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INCA/JURITEXT000046555898.xml
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 760 F-D Pourvoi n° A 21-18.806 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 La société Compagnie Européenne de Garanties et Cautions, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° A 21-18.806 contre l'arrêt rendu le 18 mars 2021 par la cour d'appel d'Amiens (chambre économique), dans le litige l'opposant à M. [E] [V], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de la société Compagnie Européenne de Garanties et Cautions, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [V], après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 18 mars 2021), la Caisse d'épargne de Picardie (la banque) a consenti à M. [V] (l'emprunteur) un prêt immobilier, dont la société SACCEF, aux droits de laquelle vient la société Compagnie Européenne de Garanties et Cautions (la caution), s'est portée caution solidaire. 2. La caution, qui a réglé le solde du prêt après mise en demeure de l'emprunteur par la banque et déchéance du terme, a assigné l'emprunteur en remboursement. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. La caution fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que l'obligation de la caution est distincte de celle du débiteur principal ; que le caractère accessoire du cautionnement ne permet pas au débiteur principal d'opposer à la caution qui exerce son recours personnel les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier, que ces exceptions aient trait à l'extinction de la dette ou à son exigibilité ; qu'en retenant, pour débouter la CEGC de ses demandes, que la faute du prêteur quant aux modalités entreprises afin de prononcer la déchéance du terme du crédit consenti, pouvait utilement être opposée à la caution, la cour d'appel a violé l'article 2305 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 2305 du code civil : 4. Selon ce texte, la caution, qui a payé, dans les limites de son engagement, une dette non éteinte, a un recours personnel contre le débiteur principal. 5. Il s'en déduit que le débiteur ne peut opposer à la caution, qui exerce son recours personnel, les exceptions qu'il eût pu opposer au créancier, telles une irrégularité de la déchéance du terme de sa dette, celle-ci n'étant pas une cause d'extinction de ses obligations. 6. Pour rejeter les demandes de la caution, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que les prétentions de la caution se fondent sur le recours personnel et, par motifs propres, que celle-ci devait vérifier, à la date à laquelle son engagement était appelé, l'existence d'une dette exigible non honorée par le débiteur principal et qu'elle ne disposait pas d'une telle preuve. 7. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai ; Condamne M. [V] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [V] et le condamne à payer à société Compagnie Européenne de Garanties et Cautions la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat aux Conseils, pour la société Compagnie Européenne de Garanties et Cautions PREMIER MOYEN DE CASSATION La CEGC fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes ; 1) Alors que l'obligation de la caution est distincte de celle du débiteur principal ; que le caractère accessoire du cautionnement ne permet pas au débiteur principal d'opposer à la caution qui exerce son recours personnel les exceptions qu'il aurait pu opposer au créancier, que ces exceptions aient trait à l'extinction de la dette ou à son exigibilité ; qu'en retenant, pour débouter la CEGC de ses demandes, que la faute du prêteur quant aux modalités entreprises afin de prononcer la déchéance du terme du crédit consenti, pouvait utilement être opposée à la caution, la cour d'appel a violé l'article 2305 du code civil ; 2) Alors que la caution ne perd ses recours contre le débiteur que si elle a payé, sans être poursuivie, sans avoir averti le débiteur principal, et si ce débiteur aurait eu, au moment du paiement, des moyens pour faire déclarer la dette éteinte ; que ces trois conditions sont cumulatives ; que, au cas présent, la cour d'appel a constaté que la caution avait payé sur poursuites de la banque (arrêt, p. 8, § 5), ce dont il résultait que les conditions de l'article 2308 du code civil sur la perte des recours n'étaient pas réunies, peu important que la caution ait averti le débiteur principal avant paiement ; qu'en déboutant néanmoins la Compagnie Européenne de garanties et cautions de ses demandes aux motifs que « l'article 2308 alinéa 2 du [code civil] dispose que lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu les moyens pour faire déclarer la dette éteinte » et que « la CEGC produit la quittance subrogative émise mais ne justifie pas avoir averti le débiteur principal de son paiement avant qu'il n'intervienne », la cour d'appel a violé l'article 2308 du code civil ; 3) Alors que l'irrégularité de la déchéance du terme affecte l'exigibilité de la dette et non son existence ; qu'au cas présent le débiteur ne soutenait pas avoir eu des moyens de faire déclarer la dette éteinte, mais seulement des moyens de faire déclarer irrégulière la déchéance du terme, de sorte que les conditions de l'article 2308 n'étaient pas réunies ; qu'en déboutant néanmoins la Compagnie Européenne de garanties et cautions de ses demandes aux motifs que « l'article 2308 alinéa 2 du [code civil] dispose que lorsque la caution aura payé sans être poursuivie et sans avoir averti le débiteur principal, elle n'aura point de recours contre lui dans le cas où, au moment du paiement, ce débiteur aurait eu les moyens pour faire déclarer la dette éteinte » et que « la CEGC produit la quittance subrogative émise mais ne justifie pas avoir averti le débiteur principal de son paiement avant qu'il n'intervienne », la cour d'appel a violé l'article 2308 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION La CEGC fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes ; 1) Alors que, à supposer que la faute du créancier dans le prononcé de la déchéance du terme soit opposable à la caution qui exerce son recours personnel, la dette était alors partiellement exigible, à hauteur des échéances échues et non payées par M. [V] au jour de l'arrêt ; que la cour d'appel elle-même a énoncé que « la créance de la Caisse d'Épargne de Picardie réclamée à hauteur de 83 893,16€ dont le capital restant dû au 8 septembre 2016 n'était pas exigible dans son intégralité » (p. 8, § 5), ce dont il résultait que la cour d'appel aurait dû à tout le moins faire droit à la demande de la CEGC pour la part de la dette exigible au jour où elle statuait ; qu'en déboutant néanmoins la caution de l'intégralité de ses demandes en paiement, la cour d'appel a violé l'article 2305 du code civil ; 2) Alors que, à supposer que la faute du créancier dans le prononcé de la déchéance du terme soit opposable à la caution, la conséquence n'en serait pas, pour la caution, la perte de ses recours, mais le report de la recevabilité de ses recours au jour où le terme sera régulièrement échu ; en déboutant purement et simplement la CEGC de ses demandes, sans avoir précisé au préalable que la demande était irrecevable car prématurée, la cour d'appel a violé les articles 2305 et 2306 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Cassation partielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 757 F-D Pourvoi n° D 20-18.920 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 1°/ Mme [E] [P], épouse [WL], domiciliée [Adresse 16], 2°/ M. [O] [VS], 3°/ M. [XJ] [VS], pris tous deux en qualité d'héritiers de [Z] [GA], veuve [VS], décédée, domiciliés [Adresse 11], 4°/ Mme [J] [UU], veuve [GA], 5°/ Mme [LF] [GA], épouse [I], 6°/ Mme [Z] [GA], épouse [L], pris tous trois en qualité d'héritiers de [Y] [IP] [GA], décédé, domiciliée [Adresse 14], 7°/ Mme [TC] [GA], épouse [FC], domiciliée [Adresse 6], 8°/ Mme [V] [GA], épouse [SE], domiciliée [Adresse 4], 9°/ Mme [RK] [GA], épouse [PM], domiciliée [Adresse 9], 10°/ M. [T] [GA], domicilié [Adresse 13], 11°/ Mme [R] [GA], épouse [ZZ], domiciliée [Adresse 1], 12°/ Mme [M] [GA], domiciliée [Adresse 12], 13°/ M. [A] [GA], domicilié [Adresse 7] tous pris en qualité d'héritiers d'[D] [H] [GA], décédé, 14°/ Mme [ZB] [U], épouse [K],, domiciliée [Adresse 8], 15°/ Mme [EI] [G] [U], épouse [I],, domiciliée [Adresse 2], 16°/ M. [W] [U], domicilié [Adresse 15], 17°/ Mme [F] [U], [Adresse 3], 18°/ Mme [MX] [U], domiciliée [Adresse 10], tous pris en qualité d'héritiers de [B] [GA] veuve [U], décédée, ont formé le pourvoi n° D 20-18.920 contre l'arrêt rendu le 17 octobre 2019 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre B), dans le litige les opposant à M. [OO] [X], domicilié [Adresse 5], défendeur à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de Mme [P], de M. [VS], de Mme [UU] veuve [GA], de Mmes [LF] et [Z] [GA], de MM. [T] et [A] [GA], de Mmes [ZB] et [EI] [U], de M. [U], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [X], après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 17 octobre 2019), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 15 juin 2017, pourvoi n° 16-20.446), [XJ] [N], qui avait souscrit quatre contrats d'assurance sur la vie en 1995 et 1999, a été placé sous tutelle le 4 juin 2002. M. [X], notaire, nommé en qualité de tuteur, a fait modifier la clause désignant les bénéficiaires de trois des contrats précités au profit de légataires institués par testament. 2. [XJ] [N] est décédé le 12 janvier 2008, en laissant pour lui succéder des héritiers non réservataires, Mme [GA], MM. [Y] et [D] [GA], MM. [O] et [XJ] [VS], Mme [P] (les consorts [GA]-[VS]) et M. [S]. 3. Après ce décès, M. [X] a produit un testament olographe daté du 25 décembre 1998 et un codicille daté du 24 décembre 2000, instituant ses enfants, [C] et [UA], légataires universels. 4. Les consorts [GA]-[VS] ont assigné M. [X] en nullité du testament, du codicille et des modifications des clauses bénéficiaires des contrats d'assurance sur la vie, ainsi qu'en responsabilité. Examen des moyens Sur le deuxième moyen, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 6. Les consorts [GA]-[VS] font grief à l'arrêt de condamner M. [X] à leur verser la somme de 30 000 euros pour préjudice moral et de rejeter leurs autres demandes, alors « les juges du fond ne doivent pas dénaturer les termes du litige tels qu'ils sont déterminés par les conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les consorts [GA]-[VS] dénonçaient le comportement fautif et malhonnête de la part du tuteur pourtant officier ministériel ; qu'ils faisaient valoir que M. [X] avait engagé sa responsabilité en sa qualité de tuteur mais aussi de notaire liquidateur ; qu'en se fondant sur les règles de la responsabilité civile, les consorts [GA]-[VS] demandaient à la cour d'appel, au visa de l'article 1382 du code civil, de constater que M. [X] a contrevenu aux obligations déontologiques régissant sa profession de notaire mais également aux obligations lui incombant en qualité de tuteur et de condamner M. [X] à leur verser les sommes de : 559.422,79 euros au titre des contrats d'assurance-vie détournés ; qu'en rejetant cette demande, au motif que les intimés ne peuvent invoquer la solidarité et demander la condamnation in solidum ou solidairement à la restitution des sommes figurant sur les contrats d'assurance vie, compte tenu que les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie n'ont pas été appelés à la cause, la cour d'appel, qui a transformé une demande d'indemnisation en une demande de restitution, a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis : 7. Pour rejeter la demande de condamnation de M. [X] à leur verser la somme de 559 422,79 euros, l'arrêt retient que les consorts [GA]-[VS] ne peuvent invoquer la solidarité et demander sa condamnation in solidum ou solidairement à la restitution des sommes figurant sur les contrats d'assurance vie, dès lors que les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie n'ont pas été appelés à l'instance. 8. En statuant ainsi, alors que, dans leurs conclusions, les consorts [GA]-[VS] demandaient la condamnation de M. [X] à leur payer, à titre de dommages-intérêts, une somme équivalente à celle figurant sur les contrats d'assurance vie, en réparation des fautes par lui commises en qualités de notaire et de tuteur, la cour d'appel, qui a dénaturé ces écritures, a violé le principe susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de condamnation de M. [X] en paiement de la somme de 559 422,79 euros au titre des contrats d'assurance-vie détournés, l'arrêt rendu le 17 octobre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ; Condamne M. [X] aux dépens En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour Mme [P], M. [VS], Mme [UU] veuve [GA], Mmes [LF] et [Z] [GA], MM. [T] et [A] [GA], Mmes [ZB] et [EI] [U], M. [U] PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué ayant condamné M. [X] à verser la somme de 30.000 euros aux consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] pour préjudice moral, d'AVOIR débouté les parties de leurs autres demandes ; AUX MOTIFS QUE, sur la demande de condamnation de M. [OO] [X] au titre des contrats d'assurance-vie détournés et au titre du préjudice moral, les consorts [GA]-[VS] poursuivent la condamnation de M. [OO] [X] à leur verser la somme de 559.422,79 € au titre des contrats d'assurance-vie détournés et la somme de 30.000 € au titre du préjudice moral ; M. [OO] [X] oppose l'irrecevabilité de ces prétentions financières, au motif qu'il s' agit d'une demande nouvelle, relevant qu'en première instance, la partie adverse demandait la restitution immédiate, par les consorts [X], de toutes les sommes dont ils ont été bénéficiaires au titre du testament et du codicille, ainsi que des contrats d'assurances-vie et la condamnation de M. [OO] [X] seul à leur verser la somme de 30.000 €, toutes causes de préjudices confondus ; qu'il rappelle qu'il n'est pas le bénéficiaire des contrats d'assurance-vie et que la somme de 559.422,79 € ne peut lui être réclamée, indiquant qu'il n'y a pas de dommage, puisque les contrats d'assurance-vie ont pour bénéficiaires ceux qui étaient initialement dès lors que ses enfants [C] et [UA] [X], ont accepté de ne pas se prévaloir des clauses modificatives ; que les consorts [GA]-[VS] font valoir que leur demande indemnitaire est la même qu'en première instance, majorée ; qu'ils estiment que la responsabilité in solidum de M. [OO] [X] peut être recherchée, dès lors qu'il a concouru au dommage qu'ils ont subi, constitué par le détournement des actifs de M. [XJ] [N] ; qu'indépendamment de l'affirmation de M. [OO] [X] selon laquelle ses enfants [C] et [UA] [X] ont accepté de ne pas se prévaloir des clauses modificatives des contrats d'assurance-vie, les intimés ne peuvent invoquer la solidarité et demander la condamnation in solidum ou solidairement à la restitution des sommes figurant sur les contrats d'assurance vie, compte tenu que les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie n'ont pas été appelés à la cause ; que, s'agissant de la demande au titre du préjudice moral, M. [OO] [X] fait valoir que sa responsabilité ne peut être engagée que s'il est démontré qu'il n'a pas agi en bon père de famille ; qu'à cet égard, la chambre des notaires a reconnu qu'il avait manqué de prudence et qu'il aurait dû solliciter la nomination d'un subrogé-tuteur ou d'un tuteur ad hoc, afin d'éviter tout conflit d'intérêt ; qu'au demeurant, à l'époque de la rédaction du testament d'origine, M. [XJ] [N] était considéré comme parfaitement capable et avait clairement manifesté son intention libérale au profit d'un membre de la famille [X] avec laquelle il entretenait des relations fortes et continues ; qu'il rappelle que les contrats d'assurance-vie ont été souscrits au cours des années 1995 à 1999 et qu'il a été désigné comme administrateur légal le 4 juin 2002 ; qu'il rappelle encore que, lors de la modification des clauses bénéficiaires des contrats en 2005, il a sollicité le juge des tutelles pour être autorisé à modifier les clauses bénéficiaires des contrats PREVI RETRAITE, PREVI OPTION et PREVI ACTION souscrits chez Suravenir et n'a donc pas manqué à ses obligations de tuteur ; qu'il admet toutefois qu'il aurait dû informer le juge des tutelles que les bénéficiaires seraient ses enfants ; qu'en première instance, le tribunal a considéré que M. [OO] [X] était en opposition d'intérêt évidente avec M. [XJ] [N], comme ayant fait procéder à la modification des clauses bénéficiaires de quatre contrats d'assurance-vie souscrits par M. [N] et de manière à ce que ses enfants soient désignés légataires ; qu'en sa qualité de notaire, il était parfaitement informé des conséquences, à savoir une forte diminution des sommes à revenir aux héritiers de sang de M. [N], les modifications opérées conduisant à ce que les deux contrats d'assurance-vie les plus importants reviennent intégralement à ses propres enfants et que l'information donnée au juge des tutelles, selon laquelle les légataires étaient ses propres enfants, aurait pu constituer un obstacle à ce que l'autorisation d'une modification des bénéficiaires soit donnée ; que cette appréciation sera suivie, l'absence d'information du juge des tutelles pour des actes ayant des conséquences financières importantes ne pouvant être considérée comme une simple imprudence de la part d'un professionnel averti ; que les consorts [GA]-[VS] sont fondés à demander l'indemnisation du préjudice moral découlant de découverte des agissements de M. [OO] [X] et il leur sera alloué à ce titre la somme de 30.000 € ; que les dispositions à ce titre du jugement du 24 février 2015 seront donc partiellement réformées ; 1) ALORS QUE les juges du fond ne doivent pas dénaturer les termes du litige tels qu'ils sont déterminés par les conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, les consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] dénonçaient le comportement « fautif et malhonnête de la part du tuteur pourtant officier ministériel » (concl., p. 17) ; qu'ils faisaient valoir que Me [X] avait engagé sa responsabilité en sa qualité de tuteur mais aussi de notaire liquidateur (concl. p. 22-23) ; qu'en se fondant sur les règles de la responsabilité civile, les consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] demandaient à la cour d'appel, au visa de l'article 1382 du code civil, de « constater que M. [X] a contrevenu aux obligations déontologiques régissant sa profession de notaire mais également aux obligations lui incombant en qualité de tuteur » et de « condamner M. [X] à [leur verser] les sommes de : 559.422,79 € au titre des contrats d'assurance-vie détournés » (concl. p. 31) ; qu'en rejetant cette demande, au motif que « les intimés ne peuvent invoquer la solidarité et demander la condamnation in solidum ou solidairement à la restitution des sommes figurant sur les contrats d'assurance vie, compte tenu que les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie n'ont pas été appelés à la cause », la cour d'appel, qui a transformé une demande d'indemnisation en une demande de restitution, a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ; 2) ALORS QUE les juges du fond ne doivent pas dénaturer les termes du litige tels qu'ils sont déterminés par les conclusions respectives des parties ; qu'en l'espèce, se fondant sur les règles de la responsabilité civile, les consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] demandaient à la cour d'appel de « constater que M. [X] a contrevenu aux obligations déontologiques régissant sa profession de notaire mais également aux obligations lui incombant en qualité de tuteur » et de « condamner M. [X] à [leur verser] les sommes de : 559.422,79 € au titre des contrats d'assurance-vie détournés » ; qu'en rejetant cette demande, au motif que « les intimés ne peuvent invoquer la solidarité et demander la condamnation in solidum ou solidairement à la restitution des sommes figurant sur les contrats d'assurance vie, compte tenu que les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie n'ont pas été appelés à la cause », tandis que la demande des consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] était expressément dirigée contre M. [X] seul, la cour d'appel a dénaturé les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile ; 3) ALORS QUE chacun des auteurs responsables d'un même dommage est tenu de le réparer en entier ; qu'en l'espèce, se fondant sur les règles de la responsabilité civile, les consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] demandaient à la cour d'appel de « constater que M. [X] a contrevenu aux obligations déontologiques régissant sa profession de notaire mais également aux obligations lui incombant en qualité de tuteur » et de « condamner M. [X] à [leur verser] les sommes de : 559.422,79 € au titre des contrats d'assurance-vie détournés » ; qu'en rejetant cette demande, au motif que « les intimés ne peuvent invoquer la solidarité et demander la condamnation in solidum ou solidairement à la restitution des sommes figurant sur les contrats d'assurance vie, compte tenu que les bénéficiaires des contrats d'assurance-vie n'ont pas été appelés à la cause », quand la victime d'un dommage peut agir contre n'importe lequel des coauteurs de celui-ci pour en obtenir entière réparation, la cour d'appel a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil ; 4) ALORS QUE tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en l'espèce, se fondant sur les règles de la responsabilité civile, les consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] demandaient à la cour d'appel de « constater que M. [X] a contrevenu aux obligations déontologiques régissant sa profession de notaire mais également aux obligations lui incombant en qualité de tuteur » et de « condamner M. [X] à [leur verser] les sommes de : 559.422,79 € au titre des contrats d'assurance-vie détournés » ; que la cour d'appel a relevé, à la suite des premiers juges, que Me [X] était « en opposition d'intérêt évidente avec M. [XJ] [N] », lorsqu'il a procédé à la modification des clauses d'attribution des contrats d'assurance-vie au profit de ses enfants et « qu'en sa qualité de notaire, il était parfaitement informé des conséquences, à savoir une forte diminution des sommes à revenir aux héritiers de sang de M. [N] » et que « l'information donnée au juge des tutelles, selon laquelle les légataires étaient ses propres enfants, aurait pu constituer un obstacle à ce que l'autorisation d'une modification des bénéficiaires soit donnée » ; qu'elle a ainsi caractérisé la faute de Me [X] et le préjudice financier en résultant pour les consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] ; qu'en rejetant néanmoins leur demande d'indemnisation de ce préjudice financier, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué ayant condamné M. [X] à verser la somme de 30.000 euros aux consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] pour préjudice moral, d'AVOIR débouté les parties de leurs autres demandes ; AUX MOTIFS QUE, sur la facture de 2.990 €, M. [OO] [X] indique qu'il s'agit d'une facture émise par son étude correspondant à des frais et honoraires relatifs à l'affaire en référence du règle de la succession [N] pour un montant de 2.500 € HT, ayant dû recourir à un cabinet de généalogiste pour rechercher l'existence d'héritiers naturels dans la branche maternelle ; que la dépense qui relève des frais de succession devra être examinée dans le cadre de la liquidation de la succession de M. [XJ] [N] ; ALORS QUE le juge a l'obligation de trancher les litiges qui lui sont soumis ; qu'en l'espèce, les consorts [U]-[GA]-[VS]-[WL] demandaient à la cour d'appel de dire et juger que la facture du 15 décembre 2005 d'un montant de 2.990 euros devra être exclue du passif successoral ; qu'en se bornant à décider « que la dépense qui relève des frais de succession devra être examinée dans le cadre de la liquidation de la succession de M. [XJ] [N] », la cour d'appel a commis un déni de justice et violé l'article 4 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Cassation partielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 758 F-D Pourvoi n° J 21-17.296 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 La société Banque internationale à Luxembourg, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3] (Luxembourg), a formé le pourvoi n° J 21-17.296 contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2021 par la cour d'appel de Metz (chambre commerciale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [O] [Y], domicilié [Adresse 1], 2°/ à Mme [J] [E], épouse [Y], domiciliée [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de la SCP Didier et Pinet, avocat de la société Banque internationale à Luxembourg, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [Y], après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Metz, 28 janvier 2021), M. [Y] et Mme [E], son épouse (les cautions), se sont portés cautions de deux crédits utilisables en compte consentis par la société de droit luxembourgeois Banque Internationale à Luxembourg (la banque) à la société de droit luxembourgeois Eco NRJ Lux (l'emprunteur). 2. L'emprunteur ayant été placé en état de faillite au Luxembourg, la banque a assigné en paiement les cautions, qui ont sollicité des dommages-intérêts équivalents aux créances avec compensation pour manquement de la banque au devoir de mise en garde. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 4. La banque fait grief à l'arrêt attaqué de la condamner à payer à chacune des cautions des dommages-intérêts au titre de la perte de chance concernant leurs engagements de caution, alors « que, subsidiairement, les juges du fond ne peuvent d'office qualifier le préjudice de perte de chance, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, les cautions demandaient la condamnation de la BIL à leur verser une indemnité équivalente aux montants dus à celle-ci au titre de leurs engagements de caution, tandis que la BIL sollicitait le rejet de la demande d'indemnisation ; que dès lors, en jugeant que le préjudice subi par les cautions s'analysait en une perte de chance concernant leurs engagements de cautions, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle a relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l' article 16 du code de procédure civile : 5. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. 6. Pour accueillir la demande reconventionnelle des cautions en paiement de dommages-intérêts, l'arrêt retient que la banque a manqué à son devoir de mise en garde, que cette faute est susceptible de sanctions contractuelles en droit luxembourgeois comme en droit français et que le juge du fond apprécie souverainement le préjudice subi, lequel consiste en une perte de chance. 7. En statuant ainsi, sans avoir préalablement invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office et tiré de la perte de chance, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la troisième branche du moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Banque Internationale à Luxembourg à payer à M. et Mme [Y], la somme de 12 500 euros chacun de dommages-intérêts au titre de la perte de chance concernant leur engagement de caution pour le crédit du 30 octobre 2015 et la somme de 20 000 euros chacun de dommages-intérêts au titre de la perte de chance concernant leur engagement de caution pour le crédit du 2 novembre 2015 et rappelle que la compensation s'opère de plein droit entre les créances réciproques des parties, l'arrêt rendu le 28 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Metz ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ; Condamne M. et Mme [Y] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [Y] et les condamne à payer à la société Banque Internationale à Luxembourg la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Didier et Pinet, avocat aux Conseils, pour la société Banque internationale à Luxembourg La BIL fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer à M. [O] [Y] et à Mme [E], épouse [Y], chacun, la somme de 12 500 € de dommages et intérêts au titre de la perte de chance concernant son engagement de caution pour le crédit du 30 octobre 2015 et la somme de 20 000 € de dommages et intérêts au titre de la perte de chance concernant son engagement de caution pour le crédit du 2 novembre 2015 ; 1°) ALORS QUE le vendeur qui propose régulièrement des opérations globales comprenant un contrat de vente et un crédit affecté, destiné exclusivement à financer l'acquisition, ne peut ignorer les risques découlant de la souscription d'un crédit et dispose donc de compétences particulières en matière financière ; qu'en se bornant, dès lors, à énoncer, pour considérer que les époux [Y] étaient des cautions profanes, que même s'ils étaient les fondateurs et dirigeants de la société débitrice principale et de deux autres établissements également spécialisés dans la pose et la fourniture de centrales photovoltaïques, dont les clients finançaient les acquisitions de matériels au moyen de crédits à la consommation, la BIL ne justifierait pas qu'ils auraient eu, de ce fait, une compétence particulière en matière bancaire, sans répondre au moyen qui faisait valoir que les opérations de crédit à la consommation permettant de financer les matériels vendus constituaient des crédits affectés mis en place à l'initiative du vendeur des installations et donc des époux [Y], ce qui était de nature à établir qu'ils disposaient de compétences suffisantes en matière financière pour apprécier la portée et les risques de leurs engagements de cautions, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS, subsidiairement, QUE les juges du fond ne peuvent d'office qualifier le préjudice de perte de chance, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, les époux [Y] demandaient la condamnation de la BIL à leur verser une indemnité équivalente aux montants dus à celle-ci au titre de leurs engagements de caution, tandis que la BIL sollicitait le rejet de la demande d'indemnisation ; que dès lors, en jugeant que le préjudice subi par les époux [Y] s'analysait en une perte de chance concernant leurs engagements de cautions (arrêt, p. 7, § 10), sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen qu'elle a relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3°) ALORS, encore plus subsidiairement, QUE le juge doit motiver sa décision ; que dès lors, en se bornant à affirmer qu'il convenait de condamner la BIL à payer aux époux [Y] chacun la somme de 12 500 € au titre de la perte de chance de concernant leurs engagements de caution pour le crédit du 30 octobre 2015 et la somme de 20 000 € chacun au titre de la perte de chance concernant leurs engagements de caution du crédit pour le 2 novembre 2015, sans s'expliquer sur la nature de la chance perdue, la cour d'appel, qui a statué par voie de simple affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 756 F-D Pourvoi n° W 21-11.810 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 Mme [R] [U], veuve [W], domiciliée [Adresse 1], [Localité 3], a formé le pourvoi n° W 21-11.810 contre l'arrêt rendu le 15 décembre 2020 par la cour d'appel de Pau (1re chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société [J] [I], société civile professionnelle, notaire associé d'une société, titulaire d'un office notarial, anciennement dénommée SCP Jean-Michel Saint-Macary et [J] [I] notaires associés, dont le siège est [Adresse 4], [Localité 2], 2°/ à M. [J] [I], domicilié [Adresse 4], [Localité 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [U], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [J] [I] et de M. [I], après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Pau, 15 décembre 2020), [G] [W] est décédé le 27 juin 2008, en laissant pour lui succéder son épouse, Mme [U], avec laquelle il était marié sous le régime de la communauté universelle, et ses deux filles issues d'une précédente union. 2. Par acte du 29 juin 2009, reçu par M. [I] (le notaire), notaire associé au sein de la SCP Jean-Michel Saint-Macary et [J] Pointoizeau devenue la SCP [J] [I] (la SCP), il a été procédé au partage amiable de la succession. 3. Un arrêt du 19 juin 2017 a rejeté la demande de Mme [U] tendant à l'annulation de cet acte. 4. Reprochant au notaire d'avoir manqué à son devoir de conseil sur l'indemnité de réduction mise à sa charge, Mme [U] l'a assigné, ainsi que la SCP, en responsabilité et indemnisation. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 5. Mme [U] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « que le notaire rédacteur d'un acte doit faire la preuve qu'il a utilement informé et conseillé son client, relativement à la portée de l'acte qu'il se propose de lui faire signer ; qu'en se bornant, pour débouter Mme [U], veuve [W], de ses demandes indemnitaires dirigées contre le notaire, à affirmer que Mme [U], veuve [W], aurait été mise à même d'appréhender les modifications du projet de partage au fur et à mesure de leur émission, sans préciser sur quoi elle fondait une telle allégation et alors que M. [I] n'établissait aucun échange avec elle entre décembre 2008 et juin 2009, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1315 et 1382 anciens du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil : 6. Il résulte de ce texte que le notaire est tenu d'informer et d'éclairer les parties, de manière complète et circonstanciée, sur la portée, les effets et les risques de l'acte auquel il prête son concours. La preuve du conseil donné, qui incombe au notaire, peut résulter de toute circonstance ou document établissant que le client a été averti clairement des risques inhérents à l'acte que le notaire a instrumenté. 7. Pour rejeter la demande indemnitaire dirigée contre la SCP et le notaire, la cour d'appel, après avoir rappelé que celui-ci avait envoyé à Mme [U] le 15 décembre 2008 un projet de liquidation de la communauté et de la succession qui évaluait à 220 107,24 euros le montant de l'indemnité de réduction due par elle, puis, le 17 décembre 2008, un projet de déclaration de succession qui évaluait cette indemnité à la somme de 167 101,34 euros, enfin, le 12 juin 2009, un courrier par lequel il se bornait à indiquer à Mme [U] qu'il se tenait à sa disposition pour toute explication sur le projet d'acte de partage joint qui évaluait cette même indemnité à la somme de 717 602,80 euros, projet sur la base duquel l'acte notarié de partage, qui portait le montant de l'indemnité de réduction à 884 404,14 euros, avait été signé le 29 juin 2009, a retenu que Mme [U] avait bénéficié d'un temps de réflexion suffisant entre le dernier courrier contenant le projet d'acte et la signature de celui-ci et que l'acte notarié était le fruit de concessions réciproques portant transaction, de sorte que le notaire avait rempli son obligation de conseil, en permettant à sa cliente d'appréhender les différents éléments pris en compte, ainsi que les modifications apportées au cours des échanges avec les deux autres héritières. 8. En se déterminant ainsi, sans constater que le notaire avait précisément attiré l'attention de Mme [U] sur la réintégration à la masse successorale d'un montant de primes d'assurance-vie de 923 536,15 euros, ce qui portait l'indemnité de réduction de 167 101,34 euros à 884 404,14 euros, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 décembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Pau ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ; Condamne M. [I] et la société [J] [I] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [I] et la société [J] [I] et les condamne à payer à Mme [U] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour Mme [U] Mme [U], veuve [W], fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement entrepris, en ce qu'il l'avait déboutée de ses demandes dirigées contre la SCP de notaires Saint-Macary [I] et contre Me [I] ; 1°) ALORS QUE le notaire doit faire la preuve qu'il a utilement conseillé son client, relativement à la portée de l'acte qu'il se propose de lui faire signer ; qu'en se fondant, pour juger que Me [I] avait suffisamment informé et conseillé sa cliente, Mme [U], Vve [W], relativement à l'acte de partage/transaction du 29 juin 2009, sur trois courriers qui avaient été adressés par le notaire à sa cliente, les 15 et 17 décembre 2008, d'une part, et le 12 juin 2009 (projet d'acte notarié sans commentaires), d'autre part, après avoir pourtant constaté, par motifs adoptés des premiers juges, que le courrier du 17 décembre 2008 faisait état d'une indemnité de réduction de 167 101,34 €, tandis que le projet d'acte envoyé le 12 juin 2009 portait cette indemnité à 717 602,80 € et qu'aucun courrier n'avait été adressé entretemps à Mme [U], Vve [W], ce dont il résultait que le notaire n'avait nullement attiré l'attention de sa cliente sur le risque – réel ou supposé – de réduction qu'elle encourait, ni ne l'avait clairement informée de son initiative de réintégrer à la masse successorale un montant de primes de 923 536,15 €, ce qui portait l'indemnité de réduction de 167 101,34 € (courrier du 17 décembre 2008) à 717 602,80 € (projet du 12 juin 2009), puis finalement à 884 404,14 € dans l'acte signé le 29 juin 2009, la cour d'appel a violé les articles 1315 et 1382 anciens du code civil ; 2°) ALORS QUE le notaire rédacteur d'un acte doit faire la preuve qu'il a utilement informé et conseillé son client, relativement à la portée de l'acte qu'il se propose de lui faire signer ; qu'en se bornant, pour débouter Mme [U], Vve [W], de ses demandes indemnitaires dirigées contre Me [I], à affirmer que Mme [U], Vve [W], aurait été mise à même d'appréhender les modifications du projet de partage au fur et à mesure de leur émission, sans préciser sur quoi elle fondait une telle allégation et alors que Me [I] n'établissait aucun échange avec elle entre décembre 2008 et juin 2009, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1315 et 1382 anciens du code civil ; 3°) ALORS QUE le notaire doit informer et conseiller sa cliente, de manière positive, et ne peut se contenter de se tenir à sa disposition pour répondre à ses questions ; qu'en jugeant, pour débouter Mme [U], Vve [W], de ses demandes indemnitaires dirigées contre Me [I], que Mme [U] avait bénéficié, entre le 12 juin 2009 et la signature de l'acte, le 29 juin 2009, d'un temps de réflexion suffisant, quand il incombait au notaire d'informer et de conseiller lui-même sa cliente, en attirant son attention sur l'importance de l'indemnité de réduction qu'elle allait devoir finalement acquitter, et sans qu'il puisse être reproché à Mme [U], Vve [W], de ne pas avoir elle-même provoqué les explications du notaire sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 1382 ancien du code civil ; 4°) ALORS QUE le notaire doit informer et conseiller son client, relativement au contenu et à la portée de l'acte qu'il se propose de lui faire signer ; qu'en retenant, pour débouter Mme [U], vve [W], de ses demandes, que ses « arguments » « quant aux conditions de signature de l'acte » étaient inopérants, quand la validité de l'acte laissait entière la question du respect par le notaire de son obligation d'information et de conseil, au regard de l'augmentation drastique (entre décembre 2008 et juin 2009) de l'indemnité de réduction que Mme [U] avait finalement dû acquitter, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1382 ancien du code civil ; 5°) ALORS QU'en s'appuyant, pour opposer à Mme [U], Vve [W], le risque de réduction qu'elle aurait couru relativement à l'assurance-vie que Me [I] avait pris l'initiative d'intégrer au partage du 29 juin 2009, sur un prétendu procès que les belles-filles de l'exposante auraient été sur le point d'intenter, ainsi que sur « la mésentente avérée » entre les successibles, sans s'expliquer sur les pièces sur lesquelles elle fondait de telles affirmations, et alors que cette mésentente et ce procès à venir étaient contestés par l'exposante, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile ; 6°) ALORS QUE le caractère exagéré de primes d'assurance vie ne s'apprécie pas en regard de la quotité de patrimoine du de cujus engagée, mais en prenant en considération, au moment du versement, l'âge, les situations patrimoniale et familiale du souscripteur et l'utilité du contrat pour celui-ci ; qu'en opposant à Mme [U], Vve [W], le risque important de réduction qu'elle aurait couru, concernant l'assurance vie que son notaire avait pris l'initiative d'introduire dans l'acte de partage/transaction du 29 juin 2009, motif pris de l'importance des sommes investies qui auraient représenté 60 % des actifs du défunt déclarés à l'ISF en 2008, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard des articles 1382 ancien et L. 132-13 du code des assurances ; 7°) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en ayant déchargé Me [I] de toute responsabilité à l'égard de sa cliente, Mme [U], Vve [W], sans répondre aux conclusions de l'exposante (p. 29 et 30), ayant fait valoir que le notaire, en tardant à établir le partage, lui avait fait perdre une partie de ses droits successoraux, la valeur de son usufruit, en raison de l'âge qu'elle avait atteint dans l'intervalle, étant passée de 40 à 33 %, la cour d'appel a méconnu les prescriptions de l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 755 F-D Pourvoi n° X 21-50.037 Aide juridictionnelle totale en défense au profit de Mme [N] [K]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 2 décembre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 Le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié en son parquet général, Palais Monclar, rue Peyresc, 13616 Aix-en-Provence, a formé le pourvoi n° X 21-50.037 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-4), dans le litige l'opposant à Mme [N] [K], domiciliée chez Mme [H] [K], épouse [D], [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guihal, conseiller doyen, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de Mme [K], après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Guihal, conseiller doyen rapporteur, M. Hasher, conseiller, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 avril 2021), Mme [K], née le 7 avril 1970 à [Localité 2] (Algérie), a formé une action déclaratoire de nationalité, en tant que fille de Mme [C], née le 15 juin 1948 à [Localité 2] d'un père marocain. Examen du moyen Enoncé du moyen 2. Le ministère public fait grief à l'arrêt de dire que Mme [K] est française, alors « qu'aux termes de l'article 30 du code civil, la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants ; que, par conséquent, la personne dépourvue de certificat, qui revendique la qualité de Français à raison de sa filiation doit rapporter la preuve de la nationalité française de son parent, preuve ne pouvant découler que de l'ensemble des pièces nécessaires à la démonstration et non du certificat de nationalité française délivré au parent; qu'en se contentant d'énoncer la teneur du certificat de nationalité française de Mme [E] [C], mère de l'appelante, pour en déduire que Mme [N] [K] est française, alors même que celle-ci, supportant la, charge de la preuve, ne produisait aucun document susceptible de démontrer que sa mère avait conservé la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance de l'Algérie, la cour d'appel a violé l'article 30 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 30 du code civil : 3. Aux termes de ce texte, la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants. 4. Il en résulte que seul le titulaire d'un certificat de nationalité française est autorisé à s'en prévaloir, cette limitation procédant de la nature même du certificat, lequel ne constitue pas un titre de nationalité mais un document destiné à faciliter la preuve de la nationalité française, dont la délivrance dépend des éléments produits par le requérant à l'appui de sa demande et de l'examen par un agent administratif de sa situation individuelle au regard du droit de la nationalité. 5. Pour dire que Mme [K] est française, l'arrêt retient qu'il résulte des mentions du certificat de nationalité française délivré à sa mère que celle-ci est née en Algérie d'une mère algérienne et d'un père marocain né au Maroc et que, n'ayant pas été saisie par la loi de nationalité algérienne, elle a conservé la nationalité française en vertu de l'article 1er, alinéa 3, de la loi du 20 décembre 1966. 4. En statuant ainsi, en déduisant d'un certificat de nationalité française délivré à la mère de l'intéressée la preuve de la nationalité marocaine du grand-père maternel de celle-ci, alors que l'article 30 du code civil n'opère inversion de la charge de la preuve de sa nationalité qu'au bénéfice de son titulaire, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 14 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne Mme [K] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence AUX TERMES D'UN MOYEN UNIQUE DE CASSATION, il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que Mme [N][K] est de nationalité française, AUX MOTIFS QUE, L'article 30 du code civil prévoit : " La charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants." En l'espèce, Mme [K] s'est vu refuser la délivrance d'un certificat de nationalité de sorte que la charge de la preuve lui incombe. Mme [K] expose qu'elle rapporte la preuve de la nationalité française de sa mère [E] [C] de sorte qu'elle doit être déclarée française sur le fondement de l'article 17 du code de la nationalité dans sa version issue de la loi du 9 janvier 1973. Mme la Procureure Générale fait valoir que si Mme [K] établit que sa mère [E] [C] était française à sa naissance par application de l'article 24-1° du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de l'ordonnance 45-2441 du 19 octobre 1945, elle ne démontre pas que celle-ci ait conservé la nationalité française pour être née en Algérie d'un père étranger à l'étranger, au sens de la loi algérienne de nationalité. Elle ajoute que la demande de délivrance d'un certificat de nationalité est irrecevable, la Cour n'ayant pas le pouvoir d'en délivrer, rappelant que l'arrêt, s'il venait à décider que l'intéressée est française, est doté d'une autorité supérieure à celle d'un certificat et satisferait entièrement à la demande de l'appelante. Aux termes de l'article 17 du code de la nationalité, dans sa version issue de la loi du 09 janvier 1973 applicable en l'espèce, est français l'enfant, légitime ou naturel dont l'un des parents au moins est français. Nul ne peut se voir reconnaître la nationalité française s'il ne justifie pas d'un état civil fiable. Mme [K] soutient que sa mère, [E] [C], née d'une mère algérienne et d'un père marocain, est réputée avoir été française dès sa naissance et s'est vue reconnaître la nationalité française sur le fondement de l'article 24-1 du code de la nationalité française. Un certificat de nationalité, en l'absence d'effet collectif, ne bénéficie qu'à son titulaire et non aux tiers, même s'il s'agit de ses enfants. Cependant, il convient de relever que le certificat de nationalité délivré à [E] [C] le 14 mars 2011 fait référence à l'ancien article 24-1 du code de la nationalité française dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 19 octobre 1945 selon lequel est français, sauf la faculté de répudier cette qualité dans les six mois précédant sa majorité, l'enfant légitime né en France d'une mère qui y est elle-même née, l'Algérie étant composée de départements français avant le 3 juillet 1962. [E] [C] est née le 15 juin 1948 à [Localité 2] ( Algérie ) alors que ce territoire était français. [E] [C] est née de [H] [G], elle-même née le 03 mai 1912 à [Localité 2] (Algérie) alors que l'Algérie était française. En cause d'appel, l'acte de naissance de [H] [G] est produit. Le certificat de nationalité française délivré le 14 mars 2011 à Mme [E] [C] épouse [K], mère de [N] [K] mentionne que : - l'intéressée née en Algérie d'une mère algérienne et d'un père marocain né au Maroc, n'a pas été saisie par la loi de nationalité algérienne. Elle a conservé la nationalité française en vertu de l'article 1er alinéa 3 de la loi du 20 décembre 1966, - il a été vérifié que l'intéressée n'a pas répudié la nationalité française dans les mois précédant sa majorité en application de l'article 24 alinéa 1 du Code de la nationalité française de l'Ordonnance du 19 octobre 1945 et que son mariage célébré le 20 juin 1964 à [Localité 2], Algérie, avec [K] [O], n'a pas eu d'incidence sur sa nationalité française en application de l'article 94 dudit Code, - il a également été vérifié que l'intéressée n'a pas libérée des liens d'allégeance à l'égard de la France en vertu de l'article 23-4 du Code civil ". Il en résulte que Mme [K], née de [E] [C], elle-même née de [H] [G], est française. Il convient d'infirmer le jugement entrepris et de dire que Mme [K] est de nationalité française. En conséquence, il convient d'ordonner la mentionprévue à l'article 28 du code civil. Mme [K] doit être déboutée du surplus de ses demandes. ALORS QU'aux termes de l'article 30 du code civil, la charge de la preuve, en matière de nationalité française, incombe à celui dont la nationalité est en cause. Toutefois, cette charge incombe à celui qui conteste la qualité de Français à un individu titulaire d'un certificat de nationalité française délivré conformément aux articles 31 et suivants. ; que, par conséquent, la personne dépourvue de certificat, qui revendique la qualité de Français à raison de sa filiation doit rapporter la preuve de la nationalité française de son parent, preuve ne pouvant découler que de l'ensemble des pièces nécessaires à la démonstration et non du certificat de nationalité française délivré au parent ; qu'en se contentant d'énoncer la teneur du certificat de nationalité française de Mme [E] [C], mère de l'appelante, pour en déduire que Madame [N] [K] est française, alors même que celle-ci, supportant la, charge de la preuve, ne produisait aucun document susceptible de démontrer que sa mère avait conservé la nationalité française lors de l'accession à l'indépendance de l'Algérie, la cour d'appel a violé l'article 30 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Irrecevabilité M. CHAUVIN, président Arrêt n° 750 FS-D Pourvoi n° A 21-20.347 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 La société The Dow Chemical Company, société de droit de l'Etat du Delaware, dont le siège est [Adresse 2] (États-Unis), dont l'établissement principal est sis [Adresse 1] (États-Unis), a formé le pourvoi n° A 21-20.347 contre l'ordonnance rendue le 16 avril 2021 par le tribunal judiciaire de Bobigny. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de la société The Dow Chemical Company, et l'avis écrit de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, MM. Hascher, Bruyère, Ancel, conseillers, Mmes Kloda, Dumas, Champ, conseillers référendaires, M. Poirret, premier avocat général, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Recevabilité du pourvoi examinée d'office Vu l'article 609 du code de procédure civile : 1. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application du texte susvisé. 2. Le pourvoi en cassation n'est recevable que si le demandeur a intérêt à agir. 3. Une ordonnance d'un juge de l'exécution du 12 juillet 2019 a autorisé des parties de nationalité nicaraguayenne à pratiquer une saisie-conservatoire en exécution d'une décision de justice nicaraguayenne condamnant la société américaine The Dow Chemical Company (TDCC) à leur payer des dommages-intérêts. 4. Au visa de l'article 53 du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, le directeur de greffe a délivré un certificat attestant, aux fins de circulation de la décision au sein de l'Union européenne, que cette ordonnance était exécutoire en France. 5. La société TDCC a formé un pourvoi en cassation contre l'ordonnance rendue le 16 avril 2021 par le président du tribunal judiciaire se déclarant incompétent pour statuer sur la demande en rétractation ou en annulation de ce certificat fondée sur l'article 509-7 du code de procédure civile. 6. L'ordonnance autorisant la saisie conservatoire ayant été rétractée par un jugement du juge de l'exécution du 2 juillet 2020, à l'égard duquel, selon l'article R. 121-21 du code des procédures civiles d'exécution, le délai d'appel et l'appel lui-même n'ont pas d'effet suspensif, et l'exécution dans un Etat membre requis étant subordonnée par l'article 42 du règlement précité à la présentation non seulement du certificat mais également d'une copie de la décision dont l'exécution est demandée, il en résulte que, lorsque celle-ci est rétractée, le certificat qui en est indissociable se trouve privé de tout effet juridique et ne peut faire grief. 7. Dès lors, la société TDCC ne justifie d'aucun intérêt à agir en justice pour en demander l'annulation, la rétractation ou le retrait. 8. En conséquence, le pourvoi n'est pas recevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi ; Condamne la société The Dow Chemical Company aux dépens ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Cassation partielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 753 F-D Pourvoi n° E 21-18.051 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 Mme [F] [T], épouse [S], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 21-18.051 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-4), dans le litige l'opposant au procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié en son parquet général, [Adresse 1], défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guihal, conseiller doyen, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de Mme [T], après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Guihal, conseiller doyen rapporteur, M. Hascher, conseiller, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 14 avril 2021), Mme [T], née le 28 novembre 1953 à [Localité 4], a assigné le ministère public pour voir juger qu'elle est française en tant que fille de [D] [T], né le 19 mai 1907 à [Localité 5] ([Localité 3], Algérie). Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 2. Mme [T] fait grief à l'arrêt de constater son extranéité, alors « qu'il n'était pas soutenu, par l'une quelconque des parties, que Mme [T] serait de nationalité algérienne, cette dernière précisant même que "l'Etat Algérien ne reconnaît pas la concluante comme de nationalité algérienne, compte tenu de ce qu'elle est née en France, de parents français, y a été élevée et y est demeurée jusqu'à ce jour" et qu'elle "ne possède pas de carte d'identité algérienne" ; qu'en tenant pour constant que Mme [T] "est de nationalité algérienne", la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 4 du code de procédure civile : 3. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. 4. Pour juger que Mme [T] n'est pas française, l'arrêt tient pour établi qu'elle est de nationalité algérienne. 5. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, Mme [T] soutenait que l'Etat algérien ne la reconnaissait pas comme faisant partie de ses nationaux, qu'elle n'avait pas de carte d'identité algérienne et que lui refuser la qualité de Française aurait pour effet de la rendre apatride, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle constate l'accomplissement de la formalité prévue par l'article 1043 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 14 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Laisse les dépens à la charge du ministère public ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour Mme [T] PREMIER MOYEN DE CASSATION Mme [F] [T] épouse [S] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté son extranéité, ALORS QU'il n'était pas soutenu, par l'une quelconque des parties, que Mme [T] serait de nationalité algérienne, cette dernière précisant même que « l'Etat Algérien ne reconnait pas la concluante comme de nationalité algérienne, compte tenu de ce qu'elle est née en France, de parents français, y a été élevée et y est demeurée jusqu'à ce jour » et qu'elle « ne possède pas de carte d'identité algérienne » (conclusions de Mme [T], p.9) ; qu'en tenant pour constant que Mme [T] « est de nationalité algérienne » (arrêt, p.5 § 1), la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Mme [F] [T] épouse [S] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté son extranéité et d'AVOIR rejeté sa demande en reconnaissance de la nationalité française, 1/ ALORS QU'en disant la filiation de Mme [F] [T] non établie (arrêt, p.5, dernier §) tout en relevant qu'il ressort de l'acte de naissance de Mme [T], tel que corroboré par le livret de famille de la ville de [Localité 4], qu'elle est née en France ([Localité 4]), de M. [D] [T] et de Mme [E] [O] épouse [T], la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé l'article 30 du code civil ensemble l'article 319 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2005-759 du 4 juillet 2005 ; 2/ ALORS QU'en relevant d'office le moyen tiré de ce que le livret de famille, l'acte de décès et l'attestation de la grande chancellerie de la Légion d'Honneur seraient dénués de force probante en l'état de quelques variations sur l'identification de M. [T] et de son lieu de naissance (arrêt, p.5 § 8 à 12), sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a porté atteinte au principe de la contradiction et a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3/ ALORS QU'il n'était pas contesté que le livret de famille, l'acte de décès et l'attestation de la grande Chancellerie de la Légion d'honneur se rapportaient bien à M. [L] [D] [T] (cf. notamment conclusions du Procureur Général, p.2) ; qu'en tenant pour contesté (arrêt, p.5 § 8 à 12), un fait pourtant reconnu par les parties, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 4 du code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Mme [F] [T] épouse [S] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR constaté son extranéité et d'AVOIR rejeté sa demande en reconnaissance de la nationalité française, 1/ ALORS QUE les personnes de statut civil de droit local, originaires d'Algérie, qui n'ont pas souscrit la déclaration prévue à l'article 152 du code de la nationalité sont réputées avoir perdu la nationalité française au 1er janvier 1963 ; que la cour d'appel a constaté la production de l'acte de naissance de Mme [T] dont il résulte qu'elle est née le 28 novembre 1953 à [Localité 4], antérieurement à l'indépendance de l'Algérie (arrêt, p. 5 § 6), de sorte que ses parents, tous les deux originaires d'Algérie, avaient nécessairement la nationalité française au moment de sa naissance ; qu'en disant cependant que Mme [T] « ne rapporte pas la preuve de la nationalité française de M. [D] [T] ou et de Mme [E] [O] lors de sa naissance le 28 novembre 1953 » (arrêt, p.6 § 1), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 18 et 30 du code civil ensemble l'article 1er alinéa 2 de la loi n°66-945 du 20 décembre 1966 ; 2/ ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en rejetant la demande en reconnaissance de nationalité française tout en relevant qu'il ressort de l'acte de naissance de Mme [T], tel que corroboré par les actes de décès de ses parents et par leur livret de famille (arrêt, p.5 § 6, 8 et 10), qu'elle est née en France ([Localité 4]), de parents nés en France (Algérie antérieurement à son indépendance), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles 19-3 et 30 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 9 novembre 2022 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 751 FS-D Pourvoi n° S 21-10.242 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 9 NOVEMBRE 2022 La société Inforad Connect Limited, société de droit Irlandais, dont le siège est [Adresse 4] (Irlande), a formé le pourvoi n° S 21-10.242 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la cour d'appel de Versailles (14e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [Z] [S], domicilié [Adresse 3], 2°/ à la société Inforad Limited, société de droit Irlandais, dont le siège est [Adresse 5] (Irlande), 3°/ à M. [K] [B], domicilié [Adresse 2], 4°/ à M. [U] [O], domicilié [Adresse 1] (Irlande), 5°/ à la société MSKA Solutions Limited, société de droit Irlandais, dont le siège est [Adresse 5] (Irlande), défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Hascher, conseiller, les observations de Me Soltner, avocat de la société Inforad Connect Limited, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [S] et de la société Inforad Limited, et l'avis écrit de Mme Marilly, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 13 septembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Hascher, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, MM. Bruyère, Ancel, conseillers, Mmes Kloda, Dumas, Champ, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Poirret, premier avocat général, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 novembre 2020), la société irlandaise Inforad Limited a résilié la licence de marque communautaire qu'elle avait concédée à la société irlandaise Inforad Connect Limited. 