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que dans ces conditions, la société « compo expert » n'a pas satisfait à son obligation de conseil, ce qui est d'autant plus grave que le produit était encore peu connu à la date du litige, étant mis en vente depuis environ trois ans, principalement pour le traitement des pommes, fruit à la peau lisse ; qu'en n'alertant pas les utilisateurs des dangers de marquage des fruits en cas d'application tardive, ni de ce que l'épiderme duveteux de l'abricot est de nature à davantage retenir le produit qu'un fruit lisse, la société « compo expert » ne mettait pas en mesure la société établissements X... de satisfaire sa propre obligation de conseil ; qu'elle sera donc condamnée à garantir la société « établissements X... » des condamnations prononcées à son encontre (arrêt, p. 4 à 8) ; 1°) ALORS QUE l'obligation d'information du fabricant à l'égard de l'acheteur professionnel n'existe que dans la mesure où la compétence de celui-ci ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des caractéristiques techniques des biens qui lui sont livrés ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la société Compo Expert France avait manqué à son devoir de conseil envers la société Établissements X... en ne la mettant pas en mesure de satisfaire sa propre obligation de conseil envers la société Le Puech Rouge, dès lors qu'elle n'avait pas alerté « les utilisateurs des dangers de marquage des fruits en cas d'application tardive ni de ce que l'épiderme duveteux de l'abricot est de nature à davantage retenir le produit qu'un fruit lisse » (arrêt, p. 8 § 4) ; que, pour se prononcer ainsi, la cour d'appel s'est fondée sur les informations générales transmises au Ceta du Vidourle par un courriel du 4 avril 2014 (arrêt, p. 4 dernier § in fine) et leur mise en oeuvre par la société Le Puech Rouge (arrêt, p. 7) ; qu'en statuant de la sorte, tandis que l'obligation d'information dont la société Compo Expert France était redevable envers la société Établissements X..., son seul cocontractant, devait s'apprécier au regard des renseignements que cette dernière, acquéreur professionnel, avait fourni à la société Compo Expert France sur l'utilisation par l'acquéreur final du produit qu'elle lui avait commandé, la cour d'appel a violé les articles 1147, dans sa rédaction applicable en la cause, et 1615 du code civil ; 2°) ALORS QUE le professionnel n'engage pas sa responsabilité au titre de son devoir d'information, de conseil et de mise en garde, si le préjudice allégué par son client résulte d'une méconnaissance des préconisations qui lui ont été faite s'agissant de la mise en oeuvre du produit acheté ; qu'en l'espèce, la société Compo Expert faisait valoir (concl., p. 14 et 15) que M. S..., l'un de ses préposés, avait indiqué dans un courriel du 4 avril 2014 au Ceta du Vidourle, qui l'avait interrogé d'une manière générale sur l'application du produit Invelop Talc sur des abricots de variété Farbaly, qu'il convenait de procéder à plusieurs passages, dont un premier passage à 45 kg/ha la semaine du 7 avril, après avoir précisé qu'il convenait d'éviter de marquer les fruits ou le moins possible ; qu'elle faisait également valoir que la société Le Puech Rouge avait appliqué le produit Invelop Talc en un seul passage, le 24 mai 2014, prenant ainsi le risque que les pluies ayant lieu entre la date d'application et la date de récolte ne soient pas suffisantes pour nettoyer complètement les fruits, et selon un dosage supérieur à celui préconisé pour cette période de l'année, de sorte que l'utilisation du produit avait été trop tardive et ne correspondait pas aux préconisations de la société Compo Expert France ; que la cour d'appel a néanmoins jugé le contraire, aux motifs qu'il était impossible à la société Le Puech Rouge d'appliquer le produit durant la semaine du 7 avril puisqu'il n'avait été livré que le 17 avril et qu'elle avait « pris la précaution de n'appliquer qu'une fois le produit à un dosage inférieur aux 45 kg par hectare préconisé par M. S... pour le premier passage », cette application ayant été effectuée tandis que « les abricots étaient au stade de « petits fruits », leur récolte n'ayant lieu qu'en juillet », de sorte que l'application n'était « pas tardive au regard des indications données dans le Powerpoint du fabricant qui fait état page 24 de passages sur des abricotiers variété Farbaly fin mai pour un dosage de 30 kg par hectare sur l'itinéraire Crau 1 » (arrêt, p. 7) ; qu'en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le courriel du 4 avril 2014 transféré au Puech Rouge le 7 avril mentionnait expressément le risque de marquage et comportait des préconisations précises sur les dates d'application du produit Invelop Talc, notamment sur la nécessité de procéder à un premier passage la semaine du 7 avril au plus tard, ni si cette préconisation était formulée afin que les pluies ultérieures soient suffisantes pour nettoyer les fruits, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147, dans sa rédaction applicable en la cause, et 1615 du code civil ;
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-16.821 du 27/11/2019, partie 5
3°) ALORS QU'il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que l'application, par la société Le Puech Rouge, du produit Invelop Talc sur sa production d'abricots Farbaly le 24 mai 2014 n'était pas tardive « au regard des indications données dans le Powerpoint du fabricant qui fait état page 24 de passages sur des abricotiers variété Farbaly fin mai pour un dosage de 30 kg par hectare sur l'itinéraire Crau 1 avec un résultat cité page 27 de 90% de fruits indemnes sur Invelop », et dès lors le « premier passage » avait été effectué à un dosage « inférieur aux 45 kg par hectare préconisé par M. S... [...] alors que les abricots étaient au stade de « petits fruits », leur récolte n'ayant lieu qu'en juillet » (arrêt, p. 7 dernier §) ; qu'en se prononçant ainsi, tandis que ce document (Prod. 2) s'il mentionnait effectivement un passage à la fin du mois de mai à un dosage de 30 kg par hectare, mentionnait également trois autres passages préalables, dont le premier au début du mois d'avril, pour une récolte en juillet, conformément aux préconisations de la société Compo Expert France laquelle avait insisté sur une première application précoce au début du mois d'avril pour éviter le marquage des fruits, la cour d'appel a dénaturé par omission cet écrit en violation de l'article 1134 alors applicable.
Cour d'appel de Nîmes, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-16.821 du 27/11/2019, partie 6
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, a rendu l'arrêt suivant : Mme Q... V... a présenté, par mémoire spécial reçu le 9 septembre 2019, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par elle contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 9e chambre, en date du 12 avril 2019, qui pour non-représentation d'enfant, l'a condamnée à six mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve et a prononcé sur les intérêts civils. La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 14 novembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Carbonaro, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre. Greffier de chambre : M. Bétron. Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire Carbonaro, les observations de la société civile professionnelle ALAIN BÉNABENT , avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général PHILIPPE. Des observations ont été produites. 1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée : "L'article 227-5 du code pénal porte-t-il atteinte aux alinéas 10 et 11 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 qui pose le principe de la protection des enfants, aux articles 3 et 12 de la Convention de New-York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant qui pose en norme supérieure la prise en compte de l'intérêt de l'enfant et des sentiments exprimés par lui dans toute décision le concernant (1°), ainsi qu'aux articles 5, 8 et 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 qui posent les principes de présomption d'innocence et de nécessité et de proportionnalité des incriminations et des peines, au principe de légalité des délits et des peines consacrés par les articles 5 et 7 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen, en ce qu'il incrimine le fait, par le parent d'un enfant mineur, de refuser de présenter ce mineur à la personne qui a le droit de le réclamer, généralement l'autre parent, et le sanctionne, au principal, d'une peine d'emprisonnement d'un an sauf, selon une jurisprudence constante, circonstances exceptionnelles dont la charge de la preuve pèse sur le parent poursuivi, alors même qu'une simple sanction ou mesure civile serait suffisante à protéger l'ordre public, l'intérêt de l'enfant, l'équilibre entre les parties et le droit au respect de la vie de familiale ? " 2. La disposition législative contestée est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel. 3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle. 4. Par ailleurs, la question posée ne présente pas un caractère sérieux, dès lors que, d'une part, la non-représentation d'enfant incrimine le non-respect d'une décision d'un juge aux affaires familiales qui préserve justement l'intérêt de l'enfant et l'équilibre familial, d'autre part, les circonstances de la commission de l'infraction relèvent de l'appréciation du juge correctionnel et qu'il n'y a pas de disproportion manifeste entre la gravité de l'infraction et la peine encourue d'un an d'emprisonnement, au regard des impératifs de maintien des liens parentaux et, enfin, la démonstration, lors de la résistance de l'enfant, de l'existence d'une circonstance d'exonération est légitime, chaque parent devant faciliter l'exercice des droits de l'autre parent, sans instrumentalisation de l'enfant. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept novembre deux mille dix-neuf. En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
décision 19-83.357 du 27/11/2019, partie 1
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par Mme D... T..., épouse W..., domiciliée [...] , contre l'ordonnance rendue le 20 mars 2018 par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, dans le litige l'opposant : 1°/ à M. P... B..., domicilié [...] , [...], 2°/ à Mme N... U..., domiciliée [...] , tous deux membres de la société Lexargos, anciennement dénommée société B..., défendeurs à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 16 octobre 2019, où étaient présents : Mme Gelbard-Le Dauphin, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, M. Besson, conseiller, Mme Rosette, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Boulloche, avocat de Mme T... ; Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, l'avis de Mme Nicolétis, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme T... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la SCP Boulloche ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un novembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour Mme T... Le premier moyen de cassation fait grief à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir rejeté la demande de Mme T... en nullité de la procédure de taxation des honoraires de la SCP O... et de Mes B... et U..., et d'avoir en conséquence fixé le montant des honoraires dus par Mme T... à la somme totale de 32 203,80 € TTC, Aux motifs qu'« aux termes de l'article 175 du décret du 27 novembre 1991, le bâtonnier, ou le rapporteur qu'il désigne, recueille préalablement les observations de l'avocat et de la partie. En l'occurrence, il apparaît que la lettre de réclamation de Mme D... T... épouse W... a été portée à la connaissance de la SCP O... afin de recueillir ses observations tout comme le courrier de la SCP O... en date du 22 septembre 2016 l'a été à celle de Mme D... T... épouse W..., le bâtonnier ayant prorogé son délibéré par décision du 23 septembre 2016 afin de respecter le principe du contradictoire. Mme D... T... épouse W... qui ne conteste pas avoir eu connaissance des observations de son contradicteur en date du 22 septembre 2016, ne peut reprocher au bâtonnier de l'ordre de ne pas lui avoir transmis les pièces y annexées, cette formalité n'étant pas prévue par les dispositions de l'article 175 du décret du 27 novembre 1991 lequel limite la contradiction à la communication des observations respectives des parties. La décision déférée ne saurait dès lors encourir la nullité de ce chef. Par ailleurs, le fait que le bâtonnier ait statué à l'égard de la SCP O... représentée par Mes Becret et B... ne saurait donner lieu au prononcé de la nullité de l'ordonnance entreprise en ce qu'il constitue seulement un motif de contestation du bien fondé de cette décision tout comme le fait que le bâtonnier n'ait pas pris en compte l'absence de facturation conforme aux dispositions du code de commerce ; Concernant la procédure de contestation de la saisie immobilière : Si Mme D... T... épouse W... s'est acquittée le 26 janvier 2016 de la somme de 10 339,17 € HT au titre de l'honoraire de diligence et de celle de 20 000 € HT représentant l'honoraire de résultat, il apparaît qu'aucune facture conforme aux dispositions de l'article L 441-3 du code de commerce récapitulant les diligences réalisées n'a été établie ni portée à sa connaissance, préalablement à ce paiement. Dès lors les intimés ne sauraient se prévaloir, du fait de ce paiement, d'un accord donné après service rendu par le client ne permettant plus la remise en cause des honoraires réglés. Concernant la procédure de divorce :
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 20, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-16.871 du 21/11/2019, partie 1
Il n'est pas sérieusement contesté qu'il a été mis fin par Mme D... T... épouse W... à la mission de son conseil, au début de la procédure de divorce après que l'affaire eut fait l'objet d'un renvoi par le juge conciliateur le 4 avril 2016 pour l'audience du 20 juin 2016. Dès lors, la convention d'honoraire n'est pas applicable. Il sera toutefois fait application du taux horaire de rémunération de 250 € HT dont Mme Marie- Françoise T... épouse W... avait été informée, ce taux qui n'est d'ailleurs pas contesté par l'appelante, correspondant à la notoriété ainsi qu'à l'expérience de ses avocats. En l'absence de production du dossier de la procédure de divorce et notamment de la requête en divorce, il sera retenu une durée de travail totale correspondant à : Deux rendez-vous 1h30 Requête en divorce 1h Audience de renvoi 1h Sous total 4h30 soit 1 125 € HT Déplacement 125 € Copie 59 € TOTAL HT 1 309 € HT ou 1 570,80 € TTC Ainsi, les honoraires dus par Mme D... T... épouse W... s'élèvent au total : - pour la procédure de contestation de la saisie immobilière à : 6 633 € TTC pour les honoraires de diligence 24 000 € TTC pour l'honoraire de résultat - pour la procédure de divorce 1 570,80 € TTC Soit un montant de 32 203,80 € TTC » (ordonnance p 4 à 6) ; 1°) Alors que le juge doit observer le principe du contradictoire et ne peut fonder sa décision sur des pièces produites par les parties que si celles-ci ont pu en débattre contradictoirement ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande de Mme T... d'annulation de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Grasse du 26 janvier 2017, le premier président de la cour d'appel, tout en relevant que les pièces annexées aux observations des avocats du 22 septembre 2016 ne lui avaient pas été communiquées, a décidé que l'article 175 du décret du 27 novembre 1991 ne prévoyait pas une telle formalité, limitant le contradictoire à la communication des observations des parties ; qu'en statuant ainsi, le premier président de la cour d'appel a violé les articles 6 de la convention européenne des droits de l'Homme, 16 du code de procédure civile et 175 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ; 2°) Alors que toute prestation de service fournie par un avocat doit faire l'objet d'une facture conforme aux dispositions de l'article L. 441-3 du code de commerce ; qu'en l'espèce, Mme T... a demandé l'annulation de la décision du bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Grasse du 26 janvier 2017 car il n'avait pas tenu compte de l'absence de facturation régulières des prestations alléguées par ses anciens conseils ; que pour rejeter cette demande, le premier président a décidé qu'il s'agissait seulement d'un motif de contestation de la décision, violant ainsi les articles L 441-3 du code de commerce et 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ; 3°) Alors que toute prestation de service fournie par un avocat doit faire l'objet d'une facture conforme aux dispositions de l'article L. 441-3 du code de commerce ; que le premier président a condamné Mme T... à payer des honoraires tout en constatant qu'aucune facture n'avait été établie pour la procédure de contestation de la saisie immobilière ; qu'en statuant ainsi, il n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles L 441-3 du code de commerce et 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ; 4°) Alors que toute prestation de service fournie par un avocat doit faire l'objet d'une facture conforme aux dispositions de l'article L. 441-3 du code de commerce ; que Mme T... a soutenu que les honoraires pour la procédure de divorce réclamés par Me U... n'étaient accompagnés d'aucune facture (conclusions p 9, § 2) ; qu'en fixant les honoraires dus par Mme T... pour la procédure de divorce à la somme de 1 570,80 € TTC sans répondre à ce moyen pertinent, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Le deuxième moyen de cassation, subsidiaire, fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir fixé le montant de l'honoraire de résultat du par Mme T... pour la procédure de contestation de la saisie immobilière à la somme de 24 000 € TTC ; Aux motifs que « le 6 juillet 2015, Mme D... T... épouse W... a confié au cabinet de la SCP B... et à Me U... la défense de ses intérêts dans des procédures civile et pénale à engager suite à l'ouverture d'une enquête pénale ayant donné lieu à la saisie immobilière d'un bien lui appartenant ainsi qu'à ses deux enfants, à la souscription par son mari d'un certain nombre de prêts en contrefaisant sa signature et compte tenu de son souhait de divorce.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 20, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-16.871 du 21/11/2019, partie 2
Une convention d'honoraires a été régularisée le 30 juillet 2015 entre la SCP B... représentée par Me P... B..., Me N... U... d'une part et Mme D... T... épouse W... d'autre part, prévoyant un honoraire de diligence fixé sur une base de 250 € HT de l'heure ainsi qu'un honoraire de résultat de 20 000 € HT soit 24 000 € TTC dès lors que sera obtenu le cantonnement de la saisie immobilière aux valeurs détournées devant être réglé soit après accord du parquet impliquant le désistement de l'appel de l'ordonnance de saisie, soit après obtention de l'arrêt de la chambre de l'instruction ayant transformé la saisie immobilière en saisie de valeur et cantonnement ainsi qu'un honoraire de résultat de 50 000 € HT soit 60 000 € TTC en cas de classement sans suite de la procédure pénale concernant Mme W..., ordonnance de non-lieu après instruction et relaxe définitive après audience devant le tribunal correctionnel. Enfin, cette convention prévoyait que dans l'hypothèse où le dessaisissement interviendrait à une date proche de l'issue des procédures et alors que le travail accompli par les avocats aurait permis l'obtention du résultat recherché, la clause relative aux honoraires de résultat serait maintenue dans les termes prévus par la convention. A la demande de ses conseils, Mme D... T... épouse W... a payé le 26 janvier 2016 la somme de 120 407 € TTC correspondant pour la procédure en cantonnement de la saisie à un honoraire de diligences de 10 339,17 € HT et à un honoraire de résultat de 20 000 € HT suite à la transformation de la saisie immobilière en saisie sur valeur et à son cantonnement, ainsi qu'une provision globale de 70 000 € pour la procédure pénale suivie à son encontre, la procédure de divorce et la plainte pour escroquerie et abus de confiance visant son époux. Enfin, par courrier recommandé adressé à la SCP B..., Mes B... et U..., en date du 9 mai 2016 réceptionné le 12 mai 2016, Mme D... T... épouse W... a dessaisi ces conseils des différents dossiers leur étant confiés. En l'occurrence, il est justifié d'une convention d'honoraires passée entre les parties laquelle doit s'appliquer dès lors que l'avocat n'a pas été dessaisi avant l'expiration de sa mission. Concernant la procédure de contestation de la saisie immobilière : Par ordonnance en date du 1er juillet 2015, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice, prenant acte des détournements de fonds opérés par M. W... d'un montant total de 804 000 € et du versement de la somme de 207 000 € sur le compte personnel de Mme D... T... épouse W..., a autorisé la saisie pénale du bien immobilier situé à Saint-Laurent du Var appartenant en pleine propriété à Mme D... T... épouse W... et à ses deux enfants. Le 10 juillet 2015, Me B... dûment mandaté par les propriétaires de l'immeuble, a relevé appel de cette décision puis, par acte déposé le 17 août 2015, a déposé une requête demandant le report de la saisie de l'immeuble sur son prix de vente et son cantonnement à la somme de 1 000 000 €. Par ordonnance du 8 septembre 2015, le juge des libertés et de la détention du tribunal de grande instance de Nice ayant autorisé la saisie immobilière et le report de la saisie pénale sur le prix de cession, après désintéressement des créanciers disposant d'un droit sur le prix de vente, Me B... a déposé un mémoire devant la chambre d'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence tendant au cantonnement de la saisie à la somme de 1 330 000 € et sa demande a été accueillie le 29 octobre 2015. Si Mme D... T... épouse W... s'est acquittée le 26 janvier 2016 de la somme de 10 339,17 € HT au titre de l'honoraire de diligence et de celle de 20 000 € HT représentant l'honoraire de résultat, il apparaît qu'aucune facture conforme aux dispositions de l'article L 441-3 du code de commerce récapitulant les diligences réalisées n'a été établie ni portée à sa connaissance, préalablement à ce paiement. Dès lors les intimés ne sauraient se prévaloir, du fait de ce paiement, d'un accord donné après service rendu par le client ne permettant plus la remise en cause des honoraires réglés. Mme D... T... épouse W... ayant dessaisi ses conseils par courrier en date du 12 mai 2016, soit bien après que la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence eut accepté le cantonnement de la saisie à la somme de 1 330 000 € par décision définitive en date du 29 octobre 2015, la convention d'honoraire liant les parties et s'appliquant à ce dossier à vocation à s'appliquer.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 20, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-16.871 du 21/11/2019, partie 3
S'agissant de l'honoraire de résultat prévu par la convention du 30 juillet 2015 de 20 000 € HT soit 24 000 € TTC, il ne peut être contesté que la SCP B... a obtenu par arrêt de la chambre de l'instruction en date du 29 octobre 2015 la transformation de la saisie du bien immobilier appartenant aux consorts T... W... d'une valeur de 2 900 000 € en une saisie sur valeur, cantonnée à 1 330 000 €. L'analyse des termes de la convention tout comme le comportement ultérieur des parties permettent de retenir que ces dernières ont entendu, lors de la signature de la convention, considérer le résultat comme obtenu dès lors qu'il y aurait transformation de la saisie immobilière en une saisie sur valeur et cantonnement par une décision non susceptible de recours, le terme de "valeurs détournées" étant utilisé par commodité de langage, ce montant étant indéterminé à la date de la convention et sans que le cantonnement de la saisie au montant exact du préjudice finalement retenu soit une condition formelle du résultat ; à cet égard, il sera relevé que la somme de 804 000 € dont se prévalent les consorts W... n'est, ainsi que l'indique l'ordonnance de cantonnement rendue par le juge des libertés et de la détention le 8 septembre 2015, qu'une estimation provisoire du préjudice, l'enquête se trouvant toujours en cours à cette date et que le cantonnement a toujours été demandé par Me B... dans les différents recours exercés, pour un montant supérieur à 804 000 €. Il apparaît en conséquence que la SCP O... est fondée à bénéficier de l'honoraire de résultat de 20 000 € HT ou 24 000 € TTC prévu par la convention. Ainsi, les honoraires dus par Mme D... T... épouse W... s'élèvent au total : -pour la procédure de contestation de la saisie immobilière à : 6 633 € TTC pour les honoraires de diligence 24 000 € TTC pour l'honoraire de résultat -pour la procédure de divorce 1 570,80 € TTC Soit un montant de 32 203,80 € TTC Mme D... T... épouse W... ayant réglé la somme de 120 407 €, la SCP O..., Mes B... et U... devront lui rembourser in solidum celle de 88 203,20 € TTC, cette somme devant porter, conformément à la demande, intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016, date à laquelle la demande de Mme W... en restitution d'honoraires a été portée à la connaissance de ses contradicteurs par le bâtonnier et capitalisation des intérêts à compter de cette même date » (ordonnance p 4, § 6 et suiv.) ; 1°) Alors que ne peuvent constituer des honoraires librement payés après service rendu ceux qui ont été réglés sur présentation de factures ne répondant pas aux exigences de l'article L 441-3 du code du commerce, peu important qu'elles soient complétées par des éléments extrinsèques ; qu'en l'espèce, le premier président a accordé à la SCP O..., Mes B... et U... l'intégralité de l'honoraire de résultat prévu dans la convention d'honoraires du 30 juillet 2015 bien qu'il ait constaté que lesdits avocats ne pouvaient pas se prévaloir de factures conformes aux dispositions de l'article L 441-3 du code de commerce ; qu'en statuant ainsi, le premier président n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard des articles L 441-3 du code de commerce et 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 ; 2°) Alors que la convention d'honoraires du 30 juillet 2015 prévoyait le règlement d'un honoraire de résultat de 20 000 € HT, soit 24 000 € TTC, dès l'instant où serait obtenu le cantonnement de la saisie immobilière aux valeurs détournées ; qu'en l'espèce, le premier président a condamné Mme T... à payer cet honoraire de résultat de 20 000 € HT après avoir retenu que son conseil avait obtenu la transformation de la saisie du bien immobilier appartenant aux consorts T... W... d'une valeur de 2 900 000 € en une saisie valeur, cantonnée à 1 330 000 € ; que cependant, le premier président a également constaté que les valeurs détournées restaient indéterminées dès lors que l'enquête se trouvait toujours en cours, ce qui empêchait le paiement de l'honoraire de résultat ; qu'en prononçant néanmoins une condamnation à payer cet honoraire, le premier président a dénaturé les termes clairs et précis de la convention d'honoraires, en violation de l'article 1103 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. Le troisième moyen de cassation, subsidiaire, fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir fixé le montant des honoraires dus par Mme T... pour la procédure de divorce à la somme de 1 570,80 € TTC ; Aux motifs qu'« il n'est pas sérieusement contesté qu'il a été mis fin par Mme D... T... épouse W... à la mission de son conseil, au début de la procédure de divorce après que l'affaire eut fait l'objet d'un renvoi par le juge conciliateur le 4 avril 2016 pour l'audience du 20 juin 2016. Dès lors, la convention d'honoraire n'est pas applicable.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 20, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-16.871 du 21/11/2019, partie 4
Il sera toutefois fait application du taux horaire de rémunération de 250 € HT dont Mme D... T... épouse W... avait été informée, ce taux qui n'est d'ailleurs pas contesté par l'appelante, correspondant à la notoriété ainsi qu'à l'expérience de ses avocats. En l'absence de production du dossier de la procédure de divorce et notamment de la requête en divorce, il sera retenu une durée de travail totale correspondant à : Deux rendez-vous 1h30 Requête en divorce 1h Audience de renvoi 1h Sous total 4h30 soit 1 125 € HT Déplacement 125 € Copie 59 € TOTAL HT 1 309 € HT ou 1 570,80 € TTC » (ordonnance p 6, § 4 et suiv.) ; Alors que l'avocat doit rapporter la preuve des diligences accomplies et ne peut à cette fin se prévaloir de titre établi par lui-même ; qu'en l'espèce, le premier président a considéré qu'en l'absence de production du dossier de la procédure de divorce et notamment de la requête de divorce, il serait retenu une durée de travail de 4h30 correspondant à 1h30 de rendez-vous, 1h d'étude de pièces, 1h pour la requête de divorce et 1h afférente à l'audience de renvoi ; que pourtant, Me U... n'a versé aux débats qu'un état de diligences établi par elle-même sans qu'aucune pièce ne le corrobore ; qu'en statuant ainsi, le premier président a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1353 du code civil dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par la société Onet services, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 8 février 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. J... M..., domicilié [...] , 2°/ à la société TEP Artois chimie, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , 3°/ à la société Arc-en-ciel environnement, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , 4°/ à Pôle emploi, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 8 octobre 2019, où étaient présents : Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prache, conseiller référendaire rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, Mme Pontonnier, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat de la société Onet services, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société TEP Artois chimie ; Sur le rapport de Mme Prache, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Donne acte à la société Onet services du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société TEP Artois chimie ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Onet services aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Onet services à payer à la société TEP Artois chimie la somme de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize novembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Bernard Hémery, Carole Thomas-Raquin, Martin Le Guerer, avocat aux Conseils, pour la société Onet services IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué, infirmatif de ces chefs, d'AVOIR condamné la société Onet services à verser à M. M... les sommes de 38 595,60 euros à titre de rappel de salaires, 3 859,50 euros au titre des congés payés afférents, 1 188,59 euros à titre d'indemnité de licenciement, 2 796,74 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 279,67 euros au titre des congés payés afférents, 9 000 euros de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 2 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, d'AVOIR ordonné à la société Onet services de remettre à M. M... un bulletin de salaire rectificatif, un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle emploi conformes aux dispositions de l'arrêt, d'AVOIR ordonné le remboursement par la société Onet services à Pôle emploi des indemnités de chômage versées à M. M... dans la limite de six mois d'indemnités AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions des articles 7-1 et suivants de la convention collective de la propreté, qu'en cas de succession, sur un même site, de prestataires entrant dans le champ d'application de cette convention, le transfert des contrats de travail des salariés remplissant des conditions, notamment d'ancienneté, s'effectue de plein droit ; que l'article 7-3 de cette convention collective fait obligation à l'entreprise sortante d'établir une liste de tout le personnel affecté au marché repris, en y faisant ressortir les salariés remplissant les conditions et aux termes de l'article 7-2, le nouveau prestataire s'engage à garantir l'emploi de 100 % du personnel affecté au marché faisant l'objet de la reprise qui remplit les conditions pour bénéficier de la garantie d'emploi ; qu'aux termes de l'article 7-3-IV, le personnel ne satisfaisant pas aux conditions requises pour bénéficier d'un maintien de son emploi au sein de l'entreprise entrante restera sous la responsabilité de l'entreprise sortante ; qu'en l'espèce, M. M... était affecté à plein temps par la société TEP sur le marché de nettoyage des locaux des douanes françaises situés sur l'emprise de l'aéroport Roissy-Charles de Gaulle ; qu'il résulte des explications des parties, que M. M... assurait indifféremment ses fonctions sur les territoires des trois départements (93, 77 et 95) à l'intersection desquels ce site est situé ;
Cour d'appel de Paris K5, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-14.584 du 13/11/2019, partie 1
qu'aux mois de mars et avril 2011, le marché de nettoyage de ces locaux situés dans les départements 77 et 95 a été attribué à la société Onet, tandis que celui relatif à ceux situés dans le département 93 a été attribué à la société Arc en ciel ; qu'à l'occasion de ce transfert, la société TEP a néanmoins transmis à la société Onet services une liste mentionnant que M. M... était occupé à plein temps sur le site qui lui était transféré ; que de son côté, la société Onet services prétend que les horaires de travail de M. M... sur la partie du site qui lui a été transférée ne représentaient que 43,33 heures par mois ; qu'au soutien de cette allégation, elle ne produit qu'un tableau, qui, selon elle, lui aurait été transmis par l'administration des Douanes, sans en rapporter la preuve ; que la société Onet services ne fournissant ainsi aucune explication ou preuve convaincante relatives aux horaires effectués par M. M... sur le site qui lui a été attribué, ce dernier doit être réputé avoir été entièrement affecté au marché qu'elle a repris ; que le jugement doit donc être infirmé en ce qu'il a débouté M. M... de ses demandes à l'encontre de la société Onet services et en ce qu'il a prononcé des condamnations à l'égard de la société Arc-en-ciel environnement ; que le contrat de travail que la société Onet services a fait signer à M. M... le 1er mai 2011, prévoyant un horaire de 52 heures par mois est inopérant, le transfert du contrat de travail intervenu en application des dispositions conventionnelles susvisées se faisant de plein droit et s'imposant à toutes les parties ; qu'en imposant à M. M... une diminution de ses horaires de travail, la société Onet services a modifié son contrat de travail de façon unilatérale ; que M. M... s'étant tenu à sa disposition pour effectuer à plein temps sa prestation de travail, est fondé à obtenir, à titre de rappel de salaire du 1er mai 2011 au 21 octobre 2014, date de son licenciement, la différence entre le salaire perçu et celui qu'il aurait dû percevoir sur la base d'un plein temps, soit, au vu de ses calculs, qui sont exacts, la somme de 38 595,60 euros, demande qu'il qualifie à tort d'indemnitaire, outre 3 859,50 euros à titre de congés payés afférents ; qu'il résulte des explications qui précèdent que la société Onet services ne pouvait valablement reprocher à M. M... de ne pas se présenter à son travail, ce dont il résulte que le licenciement, notifié par lettre du 17 octobre 2014 pour faute grave caractérisée par ses absences injustifiées depuis le 8 septembre 2014, est dépourvu de cause réelle et sérieuse, sans qu'il soit nécessaire de répondre à l'argumentation du salarié relative à l'absence de badge lui permettant d'accéder à son lieu de travail ; que sur la base d'un travail à plein temps pour le compte de la société Onet services, son salaire brut mensuel aurait dû s'élever à 1 398,37 euros ; qu'à la date de la rupture, M. M... avait plus de deux années d'ancienneté et est donc fondé à percevoir, sur cette base, une indemnité compensatrice de préavis égale à deux mois de salaire sur le fondement des articles L 1234-1 et L 1234-5 du code du travail, soit la somme de 2 796,74 euros, ainsi que les congés payés afférents, soit 279,67 euros ; que M. M... est également fondé à percevoir une indemnité de licenciement sur le fondement des dispositions de l'article L. 1234-9 et R. 1234-2 du code du travail, à hauteur de sa demande, soit 1 188,59 euros ; que l'entreprise comptant plus de dix salariés, M. M..., qui avait plus de deux ans d'ancienneté, a droit à l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, et qui ne peut être inférieure aux six derniers mois de salaire ; qu'au moment de la rupture, M. M..., âgé de 57 ans, comptait plus de 4 ans d'ancienneté ; qu'il ne produit aucun élément relatif à sa situation à la suite de son licenciement ; qu'au vu de cette situation, il convient d'évaluer son préjudice à 9 000 euros ; qu'enfin, sur le fondement de l'article L.1235-4 du code du travail, il convient de condamner la société Onet services à rembourser les indemnités de chômage dans la limite de six mois ; qu'il convient d'ordonner à la société Onet services de remettre à M. M... un bulletin de salaire rectificatif, ainsi qu'un certificat de travail et une attestation destinée à Pôle-emploi, conformes aux dispositions du présent arrêt, sans que le prononcé d'une astreinte apparaisse nécessaire ; que sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, il convient de condamner la société Onet services à payer à M. M... une indemnité destinée à couvrir les frais non compris dans les dépens qu'il a dû engager pour assurer la défense de ses intérêts et qu'il y a lieu de fixer à 2 000 euros ;
Cour d'appel de Paris K5, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-14.584 du 13/11/2019, partie 2
ALORS DE PREMIERE PART QU'en cas de marché initial redistribué en plusieurs lots, les entreprises entrantes ont l'obligation d'assurer la continuité du contrat de travail des personnes affectées au lot qu'elles reprennent et il appartient à l'entreprise sortante de démontrer que les salariés remplissent les conditions prévues par l'article 2 de l'accord du 29 mars 1990 annexé à la convention collective nationale de travail des entreprises de propreté du 1er juillet 1994 pour bénéficier de la garantie d'emploi et de la continuité du contrat de travail qu'il institue ; que, pour dire que M. M... devait être réputé avoir été entièrement affecté au marché repris par la société Onet services de sorte qu'en lui faisant signer un contrat de travail prévoyant un horaire de 52 heures par mois, la société Onet services avait modifié son contrat de travail de manière unilatérale, la cour d'appel qui a dit que la société TEP avait transmis à la société Onet services une liste mentionnant que M. M... était occupé à plein temps sur le site qui lui était transféré, que la société Onet services prétendait que les horaires de travail de M. M... sur la partie du site qui lui avait été transférée représentaient 43,33 heures par mois, produisait un tableau qui, selon elle, lui aurait été transmis par l'administration des douanes sans en apporter la preuve, et ne fournissait aucune explication ou preuve convaincante relative aux horaires de M. M... sur le site qui lui avait été transféré, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil et l'article 2 de l'accord du 29 mars 1990 annexé à la convention collective nationale de travail des entreprises de propreté du 1er juillet 1994 ; ALORS DE DEUXIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QU'en cas de marché initial redistribué en plusieurs lots, les entreprises entrantes ont l'obligation d'assurer la continuité du contrat de travail des personnes affectées au lot qu'elles reprennent ; qu'ayant constaté que M. M... était affecté à plein temps par la société TEP sur le marché de nettoyage des locaux des douanes situés sur l'emprise de l'aéroport de Roissy, à l'intersection des départements de Seine Saint-Denis, de Seine et Marne et du Val d'Oise (93, 77 et 95), qu'il exerçait indifféremment ses fonctions sur les trois départements, que ce marché avait été attribué à la société Onet services pour les départements de Seine et Marne et du Val d'Oise (77 et 95) et à la société Arc en ciel pour le département de Seine Saint-Denis (93), la cour d'appel qui a fait peser sur la seule société Onet services la preuve des horaires de travail antérieurement effectués par M. M... sur la partie du marché qui lui avait été attribuée et qui a considéré, qu'en l'absence d'une telle preuve, M. M... devait être réputé entièrement affecté au marché qu'elle avait repris, a violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil et l'article 2 de l'accord du 29 mars 1990 annexé à la convention collective nationale de travail des entreprises de propreté du 1er juillet 1994 ; ALORS DE TROISIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE dans ses conclusions d'appel, la société Onet services avait exposé qu'en vue de la reprise du personnel, Mme D..., du service immobilier de la direction interrégionale des douanes de Roissy, lui avait adressé un courriel le 14 mars 2011 indiquant : "Je vous prie de trouver ci-joint le tableau récapitulatif des agents en charge du nettoyage de la direction des douanes de Roissy, leur bâtiment d'attribution et leurs quotas horaires" et que ce tableau permettait de constater que M. M... intervenait sur les bâtiments dans les trois départements 77, 93 et 95 et ne travaillait dans le bâtiment [...] repris par la société Onet services que de 7h30 à 9h30 du lundi au vendredi ; qu'en énonçant qu'au soutien de son allégation que les horaires de travail de M. M... sur la partie du site qui lui avait été transférée ne représentaient de 43,33 heures par mois, la société Onet services produisait un tableau qui lui aurait été transmis par l'administration des douanes sans en rapporter la preuve, sans répondre aux conclusions d'appel de la société exposante invoquant le courriel de Mme D..., du service immobilier de la direction interrégionale des douanes de Roissy, lui transmettant ledit tableau, pièces produites aux débats, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; ALORS DE QUATRIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE dans ses conclusions d'appel, la société exposante faisait valoir que M. M... prétendait que l'intégralité de son contrat de travail aurait dû être transférée à la société Onet services sur la foi d'un courriel de la société TEP indiquant au conseil de M. M... que le chantier avait été divisé en deux lots, qu'en sa qualité de machiniste, M. M... intervenait sur la totalité des locaux des douanes et que, "pour ne pas le pénaliser", la société TEP l'avait "affecté dans sa globalité chez ONET", mais qu'il n'appartenait pas à la société sortante de décider des heures devant être reprises par chacun de ses successeurs, cette répartition devant être faite en fonction de la distribution des heures du salarié sur chacun des chantiers repris par les différents prestataires ;
Cour d'appel de Paris K5, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-14.584 du 13/11/2019, partie 3
qu'en énonçant qu'en l'absence de preuve relative aux horaires de travail effectués par M. M... sur le site qui avait été attribué à la société Onet services, ce dernier devait être réputé avoir été entièrement affecté au marché repris par cette société, sans répondre aux conclusions d'appel de la société exposante invoquant la lettre de la société TEP reconnaissant avoir indument affecté M. M... pour la totalité de son horaire de travail à la société Onet services, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; ALORS DE CINQUIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QU'en cas de marché initial redistribué en plusieurs lots, les entreprises entrantes ont l'obligation d'assurer la continuité du contrat de travail des personnes affectées au lot qu'elles reprennent ; qu'ayant constaté, d'une part, que M. M... était affecté à plein temps par la société TEP sur le marché de nettoyage des locaux des douanes situés sur l'emprise de l'aéroport de Roissy, à l'intersection des départements de Seine Saint-Denis, de Seine et Marne et du Val d'Oise (93, 77 et 95) et qu'il résultait des explications des parties que M. M... assurait indifféremment ses fonctions sur le territoire des trois départements (93, 77 et 95) et, d'autre part, qu'aux mois de mars et avril 2011, le marché de nettoyage de ces locaux situés dans les départements 77 et 95 avait été attribué à la société Onet services tandis que celui relatif aux locaux situés dans le département 93 avait été attribué à la société Arc en ciel, la cour d'appel qui a dit que M. M... devait être réputé avoir été entièrement affecté au marché repris par la société Onet services, n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences légales qui s'en évinçaient nécessairement et a violé l'article 2 de l'accord du 29 mars 1990 annexé à la convention collective nationale de travail des entreprises de propreté du 1er juillet 1994, ensemble l'article 12 du code de procédure civile ; ALORS DE SIXIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QU'en toutes circonstances, le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe de la contradiction ; que, sans prétendre s'être tenu à la disposition de la société Onet services pour effectuer sa prestation de travail à temps plein, puisqu'il avait parallèlement signé un contrat de travail à temps partiel avec la société Arc en ciel, attributaire de l'autre partie du marché scindé, M. M... avait sollicité l'allocation de dommages-intérêts en réparation du préjudice résultant, selon lui, de la perte de salaire qu'il aurait subie faute pour la société Onet services d'avoir repris son contrat de travail à temps plein ; qu'en énonçant que M. M... s'étant tenu à la disposition de la société exposante pour effectuer sa prestation de travail à temps plein il était fondé à obtenir un rappel de salaire du 1er mai 2011 au 21 octobre 2014, la cour d'appel qui a ainsi statué par un moyen qu'elle a relevé d'office sans le soumettre à la discussion préalable des parties, a violé l'article 16 du code de procédure civile ; ALORS DE SEPTIEME PART ET SUBSIDIAIREMENT QUE tout jugement doit être motivé à peine de nullité, une simple affirmation équivalant à une absence de motif ; qu'ayant elle-même constaté que M. M... avait signé un autre contrat à durée indéterminée le 30 mai 2011 avec la société Arc en ciel qui avait repris une autre partie du marché perdu par la société TEP, la cour d'appel qui a affirmé que M. M... s'était tenu à la dispositions de la société exposante pour effectuer sa prestation de travail à temps plein, sans préciser les éléments lui permettant de le juger, a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Roxane, dont le siège est [...], représenté par son syndic la société Hémon-Camus, [...], contre l'arrêt rendu le 5 juin 2018 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Rophidina, dont le siège est [...], 2°/ à la société Nantes Pitre-Chevalier, dont le siège est [...], défenderesses à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 8 octobre 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Andrich, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, M. Parneix, Mmes Dagneaux, Provost-Lopin, MM. Barbieri, Jessel, Boyer, conseillers, Mmes Corbel, Collomp, M. Béghin, Mme Schmitt, conseillers référendaires, Mme Valdès- Boulouque, premier avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller, les observations de Me Occhipinti, avocat du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Roxane, de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de la société Nantes Pitre-Chevalier, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Rophidina, l'avis de Mme Valdès- Boulouque, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 5 juin 2018), que, par acte du 28 mars 1997, la SCI Nantes-Pitre-Chevallier (la SCI) a consenti à la SCCV Loire Océan, constructeur de la résidence Le Roxane, une servitude de passage sur la parcelle cadastrée section [...] au profit des parcelles cadastrées section [...] et [...], devenues [...], [...] et [...] ; que la SCI a consenti, sur la parcelle [...] devenue [...], un bail à construction à la société Rophidina (la locataire) qui, en 2015, édifié une construction ; que, soutenant que cette construction faisait obstacle à l'exercice de la servitude, le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Roxane (le syndicat), devenu propriétaire de la parcelle [...] et bénéficiaire d'une convention d'occupation de la parcelle [...] appartenant à la commune de Nantes, a assigné la SCI et la locataire en suspension des travaux et en remise en état des lieux ; Attendu que le syndicat fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes, alors, selon le moyen : 1°/ qu'une servitude est instaurée au profit d'un fonds dominant, et non du propriétaire de celui-ci ; que l'utilisateur du fonds dominant peut donc agir pour faire respecter la servitude par le propriétaire du fonds dominant si son intérêt est lésé ; que la cour d'appel a constaté que le syndicat des copropriétaires était occupant précaire de la parcelle [...], faisant partie du fonds dominant ; qu'en estimant qu'il n'avait pas qualité pour agir afin de faire respecter cette servitude, elle a violé les articles 637 du code civil et 31 du code de procédure civile ; 2°/ qu'une servitude est instaurée au profit d'un fonds dominant ; que la cour d'appel a constaté que le fonds dominant était constitué des parcelles [...] et [...], devenues [...], [...] et [...] et que le syndicat des copropriétaires était propriétaire de la parcelle [...] ; qu'en estimant qu'il ne pouvait pas agir pour faire respecter la servitude de passage, au motif inopérant que cette parcelle était engazonnée, la cour d'appel a violé les articles 637 du code civil et 31 du code de procédure civile ; 3°/ qu'une servitude ne s'éteint que si, du fait du propriétaire du fonds dominant, elle ne peut plus être utilisée, ou encore par la réunion des fonds dominant et servant et par le non-usage trentenaire ; que la cour d'appel, en estimant impossible pour le syndicat, propriétaire et usager de parties du fonds dominant, d'agir pour faire respecter la servitude, en a implicitement consacré l'extinction ; qu'elle a ainsi violé les articles 703, 705 et 706 du code civil ; Mais attendu que la cour d'appel a retenu, souverainement, que le seul passage à pied et en véhicule convenu à l'acte du 28 mars 1997 concernait la parcelle [...] et, à bon droit, que le syndicat, simple occupant, n'avait pas qualité pour se prévaloir de la servitude de passage ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Roxane aux dépens ;
Cour d'appel de Rennes 1A, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-21.136 du 14/11/2019, partie 1
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande du syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Roxane, et le condamne à payer à la société Rophidina et à la société Nantes-Pitre-Chevallier la somme de 1 500 euros chacune ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze novembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par Me Occhipinti, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Roxane. Il est reproché à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré le syndicat des copropriétaires de l'immeuble Le Roxane irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir ; AUX MOTIFS QU'il résulte des dispositions de l'article 123 du code de procédure civile que les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause. Dès lors, elles peuvent être proposées pour la première fois en cause d'appel. La société Rophinida soutient que le syndicat n'est pas propriétaire du fonds prétendument dominant. Le syndicat des copropriétaires soutient qu'il bénéficie sur la parcelle [...] d'une servitude de passage au profit des parcelles [...] et [...], fonds dominant. Aux termes d'un protocole transactionnel du 21 février 1997, les parties sont convenues, en contrepartie d'une indemnité de 50 000 francs que : « La société PitreChevalier s'oblige à consentir au profit des parcelles cadastrées sous le numéro [...] et [...], objet du permis de construire précité, une servitude de passage grevant la parcelle lui appartenant cadastrée numéro [...] ([...]). L'assiette de la servitude de passage considérée est figurée sous une teinte rouge sur le plan ci annexé. Cette servitude de passage sera à tous usages pour les besoins de la desserte des parcelles cadastrées, en tout temps et à toute heure. La SCCV Loire Océan pourra l'utiliser pour les besoins de la réalisation de l'ensemble immobilier objet du permis de construire ci-dessus, à charge de remettre en état l'assiette dudit passage en cas de dégradation et sans que cette utilisation perturbe le libre accès en voiture ou en camion au centre commercial adjacent, ( .). Le ou les propriétaires des parcelles cadastrées [...] et [...], fonds dominant, participeront à hauteur de 50 % aux frais d'entretien du terrain d'assiette de la servitude. ( .) L'acte authentique établissant la présente servitude de passage sera reçu par Maître C... notaire à Nantes avant le 30 mars 1997. » Aux termes de l'acte authentique du 28 mars 1997, la société PitreChevalier ( le constituant) a consenti à la SCCV Loire Océan (le bénéficiaire) « 1) une servitude de passage à pied et tout véhicule admis sur les voies publiques, en tout temps et en toute heure. La SCCV Loire Océan pourra l'utiliser pour les besoins de la réalisation de l'ensemble immobilier objet du permis de construire ci-dessus, à charge de remettre en état l'assiette dudit passage en cas de dégradation. 2)avec le droit de se raccorder aux divers réseaux existants en souterrain dans l'emprise du terrain supportant la servitude ASSIETTE: l'assiette de cette servitude sera d'une largeur de 5 m minimum-largeur décomptés depuis 50 cm de la limites séparatives Nord de la parcelle (fonds servant)-à partir de la rue [...] et sur toute la longueur de la parcelle-sauf l'effet de ce qui est dit ci-après à propos de la fosse existante sur la parcelle-le bénéficiaire devant en faire son affaire personnelle. Cette assiette est susceptible d'être déplacée au gré du constituant sans qu'il ne puisse être apporté aucune gêne aux bénéficiaires pour son passage, ni pour les réseaux qu'il pourrait utiliser DÉCLARATION POUR L'ADMINISTRATION: Le bénéficiaire déclare qu'il accepte cette servitude de passage pour édifier sur le fonds dominant, dans le délai de quatre ans à compter de ce jour, un bâtiment collectif dont les trois quarts au moins de la superficie totale seront affectés à l'habitation, et qui couvrira avec ses cours et jardins la totalité du terrain. En conséquence la constitution de servitude sera soumise en totalité à la taxe sur la valeur ajoutée qui sera acquittée par le bénéficiaire ( .).» Les parcelles [...] et [...] sont devenues les parcelles [...], [...] et [...]. La copropriété est désormais propriétaire de la parcelle [...] sur laquelle ses immeubles sont implantés. Il ressort de l'acte authentique que, contrairement à ce que soutient le syndicat, les parties ont fait la distinction entre le « 1) » qui est une servitude de passage à pied et tout véhicule et le « 2) » qui est le droit de se raccorder aux réseaux. En ce qui concerne la servitude de passage, il ressort de la configuration des lieux, qu'à la jonction des parcelles [...] et [...], se trouve une jardinière sur le fonds [...] et que la parcelle [...] est engazonnée. Ainsi, le seul passage à pied et en véhicule convenu à l'acte concerne la parcelle [...] (fonds servant) et la parcelle [...] (fonds dominant). Ceci est corroboré par les écritures du syndicat qui tendent à la destruction des ouvrages faisant obstacle à l'exercice de la servitude par le fonds [...].
