre près de 25 % auparavant. De surcroît, la composition des bonus devrait évoluer sensiblement. Dans la lignée des recommandations du G20, soucieux de décourager les gains rapides et porteurs de risques à long terme, les banques distribueront une part plus importante en actions plutôt qu'en "cash". Selon le cabinet de chasseurs de têtes Humblot Grant Alexander, la proportion de titres devrait augmenter de 25 % à 50 % aux Etats-Unis. A Londres et à Paris, deux tiers des bonus seront des actions, contre un tiers auparavant. Présentée comme une avancée, la mesure est qualifiée par certains économistes, comme M. Philippon, "d'habillage pour ne pas choquer davantage l'opinion". Dans le même registre, pour afficher des bonus moins importants tout en préservant les rémunérations de leurs traders, certains établissements, en Europe comme aux Etats-Unis, ont augmenté leurs salaires.
13/01/2010
economie
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Claude Chossat, chauffeur de gangster
Dans le milieu corse et du sud de la France, être l'ami de Francis Mariani vaut adoubement et, dans une certaine mesure, protection.
On se fait des amis en prison. En 2000, alors qu'il est incarcéré à Borgo (Haute-Corse) pour une histoire de braquage, Claude Chossat, 22 ans à cette époque, rencontre François Mariani, alias "Francis". Beau gosse, yeux clairs, cheveux châtains, dans le milieu, Chossat n'a de cesse de se "faire une cote". Une réputation qui, chez les voyous, vaut reconnaissance et respect. Le petit truand en formation qu'est Claude Chossat sait ce que cette rencontre peut lui rapporter. Tel un ascenseur dans l'échelle sociale du banditisme, il peut changer de catégorie et grimper ainsi dans la hiérarchie. Dans le milieu corse et du sud de la France, être l'ami de Francis vaut adoubement et, dans une certaine mesure, protection. Fiché au grand banditisme, Francis Mariani est un gangster de haut vol. Redouté de tous. Il appartient au petit cercle des fondateurs de la fameuse Brise de mer, le célèbre gang de Haute-Corse qui, depuis le début des années 1980, occupe les devants de la scène criminelle en Corse et sur le continent. Pour Claude Chossat, Francis, c'est le parangon de la voyoucratie. Les deux hommes vont d'autant mieux s'entendre que, en dehors des coffres-forts des banques, ils ont en commun une autre passion : le rallye automobile. Depuis son adolescence, Francis est un as du volant. Bon pilote, il a, dans sa jeunesse, participé à des compétitions automobiles. A la fin des années 1970, il s'est distingué dans le Tour de Corse, une épreuve en vue dans le calendrier du Championnat du monde des rallyes. Fils d'un employé d'EDF originaire du continent et d'une mère corse, Claude Chossat, lui, adore les belles bagnoles. Il a raté son bac, mais décroché un BEP d'électricien et s'est déjà familiarisé avec les routes sinueuses de l'île. Chez les gangsters, savoir bien tenir un volant c'est un plus sur un CV. Comme dit l'un de leurs avocats : "C'est toujours utile en cas de poursuite." En cavale Parallèlement à sa carrière de bandit qui lui vaudra d'être impliqué dans l'assassinat, en 2008, à Aix-en-Provence, d'un truand marseillais de 65 ans, Jean-Claude Tasso, et dans une affaire d'escroquerie commise en Corse, Claude Chossat devient l'un des chauffeurs de Francis Mariani. En mars 2008, lorsque ce dernier comparaît avec son fils Jacques devant les assises d'Aix-en-Provence pour le meurtre en 2001, à Bastia, d'un jeune nationaliste corse, Nicolas Montigny, il tente d'approcher les membres du jury afin de les influencer. Cinq jours après l'ouverture du procès, trois hommes se font surprendre dans un véhicule 4 × 4, devant le domicile d'un juré. L'un d'eux est le beau-frère de Francis Mariani, et le 4 × 4 appartient à Claude Chossat. Celui-ci part en cavale, Mariani le rejoint une semaine plus tard, sans attendre le verdict de la cour d'assises, qui le condamne à huit ans d'emprisonnement. Selon son avocat, Me Jean-Michel Mariaggi, Claude Chossat, marié et père de deux enfants, a ensuite "souhaité se ranger des affaires". Pour cela, il s'était éloigné de Francis Mariani, quelques mois avant que celui-ci ne meure dans l'explosion d'un hangar à Antisanti (Haute-Corse), le 12 janvier. Retiré en Suisse, il exerçait le métier d'agent commercial avant d'être interpellé en septembre 2009. Depuis, il est en détention provisoire à la prison d'Ajaccio. Et il a décidé de parler. Yves Bordenave
13/01/2010
societe
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Ainsi a fini la Brise de mer
Les confessions d'un ancien truand permettent de reconstituer la guerre fratricide.