2. Celle-ci l'a assignée avec son représentant légal, son ancien prestataire de service informatique, la société qui avait repris l'exploitation de la licence après son éviction et le directeur de celle-ci, en paiement de dommages-intérêts pour rupture fautive du contrat, reprise illicite de noms de domaines, contrefaçon et concurrence déloyale. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. La société Inforad Connect Limited fait grief à l'arrêt de déclarer les juridictions françaises incompétentes et de la renvoyer à mieux se pourvoir devant les juridictions irlandaises, alors « que la Cour de justice des communautés a dit pour droit "que, afin de déterminer, en application de l'article 5, point 1, sous a), du règlement n° 44/2001, la juridiction compétente pour connaître d'une demande de paiement de la rémunération due en vertu d'un contrat par lequel le titulaire d'un droit de propriété intellectuelle concède à son cocontractant le droit de l'exploiter, il convient de continuer à se référer aux principes issus de la jurisprudence de la Cour portant sur l'article 5, point 1, de la convention de Bruxelles" (CJUE, Cour, 23 avril 2009, C-533/07) ; qu'en application de l'article 5, point susvisé, le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est, pour une fourniture de services, le lieu de l'État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que l'obligation arguée d'inexécution par la société Inforad Connect était l'obligation faite au concédant de mettre à la disposition de cette société la marque Inforad, pour un territoire contractuellement défini, que les "dysfonctionnements" imputés à la société Inforad Connect concernaient la gestion et le développement de cette marque, et que toutes les sociétés concernées par l'exploitation, la gestion et de le développement de la marque étaient des sociétés ayant leur siège en France et dont les dirigeants étaient français ; qu'il constate encore que la "caractéristique principale du contrat" devait être localisée en France ; que, de son côté, l'exposante faisait valoir que c'est l'inexécution de l'obligation de mise à disposition de la marque en France qui était reprochée à la société Inforad Limited, puisqu'aussi bien, le contrat de licence avait été conclu pour les besoins de la reprise d'un fonds de commerce situé en France dont la marque "Inforad" et les sites internet français dédiés à son exploitation constituaient les éléments incorporels essentiels ; qu'elle ajoutait encore que la preuve que le présent litige concernait un contrat ayant vocation à être exécuté en France résultait du propre aveu d'un responsable de la société Inforad Limited qui, dans un courrier adressé à la société Inforad Connect le 10 mars 2017 avait cru devoir rappeler à celle-ci que l'objet du contrat "était de développer la marque notamment sur le marché français" ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, la cour d'appel ne pouvait se contenter d'énoncer que l'obligation principale mise à la charge du concédant pesait sur une société domiciliée en Irlande, mais devait rechercher, comme l'article 5 point 1 du Règlement CE n° 44/2001 lui imposait de le faire, si l'obligation qui servait de fondement à la demande de dommages intérêts pour rupture fautive du contrat ne consistait pas en des prestations intellectuelles et matérielles qui devaient être fournies ou se réaliser en France ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale en se déterminant par des motifs impropres à exclure la compétence des tribunaux français au regard de l'article 7-1 du Règlement n° 44/2001(Bruxelles 1). » Réponse de la Cour Vu l'article 7, 1°, sous a), du règlement (UE) n° 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (Bruxelles I bis) : 4. Selon ce texte, une personne domiciliée sur le territoire d'un Etat membre peut être attraite en matière contractuelle dans un autre Etat membre devant la juridiction du lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande. 5. Pour dire compétentes les juridictions irlandaises, l'arrêt retient que l'obligation litigieuse, constituée par la concession des droits intellectuels permettant cette exploitation, s'exécute en Irlande, en raison de la localisation du siège de la société Inforad, sur laquelle, en tant que cédante, pèse l'obligation litigieuse. 6. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres, la cour d'appel, qui devait rechercher, comme il le lui était demandé, si l'obligation qui sert de base à la demande de dommages intérêts pour rupture abusive ne consistait pas en l'exploitation de la marque au moyen de prestations intellectuelles et matérielles, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. Et sur le second moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 7. La société Inforad Connect Limited fait le même grief à l'arrêt, alors « qu'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de la société Inforad Connect, si la compétence des juridictions françaises pour connaître des actions dirigées contre les personnes susvisées ne se justifiait pas au regard des dispositions de l'article 7-2 du Règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 reconnaissant compétence à la juridiction du lieu de survenance du fait dommageable, la cour d'appel a privé se décision de base légale au regard de ce texte. » Réponse de la Cour Vu l'article 7, § 2, du règlement Bruxelles I bis : 8. Selon ce texte, une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite dans un autre État membre, en matière délictuelle ou quasi-délictuelle, devant la juridiction du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire. 9. Selon la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes (27 septembre 1988, aff. C-189/87), un tribunal compétent pour connaître de l'élément d'une demande reposant sur un fondement délictuel n'est pas compétent pour connaître des autres éléments de la même demande reposant sur des fondements non délictuels et, s'il est vrai qu'il existe des inconvénients à ce que les divers aspects d'un même litige soient jugés par des tribunaux différents, il convient d'observer, d'une part, que le demandeur a toujours la faculté de porter l'ensemble de sa demande devant le tribunal du domicile du défendeur et, d'autre part, que, dans certaines conditions, il est permis au tribunal premier saisi de connaître de l'ensemble du litige, dès lors qu'existe un lien de connexité entre des demandes portées devant des juges différents. 10. Pour déclarer les juridictions françaises incompétentes à l'égard de l'ensemble du litige, l'arrêt retient que, compte tenu du caractère principal de l'action en responsabilité contractuelle, seule la connexité permettant de rattacher l'action délictuelle à l'action contractuelle peut être invoquée, et non l'inverse, de sorte que les moyens de la société Inforad Connect Limited fondés sur le critère de la compétence juridictionnelle au regard des faits de nature délictuelle, s'agissant notamment du domicile de M. [S] ou du centre des intérêts de la société lésée, ne sauraient prospérer. 11. En se déterminant ainsi, alors que l'article 7 précité n'établit aucune hiérarchie entre les actions contractuelle et délictuelle et qu'à supposer que le juge français ne soit pas compétent à l'égard de la première, cette circonstance ne le dispense pas d'examiner sa compétence à l'égard de la seconde, la cour d'appel, qui n'a pas recherché quel était le lieu de survenance du fait dommageable, a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 novembre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ; Condamne les sociétés Inforad Ltd et MSKA, ainsi que MM. [S], [O] et [B] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Inforad Ltd et M. [S] et condamne la société Inforad Ltd à payer à la société Inforad Connect la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par Me Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Inforad Connect Limited PREMIER MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR, confirmant l'ordonnance du juge de la mise en état, constaté l'incompétence du tribunal grande instance de Nanterre pour connaître des demandes formées par la société de droit irlandais Inforad Connect Limited à l'encontre de la société de droit irlandais Inforad Limited, la société de droit irlandais MSKA Solutions Limited, M. [B], M. [O] et M. [S] dans le cadre de son assignation délivrée par actes des 13, 15 et 16 mars et 3 avril 2018, renvoyé la société de droit irlandais Inforad Connect Limited à mieux se pourvoir devant les juridictions irlandaises compétentes pour connaître de l'entier litige ; 1°) ALORS QUE le juge doit en toute circonstance respecter le contradictoire ; qu'il ne peut relever d'office le moyen tiré de l'application d'un règlement communautaire sans inviter les parties à faire valoir leurs observations ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué a relevé que même « si les parties ne l'évoquent pas dans leurs conclusions », en cas de situation comportant un conflit de lois, le juge national doit, conformément au principe posé par l'arrêt de la CJCE Tessili du 6 octobre 1976 déterminer "en vertu de ses propres règles de conflit, quelle est la loi applicable au rapport juridique en cause et définir, conformément à cette loi, le lieu d'exécution de l'obligation contractuelle litigieuse" ; qu'il énonce encore que ce lieu doit être déterminé « selon la loi applicable désignée par la règle de conflit de lois résultant du Règlement CE no 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles » ; qu'en relevant d'office les règles prévues par ce Règlement et les principes jurisprudentiels dégagés à propos de son application, sans inviter les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a violé les articles 4,5 et 7 du code de procédure civile. 2°) ALORS QUE l'article 4-2 du Règlement n° 593/2008 relatif à la détermination de la loi applicable aux obligations contractuelles, dispose que « Lorsque le contrat n'est pas couvert par le paragraphe 1 ou que les éléments du contrat sont couverts par plusieurs des points a) à h) du paragraphe 1, le contrat est régi par la loi du pays dans lequel la partie qui doit fournir la prestation caractéristique a sa résidence habituelle » ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a énoncé que la « prestation caractéristique » du contrat litigieux était « l'exploitation et la commercialisation de la marque INFORAD par la société Inforad Connect et que cette dernière doit être considérée comme ayant sa résidence habituelle en France », pour en déduire que c'est au regard de la loi française qu'il convenait de se placer pour rechercher quel était le lieu d'exécution de l'obligation servant de base à la demande ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que le contrat en cause était un contrat de licence de marque, lequel stipulait en son article 1er que la société Inforad Limited « consent à (la société Inforad Connect) un droit exclusif d'utilisation de la marque INFORAD, ainsi que des méthodologies, logiciels, bases de données, études et autres droits intellectuels qu'elle détient ou est susceptible de détenir en lien avec les dispositifs d'assistance à la conduite INFORAD, pour le monde entier », ce dont il résultait que la prestation caractéristique devait être fournie non par la société Inforad Connect, mais par la société Inforad Limited, la cour d'appel a violé le texte susvisé, ensemble 7-1 de la convention de Bruxelles ; 3°) ALORS QUE selon l'article 5-1 du règlement 44/2001 du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale (convention de Bruxelles), qui a été remplacé par le Règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 (article 7-1) « Une personne domiciliée sur le territoire d'un État membre peut être attraite dans un autre État membre : a) en matière contractuelle, devant la juridiction du lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande » ; qu'en l'espèce, pour juger les juridictions irlandaises compétentes, la cour d'appel relève que « le litige porte donc essentiellement sur la rupture par la société Inforad Limited de son obligation de concéder la licence des droits intellectuels d'INFORAD, et que cette obligation pesant sur le cédant, c'est en considération de sa localisation et notamment de celle de son siège social, soit en l'espèce à [Localité 6] en Irlande, que le lieu d'exécution sera déterminé » ; qu'en statuant ainsi, cependant que le texte susvisé invite le juge à rechercher le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande et non celui où a son siège la partie sur qui « pèse » cette obligation, la cour d'appel a violé le texte précité ; 4°) ALORS QUE la Cour de justice des communautés a dit pour droit « que, afin de déterminer, en application de l'article 5, point 1, sous a), du règlement no 44/2001, la juridiction compétente pour connaître d'une demande de paiement de la rémunération due en vertu d'un contrat par lequel le titulaire d'un droit de propriété intellectuelle concède à son cocontractant le droit de l'exploiter, il convient de continuer à se référer aux principes issus de la jurisprudence de la Cour portant sur l'article 5, point 1, de la convention de Bruxelles » (CJUE, Cour, 23 avr. 2009, C-533/07) ; qu'en application de l'article 5, point susvisé, le lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande est, pour une fourniture de services, le lieu de l'État membre où, en vertu du contrat, les services ont été ou auraient dû être fournis ; qu'en l'espèce, l'arrêt constate que l'obligation arguée d'inexécution par la société Inforad Connect était l'obligation faite au concédant de mettre à la disposition de cette société la marque Inforad, pour un territoire contractuellement défini, que les « dysfonctionnements » imputés à la société Inforad Connect concernaient la gestion et le développement de cette marque, et que toutes les sociétés concernées par l'exploitation, la gestion et de le développement de la marque étaient des sociétés ayant leur siège en France et dont les dirigeants étaient français ; qu'il constate encore que la « caractéristique principale du contrat » devait être localisée en France ; que, de son côté, l'exposante faisait valoir que c'est l'inexécution de l'obligation de mise à disposition de la marque en France qui était reprochée à la société Inforad Limited, puisqu'aussi bien, le contrat de licence avait été conclu pour les besoins de la reprise d'un fonds de commerce situé en France dont la marque « Inforad » et les sites internet français dédiés à son exploitation constituaient les éléments incorporels essentiels; qu'elle ajoutait encore que la preuve que le présent litige concernait un contrat ayant vocation à être exécuté en France résultait du propre aveu d'un responsable de la société Inforad Limited qui, dans un courrier adressé à la société Inforad Connect le 10 mars 2017 avait cru devoir rappeler à celle-ci que l'objet du contrat « était de développer la marque notamment sur le marché français » ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, la cour d'appel ne pouvait se contenter d'énoncer que l'obligation principale mise à la charge du concédant pesait sur une société domiciliée en Irlande, mais devait rechercher, comme l'article 5 point 1 du Règlement CE n° 44/2001 lui imposait de le faire, si l'obligation qui servait de fondement à la demande de dommages intérêts pour rupture fautive du contrat ne consistait pas en des prestations intellectuelles et matérielles qui devaient être fournies ou se réaliser en France ; qu'en s'abstenant de le faire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale en se déterminant par des motifs impropres à exclure la compétence des tribunaux français au regard de l'article 7-1 du Règlement n° 44/2001(Bruxelles 1) ; 5°) ALORS QU'en énonçant par motifs supposément adoptés que la preuve de la commercialisation de produits vers des résidents situés hors de France est rapportée par la production de factures, ce que ne contestait pas la société Inforad Connect qui faisait seulement valoir que le chiffre d'affaires généré par ces commandes était infime au regard du chiffre d'affaires réalisé en France, la cour d'appel, à qui il appartenait de prendre en considération l'activité principale ou prépondérante de la société Inforad Connect pour rechercher où était localisée l'exécution de la prestation servant de base à la demande, au sens de l'article 7-1 du Règlement n° 44/2001, a privé sa décision de base légale au regard de ce texte ; DEUXIEME MOYEN DE CASSATION IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR, confirmant l'ordonnance du juge de la mise en état, constaté l'incompétence du tribunal grande instance de Nanterre pour connaître des demandes formées par la société de droit irlandais Inforad Connect Limited à l'encontre de la société de droit irlandais Inforad Limited, la société de droit irlandais MSKA Solutions Limited, M. [B], M. [O] et M. [S] dans le cadre de son assignation délivrée par actes des 13, 15 et 16 mars et 3 avril 2018, renvoyé la société de droit irlandais Inforad Connect Limited à mieux se pourvoir devant les juridictions irlandaises compétentes pour connaître de l'entier litige ; 1°) ALORS QUE dans ses écritures, l'exposante justifiait la compétence de la juridiction française pour connaître de l'action dirigée contre la société MSKA et MM. [B], [O] et [S] en se fondant sur les dispositions de l'article 7-2 du Règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012, selon lequel en matière délictuelle ou contractuelle, le demandeur peut attraire le défendeur devant la juridiction du lieu où le fait dommageable s'est produit ou risque de se produire, et entreprenait de démontrer que les faits de vols de noms de domaine, de bases de données et de sites internet commis par les intéressés lui avaient causé un préjudice qui s'était matérialisé en France, ce qui justifiait la compétence du juge saisi ; qu'en énonçant que la société Inforad Connect fondait la compétence du juge pour connaître de l'action dirigée contre les personnes susvisées sur l'existence d'un lien de connexité entre la demande dirigée contre la société Inforad Limited et celles dirigées contre les autres parties, et que cette connexité faisait défaut, cependant que la connexité n'était invoquée par la société Inforad Connect qu'à titre subsidiaire, la cour d'appel a dénaturé les conclusions de l'exposante et violé les articles 4,5 et 7 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'en s'abstenant de rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de la société Inforad Connect, si la compétence des juridictions françaises pour connaître des actions dirigées contre les personnes susvisées ne se justifiait pas au regard des dispositions de l'article 7-2 du Règlement n° 1215/2012 du 12 décembre 2012 reconnaissant compétence à la juridiction du lieu de survenance du fait dommageable, la cour d'appel a privé se décision de base légale au regard de ce texte; 3°) ALORS QU'en tout état de cause, la cassation qui sera prononcée sur le premier moyen de cassation emportera, par voie de conséquence, annulation de l'arrêt pour le tout, en application de l'article 625 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. AF1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation M. SOMMER, président Arrêt n° 230 FS-D Pourvoi n° R 21-20.798 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 MARS 2023 Le groupement d'intérêt économique Klesia ADP, venant aux droits de l'association de Moyens Klesia, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 21-20.798 contre l'arrêt rendu le 16 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à M. [D] [Y], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Barincou, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat du groupement d'intérêt économique Klesia ADP, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [Y], et l'avis de Mme Grivel, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Sommer, président, M. Barincou, conseiller rapporteur, Mme Mariette, conseiller doyen, MM. Pietton, Seguy, Mmes Grandemange, Douxami, conseillers, M. Le Corre, Mmes Prieur, Marguerite, M. Carillon, conseillers référendaires, Mme Grivel, avocat général, et Mme Pontonnier, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 16 juin 2021), M. [Y] a été engagé, à compter du 1er octobre 2009, en qualité de rédacteur juridique puis d'analyste métier par l'association D&O, laquelle a fusionné le 2 juillet 2012 avec plusieurs groupes de protection sociale pour devenir l'association Klesia, aux droits de laquelle vient le groupement d'intérêt économique Klesia ADP. 2. Il a été licencié, pour faute grave, le 5 septembre 2017. 3. Contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale. Examen du moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 4. L'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de préavis, congés payés sur préavis, indemnité conventionnelle de licenciement, rappel de salaire sur mise à pied et de congés payés afférents, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que l'illicéité d'un moyen de preuve, au regard des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats ; qu'en l'espèce, pour conclure que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est bornée à relever que le système de badgeage à l'entrée du bâtiment n'avait pas pour finalité déclarée de contrôler l'activité des salariés de sorte que ce mode de preuve était illicite et partant irrecevable ; qu'en statuant de la sorte sans rechercher si l'utilisation de cette preuve avait porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble et sans mettre en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, la cour d'appel a violé les articles 2, 6 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 dans sa version alors en vigueur et les articles 6 et 8 de la convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Vu les articles 6 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978, le premier dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2018-1125 du 12 décembre 2018 et le second dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2018-493 du 20 juin 2018 relative à la protection des données personnelles, applicables au litige, l'article L. 1222-4 du code du travail et les articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 5. D'une part, aux termes du premier de ces textes, un traitement ne peut porter que sur des données à caractère personnel qui satisfont aux conditions suivantes : 1°) les données sont collectées et traitées de manière loyale et licite, 2°) elles sont collectées pour des finalités déterminées, explicites et légitimes et ne sont pas traitées ultérieurement de manière incompatible avec ces finalités. 6. Il résulte du deuxième de ces textes que les traitements automatisés de données à caractère personnel font l'objet d'une déclaration auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) ou, lorsque le responsable du traitement a désigné un correspondant à la protection des données à caractère personnel, sont inscrits sur la liste des traitements tenue par celui-ci. 7. Enfin, selon le troisième de ces textes, aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à sa connaissance. 8. D'autre part, en application des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'illicéité d'un moyen de preuve, au regard des dispositions précitées, n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats, le juge devant apprécier, lorsque cela lui est demandé, si l'utilisation de cette preuve a porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble, en mettant en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, lequel peut justifier la production d'éléments portant atteinte à la vie personnelle du salarié à la condition que cette production soit indispensable à l'exercice de ce droit et que l'atteinte soit strictement proportionnée au but poursuivi. 9. Ainsi, lorsqu'il retient qu'un moyen de preuve est illicite, le juge doit d'abord s'interroger sur la légitimité du contrôle opéré par l'employeur et vérifier s'il existait des raisons concrètes qui justifiaient le recours à la surveillance et l'ampleur de celle-ci. Il doit ensuite rechercher si l'employeur ne pouvait pas atteindre un résultat identique en utilisant d'autres moyens plus respectueux de la vie personnelle du salarié. Enfin le juge doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte ainsi portée à la vie personnelle au regard du but poursuivi. 10. Pour condamner l'employeur à payer au salarié des sommes au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt relève, d'une part, que le système de badgeage situé à l'entrée des bâtiments de l'entreprise avait pour seule finalité, déclarée par l'employeur auprès de la Commission nationale informatique et libertés et présentée au comité d'entreprise, le contrôle des accès aux locaux et aux parkings et qu'aucune autre finalité de contrôle individuel de l'activité des salariés n'avait été déclarée concernant ce dispositif de collecte de données personnelles, d'autre part, que l'employeur avait utilisé ce système de badgeage afin de recueillir des informations concernant personnellement les salariés puis avait rapproché ces données personnelles de celles issues du logiciel de contrôle du temps de travail afin de contrôler l'activité et les horaires de travail des intéressés, sans avoir procédé à une déclaration auprès du correspondant informatique et liberté au sein de l'entreprise ni informé préalablement les salariés et les institutions représentatives du personnel que les horaires d'entrée et de sortie des bâtiments étaient susceptibles d'être contrôlés, de sorte que le résultat de ce rapprochement constituait un moyen de preuve illicite. 11. L'arrêt retient ensuite que l'employeur invoque vainement une atteinte à son droit à la preuve dans la mesure où il lui aurait suffi de déclarer de manière simplifiée au correspondant CNIL la finalité de contrôle du temps de travail du système de badgeage lors de l'accès aux locaux et d'en informer les salariés ainsi que les institutions représentatives du personnel habilitées pour préserver son droit à la preuve. 12. Il conclut qu'en l'absence d'autres preuves établissant la fraude reprochée, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. 13. En statuant ainsi alors qu'il lui appartenait de vérifier si la preuve litigieuse n'était pas indispensable à l'exercice du droit à la preuve de l'employeur et si l'atteinte au respect de la vie personnelle de la salariée n'était pas strictement proportionnée au but poursuivi, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne M. [Y] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour le groupement d'intérêt économique Klésia ADP Le GIE Klesia ADP FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à verser à M. [Y] les sommes de 11 596 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1 159,60 euros à titre de congés payés sur préavis, 12 631,83 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 644,21 euros à titre de rappel de salaire sur mise à pied et celle de 64,42 euros de congés payés y afférents, 38 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; 1°) ALORS QUE l'analyse de données issues d'un dispositif de badgeage mis en place dans le but de sécuriser l'accès aux locaux de l'entreprise n'équivaut pas à un système de contrôle de l'activité et des horaires de travail des salariés ; qu'en l'espèce, il était constant que les salariés disposaient d'un badge unique leur permettant, dans un premier temps, d'accéder aux locaux de l'entreprise (portique de sécurité), puis, dans un second temps et à l'intérieur des bâtiments, de pointer leurs heures de travail (badgeage physique), sauf à préférer enregistrer ces heures sur leurs postes informatiques (badgeage virtuel), outre que le système d'accès aux locaux avait été déclaré comme tendant à la sécurisation des bâtiments, tandis que le dispositif d'enregistrement des heures avait été déclaré comme visant à contrôler le temps d'activité des salariés ; qu'en affirmant que le recoupement manuel des données issues du système d'accès aux locaux et du dispositif de pointage des horaires, qui avait permis à l'employeur de mettre à jour une fraude par déclarations erronées du temps de travail, constituait un mode de preuve illicite faute pour le système d'accès aux locaux d'avoir été déclaré comme un dispositif de contrôle du temps de travail, la Cour d'appel, qui n'a pas caractérisé que ce système avait été utilisé à cette fin, a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1222-4 et L. 2312-38 du Code du Travail ; 2°) ALORS en tout état de cause QUE l'illicéité d'un moyen de preuve, au regard des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, n'entraîne pas nécessairement son rejet des débats ; qu'en l'espèce, pour conclure que le licenciement du salarié était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel s'est bornée à relever que le système de badgeage à l'entrée du bâtiment n'avait pas pour finalité déclarée de contrôler l'activité des salariés de sorte que ce mode de preuve était illicite et partant irrecevable (arrêt p. 5 § 4) ; qu'en statuant de la sorte sans rechercher si l'utilisation de cette preuve avait porté atteinte au caractère équitable de la procédure dans son ensemble et sans mettre en balance le droit au respect de la vie personnelle du salarié et le droit à la preuve, la cour d'appel a violé les articles 2, 6 et 22 de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 dans sa version alors en vigueur et les articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde de droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. OR COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle sans renvoi Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 220 F-D Pourvoi n° R 22-10.544 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 MARS 2023 1°/ L'AGS, dont le siège est [Adresse 3], 2°/ L'UNEDIC, [Adresse 3], agissant en qualité de gestionnaire de l'AGS, élisant domicile au centre de gestion et d'études AGS-CGEA d'[Localité 4], [Adresse 2], ont formé le pourvoi n° R 22-10.544 contre l'arrêt rendu le 25 novembre 2021 par la cour d'appel de Dijon (chambre sociale), dans le litige les opposant : 1°/ à M. [H] [M], domicilié [Adresse 1], 2°/ à M. [U] [Y], domicilié [Adresse 5], pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société DIB 52, défendeurs à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'AGS, de l'UNEDIC-CGEA d'[Localité 4], de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de M. [M], après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 25 novembre 2021), M. [M] a été engagé à compter du 1er juillet 2017 par la société DIB 52 (la société) en qualité de directeur général délégué. 2. Par jugement du 5 novembre 2018, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte à l'égard de la société, convertie en liquidation judiciaire par jugement du 17 décembre 2018, M. [Y] étant nommé liquidateur judiciaire. 3. Le 1er mars 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail et la fixation au passif de la société de diverses indemnités, d'un rappel de salaires et d'indemnités de congés payés. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. L'AGS et l'UNEDIC-CGEA d'[Localité 4] font grief à l'arrêt de dire que l'AGS doit sa garantie en ce qui concerne la somme de 6 888 euros allouée à titre d'indemnité compensatrice de congés payés pour les congés acquis en 2017 et 2018, alors « que l'indemnité compensatrice de congés payés est liée à la rupture du contrat de travail ; qu'elle concerne les congés payés non-pris à la date de la rupture, quelle que soit la période légale de leur acquisition ; qu'en cas de prononcé d'une liquidation judiciaire, les indemnités de rupture sont garanties par l'AGS à condition que la rupture du contrat de travail ait été prononcée par le liquidateur dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation judiciaire ; qu'il n'était pas contesté en l'espèce que la société Dib 52 avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire ouverte par un jugement du tribunal de commerce de Chaumont du 17 décembre 2018 ; que la résiliation judiciaire du contrat de travail du salarié aux torts de l'employeur avait été prononcée à effet du 16 septembre 2019 ; qu'en disant que l'AGS devait garantir la somme de 6 888 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés non pris acquis en 2017 et 2018, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-28 et L. 3253-8 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 3141-28 et L. 3253-8 2° du code du travail : 5. Aux termes du premier de ces textes, lorsque le contrat de travail est rompu avant que le salarié ait pu bénéficier de la totalité du congé auquel il avait droit, il reçoit, pour la fraction de congé dont il n'a pas bénéficié, une indemnité compensatrice de congé déterminée d'après les articles L. 3141-24 à L. 3141-27. 6. Selon le second, à l'égard des salariés qui ne bénéficient pas d'une protection particulière contre les licenciements, les créances résultant de la rupture des contrats de travail ne sont garanties par l'AGS qu'à la condition que cette rupture intervienne, en cas de liquidation judiciaire, à l'initiative du liquidateur judiciaire, dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation ou pendant le maintien provisoire de l'activité autorisé par le jugement de liquidation. 7. L'arrêt retient que la garantie de l'AGS est due pour les créances de nature salariale à la date du jugement de liquidation judiciaire. 8. En statuant ainsi, alors que, d'une part, l'indemnité compensatrice de congés payés naît de la rupture du contrat de travail et, d'autre part, que celui-ci n'avait pas été rompu par le liquidateur judiciaire dans le délai de quinze jours du jugement de liquidation judiciaire, en sorte que la garantie de l'AGS n'était pas due au titre de cette indemnité, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquence de la cassation 9. La cassation du chef de dispositif critiqué par le moyen n'emporte pas cassation du chef de dispositif de l'arrêt condamnant le liquidateur judiciaire, ès qualités, aux dépens, justifié par la fixation de créances, non remise en cause. 10. Sur suggestion des demanderesses au pourvoi, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 11. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. 12. Il convient de dire que l'AGS ne garantit pas la somme de 6 888 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que l'AGS doit sa garantie en ce qui concerne la somme de 6 888 euros allouée à titre d'indemnité compensatrice de congés payés pour les congés acquis en 2017 et 2018, l'arrêt rendu le 25 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Dit que l'AGS ne garantit pas la somme de 6 888 euros au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés. Condamne M. [M] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour l'AGS et l'UNEDIC-CGEA d'[Localité 4] L'AGS et l'UNEDIC-CGEA d'[Localité 4] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'AGS doit sa garantie en ce qui concerne la somme de 6888 euros allouée à titre d'indemnité compensatrice de congés payés pour les congés acquis en 2017 et 2018 ; ALORS QUE l'indemnité compensatrice de congés payés est liée à la rupture du contrat de travail ; qu'elle concerne les congés payés non-pris à la date de la rupture, quelle que soit la période légale de leur acquisition ; qu'en cas de prononcé d'une liquidation judiciaire, les indemnités de rupture sont garanties par l'AGS à condition que la rupture du contrat de travail ait été prononcée par le liquidateur dans les quinze jours suivant le jugement de liquidation judiciaire ; qu'il n'était pas contesté en l'espèce que la société Dib 52 avait fait l'objet d'une liquidation judiciaire ouverte par un jugement du tribunal de commerce de Chaumont du 17 décembre 2018 ; que la résiliation judiciaire du contrat de travail de M. [M] aux torts de l'employeur avait été prononcée à effet du 16 septembre 2019 ; qu'en disant que l' AGS devait garantir la somme de 6 888 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés non pris acquis en 2017 et 2018, la cour d'appel a violé les articles L. 3141-28 et L. 3253-8 du code du travail.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. BD4 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 218 F-D Pourvoi n° S 21-24.272 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 MARS 2023 Mme [E] [V], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 21-24.272 contre les arrêts rendus le 22 octobre 2020 et le 17 juin 2021 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale C), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société AJ UP, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], représentée par M. [C], prise en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement de l'IRMACC, 2°/ à l'association Institut régional pour les métiers d'art et la création contemporaine, dont le siège est [Adresse 4], 3°/ à l'UNEDIC délégation AGS CGEA de [Localité 6], dont le siège est [Adresse 5], 4°/ à la société [Y], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], représentée par M. [Y], prise en qualité de mandataire judiciaire de l'IRMACC, défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [V], après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 17 juin 2021), engagée à compter du 1er avril 2008 par l'association Institut régional pour les métiers d'art et la création contemporaine (l'association) en qualité de coordinatrice pédagogique, Mme [V] a été licenciée pour faute grave le 30 janvier 2017. 2. Contestant le bien fondé de ce licenciement, elle a saisi la juridiction prud'homale le 23 mars 2017. 3. Par jugement du 6 avril 2018, le tribunal de grande instance a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de l'association, la société AJ UP, représentée par M. [C] étant désignée administrateur judiciaire et la société [Y], prise en la personne de M. [Y], mandataire judiciaire. 4. Par actes des 24 et 25 mai 2018, la salariée a assigné en intervention forcée devant la cour d'appel, la société AJ UP, la société [Y] et le CGEA AGS de [Adresse 5]. 5. En cours de procédure, le tribunal de grande instance a, par jugement du 3 octobre 2019, arrêté le plan de redressement de l'association, désigné la société AJ UP en qualité de commissaire à l'exécution du plan et maintenu la société [Y] en qualité de mandataire judiciaire. Recevabilité du pourvoi en tant que formé contre l'arrêt rendu le 22 octobre 2020 examinée d'office Vu l'article 537 du code de procédure civile : 6. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article susvisé. 7. Il résulte de l'article 537 du code de procédure civile que les mesures d'administration judiciaire ne sont sujettes à aucun recours. 8. Dans l'arrêt rendu le 20 octobre 2020, la cour d'appel s'est bornée à ordonner la réouverture des débats et à inviter la salariée à s'expliquer sur la recevabilité de ses demandes dirigées à l'encontre de la liquidation judiciaire de l'association. 9. En conséquence, le pourvoi n'est pas recevable. Sur le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 17 juin 2021 Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 10. La salariée fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes de fixation au passif de l'association de diverses sommes au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis, de congés payés afférents et des dommages-intérêts pour licenciement injustifié, alors « que les créances dues par l'employeur résultant de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail antérieurement au jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire restent soumises, même après l'adoption d'un plan de redressement, qu'il soit par cession ou par continuation, au régime de la procédure collective ; qu'en jugeant irrecevable la demande de la salariée de fixation au passif du redressement judiciaire de l'association des différentes sommes dont elle réclamait le paiement au titre de son licenciement injustifié, au motif inopérant que l'association était redevenue maître de ses biens par l'effet du jugement ordonnant un plan de redressement judiciaire, quand elle avait constaté que son licenciement lui avait été notifié par un courrier du 30 janvier 2017, soit antérieurement au jugement du 6 avril 2018 du tribunal de grande instance de Saint Etienne ayant ouvert la procédure de redressement judiciaire de l'association, la cour d'appel a violé les articles L. 626-25, L. 622-22, L. 625-3 du code de commerce. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 622-22 et L. 625-3 du code de commerce : 11. Les sommes dues par l'employeur résultant de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail antérieurement au jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire restent soumises, même après l'adoption d'un plan de redressement, au régime de la procédure collective. 12. Pour déclarer irrecevables les demandes de la salariée en fixation au passif de l'association de diverses sommes au titre des indemnités de rupture, l'arrêt retient que les dispositions de l'article L. 626-25, alinéa 3, du code de commerce suivant lesquelles les actions introduites avant le jugement qui arrête le plan et auxquelles l'administrateur ou le mandataire judiciaire est partie sont poursuivies par le commissaire à l'exécution du plan, ne concernent pas les instances qui étaient en cours à la date d'ouverture du redressement judiciaire. Il en déduit qu'après le jugement arrêtant le plan de redressement, l'action engagée contre le débiteur avant le jugement d'ouverture du redressement judiciaire est poursuivie contre ce dernier redevenu maître de ses biens et que, dans ces conditions, la salariée qui sollicite l'inscription au passif de l'association, alors même qu'elle aurait dû solliciter la condamnation de son employeur redevenu maître de ses biens par l'effet du jugement arrêtant le plan de redressement, n'est pas recevable en ses demandes. 13. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les créances, objet de la demande en fixation au passif de l'association, concernaient des indemnités résultant de la rupture du contrat de travail intervenue avant le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, la cour d'appel, qui devait déterminer le montant des sommes à inscrire sur l'état des créances déposé au greffe du tribunal, a violé les textes susvisés. Et sur moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 14. La salariée fait grief à l'arrêt de mettre hors de cause l'AGS CGEA de [Adresse 5], alors « qu'en mettant hors de cause l'AGS CGEA de [Adresse 5] au motif qu'elle n'avait pas vocation à garantir les créances du débiteur in bonis, cependant que les créances de la salariée au titre de son licenciement injustifié devaient être inscrites au passif du redressement judiciaire de son employeur et relevaient par conséquent de la garantie de l'AGS, la cour d'appel a violé l'article L. 3253-6 du code du travail. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 3253-8 1° du code du travail : 15. Selon ce texte, l' AGS garantit les sommes dues aux salariés à la date du jugement d'ouverture de toute procédure de redressement ou de liquidation judiciaire. 16. Après avoir déclaré la salariée irrecevable en ses demandes de fixation au passif de l'association de diverses sommes au titre des indemnités de rupture, l'arrêt met hors de cause le CGEA AGS de Chalon-sur- Saône. 17. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les créances, objet de la demande en fixation au passif de l'association, concernaient des indemnités résultant de la rupture du contrat de travail intervenue avant le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire et, qu'à ce titre, elles étaient couvertes par l'assurance mentionnée à l'article L. 3253-6 du code du travail, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'arrêt rendu le 22 octobre 2020 par la cour d'appel de Lyon ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables les demandes de fixation au passif de la procédure collective de l'association Institut régional pour les métiers d'art et la création contemporaine formées par Mme [V] et met hors de cause l'AGS-CGEA de [Adresse 5], l'arrêt rendu le 17 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ; Condamne l'association Institut régional pour les métiers d'art et la création contemporaine aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne l'association Institut régional pour les métiers d'art et la création contemporaine à payer à Mme [V] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour Mme [V] Mme [V] fait grief à l'arrêt attaqué de la cour d'appel de Lyon du 17 juin 2021 d'avoir déclaré irrecevables ses demandes de fixation au passif du redressement judiciaire de l'association IRMACC des sommes de 8.207 euros à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 5.124 euros d'indemnité de préavis, 512,40 euros d'indemnité de congés payés afférents et 33.300 euros de dommages-intérêts pour licenciement injustifié, et d'avoir, par voie de conséquence, mis hors de cause l'AGS CGEA de [Adresse 5] ; 1°) ALORS QUE les créances dues par l'employeur résultant de l'exécution ou de la rupture du contrat de travail antérieurement au jugement ouvrant la procédure de redressement judiciaire restent soumises, même après l'adoption d'un plan de redressement, qu'il soit par cession ou par continuation, au régime de la procédure collective ; qu'en jugeant irrecevable la demande de Mme [V] de fixation au passif du redressement judiciaire de l'association IRMACC des différentes sommes dont elle réclamait le paiement au titre de son licenciement injustifié, au motif inopérant que l'association était redevenue maître de ses biens par l'effet du jugement ordonnant un plan de redressement judiciaire, quand elle avait constaté que son licenciement lui avait été notifié par un courrier du 30 janvier 2017, soit antérieurement au jugement du 6 avril 2018 du tribunal de grande instance de Saint Etienne ayant ouvert la procédure de redressement judiciaire de l'association, la cour d'appel a violé les articles L. 626-25, L. 622-22, L. 625-3 du code de commerce ; 2°) ALORS QU'en mettant hors de cause l'AGS CGEA de [Adresse 5] au motif qu'elle n'avait pas vocation à garantir les créances du débiteur in bonis, cependant que les créances de Mme [V] au titre de son licenciement injustifié devaient être inscrites au passif du redressement judiciaire de son employeur et relevaient par conséquent de la garantie de l'AGS, la cour d'appel a violé l'article L. 3253-6 du code du travail.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. BD4 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle Mme MARIETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 219 F-D Pourvoi n° V 21-25.678 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 8 MARS 2023 M. [U] [Y], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 21-25.678 contre l'arrêt rendu le 4 novembre 2021 par la cour d'appel de Versailles (21e Chambre), dans le litige l'opposant à la société CCTB, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [Y], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la société CCTB, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Pietton, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Dumont, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 4 novembre 2021), M. [Y] a été engagé à compter du 2 septembre 2002 par la société CCTB en qualité de maçon, maître ouvrier. 2. Le 19 juillet 2017, le salarié a été victime d'un accident du travail alors qu'il montait un mur sur un chantier, chutant de la benne d'un camion sur laquelle il s'était posté pour travailler. La gendarmerie, rendue sur place a procédé à un dépistage de l'état alcoolique du salarié qui s'est révélé positif. 3. Le salarié a été licencié pour faute grave par lettre du 3 août 2017. 4. Contestant son licenciement, il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir la condamnation de son employeur à lui payer diverses sommes. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 5. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que la faute grave était démontrée et de le débouter en conséquence de ses demandes au titre de la rupture de son contrat de travail, alors « que la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié ; qu'en conséquence, c'est au regard des seuls motifs énoncés dans cette lettre qu'il revient au juge d'apprécier le bien fondé du licenciement ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir constaté que, dans la lettre de licenciement du salarié, il lui était notamment reproché d'avoir ''pendant [son] temps de travail, sur le lieu de travail, de surcroît en cours d'exécution de travaux en hauteur [?] travaillé en ayant un taux d'alcoolémie au-dessus de la normale'', a considéré que le licenciement pour faute grave du salarié était justifié dès lors que la société CCTB rapportait la preuve de ce qu'au mépris des règles prescrites par le règlement intérieur, le salarié travaillait en hauteur en état d'ivresse ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la lettre de licenciement qui fixait les limites du litige ne reprochait pas au salarié d'avoir travaillé en état d'ivresse mais uniquement en ayant un taux d'alcoolémie au-dessus de la normale, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1232-1 et L. 1232-6 et du code du travail. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1232-1 et L. 1232-6 du code du travail : 6. Selon ces textes, la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié. 7. Pour juger le licenciement du salarié fondé sur une faute grave et rejeter ses demandes indemnitaires, l'arrêt retient qu'au mépris des règles prescrites par le règlement intérieur, le salarié travaillait en hauteur en état d'ivresse, objectivé par le dépistage d'alcoolémie positif auquel il a été soumis, caractérisant un taux d'alcoolémie supérieur à la normale. 8. En statuant ainsi, en retenant le grief d'exécution d'un travail en hauteur en état d'ivresse, fait non visé par la lettre de licenciement et alors que ce document ne visait que des faits d' exécution de travaux en hauteur avec un taux d'alcoolémie au-dessus de la normale, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il condamne la société CCTB à verser à M. [Y] la somme de 45 euros à titre de rappel de salaire et condamne M. [Y] à payer à la société CCTB la somme de 208,83 euros à titre de remboursement d'une dette, l'arrêt rendu le 4 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ; Condamne la société CCTB aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société CCTB et la condamne à payer à M. [Y] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [Y] Monsieur [Y] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la faute grave était démontrée par la partie défenderesse et d'avoir débouté en conséquence Monsieur [Y] de ses demandes tendant à voir dire et juger dénué de cause réelle et sérieuse le licenciement notifié à la date du 3 août 2017 et à voir condamner la société CCTB à lui verser diverses sommes à titre d'indemnité compensatrice de mise à pied, des congés payés afférents, d'indemnité compensatrice de préavis, des congés pays afférents, d'indemnité légale de licenciement, d'indemnité pour licenciement injustifié ainsi qu'au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ; ALORS en premier lieu QUE, selon l'article R. 4228-20 du Code du travail, aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail, que, lorsque la consommation de boissons alcoolisées, dans les conditions fixées au premier alinéa, est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur, en application de l'article L. 4121-1 du code du travail, prévoit dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d'accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d'une limitation voire d'une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché ; que, selon l'article R. 4228-21 du même Code, il est interdit de laisser entrer ou séjourner dans les lieux de travail des personnes en état d'ivresse ; qu'il découle de ces dispositions que, le fait de présenter, sur son lieu de travail, un taux d'alcoolémie supérieur à la normale n'est pas, en lui-même, prohibé sauf si le règlement intérieur de l'entreprise en dispose autrement ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que le règlement intérieur en vigueur au sein de l'entreprise interdisait d'accéder aux lieux de travail en état d'ivresse et prévoyait, pour les salariés occupant notamment des postes de travail en hauteur, la possibilité pour l'employeur, s'il existait un doute sérieux quant à leur capacité à occuper leur poste en toute sécurité pour les personnes ou les biens, de les soumettre à un alcootest, la Cour d'appel a retenu que le fait pour Monsieur [Y] d'avoir travaillé en hauteur avec un taux d'alcoolémie supérieur à la normale constituait un manquement à ses obligations professionnelles justifiant son licenciement pour faute grave ; qu'en statuant par de tels motifs alors qu'en l'absence de dispositions du règlement intérieur prohibant la consommation d'alcool pour les salariés travaillant en hauteur, le seul fait pour le salarié de présenter un taux d'alcoolémie supérieur à la normale n'était pas susceptible de caractériser un manquement de ce dernier à ses obligations professionnelles justifiant son licenciement, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1121-1, L. 1232-1, L. 1235-1, R. 4228-20 et R. 4228-21 du Code du travail ; ALORS en deuxième lieu QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige en ce qui concerne les griefs articulés à l'encontre du salarié ; qu'en conséquence, c'est au regard des seuls motifs énoncés dans cette lettre qu'il revient au juge d'apprécier le bienfondé du licenciement ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel, après avoir constaté que, dans la lettre de licenciement de Monsieur [Y], il lui était notamment reproché d'avoir « pendant [son] temps de travail, sur le lieu de travail, de surcroît en cours d'exécution de travaux en hauteur [?] travaillé en ayant un taux d'alcoolémie au-dessus de la normale », a considéré que le licenciement pour faute grave de Monsieur [Y] était justifié dès lors que la société CCTB rapportait la preuve de ce qu'au mépris des règles prescrites par le règlement intérieur, le salarié travaillait en hauteur en état d'ivresse ; qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la lettre de licenciement qui fixait les limites du litige ne reprochait pas à Monsieur [Y] d'avoir travaillé en état d'ivresse mais uniquement en ayant un taux d'alcoolémie au-dessus de la normale, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1232-1 et L. 1232-6 et du Code du travail ; ALORS en troisième lieu et en toute hypothèse QUE, selon l'article R. 4228-20 du Code du travail, aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail, que, lorsque la consommation de boissons alcoolisées, dans les conditions fixées au premier alinéa, est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur, en application de l'article L. 4121-1 du code du travail, prévoit dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d'accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d'une limitation voire d'une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché ; que, selon l'article R. 4228-21 du même Code, il est interdit de laisser entrer ou séjourner dans les lieux de travail des personnes en état d'ivresse ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que le règlement intérieur en vigueur au sein de l'entreprise interdisait d'accéder aux lieux de travail en état d'ivresse et prévoyait, pour les salariés occupant notamment des postes de travail en hauteur, la possibilité pour l'employeur, s'il existait un doute sérieux quant à leur capacité à occuper leur poste en toute sécurité pour les personnes ou les biens, de les soumettre à un alcootest, la Cour d'appel, pour considérer qu'au mépris des règles prescrites par ce règlement, Monsieur [Y] avait travaillé en hauteur en état d'ivresse et que ce manquement du salarié à ses obligations professionnelles justifiait son licenciement, a retenu que l'état d'ivresse du salarié était « objectivé par le test d'alcoolémie auquel il a été soumis, caractérisant un taux d'alcoolémie supérieur à la normale » ; qu'en statuant par de tels motifs, insuffisants à caractériser l'état d'ivresse du salarié, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 1321-1, R. 4228-20 et R. 4228-21 du Code du travail ; ALORS en quatrième lieu et en toute hypothèse QUE, selon l'article R. 4228-20 du Code du travail, aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail, que, lorsque la consommation de boissons alcoolisées, dans les conditions fixées au premier alinéa, est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs, l'employeur, en application de l'article L. 4121-1 du code du travail, prévoit dans le règlement intérieur ou, à défaut, par note de service les mesures permettant de protéger la santé et la sécurité des travailleurs et de prévenir tout risque d'accident. Ces mesures, qui peuvent notamment prendre la forme d'une limitation voire d'une interdiction de cette consommation, doivent être proportionnées au but recherché ; que, selon l'article R. 4228-21 du même Code, il est interdit de laisser entrer ou séjourner dans les lieux de travail des personnes en état d'ivresse ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que le règlement intérieur en vigueur au sein de l'entreprise interdisait d'accéder aux lieux de travail en état d'ivresse et prévoyait, pour les salariés occupant notamment des postes de travail en hauteur, la possibilité pour l'employeur, s'il existait un doute sérieux quant à leur capacité à occuper leur poste en toute sécurité pour les personnes ou les biens, de les soumettre à un alcootest, pour considérer qu'au mépris des règles prescrites par ce règlement, Monsieur [Y] avait travaillé en hauteur en état d'ivresse et que ce manquement du salarié à ses obligations professionnelles justifiait son licenciement pour faute grave, la Cour d'appel a retenu que l'état d'ivresse du salarié était « objectivé par le test d'alcoolémie auquel il a été soumis, caractérisant un taux d'alcoolémie supérieur à la normale » ; qu'en statuant par ces motifs sans s'expliquer sur le fait mis en avant par Monsieur [Y] qu'auditionné en qualité de témoin par le Conseil de prud'hommes, Monsieur [G], présent sur le chantier au moment de l'accident de l'exposant, avait déclaré que ce dernier ne présentait pas de signe d'ivresse, la Cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard des dispositions des articles L. 1321-1, R. 4228-20 et R. 4228-21 du Code du travail ; ALORS enfin et en toute hypothèse QUE la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise ; que ne constitue pas une telle faute, le seul fait pour un salarié ayant quinze ans d'ancienneté sans aucun antécédent disciplinaire, de présenter un taux d'alcoolémie supérieur à la normale, sans qu'il soit allégué que le salarié ait présenté d'autre signe d'ivresse ni qu'il soit établi que sa consommation d'alcool ait été à l'origine de l'accident dont il a été victime ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 1234-1, L. 1234-5 et L. 1234-9 du Code du travail.
