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economie
Motonari Otsuru, l’implacable « confesseur » au chevet de Carlos Ghosn
Lorsqu’il se trouvait à la tête du bureau d’enquêtes spéciales du parquet de Tokyo, Motonari Otsuru (à gauche) a notamment été à l’origine de l’arrestation de Takafumi Horie (à droite), le fondateur du portail Internet Livedoor, en janvier 2006. JIJI PRESS / AFP A détenu hors norme, avocat hors norme. Pour sa défense, Carlos Ghosn a choisi Motonari Otsuru. A ce stade, l’information, révélée par la presse japonaise, n’a été ni confirmée ni infirmée. Outre les débats sur la détention de l’ex-président du conseil d’administration du constructeur japonais Nissan – lequel pourrait être inculpé, lundi 10 décembre, pour avoir minoré ses déclarations de revenus aux autorités financières et devrait être, le même jour, placé à nouveau en garde à vue pour d’autres faits –, elle laisse pourtant entrevoir un procès retentissant, émaillé de joutes cinglantes avec l’accusation. M. Otsuru, qui va travailler avec le cabinet américain Paul, Weiss, Rifkind, Wharton & Garrison LLP, également sollicité par M. Ghosn, devrait en effet se retrouver face à Hiroshi Morimoto, patron du très redouté bureau d’enquêtes spéciales du parquet de Tokyo, considéré comme un ténor de la magistrature. Celui-ci a fait ses études à la prestigieuse université de Tokyo avec l’actuel ministre de la justice, Takashi Yamashita, et mène les investigations contre l’ancien patron de Nissan. Lire aussi Le redoutable bureau d’enquêtes spéciales aux trousses de Carlos Ghosn Le duel s’annonce piquant, car M. Otsuru, aujourd’hui avocat, a, lui aussi, supervisé le bureau d’enquêtes spéciales. Un passage à la tête du prestigieux service qui lui a valu d’être surnommé « Monsieur au carré » – pour sa réputation de sérieux extrême – ou « le Confesseur », pour sa capacité à faire parler les individus les plus retors. Né le 3 mars 1955, père de deux enfants et grand amateur de saxophone, Motonari Otsuru, qui avait toujours rêvé de devenir procureur, est entré dans la magistrature en 1980, au parquet de Tokyo. En 2005, il a pris la tête du bureau d’enquêtes spéciales, un service spécialisé dans la délinquance en col blanc. Dès sa prise de fonction, il s’est engagé à « enquêter sur les affaires qui mettent en colère les honnêtes travailleurs et qui les amènent à se demander pourquoi cela a été possible ». Une certaine empathie Dans un article publié cette même année sur le site du ministère de la justice, il appelait à ne pas « accepter une société dans laquelle un comportement injuste triomphe et outrepasse les personnes qui travaillent dur ou qui perdent leur emploi dans des restructurations et les entreprises qui respectent la loi ». Avec une certaine empathie pour les personnes impliquées dans les affaires dont il a eu la charge. « Beaucoup de ceux qui se retrouvent mêlés à des crimes ou des délits sont des salariés travaillant dur. Il m’est parfois arrivé de penser que j’aurais pu faire la même chose si j’avais été à leur place », déclarait-il au quotidien Mainichi.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/08/motonari-otsuru-l-implacable-confesseur-au-chevet-de-carlos-ghosn_5394461_3234.html
08/12/2018
L’avocat de l’ancien président de Nissan a d’abord été un infatigable pourfendeur de la délinquance en col blanc.
economie
Les opposants au TGV Lyon-Turin se mobilisent
Le chantier du TGV Lyon-Turin, à Saint-Martin-de-la-Porte, en Savoie, en août. Mega / © Mega / KCS PRESSE Samedi 8 décembre, ils se sont donné rendez-vous dans le centre de Turin, pour ce qui ressemble fort à un match retour. Les associations opposées au chantier de train à grande vitesse Lyon-Turin (TAV), qui contestent ce grand projet européen qui doit rapprocher la capitale du Piémont de la troisième ville de France, ont besoin de se compter et de remobiliser leurs troupes. Tout se passe comme si, à Turin, après trois décennies de mobilisation, ils étaient en train de perdre la bataille de l’opinion. Rassurés par la promesse d’une remise à plat du chantier, qui figure noir sur blanc dans le contrat de gouvernement conclu, fin mai, entre la Ligue (extrême droite) et le Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème), et la présence au poste de ministre des transports de Danilo Toninelli, une figure du M5S, historiquement opposée au projet, les « no-TAV » se sont retrouvés confrontés à un phénomène inattendu : la naissance d’un mouvement de défense du chantier, qui a choisi lui aussi d’occuper l’espace public. Quatre semaines plus tôt, le 10 novembre, ils étaient 30 000 à 40 000 personnes, dans le centre de la ville, pour ce qui était apparu à la fois comme un large rassemblement des populations locales et la première mobilisation d’ampleur contre le gouvernement Conte. Lancé en réaction à une résolution du conseil municipal déclarant Turin « commune No-TAV », sans le soutien officiel d’un syndicat ou d’un parti politique et autour du simple mot d’ordre « si, Torino va avanti » (« oui, Turin avance »), le rassemblement a rencontré un succès d’une ampleur inespérée, au point de réveiller en ville le souvenir de la « marche des 40 000 », une manifestation de 1980 contre les excès d’un mouvement de grève de la FIAT que les historiens considèrent aujourd’hui comme un tournant dans l’histoire de la ville, en même temps que le début de la fin du Parti communiste italien. Attente du résultat d’une « analyse coûts-bénéfices » Depuis le succès de la manifestation du 10 novembre, la pression sur le M5S, dont l’opposition au chantier est un des marqueurs historiques, n’a pas diminué. Lundi 3 décembre, le dirigeant de la Confindustria, l’équivalent italien du Medef, a appelé le président du Conseil, Giuseppe Conte, à « convaincre son vice-premier ministre, [Luigi Di Maio, dirigeant politique du mouvement] ou à démissionner ». Une offensive qui a forcé le M5S, soudain conscient de son isolement, à tendre la main aux partisans du projet en lâchant un peu de lest.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/08/les-opposants-au-tgv-lyon-turin-se-mobilisent_5394458_3234.html
08/12/2018
Le projet, contesté par le Mouvement 5 étoiles, est en revanche soutenu par son allié de la Ligue.
idees
Les légendes du sperme
Il est fait « d’opale et de lait », écrivait Verlaine dans Hombres (1903), son ouvrage consacré à l’Eros homosexuel. On parle beaucoup de sperme depuis que le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a rendu, le 18 septembre, un avis favorable à l’ouverture de la procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes. Effectivement, cet élargissement aux couples de lesbiennes et aux femmes seules va en accroître la demande. Déjà, les opposants à la PMA, La Manif pour tous en tête, sonnent l’alarme : personne ne voudra donner, la pénurie de spermatozoïdes guette, le « marché noir » va se développer. Dans Le Monde, le haut fonctionnaire Jean-Christophe Parisot de Bayard estime que le désir de l’enfant « de recevoir amour et complicité d’une femme et d’un homme, son père » est bafoué. « On ne dialogue pas avec un échantillon de sperme, ­s’indigne-t-il. La référence paternelle est un fondement de la psychanalyse. Freud, reviens, ils n’ont rien compris ! » Article réservé à nos abonnés Lire aussi Elargissement de la PMA : « Le risque de l’ubérisation de la reproduction » O tempora, o mores… Ces nouveaux usages procréatifs en vue de fonder de nouvelles familles, dont on ne voit pas pourquoi elles ne donneraient pas « amour et complicité » à leurs enfants, remettent en question la longue histoire symbolique, mythologique et même psychanalytique du sperme. Dans la Bible, comme l’a montré le linguiste Pierre Guiraud dans sa Sémiologie de la sexualité (Payot, 1978), se déploie une conception patrilinéaire « pan­spermique » de la création. Par le verbe, qui est semence, ­Jéhovah, Dieu le père, donne forme au chaos, engendre les choses en leur donnant un nom, crée le monde à son image, comme le fils est à l’image du père. Tout un tissage symbolique se trame, fondé sur la valorisation de la puissance fécondatrice paternelle, dont les théologiens chrétiens se souviendront en faisant du Christ le fils de Dieu. Jupiter, le « ciel père » Chez les Romains, montre encore Pierre Guiraud, Jupiter, le roi des dieux, est le « ciel père » doté de l’énergie créatrice, la puissance paternelle d’ensemencement. Chez les Grecs, elle est energeia, force en action, assimilée à la foudre de « Zeus père », mais aussi au soleil et à sa chaleur infinie, qui déclenche la germination, fertilise la terre ­féminine. Toute cette valorisation de la fécondation masculine, biblique et gréco-latine, se retrouve au cœur de la conception patriarcale occidentale, longtemps dominante – n’oublions pas qu’en France, la supériorité du « chef de famille » n’a été supprimée du code civil qu’en… 1970.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/08/les-legendes-du-sperme_5394444_3232.html
08/12/2018
Ces nouveaux usages procréatifs en vue de fonder de nouvelles familles remettent en question la longue histoire symbolique, mythologique et même psychanalytique du sperme, estime Frédéric Joignot dans sa chronique au « Monde ».
idees
Piketty : « S’il veut sauver son quinquennat, Macron doit immédiatement rétablir l’ISF »
Un cortège d’une centaine de « gilets jaunes » dans les rues de Privas, en Ardèche, samedi 8 décembre. ROMAIN ETIENNE / ITEM POUR LE MONDE Chronique. La crise des « gilets jaunes » pose à la France et à l’Europe une question centrale : celle de la justice fiscale. Depuis son élection, Emmanuel Macron a passé son temps à expliquer au pays qu’il fallait chérir les « premiers de cordée », et que la première des priorités était d’accorder des baisses d’impôts aux plus hauts patrimoines, à commencer par la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Tout cela a été mené tambour battant, avec un sentiment de toute-puissance et une totale bonne conscience. Même Nicolas Sarkozy avait été plus prudent, en 2007, avec son « bouclier fiscal », qu’il avait néanmoins dû annuler en 2012. Inévitablement, tous ceux qui ne se voient pas comme des « premiers de cordée » se sont sentis abandonnés et humiliés par le discours macronien, et voici comment nous nous retrouvons dans la situation actuelle. Le pouvoir en place a commis une série d’erreurs factuelles, historiques et politiques, qu’il est urgent et possible de corriger aujourd’hui. Il a tout d’abord cherché à justifier la suppression de l’ISF par l’idée que cet impôt suscitait une hémorragie des patrimoines hors de France. Le problème est que cette affirmation est totalement fausse d’un point de vue factuel. On observe depuis 1990 une hausse spectaculaire et continue du nombre et des montants des patrimoines déclarés à l’ISF. Cette évolution a eu lieu dans toutes les tranches de l’ISF, en particulier dans les plus élevées, où le nombre et le montant des patrimoines financiers ont progressé encore plus vite que les patrimoines immobiliers, qui ont eux-mêmes progressé beaucoup plus rapidement que le produit intérieur brut (PIB) et la masse salariale. Les baisses boursières de 2001 et 2008 ont certes temporairement calmé cette évolution, mais sitôt les crises passées les tendances longues ont repris leur cours. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les « gilets jaunes » ciblent la suppression de l’ISF, « péché originel » de Macron Un contrôle fiscal insuffisant Au total, les recettes de l’ISF ont plus que quadruplé entre 1990 et 2017, passant de 1 milliard d’euros à plus de 4 milliards d’euros, alors que le PIB nominal était multiplié par deux. Tout cela en dépit des multiples allégements, exonérations et plafonnements accordés au fil des ans aux contribuables ISF, et malgré le fait que le seuil d’entrée dans l’ISF a été graduellement relevé de 0,6 million d’euros de patrimoine net en 1990 à 1,3 million d’euros depuis 2012 (après déduction de 30 % sur la valeur de la résidence principale).
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/08/thomas-piketty-gilets-jaunes-et-justice-fiscale_5394443_3232.html
08/12/2018
Dans sa chronique au « Monde », l’économiste estime que la crise des « gilets jaunes » pose à la France et à l’Europe une question centrale : celle de la justice fiscale.
societe
Récit de la première garde à vue des lycéens de Mantes-la-Jolie
Oussama, 17 ans, chez lui : en première commerce au lycée Condorcet de Limay (Yvelines), il est resté 24 heures en garde à vue. LAURENCE GEAI POUR "LE MONDE" De sa nuit passée au commissariat de Versailles, Oussama, 17 ans, garde le souvenir des infectes pâtes aux champignons, de ce matelas qu’il a fallu partager à six « avec deux majeurs » et d’« un banc froid comme un glaçon ». Et puis il y avait aussi cette « OPJ [officier de police judiciaire] ; elle voulait vraiment que je dise : “J’ai tout fait, je suis l’organisateur.” » Il lui a expliqué le contraire. Assis dans le salon propret de la maison familiale, à Limay (Yvelines), vendredi 7 décembre en fin d’après-midi, l’adolescent ne semble pourtant pas tant affecté par « la toute première garde à vue de [sa] vie ». Il sourit de temps en temps aux pitreries de son ami Bouba, 16 ans, lui aussi tout juste sorti du commissariat, mais celui de Mantes-la-Jolie. « Je ne me sens pas trop mal parce que je suis de retour chez moi, nuance Oussama. Mais là-bas, au commissariat, les minutes c’est des heures. » Jeudi 6 décembre peu avant midi, 151 jeunes entre 12 et 20 ans ont été interpellés, à proximité des lycées Saint-Exupéry et Jean-Rostand. Les deux établissements, voisins, 2 500 élèves en temps normal, jouxtent l’immense cité du Val-Fourré, où vivent la moitié des 45 000 habitants de Mantes-la-Jolie. La scène, des jeunes alignés et agenouillés, les mains derrière la tête ou dans le dos, entravés, tous encadrés par les forces de l’ordre, a été filmée, et diffusée sur les réseaux sociaux par Aboubakry N’Diaye, un journaliste local, puis par l’Agence France Presse (AFP). Une autre vidéo filmée d’un peu plus près, où l’on entend les propos d’un policier moqueur – « voilà une classe qui se tient sage » –, a elle aussi été beaucoup partagée. « On aurait dit Medellin, en Colombie, avec les cartels » Au lendemain de ces interpellations massives, une cinquantaine de professeurs, de parents d’élèves et d’habitants se sont regroupés pour dire leur mécontentement, vendredi matin, sur le parking entre le lycée Saint-Exupéry et la Maison des associations, où les jeunes ont été interpellés. Presque tous dénoncent une réaction « disproportionnée » des forces de l’ordre. « Ces gamins, ils ont payé pour tout ce qui se passe en France », estime une habitante d’une quarantaine d’années. « Les policiers ont ramassé tout le monde, sans faire le tri, déplore un autre. On aurait dit Medellin, en Colombie, avec les cartels. » Plusieurs témoins ont affirmé que certains jeunes sont restés environ quatre heures dans des positions inconfortables.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/08/banc-froid-comme-un-glacon-et-pates-chelous-la-premiere-garde-a-vue-des-lyceens-de-mantes_5394439_3224.html
08/12/2018
Après l’interpellation de dizaines de lycéens filmée et diffusée jeudi, des habitants de la ville des Yvelines dénoncent une réaction « disproportionnée » des forces de l’ordre.
idees
Pierre Rosanvallon : « La révolte des “gilets jaunes” révèle le basculement dans un nouvel âge du social »
Professeur au Collège de France, où il est titulaire de la chaire d’histoire moderne et contemporaine du politique, Pierre Rosanvallon est aussi président de l’association La République des idées et a récemment publié Notre histoire intellectuelle et politique. 1968-2018 (Seuil, 448 pages, 22,50 euros). Il analyse la révolte des « gilets jaunes », à l’heure où « l’opinion publique est devenue une réalité matérielle ». Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Gilets jaunes » : sous pression, Macron lance un appel à l’aide Le mouvement des « gilets jaunes » relève-t-il d’une révolte ou d’une révolution ? Une révolution n’est pas seulement une révolte qui a réussi. Elle advient lorsqu’une révolte est guidée par un objectif de renversement d’un pouvoir oppresseur qui a mobilisé l’immense majorité de la société. Nous n’en sommes pas là. D’où l’inanité de la comparaison avec les révolutions arabes. Le mouvement des « gilets jaunes » est une révolte sociale, mais il n’est pas un mouvement social à proprement parler, avec ce que cela a historiquement impliqué en termes de conduite organisée de l’action ou de polarisation des objectifs. C’est d’abord l’explosion d’une colère dans laquelle se mêlent l’urgence et le flou. Elle fait remonter à la surface ce qui a été longtemps subi en silence : le sentiment de ne compter pour rien, de mener une existence rétrécie, de vivre dans un monde profondément injuste. C’est sur ce terreau que s’est développée la sensibilité populiste avec toutes les dérives qu’elle a entretenues. Le terme « d’inégalités » ne suffit pas à rendre compte de tout ce passif social et moral. Le problème est plus large et plus diffus. De même que les statistiques de revenu traduisent mal à elles seules la condition de ceux pour qui le « reste à vivre » semble se rétrécir, les dépenses contraintes (logement, assurances, transports, remboursements d’emprunts etc.) étant pour eux celles qui ont le plus augmenté. Cette révolte nous invite pour cela à considérer l’état de la société avec un œil neuf. Il nous faut aussi des indicateurs de dignité et de mépris, de ghettoïsation et d’éloignement social, d’appréhension des peurs et des fantasmes pour l’appréhender. Quelles sont les différentes composantes de cette révolte ? Elle est composite. Ce n’est pas la société des exclus, des chômeurs, des RMistes qui est dans la rue et qui occupe les ronds-points – rappelons que, en France, il y a 4,5 millions de personnes qui vivent des minimums sociaux – revenu minimum d’insertion [RMI, remplacé en 2009 par le revenu de solidarité active, RSA], allocation adultes handicapés, allocation de fin de droits de chômage et minimum vieillesse.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/08/pierre-rosanvallon-la-revolte-des-gilets-jaunes-revele-le-basculement-dans-un-nouvel-age-du-social_5394432_3232.html
08/12/2018
Ce ne sont plus les classes sociales qui constituent la société, mais les positions sociales, estime l’historien dans un entretien au « Monde ». D’où la difficulté de transformer cette révolte en mouvement structuré.
livres
La plus belle réussite de Babar, c’est la famille Brunhoff
« La Splendeur des Brunhoff », d’Yseult Williams, Fayard, 370 pages, 22 €. Michel de Brunhoff et Lee Miller, la duchesse d’Ayen, Monique de Séréville et les frères Pagès. Photo d’après-guerre. EDITIONS FAYARD « Dans la grande forêt, un petit éléphant est né. » Cécile de Brunhoff commence à improviser un récit, un soir de 1930, pour distraire son fils Mathieu, 4 ans, qui souffre d’une crise de foie carabinée. L’histoire du pachyderme qui perd sa mère et fuit vers une ville où il rencontre une gentille vieille dame passionne tant l’enfant que ses pleurs s’arrêtent – son frère aîné Laurent aussi est fasciné. Le lendemain, les deux garçons la racontent à leur père, le peintre Jean de Brunhoff (1899-1937), qui dessine en les écoutant. Ils le supplient de la poursuivre : que peut-il encore bien arriver à l’éléphant ? Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Mes incontournables » : 7 livres pour comprendre la politique française, par Solenn de Royer Ainsi Babar voit-il le jour, appelé à révolutionner la littérature pour la jeunesse et à devenir l’un des Français les plus connus à l’étranger. Dans La Splendeur des Brunhoff, la journaliste Yseult Williams retrace la généalogie du roi de Célesteville, dont le premier tome des aventures parut fin 1931, pour Noël. Des aventures auxquelles la mort de son « père », à 37 ans, de la tuberculose, ne mit pas un terme : à partir de 1946, Laurent, artiste lui aussi, reprit le flambeau. Mais c’est toute l’histoire du clan Brunhoff, intimement liée à la vie éditoriale, journalistique, artistique et politique du XXe siècle, qui rend l’ouvrage si intéressant. « Vogue » et « Vu » Le père de Jean, Maurice, publia (chez Monnier, de Brunhoff & Cie), entre autres, L’Eve future, de Villiers de l’Isle-Adam (1886). Il inspira au mystérieux auteur signant « Princesse Sapho » le chef-d’œuvre prédadaïste de 1891 Le Tutu, à l’histoire éditoriale maudite jusqu’à ce que Tristram le publie en 1991. Outre Jean, Maurice de Brunhoff eut trois enfants avec Marguerite Meyer : Jacques, Michel et Cosette. Les deux derniers marquèrent l’histoire de la presse, individuellement et avec l’aide de Lucien Vogel, époux de Cosette, directeur et créateur visionnaire de journaux, à commencer, en 1912, par La Gazette du bon ton, qui constitua un tournant dans le monde des revues et de la mode. L’homme d’affaires américain Condé Nast confia la création du Vogue français à Lucien et à Cosette, et la relance de la version anglaise à Michel, qui finit par diriger le Vogue français et par se retrouver sacré « arbitre suprême des élégances ». A la même époque, à la fin des années 1920, Lucien Vogel créait l’hebdomadaire Vu, pionnier français du photoreportage. En 1933, il publia les premiers clichés du camp de concentration de Dachau, en Allemagne. Elles avaient été prises par Marie-Claude, dite Maïco, la fille de Lucien et de Cosette, qui épousa le dirigeant communiste Paul Vaillant-Couturier.
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/08/la-plus-belle-reussite-de-babar-c-est-la-famille-brunhoff_5394424_3260.html
08/12/2018
Biographie. L’éléphant-roi n’est que l’une des créations de ce clan d’éditeurs, de journalistes et d’artistes, rappelle Yseult Williams dans « La Splendeur des Brunhoff ».
m-perso
Parentologie : les vertus éducatives de l’apéro
Praticable en plein air, tolérant aux effusions vocales, l’apéro s’adapte parfaitement à ce pur-sang remuant qu’est l’enfant. BENOÎT BACOU / PHOTONONSTOP Lorsqu’on devient parent pour la première fois, on est généralement plein de bonnes résolutions. On se dit : « Hors de question que cette petite chose geignarde qui me confond avec un distributeur de plats chauds m’empêche de vivre ma vie d’avant, celle des soirées ciné électrisantes, des apéros interminables et des virées au resto décidées à la dernière minute. » Quelques mois plus tard, vous êtes obligé de vous rendre à l’évidence : malgré votre bonne volonté initiale, vous vous êtes malheureusement transformé en distributeur de plats chauds, assumant par ailleurs tout un tas d’autres fonctions éreintantes auxquelles vous ne vous attendiez pas forcément. Aller au ciné dans un tel contexte ? Entre la fatigue qui risque de vous expédier dans les bras de Morphée après la réclame et le prix de la baby-sitter, ce n’est même pas la peine d’y penser. Le resto ? Si vous arrivez à coller votre poussette à trois roues entre deux tables et à maîtriser plus d’une heure vos enfants dans un espace confiné, l’idée reste encore envisageable ; mais plutôt comme une folie exceptionnelle. Moment festif Non, en réalité, le seul rituel qui survit de votre hédonisme d’avant, c’est celui de l’apéro. Praticable en plein air, tolérant aux effusions vocales, nécessitant une organisation minimale, il s’adapte parfaitement à ce pur-sang remuant qu’est l’enfant. Les miens adorent l’apéro. Au fil du temps, je me suis aperçu que cette tradition profondément ancrée dans la culture française était devenue, à mon insu, un des modules les plus appréciés de mon projet éducatif. Formidable pour l’ouverture d’esprit, la première vertu de ce moment festif est de montrer qu’un autre régime de normes est possible. Sous l’effet de la boisson, le parent laisse soudain tomber ses diktats habituellement si stricts. Quand les enfants entendent le mot-clé « apéro », ils savent instinctivement qu’ils vont pouvoir s’empiffrer de Pringles, avaler des mini-saucisses fumantes et s’imbiber de jus de fruit sans qu’aucun regard réprobateur ne se pose sur eux. Sous l’effet de la boisson, le parent laisse soudain tomber ses diktats habituellement si stricts, oubliant la chasse au sucre, capitulant face aux mauvaises graisses, bafouant parfois les règles d’hygiène les plus élémentaires. « Ta tranche de salami est tombée par terre ? C’est pas grave mon chaton, tu peux la manger quand même, c’est bon pour ton immunité… », plaide alors celui/celle qui se balade le reste du temps avec sa fiole de gel bactéricide toujours à portée de main.
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/08/parentologie-les-vertus-educatives-de-l-apero_5394417_4497916.html
08/12/2018
Notre chroniqueur Nicolas Santolaria s’interroge sur cette tradition française qui consiste à laisser ses enfants s’empiffrer afin que les adultes s’imbibent en paix.
international
Heather Nauert, de Fox à l’ONU
Heather Nauert, alors porte-parole du secrétaire d’Etat Rex Tillerson, à Washington, le 29 mai. MANDEL NGAN / AFP L’ancienne journaliste de la chaîne conservatrice Fox News, Heather Nauert, a été nommée par Donald Trump, vendredi 7 décembre, pour occuper les fonctions d’ambassadrice des Etats-Unis aux Nations unies (ONU). Dépourvue d’une solide expérience pour ce poste, en dépit des dix-huit mois passés comme porte-parole du département d’Etat, elle prendra la suite à New York, si elle est confirmée par le Sénat, de Nikki Haley. Cette dernière, ancienne gourverneure républicaine de Caroline du Sud, avait créé la surprise, en octobre, en annonçant elle-même sa volonté de prendre du recul, sans doute pour préserver de hautes ambitions. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Nikki Haley, le tremplin des Nations unies vers la Maison Blanche Interrogé sur cette nomination, François Delattre, l’ambassadeur de France à l’ONU, a estimé que « dans le contexte de l’administration américaine actuelle, nous avons besoin d’une personnalité forte, comme l’était Nikki Haley, pour au moins amortir les impulsions venues de Washington et si possible servir de pont entre l’ONU et la Maison Blanche. Ce sera le vrai test pour Heather Nauert ». Une gageure compte tenu de l’envergure politique de Nikki Haley, élue à deux reprises aux plus hautes fonctions de son Etat et qui compte parmi les personnalités les plus prometteuses d’un Parti républicain pauvre en talents féminins. Affable mais dépourvue de réelle expérience en matière de gouvernement et de diplomatie, Heather Nauert a été qualifiée vendredi de femme « très talentueuse » et « très intelligente » par le président. Les bonnes grâces du président Elle avait été choisie en 2017 comme porte-parole par le premier secrétaire d’Etat de Donald Trump, Rex Tillerson, tombé rapidement en disgrâce. Elle a su gagner par la suite la confiance de son successeur, Mike Pompeo, nommé en mars, et conserver ses fonctions malgré quelques gaffes comme l’évocation, en juin, de l’anniversaire du débarquement de Normandie, en 1944, mêlé au Plan Marshall, comme une preuve des « relations fortes » entre les Etats-Unis et l’Allemagne. Heather Nauert n’a pas économisé ses efforts pour se ménager les bonnes grâces du président. En février 2017, alors qu’elle était encore journaliste, elle avait défendu publiquement la fille du président, Ivanka, à la suite de la décision de la chaîne de distribution Nordstrom de ne plus vendre les articles de mode commercialisés par cette dernière. Elle avait assuré sur son compte Twitter qu’elle allait « en acheter pour les porter » dans la matinale Fox & Friends, l’une des émissions préférées de Donald Trump.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/08/heather-nauert-de-fox-a-l-onu_5394415_3210.html
08/12/2018
L’ancienne journaliste, dépourvue d’une solide expérience politique, a été nommée ambassadrice des Etats-Unis aux Nations unies, vendredi par Trump.
economie
Marlboro, premier cigarettier à investir dans le cannabis
Altria est le premier cigarettier à se laisser séduire par le marché de la marijuana, qu’il espère lucratif. RICHARD VOGEL / AP De la cigarette à la fumette, il n’y a qu’un pas, que vient de franchir au triple galop le propriétaire de Marlboro, la marque au cow-boy. Le groupe américain Altria a en effet annoncé, vendredi 7 décembre, avoir misé 1,8 milliard de dollars (1,6 milliard d’euros) pour s’emparer de 45 % du capital de la société canadienne Cronos. De quoi mettre du beurre dans les épinards de cette PME – qui vient de lancer sa marque de cannabis Spinach – et, pour ses actionnaires, de décrocher le jackpot, alors que le chiffre d’affaires de Cronos ne pèse guère plus qu’un nuage de fumée (3 millions de dollars). Altria devient ainsi le premier cigarettier à se laisser séduire par le marché de la marijuana, qu’il espère lucratif. Il est notamment soucieux de trouver un nouveau souffle face à la baisse de la consommation du tabac et aux incertitudes liées à l’avenir du vapotage. Les alcooliers avaient ouvert la voie. En août, le propriétaire de la bière Corona, le groupe américain de spiritueux Constellation Brands, a fait sensation, en déboursant près de 4 milliards de dollars pour monter au capital de la société canadienne Canopy Growth et en détenir 38 %. Effervescence Les brasseurs Molson Coors et Heineken, de leur côté, ont noué des partenariats avec des spécialistes de la feuille verte afin de proposer des boissons non alcoolisées infusées au cannabis. Puis, mi-septembre, le géant des sodas, Coca-Cola, a dévoilé son intention de mettre une pincée de cannabidiol dans ses canettes. Tous ont une vision : la légalisation du cannabis pour les usages thérapeutiques puis récréatif est en marche. C’est déjà le cas, depuis le 17 octobre, au Canada, premier pays du G7 à autoriser cette drogue. Les jeunes pousses du cannabis y ont germé et, ce faisant, semé leurs espoirs boursiers, même si tous escomptent prospérer aux Etats-Unis et en Europe. Cette effervescence n’a pas échappé aux spéculateurs. Le cannabis fleure bon l’euphorie boursière. Les valorisations de sociétés telles que Canopy Groowth, Tilray, Aurora ou Cronos se sont envolées jusqu’à la stratosphère. Depuis, elles ont traversé quelques trous d’air, mais l’opération d’Altria contribue à regonfler la bulle. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « Le cannabis fleure bon l’euphorie boursière » Qu’en est-il en France ? Les tenants d’une légalisation thérapeutique se sont réunis mercredi à l’Assemblée nationale. Parmi eux, le député La République en marche Jean-Baptiste Moreau, prêt à faire de la Creuse le... creuset du cannabis français.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/08/marlboro-premier-cigarettier-a-investir-dans-le-cannabis_5394406_3234.html
08/12/2018
Le groupe américain Altria, propriétaire de la marque au cow-boy, a annoncé miser 1,8 milliard de dollars pour s’emparer de 45 % du capital du producteur canadien Cronos.
idees
« Gilets jaunes » : « Substituons au Sénat une chambre vraiment représentative du pays »
Chronique « Recherches ». La puissante remise en cause de la « verticalité » du pouvoir actuel, accusé d’arrogance et d’être déconnecté de toute compréhension empathique des besoins réels de la population, s’inscrit autant dans les transformations récentes de la société que dans l’histoire politique longue de la France. Face aux multiples contradictions des « gilets jaunes », qui ne sont unis que par une hostilité radicale au gouvernement, l’émergence de revendications institutionnelles doit donc être considérée avec espoir et respect. Les multiples expériences de l’histoire constitutionnelle française ont permis des synthèses toujours instables entre, d’un côté, la tradition parlementaire, et, de l’autre, la tradition bonapartiste plébiscitaire. La première est régulièrement accusée de confisquer la représentation du peuple au profit de la bourgeoisie. Le suffrage censitaire, qui restreignait le vote aux contribuables aisés, fut certes abandonné dès 1848. Mais le suffrage universel (longtemps seulement masculin), s’il a permis au peuple de voter, ne lui a guère permis d’être élu. Quant à la tentation bonapartiste du rapport direct entre le peuple et le chef de l’Etat, elle se manifeste aussi par de graves restrictions des libertés fondamentales et de violentes répressions de manifestations jusque dans les années 1960. La Ve République articule les deux éléments, selon un équilibre qui s’est détérioré. L’alignement des mandats du président et de l’Assemblée nationale a achevé d’inféoder celle-ci à l’exécutif. Le lien entre peuple et élus s’est encore réduit : quand, dans leur jeunesse, les partis ouvriers (la SFIO puis le Parti communiste) étaient parvenus à faire accéder au Parlement, voire au gouvernement, des militants « de base », leur affaiblissement, leur institutionnalisation et le changement de leur base militante ont conduit à la disparition progressive de ces exceptions. De l’autre côté, l’élévation du niveau moyen d’éducation et l’accès aisé à l’information et à la connaissance par les outils numériques rendent insupportable au plus grand nombre la captation du pouvoir par un milieu politico-administratif restreint peuplant des technocraties publiques (et aujourd’hui privées), soupçonnées de favoriser dans leurs décisions leur milieu social commun. Appui sur les « corps intermédiaires » Face à la radicalisation du mouvement actuel, et à la violence qui menace, on pourrait reprendre la réforme constitutionnelle en cours pour rééquilibrer les pouvoirs en substituant au Sénat – dont le mode d’élection caricaturalement notabiliaire est d’un autre temps – une chambre vraiment représentative du pays. En 1969, la réforme du Sénat que proposait le général de Gaulle – et qui fut écartée par opposition au président plus que sur son contenu –prévoyait de faire entrer au Sénat « 146 sénateurs représentant les activités économiques, sociales et culturelles, désignés par des organismes représentatifs ».