C'est presque trop beau. Le témoignage d'un petit voyou vient de permettre de résoudre, en partie, l'énigme qui a vu la Brise de mer, le groupe dominant le grand banditisme français depuis trente ans, s'écrouler entre 2008 et 2009. La confession, les 7 et 8 janvier, de Claude Chossat devant les policiers et la justice, éclaire, pour la première fois, la façon dont deux figures historiques de la Brise de mer, Richard Casanova et Francis Mariani, se sont affrontés dans une guerre fratricide pour le contrôle de la pègre française. Représentant la seule forme de crime organisé en France, les parrains corses structurent depuis des années le paysage du grand banditisme national. Ses ramifications s'étendent sur tout le territoire et à l'étranger. Il ne s'agit pas d'un groupe en rupture avec la société, mais d'une mouvance dont l'emprise, en Corse, sur l'économie locale et la vie démocratique, relève de pratiques mafieuses. Jean-Baptiste Jérôme Colonna, dit Jean-Jé, ancien pilier de la French Connection, "juge de paix" disposant d'un réseau international, a régné à partir de 1985 sur le sud de l'île jusqu'à sa mort accidentelle, le 1er novembre 2006. Il était à la tête d'un système pyramidal dont les pièces se sont effondrées à sa disparition. En Haute-Corse, la dizaine de membres de la Brise de mer avaient fait place nette, au début des années 1980. Ce groupe, dont le nom venait d'un bar sur le vieux port de Bastia où ils avaient pour habitude de se retrouver, agissait en meute, obéissant à des règles strictes de solidarité qui ont fait leur force et leur fortune tant qu'ils les ont respectées. Tout semble avoir basculé avec la mort de Jean-Jé. Le 3 novembre 2006, en marge du cortège funèbre dans son village de Pila-Canale, au sud d'Ajaccio, les policiers en civil découvrent avec surprise que deux membres éminents de la Brise de mer, Francis Mariani et Pierre-Marie Santucci, sont venus présenter leurs condoléances. L'image n'est pas anodine. Le Nord et le Sud ont toujours été en rivalité. Après l'enterrement, ces deux hommes sont même invités à prendre un verre avec le lieutenant de Jean-Jé, Ange-Marie Michelosi, entouré d'une garde prétorienne composée de jeunes faisant régner la terreur sur Ajaccio, connus sous le nom de bande du Petit Bar. L'image vaut menace. Alors qu'un autre baron de la Brise de mer, Richard Casanova, personnage flamboyant au carrefour du monde des voyous, de la politique et des affaires, étend ses activités vers le Sud et les terres de feu Jean-Jé, voilà que Francis Mariani s'affiche avec ses ennemis potentiels. Richard, dont le surnom fut le Menteur, vient de clore une cavale de seize années. Il est suspecté d'avoir organisé de nombreux braquages majeurs, dont celui contre la banque UBS en 1990 au cours duquel 125 millions de francs furent dérobés. Il traite avec des chefs d'Etat africains, il est en contact avec des services de renseignement, il rêve de créer une agence portuaire en Corse et compte développer des projets immobiliers à Porto-Vecchio. Francis Mariani, qui traite aussi bien avec la mafia russe qu'avec la fine fleur du braquage, tisse également sa toile. Les deux hommes, à la différence de leurs acolytes de la Brise, ne veulent pas vivre de leur rente de millionnaire. Ils ont soif de pouvoir. Mariani prend le contrôle d'affaires sur la Côte d'Azur et à Paris. On le voit souvent à Aix-en-Provence. Selon Claude