INCA/JURITEXT000047304349.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SOC. OR COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 1er mars 2023 Cassation partielle M. SOMMER, président Arrêt n° 208 F-D Pourvoi n° T 21-19.834 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 1ER MARS 2023 La société SKF France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 21-19.834 contre l'arrêt rendu le 25 mai 2021 par la cour d'appel d'Orléans (chambre sociale A, section 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [E] [V], domicilié [Adresse 2], 2°/ à la société Manpower France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défendeurs à la cassation. La société Manpower France a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, les cinq moyens de cassation également annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société SKF France, de la SCP de Nervo et Poupet, avocat de M. [V], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Manpower France, après débats en l'audience publique du 11 janvier 2023 où étaient présents M. Sommer, président, Mme Thomas-Davost, conseiller référendaire rapporteur, Mme Monge, conseiller doyen, et Mme Piquot, greffier de chambre, la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Orléans, 25 mai 2021), M. [V] a été engagé par la société Manpower France (entreprise de travail temporaire) et mis à disposition de la société SKF France (entreprise utilisatrice), à compter du 8 janvier 2014, selon plusieurs contrats de mission, dont le dernier a pris fin le 22 décembre 2017. 2. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale, le 26 mars 2018, afin de solliciter la requalification de ses contrats de mission en un contrat à durée indéterminée ainsi que la condamnation des entreprises utilisatrice et de travail temporaire à lui verser diverses sommes au titre de la requalification et de la rupture du contrat de travail. Examen des moyens Sur les premier et deuxième moyens du pourvoi principal de l'entreprise utilisatrice et les premier à quatrième moyens du pourvoi provoqué de l'entreprise de travail temporaire, ci-après annexés 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le troisième moyen du pourvoi principal et le cinquième moyen du pourvoi provoqué, réunis Enoncé des moyens 4. Par son troisième moyen, l'entreprise utilisatrice fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum avec l'entreprise de travail temporaire à payer au salarié une certaine somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction postérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, sont applicables aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de ladite ordonnance et par conséquent à compter du 23 septembre 2017 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les relations contractuelles entre les parties avaient pris fin le 22 décembre 2017 et fait produire à la rupture intervenue à cette date les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; que, pour fixer le montant des dommages et intérêts alloués à ce titre et réformer le jugement qui avait dit se fonder sur ‘'le barème Macron'‘, la cour d'appel a retenu que ‘'dans leur version applicable'‘, les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail prévoyaient que ‘'le salarié peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure au salaires des six derniers mois'‘, appliquant ainsi cet article dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction postérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et l'article 40-I de ladite ordonnance. » 5. Par son cinquième moyen, l'entreprise de travail temporaire fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum avec l'entreprise utilisatrice à payer au salarié une certaine somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors « selon l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, lorsque l'entreprise emploie habituellement au moins onze salariés, le juge octroie au salarié ayant trois ans d'ancienneté et dont le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse une indemnité comprise entre trois et quatre mois de salaire ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que la relation de travail liant le salarié à l'entreprise utilisatrice a pris fin le 22 décembre 2017, qu'il avait, à cette date, moins de quatre ans d'ancienneté et que son salaire mensuel s'élevait à 1 565,23 euros ; qu'en condamnant néanmoins la société de travail temporaire in solidum avec la société utilisatrice à lui verser la somme de 9 391,38 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit l'équivalent de six mois du salaire, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable au litige. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, et 40-1 de cette même ordonnance : 6. Selon ce texte, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse et si l'une ou l'autre des parties refuse la réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre des montants minimaux et maximaux exprimés en mois de salaire brut. 7. Aux termes du second, les dispositions ci-dessus sont applicables aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de l'ordonnance. 8. Pour condamner in solidum les entreprise utilisatrice et de travail temporaire à verser au salarié une certaine somme à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt énonce, après avoir constaté que la relation contractuelle avait pris fin le 22 décembre 2017, que, le salarié comptant plus de deux ans d'ancienneté dans une entreprise comportant habituellement plus de 11 salariés, trouvent à s'appliquer les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa version applicable au litige, selon lesquelles, en cas de licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, le salarié peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. 9. En statuant ainsi, alors qu'il lui appartenait de déterminer le montant de l'indemnité par application des règles fixées à l'article L. 1235-3 du code du travail, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ce dont elle aurait dû déduire que le salarié ne pouvait prétendre, au regard de son ancienneté de trois ans dans l'entreprise, qu'à une indemnité maximale de 4 mois de salaire brut, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquence de la cassation 10. La cassation prononcée n'atteint pas les chefs de dispositif condamnant les entreprises utilisatrice et de travail temporaire aux dépens et au paiement d'une somme sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celles-ci et non remises en cause. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum la société SKF France et la société Manpower France à payer à M. [V] la somme de 9 391,38 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, l'arrêt rendu le 25 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Orléans ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bourges ; Condamne M. [V] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société SKF France, demanderesse au pourvoi principal PREMIER MOYEN DE CASSATION La société SKF FRANCE fait grief à l'arrêt attaqué, infirmant le jugement de ces chefs et y ajoutant, d'AVOIR rejeté la fin de non-recevoir tirée de la prescription de l'action en requalification des contrats de mission, d'AVOIR requalifié les contrats de mission en un contrat à durée indéterminée entre Monsieur [V] et la société SKF FRANCE à effet au 8 janvier 2014, d'AVOIR condamné in solidum la société SKF FRANCE et la société MANPOWER FRANCE à payer à Monsieur [V] la somme de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, confirmant le jugement de ces chefs, d'AVOIR condamné in solidum la société SKF FRANCE et la société MANPOWER FRANCE à payer à Monsieur [V] les sommes de 640,04 € net au titre de l'indemnité de licenciement, 3.130,46 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 313,04 brut € au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis, ainsi que d'AVOIR condamné la société SKF FRANCE à payer à Monsieur [V] la somme de 1.565,23 € net au titre de l'indemnité de requalification ; ALORS QUE selon l'article L. 1471-1 du Code du travail, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; que le délai de prescription d'une action en requalification de contrats de missions en un contrat à durée indéterminée fondée sur le non-respect du délai de carence entre deux contrats successifs prévu à l'article L. 1251-36 du code du travail court à compter du premier jour d'exécution du second de ces contrats ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir écarté la demande de requalification tirée du motif du recours aux contrats de mission, a considéré que la requalification s'imposait dès lors que « le délai de carence n'a pas été respecté, à plusieurs reprises, entre les contrats conclus pour le remplacement de salariés absents et les contrats conclus en raison de l'accroissement temporaire d'activité » ; que, pour néanmoins rejeter la fin de non-recevoir de l'action en requalification des contrats de mission, la cour d'appel a retenu que la prescription n'avait commencé à courir qu'à compter du terme du dernier contrat de mission ; qu'en statuant ainsi, quand il lui revenait d'identifier quand le délai de carence n'avait pas été respecté et de faire débuter le délai de prescription à compter du premier jour d'exécution du second contrat révélant une telle méconnaissance, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction postérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ainsi que les articles L. 1251-36, L. 1251-37 et L. 1251-40 du même code. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) La société SKF FRANCE fait grief à l'arrêt attaqué, infirmant le jugement de ces chefs et y ajoutant, d'AVOIR requalifié les contrats de mission en un contrat à durée indéterminée entre Monsieur [V] et la société SKF FRANCE à effet au 8 janvier 2014, d'AVOIR condamné in solidum la société SKF FRANCE et la société MANPOWER FRANCE à payer à Monsieur [V] la somme de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et, confirmant le jugement de ces chefs, d'AVOIR condamné in solidum la société SKF FRANCE et la société MANPOWER FRANCE à payer à Monsieur [V] les sommes de 640,04 € net au titre de l'indemnité de licenciement, 3.130,46 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 313,04 brut € au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis, ainsi que d'AVOIR condamné la société SKF FRANCE à payer à Monsieur [V] la somme de 1.565,23 € net au titre de l'indemnité de requalification ; 1. ALORS QUE les dispositions de l'article L. 1251-40 du code du travail, qui sanctionnent l'inobservation par l'entreprise utilisatrice des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35 par la requalification du contrat de travail temporaire en contrat à durée indéterminée ne sont pas applicables à la méconnaissance des dispositions de l'article L. 1251-36, relatif au délai de carence ; qu'en l'espèce, pour requalifier les contrats de missions en contrat à durée indéterminée, condamner in solidum les sociétés MANPOWER FRANCE et SKF FRANCE au paiement d'indemnités de rupture et dommages et intérêts, et cette dernière société au paiement d'une indemnité de requalification, la cour d'appel, après avoir retenu que la société SKF FRANCE apportait la preuve de la réalité des absences mentionnées aux contrats de missions conclus pour le remplacement de salariés ainsi que des surcroîts temporaires d'activité correspondant à des opérations spécifiques qu'elle a recensées, a retenu qu'il résultait toutefois de l'examen des contrats de mission que « le délai de carence n'a pas été respecté, à plusieurs reprises, entre les contrats conclus pour remplacement de salariés absents et les contrats conclus en raison de l'accroissement temporaire d'activité », et affirmé qu'« il y a lieu d'en déduire que le recours au travail temporaire a eu pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel qui a condamné l'entreprise utilisatrice sur le fondement d'une méconnaissance des obligations mises à la charge de la seule entreprise de travail temporaire, a violé l'article L. 1251-40 du code du travail ; 2. ALORS en tout état de cause QU'après avoir retenu que la société SKF FRANCE apportait la preuve de la réalité des absences mentionnées aux contrats ainsi que des surcroîts temporaires d'activité, soulignant que le seul fait de recourir à des contrats de remplacement de salariés absents de manière récurrente n'impliquait pas qu'il ait été pourvu à un emploi relevant de l'activité normale et permanente de l'entreprise, la cour d'appel a néanmoins considéré que le non-respect des délais de carence sur un même poste, afin d'assurer le remplacement de salariés absents ou de faire face à un accroissement temporaire d'activité, permettait de considérer qu'il avait été pourvu à un emploi relevant de l'activité normale et permanente de l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé les articles L. 1251-5, L. 1251-6 et L. 1251-40 du code du travail ; 3. ALORS QU' à l'expiration d'un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission incluant, le cas échéant, son ou ses renouvellement ; que ce délai de carence est égal au tiers de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat incluant, le cas échéant, son ou ses renouvellements, est de quatorze jours ou plus, ou à la moitié de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat incluant, le cas échéant, son ou ses renouvellements, est inférieure à quatorze jours, les jours pris en compte pour apprécier le délai devant séparer les deux contrats étant les jours d'ouverture de l'entreprise ou de l'établissement utilisateurs ; que pour procéder à la requalification des contrats de mission à compter du 8 janvier 2014 et condamner l'exposante au paiement de différentes sommes tant individuellement qu'in solidum avec l'entreprise de travail temporaire, la cour d'appel a retenu que « le délai de carence n'a pas été respecté, à plusieurs reprises, entre les contrats conclus pour le remplacement de salariés absents et les contrats conclus en raison de l'accroissement temporaire d'activité, ce qui n'est d'ailleurs contesté ni par la société SKF France ni par la société MANPOWER FRANCE » ; qu'en statuant ainsi, sans préciser entre quels contrats le délai de carence aurait été méconnu et à quel titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1251-36 du code du travail dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ainsi que de l'article L. 1251-36-1 dans la rédaction issue de ladite ordonnance postérieure ; 4. ALORS QUE les effets de la requalification de contrats de mission remontent à la date de la conclusion du premier contrat irrégulier ; que la cour d'appel ne pouvait faire remonter les effets de la requalification au premier jour du premier contrat de mission sans identifier la date de la première irrégularité commise ; qu'en statuant comme elle l'a fait, elle a violé l'article L. 1251-40 du code du travail. TROISIEME MOYEN DE CASSATION (plus subsidiaire) La société SKF FRANCE fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'AVOIR condamné in solidum la société SKF FRANCE et la société MANPOWER FRANCE à payer à Monsieur [V] la somme de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; ALORS QUE les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction postérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, sont applicables aux licenciements prononcés postérieurement à la publication de ladite ordonnance et par conséquent à compter du 23 septembre 2017 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les relations contractuelles entre les parties avaient pris fin le 22 décembre 2017 et fait produire à la rupture intervenue à cette date les effets d'un licenciement sans cause réelle ni sérieuse ; que, pour fixer le montant des dommages et intérêts alloués à ce titre et réformer le jugement qui avait dit se fonder sur « le barème Macron », la cour d'appel a retenu que « dans leur version applicable », les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail prévoyaient que « le salarié peut prétendre à une indemnité qui ne peut être inférieure au salaires des six derniers mois », appliquant ainsi cet article dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction postérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 et l'article 40-I de ladite ordonnance. Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Manpower France, demanderesse au pourvoi provoqué PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Manpower France fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR requalifié les contrats de mission en un contrat à durée indéterminée entre M. [V] et la société SKF France, d'AVOIR fixé la date d'effet de la requalification au 8 janvier 2014 et de l'AVOIR condamnée in solidum avec la société SKF France à payer à M. [V] les sommes de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 640,04 € net au titre de l'indemnité de licenciement, 3.130,46 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 313,04 € bruts au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis ; 1°) ALORS QU'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'il s'ensuit que l'action en requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée, fondée sur la succession illicite de contrats de nature à révéler que le recours au contrat de travail à durée déterminée a pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter du terme du dernier contrat de travail et s'étend à tous les contrats s'étant succédé ; qu'en revanche, le point de départ du délai de prescription étant le jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat de mission en contrat à durée indéterminée, fondée sur le non-respect du délai de carence entre deux contrats successifs prévu à l'article L. 1251-36 du code du travail, court à compter du premier jour d'exécution du second de ces contrats ; que, pour déclarer recevables les demandes de M. [V], la cour d'appel a retenu que « le délai de prescription a couru à compter du terme du dernier contrat, soit le 31 mai 2017, en ce que la demande de requalification des contrats de mission successifs conclus par M. [V] est fondée sur le moyen tiré du recours à une succession de contrats de mission afin de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, de sorte que l'action de M. [V] n'était pas prescrite le 26 mars 2018, jour où il a saisi le conseil de prud'hommes » ; que, pour ce faire, elle a relevé que « le délai de carence n'a pas été respecté, à plusieurs reprises, entre les contrats conclus pour remplacement de salariés absents et les contrats conclus en raison de l'accroissement temporaire d'activité, ce qui d'ailleurs n'est contesté ni par la société SKF France, ni par la société Manpower France » et que « l'entreprise utilisatrice a eu recours entre le 8 janvier 2014 et le 22 décembre 2017 pour pourvoir au même poste à des contrats de mission qui se sont succédé, sans respect du délai de carence, afin d'assurer le remplacement de salariés absents ou de faire face à un accroissement temporaire d'activité », puis en a déduit que « le recours au travail temporaire a eu pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice » ; qu'en déduisant ainsi de l'absence de respect du délai de carence entre deux contrats de mission l'existence d'une succession de tels contrats ayant pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice, pour dire que le délai de prescription courrait à compter du terme du dernier contrat et non à compter du premier jour d'exécution du contrat conclu en méconnaissance du délai de carence, la cour d'appel a statué par un motif erroné en droit et violé - à supposer que le non-respect du délai de carence susceptible de permettre la requalification sollicitée par le salarié soit antérieur à l'entrée en vigueur de la l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 - l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction antérieure à ladite ordonnance, ensemble les articles L. 1251-5, L. 1251-36, L. 1251-37 et L. 1251-40 du même code ; 2°) ALORS, subsidiairement, QU'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; qu'il s'ensuit que l'action en requalification d'un contrat de travail à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée, fondée sur la succession illicite de contrats de nature à révéler que le recours au contrat de travail à durée déterminée a pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, susceptible d'entraîner sa requalification, court à compter du terme du dernier contrat de travail et s'étend à tous les contrats s'étant succédé ; qu'en revanche, le point de départ du délai de prescription étant le jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer, le délai de prescription d'une action en requalification d'un contrat de mission en contrat à durée indéterminée, fondée sur le non-respect du délai de carence entre deux contrats successifs prévu à l'article L. 1251-36 du code du travail, court à compter du premier jour d'exécution du second de ces contrats ; que, pour déclarer recevables les demandes de M. [V], la cour d'appel a retenu que « le délai de prescription a couru à compter du terme du dernier contrat, soit le 31 mai 2017, en ce que la demande de requalification des contrats de mission successifs conclus par M. [V] est fondée sur le moyen tiré du recours à une succession de contrats de mission afin de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise, de sorte que l'action de M. [V] n'était pas prescrite le 26 mars 2018, jour où il a saisi le conseil de prud'hommes » ; que, pour ce faire, elle a relevé que « le délai de carence n'a pas été respecté, à plusieurs reprises, entre les contrats conclus pour remplacement de salariés absents et les contrats conclus en raison de l'accroissement temporaire d'activité, ce qui d'ailleurs n'est contesté ni par la société SKF France, ni par la société Manpower France », et que « l'entreprise utilisatrice a eu recours entre le 8 janvier 2014 et le 22 décembre 2017 pour pourvoir au même poste à des contrats de mission qui se sont succédé, sans respect du délai de carence, afin d'assurer le remplacement de salariés absents ou de faire face à un accroissement temporaire d'activité », puis en a déduit que « le recours au travail temporaire a eu pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice » ; qu'en déduisant ainsi de l'absence de respect du délai de carence entre deux contrats de mission l'existence d'une succession de tels contrats ayant pour objet ou pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice, pour dire que le délai de prescription courrait à compter du terme du dernier contrat et non à compter du premier jour d'exécution du contrat conclu en méconnaissance du délai de carence, la cour d'appel a statué par un motif erroné en droit et violé - à supposer que le non-respect du délai de carence susceptible de permettre la requalification sollicitée par le salarié soit postérieur à l'entrée en vigueur de la l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 - l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction issue de cette ordonnance, ensemble les articles L. 1251-5, L. 1251-36, L. 1251-37 et L. 1251-40 du même code ; 3°) ALORS, plus subsidiairement, QU'aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction applicable au litige, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; que M. [V] ayant saisi la juridiction prud'homale le 26 mars 2018, seule une méconnaissance du délai de carence postérieure au 26 mars 2016 était de nature à permettre la requalification de la relation de travail en un contrat de travail à durée indéterminée pour ce motif ; que le salarié n'invoquait aucune méconnaissance particulière du délai de carence postérieurement à cette date du 26 mars 2016 (cf. conclusions d'appel pp. 14, 15 et 19 à 21) ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans préciser entre quels contrats de mission le délai de carence prévu par les articles L. 1251-36 et L. 1251-37 du code du travail n'aurait pas été respecté, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation mesure d'exercer son contrôle, violant ainsi l'article 455 du code de procédure civile ; 4°) ET ALORS, très subsidiairement, QUE selon l'article L. 1471-1 du Code du travail, toute action portant sur l'exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit ; que le délai de prescription d'une action en requalification de contrats de missions en un contrat à durée indéterminée fondée sur le non-respect du délai de carence entre deux contrats successifs prévu à l'article L. 1251-36 du code du travail court à compter du premier jour d'exécution du second de ces contrats ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, après avoir écarté la demande de requalification tirée du motif du recours aux contrats de mission, a considéré que la requalification s'imposait dès lors que « le délai de carence n'a pas été respecté, à plusieurs reprises, entre les contrats conclus pour le remplacement de salariés absents et les contrats conclus en raison de l'accroissement temporaire d'activité » ; que, pour néanmoins rejeter la fin de non-recevoir de l'action en requalification des contrats de mission, la cour d'appel a retenu que la prescription n'avait commencé à courir qu'à compter du terme du dernier contrat de mission ; qu'en statuant ainsi, quand il lui revenait d'identifier quand le délai de carence n'avait pas été respecté et de faire débuter le délai de prescription à compter du premier jour d'exécution du second contrat révélant une telle méconnaissance, la cour d'appel a violé l'article L. 1471-1 du code du travail dans sa rédaction postérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, ainsi que les articles L. 1251-36, L. 1251-37 et L. 1251-40 du même code. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION La société Manpower France fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée in solidum avec la société SKF France à payer à M. [V] les sommes 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 640,04 € net au titre de l'indemnité de licenciement, 3.130,46 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 313,04 € bruts au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis ; 1°) ALORS QU'en vertu de l'article L. 1251-36 du code du travail, dans sa rédaction applicable au litige, à l'expiration d'un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission incluant, le cas échéant, son ou ses deux renouvellements, ce délai n'étant toutefois pas applicable dans les cas visés à l'article L. 1251-37 ; qu'aucun texte ni aucun principe ne prévoit que le respect de ce délai de carence serait une obligation propre pesant sur l'entreprise de travail temporaire ; qu'au contraire, l'article L. 1255-9 du code du travail – dans sa rédaction applicable au litige-, en disposant que « le fait pour l'utilisateur de méconnaître les dispositions relatives à la succession de contrats sur un même poste, prévues à l'article L. 1251-36, est puni d'une amende de 3 750 euros », implique que le respect du délai de carence de l'article L. 1251-36 du code du travail constitue une obligation pesant sur l'entreprise utilisatrice, seule à même d'en assurer effectivement le respect, et par suite de répondre personnellement, y compris pénalement, de sa méconnaissance ; qu'en retenant pourtant, pour condamner la société Manpower France in solidum avec l'entreprise utilisatrice au titre de la requalification de la relation de travail, que l'entreprise de travail temporaire, du fait du non-respect du délai de carence, avait manqué à ses obligations propres, la cour d'appel a violé les articles L. 1251-36, L. 1251-40 et L. 1255-9 du code du travail ; 2°) ALORS QUE la condamnation in solidum de l'entreprise de travail temporaire et de l'entreprise utilisatrice à supporter les conséquences de la requalification des contrats de mission n'est encourue qu'à la condition que cellesci aient agi de manière concertée aux fins de contourner l'interdiction de recourir au travail temporaire ; qu'il s'ensuit qu'en l'absence de collusion entre l'entreprise utilisatrice et l'entreprise de travail temporaire, cette dernière ne peut être tenue, in solidum, à garantir les condamnations prononcées à l'encontre de l'entreprise utilisatrice ; qu'en jugeant alors au contraire que « le non-respect du délai de carence caractérise un manquement par l'entreprise de travail temporaire aux obligations qui lui sont propres dans l'établissement des contrats de mission » et que « la société Manpower France doit être condamnée in solidum avec l'entreprise utilisatrice à supporter les conséquences de la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, à l'exception de l'indemnité de requalification, dont l'entreprise utilisatrice est seule débitrice », pour dire que « le moyen soulevé par la société Manpower France, pour échapper à sa condamnation in solidum avec la société SKF France (hormis pour ce qui concerne l'indemnité de requalification), tiré de ce qu'il y aurait lieu que soit démontrée l'existence d'un « concert frauduleux » entre l'entreprise de travail temporaire et l'entreprise utilisatrice, ou de ce qu'elles auraient des responsabilités propres qui ne peuvent être confondues, sera rejeté », la cour d'appel a violé l'article L. 1251-40 du code du travail en sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article 1213 du code civil en sa rédaction applicable au litige et les principes régissant l'obligation in solidum ; 3°) ET ALORS QU'en s'abstenant dès lors de faire ressortir concrètement en quoi la société Manpower France, d'une part, la société SKF France, d'autre part, se seraient concertées aux fins de contourner l'interdiction de recourir au travail temporaire, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 1251-40 du code du travail en sa rédaction applicable au litige, ensemble l'article 1213 du code civil en sa rédaction applicable au litige et les principes régissant l'obligation in solidum. TROISIÈME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) La société Manpower France fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR requalifié les contrats de mission en un contrat à durée indéterminée entre M. [V] et la société SKF France, d'AVOIR fixé la date d'effet de la requalification au 8 janvier 2014 et de l'AVOIR condamnée in solidum avec la société SKF France à payer à M. [V] les sommes de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 640,04 € net au titre de l'indemnité de licenciement, 3.130,46 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 313,04 € bruts au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis ; 1°) ALORS QU'après avoir retenu que la société SKF France apportait la preuve de la réalité des absences mentionnées aux contrats ainsi que des surcroîts temporaires d'activité, soulignant que le seul fait de recourir à des contrats de remplacement de salariés absents de manière récurrente n'impliquait pas qu'il ait été pourvu à un emploi relevant de l'activité normale et permanente de l'entreprise, la cour d'appel a néanmoins considéré que le non-respect des délais de carence sur un même poste, afin d'assurer le remplacement de salariés absents ou de faire face à un accroissement temporaire d'activité, permettait de considérer qu'il avait été pourvu à un emploi relevant de l'activité normale et permanente de l'entreprise ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1251-5, L. 1251-6, L. 1251-36, L. 1251-37 et L. 1251-40 du code du travail ; 2°) ET ALORS QU'à l'expiration d'un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission, avant l'expiration d'un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission incluant, le cas échéant, son ou ses renouvellements ; que ce délai de carence est égal au tiers de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat incluant, le cas échéant, son ou ses renouvellements, est de quatorze jours ou plus, ou à la moitié de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat incluant, le cas échéant, son ou ses renouvellements, est inférieure à quatorze jours, les jours pris en compte pour apprécier le délai devant séparer les deux contrats étant les jours d'ouverture de l'entreprise ou de l'établissement utilisateurs ; que, pour procéder à la requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée, la cour d'appel a retenu que « le délai de carence n'a pas été respecté, à plusieurs reprises, entre les contrats conclus pour le remplacement de salariés absents et les contrats conclus en raison de l'accroissement temporaire d'activité, ce qui n'est d'ailleurs contesté ni par la société SKF France ni par la société Manpower France » ; qu'en statuant ainsi, sans préciser entre quels contrats le délai de carence aurait été méconnu et à quel titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 1251-36, L. 1251-37 et L. 1251-40 du code du travail. QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION (plus subsidiaire) La société Manpower France fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR fixé la date d'effet de la requalification au 18 novembre 2013 et de l'AVOIR condamnée in solidum avec la société SKF France à payer à M. [V] les sommes de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 640,04 € net au titre de l'indemnité de licenciement, 3.130,46 € brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, 313,04 € bruts au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis ; ALORS QUE les effets de la requalification de contrats de mission remontent à la date de la conclusion du premier contrat irrégulier ; que la cour d'appel ne pouvait faire remonter les effets de la requalification au premier jour du premier contrat de mission sans identifier la date de la première irrégularité commise ; qu'en statuant comme elle l'a fait, elle a violé l'article L. 1251-40 du code du travail. CINQUIÈME MOYEN DE CASSATION (très subsidiaire) La société Manpower France fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée in solidum avec la société SKF France à payer à M. [V] la somme de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; ALORS QUE selon l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, lorsque l'entreprise emploie habituellement au moins onze salariés, le juge octroie au salarié ayant trois ans d'ancienneté et dont le licenciement est jugé sans cause réelle et sérieuse une indemnité comprise entre trois et quatre mois de salaire ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que la relation de travail liant M. [V] à la société SKF France a pris fin le 22 décembre 2017, qu'il avait, à cette date, moins de quatre ans d'ancienneté et que son salaire mensuel s'élevait à 1.565,23 euros ; qu'en condamnant néanmoins la société Manpower France in solidum avec la société SKF France à lui verser la somme de 9.391,38 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, soit l'équivalent de six mois du salaire, la cour d'appel a violé l'article L. 1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, applicable au litige.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° K 22-85.657 F-D N° 00255 SL2 7 MARS 2023 ANNULATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 M. [L] [G] a formé un pourvoi contre l'ordonnance du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 septembre 2022, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'extorsion avec arme en bande organisée, association de malfaiteurs, recel de vol et infractions à la législation sur les armes, a déclaré non admis son appel de l'ordonnance de non-lieu partiel, de requalification et de renvoi devant le tribunal correctionnel. Par ordonnance en date du 5 décembre 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi. Sur le rapport de Mme Hairon, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [L] [G], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Hairon, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Un mémoire a été produit. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par ordonnance du 29 août 2022, le juge d'instruction, après requalification, a ordonné le renvoi devant le tribunal correctionnel de M. [L] [G], des chefs d'extorsion par personne dissimulant volontairement son visage, association de malfaiteurs, recel de vol et infractions à la législation sur les armes. 3. M. [G] a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a déclaré non admis l'appel interjeté par M. [G] contre l'ordonnance de non lieu partiel, de requalification et de renvoi devant le tribunal correctionnel du juge d'instruction, alors « que la personne mise en examen peut interjeter appel de l'ordonnance la renvoyant devant le tribunal correctionnel dans le cas où elle estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises ; que la recevabilité de cet appel peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant dans l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la chambre de l'instruction, qu'en déclarant non admis l'appel interjeté le 9 septembre 2022 contre l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel dès le 16 septembre suivant, au seul motif que Monsieur [G] ne disposerait pas du droit d'appel de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel dès lors que l'ordonnance ne répond pas aux conditions d'ouverture de ce droit limitativement énumérées par l'article 186-3 du Code de procédure pénale, quand l'appelant et ses avocats n'avaient pas encore déposé de mémoire dans lequel ils auraient pu faire valoir qu'aux termes de cet article, ils estimaient que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises, ce qu'ils auraient pu faire jusqu'à la veille de l'audience devant la Chambre de l'instruction, le président de la Chambre de l'instruction, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les articles 186 et 186-3 du code de procédure pénale, ensemble l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. » Réponse de la Cour Vu l'article 186-3 du code de procédure pénale : 5. Selon ce texte, la personne mise en examen peut interjeter appel des ordonnances prévues par le premier alinéa de l'article 179 du code de procédure pénale dans le cas où elle estime que les faits renvoyés devant le tribunal correctionnel constituent un crime qui aurait dû faire l'objet d'une ordonnance de mise en accusation devant la cour d'assises. 6. Pour dire non admis l'appel de M. [G], l'ordonnance attaquée énonce que celui-ci ne dispose pas du droit d'appel de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, dès lors que l'ordonnance attaquée ne répond pas aux conditions d'ouverture de ce droit limitativement énumérées par l'article 186-3 du code de procédure pénale. 7. En prononçant ainsi, alors que la recevabilité, au regard des dispositions de l'article 186-3 du code de procédure pénale, de l'appel d'une ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, portant requalification des faits, peut être appréciée, non seulement au vu des indications figurant dans l'acte d'appel, mais aussi en fonction des motifs de ce recours exposés par mémoire devant la chambre de l'instruction, le président de cette juridiction a excédé ses pouvoirs. 8. L'annulation est de ce fait encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance susvisée du président de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 16 septembre 2022 ; CONSTATE que du fait de l'annulation de cette ordonnance, la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux se trouve saisie de l'appel ; ORDONNE le retour de la procédure à cette juridiction, autrement présidée ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'ordonnance annulée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° N 22-83.336 F-D N° 00261 SL2 7 MARS 2023 CASSATION SANS RENVOI M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 M. [G] [N] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Bastia, chambre correctionnelle, en date du 11 mai 2022, qui, pour excès de vitesse, l'a condamné à 135 euros d'amende. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, les observations de la SCP Krivine et Viaud, avocat de M. [G] [N], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Un véhicule automobile immatriculé au nom de M. [G] [N] a été contrôlé en excès de vitesse par un radar automatique. 3. Destinataire d'un avis d'amende forfaitaire, M. [N] a formé une requête en exonération. 4. L'intéressé a été cité du chef d'excès de vitesse devant le tribunal de police, qui l'a déclaré coupable et condamné à 135 euros d'amende. 5. M. [N] a relevé appel de cette décision. Sur le moyen relevé d'office et mis dans le débat Vu l'article 546 du code de procédure pénale : 6. Il résulte de ce texte que la faculté d'appeler contre un jugement de police n'appartient au prévenu que lorsque l'amende encourue est celle prévue pour les contraventions de la cinquième classe, lorsqu'a été prononcée la peine prévue à l'article 131-16, 1°, du code pénal, ou lorsque la peine d'amende prononcée est supérieure au maximum de l'amende encourue pour les contraventions de la deuxième classe. 7. M. [N] a interjeté appel du jugement du tribunal de police, qualifié à tort de rendu en premier ressort. 8. La cour d'appel qui, par application des dispositions d'ordre public susvisées, aurait dû déclarer ce recours irrecevable, s'est abstenue de le faire et l'a examiné au fond. 9. La cassation est dès lors encourue. Portée et conséquences de la cassation 10. La cassation interviendra sans renvoi dès lors que l'appel était irrecevable. 11. Cependant, l'erreur commise par le premier juge ne saurait avoir pour effet de préjudicier au prévenu. En conséquence, le délai de pourvoi contre le jugement du tribunal de police de Bastia en date du 3 juin 2021 commencera à courir à compter du jour de la notification du présent arrêt. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les premier et second moyens de cassation proposés, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Bastia, en date du 11 mai 2022 ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; DIT que l'appel interjeté contre le jugement du tribunal de police de Bastia du 3 juin 2021 était irrecevable ; DIT que le délai de pourvoi contre le dit jugement commencera à courir à compter du jour de la notification du présent arrêt ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Bastia et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° G 22-80.779 F-D N° 00260 SL2 7 MARS 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 M. [T] [W], partie civile, et la société [1], partie intervenante, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Rouen, chambre correctionnelle, en date du 22 décembre 2021, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 17 décembre 2019, n° 18-85.191), dans la procédure suivie contre M. [F] [U] du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [T] [W], les observations de la SCP Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société [1], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [T] [W] a été victime, le 19 octobre 2006, d'un accident de la circulation dont M. [F] [U], assuré auprès de la société [1], a été déclaré tenu à réparation intégrale. 3. Par jugement du 26 juillet 2011, le tribunal a prononcé sur les intérêts civils. 4. M. [W] a relevé appel de cette décision. 5. Par arrêt du 13 juin 2013, la cour d'appel a partiellement infirmé ce jugement, condamné M. [U] à payer à la partie civile diverses sommes en réparation de son préjudice corporel et a, notamment, sursis à statuer sur les frais d'appareillage rendus nécessaires par l'amputation de la jambe gauche de la victime et ordonné une nouvelle expertise relative à ceux-ci. 6. Par arrêt du 8 janvier 2015, la cour d'appel de Caen a fixé, notamment, le poste correspondant au coût d'acquisition de la première prothèse fonctionnelle et a sursis à statuer sur le coût de renouvellement de celle-ci et sur l'acquisition d'une prothèse de seconde mise, dite « de secours ». 7. Sur pourvois formés par M. [W] et la société [1], cette décision a été cassée par arrêt de la chambre criminelle (Crim., 5 avril 2016, pourvoi n° 15-80.577), uniquement en ce que la cour d'appel a omis de fixer le terme du sursis à statuer. 8. Sur renvoi après cassation, la cour d'appel a été saisie de demandes d'indemnisation au titre de l'acquisition et du renouvellement de l'appareillage prothétique, au titre du sous-poste des dépenses de santé futures. 9. Par arrêt du 17 décembre 2019, la chambre criminelle a cassé l'arrêt rendu par la cour d'appel, en toutes ses dispositions. Examen des moyens Sur le moyen proposé pour M. [W], pris en ses cinquième et sixième branches et le moyen proposé pour la société [1], pris en ses première, deuxième et quatrième branches 10. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen proposé pour M. [W], pris en ses première, deuxième, troisième, quatrième et septième branches et le moyen proposé pour la société [1], pris en sa troisième branche Enoncé des moyens 11. Le moyen proposé pour M. [W] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a limité à la somme de 2 359 219,48 euros le montant des frais de santé futurs de M. [W] a condamné M. [U] au paiement de cette seule somme, alors : « 1°/ que l'indemnité allouée au titre de l'appareillage prothétique de la victime doit être évaluée en fonction de ses besoins et ne peut pas être subordonnée à la justification des dépenses correspondantes ; qu'en refusant d'indemniser le coût de la prothèse fonctionnelle « Genium », pour la période courant de la consolidation intervenue le 1er août 2008 au 5 août 2014, au motif inopérant que ce n'est qu'à cette date que M. [W] avait fait l'acquisition effective de cette prothèse « Genium » et qu'antérieurement, il « bénéficiait d'un appareillage pris en charge par la caisse de sécurité sociale » (arrêt, p. 8, § 7), cependant qu'il résultait de ses propres constatations que le besoin de M. [W] ne pouvait être satisfait que par l'utilisation d'une prothèse « Genium », et non de la prothèse « C-LEG » fournie par la sécurité sociale, de sorte que ce besoin devait être réparé à compter de la consolidation, existant depuis cette date, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ; 2°/ qu'en toute hypothèse, seules doivent être déduites de l'indemnité à revenir à la victime les prestations effectivement versées par les organismes sociaux ; qu'en déduisant de la somme de 1 155 110,90 euros, correspondant au coût viager du renouvellement de la prothèse fonctionnelle « Genium » de M. [W], non pas le coût de la prothèse « CLEG » effectivement prise en charge par la sécurité sociale, mais une somme de 129 512,34 euros, correspondant au coût estimé d'une prothèse « Genium » pour la période comprise entre le 1er août 2008, date de consolidation, et le 5 août 2014, date d'acquisition effective de ladite prothèse, la cour d'appel, qui a déduit de l'indemnité à revenir à la victime une prestation qui n'avait pourtant pas été versée par la sécurité sociale, a violé l'article 31, alinéa 1er, de la loi du n° 85-677 du 5 juillet 1985 et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ; 3°/ qu'en toute hypothèse, seules doivent être déduites de l'indemnité à revenir à la victime les prestations effectivement versées par les organismes sociaux ; que l'arrêt rendu le 8 janvier 2015 par la cour d'appel de Caen, qui avait définitivement indemnisé le coût initial d'acquisition de la prothèse fonctionnelle, avait rappelé que celui-ci « selon facture s'établit à 50 353,25 euros (non prise en charge par la caisse primaire d'assurance maladie) » (arrêt du 8 janvier 2015, p. 8, § 6) cependant que « pour les prothèses de type CLEG, le coût est entre 25 000 et 30 000 euros » (arrêt du 8 janvier 2015, p. 7, § 6) ; qu'en déduisant de la somme de 1 155 110,90 euros, correspondant au coût viager du renouvellement de la prothèse fonctionnelle « Genium » de M. [W], une somme de 129 512,34 euros, sans mieux s'expliquer sur le coût respectif de ces différentes prothèses et sans allouer à M. [W], le cas échéant, la différence entre le coût de la prothèse « C-LEG », fournie par la sécurité sociale, et celui de la prothèse « Genium », correspondant à son besoin, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 31, alinéa 1er , de la loi du n° 85-677 du 5 juillet 1985 et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime ; 4 °/ qu'en toute hypothèse, le préjudice doit être réparé sans qu'il en résulte pour la victime une perte ou un profit ; qu'en déduisant du montant total du préjudice subi par M. [W] au titre du renouvellement de sa prothèse fonctionnelle « Genium », d'une part, une somme de 105 358,50 euros correspondant, pour cinq années, au « coût total annuel » de la prothèse, incluant « le renouvellement des accessoires », et, d'autre part, diverses sommes correspondant aux emboîtures et manchons, qui étaient pourtant déjà incluses dans ce coût total comme accessoires, la cour d'appel, qui a déduit deux fois le montant des manchons et emboîtures, a violé le principe susvisé ; 7°/ que l'indemnité allouée au titre de l'appareillage prothétique de la victime doit être évaluée en fonction de ses besoins et ne peut pas être subordonnée à la justification des dépenses correspondantes ; qu'en jugeant, s'agissant de la prothèse esthétique, que « l'évaluation deva[i]t exclure une prise en compte au 1er août 2008, s'agissant d'une dépense patrimoniale » (arrêt, p. 10), cependant qu'il résultait de ses propres constatations que le besoin présenté de ce chef par M. [W] était antérieur à la date de sa propre décision, peu important la date ou même l'existence d'une dépense en ce sens, la cour d'appel a violé le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. » 12. Le moyen proposé pour la société [1] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fixé à 2 359 219,48 euros les frais de santé futurs de M. [W], condamné M. [U] au paiement de cette somme et a dit que l'arrêt est commun à la CPAM du Calvados et opposable à la société [1], alors : « 3°/ que si les juges du fond apprécient souverainement le préjudice subi par la victime d'une infraction et les modalités de sa réparation, cette appréciation cesse d'être souveraine lorsqu'elle est déduite de motifs insuffisants, contradictoires ou erronés, ou ne répondant pas aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, s'agissant du renouvellement de la prothèse fonctionnelle, la cour d'appel a constaté que, pour la période allant du 1er août 2008 au 5 août 2014, soit pendant les six premières années à compter de la consolidation de M. [W], ce dernier bénéficiait d'un appareillage pris en charge par la sécurité sociale et devant être déduit du montant réclamé par M. [W] ; qu'en retenant néanmoins qu'il convenait de déduire du montant réclamé par M. [W] les frais d'appareillage avec renouvellement des accessoires sur cinq années seulement, ainsi que les frais d'emboîtures multipliés par deux et par quatre et les frais de manchons pour cinq années, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé. » Réponse de la Cour 13. Les moyens sont réunis. Sur le moyen proposé pour M. [W], pris en sa première branche 14. Pour évaluer les dépenses de santé futures liées au renouvellement de la prothèse fonctionnelle de M. [W], l'arrêt attaqué retient, sur la base des pièces produites, les frais correspondant à une prothèse de type « Genium », à renouveler tous les six ans. 15. Les juges relèvent toutefois que l'intéressé ayant été appareillé entre le 1er août 2008, date de sa consolidation, et le 5 août 2014 d'une prothèse de type « C-Leg » intégralement prise en charge par la sécurité sociale, les sommes correspondant à cette période doivent être déduites de son indemnisation. 16. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision, sans méconnaître le principe visé au moyen. 