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/08/gilets-jaunes-substituons-au-senat-une-chambre-vraiment-representative-du-pays_5394401_3232.html
08/12/2018
Face à la radicalisation du mouvement actuel, il est nécessaire de rééquilibrer les pouvoirs, estime le chercheur Pierre-Cyrille Hautcœur dans sa chronique au « Monde ».
campus
Tailleur de pierre, à la croisée des chemins entre art et artisanat
Dans l’atelier baigné de lumière, des blocs de pierre trônent sur les chevalets en bois. Devant eux, les élèves de gravure creusent les sillons à l’aide d’un ciseau à graver et d’une massette, tandis que plus loin leurs camarades de sculpture malaxent de la glaise. Le lycée Camille-Claudel, installé à Remiremont (Vosges), porte bien son nom. Il est l’unique établissement en France à proposer une formation pour chacun des métiers de la pierre, métiers à la croisée des chemins entre art et artisanat. « Cela demande de la logique et une bonne visualisation de l’espace. » Simon, professeur La taille de pierre est sans doute la plus connue d’entre eux. Discipline des bâtisseurs de cathédrale, auxquels on doit aussi bien les blocs carrés soutenant les édifices que les arches, les rosaces et toutes les pièces géométriques des monuments historiques. « Cela demande de la logique et une bonne visualisation de l’espace. C’est une conception pragmatique de pièces à réaliser sur mesure », analyse Simon Kerstetter, professeur en CAP taille de pierre. Un air de modernité Pour sortir de la géométrie pure, d’autres élèves sont inscrits dans le brevet des métiers d’art (BMA) gravure. Ils dessinent d’abord sur la pierre les lettres ou les motifs qu’ils veulent faire apparaître puis creusent la pierre pour les faire ressortir en 2D. Grâce à des typographies modernes, des choix de pierres plus claires comme le calcaire, et des dessins épurés, ils donnent un air de modernité à ce matériau ancestral. « Pour toute la signalétique par exemple, il est bien plus agréable de voir une œuvre comme celle-ci qu’un panneau en plastique », défend Sonia Rinaldi, artiste et professionnelle de la gravure, pointant du doigt un bloc de pierre blanche dans laquelle est sculpté un zèbre en bas-relief. Après le BMA gravure ou le CAP taille de pierre, il n’est pas rare que les élèves s’inscrivent l’année suivante dans la mention complémentaire en sculpture. Cette discipline totalement artistique est en quelque sorte le nec plus ultra des métiers de la pierre, requérant à la fois une bonne maîtrise de l’espace, de la créativité, de la rigueur et une patience à toute épreuve (il n’est pas rare de casser les premières pièces que l’on sculpte). « On laisse une partie de soi qui sera toujours là dans deux ou trois cents ans. » Thomas, élève Ce savoir-faire est en pleine évolution, modernisé à la fois par les professeurs conscients des débouchés potentiels et par de jeunes générations d’artistes souhaitant inscrire leur travail dans le temps. « On laisse une partie de soi qui sera toujours là dans deux ou trois cents ans », soupire Thomas Ilic, 45 ans, élève en taille de pierre. Lui a souhaité se reconvertir après vingt ans dans la maçonnerie, un cas loin d’être isolé.
https://www.lemonde.fr/campus/article/2018/12/08/tailleur-de-pierre-a-la-croisee-des-chemins-entre-art-et-artisanat_5394386_4401467.html
08/12/2018
A Remiremont, dans les Vosges, le lycée Camile-Claudel propose des formations en gravure, en taille de pierre et en sculpture à des bacheliers comme à des adultes en reconversion. Reportage parmi ces étudiants tombés amoureux de la pierre.
international
L’application du décret de Donald Trump sur le droit d’asile suspendue
Des migrants de la « caravane » bloqués à Tijuana, le 2 décembre. ALKIS KONSTANTINIDIS / REUTERS La cour d’appel de San Francisco a rejeté, vendredi 7 décembre, une demande de l’administration américaine visant à autoriser l’application d’un décret sur le droit d’asile signé le mois dernier par Donald Trump et aussitôt contesté en justice. Lire aussi Un juge fédéral bloque un décret de Trump verrouillant le droit d’asile Le président américain, qui a fait de l’immigration une question centrale de son mandat, a signé début novembre un décret interdisant aux immigrés arrivés clandestinement aux Etats-Unis d’y demander l’asile. Le texte prévoit que les demandes d’asile ne peuvent être formulées que par des étrangers dont l’arrivée a été enregistrée aux postes-frontières. Donald Trump a pris cette mesure face à l’afflux de milliers de migrants centraméricains qui se dirigent en « caravane » vers les Etats-Unis. L’appel du ministère après une injonction suspensive Trois mouvements de défense des droits civiques ont aussitôt saisi le tribunal fédéral de San Francisco pour contester le décret et ont obtenu une injonction suspensive. Le département de la justice a qualifié cette décision d’« absurde » et a saisi la cour d’appel pour qu’elle autorise l’application du décret le temps que les procédures juridiques suivent leur cours. Lire aussi Donald Trump interdit aux clandestins de déposer des demandes d’asile Le juge Jay Bybee, qui fut nommé par l’ancien président républicain George W. Bush, a estimé que la mesure prise par Donald Trump outrepassait les prérogatives présidentielles. « L’exécutif a tenté de contourner le Congrès », écrit-il dans son jugement.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/08/l-application-du-decret-de-donald-trump-sur-le-droit-d-asile-suspendue_5394367_3210.html
08/12/2018
Un juge de la cour d’appel de San Francisco a estimé que la mesure prise par Donald Trump outrepassait les prérogatives présidentielles.
planete
Le Brésil refuse à Total une licence d’exploration dans l’embouchure de l’Amazone
Après avoir bloqué le projet, le Brésil a décidé de refuser, vendredi 7 décembre, au groupe pétrolier français Total l’autorisation d’effectuer des forages dans cinq secteurs de l’embouchure du fleuve Amazone. « La licence environnementale pour l’activité de forage maritime dans les blocs FZA-M-57, 86, 88, 125 et 127 de Foz de Amazonas a été refusée ce vendredi en raison d’un ensemble de problèmes techniques identifiés au cours du processus visant à l’obtention de la licence », a annoncé dans un communiqué l’agence de régulation environnementale brésilienne Ibama. Trop d’« incertitudes » dans le plan de Total Le refus de cette licence avait été demandé en avril dernier par le parquet du Brésil et par des organisations de défense de l’environnement. Total s’était associé en 2013 avec le britannique BP et le brésilien Petrobras pour acquérir des blocs d’exploration dans l’embouchure de l’Amazone et attendait d’obtenir le feu vert des autorités brésiliennes pour lancer les travaux d’exploration. Ibama déclare dans son communiqué avoir détecté d’« importantes incertitudes » dans le plan présenté par Total pour d’éventuelles situations d’urgence. L’agence brésilienne évoque « la possibilité d’une fuite de pétrole qui pourrait affecter les récifs coraliens présents dans la région et par extension la biodiversité marine ». L’agence ajoute qu’elle a donné à Total E & P do Brasil, la branche brésilienne du groupe, toutes les « opportunités possibles » pour « qu’elle complète et éclaircisse les problèmes techniques » qui ont été relevés. Elle a informé vendredi Total de sa décision.
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/08/le-bresil-refuse-a-total-une-licence-d-exploration-dans-l-embouchure-de-l-amazone_5394362_3244.html
08/12/2018
Le groupe pétrolier français n’a pas su rassurer l’Institut brésilien pour l’environnement, qui considère que ce projet comporte des « problèmes techniques ».
musiques
Grammy Awards : Kendrick Lamar nommé huit fois pour son album inspiré du film « Black Panther »
En juillet 2017, Kendrick Lamar au Festival d’été de Québec (Canada). Amy Harris / Amy Harris/Invision/AP Huit nominations : c’est ce qu’a reçu le rappeur Kendrick Lamar, vendredi 7 décembre, pour les Grammy Awards, les récompenses de l’industrie musicale américaine dont la cérémonie aura lieu le 10 février à Los Angeles. Ainsi, le Californien se place en tête devant un autre rappeur, le Canadien Drake, nommé sept fois. C’est un nouveau triomphe pour le rap américain, qui peine néanmoins à s’imposer au palmarès final, le dernier prix dans la catégorie reine d’album de l’année remontant à quatorze ans. Kendrick Lamar a déjà glané douze Grammy Awards, dont cinq pour son album DAMN lors de la dernière édition. Cette fois, c’est l’album inspiré du film Black Panther qui a valu à Kendrick Duckworth, de son vrai nom, ces nouvelles nominations. L’artiste américain de 31 ans a produit le disque, contribué à l’écriture de tous les titres et en interprète plusieurs. L’annonce des nominations est un revers pour Beyoncé et Jay-Z, dont l’album événement Everything is Love avait été salué par la critique mais qui n’ont été retenus dans aucune catégorie. Autres grands absents, les chanteuses Taylor Swift et Ariana Grande, introuvables dans les catégories majeures. Lire aussi Le rappeur Kendrick Lamar remporte un prix Pulitzer Plus de diversité dans les nominations Lire aussi Grammy Awards : une cérémonie marquée par le mouvement MeToo Pour autant, le tableau des nominations témoigne de l’évolution réclamée par une partie de l’industrie musicale, avec beaucoup plus d’artistes féminines. Cinq des huit nommés dans la catégorie album de l’année sont des femmes, une proportion qui monte à six sur huit dans celle de meilleur nouvel artiste, considéré comme l’un des quatre prix majeurs des Grammys. Critiquée à l’occasion de la dernière cérémonie, la Recording Academy, l’organe de représentation des professionnels de la musique aux Etats-Unis a engagé depuis une série de réformes pour favoriser la diversité de ses membres et du palmarès des Grammys.
https://www.lemonde.fr/musiques/article/2018/12/08/grammy-awards-kendrick-lamar-nomme-huit-fois-pour-son-album-inspire-du-film-black-panther_5394354_1654986.html
08/12/2018
Le Californien se place alors en tête devant le rappeur Canadien Drake, nommé 7 fois. Malgré cette représentation, le rap américain peine toujours à s’imposer au palmarès final.
international
Un néonazi américain reconnu coupable de meurtre après les violences de Charlottesville
James Fields, durant le rassemblement des nationalistes blancs à Charlottesville, en août 2017. Stringer . / REUTERS Le jugement tombe seize mois après le meurtre, à Charlottesville, d’une manifestante antifasciste qui protestait contre un rassemblement d’extrême droite. James Fields, un néonazi américain, a été reconnu coupable de meurtre, vendredi 7 décembre, par un tribunal de la ville de l’est des Etats-Unis, selon les médias américains. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Charlottesville, un an après, la haine ordinaire Agé de 21 ans, il avait foncé au volant de sa voiture dans un groupe de manifestants, tuant Heather Heyer, 32 ans, et blessant plusieurs personnes en août 2017 dans cette petite ville de Virginie, avant de prendre la fuite. La sentence doit être annoncée ultérieurement. Le procès, qui s’est ouvert la semaine dernière, devait déterminer si l’accusé avait agi « par peur ou par malveillance », selon les mots du juge Richard Moore. Des preuves de préméditation Les avocats de James Fields ont plaidé la légitime défense et évoqué sa santé mentale au moment des faits. Selon un de ses avocats, le jeune homme a confié à la police qu’il « avait craint pour sa sécurité et qu’il était mort de peur ». L’accusation a au contraire argué que le jeune homme avait agi de manière préméditée, et qu’un monceau de preuves – photos et vidéos – le montraient. Le rassemblement de Charlottesville avait été organisé par des nationalistes blancs pour protester contre le déboulonnement annoncé d’une statue du général sudiste Robert Lee. Il avait braqué les projecteurs sur la nouvelle génération de l’extrême droite américaine qui a émergé depuis le début du mandat du président Donald Trump, dont la rhétorique incendiaire est régulièrement dénoncée comme attisant la haine et les divisions.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/08/un-neonazi-americain-reconnu-coupable-de-meurtre-apres-les-violences-de-charlottesville_5394351_3210.html
08/12/2018
En août 2017, en marge d’un rassemblement d’extrême droite, James Field a tué une personne et blessé 19 autres en percutant des manifestants antiracistes avec sa voiture.
football
Football : River Plate s’offre la Copa Libertadores face à son grand rival Boca Juniors
La joie du joueur de River Plate Javier Pinola après le second but de son équipe, le 9 décembre à Madrid. SERGIO PEREZ / REUTERS Une finale éternelle… qui s’est éternisée : au bout de l’attente, River Plate a renversé son rival Boca Juniors dimanche (3-1 après prolongation) pour s’adjuger sa quatrième Copa Libertadores. Et aucun incident n’a terni cette rencontre aseptisée, organisée à Madrid après des violences en Argentine. Un mois après des pluies diluviennes ayant perturbé la finale aller (2-2), deux semaines après des débordements et le report de la finale retour, le « superclasico » de Buenos Aires a fini par trouver son dénouement au stade Santiago-Bernabeu : en prolongation, le Colombien Juan Fernando Quintero (109e) et Pity Martinez (120e + 2) ont sacré River, alors que Boca jouait en infériorité numérique après l’exclusion de Wilmar Barrios (91e). Quatrième sacre pour River Ce dénouement sportif met un terme à un long feuilleton qui a durablement entaché l’image de l’Argentine, apparue incapable d’organiser sur son sol la « finale du siècle » entre les deux clubs les plus populaires du pays. En attendant de disputer le Mondial des clubs (12 au 22 décembre) et peut-être d’y croiser le Real Madrid, River Plate pouvait savourer cette quatrième couronne continentale qui le rapproche de son voisin et rival de Boca (6 titres). Et la fête s’annonçait délirante à Buenos Aires comme sur la Puerta del Sol, grande place du centre de Madrid. Habitué à plus de pondération, le vénérable stade Bernabeu a retenti dimanche d’une ferveur bouillonnante et bon enfant, entre tambours, chants, confettis et ballons de baudruche multicolores. Rien n’est venu gâcher la fête, même si l’enceinte de 81 000 places sonnait un peu creux en raison du prix élevé des places et des vols transatlantiques : seulement 62 200 spectateurs étaient présents. Loin de la ferveur argentine Parmi eux, des grands noms de la planète foot : l’entraîneur de l’Atlético Madrid, Diego Simeone, le milieu offensif colombien James Rodriguez… mais aussi et surtout l’astre argentin Lionel Messi, venu de Barcelone, et l’attaquant français Antoine Griezmann, revêtu d’un maillot de Boca et qui s’est pris au jeu du « superclasico ». Le spectacle n’a pas été toujours à la hauteur de l’effervescence suscitée par la rencontre. Beaucoup de fautes, de tacles, de heurts, de dégagements à l’emporte-pièce, de contrôles approximatifs… Seuls les buts, signés Dario Benedetto (44e) pour Boca, puis Lucas Pratto (68e) pour River ont fait rugir les supporteurs, jusqu’à la frappe limpide de l’ancien Rennais Quintero, entrée avec l’aide de la transversale (109e). Puis Martinez (120e + 2) a scellé le score en contre alors que le gardien de Boca était monté. Ces moments de joie pure ont peut-être été les seuls dignes de la ferveur d’un superclasico : voilà le principal regret à avoir dans cette soirée trop lisse pour être digne des fervents supporteurs argentins, attristés d’avoir été dépossédé de « leur » match.
https://www.lemonde.fr/football/article/2018/12/09/football-river-plate-s-offre-la-copa-libertadores-face-a-son-grand-rival-boca-juniors_5394958_1616938.html
09/12/2018
River Plate remporte ainsi son quatrième trophée continental à l’issue d’un match tendu et placé sous haute surveillance après avoir été délocalisé à Madrid à la suite de violences en Argentine.
idees
« Gilets jaunes » : une révolte qui divise les intellectuels
Analyse. Avant d’être le signe d’une division, les « gilets jaunes » sont l’emblème d’une communion. Des libéraux aux socialistes, des identitaires aux anarchistes, de l’essayiste Alain Finkielkraut à l’écrivaine Annie Ernaux, du philosophe Luc Ferry au romancier Edouard Louis, tous endossent la cause des « gilets jaunes ». Une convergence qui recoupe, de ronds-points bloqués en murs tagués, certaines alliances de circonstances. Mais l’unanimisme apparent masque de nombreuses divergences. Une partie de l’intelligentsia médiatique, plutôt majoritaire, campe une France coupée en deux, divisée entre les prolos et les bobos, les citadins et les ruraux. La thèse du géographe Christophe Guilluy, à nouveau déclinée dans No society. La fin de la classe moyenne occidentale (Flammarion, 242 pages, 18 euros), qui oppose les grandes métropoles mondialisées aux territoires périurbains formés par une classe moyenne paupérisée, est devenue son mantra. Transformant une simplification géographique en caricature idéologique, le pamphlétaire identitaire Eric Zemmour explique que deux France se font face : celle des « gilets jaunes », composée d’une « majorité d’homme blancs entre 30 et 50 ans » parée de toutes les vertus – de la dignité à la francité –, et celle des « minorités », des gauchistes et des mouvements féministes qui défilaient, notamment le samedi 24 novembre (comme si on ne pouvait pas être à la fois insurgé contre les inégalités sociales et remonté contre les violences sexistes). Une « situation populiste », résume la philosophe belge Chantal Mouffe, auteure de Pour un populisme de gauche (Albin Michel, 144 pages, 14 euros) et proche des « Insoumis » de Jean-Luc Mélenchon, à savoir une polarisation du conflit politique entre « ceux d’en haut » et « ceux d’en bas ». Un « moment poujadiste », corrige le philosophe Bernard-Henri Lévy, directeur de la revue La Règle du jeu, qui oppose « ceux qui ont de la mémoire » – des émeutes fascisantes unissant les « rouges » et les « bruns » – à « ceux qui n’en ont pas ». Une vision, plutôt minoritaire, soutenue par Daniel Cohn-Bendit et Romain Goupil, mais dépassant le cercle des écolos libéraux-libertaires, qui estiment que ce soulèvement n’est pas révolutionnaire et qu’il contient, au contraire, les ferments d’une dérive autoritaire : « En 1968, on se battait contre un général au pouvoir. Les “gilets jaunes”, aujourd’hui, demandent un général au pouvoir », déclare l’ancien leader du Mouvement du 22 mars.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/09/gilets-jaunes-une-revolte-qui-divise-les-intellectuels_5394945_3232.html
09/12/2018
Le surgissement du mouvement des « gilets jaunes » est une aubaine tant pour la gauche révolutionnaire que pour la droite identitaire, analyse le journaliste du « Monde » Nicolas Truong.
livres
Horacio Castellanos Moya : « J’écris à la manière d’une taupe bourrée »
L’écrivain salvadorien Horacio Castellanos Moya, photo non datée. ULF ANDERSEN/SIPA Peut-être la littérature, comme lieu intime de la mémoire et auxiliaire de l’histoire, est-elle le seul pays qui reste aujourd’hui à Horacio Castellanos Moya. Exilé de longue date, l’écrivain salvadorien de 61 ans a vécu au Canada, au Mexique, au Costa Rica, au Japon, en Espagne, en Allemagne… « Dans tellement d’endroits que je me sens étranger en permanence », explique-t-il au « Monde des livres », à la faveur de la parution de Moronga, son tout premier roman situé en Amérique du Nord. Jusqu’ici ses fictions étaient ancrées au Mexique ou dans l’isthme centre-américain, dont l’écrivain est originaire, plus particulièrement au Salvador, où il a passé sa jeunesse. Il en est parti à l’aube de la guerre civile qui a fait 75 000 morts, entre 1979 et 1992. Il y est ensuite revenu pour s’engager dans la transition démocratique. Voilà plus de vingt ans qu’il a définitivement quitté la région, dans laquelle il ne cesse de revenir à travers ses personnages cruels ou meurtris, désenchantés et paranoïaques. Malgré son nomadisme, le Salvador demeure le port d’attache de Moya « J’aime cet exemple : si je débarque à Tokyo et que je me présente comme Espagnol, tout le monde connaît Cervantès. Si je dis que je suis argentin, tout le monde sait qui est Borges. Si j’arrive du Salvador, je dois expliquer qui est Salarrué. » Soit un grand diplomate (1899-1975), qui commit plusieurs recueils de contes et de poésie, la première passion de Moya et son premier mode d’expression au sortir de l’adolescence. En 2014, lors de son discours de réception du Prix hispano-américain du roman Manuel Rojas, consacrant l’ensemble de sa carrière, ­Horacio Castellanos Moya soulignait qu’il s’agissait d’un honneur décerné à la littérature centre-américaine, encore trop méconnue. Le fait est que, malgré son nomadisme, le Salvador demeure son port d’attache. Où habite Moya en ce moment ? Dans l’Iowa (Etats-Unis), où il enseigne à l’université aux côtés de Tom Drury, Charles d’Ambrosio, au sein du Writer’s Work­shop, prestigieux département d’écriture créative, créé en 1936, qui a vu passer pas moins de 17 futurs lauréats du prix Pulitzer. Son œuvre est désormais traduite aux Etats-Unis, en Europe, ainsi qu’en Chine. Au fil des ans et d’une production irrégulière, elle prend la forme d’une cathédrale romanesque, avec des personnages récurrents, tantôt principaux tantôt secondaires, des références intertextuelles et des obsessions rémanentes. « Je la bâtis à la manière d’une taupe bourrée, s’amuse Moya, creusant des trous et des tunnels au hasard. Je ne sais pas où je vais. Au fond de ma conscience, je dois certainement posséder une carte des galeries. » Comment dispenser des leçons de « hasard » à des étudiants, comme il est censé le faire dans l’Iowa ? « Je leur dis juste de trouver leur voix, leur monde et le mode de narration qui leur paraît le plus naturel. »
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/09/horacio-castellanos-moya-j-ecris-a-la-maniere-d-une-taupe-bourree_5394943_3260.html
09/12/2018
L’écrivain salvadorien a fui la guerre civile puis les menaces de mort à la parution du « Dégoût ». En exil, il bâtit son œuvre un peu au hasard, pistant toujours le legs de la terreur. « Moronga » en témoigne.
football
Ligue 1 : Lille s’en sort bien face à Reims
Le pénalty de l’égalisation pour le Lillois Pepe, le 8 décembre. FRANCOIS LO PRESTI / AFP Lille a fragilisé sa deuxième place en concédant à domicile le nul contre Reims (1-1), pour clôturer dimanche une 17e journée de L1 tronquée par le report de six des dix matches en raison du week-end de mobilisation des gilets jaunes. Les hommes de Christophe Galtier ont échappé au pire en égalisant dans les arrêts de jeu grâce à un penalty de Nicolas Pépé (90e+6) après l’ouverture du score de Rémi Oudin (64e). Mais ce nul obtenu de justesse, cinq jours après un prometteur regain de forme à Montpellier (victoire 1-0), a rappelé que le club nordiste était bien rentré dans le rang depuis début novembre. Le Losc, qui n’a en effet gagné qu’une seule fois lors des six dernières rencontres de championnat (trois nuls, deux défaites), ne compte que deux points d’avance sur Montpellier, dont le match à rejouer le 15 ou 16 janvier sera tout de même compliqué à gagner car il aura lieu au Parc des Princes contre le PSG, champion d’automne avec 13 points d’avance sur son dauphin. Strasbourg accroché par Caen, Guingamp sombre Derrière Lille, l’équipe la mieux classée à jouer ce week-end était Strasbourg. A la Meinau contre le mal classé Caen, le Racing a trop gâché et s’est fait rejoindre au score par deux fois (2-2). Alsaciens et Normands sont désormais incontestablement les rois du match nul, avec huit égalités en 17 rencontres pour tous les deux. Mais Strasbourg, 8e, s’en sort beaucoup mieux que Malherbe, barragiste et surtout incapable de gagner depuis désormais 10 matches de suite toutes compétitions confondues. Samedsi, les Rennais et leur nouvel entraîneur Julien Stéphan ont su passer outre un match très rugueux pour s’imposer 2 à 1, grâce à un décisif Hatem Ben Arfa, à l’origine du premier but de Benjamin Bourigeaud (69e) puis buteur pour sa 3e titularisation consécutive (90e), après avoir marqué à Lyon (2-0) mercredi. L’embellie se poursuit, avec une entrée dans le top 10 (9e, 23 points). Un peu plus au nord, le match de la peur a été fatal à Guingamp contre Amiens (2-1). Le Roudourou a beaucoup vibré au cours d’une folle seconde période. Mais l’En-Avant, lanterne rouge, a trop poussé et s’est fait contrer. Par Eddy Gnahoré d’abord (63e), puis Stiven Mendoza (82e) après l’égalisation d’Etienne Didot (70e). Guingamp est désormais à huit points de son adversaire du soir, qui sort de la zone rouge (17e).
https://www.lemonde.fr/football/article/2018/12/09/ligue-1-lille-s-en-sort-bien-face-a-reims_5394933_1616938.html
09/12/2018
Les Nordistes, auteurs d’un match nul (1-1), conservent la deuxième place du classement au terme de la 17e journée de Ligue 1 tronquée par le report de six matchs.
sciences
Prix Nobel de physique 2018 : Gérard Mourou, un physicien illuminé
Gérard Mourou, dans le jardin de l’Ecole polytechnique, à Palaiseau, en décembre 2018. Simone Perolari pour Le Monde « Gérard Mourou fait de la science comme il fait du sport. A fond », constate Arnold Migus, retraité de la Cour des comptes, ancien directeur général du CNRS (2006-2010), qui connaît depuis quarante ans le dernier Prix Nobel français de physique. Fonceur, donc. En même temps que le physicien battait des records de puissance dans les lasers, il brillait sur les pistes de ski de ses Alpes natales, puis dans les salles de squash américaines, où il a passé près de trente ans, et enfin dans les piscines pour, à plus de 74 ans, un kilomètre quotidien. « Energique », est d’ailleurs l’adjectif qui vient spontanément à Donna Strickland, professeure à l’université de Waterloo, corécipiendaire du Nobel, pour décrire son ancien directeur de thèse. « J’ai travaillé jour et nuit, sept jours sur sept, pour arriver à notre but. C’était fun ! », précise la chercheuse. L’objectif consistait à réduire la durée des impulsions lasers. « C’est une lumière extraordinaire », se souvient Gérard Mourou, qui touche son premier laser, en licence, six ans après la découverte de ces faisceaux en 1960. A l’époque, ces éclairs sont déjà brefs et durent de l’ordre de la nanoseconde (milliardième de seconde). Mais les records tomberont à la suite de sa découverte à l’université de Rochester, où ce globe-trotteur arrive en 1977 après être passé par Paris, Laval (Québec) et San Diego (Californie). « Avant d’y arriver, on avait cassé pas mal de matériel », se souvient Gérard Mourou, évoquant l’un des obstacles à cette course : réduire la durée de l’éclairement, tout en gardant la même énergie, augmente ponctuellement l’intensité et détériore les matériaux. Dompter les dragons de lumière Les deux physiciens ont dompté leurs dragons de lumière en les faisant siffler comme des oiseaux, dont la fréquence du chant varie avec le temps. Plus exactement, l’impulsion lumineuse est étirée dans le temps, puis amplifiée, puis compressée. C’est l’amplification à dérive de fréquence ou CPA (chirped pulse amplification, en anglais), mise en œuvre en 1985 et récompensée par le Nobel. Les nanosecondes deviennent picosecondes, mille fois plus courtes, avant de devenir « femto », encore mille fois moins. A chaque progrès, la puissance des lasers explose, car elle est inversement proportionnelle à la durée des impulsions. Avec Donna Strickland, le pic est de l’ordre du gigawatt (un milliard de watts), puis le térawatt est atteint en 1991… en France, record mondial. En effet, Gérard Mourou avait convaincu le CEA de ne pas mettre à la casse leur vieux laser militaire P102, mais de le doper avec du CPA. Vingt ans plus tard, la barrière du petawatt, mille fois plus, est franchie par plusieurs lasers dans le monde.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/09/nobel-de-physique-2018-gerard-mourou-un-physicien-illumine_5394927_1650684.html
09/12/2018
Le corécipiendaire du Nobel de physique 2018 a créé une série de lasers toujours plus puissants. Ayant fait l’essentiel de sa carrière aux Etats-Unis, il détonne en France.
livres
« Liberté de l’esprit », la collection de Raymond Aron, voit s’ouvrir une nouvelle ère
Le philosophe et sociologue Raymond Aron (1905-1983). AFP Le premier coup d’éclat de Philippe Robinet, un an après avoir été nommé, en mai 2016, directeur général des éditions Calmann-Lévy, avait été le transfert fracassant de Guillaume Musso. Il vient d’en accomplir un deuxième, qu’on remarque moins : la résurrection d’une collection qui a marqué en profondeur la vie des idées, « Liberté de l’esprit », dirigée par le philosophe et sociologue Raymond Aron (1905-1983) de 1947 à sa mort. Enjeu commercial léger. Mais l’enjeu intellectuel et historique ne manque pas d’ampleur. « J’avais envie de développer à nouveau les essais dans cette maison qui a eu la chance extraordinaire d’être celle de Raymond Aron, raconte l’éditeur. La rencontre avec Gilles Achache m’a permis de concrétiser ce désir. Je lui ai très vite proposé de reprendre la collection. » Confirmation de l’intéressé, philosophe au parcours atypique, de l’université aux instituts de sondage, en passant par un livre étonnant, Le Complexe d’Arlequin (Grasset, 2010), un brillant éloge de l’inconstance contemporaine. Il ajoute : « J’ai hésité dix jours, pour la forme. Comment refuser ? » Aron, Arendt, Roucaute Tout, ensuite, s’accélère. Au printemps, « Liberté de l’esprit » est sur les rails. A l’automne, trois livres sortent simultanément : La Révolution introuvable, de Raymond Aron, naturellement (288 p., 19,50 €) ; le livre d’Hannah Arendt qui, en 1961, la fit découvrir au public français, Condition de l’homme moderne (504 p., 21,90 €) ; et un texte contemporain, Le Bel Avenir de l’humanité, du philosophe Yves Roucaute (504 p., 21,90 €), enquête fouillée sur les promesses du contemporain, aux antipodes exactes des lamentations déclinistes. « La proportion entre nouveautés et rééditions s’inversera en 2019, précise Philippe Robinet. Mais, pour ce nouveau départ, nous voulions montrer d’où nous venions. » D’où, justement ? De quelle histoire, de quels combats dont la vivacité devrait, aujourd’hui, être restaurée ? La collection, qui s’est arrêtée en 2001, a publié près de 120 titres, dont 54, selon le catalogue de la BNF, du vivant d’Aron – de James Burnham à Léon Poliakov, en passant par Albert Camus, Jacques Ellul, Bertrand de Jouvenel… Quand on demande au philosophe Pierre Manent, qui fut l’assistant d’Aron au Collège de France, de définir les lignes de force de cette aventure, deux images lui viennent en même temps : « Son trait le plus original, pour moi, c’est l’ouverture du compas, ou des fenêtres, sur d’autres pays : Etats-Unis, Allemagne… et, de ce fait, sur d’autres sujets. Il a réuni une forme de république des lettres, une classe réflexive transoccidentale. »
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/09/liberte-de-l-esprit-la-collection-de-raymond-aron-voit-s-ouvrir-une-nouvelle-ere_5394902_3260.html
09/12/2018
La collection d’essais de la maison d’édition Calmann-Lévy, qu’a fondée et dirigée Raymond Aron de 1947 à sa mort, en 1983, reprend vie.
pixels
« Gilets jaunes » : soupçons de manipulation sur les réseaux sociaux
« Le mouvement des “gilets jaunes” doit énormément aux réseaux sociaux et tout particulièrement à Facebook. » FACEBOOK Depuis quelques années, l’ingérence d’une puissance étrangère dans la vie politique française par le biais des réseaux sociaux est un scénario envisagé et redouté par l’Etat. S’est-il matérialisé, ces derniers jours, lors de la mobilisation des « gilets jaunes » ? A ce stade, rien ne permet de le dire. Mais les services de renseignement ont des doutes. Suffisamment pour que, selon nos informations, confirmant celles de l’Agence France-Presse (AFP), le Secrétariat général de la défense nationale (SGDSN), clé de voûte de l’appareil sécuritaire français, coordonne une opération de vérification de certaines activités sur les réseaux sociaux. Les autorités s’intéressent particulièrement « à des comptes ouverts il y a deux semaines qui envoient cent messages par jour », relate une source bien informée. Le mouvement des « gilets jaunes » doit énormément aux réseaux sociaux et tout particulièrement à Facebook : c’est là qu’il s’est organisé, et c’est en partie grâce à lui qu’il poursuit son existence protéiforme et sans leaders désignés. Des activités suspectes sur les réseaux sociaux Ces derniers jours, quelques chercheurs, experts et entreprises ont remarqué des comportements suspects, en particulier sur Twitter. C’est le cas, par exemple, d’utilisateurs apparus très récemment et pris d’une passion subite et dévorante pour le conflit des « gilets jaunes ». De comptes de médias, aussi, postant quasi exclusivement des images et des textes laissant à penser que la France est à feu et à sang et n’ayant d’autre présence numérique que cet unique, et bien solitaire, compte Twitter. D’autres ont remarqué des comptes, basés à l’étranger, relayant de nombreuses informations fausses ou tronquées sur le mouvement des « gilets jaunes ». Avec pour but commun de dépeindre un pays ravagé par une quasi-guerre civile. Plusieurs observateurs y ont vu la main du pouvoir russe Comme souvent dans ce type d’événement, plusieurs observateurs y ont vu la main du pouvoir russe. C’est notamment le cas de l’entreprise américaine de sécurité informatique New Knowledge, qui a affirmé au quotidien britannique The Times que l’appareil de propagande du Kremlin s’était investi dans le débat numérique autour des « gilets jaunes ». Sollicité par Le Monde, le directeur de l’entreprise, Ryan Fox, explique que sa société a identifié, depuis deux ans, une grande quantité de comptes sur Internet et divers réseaux sociaux comme faisant partie de l’appareil russe de propagande en ligne. Selon cet ancien officier de renseignement américain, ces différents acteurs ont multiplié les contenus et les publications liées aux « gilets jaunes » ces dernières semaines. Et ce, autour de méthodes et de thèmes communs – notamment celui de « l’hypocrisie » d’Emmanuel Macron, qui soutient les rebelles syriens tout en dénigrant les « gilets jaunes » –, montrant des images plus anciennes et les faisant passer pour des incidents datant du dernier week-end de mobilisation… Selon M. Fox, environ 2 000 comptes, ayant posté environ 20 000 contenus sur divers réseaux sociaux et sites Internet, seraient concernés.
https://www.lemonde.fr/pixels/article/2018/12/09/gilets-jaunes-soupcons-de-manipulation-sur-les-reseaux-sociaux_5394890_4408996.html
09/12/2018
Certains experts ont cru déceler des comportements suspects, notamment sur Twitter. Les autorités françaises se penchent sur la question.
economie
Impôts : l’héritage, un sujet tabou en France
alités. Au VIe siècle, la novelle 115 de l’empereur Justinien détaillait quatorze causes d’exhérédation possibles : si l’héritier frappe son auteur, s’il porte atteinte à son honneur, s’il a commis un inceste avec sa mère, et onze autres raisons plus déshonorantes les unes que les autres… L’exhérédation ? En droit des successions, il s’agit de la possibilité pour un futur défunt de déshériter un proche. Tombé en désuétude, le terme a été (re)découvert il y a tout juste un an, au lendemain de la mort de Johnny Hallyday, lorsque la France apprenait, consternée, que l’idole nationale avait décidé, sur la base du droit californien, de déshériter ses deux aînés au profit de ses filles adoptives. Curieuse indignation quand on sait que David et Laura ont touché plus d’argent de leur père que n’accumuleront jamais la majorité des Français au cours de leur vie… C’est un fait, en France, pays de la réserve héréditaire et de l’égalité testamentaire, l’héritage est un sujet sacré qui, depuis quelques années, fait même figure de débat interdit. Christophe Castaner pourrait en témoigner : en septembre, le ministre de l’intérieur, alors délégué général de La République en marche (LRM), a tenté de déminer le terrain en annonçant le lancement d’une « réflexion sans tabou pour une refonte de la fiscalité sur les successions ». Mais la réplique de l’Elysée a fusé, cinglante : « Tant que je serai là, on n’y touchera pas », a rétorqué Emmanuel Macron. Au printemps 2016, celui qui était alors ministre de l’économie avait pourtant plaidé en faveur de cette réforme, déclarant avoir une préférence pour la taxe sur les successions plutôt que pour les impôts de type ISF. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Marc Lambron : « La revue de presse de la mort de Johnny est assurément le meilleur roman du moment » « A l’époque, Macron était poussé par son entourage à augmenter la progressivité des droits de succession pour relancer la mobilité sociale. Mais lorsqu’il a compris à quel point le sujet était inflammable, il a fermé la porte à double tour », explique un des piliers de sa campagne. En juin, dans une note confidentielle à M. Macron, les trois économistes ayant inspiré son programme présidentiel, Jean Pisany-Ferry, Philippe Aghion et Philippe Martin, sont revenus à la charge pour réclamer une hausse de la fiscalité des très grosses successions. L’inégalité au coeur des transmissions parents/enfants. INFOGRAPHIE LE MONDE 82 % des Français jugent l’impôt successoral illégitime Mais les sondages sont ce qu’ils sont, et, en matière politique, ils servent souvent d’aiguillon. Selon une récente étude de l’IFOP, 82 % des Français jugent l’impôt successoral illégitime, soit l’impôt le plus impopulaire de France, devant les taxes sur l’essence !