Cour d'appel de Rennes 1A, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-21.136 du 14/11/2019, partie 2
Par acte du 7 février 2000, la SCCV LES TROIS ILES (anciennement SCCV Loire Océan) a cédé la parcelle [...] à la Ville de Nantes. Par acte sous seing privé du 18 mai 2000, la Ville de Nantes a mis la parcelle [...] à disposition de la copropriété de l'immeuble « Résidence Roxane ». Il est précisé à la convention que cette mise à disposition est destinée à l'usage exclusif des propriétaires et à destination d'espace vert, dans l'attente de leur affectation par la Ville ; que l'occupant devra jouir des lieux sans rien faire qui puisse nuire à la tranquillité du voisinage. Enfin, il est précisé que le contrat a un caractère précaire et révocable, à première réquisition de la Ville. Il résulte de cette convention que le syndicat de copropriétaires, simple occupant précaire de la parcelle [...], n'a pas qualité pour se prévaloir d'une servitude de passage au bénéfice de ce fonds ; 1°) - ALORS QU'une servitude est instaurée au profit d'un fonds dominant, et non du propriétaire de celui-ci ; que l'utilisateur du fonds dominant peut donc agir pour faire respecter la servitude par le propriétaire du fonds dominant si son intérêt est lésé ; que la cour d'appel a constaté que le syndicat des copropriétaires était occupant précaire de la parcelle [...], faisant partie du fonds dominant ; qu'en estimant qu'il n'avait pas qualité pour agir afin de faire respecter cette servitude, elle a violé les articles 637 du code civil et 31 du code de procédure civile ; 2°) - ALORS QU'une servitude est instaurée au profit d'un fonds dominant ; que la cour d'appel a constaté que le fonds dominant était constitué des parcelles [...] et [...], devenues [...], [...] et [...] et que le syndicat des copropriétaires était propriétaire de la parcelle [...] ; qu'en estimant qu'il ne pouvait pas agir pour faire respecter la servitude de passage, au motif inopérant que cette parcelle était engazonnée, la cour d'appel a violé les articles 637 du code civil et 31 du code de procédure civile ; 3°) - ALORS QU'une servitude ne s'éteint que si, du fait du propriétaire du fonds dominant, elle ne peut plus être utilisée, ou encore par la réunion des fonds dominant et servant et par le non-usage trentenaire ; que la cour d'appel, en estimant impossible pour le syndicat, propriétaire et usager de parties du fonds dominant, d'agir pour faire respecter la servitude, en a implicitement consacré l'extinction ; qu'elle a ainsi violé les articles 703, 705 et 706 du code civil.
Cour d'appel de Rennes 1A, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-21.136 du 14/11/2019, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant : M. M... A... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-En-Provence, en date du 21 août 2019, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de meurtres aggravés et association de malfaiteurs a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire. La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 30 octobre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Guéry, conseiller rapporteur, M. Moreau, conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : Mme Guichard ; Sur le rapport de M. le conseiller Guéry, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général VALAT ; Un mémoire a été produit. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 4 février 2016, deux hommes ont été abattus dans le parking d'un centre commercial de Marseille. Le 22 février 2018, M. M... A... a été mis en examen des chefs de meurtre en bande organisée et participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime. Il a été placé en détention provisoire. 3. Par ordonnance du 1er août 2019, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation de sa détention provisoire. 4. M. A... a interjeté appel de cette décision. Examen des moyens Sur le second moyen 5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen est pris de la violation des articles 114 et 116 du code de procédure pénale, des articles 5 et 6, § 3, de la Convention européenne des droits de l'homme et les droits de la défense. 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué "en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de prolongation de la détention provisoire de M. A... après avoir déclaré non fondée la demande en nullité du débat contradictoire et des actes subséquents, 1°) alors que la communication de l'entier dossier de la procédure au juge des libertés et de la détention, et sa mise à la disposition du conseil de la personne mise en examen avant chaque comparution ou audition, dans les conditions explicitées à l'article 114 du code de procédure pénale, ainsi que la communication de copies de ces pièces au conseil sont des prescriptions essentielles aux droits de la défense, à la garantie de la liberté individuelle et à la présomption d'innocence faisant nécessairement grief ; qu'en l'espèce, le conseil de M. A... indiquait qu'il n'avait pas eu accès à l'entier dossier avant le débat contradictoire qui s'est tenu le 31 juillet 2019, les procès-verbaux d'audition de M. K... Q... et de M. S... R..., reçus au cabinet le 8 avril 2019 qui concernaient la présence de M. A... en un lieu déterminé au moment des faits reprochés, ayant été joints au dossier postérieurement à l'audience après que des recherches aient été entreprises par le juge d'instruction à la suite de l'incident soulevé par la défense, le juge d'instruction ayant alors lui-même pu constater que ces procès-verbaux ne figuraient pas au dossier ; qu'en considérant néanmoins que parce que les pièces dont s'agit avaient été évoquées par le magistrat instructeur lors de l'audience, la défense ayant présenté des observations et que la motivation du juge des libertés et de la détention ne repose pas exclusivement sur ces éléments, la procédure est régulière, sans vérifier si le dossier mis à la disposition du conseil de M. A... était bien complet avant le débat contradictoire, la chambre de l'instruction a violé les dispositions des articles 114 et 116 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6 § 3 de la Convention européenne des droits de l'homme et les droits de la défense ; 2°) alors que toute personne doit disposer du temps et des facilités nécessaires à la préparation de sa défense ; qu'en s'abstenant de communiquer au conseil de M. A... les éléments du dossier nécessaires à l'exercice de la défense avant l'audience, éléments concernant le lieu où se serait trouvé le prévenu lors des faits reprochés, la chambre de l'instruction a violé les articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble préliminaire 114 et 116 du code de procédure pénale et les droits de la défense”. Réponse de la Cour
décision 19-85.700 du 14/11/2019, partie 1
8. Pour rejeter la demande en nullité présentée par le conseil de M. A..., la chambre de l'instruction énonce qu'il résulte de l'examen de la procédure que le magistrat instructeur a mentionné, dans son ordonnance de saisine du juge des libertés et de la détention, deux procès-verbaux cotés D 2046 et D 2048 que la défense prétend ne pas avoir pu consulter avant le débat contradictoire. Elle note que la consultation de la version numérisée de la procédure transmise à la chambre de l'instruction fait apparaître que ces éléments figurent bien au dossier, sont référencés sous ces cotes, et qu'aucun élément ne permet d'établir que la défense n'aurait pu avoir accès à ces pièces, notamment en consultant l'entier dossier de la procédure au cabinet d'instruction, le procès-verbal du débat contradictoire du 31 juillet 2019 mentionnant la mise à disposition de la procédure quatre jours ouvrables au plus tard avant le débat contradictoire. 9. Les juges relèvent encore qu'il résulte de la retranscription des observations du conseil de M. A... lors du débat contradictoire que les motifs de l'ordonnance de saisine du juge d'instruction tendant à la prolongation de la détention provisoire, et notamment la mention des pièces contestées par la défense, ont été contradictoirement débattus devant le juge des libertés et de la détention, ce magistrat en ayant fait état devant la défense, laquelle a formulé des observations. 10. Ils retiennent enfin que la motivation du juge des libertés et de la détention ne repose pas exclusivement sur les éléments contestés par la défense et prend en compte plusieurs autres éléments relatifs à l'information en cours ainsi qu'à la personnalité du mis en examen à l'appui de la décision de prolongation de la détention provisoire. 11. En se déterminant ainsi, dès lors que le dossier a été mis à disposition de l'avocat du mis en examen dans l'état où il se trouvait au jour dudit débat, peu important que l'avocat ait ou non reçu la copie complète de la procédure, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales et conventionnelles invoquées. 12. Dès lors, le moyen doit être écarté. 13. Par ailleurs l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze novembre deux mille dix-neuf ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
décision 19-85.700 du 14/11/2019, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par l'association FNATH 79, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 6 juin 2018 par la cour d'appel de Poitiers (chambre sociale), dans le litige l'opposant à M. M... H..., domicilié [...] , défendeur à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 1er octobre 2019, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Valéry, conseiller référendaire rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Jouanneau, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat de l'association FNATH 79 ; Sur le rapport de Mme Valéry, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne l'association FNATH 79 aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour l'association FNATH 79. Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit le licenciement de M. H... sans cause réelle et sérieuse et condamné l'association Fnath 79 à lui payer la somme de 40 000 euros à titre de dommages et intérêts, AUX MOTIFS PROPRES QUE L'association Fnath fait valoir que c'est à tort que le conseil de prud'hommes a estimé qu'elle avait failli à son devoir de reclassement en licenciant pour inaptitude M. H... sans attendre les réponses des autres destinataires du message et sans prendre des mesures permettant d'obtenir les réponses dans un délai raisonnable ; qu'il résulte des dispositions de l'article L 1226-2 du code du travail, dans son ancienne rédaction antérieure à la loi du 8 août 2016 applicable au 1er janvier 2017, que lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation, transformation des postes de travail ou aménagement du poste de travail ; que l'obligation qui pèse sur l'employeur est de moyen, en sorte qu'il lui suffit de justifier des diligences accomplies ; que la recherche de reclassement doit être loyale et sérieuse, menée au sein de la société et du groupe auquel elle appartient, dans toutes les entreprises dont les activités, l'organisation et le lieu d'exploitation permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel et qu'en l'espèce, elle s'est adressée au groupement de la fédération des accidentés de la vie dans chaque département de France où est implantée la Fnath ; que dans sa lettre du 8 octobre 2015, elle précisait la fonction de comptable de M. H... en demandant par retour une information sur les postes disponibles susceptibles d'être proposés dans chaque fédération ; que certaines associations ont répondu par la négative et que les autres n'ont pas répondu ; que la loi n'impose aucune obligation s'agissant de la fixation d'un délai limite de réponse et que l'écrit n'est pas requis dans la proposition de reclassement ; qu'elle n'a pas agi avec précipitation au regard du délai d'un mois à la suite de l'avis d'inaptitude à l'issue duquel elle aurait dû reprendre le paiement du salaire à défaut de licenciement ; qu'elle justifie de ses diligences pour tenter le reclassement de M. H... et la loyauté de ses recherches en sorte qu'il y a lieu à réformation de la décision du conseil de prud'hommes et au rejet des demandes de M. H.... M. H... explique que dès le 23 octobre 2014, il a été mis en arrêt maladie pour trouble anxio-dépressif lié à l'attitude de son supérieur hiérarchique, ce dernier lui ayant brutalement adressé une mise à pied sans commune mesure avec l'erreur commise ;
Cour d'appel de Poitiers, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-20.758 du 06/11/2019, partie 1
que plusieurs arrêts de travail s'en sont suivis, le médecin du travail le déclarant lors de la visite médicale du 1er octobre 2015 « inapte à tout poste dans l'association, apte aux mêmes fonctions dans une autre association ou entreprise » en une seule visite et pour danger immédiat, conformément à l'article R 4624-3 du code du travail; que l'article L 1226-2 du code du travail dispose que, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, la proposition prenant en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise, l'emploi proposé étant aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagements du temps de travail ; que la recherche doit s'effectuer au sein du groupe auquel appartient l'employeur sans préjuger la réponse du salarié, les recherches devant être effectives et sérieuses, l'employeur devant démontrer l'impossibilité de reclassement ; que le courrier du 8 octobre 2015 par lequel l'association Fnath interroge les structures du groupe sur une possibilité de reclassement est vague, ne faisant que mentionner le poste qu'il occupait jusque-là et sans imposer de date limite de réponse; que les cinq structures qui ont répondu se sont contentées d'indiquer qu'elles n'avaient pas de postes disponibles correspondant à son profil, sans expliciter quoi que ce soit, en sorte qu'il n'existe aucune preuve du caractère réel et sérieux de la recherche de reclassement. Aux termes de l'article L 1226-2 du code du travail, lorsqu'à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail, consécutives à une maladie ou à un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin des tâches existantes au sein de l'entreprise ; que l'emploi proposé est du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail. Il est versé aux débats la fiche établie par le médecin du travail à la suite de son examen du 1er octobre 2015, dans laquelle il conclut à l'inaptitude en un seul examen pour danger immédiat de M. H... à tout poste dans l'association mais apte aux mêmes fonctions dans une autre association ou entreprise. L'association Fnath fait valoir qu'elle a questionné le 8 octobre 2015 l'ensemble de sa fédération c'est-à-dire tant ses groupements départementaux que son siège national afin de rechercher toutes solutions de reclassement et vacances de postes mais que ses recherches sont restées vaines en raison de l'absence de poste disponible à ce jour et de création prochaine de poste. L'association Fnath produit les courriers adressés aux associations membres du réseau qui font état de la recherche d'un comptable au sein du service Conseil et défense mais sans fixer de date limite de réponse, précision donnée que le délai de reclassement du salarié déclaré inapte est d'un mois à compter de la déclaration d'inaptitude du 1er octobre 2015 et qu'il n'est pas appelé l'attention des destinataires sur la nécessité d'une réponse. Les courriers ont été adressés par message Internet mais s'ils ont bien été reçus par les destinataires, sur 63 envois, seules 5 entités ont répondu négativement entre le 9 et le 14 octobre 2015, soit un très faible pourcentage de réponses.Dans ces conditions, c'est à bon droit que le conseil de prud'hommes a estimé que l'association Fnath avait failli à son devoir de reclassement en licenciant pour inaptitude M. H... sans attendre les réponses des autres entités destinataires du message et sans prendre de mesures propres à obtenir les réponses ou au moins la majorité d'entre elles dans un délai raisonnable. Ce faisant, l'association Fnath n'a pas satisfait à son obligation de reclassement de manière loyale et sérieuse, ce qui fonde la décision de considérer le licenciement de M. H... dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le licenciement prononcé pour inaptitude physique étant dépourvu de cause réelle et sérieuse, il ouvre droit à dommages et intérêts. Le montant des dommages et intérêts doit tenir compte de l'âge de M. H... et de son ancienneté dans l'entreprise de trente ans, outre de ses difficultés actuelles à retrouver un emploi, ce qui fonde l'allocation de la somme de 40 000 euros allouée par le conseil de prud'hommes à titre de réparation. Il y a lieu en conséquence à la confirmation du jugement. ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE En droit, l'article L. 1226-2 du code du travail stipule :
Cour d'appel de Poitiers, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-20.758 du 06/11/2019, partie 2
« Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformation de poste de travail ou aménagement du temps de travail ». La recherche de reclassement doit être loyale et sérieuse. Elle doit être réalisée dans toutes les entreprises du groupe auquel appartient l'entreprise. Il a été jugé (Cass. Soc. 10/05/2012 n° 10-28304) « qu'appréciant exactement la situation à la date du licenciement, la cour d'appel ayant constaté que l'employeur avait licencié le salarié sans attendre les réponses des sociétés LMC Coupling et Vermoflex France Nord et industrie dépendant du groupe auquel il appartenait, a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche que ses énonciations rendaient inopérante, que cet employeur n'établissait pas avoir respecté son obligation de reclassement et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ». En l'espèce, l'association Fnath produit les courriers adressés aux associations membres du réseau. Ce courrier fait bien état de la recherche d'un comptable au sein du service Conseil et Défense mais ne fixe pas de date limite de réponse, étant précisé que le délai de reclassement du salarié déclaré inapte est d'un mois à compter de la déclaration d'inaptitude du 1er octobre 2015. Il n'attire pas davantage l'attention des destinataires sur la nécessité d'une réponse. Le courrier adressé, le 8 octobre 2015, par messagerie Internet a bien été reçu par les destinataires. Sur les 63 envois, seules 5 entités ont répondu négativement entre le 9 et le 14 octobre 2015 soit un très faible pourcentage de réponses En conséquence, le conseil dit que l'Association Fnath a failli à son devoir de reclassement en licenciant pour inaptitude M. H... sans attendre les réponses des autres entités destinataires du message et sans prendre de mesures permettant d'obtenir les réponses dans un délai raisonnable. Le licenciement prononcé pour inaptitude physique est donc dépourvu de cause réelle et sérieuse et ouvre droit à des dommages-intérêts. M. H..., âgé de 50 ans au jour du licenciement, totalisait plus de 30 ans de présence au sein de l'Association. Au jour de l'audience, il n'a pas retrouvé d'emploi. Compte tenu du montant de son salaire, le conseil fixe à 40 000 euros le montant des dommages-intérêts en réparation du licenciement prononcé sans cause réelle et sérieuse, ALORS QUE l'employeur qui envisage de licencier un salarié inapte est tenu, au préalable, de rechercher toutes les possibilités de reclassement au sein de l'entreprise et le cas échéant, à l'intérieur du groupe auquel celle-ci appartient, parmi les entreprises dont les activités, l'organisation ou le lieu d'exploitation leur permettent d'effectuer la permutation de tout ou partie du personnel, et de proposer ensuite au salarié quelle que soit la position prise par lui tous les emplois disponibles correspondant à ses capacités, au besoin après mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail, ou aménagement du temps de travail ; que cette obligation est une obligation de moyens, l'employeur n'étant pas en mesure de contraindre les entités juridiques distinctes appartenant au même groupe à proposer un poste de reclassement ou même de répondre à ses demandes ; qu'en jugeant que la Fnath n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement de manière loyale et sérieuse, aux motifs que dans son courrier du 8 octobre 2015 adressé à tous les membres du réseau, la Fnath ne leur avait pas fixé de date limite de réponse, ni attiré davantage leur attention sur la nécessité d'une réponse et qu'elle n'avait pas attendu les réponses des autres entités destinataires du message ni pris de mesures permettant d'obtenir les réponses dans un délai raisonnable, cependant que l'exposante ne pouvait en aucun cas contraindre les autres associations membres du réseau à lui répondre et qu'elle n'avait procédé au licenciement du salarié qu'à la fin du délai d'un mois, après avoir procédé aux démarches et recherches mises à sa charge, la cour d'appel a ajouté une obligation à la loi et partant a violé l'article L. 1226-2 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, ensemble l'article L 1235-1 du même code.
Cour d'appel de Poitiers, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-20.758 du 06/11/2019, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par M. R... X..., domicilié [...] , contre l'arrêt rendu le 20 avril 2018 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est (CARSAT), dont le siège est [...] , 2°/ au ministre des affaires sociales et de la santé, domicilié [...], défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 2 octobre 2019, où étaient présents : M. Pireyre, président, Mme Palle, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, Mmes Vieillard, Taillandier-Thomas, Coutou, conseillers, M. Gauthier, Mmes Vigneras, Dudit, conseillers référendaires, M. Gaillardot, premier avocat général, Mme Pontonnier, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Palle, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. X..., de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est, l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 20 avril 2018), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 9 mars 2017, pourvoi n° 16-10.851) et les productions, qu'après avoir exercé une activité professionnelle salariée au Royaume-Uni, en France et à Monaco, M. X..., ressortissant britannique né [...] , a obtenu de la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail du Sud-Est (la caisse), le bénéfice d'une pension de vieillesse, à effet du 1er décembre 2009, calculée sur la base d'un taux minoré de 32,50 % ; que, contestant le mode de calcul de cette pension qui ne prend pas en compte les trimestres travaillés à Monaco, il a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ; Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter son recours, alors, selon le moyen : 1°/ que la libre circulation des travailleurs, assurée à l'intérieur de l'Union, implique l'abolition non seulement de toutes discriminations ostensibles fondées sur la nationalité, mais encore de toutes formes dissimulées de discriminations, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail ; que si des différences entre les régimes de sécurité sociale des divers États membres peuvent subsister, le but de l'article 45 du TFUE, ne serait pas atteint si, par suite de l'exercice de leur droit à la libre circulation, les travailleurs migrants devaient perdre des avantages de sécurité sociale que leur assure la législation d'un État membre, une telle conséquence étant de nature dissuader le travailleur communautaire d'exercer son droit à la libre circulation, et constituerait, dès lors, une entrave à cette liberté ; qu'une législation nationale n'est conforme à l'article 45 précité que si elle ne désavantage pas le travailleur concerné par rapport à ceux qui exercent la totalité de leurs activités dans l'État membre où elle s'applique et si elle ne le conduit pas à verser des cotisations sociales à fonds perdus ; qu'en refusant à M. X... le bénéfice d'une pension de retraite à taux plein en application d'un cumul de ses périodes travaillées en France, au Royaume-Uni et dans la Principauté de Monaco quand il aurait eu droit à une telle pension s'il avait travaillé dans un seul État membre, en France, sans travailler au Royaume-Uni, la cour d'appel a violé les articles 45 et 48 du TFUE, ensemble les principes de libre circulation et d'égalité de traitement des travailleurs à l'intérieur de l'Union européenne ; 2°/ que la libre circulation des travailleurs, assurée à l'intérieur de l'Union, implique l'abolition de toutes formes dissimulées de discriminations, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail ; qu'en refusant à M. X... le bénéfice d'une pension de retraite à taux plein en application d'un cumul de ses périodes travaillées en France, au Royaume-Uni et dans la Principauté de Monaco, la cour d'appel a validé une discrimination commise à son encontre en comparaison des ressortissants d'États membres ayant conclu une convention bilatérale de sécurité sociale avec un État tiers autorisant la totalisation des périodes travaillées dans cet État et dans d'autres États membres et a ainsi violé les articles 45 et 48 du TFUE, ensemble les principes de libre circulation et d'égalité de traitement des travailleurs à l'intérieur de l'Union européenne ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-18.344 du 07/11/2019, partie 1
Mais attendu qu'il résulte de l'article 45 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tel qu'interprété par la Cour de justice de l'Union européenne (CJCE, 15 janvier 2002, aff. C -55/00, ...), que les autorités de sécurité sociale compétentes d'un premier Etat membre de l'Union européenne sont tenues de prendre en compte, aux fins de l'acquisition du droit à prestations de vieillesse, les périodes d'assurance accomplies dans un Etat tiers par un ressortissant d'un second Etat membre lorsque, en présence des mêmes conditions de cotisation, lesdites autorités compétentes reconnaissent, à la suite d'une convention internationale bilatérale conclue entre le premier Etat membre et l'Etat tiers, la prise en compte de telles périodes accomplies par leurs propres ressortissants ; Et attendu qu'ayant relevé que la convention franco-monégaque du 28 février 1952, publiée par le décret n° 54-682 du 11 juin 1954, ne comporte pas de clause prévoyant la totalisation des périodes d'assurance validées en France et dans la Principauté de Monaco avec celles validées dans un Etat tiers à cette convention, la cour d'appel en a exactement déduit qu'un ressortissant français qui aurait travaillé en France, à Monaco et dans un autre Etat membre de l'Union ne pourrait pas cumuler les périodes d'assurances acquises dans les trois Etats, de sorte qu'en application du principe d'égalité de traitement, M. X... qui ne pouvait prétendre à davantage de droits qu'un ressortissant français, pouvait revendiquer la totalisation des périodes d'assurance acquises au Royaume-Uni et en France par application des règlements de coordination communautaires, d'une part, et la totalisation des périodes d'assurance validées en France et dans la Principauté de Monaco par application de la convention franco-monégasque, d'autre part, la pension la plus élevée des deux devant lui être attribuée ; D'où il suit que nouveau, mélangé de fait et de droit, et comme tel irrecevable en sa seconde branche, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ; Et attendu que, selon la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, il n'y a pas lieu à renvoi préjudiciel quand la question soulevée est matériellement identique à une question ayant déjà fait l'objet d'une décision à titre préjudiciel dans une espèce analogue ou que le point de droit en cause a été résolu par une jurisprudence établie de cette Cour, quelle que soit la nature des procédures qui ont donné lieu à cette jurisprudence, même à défaut d'une stricte identité des questions en litige ; D'où il suit qu'il n'y a pas lieu à renvoi préjudiciel ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Dit n'y avoir lieu à renvoi préjudiciel ; Condamne M. X... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... et le condamne à payer à la caisse d'assurance retraite et de la santé au travail Sud-Est la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept novembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour M. X.... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté M. X... de sa demande tendant à la prise en compte par la CARSAT Sud-Est, au titre de périodes équivalentes, de sa durée de travail effectuée en Angleterre, cumulée aux périodes travaillées en France et à Monaco, en conséquence, 166 trimestres ; AUX MOTIFS que « la convention franco-monégasque ne comporte pas de clause prévoyant la totalisation des périodes d'assurance validées en France et dans la principauté de Monaco avec celles validées dans un État tiers à cette convention. Les règlements de coordination communautaires ne prévoient, quant à eux, que la prise en compte des périodes d'assurance acquises dans les États membres de l'Union européenne. Les champs d'application de ces conventions étant distincts, il s'ensuit qu'un ressortissant qui aurait travaillé en France, à Monaco et dans un autre État membre de l'Union européenne, ne pourrait pas cumuler les périodes d'assurances acquises dans les trois États et que seules pourraient être prise en compte soit les périodes acquises en France et à Monaco par application de la convention bilatérale, soit les périodes acquises en France et dans l'autre État membre de l'Union européenne par l'effet des règlements de coordination européens. En application du principe d'égalité de traitement, M. X... qui ne peut prétendre à davantage de droits qu'un ressortissant français, peut seulement revendiquer la totalisation des périodes d'assurance acquises au Royaume-Uni et en France par application des règlements de coordination communautaires d'une part et la totalisation des périodes d'assurances validées en France et dans la Principauté de Monaco par application de la convention franco-monégasque d'autre part, la pension la plus élevée des deux devant lui être attribuée.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-18.344 du 07/11/2019, partie 2
Pour procéder au calcul de la pension devant lui être servie, la caisse a procédé à une comparaison entre deux calculs, l'un au titre des règlements communautaires, l'autre en application de la convention franco-monégasque pour parvenir, à juste titre, à la conclusion que l'intéressé ne remplit pas la condition relative à la durée d'assurance pour bénéficier d'une pension à taux plein et déterminer un montant mensuel de pension de 393,75 euros brut, identique dans les deux cas, étant précisé qu'elle n'a pris en compte, dans le calcul au titre des règlements communautaires que le nombre de trimestres acquis au titre du régime français (99) et de celui acquis au Royaume Uni (26) mais non ceux acquis à Monaco. De même, le calcul effectué en application de la convention franco-monégasque n'a pris en compte que les durées d'assurance acquises en France et à Monaco (99 + 37 trimestres) mais non celles acquises au Royaume Uni. Il apparaît ainsi que les droits de M. X... ont été examinés conformément aux exigences des règlements européens de coordination et à celles prévues par la convention bilatérale franco-monégasque et en conformité avec le principe d'égalité de traitement. Les prétentions de M. X... ne sont donc pas fondées. Par ces motifs devant se substituer à ceux retenus par le premier juge, le jugement sera confirmé en ce qu'il l'a débouté de son recours ». 1) ALORS QUE la libre circulation des travailleurs, assurée à l'intérieur de l'Union, implique l'abolition non seulement de toutes discriminations ostensibles fondées sur la nationalité, mais encore de toutes formes dissimulées de discriminations, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail ; que si des différences entre les régimes de sécurité sociale des divers États membres peuvent subsister, le but de l'article 45 du TFUE, ne serait pas atteint si, par suite de l'exercice de leur droit à la libre circulation, les travailleurs migrants devaient perdre des avantages de sécurité sociale que leur assure la législation d'un État membre, une telle conséquence étant de nature dissuader le travailleur communautaire d'exercer son droit à la libre circulation, et constituerait, dès lors, une entrave à cette liberté ; qu'une législation nationale n'est conforme à l'article 45 précité que si elle ne désavantage pas le travailleur concerné par rapport à ceux qui exercent la totalité de leurs activités dans l'État membre où elle s'applique et si elle ne le conduit pas à verser des cotisations sociales à fonds perdus ; qu'en refusant à M. X... le bénéfice d'une pension de retraite à taux plein en application d'un cumul de ses périodes travaillées en France, au Royaume-Uni et dans la Principauté de Monaco quand il aurait eu droit à une telle pension s'il avait travaillé dans un seul État membre, en France, sans travailler au Royaume-Uni, la cour d'appel a violé les articles 45 et 48 du TFUE, ensemble les principes de libre circulation et d'égalité de traitement des travailleurs à l'intérieur de l'Union européenne ; 2) ALORS, en tout état de cause, QUE la libre circulation des travailleurs, assurée à l'intérieur de l'Union, implique l'abolition de toutes formes dissimulées de discriminations, entre les travailleurs des États membres, en ce qui concerne l'emploi, la rémunération et les autres conditions de travail ; qu'en refusant à M. X... le bénéfice d'une pension de retraite à taux plein en application d'un cumul de ses périodes travaillées en France, au Royaume-Uni et dans la Principauté de Monaco, la cour d'appel a validé une discrimination commise à son encontre en comparaison des ressortissants d'États membres ayant conclu une convention bilatérale de sécurité sociale avec un État tiers autorisant la totalisation des périodes travaillées dans cet État et dans d'autres États membres et a ainsi violé les articles 45 et 48 du TFUE, ensemble les principes de libre circulation et d'égalité de traitement des travailleurs à l'intérieur de l'Union européenne.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-18.344 du 07/11/2019, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu la décision suivante : Statuant sur le pourvoi formé par : - M. I... L..., contre le jugement du tribunal de police de BORDEAUX, en date du 8 janvier 2019, qui, pour contravention au code de la route, l'a condamné à 150 euros d'amende ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 septembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Parlos, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : Mme Lavaud ; Sur le rapport de M. le conseiller PARLOS et les conclusions de M. l'avocat général CROIZIER ; Vu le mémoire personnel produit ; Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ; Attendu qu'après avoir examiné tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure, la Cour de cassation constate qu'il n'existe, en l'espèce, aucun moyen de nature à permettre l'admission du pourvoi ; DÉCLARE le pourvoi NON ADMIS ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-neuf octobre deux mille dix-neuf ; En foi de quoi la présente décision a été signée par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
décision 19-83.159 du 29/10/2019, partie 1
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par Mme K... M..., domiciliée [...] , contre l'arrêt rendu le 29 juin 2018 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant : 1°/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles, domicilié en son parquet général [...] , [...], 2°/ à la chambre régionale de discipline du conseil régional des notaires de la cour d'appel de Versailles, dont le siège est [...], défendeurs à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 24 septembre 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Kamara, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de Mme M..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme M..., titulaire d'un office notarial à [...] depuis 2009, a fait l'objet d'une inspection qui a conduit à l'établissement de deux rapports, en date des 12 février 2015 et 2 décembre 2015, concluant à diverses anomalies comptables ; que, par acte du 12 septembre 2016, le procureur de la République près le tribunal de grande instance de Pontoise a assigné Mme M... afin de voir interdire à celle-ci l'exercice temporaire de sa profession et désigner un administrateur pour gérer son office ; Sur le premier moyen, pris en ses trois premières branches : Vu les articles 16, 31 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels, ensemble les articles 4 et 5-1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relatif au statut du notariat, et 10 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels ; Attendu qu'il résulte de ces textes que, lors des débats devant la cour d'appel statuant en matière disciplinaire, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l'intermédiaire d'un membre de la chambre ; que la chambre de discipline des notaires n'a pas la qualité de partie à l'instance et que le président de la chambre de discipline ne peut présenter ses observations par l'intermédiaire d'un avocat développant en son nom oralement les conclusions qu'il a déposées ; Attendu que l'arrêt mentionne que la chambre régionale de discipline du conseil régional des notaires de la cour d'appel de Versailles, représentée par son président en exercice, est partie intervenante, et vise les conclusions développées oralement à l'audience par l'avocat de la chambre régionale de discipline ; En quoi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; Sur les trois dernières branches de ce moyen : Vu l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile ; Attendu qu'après avoir visé les observations orales du ministère public sollicitant la confirmation du jugement déféré, puis énoncé que celui-ci s'en réfère aux termes de l'assignation, l'arrêt prononce une sanction disciplinaire ; Qu'en statuant ainsi, sans constater que Mme M... avait eu connaissance de la position du ministère public avant l'audience, ou qu'ayant pris connaissance de cette position à l'audience, elle, ou son avocat, avait eu la parole en dernier, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; Et sur le second moyen : Vu l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 16 du code de procédure civile ; Attendu que l'arrêt retient que Mme M... a commis des manquements aux règles professionnelles, notamment sur le plan comptable, alors qu'elle aurait dû être alertée par les observations formulées lors de l'inspection annuelle de 2014 ; Qu'en statuant ainsi, sans préciser de quelle manière cette pièce avait été portée à sa connaissance, alors qu'elle n'avait été communiquée ni par Mme M... ni par la chambre régionale de discipline des notaires, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 juin 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ;
Cour d'appel de Versailles 1A, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-22.032 du 24/10/2019, partie 1
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ; Laisse les dépens à la charge du Trésor public ; Vu l'article 700 du code de procédure civile rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre octobre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme M... PREMIER MOYEN DE CASSATION LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR reçu la chambre régionale de discipline du Conseil national des notaires de la cour d'appel de Versailles en son intervention volontaire, prononcé à l'encontre de l'exposante une interdiction temporaire d'exercer les fonctions de notaire pour une durée de huit ans, dans les conditions prévues aux articles 20 et suivants de l'ordonnance du 28 juin 1945, et confirmé le jugement en ses autres dispositions, sauf à préciser que la désignation de la SCP D...-F...-Z... comme administrateur de l'office de Mme M... sis à [...], avec les pouvoirs prévus à l'article 20 et suivants de l'ordonnance du 28 juin 1945 prendra fin à la date du remplacement effectif de Mme M... par son successeur ; AUX MOTIFS QUE le ministère public s'en réfère aux termes de l'assignation en insistant sur le résultat des investigations menées lors des inspections et notamment sur l'absence de couverture de fonds clients, la constatation de la passation d'un acte de vente sans les fonds en la possession de Mme M..., sur l'absence d'enregistrement de certains mouvements d'encaissement, sur la passation d'écritures incompréhensibles et sur l'existence de soldes injustifiés ; qu'il fait valoir l'impossibilité de limiter l'interdiction temporaire à l'exercice de la profession sous le statut "libéral", ce qui reviendrait à autoriser cependant l'exercice de la profession sous une autre forme, alors que les obligations de respect des règles professionnelles et déontologiques sont les mêmes ; que la Chambre régionale de discipline du Conseil régional des notaires fait les mêmes observations que le ministère public et demande la confirmation de la décision entreprise ; que l'intervention volontaire de la Chambre régionale de discipline, qui se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, doit être déclarée recevable, par application des articles 325 et suivants du code de procédure civile ; que l'article 2 de l'ordonnance n°45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires prévoit que toute contravention aux lois et règlements, toute infraction aux règles professionnelles, tout fait contraire à la probité, à l'honneur ou à la délicatesse commis par un officier public ou ministériel, même se rapportant à des faits extraprofessionnels, donne lieu à sanction disciplinaire ; ALORS D'UNE PART QUE, lors des débats devant la cour d'appel statuant en matière disciplinaire, le président de la chambre de discipline présente ses observations, le cas échéant par l'intermédiaire d'un membre de la chambre ; qu'il ne ressort d'aucune des mentions de l'arrêt que le Président de la chambre de discipline ait présenté ses observations, le cas échéant, par l'intermédiaire d'un membre de la chambre; que l'arrêt a donc été rendu en violation des articles 16, 31 et 37 du décret n°73-1202 du 28 décembre 1973, relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels, ensemble les articles 4 et 5-1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relatif au statut du notariat, 10 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels; ALORS D'AUTRE PART QUE, en matière de discipline notariale, il résulte des dispositions combinées des articles 4 et 5-1 de l'ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relatif au statut du notariat, 10 de l'ordonnance n° 45-1418 du 28 juin 1945 relative à la discipline des notaires et de certains officiers ministériels et 16, 31 et 37 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973, modifié, relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels, que seul le président de la chambre régionale de discipline est habilité à présenter des observations devant les juridictions judiciaires statuant disciplinairement à l'exclusion de la chambre régionale de discipline ; qu'ayant relevé que la chambre régionale de discipline du conseil régional des notaires fait les mêmes observations que le ministère public et demande la confirmation de la décision entreprise puis décidé que l'intervention volontaire de la chambre régionale de discipline, qui se rattache aux prétentions des parties par un lien suffisant, doit être déclarée recevable, par application des articles 325 et suivants du code de procédure civile quand seul le président est recevable à présenter des observations en matière disciplinaire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
Cour d'appel de Versailles 1A, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-22.032 du 24/10/2019, partie 2
ALORS DE TROISIEME PART QUE la présentation par le président de la chambre de discipline des notaires de ses observations à l'audience d'appel, conformément à l'article 16 du décret n° 73-1202 du 28 décembre 1973 relatif à la discipline et au statut des officiers publics ou ministériels, ne lui confère pas la qualité de partie au procès ; qu'il en va nécessairement de même pour la chambre régionale de discipline ; qu'en qualifiant la chambre régionale de discipline, de partie intervenante, puis de partie à l'instance d'appel (page 1 et 5 notamment), la cour d'appel a violé les articles 16, alinéa 2, précité et 37 du décret du 28 décembre 1973 ; ALORS DE QUATRIÈME PART QUE, après avoir visé les observations orales du ministère public qui sollicite la confirmation du jugement déféré, puis relevé que le ministère public s'en réfère aux termes de l'assignation en insistant sur le résultat des investigations menées lors des inspections et notamment sur l'absence de couverture de fonds clients, la constatation de la passation d'un acte de vente sans les fonds en la possession de Mme M..., sur l'absence d'enregistrement de certains mouvements d'encaissement, sur la passation d'écritures incompréhensibles et sur l'existence de soldes injustifiés, qu'il fait valoir l'impossibilité de limiter l'interdiction temporaire à l'exercice de la profession sous le statut "libéral", ce qui reviendrait à autoriser cependant l'exercice de la profession sous une autre forme, alors que les obligations de respect des règles professionnelles et déontologiques sont les mêmes sans constater que l'exposante avait reçu communication avant l'audience de la position adoptée par le ministère public et notamment sur le moyen par lequel elle demandait à être autorisée à exercer en qualité de notaire salariée et subsidiairement que soit réduite à de plus justes proportion l'interdiction temporaire d'exercer, lui assurant ainsi de pouvoir y répondre utilement, la cour d'appel a violé l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ALORS DE CINQUIEME PART QUE, après avoir visé les observations orales du ministère public qui sollicite la confirmation du jugement déféré, puis relevé que le ministère public s'en réfère aux termes de l'assignation en insistant sur le résultat des investigations menées lors des inspections et notamment sur l'absence de couverture de fonds clients, la constatation de la passation d'un acte de vente sans les fonds en la possession de Mme M..., sur l'absence d'enregistrement de certains mouvements d'encaissement, sur la passation d'écritures incompréhensibles et sur l'existence de soldes injustifiés, qu'il fait valoir l'impossibilité de limiter l'interdiction temporaire à l'exercice de la profession sous le statut "libéral", ce qui reviendrait à autoriser cependant l'exercice de la profession sous une autre forme, alors que les obligations de respect des règles professionnelles et déontologiques sont les mêmes sans préciser si le ministère public avait déposé des conclusions écrites préalablement à l'audience et, si tel avait été le cas, sans constater que l'exposante en avait eu communication afin de pouvoir y répondre utilement, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, privant ainsi sa décision de base légale au regard de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile ; ALORS ENFIN QUE l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier ; que l'arrêt mentionne qu'à l'audience, chacune des parties a développé ses moyens et demandes ; qu'en statuant ainsi, sans constater que l'exposante qui a pris connaissance des observations du ministère public à l'audience, ou son avocat avait eu la parole en dernier, la cour d'appel a violé l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ensemble les articles 15 et 16 du code de procédure civile ; SECOND MOYEN DE CASSATION LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT ATTAQUÉ D'AVOIR reçu la chambre régionale de discipline du Conseil national des notaires de la cour d'appel de Versailles en son intervention volontaire, prononcé à l'encontre de l'exposante une interdiction temporaire d'exercer, les fonctions de notaire pour une durée de huit ans, dans les conditions prévues aux articles 20 et suivants de l'ordonnance du 28 juin 1945, et confirmé le jugement en ses autres dispositions, sauf à préciser que la désignation de la SCP D...-F...-Z... comme administrateur de l'office de Mme M... sis à [...], avec les pouvoirs prévus à l'article 20 et suivants de l'ordonnance du 28 juin 1945 prendra fin à la date du remplacement effectif de Mme M... par son successeur ; AUX MOTIFS QUE les rapports de l'inspection occasionnelle du 12 février 2015 et de celle pratiquée entre le 25 septembre et le 2 décembre 2015 ont donné lieu aux conclusions suivantes : - la comptabilité de l'étude présentant des anomalies sérieuses comme - l'utilisation à des fins personnelles de fonds appartenant à des clients de l'étude.