17. En effet, les juges ont, par des motifs relevant de leur appréciation souveraine, dépourvus d'insuffisance ou de contradiction, retenu que le préjudice de M. [W] a été, sur la période concernée, intégralement réparé par l'appareillage pris en charge par la sécurité sociale. 18. Le grief doit dès lors être écarté. Mais sur le moyen proposé pour M. [W], pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches et le moyen proposé pour la société [1], pris en sa troisième branche Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 19. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 20. Pour évaluer à 129 512,34 euros la somme imputée au titre de l'appareillage pris en charge sur la période du 1er août 2008 au 5 août 2014, l'arrêt attaqué énonce que l'indemnisation de M. [W] doit être diminuée du montant de cinq annuités du coût annuel, accessoires compris, d'une prothèse de type « Genium », évalué à 21 071,70 euros, majoré de 16 202,94 euros et 7 950,90 euros représentant respectivement le coût des emboîtures et des manchons sur cinq années. 21. En se déterminant ainsi, par des motifs contradictoires imputant les prestations correspondant à l'appareillage de type « C-Leg » pendant six ans et quatre jours pour un montant correspondant au coût annuel d'une prothèse de type « Genium » plus onéreuse, appliqué sur une période de seulement cinq ans et majoré du coût d'accessoires qu'il prenait déjà en compte, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 22. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Et sur le moyen proposé pour M. [W], pris en sa septième branche Vu les articles 1382, devenu 1240, du code civil et 593 du code de procédure pénale : 23. Il résulte du premier de ces textes que le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties. 24. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 25. Pour fixer à 129 504,89 euros le montant du chef de préjudice relatif à la prothèse esthétique, l'arrêt attaqué énonce que M. [W] doit être indemnisé pour un coût annuel de 2 681,27 euros, dont le montant n'est pas contesté, qui doit être capitalisé pour les arrérages à échoir. 26. Les juges retiennent toutefois, pour rejeter le surplus des demandes de la partie civile, que ce préjudice ne doit être indemnisé qu'à compter de la date de l'arrêt, s'agissant d'une dépense patrimoniale. 27. En se déterminant ainsi, sans mieux s'expliquer sur les motifs du rejet partiel de la demande d'indemnisation de dépenses de santé futures qui, par la nature de ce poste de préjudice patrimonial, pouvaient exister dès la date de consolidation, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 28. La cassation est par conséquent également encourue de ce chef. Portée et conséquences de la cassation 29. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à l'indemnisation des chefs de préjudice relatifs à la prothèse fonctionnelle, à hauteur de 1 025 598,56 euros, et à la prothèse esthétique, à hauteur de 129 504,89 euros. Les autres dispositions seront donc maintenues. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Rouen, en date du 22 décembre 2021, mais en ses seules dispositions relatives à l'indemnisation des chefs de préjudice relatifs à la prothèse fonctionnelle, à hauteur de 1 025 598,56 euros, et à la prothèse esthétique, à hauteur de 129 504,89 euros, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Rouen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° W 22-84.494 F-D N° 00254 SL2 7 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 La société [1] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 7 juin 2022, qui, pour pratique commerciale trompeuse par personne morale, l'a condamnée à 10 000 euros d'amende. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Rouvière, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société [1], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Rouvière, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La société [1] (la banque) a été poursuivie du chef de pratique commerciale trompeuse devant le tribunal correctionnel, qui l'a relaxée. 3. Le procureur de la République a relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré la société [1] coupable de pratique commerciale trompeuse et, en répression, l'a condamnée à une amende de 10 000 euros, alors « qu'en application des articles 406 et 512 du code de procédure pénale, le premier dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; que la méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief ; que ces dispositions n'opèrent pas de distinction entre les personnes morales et les personnes physiques ; qu'il ressort de l'arrêt que M. [X] [P] représentant légal de la société [1], comparant, n'a pas été informé de son droit de se taire au cours des débats, en violation des textes susrappelés. » Réponse de la Cour Vu les articles 406 et 512 du code de procédure pénale : 5. Il résulte du premier de ces textes, que devant le tribunal correctionnel, le président ou l'un des assesseurs, par lui désigné, informe le prévenu, sans distinction entre les personnes physiques et les personnes morales, de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. La méconnaissance de l'obligation d'informer le prévenu du droit de se taire lui fait nécessairement grief. 6. En application du second de ces textes, ces dispositions sont applicables également devant la chambre des appels correctionnels. 7. Il ne résulte pas de l'arrêt attaqué ni des notes d'audience versées à la procédure que M. [X] [P], qui a comparu à l'audience de la cour d'appel du 3 mai 2022, en qualité de représentant légal de la prévenue, ait été informé de son droit de se taire au cours des débats. 8. En cet état, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 9. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai, en date du 7 juin 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° U 22-80.743 F-D N° 00256 SL2 7 MARS 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 La société [1] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Chambéry, chambre correctionnelle, en date du 9 décembre 2021, qui, pour infraction au code de la santé publique, l'a condamnée à 5 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Samuel, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société [1] ([1]), les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [V] [Y], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Samuel, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Des voisins de l'établissement professionnel de la société [1] ([1]) se sont plaints des nuisances sonores résultant de son activité liée à l'acheminement de produits alimentaires par camions frigorifiques. Un rapport d'expertise commandé par l'un d'entre eux, M. [V] [Y], a conclu à un dépassement important des normes admises par le code de la santé publique. 3. La société [1] a été poursuivie devant le tribunal correctionnel pour avoir, lors d'une activité professionnelle dont les conditions d'exercice relatives au bruit n'ont pas été fixées par les autorités compétentes, été à l'origine d'un bruit de voisinage dépassant les valeurs limites de l'émergence globale ou de l'émergence spectrale prévues aux articles R. 1336-7, R. 1336-8 et R. 1334-23 du code de la santé publique. 4. Les juges du premier degré ont déclaré la prévenue coupable pour les faits commis le 10 juillet 2019 et l'ont relaxée pour ceux reprochés à d'autres dates. 5. La prévenue, le ministère public et une partie civile ont relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré la société [1] coupable des faits d'émission de bruit supérieur aux normes lors d'une activité non réglementée en matière de bruit commis le 10 juillet 2019 et l'a condamné au paiement d'une amende de 5 000 euros, alors : « 1°/ que nul n'est responsable pénalement que de son propre fait ; que pour retenir la responsabilité pénale de la SA [1], du fait des nuisances sonores dont elle constate qu'en sont à l'origine des camions de livraison d'entreprises extérieures munis de dispositifs frigorifiques stationnant sur la voie publique, à proximité de la société [1], dans l'attente des chargements et déchargements, la cour d'appel énonce qu'en application de l'article R. 1336-5 du code de la santé publique, « la responsabilité légale de l'auteur des faits peut même aller plus loin que sa propre responsabilité personnelle » ; qu'en statuant par ces motifs, la cour d'appel a retenu la responsabilité pénale de la SA [1] du fait d'autrui ; qu'elle a violé les articles 121-1 et 121-2 du code pénal, et R. 1336-5 et R. 1337-6 du code de la santé publique ; 2°/ que la contravention prévue par l'article R. 1337-6 du code de la santé publique suppose que, par son fait personnel, le prévenu, fût-ce par l'intermédiaire d'autrui, ait été à l'origine du bruit ; que par suite, le prévenu ne peut être à l'origine du bruit par l'intermédiaire d'autrui que lorsqu'il est en mesure de prévenir ou de faire cesser les nuisances sonores ; que pour écarter l'argumentation de la SA [1] selon laquelle elle ne disposait d'aucun pouvoir de contrôle et de direction à l'égard des chauffeurs des camions frigorifiques de ses fournisseurs lorsqu'ils sont sur la voie publique, de sorte qu'aucun fait personnel ne pouvait lui être reproché, l'arrêt attaqué retient que les va et vient des camions « lui sont nécessaires pour exercer son activité » et que son gérant « n'a en rien démontré ses efforts pour régler le problème » ; qu'en statuant par ces motifs inopérants, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la SA [1] était en mesure de prévenir ou faire cesser les nuisances sonores provenant de camions stationnés sur la voie publique, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 121-1 et 121-2 du code pénal, et R. 1336-5 et R. 1337-6 du code de la santé publique. » Réponse de la Cour 7. Pour confirmer le jugement ayant déclaré la société prévenue coupable des faits commis le 10 juillet 2019, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé que les bruits constatés notamment par un rapport d'expertise dépassaient les valeurs limites de l'émergence globale ou de l'émergence spectrale prévues à l'article R. 1336-6 du code de la santé publique, énonce que ces nuisances sonores résultent de l'activité professionnelle habituelle de la société, de sorte qu'il n'est pas contestable qu'elle en est à l'origine. 8. Le juge ajoute que, dans le cadre de cette activité, la société se fait livrer et expédie quotidiennement, par des camions, des marchandises qui doivent être conservées, pour maintenir une température adéquate, dans des dispositifs frigorifiques composés de compresseurs à l'origine des nuisances. 9. Il précise que ces camions stationnent à proximité de l'établissement, dans l'attente des chargements ou des déchargements, de nuit ou de jour, sans horaires contraints, créant de façon imprévisible et aléatoire des nuisances auxquelles la municipalité a tenté de mettre un terme en interdisant le stationnement à certaines plages horaires. 10. Il souligne que la société est parfaitement consciente de ces nuisances, puisqu'elle a engagé des travaux au niveau des aménagements des quais de chargement ou déchargement pour qu'ils soient disposés de manière à atténuer au maximum les nuisances sonores, mais que ces dernières résultent, en fait, principalement des compresseurs des camions frigorifiques. 11. Il constate que l'expert a relevé que la société [1] devrait prendre les dispositions nécessaires afin de se mettre en conformité avec les exigences du code de la santé publique, comme notamment l'arrêt des compresseurs lors des chargements ou la mise en place de dispositifs d'insonorisation sur les compresseurs, et qu'à court terme, un protocole entre la société et le voisinage pouvait être opportun pour définir des plages horaires de livraison fixes et limitées. 12. Il relève que la prise d'un arrêté municipal interdisant l'accès de la zone industrielle entre vingt-deux heures et sept heures du matin, les nombreuses interventions des policiers municipaux et les négociations amiables ont été vaines. 13. Le juge retient encore que l'argumentation selon laquelle la société n'est pas responsable des camions qui la livrent, sur lesquels elle n'a aucune prise, n'est pas recevable dans la mesure où, selon le texte d'incrimination, il suffit que, dans le cadre de son activité professionnelle organisée de façon habituelle, il soit établi que la société est à l'origine des nuisances sonores, ce qui est le cas en l'espèce, puisque les va-et-vient de ces véhicules lui sont nécessaires pour exercer son activité et augmenter son chiffre d'affaires. 14. La cour d'appel en conclut, s'agissant de la responsabilité pénale d'une personne morale, que la faute a bien été commise, dans l'intérêt de la société, par son gérant, qui n'a en rien démontré ses efforts pour régler le problème, alors qu'il a été alerté à ce sujet depuis des années, y compris par la municipalité. 15. En statuant ainsi, par des motifs établissant, d'une part, que la société prévenue est à l'origine des nuisances sonores reprochées, d'autre part, qu'elle était en mesure de les prévenir ou de les faire cesser par les moyens dont elle disposait, y compris vis-à-vis de ses fournisseurs, la cour d'appel a justifié sa décision. 16. Ainsi, le moyen, inopérant en sa première branche comme critiquant un motif surabondant, doit être écarté. 17. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Fixe à 2 500 euros la somme que la société [1] devra payer à M. [Y] en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° M 22-82.921 F-D N° 00257 SL2 7 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 Le groupement agricole d'exploitation en commun [Adresse 1] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Besançon, chambre correctionnelle, en date du 24 mars 2022, qui, pour infraction au code de l'environnement, l'a condamné à 20 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Coirre, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société le GAEC [Adresse 1], les observations de Me Haas, avocat de l'association pour la protection des animaux sauvages, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Coirre, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [Y] [H], co-gérant du groupement agricole d'exploitation en commun [Adresse 1] (le GAEC), a dénoncé un acte de malveillance après le déversement du contenu de sa cuve à lisier dans un cours d'eau jouxtant son exploitation. 3. M. [H] a été convoqué devant le tribunal correctionnel en son nom personnel ainsi qu'en qualité de représentant légal du GAEC pour y répondre de l'infraction de déversement de substance nuisible dans les eaux souterraines, superficielles ou de la mer. 4. Après les avoir déclarés coupables de ces infractions, le tribunal a condamné M. [H] à six mois d'emprisonnement avec sursis, le GAEC à 20 000 euros d'amende et a prononcé sur les intérêts civils. 5. M. [H], le GAEC et diverses parties civiles ont relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré le GAEC [Adresse 1] coupable de déversement par personne morale de substances nuisibles dans les eaux souterraines, superficielles de la mer du 3 au 6 mars 2018, à Longchaumois et, en répression, l'a condamné au paiement d'une amende de 20 000 euros, alors « que les personnes morales ne peuvent être déclarées pénalement responsables que s'il est établi qu'une infraction a été commise, pour leur compte, par leurs organes ou représentants ; qu'en l'espèce, pour relaxer [Y] [H] des fins de la poursuite, la cour d'appel a constaté que « les éléments de l'enquête ne permettent pas de déterminer avec certitude la ou les personnes qui ont procédé au déversement dans le ruisseau du Potet du contenu de la cuve à lisier de M. [H] » (arrêt, p. 10) ; qu'en fondant ensuite la déclaration de culpabilité du Gaec [Adresse 1] du chef du délit de pollution aquatique sur une imputation de culpabilité à cette personne morale, prise abstraitement, sans identifier le ou les organes ou représentants de ce Gaec, personnes physiques, qui en seraient les auteurs, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, 121-2, 131-38, 131-39 du code pénal, L. 216-6, L. 173-5, L. 173-8 du code de l'environnement et 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 7. Selon ce texte, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 8. Pour déclarer le GAEC coupable des faits lui étant reprochés, après avoir relaxé son représentant légal au motif que l'enquête n'avait pas permis d'identifier avec certitude l'auteur du déversement du contenu de la cuve à lisier, l'arrêt attaqué énonce, notamment, que la méthode de fermeture de la trappe de la cuve appliquée par M. [H], en connaissance de l'existence d'un cours d'eau à proximité immédiate du réservoir, avait nui gravement à la sécurité. 9. Les juges en déduisent que la personne morale a commis une faute en ne prenant pas toutes les précautions requises et recommandées tant par le constructeur que dans les guides de bonnes pratiques pour éviter une pollution. 10. Ils ajoutent que ces manquements ou négligences ont été commis dans l'intérêt de la personne morale et par son représentant agissant pour son compte. 11. En se déterminant ainsi par des motifs contradictoires, dès lors que, saisie à l'encontre de ce représentant du même délit prévu à l'article L. 216-6 du code de l'environnement, réprimant les rejets intentionnels ou non intentionnels dans les eaux superficielles ou souterraines qui entraînent des dommages à la faune ou à la flore, cause directe du dommage, elle avait au préalable écarté sa responsabilité pénale, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 12. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Besançon, en date du 24 mars 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Dijon, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Besançon, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° P 22-85.637 F-D N° 00253 SL2 7 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 L'officier du ministère public près le tribunal de police de La Roche-sur-Yon a formé un pourvoi contre le jugement dudit tribunal, en date du 9 juillet 2021, qui a relaxé M. [K] [C] du chef d'excès de vitesse. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [K] [C] a été verbalisé pour des faits d'excès de vitesse. 3. Sur sa requête en exonération de l'amende forfaitaire appliquée, il a été cité devant le tribunal de police. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Le moyen est pris de la violation des articles 537 et 593 du code de procédure pénale. 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a relaxé M. [C] au motif qu'il n'était pas possible d'affirmer que l'intéressé a bien commis l'infraction reprochée, sans constater que la preuve contraire aux énonciations du procès-verbal constatant la contravention a été rapportée, alors que celui-ci fait foi jusqu'à preuve contraire par écrit ou par témoin. Réponse de la Cour Vu l'article 537 du code de procédure pénale : 6. Selon ce texte, les procès-verbaux établis par les officiers et agents de police judiciaire et agents de police judiciaire adjoints font foi jusqu'à preuve contraire des contraventions qu'ils constatent. Cette preuve ne peut être rapportée que par écrit ou par témoins. 7. Pour relaxer M. [C], le jugement attaqué énonce que l'intéressé déclare que la limitation temporaire de vitesse applicable sur l'axe concerné n'était pas signalée. 8. Le juge relève que le prévenu, bien que conscient de la présence d'un radar automatique, a été verbalisé à cinq reprises en excès de vitesse sur l'axe concerné pendant la durée du chantier justifiant la limitation temporaire, ce qui accrédite la thèse d'une signalisation insuffisante. 9. Il ajoute que si l'article de presse produit par le prévenu à l'appui de ses affirmations ne saurait constituer une preuve écrite au sens de l'article 537 du code de procédure pénale, il apporte un éclairage sur les difficultés rencontrées par les automobilistes. 10. Le juge souligne que la date de notification de la verbalisation, postérieure de quatre mois à la fin des travaux, a mis M. [C] dans l'impossibilité de prouver l'absence de signalisation adaptée. 11. Il en déduit qu'en l'absence de certitude quant à la présence d'une signalisation suffisante rendant la limitation de vitesse opposable en application de l'article R. 411-25 du code de la route, il n'est pas possible d'affirmer que M. [C] a commis les faits reprochés. 12. En se déterminant ainsi, sans constater que la preuve contraire aux énonciations du procès-verbal a été rapportée dans les conditions prévues par la loi, le tribunal de police a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé. 13. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé du tribunal de police de La Roche-sur-Yon, en date du 9 juillet 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de police de La Rochelle, à ce désigné par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe du tribunal de police de La Roche-sur-Yon et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
INCA/JURITEXT000047304442.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° B 22-83.993 F-D N° 00252 SL2 7 MARS 2023 CASSATION IRRECEVABILITE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 Mme [W] [U] a formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-15, en date du 30 mars 2021, qui a prononcé sur ses requêtes en incident contentieux d'exécution. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Hairon, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de Mme [W] [U], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Hairon, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Mme [W] [U], poursuivie pour infractions au code de l'urbanisme, a été condamnée par la cour d'appel à une amende délictuelle et à la mise en conformité des lieux sous astreinte. 3. Plusieurs procès-verbaux, constatant l'absence de remise en état des lieux ont été dressés. 4. Mme [U] a déposé une requête en difficulté d'exécution, puis a saisi la cour d'appel de deux requêtes en incident contentieux. Examen de la recevabilité des pourvois 5. La demanderesse a formé, le même jour, trois pourvois en des termes identiques. 6. Par son premier pourvoi, la demanderesse, ayant épuisé le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision. Seul est recevable le pourvoi formé le 2 avril 2021, enregistré sous le n° L 21/0220. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en difficulté d'exécution en date du 11 janvier 2019, ainsi que les requêtes en incident contentieux en date des 20 mai et 31 décembre 2019, alors « qu'aucune disposition du code de l'urbanisme ne déroge à la règle de publicité des débats lorsque la juridiction correctionnelle est saisie de toute demande relative à une astreinte prononcée en application de l'article L 480-7 du code de l'urbanisme ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que l'affaire portant sur la requête en difficulté d'exécution et les requêtes en incident contentieux relatif à l'exécution d'une astreinte pénale prononcée en matière d'urbanisme a été appelée à une audience en chambre du conseil le 16 février 2021 et l'arrêt prononcé en cette chambre le 30 mars 2021 ; qu'en examinant les demandes et en rendant sa décision en chambre du conseil, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Vu les articles 593 du code de procédure pénale et L. 480-7 du code de l'urbanisme : 8. Selon le premier de ces textes, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction de motifs équivaut à leur absence. 9. Selon le second, aucune disposition du code de l'urbanisme ne déroge à la règle de publicité des débats lorsque la juridiction correctionnelle est saisie de toute demande relative à une astreinte prononcée en application de l'article L. 480-7 du code de l'urbanisme. 10. L'arrêt attaqué énonce que l'affaire, portant sur les requêtes en incident contentieux de Mme [U], a été appelée à une audience en chambre du conseil et l'arrêt prononcé en cette chambre, le dispositif de la décision mentionnant toutefois que la cour statue publiquement. 11. La cour d'appel ne pouvait sans contradiction, après avoir affirmé que l'arrêt était prononcé en chambre du conseil, mentionner qu'il avait été jugé et prononcé à l'audience publique. 12. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés, la Cour : Sur les pourvois enregistrés sous les numéros L 21/00221 et L 21/00222 : Les DECLARE IRRECEVABLES ; Sur le pourvoi enregistré sous le numéro L 21/00220 : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 30 mars 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois. Le Rapporteur Le Président Le Greffier de chambre
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° M 22-85.635 F-D N° 00251 SL2 7 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 L'officier du ministère public près le tribunal de police de La-Roche-sur-Yon a formé un pourvoi contre le jugement dudit tribunal, en date du 26 août 2022, qui a relaxé M. [D] [O] du chef d'excès de vitesse. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Sottet, conseiller, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Sottet, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [D] [O] a été poursuivi devant le tribunal de police, du chef d'excès de vitesse en date du 5 janvier 2021. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. Le moyen est pris de la violation des articles 1, 9, 9-2, et 593 du code de procédure pénale. 4. Le moyen critique le jugement attaqué en ce qu'il a considéré que les avis de contravention délivrés les 16 janvier et 15 mars 2021 n'étaient pas interruptifs de la prescription. Réponse de la Cour Vu l'article 9-2 du code de procédure pénale : 5. L'énumération prévue à l'article précité des actes qui interrompent la prescription de l'action publique n'est pas limitative. Constitue un acte de poursuite la délivrance du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée. 6. Pour retenir la prescription de l'action publique, le juge énonce que les deux avis de contravention émis les 16 janvier et 15 mars 2021 ne constituent pas un acte du ministère public tendant à la mise en mouvement de l'action publique. 7. En se déterminant ainsi, alors que le délai de prescription d'un an, couru à compter de la constatation des faits le 15 janvier 2021, a été interrompu par la délivrance du titre exécutoire de l'amende forfaitaire majorée du 15 mars 2021, laquelle a fait courir un nouveau délai d'un an qui n'était pas expiré lors de la transmission de la procédure à l'officier du ministère public territorialement compétent du 25 février 2022, le tribunal a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé. 8. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé du tribunal de police de La Roche-sur-Yon, en date du 26 août 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de police de Nantes, à ce désigné par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe du tribunal de police de la Roche-Sur-Yon et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° E 21-83.785 F-D N° 00259 SL2 7 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 M. [H] [E] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 26 mars 2021 qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'abus de confiance et travail dissimulé, a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Leblanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [H] [E], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Leblanc, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 20 novembre 2012, la société [1] a porté plainte et s'est constituée partie civile devant le juge d'instruction des chefs d'escroquerie, faux et usage, abus de confiance et contrefaçon contre son ancien salarié, M. [H] [E]. 3. Durant la procédure d'instruction au cours de laquelle M. [E] a été mis en examen pour abus de confiance, escroquerie et travail dissimulé, la société [1] a apporté son fonds de commerce à la société [2] à compter du 1er janvier 2015. 4. Par jugement du 28 janvier 2019, le tribunal correctionnel l'a notamment reconnu coupable d'abus de confiance et de travail dissimulé. 5. Sur l'action civile, il a déclaré recevable la constitution de partie civile de la société [2], venant aux droits de la société [1], et a condamné M. [E] à payer à la société [2] les sommes de 15 000 euros au titre du préjudice commercial et de 100 000 euros en réparation de la perte de recettes. 6. M. [E] et la société [2] ont relevé appel des seules dispositions civiles de cette décision. Examen des moyens Sur le second moyen 7. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le premier moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré recevable la constitution de partie civile de la société [2] venant aux droits de la société [1], déclaré M. [E] responsable du préjudice subi par la société [2] venant aux droits de la société [1], partie civile, et condamné M. [E] à payer à la société [2] venant aux droits de la société [1], partie civile, les sommes de 15 000 euros au titre du préjudice commercial et 100 000 euros en réparation de la perte de recettes, alors : « 1°/ qu'en affirmant, pour déclarer recevable la constitution de partie civile de la société [2] venant aux droits de la société [1], que « l'ensemble des créances de cette dernière [avaient] été transmises à la société [2] dans le cadre de l'apport du fonds intervenu en 2015 » (arrêt, p. 5), après avoir pourtant constaté que l'acte d'apport de fonds de commerce conclu entre les sociétés [1] et [2] indiquait « que la société [2] sera propriétaire du bien apporté à compter du 1er janvier 2015 et en aura la jouissance à compter de cette date et qu'« il est expressément convenu que toutes les opérations tant actives que passives depuis le 1er janvier 2015 seront réputées faites pour le compte de la société [2] qui sera substituée purement et simplement à cet égard par l'apporteur, la société [1] » », que « l'acte d'apport du fonds ne mentionne pas expressément la créance potentiellement détenue par la société [1] contre M. [E] » (arrêt, p. 5) et que le tribunal correctionnel a déclaré M. [E], salarié de la société [1] jusqu'en 2012, « coupable d'abus de confiance pour des faits commis courant 2011 jusqu'au mois de mai 2012 » (arrêt p.6), ce dont il résultait que l'éventuelle créance indemnitaire de la société [1] contre M. [E] résultant des faits commis en 2012 n'avait aucunement été transmise à la société [2] par l'acte d'apport du fonds, celui-ci prévoyant expressément que la société [2] ne serait substituée à la société [1] que pour les opérations réalisées postérieurement au 1er janvier 2015, la cour d'appel s'est contredite et a violé les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ subsidiairement, que, seul un préjudice direct et personnel résultant de l'infraction pénale peut servir de base à l'action civile devant la juridiction répressive ; qu'en conséquence, est irrecevable la constitution de partie civile du cessionnaire d'une éventuelle créance indemnitaire résultant d'un abus de confiance dont seul le cédant a été victime ; qu'en affirmant, pour déclarer recevable la constitution de partie civile de la société [2] venant aux droits de la société [1], que « l'ensemble des créances de cette dernière [avaient] été transmises à la société [2] dans le cadre de l'apport du fonds intervenu en 2015 » (arrêt, p. 5), cependant qu'il ressortait de ses constatations que « la créance invoquée à l'encontre de M. [E] résulte d'un abus de confiance envers son employeur qui était la société [1] » (arrêt, p. 5), ce dont il résultait qu'en tant que cessionnaire de cette prétendue créance, la société [2] était irrecevable à se constituer partie civile devant la juridiction répressive, la cour d'appel a méconnu les articles 2, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 9. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 10. Pour déclarer recevable la constitution de partie civile de la société [2], contestée par M. [E], dont il relève qu'il soutenait aussi l'irrecevabilité de l'intervention volontaire de la société [1], l'arrêt attaqué énonce que, même si l'acte d'apport du fonds de commerce ne mentionne pas expressément la créance potentiellement détenue par la société [1] contre M. [E], celle-ci a bien été apportée à la société [2] dans le cadre de cette opération, l'acte d'apport mentionnant le transfert de toutes les opérations et le gérant de la société [1] attestant avoir transmis avec le fonds de commerce les créances potentielles de cette société. 11. Les juges en déduisent que la société [2] dispose d'un intérêt à agir en réparation de son préjudice dès lors que la créance qu'elle invoque résulte de l'abus de confiance commis par M. [E] à l'encontre de la société [1], dont il était le salarié, et que l'ensemble des créances de cette société a été transmis à la société [2] dans le cadre de l'apport du fonds de commerce de 2015. 12. En se déterminant ainsi, tout en relevant que la société [2] n'a été propriétaire du bien apporté et n'en a eu la jouissance qu'à compter du 1er janvier 2015, date à partir de laquelle il était expressément convenu dans l'acte d'apport que toutes les opérations, tant actives que passives, seraient réputées faites pour le compte de la société [2], substituée à cet égard à la société [1], la cour d'appel, qui a statué par motifs contradictoires, n'a pas justifié sa décision. 13. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Amiens, en date du 26 mars 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° M 22-82.162 F-D N° 00258 SL2 7 MARS 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 La société [1], partie intervenante, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France, chambre correctionnelle, en date du 9 mars 2022, qui, dans la procédure suivie contre M. [M] [K] du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Joly, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société [1], les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat du [2] ([2]) et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 31 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Joly, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le tribunal correctionnel a déclaré M. [M] [K] coupable de blessures involontaires avec incapacité totale de travail n'excédant pas trois mois par conducteur de véhicule terrestre à moteur sous l'empire d'un état alcoolique, a déclaré recevables les constitutions de partie civile de M. [Y] [C] et de Mme [T] [I] et a ordonné une expertise médicale. 3. Le jugement a été déclaré opposable à la société [1] (la société), assureur du prévenu. Le [2] ([2]) est intervenu à la procédure. 4. La société a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable l'exception de non-garantie de la société [1] et, en conséquence, déclaré que le jugement de première instance lui est opposable, alors « que l'assureur qui n'est pas intervenu devant le tribunal correctionnel malgré une mise en cause régulière peut valablement soumettre une exception de non-garantie pour la première fois en cause d'appel ; qu'en déclarant irrecevable l'exception de non-garantie soulevée par la société [1] pour la première fois en cause d'appel, motif pris que cette dernière, régulièrement mise en cause devant le premier juge, se trouve privée de la possibilité de soulever en appel une exception de non garantie (arrêt, p. 7), quand la société [1], appelante, régulièrement mise en cause devant les premiers juges et qui n'était pas intervenue, pouvait valablement soumettre une exception de non-garantie pour la première fois en cause d'appel, la cour d'appel a violé les articles 385-1, 388-1 et 388-2 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Sur la recevabilité du moyen, contestée en défense par le [2], partie intervenante 6. Le moyen est recevable, dès lors que la société soutenait devant la cour d'appel que, n'étant pas intervenue devant le tribunal correctionnel, même dans le cas où la citation était régulière, elle était recevable à opposer pour la première fois et in limine litis le refus de prise en charge en cause d'appel. Sur le fond Vu l'article 385-1 du code de procédure pénale : 7. Il résulte de ce texte que, si en vertu de son alinéa 2, l'assureur, mis en cause dans les conditions prévues par les articles 388-1 et 388-2 du code de procédure pénale et qui n'intervient pas au procès pénal, est réputé renoncer à toute exception, cette disposition ne fait pas obstacle, lorsque cet assureur n'a pas comparu en première instance, à ce qu'il soumette à la cour d'appel avant toute défense au fond les exceptions visées à son premier alinéa. 8. Pour déclarer irrecevable l'exception soulevée par l'assureur devant la cour d'appel tirée de la résiliation du contrat avant l'accident, l'arrêt attaqué énonce qu'ayant été régulièrement mise en cause devant le premier juge, la société se trouve privée de la possibilité de soulever en appel une telle exception. 9. En se déterminant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que la société n'a pas comparu en première instance et que devant elle, l'exception a été soulevée avant toute défense au fond, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 10. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Fort-de-France, en date du 9 mars 2022, mais en ses seules dispositions ayant déclaré irrecevable l'exception de non garantie de la société [1], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Fort-de-France, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Fort-de-France, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° K 22-87.244 F-D N° 00403 ECF 7 MARS 2023 NON-LIEU A STATUER M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 M. [B] [E] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 10 novembre 2022, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de vols en bande organisée, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant sa demande de mise en liberté. Sur le rapport de M. Coirre, conseiller, les observations de Me Descorps-Declère, avocat de M. [B] [E], et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Coirre, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. Vu l'article 606 du code de procédure pénale : 1. Il résulte de la fiche pénale de M. [B] [E] qu'il a été mis en liberté le 27 janvier 2023. 2. Il s'ensuit que le pourvoi est devenu sans objet. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° J 22-82.229 F-D N° 00274 RB5 8 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 Le procureur général près la cour d'appel de Papeete a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 8 mars 2022, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 10 mars 2021, n° 20-85.007), dans la procédure suivie des chefs de détournement de fonds publics et recel, a infirmé l'ordonnance de saisie pénale rendue par le juge des libertés et de la détention. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Ascensi, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [N] [T] et de Mme [R] [X], épouse [T], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Par jugement en date du 10 septembre 2019, M. [N] [T] a été déclaré coupable du délit de prise illégale d'intérêts, pour avoir mis gratuitement à la disposition de l'association [3], exploitant la radio éponyme, des locaux, des matériels et des agents de la commune de Faa'a, et avoir participé à l'attribution par cette commune de subventions à cette association dont il avait été président honoraire jusqu'en 2008 et qui faisait la promotion de la ligne politique du parti [2] dont il était le président. 3. Le prévenu a interjeté appel de la décision. 4. Le 27 septembre 2019, le procureur de la République a par ailleurs fait diligenter une enquête des chefs de détournement de fonds publics et recel au motif que M. [T] aurait perçu, en sa qualité de maire de la commune de Faa'a et au titre de la protection fonctionnelle, la somme de 11 559 297 francs Pacifique destinée à payer ses frais de défense dans le cadre de la procédure diligentée pour prise illégale d'intérêts, en application de deux délibérations du conseil municipal de Faa'a présidé par le premier adjoint au maire. 5. Par ordonnance du 9 juin 2022, le juge des libertés et de la détention a ordonné le maintien de la saisie de la somme de 11 559 297 francs Pacifique figurant sur le compte bancaire dont M. [T] est titulaire à la [1]. 6. M. [T] a interjeté appel de la décision. 7. Par arrêt du 7 juillet 2020, la chambre de l'instruction a confirmé l'ordonnance attaquée. 8. M. [T] s'est pourvu en cassation. 9. Par arrêt du 10 mars 2021, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la chambre de l'instruction, motif pris de ce que les juges, qui avaient confirmé l'ordonnance de maintien de la saisie, s'étaient à tort abstenus de rechercher l'existence d'indices de la commission des infractions objet de l'enquête préliminaire. Examen des moyens Sur les premier et deuxième moyens Enoncé des moyens 10. Le premier moyen est pris de la violation des articles 432-12 du code pénal, 706-141 et 706-153 du code de procédure pénale et L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales. 11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé l'ordonnance de maintien de la saisie, en retenant qu'il n'existait pas d'indice de la commission des délits de détournement de fonds publics et recel, alors : 1°/ que les juges ne pouvaient pas exiger un texte légal disposant que la prise illégale d'intérêts constitue une faute détachable de l'exercice des fonctions publiques qui prive l'élu condamné du droit de demander la protection fonctionnelle et que cette condamnation soit définitive ; 2°/ que les juges ne pouvaient se fonder sur l'absence d'un recours administratif contre la décision octroyant à M. [T] la protection fonctionnelle, ce recours présentant un caractère facultatif, et ce motif étant inopérant compte tenu de l'autonomie du droit pénal ; 3°/ que les juges ne pouvaient se fonder sur la considération que le fait pour le maire de solliciter le bénéfice de la protection fonctionnelle ne pouvait pas constituer un acte matériel de détournement de fonds publics ou de recel de ce délit, les sommes ayant été remises à ses avocats et l'intéressé n'ayant pas participé aux délibérations du conseil municipal, quand M. [T] a été le bénéficiaire des fonds et la protection fonctionnelle lui a été accordée au regard de ses fonctions de maire et à sa demande. 12. Le deuxième moyen est pris de la violation de l'article 706-141 du code de procédure pénale. 13. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé l'ordonnance de maintien de la saisie, en retenant qu'il n'existait pas de risque de dissipation de la somme d'argent saisie, alors que les saisies pénales ne sont pas conditionnées par l'existence d'un tel risque. Réponse de la Cour 14. Les moyens sont réunis. Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 15. Tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 16. Pour infirmer l'ordonnance de maintien de la saisie, l'arrêt retient que l'octroi de la protection fonctionnelle à M. [T], maire de Faa'a, ne peut être jugé frauduleux par le juge judiciaire que si l'intéressé a commis une faute détachable de ses fonctions publiques, en l'occurrence le délit de prise illégale d'intérêts, et qu'il a ainsi démontré son intention de faire financer, par le budget municipal, des frais d'avocat qui lui incombent totalement au regard des dispositions de l'article L. 2123-34 du code général des collectivités territoriales et de ses manquements personnels. 17. Les juges observent à cet égard que le jugement ayant condamné M. [T] pour prise illégale d'intérêts n'est pas définitif en raison de l'appel interjeté par le prévenu, que de surcroît aucun texte légal n'édicte que le délit de prise illégale d'intérêts constitue, de droit, une faute détachable de l'exercice des fonctions publiques qui prive l'élu condamné du droit de demander la protection fonctionnelle, et qu'enfin aucune des deux délibérations ayant accordé à M. [T] ladite protection n'a fait l'objet d'un recours pour excès de pouvoir. 18. Ils constatent par ailleurs que la somme d'argent litigieuse a été libérée au profit des avocats de M. [T], sur la base des délibérations non contestées de l'organe décisionnaire de la commune et non par des actes matériels du maire, alors qu'il est reproché à celui-ci d'avoir commis le délit de détournement de fonds publics ou de recel de ce délit qui, lui, suppose une infraction principale. 19. Ils retiennent enfin, tout en constatant que le mémoire en défense qui tend à la mainlevée pure et simple de la saisie ne formule aucune critique relativement aux autres motifs de l'ordonnance querellée, que le risque de dissipation des fonds figurant au crédit du compte bancaire de M. [T] ne s'évince pas de la procédure en ce qu'elle concerne une personne mise en cause âgée de soixante-dix ans, native de la Polynésie où elle a le centre de ses intérêts et qui, au surplus, perçoit une pension de retraite, des indemnités d'élu et des revenus locatifs qui pourraient être facilement saisis et confisqués s'il venait à vider son compte bancaire. 20. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a insuffisamment justifié sa décision. 21. En effet, d'une part, les infractions de prise illégale d'intérêts sont détachables des mandats et fonctions publics exercés par leur auteur. 22. D'autre part, la circonstance que M. [T], qui a sollicité l'octroi de la protection fonctionnelle et a bénéficié des fonds versés par la commune au titre de celle-ci, n'a pas pris part aux délibérations du conseil municipal l'ayant octroyée, n'était pas en soi de nature à exclure l'existence d'indices de la commission par l'intéressé des délits de détournement de fonds public et de recel de cette infraction. 23. Enfin, l'article 706-154 du code de procédure pénale n'exige pas, pour que soit ordonné le maintien de la saisie de sommes d'argent figurant sur un compte bancaire, que soit caractérisé un risque de dissipation des sommes saisies. 24. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le troisième moyen de cassation proposé, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete, en date du 8 mars 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Z 22-82.404 F-D N° 00275 RB5 8 MARS 2023 CASSATION SANS RENVOI M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 Mme [D] [B] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 18 mars 2022, qui, pour fraude fiscale, l'a condamnée à six mois d'emprisonnement avec sursis, 8 000 euros d'amende, cinq ans d'interdiction de gérer, et a prononcé sur les demandes de l'administration fiscale, partie civile. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de Mme [D] [B], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques et du directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine, et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Au cours de l'année 2012, la SCI [Adresse 1] (la SCI), dont Mme [D] [B] était l'une des associés et la gérante, a réalisé une plus-value grâce à la vente d'un bien immobilier dont elle était propriétaire. 3. Sur avis favorable de la commission des infractions fiscales, l'administration fiscale a déposé plainte à l'encontre de Mme [B] du chef de soustraction à l'établissement et au paiement de l'impôt sur les sociétés dû au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2012. 4. Après enquête, Mme [B] a été citée par le procureur de la République devant le tribunal correctionnel du chef de fraude fiscale. 5. Par jugement en date du 4 juin 2021, le tribunal correctionnel a relaxé la prévenue. 6. Le procureur de la République et l'administration fiscale ont formé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt infirmatif attaqué en ce qu'il a sur l'action publique déclaré Mme [B] coupable de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt sur les sociétés, l'a condamnée à un emprisonnement délictuel de six mois assortie du sursis ainsi qu'à une amende de 8 000 euros, a prononcé à titre de peine complémentaire, une interdiction d'exercer une profession commerciale pour une durée de cinq ans, et a, sur l'action civile, dit qu'elle sera tenue solidairement avec la SCI [Adresse 1] au paiement des impôts éludés et des pénalités y afférentes, alors : « 1°/ qu'aux termes de l'article 239 du code général des impôts : « 1. Les sociétés et groupements mentionnés au 3 de l'article 206 peuvent opter, dans des conditions qui sont fixées par arrêté ministériel, pour le régime applicable aux sociétés de capitaux. (?) » et que, selon les alinéas 1 et 2 de l'article 22 de l'annexe IV dudit code alors applicable « La notification de l'option prévue à l'article 239 du code général des impôts est adressée au service des impôts du lieu du principal établissement de la société ou du groupement qui souhaite exercer cette option » ; qu'au cas présent, la cour d'appel, qui a constaté que « l'administration fiscale n'a pas été en mesure de produire l'écrit attestant de la levée d'option par la SCI pour souscrire à l'impôt sur les sociétés » (arrêt, p. 7, §6), ne pouvait, en l'absence de l'écrit requis et d'une notification de la levée d'option aux services des impôts, retenir que cet élément n'excluait nullement cette option afin de pouvoir déclarer la gérante de la SCI comme ayant exercé l'option à l'assujettissement à l'impôt sur les sociétés, coupable de soustraction frauduleuse à l'établissement ou au paiement de l'impôt sur les sociétés ; que la cour d'appel a violé les articles précités, ensemble les articles 1741 et 1750 du même code ; 2°/ que les motifs inopérants constituent une insuffisance de motivation ; que la cour d'appel, en retenant que « cet élément – c'est-à-dire l'absence de l'écrit requis et d'une notification de la levée d'option aux services des impôts - n'exclut nullement cette option alors que les déclarations antérieures effectuées par cette SCI l'ont été précisément au titre de cet impôt et que cette option est confirmée par la prévenue elle-même lors de la signature de l'acte, mentionnant l'assujettissement de la SCI à cet impôt et rappelant son obligation de déclarer la plus-value » (arrêt, p. 7, §6), a statué par des motifs inopérants pour pallier l'absence de l'écrit et de la notification requis et a donc violé l'article 593 du code de procédure pénale, les articles 1741 et 1750 du code général des impôts. » Réponse de la Cour Vu les articles 206,3., 239,1.,1741 du code général des impôts et 22 de l'annexe IV dudit code, dans leur version applicable : 8. Il résulte du troisième de ces textes que commet le délit de fraude fiscale celui qui s'est frauduleusement soustrait ou a tenté de se soustraire frauduleusement à l'établissement ou au paiement total ou partiel des impôts auquel il est assujetti. 9. Il résulte du premier que les sociétés civiles immobilières relevant du régime d'option sont soumises à l'impôt sur les sociétés si elles optent pour leur assujettissement à cet impôt dans les conditions prévues au deuxième. 10. Il résulte des deuxième et quatrième que pour être exercée valablement, l'option doit être notifiée avant la fin du troisième mois de l'exercice au titre duquel l'entreprise souhaite être soumise pour la première fois à l'impôt sur les sociétés au service des impôts du lieu du principal établissement de la société ou du groupement qui souhaite exercer cette option. La notification indique la désignation de la société ou du groupement et l'adresse du siège social, les noms, prénoms et adresse de chacun des associés, membres ou participants, ainsi que la répartition du capital social ou des droits entre ces derniers. Elle est signée dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, par tous les associés, membres ou participants. Il en est délivré récépissé. 