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/09/impots-le-tabou-de-l-heritage_5394871_3234.html
09/12/2018
Alors que l’on assiste à un retour de la rente, de nombreux économistes invitent le président Macron, qui s’y refuse, à alourdir la taxation des successions, facteur majeur d’inégalités.
livres
Cléopâtre, une femme d’Etat retrouvée par Maurice Sartre
Cléopâtre. Un rêve de puissance, de Maurice Sartre, Tallandier, 350 p., 21,50 €. Cléopâtre (69-30 av. J.-C.). Florence Wojtyczka Reine dans des temps troublés, source de fantasmes à travers les siècles, la dernière souveraine de l’Egypte lagide, née de la conquête d’Alexandre, Cléopâtre VII Théa Philopator (69-30 av. J.-C.) est entourée d’un mythe tenace. Avec une rigueur alerte, Maurice Sartre, spécialiste de Palmyre et de l’Antiquité gréco-romaine, retrouve les traces réelles de ce règne. Il montre comment, dans un bassin méditerranéen où les Romains jouaient depuis longtemps le premier rôle, Cléopâtre s’est battue pour préserver une relative autonomie. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Si le nez de Cléopâtre eût été plus court… Exhumer la « vraie » Cléopâtre suppose la levée de deux obstacles. D’abord, une propagande « raciste », efficace jusqu’à nos jours, répandue par son ennemi Octave, fils adoptif de son amant César, dont les manipulations la poussent au suicide. De Virgile à Lucain, jusqu’à la bande dessinée et au cinéma, on s’entête ainsi à dépeindre cette polyglotte de culture et de langue grecques comme une « Egyptienne », avec le mépris et le soupçon de corruption, de lascivité comme de cruauté qui accompagnent le mot chez les Romains. L’autre écueil tient à un « machisme » tenace, qui peine à accepter l’idée qu’une femme dirige, seule, un Etat. Ses turbulents sujets d’Alexandrie n’ont d’ailleurs guère toléré qu’elle ne soit pas accompagnée d’un homme, que celui-ci se nomme Ptolémée ou Antoine. Rien d’une oie blanche La Cléopâtre de Maurice Sartre, passée au crible des archives, de la numismatique ou de l’épigraphie, n’a pourtant rien d’une oie blanche. Meurtrière de son frère et mari Ptolémée XIV, d’une beauté moins exceptionnelle que le veut la légende, elle ressort de ces pages en femme d’Etat, initiatrice d’une réforme monétaire, réaliste quant à l’inéluctable puissance romaine, mais qui a su porter un des derniers projets d’indépendance face à l’Empire. Lire également cette critique de « Cléopâtre », de Mankiewicz
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/09/cleopatre-une-femme-d-etat-retrouvee-par-maurice-sartre_5394852_3260.html
09/12/2018
Biographie. Dans « Cléopâtre. Un rêve de puissance », l’historien, spécialiste de l’Antiquité gréco-romaine, a retrouvé les traces réelles de la légendaire reine d’Egypte.
economie
Compétitivité des entreprises : le droit successoral en question
Et si le secret du Mittelstand allemand résidait dans le droit successoral ? La question a été soulevée outre-Rhin à l’occasion des élections fédérales de 2017. Car, comme en France, on assiste là-bas au grand retour de l’héritage. Nos voisins ont même donné un nom au phénomène : Erbschaftswelle (la « vague des héritages »), qui représenterait 400 milliards d’euros par an. Sauf qu’en Allemagne, c’est le régime des transmissions d’entreprises qui fait débat. Pour préserver le tissu des puissantes PME familiales, les Allemands ont mis en place une fiscalité très avantageuse pour les héritiers d’actifs professionnels. Mais aujourd’hui, certains responsables politiques, notamment chez les Verts et une partie du SPD, estiment que cet avantage constitue un privilège indu. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Impôts : l’héritage, un sujet tabou en France Une discussion à contre-courant des réflexions françaises sur le sujet. « En France, la difficile transmission des entreprises familiales est en partie due à la fiscalité élevée, et complexe, qui paralyse les héritiers », explique François Hellio, avocat chez CMS Francis Lefebvre. En 2003, s’inspirant du modèle allemand, le pacte Dutreil avait pour objectif de faciliter ces transmissions. « Mais comme toujours, on a mis en place une véritable usine à gaz qui demande énormément d’anticipation pour être bien utilisée », ajoute Me Hellio. Dans le meilleur des cas, un chef d’entreprise français très bien conseillé peut bénéficier d’un taux d’imposition de 6,5 %, contre un taux nul (jusqu’à 26 millions d’euros) en Allemagne. Promouvoir la créativité et la compétence Alors, faut-il alléger la fiscalité des transmissions professionnelles ? En 2003, dans son ouvrage Le Capitalisme d’héritiers (Seuil), l’économiste Thomas Philippon accusait le capitalisme familial à la française de privilégier l’héritage et la reproduction sociale plutôt que de promouvoir la créativité et la compétence. « Mais attention, il faut bien distinguer les entreprises dirigées par des membres de la famille, qui sont globalement moins performantes, des structures à actionnariat familial, dont le taux de survie est plus élevé », précise M. Philippon. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Marc Lambron : « La revue de presse de la mort de Johnny est assurément le meilleur roman du moment » Le problème, c’est qu’en France, on a tendance à mélanger les deux. Le pacte Dutreil est symptomatique : pour bénéficier des allégements fiscaux, un des membres de la famille doit exercer une fonction au sein de l’entreprise. Une obligation d’autant moins justifiée quand on sait la difficulté à trouver des héritiers désireux et compétents pour diriger l’empire familial. En Allemagne, la seule garantie à respecter est de rester au capital et de préserver l’emploi pendant au moins sept ans…
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/09/competitivite-des-entreprises-le-droit-successoral-en-question_5394843_3234.html
09/12/2018
En Allemagne, où la fiscalité est très avantageuse pour les héritiers d’actifs professionnel, le régime des transmissions d’entreprises est mis en cause. Un débat à front renversé avec les réflexions françaises sur le sujet.
international
Migration : à Bruxelles, Marine Le Pen et Steve Bannon dénoncent le « pacte avec le diable »
Steve Bannon, Tom Van Grieken, Marine Le Pen et Radim Fiala , le 8 décembre à Bruxelles. ERIC VIDAL / REUTERS Le Pacte mondial sur les migrations élaboré par les Nations unies est devenu le nouveau totem des droites radicales. Réunis pour un meeting au Parlement régional de Flandre, samedi 8 décembre, à Bruxelles, la présidente du Rassemblement national (ex-FN), Marine Le Pen, l’ancien conseiller du président Donald Trump Steve Bannon et des représentants tchèques et flamands ont dénoncé ce texte qualifié de « suicidaire », qui sera l’un des thèmes clés de la campagne pour les élections européennes de 2019. Invités par le parti Vlaams Belang, Mme Le Pen et ses amis du Mouvement pour l’Europe des nations et des libertés, alliance de partis d’extrême droite, ont salué les pays qui refusent de signer ce texte : les Etats-Unis de Donald Trump, la Hongrie de Viktor Orban, l’Italie de Matteo Salvini, etc. Références aux « gilets jaunes » Emmanuel Macron, partisan de ce « pacte avec le diable ne visant qu’à transformer le monde en un grand squat », est, lui, rangé dans le camp des « immigrationnistes irrépressibles ». Et la présidente du Rassemblement national n’a pas manqué d’établir un lien avec les manifestations des « gilets jaunes » en affirmant qu’en « organisant l’immigration », le pouvoir ne ferait que « réduire le pouvoir d’achat des salariés, dilapider les aides sociales, distribuer de l’argent à la terre entière ». Steve Bannon a totalement annexé les « gilets jaunes » à son projet de destruction de l’Union européenne et d’édification d’un courant national-populiste. « Dans les petits villages, dans les zones rurales de France et dans les rues de Paris, les gilets jaunes sont le même type de personnes que celles qui ont élu Donald Trump, le même type de personnes qui ont voté pour le Brexit », estime le fondateur de The Movement, l’organisation qu’il compte implanter notamment à Bruxelles. Lire aussi Crise politique ouverte en Belgique sur le pacte pour les migrations de l’ONU Des « convergences » à venir Un projet qui divise déjà l’extrême droite, certains craignant l’interventionnisme de cet allié américain. Au début octobre, Mme Le Pen affirmait avoir « repositionné le débat » après une rencontre avec M. Bannon : la fondation n’aurait pas vocation à diriger ou à structurer son courant politique. Le prochain objectif des participants à la réunion de Bruxelles sera d’assurer « l’alternance » en Europe. L’alliance des droites radicales qui précédera le scrutin du 26 mai sera suivie de « convergences », annonce la dirigeante du Rassemblement national. Le front des « vrais Européens » pourrait, selon elle, être élargi à des membres de l’actuel groupe des Conservateurs et réformistes européens (ECR), menacé de disparition en raison du Brexit. ECR rassemble actuellement 71 conservateurs et nationalistes britanniques, polonais, flamands ou nordiques.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/09/migration-marine-le-pen-et-steve-bannon-denoncent-a-bruxelles-le-pacte-avec-le-diable_5394839_3210.html
09/12/2018
La présidente du Rassemblement national appelle Macron à prendre en compte « la souffrance » des « gilets jaunes » plutôt qu’à adopter, lundi, le pacte de l’ONU.
livres
« La Voix du peuple », de Michel Hébert : parlementer, une idée médiévale
La Voix du peuple. Une histoire des assemblées au Moyen Age, de Michel Hébert, PUF, 306 p., 22 €. Le Parlement de Bretagne, à Rennes (XVIIe siècle). Christophe Lehenaff/Photononstop « La République, c’est moi ! », tonnait Jean-Luc Mélenchon lors de la perquisition de son domicile et des locaux de son parti, le 16 octobre. Face aux fonctionnaires de police et de justice incarnant l’Etat, le leader de La France insoumise se prévalait d’une légitimité supérieure : sa qualité de représentant du peuple. Souvent « le peuple a bon dos », lance le médiéviste québécois Michel Hébert (né en 1948) en tête de son nouvel ouvrage, La Voix du peuple. Mais, poursuit-il immédiatement, pas de démocratie sans représentants, voire pas de peuple tout court, puisque la représentation est la condition même de son existence comme sujet politique. Un vaste « moment parlementaire » européen aux XIVe et XVe siècles Pourtant, représentation populaire et démocratie ne sont pas toujours allées de pair : le peuple eut ses porte-parole officiels bien avant l’avènement de l’idéal démocratique sous les révolutions américaine et française. Sans taire les différences de rythme et les spécificités régionales, Michel Hébert identifie en effet un vaste « moment parlementaire » européen aux XIVe et XVe siècles. C’est un peu partout la grande époque des « parlements », des « cortès » en Espagne, des « assemblées d’Etats » en France ou des « diètes » en Allemagne, qui « scandent le rythme de la vie politique des plus grands Etats monarchiques [et] des plus petites principautés laïques ou ecclésiastiques ». Nées de la nécessité d’obtenir un consentement minimal à la nouveauté que constituait, au XIVe siècle, la levée de l’impôt par l’Etat, ces assemblées furent de véritables laboratoires des techniques de représentation, testant par exemple tour à tour les mandats libre ou impératif. Des expérimentations politiques dont le succès, en Angleterre notamment, ou l’échec, en France, quelques siècles plus tard, face à l’absolutisme royal, n’avaient rien d’inéluctable, à rebours de ce qu’affirmait l’historiographie classique. Au centre des échanges, la question de la chose publique S’il explore la scénographie extrêmement ritualisée de ces assemblées (choix des lieux, disposition des sièges, mode de convocation des représentants), Michel Hébert fait malheureusement l’impasse sur la sociologie exacte des représentants du peuple, dont on comprend seulement qu’ils n’appartiennent pas au « petit » peuple. Le médiéviste préfère concentrer son propos sur la spécificité du dialogue qui se noue entre des princes médiévaux ne disposant pas encore d’un pouvoir absolu et de toutes jeunes sociétés politiques qui, de leur côté, ne leur disputent jamais radicalement leurs compétences. Un « moment parlementaire » qui n’est ni démocratique ni révolutionnaire, en somme, mais qui met au centre des échanges entre gouvernants et gouvernés la question de la res publica, de la chose publique, qui devient alors, enthéorie, l’affaire de tous.
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/09/la-voix-du-peuple-de-michel-hebert-parlementer-une-idee-medievale_5394836_3260.html
09/12/2018
L’historien analyse les expériences de représentation populaire menées aux XIVe et XVe siècles en France, en Espagne ou en Allemagne.
idees
Photo de secours
Julien Muguet, photojournaliste, a réalisé des captures d’écran des occurrences du camion rouge des pompiers, sur Twitter, de 2016 à 2018. CAPTURE D'ECRAN / TWITTER Grenoble : une voiture de police ­percute une passante ». « Juan-les-Pins : le mouvement de panique reste inexpliqué ». « La foudre frappe le sol et peut blesser en faisant des bonds »… Les titres changent, l’image reste : un camion de pompiers qui semble filer à toute allure, gyrophares allumés, vers une urgence, qu’on suppose être celle que le titre décrit. Pourtant il n’en est rien. Pour preuve, cette même photo a illustré de très nombreux articles en ligne. Julien Muguet, photojournaliste indépendant, a ainsi recensé sur Twitter, de 2016 à 2018, près de 80 occurrences du fameux camion rouge : « Je le voyais apparaître constamment dans mon flux, j’ai fait des captures d’écran pour en garder une trace. » « Je le voyais apparaître constamment dans mon flux, j’ai fait des captures d’écran pour en garder une trace. » CAPTURE D'ECRAN / TWITTER Pourquoi ces reprises ? C’est simple : « Un article sans image n’a aucune chance de générer du trafic sur les réseaux sociaux. Alors on met une photo, même si elle n’apporte rien », déplore la productrice Dorothée Barba dans une chronique qu’elle consacre aux clichés associés aux reportages sur des bébés nés sans bras, diffusée sur France Inter, le 1er novembre. « Elle fait partie de ce que l’on appelle dans les salles de rédaction les « images d’illustration » ». CAPTURE D'ECRAN / TWITTER La photo du camion de pompiers est l’œuvre de Philippe Huguen, un photojournaliste de l’Agence France-Presse (AFP). Prise dans une rue de Roubaix, le 16 janvier 2015, elle fait partie de ce que l’on appelle dans les salles de rédaction les « images d’illustration ». On parle aussi d’images « prétextes ». Pré-texte. Comme si le jargon journalistique lui-même reconnaissait la fragile nature de ces images, qui arrivent avant le texte qu’elles accompagnent, et illustrent. « La photo d’illustration fait partie de notre mission », explique-t-on à l’AFP. Lorsque des images des faits relatés ne sont pas visibles, ce genre d’image « pallie le manque ». « Lorsque des images des faits relatés ne sont pas visibles, ce genre d’image « pallie le manque ». » CAPTURE D'ECRAN / TWITTER Du côté des sites d’information en ligne, elles sont perçues comme indispensables. Le phénomène est notamment dû à l’omniprésence de l’image sur les réseaux sociaux. Twitter, par exemple, préconise de toujours poster un lien avec un visuel, le post en question ayant alors « trois fois » plus de chances de générer un « engagement » (susciter une réaction : clic, Retweet, « like » ou commentaire de la part d’un internaute). Le réseau social a même introduit, il y a plusieurs années, les « cards » : l’intégration automatique d’une image dans un Tweet qui contient un lien vers un article. Cet automatisme trouve évidemment ses équivalents sur d’autres réseaux, comme Facebook, ou encore sur l’application de messagerie Whats­App.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/09/photo-de-secours_5394833_3232.html
09/12/2018
Sur les sites d’information en ligne, les illustrations sont omniprésentes – y compris quand ces « images prétextes » n’ont aucun rapport avec l’article. Cette pratique destinée à capter l’attention du lecteur fait perdre à l’image son sens initial : son rôle est de délivrer une information, pas d’« illustrer » un événement.
afrique
En Algérie, la cérémonie de béatification, « c’est aussi pour nos morts »
Chrétiens et musulmans assistent à une cérémonie de béatification de moines tués pendant la guerre civile, à Oran (Algérie), le 8 décembre. ABDELAZIZ BOUMZAR / REUTERS Sur l’esplanade de la chapelle Notre-Dame de Santa Cruz, baptisée la veille « place du Vivre-Ensemble », près de 1 200 personnes sont assises sous le ciel bleu. Bâti en haut d’une colline, le site domine la Méditerranée et une statue de la Vierge surplombe le cloître. Un coffre en bois sculpté trône au milieu de l’estrade et fera office d’autel. L’évêque d’Oran, Jean-Paul Vesco, demande une minute de silence « en hommage au peuple algérien et à ses dirigeants qui ont réussi à retrouver le chemin de la paix malgré des blessures encore si douloureuses ». Ce samedi 8 décembre est un moment exceptionnel. Une première : « dix-neuf martyrs d’Algérie », des religieux et des religieuses catholiques – quinze Français, deux Espagnoles, un Belge et une Maltaise – vont être béatifiés en terre musulmane. Tous, dont l’évêque d’Oran, Pierre Claverie, et les sept moines du monastère de Tibéhirine, ont été assassinés entre 1994 et 1996, en pleine période de terrorisme en Algérie. Sur l’estrade, l’envoyé spécial du Vatican, le cardinal Giovanni Angelo Becciu, lit un message du pape François remerciant les autorités algériennes d’avoir « facilité cette célébration », avant de prononcer le décret de béatification. « Que Monseigneur Pierre Claverie et ses dix-huit compagnons, fidèles messagers de l’Evangile, humbles artisans de paix soient dès maintenant appelés bienheureux », déclare le cardinal tandis qu’une banderole avec les portraits des religieux est déroulée et accueillie par des youyous et des applaudissements. Lire aussi Moines de Tibéhirine : de nouvelles expertises renforcent les doutes sur la date de la mort Prières communes Dans l’assistance, des imams sont présents aux côtés des représentants de l’Eglise catholique et des familles des religieux disparus. Côté politique, le ministre algérien des affaires religieuses, Mohamed Aïssa, est là, de même que Jean-Baptiste Lemoyne, le secrétaire d’Etat français aux affaires étrangères. Ces célébrations sont « autant de symboles qui parlent au nom de l’Algérie au monde entier », a souligné M. Aïssa à l’agence de presse APS. Les responsables catholiques avaient conscience dès le début du défi représenté par une telle cérémonie. L’affaire de la mort des moines de Tibéhirine, pour laquelle une enquête est toujours ouverte en France, demeure un point de tension entre Paris et Alger. En outre, les religieux béatifiés n’ont pas été les premières victimes de la décennie noire. Le bilan de la guerre civile des années 1990 s’élève à 200 000 morts, principalement musulmans. Pour éviter ces écueils, l’événement a fait en sorte de réunir les différentes sensibilités.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/09/en-algerie-la-ceremonie-de-beatification-c-est-aussi-pour-nos-morts_5394821_3212.html
09/12/2018
Samedi à Oran, la béatification des dix-neuf religieux catholiques tués dans les années 1990, dont les moines de Tibéhirine, a réuni chrétiens et musulmans.
livres
Mona Ozouf sur George Eliot, en historienne et en lectrice
L’Autre George. A la rencontre de George Eliot, de Mona Ozouf, Gallimard, 256 p., 20 €. L’écrivaine anglaise George Eliot (1819-1880) vers 1850, d’après un ­portrait de François d’Albert-Durade. WORLS HISTORY ARCHIVE / ABACA « La première fois que j’ai lu le nom de celle que je prenais pour un homme (…) »… Dans une exquise introduction introspective à son nouvel essai, L’Autre George, Mona Ozouf raconte ses découvertes successives de George Eliot (1819-1880) : lorsqu’elle l’a lue, puis aimée, puis comprise. A trois reprises en effet, cette grande dame des lettres britanniques, restée peu connue en France, a traversé le cours de sa jeune existence. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Colloque. Mona Ozouf en majesté D’abord apparaît un livre dans la bibliothèque de son père, étrangement déplacé, alors que ce meuble est essentiellement voué à célébrer la Bretagne. Que peut bien y faire Daniel Deronda (1876) ? Le titre est suffisamment insolite pour attirer la petite fille qui, à 10 ans, tente de le lire sans y saisir grand-chose. George Eliot revient quatre ans plus tard, quand la professeure de français de Mona, ­Renée Guilloux, la femme de l’écrivain Louis Guilloux (1899-1980), l’arme de ce conseil de lecture, et de cette maxime : des livres pour mieux vivre. Eliot, athée religieuse, conservatrice de progrès, rationaliste éprise de mystère Enfin, à travers Henry James (1843-1916), assidûment fréquenté à partir de ses 20 ans, Mona Ozouf comprend définitivement l’importance de George Eliot. James, subjugué par le charme d’une conversation qui l’a presque rendu amoureux de cette femme « délicieusement hideuse », éclaire la jeune Bretonne, laquelle lance à son tour des oxymores lorsque, aujourd’hui, elle évoque Eliot : une athée religieuse, une conservatrice de progrès, une rationaliste éprise de mystère. George Eliot, née Mary Ann Evans, choisit son pseudonyme masculin quand elle signe ses premières fictions, à 36 ans, afin d’être vraiment lue. Sept grands romans forment le massif de son œuvre, dont Adam Bede (1859), Le Moulin sur la Floss (1860), Middlemarch (1871-1872)… Mais elle est également critique littéraire, essayiste, diariste, épistolière. Au total, une vingtaine de gros volumes, devenus des classiques anglais. Une passion de toujours Si Mona Ozouf a choisi d’y revenir, ou plutôt de s’arrêter enfin sur une passion de toujours, c’est que l’historienne retrouve dans ces livres une question familière : qu’ont de commun le roman et l’histoire ? La vie même d’Eliot illustre ce rapport. Après une crise mystique adolescente, elle perd la foi et ose l’affirmer ; aussi méfiante à l’égard de la révolution que de la tentation réactionnaire, elle aime les traditions et croit au progrès ; ni droite ni gauche, mais femme : elle rompt avec sa famille et avec la bonne société victorienne pour vivre auprès d’un homme marié.
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/09/mona-ozouf-sur-george-eliot-en-historienne-et-en-lectrice_5394806_3260.html
09/12/2018
Avec « L’Autre George », l’historienne plonge dans l’œuvre de la romancière anglaise (1819-1880), qui se révèle une perspicace témoin de son temps.
idees
Jeanne Gang, l’une des seules femmes au monde à construire des tours
JEAN-MARC PAU Dans un milieu où la domination masculine règne quasiment sans partage, Jeanne Gang (prononcer « Giny » Gang) est un phénomène. A la tête de Studio Gang, créé en 1997, une agence de cent personnes réparties en trois bureaux – l’un à Chicago, l’autre à New York, le troisième à San Francisco –, cette Américaine de 54 ans est, depuis 2010, date de l’inauguration de son Aqua Tower, à Chicago (Illinois), l’une des seules femmes du monde à construire des tours. Inflammabilité du sujet Il y eut bien Zaha Hadid avant elle, mais l’architecte irakienne, morte en 2016, perpétuait, dans son agence, la structure de pouvoir – au moins dans le ­domaine salarial – du système qu’elle avait infiltré jusqu’à devenir, en 2004, la première femme lauréate du prix Pritzker 2004. Un outil récemment mis à disposition des entreprises par une agence gouvernementale britannique pour mesurer les écarts de rémunération hommes-femmes (le « gender pay gap »), a en effet révélé que la différence était de 18,4 % en moyenne dans les 14 plus grandes agences d’architecture du Royaume-Uni, soit neuf points de plus que la moyenne nationale, tous secteurs confondus. Chez Zaha Hadid, il atteignait 19,6 %… Curieuse de savoir ce qu’il en était chez elle, Jeanne Gang s’est procuré l’outil : dans son agence, l’écart était de 7 %. Surprise par ce ­chiffre qu’elle imaginait plus faible, elle a décidé de combler le fossé et de rendre son action publique. Au lendemain de l’affaire Weinstein, alors qu’une liste de « shitty men in architecture » (« sales types dans l’architecture », accusés de harcèlement ou de violence envers les femmes) commençait à circuler, que Richard Meier, prix Pritzker 1984, démissionnait de sa propre agence sous le feu d’accusations de harcèlement sexuel, les architectes américains avaient globalement opposé aux revendications nées du mouvement #metoo une inertie assumée, arguant de l’inflammabilité du sujet pour justifier une parfaite inaction. Ethique pragmatique En leur enjoignant, par voie de presse, de ­suivre son exemple, Jeanne Gang mettait leur bonne foi au défi. « Dans ce contexte très tendu, c’était une manière de dire : “Hé, les gars, voilà quelque chose de simple que vous pouvez faire, et qui serait un bel effort pour ­aller vers l’égalité. Ce ne sont que des chiffres, il suffit de vous procurer l’outil et de faire le calcul !” Dans les agences où il y a très peu de femmes – c’est-à-dire la plupart –, ce devrait être beaucoup plus indolore que chez moi, où les femmes représentent près de la moitié des effectifs. Ce qu’il me reste à faire maintenant, c’est de trouver un moyen de vérifier qu’ils ont réagi ! »
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/09/jeanne-gang-architecte-responsable_5394798_3232.html
09/12/2018
Exigeante sur la qualité environnementale de ses projets, l’architecte américaine, à la tête d’une agence de 100 personnes, lutte aussi contre les inégalités hommes-femmes.
livres
Maryse Condé : « La négritude de Césaire n’est qu’un beau rêve »
Maryse Condé à Paris, le 19 mars 2016. ULF ANDERSEN / AURIMAGES Née en Guadeloupe en 1937, l’écrivaine Maryse Condé doit recevoir, dimanche 9 décembre, à Stockholm le prix Nobel alternatif de littérature, une récompense décernée par une nouvelle académie composée d’intellectuels suédois. Une consécration internationale pour l’auteure de Ségou (Tome 1, Laffont, 1984 ; tome 2, Laffont, 1985) qui fut la première présidente du Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage et enseigna pendant vingt ans aux Etats-Unis. Je ne serais pas arrivée là si… Vous me permettez de tordre un peu la formule ? Et même de l’inverser ? Car moi, je suis arrivée là… bien que ! Et c’est ce « bien que » qu’il m’importe de souligner. C’est ce « bien que » qui m’a paralysée pendant près de trente ans. Vous êtes donc arrivée là, Maryse Condé, lauréate 2018 du prix Nobel alternatif de littérature, bien que… Bien qu’on m’ait affirmé, quand j’étais petite fille, que les gens comme moi ne pouvaient pas devenir écrivains. J’avais 12 ans à Pointe-à-Pitre quand une amie de ma mère a voulu me faire un cadeau original. Elle savait que j’avais lu tout ce qui pouvait me tomber sous la main : Balzac, Maupassant, Flaubert… Alors elle a opté pour un roman d’Emily Brontë : Les Hauts de Hurlevent. J’ai d’abord pris l’ouvrage sans enthousiasme, mais dès que j’ai ouvert les premières pages, j’ai été transportée. Ce livre était extraordinaire. Par quel miracle cette jeune Anglaise, fille de clergyman, qui vivait sur les landes balayées par le vent, pouvait-elle être si proche de moi, petite Antillaise qui vivait au bord d’une mer chaude ? Nous étions sœurs ! J’en étais bouleversée. Dès le lendemain, j’ai couru remercier la dame. Et je lui ai dit : « Un jour, moi aussi j’écrirai des livres. Je serai aussi connue et je ferai des livres aussi beaux que ceux d’Emily Brontë. » Elle m’a dévisagée avec une sorte d’étonnement outré : « Mais tu es folle ! Les gens comme nous n’écrivent pas ! » « Ecrire était l’affaire des autres. Des Blancs. Des hommes. Des habitants de grands pays. La voie était barrée » Que signifiait « comme nous » ? Les femmes. Les Noirs. Les gens originaires d’un petit pays comme la Guadeloupe. Peu importe. Sa réaction m’a anéantie. Je me suis dit que le monde et le métier auxquels je rêvais m’étaient interdits. Que c’était une mauvaise voie. Que c’était même un sacrilège. Et qu’il me faudrait taire toute velléité d’écriture pour être conforme à ce qu’on attendait de moi. C’est pour cela que j’inverse votre phrase. S’il n’y avait pas eu cette réflexion, je n’aurais pas attendu d’avoir 42 ans pour publier mon premier livre. Vous vous rendez compte ?
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/09/maryse-conde-attention-a-ne-pas-prendre-la-place-des-maitres-et-repeter-leurs-travers_5394777_3260.html
09/12/2018
L’écrivaine doit recevoir, dimanche, à Stockholm, le prix Nobel alternatif de littérature, une récompense décernée par une nouvelle académie composée d’intellectuels suédois.
m-le-mag
A la frontière suisse, un cimetière juif, point de passage vers la liberté
mondiale. Le cimetière juif de Veyrier, en Suisse. DAVID WAGNIERES POUR M LE MAGAZINE DU MONDE Ce 19 octobre 1981, c’est jour d’obsèques au cimetière israélite de Veyrier (Suisse), près de Genève. Un petit groupe accompagne le cercueil. Seule une imposante couronne de fleurs ­ tricolore, restée à la grille, conformément à la tradition juive, révèle l’importance du défunt. Elle a été envoyée par l’Elysée. « Depuis Proust, je crois qu’il n’y a pas eu d’écrivain de ce niveau, avait confié, en 1977, François Mitterrand. C’est vers lui que je retourne quand je veux m’évader pour retrouver les choses importantes de la vie. » Albert Cohen et son « costume national » Lui, c’est Albert Cohen, l’auteur de Belle du Seigneur. « Il y avait quelque chose de ­troublant entre ce peu de monde pour l’accompagner et l’hommage de la République française au plus haut niveau », se souvient André ­Klopmann, fonctionnaire et écrivain, comme son mentor, rencontré lorsqu’il était un tout jeune auteur et Cohen, une gloire ­littéraire vieillissante. Le cimetière de Veyrier, seul cimetière au monde à être à cheval entre deux pays, le France et la Suisse. DAVID WAGNIERES POUR M LE MAGAZINE DU MONDE A la fin de sa vie, l’écrivain recevait au dernier étage d’un appartement cossu mais dépourvu de luxe de l’avenue Krieg, à Genève, dans ce qu’il appelait son « costume national » : un peignoir en soie bordeaux à pois, celui-là même dans lequel il accueillit Bernard Pivot et son équipe d’« Apostrophes », en 1977, lors d’une émission enregistrée à son domicile. Son visage porte alors les stigmates de la maladie – dépression, anorexie – qui l’a tenu à l’écart de la vie publique ces dernières années. « Cohen ne fréquentait pas particulièrement la société juive locale et la Genève internationale dont il fut un amoureux critique », analyse André Klopmann, depuis son élégant bureau de la vieille ville de Genève. Le retentissement de l’entretien télévisé fut tel qu’il permit à plusieurs générations de (re)découvrir les livres d’Albert Cohen, et aux journalistes de s’intéresser à nouveau à ­l’auteur, alors âgé de 83 ans. La tombe d’Albert Cohen. Pas de fleurs, mais des cailloux, comme il est d’usage dans la tradition juive. DAVID WAGNIERES POUR M LE MAGAZINE DU MONDE Aujourd’hui, à l’entrée du cimetière, un écran plat tactile permet de retrouver facilement le lieu où il est enterré. Le nombre de cailloux déposés sur sa tombe, symboles notamment des traces laissées par le disparu, témoigne de sa popularité. Quelques rangs plus loin reposent le roi du cigare Zino ­Davidoff et le ­banquier Edouard Stern, tué en 2005 par sa maîtresse et découvert mort dans son appartement genevois, revêtu d’une combinaison en latex. Une singularité géographique Ouvert en 1920, le cimetière de Veyrier rassemble, comme n’importe quel autre, des hommes aux destins éclectiques. Sa particularité est ailleurs, matérialisée par deux bornes.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/09/a-la-frontiere-suisse-un-cimetiere-juif-point-de-passage-vers-la-liberte_5394770_4500055.html
09/12/2018
Albert Cohen, l’auteur de « Belle du Seigneur », y est enterré. Le cimetière de Veyrier fut traversé par des centaines de juifs fuyant la France occupée pendant la seconde guerre mondiale.
m-perso
Coupez le poireau en quatre !
« Tout ce vert est précieux et utile, c’est là où se concentrent les saveurs affirmées du légume. » CHANGKI-CHUNG POUR LE MONDE La nature est un temple où de vivants piliers se dressent dans les champs sagement alignés. Humbles, rustiques, résistants, ces piquets verts au cœur tendre nourrissent l’humanité à peu de frais depuis l’Antiquité, du moins dans les zones tempérées. Vaillants et discrets, jamais oubliés, ces compagnons de l’hiver n’ont pas bénéficié du retour en grâce des légumes « retrouvés » il y a une dizaine d’années (panais, topinambours, cerfeuil et persil tubéreux…). Sur les étals frisquets, ils ne peuvent guère se pavaner en smala colorée (on laisse ça aux courges) ou en inflorescences pommées (c’est si chou). Tout juste peuvent-ils se serrer les flancs avec leurs cousins de la famille des alliacées (oignon, ail, échalote, ciboulette), avec lesquels ils partagent une ambitieuse et incontestable destinée aromatique. « J’vous coupe le vert ? » Les poireaux, donc, sont ces plantes potagères au bulbe réduit et au fût blanc élancé, qui se prolonge par des feuilles engainantes d’un vert soutenu tirant parfois sur le bleuté. Les radicelles situées à la racine leur donnent un look hirsute pas si sage – et permettent, avec la fermeté du feuillage, d’en évaluer la fraîcheur. C’est une faute de goût que de ne pas acheter le poireau entier. Le « j’vous coupe le vert ? » proposé par les marchands de primeurs a le don de me hérisser le poil (je n’ose dire la radicelle, même si l’hiver…). Jamais de la vie, je garde tout ! D’abord, pour éviter que le parfum alliacé et légèrement soufré du poireau cru ne m’accompagne avant que je le cuisine ; mais aussi parce que tout ce vert est précieux et utile, où se concentrent les saveurs affirmées du légume. La découpe au couteau est aisée, laissant s’échapper la riche palette de parfums de cette grande tige raffinée que des snobinards mal inspirés ont un jour baptisée « asperge du pauvre ». Il existe des poireaux herculéens (géant d’hiver, monstrueux de Carentan…), mais « le standard recherché, c’est un calibre moyen – 20-30 mm –, un fût très droit avec une belle longueur de blanc – 18 cm –, et une franche délimitation entre le blanc et le vert », explique Philippe ­Lecler, producteur à Réville, dans le Val de Saire (Manche). Pic de consommation au cœur de l’hiver Dans cette région normande leader de la production nationale (40 000 tonnes par an), on pratique le buttage – formation d’une butte de terre pour favoriser la croissance du blanc à l’abri de la lumière – afin d’obtenir de beaux spécimens dont la récolte s’échelonne d’août à mai, avec un pic de consommation au cœur de l’hiver.
https://www.lemonde.fr/m-perso/article/2018/12/09/coupez-le-poireau-en-quatre_5394756_4497916.html
09/12/2018
Douceur sucrée du blanc, saveur corsée du vert, croquant ou tendre, ce légume rustique et humble autorise toutes les fantaisies.
argent
« Le choix du régime matrimonial d’une nouvelle union ne doit pas être laissé au hasard »
Il existe plus de 720 000 familles recomposées en France Aflo Foto / Photononstop / Aflo Foto / Photononstop Question à un expert Quel régime matrimonial pour une deuxième union ? Si vous faites partie des quelque 720 000 familles recomposées de France, le choix du régime matrimonial d’une nouvelle union ne devra pas être laissé au hasard. En l’absence d’enfant, si vous souhaitez transmettre intégralement votre patrimoine à votre conjoint, vous pouvez opter pour le régime de la communauté avec attribution intégrale, la mise en place d’un régime communautaire complété d’une donation au dernier vivant ou d’un pacte civil de solidarité (PACS) avec un testament. Lire aussi Comment transmettre son patrimoine dans une famille recomposée En présence d’enfants, si vous souhaitez leur transmettre l’intégralité de votre patrimoine sans protéger votre conjoint, il n’est pas nécessaire de vous marier. Vous pouvez également opter pour le régime de la séparation de biens et priver par testament votre conjoint de son droit au ¼ en pleine propriété ou de 100 % en usufruit de votre patrimoine. Régime communautaire Si vous désirez protéger votre nouveau conjoint, envisagez la mise en place d’un régime communautaire assorti d’une donation au dernier vivant lui permettant de choisir l’option la plus favorable au moment du décès. Toutefois, en présence d’enfants d’une première union, vous prenez le risque de les désavantager, car ils ne seront pas héritiers de la part transmise à ce dernier. Enfin, si vous souhaitez maintenir l’équité entre tous vos enfants tout en protégeant votre nouveau conjoint, songez à des dispositions complémentaires, comme la mise en place d’une société civile, de contrats d’assurance vie, voire anticipez la transmission de votre vivant (adoption, legs, etc.).
https://www.lemonde.fr/argent/article/2018/12/09/le-choix-du-regime-matrimonial-d-une-nouvelle-union-ne-doit-pas-etre-laisse-au-hasard_5394742_1657007.html
09/12/2018
Il n’est pas toujours nécessaire de se marier pour protéger son conjoint estime Valérie Bentz, responsable des études patrimoniales à l’UFF.