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Il a notamment été constaté qu'une somme de 32 959 euros avait été décaissée le 2 août 2013 à partir du compte CDC clients et saisie en comptabilité le1er octobre 2014 au débit du compte 108 "compte de l'exploitant" actant du caractère personnel de cette dépense ; cette somme est restée 14 mois en attente de rapprochement, - des rapprochements bancaires non établis en temps et en heure ne permettant pas de connaître la réalité comptable de l'office et notamment la couverture clients, - l'absence de couverture des fonds-clients pendant 89 jours sur 214, - le constat de 65 mouvements de décaissement non comptabilisés, de 27 écritures de virements en attente de rapprochements, de 13 mouvements de décaissement non comptabilisés pour 80 348,03 euros, - une confusion entre la comptabilité des comptes clients et celle de l'étude, - des écritures de comptes clients créditeurs en faveur d'autres comptes clients débiteurs, n'ayant aucun lien entre eux ; que Mme M... ne conteste pas réellement les nombreuses anomalies, incohérences et irrégularités comptables ainsi constatées, se limitant à tenter de les justifier en expliquant qu'elle ne dispose pas de compétences personnelles en la matière et qu'elle pensait avoir embauché des personnes qualifiées pour tenir la comptabilité de l'étude ; que les nombreux manquements aux règles comptables sont établis ; qu'ils constituent des manquements caractérisés aux règles professionnelles ; que le notaire manipule des fonds clients et se doit de tenir une comptabilité d'une extrême rigueur conforme aux règles et exempte d'irrégularités, incohérences ou erreurs et constituant le reflet exact des opérations financières passées en l'étude ; que quels que soient les moyens mis en oeuvre, Mme M... n'a pas atteint cet objectif alors qu'elle aurait dû être alertée par les observations formulées lors de l'inspection annuelle réalisée en 2014 qui révélait déjà une absence de couverture des fonds clients pendant 7 jours ouvrés en novembre 2013, des découverts des fonds réels, un acte de vente du 6 mai 2014 signé sans les fonds et l'utilisation du compte 542100 CDC Clients pour une dépense personnelle ; que c'est ainsi à juste titre que le tribunal a dit ces manquements caractérisés au regard des dispositions de l'article 2 précité de l'ordonnance du 28 juin 1945 ; que Mme M... ne peut être exonérée au prétexte de son incompétence ou de celle de ses salariés ; que le manquement à la déontologie reproché à Mme M... en sa qualité de gérante d'un débit de boissons ne sera pas retenu dès lors que celle-ci établit que sa prestation de serment en date du 17 février 2009 est postérieure aux fonctions mises en cause, qui ont pris fin lors de la liquidation judiciaire de la société Le Chat noir prononcée par jugement du tribunal de commerce de Beauvais le 4 avril 2006 ; que les manquements disciplinaires étant établis, il convient de prononcer une juste sanction telle que prévue à l'article 3 de l'ordonnance de 1945, qui sera proportionnée à la gravité et à la répétition des manquements constatés ; que c'est à juste titre que le ministère public et la Chambre régionale de discipline des notaires s'opposent à la limitation de l'interdiction temporaire qui doit être prononcée, à l'exercice libéral de la fonction de notaire ; que comme ces parties le font observer, l'exercice de la profession de notaire impose le respect des règles professionnelles et déontologiques quel que soit le statut sous lequel elle est exercée ; qu'au regard de la gravité des faits et de leur répétition et compte tenu de la situation personnelle de Mme M... qu'il convient de prononcer une peine d'interdiction temporaire d'exercer la profession de notaire pour une période de 8 ans ; que par arrêté du Garde des sceaux du 23 août 2017, Mme N... E... a été nommée notaire à la résidence de [...] en remplacement de Mme M... ; que dans ces conditions, il n'y a pas lieu de commettre un administrateur remplaçant Mme M... au-delà du 23 août 2017 ; que toutefois il convient de confirmer la désignation de la SCP D...-F...-Z... comme administrateur de l'office de Mme M..., avec les pouvoirs prévus à l'article 20 et suivants de l'ordonnance du 28 juin 1945, jusqu'à la date du remplacement effectif de Mme M... ; ALORS D'UNE PART QUE, en opposant à l'exposante, que quels que soient les moyens mis en oeuvre, Mme M... n'a pas atteint cet objectif alors qu'elle aurait dû être alertée par les observations formulées lors de l'inspection annuelle réalisée en 2014 qui révélait déjà une absence de couverture des fonds clients pendant 7 jours ouvrés en novembre 2013, des découverts des fonds réels, un acte de vente du 6 mai 2014 signé sans les fonds et l'utilisation du compte 542100 CDC Clients pour une dépense personnelle, sans préciser comment cette pièce a été portée à sa connaissance, l'exposante ni la chambre régionale de discipline du conseil régional des notaires de Versailles ne l'ayant produites, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du code de procédure civile ;
Cour d'appel de Versailles 1A, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-22.032 du 24/10/2019, partie 4
ALORS D'AUTRE PART QUE en opposant à l'exposante, que quels que soient les moyens mis en oeuvre, Mme M... n'a pas atteint cet objectif alors qu'elle aurait dû être alertée par les observations formulées lors de l'inspection annuelle réalisée en 2014 qui révélait déjà une absence de couverture des fonds clients pendant 7 jours ouvrés en novembre 2013, des découverts des fonds réels, un acte de vente du 6 mai 2014 signé sans les fonds et l'utilisation du compte 542100 CDC Clients pour une dépense personnelle, sans préciser comment cette pièce a été portée à sa connaissance, l'exposante ni la chambre régionale de discipline du conseil régional des notaires de Versailles ne l'ayant produites, la cour d'appel a violé les articles 16 du code de procédure civile et 6 §1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : I - Statuant sur le pourvoi n° B 18-13.367 formé par la société Ile-de-France poids lourds, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , contre un arrêt rendu le 9 janvier 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 3), dans le litige l'opposant à M. B... R..., domicilié [...] , défendeur à la cassation ; II - Statuant sur le pourvoi n° H 18-13.464 formé par M. B... R..., contre le même arrêt rendu entre les mêmes parties, La demanderesse au pourvoi n° B 18-13.367 invoque, à l'appui de son recours, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Le demandeur au pourvoi n° H 18-13.464 invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 18 septembre 2019, où étaient présents : M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller rapporteur, Mme Monge, conseiller, Mme Jouanneau, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Aubert-Monpeyssen, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société Ile-de-France poids lourds, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. R..., et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu la connexité, joint les pourvois n° H 18-13.464 et n° B 18-13.367 ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. R... a été engagé le 13 octobre 2004, par la société PAC, en qualité de magasinier niveau II ; que son contrat de travail a été transféré en dernier lieu, à la société Ile-de-France poids lourds ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale afin d'obtenir des rappels de salaire, outre des rappels de primes et le paiement d'heures supplémentaires ; Sur le quatrième moyen du pourvoi de l'employeur, ci-après annexé : Attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, a constaté que le salarié n'avait pas donné son accord exprès à la modification de sa rémunération par la suppression des primes ; que le moyen, qui manque en fait, n'est pas fondé ; Sur les premier, deuxième et cinquième moyens du pourvoi de l'employeur et sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi du salarié : Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Mais sur le premier moyen du pourvoi du salarié : Vu l'article 455 du code de procédure civile ; Attendu que pour limiter le montant de la condamnation au titre du rappel sur primes contractuelles, la cour d'appel retient que le salarié apparaît fondé à solliciter un rappel de prime à hauteur de 16 200 euros et les congés payés afférents ; Qu'en statuant ainsi, sans donner aucun motif à sa décision, alors que le salarié réclamait une somme de 38 880 euros, la cour d'appel a méconnu les exigences du texte susvisé ; Et sur le troisième moyen du pourvoi de l'employeur : Vu l'article L. 3121-1 du code du travail ; Attendu que pour condamner l'employeur à payer au salarié des sommes à titre de rappel d'heures supplémentaires, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que le salarié apporte des éléments laissant présumer que les pauses constituent en réalité du temps de travail effectif, que pour sa part, l'employeur n'apporte aucun élément justifiant l'institution de pauses obligatoires ni justifiant les horaires effectivement réalisés par le salarié, qu'il en résulte que les prétendus temps de pause doivent être considérés comme du temps de travail effectif ; Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Ile-de-France poids lourds à payer à M. R... les sommes de 16 200 euros à titre de rappel de prime contractuelle correspondant à la période du 1er janvier 2009 à décembre 2013 et de 1 620 euros au titre des congés payés afférents, et en ce qu'il confirme le jugement en ce qu'il condamne la société Ile-de-France poids lourds à payer à M. R... les sommes de 14 391,15 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires de 2009 à 2013 et de 1 439,11 euros au titre des congés payés afférents, l'arrêt rendu le 9 janvier 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Cour d'appel de Paris K3, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-13.367 du 16/10/2019, partie 1
remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize octobre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits au pourvoi n° B 18-13.367 par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Ile-de-France poids lourds. PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds à payer à M. R... les sommes de 22 987,80 euros à titre de rappel de salaire entre février 2009 et mars 2014 en application du principe de l'égalité salariale, 2 029,89 euros au titre des congés payés afférents, 11 823,30 euros à titre de rappel de salaire pour la période d'avril 2014 à novembre 2017, 1 182,33 euros au titre des congés payés y afférents, 268,89 euros à titre de congés payés afférents à la condamnation prononcée en première instance au titre des rappels de salaire jusqu'en mars 2014, 1 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi suite à la violation du principe d'égalité de traitement, et 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, AUX MOTIFS PROPRES QU'en application du principe "à travail égal, salaire égal", énoncé par les articles L. 2261-22-II-4, L. 2771-1-8 et L. 3221-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'assurer l'égalité de rémunération entre tous les salariés pour autant que ceux-ci sont placés dans une situation identique ; qu'il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, et il incombe à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence ; que statuant sur l'appel interjeté par l'employeur du jugement qui l'a condamné au titre du principe à "à travail égal, salaire égal" , la société reprend devant la Cour ses prétentions et ses moyens de première instance ; que les arguments du salarié sont également identiques à ceux développés devant le conseil ; que s'agissant des dispositions relatives à l'application du principe "à travail égal, salaire égal" le jugement déféré repose sur des motifs exacts et pertinents que la Cour adopte ; qu'en l'absence de moyens nouveaux et de nouvelles preuves déterminantes sur ce point du litige, le jugement sera confirmé ; que par voie de conséquence, la condamnation de la société au titre des rappels de salaire sur la période de février 2009 à mars 2014 et les congés payés y afférents sera également confirmée ; que s'agissant des congés payés y afférents, il convient d'en majorer le montant en allouant au salarié la somme de 268,89 € manquante ; que M. R... sollicite la réactualisation d'avril 2014 à juin 2017 de ce rappel de salaire en fonction des augmentations nées de l'application des accords NAO 2017 et du différentiel de l'évolution salariale entre la rémunération de Monsieur I... et la sienne ; que les calculs produits ne sont pas contestés et résultent des augmentations des accords NAO produits ; que M. R... sollicite des dommages-intérêts en réparation du préjudice né de l'inégalité de traitement ; qu'il prétend avoir eu un manque-à-gagner de 83 200 depuis 2009 ; que toutefois, à défaut de justificatifs complémentaires, il y a lieu de constater que les condamnations prononcées en première instance ainsi que les intérêts de droit qui y sont attachés permettent de considérer que le préjudice a été réparé ; qu'il ne sera fait droit à réparation que du seul préjudice moral à hauteur de 1000 euros ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en application du principe « à travail égal, salaire égal », l'employeur doit verser la même rémunération à des salariés qui sont placés dans une situation identique ; que toutefois, une différence de rémunération peut être justifiée par des éléments objectifs et matériellement vérifiables ; qu'en l'espèce, il est constant que: - M. R... occupait, en février 2009, le poste de vendeur comptoir niveau III Echelon 2 moyennant un salaire brut de 1 548 euros, - M. I... a été embauché par la société PAC S.A, en janvier 2009, pour exercer la fonction de magasinier vendeur, niveau III Echelon 1 moyennant un salaire brut de 2.310 euros ; Qu'ainsi, M. R... et M. I... exercent les mêmes fonctions à savoir vendeur comptoir avec une rémunération respective différente ;
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que l'employeur justifie cette inégalité de traitement par le fait que contrairement à M. R..., M. I... dispose, depuis son embauche, d'un diplôme en rapport avec les fonctions qu'il exerce et jouit d'une expérience de près de 14 ans au sein de la société France Tambour, leader depuis 35 ans de la distribution de pièces détachées poids lourds ; qu'or, il est en effet établi que M. I... est titulaire d'un CAP de Mécanicien réparateur d'automobiles obtenu le 1er juillet 1974 ; que par ailleurs, il a travaillé au sein de la société France Tambour en qualité d'assistant commercial, puis de responsable technique et avait notamment pour mission d'assurer la hot line technique, de rechercher de nouveaux produits, d'assurer les formations techniques internes et d'assurer la logistique magasin ; que de plus, M. I... était, au sein de son précédent employeur, auditeur interne (Norme ISO 9001 version 2000) ; que pour sa part, M. R... fournit trois attestations : - l'une de M. G... I... lui-même, qui atteste qu'il n'avait jamais assumé un poste de vendeur, que son expérience portait sur les pièces de freinage uniquement et qu'il n'était pas affecté dans le service spécialisé dans le traitement des commandes de freinage au sein d'Autodistribution PAC 91 ; qu'il ajoute que le poste de vendeur est nouveau dans la mesure où il exige de nouvelles connaissances techniques et demande une réactivité importante ; qu'il confirme avoir été formé par M. R... et M. O... ; - les autres de M. W... H... et de M. T... L..., responsable de site, qui confirme le fait que M. R... et M. O... ont formé M. I... à la vente au comptoir, à la recherche et à l'identification des pièces Poids Lourds, travail qu'il ne maîtrisait pas auparavant ; Qu'ainsi, si M. I... avait une expérience dans le domaine spécifique des pièces de freinage, il ne possédait pas les connaissances techniques nécessaires à l'exercice des fonctions de vendeur et dans un domaine autre que celui des pièces de freinage puisqu'il n'a pas été affecté à ce service spécialisé ; que l''employeur ne justifie donc pas d'une expérience valorisable dans le poste où M. I... a été affecté, ainsi que ce dernier en atteste ; que par ailleurs, M. R... justifie d'un diplôme de DUT de Gestion des Entreprises et des Administrations option Finances Comptabilité obtenu en novembre 2003 qui représente un niveau BAC + 2, supérieur au CAP de M. I..., et qui lui permet de maîtriser les outils de gestion comptable, ce qui constitue un atout dans ses fonctions commerciales ; qu'enfin, l'employeur ne démontre pas en quoi le marché de l'emploi était favorable à M. I... au moment de son embauche, le salaire perçu par le salarié auprès de son précédent employeur ne suffisant pas ; que du tout, il résulte que la différence de rémunération entre M. O... et M. I... ne peut être justifiée par des éléments objectifs ; qu'en conséquence, il convient de condamner la société Ile-de-France poids lourds SAS à payer à M. B... R... la somme de 22 987,80 euros correspondant à l'écart de salaire entre M. R... et M. I... entre février 2009 et mars 2014, outre 2 029,89 euros au titre des congés payés afférents ; 1. ALORS QU'il est interdit aux juges du fond de dénaturer les conclusions des parties ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir, preuves à l'appui, qu'au moment de l'embauche de M. I... en janvier 2009, M. R... ne justifiait d'aucune expérience dans la vente poids lourds, qu'il occupait alors un poste de magasinier et qu'il n'était devenu vendeur comptoir qu'en mars 2009 (conclusions d'appel, p. 8 ; prod. 5 à 7) ; qu'en retenant à l'appui de sa décision qu'il était constant que M. R... occupait, en février 2009, le poste de vendeur comptoir, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'employeur en violation du principe susvisé et de l'article 4 du code de procédure civile ; 2. ALORS QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, l'employeur invoquait et produisait plusieurs attestations nouvelles en cause d'appel destinées à justifier la différence de rémunération entre M. R... et M. I..., l'une d'entre elles émanant du responsable de site M. V... et soulignant que M. I... disposait déjà de solides compétences pour exercer le métier de vendeur et n'avait eu que très peu à apprendre après son embauche sur la vente, sur les pièces vendues et sur la technique, la prétendue « formation » de M. I... par M. R... se résumant à la prise en main de l'outil informatique de l'entreprise, venant ainsi confirmer l'attestation de M. N... déjà produite en première instance (conclusions d'appel, p. 8 à 10 ; prod. 9 à 12) ; qu'en s'abstenant d'examiner et d'analyser ces attestations et notamment celles produites pour la première fois en cause d'appel, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Cour d'appel de Paris K3, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-13.367 du 16/10/2019, partie 3
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds à payer à M. R... les sommes de 8 000 euros à titre de rappel de prime exceptionnelle, 800 euros à titre des congés payés y afférents et 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds aux dépens de première instance et d'appel, AUX MOTIFS QUE la charge de la preuve du paiement du salaire incombe à l'employeur qui se prétend libéré ; qu'en matière de prime et gratification, il appartient à celui qui se prévaut d'un usage d'apporter la preuve que la prime ou gratification relève de cet usage répondant à des caractères de généralité constance et de fixité ; que les bonus et primes sur objectif et commission en pourcentage sur un chiffre d'affaires constituent une rémunération variable ; que même s'il appartient au salarié qui revendique la prime de justifier qu'il a droit à son attribution, en fonction de conventions ou d'usages, l'employeur est tenu à une obligation de transparence qui le contraint à communiquer au salarié les éléments servant de base de calcul de son salaire notamment de cette part variable ; Sur la prime exceptionnelle : la société ADBP a racheté trois autres sociétés Ad Map, AD Morize et Ad Aumerle qui ont acquis un statut d'établissement ; que M. R... justifie avoir été salarié de la SAS Ad Aumerle à compter de juillet 2005 et par conséquent, il devait donc continuer à bénéficier des droits acquis lors de ce transfert ; que le procès-verbal de négociation annuelle obligatoire du 14 avril 2008 fait état des propositions de l'employeur ; qu'il indique « En ce qui concerne les employés, agents de maîtrise et cadres l'employeur entend appliquer unilatéralement les mesures suivantes : ... 2. A compter du 1er juillet 2008 considérer comme acquis la prime exceptionnelle versée en décembre de chaque année de façon aléatoire en intégrant mensuellement la moyenne des deux dernières années de la prime exceptionnelle versée » ; que l'employeur soutient que la prime exceptionnelle n'était pas attribuée à tous les salariés et qu'elle a un caractère individuel et non collectif ; que ce PV signé de la direction prouve à l'inverse que la société a reconnu que le bénéfice de cette prime s'appliquait aux employés, agents de maîtrise et cadres et avait en conséquence un caractère général ; que les bulletins de salaire, contrat et avenant de trois salariés de la société Ad Aumerle M. C..., Mme E... et M. L..., démontrent qu'il existait au sein de la société un engagement unilatéral de l'employeur au versement de cette prime à l'égard de salariés dont le statut, les fonctions et les salaires diffèrent ; que dès lors, cet avantage collectif a nécessairement été transféré de la société Ad Aumerle à la société ADBP puis à l'employeur actuel de M. R... ; que ce dernier apparaît donc fondé à solliciter un rappel à hauteur de 8 000 euros et les congés payés y afférents ; 1. ALORS QU'il est interdit aux juges de dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'en l'espèce, le procès-verbal de négociation annuelle obligatoire du 14 avril 2008, en mentionnant « En ce qui concerne les employés, agents de maîtrise et cadres l'employeur entend appliquer unilatéralement les mesures suivantes : ... 2. A compter du 1er juillet 2008 considérer comme acquis la prime exceptionnelle versée en décembre de chaque année de façon aléatoire en intégrant mensuellement la moyenne des deux dernières années de la prime exceptionnelle versée », se bornait à prévoir une intégration de la prime exceptionnelle au salaire mensuel pour les salariés auxquels elle avait été versée jusque là sans reconnaître qu'elle concernait tous les salariés ; qu'en affirmant que ce procès-verbal prouvait que la société avait reconnu que le bénéfice de cette prime s'appliquait aux employés, agents de maîtrise et cadres et avait en conséquence un caractère général, la cour d'appel a dénaturé cette pièce en violation du principe susvisé ; 2. ALORS QUE le juge, tenu d'observer et de faire respecter le principe de la contradiction, ne peut retenir à l'appui de sa décision que des documents dont les parties ont pu débattre contradictoirement ; qu'en se fondant, pour retenir l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur de verser une prime exceptionnelle, sur les bulletins de salaire de M. C..., Mme E... et M. L..., quand il ne résulte ni des conclusions des parties, ni de leurs bordereaux de communication de pièces, ni des énonciations de l'arrêt, que ces documents aient été soumis au débat contradictoire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3. ALORS en outre QU'il est interdit aux juges de dénaturer les documents soumis à leur examen ; qu'il ne résulte pas de l'avenant de M. L..., de l'avenant au contrat de travail de Mme E... et du contrat de travail de M. C... (les seuls documents concernant ces salariés figurant sur le bordereau de communication de M. R...), que ces trois salariés percevaient une prime exceptionnelle ni un engagement unilatéral de l'employeur de verser une telle prime ;
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qu'en affirmant que les « contrat et avenant » de M. C..., Mme E... et M. L... démontrent qu'il existait un engagement unilatéral de l'employeur au versement de la prime exceptionnelle à l'égard de salariés dont le statut, les fonctions et les salaires différaient, la cour d'appel les a dénaturés en violation du principe susvisé ; 4. ALORS en tout état de cause QUE l'existence d'un engagement unilatéral de l'employeur suppose le constat d'une volonté claire et non équivoque de ce dernier ; qu'en déduisant l'existence d'un engagement unilatéral de la société Ad Aumerle, transmissible aux employeurs successifs de M. R..., de verser une prime exceptionnelle à tous les salariés de la société du seul visa des « bulletins de salaire, contrat et avenant » de trois salariés de cette société dont le statut, les fonctions et les salaires différaient, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser une volonté claire et non équivoque de cet employeur de verser une prime exceptionnelle à tous les salariés de l'entreprise et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. TROISIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds à payer à M. R... les sommes de 14 391,15 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires de 2009 à 2013, 1 439,11 euros au titre des congés payés afférents, et 3 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds aux dépens de première instance et d'appel, AUX MOTIFS PROPRES QU'aux termes de l'article L 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'ainsi, si la preuve des horaires de travail effectués n'incombe ainsi spécialement à aucune des parties et si l'employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié, il appartient cependant à ce dernier de fournir préalablement au juge des éléments de nature à étayer sa demande ; que c'est par des motifs pertinents, adoptés par la Cour, que les premiers juges, après examen de l'ensemble des pièces produites par les parties, ont considéré que la demande d'heures supplémentaires formée par le salarié était suffisamment étayée et que l'employeur n'était pas à même de justifier d'un décompte régulier de la durée du travail et qu'en conséquence, il devait être fait droit à la demande d'heures supplémentaires de M. R... ; que c'est donc à juste titre que le Conseil a alloué à M. R... la somme de 14391,15 à titre d heures supplémentaires et les congés payés y afférents ; ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en application de l'article L. 3121-2 du Code du travail, les temps consacrés aux pauses sont considérés comme du temps de travail effectif lorsque les critères définis à l'article L. 3121-1 sont réunis, c'est-à-dire lorsque le salarié est à la disposition de l'employeur et se conforme à ses directives sans pouvoir vaquer librement il des occupations personnelles ; que conformément à l'article L. 3171-4 du Code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; qu'en l'espèce, il est constant que les horaires de M. R... sont les suivants: 8h à 12h, 13 h 30 à 17 h, soit 7 h 30 par jour ; que l'employeur prétend que M. R... prend deux pauses non rémunérées de 15 mns le matin et de 15 mns l'après-midi ; que cependant, M. R... verse plusieurs attestations de salariés indiquant qu'il ne prend pas ces deux pauses ; que par ailleurs, il n'est pas contesté que ces pauses ne sont pas applicables à tout le personnel de l'entreprise, en particulier à M. O... ; qu'enfin, l'employeur ne peut justifier la mise en place d'un décompte de la durée du travail conformément à l'article D. 3171-8 du Code du travail, c'est-à-dire quotidiennement par enregistrement des heures de début et de fin de chaque période de travail ou par le relevé du nombre d'heures de travail accomplies et chaque semaine par récapitulation selon tous moyens du nombre d'heures de travail accomplies par chaque salarié ; qu'ainsi, le salarié apporte des éléments laissant présumer que les pauses constituent en réalité du temps de travail effectif ;
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que pour sa part, l'employeur n'apporte aucun élément justifiant l'institution de pauses obligatoires ni justifiant les horaires effectivement réalisés par le salarié ; qu'il en résulte que les prétendus temps de pause doivent être considérés comme du temps de travail effectif ; que dès lors, il convient de condamner la société Ile-de-France poids lourds SAS à payer à M. B... R... la somme de 14 391,15 euros à titre de rappel d'heures supplémentaires de 2009 à 2013, outre 1 439,11 euros au titre des congés payés afférents ; 1. ALORS QU'il incombe au salarié qui prétend que son temps de pause s'analyse en réalité en un temps de travail effectif de démontrer que durant cette période, il était à la disposition de son employeur et devait se conformer à ses directives sans pouvoir vaquer librement à des occupations personnelles ; qu'en se bornant à relever que le salarié apportait, par la production d'attestations, des éléments laissant présumer que ses pauses constituaient en réalité du temps de travail effectif, pour ensuite exiger la preuve contraire de l'employeur, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article L. 3121-1 du code du travail ; 2. ALORS en outre QUE les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner et analyser tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en l'espèce, l'employeur faisait valoir que M. R... exerçait ses fonctions au rez-de-chaussée au sein de l'espace ventes et pouvait prendre ses pauses sans que les salariés dont il produisait les attestations puissent le voir, dès lors que ces derniers travaillaient dans des espaces séparés de l'espace ventes par un mur (conclusions d'appel, p. 17, prod. 23) ; qu'en outre, il invoquait et produisait quatre attestations de collègues soulignant que M. R... avait toujours effectivement bénéficié de ses temps de pauses (ibid. ; prod. 24 à 27) ; qu'en s'abstenant d'examiner et d'analyser ces pièces, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds à payer à M. R... les sommes de 16 200 euros à titre de rappel de prime contractuelle, 1 620 euros correspondant aux congés payés afférents, et 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds aux dépens de première instance et d'appel, AUX MOTIFS QUE la charge de la preuve du paiement du salaire incombe à l'employeur qui se prétend libéré ; qu'en matière de prime et gratification, il appartient à celui qui se prévaut d'un usage d'apporter la preuve que la prime ou gratification relève de cet usage répondant à des caractères de généralité constance et de fixité ; que les bonus et primes sur objectif et commission en pourcentage sur un chiffre d'affaires constituent une rémunération variable ; que même s'il appartient au salarié qui revendique la prime de justifier qu'il a droit à son attribution, en fonction de conventions ou d'usages, l'employeur est tenu à une obligation de transparence qui le contraint à communiquer au salarié les éléments servant de base de calcul de son salaire notamment de cette part variable ; sur la prime contractuelle : M. R... justifie bénéficier en application de l'article 5 de son contrat de travail de trois primes: « une prime d'assiduité: 90 euros brut (prime P 1), une prime de rangement et nettoyage du magasin: 90 euros brut (prime P2) et une prime de services généraux (suivi des contre remboursements, réceptions, erreur pièces, suivi des navettes, suivi et rangement des consignes: 90 euros brut (prime P3) » étant précisé que «si deux des objectifs ne sont pas réalisés aucune prime ne sera versée » ; que M. R... justifie que ces primes ont été versées jusqu'en janvier 2009, date à laquelle elles ont été supprimées ; que l'employeur ne justifie pas de l'absence de réalisation totale ou partielle des objectifs attachés à ces primes ; que l'abandon de primes s'apparente à une modification substantielle de la rémunération et donc des conditions du contrat de travail et en l'absence de tout accord exprès du salarié, l'employeur ne pouvait unilatéralement procéder à cette suppression ; que M. R... apparaît fondé à solliciter un rappel de prime à hauteur de 16200 euros et les congés payés y afférents correspondant à la période du 1 er janvier 2009 à décembre 2013 ; ALORS QUE la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs et il appartient à la cour d'appel qui décide d'infirmer ledit jugement d'en réfuter les motifs déterminants ;
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qu'en affirmant qu'en l'absence de tout accord exprès du salarié, l'employeur ne pouvait unilatéralement procéder à la suppression des primes prévues par l'article 5 de son contrat de travail, sans s'expliquer sur le motif du jugement, que l'employeur était réputé s'être approprié en en demandant la confirmation, ayant retenu que M. R... avait accepté l'avenant du 1er mars 2009 supprimant ces primes, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile. CINQUIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds à payer à M. R... les sommes de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts pour absence de formation et 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et d'AVOIR condamné la société Ile-de-France poids lourds aux dépens de première instance et d'appel, AUX MOTIFS QUE Sur la formation : en application de L 2141-5 du code du travail, il est interdit à l'employeur de prendre en considération l'appartenance à un syndicat ou l'exercice d'une activité syndicale pour arrêter ses décisions en matière notamment de recrutement, de conduite et de répartition du travail, de formation professionnelle, d'avancement, de rémunération, et d'octroi d'avantages sociaux, de mesures de discipline et de rupture du contrat de travail ; qu'en application des articles L. 1132-1, et L. 1134-1 du code du travail, lorsque le salarié présente plusieurs éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l'existence d'une telle discrimination et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ; que M. R... a bénéficié de mandats syndicaux et prétend avoir été victime d'une discrimination en raison du refus d'attribution de formation ; que s'agissant de la formation, M. R... transmet le procès-verbal de réunion du comité d'entreprise du 10 décembre 2014, du 29 mai 2015 et du 8 octobre 2014 et le bilan de formation 2012 où la formation aux méthodes de vente n'a pas été satisfaite et le plan de formation 2013 dont il a été exclus ; que son évaluation de notation 2015 démontre l'absence de formation pendant 6 ans ; qu'il est manifeste que sur la formation PROGINOV, M. R... avec Monsieur O... ont été les deux seuls salariés à être exclu du plan de formation en 2014 ; que l'employeur ne transmet sur ce point, aucune explication même si en décembre 2013, il a été programmé pour l'effectuer mais ne l'a pas réalisée ; qu'en l'absence de tout élément permettant de justifier les exclusions constatées en matière de formation, la Cour considère qu'il y a bien eu un comportement fautif de l'employeur à l'égard du salarié ; que M. R... sollicite la somme de 12000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice lié l'absence de formation ; qu'il y a lieu de relever toutefois que le préjudice né de ce défaut de formation n'est justifié par aucun élément ; que dès lors, il convient de minorer le montant des dommages-intérêts alloués en réparation du préjudice du salarié discriminé et de lui allouer à ce titre la somme de 1000 euros ; ALORS QU'il incombe au salarié qui sollicite des dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son obligation de formation de justifier de l'existence et de l'étendue de son préjudice ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément constaté que le préjudice lié au défaut de formation n'était « justifié par aucun élément », de sorte qu'en accordant néanmoins des dommages et intérêts au salarié de ce chef, elle a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. Moyens produits au pourvoi n° H 18-13.464 par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. R.... PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité à la somme de 16 200 € le montant de la condamnation de la société IDF POIDS LOURDS au titre de la prime contractuelle, outre les congés payés y afférents ; Aux motifs que Monsieur R... justifie bénéficier en application de l'article 5 de son contrat de travail de trois primes : « une prime d'assiduité : 90 € brut (prime P1), une prime de rangement et nettoyage du magasin : 90 € brut (prime P2) et une prime de services généraux (suivi des contre remboursements, réceptions, erreur pièces, suivi des navettes, suivi et rangement des consignes) : 90 € brut (prime P3) » étant précisé que « si deux des objectifs ne sont pas réalisés aucune prime ne sera versée » ; que Monsieur R... justifie que ces primes ont été versées jusqu'en janvier 2009, date à laquelle elles ont été supprimées ; que l'employeur ne justifie pas de l'absence de réalisation totale ou partielle des objectifs attachés à ces primes ;
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que l'abandon de prime s'apparente à une modification substantielle de la rémunération et donc des conditions de travail et qu'en l'absence de tout accord exprès du salarié, l'employeur ne pouvait unilatéralement procéder à cette suppression ; que Monsieur R... apparait fondé à solliciter un rappel de prime à hauteur de 16 200 € et les congés payés y afférents, correspondant à la période du 1er janvier 2009 à décembre 2013 ; ALORS, D'UNE PART, QUE les juges sont tenus de respecter l'objet du litige qui est déterminé par les prétentions respectives des parties; qu'en affirmant que « Monsieur R... apparaît fondé à solliciter un rappel de prime à hauteur de 16 200€ et les congés payés y afférents, correspondant à la période du 1er janvier 2009 à décembre 2013 », quand Monsieur R... avait réclamé un rappel de prime contractuelle de 38 880 € correspondant à la période du 1er janvier 2009 au mois de novembre 2017, la Cour d'appel, qui a réduit la période d'indemnisation non contestée par les parties, a modifié l'objet du litige, en violation de l'article 4 du Code de procédure civile ; ALORS, D'AUTRE PART et en tout état de cause, QUE le jugement doit être motivé ; qu'en se bornant à affirmer que « Monsieur R... apparait fondé à solliciter un rappel de prime à hauteur de 16 200€ et les congés payés y afférents, correspondant à la période du 1er janvier 2009 à décembre 2013 », sans cependant préciser les raisons pour lesquelles Monsieur R... ne pouvait prétendre à un rappel de prime contractuelle pour la période postérieure à décembre 2013, la Cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de Monsieur R... en paiement d'un rappel de prime de 13ème mois et de congés payés y afférents ; Aux motifs propres que Monsieur R... revendique au titre du transfert de son contrat de travail des sociétés PAC et AD AUMERLE, le versement de la prime de 13ème mois en considérant que ladite prime constituait un usage ou un engagement unilatéral de la part de l'employeur et qu'elle devait être transférée en même temps que le contrat de travail des salariés en bénéficiant ; qu'il y a lieu de constater que le bénéfice des usages ou engagements unilatéraux invoqué par le salarié ne sont transférés qu'à l'égard des salariés dont le contrat était en cours au jour du transfert ; que les salariés engagés postérieurement ou déjà présents dans la société absorbante ne peuvent bénéficier de ces avantages collectifs ; qu'il n'est pas contesté que le contrat de travail de Monsieur R... a été transféré de la société PAC à la société AD AUMERLE puis ADBPN pour enfin être intégré au sein de la société ILE DE FRANCE POIDS LOURDS ; que s'agissant de son transfert au sein de la société PAC, Monsieur R... justifie par plusieurs bulletins de salaire que 6 salariés ont bénéficié d'une prime de 13ème mois au sein de la société PAC et qu'en 2003, la société avait envisagé une mensualisation de la prime ; qu'aucune des notes de service de la société relative au 13ème mois ne démontre que cette prime était allouée à l'ensemble des salariés et notamment à Monsieur R... ; que ce dernier ne transmet d'ailleurs aucun bulletin de salaire de cette période ; que le salarié ne justifie donc pas d'un droit acquis à voir transférer le bénéfice de cette prime de 13ème mois dans le cadre du transfert de son contrat de travail ; Et aux motifs éventuellement adoptés du jugement entrepris que selon la jurisprudence constante, l'usage d'entreprise résulte d'une pratique suivie dans l'entreprise ayant un caractère général, fixe et constant ; que pour être considérée comme générale, une prime doit être attribuée à l'ensemble du personnel ou, à tout le moins, à une catégorie de personnel bien déterminée ; qu'en l'espèce, il est constant que Monsieur Q... bénéficiait d'une prime de 13ème mois au titre des avantages qu'il avait acquis auprès d'un précédent employeur, la société AGIC, avant d'être intégrée dans son salaire mensuel aux termes d'un avenant signé avec la société AUMERLE le 22 février 2008 ; qu'en outre, il est établi que Monsieur L..., responsable de site, bénéficie d'une prime mensuelle de 300 € bruts intégrée dans son salaire mensuel par avenant du 1er avril 2008 avec la société AUMERLE ; que Madame P... E... bénéficie d'une prime exceptionnelle de 800 € bruts intégrée dans son salaire mensuel par avenant du 16 juin 2008 avec la société AUMERLE ; que Monsieur Y... X... perçoit une prime de 100 € bruts suite à un avenant du 25 juin 2003 avec la société PAC ; que Monsieur Z... C..., technicien atelier tachygraphie, s'est vu attribuer deux primes basées sur le développement de l'activité par CDI conclu le 1er août 2007 avec la société AUMERLE ; qu'or, il n'est pas établi l'existence d'un usage caractérisé par la généralité, la fixité et la constance, preuve qui incombe au salarié ;
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que par ailleurs, en tout état de cause, l'obligation à laquelle est légalement tenu le nouvel employeur, en cas de transfert d'une entité économique, de maintenir au bénéfice des salariés qui y sont attachés, les droits qu'ils tiennent d'un usage en vigueur au jour du transfert, justifie la différence de traitement qui en résulte par rapport aux autres salariés ; qu'ainsi la différence de traitement entre Monsieur Q... et les autres salariés, résultant du maintien des avantages individuels acquis auprès d'un précédent employeur, est admise ; qu'en conséquence les demandes de Monsieur R... au titre de la prime de 13ème mois et de la prime exceptionnelle seront rejetées ; ALORS, D'UNE PART, QUE le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en affirmant, pour rejeter la demande de Monsieur R... en paiement d'un rappel de prime de 13ème mois, qu'« aucune des deux notes de service de la société relative au 13ème mois ne démontre que cette prime était allouée à l'ensemble des salariés et notamment à Monsieur R... », quand ces notes portant sur la prime de 13ème mois étaient adressées à l'ensemble des salariés de la société PAC et faisaient état de la diversité des modes de versement de cette prime, « certains salariés » (sic) la percevant en deux mensualités, d'autres en douze mensualités, la Cour d'appel a violé les articles 1103 et 1104 nouveaux du Code civil, ensemble le principe susvisé ; ALORS, D'AUTRE PART et en tout état de cause, QUE l'exposant avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « la note de service rappelle clairement que tous les salariés PAC étaient bénéficiaires de cette prime, acquise en conséquence dans son principe, seules les modalités de son versement pouvaient être différenciées auprès de certains salariés (en une ou deux fois « chaque année » ou lissée sur 12 mois, la prime étant donc versée par douzième). En outre, cela est encore clairement établi par la seconde note du 26 juin 2003 adressée à l'ensemble du personnel : « Salariés PAC 77/91/95 INT » prévoyant son intégration dans le salaire de base : « comme indiqué dans la note du 30 janvier 2003, à dater du 1er septembre 2003, le 13ème mois sera intégré dans le salaire de base » (page 23) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que la référence faite au sein desdites notes à « certains salariés » renvoyait exclusivement à la diversité des modes de versement de cette prime, et non à ses bénéficiaires, la Cour d'appel a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir limité à 1 000 € le montant de la condamnation de la société IDF POIDS LOURDS au titre des dommages et intérêts en réparation du préjudice subi suite à la violation du principe d'égalité de traitement ; Aux motifs que Monsieur R... sollicite des dommages et intérêts en réparation du préjudice né de l'inégalité de traitement ; qu'il prétend avoir eu un manque à gagner de 83 200 € depuis 2009 ; que toutefois ses calculs sont effectués sans aucun élément objectif de nature à les valider ; qu'il y a lieu de constater que les condamnations prononcées en première instance ainsi que les intérêts de droit qui y sont attachés permettent de considérer que le préjudice a été réparé ; qu'il ne sera fait droit à réparation que du seul préjudice moral à hauteur de 1 000 € ; ALORS, D'UNE PART, QUE le dommage né d'une inégalité de traitement injustifiée constitue un préjudice certain et réparable ; que la réparation intégrale d'un dommage oblige à placer celui qui l'a subi dans la situation où il se serait trouvé si ce comportement dommageable n'avait pas eu lieu ; qu'en se bornant à affirmer, pour juger « qu'il ne sera fait droit à réparation que du seul préjudice moral à hauteur de 1 000 € », que « les condamnations prononcées en première instance ainsi que les intérêts de droit qui y sont attachés permettent de considérer que le préjudice a été réparé », sans cependant rechercher, ainsi qu'elle y était expressément invitée, si l'inégalité de traitement subie par Monsieur R... au titre de sa rémunération contractuelle depuis 2009 n'avait pas eu un impact sur ses droits à la retraite, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard du principe de la réparation intégrale du préjudice et de l'article L 1231-1 nouveau du Code civil ; ALORS, D'AUTRE PART et en tout état de cause, QUE l'exposant avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « si le principe d'égalité de traitement avait été respecté par la société IDF PL, ses droits à la retraite ne seraient pas amputés par la privation du juste salaire depuis 2009 » (page 16) ;
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qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que l'inégalité de traitement subie par Monsieur R... au titre de sa rémunération depuis 2009 lui avait causé un préjudice financier distinct de son préjudice moral, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
Cour d'appel de Paris K3, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-13.367 du 16/10/2019, partie 10
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : I - Statuant sur le pourvoi n° P 18-19.611 formé par la société Le Chêne construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], contre un arrêt rendu le 17 mai 2018 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre ), dans le litige l'opposant à M. K... A..., domicilié [...], défendeur à la cassation ; II - Statuant sur le pourvoi n° J 18-20.550 formé par M. K... A..., contre le même arrêt rendu dans le litige l'opposant à la société Le Chêne constructions, société par actions simplifiée, défenderesse à la cassation ; La demanderesse au pourvoi n° P 18-19.611 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Le demandeur au pourvoi n° J 18-20.550 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 17 septembre 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. Nivôse, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, M. Pronier, Mmes Farrenq-Nési, Greff-Bohnert, MM. Jacques, Bech, Boyer, conseillers, Mmes Guillaudier, Georget, Renard, Djikpa, conseillers référendaires, M. Brun, avocat général, Mme Besse, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Nivôse, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société Le Chêne construction, de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de M. A..., l'avis de M. Brun, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Joint les pourvois n° 18-19.611 et 18-20.550 ; Sur le moyen unique du pourvoi n° 18-19.611 : Vu l'article 2239 du code civil ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 17 mai 2018), que, le 6 décembre 2006, M. A... et la société Le Chêne constructions (la société Le Chêne) ont conclu un contrat de construction d'une maison d'habitation ; que M. A..., ayant constaté de nombreuses malfaçons avant réception, a saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 24 décembre 2009, a désigné un expert, lequel a déposé son rapport le 15 décembre 2011 ; que, par acte du 14 août 2012, M. A... a assigné la société Le Chêne en annulation du contrat, subsidiairement en résolution ou en réparation des désordres ; Attendu que, pour juger recevable la demande en nullité du contrat, l'arrêt retient qu'il ne saurait être ajouté une condition à la suspension du délai de prescription, prévue par l'article 2239 du code civil, et que l'expertise sollicitée en référé est utile à l'appréciation de la demande en nullité du contrat, les conséquences de la nullité étant appréciées au regard de la gravité des désordres et non-conformités affectant la construction ; Qu'en statuant ainsi, alors que la demande d'expertise en référé sur les causes et conséquences des désordres et malfaçons ne tendait pas au même but que la demande d'annulation du contrat de construction, de sorte que la mesure d'instruction ordonnée n'a pas suspendu la prescription de l'action en annulation du contrat, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le moyen unique du pourvoi n° 18-20.550 : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes, autrement composée ; Condamne M. A... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept octobre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi n° P 18-19.611 par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Le Chêne construction.