11. Pour déclarer la prévenue coupable de fraude fiscale, l'arrêt attaqué énonce qu'il résulte des éléments de la procédure que la SCI a réalisé lors de la vente de son bien immobilier une plus-value non déclarée ni au titre de l'impôt sur les sociétés, ni au titre de l'impôt sur les revenus par les associés de la SCI. 12. Il relève que cette SCI avait effectué auparavant des déclarations au titre de l'impôt sur les sociétés mentionnant en immobilisation le prix de l'achat du bien et que l'acte de vente précise le régime d'imposition de la SCI, à savoir l'impôt sur les sociétés, et son obligation de déclarer la plus-value. 13. Il indique que la plaignante n'a jamais contesté lors de ses auditions cette obligation de déclaration faisant état seulement d'un oubli, du fait que le notaire ou son comptable devait la faire ou qu'elle attendait que le fisc lui réclame la somme due et affirmant surtout son absence de volonté de frauder. 14. Les juges ajoutent que si l'administration fiscale n'a pas été en mesure de produire l'écrit attestant la levée d'option par la SCI pour souscrire à l'impôt sur les sociétés, cet élément n'exclut nullement cette option alors que les déclarations antérieures effectuées par cette SCI l'ont été précisément au titre de cet impôt et que cette option a été confirmée par la prévenue elle-même lors de la signature de l'acte de vente. 15. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 16. En effet, en l'absence de notification régulière à l'administration fiscale, la SCI ne pouvait être regardée comme ayant valablement exercé l'option prévue par l'article 239 du code général des impôts en faveur de son assujettissement à l'impôt sur les sociétés. 17. La cassation est par conséquent encourue. Portée et conséquences de la cassation 18. L'impôt sur les sociétés n'étant pas applicable à la SCI, le délit de fraude fiscale, tel qu'il résulte des termes de la prévention, ne peut être caractérisé. 19. La cassation aura donc lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 18 mars 2022 ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; CONSTATE que la relaxe de Mme [B] est définitive ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° G 22-87.288 F-D N° 00406 ECF 7 MARS 2023 IRRECEVABILITÉ M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 7 MARS 2023 Mme [D] [S] a présenté, par mémoire personnel reçu le 11 janvier 2023, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par elle contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 8e section, en date du 7 décembre 2022, qui, dans l'information suivie contre elle des chefs de proxénétisme aggravé, traite des êtres humains, blanchiment, en bande organisée, et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire. Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 7 mars 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. 1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée : « Lorsque le juge d'instruction fait droit aux réquisitions du Ministère public et saisit le Juge des libertés et de la détention aux fins de renouvellement de la détention d'un mis en examen, l'absence de notification au conseil de ce dernier des dites réquisitions et de l'ordonnance de saisine au seul motif que cela n'est pas prévu expressément par les articles 145-1 et 145-2 du Code de procédure pénale est-elle conforme à la Constitution et à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ? ». 2. Le mémoire personnel déposé le 11 janvier 2023 comporte, outre la question prioritaire de constitutionnalité, des moyens de cassation. Ce mémoire, qui n'est pas spécial, étant irrecevable au regard des dispositions de l'article 23-5 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, la question prioritaire de constitutionnalité est elle-même irrecevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : DÉCLARE IRRECEVABLE la question prioritaire de constitutionnalité ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du sept mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° M 22-83.151 F-D N° 00278 RB5 8 MARS 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [H] [K] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 7e section, en date du 19 avril 2022, qui, dans la procédure suivie contre lui pour infraction à la législation sur les étrangers, a confirmé la décision de non-restitution de bien saisi prise par le procureur de la République. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Chafaï, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [H] [K], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chafaï, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Une saisie pénale a été autorisée le 18 juin 2014 par le juge des libertés et de la détention sur un bien immobilier situé [Adresse 2], section AM n° [Cadastre 1], lots n° 4 et 8, appartenant à M. [H] [K]. 3. Par jugement contradictoire du 26 novembre 2015, devenu définitif, le tribunal correctionnel a déclaré M. [K] coupable d'infraction à la législation sur les étrangers et l'a condamné à douze mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende. 4. Le 23 juin 2020, le procureur de la République s'est saisi d'office et a refusé de restituer ledit bien immobilier. 5. M. [K] a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa seconde branche 6. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé la décision de non-restitution, alors : « 1°/ que le délai prévu par l'article 41-4, al. 3, du code de procédure pénale pour demander la restitution d'un bien saisi ne peut courir à l'encontre des propriétaires qui n'auraient pas été informés de leur droit de réclamer la restitution de leur bien dans les conditions prévues par le code de procédure pénale ; que cette information est essentielle lorsque le bien saisi est un immeuble, le propriétaire n'étant pas dépossédé de son bien ; qu'il résulte par ailleurs des articles préliminaire, 803-5 et D. 594-6 du code de procédure pénale que toute personne ne comprenant pas le français a droit à la traduction des pièces essentielles de la procédure et notamment à la traduction des décisions statuant sur l'action publique et portant condamnation, prononcées ou homologuées par une juridiction ; qu'en retenant que le délai prévu par l'article 41-4, al. 3 du code de procédure pénale avait commencé de courir à l'encontre de M. [H] [K] à compter du prononcé du jugement contradictoire du 26 novembre 2015 lorsque M. [H] [K], qui ne comprend pas le français, ne s'est pas vu notifier de copie traduite du jugement et que son recours a précisément été introduit hors délai en raison de ce défaut d'information, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale et a violé le droit de propriété de M. [H] [K], garanti par l'article 1er du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que son droit d'accès à un tribunal et à un recours effectif garantis par les articles 6§1 et 13 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et libertés fondamentales, ensemble avec les articles préliminaire, 803-5 et D. 594-6 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 8. Pour rejeter la requête en contestation de la décision de non-restitution d'un bien immobilier, l'arrêt relève que le jugement du 26 novembre 2015 condamnant M. [K] n'a pris aucune décision concernant le bien immobilier saisi et qu'il est à présent définitif. 9. Le juge ajoute qu'aucune demande en restitution de ce bien immobilier n'a été déposée dans le délai de six mois prévu par l'article 41-4 du code de procédure pénale à compter de la date du jugement du tribunal correctionnel, point de départ de ce délai dans la mesure où le jugement était prononcé contradictoirement et en présence d'un interprète. 10. Il conclut que ce bien immobilier est devenu la propriété de l'Etat. 11. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des textes visés au moyen. 12. En premier lieu, le délai de six mois, prévu par l'article 41-4, alinéa 3, du code de procédure pénale, au terme duquel les objets saisis dont la restitution n'a pas été demandée ou décidée deviennent propriété de l'Etat, sous réserve des droits des tiers, a commencé à courir au jour où le prévenu a eu connaissance de la décision sur l'action publique par laquelle le tribunal a épuisé sa compétence. 13. En second lieu, aucune disposition légale ou conventionnelle n'impose qu'un jugement rendu contradictoirement, qui a été traduit oralement à l'audience par un interprète, fasse l'objet d'une traduction écrite. 13. Ainsi, le moyen n'est pas fondé. 14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° B 22-81.095 F-D N° 00279 RB5 8 MARS 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [V] [Z] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 11 janvier 2022, qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs de fraude fiscale, blanchiment et abus de biens sociaux, a confirmé la décision de non-restitution de bien saisi prise par le procureur de la République. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Ascensi, conseiller référendaire, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. [V] [Z], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Par jugement contradictoire du 13 mai 2019, le tribunal correctionnel a déclaré M. [V] [Z] coupable de fraude fiscale, blanchiment aggravé et abus de biens sociaux. 3. En répression, le tribunal a notamment ordonné la confiscation de diverses sommes d'argent qui avaient été préalablement saisies pour un total de 664 237,48 euros. 4. Le tribunal s'est en revanche abstenu de statuer sur le devenir d'une créance d'un montant de 66 724,68 euros figurant sur un contrat d'assurance sur la vie [1], qui avait été saisie au cours de l'enquête préliminaire, et de la somme de 16 800 euros en espèces qui avait été saisie au cours d'une perquisition effectuée au domicile du prévenu. 5. Le 5 juillet 2021, le procureur de la République financier a rendu une décision de non-restitution de ces biens. 6. Par acte du 29 juillet 2021, M. [Z] a contesté cette décision devant la chambre de l'instruction. Examen des moyens Sur le deuxième moyen, les premier et troisième moyens en ce qu'ils portent sur l'irrecevabilité d'une note en délibéré, et le quatrième moyen, pris en sa seconde branche 7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen, en ce qu'il porte sur l'irrecevabilité du mémoire Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, en la forme, déclaré irrecevables le mémoire et la note en délibéré produits en son nom devant la chambre de l'instruction, alors : « 1°/ que la chambre de l'instruction statuant sur la restitution d'objets saisis au détriment d'une personne poursuivie puis condamnée pénalement, doit soumettre à la discussion contradictoire des parties tout moyen qu'elle relève d'office, en particulier toute fin de non-recevoir, quel qu'en soit le fondement ; que la chambre de l'instruction a relevé d'office (arrêt attaqué, p. 3, in fine, p. 4, in limine) un moyen pris de la prétendue tardiveté du mémoire produit par monsieur [Z], demandeur en restitution du solde d'un contrat d'assurance-vie placé sous main de justice ; qu'aucune mention de l'arrêt attaqué n'atteste que ce dernier ait été invité à présenter des observations sur ce moyen relevé d'office et qu'il ne peut non plus être déduit des termes de sa note en délibéré qu'il aurait eu connaissance de ce moyen avant le prononcé de l'arrêt, cette note ayant exclusivement trait à une fin de non-recevoir distincte, également relevée d'office par la juridiction, mais mentionnée par elle lors de l'audience, prise de ce que le mémoire produit au nom de l'intéressé n'avait pas été signé de son avocat ; qu'en statuant comme elle a fait, la chambre de l'instruction a violé l'article préliminaire du code de procédure pénale, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2°/ que la procédure devant la chambre de l'instruction est écrite ; qu'il suit de là que c'est par écrit, et à tout le moins par la voie d'une note en délibéré, que les parties doivent être mises en mesure de présenter des observations sur tout moyen de droit ou de fait que la chambre de l'instruction relève d'office ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction a aussi relevé d'office (arrêt attaqué, p. 4, § 2) le moyen pris de ce que l'absence de signature, par l'avocat de monsieur [Z], du mémoire produit au nom de ce dernier, rendrait irrecevables ledit mémoire et la note en délibéré ultérieure de l'intéressé ; qu'en se cantonnant à ce que les parties, oralement et sans réflexion préalable, auraient pu dire lors de l'audience sur ce moyen et dont l'arrêt ne fait du reste pas mention, et en n'invitant pas les parties à présenter des observations écrites sur ce moyen, à tout le moins en ne déclarant pas recevable la note en délibéré que le conseil de monsieur [Z] avait précisément pris l'initiative d'envoyer pour répondre à ce moyen découvert lors de l'audience, la chambre de l'instruction a derechef violé les textes susvisés. » Réponse de la Cour 9. Le moyen est infondé, dès lors que les juges se trouvaient tenus de rechercher d'office, sans avoir à provoquer de nouvelles explications du demandeur, si le mémoire produit en application de l'article 198 du code de procédure pénale avait été déposé régulièrement au regard des formes prévues par ce texte. Sur le troisième moyen, en ce qu'il porte sur l'irrecevabilité du mémoire Enoncé du moyen 10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, en la forme, déclaré irrecevables le mémoire et la note en délibéré produits en son nom devant la chambre de l'instruction, alors « que la communication électronique, y compris pour le dépôt de mémoires devant la chambre de l'instruction, est possible devant toutes les juridictions, par l'effet des articles D. 591 et D. 592 du code de procédure pénale, modifiés en vue de permettre la signature d'une convention nationale, intervenue le 5 février 2021, selon des modalités qui garantissent la sécurité des échanges et l'authenticité des actes et pièces échangés entre avocats et juridictions ; qu'il suit de là qu'il n'est pas possible de considérer qu'un doute existe sur l'authenticité d'un mémoire non signé manuscritement, dès lors qu'il est transmis à la chambre de l'instruction selon les modalités susmentionnées ; qu'en retenant néanmoins, pour en déduire l'irrecevabilité du mémoire produit par le conseil de monsieur [Z], dont il n'était pas contesté qu'il avait été adressé conformément aux modalités prévues par la convention nationale susvisée du 5 février 2021, qu'« en application de l'article 198 du code de procédure pénale, le mémoire de l'avocat de [?] [V] [Z] n'a[vait] pas été signé. [?] En effet, le décret n° 2021-1130 du 30 août 2021 modifiant les articles D591 et D592 du code de procédure pénale ne remet[tait] pas en cause l'obligation légale pour l'avocat, qui transmet[tait] son mémoire par le RPVA, de le signer afin de l'authentifier » (arrêt, p. 4, § 2), la chambre de l'instruction a violé les articles 198, D. 591 et D. 592 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 11. Le moyen est inopérant comme portant sur des motifs erronés mais surabondants de l'arrêt attaqué. Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, au fond, rejeté sa requête et confirmé la décision du procureur de la République financier du 5 juillet 2021 rendue à son égard, disant n'y avoir lieu de lui restituer la créance figurant au contrat d'assurance-vie n° C090001935 souscrit le 26 octobre 2011 auprès de la compagnie [1] et présentant au moment de la saisie le solde de 66 724,68 euros, alors : « 1°/ que les formes et modalités de la saisie pénale d'une créance figurant sur un contrat d'assurance-vie sont exclusivement celles prévues à l'article 706-155 du code de procédure pénale, lesquelles n'emportent pas appréhension effective par le service public de la justice du contrat, de la créance figurant sur ce contrat ni de tout autre élément patrimonial dont l'Etat pourrait devenir propriétaire en cas d'absence de demande en restitution formée, passé un certain temps, par la personne visée par la saisie, mais entraînent seulement, aux termes même du texte, « la suspension des facultés de rachat, de renonciation et de nantissement de ce contrat, dans l'attente du jugement définitif au fond », l'interdiction de « toute acceptation postérieure du bénéfice du contrat dans l'attente de ce jugement » et l'impossibilité pour « l'assureur [de] consentir d[es] avances au contractant » ; qu'il suit de là que, lorsque la juridiction répressive de jugement, connaissant de la poursuite ayant motivé la saisie, n'a pas statué sur le sort de la créance inscrite au crédit du contrat d'assurance-vie saisi ni donc ordonné sa confiscation, le titulaire du contrat, visé par la saisie, retrouve de plein droit, du seul fait du prononcé du jugement définitif au fond, toutes ses prérogatives quant à la gestion et à la disposition du contrat, avec lesquelles l'Etat n'est plus en droit d'interférer, et retrouve en particulier la titularité de la créance inscrite au contrat en cause ; que la chambre de l'instruction, qui a constaté que le jugement définitif au fond n'avait pas statué sur le devenir du contrat d'assurance-vie saisi, souscrit par monsieur [Z] auprès de la compagnie [1] (arrêt attaqué, p. 4, in fine), aurait donc dû en déduire que ce dernier avait recouvré de plein droit l'ensemble de ses prérogatives sur ce contrat ; qu'en retenant néanmoins que le procureur de la République était fondé à dire n'y avoir lieu à restituer la créance figurant au contrat concerné (arrêt attaqué, p. 5, § 2), la chambre de l'instruction a violé l'article 706-155 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 13. Pour rejeter la requête, l'arrêt relève que la juridiction saisie ayant, par jugement du 13 mai 2019, épuisé sa compétence, sans avoir statué sur la restitution de certaines des sommes saisies, M. [Z] disposait d'un délai expirant au 13 novembre 2019 pour saisir le procureur de la République financier d'une requête en restitution. 14. Les juges ajoutent qu'à défaut, le ministère public était fondé à statuer d'office pour dire n'y avoir lieu à restituer les sommes saisies. 15. En statuant ainsi, la chambre de l'instruction n'a méconnu aucun des textes visés au moyen. 16. En effet, il résulte des dispositions des premier et troisième alinéas de l'article 41-4 du code de procédure pénale que si la restitution n'a pas été demandée ou décidée dans un délai de six mois à compter de la décision par laquelle la dernière juridiction saisie a épuisé sa compétence, les objets placés sous main de justice qui n'ont pas été restitués deviennent propriété de l'Etat, sous réserve des droits des tiers. 17. Ces dispositions ne distinguant pas selon la nature des biens placés sous main de justice, elles s'appliquent notamment aux créances figurant sur les contrats d'assurance sur la vie saisies en application des articles 706-153 et 706-155, alinéa 2, du code de procédure pénale. 18. La circonstance qu'en application du second de ces textes, la saisie de tels biens n'entraîne pas, pour l'assureur ou l'organisme auprès duquel le contrat d'assurance sur la vie a été souscrit, l'obligation de consigner la somme objet de ces créances auprès de l'AGRASC, est par ailleurs sans emport sur leur indisponibilité prévue par l'article 706-145 du code de procédure pénale. 19. Il s'en déduit qu'à l'expiration du délai de six mois précité, les créances figurant sur les contrats d'assurance sur la vie saisies sont dévolues à l'Etat lorsque la juridiction saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur leur restitution. 20. Cette dévolution entraîne de surcroît la résolution du contrat d'assurance sur la vie et le transfert des fonds objet de la créance à l'Etat en application de l'article L. 160-9 du code des assurances, L. 223-29 du code de la mutualité ou L. 932-23-2 du code de la sécurité sociale, disposant que la décision définitive de confiscation d'une somme ou d'une créance figurant sur un contrat d'assurance sur la vie, prononcée par une juridiction pénale, entraîne de plein droit la résolution judiciaire du contrat et le transfert des fonds confisqués à l'État. 21. En effet, les textes précités sont issus de la loi n° 2013-1117 du 6 décembre 2013 qui a été adoptée afin d'éviter que l'Etat ne soit tenu d'attendre le dénouement du contrat d'assurance sur la vie pour ramener à exécution la peine de confiscation de la créance figurant sur cette convention (Rapport nos 1130 et 1131 fait au nom de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de l'Assemblée nationale, XIVe législature, p. 81). 22. A la suite de l'entrée en vigueur de ce texte, la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 a modifié l'article 41-4 du code de procédure pénale pour permettre au procureur de la République, notamment lorsque la dernière juridiction saisie a épuisé sa compétence sans avoir statué sur la restitution des biens placés sous main de justice, de refuser la restitution des biens qui sont l'instrument ou le produit direct ou indirect de l'infraction, en plus de ceux dont la restitution est de nature à créer un danger pour les personnes ou les biens, et ceux dont la destruction est prévue par une disposition particulière. Cette loi a également modifié en ce sens l'article 481 du code de procédure pénale applicable devant le tribunal correctionnel. 23. La loi du 3 juin 2016 constitue la transposition des dispositions de l'article 4 de la directive 2014/42/UE du Parlement européen et du Conseil imposant aux Etats membres de prendre les mesures nécessaires pour permettre, dans certains cas, la confiscation de l'instrument et du produit de l'infraction sans condamnation préalable de son auteur. 24. Si la non-restitution définitive des biens placés sous main de justice ne constitue pas une peine, dès lors que le seul objet de cette mesure est de prévenir le renouvellement d'infractions et de lutter contre toute forme d'enrichissement illicite, dans l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public (Cons. const., 3 décembre 2021, décision n° 2021-951 QPC), la non-restitution doit dorénavant être vue comme une alternative à la confiscation dont elle partage les effets comme emportant, au même titre que cette peine, la dévolution du bien non-restitué à l'Etat en application du troisième alinéa de l'article 41-4 du code de procédure pénale. 25. En conséquence, les effets de la dévolution à l'Etat des créances figurant sur les contrats d'assurance sur la vie prévus par les articles L. 160-9 du code des assurances, L. 223-29 du code de la mutualité et L. 932-23-2 du code de la sécurité sociale doivent s'étendre à celles qui sont devenues la propriété de l'Etat en application du troisième alinéa de l'article 41-4 du code de procédure pénale. 26. Dès lors le moyen doit être écarté. 27. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° S 22-81.040 F-D N° 00277 RB5 8 MARS 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [C] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-15, en date du 11 octobre 2021, qui, pour violation du secret des correspondances et recel d'abus de confiance, l'a condamné à 6 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de Mme Chafaï, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [C] [F], les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société [1]., et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chafaï, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La société [1]. a porté plainte et s'est constituée partie civile des chefs de recel de vol et complicité de recel de vol devant le juge d'instruction. 3. Elle a exposé qu'à la suite d'un placement en retenue douanière d'un lot de chaussures de marque [1], elle a assigné en contrefaçon de marque l'expéditeur, la société de droit suisse [2], dirigée par M. [C] [F]. 4. Dans le but de démontrer que les produits retenus étaient authentiques, la société [2] a produit en défense plusieurs documents, dont des instructions de la société [1]. relatives aux mesures de vérification et des échanges de correspondances électroniques internes à la société [1]., qui, selon cette dernière, lui auraient été frauduleusement soustraits. 5. M. [F] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef de recel de documents confidentiels provenant d'un délit commis au préjudice de la société [1].. 6. Le tribunal correctionnel a condamné M. [F] du chef de recel d'abus de confiance et prononcé sur les intérêts civils. 7. M. [F], le ministère public et la société [1]. ont relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [F] coupable d'avoir, les 10 juin et 29 octobre 2009 à Paris, violé le secret des correspondances en produisant les correspondances électroniques internes à la société [1] (pièces 22 à 29), l'a déclaré coupable des faits de recel d'abus de confiance en ce qui concerne les instructions de la société [1] relatives aux mesures de vérification (pièce 5), et a en conséquence prononcé sur la peine et les intérêts civils, alors : « 1°/ qu'en toute matière, la commission de certaines infractions peut être justifiée si elle est strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense de son auteur ; qu'en affirmant que la violation du secret des correspondances et le recel d'abus de confiance résultant de la production de documents confidentiels internes à la société [1] dans la procédure civile en contrefaçon l'opposant à la société [2] ne pouvaient être justifiés par l'exercice des droits de sa défense aux motifs que ce fait justificatif était admis « uniquement dans le cadre d'un litige entre salarié et employeur » et que « le litige qui opposait le prévenu à la société [1] ne relevait pas du droit du travail », la cour d'appel a restreint à tort le champ d'application du principe susvisé, en violation de l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'homme, du principe du respect des droits de la défense, et des articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ que ne commet pas d'infraction pénale la partie qui, poursuivie civilement du chef de contrefaçon, produit pour les nécessités de sa défense des documents internes au propriétaire de la marque de nature à établir l'authenticité des marchandises prétendument contrefaites ; qu'en affirmant que la violation du secret des correspondances et le recel d'abus de confiance résultant de la production de documents confidentiels internes à la société [1] dans la procédure civile en contrefaçon l'opposant à la société [2] n'était « pas strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense » aux motifs que « la juridiction civile a rendu une décision, d'ailleurs favorable au prévenu, après avoir écarté les pièces litigieuses » (arrêt, p. 9, al. 7), cependant que les documents en cause permettaient de déterminer le caractère authentique ou contrefait de la marchandise, que l'impossibilité pour le juge civil de les exploiter l'avait précisément conduit à ordonner une expertise afin que la société [1] en fasse elle-même état devant l'expert judiciaire dans des conditions garantissant les secrets de fabrication, et que les demandes de la société [1] avaient finalement été rejetées au regard de son refus de fournir ces documents à l'expert, ce dont il résultait qu'ils étaient nécessaires à l'exercice des droits de la défense de la société [2], et que leur communication n'était pas pénalement répréhensible, la cour d'appel a violé les articles 226-15 et 321-1 du code pénal, ensemble l'article 6 §1 de la Convention européenne des droits de l'homme, le principe du respect des droits de la défense, et les articles préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 9. Pour déclarer le prévenu coupable de violation du secret des correspondances et de recel d'abus de confiance, l'arrêt attaqué énonce, notamment, que si la chambre criminelle de la Cour de cassation admet que certaines infractions matériellement constatées ne peuvent être pénalement reprochées à leur auteur, c'est uniquement dans le cadre d'un litige entre salarié et employeur et à la condition que la commission de l'infraction ait été strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense. 10. Le juge ajoute qu'en l'espèce, outre que le litige qui opposait le prévenu et la société [1]. ne relevait pas du droit du travail, la commission des deux infractions reprochées n'était pas strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense puisque la juridiction civile a rendu une décision, d'ailleurs favorable au prévenu, après avoir écarté les pièces litigieuses. 11. Il en conclut que M. [F] doit être déclaré coupable des faits de violation du secret des correspondances et de recel d'abus de confiance en ce qui concerne les instructions de la société [1]. relatives aux mesures de vérification. 12. C'est à tort que le juge a écarté le fait justificatif tiré de l'exercice des droits de la défense au motif qu'il ne s'applique qu'en matière de droit du travail. 13. En effet, dès lors que n'est pas punissable l'infraction commise pour les strictes nécessités de la défense de son auteur, le bénéfice de ce fait justificatif ne saurait être restreint à la défense exercée dans un cadre prud'homal. 14. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure, dès lors que la cour d'appel a estimé, par des motifs relevant de son appréciation souveraine, que la commission des infractions objet des poursuites n'était pas strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense. 15. Ainsi, le moyen n'est pas fondé. 16. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; FIXE à 2 500 euros la somme que M. [F] devra payer à la société [1]. en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° E 22-80.040 F-D N° F 22-80.041 N° 00276 RB5 8 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [R] [P] a formé des pourvois contre des arrêts de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-1, en date du 12 octobre 2021 : - le premier, n° 229 (pourvoi n° 22-80.040), qui a prononcé sur sa demande de restitution de sommes versées à titre de cautionnement, - le second, n° 230 (pourvoi n° 22-80.041), qui, dans la procédure suivie contre lui des chefs d'abus de confiance, escroquerie et infraction à la législation sur le démarchage à domicile, a prononcé sur les intérêts civils. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de Mme Chafaï, conseiller référendaire, les observations de la SCP Richard, avocat de M. [R] [P], les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de Mme [W] [V], tant en son nom personnel qu'en qualité d'héritière de [X] [V], MM. [A], [N] et [Y] [V] en qualité d'héritiers de [X] [V], Mme [K] [I], en qualité d'héritière de [C] [V], héritière de [X] [V], Mmes [J] et [H] [D] et M. [S] [D], en qualité d'héritiers de [C] [V], les observations de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. [Z] [F], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chafaï, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte des arrêts attaqués et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par jugement du 6 avril 2001, M. [R] [P] a été déclaré coupable des chefs d'abus de confiance, escroquerie et infraction à la législation sur le démarchage à domicile et condamné à payer des dommages et intérêts aux parties civiles, dont MM. [Z] [F] et [X] [V] et Mme [W] [G], épouse [V]. 3. Il a relevé appel de la décision, le ministère public relevant appel incident. 4. Par arrêt du 27 novembre 2002, la cour d'appel l'a relaxé du chef d'abus de confiance au préjudice de deux des parties civiles et l'a condamné pour le surplus. Sur les intérêts civils, la cour d'appel a constaté que M. [P] justifiait de sa mise en liquidation judiciaire personnelle par jugement du tribunal de commerce du 7 mai 1998, et a sursis à statuer jusqu'à la mise en cause du liquidateur. 5. La liquidation judiciaire de M. [P] a été clôturée le 12 septembre 2017. 6. M. [P] ayant adressé les 6 juin 2018 et 16 septembre 2020 à la cour d'appel une demande en restitution des cautionnements versés entre 1995 et 1998 au titre des mesures de contrôle judiciaire auxquelles il a été astreint, le parquet général a saisi la cour d'appel d'une requête en difficulté d'exécution. 7. M. [P] et les parties civiles ont été cités à l'audience de la cour d'appel aux fins d'examen de la recevabilité et du bien-fondé des demandes formées par ces dernières. Examen des moyens Sur le premier moyen du pourvoi formé contre l'arrêt n° 230 Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il n'a pas mentionné que l'appel a été jugé à l'audience sur le rapport oral d'un conseiller, alors « que l'appel est jugé à l'audience sur le rapport oral d'un conseiller ; qu'étant un préliminaire indispensable à tout débat équitable et impartial, l'énoncé de ce rapport constitue une formalité substantielle, dont l'accomplissement s'impose et doit être expressément constaté, même si l'action civile reste seule en cause, dès lors que la cour d'appel doit statuer au fond ; que l'arrêt attaqué ne porte aucune mention de ce que l'affaire a été jugée sur le rapport oral d'un conseiller, bien que la Cour d'appel, qui était saisie de la seule action civile, ait statué sur le fond ; que l'arrêt attaqué, qui ne fait pas preuve de sa régularité, a été rendu en violation des articles 513 et 591 du Code de procédure pénale, ensemble l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et ce en application des articles 593 et 609 du Code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 513 du code de procédure pénale : 9. Selon ce texte, l'appel est jugé à l'audience sur le rapport oral d'un conseiller. L'inobservation de cette formalité porte atteinte aux intérêts de toutes les parties en cause et entraîne la nullité de l'arrêt. 10. Les mentions de l'arrêt attaqué, aux termes desquelles après reprise de l'audience, les avocats des parties et le ministère public ont été entendus, l'avocat du prévenu ayant eu la parole en dernier, ne permettent pas à la Cour de cassation de s'assurer que ces dispositions ont été observées. 11. La cassation est par conséquent encourue. Portée et conséquences de la cassation 12. La cassation de l'arrêt n° 230 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 12 octobre 2021 entraîne, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt n° 229 du même jour de ladite cour d'appel. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation dirigés contre l'arrêt n° 230, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, les arrêts susvisés n° 229 et 230 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 12 octobre 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, et sa mention en marge ou à la suite des arrêts annulés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° F 21-84.384 F-D N° 00266 RB5 8 MARS 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [E] [I] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Lyon, 7e chambre, en date du 19 mai 2021, qui, pour escroquerie, extorsion et tentative, l'a condamné à deux ans d'emprisonnement avec sursis probatoire, 5 000 euros d'amende, une interdiction professionnelle définitive, et a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [E] [I], les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société [1] Rhône-Alpes, les observations de Me Balat, avocat de Mme [Y] [N], épouse [X], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [E] [I], conseiller bancaire dans une agence de la [1] de [Localité 2], a fait l'objet de plaintes de clientes ayant souscrit des crédits à la consommation auprès de cette agence, lui reprochant de leur avoir obtenu des prêts dépassant leurs capacités de remboursement et auxquels elles ne pouvaient prétendre, en mentionnant dans leur dossier de faux renseignements sur leurs revenus, et en se faisant remettre en contrepartie, sous couvert de commissions ou d'assurance, différentes sommes en espèces. 3. Par jugement du tribunal correctionnel du 26 juin 2019, il a été déclaré coupable d'escroqueries, extorsion de fonds et tentative, et condamné à douze mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve. Sur l'action civile, le tribunal a déclaré recevables les constitutions de partie civile de la [1] et de trois des plaignantes, et leur a alloué des dommages-intérêts. 4. Le prévenu, le ministère public et deux parties civiles ont fait appel de ce jugement. Examen des moyens Sur le premier moyen et le deuxième moyen, pris en sa première branche 5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le deuxième moyen, pris en ses deux dernières branches Énoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement attaqué en ce qu'il a condamné M. [I] des chefs d'extorsion au préjudice de Mmes [W] [B] et [V] [C], de tentative d'extorsion au préjudice de Mme [Y] [N], épouse [X], escroqueries au préjudice de Mme [O] et de la [1], alors : « 2°/ que si la contrainte de l'article 312-1 du code pénal peut être simplement morale, il demeure qu'elle implique la constatation d'un état de sujétion, apprécié au regard de la situation concrète de la personne qui la subit, tel que cette dernière s'est trouvée privée de sa liberté de consentir ; que la seule précarité financière du client d'une agence bancaire en l'absence de tout autre élément se rapportant à sa situation personnelle et concrète, ne suffit pas à caractériser un état de sujétion à l'égard du directeur adjoint de l'agence bancaire ; qu'en se contentant de retenir que la contrainte morale exercée par M. [E] [I] résultait « tant de la situation de précarité financière des clientes que de ses fonctions de directeur adjoint et conseiller clientèle » (arrêt p. 18), la cour d'appel a privé sa décision de base légale et violé les articles 312-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale ; 3°/ que l'état de vulnérabilité de la victime n'est susceptible de caractériser l'existence d'une contrainte morale qu'en tant qu'il était connu du prévenu qui en a volontairement abusé ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué ne caractérise pas la connaissance que M. [E] [I] a pu avoir de l'état de vulnérabilité des prétendues victimes vis-à-vis de sa personne ; qu'en retenant l'existence d'une contrainte morale dans ces conditions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale et a violé les articles 312-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 7. Pour déclarer le prévenu coupable d'extorsion de fonds par contrainte à l'encontre de Mmes [B] et [C], et de tentative de ce délit à l'égard de Mme [N], l'arrêt attaqué énonce, notamment, que M. [I] a d'abord établi des demandes de crédit en saisissant des données ne correspondant pas aux justificatifs produits ou sans justificatifs, puis a signifié aux intéressées que leurs revenus ne leur permettaient pas d'obtenir les prêts sollicités et, enfin, a exigé la perception d'une commission au motif que son intervention leur avait néanmoins permis d'obtenir lesdits prêts. 8. Les juges relèvent que les trois intéressées rencontraient toutes de sérieuses difficultés financières, ce qui les plaçait dans une situation de vulnérabilité à l'égard de M. [I], lequel, en qualité de directeur adjoint, pouvait leur apparaître comme un interlocuteur incontournable de la banque. 9. Ils ajoutent que, confrontées au directeur adjoint de la banque, ne maîtrisant manifestement pas les arcanes des procédures bancaires à la différence de celui-ci, ayant été convaincues par M. [I] qu'elles n'avaient obtenu le crédit sollicité que grâce à son intervention, elles ne pouvaient s'opposer à ce dernier sans prendre le risque d'une remise en cause du versement des fonds dont elles avaient besoin de façon urgente. 10. La cour d'appel retient que, s'agissant de Mme [N], M. [I] avait conditionné l'octroi du prêt au versement d'une commission de 2 200 euros, que lorsqu'elle a manifesté son désaccord, il lui a dit que cette somme serait comprise dans le montant du crédit sollicité, et que lors d'un appel téléphonique, Mme [N] a fait part à M. [I] de sa volonté de renoncer à sa demande de crédit et l'a informé que son mari allait passer à l'agence, le prévenu lui ayant alors dit qu'il renonçait à sa commission. 11. Les juges concluent qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [I] a exercé une contrainte morale sur Mmes [B], [C] et [N] afin de se faire remettre des commissions respectivement de 4 000, 1 000 et 2 200 euros, contrainte résultant tant de la situation de précarité financière des clientes que de ses fonctions de directeur adjoint et conseiller clientèle, qui lui avaient permis de signifier à celles-ci qu'elles ne pouvaient obtenir les prêts dont elles avaient besoin que grâce à son intervention compte tenu de la faiblesse de leurs revenus, faisant du versement de la commission la condition de la remise des fonds. 12. En se déterminant ainsi, par des motifs qui caractérisent suffisamment un état de sujétion à l'égard du directeur adjoint de l'agence bancaire, ainsi que la situation de vulnérabilité et de dépendance vis à vis de M. [I], dans laquelle se trouvaient les plaignantes, dont les juges ont pu souverainement déduire l'existence d'une contrainte morale, dont le prévenu avait nécessairement connaissance en sa qualité de banquier de celles-ci, la cour d'appel a justifié sa décision. 13. D'ou il suit que le moyen doit être écarté. Mais sur le troisième moyen Énoncé du moyen 14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement attaqué en ce qu'il a déclaré M. [I] coupable d'escroquerie au préjudice de Mme [D] [O], alors « qu'un simple mensonge ne peut constituer une manoeuvre frauduleuse au sens de l'article 313-1 du code pénal s'il ne s'y joint aucun fait, antérieur à la remise, extérieur ou acte matériel, aucune mise en scène ou intervention d'un tiers destinés à donner force et crédit à l'allégation mensongère du prévenu ; qu'en l'espèce, il ressort des motifs de l'arrêt attaqué M. [E] [I] aurait demandé à Mme [D] [O] de lui remettre la somme de 2 000 euros en contrepartie de la souscription d'un contrat d'assurance qui n'a pourtant jamais été souscrit et qu'après la remise de cette somme, ce dernier lui aurait dit qu'il lui accordait un découvert de 2 800 euros (arrêt p. 19) ; qu'à cet égard, la cour d'appel a retenu qu'« outre que [D] [O] a pu se laisser convaincre par l'argument selon lequel elle bénéficierait d'un découvert de 2 800 euros, qui pourrait être en partie comblé par les 2 000 euros investis dans l'assurance, ces accusations sont confortées par le retrait d'espèces qui a été effectué concomitamment sur son compte » et qu'« en faisant souscrire à [D] [O] un contrat de découvert en contrepartie de la remise d'une somme de 2 000 euros en espèces au titre d'un prétendu contrat d'assurance, [E] [I] a usé de manoeuvres frauduleuses qui ont déterminé [D] [O] à lui remettre en espèces la somme de 2 000 euros qu'il a conservé par devers lui » (arrêt p. 19) ; que ce faisant, la cour d'appel s'est fondée sur des éléments postérieurs à la décision de remise, insusceptibles de corroborer le prétendu mensonge du prévenu sur la souscription d'un contrat d'assurance ; que dès lors en l'absence de manoeuvre frauduleuse antérieure à la remise, corroborant le seul mensonge antérieur, la condamnation prononcée est privée de toute base légale au regard des articles 313-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 313-1 du code pénal et 593 du code de procédure pénale : 15. Il résulte du premier de ces textes que les manoeuvres frauduleuses, constitutives de l'escroquerie, doivent être déterminantes de la remise et antérieures à celle-ci. 16. Selon le second de ces textes, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 17. Pour déclarer M. [I] coupable d'escroquerie au préjudice de Mme [O], l'arrêt attaqué énonce qu'il lui avait proposé une assurance moyennant une prime de 2 000 euros, somme qu'elle avait retirée en espèces le jour de la signature du contrat à l'aide d'une carte de retrait à usage unique établie par M. [I], qui lui avait accordé un découvert de 2 800 euros. 18. Les juges retiennent que Mme [O] a pu se laisser convaincre par l'argument selon lequel elle bénéficierait d'un découvert de 2 800 euros, qui pourrait être en partie comblé par les 2 000 euros investis dans l'assurance. 19. Ils ajoutent qu'il apparaît néanmoins que le contrat de découvert était en date du 10 février 2011, et non du 8 février 2011, date de la signature du contrat de rachat. 20. La cour d'appel en conclut qu'en faisant souscrire à Mme [O] un contrat de découvert en contrepartie de la remise d'une somme de 2 000 euros en espèces au titre d'un prétendu contrat d'assurance, M. [I] a usé de manoeuvres frauduleuses qui ont déterminé celle-ci à lui remettre en espèces la somme de 2 000 euros qu'il a conservée par devers lui. 21. En se déterminant ainsi, par des énonciations insuffisantes à caractériser des manoeuvres frauduleuses antérieures à la remise, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 22. D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef. Portée et conséquences de la cassation 23. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la déclaration de culpabilité de M. [I] du chef d'escroquerie à l'encontre de Mme [O], à la peine, et aux intérêts civils concernant cette dernière. Les autres dispositions seront donc maintenues. Examen de la demande fondée sur l'article 618-1 du code de procédure pénale 24. Les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de M. [I] du chef d'escroquerie au préjudice de la [1] étant devenue définitive par suite de la non-admission du premier moyen, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de la [1] Rhône-Alpes. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Lyon, en date du 19 mai 2021, mais en ses seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité de M. [I] du chef d'escroquerie à l'encontre de Mme [O], à la peine, et aux intérêts civils concernant cette dernière, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; FIXE à 2 500 euros la somme que M. [I] devra payer à la [1] Rhône-Alpes en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Lyon, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° B 21-84.978 F-D N° 00267 RB5 8 MARS 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [Z] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2021, qui, pour abus de confiance et blanchiment, l'a condamné à trois ans d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis probatoire, dix ans d'interdiction de gérer, cinq ans d'inégibilité, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de Me Isabelle Galy, avocat de M. [Z] [F], les observations de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de la société Résidence médicalisée [1], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [Z] [F], qui était directeur salarié de deux maisons de retraite médicalisées, a été poursuivi des chefs d'abus de confiance et de blanchiment pour avoir émis, entre 2011 et 2015, quatre-vingt-quinze chèques sur les comptes bancaires de ces résidences, qu'il a déposés sur ses comptes personnels et ceux de la société d'informatique [2] qu'il dirigeait par ailleurs, pour un montant total de 561 924,24 euros, sans que ces chèques soient justifiés par une facture, ou correspondent à une prestation de la société [2]. 3. Par jugement du 8 octobre 2019, M. [F] a été condamné par le tribunal correctionnel à dix-huit mois d'emprisonnement dont douze mois avec sursis et mise à l'épreuve, dix ans d'interdiction de gérer, cinq ans d'inégibilité, ainsi qu'à la confiscation des biens saisis. 4. Le prévenu et le ministère public ont relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le troisième moyen et sur le deuxième moyen, pris en sa première branche 5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le premier moyen Énoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement ayant déclaré M. [F] coupable des faits d'abus de confiance reprochés commis du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2015, l'a condamné pénalement et a confirmé le jugement en toutes ses dispositions civiles, notamment en ce qu'il l'a condamné à payer à la SAS Résidence médicalisée [1] la somme de 363 303,18 euros en réparation de son préjudice matériel, alors « que le jugement a retenu la culpabilité de M. [F] pour l'ensemble des faits d'abus de confiance reprochés, correspondant à des encaissements par chèques pour un montant total de 561 924,24 euros, à hauteur de 363 303,18 euros au préjudice de la SAS Résidence médicalisée [1] et de 198 621,08 euros au préjudice de la SARL Les Demeures des Glycines (jugement, p. 20) ; qu'il a en conséquence, sur l'action civile, condamné M. [F] à payer à la SAS résidence médicalisée [1] la somme de 363 303,18 euros en réparation de son préjudice matériel (p. 25) ; qu'en appel, l'arrêt retient toutefois que parmi ces chèques, deux sont justifiés, pour un montant total de 49 928,39 euros sur les 561 924,24 euros dégagés par les enquêteurs (arrêt, p. 16), correspondant au règlement de deux factures de la [2] par la SAS résidence médicalisée [1] (arrêt, p. 15) ; que dès lors, l'arrêt ne pouvait, sans se contredire, retenir dans ses motifs que l'ensemble des « sommes correspondant aux remises de chèques tirés à partir des comptes de la SARL Résidence Demeures des Glycines et de la SAS Résidence médicalisée [1] opérées sur les comptes de [Z] [F] pour un total général de 561 924,24 euros sont le produit des faits d'abus de confiance commis par ce dernier » (p. 17 §1) et que le montant des détournements au préjudice de la SAS résidence médicalisée [1] est de 363 303,18 euros (arrêt, p. 19), puis, dans ses motifs et son dispositif, confirmer le jugement entrepris sur la culpabilité et l'action civile ; que la cour a violé l'article 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 7. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 8. Pour confirmer le jugement ayant déclaré le prévenu coupable d'abus de confiance en signant, endossant et encaissant quatre-vingt-quinze chèques pour un montant de 561 924,24 euros, tirés sur les comptes des deux maisons de retraite dont il avait la direction, dont 363 303,18 euros demeuraient injustifiés s'agissant de la Résidence médicalisée [1], et ayant condamné le prévenu à payer à cette dernière cette somme de 363 303,18 euros en réparation de son préjudice matériel, l'arrêt attaqué énonce qu'il est constant que les comptes personnels du prévenu ou de la société [2] ont bénéficié sur la période de janvier 2011 à l'année 2015 d'un total de remises de chèques s'élevant à 561 924,24 euros, dont, s'agissant de la Résidence médicalisée [1], 223 821,64 euros dont le libellé de l'écriture comptable est au nom de la [2], 98 115 euros dont le libellé de l'écriture comptable est au nom de M. [F], et 40 967 euros avec un libellé d'écriture comptable inconnu ou classé compte 471. 9. Les juges ajoutent que seules deux factures de la société [2] ont pu être présentées pour justifier l'émission des chèques signés par M. [F] à partir du chéquier de la résidence médicalisée [1] : une facture du 24 avril 2011 pour un montant de 36 068,39 euros, et une facture du 21 avril 2015 pour un montant de 13 860 euros. 10. Ils en déduisent que les chèques tirés sur les comptes des deux maisons de retraite et remis sur le compte de M. [F] ne sont donc justifiés que pour un total de 49 928,39 euros sur les 561 924,24 euros dégagés par les enquêteurs. 11. En prononçant ainsi, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 12. En effet, si la constatation d'un préjudice suffit à établir l'élément matériel du délit d'abus de confiance, quel qu'en soit le montant, les juges ne pouvaient sans se contredire allouer à la Résidence médicalisée [1], partie civile, en réparation de son préjudice matériel, la somme de 363 303,18 euros, sans en déduire le montant des chèques qu'ils ont considérés comme justifiés, à hauteur de 49 928,39 euros. 13. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Et sur le deuxième moyen, pris en ses deuxième, troisième et quatrième branches Énoncé du moyen 14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [F] à la peine de trois ans d'emprisonnement dont dix-huit mois assortis d'un sursis avec mise à l'épreuve de deux ans, alors : « 2°/ que pour refuser un quelconque aménagement de peine ab initio, l'arrêt s'est fondé de manière déterminante sur « l'absence de renseignement sur l'hébergement et sur le titulaire du bail ou du titre de propriété de l'habitation » ; que cependant, M. [F], présent à l'audience, pouvait répondre à toutes les questions des juges leur permettant d'apprécier la faisabilité d'une mesure d'aménagement ; que la cour d'appel n'a pas mieux justifié sa décision au regard de l'article 132-19 alinéas 2 et 3 du code pénal dans sa rédaction applicable, antérieure à la loi du 24 mars 2020 ; 3°/ que pour refuser cet aménagement, l'arrêt relève en outre « l'absence d'une quelconque démarche d'indemnisation aussi modique soit-elle de la partie civile ou des victimes malgré le prononcé en première instance d'un sursis mise à l'épreuve avec exécution provisoire », après avoir pourtant retenu, au vu de la faiblesse des ressources de M. [F], qu'une peine d'amende - aussi modique soit-elle donc- n'est pas opportune ; que la cour d'appel, qui s'est contredite sur les capacités financières de M. [F], a méconnu l'article 593 du code de procédure pénale ; 4°/ que si la peine ferme prononcée n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, qui décide de ne pas l'aménager, doit soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce, de la personnalité du prévenu et de sa situation matérielle, familiale et sociale ; que l'arrêt ne satisfait pas à ces exigences, en violation de l'article 132-19 alinéas 2 et 3 du code pénal dans sa rédaction applicable, antérieure à la loi du 24 mars 2020. » Réponse de la Cour Vu les articles 132-19 du code pénal et 593 du code de procédure pénale : 15. Il résulte du premier de ces textes, dans sa rédaction alors applicable, que si la peine d'emprisonnement sans sursis prononcée n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge qui décide de ne pas l'aménager doit soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce, de la personnalité du prévenu et de sa situation matérielle, familiale et sociale. 16. Selon le second de ces textes, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 17. Pour refuser d'aménager l'exécution de la partie ferme de la peine de trois ans d'emprisonnement dont dix-huit mois avec sursis probatoire prononcée contre M. [F], l'arrêt attaqué énonce que l'absence d'une quelconque démarche d'indemnisation, aussi modique soit-elle, de la partie civile ou des victimes malgré le prononcé en première instance d'un sursis avec mise à l'épreuve assorti de l'exécution provisoire, l'absence de renseignement sur l'hébergement et sur le titulaire du bail ou du titre de propriété de l'habitation, conduisent à ne pas accorder un quelconque aménagement de peine ab initio. 18. En se déterminant ainsi, par des motifs qui n'indiquent pas les raisons tirées des faits de l'espèce, de la personnalité du prévenu et de sa situation matérielle, familiale et sociale, de nature à empêcher l'aménagement de la peine, et alors que M. [F], présent à l'audience, pouvait répondre à toutes les questions des juges leur permettant d'apprécier la faisabilité d'une mesure d'aménagement, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 19. D'où il suit que la cassation est encore encourue de ce chef. Portée et conséquences de la cassation 20. La cassation à intervenir ne concerne que les peines et les dispositions relatives au montant des dommages-intérêts alloués à la société Résidence médicalisée [1], partie civile. Les autres dispositions seront donc maintenues. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Caen, en date du 20 janvier 2021, mais en ses seules dispositions relatives aux peines et au montant des dommages-intérêts alloués à la société Résidence médicalisée [1], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Caen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° G 21-86.065 F-D N° 00268 RB5 8 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [H] [W] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-1, en date du 6 juillet 2021, qui, pour escroquerie, l'a condamné à un an d'emprisonnement, 5 000 euros d'amende, cinq ans d'interdiction de gérer, et a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [H] [W], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La société [3], devenue [2], a conclu avec la société [1] ([1]) un partenariat pour la distribution de produits d'assurance. 3. Un litige est apparu entre les deux sociétés au sujet de commissions, et la société [3] a obtenu du juge de l'exécution l'autorisation de procéder à la saisie à titre conservatoire des comptes bancaires de la société [1] pour un montant de 31 732,41 euros. 4. La société [3] a par la suite saisi au fond le tribunal de commerce, pour voir la société [1] condamnée à lui verser la somme de 42 750 euros au titre des reprises de commissions. 5. La société [3], dont le dirigeant était à l'époque M. [H] [W], a produit à l'appui de ses demandes un contrat de partenariat et un protocole de commissionnement entre les sociétés [1] et [3], datés du 24 octobre 2013. 6. La dirigeante de la société [1] a contesté l'authenticité de ces contrats, et déposé plainte auprès du procureur de la République. À l'issue de l'enquête, le dirigeant de [3], M. [W], a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour faux et usage, et escroquerie. 7. Par jugement du 7 mai 2019, le tribunal correctionnel à relaxé M. [W] du chef de faux, l'a déclaré coupable d'usage de faux et d'escroquerie, l'a condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis et 5 000 euros d'amende, et a statué sur l'action civile. 8. Le prévenu, le ministère public et la partie civile ont fait appel de ce jugement. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche et le second moyen 9. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche Énoncé du moyen 10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [W] coupable de faits d'escroquerie par emploi de manoeuvres frauduleuses consistant à produire en justice à l'appui de ses prétentions de faux contrats devant le tribunal de commerce de Marseille, celui de Paris et le juge de l'exécution de Nice et à les déterminer ainsi à consentir un acte opérant obligation ou décharge, en l'espèce, une ordonnance de saisie conservatoire, et une condamnation au paiement d'une somme de plus de 40 000 euros (tribunal de commerce Paris) au préjudice de la société [1], sur la période de la prévention de courant mars 2016 jusqu'au 15 septembre 2016, alors : « 1°/ d'une part, que le tribunal de commerce de Paris s'est déclaré incompétent au profit de celui de Marseille, lequel a fixé au passif du redressement judiciaire de la société [2], anciennement dénommée [3], diverses sommes au titre des commissions dues au 18 mai 2015 à la société [1], à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et pour avoir produit des contrats portant la signature falsifiée de la gérante de la société [1], et l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes ; qu'en déclarant M. [W] coupable d'avoir produit en justice de faux contrats qui auraient déterminé le tribunal de commerce de Paris à condamner la société [1] au paiement d'une somme de plus de 40 000 euros, quand ni ce tribunal, ni celui de Marseille, ne l'ont condamnée à verser une quelconque somme à la société [3], en sorte que leurs décisions n'ont nullement opéré obligation au préjudice de la société [1], la cour d'appel s'est prononcée en contradiction avec les pièces du dossier, et a violé l'article 313-1 du code pénal. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 11. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 12. Pour déclarer le prévenu coupable d'escroquerie par emploi de manoeuvres frauduleuses consistant à produire en justice à l'appui de ses prétentions de faux contrats devant le tribunal de commerce de Marseille, celui de Paris et le juge de l'exécution de Nice, et les avoir déterminés ainsi à consentir un acte opérant obligation ou décharge, en l'espèce, une ordonnance de saisie conservatoire, et une condamnation au paiement d'une somme de plus de 40 000 euros au préjudice de la société [1], l'arrêt attaqué énonce que les faux produits dans les différentes instances ont contribué à conférer force probante et crédit aux relevés de commission établis par la société [3], et à asseoir sa créance au titre des reprises sur commissions, et ont par conséquent préjudicié gravement aux intérêts de la société [1] dont le compte bancaire a fait l'objet d'une saisie conservatoire réalisée les 22 avril 2016 et 10 mai 2016, qui a bloqué la provision pendant plusieurs mois. 13. En se déterminant ainsi, sans mieux s'expliquer sur la condamnation de la société [1] au paiement à la société [3] d'une somme de plus de 40 000 euros qui ne résulte pas des éléments du dossier et qu'elle retient par ailleurs comme étant l'une des obligations consenties à la suite des manoeuvres frauduleuses, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 14. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 6 juillet 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° W 22-83.068 F-D N° 00272 RB5 8 MARS 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [V] [P] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-1, en date du 16 février 2022, qui pour abus de confiance, l'a condamné à dix-huit mois d'emprisonnement, et a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [V] [P], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [V] [P] a été poursuivi devant le tribunal correctionnel pour avoir détourné au préjudice de la société [1] représentée par son gérant, M. [T], des fonds pour un montant de 16 800 euros, qui lui avaient été remis à charge d'en faire un usage déterminé, en l'espèce, pour commander du matériel et mobilier de restaurant et des sanitaires. 3. Le 4 avril 2019, le tribunal correctionnel, pour abus de confiance, l'a condamné à six mois d'emprisonnement et a prononcé sur les intérêts civils. 4. Il a relevé appel de cette décision, et le ministère public a formé un appel incident. Examen des moyens Sur le premier moyen 5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le second moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [P] coupable d'abus de confiance, alors : « 1°/ que les juridictions correctionnelles ne peuvent ajouter aux faits de la prévention, lesquels doivent rester tels qu'ils ont été retenus dans l'acte de saisine, à moins que le prévenu ait accepté d'être jugé sur des faits nouveaux ; qu'en l'espèce, aux termes de la citation du 26 juin 2018, il est reproché au prévenu d'avoir détourné des fonds, à hauteur de 16 800 €, qui lui avaient été remis à charge d'en faire un usage déterminé, en l'espèce pour commander du matériel et mobilier de restaurant et des sanitaires ; que, dès lors, en relevant, pour déclarer l'exposant coupable d'abus de confiance, que celui-ci s'est fait remettre la somme totale de 16 800 € à charge pour lui de réaliser des travaux dans un établissement appartenant à la SARL [1] et qu'en conservant ces fonds par devers lui, le prévenu en a fait un usage contraire à l'objet convenu avec la victime, quand, aux termes de la citation susvisée, l'usage des fonds ainsi remis à l'intéressé n'était pas de réaliser des travaux mais de commander du matériel et du mobilier, la cour d'appel a relevé à la charge de l'exposant des faits excédant les limites de la prévention, sans qu'il résulte des pièces de la procédure que le prévenu ait expressément accepté d'en répondre et, partant, a violé l'article 388 du code de procédure pénale ; 2°/ que l'abus de confiance ne peut porter que sur des fonds, valeurs ou biens remis à titre précaire, et est donc exclu en cas de transfert de propriété de la chose ainsi remise ; qu'en l'espèce, pour déclarer l'exposant coupable du chef d'abus de confiance, la cour d'appel a relevé que celui-ci s'est fait remettre la somme totale de 16 800 € à charge pour lui de réaliser des travaux dans un établissement appartenant à la SARL [1] et qu'en conservant ces fonds par devers lui, le prévenu en a fait un usage contraire à l'objet convenu avec la victime ; qu'en l'état de ces énonciations d'où il ne résulte pas que les sommes litigieuses, auraient-elles fait l'objet d'une affectation spécifiée, aient été remises au prévenu à titre précaire, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 314-1 du code pénal. » Réponse de la Cour Vu les articles 388 du code de procédure pénale et 314-1 du code pénal : 7. Il résulte du premier de ces textes que les juges ne peuvent statuer que sur les faits dont ils sont saisis, à moins que le prévenu n'accepte expressément d'être jugé sur des faits distincts de ceux visés à la prévention. 8. Selon le second, l'abus de confiance ne peut porter que sur des fonds, valeurs ou biens remis à titre précaire. 9. Pour dire établi le délit d'abus de confiance, l'arrêt attaqué relève notamment que, lors de son audition, le prévenu a expliqué qu'il avait été engagé par le gérant de la société [1] afin d'effectuer des travaux de réfection au sein du restaurant de ce dernier (carrelage et sanitaires), qu'il avait commandé les matériaux en Italie, ceux-ci devant lui être livrés sous huit semaines, que cette commande était toujours en cours, mais qu'il n'avait pas procédé aux travaux en raison d'un désaccord avec M. [T], lequel lui avait donné des instructions contradictoires, souhaitant annuler puis maintenir la commande. 10. Les juges ajoutent que M. [P] se disait prêt à rembourser la somme versée par la société [1]. 11. Ils retiennent qu'il résulte des déclarations de l'assistante de direction de cette société, des pièces versées par elle, des investigations et des propres aveux a minima de M. [P], que ce dernier s'est fait remettre la somme totale de 16 800 euros, à charge pour lui de réaliser des travaux dans un établissement appartenant à la société [1], somme qu'il a conservée par devers lui à l'insu de la plaignante et de son gérant. 12. Ils en concluent qu'en agissant ainsi, le prévenu a fait un usage des fonds détourné et contraire à l'objet convenu avec la victime. 13. En se déterminant ainsi, alors que, d'une part, la prévention ne concernait que des fonds remis pour commander du matériel et mobilier de restaurant et des sanitaires, et qu'il ne résulte pas de l'arrêt que le prévenu ait accepté d'être jugé pour le détournement de fonds remis à charge pour lui de réaliser des travaux, d'autre part, il ressort de ses motifs que la somme remise à M. [P] lui a été versée en pleine propriété pour effectuer ces travaux, dont l'inexécution n'est pas constitutive d'un abus de confiance, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 14. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 16 février 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° H 22-82.043 F-D N° 00271 RB5 8 MARS 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [E] [N] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 9e chambre, en date du 4 mars 2022, qui, pour escroquerie en bande organisée, en récidive, l'a condamné à deux ans d'emprisonnement, cinq ans d'inéligibilité, et a ordonné une mesure de confiscation. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [E] [N], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. A l'issue d'une information judiciaire ouverte le 2 novembre 2017 concernant des faits d'escroquerie et de tentative d'escroquerie de type « rip deal », M. [E] [N] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel qui, pour escroquerie en bande organisée, en récidive, l'a condamné à vingt quatre mois d'emprisonnement, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils. 3. Il a relevé appel de cette décision, et le ministère public a formé un appel incident. Examen des moyens Sur le premier moyen et le second moyen, pris en ses deux premières branches 4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé la confiscation en valeur du bien situé [Adresse 1] à [Localité 2] et la confiscation des scellés, alors : « 3°/ qu'enfin, il incombe au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure ; que, dès lors, en prononçant « la confiscation des scellés ayant servi à commettre l'infraction ou en étant le produit » (arrêt, p. 9, § 5), sans indiquer la nature et l'origine des objets confisqués, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de contrôler la légalité de sa décision, en méconnaissance des articles 131-21 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 131-21 du code pénal et 593 du code de procédure pénale : 6. Selon le premier de ces textes, la peine complémentaire de confiscation est encourue dans les cas prévus par la loi ou le règlement. La confiscation porte alors sur les biens qui ont servi à commettre l'infraction, ou qui étaient destinés à la commettre, et sur ceux qui sont l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction. Si la loi qui réprime le crime ou le délit le prévoit, la confiscation peut porter sur tout ou partie des biens appartenant au condamné. 7. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit contenir les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 8. L'arrêt attaqué se borne, sans énoncer les motifs de cette peine complémentaire, à confirmer la mesure de confiscation des scellés ordonnée par le jugement, lui-même dépourvu de motivation sur ce point. 9. En prononçant ainsi, sans indiquer la nature et l'origine des objets placés sous scellés dont elle a ordonné la confiscation, ni le fondement de cette peine, dont elle n'a pas davantage précisé la nécessité, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ni mis la Cour de cassation en mesure d'en contrôler la légalité. 10. La cassation est par conséquent encourue. Portée et conséquences de la cassation 11. La cassation sera limitée aux peines prononcées à l'encontre de M. [N], la déclaration de culpabilité n'encourant pas la censure. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 4 mars 2022, mais en ses seules dispositions relatives aux peines prononcées à l'encontre de M. [N], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° W 21-86.859 F-D N° 00269 RB5 8 MARS 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 M. [F] [B], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy en date du 18 août 2021, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer sur sa plainte du chef d'escroquerie. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Wyon, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [F] [B], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Wyon, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 10 septembre 2020, M. [F] [B] a porté plainte et s'est constitué partie civile devant le juge d'instruction contre M. [G] [L] pour escroquerie au jugement. 3. Il expose avoir été mis en cause, dans le cadre d'une information judiciaire ouverte sur plainte avec constitution de partie civile de la société [1], dirigée par M. [L], et avoir produit au juge d'instruction, pour les besoins de sa défense, un document intitulé « annexe et convention d'intérêts supplémentaire ». 4. Il reproche à M. [L] d'avoir adressé au juge d'instruction, par l'intermédiaire de son avocat, une lettre dans laquelle il affirmait ne jamais avoir signé ce document, ce qui a conduit le magistrat instructeur à rejeter une demande de non-lieu présentée par M. [B], par une ordonnance du 31 janvier 2018. 5. Par ordonnance du 11 mai 2021, le juge d'instruction a dit n'y avoir lieu à informer sur la plainte avec constitution de partie civile déposée par M. [B]. 6. M. [B] a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Énoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a refusé d'informer sur la plainte avec constitution de partie civile de M. [B], alors : « 1°/ que la juridiction d'instruction, régulièrement saisie d'une plainte avec constitution de partie civile, a le devoir d'instruire, quelles que soient les réquisitions du ministère public, cette obligation ne cessant que si, pour des causes affectant l'action publique elle-même, les faits ne peuvent comporter légalement une poursuite ou si, à supposer les faits démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale ; que la production en justice, par une partie, d'un document mensonger suffit à caractériser l'élément matériel du délit d'escroquerie au jugement ; qu'en refusant d'informer, sans rechercher si, ainsi que le dénonçait la plainte, le fait pour M. [L] d'avoir, en sa qualité dirigeant de la société [1], adressé par l'intermédiaire de son conseil au juge d'instruction en charge d'une information ouverte contre M. [B] sur plainte avec constitution de partie civile de cette société, une lettre dans laquelle il indiquait mensongèrement qu'il n'avait jamais signé le document intitulé « annexe et convention d'intérêts supplémentaire » que M. [B] avait remis au magistrat instructeur pour sa défense, ce qui avait conduit ce dernier à rejeter sa demande de non-lieu n'était pas susceptible de caractériser une manoeuvre constitutive du délit escroquerie au jugement, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 313-1 du code pénal, 85, 86, 591 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ que la production en justice, par une partie, d'un document mensonger est de nature à causer à la partie adverse un préjudice personnel et direct ; qu'en retenant, pour refuser d'informer, que M. [B] ne justifiait d'aucun préjudice, quand la déclaration mensongère contenue dans la lettre adressée par M. [L] au juge d'instruction avait conduit ce dernier à rejeter par ordonnance la demande de non-lieu formée par M. [B], décision préjudiciable à ses intérêts, la chambre de l'instruction a de nouveau méconnu les articles 313-1 du code pénal, 2, 85, 86, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 8. Pour confirmer l'ordonnance de refus d'informer du juge d'instruction, l'arrêt attaqué énonce, notamment, qu'un simple mensonge, même produit par écrit, ne peut constituer une manoeuvre caractéristique du délit d'escroquerie, qui nécessite au surplus la démonstration d'un préjudice. 9. Les juges ajoutent qu'il est constant que M. [B] est l'auteur de la remise au magistrat instructeur de la copie du document intitulé « annexe et convention d'intérêts supplémentaire », sur lequel, après découverte de l'original, il appuie aujourd'hui sa plainte avec constitution de partie civile contre M. [L], qui, à la lecture de l'ordonnance de rejet de demande de non-lieu du 31 janvier 2018, s'est contenté, par l'intermédiaire de son avocat, dans un courrier du 8 janvier 2018, de contester avoir signé ce document le qualifiant de faux. 10. La cour d'appel relève qu'au surplus M. [B] ne justifie d'aucun préjudice, se contentant de soutenir qu'il « risque d'être renvoyé en correctionnelle » ou qu'il « aurait pu bénéficier de la fin des poursuites et ne plus risquer d'être condamné lors d'un éventuel renvoi devant le tribunal correctionnel qui pourrait prononcer des condamnations portant atteinte à sa fortune personnelle », l'emploi du conditionnel par son avocat caractérisant cette absence de démonstration d'un quelconque préjudice, étant rappelé qu'aucun jugement de condamnation n'est intervenu à ce jour. 11. C'est à tort que les juges retiennent qu'un simple mensonge, même produit par écrit, ne peut constituer une manoeuvre caractéristique du délit d'escroquerie au jugement, la production d'un document simplement mensonger étant susceptible de caractériser l'élément matériel de ce délit. 12. Cependant, l'arrêt n'encourt pas la censure, dès lors que, d'une part, un simple courrier adressé à un juge d'instruction par l'avocat d'une partie pour contester la valeur d'une charge ne peut s'assimiler à la production en justice d'un document mensonger destiné à tromper la religion du juge, d'autre part, la décision du juge d'instruction de rejeter une demande de non-lieu en cours d'information judiciaire n'est pas un acte susceptible d'opérer obligation ou décharge au sens de l'article 313-1 du code pénal, et par là même de causer un préjudice au mis en examen. 13. Dès lors, le moyen doit être écarté. 14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° A 21-85.874 F-D N° M 20-85.696 N° 00270 RB5 8 MARS 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 8 MARS 2023 MM. [J] [T], [K] [D], devenu [K] [R], et M. [U] [V], Mmes [F] [N]-[V], [I] [S]-[V], [P] [W]-[V], [Y] [H]-[V], agissant tant en leur nom personnel qu'en tant qu'héritiers de [L] [V], [E] [V], agissant tant en son nom personnel qu'en tant qu'héritière de [O] [V], [M] [V], [G] [V] et [Z] [V], agissant en tant qu'héritières de [B] [V] et de [O] [V], et M. [A] [C], parties civiles, ont formé des pourvois : - s'agissant des deux premiers demandeurs, contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 4-11, en date du 19 septembre 2019, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 11 juillet 2017, n° 16-84.644), a infirmé le jugement correctionnel ayant déclaré l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et de non-lieu partiel irrégulière, et renvoyé l'affaire à une audience ultérieure (pourvoi n° 20-85.696), - s'agissant de l'ensemble des demandeurs, contre l'arrêt de la même cour d'appel, chambre 2-11, en date du 1er octobre 2021, qui a condamné le premier, pour faux et usage, et dénonciation calomnieuse, à trois mois d'emprisonnement avec sursis et 7 000 euros d'amende, le deuxième, pour fausse attestation, à 3 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils (pourvoi n° 21-85.874). Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Pauthe, conseiller, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de MM. [J] [T] et [K] [D], les observations de la SCP Le Bret-Desaché, avocat des consorts [V] et de M. [A] [C], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 1er février 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pauthe, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Boudalia, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte des arrêts attaqués et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 27 janvier 2004, M. [J] [T], la mère de celui-ci et la société [2] représentée par M. [K] [R], ont porté plainte avec constitution de partie civile des chefs d'escroquerie et abus de confiance, à la suite de l'échec d'une transaction immobilière portant sur une opération de promotion immobilière prévue sur un terrain situé aux [Localité 3], qui devait être conclue entre la société [2] et l'indivision [V], dénonçant la machination dont le premier nommé aurait été victime, élaborée par MM. [U] [V], vendeur du terrain, [A] [C], maître d'ouvrage, et diverses autres personnes. 3. A l'appui de sa plainte, M. [T] a joint, d'une part, la photocopie de cessions d'actions faites à son profit par les consorts [V], qui l'auraient trompé ainsi que sa mère, d'autre part, trois attestations de M. [R] déclarant avoir assisté à trois remises d'espèces qu'il aurait effectuées au profit des mêmes consorts [V]. 4. Ultérieurement, MM. [V] et [C] ont déposé plainte à leur tour auprès du procureur de la République contre M. [T], sa mère et M. [R], des chefs de dénonciation calomnieuse, faux et usage de faux et tentative d'escroquerie, soutenant que les photocopies de contrats de cession d'actions de la société [1] produites par M. [T] à l'appui de sa plainte étaient des faux. La saisine du juge d'instruction, initialement saisi des chefs d'escroquerie et abus de confiance, a été étendue à ces faits. 5. A l'issue de l'information, le juge d'instruction, après avoir ordonné unnon-lieu des chefs d'escroquerie et d'abus de confiance, a ordonné le renvoi de M. [T] devant le tribunal correctionnel du chef, d'une part, de faux et usage ayant consisté à établir de fausses conventions de cession d'actions de la société [1], l'une datée du 4 avril 2002 et l'autre du 25 septembre 2002, et à avoir fait usage de ces fausses conventions lors de procédures, notamment le 26 janvier 2004, et ce au préjudice de M. [C], de M. [V] et de l'indivision [V], d'autre part, de dénonciation calomnieuse ayant consisté à dénoncer au doyen des juges d'instruction de Paris par le moyen d'une plainte avec constitution de partie civile alors qu'il les savait totalement ou partiellement inexacts, des faits de nature à entraîner des sanctions judiciaires, administratives ou disciplinaires au préjudice, notamment, de MM. [V] et [C], enfin, d'usage de faux ayant consisté à faire usage de trois attestations inexactes ou falsifiées signées par M. [R], au préjudice, notamment, des personnes susnommées. 6. M. [R] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef de faux pour avoir établi les trois attestations susvisées faisant état de faits matériellement inexacts, au préjudice des mêmes personnes. 7. Par jugement en date du 16 mai 2014, le tribunal correctionnel, constatant l'irrégularité de l'ordonnance de renvoi, a renvoyé la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction d'instruction aux fins de régularisation. 8. La cour d'appel a déclaré irrecevables les appels des prévenus par arrêt du 30 mai 2016 à l'encontre duquel M. [T] s'est pourvu. Par arrêt du 11 juillet 2017, la Cour de cassation a cassé l'arrêt de la cour d'appel en toutes ses dispositions. 9. Par arrêt du 19 septembre 2019, la cour d'appel, statuant sur renvoi après cassation, a rejeté l'ensemble des exceptions de nullités présentées par MM. [T] et [R] et ordonné le renvoi de l'affaire à une audience ultérieure. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa seconde branche, concernant l'arrêt du 19 septembre 2019 en ce qu'il concerne M. [R], le troisième moyen proposé pour MM. [T] et [R] concernant l'arrêt du 1er octobre 2021, en ce qu'il concerne M. [R] 10. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, proposé pour M. [T] Enoncé du moyen 11. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé le jugement entrepris et rejeté toutes les exceptions de nullité que MM. [T] et [D] avaient formées, alors : « 1°/ qu'il ressort des mentions de l'arrêt que M. Putigny-Ravet, avocat de M. [T], n'a pas eu la parole en dernier, après les réquisitions de l'avocat général (p. 5), de sorte que la chambre de l'instruction a violé les articles 460 et 513 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 513 du code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme : 12. Selon le premier de ces textes, le prévenu ou son avocat auront toujours la parole en dernier ; cette règle s'applique à tout incident dès lors qu'il n'est pas joint au fond. 13. Poursuivi des chefs de faux et usage, usage de fausse attestation et dénonciation calomnieuse, M. [T] a saisi la cour d'appel d'une exception de nullité de l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel. 14. Par l'arrêt avant-dire droit attaqué, la cour d'appel, qui n'a pas joint l'incident au fond, a rejeté les exceptions de nullité et ordonné le renvoi de l'affaire pour examen au fond. 15. Selon les mentions de l'arrêt, l'avocat de M. [T], qui le représentait, n'a pas eu la parole après les réquisitions du ministère public. 16. En statuant dans ces conditions, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé. 17. La cassation est encourue de ce chef. Sur les premier, deuxième et troisième moyens proposés pour les consorts [V] et M. [C] en ce qu'ils concernent M. [T] 18. La cassation de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 19 septembre 2019 en ses dispositions concernant M. [T] entraîne par voie de conséquence la cassation de l'arrêt de ladite cour d'appel du 1er octobre 2021 en toutes ses dispositions concernant M. [T]. 19. Il en résulte que les premier, deuxième et troisième moyens proposés pour les consorts [V] et [C] sont devenus sans objet en ce qu'ils concernent M. [T]. Sur le troisième moyen proposé pour M. [C] en ce qu'il concerne M. [R] Enoncé du moyen 20. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a débouté M. [C] de sa demande de réparation de son préjudice financier, alors « que l'élément de préjudice constitué par la perte d'une chance peut présenter en lui-même un caractère direct et certain chaque fois qu'est constatée la disparition, par l'effet du délit, de la probabilité d'un événement favorable, encore que, par définition, la réalisation d'une chance ne soit jamais certaine ; que pour rejeter la demande de la partie civile, l'arrêt attaqué énonce que : « la demande de dommages-intérêts de [A] [C] fondée sur la perte d'une chance, faisant valoir que les manoeuvres de [J] [T] et à un moindre degré de [K] [D] ayant eu pour conséquence l'échec du projet immobilier et une perte de rémunération, n'est pas justifiée et constitue en réalité un préjudice hypothétique sans lien direct et certain avec les infractions reprochées aux prévenus. Il en est de même pour les frais de passation du dossier « [2] » réclamés par [A] [C]. Les demandes formées au titre du préjudice financier par la partie civile seront rejetées » (page 18) ; qu'en se prononçant par ces considérations vagues et générales, sans s'expliquer sur le point de savoir si en raison du degré de probabilité de la réalisation dudit projet immobilier, mis en échec par les délits poursuivis à l'encontre du prévenu, la partie civile n'avait pas subi une perte effective du gain qu'il pouvait escompter de la réalisation de ce projet, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 21. Pour débouter M. [C] de ses demandes en réparation de son préjudice financier, l'arrêt attaqué relève que la demande de dommages et intérêts de M. [C], fondée sur la perte d'une chance, faisant valoir que les manoeuvres de MM. [T] et [R] avaient eu pour conséquence l'échec du projet immobilier et une perte de rémunération, n'est pas justifiée. 22. Les juges ajoutent que le préjudice ainsi allégué est hypothétique et sans lien direct et certain avec les infractions reprochées aux prévenus et qu'il en est de même pour les frais de passation du dossier « [2] » réclamés par M. [C]. 23. En prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision. 24. Le moyen, en ce qu'il ne concerne que M. [R], ne peut qu'être écarté. Mais sur le deuxième moyen proposé pour les consorts [V] en ce qu'il concerne M. [R] Enoncé du moyen 25. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a omis dans son dispositif de statuer sur la demande des consorts [V] à titre de réparation leur préjudice personnel et individuel chacun, alors « qu'il résulte des motifs de l'arrêt attaqué que par conclusions visées et soutenues à l'audience les parties civiles ont demandé réparation de leur préjudice personnel et individuel indépendamment du préjudice subi par l'indivision successorale (cf arrêt page 12) ; que dans le par ces motifs de ces conclusions, les parties civiles, ont demandé à la cour d'appel de « condamner solidairement Monsieur [J] [T] et [K] [D] à payer à chacun des dix concluants 100 000 euros en réparation du préjudice moral subi » ; qu'en omettant de statuer sur la demande de réparation des parties civiles en leur nom personnel, la cour d'appel a méconnu l'article 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 26. Tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; l'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 27. Pour allouer à chacune des parties civiles la somme de 3 000 euros en réparation du préjudice subi par elles en leur qualité d'héritiers membres de l'indivision [V] reprenant les actions de leurs père et mère décédés, l'arrêt attaqué relève que la demande de dommages et intérêts des consorts [V] est formée au titre des faux et de l'usage des fausses conventions traduisant la volonté de nuire manifeste de M. [T] à leur encontre, entraînant un préjudice moral. 28. En l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui a omis de se prononcer sur la demande des parties civiles de condamner M. [R] solidairement avec M. [T] à payer à chacune la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice moral subi, n'a pas justifié sa décision. 29. La cassation est à nouveau encourue de ce chef. Portée et conséquence de la cassation 30. La cassation de l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 19 septembre 2019 en toutes ses dispositions relatives à M. [T] entraîne, par voie de conséquence, la cassation de l'arrêt de ladite cour d'appel du 1er octobre 2021 en toutes ses dispositions relatives au même demandeur. 31. La cassation de l'arrêt du 1er octobre 2021 sur le deuxième moyen proposé par les consorts [V] n'est relative qu'aux dispositions civiles prononcées à l'encontre de M. [R] en ce qui concerne les demandes des parties civiles faites en leur nom personnel. 32. Il en résulte que la cour d'appel de renvoi devra se prononcer, d'une part, sur la demande d'annulation présentée par M. [T] ainsi que sur toutes les dispositions le concernant, d'autre part, sur les demandes en réparation des consorts [V] à titre personnel concernant M. [R]. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le deuxième moyen de cassation proposé pour M. [T] et le troisième moyen de cassation proposé en ce qu'il concerne M. [T], la Cour : CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Paris, en date du 19 septembre 2019, en toutes ses dispositions relatives à M. [T], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; CASSE et ANNULE, partiellement par voie de conséquence, l'arrêt de ladite cour d'appel, du 1er octobre 2021, en toutes ses dispositions relatives à M. [T] et en ses dispositions civiles relatives à la demande de dommages-intérêts faites en leur nom personnel par les consorts [V] à l'égard de M. [R], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites des cassations ainsi prononcées, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite des arrêts partiellement annulés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 183 F-D Pourvoi n° Y 21-18.804 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 L'Ecole du ski français de [2] de Couchevel 1850), dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Y 21-18.804 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2021 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant à la société Offer SRL, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 1] (Italie), défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de l'ESF de [2], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Offer SRL, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 6 avril 2021), le 14 avril 2014, le syndicat local des Moniteurs du Ski Français de [2] (l'ESF de Courchevel) a commandé auprès de la société Tricolor sport, des tenues de ski techniques destinées à équiper ses moniteurs dans l'exercice de leur activité professionnelle, avec une date de livraison fixée au 30 novembre 2014. 2. A la suite de la défaillance de son sous-traitant, la société Tricolor sport a confié la fabrication des tenues à la société Offer qui les a livrées le 25 novembre 2015. L'ESF de Courchevel a payé à cette dernière la somme de 150 000 euros. Mais n'ayant pas payé le solde des factures réclamé par la société Offer, d'un montant de 141 331,78 euros, celle-ci l'a assignée en paiement. 3. La société Tricolor sport a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 15 décembre 2015. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. L'ESF de Courchevel fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Offer la somme de 141 331,78 euros à titre de solde du prix, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2016, et de rejeter toutes ses demandes, alors « que constitue un contrat d'entreprise, et non une vente, le contrat portant sur la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui, exigeant un travail spécifique, est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordres ; que l'ESF de Courchevel faisait valoir, devant la cour d'appel, que les tenues de ski qu'elle avait commandées auprès de la société Tricolor sport, et que lui avait livrées la société Offer, répondaient à ce critère propre au contrat d'entreprise, dès lors qu'elles correspondaient à des caractéristiques précises qui n'avaient pas été déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui avaient été définies de manière à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par l'ESF ; qu'elle en tirait, notamment, la conséquence que la société Offer avait la qualité de sous-traitant et que, n'ayant pas respecté les formalités de l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, elle ne pouvait pas agir en paiement directement à son encontre ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la commande passée par l'ESF de Courchevel ne portait pas sur un travail spécifique, et en se bornant à affirmer que "l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente", pour en déduire que l'ESF était liée à la société Offer par un contrat de vente, et pour accueillir sur ce fondement la demande en paiement formée par cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779 et 1787 du code civil, ensemble l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975. » Réponse de la Cour Vu les articles 1582 et 1787 du code civil : 5. Il résulte de ces textes que constitue un contrat d'entreprise, et non un contrat de vente, le contrat portant non sur des choses déterminées à l'avance mais sur un travail spécifique destiné à répondre aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordre. 6. Pour condamner l'ESF de Courchevel à payer une certaine somme au titre du solde du prix à la société Offer, l'arrêt retient qu'elle a accepté sans réserves les marchandises qui lui ont été livrées par cette dernière, qui agissait comme propriétaire de celles-ci et à laquelle elle a payé un acompte le jour de la livraison. Il relève encore que la société Tricolor sport n'a, par la suite, jamais facturé l'ESF de Courchevel et que son liquidateur judiciaire a confirmé qu'il n'engagerait aucune procédure de recouvrement du prix des marchandises. Il ajoute que l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente. 7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitait l'ESF de Courchevel, si la commande passée par cette dernière ne portait pas sur un travail spécifique destiné à répondre à des besoins particuliers, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ; Condamne la société Offer aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Offer et la condamne à payer au syndicat local des Moniteurs du Ski Français de [2] (ESF de [2]) la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour l'Ecole du ski français de [2] (ESF de [2]). L'ESF de Courchevel fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir condamnée à payer à la société Offer SRL la somme de 141 331,78 euros à titre de solde du prix, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2016, et de l'avoir déboutée de toutes ses demandes ; 1) Alors que constitue un contrat d'entreprise, et non une vente, le contrat portant sur la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui, exigeant un travail spécifique, est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordres ; que l'ESF de Courchevel faisait valoir, devant la cour d'appel, que les tenues de ski qu'elle avait commandées auprès de la société Tricolor sport, et que lui avait livrées la société Offer SRL, répondaient à ce critère propre au contrat d'entreprise, dès lors qu'elles correspondaient à des caractéristiques précises qui n'avaient pas été déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui avaient été définies de manière à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par l'ESF (conclusions d'appel, pp. 8-12) ; qu'elle en tirait, notamment, la conséquence que la société Offer SRL avait la qualité de sous-traitant et que, n'ayant pas respecté les formalités de l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, elle ne pouvait pas agir en paiement directement à son encontre (conclusions d'appel, pp. 12-13) ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la commande passée par l'ESF de Courchevel ne portait pas sur un travail spécifique, et en se bornant à affirmer que « l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente » (arrêt attaqué, p. 6, dernier §), pour en déduire que l'ESF était liée à la société Offer SRL par un contrat de vente, et pour accueillir sur ce fondement la demande en paiement formée par cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779 et 1787 du code civil, ensemble l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ; 2) Alors qu'en tout état de cause, selon l'article 13 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, l'obligation du maître de l'ouvrage, en cas d'action directe exercée par le sous-traitant, est limitée à ce qu'il doit encore à l'entrepreneur principal à la date de réception de la copie de la mise en demeure que le sous-traitant est tenu d'adresser à l'entrepreneur principal en application de l'article 12 de ladite loi ; qu'il suit de là que le maître de l'ouvrage, contre lequel le sous-traitant agit directement, peut opposer à ce dernier la compensation avec une créance connexe qu'il détient à l'égard de l'entrepreneur principal, dès lors qu'il s'agit d'une créance certaine à la date à laquelle il reçoit copie de la mise en demeure adressée à ce dernier ; que l'ESF de Courchevel opposait subsidiairement une telle compensation à la société Offer SRL, en se prévalant de la créance qu'elle avait déclarée à la procédure collective de la société Tricolor sport au titre d'une astreinte prononcée en référé et du préjudice résultant du retard de livraison (conclusions d'appel, pp. 13-14) ; que la cour d'appel a rejeté cette exception de compensation, comme inopposable à la société Offer SRL, motif pris de l'autonomie de « la vente » prétendument conclue entre cette société et l'ESF de Courchevel (arrêt attaqué, p. 7, §§ 4 et 5) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y avait été invitée par l'ESF, si la commande passée par celle-ci auprès de la société Tricolor sport, et exécutée par la société Offer SRL, ne portait pas sur un travail spécifique, justifiant les qualifications respectives de contrat d'entreprise, s'agissant des rapports entre l'ESF et Tricolor sport, et de sous-traitance, s'agissant de l'intervention d'Offer SRL, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779, 1787 du code civil et 13 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, ensemble les articles 1289 et 1291 dudit code, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 176 F-D Pourvoi n° P 21-21.785 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Chaud et froid, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 21-21.785 contre l'arrêt rendu le 10 juin 2021 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 1), dans le litige l'opposant à la société Moteurs 60, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guillou, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Chaud et froid, de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société Moteurs 60, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 10 juin 2021), la société Moteurs 60 a vendu à la société Chaud et froid un moteur reconditionné, commandé le 18 juin 2015 sur internet par cette dernière et qui a été installé sur le véhicule de celle-ci par un tiers. A la suite de dysfonctionnements et d'une expertise réalisée par l'acquéreur, la société Moteurs 60 a, avec l'accord de ce dernier, mandaté une société pour remorquer le véhicule dans ses ateliers puis procédé à la recherche de l'origine des désordres. Le 26 octobre 2015, soutenant que ceux-ci ne lui étaient pas imputables, elle a invité la société Chaud et froid à venir récupérer le véhicule après règlement des factures de remorquage et de recherche de panne. En l'absence de règlement, elle a assigné la société Chaud et froid en paiement de ces sommes ainsi qu'en paiement de frais de gardiennage à compter du 26 octobre 2015. Examen des moyens Sur le second moyen, qui est préalable Enoncé du moyen 2. La société Chaud et froid fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Moteurs 60 la somme de 1 395 euros au titre de ses frais de remorquage et de recherche de panne, alors : « 1°/ qu'il appartient à celui qui se prétend créancier d'une obligation de le prouver ; qu'en la condamnant à payer à la société Moteurs 60 les frais de recherche de panne qu'elle avait exposés au motif "qu'en l'absence de prise en charge dans le cadre de la garantie vendeur" ils devaient être mis à la charge de la société Chaud et froid, sans constater l'existence d'un accord obligeant la société Chaud et froid à prendre en charge ces frais, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code ; 2°/ qu'il appartient à celui qui se prétend créancier d'une obligation de le prouver ; qu'en la condamnant à payer à la société Moteurs 60 les frais de remorquage du véhicule au motif que ces frais avaient été requis pour assurer la remise de la chose, sans constater l'existence d'un accord l'obligeant la société Chaud et froid à prendre en charge ces frais, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code. » Réponse de la Cour 3. Après avoir rejeté les demandes formées par la société Chaud et froid en nullité de la vente du moteur et en résolution de celle-ci pour défaut de conformité, l'arrêt retient que la société Chaud et froid a donné son accord pour un remorquage de son véhicule dans les ateliers de la société Moteurs 60 en vue de la recherche de l'origine des dysfonctionnements de celui-ci. 4. De ces constatations et appréciations, dont il résulte que les dysfonctionnements du moteur n'étaient pas imputables au vendeur, la cour d'appel a justement déduit, qu'en l'absence de prise en charge au titre de la garantie de ce dernier, les frais de remorquage payés par la société Moteurs 60 pour permettre le dépôt du véhicule dans son atelier ainsi que les frais de recherche de la panne incombaient à la société Chaud et froid. 5. Le moyen n'est donc pas fondé. Et sur le premier moyen Enoncé du moyen 6. La société Chaud et froid fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Moteurs 60 la somme de 9,30 euros HT par jour au titre des frais de gardiennage à compter du 26 octobre 2015, alors : « 1°/ qu'est présumé stipulé à titre gratuit le dépôt d'un bien fait entre les mains de celui qui l'a vendu afin que soit déterminé l'origine des désordres l'affectant et que le vendeur prenne position sur la mise en oeuvre de sa garantie ; qu'en la condamnant à verser au vendeur du moteur des frais de gardiennage du véhicule au motif que le contrat de dépôt serait présumé conclu à titre onéreux, quand elle constatait que la société Chaud et froid avait remis le véhicule au vendeur du moteur pour qu'il détermine l'origine des désordres et prenne position sur sa garantie, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1917 du code civil, ensemble l'article 1315 devenu 1353 du même code ; 2°/ qu'en toute hypothèse le contrat de dépôt est présumé conclu à titre gratuit sauf s'il est l'accessoire d'un contrat d'entreprise ; qu'en la condamnant à verser au vendeur du moteur des frais de gardiennage du véhicule au motif qu'elle l'aurait confié au vendeur, sans constater que la société Moteurs 60 aurait été chargée d'effectuer des réparations sur le moteur vendu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1917 du code civil, et de l'article 1315 devenu 1353 du même code ; 3°/ que le juge doit en toute circonstance, respecter le principe du contradictoire ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que la société Moteurs 60 serait un "garagiste" pour juger qu'elle pouvait se prévaloir de la présomption d'onérosité du contrat de dépôt conclu avec la société Chaud et froid sans rouvrir les débats ni inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 7. Après avoir retenu que les frais de recherche de panne et les frais de remorquage du véhicule incombaient à la société Chaud et froid, l'arrêt en déduit que la société Moteurs 60 est fondée à exercer son droit de rétention sur le véhicule jusqu'au paiement des factures nées à l'occasion de la recherche des causes de la panne convenue entre les parties. 