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Président Trump, an II : un étranger dans la cathédrale
Lors des obsèques d’Etat de George H. W. Bush à Washington, le 5 décembre. Evan Vucci / AP L’hommage à l’ancien président George Herbert Walker Bush était déjà bien avancé dans la cathédrale nationale de Washington, mercredi 5 décembre, lorsqu’un long vieil homme s’est avancé à pas lents. Parvenu au pupitre installé devant le cercueil recouvert de la bannière étoilée, il a regardé l’assistance et lancé : « Détendez-vous, George ne m’a donné que dix minutes. » Une nation dit beaucoup d’elle-même dans sa manière d’enterrer ses grands hommes. L’Amérique aime parsemer ses éloges funèbres de traits d’humour qui lui permettent de reprendre son souffle avant de céder à l’émotion et à la gravité. La cérémonie avait été réglée par le disparu. Ce dernier avait choisi avant de s’éteindre qui parlerait de lui. Après avoir pris connaissance du discours que son biographe prononcerait, il avait fait remarquer, comme pour le regretter, qu’il parlait beaucoup de lui. Le long vieil homme, Alan Simpson, 87 ans, sénateur républicain du XXe siècle et du Wyoming, a fait le boulot lorsque son tour est venu. Au premier rang se tenait un homme muré dans la défiance, silencieux lors des chants religieux, lèvres cousues pendant le credo : le président des Etats-Unis. Donald Trump, qui voudrait tant être aimé de tous, a été condamné ce jour-là à entendre les louanges adressées à un autre que lui et pour lequel il n’avait guère de considération. A « un homme imparfait » qui avait laissé « une nation meilleure ». Elles étaient d’autant plus cruelles pour son ego qu’elles sonnaient vrai. Article réservé à nos abonnés Lire aussi George H. W. Bush, ancien président des Etats-Unis, est mort Alan Simpson a piqueté les siennes de réflexions qui ne mentionnaient pas de destinataire, mais qui sont pourtant arrivées aux pieds du président. Ironiques lorsqu’il a estimé que ceux empruntent aujourd’hui à Washington « la route de l’humilité », arpentée naguère avec régularité par le disparu, « ne risquent pas les embouteillages ». Graves quand il a mis en garde contre « la haine qui corrompt ce qui la contient » et qui était restée étrangère à George H. W. Bush. Difficile de s’associer à l’hommage d’une nation Donald Trump avait pris place dans la cathédrale aux côtés des anciens présidents, au début de la cérémonie, dans une tension palpable. Il avait limité ses salutations, limitées au strict nécessaire, au couple Obama, ses voisins immédiats, ignorant ostensiblement Bill Clinton pendant que l’épouse de ce dernier, Hillary, évitait son regard. Lorsque George W. Bush, premier ancien président de l’histoire des Etats-Unis à prononcer l’éloge d’un père également ancien président, est arrivé à son tour derrière la dépouille du disparu, il a salué au contraire avec chaleur les Trump, les Obama, les Clinton et les Carter. Sans oublier de glisser discrètement à Michelle Obama une friandise.
https://www.lemonde.fr/chroniques-de-la-presidence-trump/article/2018/12/09/president-trump-an-ii-un-etranger-dans-la-cathedrale_5394739_5077160.html
09/12/2018
Le président et quatre de ses prédécesseurs à la Maison Blanche ont assisté ensemble, mercredi, aux obsèques d’Etat de George H. W. Bush, dans une tension palpable.
livres
Pierre Laval : destin de l’anti-de Gaulle absolu
Pierre Laval. Un mystère français, de Renaud Meltz, Perrin, 1 228 p., 35 €. Le collaborateur Pierre Laval (1883-1945). Florence Wojtyczka Dans l’imaginaire national, Pierre Laval (1883-1945) incarne le pire de la collaboration, même si la figure de cet ancien socialiste, orateur pacifiste enflammé pendant la première guerre mondiale, gosse de pauvre et pur produit de la méritocratie républicaine devenu riche notable, incontournable pilier des combinaisons politiciennes d’une IIIe République à laquelle il donna le coup de grâce, est aujourd’hui en bonne partie oubliée. De cette personnalité politique de premier plan de l’entre-deux-guerres, devenu chef du gouvernement du régime de Vichy (1942-1944), il ne reste finalement que l’image d’un homme vautré dans les compromissions avec l’occupant nazi, que Le Canard enchaîné, lors de son procès de 1945, achevé devant un peloton d’exécution, croquait toujours enveloppé d’un nuage de mouches. Il était le traître par excellence, celui qui publiquement avait lancé, en 1942 : « Je souhaite la victoire de l’Allemagne. » Un politicard douteux « Pétain s’est acquis des adeptes, des admirateurs, des fidélités dans l’extrême droite monarchiste et religieuse », note l’historien Renaud Meltz, qui relève que Laval, en revanche, « n’a qu’une postérité négative et répulsive ». C’est ce mystère qu’il sonde dans une biographie presque trop riche, et magnifiquement écrite. Laval, comme le Maréchal, se défendait en disant avoir voulu éviter le pire et tout fait « pour ne pas livrer la France à un Gauleiter ou à des aventuriers ». Mais pour Pétain, qui le haïssait, comme pour les fanatiques de l’alliance avec l’Allemagne nazie, il resta toujours un politicard douteux aux amitiés franc-maçonnes, que la presse collabo la plus ultra accusait, pour son visage lippu et basané, d’avoir des origines juive ou tzigane. Raconter Pierre Laval, c’est raconter la médiocrité du mal. La lâcheté d’un homme qui veut d’abord la paix, comme la majorité des Français de l’époque, mais dérive au point d’accepter, en son nom, la pire violence. Il incarne aussi l’aveuglement d’une France sortie exsangue de la première guerre mondiale avec l’illusion d’en être le grand vainqueur. « Ecrire la vie de Laval, c’est suivre la pente d’un pays qui rêve de retraite hors de l’histoire », écrit le biographe, pour qui son personnage « reste une espèce de somnambule » naviguant au gré des vents dominants. C’est ­l’anti-de Gaulle absolu. L’idiot utile d’Hitler
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/09/pierre-laval-destin-de-l-anti-de-gaulle-absolu_5394736_3260.html
09/12/2018
Biographie. Avec « Pierre Laval. Un mystère français », Renaud Meltz sonde, dans une très riche biographie, la trajectoire de ce traître par excellence (1883-1945).
societe
« Gilets jaunes » : à Paris, magasins fermés et touristes désorientés
Des boutiques dont les vitrines ont été protégées par des panneaux en bois, le 8 décembre à Paris STEPHANE MAHE / REUTERS N’était ce petit vent froid, la rue de Turenne aurait des airs de mois d’août, ce 8 décembre. En fin de matinée, la plupart des commerçants du 3e arrondissement de Paris n’ont pas ouvert leurs boutiques. Mieux, ils se sont barricadés comme ils ont pu. Ceux qui disposent d’un rideau métallique l’ont baissé, ceux qui n’en ont pas ont improvisé des caches taillés dans des panneaux de contreplaqué. Parfois, ils ont simplement dissimulé l’intérieur de leur local grâce à un store, voire à des bandes de papier kraft ou vidé les présentoirs. Peut-être un peu gêné de lâcher ses clients à trois semaines de Noël, un magasin de cheminées design indique : « La boutique est fermée ce jour pour cause de manifestation. Au plaisir. » Plus loin, par ruse peut-être, un commerçant a placardé sur sa devanture complètement sèche un grand écriteau « Peinture fraîche ». A l’angle de la rue de Saintonge, le magasin de chaussures a timidement ouvert à 10 heures, puis refermé faute de clients. Il faut dire qu’il n’y a pas foule, même si les bars sont ouverts et les supérettes pleines de monde, il faut bien se nourrir. Les rares passants se déplacent en silence dans cet étrange décor de couvre-feu, sauf deux Américaines qui parlent fort en faisant leur jogging. Vers l’angle de la rue Saint-Gilles, le pharmacien est nerveux. Lui n’a pas de rideau et surtout, il ne voit rien de ce qui se passe dehors quand il est derrière son comptoir. Du coup, il vient à la porte dès qu’il le peut. Exactement comme les serveuses de l’Hippopotamus, place de la République, qui sortent du restaurant pour observer un début d’agitation au pied de la statue. Pas moyen de faire autrement, puisque l’enseigne a entièrement obstrué sa devanture grâce à des écrans en aggloméré. « Notre restaurant reste ouvert », informe une feuille blanche épinglée sur le bois, pour ne pas faire mentir les lettres inscrites plus haut : « Service 7/7 ». En avançant un peu, on entrevoit des gens attablés dans la pénombre. Feuilles mortes et magasins clos Ceux-là ne profiteront pas du spectacle qui s’amorce sur la place où deux manifestations se tournent le dos. L’une est en faveur de la démocratie au Togo, tous drapeaux dehors, l’autre pour le climat. Passe un groupe de gilets jaunes qui s’engouffre dans le boulevard Saint-Martin, bientôt suivi par une quinzaine de voitures de police. Ensuite, plus rien. Sur la voie déserte, des feuilles mortes se promènent en silence entre les magasins clos. Il y a bien le théâtre de la Comédie Saint-Martin qui montre crânement son entrée de velours cramoisi, mais elle est vide.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/09/a-paris-magasins-fermes-et-touristes-desorientes_5394724_3224.html
09/12/2018
Inquiets des violences des dernières semaines, de nombreux commerçants parisiens ont préféré ne prendre aucun risque ce samedi et fermer leur établissement.
politique
Emmanuel Macron concède aux « gilets jaunes » sans rien céder
Edouard Philippe, Emmanuel Macron et François de Rugy, au palais de l’Elysée, le 10 décembre. LAURENCE GEAI POUR " LE MONDE" Il fallait un symbole : les travailleurs au smic verront leur revenu augmenter de 100 euros par mois dès 2019, a annoncé Emmanuel Macron, lundi 10 décembre, dans son allocution télévisée aux Français. Cent euros de plus pour tenter de répondre au mouvement des « gilets jaunes « qui, a reconnu le chef de l’Etat, appelle « l’état d’urgence économique et sociale ». La mesure était faite pour surprendre car, quelques heures plus tôt, les membres de son gouvernement assuraient qu’il n’était pas question de toucher au salaire minimum. En réalité, tout le monde a un peu raison : c’est en réalité la prime d’activité qui augmentera afin que l’Etat prenne en charge l’intégralité du surcoût et que cela ne coûte rien aux entreprises. Le chef de l’Etat veut bien lâcher du lest mais il n’est pas prêt pour autant à renoncer à la politique à laquelle il croit Ce tour de passe-passe expliqué quelques minutes plus tard par Muriel Pénicaud, la ministre du travail, sur le plateau de France 2, dit tout de l’intervention télévisée d’Emmanuel Macron : pour « répondre à la détresse » de ceux qui ont des difficultés à boucler les fins de mois, le chef de l’Etat veut bien lâcher du lest mais il n’est pas prêt pour autant à renoncer à la politique à laquelle il croit et qu’il a mis en œuvre à son arrivée à l’Elysée. C’est si vrai que l’impôt sur la fortune (ISF), autre symbole fort, qu’il a supprimé au début de son mandat, ne sera pas rétabli. Il l’a dit et redit ces derniers jours. Et si, face à la nouvelle donne sociale, il est désormais question de faire payer les grandes entreprises et les plus gros contribuables, Emmanuel Macron s’est bien gardé d’annoncer le détail de la facture. Hors de question de concéder une quelconque victoire idéologique à ses opposants politiques. Plutôt que de manger son chapeau, Macron concède Au lendemain du quatrième samedi de mobilisation des « gilets jaunes », le président de la République continue d’évoluer sur une ligne de crête. Il lâche quatre mesures immédiates sur le pouvoir d’achat :
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/10/emmanuel-macron-concede-aux-gilets-jaunes-sans-rien-ceder_5395539_823448.html
10/12/2018
Le président de la République a annoncé plusieurs mesures immédiates sur le pouvoir d’achat mais ne renonce pas à la politique qu’il a mise en œuvre depuis son arrivée à l’Elysée.
societe
Vidéo : le discours de Macron en réponse aux « gilets jaunes »
lique. Emmanuel Macron a prononcé un discours retransmis à la télévision, lundi 10 décembre à 20 heures. Le chef de l’Etat a annoncé un certain nombre de mesures en réponse aux revendications ayant émergé à la faveur du mouvement des « gilets jaunes » qui, avec ses manifestations d’ampleur, secoue l’Hexagone depuis plusieurs semaines. Principales mesures annoncées : une augmentation de 100 euros par mois du revenu des travailleurs au smic dès 2019, l’annulation pour cette année de la CSG pour les retraités gagnant moins de 2000 euros par mois et la suppression des impôts et charges pour les heures supplémentaires dès 2019. Le président de la République a par ailleurs demandé aux entreprises « qui le peuvent » de verser une prime de fin d’année aux salariés, qui sera défiscalisée. Sur l’impôt sur la fortune (ISF) en revanche, le chef de l’Etat a refusé de faire machine arrière. Enfin Emmanuel Macron a annoncé la tenue d’un débat à l’échelle nationale « sans précédent » pour aborder à la fois l’environnement, l’immigration, la décentralisation de l’Etat ou encore le vote blanc. Le tout en s’appuyant pour cela sur les maires, qu’il entend rencontrer « [lui]-même, région par région ».
https://www.lemonde.fr/societe/video/2018/12/10/discours-d-emmanuel-macron-les-annonces-en-reponse-aux-gilets-jaunes_5395531_3224.html
10/12/2018
Hausse des bas revenus, annulation de la CSG pour certains retraités, défiscalisation des heures supplémentaires… le résumé en vidéo des annonces du président de la République.
international
Brexit : Theresa May accroît le risque de sortie de l’UE sans accord
La première ministre britannique, Theresa May, lors de son discours devant la Chambre des communes, le 10 décembre. PARBUL / PA / AP La reculade traduit une terrible perte d’autorité de la première ministre britannique et accroît les risques de dérapage vers un dangereux vide juridique sur le Brexit. Theresa May a annoncé, lundi 10 décembre devant les députés, le report sine die du vote sur l’accord de sortie de l’Union européenne (UE), qui était prévu mardi mais qui s’annonçait négatif. La première ministre n’a pas indiqué de nouvelle date, ce qui implique que le vote pourrait être reporté de plusieurs jours, de plusieurs semaines, voire, dans le pire des cas, jusqu’à la fin mars. En attendant, Mme May dit vouloir obtenir de l’UE de nouvelles « assurances » propres à convaincre les députés et à les ramener dans le droit chemin. A moins que, d’ici là, ils ne la renversent. « J’ai écouté attentivement ce qui s’est dit dans cette Chambre [des communes] et à l’extérieur (…) et il est clair que sur la question de la garantie donnée pour l’Irlande du Nord, des inquiétudes profondes restent largement répandues, a déclaré la première ministre après trois journées de débat. De ce fait, si nous continuions et avions un vote demain, l’accord serait rejeté par une large majorité. Nous allons donc reporter ce vote prévu demain. » Plus de colère que de stupeur L’annonce faite devant une Chambre comble et chauffée à blanc a provoqué plus de colère que de stupeur, car elle avait filtré dans la presse deux heures auparavant. En fin de matinée pourtant, Downing Street continuait d’affirmer que le vote se tiendrait. Mais au même moment, lors d’une conférence téléphonique impromptue, Mme May informait les membres de son gouvernement de sa décision d’ajournement. Une centaine de députés conservateurs avaient exprimé leur opposition à l’accord et la première ministre allait au-devant d’un échec cinglant. Il lui aurait fallu 320 voix pour faire passer le texte et il lui en aurait manqué plus d’une centaine, étant donné l’ampleur des défections. Sonnant la retraite, elle a annoncé qu’avant même le Conseil européen du jeudi 13 décembre, elle rencontrerait des chefs d’Etat et de gouvernement du continent ainsi que les dirigeants de l’UE pour « débattre avec eux des inquiétudes que cette Chambre a exprimées ». La principale de ces préoccupations concerne la garantie (backstop) pour l’Irlande du Nord. Afin d’éviter le retour d’une frontière terrestre sur l’île, Londres a accepté que l’ensemble du Royaume-Uni demeure dans l’union douanière européenne et que l’Irlande du Nord reste dans le marché unique européen.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/brexit-theresa-may-accroit-le-risque-de-sortie-de-l-ue-sans-accord_5395503_3210.html
10/12/2018
En reculant face à un vote qui s’annonçait négatif, la première ministre britannique a exposé sa faiblesse et voit son avenir largement assombri.
televisions-radio
« Les Paris du Globe Cooker » : Fred Chesneau remet le couvert
Fred Chesneau avec Fatou, la reine de Montreuil. XAVIER LAHACHE Canal+, lundi 10 décembre à 22 h 50, documentaire Après avoir sillonné la planète pour Les Nouveaux Explorateurs, sur Canal+, Fred Chesneau avait décidé de poser ses valises et de se concentrer sur la richesse de la cuisine étrangère à Paris. Ainsi fut créée la ­série Les Paris du Globe Cooker, ­laquelle nous faisait découvrir plats danois, turcs, japonais à travers les épiceries, cantines de quartier ou restaurants de la capitale. Fort du succès des douze premiers épisodes diffusés en 2016, Fred Chesneau remet donc le couvert avec cette saison 2, qui s’ouvre par la Grèce et le Mali. La Grèce à l’honneur Grec de cœur – il a ouvert un restaurant sur l’île de Paros, où il vit la moitié de l’année –, Fred Chesneau se désole que, pour bon nombre de Parisiens, la richesse de la gastronomie grecque se résume aux plats tristement servis dans les « tavernes » ultra-touristiques du quartier de la Huchette, dans le 5e arrondissement. Alors, bien évidemment, il ne s’agit pas de faire l’impasse sur les olives de Kalamata, mais Fred Chesneau s’attarde ici sur le renouveau de la gastronomie grecque de ces dernières années. En témoigne l’ouverture des restaurants Chez Yaya ou Etsi, dans lequel Mikaëla Liaroutsos dépoussière les plats traditionnels. Une façon, sans doute, d’oublier un peu la crise ­financière qui ébranle le pays depuis 2010. Chez Fatou, la reine de Montreuil, les saveurs se mélangent, les légumes aussi, et les sourires sont aussi généreux que les portions servies Politique aussi, certainement, est la découverte de la cuisine du Mali, cette ancienne colonie française. D’ailleurs, Fatou, la reine de Montreuil (toujours surnommée « Bamako-sur-Seine » ou « Mali-sous-Bois »), le dit : tout est question de goûts, plus que d’odeurs ! Lire le portrait : Fred Chesneau, le goût des autres Chez elle, les saveurs se mélangent, les légumes aussi, et les sourires sont aussi généreux que les portions servies. Idem à La Marmite d’Afrique, ce restaurant ­associatif créé en 2011 où l’on boit un bissap, cette boisson rose et rafraîchissante à base de fleurs d’hibiscus. Si ces deux premiers volets sont un brin roboratifs (on passe trop vite de table en table), on ne boudera pas le plaisir de goûter, même par procuration, un mafé (cette sauce incroyable à base de pâte d’arachide) ou du poulet yassa. Prochaines étapes : le Liban et le Vietnam, sous l’œil, il faut le dire, toujours curieux et bienveillant de Fred Chesneau. Les Paris du Globe Cooker, de Fred Chesneau, Olivia Chiché et Jean-François Julian (France, 2018, 6 ×52 min). www.mycanal.fr/decouverte/les-paris-du-globe-cooker
https://www.lemonde.fr/televisions-radio/article/2018/12/10/les-paris-du-globe-cooker-fred-chesneau-remet-le-couvert_5395497_1655027.html
10/12/2018
La saison 2 de cette série culinaire continue de faire découvrir des cuisines aux saveurs internationales dans la capitale.
societe
Des « dérapages inadmissibles » de la police dénoncés par des syndicats de journalistes
Tir de gaz lacrymogène par un policier près d’un journaliste sur les Champs-Elysées, à Paris, le 8 décembre 2018, lors d’une manifestation des « gilets jaunes ». ALAIN JOCARD / AFP Deux photographes du Parisien visés par des tirs de lanceurs de balles de défense, un photographe du Journal du dimanche hospitalisé après avoir été frappé par un CRS, une quinzaine de journalistes « mis en joue, pris pour cibles parfois intentionnellement, commotionnés ou molestés par les forces de l’ordre »… Quatre syndicats de journalistes ont déploré, lundi 10 décembre, les « nombreux blessés parmi les journalistes de terrain, reporters et photographes » qui couvraient les manifestations des « gilets jaunes » samedi. Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO condamnent « les dérapages inadmissibles des forces de police, notamment à Paris » et exigent dans un communiqué commun « des explications de la préfecture de police, du ministère de l’intérieur et du gouvernement sur les consignes qui ont été données pour en arriver à cette situation ». « Inacceptable dans un pays démocratique » « Dès 8 heures du matin, samedi, de nombreux photographes de presse, clairement identifiés comme tels, se sont fait confisquer leur équipement de protection individuel, parfois sous la menace d’une garde à vue. Ce qui a eu pour effet d’empêcher certains reporters de faire leur travail », ont déploré ces organisations syndicales représentatives de la profession. Les syndicats recommandent « à tous les reporters victimes d’agissements anormaux de déposer plainte et/ou d’effectuer les signalements nécessaires auprès de l’inspection générale de la police nationale ». « Face à cette situation inédite pour la profession, confrontée à une violence grandissante », les syndicats demandent au gouvernement de « prendre les mesures nécessaires » pour que ces événements ne se reproduisent pas et « à être reçus en urgence par le président de la République ». « Il est totalement inacceptable, dans un pays démocratique et dans un état de droit, que les pouvoirs publics ne garantissent pas la liberté d’informer », déplorent-ils. Avec l’appui de la Fédération européenne des journalistes (FEJ) et de la Fédération internationale des journalistes (FIJ), ils ont alerté une deuxième fois le Conseil de l’Europe de la situation, par la plate-forme de signalement consacrée à la sécurité des journalistes.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/10/des-derapages-inadmissibles-de-la-police-denonces-par-des-syndicats-de-journalistes_5395491_3224.html
10/12/2018
Des photographes et des reporters ont été pris pour cibles lors de la manifestation des « gilets jaunes » du 8 décembre. Des syndicats demandent à être reçus à l’Elysée.
international
A Prague, le nouveau maire figure de proue du Parti pirate
Zdenek Hrib (à gauche), à Prague, le 6 octobre. AKTRON Les touristes se pressant dans la capitale tchèque n’en savent probablement rien, mais la ville qu’ils admirent est dirigée par un « pirate ». De quoi faire de Prague le laboratoire d’une nouvelle forme de gouvernance. Car les Tchèques plébiscitent désormais une formation internationale, le Parti pirate, né en Suède en 2006, et qui essaime depuis, avec plus ou moins de bonheur, dans de nombreux pays. « Le rejet des autres partis est l’un des principaux facteurs de mon élection, ironise Zdenek Hrib, le nouveau maire de la ville, qui compte 1,3 million d’habitants. Le Parti pirate, que je représente, doit son succès également au travail qu’il a effectué sur les bancs de l’opposition ces quatre dernières années. Nous avons porté l’exigence de transparence que réclament nos concitoyens et gagné plusieurs batailles contre la corruption. » Le 15 novembre, cet expert en assurance santé a réussi à ravir l’hôtel de ville au parti Action des citoyens mécontents (ANO) du premier ministre, le libéral au discours anti-système Andrej Babis, mis en examen dans une affaire de détournement de fonds européens, qui avait pourtant investi 2 millions d’euros dans la campagne. Avec 17 % des voix, il est arrivé en deuxième position, juste derrière les conservateurs (ODS, 18 %), lors des municipales des 5 et 6 octobre. Un budget de 3 milliards d’euros par an Puis il a formé, au nez et à la barbe du vainqueur, une coalition tripartite composée d’élus issus de ses rangs, d’un nouveau mouvement local (Praha Sobe) et des « Forces alliées pour Prague », un groupe rassemblant trois petits partis. Sans expérience politique autre que le militantisme, poussé par une « contestation 2.0 », il est à la tête d’un budget de 3 milliards d’euros par an et « pourrait faire de Prague une base solide pour disputer son pouvoir à M. Babis », selon l’universitaire spécialiste des médias Vaclav Stetka. Prônant l’horizontalité dans la prise de décisions, ainsi que l’émancipation du citoyen, il a mis sur pied un programme de réformes pour les quatre prochaines années, ambitionnant la construction, par exemple, d’une nouvelle ligne de métro. « Au niveau local, les problèmes sont souvent connus et les solutions à y apporter consensuelles, explique au Monde Zdenek Hrib, dans son premier entretien accordé à un média étranger. Nous avons donc installé un pouvoir très stable, tourné vers la concrétisation d’objectifs bien définis. Si nous nous tenons à ce que nous avons décidé ensemble, alors je ne vois pas l’alliance péricliter. »
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/a-prague-le-nouveau-maire-figure-de-proue-du-parti-pirate_5395484_3210.html
10/12/2018
Elu le 15 novembre, Zdenek Hrib, 37 ans, est issu d’une formation qui se voit, en particulier en Europe centrale, comme une alternative crédible aux extrêmes et aux partis traditionnels.
economie
Eramet de nouveau dans la tourmente
La Société Le Nickel (SLN), filiale du groupe Eramet, en Nouvelle-Calédonie, le 29 avril 2016. THEO ROUBY / AFP Un petit massacre. L’action Eramet a plongé de 24 %, lundi 10 décembre, faisant fondre sa capitalisation boursière de 420 millions d’euros d’un coup. Depuis le point haut touché en mai, le champion français du nickel et du manganèse a perdu 71 % de sa valeur. Alors qu’il avait enfin gagné de l’argent en 2017 après des années de perte et semblait en plein redressement, le seul groupe minier tricolore suscite de nouveau l’inquiétude. A l’origine des dernières turbulences, l’annonce par Eramet d’un problème de contrôle de la qualité dans les alliages, un de ses trois grands métiers. A la suite d’investigations internes, réalisées sous l’impulsion du nouveau patron de cette branche, le groupe « a constaté des non-conformités dans le système de management de la qualité », a-t-il indiqué samedi. « Ils ont découvert un loup, traduit Jean-François Lambert, consultant chez Lambert Commodities. Mais de quoi s’agit-il exactement ? Des produits défectueux ont-ils été livrés ? Va-t-il falloir dédommager certains clients ? Cela reste très flou, ce qui explique que les investisseurs aient vendu leurs actions en attendant d’y voir plus clair. » La baisse a été d’autant plus violente que le marché boursier était morose. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Eramet prépare un tour de vis supplémentaire en Nouvelle-Calédonie Baisse des cours du nickel Seule certitude, aucune « atteinte à la sécurité » n’a été décelée dans les produits déjà livrés, par exemple aux constructeurs aéronautiques. Et des mesures correctrices ont été lancées. Le coût de ce problème est « supérieur à 25 millions d’euros », indique Eramet. Les analystes l’évaluent en première approche entre 50 et 100 millions d’euros. « La bonne nouvelle, c’est que la nouvelle direction d’Eramet est plus vigilante, plus dynamique que la précédente, qu’elle sait repérer les difficultés », commente Fabrice Farigoule, analyste chez AlphaValue. La mauvaise, c’est que ce problème de qualité arrive alors que le groupe est déjà sous tension en raison de la baisse des cours du nickel et d’un recul des ventes d’alliages. Seul l’activité de manganèse est réellement bénéficiaire.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/10/eramet-de-nouveau-dans-la-tourmente_5395481_3234.html
10/12/2018
Le groupe minier français a dévissé de 24 %, lundi, en Bourse après la découverte d’un problème dans son activité d’alliages.
societe
« Gilets jaunes » : des « dérapages inadmissibles » de la police envers des journalistes samedi
Quatre syndicats de journalistes ont déploré lundi 10 décembre les « nombreux blessés parmi les journalistes de terrain, reporters et photographes » qui couvraient les manifestations des « gilets jaunes » samedi et condamné « les dérapages inadmissibles des forces de police, notamment à Paris ». Dénonçant la « gestion calamiteuse des manifestations de samedi par les forces de l’ordre », le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO ont exigé dans un communiqué commun « des explications de la préfecture de police, du ministère de l’intérieur et du gouvernement sur les consignes qui ont été données pour en arriver à cette situation ». « Dès 8 heures du matin, samedi, de nombreux photographes de presse, clairement identifiés comme tels, se sont fait confisquer leur équipement de protection individuel, parfois sous la menace d’une garde à vue. Ce qui a eu pour effet d’empêcher certains reporters de faire leur travail », ont déploré ces organisations syndicales représentatives de la profession. « Violence grandissante » Ils citent en outre les cas de deux photographes du Parisien visés par des tirs de lanceurs de balles de défense, d’un photographe du JDD hospitalisé après avoir été frappé par un CRS, et disent qu’une quinzaine de témoignages de confrères « mis en joue, pris pour cibles parfois intentionnellement, commotionnés ou molestés par les forces de l’ordre » leur sont remontés ces dernières heures. Les syndicats recommandent « à tous les reporters victimes d’agissements anormaux de déposer plainte et/ou d’effectuer les signalements nécessaires auprès de l’Inspection générale de la police nationale ». « Face à cette situation inédite pour la profession, confrontée à une violence grandissante », les syndicats demandent au gouvernement de « prendre les mesures nécessaires » pour que ces événements ne se reproduisent pas et demandent « à être reçus en urgence par le président de la République ». « Il est totalement inacceptable, dans un pays démocratique et dans un Etat de droit, que les pouvoirs publics ne garantissent pas la liberté d’informer », déplorent-ils. Avec l’appui des fédérations européenne (FEJ) et internationale des journalistes (FIJ), ils ont alerté une deuxième fois le Conseil de l’Europe de la situation, via la plate-forme de signalement consacrée à la sécurité des journalistes.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/10/gilets-jaunes-des-derapages-inadmissibles-de-la-police-envers-des-journalistes-samedi_5395480_3224.html
10/12/2018
Le SNJ, le SNJ-CGT, la CFDT-Journalistes et le SGJ-FO ont déploré les « nombreux blessés parmi les journalistes de terrain, reporters et photographes » qui couvraient les manifestations samedi.
sciences
En Inde, la recette parfaite pour faire émerger des superbactéries
Les bactéries possèdent un immense avantage : elles peuvent échanger de l’ADN entre elles, comme on échange une poignée de main. Aucun bras chez elles, mais des « pilis », sortes de tubes permettant de connecter deux bactéries voisines, et par lesquels voyagent des bouts d’ADN, appelés « plasmides », initialement arrachés au géno­me des bactéries. On trouve de tout parmi ces brins d’ADN voyageurs, notamment des ­gènes qui confèrent à ceux qui en sont porteurs une résistance aux antibiotiques. Ces gènes proviennent en premier lieu d’une lutte millénaire entre micro-organismes, dont l’une des armes pour limiter la multiplication de bactéries concurrentes est de fabriquer… des antibiotiques. Pour ­survivre, les bactéries doivent donc en permanence développer des parades en dégradant ces molécules naturelles ou en les ­rendant inactives. Un mécanisme accéléré Or, ce même mécanisme peut être accéléré lorsque l’environnement contient une gran­de diversité d’antibiotiques rejetés par les ­activités humaines. Les microbes les plus résistants profitent de la situation et partagent leurs avantages avec les bactéries voisines. Et si des déversements d’excréments ont lieu au même endroit, c’est le jackpot. Pourquoi ? Parce que dans nos excréments se trouvent des bactéries potentiellement pathogènes pour l’homme, qui peuvent dès lors acquérir de nouvelles formes de résistance. C’est exactement ce scénario qui se déroule aujourd’hui à Hyderabad, la capitale de l’Etat indien du Telangana, avec ce mélange des ­effluents des usines d’antibiotiques et des eaux noires de la ville. A cela s’ajoutent la surpopulation indienne et les conditions d’hygiène des villages en amont : la recette semble parfaite pour voir l’émergence d’épidémies de superbactéries…
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/10/en-inde-la-recette-parfaite-pour-faire-emerger-des-superbacteries_5395474_1650684.html
10/12/2018
Le mélange des ­effluents des usines d’antibiotiques et des eaux noires de la ville d’Hyderabad créé des conditions idéales pour voir émerger des épidémies de superbactéries….
sciences
Fabrication d’antibiotiques en Inde : l’inaction européenne en question
En 2017, il a été vendu 759 tonnes d’antibiotiques destinés à la santé humaine en France. Les consommateurs peuvent-ils conti­nuer à fermer les yeux sur les dégâts environnementaux et sanitaires causés à des milliers de kilomètres de chez eux par la fabrication de médicaments servant à les soigner ? C’est en substance la question posée par des activistes indiens et des représentants de communautés lo­cales qui, en juillet, ont envoyé une lettre à la Commission européenne, l’exhortant à agir contre « la grave crise liée à la production de médicaments » en cours dans leur pays. Plusieurs ­associations, comme Changing Markets, Health Care Without Harm ou l’European Public Health Alliance, aux côtés de pays comme la Suède, poussent à l’adoption de normes ­environnementales plus drastiques – sans réelle avancée jusque-là. Il a fallu attendre 2011 pour qu’un plan d’action européen contre l’antibiorésistance mentionne le problè­me de la pollution par les sites de production. En 2013, une directive exige des Etats membres qu’ils dé­veloppent une approche stratégique contre la pollution de l’eau par les substances pharmaceutiques dans un délai de deux ans. Mais les dis­cussions ont commencé seulement cette année… Pression des lobbys L’une des mesures envisagées prévoit d’inclure des critères environnementaux aux guides des « Bonnes pratiques de fabrication » (GMP pour Good Manufacturing Practice). « C’est un système déjà en place : des inspecteurs européens peuvent se rendre en Inde afin de visiter des usines fabriquant les médicaments pour le marché européen et s’assurer que ceux-ci seront sûrs à la consommation. Une telle procédure pourrait être étendue assez simplement aux pollutions environnementales », avance Kia Salin, de l’agence suédoise des produits médicamenteux. Lire aussi En Inde, la recette parfaite pour faire émerger des superbactéries Mais cette piste aurait déjà été en partie sabotée sous la pression des lobbys pharmaceutiques, qui se félicitent ouvertement de l’inaction européenne. « Je n’ai jamais vu l’industrie être si franche sur son opposition à la législation. Ce qui est encore pire, c’est que cela vient de la part d’industriels qui devraient être en tête des efforts à mener contre la résistance antibio­tique, l’AMR Alliance, la prétendue ­alliance contre l’antibiorésistance ! », s’insurge Nusa Urbancic, directrice de campagne pour Changing Markets.
https://www.lemonde.fr/sciences/article/2018/12/10/fabrication-d-antibiotiques-en-inde-l-inaction-europeenne-en-question_5395472_1650684.html
10/12/2018
Plusieurs associations s’alarment des graves conséquences environnementales et sanitaires liées au manque d’encadrement dans la fabrication des médicaments en Inde.
culture
Mort de l’écrivain russe Andreï Bitov
L’écrivain russe Andreï Bitov en novembre 2008. DMITRY ROZHKOV / CC BY-SA 3.0 Auteur à l’œuvre profondément marquée par l’histoire et la littérature de son pays, qu’il ne quitta jamais, même aux plus durs moments de la répression soviétique, le romancier Andreï Gueorguievitch Bitov est mort, à Moscou, le 3 décembre, à l’âge de 81 ans. Très attaché à Léningrad, où il naît le 27 mai 1937, Andreï Bitov se réclame d’une ancienne souche pétersbourgeoise – son grand-père y fut directeur de lycée, son père Georg Leonidovitch (1902-1977), architecte, et sa mère Olga Alekseieva Kedrova (1905-1990), avocate – et célèbre tant son destin historique que sa vocation européenne et sa mémoire littéraire. Il se faisait gloire d’être né 250 ans exactement après la fondation de la ville, même si la mort de Staline, deux mois avant les commémorations annoncées, annula les festivités prévues le jour de ses 16 ans. Ses premiers souvenirs sont du reste liés au siège de la ville par les nazis dès la fin 1941, puis à l’évacuation de la famille vers l’Oural en mars 1942 où avec sa mère et son frère Oleg, il rejoint son père. Après un repli à Tachkent, il revient à Léningrad en 1944 où, s’il rêve déjà d’être écrivain, il s’adonne au sport (athlétisme, aviron, haltérophilie, voire escalade dès qu’il peut gagner les montagnes). C’est du reste ce goût qui le conduit à entreprendre des études d’ingénieur géologue à l’Institut des mines, mais Andreï Bitov est bientôt exclu de l’établissement, où il participe, poète débutant, à l’association littéraire, certains de ses actes, au lendemain de la mise au pas de la Hongrie fin 1956, étant jugés séditieux. Mausolée de la culture russe Après son service militaire, il réintègre l’Institut et obtient son diplôme, mais il se tourne désormais vers la prose, commence à publier (1960) et ne tarde pas à intégrer, en 1965, l’union des écrivains soviétiques, sorte de syndicat professionnel, même si certains de ses textes où le thème du dédoublement entre lui et l’auteur qu’il met en scène (Serge et Bitov lui-même dans Par temps de vent et En marge) ne correspondent pas aux canons littéraires prescrits. Dès 1964, il entreprend un grand roman qui l’occupe sept ans, La Maison Pouchkine. Roman de l’humiliation infinie, sorte de saisissant mausolée de la culture russe présentée comme moribonde, sinon morte, et qui naturellement ne peut paraître en URSS en 1971. La première édition, en russe, paraît aux Etats-Unis en 1978 avant, une décennie plus tard, des traductions en anglais dès 1987, en allemand, en italien, en japonais et en suédois, et finalement en 1988, au moment même où le texte est publié en URSS dans la revue Novy Mir, perestroïka oblige, en français, où cette fresque formidable est couronnée du prix du meilleur livre étranger (1989).