Chossat, que Francis Mariani a connu en prison, le choc frontal entre ces deux rivaux survient fin novembre 2007. Francis Mariani rentre chez lui en Porsche lorsqu'il est pris sous des coups de feu desquels il réchappe de justesse. "A partir de ce moment-là, il est devenu cinglé", raconte Claude Chossat aux policiers. Il n'a eu de cesse de chercher qui était derrière cette tentative d'assassinat et a même fait agrandir les images captées par les caméras de vidéosurveillance installées devant chez lui. Vers la mi-avril 2008, d'après Claude Chossat, qui lui sert de chauffeur et d'homme de main, il pense avoir trouvé : il s'agirait de Jean-Luc Germani, le beau-frère de Richard Casanova. Pour avoir des informations, Claude Chossat est chargé, le 23 avril 2008, de surveiller une concession automobile à Porto-Vecchio et de prévenir Mariani dès que la voie est libre pour interroger son gérant, un proche de Germani. Mais les événements seront tout autres. Claude Chossat raconte. "Par hasard, Francis et Franck (présenté comme un autre complice) ont vu passer Richard Casanova dans son 4 × 4 sur la rocade et l'ont suivi. Ils sont arrivés (à la concession surveillée par Chossat) juste après le 4 × 4. J'ai dit qu'ils (Casanova était accompagné d'un autre homme) étaient entrés à l'intérieur, il m'a demandé de déplacer un gros bloc de pierre pour voir par-dessus le mur, puis il m'a demandé de l'attendre dans la voiture, Francis est arrivé 5, 10 minutes plus tard", assure Claude Chossat, qui ajoute que Mariani portait un sac contenant des armes. Les gendarmes retrouveront le cadavre de Richard Casanova sur le parking. Toujours selon ce témoin, Mariani aurait révélé que la victime était Richard Casanova sur le trajet du retour, à Aléria,vers le domicile de Charles Fraticelli. Il s'agissait d'un vieil ami de Mariani à qui aurait été confiée la tâche de "faire disparaître les armes". Claude Chossat rapporte les explications fournies par Francis Mariani : "Il a dit que si Richard n'est pas directement sur la Porsche, il avait laissé faire." En veine de confidence, l'intéressé révèle également que Francis Mariani, perdu dans une fuite en avant aurait également liquidé, le 3 juillet 2008, l'un de ses proches, vieux compagnon de route de la Brise de mer, Daniel Vittini, omniprésent dans la région de Corte. "Je l'ai emmené au rendez-vous avec ma moto", confie le témoin. Ces révélations, dans un monde où l'on ne parle pas, n'ont pas manqué de soulever des interrogations. Claude Chossat prend soin de ne jamais apparaître comme complice des faits eux-mêmes. Il désigne, à l'exception du mystérieux "Franck", des acteurs qui sont tous morts. Francis Mariani et Charles Fraticelli ont été tués le 12 janvier dans une explosion que Claude Chossat considère criminelle et non accidentelle. Pierre-Marie Santucci a été tué le 11 février. Néanmoins, les policiers disposent d'éléments matériels, dont l'ADN partiel de Claude Chossat sur le bloc de pierre, et des vérifications sur les véhicules utilisés par Mariani et ses complices étayent les déclarations de ce témoin inespéré. Yves Bordenave et Jacques Follorou
13/01/2010
societe
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En dix ans, la police française a interpellé 500 militants d'ETA, une organisation au recrutement permanent
Un couple, arrêté dans le Puy-de-Dôme, devait être présenté au juge antiterroriste le 13 janvier.