8. Par ces seuls motifs, dont il résulte que la société Moteurs 60, exerçant son droit de rétention, était fondée à demander le paiement des frais de gardiennage, même si ceux-ci n'avaient pas été contractuellement prévus, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, ni violé le principe de la contradiction, a légalement justifié sa décision de ce chef. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Chaud et froid aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Chaud et froid et la condamne à payer à la société Moteurs 60 la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Chaud et froid. PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Chaud et Froid fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer à la société Moteurs 60 la somme de 9,30 euros HT par jour au titre des frais de gardiennage à compter du 26 octobre 2015 jusqu'au retrait du véhicule ; 1°) ALORS QU'est présumé stipulé à titre gratuit le dépôt d'un bien fait entre les mains de celui qui l'a vendu afin que soit déterminé l'origine des désordres l'affectant et que le vendeur prenne position sur la mise en oeuvre de sa garantie ; qu'en condamnant l'exposante à verser au vendeur du moteur des frais de gardiennage du véhicule au motif que le contrat de dépôt serait présumé conclu à titre onéreux (arrêt, p. 8, al. 7), quand elle constatait que l'exposante avait remis le véhicule au vendeur du moteur pour qu'il détermine l'origine des désordres et prenne position sur sa garantie (arrêt, p. 8, al. 1er, 3 et 6), la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1917 du code civil, ensemble l'article 1315 devenu 1353 du même code ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse le contrat de dépôt est présumé conclu à titre gratuit, sauf s'il est l'accessoire d'un contrat d'entreprise ; qu'en condamnant l'exposante à verser au vendeur du moteur des frais de gardiennage du véhicule au motif qu'elle l'aurait confié au vendeur (arrêt, p. 8, al. 3 et 7), sans constater que la société Moteurs 60 aurait été chargée d'effectuer des réparations sur le moteur vendu, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1917 du code civil et de l'article 1315 devenu 1353 du même code ; 3°) ALORS QUE le juge doit, en toute circonstance, respecter le principe du contradictoire ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de ce que la société Moteurs 60 serait un « garagiste » pour juger qu'elle pouvait se prévaloir de la présomption d'onérosité du contrat de dépôt conclu avec l'exposante (arrêt, p. 8, al. 7), sans rouvrir les débats ni inviter les parties à présenter leurs observations sur ce moyen relevé d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION La société Chaud et Froid fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée à payer à la société Moteurs 60 la somme de 1 395 euros au titre de ses frais de remorquage et de recherche de panne ; 1°) ALORS QU'il appartient à celui qui se prétend créancier d'une obligation de le prouver ; qu'en condamnant l'exposante à verser à la société Moteurs 60 les frais de recherche de panne qu'elle avait exposés au motif qu'« en l'absence de prise en charge dans le cadre de la garantie vendeur », ils devaient être mis à la charge de l'exposante (arrêt, p. 8, al. 6), sans constater l'existence d'un accord obligeant l'exposante à prendre en charge ces frais, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code ; 2°) ALORS QU'il appartient à celui qui se prétend créancier d'une obligation de le prouver ; qu'en condamnant l'exposante à verser à la société Moteurs 60 les frais de remorquage du véhicule au motif que ces frais avaient été requis pour assurer la remise de la chose (arrêt, p. 8, al. 4), sans constater l'existence d'un accord obligeant l'exposante à prendre en charge ces frais, la cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil, devenu 1353 du même code.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 175 F-D Pourvoi n° T 21-12.244 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société ABC entretien Réunion, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 21-12.244 contre l'arrêt rendu le 21 octobre 2020 par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion (chambre commerciale), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Ill & Pro, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ à la société Alliance MJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité de liquidateur de la société Ill & Pro, défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guillou, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société ABC entretien Réunion, de la SCP Doumic-Seiller, avocat de la société Alliance MJ, ès qualités, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Désistement partiel 1. Il est donné acte à la société ABC entretien Réunion du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Ill & Pro. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de la Réunion, 21 octobre 2020), le 1er septembre 2015, la société Ill & Pro et la société ABC entretien Réunion ont signé dix contrats de formation. Sur la requête de la société Ill & Pro, une ordonnance du 12 janvier 2018 a enjoint à la société ABC entretien Réunion de payer la somme de 183 715,75 euros contre laquelle cette société a formé opposition. La société Ill & Pro a été mise en liquidation judiciaire le 4 octobre 2018, la société Alliance MJ étant désignée liquidateur judiciaire. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. La société ABC entretien Réunion fait grief à l'arrêt de la condamner à verser à la société Alliance MJ, ès qualités, la somme de 116 940,75 euros au titre des prestations de formation outre intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2018, alors « qu'il appartient au prestataire de service qui demande le paiement d'une prétendue créance de démontrer non seulement l'existence du contrat mais aussi la réalité des prestations accomplies ; qu'en se contentant de la preuve par la société Alliance de l'existence de contrats engageant la société ABC Entretien, et en faisant peser sur cette dernière la preuve de l'absence du caractère effectif des formations facturées, preuve négative de surcroît impossible à rapporter, la cour d'appel a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 1315, devenu 1353, du code civil : 4. Aux termes de ce texte, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation. 5. Pour condamner la société ABC entretien Réunion à payer à la société Alliance MJ, ès qualités, la somme de 58 520 euros, l'arrêt retient que la société ABC entretien Réunion se prévaut d'une exception d'inexécution dont elle supporte cependant la charge de la preuve, et ne produit aucun élément sur ce point. Il retient encore que la société ABC entretien Réunion se prévaut des courriers de stagiaires desquels il ressort que les personnes concernées souhaitent soit interrompre momentanément la formation en conservant leur droit à celle-ci soit l'arrêter pour diverses raisons mais que ces éléments ne permettent pas d'établir que la société Ill & Pro n'a pas dispensé les formations auxquelles elle s'était engagée dans les termes des conventions conclues. 6. En statuant ainsi, alors qu'il incombait à la société Ill & Pro de prouver que les prestations avaient été réalisées, la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion autrement composée ; Condamne la société Alliance MJ, en qualité de liquidateur de la société Ill & Pro, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société ABC entretien Réunion. PREMIER MOYEN DE CASSATION La société ABC Entretien fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir condamnée à verser à la société Alliance es qualités la somme de 116.940,75 euros au titre des prestations de formation outre intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2018 ; 1°- ALORS QU'il appartient au prestataire de service qui demande le paiement d'une prétendue créance de démontrer non seulement l'existence du contrat mais aussi la réalité des prestations accomplies ; qu'en se contentant de la preuve par la société Alliance de l'existence de contrats engageant la société ABC Entretien, et en faisant peser sur cette dernière la preuve de l'absence du caractère effectif des formations facturées, preuve négative de surcroît impossible à rapporter, la Cour d'appel a violé l'article 1315 devenu 1353 du code civil ; 2°- ALORS QU'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher ainsi qu'elle y était invitée, si la preuve de l'absence de prestations accomplies ne résultait pas de la circonstance que la société Ill & Pro et la société Alliance es qualités ne versaient pas aux débats les documents tels que les programmes, plannings et objectifs préalablement déterminés, les fiches de contrôle de la présence du salarié et de son assiduité, les états de présence émargés par ce dernier, l'attestation délivrée au stagiaire à l'issue de la formation, pourtant requis par les articles L. 6353-1 et suivants, R. 6353-1 et suivants et D. 6353-4 du code du travail pour l'exécution de la formation par un organisme formateur, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1315 devenu 1353 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION La société ABC Entretien fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir condamnée à verser à la société Alliance es qualités la somme 58.520 Euros au titre de la réalisation d'un audit outre intérêts au taux légal à compter du 12 mars 2018 ; ALORS QUE lorsque le coût de la prestation n'a pas été convenu entre les parties, il incombe au prestataire, en sa qualité de demandeur, d'établir le montant de sa créance et à cet effet, de fournir les éléments permettant de fixer ce montant et il appartient au juge d'apprécier celui-ci en fonction notamment de la qualité du travail fourni ; que le juge ne peut se contenter du silence du prétendu débiteur sur le coût de la prestation dont la réalisation est contestée ; qu'en l'espèce, il résulte des propres constatations de la Cour d'appel que le coût de la prestation d'audit n'avait pas été convenu entre les parties ; qu'en se bornant, pour fixer à la somme de 58.520 euros la créance de la société Ill & Pro au titre de cette prestation, à constater que la société ABC Entretien qui conteste la réalité de la prestation ne formule aucune demande particulière s'agissant du prix de la prestation et ne justifie pas d'une réaction lors de la mise en demeure de régler la facture de 58.520 euros établie par la société Ill & Pro, quand la charge de la preuve du coût de la prestation pesait sur la société Ill & Pro et sur la société Alliance es qualités, et qu'il lui appartenait dès lors de vérifier si ce montant était justifié par le travail prétendument fourni, la Cour d'appel a violé les articles 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2013 et 1315 devenu 1353 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 182 F-D Pourvoi n° V 21-18.801 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 L'Ecole du ski français de Val d'Isère (ESF de [Localité 3]), dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 21-18.801 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2021 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant à la société Offer SRL, société de droit italien, dont le siège est [Adresse 2] (Italie), défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kass-Danno, conseiller référendaire, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de l'ESF de Val d'Isère, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Offer SRL, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Kass-Danno, conseiller référendaire rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 6 avril 2021), le 14 avril 2014, le syndicat local des Moniteurs du Ski Français de [Localité 3] (l'ESF de Val d'Isère) a commandé auprès de la société Tricolor sport, des tenues de ski techniques destinées à équiper ses moniteurs dans l'exercice de leur activité professionnelle avec une date de livraison fixée au mois de novembre 2014. 2. A la suite de la défaillance de son sous-traitant, la société Tricolor sport a confié la fabrication des tenues à la société Offer qui les a livrées les 1er et 5 décembre 2015. L'ESF de [Localité 3] a payé à cette dernière les sommes de 83 764,29 euros et de 9 431,80 euros mais n'ayant pas payé le solde des factures réclamé par la société Offer, d'un montant de 79 614,89 euros, celle-ci l'a assignée en paiement. 3. La société Tricolor sport a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 15 décembre 2015. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. L'ESF de [Localité 3] fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Offer la somme de 79 614,89 euros à titre de solde du prix, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2016, et de rejeter toutes ses demandes, alors « que constitue un contrat d'entreprise, et non une vente, le contrat portant sur la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui, exigeant un travail spécifique, est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordres ; que l'ESF de Val d'Isère faisait valoir, devant la cour d'appel, que les tenues de ski qu'elle avait commandées auprès de la société Tricolor sport, et que lui avait livrées la société Offer, répondaient à ce critère propre au contrat d'entreprise, dès lors qu'elles correspondaient à des caractéristiques précises qui n'avaient pas été déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui avaient été définies de manière à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par l'ESF ; qu'elle en tirait, notamment, la conséquence que la société Offer avait la qualité de sous-traitant et que, n'ayant pas respecté les formalités de l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, elle ne pouvait pas agir en paiement directement à son encontre ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la commande passée par l'ESF de Val d'Isère ne portait pas sur un travail spécifique, et en se bornant à affirmer que "l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente", pour en déduire que l'ESF était liée à la société Offer par un contrat de vente, et pour accueillir sur ce fondement la demande en paiement formée par cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779 et 1787 du code civil, ensemble l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975. » Réponse de la Cour Vu les articles 1582 et 1787 du code civil : 5. Il résulte de ces textes que constitue un contrat d'entreprise, et non un contrat de vente, le contrat portant non sur des choses déterminées à l'avance mais sur un travail spécifique destiné à répondre aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordre. 6. Pour condamner l'ESF de [Localité 3] au paiement d'une certaine somme au titre du solde du prix à la société Offer, l'arrêt retient qu'elle a accepté sans réserves les marchandises qui lui ont été livrées par cette dernière, qui agissait comme propriétaire de celles-ci et à laquelle elle a payé un acompte le jour de la livraison. Il relève encore que la société Tricolor sport n'a, par la suite, jamais facturé l'ESF de [Localité 3] et que son liquidateur judiciaire a confirmé qu'il n'engagerait aucune procédure de recouvrement du prix des marchandises. Il ajoute que l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente. 7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme l'y invitait l'ESF de Val d'Isère, si la commande passée par cette dernière ne portait pas sur un travail spécifique destiné à répondre à des besoins particuliers, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ; Condamne la société Offer aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Offer et la condamne à payer au syndicat local des Moniteurs du Ski Français de [Localité 3] (ESF de [Localité 3]) la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour l'Ecole du ski français de [Localité 3] (ESF de [Localité 3]). L'ESF de [Localité 3] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir condamnée à payer à la société Offer SRL la somme de 79 614,89 euros à titre de solde du prix, avec intérêts au taux légal à compter du 17 mars 2016, et de l'avoir déboutée de toutes ses demandes ; 1) Alors que constitue un contrat d'entreprise, et non une vente, le contrat portant sur la réalisation d'un produit qui ne correspond pas à des caractéristiques déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui, exigeant un travail spécifique, est destiné à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par le donneur d'ordres ; que l'ESF de Val d'Isère faisait valoir, devant la cour d'appel, que les tenues de ski qu'elle avait commandées auprès de la société Tricolor sport, et que lui avait livrées la société Offer SRL, répondaient à ce critère propre au contrat d'entreprise, dès lors qu'elles correspondaient à des caractéristiques précises qui n'avaient pas été déterminées à l'avance par le fabricant, mais qui avaient été définies de manière à satisfaire aux besoins particuliers exprimés par l'ESF (conclusions d'appel, pp. 8-12) ; qu'elle en tirait, notamment, la conséquence que la société Offer SRL avait la qualité de sous-traitant et que, n'ayant pas respecté les formalités de l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, elle ne pouvait pas agir en paiement directement à son encontre (conclusions d'appel, pp. 12-13) ; qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si la commande passée par l'ESF de Val d'Isère ne portait pas sur un travail spécifique, et en se bornant à affirmer que « l'opération par laquelle un propriétaire transfère la propriété d'une chose à une personne, après accord sur la chose et sur le prix entre eux, est une vente » (arrêt attaqué, p. 6, § 9), pour en déduire que l'ESF était liée à la société Offer SRL par un contrat de vente, et pour accueillir sur ce fondement la demande en paiement formée par cette société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779 et 1787 du code civil, ensemble l'article 12 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 ; 2) Alors qu'en tout état de cause, selon l'article 13 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, l'obligation du maître de l'ouvrage, en cas d'action directe exercée par le sous-traitant, est limitée à ce qu'il doit encore à l'entrepreneur principal à la date de réception de la copie de la mise en demeure que le sous-traitant est tenu d'adresser à l'entrepreneur principal en application de l'article 12 de ladite loi ; qu'il suit de là que le maître de l'ouvrage, contre lequel le sous-traitant agit directement, peut opposer à ce dernier la compensation avec une créance connexe qu'il détient à l'égard de l'entrepreneur principal, dès lors qu'il s'agit d'une créance certaine à la date à laquelle il reçoit copie de la mise en demeure adressée à ce dernier ; que l'ESF de [Localité 3] opposait subsidiairement une telle compensation à la société Offer SRL, en se prévalant de la créance qu'elle avait déclarée à la procédure collective de la société Tricolor sport au titre d'une astreinte prononcée en référé et du préjudice résultant du retard de livraison (conclusions d'appel, pp. 13-14) ; que la cour d'appel a rejeté cette exception de compensation, comme inopposable à la société Offer SRL, motif pris de l'autonomie de « la vente » prétendument conclue entre cette société et l'ESF de Val d'Isère (arrêt attaqué, p. 7, §§ 2 et 3) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y avait été invitée par l'ESF, si la commande passée par celle-ci auprès de la société Tricolor sport, et exécutée par la société Offer SRL, ne portait pas sur un travail spécifique, justifiant les qualifications respectives de contrat d'entreprise, s'agissant des rapports entre l'ESF et Tricolor sport, et de sous-traitance, s'agissant de l'intervention d'Offer SRL, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1582, 1779, 1787 du code civil et 13 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975, ensemble les articles 1289 et 1291 dudit code, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 177 F-D Pourvoi n° P 21-22.176 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La Société de distribution et de réparation automobile (Sodira), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 21-22.176 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-3), dans le litige l'opposant à la société CRAMA Méditerranée - Groupama Méditerranée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guillou, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la Société de distribution et de réparation automobile (Sodira), de la SARL Cabinet François Pinet, avocat de la société CRAMA Méditerranée - Groupama Méditerranée, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Guillou, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence,1er juillet 2021), le 25 mai 2018, la société EBS confort a cédé à la Société de distribution et de réparation automobile (la Sodira) une créance d'indemnité qu'elle détenait sur la société CRAMA Méditerranée - Groupama Méditerranée (la société Groupama), assureur d'un véhicule sur lequel la Sodira avait effectué des travaux à la suite d'un sinistre. La cession a été notifiée à la société Groupama par lettre recommandée du 25 mai 2018, dont l'avis de réception a été signé le 5 juin 2018. 2. La société Groupama se prévalant d'un règlement de l'indemnité à la société EBS confort avant la notification de la cession de créance, la société Sodira l'a assignée en paiement. Examen du moyen Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 3. La Sodira fait grief à l'arrêt de rejeter l'ensemble de ses demandes, alors « que le juge ne peut statuer par voie de pure affirmation et doit préciser les pièces sur lesquelles il se fonde pour affirmer l'existence d'un fait ; que, dans ses écritures d'appel, la société Groupama se bornait à alléguer, sans le démontrer, que le paiement réalisé entre les mains de la société EBS Confort avait été "décidé en amont" ; qu'en énonçant, pour juger que la société Groupama était en droit d'opposer à la société Sodira "le caractère libératoire de son paiement entre les mains du cédant", qu'il existait "des présomptions précises et concordantes de l'antériorité du paiement effectué par le débiteur cédé par rapport au moment où il a eu connaissance de la notification, le paiement ayant été prévu en amont", sans préciser sur quelle pièce elle se fondait pour considérer que le paiement avait été prévu en amont et alors que la société Groupama se fondait elle-même, pour justifier du règlement, sur une pièce n° 4 dénommée "Création et règlement" qualifié d'"ordonnancement", la cour d'appel, qui a statué par voie de pure affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 455 du code de procédure civile : 4. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. 5. Pour rejeter les demandes de la Sodira, l'arrêt relève que le paiement direct au cédant par le débiteur cédé a été effectué le jour même où celui-ci a reçu la notification de la cession de créance et retient qu'il existe des présomptions précises et concordantes de l'antériorité du paiement effectué par le débiteur cédé par rapport au moment où il a eu connaissance de la notification, le paiement ayant été prévu en amont et la notification ayant été adressée au gestionnaire du dossier de sinistre qui n'est pas l'organisme payeur. 6. En statuant ainsi, par de simples affirmations, sans préciser ni analyser les pièces sur lesquelles elle se fondait pour retenir les allégations selon lesquelles le paiement n'aurait pas été effectué le jour même de la notification mais décidé antérieurement à celle-ci, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne la société CRAMA Méditerranée - Groupama Méditerranée aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société CRAMA Méditerranée - Groupama Méditerranée et la condamne à payer à la Société de distribution et de réparation automobile (la Sodira) la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la Société de distribution et de réparation automobile (la Sodira). - sur l'opposabilité de la cession de créance à la société Groupama - La société Sodira fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de toutes ses demandes ; Alors 1°) qu'il incombe à celui qui se prétend libéré d'une obligation de justifier le paiement ou le fait qui a produit son extinction ; qu'en vertu de ce principe, il incombe au débiteur cédé, qui prétend que le paiement réalisé entre les mains du cédant l'a libéré à l'égard du cessionnaire, de démontrer que ce paiement est intervenu à un moment où la cession de créance ne lui était pas encore opposable ; que, dès lors, il incombe au débiteur cédé de démontrer avoir réglé sa dette auprès du cédant antérieurement à la notification de la cession de créance réalisée par le cessionnaire ; qu'en retenant pourtant que la société Groupama était en droit d'opposer à la société Sodira « le caractère libératoire de son paiement entre les mains du cédant », au motif que « la société Sodira ne rapportait pas la preuve que la notification de la cession de créance est intervenue avant le paiement de l'indemnité d'assurance à la victime du sinistre » (arrêt attaqué, p. 4, § 3), quand une telle preuve incombait à la société Groupama, qui se prétendait libérée de son obligation à l'égard de la société Sodira en raison de l' « ordonnancement » en date du 5 juin 2018 (pièce adverse n° 4), la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353 du code civil, ensemble l'article 1324 du même code ; Alors 2°) que le juge ne peut statuer par voie de pure affirmation et doit préciser les pièces sur lesquelles il se fonde pour affirmer l'existence d'un fait ; que, dans ses écritures d'appel, la société Groupama se bornait à alléguer, sans le démontrer, que le paiement réalisé entre les mains de la société EBS Confort avait été « décidé en amont » (conclusions d'appel de la société Groupama, p. 9, § 3) ; qu'en énonçant, pour juger que la société Groupama était en droit d'opposer à la société Sodira « le caractère libératoire de son paiement entre les mains du cédant », qu'il existait « des présomptions précises et concordantes de l'antériorité du paiement effectué par le débiteur cédé par rapport au moment où il a eu connaissance de la notification, le paiement ayant été prévu en amont » (arrêt attaqué, p. 4, § 3), sans préciser sur quelle pièce elle se fondait pour considérer que le paiement avait été prévu en amont et alors que la société Groupama se fondait elle-même, pour justifier du règlement, sur une pièce n°4 dénommée « Création et règlement » qualifié d'« ordonnancement », la cour d'appel, qui a statué par voie de pure affirmation, a violé l'article 455 du code de procédure civile ; Alors 3°) que le juge ne peut se fonder, pour admettre la matérialité d'un fait, sur des indices résultant des seules déclarations d'une partie ; qu'en énonçant, pour juger que la société Groupama était en droit d'opposer à la société Sodira « le caractère libératoire de son paiement entre les mains du cédant », que la décision de payer l'indemnité d'assurance à la société EBS Confort avait été prise en amont, ce qui constituait un indice permettant d'établir que ce paiement était intervenu antérieurement à la notification de la cession de créance, quand cet indice résultait uniquement des affirmations de la société Groupama, qui n'étaient corroborées par aucun élément de preuve, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil, ensemble l'article 1324 du même code.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Désistement Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 189 F-D Pourvoi n° M 21-25.992 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Codimatel, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 21-25.992 contre l'arrêt n° RG 19/00903 rendu le 1er septembre 2021 par la cour d'appel de Bastia (chambre civile, section 2), dans le litige l'opposant à M. [C] [O], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Codimatel, de la SCP Spinosi, avocat de M. [O], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. 1. Par acte déposé au greffe de la Cour de cassation le 16 novembre 2022, la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, agissant pour la société Codimatel, a déclaré se désister du pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 1er septembre 2021 par la cour d'appel de Bastia, au profit de M. [C] [O]. 2. Ce désistement étant intervenu après le dépôt du rapport, le 3 novembre 2022 ; dès lors, aux termes de l'article 1026 du code de procédure civile, il doit être constaté par arrêt. PAR CES MOTIFS, la Cour : DONNE ACTE à la société Codimatel du désistement de son pourvoi ; Condamne la société Codimatel aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Codimatel et la condamne à payer à M. [O] la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. SH COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 169 F-D Pourvoi n° S 21-20.224 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Thales AVS France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° S 21-20.224 contre l'arrêt rendu le 10 mai 2021 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Immersion, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Thales AVS France, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Immersion, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué, rendu en référé (Bordeaux, 10 mai 2021), les 14 octobre 2015 et 13 octobre 2017, les sociétés Thales AVS France (la société Thales), Immersion et Bertin technologies ont conclu un accord « de confidentialité » puis un accord de coopération pour un projet dénommé Uliss. 2. Soutenant que la société Thales avait violé la clause de confidentialité en mettant à la disposition d'une société tierce, la société Yokogawa Electric Corporation (la société YEC), des informations relatives au lot D3 du projet, la société Immersion l'a assignée en référé aux fins notamment de production d'une attestation de cette société YEC confirmant la destruction de l'ensemble des données reçues en lien avec le lot D3 du projet Uliss, de restitution de matériel et de paiement d'une provision. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. La société Thales fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a enfreint l'accord de confidentialité 15 TLS 009 du 14 octobre 2015 et l'accord de coopération et notamment l'article 9 relatif à la confidentialité, en conséquence de la condamner à remettre une attestation de la société YEC de destruction, non-divulgation et non-exploitation de l'ensemble des données du lot D3.4, sous astreinte, alors : « 1°/ que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; que la cour d'appel a constaté que les relations entre les parties étaient "imbriquées", que la société Immersion reconnaissait "de facto" l'implication de la société Yokogawa Electric Corporation dans le développement du projet Uliss, que les documents de suivi (DRL), établis à l'issue de leurs travaux par les partenaires, dont la société Immersion, faisaient apparaître la société Yokogawa Electric Corporation comme relecteur du sous lot D3.4 et lui reconnaissaient un droit d'accès non restreint ; que la question de savoir si la participation effective de la société Yokogawa Electric Corporation au projet ne supposait pas que la confidentialité ait été levée à son égard constituait une contestation sérieuse ; qu'en condamnant la société Thales AVS pour la violation d'une obligation de confidentialité dont la portée était sérieusement contestable, la cour d'appel a violé l'article 873 al 2 du code de procédure civile ; 2°/ que pour dire que la violation de la clause de confidentialité n'était pas sérieusement contestable, la cour d'appel a énoncé que la société Yokogawa Electric Corporation n'était pas partie à l'accord de coopération, que son intervention n'avait pas fait l'objet d'une "contractualisation" et qu'il n'était pas établi que le DRL, qui la mentionnait comme partie participante au lot D3.4 avec un droit accès complet, avait un caractère contractuel ; que la détermination de la sphère contractuelle, au-delà de sa formalisation par un écrit, constituait une contestation sérieuse ; que la cour d'appel, en la tranchant, a violé l'article 873 al 2 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 4. La société Immersion conteste la recevabilité du moyen. Elle soutient que celui-ci postule qu'elle aurait reconnu, de fait, la participation de la société YEC et qu'elle aurait ainsi, implicitement, accepté de lever l'obligation de confidentialité contractuellement prévue liant la société Thales, ce qui serait incompatible avec la thèse développée en cause d'appel par celle-ci, prétendant que la société Immersion avait accepté contractuellement que la société YEC endosse la qualité de relecteur du sous-lot D3.4. 5. Cependant, devant la cour d'appel comme devant la Cour de cassation, la société Thales fait valoir que, bien que non-signataire de l'accord de confidentialité du 14 octobre 2015 et de l'accord de coopération du 13 octobre 2017, la société YEC était partie prenante au projet de recherche Uliss, y compris au titre du sous-lot D3.4 en litige, et que cette implication supposait la communication des documents contractuels, nécessairement connue de la société Immersion. 6. Le moyen, qui n'est pas incompatible avec la thèse soutenue devant les juges du fond, est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu l'article 873 du code de procédure civile : 7. Selon le second alinéa de ce texte, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. 8. Pour dire que la société Thales a enfreint l'accord de confidentialité et l'accord de coopération, et la condamner à remettre une attestation de la société YEC, l'arrêt constate, en premier lieu, qu'il n'est pas contesté que la société Immersion était le seul contributeur du lot D3 de l'accord de coopération, en second lieu, que la société Thales reconnaît avoir communiqué à la société YEC les résultats du sous-lot D3.4 ainsi que la nature confidentielle des documents transmis. 9. Il retient qu'il incombe à la société Thales, qui conteste avoir ainsi méconnu son devoir de confidentialité, de justifier d'une contestation sérieuse en apportant aux débats les éléments de nature à établir que la société Immersion aurait reconnu à la société YEC la qualité de relecteur dans la réalisation du lot D3.4. 10. Il ajoute que la demande de soutien financier soumise le 16 octobre 2015 par les trois sociétés françaises à la direction générale de l'aviation civile mentionne la société YEC comme participant au lot 3 mais non comme relecteur du lot D3.4 et que, si la société Immersion reconnaît la nature contractuelle du plan de management du projet (le PMP) signé le 17 janvier 2017 par les trois sociétés françaises, cet acte ne mentionne la société YEC que deux fois et sans faire état d'une qualité de relecteur. 11. L'arrêt en déduit qu'aucun des actes de nature contractuelle ne prévoyant la reconnaissance d'une telle qualité par la société Immersion, la violation de la clause de confidentialité par la société Thales n'apparaît pas sérieusement discutable. 12. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a tranché une contestation sérieuse portant sur la nature contractuelle du document référence list, sur la portée de mentions figurant sur la demande de soutien financier du 16 octobre 2015 et sur celles figurant sur le PMP, ainsi que sur la qualité de la société YEC dans le projet Uliss, a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant l'ordonnance de référé, il dit que la société Thales AVS France a enfreint l'accord de confidentialité 15 TLS 009 du 14 octobre 2015 et l'accord de coopération concernant le projet Uliss, et notamment l'article 9 relatif à la confidentialité, et en conséquence la condamne à remettre une attestation de la société Yokogawa Electric Corporation confirmant la destruction, la non-divulgation et l'absence de toute exploitation ou utilisation de l'ensemble des données relatives au lot D3.4, sous astreinte, l'arrêt rendu le 10 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux autrement composée ; Condamne la société Immersion aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Immersion et la condamne à payer à la société Thales AVS France la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Thales AVS France. La société Thales AVS reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'elle avait enfreint l'accord de confidentialité 15 TLS 009 du 15 octobre 2015 et l'accord de coopération et notamment l'article 9 relatifs à la confidentialité, et de l'avoir en conséquence condamnée à remettre une attestation de la société Yokogawa Electric Corporation de destruction, non divulgation et non exploitation de l'ensemble des données du lot D3.4, sous astreinte ; 1) ALORS QUE dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président peut ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; que la cour d'appel a constaté que les relations entre les parties étaient « imbriquées », que la société Immersion reconnaissait « de facto » l'implication de la société Yokogawa Electric Corporation dans le développement du projet Uliss, que les documents de suivi (DRL), établis à l'issue de leurs travaux par les partenaires, dont la société Immersion, faisaient apparaître la société Yokogawa Electric Corporation comme relecteur du sous lot D3.4 et lui reconnaissaient un droit d'accès non restreint ; que la question de savoir si la participation effective de la société Yokogawa Electric Corporation au projet ne supposait pas que la confidentialité ait été levée à son égard constituait une contestation sérieuse ; qu'en condamnant la société Thales AVS pour la violation d'une obligation de confidentialité dont la portée était sérieusement contestable, la cour d'appel a violé l'article 873 al 2 du code de procédure civile ; 2) ALORS QUE pour dire que la violation de la clause de confidentialité n'était pas sérieusement contestable, la cour d'appel a énoncé que la société Yokogawa Electric Corporation n'était pas partie à l'accord de coopération, que son intervention n'avait pas fait l'objet d'une « contractualisation » et qu'il n'était pas établi que le DRL, qui la mentionnait comme partie participante au lot D3.4 avec un droit accès complet, avait un caractère contractuel ; que la détermination de la sphère contractuelle, au-delà de sa formalisation par un écrit, constituait une contestation sérieuse ; que la cour d'appel, en la tranchant, a violé l'article 873 al 2 du code de procédure civile.
INCA/JURITEXT000047304578.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Irrecevabilité M. VIGNEAU, président Arrêt n° 168 F-D Pourvoi n° J 21-19.067 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société MJS Partners, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], mandataire judiciaire, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Steal, a formé le pourvoi n° J 21-19.067 contre l'arrêt rendu le 9 avril 2021 par la cour d'appel d'Amiens (chambre économique), dans le litige l'opposant à la société Securitas, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société MJS Partners, ès qualités, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Securitas, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Recevabilité du pourvoi examinée d'office Vu l'article 615, alinéa 2, du code de procédure civile : 1. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application du texte susvisé. 2. En cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, le pourvoi formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance. En raison du lien d'indivisibilité qui existe, en matière d'admission des créances, entre le débiteur, le créancier contesté et le mandataire judiciaire ou le liquidateur, le pourvoi de l'un n'est, en application du texte susvisé, recevable que s'il est dirigé contre les deux autres. 3. La société MJS Partners, en qualité de liquidateur de la société Steal, s'est pourvue en cassation contre l'arrêt s'étant prononcé sur l'appel formé par elle contre l'ordonnance du juge-commissaire du 29 janvier 2020 ayant admis au passif la créance de la société Securitas. Ce pourvoi est seulement dirigé contre le créancier déclarant, à l'exclusion de la société débitrice. 4. En conséquence, le pourvoi n'est pas recevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi ; Condamne la société MJS Partners, en qualité de liquidateur de la société Steal, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
INCA/JURITEXT000047304593.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Irrecevabilité Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 190 F-D Pourvoi n° Y 20-10.842 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Investissements et intermédiation en banque et financement - IIBF, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 20-10.842 contre le jugement rendu le 23 octobre 2019 par le tribunal de commerce de Paris (8e chambre), dans le litige l'opposant à la société Orange, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de la société Investissements et intermédiation en banque et financement - IIBF, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Orange, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Recevabilité du pourvoi contestée par la défense Vu les articles 40 et 605 du code de procédure civile : 1. Selon le second des textes susvisés, le pourvoi en cassation n'est ouvert qu'à l'encontre des jugements rendus en dernier ressort. Selon le premier, le jugement qui statue sur une demande indéterminée est, sauf disposition contraire, susceptible d'appel. 2. La société IIBF s'est pourvue en cassation contre un jugement (tribunal de commerce de Paris, 23 octobre 2019) qui, statuant sur des demandes tendant au rétablissement de l'accès aux documents électroniques liés à l'abonnement souscrit, à l'annulation des sanctions mises en oeuvre par la société Orange, et à l'annulation des forfaits souscrits, sont des demandes indéterminées, a été rendu en premier ressort. 3. Le pourvoi n'est dès lors pas recevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi ; Condamne la société Investissements et intermédiation en banque et financement - IIBF aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Investissements et intermédiation en banque et financement - IIBF et la condamne à payer à la société Orange la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
INCA/JURITEXT000047304587.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 178 F-D Pourvoi n° Z 21-20.346 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 M. [I] [U], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-20.346 contre l'arrêt rendu le 5 mai 2021 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige l'opposant à la société Star Lease, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de M. [U], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 5 mai 2021), la société Formes et couleurs, gérée par M. [U], a souscrit deux crédits-bails auprès de la société Star Lease : le contrat n° 717252-00, du 10 janvier 2012, portant sur un chariot téléscopique et des accessoires, d'une durée de soixante mois, remboursable en soixante loyers mensuels et garanti par le cautionnement donné par M. [U] dans la limite de 97 500 euros, et le contrat n° 847486-00, du 7 septembre 2012, portant sur une mini pelle et des accessoires, d'une durée de quarante-huit mois, remboursable en quarante-huit loyers mensuels et garanti par le cautionnement consenti par M. [U] dans la limite de 45 500 euros. 2. La société Formes et couleurs ayant été mise en liquidation judiciaire, la société Star Lease a déclaré sa créance au titre des deux contrats, avant d'assigner M. [U] en paiement des loyers impayés et d'indemnités de résiliation, déduction faite du prix de revente des matériels. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 4. M. [U] fait grief à l'arrêt d'arrêter les créances de la société Star Lease aux sommes de 16 842,68 et de 9 340,64 euros et de le condamner à payer à cette société la somme de 26 183,32 euros, alors « que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision, que la contradiction entre les motifs de la décision équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant en l'espèce que la commission de replacement "est déduite de l'indemnité réclamée au locataire ce qui lui était donc favorable", tout en déduisant ultérieurement cette commission du prix de revente des matériels, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 455 du code de procédure civile : 5. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. La contradiction entre les motifs équivaut à un défaut de motifs. 6. Pour considérer comme inopérante la contestation soulevée par M. [U] tendant à voir juger que la commission de replacement constitue une clause pénale pouvant faire l'objet d'une réduction pour excès, l'arrêt retient, d'un côté, qu'au vu du décompte produit et de l'article 11.2 du contrat, qu'il reproduit, cette somme est déduite de l'indemnité réclamée au locataire, ce qui est favorable à ce dernier, et, de l'autre, il déduit cette commission du prix de revente des matériels loués venant lui-même diminuer le montant de l'indemnité de résiliation. 7. En statuant ainsi, alors que cette déduction de la commission s'avérait défavorable au locataire et, partant, à sa caution, M. [U], la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé. Et sur le moyen, pris en sa quatrième branche Enoncé du moyen 8. M. [U] fait le même grief à l'arrêt, alors « que c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver ; qu'en retenant en l'espèce que "la société Star Lease peut valablement déduire du prix de revente les sommes réclamées au titre des factures d'enlèvement dans la mesure où il n'est pas démontré que le locataire a assuré cette restitution ainsi que de gardiennage qui correspond à la garde du matériel" et en faisant ainsi peser sur la caution la charge de prouver qu'elle n'était pas débitrice des sommes indument réclamées, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure applicable au litige (article 1353 nouveau). » Réponse de la Cour Vu l'article 455 du code de procédure civile : 9. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs. 10. Pour écarter la contestation soulevée par M. [U] au titre de la déduction du prix de revente des matériels loués, des frais de gardiennage et d'enlèvement des matériels, l'arrêt retient qu'en application de l'article 11.2 du contrat, la société Star Lease peut valablement déduire du prix de revente les sommes réclamées au titre des factures d'enlèvement dans la mesure où il n'est pas démontré que le locataire ait assuré cette restitution ni le gardiennage qui correspond à la garde du matériel. 11. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. [U], qui soutenait qu'aucune convention ni facture de gardiennage n'étaient produites par la société Star Lease, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation Vu l'article 624 du code de procédure civile : 12. La cassation prononcée du chef de la condamnation à paiement de M. [U] entraîne, par voie de conséquence, la cassation du chef de l'arrêt qui accorde des délais de paiement à celui-ci et des chefs qui le condamnent au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il constate la recevabilité de la demande de résiliation des contrats de crédit-bail, en ce qu'il infirme le jugement en toutes ses dispositions, et en ce que, statuant de nouveau, il constate la résiliation de plein droit des contrats de crédit-bail et prononce la déchéance du droit aux intérêts, l'arrêt rendu le 5 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; Remet, sauf sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes autrement composée ; Condamne la société Star Lease aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Star Lease à payer à M. [U] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois, et signé par lui et Mme Vaissette, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour M. [U]. M. [U] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir arrêté les créances de la société Star Lease à des montants de 16.842,68 et de 9 340,64 euros et de l'avoir ainsi condamné à payer à la société Star Lease la somme de 26.183,32 euros ; 1°/ ALORS QUE, tout jugement doit être motivé à peine de nullité, le défaut de réponse à conclusions constituant un défaut de motif ; que dans ses conclusions d'appel M. [U] invoquait l'article L. 442-6, I, 2° du code de commerce dans sa version antérieure applicable au litige pour que soient réputées non écrites les diverses clauses pénales prévues par les contrats de crédit-bail de sorte qu'après imputation du prix de revente des véhicules, il n'était plus redevable d'aucune somme ; qu'en se bornant en l'espèce à relever que le crédit-preneur « conteste le caractère excessif de l'indemnité de résiliation dont il demande sa réduction sans toutefois démontrer en quoi celle-ci s'avère excessive », sans vérifier si les clauses litigieuses ne créaient pas le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties dont arguait l'intimé, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ ALORS QUE le contrat est résilié de plein droit au jour où le cocontractant est informé de la décision du liquidateur de ne pas poursuivre le contrat ; qu'en retenant que la réponse favorable du liquidateur à la demande de restitution du bien en date du 29 avril 2015 manifestait son souhait de ne pas poursuivre le contrat en cours tout en faisant remonter l'indemnité de résiliation au jour de l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 641-11-1 du code de commerce ; 3°/ ALORS QUE, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision, que la contradiction entre les motifs de la décision équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant en l'espèce que la commission de replacement « est déduite de l'indemnité réclamée au locataire ce qui lui était donc favorable », tout en déduisant ultérieurement cette commission du prix de revente des matériels, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ; 4°/ ALORS QUE, c'est à celui qui réclame l'exécution d'une obligation de la prouver ; qu'en retenant en l'espèce que « la société Star Lease peut valablement déduire du prix de revente les sommes réclamées au titre des factures d'enlèvement dans la mesure où il n'est pas démontré que le locataire a assuré cette restitution ainsi que de gardiennage qui correspond à la garde du matériel » et en faisant ainsi peser sur la caution la charge de prouver qu'elle n'était pas débitrice des sommes indument réclamées, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil dans sa version antérieure applicable au litige (article 1353 nouveau) ; 5°/ ALORS QUE le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter la peine qui avait été convenue, si elle est manifestement excessive ou dérisoire ; qu'en se bornant en l'espèce à relever que le crédit-preneur « conteste le caractère excessif de l'indemnité de résiliation dont il demande sa réduction sans toutefois démontrer en quoi celle-ci s'avère excessive », sans rechercher si le caractère excessif ne s'évinçait pas de ses constatations, à savoir que l'indemnité de résiliation comprenait cumulativement la somme des loyers non échus outre une « indemnité contractuelle » égale à 10 % de la totalité des loyers HT restant à échoir majorée du montant de l'option d'achat HT, et encore une « commission contractuelle » venant minorer de 20 % le prix de revente du matériel, la cour d'appel, a privé sa décision de base légale au regard l'article 1152 du code civil dans sa version antérieure applicable au litige (article 1231-5 nouveau).