Cour d'appel de Rennes 04, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.611 du 17/10/2019, partie 1
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR jugé recevable la demande formée par Monsieur A... tendant à la nullité du contrat souscrit entre les parties le 6 décembre 2006, prononcé la nullité dudit contrat, condamné la société LE CHENE CONSTRUCTIONS à démolir l'ouvrage à ses frais et à payer à Monsieur A... la somme de 143 152,67 € au titre de la restitution des sommes versées en vertu du contrat annulé et débouté la société LE CHENE CONSTRUCTIONS de toute demande tendant à être indemnisée du coût des travaux qu'elle a réalisés et de sa demande d'expertise pour évaluer lesdits travaux ; AUX MOTIFS QUE sur la recevabilité de l'action en nullité du contrat liant la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS et Monsieur A..., en application de l'article 1304 alinéa 1 ancien du Code civil (applicable en l'espèce), « dans tous les cas où l'action en nullité ou en rescision d'une convention n'est pas limitée à un moindre temps par une loi particulière, cette action dure 5 ans » ; que par ailleurs, l'article 2239 du même Code dispose que « la prescription est également suspendue lorsque le juge fait droit à une demande de mesure d'instruction présentée avant tout procès. Le délai de prescription recommence à courir, pour une durée qui ne peut être inférieure à 6 mois, à compter du jour où la mesure a été exécutée » ; que s'agissant d'une action en nullité d'un contrat de construction de maison individuelle, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu l'application de l'article 1304 susvisé ; qu'en effet, les règles impératives posées par l'article L 231-1 du Code de la construction constituent une mesure de protection de telle sorte que leur non-respect est sanctionné par une nullité relative au titre de l'ordre public de protection ; qu'en revanche, c'est à tort que les premiers juges ont refusé de faire application de la suspension de prescription prévue à l'article 2239 du même Code ; qu'outre qu'il ne saurait être ajoutée une condition à la suspension du délai de prescription telle que prévue par l'article 2239 du Code civil, force est de constater que la demande d'expertise sollicitée dans le cadre d'une procédure de référé, est manifestement utile à l'appréciation d'une demande en nullité d'un contrat de construction de maison individuelle et plus précisément des effets de la nullité lorsqu'elle est retenue ; qu'en effet, les conséquences de la nullité sont appréciées au regard de la gravité des désordres et non conformités affectant la construction ; qu'il s'en déduit que le contrat ayant été signé le 06 décembre 2006, le délai d'action, à défaut de mesure d'instruction, expirait le 06 décembre 2011 ; que compte tenu de la procédure de référé ayant conduit à la désignation d'un expert par ordonnance en date du 24 décembre 2009, suivie du dépôt du rapport d'expertise le 15 décembre 2011, le délai de prescription quinquennale a été suspendu entre ces deux dates ; que le délai d'action en nullité expirait par conséquent le 17 décembre 2013 ; que Monsieur A... a assigné la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS le 14 août 2012 ; que l'action en nullité est donc recevable ; que le jugement dont appel est infirmé de ce chef ; que sur la nullité du contrat, sur le bien-fondé de la demande tendant à voir prononcer la nullité du contrat conclu entre Monsieur A... et la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS, il convient de déterminer la nature du contrat liant les parties afin d'apprécier la validité dudit contrat au regard des règles applicables ; que sur la nature du contrat, la nature même du contrat conclu entre les parties n'est pas discutée en cause d'appel ; qu'il y a lieu d'observer que le contrat signé le 06 décembre 2006 est incontestablement un contrat de construction de maison individuelle au sens de l'article L 231-1 du Code la construction, la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS proposant une réalisation complète de l'immeuble, incluant tous les postes de travaux, outre la fourniture des plans et la prestation d'obtention du permis de construire (ces deux éléments ressortant de l'expertise judiciaire) ; que sur la validité du contrat, en application de l'article L231-1 du Code de la construction et de l'habitation, toute personne qui se charge de la construction d'un immeuble à usage d'habitation ne comportant pas plus de deux logements destinés au maître de l'ouvrage d'après un plan qu'elle a proposé, doit conclure avec le maître de l'ouvrage un contrat soumis aux dispositions de l'article L 231-2 du même Code ; que ce dernier énonce l'ensemble des mentions que doit contenir le contrat et qui peuvent se référer à des clauses types approuvées par décret. Il n'est pas discutable que ces mentions, qu'elles figurent dans le contrat lui-même, sur le plan prévu par l'article R 231-3 ou dans la notice descriptive visée à l'article R 231-4, doivent être claires et précises, sauf à priver le maître de l'ouvrage de la protection édictée par cette législation dont le caractère d'ordre public est énoncé par l'article L 230-1 du même Code ;
Cour d'appel de Rennes 04, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.611 du 17/10/2019, partie 2
que ces règles d'ordre public, afférentes aux mentions que doit comporter le contrat, sont édictées dans l'intérêt du maître de l'ouvrage et la nullité relative qui en sanctionne la violation est susceptible d'être couverte par une renonciation du maître de l'ouvrage à s'en prévaloir ; qu'en l'espèce, force est de constater que le document valant contrat, intitulé « devis de travaux » en date du 6 décembre 2006, ne comprend aucune des mentions obligatoires à l'exception du coût global du bâtiment à construire ; qu'il est de surcroît complété par 5 devis complémentaires ; que ce constat suffit amplement à retenir que le contrat de construction de maison individuelle conclu entre Monsieur A... et la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS le 06 décembre 2006, est entaché de nullité ; qu'il est acquis que Monsieur A... n'avait, à l'évidence, pas connaissance des dispositions d'ordre public destinées à le protéger en sa qualité de maître d'ouvrage ; qu'il les a découvertes en cours d'expertise ; que cet élément, ajouté au refus de réception et à la saisine du juge des référés pour déterminer les malfaçons, permet de considérer qu'il n'a pas renoncé à se prévaloir de la nullité du contrat litigieux ; qu'il convient par conséquent de faire droit à la demande de ce chef et de prononcer la nullité du contrat conclu le 6 décembre 2006 ; que sur les effets de la nullité, il convient d'observer à titre liminaire qu'en exécution du contrat susvisé, Monsieur A... a versé à la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS diverses sommes pour un montant total de 143 152,67 € ; que de manière générale, l'annulation du contrat impose de remettre les parties dans l'état où elles se trouvaient avant sa conclusion ; que sur la demande tendant à la démolition de l'immeuble, la nullité du contrat de construction de maison individuelle peut être sanctionnée par la remise en état des lieux et par suite la démolition de l'immeuble ; qu'une telle sanction est prononcée, sous réserve qu'elle n'apparaisse par disproportionnée à la gravité des désordres et non conformités affectant la construction ; qu'en l'espèce, l'expert judiciaire a relevé les désordres suivants : - chambre 1 : il manque une grille d'arrivée d'air neuf et un détalonnage de la porte, faux équerrage de la cloison limitant l'espace prévu pour recevoir un placard, - chambre 2 : idem pour le faux équerrage ; - escalier menant au 1er étage : décalage d'aplomb de 2 cm entre la cloison du rez-de-chaussée et celle du premier, - premier étage : 45 m2 mesurés contre 51 m2 au devis, défaut de diamètre des gaines de ventilation ; défaut de continuité de l'isolant acoustique, - garage : chauffe-eau à déplacer, tuyaux d'eau à isoler, caniveau de récupération des eaux pluviales devant la porte de garage non posé, - aménagement devant garage : désaccord sur le volume de cailloux de blocage mis en place devant le garage, - trois désordres d'implantation : mauvaise implantation planimétrique de la maison : contrairement aux obligations rappelées dans le permis de construire, le pignon du garage n'a pas été aligné sur la limite de propriété, les côtes indiquées dans le permis de construire pour l'implantation de la maison par rapport aux deux voies de circulation n'ont pas été respectées, mauvaise implantation altimétrique : le pavillon devait être de plain-pied, or les mesures effectuées par le géomètre montrent une différence d'altitude entre le terrain naturel et le rez-de-chaussée de 69 cm, ce qui interdit notamment l'accès d'un handicapé en fauteuil (élément essentiel de cette affaire, dans la mesure où le maitre de l'ouvrage a un enfant handicapé), défaut de côte d'implantation du système d'épuration, que l'expert ajoute qu'il note que les mesures figurant sur le plan de situation du permis de construire initial ainsi que celles figurant sur le projet de permis de construire modificatif ne coïncident pas avec les côtes relevées par le géomètre, cette imprécision étant à rapprocher de la médiocre qualité des éléments graphiques du permis de construire (plan incomplet, absence de cartouche, absence d'indication permettant de distinguer les différentes étapes du permis) ; qu'il ressort des conclusions expertales que les désordres révélés par l'expertise peuvent faire l'objet d'une réparation ; qu'il ne compromettent pas la solidité de l'immeuble et ne le rendent pas impropre à sa destination ; que néanmoins, il résulte à suffire du rapport d'expertise que les désordres et non conformités sont substantiels et que les travaux réparatoires pour y remédier sont évalués à un coût représentant environ 1/3 du marché initial (soit plus de 50 000 €) ; que s'agissant de l'implantation altimétrique, elle n'est pas conforme au permis de construire puisque l'immeuble devait être de plein pied et que les mesures effectuées par le géomètre montrent une différence d'altitude de 69 cm entre le terrain et le rez-de-chaussée ; qu'à ce titre, il importe peu de déterminer si la condition d'accès pour personne à mobilité réduite était entrée dans le champ contractuel dès la signature du marché le 06 décembre 2006 ; qu'au regard de l'ensemble de ces éléments, la démolition de l'immeuble construit en vertu du contrat de construction annulé, n'apparait pas disproportionnée et doit être ordonnée ;
Cour d'appel de Rennes 04, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.611 du 17/10/2019, partie 3
que la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS est condamnée à démolir l'ouvrage à ses frais ; que sur la restitution des sommes versées en exécution du contrat annulé, en application du principe général posé ci-avant, il convient de faire droit à la demande de Monsieur A... en condamnant la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS à lui restituer les sommes versées, soit la somme totale de 143 152,67 € ; que sur la demande de la SAS LE CHENE CONSTRUCTIONS en restitution des sommes déboursées, le contrat de construction étant annulé et la démolition ordonnée, le principe d'une remise des parties dans l'état où elles se trouvaient avant la conclusion du contrat interdit à la SAS LE CHENE CONTRUCTIONS de solliciter une indemnisation au titre du coût des travaux qu'elle a réalisé en exécution de ce contrat ; qu'il ne saurait être fait droit à la demande d'expertise ou à toute autre demande de ce chef ; 1°) ALORS QUE la suspension de la prescription, comme son interruption, ne peut s'étendre d'une action à une autre ; qu'il n'en est autrement que lorsque les deux actions, quoiqu'ayant des causes distinctes, tendent à un seul et même but, de sorte que la seconde est virtuellement comprise dans la première ; qu'en statuant ainsi, quand la demande tendant à voir ordonner en référé une expertise sur les causes et conséquences des désordres et malfaçons affectant un ouvrage ne tend pas au même but que la demande d'annulation du contrat de construction de l'ouvrage, de sorte que la mesure d'instruction ordonnée sur une telle demande ne suspend pas la prescription de l'action en annulation du contrat de construction de l'ouvrage, la Cour a violé l'article 2239 du Code civil ; 2°) ALORS QUE la cause de nullité d'un contrat de construction d'une maison individuelle pour cela qu'il ne comporte pas les mentions obligatoires prévues par l'article L231-2 du Code de la construction et de l'habitation est nécessairement avérée le jour de la signature du contrat incomplet, puisque la nullité est prise précisément de l'absence au contrat desdites mentions ; qu'en statuant ainsi, motif pris que « la demande d'expertise sollicitée dans le cadre d'une procédure de référé, est manifestement utile à l'appréciation d'une demande en nullité d'un contrat de construction de maison individuelle et plus précisément des effets de la nullité lorsqu'elle est retenue », la Cour a violé le texte susvisé, ensemble l'article 2239 du Code civil. Moyen produit au pourvoi n° J 18-20.550 par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour M. A.... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Monsieur A... de sa demande tendant à l'indemnisation du préjudice de jouissance ; Aux motifs que « sur la demande au titre du préjudice de jouissance Le contrat de construction étant annulé, monsieur A... ne peut se prévaloir des conséquences dommageables du non respect du délai prévisible de livraison de sa maison. Il s'en déduit que sa demande de dommages-intérêts en indemnisation du trouble de jouissance doit être rejetée » ; Alors que, d'une part, dans le cas où un contrat nul a cependant été exécuté, des dommages-intérêts peuvent être alloués au titre de l'exécution défectueuse du contrat nul ; qu'en jugeant, cependant, que le contrat de construction ayant été annulé, Monsieur A... ne pouvait se prévaloir des conséquences dommageables du non-respect du délai prévisible de livraison de sa maison, quand elle constatait elle-même une exécution défectueuse du contrat nul, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 ; Alors que, d'autre part, le prononcé de la nullité n'exclut pas la réparation d'un dommage pouvant résulter d'une faute commise par celui auquel la nullité peut être imputée ; qu'en retenant, cependant, que le contrat de construction ayant été annulé, Monsieur A... ne pouvait se prévaloir des conséquences dommageables du non-respect du délai prévisible de livraison de sa maison, quand elle constatait elle-même que la nullité du contrat liant les parties était imputable à la société CHENE CONSTRUCTIONS, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
Cour d'appel de Rennes 04, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.611 du 17/10/2019, partie 4
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par : 1°/ Mme E... U..., 2°/ M. B... U..., tous deux domiciliés [...] , contre l'arrêt (n° RG : 15/01706) rendu le 7 novembre 2017 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige les opposant à la Société générale, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 9 juillet 2019, où étaient présents : Mme Mouillard, président, M. Remeniéras, conseiller rapporteur, M. Rémery, conseiller doyen, Mme Guinamant, avocat général référendaire, Mme Labat, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat de M. et Mme U..., de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la Société générale ; Sur le rapport de M. Remeniéras, conseiller, l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme U... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la Société générale la somme globale de 2 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du neuf octobre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, avocat aux Conseils, pour M. et Mme U... Mme E... O... épouse U... et M. B... U... font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déboutés de l'ensemble de leurs prétentions tendant à voir condamner la Société générale à leur payer chacun la somme de 10.000 euros pour le préjudice subi par la signature du contrat de cautionnement conclu avec la Société générale et la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour leur préjudice moral ; AUX MOTIFS QUE pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, la cour se réfère à la décision attaquée et aux dernières conclusions déposées ; que dans le cadre de la présente instance, la Société générale, demanderesse à l'instance, agissait en paiement contre la SCI aux 4 lunes, débiteur principal, et contre les époux U... et les époux F..., cautions ; qu'en raison du remboursement intégral du prêt par la SCI aux 4 lunes en cours de procédure de première instance, la Société générale a abandonné toutes ses demandes à l'encontre de la SCI et des cautions ; que le débat sur l'éventuelle disproportion des engagements des cautions qui aurait pu conduire les juges à faire application de l'article L. 341-4 du code de la consommation qui n'est plus d'actualité ; que les époux U... fondent leur demande de dommages-intérêts à l'encontre de la Société générale sur le manquement de la banque à son obligation de mise en garde, lui reprochant indifféremment d'avoir, par légèreté ou manoeuvres, consenti le prêt consenti à la SCI aux 4 lunes et d'avoir obtenu leur engagement dans le cadre d'une opération qui était à l'origine vouée à l'échec ; que le succès des prétentions des époux U... suppose la démonstration d'une faute de la banque et d'un préjudice en lien de causalité avec cette faute ; que sur la faute de la banque, les éléments produits par les époux U... sont insuffisants à retenir que la banque les a engagés en tant que cautions dans une opération ruineuse qui était dès l'origine vouée à l'échec ; que les pièces produites aux débats établissent notamment que la SCI aux 4 lunes, débitrice principale, a honoré les échéances du prêt pendant plus de trois ans, ce qui contredit l'affirmation d'une opération vouée à l'échec dès l'origine ; que la preuve de la faute de la banque n'est pas rapportée ; que de surcroît, par l'effet du remboursement intégral du prêt par le débiteur principal, les cautions sont définitivement et entièrement libérées de leur engagement, de sorte qu'elles ne peuvent exciper d'aucun préjudice qui serait caractérisé par la perte de chance de ne pas s'engager en qualité de caution ; que le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté les époux U... de leurs demandes ;
Cour d'appel de Grenoble 01, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-12.914 du 09/10/2019, partie 1
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il est constant que M. B... U... et Mme E... O... épouse U..., M. L... F... et Mme S... O... F... ont constitué la SCI aux quatre lunes pour l'exploitation d'un camping sur la commune de Serres dénommé le Domaine des deux soleils et que suivant acte notarié en date du 2 mai 2008, la SCI Domaine des deux soleils a cédé à la SCI aux 4 lunes la totalité de la parcelle sur laquelle se situe le fonds de commerce exploité ; que par acte distinct du même jour, a été cédé entre les mêmes parties le fonds de commerce de terrain de camping, piscine, gaz, droguerie, alimentation, snack, restaurant, buvette, plats cuisinés à emporter, pain, croissants, boissons à emporter, glaces et crèmes glacées, blocs de glaces de ménage saisonnier, moyennant un prix de 300.000 euros soit 165.997,38 euros pour les éléments incorporels, et 134.002,62 euros pour les éléments matériels ; qu'un prêt d'entreprise à la SCI d'une durée de 180 mois au taux d'intérêt de 5,29% et assurance d'un montant de 700.000 euros moyennant des échéances de 5.996,49 euros était annexé à l'acte de vente ; que ce prêt destiné à l'acquisition du domaine était assorti d'une caution d'une durée de 17 années, solidaire de la part des époux F... L... et U... B... pour un montant de 455.000 euros incluant principal, intérêts, frais et accessoires; que par acte notarié du même jour, la Société générale a prêté à M. et Mme U... une avance patrimoniale, et consenti une ouverture de crédit par découvert en compte spécial, pour un montant principal de 250.000 euros garantie par l'inscription d'une hypothèque conventionnelle sur leur maison à usage d'habitation d'une durée de 24 mois à rembourser au plus tard le 10 avril 2010 ; qu'enfin, par acte notarié du même jour, la Société générale a prêté à M. et Mme F... une avance patrimoniale, et consenti une ouverture de crédit par découvert en compte spécial, pour un montant principal de 250.000 euros garantie par l'inscription d'une hypothèque conventionnelle sur leur maison à usage d'habitation d'une durée de 24 mois à rembourser au plus tard le 10 avril 2010 ; qu'il n'est pas contestable qu'à compter de la fin de l'année 2011 plusieurs échéances du prêt accordé à la SCI sont restées impayées puisque la Société générale devait lui indiquer le 30 janvier 2012 qu'elle sursoyait au prononcé de l'exigibilité immédiate sous réserve du paiement des sommes dues sous huit jours ; qu'à partir de cette première mise en garde, la SCI a été mise en demeure à plusieurs reprises : - le 4 juillet 2012, la Société générale a indiqué à la SCI qu'elle procéderait à la clôture du compte le 2 septembre 2012, ce qu'elle a confirmé par courrier du 5 septembre 2012 dans le silence de la SCI, - le 10 septembre 2012, la Société générale a de nouveau indiqué qu'elle sursoyait au prononcé de l'exigibilité anticipé du prêt à condition que les sommes dues soient réglées sous huit jours sans réponse de la SCI, - le 21 septembre 2012, une mise en demeure de payer la somme principale de 612.238,30 euros outre intérêts postérieurs et pénalités de retard a de nouveau été adressée à la SCI ; que la banque a rappelé à chacune des cautions leur engagement et les a mis en demeure de lui adresser un règlement de sa créance à hauteur de leur cautionnement soit la somme de 455.000 euros par courriers du 21septembre 2012 ; que suite à l'assignation en justice la SCI aux 4 lunes a procédé à la vente du camping qu'elle exploitait ce qui a permis de la désintéresser totalement ; que la Société Générale a donc indiqué abandonner ses demandes à l'encontre des époux F... et U... actionnés en leur qualité de cautions solidaires dans le cadre de la présente procédure ; que M. B... U... et Mme E... O... épouse U..., d'une part, et M. F... L... et Mme O... S... épouse F..., d'autre part, soutiennent que leurs engagements en qualité de cautions étaient disproportionnés dès leur conclusion au regard de leur situation patrimoniale et de leurs ressources financières et que cette situation était connue de la banque qui a été loyalement informée par eux ; qu'ils considèrent que le créancier qui exige un cautionnement à caractère excessif commet un abus dans la mesure où la banque a l'obligation de contracter de bonne foi faute de quoi elle engage sa responsabilité ; qu'en conséquence il y a lieu d'examiner si à la période de souscription des engagements de cautions soit le 2 mai 2008, la Société générale aurait manqué à son devoir d'information ; que l'acte de prêt notarié en date du 2 mai 2008 de la Société générale aux époux U... précisait que M. B... U... était technicien au services des Eaux et Mme E... U... commerçante ; que le prêt prévoyait une affectation hypothécaire portant sur un pavillon d'habitation situé [...] (Seine-et-Marne) ;
Cour d'appel de Grenoble 01, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-12.914 du 09/10/2019, partie 2
qu'en effet, les époux U... étaient propriétaires d'une maison qu'ils souhaitaient vendre et que dans l'attente, ils avaient souscrit une demande d'avance patrimoniale d'un montant de 250.000 euros sous forme d'ouverture de crédit par découvert de compte spécial le 10 avril 2008 sur 24 mois avec remboursement au plus tard le 10 avril 2010 ; que cette avance patrimoniale n'avait pas pour objet de rembourser un prêt à peine souscrit sachant que le prêt professionnel avait un différé de remboursement de six mois et que l'avance ne pouvait donc avoir comme objet qu'une mise à disposition de fonds dans l'attente de la vente de leur maison ; qu'il est manifeste qu'il en était de même pour les époux F... ; qu'à la période de souscription des engagements de cautions, les époux U... et les époux F... associés dans la SCI se sont adressés à la Société générale avec un projet professionnel raisonné sachant qu'ils ne pouvaient manifestement autofinancer l'acquisition du fonds de commerce de camping ; que la Société générale a sollicité à ce moment-là divers renseignements concernant chacun des associés et leur a fait remplir une fiche de « renseignements confidentiels sur une personne physique acceptant de se porter caution » puisqu'il s'agissait de s'engager au profit de la SCI à rembourser sur une durée de 17 années solidairement avec les trois autres cautions une somme de 455.000 euros incluant principal, intérêts, frais et accessoires ; que Mme U... a indiqué qu'elle était commerçante en nom propre depuis le mois de juin 1987 et qu'elle percevait des revenus d'environ 1.000 euros par mois outre qu'elle était propriétaire d'une maison d'habitation estimée entre 440 et 450.000 euros ; que M. U... de son côté a indiqué qu'il était ouvrier d'assainissement chez Veolia depuis juillet 1979 et percevait un salaire de 2.200 euros outre qu'il était propriétaire d'une maison d'habitation à [...] d'une valeur de 440 à 450.000 euros ; que les époux U... produisaient à la Société générale un mandat de vente de leur maison d'habitation indiquant que le prix de vente net vendeur arrêté avec l'agence Environnement Immobilier Côté Maison situé à [...] était effectivement de 450.000 euros ; que Mme F... a indiqué qu'elle était agent de production depuis le 31 mai 1999 et qu'elle percevait un salaire de 1.402,64 euros outre qu'elle était propriétaire d'une maison d'habitation estimée à 340.000 euros à [...] ; que M. F... a de son côté indiqué qu'il était technico-commercial avec un salaire de 1580 euros outre qu'il était propriétaire d'une maison d'habitation évaluée à 340.000 euros à [...] ; que partant, il n'apparaît pas hors de proportion que la Société générale ait considéré que les époux U... et les époux F... avaient une surface financière suffisante à s'engager en qualité de cautions solidaires tous les quatre pour la SCI compte tenu d'une part de leurs revenus anciens, d'autre part de leur propriété d'un bien immobilier outre le fait qu'il était logique de considérer que leur nouvelle activité leur fournirait un revenu qu'eux-mêmes évaluaient à 20.000 euros par mois pour les quatre associés ; qu'ils ne peuvent soutenir que leurs biens immobiliers auraient été en son temps surévalués, sachant que si la maison des époux U... est restée en vente plus de deux années avant que la question de sa réévaluation soit posée, la crise immobilière étant dans l'intervalle passée par là, ce que la banque ne pouvait anticiper ; que pas plus les époux F... ne peuvent soutenir que le fait que leur résidence d'habitation qui faisait déjà l'objet d'une prise de garantie par la banque sous forme d'hypothèque conventionnelle à hauteur de 250.000 euros ne pouvait au moment de la prise d'engagement être prise en compte pour déterminer l'ampleur de leur patrimoine alors même que par définition une hypothèque n'est qu'une garantie qui n'est mobilisable qu'en cas de difficulté ; qu'il est de jurisprudence constante qu'il n'appartenait pas à la banque de s'immiscer dans les affaires de ses clients notamment en faisant réaliser une étude de rentabilité du camping nonobstant le fait qu'ils auraient été profanes, ce qu'ils ne démontrent pas ; que les époux U... et les époux F... ne peuvent sérieusement soutenir qu'ils ont découvert que l'activité de camping était saisonnière, ni qu'il appartenait à l'organisme prêteur de s'assurer que le chiffre d'affaires permettrait de faire face à la charge des emprunts et des charges courantes largement dépendante des choix d'exploitation futures par les associés ; que pas plus les époux U... ne peuvent soutenir que la Société générale a « continué la mise en place de crédit » en leur consentant une avance patrimoniale puisque cette avance comme il a été souligné n'a pas été consentie après le prêt professionnel et leur engagement de caution ou encore au moment où la SCI ne faisait plus face au remboursement de son prêt professionnel mais le 2 mai 2008 soit trois années auparavant et pour un tout autre objet ;
Cour d'appel de Grenoble 01, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-12.914 du 09/10/2019, partie 3
que les époux F... et les époux U... ne démontrent pas que la Société Générale avait connaissance d'une situation irrémédiablement compromise dès l'origine, ce que les faits du reste démentent, les difficultés n'étant intervenues que trois ans plus tard, ni qu'elle avait sur leur situation connaissance d'informations qu'eux-mêmes ignoraient touchant à leur incapacité originelle à tenir les engagements souscrits ; que pas plus ils n'établissent n'avoir touché aucun salaire depuis l'origine de l'exploitation du camping étant précisé qu'ils ne démentent pas comme l'affirme la Société générale que la vente du camping a dégagé un bénéfice pour les associés après désintéressement de la banque, ce qui invalide l'affirmation de ce qu'ils auraient été contraints de vendre l'affaire à "vil prix" ; que conséquemment les époux U... et les époux F... n'établissent pas que la Société générale aurait commis une quelconque faute dans le fait de solliciter leur engagement de cautions au bénéfice de la SCI ni d'accorder le prêt considéré à cette dernière ou qu'elle aurait manqué à son devoir d'information sur les conditions du prêt et les risques d'endettement par rapport à leurs capacités financières; que par suite de ces développements qu'il y a lieu de débouter M. B... U..., Mme E... O... épouse U..., d'une part et M. F... L... et Mme O... S... épouse F... d'autre part, qui ne démontrent l'existence d'aucun préjudice ; 1°) ALORS QUE la cassation d'un arrêt entraîne par voie de conséquence l'annulation de toute décision qui en est la suite, l'application ou l'exécution ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que la cassation à intervenir de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 7 novembre 2017 (RG 15/01705) sur l'une des trois premières branches du pourvoi H18-12.912 relatif au manquement de la Société générale à son devoir de mise en garde lors de l'octroi du prêt consenti à la SCI aux 4 lunes entraînera l'annulation par voie de conséquence de l'arrêt de la cour d'appel de Grenoble en date du 7 novembre 2017 (RG 15/01706) qui est relatif au manquement de la Société générale à son devoir de mise en garde lors de la conclusion du cautionnement consenti par les époux U... en garantie de ce prêt et qui s'y rattache par conséquent par un lien de dépendance nécessaire, en application de l'article 625 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE la banque est tenue d'un devoir de mise en garde à l'égard de la caution non avertie, lorsque son engagement crée, le jour de sa souscription, un risque d'endettement excessif au regard de ses capacités financières ; qu'en retenant, pour écarter tout manquement de la Société générale, qu'il n'était pas hors de proportion que cette dernière ait considéré que les époux U... avaient une surface suffisante à s'engager en qualité de cautions solidaires avec les époux F... pour la SCI aux 4 lunes, compte tenu de leurs revenus anciens et de leur propriété d'un bien immobilier, outre le fait qu'il était logique de considérer que leur nouvelle activité leur fournirait un revenu qu'eux-mêmes évaluaient à 20.000 euros par mois pour les quatre associés, sans préciser si elle avait pris en compte, pour apprécier les capacités financières des époux U..., les engagements que ces derniers avaient, par ailleurs, souscrits au profit de la Société générale, soit l'hypothèque conventionnelle consentie sur la maison d'habitation composant leur patrimoine immobilier et l'avance patrimoniale souscrite à hauteur de 250.000 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; 3°) ALORS QU'en tout état de cause, en affirmant, pour écarter tout manquement de la Société générale, que la nouvelle activité des époux U... leur fournirait un revenu qu'eux-mêmes évaluaient à 20.000 euros par mois pour les quatre associés, la cour d'appel s'est fondée sur un élément hypothétique postérieur à la souscription du cautionnement litigieux pour écarter tout manquement au devoir de mise en garde et a ainsi violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; 4°) ALORS QUE dans leurs conclusions d'appel, les époux U... faisaient valoir que le fait pour la Société générale de leur avoir fait souscrire le contrat de cautionnement litigieux les avait détruits moralement et avait eu pour effet de réveiller les maladies de M. U..., devenu aujourd'hui handicapé (conclusions, p. 11-12) ; que dès lors, en retenant, pour écarter toute responsabilité de la Société générale, que par l'effet du remboursement intégral du prêt par le débiteur principal, les époux U... étaient définitivement et entièrement libérés de leur engagement, de sorte qu'ils ne pouvaient exciper d'aucun préjudice qui serait caractérisé par la perte de chance de ne pas s'engager en qualité de cautions, sans répondre au moyen opérant tiré de la subsistance de leur préjudice moral, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par la société du [...] , société civile immobilière, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 7 mai 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 3), dans le litige l'opposant à la société Vizona, anciennement dénommée Vitra Retail, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 10 septembre 2019, où étaient présents : M. Chauvin, président, Mme Corbel, conseiller référendaire rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Berdeaux, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Corbel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat de la société du [...] , de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Vizona, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 mai 2018), que la SCI du [...] (la SCI) a donné à bail à la société Vizona divers locaux commerciaux, puis lui a délivré un congé avec refus de renouvellement du bail et offre d'une indemnité d'éviction qu'elle a ensuite rétractée en lui reprochant une sous-location irrégulière d'une partie des locaux ; que la société Vizona l'a assignée en nullité de cette rétractation et en paiement d'une indemnité d'éviction ; Sur le premier moyen, ci-après annexé : Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Mais sur le second moyen : Vu l'article L. 145-14 du code de commerce ; Attendu que, pour condamner la SCI à payer une certaine somme au titre des indemnités d'éviction et accessoires, l'arrêt retient que, les locaux formant un tout indivisible, la sous-locataire n'a pas droit au renouvellement direct du bail de sorte que la locataire principale doit être indemnisée de son éviction de la totalité des locaux, y compris de la partie sous-louée ; qu'il en déduit que l'ensemble des préjudices résultant de l'éviction doit être pris en compte sans distinguer les sociétés occupantes ; Qu'en statuant ainsi, alors que l'indemnité d'éviction du preneur sortant ne doit réparer que le préjudice qu'il a subi, la cour d'appel, qui a indemnisé le preneur sortant des frais de déménagement des locaux loués par la sous-locataire, des frais de réinstallation qui comprenaient des frais de communication de la sous-locataire et du double loyer qui était en partie supporté par la sous-locataire, a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la SCI du [...] à payer à la société Vizona les sommes de 184 733 euros au titre des frais réinstallation/communication, 29 000 euros au titre des frais de déménagement/administratifs et 39 377 euros à titre d'indemnité pour double loyer, l'arrêt rendu le 7 mai 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne la société Vizona aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Vizona ; la condamne à payer à la SCI du [...] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix octobre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société du [...] PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir dit que l'existence d'un motif grave et légitime dispensant la SCI du [...] du paiement de l'indemnité d'éviction n'était pas démontrée, d'avoir dit que la sommation délivrée le 18 septembre 2013 était de nul effet, d'avoir en conséquence condamné la SCI du [...] à une indemnité d'éviction au profit de la société Vizona et d'avoir débouté la SCI du [...] de sa demande aux fins d'obtenir l'expulsion de la société Vizona ;
Cour d'appel de Paris I3, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.662 du 10/10/2019, partie 1
Aux motifs propres que « aux termes du bail commercial du 19 décembre 2003 liant les parties, la société VIZONA s'est expressément obligée à : " CESSION- SOUS-LOCATIONS sous peine de résiliation immédiate et sans préjudice de toutes autres indemnités et dommages-intérêts, le preneur s'engage : (...) 2°) A ne concéder la jouissance des lieux loués et les sous-louer à qui que ce soit, hormis à une société du même groupe, en tout ou en partie, sous quelque forme que ce soit, même temporairement ou à titre précaire, sans l'autorisation préalable et écrite du bailleur. La sous-location partielle, si elle venait à être autorisée, n 'entraînerait pas en tout état de cause renonciation à la clause d'indivisibilité conventionnellement stipulée au profit du bailleur. D'une façon générale, les conventions de sous-location autorisées devront : - reproduire les termes du bail que le sous-locataire devra s'engager à respecter dans ses rapports avec le preneur, - comporter une clause de renonciation à tous recours directs du sous-locataire contre le bailleur, soit en responsabilité, soit pour obtenir le renouvellement du bail directement à son profit, - être faites pour un montant de loyer au moins égal à celui résultant du bail, - avoir été approuvées préalablement par le bailleur, - avoir une durée de 23 mois. " La précision apportée dans les dispositions relatives à la sous-location par les termes " hormis à une société du même groupe" introduit une exception quant aux modalités contractuelles de la sous-location : celle-ci ne doit en effet être autorisée par écrit et préalablement par le bailleur que pour les sous-locations à des sociétés n'appartenant pas au même groupe que la société VIZONA. L'emploi du terme " d'une façon générale " introduisant les modalités de la sous-location, notamment la durée de 23 mois, ne concerne que les "conventions de sous-location autorisées " et ces modalités sont donc exclues pour les sociétés du même groupe pour lesquelles la sous-location ne nécessite pas d'autorisation écrite et préalable. D'ailleurs, le fait que cette exception attachée aux sociétés du même groupe ressort de l'intention commune des parties est corroborée par la manière dont cette clause a été rédigée à l'origine dans le contrat de renouvellement de bail du 7 novembre 2001 portant sur l'essentiel des locaux en cause, qui a été remplacé par le bail du 19 décembre 2003. L'acte du 7 novembre 2001 comporte en effet une clause dactylographiée relative à la sous-location dans laquelle a été ajoutée au 2°) de façon manuscrite et avec les paraphes des parties, après la mention: " les sous-louer à qui que ce soit ", la mention: " hormis une société du même groupe ". Il s'ensuit que si les parties ont ajouté expressément cette exception dans le bail depuis 2001 c'est qu'elles ont voulu lui donner un effet spécifique, de sorte que les dispositions relatives aux " conventions de sous-location autorisées " n'ont pas vocation à s'appliquer pour les sociétés du même groupe. La société VIZONA verse aux débats une attestation de son expert comptable en date du 26 février 2014 certifiant que les sociétés ANSORG FRANCE et VIZONA FRANCE font partie du même groupe de sociétés, à la tête duquel se trouve la société VITRASHOP HOLDING AG, société de droit suisse. Cette attestation est corroborée par la copie de la liste des comptes consolidés des sociétés du groupe VITRASHOP HOLDING AG pour l'année 2012 mentionnant plusieurs sociétés VIZONA dont celle de Paris et plusieurs sociétés ANSORG dont celle de Paris, la copie d'un organigramme du groupe. Il est ainsi démontré l'appartenance de la société ANSORG au même groupe que la société VIZONA. La SCI DU [...] se prévaut également du constat d'huissier du 19 décembre 2013 selon lequel d'autres sociétés dénommées VISPLAY et VITRASHOP seraient présentes dans les locaux. Mais la mise en demeure comportant rétractation de congé du 18 septembre 2013 ne reproche à la société VIZONA que la seule sous-location consentie à la société ANSORG, de sorte que l'occupation des locaux par d'autres sociétés ne saurait valablement constituer un motif grave et légitime. En tout état de cause, il ressort du procès-verbal d'assemblée générale extraordinaire du 15 décembre 2000 que la société VITRASHOP est devenue la société VIZONA et qu'elle a pour nom commercial VISPLAY. En outre, la société VIZONA rapporte la preuve que les personnes nommément désignées par l'huissier de justice comme travaillant pour le compte de VISPLAY dans le constat précité sont salariées par la société VIZONA. Il apparaît donc que la société ANSORG est la seule sous-locataire des locaux qu'elle partage avec la société VIZONA notamment pour l'espace show-room. Enfin il résulte du courrier précité en date du 16 avril 2004 de M. K..., administrateur de biens représentant la SCI DU [...] que les sociétés VIZONA et ANSORG 1 avril 2004 laquelle a, par la voie de son ma er ndataire, reconnu la validité de la souslocation, bien que M. K... ait de manière erronée fait référence à une durée de 23 mois. La circonstance que le 30 novembre 2006, l'intégralité des parts sociales de la SCI DU [...] ait été cédée à la Sté FONCIERE DE LA MUETTE BROCHANT est inopérante puisque la bailleresse est restée la même personne morale.
Cour d'appel de Paris I3, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.662 du 10/10/2019, partie 2
Au regard de l'ensemble de ces éléments, la SCI DU [...] ne démontre pas justifier d'un motif grave et légitime la dispensant du versement d'une indemnité d'éviction. Par conséquent, par l'effet du congé comportant refus de renouvellement signifié le 25 juillet 2012, le bail a pris fin le 31 mars 2013 et en l'absence d'un motif grave et légitime, ce congé ouvre droit au profit de la locataire au paiement de l'indemnité d'éviction prévue, de sorte que le jugement entrepris sera confirmé de ces chefs. En application de l'article L145-28 du code de commerce, la locataire évincée pouvant prétendre à une indemnité d'éviction a droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de celle-ci. Le jugement sera donc également confirmé en ce qu'il a débouté la SCI DU [...] de sa demande tendant à voir ordonner l'expulsion de la société VIZONA et des demandes subséquentes » ; Aux motifs éventuellement adoptés que « 1. Sur le motif grave et légitime du congé : Selon l'article L. 145-17 du Code de Commerce : "Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement d'aucune indemnité : 1° S'il justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant. Toutefois, s'il s'agit soit de l'inexécution d'une obligation, soit de la cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation du fonds, compte tenu des dispositions de l'article L. 145-8, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur d'avoir à la faire cesser. Cette mise en demeure doit, à peine de nullité, être effectuée par acte extrajudiciaire, préciser le motif invoqué et reproduire les termes du présent alinéa. (...)". En l'espèce, dans l'acte d'huissier du 18 septembre 2013 délivrée à la Sté VIZONA à la requête de la bailleresse intitulé : " sommation valant mise en demeure préalable et congé avec refus de renouvellement sans indemnité d'éviction comportant rétractation du congé avec refus de renouvellement et proposition d'indemnité d'éviction signifié le 25 juillet 2012 à effet au 31 mars 2013", cette dernière expose notamment que lors du rendez-vous d'expertise du 12 septembre 2013, la Sté VIZONA a expressément reconnu que la Sté ANSORG, dont un représentant était présent au rendezvous, occupait les lieux loués depuis plusieurs années, que l'autorisation préalable écrite du bailleur de sous-louer exigée par l'article 6 du contrat de bail n'a jamais été requise, qu'en outre la sous-location a duré plus de 23 mois durée maximum autorisée par cet article. Elle met en demeure sa locataire de mettre fin à ce manquement à ses obligations contractuelles dans le délai d'un mois sous peine de s'en prévaloir, comme motif grave et légitime de refus de renouvellement sans indemnité d'éviction en application de l'article L145-17 précité. Elle fait valoir que le contrat de bail impose l'obtention de l'autorisation de la bailleresse à toute sous-location dont la durée ne peut excéder 23 mois, que la Sté ANSORG a volontairement dissimulé son lieu d'exploitation, que la preuve n'est pas rapportée qu'elle appartienne au même groupe que la Sté VIZONA, que plusieurs sociétés exploitent leur activité dans les locaux, que la sous location non autorisée s'est poursuivie un mois après la mise en demeure. De son côté, la Sté VIZONA fait valoir que la sous location partielle de ses locaux à la Sté ANSORG, appartenant au même groupe qu'elle, est autorisée par le contrat de bail et qu'il n'y a donc pas d'infraction contractuelle de sa part, que la bailleresse qui avait connaissance de la sous-location des locaux avant la délivrance du congé du 25 juillet 2012 offrant le paiement d'une indemnité d'éviction ne pouvait se rétracter. Les dispositions de l'article L145-31 du code de commerce relatives à la sous-location n'étant pas d'ordre public en application de l'article L145-5 du même code, les parties peuvent y déroger dans leur contrat de bail. Aux termes du bail commercial liant les parties, la société VIZONA s'est expressément obligée à : «CESSION-SOUS-LOCATION Sous peine de résiliation immédiate et sans préjudice de toutes autres indemnités et dommages-intérêts, le preneur s'engage : 1°) A ne pas mettre son fonds en gérance libre, en tout ou partie, mais d'exploiter personnellement. 2°) A ne concéder la jouissance des lieux loués et les sous-louer à qui que ce soit, hormis à une société du même groupe, en tout ou en partie, sous quelque forme que ce soit, même temporairement ou à titre précaire, sans l'autorisation préalable et écrite du bailleur. La sous-location partielle, si elle venait à être autorisée, n'entraînerait pas en tout état de cause renonciation à la clause d'indivisibilité conventionnellement stipulée au profit du bailleur.