Les conditions météo étaient exécrables ce samedi 9 janvier, et la voiture dans laquelle se trouvaient Inaki Iribaren Galbete et Eider Uruburu Zabaleta a fini dans le fossé, tout près de l'endroit où ils se rendaient : une cache dans la forêt de Chadrat (Puy-de-Dôme). Le couple, soupçonné de faire partie de l'organisation terroriste basque ETA, a aussitôt été interpellé par les policiers qui, depuis des semaines, surveillaient le hameau. Il devait être présenté au juge mercredi 13 janvier. En dix ans, de 1999 à 2009, ce sont pas moins de 500 membres présumés d'ETA qui ont été interpellés sur le sol français par la sous-direction de la lutte antiterroriste (SDAT) de la police judiciaire, 30 pour la seule année 2009. De ce côté-ci de la frontière, 172 etarras sont toujours sous les verrous (dont 25 personnes écrouées en 2009), contre 591 en Espagne. Ces chiffres témoignent de l'activité déployée par la police française dans la lutte contre l'organisation basque, renforcée par un travail commun depuis 2002, de plus en plus étroit, avec la police espagnole. "La collaboration est exceptionnelle, se réjouit Christian Lothion, directeur central de la police judiciaire. Nous avons porté à ETA de sacrés coups." Les communiqués se succèdent pour annoncer l'arrestation d'un chef militaire (Miguel de Garikoïtz Aspiazu Rubina, alias Txeroki, en novembre 2008, Aitzol Iriondo dit Gurbitz en décembre 2008, Jurdan Martitegi en avril 2004...) ou d'un important responsable. Inaki Iribaren Galbete, 33 ans, est décrit comme l'un des membres de l'appareil militaire visé par un mandat d'arrêt européen lancé par un juge espagnol le 30 décembre 2008, pour ses liens avec le commando "Navarre". La femme âgée de 32 ans, interpellée en même temps que lui par la police judiciaire assistée du Raid, serait également bien connue. Autre indicateur de la traque : le nombre de caches trouvées a bondi : 34 "zulos" ont été découverts en 2009 (dont 15 bidons étanches au mois d'août dans le sud-est, qui contenaient de l'argent, des papiers et des armes), contre 9 en 2008. Mais paradoxalement, la tâche des enquêteurs est devenue, aussi, de plus en plus compliquée. Et à bien y regarder, le nombre des interpellations a en réalité plutôt tendance à diminuer (il y a en a eu 66 en 2003, 64 en 2004). Car ETA s'est réorganisée. L'organigramme de l'organisation, déjà difficile à établir, est "un puzzle permanent qui se reconstitue, souligne Christian Sainte, patron de la SDAT. Tout chef est présumé un jour disparaître et son remplaçant déjà désigné". Les effectifs se renouvellent sans cesse. Si la police considère qu'ETA est "affaiblie", comme l'affirme M. Lothion, c'est en raison du rajeunissement de ses responsables. En réalité, l'activisme de l'organisation ne se dément pas. La PJ estime entre 80 et 100 le nombre d'etarras actifs sur le sol français. Les "équipes" sont rarement constituées de plus de deux personnes. Les interpellations, qui nécessitent d'importants moyens et souvent un long travail de surveillance, se font donc au compte-gouttes. Les militants privilégient les zones rurales aux villes et le camping au logement en dur, jugé plus risqué. "Ce sont des moines-soldats", assure M. Sainte. Et c'est désormais l'ensemble du territoire français qui doit être pris en compte par la police, car les militants ETA ne se contentent plus de se replier sur la région sud-ouest. Ils remontent jusque dans l'Orne, la Mayenne, la Savoie ou la Bretagne. "Ils circulent énormément, indique M. Sainte, ils font des milliers de kilomètres pour récupérer quelques centaines d'euros." Le nombre de voitures volées est un autre indicateur de l'activité d'ETA. La police française leur en impute 65 en 2009. La technique est souvent la même : les militants guettent le conducteur impatient ou imprudent qui descend de son véhicule en laissant les clés sur le contact. Enfin, ils dispersent de plus en plus leur matériel en multipliant les petites caches. Les enquêteurs, qui décrivent ETA comme une organisation cloisonnée et "paranoïaque sur sa sécurité", sont bien forcés d'admettre l'efficacité de son réseau. Sur chaque interpellé, des armes provenant du vol, en 2006, de la fabrique de Vauvert dans le Gard, sont découvertes. Cela a encore été le cas avec Inaki Iribaren Galbete qui se trouvait en possession d'un revolver de cet arsenal. Or sur les 341 armes dérobées à Vauvert (et 60 000 munitions !), seules 80 ont été jusqu'ici retrouvées... La police surveille de près les "déclinaisons" potentielles d'ETA en France. Le groupuscule Irrintzi, responsable d'une quarantaine d'actions en pays basque français, a été démantelé le 19 décembre 2009. Il s'agissait de deux étudiants parisiens d'origine basque repérés par les renseignements généraux de la préfecture de police. En ligne de mire figure aussi le groupe "Le Pays basque n'est pas à vendre", qui mène des opérations contre des agences immobilières. Isabelle Mandraud
13/01/2010
societe
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Tennis : les joueurs veulent remplacer la Coupe Davis par une Coupe du monde
Une initiative révolutionnaire en faveur d'une Coupe du monde de tennis qui remplacerait la Coupe Davis sera discutée par les joueurs lors de l'Open d'Australie, a déclaré mercredi le Serbe Novak Djokovic, numéro 3 mondial.