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/10/mort-de-l-ecrivain-russe-andrei-bitov_5395465_3246.html
10/12/2018
L’auteur de « La Maison Pouchkine », Prix du meilleur livre étranger en 1989, et qui compte parmi les écrivains majeurs de la littérature russe, est mort à Moscou le 3 décembre, à l’âge de 81 ans.
climat
COP24 : les Etats pétroliers, experts en blocage des négociations climatiques
Un délégué lors de la séance plénière de la COP24, à Katowice (Pologne), le 4 décembre. JANEK SKARZYNSKI / AFP C’est un combat autour d’un mot, mais qui illustre à quel point les négociations climatiques sont à la fois délicates et fortes d’enjeux. Alors que débute la deuxième semaine de la conférence mondiale sur le climat (COP24), qui se tient à Katowice (Pologne) jusqu’au 14 décembre, les délégations sont échaudées par un signal inquiétant pour la suite des négociations : l’Arabie saoudite, le Koweït, la Russie et les Etats-Unis se sont alliés contre les autres 192 Etats afin d’édulcorer une référence au rapport historique du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) sur la nécessité de limiter le réchauffement à 1,5 °C. Les quatre Etats pétroliers ont poussé pour que soit indiqué, dans l’un des rapports techniques qui ont été rendus samedi à la présidence polonaise de la COP, que les pays « prennent note » de l’étude plutôt que de l’« accueillir favorablement ». Une façon d’être moins contraints par ses conclusions, voire d’en ignorer la teneur. La motion n’a finalement pas été adoptée en raison de l’absence de consensus, après le rejet de l’Union européenne et d’Etats insulaires, africains et latino-américains. « Le résultat final est décevant, car il y a un clivage profond entre la volonté de la très grande majorité des pays à reconnaître clairement le message du GIEC, et le refus d’un très petit nombre », regrette un spécialiste des négociations climatiques. Il y a deux mois, pourtant, les représentants des gouvernements du monde entier, y compris ceux de l’Arabie saoudite, du Koweït, de la Russie et des Etats-Unis, avaient adopté par consensus ce rapport du GIEC commandé lors de la COP21 à Paris. ll concluait à la nécessité d’engager des transformations « rapides » et « sans précédent » pour contenir le réchauffement en deçà de 1,5 °C, faute de quoi la planète connaîtrait des impacts des plus graves en termes de hausse du niveau des mers, de vagues de chaleur ou encore de perte de la biodiversité. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Climat : il y a un espoir de limiter le réchauffement mais au prix d’un sursaut international Mais dès lors, Riyad avait tenté de discréditer ces conclusions, comme elle le fait de longue date pour miner les négociations climatiques. Le royaume est en effet le premier producteur de pétrole et devrait voir ses émissions de gaz à effet de serre doubler d’ici à 2030 par rapport à 2014. « La position de l’Arabie saoudite peut être surmontée quand cette dernière est seule ou seulement soutenue par le Koweït. Le fait que les Etats-Unis et la Russie s’y soient joints est beaucoup plus dangereux », prévient Alden Meyer, directeur de la stratégie de l’Union of Concerned Scientists, et observateur de longue date des négociations climatiques.
https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/10/cop24-les-etats-petroliers-experts-en-blocage-des-negociations-climatiques_5395462_1652612.html
10/12/2018
L’Arabie saoudite, le Koweït, la Russie et Etats-Unis ont tenté d’édulcorer une référence à un rapport du GIEC sur la nécessité de limiter le réchauffement à 1,5 °C.
politique
La crise des « gilets jaunes » met en suspens la réforme des retraites jusqu’à janvier
Les séances de concertation sur la réforme des retraites prévues fin décembre ont été reportées à janvier, à cause de la crise des « gilets jaunes », a appris lundi 10 décembre l’Agence France-Presse (AFP) auprès de l’entourage de Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites. M. Delevoye avait prévu d’aborder les « conditions d’ouverture des droits et carrières longues » durant la semaine du 17 décembre. La discussion attendra finalement la semaine du 7 janvier, afin de « laisser le temps aux partenaires sociaux de s’impliquer pleinement dans la concertation du gouvernement » sur la fiscalité et le pouvoir d’achat. Report possible du vote Les conséquences sur le calendrier de la réforme des retraites seront a priori limitées : la deuxième phase de la concertation, qui devait s’achever fin janvier, se prolongera jusqu’aux vacances d’hiver. Mais ce contretemps rend plus difficile le vote d’un projet de loi « au premier semestre » 2019, comme l’avait souhaité Emmanuel Macron. C’est un simple « décalage de quinze jours », certainement « pas une remise en cause de la réforme, ni du calendrier », ont assuré les mêmes sources. Mais M. Delevoye lui-même évoque désormais un dépôt du texte après les élections européennes et une adoption « dans le courant de l’année ». Lire aussi Réforme des retraites : ce que veulent les citoyens consultés Le gouvernement prévoit d’uniformiser les 42 régimes de retraite existants et de passer d’un système en annuités, où les actifs cumulent des trimestres, à un système en points, où les actifs cumulent des points tout au long de leur parcours professionnel.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/10/la-crise-des-gilets-jaunes-met-en-suspens-la-reforme-des-retraites-jusqu-a-janvier_5395453_823448.html
10/12/2018
La discussion avec les partenaires sociaux attendra la semaine du 7 janvier, afin de leur laisser le temps de « s’impliquer pleinement dans la concertation » sur la fiscalité et le pouvoir d’achat.
climat
La voiture électrique est-elle vraiment plus écologique ?
La planète se réchauffe et l’un des responsables est tranquillement garé devant chez nous : la voiture. En France, les transports représentent 30 % des émissions de CO 2 , un gaz à effet de serre qui accroît les changements climatiques. Pour les pouvoirs publics comme pour les industriels, l’une des solutions pourrait être la voiture électrique. Lorsqu’elle roule, celle-ci n’émet pas de CO 2 puisqu’elle ne brûle ni essence ni diesel. Ce constat n’en fait pas pour autant un véhicule propre, loin de là. Car la construction d’un véhicule électrique demande beaucoup plus d’énergie que la construction d’un véhicule thermique, et l’extraction des métaux qui le composent cause de graves dommages environnementaux. Par ailleurs, pour recharger la batterie d’une voiture électrique, il faut produire cette électricité en amont. Et dans le monde, les sources d’énergie sont encore bien souvent le charbon et le pétrole, très polluants. La voiture électrique ne ferait-elle donc que déplacer le problème ? Explications en vidéo. Sources :
https://www.lemonde.fr/climat/video/2018/12/10/la-voiture-electrique-est-elle-vraiment-plus-ecologique_5395451_1652612.html
10/12/2018
#UrgenceClimat. La voiture électrique est souvent présentée comme le rempart idéal à la pollution. Mais la réalité est un peu plus compliquée.
rugby
Rugby : un joueur de l’équipe espoirs du Stade français en réanimation « dans un état grave »
Victime d’un arrêt cardiaque, dimanche 8 décembre, au cours d’un match à Bègles (Gironde), un joueur de l’équipe espoirs du Stade français, Nicolas Chauvin, se trouve en « réanimation, dans un état grave », au CHU Pellegrin de Bordeaux, a annoncé, lundi dans un communiqué, le club parisien de rugby. Le troisième-ligne aile, âgé de 19 ans, « a été opéré en urgence d’une fracture de la deuxième cervicale », a précisé le club. Nicolas Chauvin ne s’est pas relevé après un plaquage survenu autour de la 5e minute du match, que l’arbitre a immédiatement arrêté. Victime d’un arrêt cardiaque, il a été pris en charge par l’équipe médicale du club girondin, qui lui a prodigué un massage cardiaque pendant près de vingt minutes et lui a posé une canule. Lorsque les pompiers et le SAMU sont arrivés sur les lieux, le pouls du joueur, toujours inconscient, était reparti et il a été transporté à l’hôpital. Le précédent de Louis Fajfrowski Cet accident rappelle celui survenu le 10 août, qui avait conduit à la mort d’un jeune joueur d’Aurillac (Pro D2) : Louis Fajfrowski, 21 ans, est mort à la suite d’un plaquage lors d’un match de présaison contre Rodez. La justice a conclu, en novembre, que cette mort était due à « un traumatisme thoracique précordial, responsable d’une commotion cardiaque létale sur un cœur pathologique ». Mais le parquet a précisé que cette « mort accidentelle » était survenue « à la suite et non pas à cause d’un plaquage » subi par le joueur à mi-hauteur. Le mort de Louis Fajfrowski a relancé, au sein du rugby français, un débat sur la santé des joueurs, tout particulièrement sur la violence des chocs au cours de matchs. Elle avait conduit Bernard Laporte, le président de la Fédération française de rugby, à annoncer aux dirigeants de club la mise en place d’un programme intitulé « Bien joué », comportant plusieurs mesures destinées à « renforcer la sécurité de la pratique de notre sport ». Ce programme vise essentiellement les jeunes pratiquants.
https://www.lemonde.fr/rugby/article/2018/12/10/rugby-un-joueur-de-l-equipe-espoirs-du-stade-francais-en-reanimation-dans-un-etat-grave_5395435_1616937.html
10/12/2018
Le joueur de 19 ans, qui ne s’est pas relevé après un plaquage dimanche, a été victime d’un arrêt cardiaque. Il a été opéré d’une fracture de la deuxième cervicale, a annoncé le club parisien.
planete
Comment les coraux s’acclimatent tant bien que mal au réchauffement
Un plongeur inspectant les récifs de la Grande Barrière de corail, au large des côtes australiennes, en octobre 2016. TANE SINCLAIR-TAYLOR / CORAL REEF STUDIES C’est une lueur d’espoir pour la Grande Barrière de corail australienne. L’espoir que cet écosystème unique au monde, inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco, résiste mieux qu’on ne le craignait au réchauffement climatique. Un espoir tout relatif cependant, comme le montre l’étude, publiée lundi 10 décembre dans la revue Nature Climate Change, d’une équipe de chercheurs australiens et américains conduite par Terry Hughes, directeur de l’Australian Resarch Council Centre of Excellence for Coral Reef Studies. Une perte de couverture corallienne de 30 % en 2016 Au printemps 2018, une publication émanant pour l’essentiel des mêmes scientifiques avait fait état d’une « mortalité catastrophique » des récifs australiens, à la suite des vagues de chaleur extrême enregistrées dans cette zone en 2016. Terry Hughes et ses collègues avaient alors relevé une perte de couverture corallienne de 30 % en moyenne le long de cet ensemble qui s’étend sur 2 300 kilomètres, avec des réductions particulièrement importantes, de l’ordre de 50 %, dans sa partie nord. « Beaucoup de coraux ont succombé immédiatement au stress thermique », tandis que « d’autres sont morts plus lentement », écrivaient-ils dans la revue Nature. Or, les chercheurs ont réalisé en 2017 de nouveaux relevés aériens, accompagnés de plongées, pour évaluer l’impact des nouvelles vagues de chaleur – encore plus intenses – survenues cette année-là. Ils ont ainsi pu comparer, d’une année à l’autre, le niveau de blanchissement des récifs : un processus de dépérissement provoqué, sous l’effet d’une chaleur excessive des eaux de surface, par la rupture de l’association symbiotique entre les coraux et des microalgues (des zooxanthelles) vivant dans leurs tissus, qui leur donnent leurs couleurs éclatantes et leur apportent des nutriments. Un plongeur inspectant les récifs de la Grande Barrière de corail, au large des côtes australiennes, en octobre 2016. TANE SINCLAIR-TAYLOR / CORAL REEF STUDIES « Nous avons été stupéfaits de trouver moins de blanchissement en 2017, alors même que les températures étaient encore plus extrêmes que celles de l’année précédente », rapporte Terry Hughes. Les résultats sont de fait surprenants. Sur les 606 récifs examinés consécutivement en 2016 et 2017, il apparaît que 22 % ont subi un blanchissement sévère lors des deux épisodes de chaleur, mais que 22 % aussi ont été moins affectés par le second, tandis que 9 % seulement l’ont été davantage. Les autres ont échappé à un processus de dépérissement important dans les deux cas, car ils se situent dans la partie sud de la Grande Barrière, moins touchée par les vagues de chaleur.
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/10/comment-les-coraux-s-acclimatent-tant-bien-que-mal-au-rechauffement_5395407_3244.html
10/12/2018
Certains récifs de la Grande Barrière de corail, en Australie, ont moins souffert des vagues de chaleur extrême de 2017 que de celles de 2016, en raison d’une « mémoire écologique ».
idees
Etudiants étrangers : « L’équité fiscale n’est qu’un prétexte »
L’objectif est de passer de 340 000 étudiants étrangers en 2017 à 500 000 en 2027. Simone Perolari/Luz pour M Le magazine du Monde Tribune. Le gouvernement vient d’annoncer un plan pour renforcer l’attractivité internationale de l’enseignement supérieur. L’objectif est de passer de 340 000 étudiants étrangers en 2017 à 500 000 en 2027 (16 000 étudiants étrangers de plus chaque année pendant dix ans, un peu au-dessus de la progression observée de 2000 à 2005). Pour ce faire, le gouvernement prévoit trois piliers. Deux d’entre eux visent à faciliter l’obtention des visas pour les étudiants et de titres de séjour pour les diplômés, de généraliser une « culture de l’accueil » et de développer des campus d’établissements français à l’étranger. Ils ne posent guère de problèmes de principe, même si on peut s’interroger sur la faiblesse des moyens mis en œuvre. Le troisième suscite un émoi bien naturel. Il s’agit de créer « des droits d’inscription différenciés », bien plus élevés pour les étudiants extracommunautaires que pour les autres : 2 770 euros contre 170 euros en licence, 3 770 euros en master et doctorat contre 243 ou 380 euros. Le premier ministre, conscient qu’il est peu intuitif de croire qu’une telle augmentation permette d’attirer plus d’étudiants, met en avant « l’équité financière » : « Actuellement, la France est l’un des pays au monde où les droits d’inscription des étudiants internationaux sont les plus faibles : c’est presque comme s’ils n’existaient pas. En bref, un étudiant étranger très fortuné qui vient en France paye le même montant qu’un étudiant français peu fortuné dont les parents résident, travaillent et payent des impôts en France depuis des années. C’est absurde et injuste. Et ce choix a comme conséquence la faiblesse des moyens disponibles pour accueillir et accompagner les étudiants internationaux. » Comparaison à la « Gilet jaune » Le premier ministre oppose « l’étudiant étranger très fortuné » au « Français peu fortuné », rhétorique entre riches et pauvres dans l’air du temps. On est cependant déçu par cette comparaison à la « Gilet Jaune » puisque presque rien n’est annoncé pour les étudiants étrangers peu fortunés, catégorie significativement absente du discours d’Edouard Philippe alors qu’elle sera affectée au premier chef par cette réforme. Le gouvernement envisage certes de délivrer autour de 14 000 nouvelles bourses (sans rien dire de leur montant) ou exonérations. C’est très peu pour 340 000 étudiants, encore moins pour les 500 000 souhaités et très en dessous de ce que font les pays qui demandent des droits d’inscription élevés.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/10/etudiants-etrangers-l-equite-fiscale-n-est-qu-un-pretexte_5395395_3232.html
10/12/2018
Faute d’un plan de soutien sérieux, l’augmentation des droits d’inscription pour les étudiants extracommunautaires, risque d’évincer des campus les étudiants les plus modestes, mais aussi d’entraîner une hausse générale de ces droits, estime, dans une tribune au « Monde », Jean-Yves Mérindol, professeur.
climat
En Espagne, la « révolution piétonne » réussie de Pontevedra
« Pontevedra était un hangar à voitures, une ville où l’on entrait de mauvaise humeur à la recherche d’une place introuvable. Une ville où la pollution était terrible », rappelle le maire, Miguel Anxo Fernandez Lores. Juan Teixeira pour «Le Monde» « Ecoutez… » Miguel Anxo Fernandez Lores, le maire de Pontevedra, se tait un instant. De la rue Michelena, située en plein cœur de cette ville de Galice, ne parviennent que les murmures des passants et des clients attablés aux bars. « Quand je me suis installé dans ce bureau, en 1999, 14 000 voitures passaient dans cette rue tous les jours, explique-t-il. Un peu plus loin, rue d’Espagne, il en passait 28 000. Pontevedra était un hangar à voitures, une ville où l’on entrait de mauvaise humeur à la recherche d’une place introuvable. Une ville où la pollution était terrible, d’où les gens partaient. Aujourd’hui n’y entrent que les véhicules indispensables pour que la ville fonctionne, et le nombre d’habitants est en hausse. » Située à la pointe nord-ouest de l’Espagne, Pontevedra est devenue l’exemple d’une révolution piétonne réussie. Couronnée par le prix européen Intermodes et le prix ONU Habitat, elle a vu, en vingt ans, les émissions de CO 2 chuter de 60 % dans son centre-ville, la consommation de combustible baisser de 66 % et les déplacements à pied bondir pour représenter 70 % des trajets effectués en ville – contre 30 % deux décennies plus tôt. Un carrefour où les piétons ont la priorité dans le centre de Pontevedra. Juan Teixeira pour «Le Monde» Ancien médecin de famille et élu du Bloc national galicien, un parti régionaliste d’extrême gauche, Miguel Anxo Fernandez Lores, a rendu le cœur historique de la ville (300 000 m²) aux piétons à peine un mois après sa prise de fonctions, à l’été 1999. « Nous étions tous sceptiques, moi y compris, reconnaît Miguel Lago, président de l’association Centre commercial urbain-Zone monumentale, qui regroupe les commerces du centre historique. Mais on s’est vite rendu compte que ça fonctionnait très bien, que les prix des locaux augmentaient et que les clients et les promeneurs venaient. » Le long des ruelles pavées, des panneaux – les metrominutos – affichent désormais, à la manière d’un plan de métro, les distances entre différents lieux du centre-ville. D’un bout à l’autre, il ne faut guère marcher plus d’une demi-heure, et le premier parking gratuit est toujours à moins d’un quart d’heure. La circulation n’est d’ailleurs pas totalement interdite : les véhicules de livraison (quatre heures par jour) et les particuliers qui rejoignent un parking ou transportent une personne ayant des difficultés à marcher, par exemple, peuvent être autorisés à entrer dans la ville. Un trafic « nécessaire », justifie M. Lores, en opposition au trafic de congestion, provoqué par les automobilistes cherchant une place de stationnement, et à celui de passage des véhicules qui ne faisaient que traverser la ville, sans s’y arrêter.
https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/10/en-espagne-la-revolution-pietonne-reussie-de-pontevedra_5395384_1652612.html
10/12/2018
#Urgenceclimat. La ville du nord-ouest de l’Espagne a vu, en vingt ans, les émissions de CO2 chuter de 60 % dans son centre-ville et les déplacements à pied bondir à 70 %.
international
Controverse autour du prix des droits de l’homme décerné par la France à deux ONG israélienne et palestinienne
La garde des sceaux Nicole Belloubet, le 21 novembre à l’Elysée. ALAIN JOCARD / AFP Devant les pressions, le gouvernement français a cédé. La ministre de la justice Nicole Belloubet devait présider lundi 10 décembre la remise du prix des droits de l’homme, doté par les services du premier ministre Edouard Philippe. Composé de membres de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), le jury a décidé d’honorer cinq lauréats cette année. L’un des prix est une récompense commune à deux ONG, israélienne et palestinienne, B’Tselem et l’association Al-Haq. Une façon de saluer leur travail de documentation de l’occupation, dans un environnement hostile, et ce le jour de la célébration de la déclaration universelle des droits de l’homme, signée il y a soixante-dix ans. Or la garde des sceaux a décidé en fin de semaine dernière de ne pas participer à la cérémonie, contrairement à ce que la CNCDH avait annoncé le 28 novembre. « Son agenda ne le lui permettait pas, regardez ce qui se passe actuellement », se justifie-t-on dans son entourage, en référence aux réunions de crise autour d’Emmanuel Macron, ce lundi. Mais aucun autre membre du gouvernement n’a été dépêché à sa place. C’est finalement François Croquette, ambassadeur pour les droits de l’homme, qui a remis les prix, après des jours orageux de négociations en coulisses. L’affaire est d’autant plus embarrassante que les deux ONG sont connues et appréciées de longue date par les diplomates français et leurs collègues européens, chargés des territoires palestiniens. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La Commission des droits de l’homme inquiète du choix de son nouveau président Ce revirement de Mme Belloubet a coïncidé avec une campagne de pressions exercées en Israël par des responsables de la droite, et en France, par les organisations juives. Jusqu’au dernier moment, elle a visé à empêcher la présence d’un représentant du gouvernement français. Cette absence à cette cérémonie est en soi exceptionnelle, seulement constatée deux fois en trente ans. « Ce n’est pas à l’Elysée que ça coinçait » Selon nos informations, l’absence de tout membre du gouvernement relèverait d’une décision de Matignon. « Ce n’est pas à l’Elysée que ça coinçait », résume une source diplomatique. Autorité indépendante reconnue par l’ONU, la CNCDH compte 64 membres – représentants de la société civile et des syndicats, 30 experts et représentant des cultes et des loges maçonniques, plus les représentants de l’Assemblée, du Sénat, du Conseil économique, social et environnemental. Ils sont formellement nommés par le premier ministre, mais leur totale indépendance est garantie par une entité réunissant le vice-président du Conseil d’Etat, le premier président de la Cour de cassation et le premier président de la Cour des comptes.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/controverse-autour-du-prix-des-droits-de-l-homme-decerne-par-la-france-a-deux-ong-israelienne-et-palestinienne_5395378_3210.html
10/12/2018
La ministre de la justice Nicole Belloubet a renoncé lundi à présider la cérémonie de remise d’une récompense aux associations B’Tselem et Al-Haq, mises en cause par Israël et les organisations juives de France.
les-decodeurs
Non, l’Union européenne n’a pas envoyé de blindés aider Emmanuel Macron
C’est une image qui a fait le tour du monde : face aux « gilets jaunes », la France a déployé, samedi 8 décembre, des véhicules blindés de la gendarmerie, rarement sortis face à des manifestants. Mais une nouvelle rumeur court au sein des partisans du mouvement : ces blindés seraient européens. ⚡🇫🇷 Tout un symbole, les blindés Français sur les #ChampsElysees ont l'emblème du drapeau européen #UE , la France… https://t.co/lYiJwNk0wx — NatGermain (@Nathalie Germain🇫🇷) En cause, l’emblème européen figurant sur l’un des véhicules. Il n’en fallait pas plus à certains pour y voir la main d’une « gendarmerie européenne » appelée en renfort par Emmanuel Macron. En réalité, il n’y avait qu’un seul blindé siglé du drapeau européen. Selon CheckNews (le site de fact checking de Libération), qui a contacté la gendarmerie, ce blindé avait servi dans le cadre d’entraînements européens. Rien à voir non plus avec l’EuroGendFor, la Force de gendarmerie européenne (limitée à la coopération de sept pays : Espagne, France, Italie, Pays-Bas, Pologne, Portugal et Roumanie), accusée par certains d’être venue prêter main-forte à la police française.
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/12/10/non-l-union-europeenne-n-a-pas-envoye-de-blindes-aider-emmanuel-macron_5395367_4355770.html
10/12/2018
La présence d’un emblème européen sur un véhicule blindé déployé samedi à Paris a suffi à lancer la rumeur.
m-le-mag
Aux Etats-Unis, des fêtes délirantes pour dévoiler le sexe des futurs bébés
Le secret du sexe de l’enfant ne sera révélé qu’à la « gender party ». MCCALLK69 / ISTOCKPHOTO / GETTY IMAGES C’est la nouvelle mode aux Etats-Unis parmi les parents qui attendent un enfant : les fêtes de gender reveal. Ou la révélation – publique – du sexe du bébé à venir. Plutôt que d’apprendre dans l’intimité du cabinet d’échographie s’il s’agit d’un garçon ou d’une fille, les couples américains font maintenant participer famille et amis à leur découverte. Voire toute la planète : les gender reveal parties occupent plus de 500 000 pages sur YouTube. Le principe repose sur la complicité de l’échographe, du gynécologue ou du laboratoire d’analyse de l’ADN qui, au lieu de révéler le sexe de l’enfant aux parents, inscrivent l’information dans une enveloppe scellée. Celle-ci est transmise à la personne désignée par le couple pour garder le secret et organiser la fête. « J’étais très flattée d’avoir été choisie comme maîtresse de cérémonie, mais en même temps paniquée par la responsabilité », raconte Julianne, une assistante médicale du Texas, qui a organisé la gender reveal party de sa belle-sœur Dany et de son frère James, cinq mois avant la naissance du bébé. Dans un cupcake, un tuyau ou des pétards Les détails pratiques varient d’une famille à l’autre. Dany et James avaient choisi la formule « ballons ». En secret, Julianne a acheté l’accessoire. Un grand ballon noir, une couleur « neutre ». A l’instant fatidique, devant tous les invités réunis, Dany a percé le ballon. Une pluie de confettis bleus s’en est échappée, signifiant qu’il s’agissait d’un garçon. D’autres couples choisissent les cupcakes, fourrés à la crème rose ou bleue, qui livrent leur secret dès que la future mère entame le dessert (la pâtisserie est dépositaire du secret) ; les pétards, qui dégagent une fumée rouge ou bleue ; le tuyau d’arrosage, qui déverse de l’eau colorée, voire la lance à incendie du camion de la caserne, pour le pompier Ray Hernandez et sa femme, Dorya, fin novembre, à Houston. La mise en scène est digne des comptes à rebours du 31 décembre à Times Square. Cinq, quatre, trois… Tout le monde saute et hurle de joie quel que soit le résultat. La fête est accompagnée de concours de pronostics. Les invités choisissent des badges : « Team lashes » ou « Team staches » (« équipe cils » ou « équipe moustaches »), selon la thématique recommandée sur Pinterest. La mise en scène est digne des comptes à rebours du 31 décembre à Times Square. Cinq, quatre, trois… Hystérie garantie. Tout le monde saute et hurle de joie quel que soit le résultat.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/10/aux-etats-unis-des-fetes-delirantes-pour-devoiler-le-sexe-des-futurs-bebes_5395362_4500055.html
10/12/2018
Fille ou garçon ? La surprise est révélée à la famille, aux amis et aux parents eux-mêmes lors des « gender reveal parties », dans une débauche de rose ou de bleu. Et le film de la fête est diffusé sur YouTube.
les-decodeurs
Les « gilets jaunes », récit d’un mouvement hors norme né sur Facebook
Le vent a commencé à souffler au début de l’automne ; samedi 8 décembre, il soufflait encore à Paris et dans plusieurs villes de France, théâtres de nombreux rassemblements de « gilets jaunes », pour l’« acte IV » de la mobilisation. Il s’est d’abord fait sentir avec l’événement Facebook créé le 10 octobre par Eric Drouet, un chauffeur routier, pour protester contre la hausse des taxes sur les carburants. A nouveau quand huit jours plus tard, l’hypnothérapeute Jacline Mouraud a publié une vidéo de quatre minutes pour dénoncer la « chasse » aux automobilistes. Puis trois jours après, encore, via une pétition réclamant la baisse des prix à la pompe publiée sur la plate-forme Change.org par Priscillia Ludosky, une micro-entrepreneuse de 33 ans. L’hypnothérapeute Jacline Mouraud est l’une des premières à avoir incarné le mouvement des « gilets jaunes ». Facebook / Jacline Mouraud Derrière, les premiers signes annonciateurs de l’orage ne tardent pas à venir. La pétition de Priscillia Ludosky récolte des milliers, puis des centaines de milliers de signatures en quelques jours. A ce jour, elle en a plus de 1,1 million. Les compteurs de la vidéo de Jacline Mouraud s’affolent aussi : plus de six millions de vues et des milliers de commentaires pour cette inconnue du grand public, qui se retrouve propulsée sur les plateaux des grandes chaînes de télévision. En quelques jours, un climat s’installe sur Facebook : des centaines d’autres vidéos, images, pétitions et coups de gueule en tous genres interpellent l’exécutif. Plusieurs décisions récentes, toutes aussi impopulaires, sont également citées : la limitation de la vitesse de circulation à 80 km/h sur les routes secondaires, la baisse des APL ou encore la suppression des contrats aidés. Face aux critiques, le gouvernement tente de se défendre tant bien que mal, en rappelant que l’augmentation des taxes n’explique qu’une part relative de la flambée des prix des carburants et en plaidant en faveur de la transition écologique. « Je compte bien tenir le cap », assure Edouard Philippe dans une interview à La Dépêche du Midi le 26 octobre. Mais ce que le premier ministre ignore, c’est que la déferlante qui se prépare est d’une tout autre nature que celles que l’exécutif a affrontées depuis mai 2017. C’est l’histoire de la naissance d’un mouvement hors norme que ni le gouvernement, ni les médias, ni sans doute même la plupart de ses membres, n’ont vu venir. Facebook Live comme lieu de débat Fin octobre, le mouvement de protestation naissant a déjà un motif de colère commune. Il se trouve rapidement un but : bloquer les routes un peu partout en France le 17 novembre. Pour parachever le tout, il se trouve aussi un emblème : le « gilet jaune », signe de ralliement des automobilistes - qui possèdent tous ce vêtement de sécurité depuis que la loi a imposé de l’avoir dans son véhicule, en 2008.
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/12/10/les-gilets-jaunes-recit-d-un-mouvement-hors-norme-ne-sur-facebook_5395359_4355770.html
10/12/2018
Le mouvement, né sur les réseaux sociaux pour protester contre les prix à la pompe, s’est mué en vaste colère populaire qui ébranle le gouvernement.