Cour d'appel de Paris I3, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.662 du 10/10/2019, partie 3
D'une façon générale, les conventions de sous-location autorisées devront: - reproduire les termes du bail que le sous-locataire devra s'engager à respecter dans ses rapports avec le preneur, - comporter une clause de renonciation à tous recours directs du sous-locataire contre le bailleur, soit en responsabilité, soit pour obtenir le renouvellement du bail directement à son profit - être faites pour un montant de loyer au m2 au moins égal à celui résultant du bail, - avoir été approuvées préalablement par le bailleur, -avoir une durée de 23 mois. » Les parties s'opposent sur l'interprétation de cette stipulation, en particulier sur la question de savoir si la sous location à une société du même groupe est subordonnée aux conditions posées au troisième paragraphe imposant notamment que les "sous-locations autorisées" soient approuvées préalablement par le bailleur et aient une durée de 23 mois. Selon les dispositions des articles 1156 et suivants du code civil relatives à l'interprétation des conventions, l'on doit rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes, lorsqu'une clause est susceptible d'avoir deux sens, on doit plutôt l'entendre dans celui avec lequel elle peut avoir un effet, que dans le sens avec lequel elle n'en produit aucun, les termes susceptibles de deux sens doivent être pris dans le sens qui convient le plus à la matière du contrat; ce qui est ambigu s'interprète par ce qui est d'usage dans le pays où le contrat est passé, les clauses s'interprètent les unes par rapport aux autres; dans le doute, la convention s'interprète contre celui qui a stipulé et en faveur de celui qui a contracté l'obligation. La recherche de la commune intention des parties impose de regarder de quelle façon a été insérée dans le bail la clause selon laquelle les locaux peuvent être sous-loués aux sociétés du groupe. Dans le contrat de renouvellement de bail portant sur l'essentiel des locaux en cause conclu entre les parties le 7 novembre 2001, l'article "CESSION-SOUS-LOCATION" mentionne de façon dactylographiée que le preneur s'engage "2°) à ne concéder la jouissance des lieux loués et les sous-louer à qui que ce soit, en tout ou en partie, sous quelque forme que ce soit, même temporairement ou à titre précaire, sans l'autorisation préalable et écrite du bailleur'''' et précise deux paragraphes au dessous, eh caractères dactylographiés que "d'une façon générale, les conventions de sous-location autorisées devront: (...) - Avoir été approuvées préalablement par le bailleur, - avoir une durée de 23 mois. Or, à cet article dactylographié a été ajouté au 2°) , de façon manuscrite et avec les paraphes des parties, après la mention: "les sous louer à qui que ce soit", la mention: "hormis une société du même groupe". Il apparaît donc que les conditions commençant par la formule "D'unefaçon générale " ont été prévues avant que soit ajoutée l'exception accordée aux sociétés du groupe et alors que toutes les sous- locations devaient être préalablement autorisées par le bailleur. Ainsi, la formule "d'une façon générale" n'avait pas pour objet de souligner que les conditions posées visaient à la fois les sous-locations autorisées préalablement par le bailleur et celles consenties sans autorisation aux "sociétés du même groupe". Dans le contrat de bail du 19 décembre 2003 l'article "CESSION-SOUS-LOCATION" est intégralement dactylographié. Au paragraphe 2°), l'exception à l'obligation d'obtenir avant de sous-louer à l'autorisation préalable et écrite du bailleur", prévue en faveur des "sociétés du même groupe", perd tout intérêt si l'on considère que le troisième alinéa de ce paragraphe énonçant que "d'une façon générale, les conventions de sous-location autorisée devront : (...)- avoir été approuvées préalablement par le bailleur (...)" doit s'appliquer. Or, si les parties ont ajouté expressément cette exception dans le bail depuis 2001 c'est qu'elles ont voulu lui donner un effet spécifique. Il faut donc en déduire que le 3eme alinéa ne s'applique qu'aux sous-locations qui doivent faire l'objet d'une autorisation préalable et écrites selon le 2°) et non aux sociétés du même groupe que la Sté VIZONA. Il en résulte qu'en cas de sous-location aux sociétés de ce groupe, l'autorisation écrite et préalable n'était pas nécessaire et la durée de 23 mois ne s'imposait pas non plus. La mise en demeure comportant rétractation de congé du 18 septembre 2013 fait état de la seule sous-location consentie à la Sté ANSORG. Dans ses écritures, la bailleresse se prévaut cependant du constat d'huissier du 19 décembre 2013 selon lequel de représentants d'autres sociétés dénommées DISPLAY, VITRA SHOP et VITRA SHO GROUPE auraient été rencontrés sur place par l'huissier. Or, il ressort de son extrait du registre du commerce que la Sté VIZONA a pour nom commercial DISPLAY et qu'elle était anciennement dénommée VITRA SHOP, nom qui apparaît d'ailleurs sur le contrat de bail de 1991 et son avenant de 1996. Il apparaît donc que la Sté ANSORG est la seule sous locataire des locaux, sous location qui n'a jamais été contestée par la Sté VIZONA. Cette dernière produit une attestation de son expert comptable en date du 26 février 2014 certifiant que les sociétés ANSORG FRANCE et VIZONA FRANCE font partie du même groupe de sociétés, à la tête duquel se trouve la société VITRASHOP HOLDING AG, société de droit suisse.
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La copie de la liste des comptes consolidés des sociétés du groupe VTTRASHOP HOLDING AG pour l'année 2012 mentionnant plusieurs sociétés VIZONA dont celle de Paris et plusieurs sociétés ANSORG dont celle de Paris, la copie d'un organigramme du groupe, corroborent cette attestation. La démonstration est donc faite de l'appartenance de la Sté ANSORG au même groupe que la Sté VIZONA. Enfin, le 16 avril 2004 M. N. K..., administrateur de biens représentant la SCI du [...] , a écrit à la Sté VIZONA : "j'ai bien reçu votre courrier du 1er avril dernier m'informant de l'entrée de l'entreprise ANSORG dans vos locaux à partir du 1er avril 2004. Je vous rappelle que votre bail vous autorise de sous-louer votre local à une société de votre groupe en bail précaire, soit 23 mois. Il résulte clairement de ce courrier que la société VIZONA et la Sté ANSORG n'ont jamais dissimulé la sous-location mais en ont, au contraire, informé la bailleresse et que celle-ci a expressément reconnu par la voix de son mandataire qu'il s'agissait d'une sous-location autorisée par le bail. La circonstance que le 30 novembre 2006, l'intégralité des parts sociales de la SCI du [...] aient été cédées à la Sté FONCIERE DE LA MUETTE BROCHANT est inopérante puisque la bailleresse est restée la même personne morale ayant eu pour mandataire M. N. K.... Il est donc démontré que lors de la délivrance du congé avec offre d'indemnité d'éviction, la bailleresse avait connaissance de la sous location litigieuse, pour en avoir reconnu la validité en 2004. Elle ne peut donc plus l'invoquer comme motif grave et légitime pour se dispenser du paiement de l'indemnité d'éviction. L'affirmation de M. N. K... selon laquelle la sous-location à la Sté ANSORG ne devrait durer que 23 mois bien qu'il s'agisse d'une société du même groupe que la Sté VIZONA est sans conséquence puisqu'il s'agit d'une interprétation erronée du bail, comme exposé ci-dessus. Cette interprétation erronée n'a d'ailleurs pas été maintenue puisque le mandataire de la bailleresse a laissé la sous location se poursuivre. Il ressort de l'ensemble de ces éléments que la SCI du [...] ne démontre pas justifier d'un motif grave et légitime la dispensant du versement d'une indemnité d'éviction. Il convient, en conséquence, de dire que par l'effet du congé comportant refus de renouvellement signifié le 25 juillet 2012, le bail a pris fin le 31 mars 2013 et que ce congé ouvre droit au profit de la locataire au paiement de l'indemnité d'éviction prévue à l'article L145-14 du code de commerce. En application de l'article L145-28 du code de commerce, la locataire évincée pouvant prétendre à une indemnité d'éviction a droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de celle-ci. Il convient, en conséquence, de débouter la SCI du [...] de sa demande tendant à voir ordonner l'expulsion de la Sté VIZONA et de toutes ses demandes subséquentes ». 1) Alors que le concours du bailleur à la sous-location est requis même si la sous-location a été préalablement autorisée et que le défaut d'appel du bailleur à concourir aux actes de sous-location entraîne l'irrégularité de la sous-location et constitue un motif grave et légitime privant du droit à l'indemnité d'éviction ; qu'en estimant que la sous-location était régulière en ce que le bail commercial permettait, sans autorisation préalable et écrite, la sous-location des lieux à une société du même groupe, la cour d'appel a violé les articles L. 145-17 et L. 145-31 du code de commerce ; 2) Alors en tout état de cause que sauf stipulation contraire au bail ou accord du bailleur, toute sous-location totale ou partielle est interdite et que la renonciation par le bailleur au bénéfice du statut des baux commerciaux doit être expresse ; qu'en estimant que le bailleur avait autorisé la sous-location aux sociétés du même groupe, lorsque le bail commercial du 19 décembre 2003 stipulait que d'une façon générale, les conventions de sous-location devront être approuvées préalablement par le bailleur et pour une durée de 23 mois, d'où il s'évinçait que le bailleur n'avait pas renoncé à l'application du statut, la cour d'appel a violé les articles L. 145-17 et L. 145-31 du code de commerce ; 3) Alors en tout état de cause que le bail commercial conclu le 19 décembre 2003 stipule que « d'une façon générale, les conventions de sous-location autorisées devront : - reproduire les termes du bail que le sous-locataire devra s'engager à respecter dans ses rapports avec le preneur, - comporter une clause de renonciation à tous recours directs du sous-locataire contre le bailleur, soit en responsabilité, soit pour obtenir le renouvellement du bail directement à son profit - être faites pour un montant de loyer au m2 au moins égal à celui résultant du bail, - avoir été approuvées préalablement par le bailleur, - avoir une durée de 23 mois » ; qu'il s'évince clairement et précisément d'une telle stipulation générale que toutes les sous-locations devaient être approuvées préalablement par le bailleur et avoir une durée de 23 mois ;
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qu'en énonçant que la sous-location à une société membre du groupe n'était pas soumise à l'accord préalable du bailleur, la cour d'appel a violé, par dénaturation de l'écrit, l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; 4) Alors en tout état de cause que le bail commercial conclu le 19 décembre 2003 stipule que « d'une façon générale, les conventions de sous-location autorisées devront : - reproduire les termes du bail que le sous-locataire devra s'engager à respecter dans ses rapports avec le preneur, - comporter une clause de renonciation à tous recours directs du sous-locataire contre le bailleur, soit en responsabilité, soit pour obtenir le renouvellement du bail directement à son profit - être faites pour un montant de loyer au m2 au moins égal à celui résultant du bail, - avoir été approuvées préalablement par le bailleur, - avoir une durée de 23 mois » ; qu'il s'évince clairement et précisément d'une telle stipulation générale que toutes les sous-locations devaient être approuvées préalablement par le bailleur et avoir une durée de 23 mois ; qu'en prenant appui sur l'autorisation donnée le 16 avril 2004 par l'ancien mandataire du bailleur, tout en relevant que la référence à la durée de 23 mois était erronée, pour en déduire qu'aucun motif grave et légitime n'était établi pour exclure le droit du preneur à son indemnité d'éviction, la cour d'appel a violé, par dénaturation de l'écrit, l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable à la cause ; SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir fixé à la somme de 1.136. 920 euros le montant de l'indemnité d'éviction due par la SCI du [...] à la société Vizona ; Aux motifs que « 1. Sur l'indemnité principale. Les parties ne contestent pas le jugement entrepris qui a retenu, suivant les préconisations de l'expert judiciaire, que le fonds est transférable et que l'indemnité principale est constituée par la valeur du droit au bail. Cette valeur se calcule en fonction de la différence existant entre le loyer du marché et le loyer dû en cas de renouvellement du bail à laquelle un coefficient est appliqué. Le jugement entrepris a retenu qu'il n'y avait pas de motif de déplafonnement et il s'est référé à un loyer plafonné de 125.410 euros en fonction duquel il a fixé la valeur du droit au bail à 615.000 euros, ce que la société VIZONA demande de confirmer. La SCI DU [...] considère qu'une modification notable des caractéristiques des locaux est intervenue au cours du bail expiré en raison de la création d'un show-room sur la quasi-totalité de la surface du rez-de-chaussée permettant de changer son affectation en créant une surface plus importante pour la réception de la clientèle de la locataire. Selon elle, il convient par conséquent de se référer au loyer déplafonné, soit la somme de 236.259 euros, et elle demande de fixer en conséquence la valeur du droit au bail à 171.644 euros. Selon le contrat de bail du 19 décembre 2003, les locaux sont loués à destination de " l'activité d'achat, de vente, de représentation de mobiliers, d'installations et d'agencements pour les entreprises et les particuliers, ainsi que la réalisation et le stockage de prototypes en découlant ", moyennant un loyer annuel de 91.470 euros HT/HC révisable automatiquement à l'issue de chaque période triennale. Selon le rapport d'expertise judiciaire, les locaux sont situés au [...] et à l'angle de la [...] et de la [...], aux sous-sol, rez-de-chaussée, 1er et 2ème étage d'un ensemble composé d'immeubles anciens en maçonnerie enduite. L'expert judiciaire conclut que l'implantation des locaux, qui sont en bon état, est de qualité moyenne pour l'activité exercée, souffrant d'une visibilité médiocre mais bénéficiant d'une bonne accessibilité par les transports en commun. Ces points ne sont pas contestés par les parties. Les locaux du rez-de-chaussée sont ainsi désignés dans le contrat de bail du 19 décembre 2003 :. Immeuble [...] - un espace d'exposition et de vente + sanitaires d'environ 350 m² - un atelier et une réserve de stockage d'environ 70 m² . Immeuble angle [...] - un espace de bureaux d'environ 66 m².Il ressort du projet d'architecte datant de 2004 que le bâtiment donnant sur la [...] devait être à destination de show-room pour une surface de 325 m². Dans la mesure où le bail mentionne un espace d'exposition et de vente + sanitaires d'environ 350m², le bailleur ne démontre pas que les travaux entrepris par la société locataire aurait eu pour effet d'augmenter la surface affectée à la réception du public. En outre, selon les plans dressés en 2009, repris dans le rapport d'expertise, figurent au rez-de-chaussée des locaux donnés à bail un show-room de 264,44 m² ainsi les suites show-room et sanitaire pour une surface de 40,07m². Il n'est donc pas démontré par l'appelante une augmentation de la surface affectée à la réception du public entraînant une modification notable des caractéristiques des locaux. Il s'ensuit que la SCI DU [...] ne rapporte pas la preuve du déplafonnement qu'elle allègue et qu'il convient de se référer au loyer plafonné comme retenu par le jugement entrepris.
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La cour renvoie à la motivation détaillée du jugement de première instance, en l'absence d'autres moyens de contestation de la valeur du droit au bail soulevés par les parties, qu'elle adopte, de sorte que la valeur du droit au bail s'établit comme suit : - valeur du marché pour l'ensemble des locaux : 279 170 euros annuels, - loyer contractuel plafonné résultant de l'application de l'indice : 125.410 euros au 31 mars 2013, - coefficient de 4 qui n'est pas discuté par les parties et qui est justifié s'agissant d'une situation sans aucune commercialité mais d'un local de qualité constitué de bureaux et d'un show-room en partie sur rue, soit (279 170 -125 410) x 4 = 615 040 euros. Le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu'il a fixé l'indemnité principale d'éviction à 615 000 euros (somme arrondie) ; 2. Sur les indemnités accessoires La SCI DU [...] fait valoir qu'en cas de refus de renouvellement du bail et lorsque le bail comporte une clause d'indivisibilité comme en l'espèce, le sous-locataire est privé de tout recours et il ne peut rien réclamer ; que la société VIZONA ne peut donc prétendre à être indemnisée du préjudice résultant de l'éviction pour elle et pour la société ANSORG. La société VIZONA fait valoir qu'elle a droit à réparation du préjudice résultant de son éviction de la totalité des locaux, y compris la partie sous-louée. La société locataire ne conteste que les montants de l'indemnité allouée au titre du trouble commercial et l'indemnité allouée au titre des frais de réinstallation alors que la SCI DU [...] conteste l'ensemble des montants alloués au titre des indemnités accessoires. Par application de l'article l'article L 145-32 du code du commerce, en cas de sous-location partielle, le sous-locataire n'a de droit direct au renouvellement que lorsque les lieux objet du bail principal ne forment pas un tout indivisible matériellement ou dans la commune intention des parties. En l'espèce outre le fait que le bail contient une clause d'indivisibilité conventionnelle, la configuration des locaux, décrite dans le constat d'huissier du 19 décembre 2013 et le rapport d'expertise, révèle qu'ils forment un tout indivisible. Dans ces conditions, la société ANSORG n'a pas droit au renouvellement direct du bail de sorte qu'il n'y a pas lieu de distinguer le préjudice causé spécifiquement à la société VIZONA en raison de sa propre activité, l'ensemble des préjudices résultant de l'éviction devant être pris en compte sans distinguer les sociétés occupantes, la société VIZONA devant être indemnisée du fait de son éviction de la totalité des locaux sous-loués, y compris de la partie sous-louée. - sur l'indemnité de remploi. Ces frais sont destinés à permettre au locataire évincé de faire face aux frais qu'il devra débourser à l'occasion de l'achat d'un fonds d'une valeur équivalente à celui dont il est évincé et comprennent notamment les droits de mutation et les frais d'agence et de rédaction d'acte. L'expert judiciaire évalue à 56.810 euros les frais de remploi en appliquant les nouveaux barèmes des droits de mutation sur les cessions de fonds de commerce et estimant à 5% les honoraires de transaction et juridiques soit : - droits de mutation pour la première tranche de 23 000 € : néant - droits de mutation pour la seconde tranche de 177 000 € x 3% = 5310 € - droits de mutation pour la troisième tranche de 415 000 € x 5% = 20 750 € - frais et honoraires de transaction : 615 000 € x 5% = 30 750 € La SCI DU [...] reprend ces modalités de calcul en les appliquant à l'indemnité principale qu'elle réclamait à hauteur de à 171.644 euros et demande, en conséquence, de fixer l'indemnisation des frais de remploi à 13.041,52 €. La société VIZONA demande l'application du coefficient forfaitaire de 10%. Le calcul ainsi fait par l'expert judiciaire sur la base des barèmes des droits étant plus précis que l'application d'une indemnité forfaitaire, l'indemnité de remploi sera fixée à la somme de 56.810 euros et non 61 500 euros comme retenu par le jugement de première instance. - sur le trouble commercial La SCI DU [...] expose que le trouble commercial doit correspondre à trois mois d'EBE et elle critique le choix de l'expert qui s'est basé sur le chiffre d'affaires, ce qui ne correspond pas à la réalité du préjudice de la société VIZONA laquelle a un chiffre d'affaire important mais un taux de rentabilité négatif en 2010 et 2011. Elle propose de se référer à l'EBE retraitée positive de la seule l'année 2012. La société VIZONA conteste le montant de l'indemnité retenu au titre du trouble commercial au motif qu'il convient de retenir un trouble égal à deux semaines du chiffres d'affaires HT, et non une semaine, comme l'a préconisé l'expert judiciaire. Mais s'agissant d'une société qui, comme l'a relevé le jugement entrepris, n'a généralement pas d'E.B.E., il convient de se référer au chiffre d'affaires et de retenir une semaine de chiffre d'affaires HT, soit au regard du rapport d'expertise judiciaire, la somme de 212.000 euros, la préconisation de l'expert de retenir deux semaines soit 464 000 euros étant manifestement excessive eu égard à l'activité économique de la société VIZONA. - sur les frais de déménagement et les frais administratifs.
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L'expert judiciaire a proposé, au regard des devis présentés dont il a fait la moyenne, une somme arrondie à 26 000 euros retenue par le jugement entrepris. La SCI DU [...] critique les devis retenus par l'expert judiciaire au motif qu'ils incluent le déménagement de la société ANSORG. Mais dés lors que l'ensemble des préjudices résultant de l'éviction doit être pris en compte sans distinguer les sociétés occupantes, ce moyen n'est pas fondé. Par conséquent la somme de 26 000 euros sera retenue. Pareillement la somme forfaitaire de 3 000 euros au titre des frais administratifs proposée par l'expert et retenue par le jugement de première instance est appropriée. C'est donc de manière justifié que le jugement entrepris a retenu la somme de 29 000 euros au titre des frais de déménagement et des frais administratifs. - sur les frais de réinstallation L'expert a retenu la valeur d'acquisition actualisée des différents agencements des locaux loués et y a appliqué un coefficient de vétusté de 70% pour fixer les frais de réinstallation à 329.185 euros. Il y ajoute une somme forfaitaire de 4.000 euros au titre des frais de communication, soit un montant proposé de 333.000 euros au titre des frais de réinstallation. La SCI DU [...] estime que l'indemnité de réinstallation ne doit être réglée que sur justificatifs et elle demande de retenir une somme de 2.000 euros au titre des frais de communication faisant valoir qu'il n'y a pas lieu de prendre en ceux de la société ANSORG. La société VIZONA demande de retenir un coefficient de vétusté de 40% ainsi que la valeur d'acquisition actualisée proposée par l'expert que le jugement entrepris n'a pas reprise. Le locataire qui dispose d'un droit au maintien dans les lieux jusqu'au paiement de l'indemnité d'éviction est fondée à réclamer la prise en compte de ses frais de réinstallation sans que celle-ci ne soit différée comme le sollicite la SCI DU [...] . Il ressort du rapport d'expertise judiciaire que des devis de dépose, démolition des agencements existants et nouveaux agencements et installations dans les locaux, d'installation réseau et infrastructure ainsi que des devis de fourniture de mobilier debureau ont été fournis par la locataire et l'expert a recensé les travaux réalisés dans les locaux sous forme de tableau. C'est à juste titre que le jugement entrepris a considéré qu'il n'y avait pas lieu de réactualiser la valeur d'acquisition des différents agencement qui seront conservés pour leur valeur nominale, soit un total de 602.446 euros. Le coefficient de vétusté de 70% proposé par l'expert sera retenu étant observé que l'expert judiciaire a relevé que la valeur d'acquisition des agencements est sansrapport avec la valeur nette comptable et que certains des aménagements datent des années 90. En conséquence, les frais de réinstallations seront fixés à 180.733 euros (602.446 x 30%) Les frais de communication de 4.000 euros proposés par l'expert seront retenus, le moyen soulevé par la SCI DU [...] tiré du fait que ces frais comprennent pour partie la société ANSORG étant inopérant. En conséquence, c'est de manière justifiée que le jugement de première instance a retenu la somme de 184.733 euros au titre des frais de réinstallation et de communication. - sur les frais de double loyer Il peut être pris en compte un poste spécifique de " double loyer ", correspondant à l'indemnisation du préjudice complémentaire subi par le preneur, contraint pour effectuer ses opérations de déménagement et réaménagement des nouveaux locaux, de conserver les anciens locaux parallèlement aux nouveaux. Au regard de l'état des locaux et en l'absence d'aménagements spécifiques, l'expert retient deux mois de loyer sur la base de la valeur locative, soit 39.377 euros, Faisant valoir que ce double loyer serait partagé avec la société ANSORG, la SCI DU [...] propose de n'en retenir que la moitié, soit la somme de 19.688 euros. Comme exposé ci-dessus ce moyen n'est pas fondé de sorte qu'il convient de retenir la somme de 39.377 euros à ce titre à l'instar du jugement entrepris. Il ressort de l'ensemble de ces éléments, que l'indemnité d'éviction totale due à la société VIZONA s'élève à la somme de : - indemnité principale : ..............................................615.000 € - indemnité de remploi : ...............................................56.810 € - trouble commercial : ................................................212.000 € - frais réinstallation/communication : .........................184.733 € - frais de déménagement/administratifs : ....................29.000 € - indemnité de double loyer : .......................................39.377 € soit un total de 1.136.920 euros toutes causes confondues et non de 1.141.610 euros comme retenu par le jugement entrepris qui sera donc infirmé sur le montant total toutes causes confondues de l'indemnité d'éviction » ; 1) Alors que l'indemnité d'éviction comprend notamment la valeur marchande du fonds de commerce, déterminée suivant les usages de la profession, augmentée éventuellement des frais normaux de déménagement et de réinstallation, ainsi que des frais et droits de mutation à payer pour un fonds de même valeur, sauf dans le cas où le propriétaire fait la preuve que le préjudice est moindre ;
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qu'en présence d'une sous-location partielle, le locataire ne peut pas prétendre à la réparation du préjudice causé par l'éviction de la totalité des lieux, y compris ceux sous-loués ; qu'en statuant en sens contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 145-14 du code de commerce, ensemble le principe de réparation intégrale du dommage, sans perte ni profit ;
Cour d'appel de Paris I3, Cour de cassation Troisième chambre civile, décision 18-19.662 du 10/10/2019, partie 9
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par la société Fauconnet ingénierie, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , contre l'arrêt rendu le 9 mai 2018 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. A... F..., domicilié [...] , 2°/ à Pôle emploi, agence Troyes-Langevin, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 3 septembre 2019, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Silhol, conseiller référendaire rapporteur, Mme Capitaine, conseiller, Mme Pontonnier, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Fauconnet ingénierie, de la SCP Ghestin, avocat de M. F... ; Sur le rapport de M. Silhol, conseiller référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Fauconnet ingénierie aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Fauconnet ingénierie à payer à M. F... la somme de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux octobre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour la société Fauconnet ingénierie Il est fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR dit le licenciement de A... F... sans cause réelle et sérieuse, et d'AVOIR, en conséquence condamné la SAS Fauconnet Ingénierie à lui verser diverses sommes subséquentes ; AUX MOTIFS QUE : « sur le bien-fondé du licenciement. La faute grave, dont la charge de la preuve incombe à l'employeur, telle qu'énoncée dans la lettre de licenciement dont les termes fixent le cadre du litige soumis à l'appréciation des juges du fond se définit comme un fait ou un ensemble de faits, imputables au salarié, caractérisant de sa part un manquement tel aux obligations découlant de la relation de travail que son maintien dans l'entreprise, pendant la durée du préavis, s'avère impossible. En l'espèce, les griefs formulés à l'encontre de A... F... ne sont pas contestés par le salarié. Toutefois, ce dernier soutient que son comportement, dont il ne conteste pas dans le corps de ses écritures qu'il était anormal, résultait des effets secondaires des antidépresseurs que lui avait prescrits son médecin traitant le 3 décembre 2015 puis le 16 février 2016. Il n'est pas contesté qu'au terme de l'ordonnance du 16 février 2016, le médecin traitant a prescrit un second médicament, dénommé Stablon, susceptible de provoquer des effets secondaires indésirables au nombre desquels, selon la Haute Autorité de Santé, figurent la confusion et les hallucinations. Dans le certificat qu'il a établi le 4 mars 2016 (pièce 18 dossier salarié), son médecin traitant a pu, bien que n'étant pas psychiatre, compte tenu des médicaments prescrits à son patient, énoncer que celui-ci a « pris en plus en antidépresseur qui a augmenté la désinhibition, a provoqué un comportement très hostile avec agressivité et opposition. Ces effets secondaires sont très connus à l'introduction du traitement par la fluoxétine ». Pour confirmer cette altération du comportement, A... F... sollicite, à titre subsidiaire, l'organisation d'une mesure d'expertise médicale. Toutefois, à défaut d'avoir été réalisée dans un temps contemporain au licenciement, cette expertise n'est pas de nature à permettre d'éclairer le litige, sauf à confirmer les possibles effets secondaires des médicaments en cause, qu'ont déjà évoqués les parties, dont elles sont justifiés. En dépit de la qualification donnée par l'employeur au licenciement, par laquelle le juge n'est pas tenu le juge, il incombe à ce dernier, sur le fondement des dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail de s'assurer du caractère objectif, précis, vérifiable, du ou des griefs énoncés et d'en apprécier la gravité. La faute grave ne suppose ni intention maligne, ni celle de commettre un acte indélicat pas plus qu'elle ne résulte d'un comportement volontaire. Elle suppose, compte tenu des griefs imputés au salarié que ceux-ci résultent d'un acte délibéré.
Cour d'appel de Reims, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-19.284 du 02/10/2019, partie 1
Or, en l'espèce, compte tenu du traitement médicamenteux prescrit à son salarié, désinhibiteur, susceptible de générer confusion et hallucinations, dont l'employeur a eu connaissance au plus tard lors de l'entretien préalable au licenciement, comme le relate le compte rendu d'entretien établi par la déléguée du personnel qui y a assisté A... F..., un doute existe quant au caractère délibéré des griefs imputés à faute au salarié. En application des dispositions de l'article L. 1235-1 du code du travail, ce doute doit bénéficier au salarié, de sorte que le licenciement prononcé à l'encontre de A... F... doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse. Dès lors, la décision déférée doit être confirmée. A... F... prétend valablement au paiement du salaire retenu au titre de la mise à pied à titre conservatoire dont il a fait l'objet, des congés payés afférents, d'une indemnité conventionnelle de licenciement ainsi qu'au bénéfice de dommages-intérêts dont le montant, compte tenu de son ancienneté dans l'entreprise et de l'effectif occupé par celle-ci ne saurait être inférieur à 6 mois de salaire ». 1) ALORS QUE, les motifs dubitatifs équivalent à une absence de motifs ; qu'en affirmant, pour dire que le licenciement de M. F... était dépourvu de cause réelle et sérieuse et après avoir constaté que celui-ci avait reconnu la réalité des griefs qui lui étaient reprochés, que le traitement médicamenteux pris par ce dernier, avait été susceptible de générer confusion et hallucinations, sans jamais précisé si ces effets avaient effectivement été constatés chez M. F..., la cour d'appel, qui a statué par des motifs dubitatifs, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en affirmant de manière péremptoire que le traitement médicamenteux pris par M. F... avait été susceptible de générer confusion et hallucinations sans jamais préciser, ni rechercher, si ces effets avaient été effectivement constatés chez M. F..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ; 3) ALORS DE PLUS FORT QUE, en affirmant que le traitement médicamenteux pris par M. F..., et en particulier le STABLON – prescrit à compter du 16 février 2016 après la fluoxétine prescrite à compter du 3 décembre 2015 - était susceptible d'avoir généré des confusions et hallucinations, cependant que dans le seul certificat médical produit aux débats, il était uniquement fait état de la prise d'un anti-dépresseur supplémentaire, « qui a augmenté la désinhibition, a provoqué un comportement de type hostile avec agressivité et opposition. Ces effets secondaires sont très connus à l'introduction de la fluoxétine », la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations dont il résultait qu'il avait été constaté médicalement une agressivité et une opposition à la suite de la prise du STABLON et en aucun cas, confusion ou hallucination, a violé les articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ; 4) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, en affirmant d'une part, sur la base d'un document de la Haute Autorité de Santé, que le STABLON pouvait générer confusion et hallucinations et d'autre part, que le médecin avait constaté, à la prise de la fluoxétine, à laquelle s'était ajoutée la prise du STABLON, un comportement agressif et hostile, pour en déduire que le traitement était susceptible de générer des confusions et hallucinations qui ont pu altérer le jugement de M. F..., la cour d'appel qui a statué par des motifs confus, a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ; 5) ALORS ENCORE, que pour débouter M. F... de sa demande, les premiers juges avaient retenu, et ainsi que l'employeur l'avait démontré, que M. F... avait déjà pris le traitement STABLON de 2009 à 2012 sans aucun effet secondaire rapporté ou constaté en sorte que rien ne permettait de considérer que ce traitement justifierait les faits particulièrement graves commis lors de la reprise de ce traitement ; qu'en infirmant le jugement de ce chef sans réfuter ces motifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1235-1 du code du travail ; 6) ALORS EN OUTRE QUE, en affirmant encore, qu'il résultait du compte-rendu d'entretien préalable, qui s'est déroulé le 18 mars 2016, que l'employeur aurait été informé des effets de ce traitement lors de l'entretien préalable cependant qu'il ne résultait à aucun moment dudit document que M. F... aurait fait état des effets secondaires liés à des hallucinations ou encore des confusions, s'étant borné sur ce point à faire état de quelques pertes de mémoire, la cour d'appel, qui a dénaturé cette pièce, a violé le principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause, ensemble l'article 4 du code de procédure civile;
Cour d'appel de Reims, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-19.284 du 02/10/2019, partie 2
7) ALORS AU SURPLUS QUE, si la preuve de la réalité des faits invoqués à l'appui d'une faute grave incombe à l'employeur et que le doute profite au salarié quant à la réalité des faits qui lui sont reprochés, il appartient au salarié, qui prétend que son comportement aurait été altéré par son état de santé, d'en rapporter la preuve ; qu'en retenant, pour dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et après avoir constaté que l'ensemble des faits reprochés au salarié étaient avérés, que le traitement médicamenteux pris par M. F... était susceptible d'entraîner des confusions et hallucinations en sorte que le doute devait profiter au salarié, la cour d'appel, a violé, l'article 1315 du code civil dans sa rédaction alors en vigueur, ensemble l'article L.1235-1 du code du travail; 8) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QUE, en affirmant que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse dès lors que le traitement était susceptible d'avoir généré des hallucinations, une désinhibition et de la confusion après avoir constaté que les faits reprochés à M. F..., dont il ne contestait pas la réalité, consistaient en l'organisation d'un système d'espionnage de la direction et de ses collègues, le piratage des emails de ses collègues, la destruction des fichiers de la Société et l'installation des logiciel illégaux, autant de faits qui ne sauraient être justifiés et ne présentaient aucun lien causal avec de la confusion ou des hallucinations ou encore une désinhibition et qui impliquent, bien au contraire, sang-froid et anticipation, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles L. 1232-1 et L. 1232-5 du code du travail ; 9) ALORS A TOUT LE MOINS QUE, à l'appui de ses écritures, la Société FAUCONNET avait eu soin de soutenir et de démontrer que les faits reprochés n'avaient aucunement été ponctuels, mais s'étaient déroulés sur une longue période, a minima entre le 25 février 2016 et le 1er mars, et avaient été réalisés pour certains, bien avant la prise du second médicament, que n'étaient nullement en cause des actes impulsifs, commis sur un ou deux jours mais bien au contraire des actes parfaitement réfléchis, nécessitant d'avoir pleinement conscience de ses agissements, ce que n'auraient pu permettre la confusion, les hallucinations tout autant qu'elles ne pouvaient justifier de tels actes ; qu'en se bornant à affirmer, pour dire le licenciement, sans cause réelle et sérieuse, que le doute quant au jugement de M. F... devait lui profiter dès lors que le traitement était susceptible d'avoir généré des hallucinations, une désinhibition et de la confusion, sans rechercher, ni préciser, pour chacun des faits reprochés, si ceux-ci pouvaient être justifiés , être en rapport ou présenter un lien de causalité avec les prétendus effets secondaires du traitement, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1 et L. 1232-5 du code du travail.
Cour d'appel de Reims, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-19.284 du 02/10/2019, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par M. S... A..., domicilié [...] , contre l'arrêt rendu le 24 avril 2018 par la cour d'appel de Lyon (1re chambre civile B), dans le litige l'opposant à la société Fourchet Patrick, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 9 juillet 2019, où étaient présents : Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mme Randouin, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. A..., l'avis de Mme Marilly, avocat général référendaire, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que, le 29 janvier 2013, M. A... (l'acquéreur) a acquis de la société Fourchet Patrick (le vendeur) un véhicule automobile d'occasion de type camion-benne ; qu'à la suite de dysfonctionnements ayant entraîné un dommage irrémédiable du moteur, l'acquéreur a assigné le vendeur en résolution de la vente, sur le fondement de la garantie des vices cachés ; Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches réunies : Vu l'article 1641 du code civil ; Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient, d'une part, que l'acquéreur ne rapporte pas la preuve de l'antériorité du dysfonctionnement du système d'injection, d'autre part, que l'expert n'a pu décrire la cause du vice l'affectant, défectuosité d'une pièce ou mauvais réglage ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'expert avait estimé que le vice affectant le système d'injection à l'origine de l'endommagement définitif du moteur était au moins sous-jacent au moment de l'achat et que la cause de cette défaillance, qu'elle soit la conséquence de la défectuosité d'une pièce ou d'un mauvais réglage, était, dans tous les cas, intrinsèque à la chose vendue, ce dont il se déduisait que les défauts affectant le véhicule, qui préexistaient à la vente, constituaient des vices cachés le rendant impropre à son usage, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; Et sur la troisième branche du moyen : Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ; Attendu que, pour rejeter la demande, l'arrêt retient que l'expert a constaté que le carburant utilisé par M. A... n'était pas autorisé ; Qu'en statuant ainsi, alors que, dans son rapport, en réponse à un dire faisant valoir que le carburant utilisé par M. A... n'était pas conforme, l'expert indiquait que le gasoil routier et le gasoil non routier sont techniquement des carburants identiques et qu'en outre, le vendeur n'avait pas fait procéder à une analyse du carburant contenu dans le véhicule lors de son intervention sur le système d'injection en octobre 2013, la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis du rapport d'expertise, a violé le principe susvisé ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 avril 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Riom ; Condamne la société Fourchet Patrick aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à M. A... la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois octobre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. A... Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement qui avait prononcé la résolution de la vente intervenue le 29 janvier 2013 entre la société Fourchet Patrick et M. A... et condamné la première à rembourser le prix de vente du véhicule et payer des dommages et intérêts à l'acheteur ; Aux motifs que c'était à l'acquéreur exerçant l'action en garantie des vices cachés qu'il appartenait de rapporter la preuve de l'existence et de la cause des vices qu'il alléguait ;
Cour d'appel de Lyon 1B, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-18.791 du 03/10/2019, partie 1
qu'en l'espèce, en réponse à la question « dire si les défauts existaient au moment de la vente », l'expert judiciaire avait répondu « M. A... a acquis ce véhicule alors qu'il totalisait 83 kilomètres ; j'ai relevé un kilométrage de 87 776 kilométrages lors de mon accédit du 28 janvier 2015 ; M. A... n'avait donc parcouru que 4 668 kilomètres. Il est indéniable que cette défaillance était au moins sous-jacente lors de l'achat du véhicule par M. A.... De surcroît, un injecteur avait été remplacé en septembre 2013 aux frais de M. A..., alors que le véhicule avait été acquis à peine neuf mois auparavant » ; qu'une défaillance sous-jacente ne pouvait être considérée comme une défaillance certaine et antérieure à la vente ; qu'en réponse à un dire, l'expert avait précisé qu'il était parfaitement exact qu'il était techniquement impossible de définir la date et l'heure d'apparition du dysfonctionnement, ce qui confirmait le doute sur l'antériorité du vice ; que l'expert avait produit en annexe à son rapport une pièce n° 10 constituée d'une documentation technique indiquant parmi les causes possibles « un réglage incorrect de la pompe de l'injecteur, une quantité de combustible injectée trop grande » et au titre des remèdes, « contrôler ou remplacer les injecteurs » ; que l'expert n'avait pas été en mesure d'affirmer que le dérèglement existait avant la vente, ni pour quelle raison le changement de l'injecteur en septembre 2013 n'avait pas remédié au dysfonctionnement ; que par ailleurs, l'expert n'avait pas pu décrire la cause du vice affectant le système d'injection : défectuosité d'une pièce ou mauvais réglage ; qu'enfin, l'expert avait écarté comme cause possible des dommages l'utilisation d'un mauvais carburant tout en constatant que celui utilisé par M. A... n'était pas autorisé et sans avoir fait contrôler sa qualité ; qu'il résultait de ces éléments de nombreuses incertitudes sur les causes de la panne ayant endommagé le moteur du véhicule, cette panne pouvant avoir pour cause un évènement postérieur à la vente ; que l'acquéreur n'ayant pas démontré l'antériorité du dysfonctionnement du système d'injection, le jugement serait infirmé ; Alors 1°) que le vendeur professionnel répond des vices cachés imputables à la vente dès lors que le vice existait en germe lors de la vente et qu'il s'est révélé peu de temps après la livraison ; qu'en ayant énoncé, pour débouter M. A... de ses demandes, qu'une défaillance sous-jacente lors de l'acquisition du véhicule ne pouvait pas être considérée comme une défaillance antérieure à la vente, la cour d'appel a violé l'article 1641 du code civil ; Alors 2°) que la cause exacte du vice caché importe peu dès lors qu'il rend la chose vendue impropre à sa destination ; qu'en déboutant M. A... de ses demandes en raison du silence de l'expert sur le point de savoir si le vice affectant le système d'injection était la « défectuosité d'une pièce » ou « un mauvais réglage », bien que le vendeur dût répondre de l'un comme de l'autre, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1641 du code civil ; Alors 3°) que les juges ne peuvent dénaturer le rapport d'expertise judiciaire ; qu'en énonçant que l'expert judiciaire avait « constaté » que le carburant utilisé par M. A... n'était pas autorisé, quand seul M. P... , conseil technique de la société Fourchet Patrick, avait indiqué que le carburant utilisé par l'acheteur n'était pas celui préconisé, affirmation non entérinée par l'expert judiciaire (rapport p. 15 et 16), la cour d'appel a méconnu l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause.