Une initiative révolutionnaire en faveur d'une Coupe du monde de tennis qui remplacerait la Coupe Davis sera discutée par les joueurs lors de l'Open d'Australie, a déclaré mercredi le Serbe Novak Djokovic, numéro 3 mondial. Djokovic, membre du Conseil des joueurs de l'ATP, a indiqué que l'idée d'une Coupe du monde regroupant 32 pays tous les deux ans, afin de remplacer la Coupe Davis, émanait de cet organe. Selon la presse, cette compétition ramassée sur 10 jours consisterait en des matches plus courts que ceux disputés actuellement en Coupe Davis (au meilleur des cinq sets) durant lesquels les joueurs disposeraient d'un temps limité entre les points et effectueraient des remplacements obligatoires. Ces pourparlers entre joueurs seront "déterminants pour les années à venir" a estimé le Serbe tout en admettant que rien n'était encore arrêté et que plusieurs options étaient sur la table. "C'est tout frais et ce ne sont que des idées, nous avons décidé de ne rien arrêter encore car il faut aussi prendre en compte les autres parties", a déclaré Djokovic aux journalistes. "C'est le vrai problème. Sans les sponsors, il n'y aurait pas de tournois; sans tournois, vous le savez, les joueurs n'existeraient pas", a-t-il expliqué. "Néanmoins, les joueurs sont ceux qui font le spectacle et leur avis doit être pris en compte", a insisté Djokovic. Selon le Times, l'idée a déjà été présentée devant les organisateurs de Wimbledon, les Fédérations américaine et australienne de tennis. Le directeur de l'Open d'Australie, Craig Tiley, qualifie cette idée dans le quotidien britannique "d'innovante, rafraîchissante". "JE NE VAIS PLUS JOUER LA COUPE DAVIS" "Toute initiative qui exposerait davantage notre sport et augmenterait sa présence, particulièrement en Australie mais aussi à travers le monde, doit être bonne pour le tennis", a-t-il déclaré. Ces discussions interviennent alors que certains joueurs sont mécontents du format actuel de la Coupe Davis qui surchargerait le calendrier. Pour preuve, d'aucuns ne participent pas à tous les tours de la compétition. "Les meilleurs joueurs ne peuvent pas jouer tous les matches qu'ils aimeraient jouer pour leur pays", a stipulé le Croate Ivan Ljubicic aux journalistes. "Le format n'est plus adapté pour les joueurs. Notre sport évolue, il faut donc changer certains aspects. C'était peut être parfait il y a 20 ou 30 ans, mais désormais c'est vraiment trop pour nous - au meilleur des cinq sets, trois jours d'affilée - et, c'est sûr, la semaine précédente et suivante vous ne pouvez pas jouer", a-t-il ajouté. "C'est dommage parce que je suis sûr à 100% que chacun aimerait jouer pour son pays. En fait, je ne vais plus jouer la Coupe Davis pour ces mêmes raisons", a conclu le Croate.
13/01/2010
sport
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Burqa : le chef du gouvernement repousse le débat après les régionales
Malgré le forcing de Jean-François Copé, le contenu de la loi n'est pas tranché.