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« Le Monde des lecteurs » - Gilets jaunes : interrogations sur le Grenelle de la fiscalité
« Les retraites moyennes du public et des régimes spéciaux sont 40 % supérieures à la moyenne des retraites du privé. Ce qui représente, sur un total de 312 milliards d’euros par an toutes catégories confondues, un surcoût d’au minimum 30 milliards d’euros par an (à comparer aux 3 milliards d’ISF !!!) » DPA / Photononstop / DPA / Photononstop Sur le blog « Le Monde des lecteurs », les lectrices et lecteurs du « Monde » peuvent commenter l’actualité. Vous pouvez contacter la rédaction par courriel : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr. Je ne comprends pas la proposition de Philippe Aghion qui appelle à un « Grenelle de la fiscalité » dans Le Monde du 4 décembre, de sortir temporairement de la contrainte budgétaire européenne des 3 % de déficit. Allons-nous indéfiniment continuer ce que nous faisons depuis plus de 30 ans. Vous parlez également d’introduire une taxe de solidarité sur les patrimoines mobiliers pour financer la transition. Pourquoi pas ? Mais l’urgence me semble-t-il est de réduire les dépenses publiques en s’attaquant enfin à la plus grande injustice en France : les retraites moyennes du public et des régimes spéciaux sont 40 % supérieures à la moyenne des retraites du privé. Ce qui représente, sur un total de 312 milliards d’euros par an toutes catégories confondues, un surcoût d’au minimum 30 milliards d’euros par an (à comparer aux 3 milliards d’ISF !!!), soit 450 euros payés en plus par an par chaque Français, bébé compris, pour financer les avantages de retraite de ces « pauvres chéris » qui eux ne représentent que 25 % des anciens actifs. Valeur du montant moyen de la retraite ? Depuis le début de la réflexion actuelle sur les retraites, on donne un montant moyen de retraite, sans différencier les paquets correspondants, c’est parfaitement humiliant. J’aimerais connaître la moyenne des retraites et le nombre moyen d’années passées en retraite pour chaque catégorie : public, régimes spéciaux et privé. Ce n’est tout de même pas très compliqué. Personne ne veut en parler de ces différences par catégorie mais tout ce qui est non-dit cache un problème. Pourquoi tout ce « pognon de dingue » pour les retraites de ces « pauvres chéris » plutôt que d’investir dans le logement, les infrastructures de transport, etc. Triste pays, je ne comprends pas que les citoyens, qui sont tous des contribuables, acceptent d’être traités de cette manière et depuis plus de 20 ans (1995). Nos dirigeants politiques sont tous des charlots et M. Macron s’est complètement « charlotisé » en l‘espace de deux ans. Affligeant ! Marie Favre, Paris
https://www.lemonde.fr/blog-mediateur/article/2018/12/10/le-monde-des-lecteurs-gilets-jaunes-interrogations-sur-le-grenelle-de-la-fiscalite_5395352_5334984.html
10/12/2018
Marie Favre se demande « pourquoi tout ce « pognon de dingue » pour les retraites de ces « pauvres chéris » plutôt que d’investir dans le logement, les infrastructures de transport. Triste pays, je ne comprends pas que les citoyens, qui sont tous des contribuables, acceptent d’être traités de cette manière et depuis plus de 20 ans (1995) »
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« Le Monde des lecteurs » - Gilets jaunes : la planète rit jaune
« Tout ça pour ça, Emmanuel Macron vient de capituler et a décidé de faire de la politique comme son illustre prédécesseur. » Yoan Valat / AP Sur le blog « Le Monde des lecteurs », les lectrices et lecteurs du « Monde » peuvent commenter l’actualité. Vous pouvez contacter la rédaction par courriel : courrier-des-lecteurs@lemonde.fr. Tout ça pour ça, Emmanuel Macron vient de capituler et a décidé de faire de la politique comme son illustre prédécesseur. La planète rit « jaune » et Donald Trump ironise sur le grand défenseur des Accords de Paris et le donneur de leçons qu’est notre Président. Grâce aux gilets jaunes le droit pour nos enfants et petits-enfants à avoir plus de cancer a été défendu avec brio. Je tiens à saluer la prestation de tous les journalistes français pour avoir soutenu inconditionnellement ce mouvement et leur avoir donné une place incroyable dans tous les médias. Nous avons un formidable regard critique et condescendant lorsque nous jugeons le populisme chez nos voisins européens comme la Hongrie de Victor Orban mais le populisme habillé chez nous en jaune a apparemment toutes les vertus. Quelle splendide défaite. Bravo à tous les participants. Eric Vonesch, Strasbourg
https://www.lemonde.fr/blog-mediateur/article/2018/12/10/le-monde-des-lecteurs-gilets-jaunes-la-planete-rit-jaune_5395322_5334984.html
10/12/2018
Eric Vonesch estime que « nous avons un formidable regard critique et condescendant lorsque nous jugeons le populisme chez nos voisins européens comme la Hongrie de Victor Orban mais le populisme habillé chez nous en jaune a apparemment toutes les vertus ».
l-epargne-solidaire
Enercoop, l’énergie militante qui œuvre pour les citoyens
Une initiative citoyenne qui répond aux problématiques environnementales et sociales actuelles et donne le pouvoir à ses sociétaires. Pouvez-vous nous présenter Enercoop en quelques phrases ? Enercoop est un acteur économique intervenant sur le marché de la fourniture d’électricité. Cet environnement extrêmement concurrentiel nous confronte à de gros acteurs comme Engie, EDF ou encore Total, pour n’en citer que quelques-uns. Nous portons cependant trois marqueurs distinctifs : ⁃ Nous fournissons une énergie d’origine 100 % renouvelable. ⁃ Nous disposons d’un statut coopératif. Cela signifie notamment que notre lucrativité est limitée, également que nous n’avons pas d’actionnaires mais des sociétaires qui participent directement à la gouvernance de la coopérative sous le principe « une personne = une voix ». ⁃ Notre fonctionnement est décentralisé, et organisé en réseau de coopératives, au plus près des enjeux locaux, dans l’objectif de créer un circuit court de l’énergie. Vous expliquez militer pour un service citoyen de l’énergie, qu’est-ce que cela signifie ? Enercoop s’est créé à la suite de la dérégulation du marché de l’énergie en France. En ouvrant ce marché, le service public de l’énergie a ainsi quasi disparu, et nous avons souhaité y pallier en y substituant un service « citoyen ». Nous sommes ainsi financés et dirigés par les citoyens, notamment grâce à notre statut. Nos objectifs d’intérêt collectif et d’intérêt général sont véhiculés par ces citoyens, qui peuvent être nos clients, nos sociétaires, ou encore nos partenaires. Vous partagez de nombreux points communs avec la MAIF : des pratiques de gouvernance, mais aussi un certain statut, lié notamment au fait que vous n’avez pas d’actionnaires ; que vous confère cette indépendance et en quoi cela est important pour vous ? C’est un système très protecteur : quelqu’un qui choisit de soutenir significativement Enercoop en apportant du capital ne dispose pas pour autant d’un droit de regard ou d’une priorité sur les prises de décisions. Nous ne pouvons en aucun cas être à la merci d’un actionnaire majoritaire. De même, Enercoop n’est techniquement pas rachetable. Nous sommes une coopérative qui appartient collectivement à ses 33 000 sociétaires, et notre capital est indivisible. J’ajoute que nous partageons aussi avec la MAIF la même baseline : l’assureur militant et l’énergie militante ! Cela souligne en effet des valeurs communes. De quelles manières vous soutient la MAIF ? Nous sommes en discussions permanentes avec la MAIF, et loin d’être au bout de notre logique partenariale. Cet accord de partenariat repose sur plusieurs axes : ⁃ La MAIF soutient financièrement Enercoop. Nous avons fait une levée de fonds il y a deux ans auprès d’acteurs de la finance solidaire, et la MAIF a fait partie du tour de table, via son fonds MAIF Innovation Sociale et Solidaire (MISS). ⁃ La MAIF est cliente d’Enercoop, aujourd’hui pour l’alimentation du MAIF Social Club à Paris. ⁃ La MAIF a une réelle volonté de faire preuve de pédagogie vis-à-vis de ses sociétaires, en s’engageant durablement sur la question énergétique, au cœur des enjeux de mobilité, d’habitat, de finance et de santé. Nous réfléchissons ensemble à des animations communes entre nos sociétaires respectifs.
https://www.lemonde.fr/l-epargne-solidaire/article/2018/12/10/enercoop-l-energie-militante-qui-uvre-pour-les-citoyens_5395316_5380848.html
10/12/2018
Emmanuel Soulias, directeur général d’Enercoop, nous présente cet acteur à part dans le paysage énergétique français. Une initiative citoyenne qui répond aux problématiques environnementales et sociales actuelles et donne le pouvoir à ses sociétaires.
sante
Des préservatifs remboursés à 60 % à partir de ce lundi
Les préservatifs de la marque Eden peuvent figurer sur une ordonnance et être délivrés en pharmacie. YASUYOSHI CHIBA / AFP A compter de ce lundi 10 décembre, il est possible, pour la première fois, de se faire prescrire – et donc de se faire en partie rembourser – des préservatifs masculins par un médecin ou une sage-femme. Cette prescription, qui pourra être faite aussi bien à des hommes qu’à des femmes, ne concerne pas tous les préservatifs. Seuls ceux de la marque Eden, du laboratoire français Majorelle, une PME spécialisée dans la gynécologie et l’urologie, pourront figurer sur l’ordonnance et être délivrés en pharmacie. Ce fabricant est, en effet, le seul à avoir sollicité le feu vert de la Haute Autorité de santé (HAS) et il est donc le seul à avoir obtenu, en juin, un avis favorable, préalable à un financement par la « Sécu ». « Pour certains, c’est trop cher » Concrètement, l’Assurance-maladie prendra à sa charge 60 % du coût de ces préservatifs, sur la base d’un prix de vente de 1,30 euro la boîte de six, de 2,60 euros la boîte de douze et de 5,20 euros la boîte de vingt-quatre. Les complémentaires santé pourront choisir de prendre la différence à leur charge. Cette mesure a été annoncée par la ministre des solidarités et de la santé, Agnès Buzyn, mardi 27 novembre, quatre jours avant le 1er décembre, date annuelle de la Journée mondiale de lutte contre le sida. « Pour certains, [le préservatif] c’est trop cher », avait fait valoir la ministre sur France Inter, en rappelant qu’« acheter une boîte à 3, 4, 5 euros, ça a un coût pour un adolescent. » Près de deux millions de couples hétérosexuels et homosexuels seraient des utilisateurs déclarés de préservatif en tant que moyen de contraception et/ou comme moyen de prévention des infections sexuellement transmissibles, selon la HAS. Les indicateurs de santé sexuelle chez les jeunes sont, en revanche, jugés « préoccupants ». Les 15-29 ans représentent près d’un quart des 6 000 nouveaux cas de séropositivité VIH découverts chaque année.
https://www.lemonde.fr/sante/article/2018/12/10/des-preservatifs-rembourses-a-60-a-partir-de-ce-lundi_5395309_1651302.html
10/12/2018
Cette mesure avait été annoncée par la ministre de la santé, Agnès Buzyn, le 27 novembre, quatre jours avant la Journée mondiale de lutte contre le sida.
economie
A Toronto, le projet de « ville Google » en zone de turbulences
Vue de Toronto (Ontario), en octobre 2017. MARK BLINCH / REUTERS Sur la rive du lac Ontario, à Toronto, « Google City » affronte des vents contraires. La société Sidewalk Labs, filiale d’Alphabet comme Google, développe depuis un an, dans la métropole canadienne, un projet futuriste de « smart city » truffée de capteurs, gérée grâce à une collecte massive de données numériques et des systèmes d’intelligence artificielle. Un aménagement porté par la province, la ville et le gouvernement canadien, associés dans l’organisme Waterfront Toronto, chargé de mener à bien la reconversion de vastes friches portuaires. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le projet de « ville Google » prend forme à Toronto Or rien ne va plus entre la province et ses deux partenaires, en désaccord sur ce projet, baptisé Quayside. Le gouvernement progressiste-conservateur de l’Ontario, élu en juin, vient de limoger ses trois représentants au conseil d’administration de Waterfront Toronto, nommés par le gouvernement précédent, dirigé par les libéraux. Parmi les trois administrateurs remerciés figurent la présidente de Waterfront Toronto, Helen Burstyn, et son directeur exécutif, Michael Nobrega. Le troisième est le président de l’université de Toronto, Meric Gertler. La quatrième représentante de la province, la promotrice Julie Di Lorenzo, avait démissionné au mois d’août, estimant que le partenariat avec Google n’était pas « dans le meilleur intérêt » de Waterfront Toronto ni du Canada. Le ministre provincial des infrastructures, Monte McNaughton, qui a dénoncé la pression du pouvoir fédéral en faveur de ce projet, a indiqué vouloir lui donner une nouvelle direction, alors que les doutes et les critiques se multiplient sur les conditions de l’accord passé avec Sidewalk Labs et la gestion des données dans le futur quartier. Polémique sur la confidentialité des données Le monde de l’urbanisme observe avec une curiosité mâtinée d’inquiétude le développement de ce projet, première incursion à grande échelle d’un géant du numérique dans l’aménagement d’une ville La situation s’est dégradée mercredi 5 décembre, quand un rapport de la vérificatrice générale de l’Ontario – l’équivalent d’une cour régionale des comptes – a vertement critiqué la gouvernance de Waterfront Toronto et l’accord avec la filiale d’Alphabet, passé selon elle dans la précipitation. Le rapport demande au gouvernement provincial de « réévaluer » le projet. « J’ai été choqué de découvrir que le conseil n’avait eu qu’une semaine pour examiner la plus importante transaction de son histoire avant d’être appelé à l’approuver », a critiqué M. McNaughton, qui a prévenu qu’il « ne spéculerait pas sur ce qui arriverait à l’avenir » à la proposition de Google.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/10/a-toronto-le-projet-de-ville-google-en-zone-de-turbulences_5395301_3234.html
10/12/2018
La province canadienne de l’Ontario souhaite revoir le partenariat noué avec Sidewalk Labs, une société sœur de Google, pour développer une « smart city » futuriste.
international
Yémen : l’ONU propose aux belligérants le contrôle conjoint du port stratégique de Hodeïda
Hodeïda est une ville portuaire sur la mer Rouge par où transitent 70 % des importations yéménites. ABDULJABBAR ZEYAD / REUTERS L’envoyé spécial des Nations unies (ONU) pour le Yémen propose l’abandon par les rebelles du port stratégique de Hodeïda dans le cadre d’un cessez-le-feu, pour le placer sous contrôle conjoint des belligérants, selon un document consulté lundi 10 décembre par l’Agence France-Presse (AFP). Double tutelle L’ONU propose que la coalition militaire progouvernementale sous commandement saoudien cesse ses opérations militaires contre HodeÏda en échange d’un retrait des combattants houthistes de la ville portuaire. Hodeïda, par où entre l’essentiel de l’aide humanitaire au Yémen, serait ensuite placée sous la double tutelle du gouvernement et des rebelles, avec la supervision des Nations unies. Les négociateurs gouvernementaux devaient donner une réponse dans la journée, ont fait savoir à l’AFP des membres de leur délégation. Lire notre analyse (en édition abonnés) : Au Yémen, guerre d’usure autour d’Hodeïda Au cœur des négociations Le sort de Hodeïda est au cœur des discussions actuellement en cours en Suède entre belligérants, sous les auspices du médiateur de l’ONU, le Britannique Martin Griffiths. Hodeïda serait même la question la plus « difficile » à l’ordre du jour des consultations, selon un responsable onusien. La situation humanitaire s’est, en effet, récemment détériorée en raison de l’insécurité à Hodeïda, ville portuaire sur la mer Rouge par où transitent 70 % des importations yéménites, selon le Programme alimentaire mondial (PAM). Les forces progouvernementales tentent de reprendre depuis des mois cette ville aux rebelles, soutenus par l’Iran, au prix de combats meurtriers. Le gouvernement yéménite exige vainement le retrait intégral des rebelles du port et les accuse de l’utiliser pour importer des armes.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/yemen-l-onu-propose-aux-belligerants-le-controle-conjoint-du-port-strategique-de-hodeida_5395298_3210.html
10/12/2018
Hodeïda serait même la question la plus « difficile » à l’ordre du jour des consultations en cours en Suède sous l’égide de l’ONU, selon un responsable onusien.
disparitions
Mort de Bernard Giroux, responsable de l’information au sein du patronat
Bernard Giroux a dirigé le service de presse du CNPF (ex-Medef) de 1989 à 2003. Xerfi-Canal Il avait un humour qui l’aidait à ne jamais se prendre au sérieux et il aimait passionnément la vie. Grand manitou de l’information sociale au sein du patronat, Bernard Giroux est mort lundi 3 décembre, à Vincennes (Val-de-Marne), des suites d’un cancer, à l’âge de 63 ans. Né le 12 janvier 1955, à Vincennes, titulaire d’un diplôme d’études approfondies de droit public et diplômé de l’Institut d’études politiques de Paris, il démarre sa carrière, en 1979, comme assistant parlementaire. Vite repéré par le grand patron de l’information du Conseil national du patronat français (CNPF), Michel Frois, dit « le colonel », il entre en 1980 dans l’organisation patronale, comme chargé des relations avec la presse sociale. A ce poste qu’il conservera jusqu’en 1989, Bernard Giroux déploie tous ses talents. Il sait distiller avec humour et précision ses informations aux journalistes qui « sont comme des chats, ils savent quand on ne les aime pas ». S’il porte la bonne parole patronale, il respecte la liberté de jugement et l’indépendance de ses interlocuteurs avec lesquels il s’efforce d’établir des relations personnelles. Il se coule avec autant d’aisance dans le monde des médias comme dans l’univers patronal. Il a un petit côté « pipelette » qu’il ne cherche pas à dissimuler. Il fait son miel des négociations sociales, ces grandes messes qui rituellement durent toute la nuit au siège du CNPF et s’achèvent au petit matin. Il y noue des relations cordiales avec les responsables syndicaux. Apparatchik au grand cœur Bernard Giroux connaît tous les petits secrets du monde patronal, les coups tordus, les grandes manœuvres, les petites combines. Directeur adjoint de l’information du CNPF et responsable de l’information sociale, de février 1989 à septembre 1992, puis directeur du service de presse, il conserve ses fonctions lorsque le CNPF se transforme, en 1998, en Medef (Mouvement des entreprises de France). Bernard Giroux connaît tous les petits secrets du monde patronal, les coups tordus, les grandes manœuvres, les petites combines En avril 2003, Ernest-Antoine Seillières le congédie. Il ne lui en tient pas rigueur et dans son livre Medef, confidences d’un apparatchik (L’Archipel, 2013), il croque des portraits plutôt flatteurs des cinq patrons des patrons qu’il a servis : François Ceyrac (1912-2010), Yvon Gattaz, François Perigot, Jean Gandois et le baron Seillières. Mais il ne cache pas son admiration pour François Ceyrac et Yvon Chotard (1921-1998), celui qui fut le grand négociateur du CNPF et dont il fut très proche, sans jamais réussir à se faire élire président.
https://www.lemonde.fr/disparitions/article/2018/12/10/mort-de-bernard-giroux-responsable-de-l-information-au-sein-du-patronat_5395294_3382.html
10/12/2018
Entré en 1980 au CNPF (ex-Medef), il restera vingt-trois ans au cœur de l’organisation patronale dont il dirigera le service de presse de 1989 à 2003. Bernard Giroux est mort le 3 décembre, à Vincennes, à l’âge de 63 ans.
les-decodeurs
Non, l’ONU n’a pas condamné la France pour la répression des « gilets jaunes »
C’est une nouvelle rumeur dans une crise déjà caractérisée par son nombre d’intox : un « conseil de Genève des droits de l’homme et de la justice » aurait condamné la France pour la répression du mouvement des « gilets jaunes ». L’information date de la fin novembre, mais n’en finit pas de se répandre, reprise ce week-end par la directrice de la WebTV Le Média, Aude Lancelin, par exemple : Cet organisme est apparu en mai 2018 Problème : comme l’ont déjà relevé 20 Minutes ou Le Dauphiné libéré, ce « conseil de Genève » n’a rien d’officiel et n’a rien à voir avec le Conseil des droits de l’homme des Nations unies, dont le siège est à Genève. Baptisé en anglais « Geneva Council For Human Rights and Justice », cet organisme est apparu en mai 2018. Son compte Twitter publie essentiellement des messages en langue arabe. Ce « conseil » a d’ailleurs émis des recommandations qui portent essentiellement sur le Proche-Orient : Yémen, Syrie, Arabie saoudite, Qatar… Sur son site officiel, réalisé à l’aide de la plate-forme de blogs Wordpress, ne figurent aucune mention légale ni aucun membre du bureau de cette association mystérieuse. L’ONG ne mentionne qu’une seule conférence, qu’elle aurait organisée au Danemark, et se borne à quelques communiqués, dont le ton laisse penser à une émanation d’une puissance opposée à l’Arabie saoudite. Comme le notait 20 Minutes, le contenu du site reprend mot pour mot ce qu’on trouve sur un autre site en français, parisfrancophonic.com, également conçu sous Wordpress, et tout aussi douteux.
https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/12/10/non-l-onu-n-a-pas-condamne-la-france-pour-la-repression-des-gilets-jaunes_5395290_4355770.html
10/12/2018
Un « conseil de Genève des droits de l’homme » aurait condamné la France. Problème : cette association inconnue n’a rien d’officiel ni aucun rapport avec l’ONU.
afrique
CAN 2019 : le pays hôte sera connu le 9 janvier
Lors d’une réunion de la Confédération africaine de football à Accra, le 30 novembre 2018. De g. à dr. : Amaju Pinnink (vice-président), Ahmad Ahmad (président) et Essadik Alaoui (secrétaire général). CRISTINA ALDEHUELA / AFP Le pays organisateur de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2019, retirée au Cameroun fin novembre, sera connu le « 9 janvier » à l’issue de la réunion du comité exécutif de la Confédération africaine de football (CAF), a annoncé à l’AFP son président, Ahmad Ahmad, lundi 10 décembre à Paris. Après la clôture de l’appel aux candidatures programmée le 14 décembre, « tout sera finalisé le 25 décembre pour faire sortir une “short list” de candidats avec leur évaluation et des notations claires. Le comité exécutif va se réunir le 9 janvier à Dakar, où nous donnerons la décision », a expliqué Ahmad Ahmad dans un entretien à l’AFP. Lire aussi CAN 2019 : le Maroc favori pour remplacer le Cameroun au pied levé Combien de candidatures l’instance a-t-elle reçues pour l’instant ? « D’après mes informations, il y a deux ou trois lettres d’intentions qui sont arrivées », a répondu le président de la CAF. Comme le Maroc, annoncé comme le candidat le plus crédible pour organiser la première CAN de l’histoire à 24 équipes, du 15 juin au 13 juillet 2019 ? « Je ne sais pas, mais l’Afrique du Sud a envoyé une lettre d’intention. Il y a deux ou trois pays qui ont demandé le cahier des charges », a-t-il ajouté. L’édition 2021 au Cameroun En ce qui concerne le Congo-Brazzaville, annoncé comme candidat par l’un des vice-présidents de la CAF vendredi avant un démenti du ministre congolais des sports dimanche, Ahmad Ahmad n’a pas voulu confirmer ou infirmer. « Je ne vais pas parler des problèmes internes d’un pays. C’est un problème congolais interne. Voyez plutôt du côté de la fédération et du gouvernement », a-t-il déclaré. En 2014, la CAF, alors présidée par le Camerounais Issa Hayatou, avait attribué les trois prochaines CAN d’un coup : 2019 au Cameroun, 2021 à la Côte d’Ivoire et 2023 à la Guinée. L’instance africaine a finalement retiré fin novembre l’organisation de l’édition 2019 au Cameroun, en raison de retards dans les travaux d’infrastructures et une situation fragile sur le plan sécuritaire. Mais « pour arranger les choses de manière vraiment humaine », la CAF a décidé de confier l’organisation des éditions 2021 au Cameroun et 2023 à la Côte d’Ivoire, a annoncé Ahmad Ahmad, lundi, sur la chaîne de télévision Afrique Média TV. « En 2021 ils seront prêts : on organise la CAN au Cameroun. Et en 2023 on organise en Côte d’Ivoire. C’était la décision prise par le comité exécutif » le 30 novembre à Accra, a-t-il ajouté.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/10/can-2019-le-pays-hote-sera-connu-le-9-janvier_5395283_3212.html
10/12/2018
Après le retrait de l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations au Cameroun, le Maroc et l’Afrique du Sud sont favoris pour accueillir la compétition de football.
societe
Le sort des anciens interprètes afghans de l’armée française en suspens
Manifestation de civils afghans ayant travaillé pour l’armée française demandant l’obtention d’un visa et la protection de la France, le 9 septembre 2018, devant le ministère des armées, à Paris. PHILIPPE LOPEZ / AFP La menace s’est dangereusement rapprochée un matin de 2015. Elias sortait de chez lui lorsqu’il a découvert l’inscription sur le mur de sa maison, à Kaboul, « il faut tuer les infidèles qui ont travaillé avec des étrangers ». Pour cet Afghan d’une trentaine d’années, dont on taira le vrai nom, c’est le début d’une longue course-poursuite avec femme et enfants. En deux ans, la famille déménage cinq fois. Aux yeux des talibans, Elias est un traître. Il fait partie des quelque 800 personnels civils de recrutement local – interprètes, cuisiniers, ouvriers… – ayant travaillé pour les forces françaises lorsqu’elles étaient déployées en Afghanistan, de 2001 à 2014. Un travail bien payé– 950 dollars (834 euros) par mois, cinq fois le salaire moyen – mais qui l’oblige aujourd’hui à vivre avec la peur au ventre et le risque d’être pris pour cible à chaque instant. Elias vit désormais reclus chez lui, avec sa famille. « On vit comme des prisonniers, explique-t-il au Monde, par téléphone. On limite nos sorties au maximum, mais je ne sais pas si je pourrai vivre encore longtemps. » En 2015, l’administration française a refusé sa demande de visa, ainsi qu’à 151 autres personnels civils afghans, sans qu’on leur explique pourquoi. « La France nous a abandonnés », regrette-t-il. Les retards s’accumulent Lorsqu’il était candidat de la présidentielle, Emmanuel Macron avait comparé le sort de ces anciens interprètes afghans à celui des harkis en Algérie, « que nous avons abandonnés, alors qu’ils s’étaient battus dans nos rangs ». « Nous avons commis une faute comparable avec nos interprètes afghans. C’était une trahison », avait-il ajouté. Face à la dégradation de la situation sécuritaire dans le pays, le président a demandé, en février, à faire réexaminer à titre humanitaire les dossiers refusés en 2015. Il a pourtant fallu attendre neuf mois de plus avant que cette démarche se concrétise. Les retards s’accumulent. Ce n’est pas la première fois que les autorités traînent dans ce dossier sensible, géré conjointement par les ministères de l’intérieur, des affaires étrangères et des armées. « Ils se renvoient tous la balle depuis quatre ans », admet une source gouvernementale auprès du Monde. Qader Daoudzai, 33 ans, a été tué le 20 octobre dans un attentat-suicide visant un bureau de vote Caroline Decroix, vice-présidente de l’Association des interprètes afghans de l’armée française, créée en août 2016 pour leur apporter une assistance juridique, estime que « la France semble enfin avoir pris conscience de la nécessité de protéger ces personnes », mais déplore un « retard très dommageable ». Entre-temps, l’un des anciens interprètes afghans des forces françaises est mort. Qader Daoudzai, 33 ans, a été tué le 20 octobre dans un attentat-suicide visant un bureau de vote, où il travaillait comme observateur pour les élections législatives. Lui aussi avait vu sa demande de visa refusée par les autorités françaises.
https://www.lemonde.fr/societe/article/2018/12/10/le-sort-des-anciens-interpretes-afghans-de-l-armee-francaise-en-suspens_5395273_3224.html
10/12/2018
Des ex-personnels civils pour les forces françaises, menacés de mort, ont vu leur demande de visa refusée. Leur cas est réexaminé à titre humanitaire, mais l’opération est opaque.
livres
Emil Ferris remporte le grand prix de la critique BD
Extrait de « Moi ce que j’aime, c’est les monstres », un ouvrage d’Emil Ferris. Le grand prix de la critique BD a été décerné à l’Américaine Emil Ferris pour son album Moi ce que j’aime, c’est les monstres - livre premier, a annoncé lundi 10 décembre l’association ACBD, qui rassemble les journalistes et critiques de bande dessinée. Publié en août, Moi ce que j’aime, c’est les monstres (éditions Monsieur Toussaint Louverture) est le premier roman graphique d’Emil Ferris, 56 ans. Dans cet album puissant, au dessin ébouriffant (réalisé au stylo bille et aux feutres), elle brasse les époques et les récits, d’inspiration autobiographique. Contant l’enfance d’une fillette des années 1960 dans un quartier miséreux de Chicago, la jeune Karen fait chaque jour face à l’horreur et à la souffrance, et se représente en monstre. Quand sa voisine Anka, survivante de la Shoah, meurt dans d’étranges circonstances, elle décide d’enquêter. L’occasion pour l’autrice de plonger ses lecteurs au cœur de l’Allemagne nazie. L’un des « 100 livres de l’année » L’artiste américaine a réalisé son album pendant ses quatre années et demie de convalescence, à la suite d’une méningo-encéphalite contractée après s’être fait piquer par un moustique. L’album récompensé est en lice pour le Fauve d’or d’Angoulême (qui sera décerné à la fin de janvier) et le prix BD Fnac-France Inter (décerné le 16 janvier). Il a également été sélectionné parmi les « 100 livres de l’année » du magazine Lire. En juillet, il a été distingué par trois Eisner Awards au Comic-Con de San Diego, dont ceux de meilleur album et meilleur auteur. L’an dernier, le grand prix ACBD avait été décerné à l’artiste italien Gipi pour La Terre des fils (Futuropolis). Relisez notre critique de l’album : Nous ce qu’on aime, c’est les monstres d’Emil Ferris
https://www.lemonde.fr/livres/article/2018/12/10/emil-ferris-remporte-le-grand-prix-de-la-critique-bd_5395270_3260.html
10/12/2018
L’album « Moi ce que j’aime, c’est les monstres - livre premier », raconte l’enfance d’une fillette des années 1960 dans un quartier miséreux de Chicago, qui enquête sur la mort de sa voisine, survivante de la Shoah.
economie
Electricité : la France pourrait atteindre 85 % de renouvelables en 2050, selon l’Ademe
La centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly, près d’Orléans, le 23 octobre. GUILLAUME SOUVANT / AFP En pleine crise des « gilets jaunes », les discussions sur la transition énergétique se poursuivent. Alors qu’Emmanuel Macron a annoncé, le 27 novembre, les grandes orientations de la France en matière d’énergie pour les dix années à venir, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) a publié, lundi 10 décembre, une nouvelle étude sur le futur électrique de l’Hexagone. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Nucléaire, renouvelables... le détail du plan du gouvernement en matière d’énergie Dans le débat souvent stérile entre partisans du nucléaire et défenseurs des énergies renouvelables, l’établissement public esquisse plusieurs pistes, selon lesquelles le solaire et l’éolien supplanteraient progressivement la domination de l’atome. L’étude que l’agence a menée porte sur les années 2020-2060. Elle analyse plusieurs scénarios de développement des énergies renouvelables(EnR)et de prolongation du parc nucléaire. Selon l’un d’eux, mis en avant par l’Ademe, la France pourrait atteindre en 2050 un mix électrique comportant 85 % d’énergies renouvelables, et plus de 95 % en 2060. « Par ailleurs, pour le consommateur, l’augmentation progressive de la part des EnR dans le mix électrique permet de faire baisser le coût total de l’électricité », affirme l’étude. Lire aussi La France doit clarifier sa politique énergétique Les auteurs de ce document estiment que la prolongation trop longue du parc nucléaire français – au-delà de cinquante ans pour certains réacteurs – et le lancement de la construction de nouveaux réacteurs de type EPR ne sont pas une option à retenir. En cause, la faible compétitivité, à terme, des nouveaux réacteurs nucléaires. « Si l’on se projette sur la période 2030-2035, les énergies solaire et éolienne n’auront plus besoin de soutien public », explique au Monde le président de l’Ademe, Arnaud Leroy. Scénario ambitieux Certes, les énergies renouvelables comme l’éolien et le solaire produisent de l’électricité de manière intermittente, quoique largement prévisible. Mais la baisse des coûts du stockage, les prochaines évolutions technologiques et surtout une très grande maîtrise du réseau électrique et de sa gestion en temps réel pourraient pallier ces difficultés, sou­ligne l’Ademe. Y compris si la France comptait 10 à 15 millions de véhicules électriques en 2035. Article réservé à nos abonnés Lire aussi « L’éolien, oui, mais pas dans mon jardin (ou face à ma plage) » Le nucléaire représente actuellement près de 72 % de la production d’électricité en France, contre 12 % pour les barrages hydroélectriques, 4 % pour l’éolien et 2 % pour le solaire. D’après l’Ademe, la diminution progressive du parc nucléaire jusqu’à 2035 devrait permettre un développement rapide des énergies renouvelables. Ce scénario est plus ambitieux que celui présenté par le gouvernement dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), qui doit être soumise à consultations. « C’est un exercice différent, explique M. Leroy, par ailleurs membre de la direction de La ­République en marche et proche d’Emmanuel Macron. Il s’agit de peser sur le débat à venir et d’éclairer les choix jusqu’en 2060. »
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/10/energie-85-de-renouvelables-en-france-en-2050_5395267_3234.html
10/12/2018
Dans une étude présentée lundi, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie estime que l’Hexagone pourrait quasiment sortir du nucléaire à l’horizon 2060.
international
Brexit : les députés de Westminster se déchirent
Le palais de Westminster, le 7 décembre à Londres. DANIEL LEAL-OLIVAS / AFP S’il fallait une preuve qu’une question aussi complexe que la relation du Royaume-Uni avec l’Union européenne (UE) ne peut être réduite au choix binaire d’un référendum, le spectaculaire éclatement du Parlement britannique qui doit voter, mardi 11 décembre sur le Brexit, la fournit. Au moment du référendum de juin 2016, la Chambre des communes était majoritairement proeuropéenne. D’où le conflit central entre légitimité parlementaire – cœur de la démocratie représentative britannique depuis des siècles – et la légitimité du vote populaire qui a donné 51,9 % des voix au Brexit. Aujourd’hui, la réalité est plus éclatée. Comme le pays lui-même, les deux principaux partis (ils cumulent 572 des 650 sièges de la Chambre des communes) sont non seulement divisés sur le sujet, mais traversés par de multiples courants. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Theresa May joue l’avenir du Brexit et le sien au Parlement de Westminster Les élections législatives de juin 2017 et les positions radicales prises alors par Theresa May, ont renforcé l’image d’un Parti conservateur pro-Brexit. Mais ce raidissement a renforcé la rébellion des tories europhiles. En face, même si les élus travaillistes sont largement pro-européens, le Labour de Jeremy Corbyn a cultivé un discours ambigu. Il a promis de mettre en œuvre le Brexit pour ne pas désespérer sa base populaire anti-UE, tout en formulant des exigences difficilement compatibles avec la sortie de l’Union. Des contorsions que vivent mal certains députés. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Brexit : les Européens retiennent leur souffle Le clivage central, rarement exprimé avec clarté, porte sur le choix entre le maintien d’une forme d’alignement sur l’UE pour préserver l’économie, et une « divergence » profonde avec l’Union destinée à transformer le Royaume-Uni en un paradis fiscal, « libéré » des règles sociales et environnementales prospérant sur le dumping aux portes du continent. L’importance de la souveraineté sur les échanges économiques avec l’UE, la place accordée à l’immigration des Européens, nourrissent aussi les oppositions. Mais les concessions répétées aux Vingt-Sept, qu’a dû opérer Theresa May au fil des négociations et, surtout, l’accord – très éloigné de ses positions initiales – auquel elle est parvenue le 25 novembre, ont encore compliqué la querelle. A la veille de leur vote décisif, on peut arbitrairement classer les députés en six familles.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/brexit-les-deputes-de-westminster-se-dechirent_5395263_3210.html
10/12/2018
L’opposition entre brexiters et « remainers » s’est transformée en raison de l’affrontement d’au moins six camps profondément divisés sur les modalités et les conséquences du Brexit.
international
Theresa May joue l’avenir du Brexit et le sien au Parlement de Westminster
Lors d’une manifestation de soutien au Brexit, à Londres, le 9 décembre 2018. ADRIAN DENNIS / AFP La sortie de l’Union européenne est une question censée avoir été réglée en juin 2016 par le peuple britannique qui l’a approuvée par référendum à 51,9 %. Mais deux ans et demi après, la rupture n’est toujours pas consommée ni même actée. Mardi 11 décembre, après cinq journées de débat, la Chambre des Communes devrait se prononcer sur l’accord de divorce que Theresa May a laborieusement négocié avec l’UE et qui, le 25 novembre, a été approuvé par les 27 Etats membres de l’Union. A moins d’une surprise, tout porte à croire qu’une majorité de députés de Westminster vont voter contre le projet de loi destiné à approuver ce « deal ». Un tel rejet pourrait déclencher au Royaume-Uni une crise politique aux multiples issues possibles : démission de Mme May, sortie de l’UE dans un total vide juridique (« no deal »), nouvelles élections, voire second référendum susceptible d’annuler la décision populaire de 2016. Longtemps, la première ministre a cherché à contourner le Parlement. Seule une procédure judiciaire et la pression de ses collègues députés l’ont contrainte à passer sous leurs fourches caudines. Faute d’avoir cherché à rassembler des élus de tous bords sur son texte, Mme May court, selon tous les observateurs, au-devant d’une défaite humiliante. Au point que dimanche 9 décembre, le Sunday Times faisait état de pressions tendant à retarder le vote pour lui permettre de débarquer à Bruxelles en « balançant un coup de sac à main », comme l’avait fait Margaret Thatcher pour imposer ses vues à l’UE. Mme May, elle, chercherait à obtenir d’ultimes aménagements aptes à sauver le vote de mardi. Rapidement démentie par le ministre du Brexit, Stephen Barclay, l’hypothèse d’un tel ajournement restait pendante, lundi 10 décembre, veille même du vote, confirmant l’impasse pour la première ministre et son isolement croissant. Au lieu de concentrer ses efforts sur les réseaux politiques de Westminster, Theresa May s’est bizarrement lancée, début décembre, dans une quasi tournée électorale à travers le pays, comme si les électeurs – en réalité las du Brexit – allaient faire pression sur leurs députés. En parallèle, le gouvernement a diffusé des informations alarmantes sur les pénuries qui menacent en cas de « no deal ». L’argument répété par Mme May est simple : l’accord signé avec l’UE est « le seul possible » et il est « bon pour le pays ». Il met en œuvre le Brexit en stoppant la libre entrée des Européens et les contributions financières à l’UE. Mais plus elle déployait d’efforts pour convaincre, plus la liste des députés conservateurs hostiles à son texte s’est allongée, pour dépasser la centaine.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/theresa-may-joue-l-avenir-du-brexit-et-le-sien-au-parlement-de-westminster_5395254_3210.html
10/12/2018
L’accord de divorce négocié entre Theresa May et l’Union européenne est soumis au vote mardi, dans un climat de fronde contre la première ministre britannique et son projet.
planete
Un « principe d’innovation » porté par l’industrie chimique pourrait entrer dans le droit européen
COLCANOPA Instaurer un « principe d’innovation ». L’idée sonne comme une belle promesse, innocente comme le bon sens. Elle pourrait pourtant gravement saper la protection de l’environnement et de la santé publique. Car ce concept qui s’apprête à faire une entrée officielle dans la législation européenne n’a pas été élaboré par des responsables publics. Il a été imaginé par des industriels soumis à des réglementations très strictes : tabac, pesticides, substances chimiques ou pétrole. Ce « principe d’innovation » figure en effet en préambule du texte établissant le prochain programme de recherche de l’Union européenne (UE) qui distribuera près de 100 milliards d’euros en six ans. Appelé « Horizon Europe », il doit être discuté et mis au vote mercredi 12 décembre au Parlement européen en séance plénière. Que dit ce « principe » ? En des termes très généraux, que « l’impact sur l’innovation devrait être pleinement évalué et pris en compte » à l’occasion de chaque initiative législative. « Aucune personne sensée ne pourrait s’y opposer. C’est le génie de cette opération de lobbying », décrypte Kathleen Garnett, une chercheuse indépendante, coauteure d’un article sur le sujet dans une revue académique de droit. Mais ce que ce concept, flou et consensuel en apparence, cible en réalité, explique-t-elle, ce sont les réglementations environnementales de l’UE, et en particulier celles qui encadrent l’usage des produits chimiques – comme le règlement Reach –, des pesticides, des OGM ou encore des nano et biotechnologies. Intégré à la loi, le « principe d’innovation » permettrait de faire contrepoids à ce que ces industriels estiment être un obstacle majeur à leurs affaires : le principe de précaution. « Porte dérobée » Pour Geert Van Calster, professeur de droit à l’Université de Louvain (Belgique) et coauteur de l’article, « il est tout simplement extraordinaire de voir les institutions européennes se faire complètement avoir par un lobby de l’industrie pour introduire cela dans le droit communautaire ». A ce jour, ce « principe d’innovation » n’est rien qu’un slogan de lobbying : contrairement au principe de précaution, inscrit, lui, dans les traités européens, il n’a aucune existence légale. Or son entrée dans un texte officiel « par une porte dérobée » le « légitimerait ». « Et c’est là le véritable danger : si, en tant que fait accompli, il acquiert le statut de principe, il sera alors très difficile de revenir en arrière », déplore M. Van Calster.