Cour d'appel de Lyon 1B, Cour de cassation Première chambre civile, décision 18-18.791 du 03/10/2019, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par M. S... W..., domicilié [...] , agissant en qualité d'ancien dirigeant de la société W... et B..., contre l'arrêt rendu le 5 avril 2018 par la cour d'appel de Grenoble (chambre commerciale), dans le litige l'opposant à M. U... K... , domicilié [...] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société W... et B..., défendeur à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 25 juin 2019, où étaient présents : M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller, M. Richard de la Tour, premier avocat général, M. Graveline, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. W..., de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. K... ; Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, l'avis de M. Richard de la Tour, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne M. W... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour M. W... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté que les fautes que M. K... , ès qualités, reprochait à M. W..., ès qualités, dans la gestion de la société W... et B... étaient fondées et, en conséquence, d'AVOIR condamné M. W... à supporter personnellement une partie de l'insuffisance de l'actif, révélé dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société W... et B..., pour un montant de 25.000 €, et d'AVOIR prononcé à l'encontre de M. W... une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer, contrôler directement ou indirectement, toute entreprise commerciale et artisanale, toute personne morale, et ce pendant une durée de six années ; AUX MOTIFS QUE, que selon l'article L. 651-2 du code de commerce qui a été modifié par la loi du 9 décembre 2016 en ce qu'en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l'insuffisance d'actif ne peut être engagée ; que lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté par ce dirigeant en tout ou en partie ; que selon l'article L. 653-8, la sanction de l'interdiction de gérer peut être prononcée contre le dirigeant qui a poursuivi abusivement une activité déficitaire, a détourné une partie de son actif, a fait des biens de l'entreprise un usage au profit d'une autre entreprise dans laquelle il était intéressé, a tenu une comptabilité manifestement incomplète ou a omis de demander l'ouverture d'une procédure collective dans le délai de 45 jours de la survenance de l'état de cessation des paiements ; qu'en l'espèce, le passif admis dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire qui a été ouverte le 13 mars 2009 s'élève à 1.343.554 € sur lequel restait dû au 1er août 2013 un montant de 1.321.261,93 €, outre 57.160,74 € au titre des créances de poursuite d'exploitation c'est-à-dire nées entre le jugement d'ouverture et la procédure de redressement et l'adoption du plan de continuation le 12 mars 2010 ; qu'ainsi c'est à tort que M. W... mentionne cette somme de 57.160,74 € comme étant le montant du passif supplémentaire constaté le 11 octobre 2013 à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire sur résolution du plan de redressement ; que suite au prononcé de la liquidation judiciaire sur résolution du plan le 11 octobre 2013, il a été déclaré un passif de 2.736.101,86 €, dont 2.084.188,62 € échu et 16.145 € au titre des cotisations patronales URSSAF pour les mois de juin à octobre 2013 ; que selon les pièces versées aux débats, l'actif existant dans le cadre de la liquidation judiciaire a seulement procuré un produit de 38.311,79 € ;
Cour d'appel de Grenoble 07, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-17.934 du 25/09/2019, partie 1
que les services fiscaux ont effectué une vérification de comptabilité pour la période du 1er juillet 2010 au 31 décembre 2011, alors que les comptes 2011 n'étaient pas « bouclés » ni donc a fortiori « présentés » par le cabinet Fabre ; que le cabinet d'expertise comptable Alpes Audit Conseil n'a pu établir que courant 2013 la comptabilité 2012 ; que c'est ainsi que les comptes 2012 n'ont pu, non plus, être clos et déposés dans les délais à l'administration fiscale ; qu'il est apparu que neuf véhicules utilitaires appartenant à la société W... et B... avaient fait l'objet de factures de cession en date du 10 août 2012 au profit de la société Alpes Méditerranée Déco, qui est aussi dirigée par M. W..., ces cessions ayant fait l'objet le 10 septembre 2013 seulement, soit postérieurement à la saisine du tribunal par le commissaire à l'exécution du plan, de chèques du cessionnaire pour un montant total de près de 25.000 € ; que c'est le commissaire à l'exécution du plan, constatant qu'était impayée la troisième annuité du plan d'un montant de 65.000 € à échéance de mars 2013 qui a saisi le tribunal qui, par jugement en date du 11 octobre 2013, a prononcé la résolution du plan de redressement de la société ; que ce jugement a constaté la survenance d'un nouvel état de cessation des paiements qu'il a provisoirement fixé au 11 avril 2013 ; que cette date n'a pas été modifiée, caractérisant ainsi un défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours de la survenance de cet état ; qu'en considération de ces éléments, c'est à bon droit et sans qu'il y ait lieu d'aggraver les sanctions prononcées à juste titre que le tribunal a constaté que les fautes que M. K... , ès qualités, reproche à M. W..., en qualité de gérant de la société W... et B..., dans la gestion de cette société sont fondées, condamné M. W... à supporter personnellement une partie de l'insuffisance d'actif révélé dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société W... et B... pour un montant de 25.000 €, prononcé à l'encontre de M. W... une mesure d'interdiction de diriger, gérer, administrer, contrôler directement ou indirectement toute entreprise commerciale et artisanale, toute personne morale, et ce pendant une durée de six années ; qu'il convient donc de confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris (v. arrêt, p. 6 à 8) ; 1°) ALORS QUE le retard dans la déclaration de cessation des paiements n'est pas l'une des fautes susceptibles d'être sanctionnées par l'obligation aux dettes sociales et, partant, ne permet pas de mettre à la charge du dirigeant la totalité ou une partie des dettes de la personne morale ; qu'en se fondant, pour condamner M. W..., gérant de la société W... et B..., à supporter personnellement les dettes sociales à hauteur de 25.000 € et prononcer à son encontre une interdiction de gérer pour une durée de six années, un défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours de la survenance de cet état, la cour d'appel a violé l'article L. 652-1 du code de commerce et le principe de proportionnalité ; 2°) ALORS QUE (subsidiairement) l'omission de la demande d'ouverture d'une procédure collective dans les 45 jours de la cessation des paiements doit être faite sciemment pour être sanctionnée ; qu'en toute hypothèse, en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, que c'était le commissaire à l'exécution du plan, constatant qu'était impayée la troisième annuité du plan de redressement d'un montant de 65.000 € à échéance de mars 2013, qui avait saisi le tribunal qui, par un jugement du 11 octobre 2013, avait prononcé la résolution de ce plan, que ce jugement avait constaté la survenance d'un nouvel état de cessation des paiements, provisoirement fixé au 11 avril 2013, et que cette date n'avait pas été modifiée, caractérisant un défaut de déclaration de l'état de cessation des paiements dans le délai de 45 jours de la survenance de cet état, sans constater que cette omission avait été faite sciemment, la cour d'appel a violé l'article L. 652-1 du code de commerce et le principe de proportionnalité ; 3°) ALORS QUE (subsidiairement) l'omission de la déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal s'apprécie au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture ou dans un jugement de report ;
Cour d'appel de Grenoble 07, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 18-17.934 du 25/09/2019, partie 2
qu'en toute hypothèse encore, en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, que c'était le commissaire à l'exécution du plan, constatant qu'était impayée la troisième annuité du plan de redressement d'un montant de 65.000 € à échéance de mars 2013, qui avait saisi le tribunal qui, par un jugement du 11 octobre 2013, avait prononcé la résolution de ce plan, que ce jugement avait constaté la survenance d'un nouvel état de cessation des paiements, provisoirement fixé au 11 avril 2013, et que cette date n'avait pas été modifiée, quand l'omission de la déclaration de la cessation des paiements dans le délai légal devait être appréciée au regard de la seule date de la cessation des paiements fixée dans le jugement d'ouverture, soit le 13 mars 2009, la cour d'appel a violé l'article L. 652-1 du code de commerce et le principe de proportionnalité ; 4°) ALORS QUE seule une faute ayant contribué à la cessation des paiements est de nature à justifier la condamnation du dirigeant au paiement des dettes sociales ; qu'en ajoutant, pour statuer comme elle l'a fait, que M. W... avait maintenu une activité déficitaire dès lors que le passif admis dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte le 13 mars 2009 s'élevait à 1.343.554 € sur lequel restait dû au 1er août 2013 un montant de 1.321.261,93 €, outre 57.160,74 € au titre des créances de poursuite d'exploitation, nées entre le jugement d'ouverture de la procédure de redressement et l'adoption du plan de continuation le 12 mars 2010, et que c'était à tort que M. W... mentionnait cette somme de 57.160,74 € comme étant le montant du passif supplémentaire constaté le 11 octobre 2013 à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire sur résolution du plan de redressement, quand ce passif était celui qui préexistait dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire initiale et dont le remboursement avait fait l'objet du plan adopté le 12 mars 2010, et, partant, ne pouvait être pris dans le maintien de l'activité déficitaire comme faute de gestion, la cour d'appel a violé l'article L. 652-1 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 5°) ALORS QUE (subsidiairement) la condamnation d'un dirigeant social au paiement de dettes sociales suppose la preuve par le demandeur à l'action de l'insuffisance d'actif, de la faute de gestion commise par le dirigeant et du lien de causalité entre cette insuffisance et cette faute ; qu'en outre, en considérant que le passif admis dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire ouverte le 13 mars 2009 s'élevait à 1.343.554 € sur lequel restait dû au 1er août 2013 un montant de 1.321.261,93 €, outre 57.160,74 € au titre des créances de poursuite d'exploitation, nées entre le jugement d'ouverture de la procédure de redressement et l'adoption du plan de continuation le 12 mars 2010, et que c'était à tort que M. W... mentionnait cette somme de 57.160,74 € comme étant le montant du passif supplémentaire constaté le 11 octobre 2013 à l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire sur résolution du plan de redressement, pour en déduire le maintien par M. W... d'une activité déficitaire, quand ce passif, qui était celui qui préexistait dans le cadre de la procédure de redressement judiciaire initiale, était exclusif d'un lien de causalité entre l'insuffisance d'actif aujourd'hui constatée et les conditions de gestion de l'entreprise entre 2010 et 2013, la cour d'appel a violé l'article L. 652-1 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 6°) ALORS QUE la tenue incorrecte ou incomplète par le dirigeant social de la comptabilité ne constitue pas une faute de gestion légalement sanctionnée ; que, de surcroît, en condamnant comme elle l'a fait M. W... à raison de ce que les comptes 2011 n'étaient pas « bouclés » ni a fortiori « présentés » et que le cabinet d'expertise comptable n'avait pu établir que courant 2013 la comptabilité 2012, outre que les comptes 2012 n'avaient pu être clos et déposés dans les délais à l'administration fiscale, quand ces problèmes comptables ne pouvaient caractériser une faute de gestion de M. W..., la cour d'appel a violé l'article L. 652-1 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 7°) ALORS QUE (subsidiairement) seule une faute ayant contribué à la cessation des paiements est de nature à justifier la condamnation du dirigeant au paiement des dettes sociales ;
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qu'en toute hypothèse, en se bornant, pour retenir la tenue irrégulière ou incomplète de comptabilité par M. W..., à considérer que les comptes 2011 n'étaient pas « bouclés » ni a fortiori « présentés » et que le cabinet d'expertise comptable n'avait pu établir que courant 2013 la comptabilité 2012, outre que les comptes 2012 n'avaient pu être clos et déposés dans les délais à l'administration fiscale, sans rechercher le caractère effectif de la communication par M. W... de la comptabilité à M. K... , et ce à plusieurs reprises, ni prendre en considération l'explication de l'expert-comptable, M. I..., ayant indiqué lui-même avoir établi la comptabilité 2012, le bilan comptable n'ayant pas été arrêté en raison de la conversion du redressement judiciaire en liquidation judiciaire et la saisie comptable 2013 ayant, elle, été réalisée en interne, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 652-1 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité ; 8°) ALORS QUE seule une faute ayant contribué à la cessation des paiements est de nature à justifier la condamnation du dirigeant au paiement des dettes sociales ; qu'enfin, en retenant aussi, pour statuer comme elle l'a fait, la cession de neuf véhicules utilitaires appartenant à la société W... et B... le 10 septembre 2013, soit postérieurement à la saisine du tribunal par le commissaire à l'exécution du plan, pour un montant total de près de 25.000 €, et au profit d'une société dirigée par M. W..., sans rechercher s'il ne s'agissait pas de véhicules dont la société W... et B... n'avait la jouissance que dans le cadre de contrats de leasing, si anciens que leur valeur résiduelle s'avérait inexistante, et dans quelle mesure la société W... et B... ne disposait pas d'autres véhicules lui permettant la poursuite effective de son activité, éléments exclusifs de la caractérisation d'une faute de gestion pour détournement d'actifs, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 652-1 du code de commerce, ensemble le principe de proportionnalité.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant : M. D... B... a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Basse-terre, en date du 25 octobre 2018, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'abus de biens sociaux, blanchiment et recel, a confirmé l'ordonnance de saisie pénale rendue par le juge des libertés et de la détention ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 11 septembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme Planchon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre ; Avocat général : M. Petitprez ; Greffier de chambre : M. Bétron ; Sur le rapport de Mme le conseiller PLANCHON, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général PETITPREZ ; Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Une enquête préliminaire a été diligentée concernant les agissements de M. B..., dirigeant de la société Sotradom, susceptibles de recevoir les qualifications de blanchiment de fraude fiscale, d'abus de biens sociaux et de recel. 3. Les investigations ont, notamment, révélé que M. B... est nu-propriétaire d'un appartement et de ses dépendances, situés dans un immeuble sis [...] , dont la valeur totale a été estimée à 2 400 000 euros tandis que celle de la nue-propriété a été estimée à 2 160 000 euros. 4. Ce bien est, par ailleurs, grevé à hauteur de 1 504 366,75 euros, d'une sûreté bancaire au profit de la caisse de crédit agricole de Guadeloupe. 5. Le 2 juillet 2018, le juge des libertés et de la détention a autorisé la saisie pénale en valeur du bien immobilier susvisé par une ordonnance dont M. B... a interjeté appel. Examen des moyens Sur le moyen unique, pris en ses deuxième et troisième branches 6. Les griefs ne sont pas de nature à être admis, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen unique pris en ses première, quatrième et cinquième branches Enoncé du moyen 7. Le moyen est pris de la violation des articles 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1er du Protocole additionnel n°1 à cette Convention, 131-21 du code pénal, préliminaire, 706-141-1, 706-150, 706-151, 706-152, 591 et 593 du code de procédure pénale. 8. Le moyen critique « l'arrêt attaqué en ce qu'il a refusé d'annuler l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la saisie pénale immobilière et confirmé cette décision » : 1°/ alors que « l'ordonnance attaquée se bornait à reproduire les réquisitions du procureur de la République, sans aucune motivation propre et sans aucune mention relative à un quelconque procès-verbal permettant d'attester de l'exercice effectif par ce magistrat de son contrôle juridictionnel sur la pertinence et le bien fondé de la requête qui lui était soumise ; » 4°/ alors qu' « en jugeant que la saisie peut intervenir avant que le mis en cause ait pu s'expliquer sur les faits alors que les articles 6 et 13 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, lesquels garantissent le droit à un recours effectif, l'égalité des armes et le principe du contradictoire, font obstacle à ce que la décision de saisie pénale immobilière puisse intervenir sans être précédée d'un débat contradictoire ; » 5°/ alors que « l'absence de possibilité de présenter ses observations au stade de l'enquête prive le demandeur de toute procédure équitable et de la possibilité effective d'assurer sa défense ». Réponse de la cour Sur le moyen pris en sa première branche 9. Pour rejeter l'exception de nullité prise de ce que l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la saisie en valeur d'un bien immobilier procéderait par simple référence à la requête du procureur de la République, l'arrêt attaqué énonce que le juge n'a pas procédé ainsi mais par la reprise des éléments contenus dans les réquisitions. 10. Les juges ajoutent que cette manière de motiver une décision, qui ne caractérise pas une absence de contrôle de la part du juge ni une absence de motivation personnelle, signifie que le magistrat n'a pas estimé que les éléments qui lui étaient soumis étaient susceptibles de meilleurs développements.
décision 18-86.779 du 25/09/2019, partie 1
11. Les juges concluent que la défense, qui présuppose l'absence d'effectivité de contrôle juridictionnel et de garantie suffisante "contre le risque d'une atteinte disproportionnée à la vie privée des personnes concernées", n'est pas en mesure de l'établir ni de démontrer l'existence d'un grief. 12. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de cassation que dès lors que le juge des libertés et de la détention ordonne ou autorise un acte qui porte atteinte à un droit fondamental, l'ordonnance qu'il rend ne peut se limiter à renvoyer aux motifs de la requête et doit contenir une motivation justifiant, en droit et en fait, de la nécessité de la mesure (Crim., 8 juillet 2015, pourvoi n° 15-81.731, Bull. crim. 2015, n° 174 ; Crim., 23 novembre 2016, pourvoi n° 15-83.649, Bull. crim. 2016, n° 307). 13. En l'espèce, l'ordonnance autorisant une saisie immobilière est de nature à porter atteinte au droit de propriété. 14. En se déterminant par les motifs susvisés, la chambre de l'instruction a justifié sa décision. 15. En effet, d'une part, en reproduisant les motifs énoncés dans la requête du ministère public qui analysent les éléments de fait et de droit rendant nécessaire la saisie, le juge des libertés et de la détention a justifié de la nécessité de la mesure et s'est conformé à l'exigence de motivation prévue à l'article 706-150 du code de procédure pénale. 16. D'autre part, la circonstance que l'ordonnance autorisant la saisie pénale en valeur reproduise les motifs de la requête du ministère public ne peut, à elle seule, laisser présumer que le juge des libertés et de la détention n'a pas exercé son contrôle sur la régularité, le bien-fondé et l'opportunité de la mesure de saisie. 17. Dès lors, le grief ne peut qu'être écarté. Sur le moyen pris en ses quatrième et cinquième branches 18. Pour confirmer l'ordonnance de saisie pénale en valeur, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé les dispositions de l'article 131-21 alinéa 9, du code pénal et que la confiscation en valeur consiste à confisquer un bien dont la valeur équivaut au produit de l'infraction et peut porter sur tout bien, quelle que soit l'origine licite ou illicite de celui-ci et quelle que soit sa date d'acquisition par rapport à la date de commission de l'infraction, relève que M. B... est susceptible d'encourir la peine complémentaire de confiscation au regard des infractions pour lesquelles il est mis en cause dont le produit peut être estimé à la somme de 1 431 673 euros. 19. Les juges ajoutent que la part confiscable de l'appartement saisi, dont le demandeur est nu-propriétaire est estimée, à la date de la saisie, à 655 633,25 euros, et soulignent que l'absence de saisie pourrait, en cas de dissipation de la valeur de ce bien, priver la juridiction de jugement de toute perspective de confiscation. 20. La cour conclut que la saisie pénale, qui est une mesure conservatoire destinée à garantir l'exécution de la peine de confiscation, peut intervenir à tout moment de l'enquête, y compris avant que le mis en cause ait pu s'expliquer sur les faits qui lui sont reprochés, aucun texte n'exigeant le contraire, et que le mis en cause bénéficie de la possibilité de contester la saisie puis de communiquer tous éléments utiles à sa défense devant la juridiction de jugement qui seule pourra prononcer la confiscation du bien saisi, ce qui est de nature à garantir une procédure équitable et contradictoire, préservant l'équilibre des droits des parties, en présence du ministère public et de la défense. 21. La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme en matière de saisie pose différents critères d'appréciation pour juger du bien-fondé de la mesure. 22. Tout d'abord, elle exige que la mesure de saisie soit prévue par la loi et poursuive un but d'intérêt général (CEDH Smirnov c. Russie n° 55 et 57). 23. Elle vérifie que l'ingérence ainsi apportée dans l'exercice du droit de propriété est proportionnée au but poursuivi, un juste équilibre devant être ménagé entre l'intérêt général et la protection des droits fondamentaux de l'individu (CEDH Smirnov c. Russie n° 57). 24. Elle s'assure qu'elle est entourée de garantie procédurales (CEDH, 13 juillet 2010, Tendam c/ Espagne, § 49) et que le propriétaire du bien saisi et les tiers intéressés disposent d'un recours effectif contre cette décision. 21. Les jurisprudences en la matière du Conseil constitutionnel (Cons. Cons, décisions n° 2011-208 QPC du 13 janvier 2012 ; n° 2014-375 QPC et autres du 21 mars 2014 ; n° 2014-406 QPC du 9 juillet 2014) et de la Cour de cassation (Crim., 28 juin 2017, pourvoi n° 17-80.987 ; Crim., 28 février 2017, pourvoi n° 16-83.773) sont fondées sur des critères identiques. 22. En se déterminant par les motifs susvisés, la chambre de l'instruction a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées.
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23. En effet, d'une part, aucune disposition du code de procédure pénale ne fait obligation au juge des libertés et de la détention d'entendre la personne concernée avant d'autoriser une mesure de saisie. 24. D'autre part, la saisie immobilière en valeur, qui est une mesure temporaire prévue par les articles 706-150 à 706-152 du code de procédure pénale et qui est destinée à garantir une éventuelle peine complémentaire de confiscation en application de l'article 131-21 du code pénal, poursuit un but d'intérêt général, est prononcée par un juge qui doit s'assurer, en l'espèce, que le bien saisi a une valeur au plus équivalente à celle du produit de l'infraction. 25. Elle est en outre entourée de garanties procédurales permettant, notamment, aux personnes concernées, qui ne sont pas, du seul effet de la saisie, privées de leur droit de propriété, d'exercer un recours contre cette mesure conformément aux dispositions de l'article 706-150, alinéa 2, et de saisir l'autorité judiciaire compétente d'une demande de restitution à chacune des phases de la procédure en application des articles 41-4, 99 et 479 du code de procédure pénale, les juges étant tenus de se prononcer dans un délai raisonnable, la chambre de l'instruction, qui n'a fait qu'appliquer la loi en vigueur, 26. Dès lors le moyen ne peut qu'être écarté. 27. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme ; PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-cinq septembre deux mille dix-neuf ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
décision 18-86.779 du 25/09/2019, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par M. T... K..., domicilié [...] , contre l'arrêt rendu le 21 mars 2018 par la cour d'appel de Reims (chambre sociale), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Tirmant Raulet, société civile professionnelle, dont le siège est [...] , prise en qualité de mandataire judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Tanousse, [...] , 2°/ au Centre de gestion et d'études AGS-CGEA d'Amiens, dont le siège est [...] , défendeurs à la cassation ; Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 18 juin 2019, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pion, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Grivel, avocat général, Mme Jouanneau, greffier de chambre ; Sur le rapport de M. Pion, conseiller, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de M. K..., de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de la société Tirmant Raulet, ès qualités, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique : Vu le principe selon lequel il est interdit aux juges de dénaturer les documents de la cause ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que, dans le cadre d'une opération antifraude, les militaires de la gendarmerie ont procédé le 14 avril 2014, au contrôle du magasin Proxi Marché d'Hermonville ; que le 23 avril 2014, M. K... a signé un contrat de travail en qualité d'employé de vente au sein du magasin Proxi Marché avec la société Tanousse (la société) ; que par jugement du tribunal correctionnel de Troyes du 26 novembre 2014, le gérant du magasin, M. K... a été reconnu coupable et condamné pour des faits d'emploi d'un étranger non muni d'une autorisation de travail salarié et de travail dissimulé ; que ce jugement a été confirmé par arrêt du 21 octobre 2015 de la cour d'appel de Reims ; que par jugement du 12 janvier 2016, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la société et désigné la SCP Tirmant Raulet en qualité de liquidateur judiciaire ; qu'estimant être au bénéfice d'un contrat de travail depuis 2005, M. K... a saisi la juridiction prud'homale ; Attendu que pour limiter la créance de rappels de salaire de M. K... aux seuls salaires dus à compter du 1er mai 2011, l'arrêt retient que si les motifs des décisions pénales rapportent les déclarations de M. K... aux termes desquels il avait été embauché par le gérant en 2005, et même celles du prévenu reconnaissant avoir recruté K... en 2005, les termes lapidaires de cette motivation ne permettent pas suffisamment d'établir si c'est en qualité de salarié qu'il a été embauché, et non sous un autre statut, notamment celui de gérant de succursale, qu'il ne peut en être suffisamment déduit l'existence d'un lien de subordination dès l'année 2005, et qu'il convient de retenir que le contrat de travail a commencé le 1er mai 2011 ; Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de l'arrêt du 21 octobre 2015 de la cour d'appel de Reims qu' "interrogé sur ces faits le 24 avril 2014, M. K... confirmait qu'il avait recruté T... K... en 2005, qu'il travaillait de 8h à 21h sept jours sur sept, pour un salaire de 900 par mois. Il prenait 3 semaines de vacances en moyenne. Il ne l'avait jamais déclaré », la cour d'appel en a dénaturé les termes clairs, en violation du principe susvisé ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il limite les créances de M. K... au passif de la société Tanousse aux sommes de 6 284,21 euros à titre de rappels de salaire du 1er mai 2011 au 31 mars 2014, 628,42 euros au titre des congés payés afférents et de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires, l'arrêt rendu le 21 mars 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ; Condamne la SCP Tirmant Raulet, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Tanousse, aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCP Tirmant Raulet, ès qualités, à payer à M. K... la somme de 3 000 euros ;
Cour d'appel de Reims, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.874 du 18/09/2019, partie 1
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, signé par M Ricour, conseiller le plus ancien, en ayant délibéré, conformément aux articles 452 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour M. K.... Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement qui avait fixé la créance de M. K... au passif de la liquidation judiciaire de la Sarl Tanousse aux sommes de 213 956,62 euros à titre de rappel de salaire pour la période de juin 2005 à mars 2014, 15 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des repos compensateurs et hebdomadaires, et d'avoir fixé la créance aux seules sommes de 6 284,21 euros à titre de rappel de salaire du 1er mai 2011 au 31 mars 2014, outre les congés payés y afférents, 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour non-respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires ; AUX MOTIFS QUE M. K... soutient avoir travaillé sans discontinuer tous les jours de la semaine y compris les samedis, dimanches et jours fériés de 8 heures à 21 heures depuis 2005 ; qu'en indiquant que la condamnation pénale du gérant de la société Tanousse pour des faits de travail dissimulé le 14 avril 2014 ne permettaient pas d'affirmer que l'embauche de M. K... remontait à 2005, l'AGS vient ainsi remettre en cause l'existence du contrat de travail dont se prévaut l'intéressé ; que M. K... ne saurait utilement se prévaloir du redressement de cotisations opéré par l'Urssaf ayant abouti à reconstituer son salaire depuis 2005 à 213 956,62 euros ; qu'il résulte de la lettre d'observations de l'organisme social que le rappel de cotisations assis sur le salaire reconstitué de M. K..., portant sur la période commençant le 1er janvier 2009, a été établi sur la base des seules déclarations de celui-ci ; qu'en l'absence du représentant légal de l'assujetti au jour du contrôle, cette lettre n'a pas fait état du recueil de la version du gérant de la société Tanousse ; qu'aucune autre pièce émanant de l'Urssaf et recueillant les observations représentant légal du cotisant redressé n'a été produite ; qu'il appartient à celui qui se prévaut de l'existence d'un contrat de travail d'apporter la preuve de son existence ; que le contrat de travail se caractérise essentiellement par l'existence d'un lien de subordination ; que si M. K... produit des dizaines d'attestations d'habitants de la commune où se situe l'établissement de la société Tanousse, dont ils étaient clients, aucune ne met en évidence un quelconque lien de subordination de celui-ci à l'employeur, pour se borner à faire état de la seule présence discontinue de M. K... dans l'établissement depuis 2005 ; qu'il y a lieu de relever la récurrence des attestations rapportant sa présence dans « son » commerce, magasin ou épicerie ; qu'il convient de relever l'expression de la croyance de certains attestants qu'il était propriétaire du fonds, ou patron, ou gérant, ou à son compte, ou qu'il « tenait » le magasin ou l'épicerie ; que cette ambiguïté est encore plus marquée dans l'attestation de M. et Mme G... qui soulignent avoir constaté l'exercice par l'intéressé de son activité commerciale de 2005 au 14 avril 2014 au sein de son magasin, ou de celles le qualifiant de commerçant ; que la preuve quelconque d'un lien de subordination n'est pas plus rapportée par la production d'un extrait de journal local ou municipal d'Hermonville de décembre 2005, faisant état de l'ouverture du magasin, ou d'une coupure de presse d'avril 2014 ; que si celle-ci fait état de l'embauche de M. K... à compter du 1er octobre 2005 pour tenir le magasin proxi d'Hermonville, il ne cite pas sa source, de sorte qu'il ne peut être exclu qu'elle ne soit en réalité M. K... lui-même ; que de plus, si ce document rapporte notamment les propos du gérant de la société Tanousse, reconnaissant le principe d'un lien de subordination à l'égard de la société, indiquant avoir proposé à l'intéressé de rédiger une promesse d'embauche courant février 2014, ce locuteur ne vient aucunement indiquer la date de commencement effectif de la relation de travail ; que la déclaration préalable à l'embauche du 22 avril 2014 fait état d'une embauche en CDI à compter du 23 avril ; que le jugement correctionnel du 26 novembre 2014 confirmé par arrêt du 21 octobre 2015 a déclaré le gérant de la société Tanousse coupable de travail dissimulé pour la seule journée du 14 avril 2014 ;
Cour d'appel de Reims, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.874 du 18/09/2019, partie 2
que les motifs de ces jugement et arrêt rapportent les déclarations de M. K... aux termes desquelles il aurait été embauché par le gérant en 2005 sans permettre d'établir si c'est en qualité de salarié qu'il a ainsi été embauché, et non sous un autre statut, comme notamment celui de gérant de succursale de commerce de détail d'alimentation ; que de la sorte, il ne peut pas être suffisamment déduit l'existence d'un lien de subordination propre au contrat de travail dès 2005 ; que les bulletins de paie produits concernent la période du 1er mai 2011 au 31 mars 2014 ; que le certificat de travail fait état d'une date d'embauche au 1er mai 2011 ; qu'il conviendra de retenir que le contrat de travail a commencé le 1er mai 2011 ; ALORS, DE PREMIERE PART, QUE les juges ne peuvent modifier les termes du litige dont ils sont saisis ; que pour débouter M. K... de sa demande de rappel de salaires pour la période antérieure au 1er mai 2011, l'arrêt retient que n'est pas démontrée l'existence d'un lien de subordination dès 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors que ni le liquidateur, ni l'AGS n'avaient discuté et contesté l'existence d'un lien de subordination, la cour d'appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé l'article 4 du code de procédure civile ; ALORS, DE DEUXIEME PART, QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire respecter et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; que si, lorsque la procédure est orale, les moyens soulevés d'office sont présumés avoir été débattus contradictoirement à l'audience, il peut être apporté la preuve contraire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il ne résulte ni de l'arrêt ni des pièces de la procédure que l'AGS ou le liquidateur ait soutenu devant les juges du fond que si M. K... avait été embauché en 2005, rien ne permettait d'établir si c'était en qualité de salarié et non sous un autre statut, notamment celui de gérant de succursale de commerce de détail ou d'alimentation, de sorte que n'était pas établie l'existence d'un lien de subordination à compter de 2005, la cour d'appel, qui a relevé d'office ce moyen, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, sur les conditions dans lesquelles M. K... avait de manière non contestée travaillé pour le compte de la Sarl Tanousse, a violé l'article 16 du code de procédure civile ; ALORS, DE TROISIEME PART, QU' il est interdit au juge de dénaturer les documents de la cause ; qu'en énonçant que les motifs du jugement correctionnel du 26 novembre 2014 confirmé par arrêt du 21 octobre 2015 rapportant les déclarations de M. K... aux termes desquelles il aurait été embauché par le gérant en 2005, lapidaires, « ne permettent pas suffisamment d'établir si c'est en qualité de salarié qu'il a ainsi été embauché, et non sous un autre statut, comme notamment celui de gérant de succursale de commerce de détail d'alimentation », la cour d'appel a dénaturé ces décisions mentionnant que M. K... « confirmait qu'il avait recruté T... K... en 2005, qu'il travaillait de 8h à 21h sept jours sur sept, pour un salaire de 900 par mois. Il prenait 3 semaines de vacances en moyenne. Il ne l'avait jamais déclaré » (jugement du 26 novembre 2014 p. avant-dernier § ; arrêt du 21 6 octobre 2015 p.5, avant-dernier §), dont il ressortait sans aucune ambiguïté que M. K... avait été embauché dès 2005 en qualité de salarié, en violation du principe susvisé ; ALORS, DE QUATRIEME ET DERNIER PART, QU' en n'ayant pas tiré les conséquences légales de ses constatations selon lesquelles le gérant de la Sarl Tanousse avait reconnu le principe d'un lien de subordination de M. K... à l'égard de la société (p. 6, 5ème) et l'avoir recruté en 2005 (p. 6, antépénultième §), ce qui, en l'absence de constatation d'un changement des conditions dans lesquelles travaillait M. K..., établissait l'existence d'un contrat de travail dès son recrutement en 2005, la cour d'appel a violé l'article L. 1221-1 du code du travail.
Cour d'appel de Reims, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-16.874 du 18/09/2019, partie 3
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par la société Groupe Meac, société par actions simplifiée, dont le siège est [...], venant aux droits de la société Carmeuse France, contre l'arrêt rendu le 6 juin 2017 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre), dans le litige l'opposant au directeur général des douanes et droits indirects, domicilié [...], défendeur à la cassation ; La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 18 juin 2019, où étaient présentes : Mme Mouillard, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, Mme Orsini, conseiller doyen, Mme Labat, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Groupe Meac, de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du directeur général des douanes et droits indirects, l'avis de Mme Beaudonnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Sur le moyen unique : Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 6 juin 2017), que la société Carmeuse France, aux droits de laquelle est venue la société Groupe Meac (la société Meac) extrait du calcaire d'une carrière située à Verfeuil (Gard), qu'elle commercialise sous forme de poudre ; qu'ayant procédé à un contrôle, au terme duquel elle a estimé qu'une partie de la production de cette société devait être assujettie à la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), en ce que les produits livrés n'étaient pas destinés à des industries du ciment, de la chaux, de la sidérurgie, des charges minérales ou à enrichir les terres agricoles, l'administration des douanes lui a notifié une infraction de défaut de déclaration des quantités de granulats assujettis à la TGAP ; qu'après mise en recouvrement des droits correspondants et rejet de sa contestation, la société Meac a saisi le tribunal de grande instance aux fins d'annulation de l'avis de mise en recouvrement ; Attendu que la société Meac fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande alors, selon le moyen : 1°/ qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 2001-172 du 21 février 2001, les matériaux visés par l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes, dont l'utilisation ou la livraison pour la première fois sur le marché intérieur en suite de leur extraction sont assujetties à la taxe générale sur les activités polluantes, sont ceux des types généralement destinés aux travaux publics, au bâtiment et au génie civil ; qu'en se contentant de relever, pour considérer que la société Meac devait être assujettie à cette taxe, que ce dispositif était simplement descriptif, que "généralement" n'équivalait pas à "exclusivement" et qu'en conséquence, il pouvait concerner d'autres usages, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée s'il ne résultait pas de ce dispositif que pour taxer l'usage ou la livraison de tels matériaux, il fallait qu'ils soient majoritairement destinés aux bâtiments, travaux publics et génie civil en sorte qu'en l'espèce, la part du calcaire extraite par la société Meac, destinée très minoritairement à la construction, ce qui était représentatif de l'activité des entreprises du secteur à l'échelon national, ne pouvait la rendre redevable de cette taxe, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes et 1er du décret n° 2001-172 du 21 février 2001 ; 2°/ qu'aux termes du décret n° 2001-172 du 21 février 2001, les matériaux visés par l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes, dont l'utilisation ou la livraison pour la première fois sur le marché intérieur en suite de leur extraction sont assujetties à la taxe générale sur les activités polluantes, sont ceux des types généralement destinés aux travaux publics, au bâtiment et au génie civil, à l'exclusion notamment du calcaire industriel lorsqu'il est destiné à être utilisé pour les seules industries du ciment, de la chaux, de la sidérurgie, des charges minérales et à enrichir les terres agricoles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Meac transformait le calcaire industriel qu'elle extrayait en charges minérales sous la forme d'une poudre fine qu'elle commercialisait ; qu'en considérant qu'elle devait être assujettie à la taxe générale sur les activités polluantes et en validant l'avis de mise en recouvrement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes et l'article 1er décret n° 2001-172 du 21 février 2001 ;
Cour d'appel de Montpellier 02, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 17-24.032 du 18/09/2019, partie 1
3°/ qu'en se contentant de relever, pour décider d'assujettir la société Meac à la taxe générale sur les activités polluantes, que la simple lecture des marchés destinataires de ses produits listés par l'administration fiscale indiquait que la destination du calcaire industriel qu'elle extrayait n'était pas celle de charges minérales, quand elle avait relevé que la société Meac transformait en poudre fine le calcaire qu'elle extrayait, procédant ainsi à la commercialisation de charges minérales en sorte que la destination de ces produits était sans emport, la cour d'appel, qui a statué par une motivation inopérante à justifier cet assujettissement, a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes et de l'article 1er du décret n° 2001-172 du 21 février 2001 ; Mais attendu, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles 266 sexies I 6 a) du code des douanes et 1er du décret n° 2001-172 du 21 février 2001 que sont soumis à la TGAP, lorsqu'ils sont livrés pour la première fois sur le marché intérieur, les matériaux d'extraction généralement destinés aux travaux publics, au bâtiment et au génie civil, à l'exclusion, notamment, du calcaire industriel, lequel s'entend du calcaire destiné à être utilisé pour les seules industries du ciment, de la chaux, de la sidérurgie, des charges minérales ou à enrichir les terres agricoles ; qu'il s'en déduit que sont visés par ces textes les matériaux d'extraction dont l'utilisation la plus courante relève de ces activités, peu important qu'il ne s'agisse pas d'une utilisation exclusive ; que la cour d'appel, qui a statué en ce sens, n'encourt pas le grief de la première branche ; Et attendu, en second lieu, que le fait générateur de la taxe étant la première livraison ou la première utilisation des matériaux, il n'importe que le producteur exerce lui-même une activité d'industrie des charges minérales, sans influence sur l'application des textes susvisés, seule devant être vérifiée, aux fins d'exonération éventuelle, la destination ou l'utilisation des matériaux livrés ; que le moyen qui, en ses deuxième et troisième branches, postule le contraire, manque en droit ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Groupe Meac aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer au directeur général des douanes et droits indirects la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Groupe Meac Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'Avoir débouté la société Groupe MEAC de l'ensemble de ses demandes dirigées contre M. le directeur général des douanes et des droits indirects et d'Avoir confirmé en toutes ses dispositions l'avis de mise en recouvrement n°903/13/271 du 21 mars 2013 pour un montant de 86 959 € ; Aux motifs propres que, la société Carmeuse est spécialisée dans la production et la vente de carbonate de calcium (calcaire) industriel et de ses dérivés, provenant notamment du site d'extraction de Verfeuil (30630) ; qu'elle y exploite une carrière pour en tirer ce calcaire industriel, qu'elle transforme puis commercialise ensuite elle-même en France pour diverses utilisations, dont elle soutient qu'elles ne sont pas généralement destinées au secteur du Bâtiment et des Travaux Publics (BTP) ; qu'elle en tire une première cause d'exonération, soutenant que le fait que le calcaire industriel soit destiné au BTP est une condition légale de son assujettissement à la TGAP ; mais que cette interprétation de l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes et de l'article 1er du décret du 21 février 2001 est erronée ; qu'il résulte en effet de la rédaction de ce dernier texte qu'il est à cet égard simplement descriptif en précisant que les matériaux concernés par ses dispositions sont ceux « généralement » destinés aux bâtiment, aux travaux publics et au génie civil, ce qui signifie qu'il ne s'agit pas d'une condition d'usage exclusive mais seulement descriptive, les matériaux concernés pouvant être destinés à d'autres usages, moins généraux ; que ceci sous réserve des exonérations particulières pour le calcaire industriel notamment, qui suivent dans ce même texte règlementaire ; que cette interprétation, se trouve confirmée par l'exonération spéciale prévue pour les calcaires industriels destinés à enrichir les terres agricoles, laquelle n'aurait pas lieu d'être s'agissant d'une destination qui ne relève manifestement pas de l'industrie du bâtiment, des travaux publics ni du génie civil ; que la société Carmeuse considère ensuite qu'elle n'est pas assujettie, pour cette activité, à la TGAP, puisque l'article 1er du décret du 21 février 2011 prévoit expressément l'exclusion du champ d'application de l'article 266 sexies I-6 du code des douanes, au sein des matériaux d'extraction visés par ce dernier texte, pour le calcaire industriel ;
Cour d'appel de Montpellier 02, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 17-24.032 du 18/09/2019, partie 2
mais que le décret du 21 février 2001 restreint expressément cette exonération de façon spéciale, à certaines destinations faites à l'usage de ce matériau, dérogeant ainsi à la règle générale précédemment formulée ; que lors de son contrôle ayant débuté le 28 septembre 2011, l'administration des douanes et droits indirects (les douanes) a dressé trois procès-verbaux de constat les 28 septembre 2011, 16 février 2012 et 19 mars 2013, ce dernier relevant une infraction concernant la TGAP, notifiée le même jour ; que les douanes ont relevé la livraison par la société Carmeuse, de 2009 à 2011 inclus, de 434 793,39 tonnes de calcaire extrait de ce site, sans avoir acquitté la TGAP qu'elle estimait applicable ; que les douanes ont donc calculé que la taxe éludée s'élevait à la somme de 86.959,00 €, qui a ensuite fait l'objet d'un avis de mise en recouvrement notifié en date du 21 mars 2013, dont la contestation par la société Carmeuse est l'objet de la saisine du tribunal de grande instance de Montpellier puis de la présente cour d'appel ; mais que compte-tenu de la rédaction de l'article 1er du décret du 21 février 2001, l'administration des douanes exige de la société qui extrait le calcaire industriel, pour la faire bénéficier de l'exonération prévue, qu'elle rapporte la preuve de l'usage auquel sont destinés les matériaux produits, afin d'établir qu'ils ont bien été destinés aux « seules industries du ciment, de la chaux, de la sidérurgie, des charges minérales et à enrichir les terres agricoles» ; que l'administration des douanes soutient que cette preuve de l'usage du calcaire industriel, de nature à exonérer la société du paiement de la TGAP, doit être rapportée notamment par la production d'attestations de ses clients, quant à l'utilisation à laquelle le calcaire industriel était destinée ; que concernant la société Carmeuse, elle a toutefois relevé, au vu des pièces comptables consultées, qu'une partie du calcaire avait été destinée à l'enrichissement des terres agricoles ou la sidérurgie et lui a fait bénéficier de l'exonération prévue en ce cas, malgré l'absence d'attestation de ses clients ; que pour les autres quantités produites, les douanes ont relevé, selon les pièces comptables consultées, qu'elles avaient été destinées à l'industrie de l'alimentation animale, des asphaltes, du filler pour béton, du traitement thermique des fours, de fabrication de fertilisants, de la fibre de verre, de la verrerie, de la fonderie, de la fabrication d'enduits de façade, de la fabrication de béton et du traitement des fumées ; qu'elle relève qu'aucune de ces destinations ne bénéficie de l'exonération fiscale prévue à l'article 1er du décret du 21 février 2001 : que pour la SA Carmeuse, l'ensemble de ces utilisation relève de la catégorie des industries des charges minérales, visées dans le décret du 21 février 2001, ce que conteste l'administration des douanes ; que cette dernière propose la définition suivante de l'industrie des charges minérale, cette industrie regroupant : « l'ensemble des industries qui extraient sélectivement les matériaux minéraux en fonction des gisements géologiques et effectue les premiers traitements. Ces derniers peuvent être mécaniques (broyage, concassage, etc.) chimiques (précipitation), thermiques (déshydratation, calcination) ou physiques (granulométrie sélective) et sont fonction des spécifications requises pour les nombreuses applications ultérieures (agroalimentaire, chimie, pharmacien, électrique, etc..). ; que selon cette définition, la SA Carmeuse est elle-même une industrie des charges minérales, notamment par la transformation qu'elle fait du calcaire brut en fine poudre commercialisée ensuite, mais ce n'est pas le cas de ses clients listés par l'administration des douanes, destinataires des quantités de calcaire industriel relevées lors du contrôle pour les années 2009, 2010 et 2011 ; que la société Carmeuse rappelle la définition des charges minérales, donnée par le Memento « Roches et Minéraux industriels » publié par le Ministère de l'Industrie en décembre 2000 : « Les charges sont les produits crus ou cuits, réduits en fines poudres, (..) qui entrent dans la composition des produits élaborés. Leur emploi est courant et bien connu en fabrication de papiers, peintures ou plastiques » ; qu'elle considère à cet égard que si elle avait vendu le calcaire brut, non transformé, à une entreprise tierce qui l'aurait réduit en poudre fine, elle aurait donc cédé ce matériau à une industrie de charge minérale, ce qui l'aurait exonérée de la TGAP ; alors qu'en transformant elle-même ce calcaire, on lui réclame la TGAP pour le même matériau et les mêmes usages ultérieurs que si elle avait utilisé une entreprise intermédiaire alors exonératoire pour elle ; mais que les dispositions susvisés de l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes s'appliquent, en matière de taxation soit à celui qui livre, pour la première fois sur le marché intérieur le calcaire industriel, soit à celui qui utilise, pour la première fois, ce calcaire industriel, dans l'hypothèse où il n'aurait pas déjà été taxé au titre de la TGAP ; que dès lors que la société Carmeuse, après avoir extrait ce calcaire, activité industrielle non taxable à la TGAP en elle-même, le transforme en charge minérale sous forme de poudre fine, autre activité non taxable à la TGAP, mais le revend ensuite à ses clients, elle leur livre les matériaux transformés ;
Cour d'appel de Montpellier 02, Cour de cassation Chambre commerciale financière et économique, décision 17-24.032 du 18/09/2019, partie 3
que cette livraison, pour la première fois sur le marché intérieur, relève donc de l'application de la TGAP, sauf à justifier que certaines livraisons sont destinées à des usages spécialement exonérés par les textes susvisés : enrichissement de terres agricoles, industrie du ciment, de la chaux, de la sidérurgie ou des charges minérales ; qu'il importe peu en effet que la société Carmeuse se qualifie elle-même d'industrie des charges minérales, dès lors que l'exonération de la TGAP n'est pas applicable à ce type d'industrie mais seulement aux achats auxquels elle procède, de matériaux d'extraction ; que par la suite, après son activité de transformation, par exemple en poudre fine, du calcaire industriel, l'industrie des charges minérales qui livre à ses clients ce produit, pour la première fois sur le marché intérieur, ou qui l'utilise elle-même, est également redevable de la TGAP, sauf exonération du fait de la destination particulière du matériau, comme indiqué ci-dessus, sans rupture de l'égalité devant les charges publiques ; que la société Carmeuse est donc bien redevable de la TGAP pour les 434.793 tonnes de calcaire revendues à ses clients, pour des destinations autres que celles visées dans les cas d'exonération particulières susvisées ou dont la destination est inconnue ; qu'il appartient en effet au redevable qui invoque un cas particulier d'exonération de la TGAP applicable à son activité économique, de rapporter la preuve qu'il relève bien de ce cas, ce que ne fait pas en l'espèce la société Carmeuse ; qu'elle argue aussi qu'en sa qualité d'industrie pratiquant l'extraction du calcaire et le transformant en charge minérale, sous forme de poudre fine, elle ne peut non plus se produire d'attestation à elle-même sur sa destination ; mais que c'est à tort qu'elle soutient qu'on exige d'elle une preuve impossible à rapporter sous forme d'attestation de ses clients sur la destination des matériaux livrés, au motif qu'elle transforme elle-même le calcaire industriel qu'elle extrait ; qu'en effet la TGAP ne s'applique pas à l'extraction ni à la transformation en charge minérale, qu'elle pratique, mais à la livraison, pour la première fois sur le marché intérieur, du calcaire industriel transformé ; que c'est cette activité économique de la société Carmeuse, de vente, emportant la livraison à ses clients du calcaire industriel qui est taxable et rien n'empêche le vendeur de réclamer à ses clients acquéreurs une attestation de leur part quant à l'usage auquel ils destinent ce matériau, permettant de justifier de la condition d'exonération spéciale que la société Carmeuse invoque ; qu'en outre, comme l'a exactement relevé le tribunal de grande instance de Montpellier dans son jugement déféré, lors du contrôle la SA Carmeuse a produit 39 attestations de ses clients pour justifier certaines de ses assertions, démontrant ainsi qu'elle avait la possibilité d'obtenir de telles attestations ; que la société Carmeuse soutient aussi que l'exigence de rapporter la preuve de l'usage par une attestation, résultant du Bulletin Officiel des douanes nº6813 du 31 mars 2009 et de la circulaire du 9 avril 2013, est abusive de la part des douanes, qui rajoute aux obligations légales et règlementaires, qu'elles n'ont pas le pouvoir de modifier, selon la hiérarchie des normes en vigueur, mais seulement d'interpréter ; que la cour relève cependant que les douanes ont appliqué l'exonération de la TGAP pour une partie du calcaire industriel vendu destiné à l'enrichissement de terres agricoles ou à la sidérurgie (12 081,72 tonnes), sur la seule base de la comptabilité de la société Carmeuse, sans exiger d'elle une attestation de ses clients, ce qui démontre qu'elle demeurait libre de proposer un autre moyen de preuve de la destination des matériaux livrés à ses clients, même aux yeux de l'administration des douanes ; mais qu'en toute hypothèse, dans la présente instance, la société Carmeuse ne propose aucune autre preuve de la destination différente du calcaire industriel ayant fait l'objet du contrôle litigieux au titre des années 2009, 2010 et 2011, telle que relevée par les services des douanes, peu important donc qu'elle n'ait pas fourni d'attestation de ses clients à cet égard ; que le calcul du montant de la TGAP, en fonction des quantités de calcaire industriel transformé livré en 2009, 2010 et 2011 par la société Carmeuse à ses clients n'étant pas particulièrement contesté, de même que la régularité de la procédure administrative et judiciaire de contestation suivie, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a refusé d'annuler et au contraire retenu comme fondé et justifié l'avis de mise en recouvrement nº903/13/271 du 21 mars 2013 pour un montant de 86 959,00 €, au titre de la TGAP ; Et aux motifs éventuellement adoptés que, il appartient à la société Carmeuse, demanderesse, qui prétend avoir fait à tort l'objet d'une taxation, de rapporter la preuve de ce que les produits sur lesquels l'administration prétend asseoir la TGAP litigieuse sont exclus de cette taxe par la loi, et ce autrement que par la référence à son propre site internet, preuve qu'elle se constitue à elle-même, à partir d'un medium dont la vocation publicitaire et commerciale s'accommode mal de la rigueur scientifique et juridique de la preuve à rapporter en l'espèce ;
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que pour cela, il lui appartient d'abord de démontrer que les produits de la carrière de Verfeuil, seul site concerné par la présente procédure, sont du calcaire ou de la dolomie industriels, non pas selon l'acception générale de l'expression, mais au sens des textes pertinents, c'est-à-dire « destinés à être utilisés pour les seules industries du ciment, de la chaux, de la sidérurgie, des charges minérales et à enrichir les terres agricoles » ; qu'il résulte déjà de l'arrêté préfectoral n°09-032N l'autorisant à exploiter le site de Verfeuil qu'elle y procède, aussi bien à l'extraction de « calcaire pour la production de granulats destinés à l'industrie, à l'agriculture, au secteur du BTP, que les installations connexes, en l'espèce une station de transit des matériaux extraits ; que cet arrêté stipule expressément (article 12.5) que Carmeuse est soumise à la TGAP ; qu'il résulte ensuite du pv n°3 dressé par les agents de la DRDDI qu'aucune TGAP n'a été versée au titre de la production du site de Verfeuil, l'exploitant « ne considérant pas être soumis à la TGAP » ; que les agents des douanes ont dressé (page 7 du même procès-verbal) la liste des quantités qu'ils considèrent comme soumises à la taxe, en précisant la destination des tonnages en cause, c'est-à-dire : l'alimentation animale, les asphaltes, le filler pour béton, le traitement thermique de fours, l'industrie de fabrication de fertilisants, l'industrie de la fibre de verre, l'industrie de la verrerie ; quelques tonnes de « divers », puis l'industrie de fabrication d'enduits de façade, les ventes à d'autres sociétés du groupe, celles faites à l'industrie de fabrication de béton préfabriqué, de bétons prêts à l'emploi, et de traitement des fumées ; que la simple lecture des marchés destinataires des produits que l'administration entend soumettre à la taxe montre qu'il ne s'agit d'aucune des marchés concernés par l'exonération ci-dessus rappelée, ce qui suffit à établir le bien-fondé de la taxation, ; que pour tenter malgré tout d'y échapper, Carmeuse entretient une confusion entre sa propre activité et celle de l'industrie des charges minérales, qui fabrique ces charges minérales à partir de la roche calcaire extraite, concassée, séchée, broyée et calibrée avant livraison par Carmeuse (cf folio 3 du PV n°2) : qu'or, il s'agit là d'une industrie intermédiaire entre la carrière exploitée par Carmeuse qui en extrait le calcaire et l'industrie incorporant ensuite la charge minérale à son propre produit ; que Carmeuse affirme qu'elle produirait elle-même des charges minérales, c'est-à-dire des produits immédiatement aptes, sans traitement par une autre entreprise intervenant en aval du site de Verfeuil, à être utilisés comme charge minérale ; mais qu'elle n'en justifie pas, et ne se livre à aucune critique ligne à ligne du tableau dressé par l'administration et aboutissant à la taxation contestée, alors qu'il en ressort clairement qu'aucune taxe n'a été calculée sur les vente d'amendements agricoles, ni sur les ventes à la sidérurgie ou à la fonderie, tandis qu'il n'est retenu aucune vente à l'industrie des charges minérales » ; que la production de tableaux extra-comptables en anglais pour présenter la répartition du chiffre d'affaires n'est d‘aucune utilité pour rapporter la preuve de la discrimination alléguée ; qu'étant rappelé que le texte vise la première mise sur le marché, il appartenait à Carmeuse de rapporter la preuve de ce qu'elle met sur le marché des charges minérales, taxées à tort, ce qu'elle ne fait pas, la référence à des sites internet de l'administration de l'environnement, à vocation informative et didactique, ne pouvant suppléer la production de documents comptables explicites ; que s'agissant des attestations de clients, l'argumentation de la demanderesse est non seulement confuse, comme le relève l'administration, mais fausse, puisque la société Carmeuse a été en mesure de produire à l'occasion du contrôle dont elle a fait l'objet pas moins de 39 attestations de clients, preuve que la production de ces documents est une simple formalité pour les acteurs des secteurs concernés ; qu'à l'évidence, les clients ont en effet tout intérêt à remettre à leur fournisseur le document qui leur évitera de voir la TGAP incorporée au prix d'achat des produits qu'il leur livre ; qu'enfin, dès lors que les textes font de la destination des produits le critère de l'application de la taxe, il est évident que seule une attestation du client est de nature à justifier de la destination du produit, la documentation interne des services de l'administration douanière n'ayant fait, sur ce point, que tirer des textes généraux la conséquence pratique sui s'imposait ; qu'en l'état des textes applicables et des pièces du dossier, il conviendra de retenir que la taxation litigieuse était parfaitement justifiée ; 1°) alors que, aux termes de l'article 1er du décret n°2001-172 du 21 février 2001, les matériaux visés par l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes, dont l'utilisation ou la livraison pour la première fois sur le marché intérieur en suite de leur extraction sont assujetties à la taxe générale sur les activités polluantes, sont ceux des types généralement destinés aux travaux publics, au bâtiment et au génie civil ;
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qu'en se contentant de relever, pour considérer que la société Groupe Meac devait être assujettie à cette taxe, que ce dispositif était simplement descriptif, que « généralement » n'équivalait pas à « exclusivement » et qu'en conséquence, il pouvait concerner d'autres usages, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée (conclusions récapitulatives d'appel de la société Groupe Meac, p.4 et s.), s'il ne résultait pas de ce dispositif que pour taxer l'usage ou la livraison de tels matériaux, il fallait qu'ils soient majoritairement destinés aux bâtiments, travaux publics et génie civil en sorte qu'en l'espèce, la part du calcaire extraite par la société Groupe Meac, destinée très minoritairement à la construction, ce qui était représentatif de l'activité des entreprises du secteur à l'échelon national, ne pouvait la rendre redevable de cette taxe, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes et 1er du décret n° 2001-172 du 21 février 2001 ; 2°) Alors que, subsidiairement, aux termes du décret n°2001-172 du 21 février 2001, les matériaux visés par l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes, dont l'utilisation ou la livraison pour la première fois sur le marché intérieur en suite de leur extraction sont assujetties à la taxe générale sur les activités polluantes, sont ceux des types généralement destinés aux travaux publics, au bâtiment et au génie civil, à l'exclusion notamment du calcaire industriel lorsqu'il est destiné à être utilisé pour les seules industries du ciment, de la chaux, de la sidérurgie, des charges minérales et à enrichir les terres agricoles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Groupe Meac transformait le calcaire industriel qu'elle extrayait en charges minérales sous la forme d'une poudre fine qu'elle commercialisait ; qu'en considérant qu'elle devait être assujettie à la taxe générale sur les activités polluantes et en validant l'avis de mise en recouvrement, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes et l'article 1er décret n° 2001-172 du 21 février 2001 ; 3°) Alors que, subsidiairement, en se contentant de relever, pour décider d'assujettir la société Groupe Meac à la taxe générale sur les activités polluantes, que la simple lecture des marchés destinataires de ses produits listés par l'administration fiscale indiquait que la destination du calcaire industriel qu'elle extrayait n'était pas celle de charges minérales, quand elle avait relevé que la société Groupe Meac transformait en poudre fine le calcaire qu'elle extrayait, procédant ainsi à la commercialisation de charges minérales en sorte que la destination de ces produits était sans emport, la cour d'appel, qui a statué par une motivation inopérante à justifier cet assujettissement, a derechef privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 266 sexies 6 a) du code des douanes et de l'article 1er du décret n° 2001-172 du 21 février 2001.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par la Société anonyme gardéenne d'économie mixte (SAGEM), société anonyme, dont le siège est [...] , prise en son établissement [...] , exploitant le Golf de [...], contre l'arrêt rendu le 1er décembre 2017 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre), dans le litige l'opposant à M. B... J..., domicilié [...], défendeur à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 25 juin 2019, où étaient présents : M. Chauvet, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Richard, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la Société anonyme gardéenne d'économie mixte (SAGEM) ; Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne la Société anonyme gardéenne d'économie mixte (SAGEM) aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, prononcé et signé par M. Pietton, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du président empêché, en son audience publique du onze septembre deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la Société anonyme gardéenne d'économie mixte (SAGEM) PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré le licenciement de M. B... J... sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR condamné la SAGEM à verser au salarié la somme de 32 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'AVOIR dit que les sommes allouées produiraient intérêts au taux légal à compter du 16 février 2016 pour les créances salariales et à compter de l'arrêt pour les créances à caractère indemnitaire, d'AVOIR condamné l'employeur à remettre au salarié un bulletin de salaire conforme à l'arrêt sous astreinte de 10 euros par jour de retard, commençant à courir à l'expiration d'un délai de 2 mois à compter de la notification de l'arrêt, pendant 3 mois, passé lequel il pourrait être à nouveau statuer, d'AVOIR condamné la SAGEM aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à M. J... la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE « Sur le licenciement Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié. Ainsi l'administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, l'employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables. En revanche, lors que l'employeur invoque la faute grave pour licencier, il doit en rapporter la preuve. M. J... a été licencié dans les termes suivants : « Le 16 novembre 2015, le technicien de l'entreprise ORA a relevé le dysfonctionnement des batteries des voiturettes du Golf qu'il a refusé de prendre en charge car nous étions fautifs par manque d'entretien. Votre supérieur hiérarchique, M. F..., m'a indiqué que le remplissage d'eau déminéralisée des batteries des voiturettes n'avait pas été fait par vous, alors que vous en aviez la charge et qu'il vous a rappelé cette obligation de nombreuses fois. Il apparaît que vous n'avez pas respecté les consignes durant ces semaines et nous sommes obligés de prendre en charge les frais des voiturettes. Lors de l'entretien, vous avez reconnu votre erreur, sans apporter de justification. Votre supérieur hiérarchique vous reproche également votre manque de rigueur et d'implication de façon générale, dans toutes les tâches qui vous sont demandées. Il m'a rappelé que le 27 mars 2015, vous aviez reçu un avertissement (manquements en matière de respect des consignes et négligence dans la gestion de l'entretien du matériel qui avaient conduit à des frais importants).