Le président du groupe UMP de l'Assemblée nationale, Jean-François Copé, peaufine chaque jour son OPA sur le débat consacré depuis six mois au voile intégral. Après avoir tenté de lui appliquer son propre calendrier, il s'efforce désormais de lui imprimer sa marque : il a revendiqué, mardi 12 janvier, le soutien du premier ministre François Fillon. En réalité, la position de M. Copé sur ce sujet de société marginal mais symbolique demeure toujours isolée. Il est, parmi les personnalités UMP de premier plan, l'un des seuls à défendre une loi d'interdiction générale, censée prohiber le port du voile intégral en France, y compris sur la voie publique. L'UMP, craignant qu'une telle loi ne soit censurée par le Conseil constitutionnel ou la Cour européenne des droits de l'homme, s'est prononcée pour une résolution parlementaire qui rappellerait les principes républicains. Ce texte serait complété par une loi spécifique pour les universités et les transports publics. Parallèlement, les propos de François Fillon tenus mardi lors de la réunion des députés UMP ne permettent pas d'y voir un soutien explicite à M. Copé. : défendant une "résolution, des décrets et une loi", le premier ministre a repoussé après les élections régionales de mars les discussions sur la définition du périmètre de la loi (services publics et/ou voie publique) ainsi que sur la constitutionnalité du texte. Autrement dit, les deux points de désaccord entre M. Copé et les responsables de l'UMP. "Copéisation" du débat Ce report des discussions est destiné faire taire, temporairement, les divisions au sein de la majorité. Car les divergences, plus techniques ou juridiques qu'idéologiques, rendent depuis plusieurs semaines le débat à droite inaudible. M. Copé a entretenu la confusion en assurant que ceux qui n'étaient pas pour "sa loi d'interdiction totale étaient opposés à toute loi ; "ce que les Français ne comprendraient pas", répète-t-il. La politisation du débat, perçue dans l'affrontement entre M. Copé et le chef de file de l'UMP, Xavier Bertrand, a fini par poser un problème de crédibilité de la majorité sur ce sujet, à quelques semaines des régionales. L'omniprésence du député de Seine-et-Marne sur la question ne date pas d'hier : sans concertation, il avait livré sa position, alors même que débutaient les travaux de la mission parlementaire créée sur le sujet en juillet. Il avait ensuite installé un groupe de travail de députés UMP, concurrent de la mission. Cette étape achevée, il avait annoncé en décembre son intention de déposer une proposition de loi. Critiquant la "lenteur" des travaux de la mission, il a suscité la colère de membres de la majorité et du gouvernement, agacés par ce cavalier seul. Ces derniers jours, il a multiplié les déclarations, jusqu'à la présentation dans le détail de son texte de loi. Ce faisant, il a amené ses amis politiques à se positionner par rapport à ses propositions, occupant sur le sujet une place centrale face à M. Bertrand et à la plupart des ministres concernés. Dans le même temps, en conservant, comme il le revendique une "position ferme et constante" pendant plus de six mois, il a fini par incarner un point de repère pour une partie de l'opinion publique, notamment dans son électorat, en quête de réponse tranchée face à une pratique qui suscite un rejet unanime. Il n'est pas sûr pourtant que la "copéisation" du débat facilite la réponse sereine que devrait apporter la République à ce nouveau phénomène. D'autant qu'une possible censure de la loi d'interdiction serait interprétée comme un affaiblissement des principes républicains. Stéphanie Le Bars
13/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/13/burqa-le-chef-du-gouvernement-repousse-le-debat-apres-les-regionales_1291096_3224.html
Interpellations de militants indépendantistes en Corse
Ils sont soupçonnés d'avoir participé à un attentat à la voiture piégée qui avait visé sans faire de blessé la gendarmerie de Vescovato (Haute-Corse), au sud de Bastia, le 22 juillet 2009.
Sept militants indépendantistes ont été interpellés en Haute-Corse, mardi 12 janvier, par la gendarmerie et la police, dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte par le parquet antiterroriste de Paris. Ils sont soupçonnés d'avoir participé à un attentat à la voiture piégée qui avait visé sans faire de blessé la gendarmerie de Vescovato (Haute-Corse), au sud de Bastia, le 22 juillet 2009. Sur la base de traces ADN, les enquêteurs estiment qu'ils pourraient également être impliqués dans deux autres attentats, commis en 2008 et en 2009. Deux autres personnes sont recherchées. . Isabelle Mandraud
13/01/2010
societe
https://www.lemonde.fr/societe/article/2010/01/13/interpellations-de-militants-independantistes-en-corse_1291101_3224.html
François Fillon, l'hôte de Matignon qui dure dans les vicissitudes
Malgré des relations difficiles avec M. Sarkozy, son bail pourrait être prolongé au-delà des régionales.