https://www.lemonde.fr/planete/article/2018/12/10/un-principe-d-innovation-porte-par-l-industrie-chimique-pourrait-entrer-dans-le-droit-europeen_5395249_3244.html
10/12/2018
En apparence anodin, le concept a été imaginé pour neutraliser le principe de précaution par un think tank issu de la pétrochimie et du tabac.
m-le-mag
Michel Delpuech, un préfet sur la sellette
Michel Delpuech. Hamilton/REA Michel Delpuech, préfet de police de Paris, a débord fait carrière sous la droite, avant de connaître l’ultime consécration grâce à François Hollande. En charge de la sécurité lors de la manifestation du 1er décembre, va-t-il payer le prix de ses débordements ? Promu grâce au hasard C’est une banale chute de vélo qui lui a valu, à 64 ans, la plus grande promotion de sa carrière. En avril 2017, Michel Cadot, alors préfet de police de Paris (PP), tombe d’un Vélib’ et se fracture la hanche. Il est immédiatement remplacé par Michel Delpuech, pour éviter tout flottement à ce poste-clé du dispositif sécuritaire en France, qui est aussi le plus envié au sein du corps préfectoral. Gestionnaire de crises Depuis sa prise de fonctions, rien n’a été simple. Michel Delpuech a été confronté au risque terroriste dès le lendemain de sa nomination, avec l’assassinat du policier Xavier Jugelé. Il a déjà eu à gérer une polémique après le 1er mai 2018, quand son choix de contenir les casseurs, plutôt que de les affronter, afin d’éviter les blessés, avait été critiqué. Serviteur de l’état impartial Ce haut fonctionnaire madré, décrit par ses pairs comme un « grand républicain », a d’abord fait carrière sous la droite chiraquienne (directeur de cabinet du préfet de police de Paris), puis sarkozyste (directeur de cabinet de la ministre de l’intérieur Michèle Alliot-Marie). Avant de devoir à la gauche, et particulièrement à François Hollande, ancien camarade à l’ENA dans la promotion Voltaire, son ascension parisienne. Fusible idéal ? Maître de l’ordre à Paris est un poste aussi influent qu’exposé. Nombreux sont les ministres de l’intérieur qui ont rêvé de réformer le principe même de la Préfecture de police de Paris, au fonctionnement très indépendant. En vain. Mais, au moindre accroc, c’est le « PP » lui même qui est sur un siège éjectable. Michel Delpuech avait déjà été fragilisé au moment de l’affaire Benalla. Les « gilets jaunes » pourraient être la polémique de trop. Lire aussi Le préfet de police de Paris dans la tourmente
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/10/michel-delpuech-un-prefet-sur-la-sellette_5395234_4500055.html
10/12/2018
Après les violences de la manifestation des « gilets jaunes » samedi 1er décembre à Paris, le préfet de police de Paris pourrait être le fusible idéal.
m-le-mag
Un gilet couleur citron amer
Lors d’un rassemblement à Bordeaux, le 4 décembre. MARION PARENT POUR " LE MONDE " Avoir choisi le gilet jaune comme signe de ralliement est une riche idée. Tout le monde possède par-devers soi cet équipement obligatoire, synonyme de mise en alerte et qui se voit de loin (c’est même sa raison d’être). En faire un attribut contestataire donne forcément un effet de loupe aux rassemblements de cette armée du chahut. Cela lui permet aussi de ne pas avoir à se nommer autrement que par son signe distinctif, ce qui est pratique pour ce mouvement qui fait nombre mais affiche une allergie ontologique à l’expression collective. Et puis, surtout, il y a ce jaune. Une couleur qui, si l’on ose dire, présente tous les avantages de la page blanche, idéale pour accueillir un fourre-tout idéologique. Ce n’est ni le rouge de la contestation d’extrême gauche, ni le noir de l’extrême droite, ni le bleu de la République. Le jaune peut agréger tout cela ; a priori, il ne s’agit pas d’une couleur politiquement identifiée. On le retrouve certes sur le drapeau de la papauté mais de là à déceler l’ombre d’une soutane derrière les gilets… Moins de 3 % de la population préfère le jaune Ce jaune-là est celui du citron amer, pas celui du miel et encore moins celui du beurre dans les épinards. Historiquement, il s’agit d’une teinte mal aimée, presque choquante, associée à la tricherie, la tromperie. On rit jaune, franchit la ligne jaune. En France, qui s’habille en jaune, décore son intérieur en jaune, achète une voiture jaune ? Pas grand monde. Michel Pastoureau, l’historien des couleurs, rappelle qu’en Occident, où l’on plébiscite le bleu, moins de 3 % de la population préfère le jaune. Cela n’empêche pas, bien au contraire, d’en faire, en version fluo, la couleur de l’impensé, de la colère, de la transgression, des dérapages non contrôlés, du tout tout de suite, du sentiment de toute-puissance. La couleur, aussi, de la panique à bord.
https://www.lemonde.fr/m-le-mag/article/2018/12/10/un-gilet-couleur-citron-amer_5395230_4500055.html
10/12/2018
Chronique. Le jaune est délaissé par les partis, malaimé des Français. La voie était libre pour en faire la couleur de la colère, de l’impensé.
m-gastronomie
Dessine-moi une recette
Aurélie Sastres, illustratrice d’ouvrages gastronomiques. Julie Balagué pour M Le magazine du Monde J’aime être dans la vie, témoin de mon temps. Croquer dans l’instant le quotidien du métro, d’une rue, d’un marché, lui donner du sens, avec des dessins accessibles. Je suis née à Vienne, en Isère, j’ai fait ma scolarité à Annecy. Ma mère était infirmière et travaillait énormément. Elle avait très peu de temps pour cuisiner, il fallait que ça aille vite. Nous faisions des repas simples, mais toujours avec des produits frais, achetés au marché. Mon père, lui, adorait les bons vins et aimait manger dans les restaurants étoilés quand il le pouvait. Nous avons ainsi fait quelques belles tables. Je me souviens de la première fois où j’ai mangé des algues. Elles devaient provenir du lac d’Annecy ou alentour, mais j’ai immédiatement imaginé la mer dans ma bouche. Des croquis partout, tout le temps A 18 ans, j’ai « quitté ma province ». J’ai fait ma terminale à Paris, puis je suis entrée à l’Ecole nationale supérieure des arts décoratifs. Une fois diplômée, je me suis lancée dans l’illustration. J’ai commencé à travailler dans la littérature enfantine, j’ai même gagné des prix. Mais dessiner des princesses n’était pas trop mon truc. J’ai rencontré mon compagnon, Alain Cohen, à l’âge de 25 ans, et il m’a tout de suite parlé de fruits et légumes. C’est un sacré personnage, un touche-à-tout de première. Acteur fétiche de Claude Berri quand il était enfant puis adolescent, il venait de finir un film avec Yvan Attal. Il possédait un cabinet d’architecture qu’il a dû fermer en raison de la crise immobilière des années 1990. Quelqu’un lui avait parlé de Rungis, il y est allé et a été embauché aux Vergers Saint-Eustache, pour distribuer les meilleurs légumes aux grands chefs. Peu après notre rencontre, il a perdu son permis de conduire, et m’a demandé d’être son chauffeur pour les livraisons. A chaque étape, il me donnait une cagette, et je l’accompagnais dans les cuisines. La première fois, c’était chez Yannick Alléno. C’était en plein service, je me suis collée contre un mur, subjuguée, impressionnée par ce bouillonnement, et j’ai aussitôt eu envie de tout dessiner. C’était incroyablement graphique, les cuisiniers en blanc, les ustensiles, les ingrédients, les gestes répétitifs… J’ai commencé à faire des croquis partout, tout le temps. Jusqu’à en concevoir un livre, intitulé J’ai croqué un chef. Puis j’ai publié d’autres ouvrages. Le dernier en date, je l’ai réalisé avec Guillaume Gomez, le chef de l’Elysée, qui m’a ouvert les portes des cuisines du Palais. C’est un carnet de cuisine aux illustrations libres, dans lequel figure cette recette de tarte aux légumes que je chéris particulièrement. D’abord parce qu’elle me rappelle la tarte à la tomate de ma mère, mais aussi parce qu’elle rassemble les meilleurs légumes de saison, fournis par Alain : c’est un résumé de l’art du chef, mais aussi de la philosophie de mon homme, et de la gourmandise que cela m’inspire. « Le Carnet de Guillaume Gomez, chef de l’Elysée », illustrations Aurélie Sartres, Glénat, 14,95 €
https://www.lemonde.fr/m-gastronomie/article/2018/12/10/dessine-moi-une-recette_5395226_4497540.html
10/12/2018
Aurélie Sartres met son talent de dessinatrice au service de la gastronomie. Elle a illustré plusieurs livres, et travaillé avec des chefs comme Guillaume Gomez, qui lui a inspiré une tarte aux légumes évoluant au gré des saisons.
international
Le président péruvien remporte son référendum contre la corruption
Le président du Pérou, Martin Vizcarra, venu voter au référendum anticorruption, dimanche 9 décembre, à Lima. HANDOUT / REUTERS Oui, oui, oui, non. Le président péruvien, Martin Vizcarra, a remporté haut la main « son » référendum anticorruption, dimanche 9 décembre. Avec 70 % des votes dépouillés, presque 80 % des électeurs péruviens ont répondu oui aux trois premières questions qui leur étaient posées. Elles portaient sur la nomination des magistrats, le financement des partis politiques et la non-réélection des députés. En revanche, quelque 81 % des Péruviens ont refusé le retour du bicaméralisme. Cette quatrième réforme avait, elle aussi, été proposée par le gouvernement, mais M. Vizcarra lui avait finalement retiré son soutien, en considérant que les modifications introduites au texte par le Congrès l’avaient dénaturée. C’est la première fois depuis l’adoption de la Constitution, en 1993, que les Péruviens étaient appelés à se prononcer sur sa modification. La participation électorale (qui est obligatoire) a atteint 76 %. « La démocratie est sortie renforcée du scrutin », a déclaré dimanche le chef de l’Etat. Il en sort, lui aussi, consolidé. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Au Pérou, un référendum crucial pour la lutte anticorruption « Les questions posées ne vont que partiellement réformer le système politique et judiciaire. Mais le contexte est exceptionnel », considère Gustavo Gorriti, directeur de l’organisation IDL-Reporteros. L’affaire de corruption Odebrecht, qui n’en finit pas d’éclabousser la classe politique péruvienne, s’est doublée, depuis juillet, du scandale des écoutes téléphoniques qui a ébranlé la justice. « L’indignation citoyenne est aujourd’hui comparable à celle qui a fait chuter le dictateur Alberto Fujimori en 2000. » Gustavo Gorriti Les quatre derniers présidents péruviens font l’objet d’une enquête judiciaire. La corruption est devenue le premier sujet de préoccupation des citoyens. « L’indignation citoyenne est aujourd’hui comparable à celle qui a fait chuter le dictateur Alberto Fujimori en 2000 », continue M. Gorriti, dont le média a révélé les enregistrements clandestins mettant en évidence l’ampleur des pratiques mafieuses au sein du système judiciaire. Vice-président propulsé président après la démission de Pedro Pablo Kuczynski en mars, Martin Vizcarra l’a compris. Il a choisi de se démarquer de la classe politique décriée en lançant ce référendum. Entre autres résultats du scrutin, les magistrats seront désormais sélectionnés et promus sur concours, les partis politiques péruviens ne pourront plus recevoir de dons privés en liquide, le montant de ceux-ci sera plafonné et les sanctions en cas de financement illicites renforcées, l’accès aux médias des candidats en campagne sera régulé, les députés devront désormais attendre cinq ans pour pouvoir briguer un nouveau mandat.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/le-president-peruvien-remporte-son-referendum-contre-la-corruption_5395212_3210.html
10/12/2018
Fatigués par les scandales à répétition qui éclaboussent le système politique et judiciaire, les Péruviens ont notamment approuvé la non-réélection des députés.
economie
« On a vite fait de réduire certaines entreprises à des symboles du déclin de l’“usine France” »
Des personnes manifestent pour le sauvetage de l’usine automobile Ford de Blanquefort, à Bordeaux, le 30 juin. MEHDI FEDOUACH / AFP Pertes & profits. La vie économique n’est pas suspendue aux « gilets jaunes », mais toutes les décisions industrielles ont une résonance particulière en cette ­période de crise sociale aiguë. Trois dossiers impliquant l’Etat sont sur la table : le devenir de l’usine Ford de Blanquefort (Gironde) et de ses 850 salariés devait être scellé lundi 10 décembre et l’éventuelle relance des hauts-fourneaux ArcelorMittal de Florange (Moselle), décidée avant la fin de l’année. Quant à la reprise de l’aciérie Ascoval de Saint-Saulve (Nord) par le groupe franco-belge Altifort, elle sera sans doute validée mercredi par le tribunal de Strasbourg. L’avenir de ses 281 employés était suspendu à l’aide de l’Etat. Ils auront attendu jusqu’au dernier moment, vendredi, pour être fixés sur leur sort. Une heure avant l’expiration du délai fixé à 17 heures par la justice, le patron ­d’Altifort, Bart Gruyaert, a reçu la lettre du ministère de l’économie lui annonçant un concours financier de 25 millions d’euros, qui s’ajoutera aux engagements des collectivités locales et des banques. Le plan doit permettre la construction d’un train de fabrication de fil d’acier et l’embauche de 133 personnes. Inespéré il y a encore un mois ! Inespéré, mais fragile, tant l’avenir dépend du carnet de commandes d’Altifort. Article réservé à nos abonnés Lire aussi La carte des usines françaises a été profondément remaniée Fragile comme le rebond de l’industrie en 2017, marqué par la création nette d’emplois industriels et un solde positif d’ouvertures de sites. Cette année sera probablement moins florissante. De plus, de lourdes hypothèques pèsent sur certains groupes : General Electric (ex-Alstom), menacé par l’effondrement des commandes de turbines électriques en Europe, le parapétrolier CGG, frappé par la rigueur des compagnies dans leurs dépenses d’exploration-production, ou le fabricant de tubes d’acier Vallourec, à la merci d’un raid de la part de plus gros que lui, comme son actionnaire (14,6 %) Nippon Steel & Sumitomo Metal Corporation. Défaitisme ambiant On a vite fait de réduire ces entreprises à des symboles du déclin de l’« usine France ». GE-Alstom, CGG et Vallourec se trouvent à la pointe de la technologie dans leur domaine. Et l’industrie ne se résume pas à ces sociétés opérant dans des secteurs traditionnels. Ses dirigeants dénoncent le défaitisme ambiant. « Leur premier sentiment, c’est l’exaspération face au discours sur la désindustrialisation, perçu comme du “French bashing” », note Agnès Laurent-Moreau, responsable du pôle industrie de la banque publique d’investissement.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/10/on-a-vite-fait-de-reduire-certaines-entreprises-a-des-symboles-du-declin-de-l-usine-france_5395205_3234.html
10/12/2018
Certes, de lourdes hypothèques pèsent sur General Electric, CGG ou encore Vallourec, mais l’industrie ne se résume pas à ces sociétés opérant dans des secteurs traditionnels, note Jean-Michel Bezat, journaliste économique du « Monde », dans sa chronique.
politique
Entre Emmanuel Macron et des élus, un échange « vraiment cash » mais « républicain »
Dans l’agenda caché d’Emmanuel Macron, figurait, vendredi 7 décembre, une rencontre, révélée par Europe 1, avec une quinzaine de maires des Yvelines. A l’initiative de ce rendez-vous discret, Karl Olive, maire (LR) de Poissy et cofondateur de Génération terrain, une association créée en juillet 2017 rassemblant, selon sa charte, « des élus de terrain, pragmatiques, responsables, modernes et humanistes ». « J’ai envoyé un SMS au président de la République dimanche [2 décembre] pour lui dire “quand allez-vous rencontrer ceux qui sont en prise directe, c’est-à-dire les maires ?”, raconte l’élu. Il m’a rappelé deux jours plus tard. Je lui ai dit que sa méthode était catastrophique. Il m’a répondu “qu’est-ce que vous proposez ?”. Venez-nous voir, je réunis une quinzaine d’élus représentatifs et on se parle franchement. Il a accepté mais à la dernière minute, pour des raisons de sécurité, ça a été fixé à l’Elysée. On a dit d’accord mais à condition qu’il n’y ait que lui. » Les deux heures de rencontre prévues se sont muées en trois heures et demie. « Un échange sans filtre, vraiment cash mais, en même temps, courtois et républicain. Ça a matché », relate M. Olive. L’ensemble des participants contactés par Le Monde rapporte un président « très à l’écoute », « bienveillant », « de vrais échanges, très francs ». « Je craignais un peu une attitude arrogante. Très sincèrement, ça s’est très bien passé », apprécie Josette Jean, maire de Condé-sur-Vesgre. « J’insiste sur le fait que c’était très respectueux, abonde Samy Benoudiz, maire d’Aigremont. Je m’étonne que, dans certains médias, on ait voulu en faire un match de boxe alors que ce n’était pas le cas. » Chacun avait prévu de s’exprimer sur un thème. « J’ai souhaité évoquer avec lui l’image du président, ce que nous entendions, les expressions à l’emporte-pièce qui nous semblent décalées, les erreurs de communication. J’ai été très directe, avec tout le respect que je lui dois en tant que président de la République, raconte Joséphine Kollmannsberger, maire de Plaisir. L’empathie qu’il avait pendant la campagne a vraiment disparu. On lui a remonté énormément de choses que l’on vit tous les jours et on lui a redit que nous étions là pour une vraie démarche d’accompagnement. » Lire aussi : Comment Emmanuel Macron va tenter de sauver son quinquennat Ruralité, matraquage fiscal, taxe d’habitation, contribution sociale généralisée (CSG), emplois aidés, aide personnalisée au logement (APL), dotations aux collectivités, intercommunalités, transports, services publics, concentration des moyens de l’Etat… de multiples sujets ont été abordés. « Chez nous, tout se paye au prix fort. Je voulais qu’il soit conscient des difficultés en milieu rural, même si je ne lui en fais pas porter toute la responsabilité, insiste Mme Jean. C’est une population qui travaille, des retraités qui ne s’en sortent plus et qui n’arrivent même plus à se chauffer. Il faut leur redonner du pouvoir d’achat. »
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/10/entre-emmanuel-macron-et-des-elus-un-echange-vraiment-cash-mais-republicain_5395194_823448.html
10/12/2018
Le chef de l’Etat a reçu en toute discrétion à l’Elysée, vendredi 7 décembre, une quinzaine de maires des Yvelines.
economie
Google lance son portefeuille électronique en France
Google Pay est accessible aux utilisateurs d’un smartphone Android, à condition toutefois que ceux-ci soient aussi clients d’une banque partenaire. LEON NEAL / AFP Google se lance à son tour dans le paiement mobile en France. Deux ans et demi après Apple, et sept mois après Samsung, le géant américain de l’Internet déploie, mardi 11 décembre, son portefeuille électronique dans l’Hexagone. Baptisé Google Pay, il est accessible aux utilisateurs d’un smartphone Android, à condition toutefois que ceux-ci soient aussi clients d’une banque partenaire. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Les banques françaises finissent par céder à Apple Pay Selon nos informations, la banque en ligne Boursorama sera l’un des tout premiers établissements à offrir ce service à ses clients. La Société générale, sa maison mère, ne sera pas présente au lancement, mais elle indique être « amenée à dialoguer avec l’ensemble des acteurs du paiement mobile, dont Google ». Le projet est également à l’étude chez BNP Paribas. En revanche, Banque populaire Caisses d’épargne (BPCE) n’a pas prévu, à ce stade, de proposer la solution de paiement de Google. Le groupe est pourtant le pionnier du paiement mobile : il avait ouvert le marché français à Apple en juillet 2016, puis à Samsung Pay en avril dernier. Comme ses rivaux, Google Pay repose sur la technologie sans contact NFC, qui permet de régler un achat dans un magasin, en approchant un smartphone du terminal de paiement. Il n’est même pas nécessaire de déverrouiller le téléphone si la transaction ne ­dépasse pas les 30 euros. Le service peut également être utilisé pour payer en ligne. Aux Etats-Unis, Starbucks, Airbnb ou encore Kayak offrent cette option sur leur application mobile. Difficile de séduire les habitués de la Carte bleue Lors de sa première ouverture, l’application récupère automatiquement les coordonnées bancaires déjà renseignées sur d’autres services de Google, comme la boutique d’applications Play Store. Outre les paiements, elle stocke les cartes cadeaux et les cartes de fidélité – à présenter lors d’un passage en caisse –, mais aussi les cartes d’embarquement et les billets de concert. A Las Vegas, Chicago et Londres, Google Pay permet de payer dans les transports en commun. Lire aussi Quand le smartphone remplace le cash Aux Etats-Unis et en Inde, il est par ailleurs possible d’envoyer de l’argent à ses contacts. « Pour attirer des utilisateurs, Google est en train de passer d’un portefeuille sans contact à un portefeuille universel », note Rivka Little, du cabinet IDC. « Cette stratégie a fait le succès de WeChat Pay en Chine, souligne Thad Peterson, analyste chez Aite Group. Mais sa réussite est plus incertaine en Occident, car d’autres applications existent déjà », à l’image de Venmo pour l’envoi d’argent entre particuliers.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/10/google-lance-son-portefeuille-electronique-en-france_5395185_3234.html
10/12/2018
Boursorama, la banque en ligne de la Société générale, sera l’un des tout premiers établissements bancaires à offrir Google Pay à ses clients.
politique
« Le rejet, pour ne pas dire la haine, que suscite Macron est une donnée fondamentale du conflit »
Chronique. Cette fois, Emmanuel Macron a compris : la crise révélée par le mouvement des « gilets jaunes » est grave, profonde, multiforme. Elle est sociale, démocratique, identitaire. Elle montre qu’une partie du pays est en train de faire sécession dans le désordre, la violence et, pour certains, dans la haine. Depuis quelques jours, les économistes et les sociologues qui avaient aidé le candidat pendant sa campagne présidentielle ont retrouvé l’oreille présidentielle. Et ce qu’ils conseillent au président va dans le même sens : surtout ne pas lésiner sur la réponse, mettre le paquet sur des annonces concrètes susceptibles de doper le pouvoir d’achat des Français qui peinent à boucler leur fin de mois. Et vite. Dans l’urgence, Emmanuel Macron doit renouer le dialogue et tenter de traiter dans la foulée toutes les autres questions qui ont surgi dans cette crise : le sentiment d’injustice sociale, la peur du déclassement, le mauvais fonctionnement de la démocratie, le rejet fiscal, l’urgence climatique… Le chef de l’Etat est appelé à s’exonérer de la règle des 3 % de déficit, ce n’est plus le sujet. Le sujet, c’est de tenter de sauver le mandat présidentiel à travers un « nouveau pacte social », selon les mots du ministre des affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Si ceux-ci ont un sens, il s’agit d’un tournant, du grand tournant du quinquennat. Et pourtant, personne ne se hasarde à dire que la réponse présidentielle sera vécue comme une victoire par les « gilets jaunes ». Personne ne prétend qu’elle mettra fin à la crise, au terme de la quatrième journée de manifestation qui a mobilisé, samedi 8 décembre, pas moins de 89 000 policiers et gendarmes pour éviter le pire. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Comment Emmanuel Macron va tenter de sauver son quinquennat Car il ne suffit de dire : « Je vous ai compris ! », encore faut-il que ce message d’empathie tombe au bon moment. Or, le mouvement des « gilets jaunes » demeure toujours aussi gazeux. Né sur les réseaux sociaux, il se montre rétif à toute délégation de pouvoir et reste travaillé par des ultras, qui veulent marcher sur l’Elysée et mettre à bas le régime. Le rejet, pour ne pas dire la haine, que suscite Emmanuel Macron est une donnée fondamentale du conflit. Lâcher du lest Le président de la République paie au prix fort son côté « premier de cordée », ses phrases maladroites à l’égard des plus humbles et, plus fondamentalement, la difficulté qu’il a éprouvée, sans doute parce qu’il n’a jamais exercé de mandat local, à sentir le moment où il fallait commencer à lâcher du lest. Pendant les premières semaines du conflit, lui et son premier ministre ont obstinément refusé de reculer sur la fiscalité pétrolière, de peur de ressembler aux gouvernements du « monde d’avant ».
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/10/le-rejet-pour-ne-pas-dire-la-haine-que-suscite-macron-est-une-donnee-fondamentale-du-conflit_5395182_823448.html
10/12/2018
Dans sa chronique, l’éditorialiste au « Monde » Françoise Fressoz estime que le chef de l’Etat peut bien « mettre le paquet », il n’est pas sûr de parvenir à calmer la colère des « gilets jaunes ».
culture
Sélection galerie : Zineb Sedira chez Kamel Mennour
Zineb Sedira, « Laughter in Hell » (2018). Zineb Sedira Zineb Sedira poursuit inexorablement son œuvre, qui a pour centre l’histoire de l’Algérie, le pays natal de ses parents. Les images sont son matériau d’analyse et son mode d’expression. Tantôt elle les crée, par la vidéo ou la photo, tantôt elle en constitue des ensembles, déployés en installations. C’est la méthode qu’elle applique ici à un sujet précis : le destin du dessin d’humour et de la caricature en Algérie durant la guerre civile, de la victoire électorale du Front islamique du salut en 1990 à la loi dite de « concorde civile » de 1999. Soit une décennie de massacres dont dessinateurs politiques et satiriques furent parmi les dizaines de milliers de victimes. Plaisanteries à l’humour le plus macabre qui soit Archiviste, Sedira a retrouvé nombre des planches parues dans les journaux ou sous forme d’albums. Ce sont des plaisanteries à l’humour le plus macabre qui soit. Exemple : un père se réjouit que, grâce à lui, son fils s’éduque sur Internet. Mais le gamin consulte passionnément des conseils sur la fabrication des bombes ; le raccourci est d’une justesse terrible. Ou cette conversation entre deux barbus islamistes : « Je nettoyais tranquillement mon arme quand une balle est sortie malencontreusement ; elle a tué un intellectuel, ensuite elle a ricoché sur un peintre abstrait fauchant au passage un écrivain laïque avant de se loger dans le foie d’un chanteur de raï… » Autant dire qu’on ne rit pas longtemps face à cette chronique du combat du fanatisme contre la pensée, bien que ces dessinateurs excellent dans le burlesque. L’exposition commence par des plaques de cuivre où trois de ces fables tragiques sont gravées à l’acide : trois faire-part de deuil de la liberté assassinée. « Laughter in hell », galerie Kamel Mennour, 6, rue du Pont-de-Lodi, Paris 6e. Tél. : 01-56-24-03-63. Du mardi au samedi de 11 heures à 19 heures. Jusqu’au 12 janvier 2019.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/10/selection-galerie-zineb-sedira-chez-kamel-mennour_5395159_3246.html
10/12/2018
La plasticienne expose une série consacrée aux attentats islamistes qui frappèrent des dessinateurs politiques et satiriques dans les années 1990.
idees
« Retour au calme et fin de l’impunité, une urgence pour tous ! »
Samedi 1er décembre, l’Arc de Triomphe à Paris. STEPHANE MAHE / REUTERS Tribune. Entendre la colère ? Sans doute, bien qu’elle s’exprime d’une façon trop confuse pour que ses objectifs soient discernables. Mais là n’est plus l’urgence. Sans sécurité, toute liberté est illusoire. Sans paix civile, nos droits n’ont plus cours. Sans retour au calme, le dialogue n’est que cacophonie. En abandonnant la rue à la furie de la foule, la République se renie et la France perd tout crédit international. Après les scènes chaotiques auxquelles le monde entier a assisté médusé, devant le spectacle consternant des policiers agressés, des vitrines brisées, des voitures brûlées, des immeubles incendiés, des entreprises en chômage technique, des commerces mis à sac, de l’économie sinistrée, face au risque de coagulation des mécontentements les plus hétéroclites, l’urgence est de rétablir l’ordre et de faire cesser l’impunité. Rétablir l’ordre est le devoir des pouvoirs publics. Mais c’est aussi le devoir de quiconque comprend qu’il est délétère de laisser l’émeute dicter l’agenda politique. C’est le devoir de l’ensemble des institutions qui, plutôt que de tenter de tirer leur épingle du jeu, devraient condamner sans ambiguïté la violence, appeler à ne pas manifester et, tant que le péril persiste, apporter leur soutien au gouvernement. Plutôt que de jeter de l’huile sur le feu C’est le devoir de tous les élus de la nation qui, plutôt que de jeter de l’huile sur le feu ou de faire preuve de compréhension à l’égard des dérapages les plus fous, devraient mesurer combien la banalisation de ceux-ci sape les fondements du pacte démocratique. C’est le devoir de toutes les organisations syndicales qui, plutôt que de s’annexer au mouvement, devraient comprendre que l’explosion inorganisée de revendications virulentes et contradictoires remet directement en cause la mission des corps intermédiaires. C’est l’obligation déontologique des médias qui, surmontant leur habituel réflexe d’empathie à l’égard d’insurgés « en souffrance sociale », devraient plus complètement témoigner de la gravité des faits. Le retour au calme devrait surtout s’imposer en conscience à chaque « gilet jaune ». Le 1er décembre, manifestation des "gilets gaunes" autour de la Place de l Etoile. Un graffiti sur l’Arc de Triomphe. Julien Muguet pour « Le Monde » Oui, beaucoup de nos compatriotes se débattent dans des difficultés financières et craignent l’avenir. Mais échangeraient-ils leur place avec les ressortissants de pays dépourvus de couverture sociale, sans système de santé accessible, privés d’éducation gratuite et accablés d’institutions corrompues ? Il n’y a aucune justification à leur vindicte actuelle contre un système politique certes toujours critiquable et perfectible, mais dont la destruction ne réglerait aucun de leurs problèmes présents et futurs et nous conduirait à la dictature.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/10/retour-au-calme-et-fin-de-l-impunite-une-urgence-pour-tous_5395157_3232.html
10/12/2018
La colère de ceux qui n’arrivent pas à joindre les deux bouts se comprend, mais la furie de la foule empêche tout dialogue. Il est urgent de rétablir l’ordre, c’est la responsabilité de tous, affirme, dans une tribune au « Monde », un collectif de juristes emmené par Noëlle Lenoir.
idees
Sebastian Roché : « Le dispositif policier hors norme contre les “gilets jaunes” signale la faiblesse de l’Etat »
Paris, le 8 décembre 2018. Des « gilets jaunes » rassemblés sur l'avenue des Champs Elysées se retrouvent nassés par les forces de l'ordre. Un véhicule blindé de la Gendarmerie Nationale aide à la manoeuvre en vue de l'évacuation de l'avenue en fin de journée. Benjamin Girette pour le Monde / Benjamin Girette Tribune. Les représentants du peuple, président en tête, sont accusés par les « gilets jaunes » de ne plus le représenter. Une colère populaire s’exprime à Paris, mais aussi dans toutes les villes de France, de Brest à Strasbourg, de Lille à Marseille, de Besançon à Bordeaux. Spectaculaire. Massive. Inédite par sa synchronisation sans chef. Si la forme n’est pas nouvelle – battre le pavé, bloquer, affronter la police, détruire le mobilier et piller, cibler bâtiments officiels et symboles –, son extension géographique et la diversité des publics assemblés le sont. La force de cette révolte horizontale, qui dure depuis mi-novembre, « ni de gauche ni de droite », aux revendications peu formatées politiquement, est mal comprise par le gouvernement, et son ampleur méconnue. Ce défaut d’analyse oriente son choix vers un dispositif de maintien de l’ordre d’une taille suffisante pour provoquer du ressentiment et insuffisante pour saturer le terrain. Après deux semaines de blocages, filtrages, manifestations et heurts, un point haut est atteint le samedi 1er décembre. Les images font le tour du monde : l’incendie d’une préfecture au Puy-en-Velay, des barricades (obstacles plus symboliques que réels au progrès des policiers), des graffitis et une statue endommagée dans l’Arc de triomphe, et des groupes qui réussissent à s’approcher des palais gouvernementaux. Serait-ce une insurrection qui se dessine ? Le gouvernement est aux abois. La cote de popularité du jeune « président des riches » est au plus bas. Celle des “gilets jaunes”, au zénith, ne faiblit pas. La tentation est trop forte, même le chef du parti Les Républicains endosse un gilet jaune. Il est décidé d’afficher la fermeté : le 8 décembre, l’Etat sera plus fort que les « factieux », selon le mot de M. Castaner, « ceux qui veulent le chaos », selon ceux de M. Macron. En démocratie, ce sont le gouvernement et ses représentants, les préfets, qui décident de la stratégie policière, et non les policiers. Les décisions sont prises par le ministre lui-même lorsque la crise a cette ampleur. Le préfet de police de Paris dirige l’action de ses services, les divers services de police locaux (en civil et en tenue), les sapeur-pompiers, les unités de forces mobiles (UFM) – les CRS et les gendarmes mobiles. Cela suppose une intégration de toutes les directions policières et non policières dans un dispositif, lui-même piloté depuis un « centre opérationnel ». En province, l’architecture du dispositif est comparable, mais doté de moins de moyens.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/10/sebastian-roche-le-dispositif-policier-hors-norme-contre-les-gilets-jaunes-signale-la-faiblesse-de-l-etat_5395148_3232.html
10/12/2018
Inédites par leur synchronisation sur tout le territoire français, les manifestations des « gilets jaunes » ont été jugulées sans drame par le ministère de l’intérieur. Mais cette démonstration de force révèle un Etat faible, explique, dans une tribune au « Monde », le sociologue Sebastian Roché.
idees
Cyril Dion : « Ecrivons un autre avenir pour la planète »
Marche pour le climat à Bordeaux, le 13 octobre 2018. NICOLAS TUCAT/AFP Tribune. Est-il trop tard ? La question mérite d’être posée, et de plus en plus. Les dernières études sur l’évolution du changement climatique et l’effondrement de la biodiversité montrent une phénoménale accélération. Quelque 60 % des populations d’animaux vertébrés ont disparu ces quarante dernières années, 80 % des insectes volants en Europe, 30 % des oiseaux. La dernière fois qu’autant d’espèces ont été éradiquées aussi vite, c’était il y a des millions d’années, à l’époque de l’extinction des dinosaures. Sur le front du réchauffement, cela ne va pas mieux. Nous sommes déjà à + 1,2 °C. L’objectif de + 1,5 °C que l’accord de Paris appelait à ne pas dépasser avant 2100 le sera certainement aux alentours de 2030. Nous voguons allègrement vers 2 °C en 2040-2045. Si nous dépassons les + 2 °C, nous enclencherons des boucles de rétroaction négatives (libération du méthane prisonnier des sols gelés d’Arctique et de Sibérie, incendies dégageant des masses de carbone, acidification des océans qui ne pourront plus stocker le CO 2 ) qui nous conduiront allègrement vers + 3 °C à + 5 °C. A + 5 °C, une bonne partie du globe deviendra inhabitable. A tel point que le directeur de l’Institut de recherche sur le climat de Potsdam a estimé en 2009 qu’à cette température seul un milliard de personnes pourront vivre sur Terre. + 4 °C en 2100, c’est ce que prévoit le ministère des transports américain ; + 5 °C, c’est ce que prévoit le scénario interne des pétroliers BP et Shell, mais… en 2050 ! Que faire face au désastre annoncé ? Il n’y a pas de réponse simple à cette question. La situation face à laquelle nous nous trouvons est inédite. Elle ne demande pas des ajustements, mais une métamorphose (selon les termes du sociologue Edgar Morin). Ou comme le disent les initiateurs britanniques du mouvement Extinction Rebellion [qui dénonce l’inaction des gouvernements] : « Nous ne pouvons pas sauver le monde en respectant les règles du jeu, car les règles doivent changer. » Ce n’est pas rentable, à court terme, de stabiliser le climat Les règles du jeu, ce sont celles du libre-échange qui interdisent toute mesure protégeant l’agriculture bio et locale de la concurrence internationale faite de produits dopés aux OGM et arrosés de pesticides au nom de la concurrence libre et non faussée. Ce sont celles de l’économie de marché, capitaliste, qui mettent la notion de profit et de rentabilité au-dessus de toute autre. Celles qui guident aujourd’hui nos choix personnels, ceux des entreprises et des Etats. Celles qui nous imposent une croissance matérielle infinie dans un monde fini.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/10/cyril-dion-ecrivons-un-autre-avenir-pour-la-planete_5395139_3232.html
10/12/2018
#UrgenceClimat. Le désastre écologique annoncé se réalisera si nous ne changeons pas la façon dont fonctionne le monde, les idées/fictions qui le gouvernent. Contre ce sombre constat, inventons un nouveau récit qui donne priorité au sens sur les profits, propose l’écrivain et réalisateur Cyril Dion.