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-11.534 du 11/09/2019, partie 1
Il m'a également reporté des remarques sur votre gestion des jetons de practice. Sur ces sujets, vous n'avez faits que m'indiquer qu'à l'avenir, vous feriez ce qu'il faut. J'ai relevé que c'est ce que vous disiez à chaque fois... Aussi, je constate que malgré les remarques qui vous ont été formulés à de nombreuses reprises, vous n'avez pas modifié votre comportement ainsi que la gravité des fautes qui vous sont imputables avec leurs conséquences financières. Compte tenu de la nature des fautes relevées, je vous notifie votre licenciement pour faute réelle et sérieuse (...)'. Il résulte des termes de la lettre de licenciement que la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM a licencié M. J... non pas pour faute grave mais pour cause réelle et sérieuse. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM fait ainsi grief à M. J... de ne pas avoir rempli d'eau déminéralisée les batteries des voiturettes du golf à l'origine de leur dysfonctionnement et du refus de l'entreprise ORA de les prendre en charge. Aux termes du contrat de travail signé le 01/03/1995, il est expressément mentionné que M. J... est engagé en qualité de starter, practice man, caddy master chargé notamment du ramassage des balles de practice, du nettoyage du poste de pratice, du contrôle des joueurs sur le parcours et le pitch and pull, de la vérification de la qualité du terrain (piquetage des zones, vidanges des lave-balles, voiturettes...), du contrôle des niveaux d'huile, essence, graissage des engins (ramasse balles, voiturettes...), de l'ouverture et de la fermeture des locaux (atelier, machine à balles, club-house, portail.... En spécifiant expressément que M. J... avait la charge du contrôle des niveaux d'huile, essence, graissage des engins (ramasse balles, voiturettes...), la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM a entendu confier à l'appelant l'entretien des voiturettes dont la vérification des niveaux d'eau des batteries fait partie. Il ne résulte nullement des pièces versées aux débats que la vérification du niveau de l'eau des batteries nécessite des compétences techniques particulières et encore moins une formation. Mais si M. L... , directeur de développement et M. F..., intendant du golf, attestent que l'eau déminéralisée était manquante dans les voiturettes le 16/11/2015, la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM ne verse toutefois aux débats aucun document émanant de la société ORA certifiant que ce manque d'eau est à l'origine de dysfonctionnements des engins et d'un refus de prise en charge de cette dernière. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM ne produit enfin aucune facture de réparation des voiturettes qu'elle aurait réglées en raison du manquement de M. J... à ses obligations. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM fait également grief à M. J... de son manque de rigueur et d'implication de façon générale dans toutes les tâches qui lui sont demandées. Ainsi que le souligne le salarié, ce grief est vague, aucun fait précis et matériellement vérifiable n'étant indiqué dans la lettre de licenciement. Ce manque de rigueur et d'implication de M. J... dans ses tâches est par ailleurs contredit par plus de 20 abonnés du golf qui soulignent le professionnalisme, le sérieux, la disponibilité, l'amabilité, les compétences techniques de M. J... dans son travail et dans son accompagnement des joueurs. I... W..., jardinier du golf du 25/03/2008 au 12/03/2016, atteste de l'attitude professionnelle, sérieuse et correcte de M. J..., son comportement exemplaire, respectueux, son respect des consignes. R... Y..., salarié du golf de septembre 2003 au 01/07/2015, confirme le comportement exemplaire de M. J... vis à vis de la clientèle et son comportement modèle dans la gestion du practice et du terrain et de sa forte implication dans ses fonctions. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM demande d'écarter les attestations de M. J... aux motifs qu'elles n'ont aucune valeur probante, n'émanant pas des supérieurs hiérarchiques du salarié. L'article 202 du code de procédure civile dispose : « L'attestation contient la relation des faits auxquels son auteur a assisté ou qu'il a personnellement constatés. Elle mentionne les nom, prénoms, date et lieu de naissance, demeure et profession de son auteur ainsi que, s'il y a lieu, son lien de parenté ou d'alliance avec les parties, de subordination à leur égard, de collaboration ou de communauté d'intérêts avec elles. Elle indique en outre qu'elle est établie en vue de sa production en justice et que son auteur a connaissance qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales. L'attestation est écrite, datée et signée de la main de son auteur. Celui-ci doit lui annexer, en original ou en photocopie, tout document officiel justifiant de son identité et comportant sa signature ». Les attestations régulièrement communiquées, ne peuvent être écartées des débats au seul motif qu'elles ne répondent pas en la forme aux prescriptions légales, le juge devant seulement en apprécier la valeur probante. En l'espèce, si quelques attestations ne comportent pas la carte nationale d'identité de leurs auteurs, la cour dit toutefois qu'elles ne comportent aucun indice de nature à mettre en doute leur authenticité et la sincérité de leurs auteurs. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM ne rapporte pas au surplus la preuve d'un contentieux existant avec ses anciens salariés I... W... et R... Y....
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-11.534 du 11/09/2019, partie 2
Il n'y a pas lieu par conséquent de les écarter des débats. Il convient ainsi de constater que ce grief n'est pas établi. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM reproche enfin à M. J... sa gestion des jetons de practice sans toutefois préciser les difficultés que cette dernière aurait engendré. Bien qu'il fasse état des remarques rapportées par M. F... sur cette gestion, l'employeur se garde de les inventorier afin de pouvoir en vérifier le bien-fondé. Ce grief n'est pas par conséquent établi. Il résulte de ces éléments que le seul fait fondé à l'encontre de M. J... est son oubli de l'eau dans les batteries des voiturettes. Toutefois, ce manquement ne saurait constituer une cause sérieuse de licenciement eu égard à l'ancienneté du salarié qui n'a fait l'objet d'aucune sanction disciplinaire justifiée en 23 ans de collaboration et eu égard à son sérieux et à ses qualités professionnelles certifiées par ses collègues de travail et de nombreux abonnés du golf. Il convient par conséquent d'infirmer le jugement et de déclarer le licenciement de M. J... sans cause réelle et sérieuse. M. J... avait 23 ans et 5 mois d'ancienneté au moment de son licenciement. Il justifie de son admission à Pôle Emploi à compter de février 2016 et de son absence de retour à l'emploi en dépit de ses recherches actives. Compte-tenu de son âge au moment du licenciement, 55 ans, de son ancienneté, 23 ans, du montant du salaire brut mensuel (1912,88 € bruts) et de son absence de retour à l'emploi, il convient de lui allouer une somme de 32 500 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Sur les autres demandes En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l'ordonnance nº 2016-131 du 10 février 2016, les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 15/02/2016, et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt. Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise d'un bulletin de salaire conformes est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif. Sur les frais irrépétibles et les dépens La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM qui succombe sera condamnée à verser à M. J... la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d'appel » ; 1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige, lesquels sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appel « auxquelles il est renvoyé pour un exposé complet des moyens et des prétentions » (arrêt p. 3 § 5), si M. J... affirmait que le grief tiré du défaut de vérification du niveau d'eau des batteries de voiturettes ne pouvait pas lui être reproché car cette tâche ne lui incombait pas, à aucun moment il ne prétendait qu'à supposer qu'il ait commis un manquement, celui-ci ne pouvait justifier son licenciement eu égard à son ancienneté, ses qualités professionnelles ou encore à l'absence de préjudice causé à son employeur ; que dès lors, en relevant, pour dire que le grief tiré du défaut de vérification du niveau d'eau dans les voiturettes était établi mais ne justifiait pas le licenciement, que l'employeur ne prouvait pas le préjudice subi et que le salarié avait une ancienneté de 23 ans sans passé disciplinaire et que ses qualités professionnelles étaient reconnues par ses collègues et les clients, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige, et partant, a violé l'article 4 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE la preuve est libre en matière prud'homale ; qu'en l'espèce, pour démontrer que le défaut de remplissage des batteries des voiturettes avait endommagé les véhicules et nécessité des réparations à la charge de l'employeur, la SAGEM produisait aux débats l'attestation de M. L... qui précisait que « cette absence de tâches qu'il devait réaliser a engendré le changement du pad de batteries et donc un coût supplémentaire imprévu à la charge de l'entreprise » ; que, pour dire que l'oubli de l'eau dans les voiturettes ne pouvait pas justifier le licenciement du salarié, la cour d'appel a relevé que l'employeur ne versait aux débats aucun document émanant de la société ORA certifiant que ce manque d'eau était à l'origine d'une dégradation des véhicules, ni de facture de réparation desdites voiturettes ; qu'en exigeant ainsi la production de certains éléments de preuve en particulier, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 3°) ALORS en tout état de cause QUE justifie un licenciement le fait pour un salarié, ayant plus de 20 ans d'expérience dans son poste, de ne pas procéder aux vérifications nécessaires sur les véhicules dont il a en charge l'entretien ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. J... avait manqué à son obligation de remettre de l'eau dans les batteries des voiturettes ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-11.534 du 11/09/2019, partie 3
que, pour dire que le manquement de M. J... ne pouvait pas justifier son licenciement, la cour d'appel a relevé que le salarié avait 23 ans d'ancienneté ; qu'en statuant de la sorte sans rechercher si l'ancienneté du salarié n'aurait au contraire pas dû l'amener à faire preuve de plus de vigilance dans l'exécution de ses tâches, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1235-1, et L. 1235-3 du code du travail ; 4°) ALORS QUE justifie un licenciement le fait pour un salarié, ayant plus de 20 ans d'expérience dans son poste, de ne pas procéder aux vérifications nécessaires sur les véhicules dont il a en charge l'entretien ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que M. J... avait manqué à son obligation de remettre de l'eau dans les batteries des voiturettes ; que, pour dire que le manquement de M. J... ne pouvait pas justifier son licenciement, la cour d'appel a relevé que le salarié n'avait pas de passé disciplinaire, que ses qualités professionnelles étaient reconnues par ses collègues et des clients du golf ; qu'en statuant par de tels motifs inopérants, la cour d'appel a derechef privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1232-1, L. 1235-1, et L. 1235-3 du code du travail ; DEUXIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SAGEM à verser au salarié la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect de l'obligation de formation, d'AVOIR dit que les sommes allouées produiraient intérêts au taux légal à compter du 16 février 2016 pour les créances salariales et à compter de l'arrêt pour les créances à caractère indemnitaire, d'AVOIR condamné la SAGEM aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à M. J... la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE « Sur l'obligation de formation de l'employeur L'article L. 6321-1 du code du travail dispose : 'L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme. Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1º de l'article L 6312-1. L'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail. Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu'à la lutte contre l'illettrisme. Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1º de l'article L 6312-1. L'employeur a ainsi une obligation légale de formation de son salarié. M. J... soutient ne jamais avoir bénéficié de formation pendant 23 ans. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM réplique que M. J... a sollicité des formations étrangères aux fonctions qu'il occupait, produisant à l'appui de ses dires un tableau manuscrit aux termes duquel M. J... a sollicité une formation d'organisateur d'épreuves du club, un stage sur les éléments de performance et le coaching et le nouveau logiciel de gestion sportive. Il résulte des pièces versées aux débats et des attestations de nombreux abonnés que l'emploi occupé par M. J... nécessitait des contacts avec la clientèle et une connaissance du golf ; ce dernier a été également amené à travailler lors de l'organisation d'un grand prix. Les demandes de formation du salarié n'apparaissent pas ainsi sans lien avec les tâches qu'il assumait. La cour constate au surplus que le manquement de la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM à son obligation est établi dans la mesure où M. J... n'a bénéficié d'aucune formation pendant les 23 ans qu'a duré la relation contractuelle. Ce manquement cause au salarié un préjudice certain dans la mesure où ce dernier n'est pas en mesure de maintenir sa capacité à occuper un travail au regard de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations. Il convient par conséquent d'allouer à M. J... une somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de ce préjudice. Sur les autres demandes En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l'ordonnance nº 2016-131 du 10 février 2016, les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 15/02/2016, et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt. Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise d'un bulletin de salaire conformes est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif.
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-11.534 du 11/09/2019, partie 4
Sur les frais irrépétibles et les dépens La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM qui succombe sera condamnée à verser à M. J... la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d'appel » ; 1°) ALORS QUE les juges du fond sont tenus d'examiner les éléments de preuve soumis leur examen ; qu'en l'espèce, pour établir que M. J... avait bénéficié de formations au cours de sa carrière, la SAGEM produisait notamment aux débats le plan de formation 2012 duquel il ressortait que plusieurs formations avaient été programmées pour le salarié ; qu'en jugeant que M. J... n'avait bénéficié d'aucune formation professionnelle pendant les 23 ans qu'avait duré la relation contractuelle, sans viser ni analyser cet élément de preuve produit par l'employeur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige, lesquels sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce, aucune des parties ne prétendait que les formations refusées au salarié avaient un lien avec les fonctions qu'il occupait ; que M. J... se bornait à prétendre qu'il n'avait jamais bénéficié d'aucune formation professionnelle au cours de sa carrière ; que la SAGEM soulignait quant à elle que les seules formations qui avaient été refusées au salarié ne présentaient aucun lien avec ses fonctions ; que dès lors, en relevant, pour dire que l'employeur avait manqué à son obligation de formation professionnelle, que ce dernier avait refusé au salarié des formations en lien avec les tâches qu'il assumait, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et partant, a violé l'article 4 du code de procédure civile ; 3°) ALORS en tout état de cause QU'en relevant d'office le moyen tiré du refus de l'employeur de faire bénéficier M. J... de formations en lien avec ses fonctions, sans avoir invité les parties à s'expliquer préalablement sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 4°) ALORS en tout état de cause QU'aux termes de l'article L. 6321-1 du code du travail, l'employeur assure l'adaptation des salariés à leur poste de travail et veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi au regard notamment de l'évolution des emplois, des technologies et des organisations ; qu'en l'espèce, la SAGEM faisait valoir que M. J... avait évolué dans la hiérarchie puisqu'il était passé du groupe I au groupe III (conclusions d'appel de l'exposante p. 15 § 4) ; que, pour juger que l'employeur avait manqué à son obligation, la cour d'appel s'est bornée à relever que le salarié n'avait bénéficié d'aucune formation au cours de ses 23 ans de présence dans l'entreprise et que l'employeur lui avait refusé des formations en lien avec ses fonctions ; qu'en statuant ainsi, sans constater que la carence de l'employeur, à la supposer avérée, avait une incidence sur les possibilités d'adaptation du salarié et/ou de maintien dans son poste de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article susvisé ; TROISIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR condamné la SAGEM à verser au salarié la somme de 1 500 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral, d'AVOIR dit que les sommes allouées produiraient intérêts au taux légal à compter du 16 février 2016 pour les créances salariales et à compter de l'arrêt pour les créances à caractère indemnitaire, d'AVOIR condamné la SAGEM aux dépens de première instance et d'appel ainsi qu'à verser à M. J... la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; AUX MOTIFS QUE « Sur l'exécution du contrat de travail, le harcèlement moral et les manquements de l'employeur à ses obligations conventionnelles et légales M. J... sollicite à ce titre une somme de 11 477,28 € représentant 6 mois de salaire. Il fait état à l'appui de sa demande : -des sanctions abusives, -d'une surcharge de travail, -du non-respect du descriptif de poste, -du non-respect de son droit à une pause au bout de 4 heures de travail conformément à l'article 5.3 de la convention collective nationale du golf, -de la pression morale de son supérieur hiérarchique faisant notamment obstacle au paiement de ses heures supplémentaires, -du non affichage des plannings et des horaires, -de l'attitude vexatoire de l'employeur La cour a estimé que les deux avertissements reçus par M. J... du 18/08/2014 et 27/03/2015 n'étaient pas justifiés. M. J... a été convoqué par la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM à un entretien individuel le 29/12/2015. Il fait état du cynisme de l'employeur de le convoquer à cet entretien afin de faire un bilan et d'évoquer ces objectifs alors même qu'il était en préavis, son licenciement lui ayant été notifié le 09/12/2015.
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Si cet entretien était en effet dépourvu de tout intérêt en raison du licenciement effectif de M. J..., l'employeur avait néanmoins l'obligation d'y procéder en vertu de l'article L 6315-1 du code du travail. M. J... ne produit par ailleurs aucun élément démontrant que l'entretien a été mené dans des conditions vexatoires. Il convient par conséquent d'écarter ce moyen. M. J... fait grief à la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM de ne pas avoir affiché les plannings en horaires de travail en violation des articles 4.2.1 et 5.1.1 de la convention collective nationale du golf. Aux termes toutefois de la lettre du 29/06/1992, la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM a indiqué à M. J... qu'elle l'engageait en qualité de starter practice man, caddy master et ouvrier de terrain aux conditions générales prévus par la convention collective nationale des sociétés immobilières du 01/01/1984. L'application de cette collective nationale des sociétés immobilières du 01/01/1984 à la relation des parties est par ailleurs expressément rappelée à l'article 2 du contrat à durée indéterminée en date du 01/03/1995, l'avenant en date du 22/05/2014, portant suppression des primes de panier repas indiquant que le reste du contrat de travail demeure inchangé. Aucun document ne fait état de l'application de la convention collective nationale du golf au lieu et place de collective nationale des sociétés immobilières du 01/01/1984. M. J... ne peut dès lors se prévaloir des stipulations de la convention collective nationale du golf. Il n'en demeure pas moins que le contrat de travail du 01/03/1995 et l'avenant du 22/05/2014, ne mentionnent pas les horaires de travail de M. J.... M. L... , directeur de développement, indique que l'emploi du temps de M. J... a été spécialement aménagé en fonction de ses entraînements de golf. M. F..., intendant, soutient avoir attribué à M. J... des aménagements de ses horaires en raison de son fils malade. Aux termes de ses écritures, M. J... a par ailleurs expressément indiqué qu'il travaillait en continu de 7h à 12h en période d'hiver et de 7h à 13h en période d'été. Il résulte ainsi des propres déclarations du salarié que ce dernier bénéficiait d'un horaire de travail fixe qu'il connaissait, les fiches de pointage versées aux débats confirmant ses déclarations dans la mesure où elles mentionnent des horaires de travail du salarié essentiellement le matin entre 7h00 et 13h00 à l'exception des samedis où il travaillait toute la journée. Il convient par conséquent d'écarter ce moyen. M. J... fait état d'une surcharge de travail, du non-respect par l'employeur du descriptif de son poste et d'un refus de l'employeur de lui régler des heures supplémentaires. Il soutient ainsi qu'en sus de ses tâches, il devait se livrer à des opérations d'organisation de compétitions, de conseils techniques aux pratiquants, de l'entretien des parcours, du placement des départs, du placement des trous de golf sur le green, aider aux cours dispensés auprès de l'école de golf des enfants. Les conseils techniques aux pratiquants, l'entretien des parcours, le placement des départs, du placement des trous de golf sur le green relèvent toutefois de son emploi de starter, pratice man, caddy master dont les tâches consistent notamment au ramassage des balles de practice, au nettoyage du poste de pratice, au contrôle des joueurs sur le parcours et le pitch and pull. Ainsi que le souligne la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM, si M. J... a participé à la préparation et au déroulement de compétitions et de manifestations, c'est à la demande de la société AGF qui en était l'organisatrice. Si M. J... a par ailleurs initié au golf des agents de l'AFPA le 13/06/2004, ainsi qu'en atteste son président monsieur P..., le salarié ne démontre nullement que cette initiation lui a été demandée par son employeur et qu'elle s'est au demeurant déroulée sur son lieu de travail. A... T... atteste par ailleurs que M. J... s'est occupé des enfants de l'école de golf en dehors de son travail. M. J... produit au surplus ses relevés d'heures de travail du 02/03/2015 au 24/01/2016 aux termes desquels il apparaît qu'il effectuait régulièrement 35 heures par semaine, les dépassements étant peu nombreux. Le salarié ne verse enfin aux débats aucun élément de preuve objectif établissant qu'il a réclamé le paiement d'heures supplémentaires et d'un refus de son employeur de lui régler. Les griefs ne sont pas ainsi fondés. M. J... reproche à la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM de ne pas avoir respecté le temps de pause prévu à l'article 5.3 de la convention collective nationale du golf du 13 juillet 1998. La convention collective nationale du golf n'étant pas applicable à la relation des parties, il convient d'écarter le moyen. Selon l'article L 1152-1 du code du travail, "aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel."
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L'article L1154-1 du code du travail prévoit que "lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L1152-1 à L1152-3 et L 1153-1à L1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles". M. J... fait état de pressions morales, versant à l'appui de ses dires : -une attestation de X... G... en date du 4 novembre 2016 qui certifie : « J'ai travaillé pour le golf de [...] de 2008 à 2012 en tant que jardinier. M. F... et M. L... avaient une attitude dure et humiliante en ce qui concerne le personnel assurant l'entretien du practice et plus particulièrement envers M. J... qui travaillait seul tous les week-ends et jours fériés pour assurer la bonne marche des installations golfiques et des compétitions très fréquentes. Ces Messieurs M. F... et M. L... lui refusaient les congés payés en période scolaire alors que d'autres collègues pouvaient partir en congés pendant ces périodes. Personnellement j'ai préféré quitter l'entreprise car je ne supportais plus l'ambiance délétère qui régnait envers le personnel chargé de l'entretien du terrain. Par exemple : la porte du tracteur du terrain a été cassée plusieurs fois, personne n'a été inquiété sauf M. J... qui l'utilisait de temps en temps sur le practice quand la machine qu'il utilisait était en panne. Je n'ai jamais vu M. J... partir en formation malgré ses demandes répétées chaque année alors que D... qui rentrait dans l'entreprise plus tard avait obtenu une formation. » -une attestation de Z... U..., enseignant de golf au golf de [...] durant 15 ans, de 1999 à 2015, qui déclare : 'je soussigné (...) atteste des faits suivants : à de très nombreuses reprises, que cela soit au practice ou sur le parcours, j'ai été témoin de comportement odieux de M. F... M... à l'égard de M. J.... En effet, M. F..., pendant le travail, donnait des ordres à M. J... en le traitant 'comme du poisson pourri', allant même jusqu'à lui hurler dessus pour lui donner des ordres. M. F... M... traitant M. J... 'comme un moins que rien' et ce en plein public, (...). -une attestation de O... K..., comptable de la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM, qui atteste le 08/08/2016 avoir préparé sous les directives de E..., directeur général de la société, 33 lettres de convocation à un entretien préalable pour un éventuel licenciement sur le golf de 2010 'à nos jours' et à 16 licenciements dont 10 pour faute grave, les autres salariés ayant eu soit une sanction disciplinaire soit une rupture conventionnelle. -un certificat médical du 25/05/2016 du docteur V... qui précise que M. J... l'a consulté à plusieurs reprises depuis 18 mois environ pour des problèmes de troubles du sommeil et névrosisme liés à des soucis professionnels. L'attestation de O... K... ne caractérise nullement l'existence de faits commis par la société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM à l'encontre de M. J... laissant présumer l'existence d'un harcèlement. Les bulletins de salaire de décembre 2011, 2012, 2014 et 2015 et d'août 2014 mentionnent par ailleurs des congés du salarié pendant les vacances scolaires, contredisant les allégations de cet ancien salarié. X... G... et Z... U... font néanmoins état d'une attitude déplacée de M. F... envers M. J.... M. J... a par ailleurs fait l'objet le 18/08/2014 et le 27/03/2015 de deux avertissements injustifiés et n'a bénéficié d'aucune formation depuis son embauche. Il établit ainsi l'existence matérielle de faits précis et concordants, qui pris dans leur ensemble permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral à son encontre qui a affecté son état de santé mais également ses conditions de travail et de carrière. L'employeur fait valoir que les formations sollicitées par M. J... étaient étrangères à ses fonctions. La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM ne démontre pas en quoi la formation d'organisateur d'épreuves du club, la demande de stage sur les éléments de performance et le coaching et sur le nouveau logiciel de gestion sportive étaient dépourvues de lien avec l'emploi de M. J... qui a notamment participé à un grand prix organisé sur le golf et qui devait contrôler les joueurs sur les parcours. Elle ne verse aucun élément justifiant l'attitude de M. F... envers M. J.... L'employeur échoue ainsi à démontrer que les faits matériellement établis par M. J... sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement. Le harcèlement moral est établi. Compte tenu des circonstances du harcèlement subi, de sa durée et des conséquences dommageables qu'il a eu pour M. J... telles qu'elles ressortent du certificat médical, le préjudice doit être réparé par l'allocation de la somme de 1500 € de dommages-intérêts. Le jugement est infirmé sur ce point. Sur les autres demandes
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En application des articles 1153 et 1153-1 du code civil, recodifiés sous les articles 1231-6 et 1231-7 du même code par l'ordonnance nº 2016-131 du 10 février 2016, les créances salariales produisent intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation, soit en l'espèce le 15/02/2016, et les créances indemnitaires produisent intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt. Compte tenu des développements qui précèdent, la demande tendant à la remise d'un bulletin de salaire conformes est fondée et il y est fait droit dans les termes du dispositif. Sur les frais irrépétibles et les dépens La société GARDEENNE D'ECONOMIE MIXTE SAGEM qui succombe sera condamnée à verser à M. J... la somme de 2500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens de première instance et d'appel » ; 1°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes du litige, lesquels sont fixés par les prétentions respectives des parties ; qu'en l'espèce si, dans ses conclusions d'appel oralement soutenues à l'audience, M. J... prétendait que son employeur avait manqué à son obligation de formation, à aucun moment il ne se prévalait de ce manquement au titre de sa demande en reconnaissance de harcèlement moral ; que dès lors, en se fondant sur le prétendu manquement de la SAGEM à son obligation de formation pour dire que le salarié présentait des faits laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé l'article 4 du code de procédure civile ; 2°) ALORS en tout état de cause QUE la cassation à intervenir sur le deuxième moyen, relatif à l'obligation de formation de l'employeur, entraînera, par voie de conséquence, la censure du chef de dispositif ayant dit que le salarié avait été victime de harcèlement moral et lui ayant alloué diverses sommes à ce titre, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QU'il appartient au salarié d'établir et aux juges du fond de constater la matérialité de faits précis et circonstanciés imputables à l'employeur et pouvant laisser présumer l'existence d'agissements de harcèlement moral ; que c'est seulement lorsque la preuve de tels faits est établie qu'il incombe à l'employeur de prouver que ses agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et sont justifiés par des éléments objectifs qui y sont étrangers ; qu'en l'espèce, la SAGEM faisait valoir que M. J... n'avait jamais subi le moindre harcèlement moral de la part de son supérieur hiérarchique mais avait au contraire bénéficié d'un traitement favorable (conclusions d'appel de l'exposante p. 17 in fine) ; qu'à ce titre l'employeur soulignait que contrairement aux dires des attestants et notamment de M. G..., qui au surplus avait quitté l'entreprise depuis plus de 4 ans à la date du licenciement de M. J..., le salarié avait lui-même indiqué dans l'entretien annuel réalisé fin 2015 alors que son licenciement lui avait déjà été notifié, qu'il entretenait de bonnes relations internes ; que, pour dire que le salarié présentait des faits laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a relevé que M. G... et M. U... faisaient état d'une attitude déplacée du supérieur hiérarchique de M. J... à son égard ; qu'en statuant de la sorte, sans s'expliquer sur les éléments développés par l'employeur de nature à remettre en cause la véracité des propos tenus par ces attestants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
Cour d'appel d'Aix-en-Provence 18, Cour de cassation Chambre sociale, décision 18-11.534 du 11/09/2019, partie 8
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant : REJET des pourvois formés par M. T... G..., M. A... G... et la société du Haut Dimont, contre l'arrêt de la cour d'appel de BESANÇON, chambre correctionnelle, en date du 13 mars 2018, qui a condamné, le premier, pour fraude fiscale aggravée, à un an d'emprisonnement avec sursis, le second, pour complicité, à six mois d'emprisonnement avec sursis et, la troisième, pour recel, à 10 000 euros d'amende, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile . La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 mai 2019 où étaient présents : M. Soulard, président, Mme Pichon, conseiller rapporteur, Mmes de la Lance, Planchon, M. Larmanjat, Mme Zerbib, MM. d'Huy, Wyon, conseillers de la chambre, M. Ascensi, Mme Fouquet, conseillers référendaires ; Avocat général : Mme Zientara-Logeay ; Greffier de chambre : Mme Darcheux ; Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire PICHON, les observations de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, de la société civile professionnelle FOUSSARD et FROGER, avocats en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général ZIENTARA-LOGEAY, les avocats des parties ayant eu la parole en dernier ; Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires ont été produits en demande et en défense. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. T... G... a exercé, à titre individuel, puis, à compter de mars 2011, en qualité de gérant de la société 3BMA, une activité de négoce de véhicules automobiles d'occasion dans des locaux loués par la SCI du Haut Dimont, également gérée par lui. Des vérifications de comptabilité ont révélé une fraude à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) ayant consisté, lors des reventes de véhicules provenant d'un autre Etat de l'Union européenne, dans l'application du régime de la TVA sur la marge et non sur le prix de vente total, grâce au recours à des sociétés espagnoles ayant servi d'intermédiaires avec des fournisseurs allemands. L'administration fiscale, sur avis conforme de la commission des infractions fiscales, a déposé plainte pour fraude fiscale. Selon l'administration fiscale, la TVA éludée par M. T... G... à titre personnel s'élève à 992 429 euros. 3. Le procureur de la République, après avoir diligenté une enquête préliminaire, a fait citer M. T... G... devant le tribunal correctionnel afin d'y être jugé du chef de fraude fiscale pour minoration des déclarations de TVA au titre des années fiscales 2010 et suivantes, jusqu'au 7 décembre 2013, et de fraude fiscale aggravée pour minoration des déclarations de TVA, du 8 décembre 2013 au 20 mars 2014, réalisée ou facilitée au moyen de l'interposition d'une personne établie à l'étranger. Son fils, M. A... G..., a été cité du chef de complicité, la SCI du Haut Dimont, du chef de recel. 4. Devant les premiers juges, M. T... G... a soulevé une exception de procédure fondée sur le principe ne bis in idem prévu à l'article 4 du Protocole n° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme. Il a fait valoir qu'il a déjà fait l'objet de pénalités fiscales définitives de 80 % pour les mêmes faits, la cour administrative d'appel l'ayant débouté de sa demande de décharge, et que la réserve émise par la France en marge du protocole ne peut plus être invoquée compte tenu de l'arrêt P... et autres c. Italie rendu le 4 mars 2014 par la Cour européenne des droits de l'homme (nos 18640/10, 18647/10, 18663/10, 18668/10 et 18698/10). 5. Le prévenu a également fait valoir que, ces pénalités étant supérieures à la somme de 500 000 euros, il ne pouvait plus être condamné à une amende pénale dès lors que le montant maximum encouru s'élève à cette somme. 6. Le tribunal correctionnel a relaxé M. T... G... sur le fondement, notamment, de la règle ne bis in idem s'agissant de la période de temps retenue par le juge de l'impôt. Il a condamné, pour une part des faits reprochés, M. A... G... et la SCI, et s'est prononcé sur les intérêts civils. 7. Le procureur de la République, M. T... G..., M. A... G..., la SCI, l'administration fiscale et l'Etat français, parties civiles, ont interjeté appel de ce jugement. Examen des moyens Sur le second moyen de cassation 8. Le moyen n'est pas de nature à être admis, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen de cassation Enoncé du moyen
décision 18-82.430 du 11/09/2019, partie 1
9. Le moyen est pris de la violation de l'article 4 du 7e Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, des articles 6, § 1 et 57 de la Convention européenne des droits de l'homme, de l'article 1741 du code général des impôts, du principe de nécessité et de proportionnalité des peines, et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale et insuffisance de motivation. 10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'infirmant le jugement du tribunal correctionnel de Besançon du 8 décembre 2016, il a rejeté l'exception de procédure fondée sur la règle "non bis in idem", concernant M. T... G... en son nom propre du 1er octobre 2010 au 31 mars 2011, et ès- qualités de représentant légal de la Sarl 3 BMA du 1er avril 2011 au 31 décembre 2012, et en ce que l'arrêt attaqué a en conséquence déclaré M. G... coupable du délit de fraude fiscale réalisée ou facilitée par l'interposition de personne établie à l'étranger, et de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt, et en répression, l'a condamné à une peine d'emprisonnement d'un an avec sursis ; 1°/ alors que « selon l'article 4 du 7e Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat ; que M. T... G... faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 5-6) que la réserve émise par l'Etat français sur cette disposition, aux termes de laquelle "le gouvernement de la République française déclare que seules les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale doivent être regardées comme des infractions au sens des articles 2 à 4 du présent Protocole", n'était pas conforme à l'article 57 de la Convention qui subordonne la validité des réserves émise par un Etat sur l'application d'une disposition de la Convention à l'établissement d'un bref exposé de la ou des loi(s) prétendument incompatible(s) avec la disposition objet de la réserve, et exclut les réserves de caractère général ; que pour rejeter ce moyen, la cour d'appel a retenu que la réserve émise par la France sur l'application de l'article 4 du Protocole additionnel n°7 à la Convention européenne des droits de l'homme "n'est pas remise en cause par la Cour européenne des droits de l'homme (cf l'arrêt CEDH du 15 novembre 2016, A et B c. Norvège, n° 24130/ 11 et 29758/ 11, § 117)" ; qu'en statuant de la sorte, quand dans l'arrêt A et B. c/ Norvège du 15 novembre 2016, la Cour européenne des droits de l'homme s'était bornée à énoncer de manière incidente (§ 117) que "les réserves formulées par l'Autriche et l'Italie ont été jugées non valables parce qu'elles n'étaient pas accompagnées d'un bref exposé de la loi en cause comme le veut l'article 57, § 2, (voir, respectivement, E... c. Autriche, 23 octobre 1995, § 51, série A n) 328-C, et P..., précité, §§ 204-211), contrairement à la réserve émise par la France (H... c. France, n°33402/96, § 51, CEDH 2002-V", l'arrêt P... du 4 mars 2014 ayant en revanche invalidé la réserve émise par l'Italie, laquelle était parfaitement analogue à celle émise par la France, la cour d'appel a méconnu les textes visés au moyen » ; 2°/ alors, encore, qu' « en statuant ainsi, et sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si la réserve émise par la France quant à l'application de l'article 4 du Protocole additionnel n° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme ne contrevenait pas aux dispositions de l'article 57 de la Convention, eu égard à son caractère général et faute d'être accompagnée d'un bref exposé des lois prétendument incompatibles avec cette disposition, la cour d'appel a méconnu les textes et principes visés au moyen, et insuffisamment motivé sa décision » ; 3°/ alors que « le cumul contre une même personne de poursuites fiscale et pénale n'est conforme aux principes de proportionnalité et de légalité des délits et des peines qu'à la condition que le juge répressif tienne compte, pour apprécier la peine qu'il inflige au prévenu, des sanctions fiscales dont il a pu précédemment faire l'objet ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée (conclusions de M. T... G..., spéc. p. 3 ; p. 4 à 8) si l'infliction à son égard de sanctions pénales n'était pas disproportionnée eu égard au redressement dont il avait fait l'objet, validé par arrêt de la cour administrative de Nancy du 24 mars 2016, qui avait mis à sa charge des rappels de droit, intérêts de retard et majorations de 40 % et 80 %, à hauteur de 2 623 823 euros, alors que les droits éludés ne s'élevaient qu'à 1 402 681 euros, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes et principes visés au moyen, et insuffisamment motivé sa décision ». Réponse de la Cour
décision 18-82.430 du 11/09/2019, partie 2
Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, relatif au principe ne bis in idem et à la réserve émise par la France. 11. Lors de la ratification du Protocole n° 7, additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme (la Convention), la France a émis une réserve aux termes de laquelle "seules les infractions relevant du droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale doivent être regardées comme des infractions au sens", notamment, de l'article 4 de ce protocole qui prévoit, à son paragraphe premier, que "Nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même Etat en raison d'une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné par un jugement définitif conformément à la loi et à la procédure pénale de cet Etat". 12. La Cour de cassation juge de façon constante que l'interdiction d'une double condamnation en raison de mêmes faits, prévue par l'article 4 du Protocole n° 7 ne trouve à s'appliquer, selon la réserve émise par la France en marge de ce protocole, que pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale et n'interdit pas le prononcé de sanctions fiscales parallèlement aux peines infligées par le juge répressif (Crim., 20 juin 1996, pourvoi n° 94-85.796, Bull. crim. 1996, n° 268 ; Crim., 4 juin 1998, pourvoi n° 97-80.620, Bull. crim. 1998, n° 186). 13. Postérieurement à l'arrêt P... ayant constaté l'invalidité de la réserve italienne, la Cour de cassation a confirmé son analyse considérant que la réserve de la France n'est pas remise en cause par la Cour européenne des droits de l'homme (Crim., 22 février 2017, pourvoi n° 14-82.526, Bull. crim. 2017, n° 49). En effet, ladite Cour ne s'est pas prononcée sur la validité de la réserve française. 14. Cette jurisprudence s'inscrit dans celle relative à l'office du juge judiciaire qui est d'interpréter et d'appliquer un traité international invoqué dans la cause soumise à son examen, auquel s'incorpore la déclaration unilatérale faite par un Etat quand il signe ou ratifie un traité, par laquelle il vise à exclure ou à modifier l'effet juridique de certaines dispositions du traité dans leur application à l'Etat (Crim., 15 janvier 2014, pourvoi n° 13-84.778, Bull. crim. 2014, n° 11 ; 1re Civ., 11 juillet 2006, pourvoi n° 02-20.389, Bull. 2006, I, n° 378). 15. Dans ces conditions, il appartient au juge répressif d'appliquer l'article 4 au Protocole n° 7 en faisant produire un plein effet à la réserve émise par la France en marge de ce protocole. 16. Ce principe ne contredit pas la jurisprudence de la Cour de cassation aux termes de laquelle les Etats adhérents à la Convention sont tenus de respecter les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme, sans attendre d'être attaqués devant elle ni d'avoir modifié leur législation (Ass. plén., 15 avril 2011, pourvoi n° 10-17.049, Bull. crim. 2011, Ass. plén., n° 1). 17. Cette exigence a été adoptée pour l'application et l'interprétation des droits et libertés définis par la Convention ou ses protocoles. Elle ne s'applique pas lorsque la question concerne, non la portée de ces droits et libertés, mais l'appréciation préalable de l'étendue des engagements de l'Etat. 18. C'est d'ailleurs sur le fondement de dispositions spécifiques de la Convention, les actuels articles 19 et 32, que la Cour européenne des droits de l'homme s'est reconnue compétente pour apprécier la validité d'une réserve formulée par un Etat au sujet d'une disposition particulière (29 avril 1988, N... c. Suisse, n° 10328/83). En particulier, l'article 32 prévoit que la compétence de la Cour européenne des droits de l'homme s'étend à toutes les questions concernant l'interprétation et l'application de la Convention et de ses protocoles et qu'en cas de contestation sur le point de savoir si la Cour est compétente, la Cour décide. 19. En l'espèce, pour infirmer le jugement et rejeter l'exception de procédure fondée sur le principe ne bis in idem, l'arrêt attaqué énonce que l'interdiction d'une double condamnation en raison de mêmes faits, prévue par l'article 4 du Protocole n° 7, additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, ne trouve à s'appliquer, selon la réserve émise par la France, que pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale et n'interdit pas le prononcé de sanctions fiscales parallèlement aux peines infligées par le juge répressif et que contrairement à ce que soutiennent les prévenus, cette réserve n'est pas remise en cause par la Cour européenne des droits de l'homme (cf l'arrêt CEDH du 15 novembre 2016, A et B c. Norvège, nos 24130/11 et 29758/11, § 117). 20. En cet état, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche inopérante, a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions conventionnelles invoquées. Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, relatif à la proportionnalité du cumul des sanctions pénales et fiscales.