François Fillon le paradoxe ? Celui dont on a tant prédit le départ devait prononcer jeudi 14 janvier ses troisièmes voeux. Plus le temps passe, plus le premier ministre prospère dans l'opinion publique comme dans la majorité. En un mois, il a enregistré une hausse de sept points de popularité, selon l'Institut Viavoice pour Libération passant de 47 % à 54 % (sondage effectué les 7 et 8 janvier). Les sondeurs lient ce regain à la disparition de son mentor Philippe Séguin. Quelques heures après le décès du président de la Cour des comptes, dont il fut l'un des plus proches, le premier ministre, si peu habitué à l'affect, lui avait rendu un hommage empli d'émotion. Il y a tout juste un an, à Matignon à l'occasion des voeux, le chef du gouvernement avait ironisé sur ces journalistes qui "l'année dernière lui donnaient quelques mois de sursis". "Il est plus sage si toutefois la sagesse est une vertu compatible avec votre métier de laisser l'avenir et les circonstances politiques en décider", avait-il lancé à la presse. Le premier ministre avait-il de bonnes raisons de ne pas douter de la prolongation de son bail ? Un livre intitulé La Carpe et le Lapin (Ed. du Moment, 17,95 euros) qui parait jeudi 14 janvier, sous la plume d'Alix Bouilhaguet, journaliste à France 2, révèle l'existence d'un pacte qu'auraient conclu en mai 2008 le chef de l'Etat et son premier ministre. La scène se serait déroulée à l'Elysée, lors d'un petit déjeuner, alors que le tandem exécutif était à couteaux tirés. Le chef du gouvernement se sent alors court-circuité par les conseillers de l'Elysée, en particulier Claude Guéant, le secrétaire général, et Henri Guaino, le conseiller spécial. M. Fillon souffre de l'omniprésence du chef de l'Etat. Depuis son installation, il peine à trouver sa place. Dès le 28 septembre 2007, il aurait proposé sa démission à Nicolas Sarkozy, à la suite d'un article de presse relatant leurs divergences sur les réformes. Ce matin de mai 2008, venu dire au chef de l'Etat que les limites ont été franchies, avec l'instauration du G7 - "ce truc", dit-il, cette réunion de ministres autour du président de la République dont il ne fait pas partie -, le chef du gouvernement serait reparti avec l'assurance de durer au moins jusqu'en 2011. Le service de communication de Matignon a démenti, mardi 12 janvier, les confidences de M. Fillon rapportées par Alix Bouilhaguet. Le premier ministre "ne fait jamais parler le président", assure sa conseillère en communication. "Pas de chambardement" Cependant l'entourage du chef de l'Etat accrédite ces derniers jours la thèse selon laquelle M. Fillon restera au-delà des élections régionales de mars. "Il n'y aura pas de chambardement gouvernemental après les élections régionales. Nous manquons de visibilité sur la conjoncture. De grosses réformes restent à faire, celle des retraites notamment. S'il doit y avoir changement, ce sera en 2011", affirme un conseiller de M. Sarkozy. Alors que beaucoup pensaient que la césure du quinquennat se produirait au lendemain des élections régionales, tous les ministres soutiennent aujourd'hui que François Fillon est installé "pour un très long bail". Le président du Sénat, Gérard Larcher, se dit aussi "favorable à un premier ministre qui dure" en expliquant : "François Fillon a renforcé au fil des mois ses relations avec les corps intermédiaires et les élus. C'est un excellent pédagogue et, en ce moment, il en faut de la pédagogie pour expliquer les réformes aux Français qui ont le tournis et demandent des repères." Ces dernières semaines, Nicolas Sarkozy a laissé beaucoup plus de champ à son premier ministre pour déminer les dossiers difficiles : réforme des collectivités territoriales, débat sur l'identité nationale et la burqa, relations avec la Chine... Mais les relations du couple exécutif restent chaotiques. En septembre dernier, après un conflit sur le montant de la taxe carbone, François Fillon s'était de nouveau interrogé sur son maintien à Matignon. Pressé par certains de ses conseillers de sortir de la Rue de Varenne la tête haute, au faîte de sa popularité, il avait caressé l'idée de remplacer à la tête de la Commission européenne le Portugais José Manuel Barroso. L'Elysée n'avait pas apprécié. Sophie Landrin
13/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/13/francois-fillon-l-hote-de-matignon-qui-dure-dans-les-vicissitudes_1291094_823448.html
Le PS relance la proposition du droit de vote des étrangers aux élections locales
Depuis 1981, cette idée resurgit régulièrement dans le débat politique.