climat
Transports, alimentation, consommation… comment agir pour le climat ? « Le Monde » se mobilise pendant une semaine
Que faire face au défi du changement climatique ? Comment agir, concrètement, à l’échelle individuelle ou collective ? Les initiatives citoyennes ont-elles un sens alors que c’est tout le système qu’il faudrait faire évoluer pour espérer limiter les effets du dérèglement ? Alors que la COP24 sur le climat se tient du 2 décembre au 14 décembre, en Pologne, la rédaction du Monde se mobilise autour de ces questions. Au-delà du constat de l’urgence, nous avons voulu nous interroger sur les solutions existantes ou à explorer. Chaque jour, pendant une semaine, des personnalités, expertes de leur domaine et engagées au quotidien, répondent en direct aux questions des internautes : Des initiatives, en France et ailleurs Nous mettrons aussi en lumière, tout au long de la COP, quelques-unes des nombreuses initiatives lancées, en France ou ailleurs, pour faire face au changement climatique : inventer une ville sans voiture, créer un restaurant gastronomique entièrement végétarien, faire vivre un quartier fonctionnant à 100 % aux énergies renouvelables, développer la géothermie pour se chauffer en réduisant drastiquement ses émissions de gaz à effet de serre… Des citoyens nous expliqueront comment ils ont arrêté de manger de la viande ou décidé de moins consommer, par souci de préservation de la planète. D’autres nous raconteront en quoi leur combat individuel – initier une « grève scolaire » pour le climat en Suède, attaquer l’Union européenne en justice, planter des arbres au Burkina Faso… – est susceptible d’avoir un impact à l’échelle globale. Et vous ? Savez-vous vraiment comment faire des économies d’énergie ou quels fruits et légumes frais consommer au meilleur moment de l’année ? Savez-vous pourquoi l’industrie textile est l’une des plus nocives pour l’environnement ? Connaissez-vous l’impact écologique réel de la voiture électrique ? Quelles sont les meilleures applis pour vous aider à changer vos habitudes ? Des quiz, des vidéos et des articles vous donneront des pistes pour agir, vous aussi.
https://www.lemonde.fr/climat/article/2018/12/10/climat-comment-agir_5395135_1652612.html
10/12/2018
#UrgenceClimat. Alors que la COP24 se tient en Pologne, « Le Monde » s’interroge sur les manières de lutter, à l’échelle individuelle et collective, contre le dérèglement climatique. Ce vendredi : peut-on peser collectivement ?
afrique
CAN 2019 : le Congo-Brazzaville dément être candidat
Lors d’un match entre le Congo et la Zambie, au stade Kintele de Brazzaville, en mars 2016. MARCO LONGARI / AFP Le Congo-Brazzaville n’est pas candidat à l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2019, que la Confédération africaine de football (CAF) a retirée au Cameroun, a indiqué son ministre des sports sur RFI, dimanche 9 décembre, contredisant une annonce faite vendredi par un dirigeant de la CAF. « Nous sommes à six mois de l’organisation de la Coupe d’Afrique des nations et il ne sera pas possible pour nous de l’organiser avec honneur et dignité. C’est plutôt le contraire : le Congo-Brazzaville ne sera pas candidat. Cela ne sera pas possible, a déclaré Hugues Ngouélondélé. La crise est mondiale et nous avons d’autres priorités que d’organiser la CAN pour le moment. » Lire aussi La Confédération africaine de football retire l’organisation de la CAN 2019 au Cameroun Contactée par l’AFP, une source au sein de la Fédération congolaise de football (Fécofoot) n’a pas souhaité commenter les déclarations du ministre des sports. Crise économique et financière Constant Omari, deuxième vice-président de la CAF, avait affirmé vendredi que le Congo-Brazzaville s’était porté candidat à l’organisation de la CAN 2019, qui devra regrouper 24 équipes pour la première fois. Son organisation a été retirée au Cameroun, dont les préparatifs ont été jugés insuffisants, et la CAF doit désormais trouver un autre pays organisateur avant fin 2018. Lire aussi CAN 2019 : le Maroc favori pour remplacer le Cameroun au pied levé Pays pétrolier d’Afrique centrale, le Congo-Brazzaville est frappé par une crise économique et financière depuis 2014. Le pays est en négociations avec le Fonds monétaire international (FMI) en vue d’obtenir une aide. En 2015, il avait réussi l’organisation des onzièmes Jeux africains, dits « du cinquantenaire », ayant regroupé presque tous les pays du continent.
https://www.lemonde.fr/afrique/article/2018/12/10/can-2019-le-congo-brazzaville-dement-etre-candidat_5395128_3212.html
10/12/2018
La Coupe d’Afrique des nations a été retirée au Cameroun, dont les préparatifs ont été jugés insuffisants pour accueillir la compétition de football.
culture
Exposition : expérimentations espagnoles à Orléans
Francisco Javier Segui de la Riva & Ana Buenaventura, « Ordre biologique » (1971). Collection Frac Centre-Val de Loire Les ordinateurs ressemblaient alors à des armoires anthropomorphes où tournoyaient, tels des yeux éperdus, d’imposantes bandes magnétiques. En faisant évoluer ces drôles de machines vers un usage inédit, le Centre de calcul de l’université de Madrid (CCUM), implanté par la société IBM, a donné naissance, au tournant des années 1960-1970, à un courant expérimental, artistique et architectural, curieusement méconnu. Jusqu’au 24 février 2019, le Fonds régional d’art contemporain (FRAC) du Centre-Val de Loire à Orléans répare cet oubli. « En partant de l’œuvre, qu’est-ce que l’ordinateur est capable de faire ? », s’interroge Abdelkader Damani, directeur du FRAC depuis 2015. Une réflexion d’actualité alors qu’un tableau créé par une intelligence artificielle à partir d’autres toiles a été vendu aux enchères chez Christie’s 380 000 euros, le 25 octobre. Abdelkader Damani a choisi de privilégier les mécanismes de création plutôt que le résultat, un texte ou une maquette plutôt qu’un bâtiment achevé. L’expérience dure de 1968 à 1982. « Après des décennies d’isolement culturel, artistes, architectes et musiciens se réunissent autour de l’introduction de l’ordinateur dans les processus créatifs », rappelle l’architecte, enseignante et historienne de l’architecture Monica Garcia Martinez, commissaire de l’exposition avec M. Damani. « Le Centre de calcul devient le plus grand espace de liberté de création de la fin de la dictature [franquiste]. » La poésie expérimentale espagnole a été l’un des ferments de ces projets IBM impose que son outil ne soit pas destiné à des tâches administratives, et attribue des bourses à des chercheurs. Dès 1968, un premier séminaire est organisé. Son but : étudier les fondements mathématiques de l’art et mettre au point des stratégies d’application de l’ordinateur aux processus de création. Les algorithmes s’invitent. Morphologie, modularité, réseau, structure, automatisme… un nouveau vocabulaire se déploie sous l’influence de la rencontre entre art, applications mathématiques et sciences de l’information. Les notions de sémiotique et de cybernétique agitent la petite communauté pionnière. La poésie expérimentale espagnole a été l’un des ferments de ces projets. C’est notamment par les compositions « lettristes » de l’influent poète Ignacio Gomez de Liaño que s’ouvre l’exposition. Loin de les considérer comme « des monstres », il voit dans les machines « la cartographie d’un sol où l’on pourrait se déplacer poétiquement ».
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/10/exposition-experimentations-espagnoles-a-orleans_5395113_3246.html
10/12/2018
En 1968 à Madrid, un calculateur IBM a lancé une scène artistique et architecturale inédite, à découvrir au Frac Centre-Val de Loire.
politique
Comment Emmanuel Macron va tenter de sauver son quinquennat
Manifestation des « gilets jaunes », à Paris, le 9 décembre. LAURENT VAN DER STOCKT POUR " LE MONDE" Emmanuel Macron l’a répété à ses visiteurs ces derniers jours. Même si les manifestations du 8 décembre ont été mieux maîtrisées par les forces de l’ordre, au prix d’un nombre record d’arrestations et de gardes à vue de « gilets jaunes », le chef de l’Etat n’entend pas en rester là. Plus question de jouer le pourrissement du conflit, comme l’exécutif avait été tenté de le faire au début de la mobilisation. « La colère est toujours là, il faut y répondre », explique un proche du président, alors que le soutien des Français au mouvement ne faiblit pas dans les sondages. Signe de ce volontarisme, Emmanuel Macron a convoqué en urgence une grande conférence sociale à l’Elysée, lundi 10 décembre. Prévenus seulement la veille, les organisations syndicales et patronales, mais aussi les présidents du Sénat et de l’Assemblée nationale, Gérard Larcher et Richard Ferrand, celui du Conseil économique, social et environnemental, Patrick Bernasconi, ainsi que des responsables d’associations d’élus, devaient échanger lundi matin avec le chef de l’Etat sur les réponses à apporter à « ce moment grave que traverse la nation ». Objectif de cette réunion, à laquelle devaient aussi assister le premier ministre Edouard Philippe et une partie du gouvernement : « mobiliser pour agir », alors que les « gilets jaunes » amorcent leur deuxième mois de conflit et qu’un nouvel appel à manifester a été lancé pour le 15 décembre. Ces derniers jours, le chef de l’Etat a d’ailleurs beaucoup consulté à l’Elysée, où il s’est enfermé toute la semaine et d’où il a suivi les manifestations du 8 décembre. « Il a vu des intellectuels, des politiques, des associatifs », détaille une proche. Christophe Castaner, le ministre de l’intérieur, est passé le voir samedi. François Bayrou, son allié du MoDem, lui parle tous les jours. Ces échanges sont censés nourrir l’allocution qu’Emmanuel Macron devait effectuer lundi soir depuis l’Elysée. Une déclaration solennelle à la télévision destinée à reprendre la main, après dix jours de mutisme du chef de l’Etat. Depuis son retour d’Argentine le 2 décembre, le président de la République ne s’est pas exprimé publiquement et ses rares sorties ont été effectuées loin des caméras. Le 4 décembre, il s’est bien rendu au Puy-en-Velay, pour évaluer les dégâts causés à la préfecture incendiée par des « gilets jaunes », mais le cortège présidentiel a été hué par des passants en colère.
https://www.lemonde.fr/politique/article/2018/12/10/comment-emmanuel-macron-va-tenter-de-sauver-son-quinquennat_5395110_823448.html
10/12/2018
Le chef de l’Etat doit sortir de son silence et « s’adresser à la nation » lundi à 20 heures pour tenter de désamorcer le conflit des « gilets jaunes ». Une épreuve de vérité.
idees
Chine : quand l’Europe s’éveillera
« La Chine à nos portes. Une stratégie pour l’Europe », de François Godement et Abigaël Vasselier, Odile Jacob, 240 pages 22,90 euros. Livre. Faites d’« agendas », de « dialogues de haut niveau », d’« éléments pour une nouvelle stratégie » ou d’interminables « cycles de négociation d’accord sur les investissements », les relations entre la Chine et l’Union européenne intéressent, il faut bien l’avouer, peu de monde. Jusqu’au jour où l’on découvre que les Chinois ont racheté le port du Pirée, en Grèce, que les Hongrois leur ont vendu 6 500 contrats de résidence (plus connus sous le nom de « golden visas ») ou que leurs navires militaires procèdent à des exercices de tirs réels en Méditerranée. C’est pourquoi il faut faire l’effort de se plonger dans l’essai de François Godement et Abigaël Vasselier : La Chine à nos portes. Une stratégie pour l’Europe. Un titre d’ailleurs un peu trompeur tant la lecture de ce livre édifiant montre qu’il y a bien longtemps que les portes de l’Europe sont ouvertes aux Chinois. Ce ne serait pas forcément un problème si la réciproque était vraie. Malheureusement, François Godement, historien, sinologue et « M. Chine » du centre de réflexions ECFR (European Council on Foreign Relations), et Abigaël Vasselier, alors analyste à l’ECFR, n’ont aucun mal à montrer qu’il n’en est rien. La bonne nouvelle de ce livre extrêmement précis et exhaustif – il fut à l’origine un rapport pour la Commission européenne – est que face à la Chine, l’Union européenne dispose d’une stratégie. La mauvaise est que chacun des 28 Etats membres aussi, et que la Chine l’a parfaitement compris. La dernière partie de l’ouvrage est d’ailleurs constituée de vingt-huit « fiches pays » qu’on dirait écrites par des entomologistes. Art du lobbying Mais croire qu’il suffit à la Chine de diviser pour régner est faux. Analysant la stratégie de Pékin face aux seize pays d’Europe centrale et des Balkans qu’elle courtise assidûment depuis 2011 au grand dam de Bruxelles, les auteurs montrent que les résultats sont jusqu’ici peu probants, même si ces pays, qui se sentent souvent méprisés par le reste de l’Europe, ont acquis, grâce à Pékin, une réelle visibilité internationale, ce qui n’est pas négligeable. La Chine n’utilise pas qu’une diplomatie du carnet de chèques ou du rapport de forces. L’ouvrage montre qu’elle est également passée maître dans l’art du lobbying, même si, dans ce domaine, elle privilégie jusqu’à présent l’Australie et les Etats-Unis. Face à cette Chine qui a tendance à ne respecter ses engagements que lorsqu’ils ne contrarient pas ses intérêts, les auteurs appuient à plusieurs reprises sur la sonnette d’alarme. Ils mettent notamment en garde contre les « échanges scientifiques » qui n’ont d’échanges que le nom puisque la Chine se garde bien de partager ses connaissances. Plus globalement, ils proposent quelques remèdes d’urgence, dont le principal est l’achèvement de la mise en place d’un système de filtrage des investissements à l’échelle européenne. En ce domaine, le Japon et les Etats-Unis font preuve de beaucoup moins de naïveté que nous.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/10/chine-quand-l-europe-s-eveillera_5395092_3232.html
10/12/2018
Dans « La Chine à nos portes », François Godement et Abigaël Vasselier montrent que face à Pékin, l’Union européenne dispose d’une stratégie.
idees
Le rapport difficile de la France aux génocides
Analyse. Il y a soixante-dix ans, le 9 décembre 1948, les Nations unies adoptaient, à Paris, la convention pour la prévention et la répression du crime de génocide. Ce traité, ratifié par 149 Etats dont la France, le 14 octobre 1950, fut d’abord l’œuvre et la victoire d’un homme, le juriste juif polonais Raphael Lemkin (1900-1959). Convaincu qu’il fallait un mot nouveau pour désigner l’anéantissement des Ottomans arméniens entre 1915 et 1917 et celui des juifs d’Europe pendant la seconde guerre mondiale, il forgea la notion de « génocide ». L’incrimination de crime de génocide, fixée par cette convention, poursuit un but précis : protéger les groupes visés par « des actes commis dans l’intention de détruire, ou tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux ». Elle se distingue ainsi fortement du crime contre l’humanité, établi par la charte de Nuremberg en 1945, qui entend protéger les personnes des atrocités commises « dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique dirigée contre toute population civile ». En dépit des succès de Lemkin et des Nations unies, la convention du 9 décembre 1948 est néanmoins restée méconnue en France, mais pas seulement. D’une part, parce que la puissance de l’incrimination devait dissuader par son existence d’autres crimes de génocide à l’avenir : c’était le « plus jamais ça » proclamé après la découverte de la Shoah. Or elle n’a pas débouché sur l’instauration d’un tribunal pénal permanent ; elle est restée théorique. D’autre part, parce qu’elle a été aussi attaquée par des pays négationnistes, comme la Turquie, qui ont empêché que la convention ne constitue une institution d’étude et de suivi des grands crimes du XXe siècle. Preuve en est, l’enterrement de l’important rapport Whitaker, commandé par l’ONU en 1983, qui reconnaissait le génocide des Arméniens. Loi « mémorielle » C’est tardivement que les premières inculpations pour crimes de génocide ont eu lieu : en 1994, pour l’extermination des Tutsis du Rwanda, et en 1995, pour le massacre de Srebrenica. De même, il a fallu attendre 1994 pour que la France introduise le crime de génocide dans son code pénal et en fasse le crime contre l’humanité le plus grave. Et ce n’est qu’en 2014 que le premier procès devant la justice française pour crime de génocide a été intenté à des responsables rwandais.
https://www.lemonde.fr/idees/article/2018/12/10/le-rapport-difficile-de-la-france-aux-genocides_5395087_3232.html
10/12/2018
Analyse. La convention du 9 décembre 1948 est longtemps restée méconnue en France, analyse le journaliste Antoine Flandrin.
international
Brexit : le Royaume-Uni peut décider seul de renoncer à quitter l’UE, estime la Cour de justice
Cette décision survient à la veille du vote des députés britanniques sur l’accord de Brexit. TIM IRELAND / AP Le Royaume-Uni peut décider seul de renoncer à quitter l’Union européenne, sans avoir besoin de l’aval des autres Etats membres, a estimé la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) dans un arrêt rendu lundi 10 décembre. Cette décision est rendue à la veille d’un vote décisif, mardi, au Parlement britannique sur l’accord du Brexit, objet d’une âpre négociation de dix-sept mois entre Londres et l’UE, conclue fin novembre. Une victoire pour les anti-Brexit « Le Royaume-Uni est libre de révoquer unilatéralement la notification de son intention de se retirer de l’Union européenne », écrit la CJUE. « Une telle révocation, décidée dans le respect de ses propres règles constitutionnelles, aurait pour effet que le Royaume-Uni resterait dans l’Union dans des termes inchangés quant à son statut d’Etat membre », ajoute-t-elle. Selon la CJUE, cette renonciation au Brexit est possible « tant qu’un accord de retrait (…) n’est pas entré en vigueur ou, à défaut d’un tel accord, tant que le délai de deux ans à partir de la notification de l’intention de se retirer de l’Union européenne, éventuellement prorogé, n’a pas expiré », c’est-à-dire jusqu’au 29 mars 2019, date de départ prévu des Britanniques. Cet arrêt pourrait encourager les Britanniques qui espèrent encore que le Royaume-Uni puisse renoncer à quitter l’UE. Il a donc été reçu froidement par les tenants du Brexit, dont le secrétaire d’Etat britannique à l’environnement. Michael Gove a ainsi réagi à l’arrêt en insistant sur le fait que la Grande-Bretagne ne souhaitait pas rester au sein de l’UE et que le Brexit aurait bel et bien lieu le 29 mars 2019. Vote des députés demain La Cour basée à Luxembourg a ainsi suivi l’avis de l’avocat général du 4 décembre. La question de la révocation de la décision du Brexit a été posée à la CJUE dans le cadre d’une action en justice d’élus écossais, qui estiment que le Parlement britannique devrait pouvoir inverser le processus dit « de l’article 50 ». C’est cet article du traité sur l’UE qui permet à un Etat membre de notifier au Conseil européen son souhait de quitter l’Union et qui fixe les étapes d’une telle procédure.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/brexit-le-royaume-uni-peut-decider-seul-de-quitter-l-union-europeenne-estime-la-cour-de-justice_5395085_3210.html
10/12/2018
La Cour de justice de l’Union européenne a ainsi suivi l’avis de l’avocat général rendu public le 4 décembre. Cet arrêt qui sonne comme une victoire pour les anti-Brexit.
culture
Architecture : miracles géométriques au Bangladesh
Usine de tissage de Gazipur, par le cabinet Archeground. IWAN BAAN Une scène architecturale bouillonnante, héritière d’une histoire riche et complexe, en prise directe, qui plus est, avec la crise climatique et l’explosion démographique. Et pourtant, pratiquement inconnue. Qui l’eût cru, à l’heure où la planète est scannée dans ses moindres recoins par Google Earth ? C’est à deux hommes que l’on doit cette découverte : l’architecte suisse Niklaus Graber et le directeur du Musée suisse d’architecture (SAM) de Bâle, Andreas Ruby. Lors d’un voyage au Bangladesh initialement prévu pour découvrir le Parlement de Dacca, chef-d’œuvre de l’Américain Louis Kahn réalisé en 1962, le premier a été captivé par la qualité et l’inventivité de l’architecture ­contemporaine du pays. De retour en Suisse, il s’en est ouvert au second, qui l’a invité à monter une exposition sur le ­sujet. Présentée au S AM durant le premier semestre 2018,« Bengal Stream » arrive aujourd’hui à Bordeaux, au centre Arc en rêve. ­Environ soixante projets y sont réunis, qui témoignent de la diversité et de la vitalité de ces courants bangladais, invitant à comprendre comment ils se sont constitués, depuis l’indépendance du pays, en 1971, en un mouvement d’une cohérence ­remarquable – et à s’interroger au passage sur la cécité à son égard des revues spécialisées et autres instances de légitimation internationales. Formes spectaculaires La notoriété relative de Kashef Chowdhury et de Marina Tabassum, dont les travaux sont régulièrement montrés en Occident, a largement occulté, de fait, la production de leurs contemporains, qui partagent avec eux de nombreuses préoccupations et un ­solide héritage. Celui de Muzharul Islam, formé aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne, qui a posé les bases d’une architecture nationale puisant conjointement aux sources de l’architecture tropicale et du modernisme, et visant à ­répondre aux besoins de la population. Projet colossal, qu’il a porté à bout de bras de mille manières. En tant qu’architecte (on doit à Muzharul Islam l’Institut des beaux-arts de Dacca, l’Institut national d’administration publique, l’université de Jahangirnagar ou les Archives nationales) et en tant qu’urbaniste (il a conçu les plans de masse de Chittagong et Sabhar, et le plan d’aménagement urbain de Dacca) ; en tant qu’initiateur de l’invitation faite à Louis Kahn et à d’autres représentants du modernisme finissant à venir construire au Bangladesh et en tant que fondateur de la première école d’architecture du pays, dans les années 1960 ; en tant qu’instigateur, enfin, de la Chetana Society : mise en place par d’anciens élèves de Muzharul Islam, cette fondation est à l’origine d’un projet de ­recension de l’architecture du pays, depuis les premiers monastères bouddhistes du VIIe siècle jusqu’au Parlement de Louis Kahn en passant par les périodes islamique, moghole et coloniale, qui a abouti, en 1997, à l’exposition « De Pundranagar à Sherebanglanagar », dont le catalogue constitue aujourd’hui un ouvrage de référence.
https://www.lemonde.fr/culture/article/2018/12/10/architecture-miracles-geometriques-au-bangladesh_5395081_3246.html
10/12/2018
A Bordeaux, au centre Arc en rêve, l’exposition « Bengal Stream » montre toute l’inventivité des bâtisseurs bangladais.
economie
Fin du grand supermarché des visas pour riches étrangers au Royaume-Uni
Au grand supermarché des visas pour riches étrangers qui veulent cacher leur argent, le Royaume-Uni vient de fermer son étalage. Le gouvernement britannique a provoqué la surprise en supprimant, depuis vendredi 7 décembre, les visas destinés aux « investisseurs ». Condamnés par l’association Transparency International comme « un outil pour blanchir l’argent de la corruption », ces visas dits « tier 1 » étaient l’une des méthodes favorites pour les milliardaires du monde entier de s’installer au Royaume-Uni. La grande majorité d’entre eux étaient chinois et russes. Pour qui dispose d’un portefeuille très garni, le système était particulièrement simple. Pour 2 millions de livres (2,2 millions d’euros) injectés dans l’économie britannique, l’heureux demandeur recevait un permis de séjour, qui ouvrait le droit à l’autorisation de résidence permanente au bout de cinq ans. En montant à un investissement de 10 millions de livres, la période d’attente était réduite à deux ans. Cela donnait ensuite la possibilité de facilement accéder à la nationalité britannique. Créé en 2008, ce système de visas a longtemps été une complète « boîte noire ». « Les banques estimaient que le ministère de l’intérieur devait faire les vérifications sur l’origine de l’argent, et le ministère de l’intérieur renvoyait la responsabilité aux banques, expliquait en mars au Monde Rachel Davies, membre de Transparency International. Résultat, il y a eu très peu de vérifications. » Une pratique développée après la crise financière de 2008 A son pic, en 2015, près d’un millier de visas par an étaient attribués. Mais, quand certains contrôles ont finalement été mis en place cette année-là, la plupart des demandes se sont mystérieusement évaporées, diminuant des trois quarts… Mais les mailles du filet n’étaient visiblement pas très serrées. « Nous ne tolérerons pas les gens qui ne respectent pas les règles et abusent du système », a expliqué la secrétaire d’Etat à l’immigration, Caroline Nokes, pour justifier la suppression des visas « tier 1 ». Outre les soupçons de blanchiment, l’utilité économique de ce système était de toute façon très limitée. Les « investisseurs » ne mettaient généralement leur argent que dans des obligations du Trésor. En clair, ils obtenaient un visa en prêtant de l’argent au gouvernement britannique, dont ils tiraient ensuite des bénéfices. Si l’objectif, louable, était d’attirer de vrais entrepreneurs, il a échoué. D’autres pays européens sont sur les rangs des visas à acheter, une pratique qui s’est développée après la crise financière de 2008. Malte est le plus connu, mais Chypre, le Portugal, la Grèce ou encore la Bulgarie et la Hongrie ont des systèmes similaires. Le gouvernement britannique annonce qu’il entend réformer son système « tier 1 » et le rouvrir en 2019. Les investissements dans les obligations seront alors interdits et des auditeurs seront chargés d’inspecter l’origine des fonds.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/10/londres-met-fin-aux-visas-a-vendre_5395077_3234.html
10/12/2018
Pour lutter contre le blanchiment d’argent, les visas attribués en échange de 2 millions de livres sterling sont supprimés.
economie
Brexit : Paris attire toujours les banquiers londoniens, malgré les « gilets jaunes »
Devant une agence BNP Paribas, le 2 décembre, à Paris, au lendemain de la mobilisation des « gilets jaunes ». Julien MUGUET / © Julien Muguet pour Le Monde Des voitures incendiées sur les avenues parisiennes montrées en boucle sur les télévisions britanniques. Des beaux quartiers prisés des banquiers ciblés par les casseurs. Un retour potentiel de l’impôt sur la fortune, même si le président de la République, Emmanuel Macron, l’a écarté. L’instabilité en France se manifeste au moment même où nombre d’établissements financiers se préparent à transférer des emplois de Londres vers Paris pour cause de Brexit. La mobilisation des « gilets jaunes » peut-elle remettre en question ces projets au profit de Francfort ou Dublin, les places concurrentes ? « Nous n’avons pas d’indication de changement de plan de la part de banques qui ont décidé de relocaliser des équipes à Paris, constate Marc Perrone, avocat spécialisé en réglementation bancaire chez Linklaters, cabinet conseil de plusieurs établissements américains et internationaux dans le contexte du Brexit. Les grandes banques qui sont déjà très avancées dans leur planning, qui ont loué des locaux à Paris, n’ont, de toute façon, pas le temps de changer leur fusil d’épaule, en quelques mois. » Article réservé à nos abonnés Lire aussi Le Brexit n’a fait perdre que quelques milliers d’emplois à la City « A ce stade, on ne constate pas d’impact sur les demandes de relocalisation à Paris », confirme-t-on également du côté des autorités françaises. Certes, il y a urgence. « Les grandes banques se préparent, depuis deux ans, au scénario du pire, celui d’un Brexit sans accord », précise Fabien Zaveroni, directeur au sein du cabinet de stratégie Sia Partners à Londres. Un « no deal » entre Londres et Bruxelles interdirait de fait aux établissements financiers bénéficiant d’une seule licence britannique de travailler dans l’Union européenne à partir du 29 mars 2019. « L’Allemagne avait initialement une longueur d’avance » Ces derniers mois, les Credit Suisse, Goldman Sachs ou autres JPMorgan ont répertorié les équipes qui ne pourront plus servir leurs clients français, allemands ou belges depuis Londres selon un tel scénario. « Certains manageurs sont déjà partis. Pour le reste, les personnes concernées ont été alertées sur le fait qu’elles devraient être prêtes à boucler leurs valises à partir du mois de mars », explique un responsable en France d’une banque américaine. Un exercice mené à tâtons sur fond d’incertitudes politiques et juridiques. « En octobre encore, des manageurs, qui pensaient jusque-là pouvoir rester à Londres, ont été prévenus par leur direction qu’ils devraient déménager », relate un banquier.
https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/12/10/brexit-paris-attire-toujours-les-banquiers-londoniens-malgre-les-gilets-jaunes_5395057_3234.html
10/12/2018
La colère sociale n’a pas d’incidence sur les demandes de relocalisation d’emplois en France, malgré la concurrence de Francfort ou de Dublin.
police-justice
Un entraîneur devant les assises pour les viols de deux championnes de roller
Interrogés lors de l’enquête ouverte à la suite d’une plainte de l’adolescente, plusieurs jeunes sportifs décrivent un homme « tactile », qui se promène « en slip » et s’allonge dans le lit de ses élèves pour leur réclamer des « massages ». ALEX EDELMAN / AFP Un homme de 42 ans, ancien directeur des équipes de France de roller artistique, comparaît à partir de lundi 10 décembre devant les assises du Val-d’Oise : deux championnes l’accusent de les avoir agressées sexuellement et violées pendant plusieurs années, depuis l’âge de 8 ans pour l’une d’elles. Pendant cinq jours, cet ancien champion devenu entraîneur et cadre de la fédération, incarcéré depuis 2015, devra répondre d’accusations d’agressions sexuelles, de viols, de corruption de mineure et de détention d’images pédopornographiques. Cadre de la fédération de roller L’affaire commence en 2011. Une patineuse de 14 ans confie à une psychologue du pôle espoir d’athlétisme d’Ile-de-France avoir été abusée par son entraîneur depuis l’âge de 8 ans. Elle décrit un mode opératoire bien précis : des massages qui donnent d’abord lieu à des « bisous ». Puis un entraîneur qui vient dans sa chambre d’hôtel lors des nombreux déplacements en vue de compétitions. Interrogés lors de l’enquête ouverte après une plainte de l’adolescente, plusieurs jeunes sportifs décrivent un homme « tactile », qui se promène « en slip » et s’allonge dans le lit de ses élèves pour leur réclamer des « massages ». Les témoignages évoquent aussi « un entraîneur violent à qui il arrive d’attraper les patineuses par les cheveux ». Le sélectionneur, qui nie en bloc, est suspendu de ses fonctions par décision préfectorale, d’abord pour six mois puis définitivement. Viols quotidiens De son côté, Isabelle Steyer, l’avocate de la seconde plaignante, a affirmé que « le monde du patin a couvert cet agresseur qui avait le pouvoir de hisser des très jeunes filles sur les podiums et l’utilisait à des fins dévoyées », sur des adolescentes « déracinées et à sa merci ». En 2015, sa cliente, présentée comme sa « favorite », dépose plainte à son tour contre celui qui est à la fois son entraîneur et sa famille d’accueil. Les parents de l’adolescente, qui habitent en Bretagne, l’ont confiée à l’accusé, qui vit avec sa femme et ses deux enfants, pour qu’elle puisse s’entraîner dans le Val-d’Oise, puis en Belgique, à ses côtés. La sportive de haut niveau, qui a d’abord défendu son mentor après la plainte déposée par sa consœur en 2011, le dénonce à son tour. Elle raconte aux enquêteurs l’emprise, les viols quotidiens, les pompes supplémentaires infligées à l’entraînement quand elle refuse de se plier à certaines pratiques sexuelles. Les rendez-vous imposés avec d’autres hommes, aussi. Lors de l’enquête, plusieurs patineuses ont affirmé avoir elles aussi subi des attouchements, voire des viols, de la part de l’entraîneur. Mais n’ont pas porté plainte. L’accusé, lui, décrit à l’opposé une relation « amoureuse » consentie, débutée à partir de l’émancipation de son élève, à l’âge de 16 ans. L’avocat de l’entraîneur, Augustin d’Ollone, lui, n’a pas souhaité s’exprimer avant l’ouverture du procès.
https://www.lemonde.fr/police-justice/article/2018/12/10/un-entraineur-devant-les-assises-pour-les-viols-de-deux-championnes-de-roller_5395053_1653578.html
10/12/2018
L’homme, âgé de 42 ans, nie les accusations de la première championne et dit avoir entretenu une relation « amoureuse » avec la seconde, débutée à partir de ses 16 ans.
international
Arménie : le bloc électoral du premier ministre en tête des élections législatives anticipées
Le premier ministre arménien, Nikol Pachinian, lors des élection législatives anticipées, dimanche 9 décembre. VAHAN STEPANYAN / AP Le bloc électoral du premier ministre arménien, Nikol Pachinian, était en tête dimanche 9 janvier des élections législatives anticipées, convoquées par le dirigeant réformateur pour renforcer son pouvoir quelques mois après son arrivée à la tête du pays grâce à un soulèvement populaire. Selon un décompte portant sur 25 % des bureaux de vote, le bloc dirigé par le parti Contrat civil de M. Pachinian a obtenu 70,25 % des votes, a annoncé la Commission électorale centrale. Article réservé à nos abonnés Lire aussi En Arménie, l’acte II de la « révolution de velours » Manœuvre politique Nikol Pachinian, un ancien journaliste de 43 ans, est arrivé au pouvoir en Arménie en mai après avoir mené pendant plusieurs semaines des manifestations massives contre le gouvernement alors au pouvoir depuis plus de dix ans. Mais M. Pachinian ne contrôlait pas le Parlement, encore largement acquis au Parti républicain de l’ex-président Serge Sarkissian, raison pour laquelle, bloqué dans ses réformes, il aspirait à organiser des élections anticipées. A la mi-octobre, Nikol Pachinian a réussi une manœuvre politique en annonçant sa démission, puis en se mettant d’accord avec les députés pour qu’ils échouent deux fois de suite à élire un nouveau chef de gouvernement : un prétexte pour la dissolution du Parlement et la convocation d’élections législatives anticipées. Les prochaines élections législatives dans cette ex-république soviétique du Caucase du Sud n’étaient jusqu’alors prévues qu’en 2022. Article réservé à nos abonnés Lire aussi Nikol Pachinian change le visage politique de l’Arménie « Après les élections, nous développerons la démocratie en Arménie et ferons une révolution économique », a déclaré M. Pachinian aux journalistes après avoir glissé son bulletin dans l’urne à Erevan, promettant des élections « libres, équitables et transparentes ». Neuf partis politiques et deux blocs électoraux étaient en lice pour les 101 sièges au Parlement arménien. Selon la législation arménienne, un parti a besoin de recueillir au moins 5 % des voix des électeurs pour pouvoir siéger au Parlement, alors qu’un bloc électoral doit récolter au moins 7 % des suffrages. Une fois passés au Parlement, les partis d’opposition doivent cependant y avoir – en vertu de la loi arménienne – au moins 30 % des sièges, même s’ils ont enregistré des résultats inférieurs à ce chiffre.
https://www.lemonde.fr/international/article/2018/12/10/armenie-le-bloc-electoral-du-premier-ministre-en-tete-des-elections-legislatives-anticipees_5395044_3210.html
10/12/2018
Ces élections ont été convoquées par le dirigeant réformateur pour renforcer son pouvoir après son arrivée à la tête du pays grâce à un soulèvement populaire.