décision 18-82.430 du 11/09/2019, partie 3
21. Aux termes d'une réserve d'interprétation émise par le Conseil constitutionnel à l'application combinée de l'article 1741 du code général des impôts avec l'article 1728, 1a et 1b, ou 1729 du même code prévoyant des sanctions fiscales en cas d'omission ou d'insuffisance déclarative volontaire, si l'éventualité que deux procédures, pénale et fiscale, pour des faits de fraude fiscale soient engagées peut conduire à un cumul de sanctions, le principe de proportionnalité implique qu'en tout état de cause le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues (décisions nos 2016-545 QPC et 2016-546 QPC du 24 juin 2016, n° 2016-556 QPC du 22 juillet 2016 et n° 2018-745 QPC du 23 novembre 2018). 22. Cette réserve ne peut concerner que des sanctions de même nature dès lors que sa mise en oeuvre suppose, pour le juge qui se prononce en dernier, de pouvoir procéder à la comparaison des maximums des sanctions pénales et fiscales encourues afin de déterminer le montant le plus élevé qui constitue le plafond. 23. Il convient d'en déduire que, lorsque le prévenu justifie avoir fait l'objet, à titre personnel, d'une sanction fiscale définitivement prononcée pour les mêmes faits, le juge pénal n'est tenu de veiller au respect de l'exigence de proportionnalité que s'il prononce une peine de même nature. 24. En l'espèce, la cour d'appel a condamné M. T... G..., déclaré coupable de fraude fiscale et de fraude fiscale aggravée, à un an d'emprisonnement avec sursis. 25. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche prétendument omise, n'a pas méconnu la portée de la réserve d'interprétation du Conseil constitutionnel. 26. En effet, si des pénalités fiscales définitives ont été prononcées à l'encontre de M. T... G..., aucune amende pénale ne lui a été infligée par la juridiction correctionnelle. 27. Il s'ensuit que le moyen ne saurait être accueilli. 28. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze septembre deux mille dix-neuf ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
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R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par : - M. Q... I..., contre l'arrêt de la cour d'assises du GARD, en date du 17 avril 2018, qui, pour tentative de meurtre, l'a condamné à seize ans de réclusion criminelle ainsi que contre l'arrêt du même jour par lequel la cour a prononcé sur les intérêts civils ; La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 5 juin 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, Mme SLOVE, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ; Greffier de chambre : M. Bétron ; Sur le rapport de Mme le conseiller SLOVE, les observations de la société civile professionnelle POTIER DE LA VARDE, BUK-LAMENT et ROBILLOT, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général BONNET ; Vu le mémoire produit ; Sur le troisième moyen de cassation : Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale ; Attendu que le moyen n'est pas de nature à être admis ; Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 311, 378 et 591 du code de procédure pénale ; "en ce qu' il résulte du procès-verbal des débats qu'après la déposition du témoin M. V... C..., enquêteur de personnalité, les dispositions des articles 311, 312 et 332 du code de procédure pénale ont été observées, qu'après la déposition des témoins M. F... T..., Mmes G... T..., N... T..., il a été répondu aux questions posées conformément aux prescriptions des articles 311,312 et 332 du code de procédure pénale, qu'après la déposition du témoin M. P... R..., il a été répondu aux questions posées conformément aux prescriptions des articles 311, 312 et 332 du code de procédure pénale, qu'après la déposition de M. B... M... , partie civile, il a été répondu aux questions posées conformément aux prescriptions des articles 311, 312 et 332 du code de procédure pénale (page 7) et qu'après la déposition des témoins Mme X... O... et M. P... U... il a été répondu aux questions posées conformément aux prescriptions des articles 311, 312 et 332 du code de procédure pénale ; "alors que les assesseurs et les jurés qui peuvent poser des questions aux accusés et aux témoins en demandant la parole au président ayant le devoir de ne pas manifester leur opinion, le procès-verbal des débats doit énoncer les termes des questions posées afin de vérifier le respect du principe précité ; qu'en l'espèce le procès-verbal se bornant à énoncer que les questions posées aux témoins l'ont été dans le respect de l'article 311 du code de procédure pénale ne permet pas de vérifier si les assesseurs et les jurés n'ont pas manifesté leur opinion en sorte que la légalité de l'arrêt n'est pas justifiée ; Attendu qu'il résulte du procès-verbal des débats qu'aucune des parties n'a soulevé d'incident contentieux, ni présenté une demande de donner acte au motif que l'un des membres de la Cour aurait posé une question à la suite de la déposition des témoins ; D'où il suit que le moyen doit être écarté : Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme , 365-1, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs ; "en ce que l'arrêt attaqué a reconnu M. Q... I... coupable de tentative de meurtre et l'a condamné à la peine de seize ans de réclusion criminelle et à la peine d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation pour une durée de quinze ans ; "alors qu'il appartient à la cour d'assises de motiver sa décision en énonçant les principaux éléments à charge qui, pour chacun des faits reprochés à l'accusé, l'ont convaincu de sa culpabilité ; qu'en énonçant dans la feuille de motivation que l'intention homicide résultait de la présence de déchirures sur le tee-shirt de la victime, l'un des coups ayant atteint le coeur occasionnant une plaie et supposant l'usage du couteau empoigné avec force et maintenu avec détermination dans une direction fixe, la cour d'assises qui s'est fondée sur une supposition pour caractériser l'intention a privé sa décision de motivation ;
décision 18-83.399 du 04/09/2019, partie 1
Attendu que les énonciations de la feuille de questions et celles de la feuille de motivation mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que la cour d'assises, statuant en appel, a caractérisé les principaux éléments à charge, résultant des débats, qui l'ont convaincue de la culpabilité de l'accusé, et justifié sa décision, conformément aux dispositions conventionnelles invoquées et à l' article 365-1 du code de procédure pénale ; D'où il suit que le moyen, qui revient à remettre en question l'appréciation souveraine, par la cour et le jury, des faits et circonstances de la cause, ainsi que des éléments de preuve contradictoirement débattus, ne saurait être admis ; Et attendu que la procédure est régulière et que la peine a été légalement appliquée aux faits déclarés constants par la cour et le jury ; D'où il suit que le moyens ne saurait être accueilli ; REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre septembre deux mille dix-neuf ; En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.
décision 18-83.399 du 04/09/2019, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par Mme Y... T..., domiciliée [...] , contre l'arrêt rendu le 22 septembre 2016 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 2), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Fourwinds Capital Management Limited, dont le siège est [...] , [...], 2°/ à la société Fourwinds Capital Management c/o Campbells Corporate Services Limited, dont le siège est [...] , société de droit étranger enregistrée aux Iles Cayman, défenderesses à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 12 juin 2019, où étaient présents : M. CHAUVET, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, M. Maron, conseiller, Mme Pontonnier, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de Mme T... ; Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l'encontre de la décision attaquée, n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme Y... T... aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix juillet deux mille dix-neuf. MOYEN ANNEXE à la présente décision Moyen produit par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour Mme T... Le moyen reproche à l'arrêt D'AVOIR déclaré irrecevable le contredit formé par madame Y... T..., salariée, à l'encontre du jugement rendu le 18 février 2016 par le conseil de prud'hommes de Paris ; AUX MOTIFS QU'en application des dispositions de l'article 82, alinéa 1er, du code de procédure civile, le contredit devait, à peine d'irrecevabilité, être motivé et remis au secrétariat de la juridiction qui avait rendu la décision dans les quinze jours de celle-ci ; que le délai pour former contredit courait donc à compter du prononcé de la décision et non de sa notification, à condition toutefois que la date à laquelle le jugement devait être rendu ait été porté à la connaissance des parties, l'article R. 1454-25 du code du travail dans sa rédaction alors en vigueur, applicable spécifiquement au conseil de prud'hommes, prévoyant qu'« à l'issue des débats et si la décision n'[était] pas immédiatement rendue, la date de prononcé du jugement [était] rappelée aux parties par émargement au dossier ou par la remise d'un bulletin par le greffier » ; qu'au cas présent, le conseil de prud'hommes de Paris avait rendu son jugement le 18 février 2016, après débats à l'audience du 22 janvier 2016 à laquelle il avait été indiqué aux parties que la décision serait prononcée le 18 février 2016, ainsi qu'il ressortait de la mention en ce sens figurant dans les notes d'audience prises par le greffier du conseil et de la signature apposée par les avocats des parties sous ladite mention ; que le délai pour former contredit expirait dès lors le vendredi 4 mars 2016 à minuit ; qu'il s'ensuivait que quand bien même le courrier sous pli recommandé avec avis de réception avait été posté le 1er mars 2016, le contredit remis au greffe du conseil de prud'hommes de Paris le 8 mars 2016 avait été formé hors délai, étant précisé à cet égard que le tampon du bureau d'ordre central du conseil portait la date du 8 mars 2016 tant sur le contredit lui-même que sur l'accusé de réception de son envoi ;
Cour d'appel de Paris K2, Cour de cassation Chambre sociale, décision 16-26.178 du 10/07/2019, partie 1
que les dispositions de l'article 82 du code de procédure civile régissant les conditions de forme et de délai pour exercer un contredit, qui répondaient aux exigences de célérité de la justice et de respect du principe de la sécurité juridique, exigences d'autant plus impératives que le fond du litige n'avait pas toujours été abordé à ce stade de la procédure, ne contrevenaient pas aux droits fondamentaux énoncés par les articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et en particulier ne constituaient pas une atteinte disproportionnée au droit à un recours effectif dès lors que, comme en l'espèce, le demandeur au contredit avait été avisé dans les formes légales de la date à laquelle le jugement déféré serait prononcé et qu'il n'avait pas été induit en erreur, avant l'expiration du délai de contredit, sur la nature, le délai et les modalités du recours qui lui était ouvert, la notification du jugement faite par le greffe du conseil le 29 février 2016 étant en tous points régulière ; qu'en conséquence, le contredit formé par madame Y... T... devait être déclaré irrecevable (arrêt, p. 3) ; ALORS QUE seule la notification du jugement par le greffe du conseil de prud'hommes met la partie concernée en mesure d'en connaître la motivation et donc de le frapper utilement d'un contredit, lequel doit être motivé, à peine d'irrecevabilité ; qu'il suit de là que le délai de quinze jours réglementairement imparti pour former contredit court, non pas à compter de la date du prononcé du jugement – un tel point de départ, fixé en un temps où la partie intéressée n'est pas en mesure de former utilement le recours, étant de nature à porter atteinte à la substance même du droit d'accès au juge –, mais à compter de la notification du jugement par le greffe du conseil de prud'hommes ; qu'en retenant néanmoins, pour en déduire l'irrecevabilité du contredit formé par madame T..., que le délai réglementairement imparti pour former le contredit courait à compter du prononcé du jugement, la cour d'appel a violé les articles 82 et 528 du code de procédure civile et l'article R. 1454-26 du code du travail, ensemble l'article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'à supposer même que le délai pour former contredit coure à compter du prononcé du jugement, l'irrecevabilité du contredit remis au greffe du conseil de prud'hommes postérieurement à l'expiration du délai ainsi compté porte atteinte à la substance même du droit d'accès au juge lorsque l'auteur du recours a adressé le contredit par un pli postal expédié en temps utile pour être normalement enregistré au greffe avant l'expiration du délai ; qu'en retenant au contraire qu'en l'état d'un contredit adressé par pli postal et parvenu au greffe du conseil de prud'hommes postérieurement à l'expiration du délai de recours, ce contredit devait être déclaré irrecevable, sans qu'il faille prendre en considération la date d'expédition du pli, la cour d'appel a violé l'article 82 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1er, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; ALORS, TRES SUBSIDIAIREMENT, QU'en ne recherchant pas si l'envoi du pli comportant le contredit, fait trois jours ouvrés avant l'expiration du délai de recours, n'avait pas eu lieu en temps utile, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des textes susvisés.
Cour d'appel de Paris K2, Cour de cassation Chambre sociale, décision 16-26.178 du 10/07/2019, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante : Vu le pourvoi formé par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de l'Oise, dont le siège est [...] , contre un arrêt rendu le 2 mars 2017 par la cour d'appel d'Amiens (chambre sociale TASS - sécurité sociale) et un arrêt rendu le 5 avril 2018 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre, protection sociale), dans le litige l'opposant à la société AGCO, société par actions simplifiée, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 12 juin 2019, où étaient présents : M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Vieillard, conseiller rapporteur, M. Cadiot, conseiller, Mme Szirek, greffier de chambre ; Vu les observations écrites de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise, de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société AGCO ; Sur le rapport de Mme Vieillard, conseiller, l'avis de Mme Ceccaldi, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Vu l'article 1014 du code de procédure civile ; Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l'encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; Qu'il n'y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ; REJETTE le pourvoi ; Condamne la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise et la condamne à payer à la société AGCO la somme de 3 000 euros ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES à la présente décision Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Oise. PREMIER MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué (2 mars 2017) encourt la censure ; EN CE QU' il a déclaré recevable la demande de la société AGCO tendant à faire dire inopposable les prestations, soins et arrêts de travail prescrits à Monsieur M... postérieurement au 29 novembre 2011 ; AUX MOTIFS QU' « au terme de motifs circonstanciés, le premier juge a écrit "Par conséquence, la société AGCO SA sera déboutée de sa demande d'inopposabilité de la prise en charge des arrêts de travail ayant subi l'accident du travail du 23 juin 2011 et de sa demande d'expertise judiciaire. Il n'y a donc pas lieu d'ordonner le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure." Puis dans le dispositif de sa décision, il a "débout [é] la société AGCO SA de ses demandes," Même si le jugement entrepris ne reproduit pas intégralement les demandes présentées par les parties, il s'induit de ces citations que le premier juge a statué sur l'inopposabilité invoquée par la société AGCO. Dès lors qu'il n'est pas allégué qu'il a statué ultra petita, il convient de retenir que le tribunal était saisi de cette demande, de sorte que l'exception d'irrecevabilité soulevée par la caisse doit 'être rejetée » ; ALORS QUE, premièrement, les mentions figurant dans les jugements par lesquelles les juges constatent la position prise par les parties à l'audience ont la force probante d'un acte authentique, qui ne peut être contestée que par la voie de l'inscription de faux ; que dans le jugement du 28 mai 2015, les premiers juges ont constaté que « La société AGCO comparait représentée par son conseil et demande au Tribunal de : A titre principal - déclarer son recours recevable, - ordonner à la CPAM de transmettre à son médecin conseil la totalité des certificats médicaux descriptifs justifiant la prise en charge des prestations. A titre subsidiaire - ordonner une mesure d'expertise médicale sur pièces, - renvoyer l'affaire à une audience ultérieure » (jugement, p. 2, § 1er) ; que ces mentions ont la force probante d'un acte authentique ; qu'en considérant, pour dire que la demande d'inopposabilité formulée par l'employeur n'était pas nouvelle en cause d'appel, que les demandes reproduites par le jugement ne correspondaient pas à celles présentées par les parties, la cour d'appel a violé l'article 457 du code de procédure civile, ensemble l'article 564 du même code ; ALORS QUE, deuxièmement, en interprétant les mentions claires et précises du jugement par lesquelles les juges ont constaté la position prise par les parties à l'audience à la lumière de motifs de fond, les juges d'appel ont dénaturé le jugement du 28 mai 2015 ;
Cour d'appel d'Amiens, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-17.956 du 11/07/2019, partie 1
ALORS QUE, troisièmement, en se fondant sur la circonstance que la Caisse n'a pas soutenu que le jugement du 28 mai 2015 était affecté d'un ultra petita quand cette circonstance était inopérante, la nouveauté des demandes s'appréciant au regard des mentions du jugement constatant la position prise par les parties à l'audience et non au regard des demandes tranchées dans le dispositif du jugement, la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile, ensemble l'article 457 du même code ; ET ALORS QUE, quatrièmement, en se fondant sur la circonstance que la Caisse n'avait pas soutenu que le jugement du 28 mai 2015 était affecté d'un ultra petita quand cette circonstance était inopérante, la confrontation des mentions du jugement constatant la position prise par les parties à l'audience et du dispositif révélant l'absence d'ultra petita, la cour d'appel a violé l'article 564 du code de procédure civile, ensemble les articles 457, 480, 4 et 5 du même code. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) L'arrêt attaqué (CA Amiens, 5 avril 2018) encourt la censure ; EN CE QU' il a dit que la décision d'attribuer à Monsieur M... une rente basée sur un taux d'incapacité permanente partielle de 12 % est inopposable à la société AGCO ; AUX MOTIFS QUE « Sur la demande d'inopposabilité de la décision d'attribution à Monsieur Olivier M... d'une rente d'un taux de 12% : Aux termes de l'article L 142-1 du code de la sécurité sociale, le contentieux général de la sécurité sociale règle les différends auxquels donne lieu l'application des législations et réglementations de sécurité sociale, et qui ne relèvent pas par leur nature, d'un autre contentieux. En outre et en vertu de l'article L143-1 2° et de l'article L 143-1 du code de la sécurité sociale, relèvent du contentieux technique de la sécurité sociale les contestations relatives au taux d'incapacité permanente de travail en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle. Toutefois, la demande en inopposabilité de la décision d'attribution d'une rente basée sur un taux d'IPP de 12% découle de l'inopposabilité des soins, arrêts de travail, et toutes autres prestations prescrits après le 22 novembre 2011, lesquels sont sans lien avec l'accident du travail pris en charge. Il s'ensuit que la décision d'attribuer à Monsieur M... une rente basée sur un taux d'IPP de 12% sera déclarée inopposable à la société AGCO » ; ALORS QUE, premièrement, le juge du contentieux général de la sécurité sociale n'est pas compétent pour se prononcer sur l'opposabilité à l'égard de l'employeur de la décision attributive de rente portant fixation du taux d'incapacité permanente partielle de l'assuré ; qu'en déclarant inopposable à la société AGCO, la décision attributive de rente portant le taux d'incapacité permanente partielle de Monsieur M... à 12%, la cour d'appel, qui a tranché une contestation échappant à sa compétence, a violé les articles L. 142-1 et L. 143-1 du code de la sécurité sociale ; ALORS QUE, deuxièmement, en statuant comme elle l'a fait, au motif inopérant que l'inopposabilité de la décision attributive de rente découlait de l'inopposabilité des soins, arrêts de travail et toutes autres prestations prescrits après le 22 novembre 2011, la cour d'appel a encore violé les articles L. 142-1 et L. 143-1 du code de la sécurité sociale.
Cour d'appel d'Amiens, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-17.956 du 11/07/2019, partie 2
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : Statuant sur le pourvoi formé par la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) des Hauts-de-Seine, dont le siège est [...] , contre l'arrêt n° RG : 16/05447 rendu le 9 novembre 2017 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à l'agence régionale de santé Ile-de-France, dont le siège est [...] , 75935 Paris cedex 19, 2°/ à la société Clinique de la Défense, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesses à la cassation ; La société Clinique de la Défense a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ; La demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation également annexé au présent arrêt ; Vu la communication faite au procureur général ; LA COUR, en l'audience publique du 12 juin 2019, où étaient présents : M. Prétot, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Taillandier-Thomas, conseiller rapporteur, Mme Vieillard, conseiller, Mme Szirek, greffier de chambre ; Sur le rapport de Mme Taillandier-Thomas, conseiller, les observations de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Clinique de la Défense, l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ; Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Clinique de la Défense (la clinique) a fait l'objet d'un contrôle à la suite duquel la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine (la caisse) lui a notifié, le 27 décembre 2013, un indu d'un certain montant, correspondant à des anomalies relevées dans la facturation de frais de transport pour la période du 1er janvier 2011 au 30 septembre 2012 ; que la clinique a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ; Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable : Attendu que la clinique fait grief à l'arrêt de dire que la procédure de recouvrement de l'indu suivie par la caisse est régulière, alors, selon le moyen, que la réglementation en matière de recouvrement d'indu antérieurement à la mise en oeuvre du décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012 imposait l'envoi d'une mise en demeure par l'organisme de recouvrement ; qu'à défaut d'une telle mise en demeure, la procédure de recouvrement était irrégulière et la notification d'indu consécutive devait être annulée, le non-respect d'une condition de fond de régularité de la procédure faisant nécessairement grief à l'établissement poursuivi ; que la cour d'appel a constaté que les dispositions du décret du 7 septembre 2012 n'étaient pas applicables, qu'en retenant néanmoins la régularité de la procédure de recouvrement, la cour d'appel a violé les articles L. 133-4 et R. 133-9-1 du code de la sécurité sociale, le second dans sa rédaction antérieure au décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012, ensemble l'article R. 142-1 du code de la sécurité sociale ; Mais attendu que l'arrêt retient que si la caisse a appliqué à tort les dispositions du décret n° 2012-1032 du 7 septembre 2012, la clinique ne peut, cependant, invoquer aucune violation du contradictoire puisqu'elle a pu à la fois faire valoir ses observations et contester, au fond, devant la commission de recours amiable, le bien fondé de l'indu, avant de faire valoir ses droits devant la juridiction compétente ; Que de ces constatations et énonciations, faisant ressortir que la clinique avait eu la possibilité, nonobstant l'absence de mise en demeure, de contester l'indu devant le tribunal, la cour d'appel en a exactement déduit que la procédure était régulière ; D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ; Mais sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties en application de l'article 1015 du code de procédure civile : Vu les articles L. 6114-1, L. 6114-2, L. 6114-3 et L. 6114-4 du code de la santé publique et L. 162-22-2, L. 162-22-3, L. 162-22-4 et L. 162-22-5 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable à la date de la prescription des transports litigieux ; Attendu, selon les trois premiers de ces textes, que l'agence régionale de santé conclut avec les établissements de santé qu'ils mentionnent un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens d'une durée maximale de cinq ans qui détermine les orientations stratégiques de l'établissement et fixe des objectifs notamment en matière de qualité et de sécurité des soins, d'accueil et de traitement des patients et d'amélioration de la gestion ;
Cour d'appel de Versailles, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-11.947 du 11/07/2019, partie 1
que, selon le quatrième et le huitième, le montant des tarifs de prestations prises en charge par l'assurance maladie est fixé dans le respect des quatre derniers textes par un avenant tarifaire au contrat, les litiges en résultant relevant de la compétence du contentieux général de la sécurité sociale ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que si elle procède non d'une décision unilatérale de l'agence régionale de santé, mais d'une annexe annuelle au contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens pourvue d'effets réglementaires, la fixation des tarifs de prestations obéit exclusivement aux règles de prise en charge, objectifs quantifiés et modulations tarifaires déterminés par les autorités de l'Etat ; Attendu que pour débouter la caisse de sa demande en paiement de l'indu, l'arrêt retient que si le contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens, conclu entre la clinique et l'agence régionale de santé d'Ile-de-France, prévoit expressément, en plus du prix de journée tout compris, la prise en charge des frais de transport liés aux soins de chimiothérapie, de radiothérapie ou de dialyse, il est muet s'agissant des transports qui ne sont pas liés aux soins de suite et de réadaptation des personnes âgées pris en charge par la clinique et qui sont prescrits par des médecins non salariés de celle-ci ; que les avenants fixant le prix de journée, signés ultérieurement, ne comportent aucune précision à cet égard et que la caisse ne fournit aucun élément permettant de considérer que ces transports ont été pris en compte lors des discussions ayant conduit à la fixation du prix de journée ; Qu'en statuant ainsi, par des motifs tirés essentiellement des clauses du contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare recevable le recours de la société Clinique de la Défense et dit que la procédure de recouvrement de l'indu suivie par la caisse est régulière, l'arrêt rendu le 9 novembre 2017, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sauf sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ; Condamne la société Clinique de la Défense aux dépens ; Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze juillet deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale des Hauts-de-Seine en date du 26 septembre 2016 (RG 14/01134) en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a déclaré recevable le recours de la société Clinique de la Défense sa, d'avoir annulé la décision de rejet de la commission de recours amiable de la cpam des Hauts-de-Seine en date du 11 août 2014, d'avoir débouté la cpam des Hauts-de-Seine de sa demande de condamnation de la société Clinique de la Défense sa à lui payer la somme de 10 870,92 euros au titre du recouvrement d'un indu et d'avoir condamné la cpam des Hauts-de-Seine à payer à la société Clinique de la Défense sa une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile; AUX MOTIFS QUE « Sur l'indu La clinique souligne que la caisse a changé d'opinion par rapport à la pratique antérieure, sans s'expliquer sur ce revirement. En tout état de cause, la clinique relève que, pour les transports en cause, il est « incontestable que le soin ou la consultation pour lequel le patient doit se déplacer n'est ni prescrit ni réalisé par un médecin de SSR, ce que démontre un échantillon de convocations rédigées par des médecins extérieurs, contraignant la clinique du Villa Marie Louise (sic) à diligenter des transports pour les patients ». Les transports litigieux sont afférents à des consultations de suivi post-chirurgical ou dermatologique, par exemple, qui n'ont pas été prescrites par les médecins du SSR. En tout état de cause, l'indu ne pouvait pas être réclamé à la clinique, puisqu'elle n'avait perçu aucune somme. La caisse réplique, notamment, que les dispositions de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale lui permettent, en cas d'inobservation des règles de tarification ou de facture des frais de transport, de les recouvrer « auprès du professionnel ou de l'établissement à l'origine du non-respect de ces règles et ce, que le paiement ait été effectué à l'assuré, à un autre professionnel de santé ou à un établissement ».
Cour d'appel de Versailles, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-11.947 du 11/07/2019, partie 2
La caisse ajoute que la clinique « a souscrit des engagements spécifiques » en contrepartie d'un « prix de journée tout compris », à la seule exception, expressément prévue, des soins de dialyse, chimiothérapie et radiothérapie. Se référant à une note de l'ARS, la caisse souligne que celle-ci a relevé que les « tarifs ont été fixés après une étude approfondie des charges d'un ou deux établissements de référence pour chaque spécialisation et chaque poste de dépense a été étudié avec la Fédération Hospitalière privée et le représentant légal de l'établissement identifié comme premier demandeur et référence pour les autres structures exerçant la même modalité » (souligné par la caisse). Faute de dénonciation, l'engagement contractuel demeure valable. La caisse souligne qu'elle a rapporté la somme réclamée au montant de 10 890,72 euros et que la clinique est parfaitement à même d'identifier les dossiers concernés. La cour considère que la question n'est pas de savoir si l'indu peut ou non être réclamé à la clinique : les termes de l'article L. 133-4 du code de la sécurité sociale sont dénués de toute ambiguïté à cet égard et, si l'indu était considéré fondé, la clinique serait tenue au paiement des sommes réclamées par la caisse, dont le montant total, tel que rapporté par la CRA à la somme de 10 890,72 euros, n'est au demeurant pas contesté. Mais encore faudrait-il que cet indu puisse être réclamé par la clinique, ce qui n'est pas le cas. En effet, il est constant que, dans un souci de meilleure gestion mais surtout d'économie, l'agence régionale de l'hospitalisation d'Ile-de-France a souhaité mettre en place un système spécifique de prise en charge des soins, notamment des soins de suite et de réadaptation, par la signature de contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens. Aux termes de ces CPOM, l'établissement « s'engage à respecter les tarifs qui lui sont applicables tels que fixés par les avenants tarifaires. Il se conforme aux caractéristiques de fonctionnement attachées au bénéfice de modalités tarifaires particulières, notamment prix de journée tout compris (pour les cliniques privées) ». La cour ne peut que constater, à toutes fins, que le contrat est quelque peu confus, si l'on rapproche le « récapitulatif des annexes au contrat », qui : liste plus spécialement au nombre des activités de soins de la clinique, la chirurgie, la médecine, les SSR et les soins palliatifs ; décrit les « orientations stratégiques prioritaires de l'établissement comme étant la nécessité de répondre aux besoins de proximité de la population de Nanterre et alentours pour ce qui est de son activité de chirurgie et répondre en médecine, à son orientation cancérologue, tout en organisant la « prise en charge massive des bébés atteints de bronchiolites par le service de kinésithérapie respiratoire » ; et mentionne comme ‘actions prioritaires en relation avec les priorités du SROS' la lutte contre le cancer, y compris, selon l'annexe 4 jointe au contrat, les soins palliatifs. L'avenant tarifaire à effet du 1er mars 2011 prévoit un prix de journée de 312,36 euros. Le contrat a été prorogé par avenant du 31 mars 2012 (modifiant l'annexe 2-6 ‘soins de suite et réadaptation indifférenciés en hospitalisation complète' et ‘reconnaissance contractuelle pour la prise en charge des soins palliatifs). La cour note ici que cet avenant est sans effet sur la discussion en cause ici. Le contrat et ses annexes sont muets en ce qui concerne les transports, notamment les transports non liés aux SSR. Les avenants signés ultérieurement, qui fixent en particulier le prix de journée, ne comportent aucune précision à cet égard. Par ailleurs, la caisse ne conteste pas que sa réclamation résulte d'un changement d'interprétation des conventions, sans qu'elle ne fournisse aucune explication sur ce revirement. Pourtant, rien ne justifie que le principe du ‘prescripteur-payeur' soit remis en cause soudainement. Si les CPOM prévoient expressément trois exceptions, à savoir les transports liés aux soins de chimiothérapie, de radiothérapie ou de dialyse, il demeure que, comme la caisse l'a souligné elle-même dans ses écritures, chaque poste de dépense a été étudié par la fédération hospitalière avant que ne soit déterminé le prix de journée. Or, précisément, les transports en cause ici ne peuvent constituer un tel ‘poste de dépense' puisque, par définition, ils ne peuvent être ni anticipés ni connus par la clinique. En effet, il est constant que ces transports sont déterminés par la demande d'un médecin qui n'est pas le salarié de la clinique et à la demande duquel celle-ci ne saurait s'opposer (sauf motif impératif de santé, naturellement). En d'autres termes, imposer aux établissements privés de santé sous CPOM de payer pour de tels transports reviendrait à leur demander d'anticiper sur l'imprévisible. La caisse ne fournit au demeurant aucun élément d'aucune sorte qui permettrait de considérer que de tels transports ont été pris en compte lors des discussions ayant conduit au prix de journée. Enfin, la position de la caisse est incohérente puisque, si les transports devaient être pris en charge par la clinique, celle-ci devrait également prendre les soins justifiant ce transport. Or, précisément, la caisse ne demande pas que ces frais soient imputés à la clinique.
Cour d'appel de Versailles, Cour de cassation Deuxième chambre civile, décision 18-11.947 du 11/07/2019, partie 3
Il résulte de ce qui précède que c'est à tort que la caisse a prétendu au remboursement par la clinique, en fait par la société Clinéa, d'une somme d'un montant de 10 870, 92 euros » ; 1) ALORS QUE la fixation, dans le cadre d'un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (cpom), d'un prix de journée forfaitaire tout compris constitue un mode de facturation et de remboursement dérogatoire qui interdit à l'établissement de soins de réclamer, en sus du prix de journée convenu, le remboursement de frais de transports secondaires ne correspondant pas aux hypothèses de sortie de forfait expressément envisagées par le contrat et ses avenants tarifaires ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la clinique avait conclu un contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens stipulant un prix de journée tout compris et n'envisageant expressément une sortie de forfait que pour les seuls frais de transport liés aux soins de chimiothérapie, radiothérapie et dialyse ; qu'en considérant cependant que la clinique était en droit d'obtenir, en sus du prix de journée, le remboursement de frais de transport n'étant pas afférents à ces soins spécifiques, au prétexte que le contrat et ses annexes sont muets s'agissant des transports non liés aux soins de suite et de rééducation et que la caisse ne prouve pas que ceux-ci ont été envisagés lors de la négociation, la cour d'appel a violé les articles 1134 ancien et 1103 nouveau du code civil, L. 162-22-6, d, L. 322-5 et R. 322-10 du code de la sécurité sociale. 2) ALORS QUE l'erreur de droit ou la tolérance administrative ne sont pas créatrices de droits ; que la CPAM pouvait revenir sans s'en expliquer sur l'interprétation antérieure qu'elle faisait, à tort, de la convention litigieuse ; qu'en décidant le contraire la cour d'appel a violé les articles 1134 ancien et 1103 nouveau du code civil, L. 162-22-6, d, L. 322-5 et R. 322-10 du code de la sécurité sociale. Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Clinique de la Défense Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la procédure de recouvrement de l'indu suivie par la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine est régulière ; AUX MOTIFS QUE la Clinique fait notamment valoir que le tribunal des affaires de sécurité sociale a commis une erreur de droit en considérant que les dispositions du décret du 7 septembre 2012 s'appliquaient au litige ; Que selon la Clinique, ce décret n'est applicable qu'aux procédures relatives à des indus correspondant à des périodes postérieures à sa publication ; Qu'en l'espèce, les indus réclamés concernent, pour l'essentiel, des périodes antérieures ; que dès lors, ce sont les dispositions des articles L.133-4 et R.133-9 (dans leur rédaction issue du décret du 20 août 2009) du code de la sécurité sociale qui doivent s'appliquer, lesquelles imposent une procédure en trois temps : une notification émise par la Caisse de payer les sommes réclamées tout en invitant le débiteur à présenter ses observations ; en cas de rejet total ou partiel de ces observations et en l'absence de règlement de l'indu, une mise en demeure de payer ; le débiteur peut contester cette mise en demeure devant la commission de recours amiable ; Que la CPAM considère, pour sa part, qu'il est indifférent qu'une mise en demeure ait été adressée à l'issue du contrôle d'activité de la Clinique et que le décret du 7 septembre 2012 « s'applique aux indus des établissements de santé nés de la méconnaissance des règles de tarification et de facturation » ; que la caisse souligne que les nouvelles dispositions sont plus favorables au débiteur de l'indu « en ce sens qu'elle (s) lui offre(nt) des délais plus longs pour faire valoir ses droits et une option supplémentaire dès le stade de la notification », puisque le débiteur peut désormais, dès réception de la notification, choisir de formuler des observations "et/ou saisir la CRA ", dans le délai de deux mois ; Que la caisse relève que la Cour de cassation a reconnu le bienfondé de son argumentation dans un arrêt du 15 décembre 2016 (pourvoi n°15-28.915) ; Que la cour de céans considère que, si c'est à tort que la CPAM a cru pouvoir appliquer le décret du 7 septembre 2012 à l'espèce, alors qu'il ne lui était pas applicable, force est de constater que la Clinique ne peut alléguer aucune violation du contradictoire puisqu'elle a pu à la fois faire valoir ses observations et contester au fond, devant la commission de recours amiable de la Caisse, le bien-fondé de l'indu qui lui était réclamé, avant que de ne faire valoir ses droits devant la juridiction sociale compétente ; Qu'aucun grief ne peut être allégué par la Clinique du fait de la procédure suivie par la Caisse ; ALORS QUE la règlementation en matière de recouvrement d'indu antérieurement à la mise en oeuvre du décret n°2012-1032 du 7 septembre 2012 imposait l'envoi d'une mise en demeure par l'organisme de recouvrement ;
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qu'à défaut d'une telle mise en demeure, la procédure de recouvrement était irrégulière et la notification d'indu consécutive devait être annulée, le non-respect d'une condition de fond de régularité de la procédure faisant nécessairement grief à l'établissement poursuivi ; que la cour d'appel a constaté que les dispositions du décret du 7 septembre 2012 n'étaient pas applicables, qu'en retenant néanmoins la régularité de la procédure de recouvrement, la cour d'appel a violé les articles L.133-4 et R.133-9-1 du code de la sécurité sociale, le second dans sa rédaction antérieure au décret n°2012-1032 du 7 septembre 2012, ensemble l'article R.142-1 du code de la sécurité sociale.
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