Il suffira de la ressortir d'un tiroir et de la "rafraîchir", en l'enregistrant sous un nouveau numéro. Certes, les députés socialistes étaient les premiers surpris, mardi 12 janvier, à la sortie de leur réunion de groupe à l'Assemblée nationale, d'apprendre qu'au même moment, Rue de Solférino, la première secrétaire du PS, Martine Aubry, avait annoncé le dépôt, "dès aujourd'hui", d'une proposition de loi accordant le droit de vote aux étrangers aux élections locales. Eux n'avaient même pas évoqué le sujet. "Ce n'est pas grave, assure le président du groupe socialiste, Jean-Marc Ayrault. Nous en discuterons demain (mercredi 13) et elle sera déposée dans la foulée." Le texte reprendra celui qui avait déjà été présenté en novembre 2002. Et rejeté tout aussitôt. Comme l'a également été celui présenté par les sénateurs socialistes le 19 janvier 2006. Une proposition de loi constitutionnelle avait bien été adoptée par l'Assemblée nationale, le 3 mai 2000, par la majorité de gauche, mais le premier ministre de l'époque, Lionel Jospin, s'était dispensé de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat, sachant que la majorité sénatoriale, de droite, y ferait alors obstacle. Ainsi la 80e des 110 propositions du candidat François Mitterrand en 1981 fait-elle régulièrement sa réapparition dans le débat politique. Sans avancer d'un pouce. Le thème du droit de vote des étrangers fait office d'"épouvantail" aux yeux de la droite, de "marqueur" pour la gauche. Mme Aubry a jugé le moment opportun pour le ressortir, feignant de croire que le sujet pourrait être un ferment de division dans les rangs de la majorité. La responsable socialiste s'appuie sur les récentes déclarations d'Eric Besson, le ministre de l'immigration et de l'identité nationale. Celui qui, venu des rangs socialistes, est à présent secrétaire général adjoint de l'UMP avait estimé, dimanche 10, qu'il faudrait " aller à terme vers le vote des étrangers aux élections locales", jugeant cette évolution envisageable "dans les dix ans à venir". Nicolas Sarkozy avait lui-même, avant l'élection présidentielle, évoqué cette possibilité, mais l'avait écartée de son programme de campagne en raison de l'hostilité qu'elle suscitait dans son propre camp. Mme Aubry veut les "mettre au pied du mur". "Le président de la République a dit qu'il y était favorable. Eh bien qu'il la fasse voter, a-t-elle lancé mardi en présentant ses voeux à la presse. Ce serait un beau signe à donner." La droite y reste cependant aussi majoritairement que farouchement opposée. Les quelques voix qui, à un moment ou à un autre, en ont approuvé le principe se sont mises en sourdine. Les réactions dans la majorité ne se sont pas fait attendre. M. Besson lui-même a jugé "contre-productif" d'ouvrir ce débat. Thierry Mariani, tête de liste de l'UMP en région Provence-Alpes-Côte-d'Azur, où il est confronté à Jean-Marie Le Pen, a accusé la première secrétaire du PS de "ressortir les vieilles recettes qui ont fait le succès de Mitterrand" pour "raviver les tensions et renforcer le Front national". "Le Parti socialiste espère grâce à cela pouvoir compter sur son allié objectif de toujours pour conserver ses régions", s'insurge le député du Vaucluse. La surprise n'était pas moins grande dans les rangs des députés socialistes, qui n'avaient pas inscrit ce texte dans leurs priorités de bataille. "On se faisait la réflexion avec François Hollande : c'est étonnant", confiait Bruno Le Roux (PS, Seine-Saint-Denis). Quoi qu'il en soit, il ne pourra pas être examiné avant les élections régionales. Patrick Roger
13/01/2010
politique
https://www.lemonde.fr/politique/article/2010/01/13/le-ps-relance-la-proposition-du-droit-de-vote-des-etrangers-aux-elections-locales_1291093_823448.html