INCA/JURITEXT000047304583.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. SMSG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 174 F-D Pourvoi n° K 21-20.747 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Edec, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 21-20.747 contre le jugement rendu le 18 mai 2021 par le tribunal de commerce de Valenciennes (1re chambre), dans le litige l'opposant à la société Eaudiofuite, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société Edec, de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Eaudiofuite, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présentes Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement (tribunal de commerce de Valenciennes,18 mai 2021), rendu en dernier ressort, début 2019, la société Edec a sollicité la société Eaudiofuite pour rechercher une fuite dans un bâtiment. La société Eaudiofuite a facturé sa prestation que la société Edec a refusé de payer, considérant que la prestation de la société Eaudiofuite était inachevée. Par ordonnance du 10 janvier 2020, la société Eaudiofuite a obtenu du président du tribunal de commerce de Valenciennes une ordonnance portant injonction de payer une certaine somme avec intérêts au taux légal, à laquelle la société Edec a formé opposition. Examen des moyens Sur le deuxième moyen, ci-après annexé 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le premier moyen Enoncé du moyen 3. La société Edec fait grief au jugement de la condamner à payer à la société Eaudiofuite la somme de 3 750 euros avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 7 octobre 2019 alors « qu'à moins que l'affaire ne soit jugée dès la première audience, le greffier du tribunal de commerce avise par lettre simple les parties qui ne l'auraient pas été verbalement de la date des audiences ultérieures ; que, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, les parties avaient été invitées par lettres recommandées à comparaitre à l'audience du 23 mars 2021 et, lors de cette audience, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 20 avril 2021 pour être évoquée, plaidée et mise en délibéré ; que, lors de cette seconde audience, la société Edec n'a pas comparu ; qu'en condamnant la société Edec à payer à la société Eaudiofuite la somme de 3 750 euros outre intérêts sans qu'il résulte du jugement que la société Edec ait été avisée de la date de renvoi de l'affaire à l'audience du 20 avril 2021, le tribunal a violé les articles 14, 16, 861 et 870 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 14, 16, 861 et 870 du code de procédure civile : 4. Il résulte de la combinaison de ces textes que le tribunal de commerce ne peut statuer à une audience postérieure à celle à laquelle les parties ont été convoquées que si ces parties ont été avisées verbalement ou par lettre simple du renvoi à cette audience. 5. Pour rejeter l'opposition formée par la société Edec, défenderesse à l'injonction de payer, le tribunal, après avoir renvoyé l'affaire à une audience ultérieure à laquelle il avait entendu la société Eaudiofuite, demanderesse à l'injonction de payer, a constaté la non-comparution de la société Edec. 6. En statuant ainsi, sans constater que la société Edec avait été avisée du renvoi de l'affaire à l'audience à laquelle a été entendue la société Eaudiofuite et à l'issue de laquelle il a été statué, le tribunal a violé les textes susvisés. Et sur le troisième moyen Enoncé du moyen 7. La société Edec fait grief au jugement de la condamner à payer à la société Eaudiofuite la somme de 3 750 euros avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 7 octobre 2019, alors « que les parties doivent se mettre mutuellement en mesure d'organiser leur défense et que le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il résulte du jugement que la société Eaudiofuite a formulé une nouvelle demande lors de l'audience du 20 avril 2021, tendant à voir appliquer à la condamnation de la société Edec le taux d'intérêt BCE majoré de 10 points plutôt que le taux d'intérêt légal retenu par l'ordonnance d'injonction de payer ; qu'en accueillant cette demande alors qu'il constatait que la société Edec n'avait pas comparu à cette audience et n'avait donc pas été avisée de cette nouvelle prétention, le tribunal a violé les articles 14, 15 et 16 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 14, 15 et 16 du code de procédure civile : 8. Il résulte de la combinaison de ces textes, que, nulle partie ne pouvant être jugée sans avoir été entendue ou appelée et les parties devant se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait et de droit qu'elles invoquent au soutien de leurs prétentions, celui qui, au cours d'une procédure orale, forme une demande additionnelle doit la faire connaître à son adversaire lorsque ce dernier ne comparaît pas à l'audience au cours de laquelle elle est formée. 9. Le jugement condamne la société Edec à payer, sur la somme allouée au principal de 3 750 euros, des intérêts au taux de la Banque centrale européenne majoré de 10 points à compter du 7 octobre 2019, alors qu'il constate que cette demande a été formulée pour la première fois à l'audience du 20 avril 2021, à laquelle la société Edec n'a pas comparu. 10. En statuant ainsi, le tribunal a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 18 mai 2021, entre les parties, par le tribunal de commerce de Valenciennes ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal de commerce de Lille Métropole ; Condamne la société Eaudiofuite aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Eaudiofuite et la condamne à payer à la société Edec la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour la société Edec. PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Edec fait grief au jugement rendu en dernier ressort et par défaut attaqué de condamner la société Edec à payer à la société Eaudiofuite la somme de 3 750 euros avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 7 octobre 2019 alors : qu'à moins que l'affaire ne soit jugée dès la première audience, le greffier du tribunal de commerce avise par lettre simple les parties qui ne l'auraient pas été verbalement de la date des audiences ultérieures ; que, selon le jugement attaqué rendu en dernier ressort, les parties avaient été invitées par lettres recommandées à comparaitre à l'audience du 23 mars 2021 et, lors de cette audience, l'affaire a été renvoyée à l'audience du 20 avril 2021 pour être évoquée, plaidée et mise en délibéré ; que, lors de cette seconde audience, la société Edec n'a pas comparu ; qu'en condamnant la société Edec à payer à la société Eaudiofuite la somme de 3 750 euros outre intérêts sans qu'il résulte du jugement que la société Edec ait été avisée de la date de renvoi de l'affaire à l'audience du 20 avril 2021, le tribunal a violé les articles 14, 16, 861 et 870 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION La société Edec fait grief au jugement rendu en dernier ressort et par défaut attaqué de condamner la société Edec à payer à la société Eaudiofuite la somme de 3 750 euros avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 7 octobre 2019 alors : 1°) qu'en se bornant à affirmer que la réalisation des prestations de la société Eaudiofuite, sur qui pesait la charge de la preuve, serait établie par la production aux débats d'un rapport de 23 pages comprenant photos et compte rendu d'investigation, sans analyser, même sommairement, ce document de manière à permettre à la Cour de cassation d'exercer son contrôle, le tribunal a violé les articles 455 et 472 du code de procédure civile ; 2°) qu'en se bornant à affirmer subsidiairement, pour accueillir sa demande, que la SARL Eaudiofuite serait tenue par une obligation de moyen et non une obligation de résultat sans aucunement justifier sa décision, le tribunal, qui a statué par un motif purement affirmatif, a violé les articles 455 et 472 du code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION La société Edec fait grief au jugement rendu en dernier ressort et par défaut attaqué de condamner la société Edec à payer à la société Eaudiofuite la somme de 3 750 euros avec intérêts au taux BCE majoré de 10 points à compter du 7 octobre 2019 alors : que les parties doivent se mettre mutuellement en mesure d'organiser leur défense et que le juge doit faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il résulte du jugement que la société Eaudiofuite a formulé une nouvelle demande lors de l'audience du 20 avril 2021, tendant à voir appliquer à la condamnation de la société Edec le taux d'intérêt BCE majoré de 10 points plutôt que le taux d'intérêt légal retenu par l'ordonnance d'injonction de payer ; qu'en accueillant cette demande alors qu'il constatait que la société Edec n'avait pas comparu à cette audience et n'avait donc pas été avisée de cette nouvelle prétention, le tribunal a violé les articles 14, 15 et 16 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 173 F-D Pourvoi n° B 21-23.246 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 M. [M] [K], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° B 21-23.246 contre l'arrêt rendu le 3 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-2), dans le litige l'opposant à la société [W] & [L], société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [K], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [W] & [L], après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 3 juin 2021), par un jugement du 4 juin 1982, la société [K] et fils a été mise en règlement judiciaire, procédure ensuite étendue à M. et Mme [K], puis convertie en liquidation des biens par un jugement du 22 octobre 1984. [V] [W] étant maintenu en ses fonctions de syndic, la liquidation des biens a été clôturée pour extinction du passif le 6 décembre 2006. 2. Le 20 octobre 2006, [V] [W] a constitué avec M. [L] une société d'exercice libéral à responsabilité limitée dénommée [W] & [L], laquelle a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 19 juin 2007, avant d'être inscrite sur la liste nationale des administrateurs judiciaires à effet au 1er juillet 2007. 3. Le 13 décembre 2007, [V] [W] a établi un acte de reddition des comptes qui a été approuvé par M. [K]. 4. Recherchant la responsabilité du syndic à raison de fautes commises dans l'exercice de son mandat, M. [K] a obtenu un arrêt rendu en référé enjoignant à [V] [W] de communiquer différentes pièces retraçant les opérations et comptes de la procédure collective. 5. [V] [W] est décédé le [Date décès 2] 2018. 6. Le 18 juillet 2019, exposant qu'il n'avait pas obtenu la production de toutes les informations réclamées, M. [K] a assigné en référé la société [W] & [L] pour qu'elle soit condamnée à justifier de la destination de sommes encaissées à l'occasion de marchés de travaux. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa troisième branche, ci-après annexé 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches Enoncé du moyen 8. M. [K] fait grief à l'arrêt de le déclarer irrecevable en ses demandes, alors : « 1°/ que l'administrateur judiciaire devenu associé d'une société d'exercice libéral d'administrateurs judiciaires ne peut plus exercer sa profession à titre individuel et doit consacrer à la société toute son activité professionnelle ; qu'en l'espèce, les juges ont eux-mêmes constaté que, après clôture le 6 décembre 2006 de la procédure de liquidation pour laquelle [V] [W] avait été désigné syndic, la société [W] & [L] avait été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 19 juin 2007, qu'elle avait été inscrite sur la liste nationale des administrateurs judiciaires à effet du 1er juillet 2007, cependant que l'acte de reddition de comptes de la mission de [V] [W], à l'origine du litige, avait été établi le 13 décembre 2007, à une date à laquelle cet acte ne pouvait être effectué qu'au nom de la société ; qu'en jugeant néanmoins M. [K] irrecevable à agir contre la société [W] & [L] au motif que celle-ci n'était pas concernée par le litige, la cour d'appel a violé les articles 20, 21 et 22 du décret n° 93-892 du 6 juillet 1993, devenus les articles R. 814-84, R. 814-85 et R. 814-86 du code de commerce ; 2°/ que la société d'exercice libéral d'administrateurs judiciaires est solidairement responsable avec ses associés des actes accomplis par eux dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'à ce titre, le débiteur qui s'estime victime d'actes accomplis par un administrateur judiciaire au cours ou au terme de la procédure collective dont il a fait l'objet est fondé à diriger ses demandes contre la société d'exercice libérale dans laquelle cet administrateur est associé ; qu'en décidant en l'espèce que M. [K], qui élevait un litige né à la suite de la reddition des comptes établis par [V] [W] à une date à laquelle celui-ci s'était associé au sein d'une société d'exercice libéral d'administrateurs judiciaires, était irrecevable à agir à l'encontre de cette société pour cette raison que celle-ci n'était pas concernée par le litige, la cour d'appel a violé l'article 16 loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990. » Réponse de la Cour 9. L'obligation de rendre ses comptes pesant personnellement sur le syndic qui cesse ses fonctions, c'est exactement que l'arrêt, ayant relevé que la liquidation des biens a été clôturée par un jugement du 20 octobre 2006 et que cette décision a mis fin à la mission de [V] [W], retient que la société [W] & [L], immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 19 juin 2007 et inscrite sur la liste nationale des administrateurs judiciaires avec effet au 1er juillet 2007, n'a pu se voir transmettre cette procédure collective, de sorte que les demandes formées contre elle par M. [K] sont irrecevables. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [K] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [K] et le condamne à payer à la société [W] & [L] la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [K]. M. [K] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déclaré irrecevable en ses demandes ; 1° ALORS QUE l'administrateur judiciaire devenu associé d'une société d'exercice libéral d'administrateurs judiciaires ne peut plus exercer sa profession à titre individuel et doit consacrer à la société toute son activité professionnelle ; qu'en l'espèce, les juges ont eux-mêmes constaté que, après clôture le 6 décembre 2006 de la procédure de liquidation pour laquelle Me [V] [W] avait été désigné syndic, la SELARL [W] & [L] avait été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 19 juin 2007, qu'elle avait été inscrite sur la liste nationale des administrateurs judiciaires à effet du 1er juillet 2007, cependant que l'acte de reddition de comptes de la mission de Me [V] [W], à l'origine du litige, avait été établi le 13 décembre 2007, à une date à laquelle cet acte ne pouvait être effectué qu'au nom de la société ; qu'en jugeant néanmoins M. [K] irrecevable à agir contre la société SELARL [W] & [L] au motif que celle-ci n'était pas concernée par le litige, la cour d'appel a violé les articles 20, 21 et 22 du décret n° 93-892 du 6 juillet 1993, devenus les articles R. 814-84, R. 814-85 et R. 814-86 du code de commerce ; 2° ALORS QUE la société d'exercice libéral d'administrateurs judiciaires est solidairement responsable avec ses associés des actes accomplis par eux dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'à ce titre, le débiteur qui s'estime victime d'actes accomplis par un administrateur judiciaire au cours ou au terme de la procédure collective dont il a fait l'objet est fondé à diriger ses demandes contre la société d'exercice libérale dans laquelle cet administrateur est associé ; qu'en décidant en l'espèce que M. [K], qui élevait un litige né à la suite de la reddition des comptes établis par Me [V] [W] à une date à laquelle celui-ci s'était associé au sein d'une société d'exercice libéral d'administrateurs judiciaires, était irrecevable à agir à l'encontre de cette société pour cette raison que celle-ci n'était pas concernée par le litige, la cour d'appel a violé l'article 16 loi n° 90-1258 du 31 décembre 1990 ; 3° ALORS QUE l'administrateur judiciaire associé au sein d'une société d'exercice libéral d'administrateurs judiciaires ne peut accomplir des actes, pour l'exercice de sa profession, qu'au nom et pour le compte de cette société ; qu'il en va de même lorsque celle-ci, bien que déjà constituée, est encore en formation, dans l'attente de son immatriculation au registre du commerce et des sociétés et de son inscription sur la liste nationale des administrateurs judiciaires ; que par suite, les actes accomplis au cours de cette période par les administrateurs judiciaires associés sont réputés l'être nom et pour le compte de la société, et être repris de plein droit au jour de son immatriculation puis de son inscription ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations des juges que la SELARL [W] & [L] avait été constituée dès le 20 octobre 2006, soit antérieurement à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société [K] et des époux [K], intervenue le 6 décembre 2006 ; qu'il en résultait que cette clôture et les actes accomplis dans l'intervalle l'avaient été au nom et pour le compte de la société, et que, en l'absence de décision contraire, cette société était réputée les avoir repris après obtention de la personnalité morale ; qu'en cantonnant néanmoins la reprise des actes accomplis pour le compte de la SELARL [W] & [L] aux seuls procédures en cours au jour de l'immatriculation et de l'inscription de cette société à la fin du premier semestre 2007, la cour d'appel a violé l'article 1843 du code civil, ensemble les articles 20, 21 et 22 du décret n° 93-892 du 6 juillet 1993, devenus les articles R. 814-84, R. 814-85 et R. 814-86 du code de commerce.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. SMSG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle sans renvoi avec retranchement M. VIGNEAU, président Arrêt n° 170 F-D Pourvoi n° H 21-21.503 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Omega systèmes Atlantique, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° H 21-21.503 contre l'arrêt rendu le 17 mai 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant à la société Menco, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Fontaine, conseiller, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de la société Omega systèmes Atlantique, de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Menco, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Fontaine, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 17 mai 2021), la société Omega systèmes Atlantique (la société Omega) a pour activité la découpe industrielle pour le secteur aéronautique. La société Menco est une société de travail temporaire. 2. Le 17 décembre 2015, elles ont signé un accord-cadre pour une durée allant jusqu'au 31 décembre 2018, ayant pour objet la mise à disposition de personnel temporaire au sein des « entités d'Omega ». 3. La société Omega ayant mis fin à cette relation contractuelle par un courriel du 3 janvier 2018, la société Menco l'a mise en demeure de lui payer la somme de 143 000 euros au titre d'une perte de marge consécutive à la rupture de la relation et à un manquement à son obligation d'exécuter de bonne foi le contrat. 4. Le 20 avril 2018, la société Menco a assigné la société Omega en paiement. Examen du moyen Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 6. La société Omega fait grief à l'arrêt de dire que l'accord-cadre du 17 décembre 2015 a été résilié par elle de manière fautive à la date du 3 janvier 2018 et de la condamner à payer à la société Menco les sommes de 5 935 euros et de 65 284 euros, alors « qu' il résulte de la combinaison des articles 4 et 5 du code de procédure civile que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer seulement sur ce qui est demandé ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appelante n° 3, la société Menco faisait valoir que du fait de la rupture de l'accord-cadre du 17 décembre 2015, elle avait subi un préjudice commercial extrêmement important, consistant dans la perte de marge sur le 2e semestre 2017 et la perte de marge sur toute l'année 2018 et réclamait la somme de 143 000 euros au titre du préjudice commercial subi ; que dans le dispositif de ses conclusions, elle demandait que la société Omega systèmes Atlantique soit condamnée à lui payer la somme de 143 000 euros, correspondant à la perte de marge sur le second semestre 2017 et l'année 2018, et à titre subsidiaire, que soit constaté que le préjudice avait été principalement subi par la société Menco et que la société Omega systèmes Atlantique soit condamnée à lui verser la somme de 120 000 euros ; que la cour d'appel, se prononçant sur les demandes de la société Menco en matière de préjudice, a notamment retenu que la société Omega ne s'était pas contractuellement engagée sur un chiffre d'affaires en matière de recrutement de personnel temporaire, et qu'il convenait en conséquence de rejeter la demande de dommages intérêts de la société Menco, relative à une perte sur marge de 143 000 euros et de confirmer le jugement de ce chef ; qu'en condamnant pourtant la société Omega systèmes Atlantique à payer à la société Menco les sommes de 5 935 euros et de 65 284 euros, à titre d'indemnité pour non-respect du préavis de 30 jours et d'indemnité complémentaire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige violant ainsi les textes susvisés. » Réponse de la Cour Vu l'article 4 du code de procédure civile : 7. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. 8. L'arrêt rejette la demande en paiement de 143 000 euros présentée par la société Menco au titre d'une perte sur marge tout en condamnant la société Omega à lui payer une indemnité de 5 935 euros pour non-respect de la durée du préavis et une somme de 65 284 euros correspondant à la moyenne de la marge brute dégagée sur les trois derniers exercices, rapportée sur les onze derniers mois de l'année 2018. 9. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, la société Menco ne formait que la demande en paiement de 143 000 euros au titre d'une perte sur marge, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 10. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 11. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que peut être retranché du dispositif le chef censuré, l'arrêt n'étant cassé qu'en ce qu'il condamne la société Omega au paiement des sommes non demandées. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, mais seulement en ce qu'il condamne la société Omega systèmes Atlantique à payer à la société Menco les sommes de 5 935 euros et 65 284 euros, l'arrêt rendu le 17 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Dit n'y avoir lieu à renvoi ; Condamne la société Menco aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour la société Omega systèmes Atlantique. La société Omega Systèmes Atlantique fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'accord-cadre du 17 décembre 2015 avait été résilié de manière fautive par la société Omega Systèmes Atlantique à la date du 3 janvier 2018 et condamné cette société à payer à la société Menco les sommes de 5 935 euros et de 65 284 euros ; 1) ALORS QUE dans ses conclusions d'appelante n° 3, la société Menco, qui se bornait à soutenir que M. [M], auteur du courriel du 3 janvier 2018, avait le pouvoir d'engager la société Omega, n'a pas prétendu que [S] [K], à qui ce courriel avait été mis en copie, était une des responsables de la société Omega ; que ce courriel du 3 janvier 2018 ne fait nullement mention que [S] [K] serait une des responsables de la société Omega ; que pour considérer que la société Omega avait pris la décision de résilier l'accord-cadre dans un courriel du 3 janvier 2018, la cour d'appel a néanmoins affirmé que « M. [M], responsable des opérations, a engagé la société Omega le 3 janvier 2018 en mettant en copie Mme [K], responsable à la société Omega, sans être démenti » ; qu'en relevant d'office le moyen tiré de la qualité de « responsable à la société Omega » de Mme [S] [K], sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d'appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l'article 16 du code de procédure civile ; 2) ALORS QU' en outre, dans ses conclusions d'intimée n° 3, la société Omega Systèmes Atlantique faisait valoir que le salarié, auteur du courriel du 3 janvier 2018, n'avait pas le pouvoir d'engager la société et qu'à défaut de ratification, la décision prise par le salarié non-habilité n'était pas valable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a considéré que la société Omega avait pris la décision de résilier l'accord-cadre dans un courriel du 3 janvier 2018, s'est bornée à affirmer que « M. [M], responsable des opérations, a engagé la société Omega le 3 janvier 2018 en mettant en copie Mme [K], responsable à la société Omega, sans être démenti », et à retenir que « de ce point de vue, la société Omega invoque à tort la nécessité d'une « ratification » sans même se référer à l'existence d'une délégation de signature, alors qu'elle n'a produit aucun document probant, en particulier un organigramme, une fiche de paie ou une décision qui formaliserait la répartition des compétences en son sein entre 2015 et 2018, ni même un extrait attesté de son chiffre d'affaires réalisé avec la société Menco ou ses comptes sociaux » ; qu'en statuant de la sorte, quand il incombait à la société Menco de rapporter la preuve de la réalité des pouvoirs de M. [M] pour engager la société, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 3) ALORS QU' au surplus, il résulte de la combinaison des articles 4 et 5 du code de procédure civile que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge doit se prononcer seulement sur ce qui est demandé ; qu'en l'espèce, dans ses conclusions d'appelante n° 3, la société Menco faisait valoir que du fait de la rupture de l'accord-cadre du 17 décembre 2015, elle avait subi un préjudice commercial extrêmement important, consistant dans la perte de marge sur le 2ème semestre 2017 et la perte de marge sur toute l'année 2018 et réclamait la somme de 143 000 euros au titre du préjudice commercial subi ; que dans le dispositif de ses conclusions, elle demandait que la société Omega Systèmes Atlantique soit condamnée à lui payer la somme de 143 000 euros, correspondant à la perte de marge sur le second semestre 2017 et l'année 2018, et à titre subsidiaire, que soit constaté que le préjudice avait été principalement subi par la société Menco et que la société Omega Systèmes Atlantique soit condamnée à lui verser la somme de 120 000 euros ; que la cour d'appel, se prononçant sur les demandes de la société Menco en matière de préjudice, a notamment retenu que la société Omega ne s'était pas contractuellement engagée sur un chiffre d'affaires en matière de recrutement de personnel temporaire, et qu'il convenait en conséquence de rejeter la demande de dommages intérêts de la société Menco, relative à une perte sur marge de 143 000 euros et de confirmer le jugement de ce chef ; qu'en condamnant pourtant la société Omega Systèmes Atlantique à payer à la société Menco les sommes de 5 935 euros et de 65 284 euros, à titre d'indemnité pour non-respect du préavis de 30 jours et d'indemnité complémentaire, la cour d'appel a méconnu les termes du litige violant ainsi les textes susvisés ; 4) ALORS QU' en tout état de cause, la résiliation fautive d'une convention à durée déterminée par anticipation n'ouvre droit qu'à l'allocation au cocontractant de dommages-intérêts dont il appartient au juge de fixer le montant ; qu'en affirmant que la résiliation fautive par la société Omega donnait droit à son cocontractant à une indemnité pour les 30 jours du préavis qui n'a pas été respecté ainsi qu'à une indemnité complémentaire correspondant à la moyenne de la marge brute dégagée sur les trois derniers exercices 2015, 2016 et 2017, rapportée sur les 11 derniers mois de l'année 2018, à l'expiration de l'accord-cadre, tout en constatant que la société Omega ne s'était pas contractuellement engagée sur un chiffre d'affaires en matière de recrutement de personnel temporaire et en rejetant la demande de dommages intérêts de la société Menco, relative à une perte sur marge de 143 000 euros, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle Mme VAISSETTE, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 172 F-D Pourvoi n° A 21-18.737 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 1°/ M. [T] [S], 2°/ M. [M] [S], domiciliés tous deux [Adresse 4], 3°/ la société SBCMJ, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Ceven'oeufs, ont formé le pourvoi n° A 21-18.737 contre l'arrêt rendu le 31 mars 2021 par la cour d'appel de Nîmes (4e chambre commerciale), dans le litige les opposant : 1°/ à la société MPH distribution, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], 2°/ à la société Koch et associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société MPH distribution, anciennement dénommée [O] & Capelle, défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Riffaud, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de MM. [T] et [M] [S] et de la société SBCMJ, ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents Mme Vaissette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Riffaud, conseiller rapporteur, Mme Bélaval, conseiller, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 31 mars 2021), par un jugement du 18 décembre 2013, la société Ceven'oeufs a été mise en redressement judiciaire. Le 28 février 2014, la société MPH distribution a déclaré une créance de 1 074 386,46 euros avant, par un acte du 28 mai 2014, de mettre en demeure MM. [T] et [M] [S], qui s'étaient rendus cautions de la société Ceven'oeufs, de lui payer la somme de 275 598,33 euros. 2. Par un jugement du 9 juin 2015, la procédure collective de la société Ceven'oeufs a été convertie en liquidation judiciaire. M. [U], désigné en qualité de liquidateur et ultérieurement remplacé par la société SBCMJ, a contesté la créance déclarée par la société MPH distribution. 3. Par une ordonnance du 21 juin 2016, le juge-commissaire s'est déclaré incompétent pour trancher la contestation de la créance. Il a renvoyé les parties à saisir la juridiction compétente et a sursis à statuer sur l'admission de la créance. 4. Un jugement du 17 novembre 2017 a rejeté la demande de la société MPH distribution tendant à l'inscription de sa créance au passif de la société Ceven'oeufs et sa demande en paiement formée contre les cautions. 5. Par un jugement du 21 novembre 2018, la société MPH distribution a été mise en redressement judiciaire. Cette procédure collective a été convertie en liquidation judiciaire par un jugement du 5 février 2020, la société [O] & Capelle, étant désignée en qualité de liquidateur. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche et sur le second moyen, ci-après annexés 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 7. Le liquidateur de la société Ceven'oeufs fait grief à l'arrêt d'inscrire au passif de ladite société une créance de 600 074,82 euros au profit de la société MPH distribution, alors « que la compétence des juridictions du fond saisies à la suite d'une décision d'incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation sérieuse relative à une créance déclarée se limite à l'examen de cette contestation, le juge-commissaire demeurant exclusivement compétent pour décider de l'admission ou du rejet de la créance ; qu'en fixant cependant "la créance chirographaire de la société MPH" au passif de la société Ceven'oeufs, dont la liquidation judiciaire avait été prononcée par un jugement du 9 juin 2015, tandis que l'admission de cette créance ne pouvait être décidée que par le juge-commissaire qui, saisi de la contestation de la créance déclarée le 28 février 2014 par la société MPH, s'était seulement déclaré incompétent pour trancher la contestation sérieuse relative à la créance, la cour d'appel a excédé l'étendue de ses pouvoirs, violant ainsi l'article L. 624-2 du code de commerce. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 624-2 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 : 8. Il résulte de ce texte que, sauf constat de l'existence d'une instance en cours, le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées et, après une décision d'incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation, les pouvoirs du juge compétent régulièrement saisi se limitent à l'examen de cette contestation. 9. Pour inscrire au passif de la société Ceven'oeufs, la créance de la société MPH distribution, l'arrêt retient que cette dernière ne répond pas précisément aux contestations formées sur le surplus de sa créance et que, sans qu'il soit nécessaire de nommer un expert, la créance sera fixée à la somme de 600 074,82 euros. 10. En statuant ainsi, alors que ses pouvoirs se limitaient à trancher les contestations soulevées par la société Ceven'oeufs et sur lesquelles le juge-commissaire s'était déclaré incompétent, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Et sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche 11. Le liquidateur de la société Ceven'oeufs fait le même grief à l'arrêt, alors « que les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des conclusions des parties ; qu'en inscrivant cependant au passif de la société Ceven'oeufs la somme de 600 074,82 euros au titre de la créance chirographaire de la société MPH distribution, aux motifs qu'il ressortait "des écritures de M. [U], ès qualités, que la société Ceven'oeufs devait à la société MPH distribution, avant le 30 novembre 2012 la somme de 228 105 euros et qu'elle ne conteste pas non plus être redevable de la somme de 290 490,04 euros ainsi que de celle de 81 479,78 euros", tandis que M. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Ceven'oeufs, admettait seulement que la société était débitrice d'une somme totale de 371 969,79 euros à l'égard de la société MPH, la cour d'appel a dénaturé ses conclusions, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis : 12. Pour fixer la créance de la société MPH distribution à la somme de 600 074,82 euros, l'arrêt retient qu'il ressort des écritures de M. [U], ès qualités, que la société Ceven'oeufs devait à la société MPH distribution avant le 30 novembre 2012, la somme de 228 105 euros et qu'elle ne conteste pas non plus être redevable de la somme de 290 490,04 euros, ainsi que celle de 81 479,78 euros. 13. En statuant ainsi, alors que le liquidateur faisait seulement valoir dans ses conclusions que la société Ceven'oeufs devait à la société MPH distribution la somme de 290 490,04 euros plus celle de 81 479,78 euros, soit la somme de 371 969,79 euros, sans y adjoindre celle de 228 105 euros, la cour d'appel, qui a dénaturé ces conclusions, a violé le principe susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il ordonne l'inscription au passif de la société Ceven'oeufs, de la créance chirographaire de la société MPH distribution pour la somme de 600 074,82 euros, l'arrêt rendu le 31 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ; Condamne la société SBCMJ, en sa qualité de liquidateur de la société Ceven'oeufs, et MM. [T] et [M] [S] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour MM. [T] et [M] [S] et la société SBCMJ, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Ceven'oeufs. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la demande de M. [U], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société Ceven'oeufs, tendant au paiement de la somme de 683.199,72 euros, et d'avoir inscrit au passif de la société Ceven'oeufs la créance chirographaire de la société MPH, pour un montant de 600.074,82 euros. 1°) alors que la compétence des juridictions du fond saisies à la suite d'une décision d'incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation sérieuse relative à une créance déclarée se limite à l'examen de cette contestation, le juge-commissaire demeurant exclusivement compétent pour décider de l'admission ou du rejet de la créance ; qu'en fixant cependant « la créance chirographaire de la société MPH » au passif de la société Ceven'oeufs, dont la liquidation judiciaire avait été prononcée par un jugement du 9 juin 2015, (arrêt, p. 11 § 11), tandis que l'admission de cette créance ne pouvait être décidée que par le juge-commissaire qui, saisi de la contestation de la créance déclarée le 28 février 2014 par la société MPH, s'était seulement déclaré incompétent pour trancher la contestation sérieuse relative à la créance, la cour d'appel a excédé l'étendue de ses pouvoirs, violant ainsi l'article L. 624-2 du code de commerce ; 2°) alors, en toute hypothèse, que dans ses conclusions d'appel, M. [O], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société MPH, demandait seulement à voir juger qu'il était « bien-fondé à solliciter l'inscription de la somme de 1.074.386,46 euros en principal à titre chirographaire au passif de la procédure de liquidation judiciaire de la société Ceven'oeufs » (concl., p. 17 § 13) ; qu'en ordonnant cependant l'inscription de la créance chirographaire de la société MPH au passif de la société Ceven'oeufs, pour un montant de 600.074,82 euros (arrêt, p. 11 § 11), que n'avait pas demandée le liquidateur, la cour d'appel a modifié l'objet du litige, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile ; 3°) alors que la compensation s'opère de plein droit entre les dettes réciproques des parties, dès lors qu'elles sont certaines, liquides et exigibles avant le prononcé du jugement d'ouverture de la procédure collective de l'une ou l'autre des parties, peu important le moment où elle est invoquée et l'absence de déclaration de la créance réciproque au passif de la procédure collective de la partie ayant introduit l'action en paiement ; qu'en jugeant cependant qu' « à défaut de justificatif d'une déclaration de créance ou d'un relevé de forclusion, la créance alléguée par M. [U], pris en sa qualité de liquidateur de la société Ceven'oeufs, est inopposable à la procédure collective de la société MPH » (arrêt, p. 8 § 4), tandis que cette créance de la société Ceven'oeufs s'était compensée de plein droit, avant le jugement d'ouverture de la procédure collective de la société MPH, avec la créance invoquée par cette dernière à hauteur de 1.074.386,46 euros, de sorte qu'elle n'avait pas à être déclarée au passif de la procédure collective de la société MPH, la cour d'appel a violé les articles 1289 et 1291 du code civil dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenus les articles 1347 et 1347-1 du code civil ; 4°) alors, subsidiairement, que les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des conclusions des parties ; qu'en inscrivant cependant au passif de la société Ceven'oeufs la somme de 600.074,82 euros au titre de la créance chirographaire de la société MPH, aux motifs qu'il ressortait « des écritures de M. [U], ès qualités, que la société Céven'oeuf devait à la société MPH avant le 30 novembre 2012 la somme de 228.105 euros et qu'elle ne conteste pas non plus être redevable de la somme de 290.490,04 euros (sa pièce 8) ainsi que de celle de 81.479,78 euros (sa pièce 10) » (arrêt, p. 8, in fine), tandis que M. [U], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Ceven'oeufs, admettait seulement que la société était débitrice d'une somme totale de 371.969,79 euros à l'égard de la société MPH (concl., p. 7, in fine), la cour d'appel a dénaturé ses conclusions, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné solidairement MM. [T] et [M] [S] à payer à M. [O], ès qualités de mandataire liquidateur de la société MPH, la somme de 275.598,33 euros en exécution de leur engagement de caution du 28 mai 2013, outre les intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 28 mai 2014 ; alors que les juges du fond ne peuvent dénaturer les stipulations claires et précises d'un contrat ; qu'en jugeant cependant que l'engagement de caution de MM. [T] et [M] [S] était valable jusqu'au 28 mai 2014 inclus, quand le contrat stipulait que « la durée du cautionnement expirera au 28 mai 2014 » (contrat, p. 2 § 1), ce dont il résultait nécessairement qu'il n'était plus valable le 28 mai 2014, la cour d'appel a dénaturé les stipulations claires et précises du contrat de cautionnement du 28 mai 2013, violant ainsi l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu les articles 1102 et 1192 du même code.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 164 F-D Pourvoi n° F 21-20.881 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Velcorex since 1828, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 21-20.881 contre l'arrêt rendu le 9 juin 2021 par la cour d'appel de Toulouse (2e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [U] [W], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de directeur général de la société JBA, 2°/ à la société JBA, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5], 3°/ à la société Benoit et associés - mandataires judiciaires, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société JBA, 4°/ au procureur général près la cour d'appel de Toulouse, domicilié en son parquet général, [Adresse 1], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Velcorex since 1828, de la SCP Spinosi, avocat de la société Benoit et associés, ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 9 juin 2021), la société JBA, fabricant et vendeur d'articles de confection, a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 20 décembre 2016 et 28 février 2017. La société Velcorex since 1828 (la société Velcorex) a revendiqué à la procédure des marchandises qu'elle avait précédemment vendues avec réserve de propriété, pour une valeur totale de 71 044,36 euros. Examen du moyen Sur le moyen 2. La société Velcorex fait grief à l'arrêt de rejeter l'intégralité de ses demandes alors : « 1°/ qu'en présence d'un inventaire incomplet, sommaire ou inexploitable, qui équivaut à l'absence d'inventaire obligatoire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce, la preuve que le bien revendiqué, précédemment détenu par le débiteur, n'existe plus en nature au jour du jugement d'ouverture, incombe au liquidateur ; que l'inventaire dont la date ne peut pas être déterminée ne constitue pas un inventaire exploitable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que par jugement du 20 décembre 2016, publié le même jour au BODACC, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert la procédure de redressement judiciaire de la société JBA et désigné la société Catherine Chausson, commissaire priseur judiciaire, à l'effet de procéder à un inventaire des biens dans un délai de quinze jours ; que pour affirmer que l'inventaire établi par le commissaire-priseur avait force probante et que la société Velcorex n'établissait pas qu'au jour du jugement d'ouverture, les marchandises objet de sa revendication existaient en nature dans les locaux de la société JBA, la cour d'appel a énoncé que si l'inventaire n'était pas daté, il avait été établi avant le 17 février 2017, soit moins de deux mois après le jugement, puisqu'il avait été transmis à cette date du 17 février par l'administrateur à la société Velcorex ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il ressortait que la date à laquelle l'inventaire avait été établi ne pouvait pas être déterminée, de sorte qu'il était inexploitable, violant ainsi les articles L. 622-6 et L. 624-16 du code de commerce et l'article 1315 devenu 1351 du code civil ; 2°/ qu'en présence d'un inventaire incomplet, sommaire ou inexploitable, qui équivaut à l'absence d'inventaire obligatoire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce, la preuve que le bien revendiqué, précédemment détenu par le débiteur, n'existe plus en nature au jour du jugement d'ouverture, incombe au liquidateur ; que, pour être complet, l'inventaire doit mentionner l'ensemble du patrimoine du débiteur, ce qui inclut les biens détenus par un tiers pour le compte de ce dernier ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'inventaire établi par le commissaire-priseur avait force probante, la cour d'appel a énoncé que ce n'est pas parce que le nom de la société Velcorex ne figurait pas sur les lots mentionnés avec réserve de propriété que l'inventaire était incomplet, de sorte que celui-ci n'établissait pas qu'au jour du jugement d'ouverture, les marchandises, objet de la revendication, existaient en nature dans les locaux de la société JBA ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il ressortait que les appelants reconnaissaient dans leurs conclusions que la revente des marchandises litigieuses n'était pas intervenue et que le dirigeant de la société JBA avait déclaré les avoir expédiées au Maroc pour être transformées, de sorte qu'elles figuraient toujours dans le patrimoine du débiteur au jour du jugement d'ouverture, quand bien même auraient-elles été détenues par un tiers pour son compte, si bien qu'elle auraient dû figurer dans cet inventaire, la cour d'appel a violé les articles L. 622-6 et L. 624-16 du code de commerce et l'article 1315 devenu 1351 du code civil ; 3°/ qu'en présence d'un inventaire incomplet, sommaire ou inexploitable, qui équivaut à l'absence d'inventaire obligatoire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce, la preuve que le bien revendiqué, précédemment détenu par le débiteur, n'existe plus en nature au jour du jugement d'ouverture, incombe au liquidateur ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'inventaire dressé par le commissaire-priseur avait force probante, la cour d'appel a énoncé que dans son ordonnance du 20 octobre 2017, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Toulouse avait précisé, sans être contredit sur ce point par les parties, que le 3 mars 2017, le commissaire-priseur avait effectué un récolement d'inventaire en faisant état d'un lot de tissus indéfinis sans qu'on puisse faire un rapprochement entre les tissus, objet de la revendication, et ceux présents au sein des locaux de la société JBA ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, dès lors qu'ils ne permettent pas d'exclure que les marchandises revendiquées existaient en nature dans le patrimoine de la société JBA au jour du jugement d'ouverture et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-6 et L. 624-16 du code de commerce et de l'article 1315 devenu 1351 du code civil ; 4°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que dans ses conclusions d'appel, la société Velcorex soutenait qu'à supposer même que l'inventaire ait été exhaustif, il était matériellement impossible que les marchandises ayant fait l'objet d'une facture n° 16037 du 2 décembre 2016 et livrées à la société JBA le 5 décembre suivant aient pu être transformées au Maroc à la date du jugement d'ouverture, soit le 20 décembre 2016 ; qu'elle produisait en ce sens, outre cette facture, une attestation du directeur de la société Velcorex du 6 avril 2017 et une déclaration du transporteur des marchandises, la société Gefco ; qu'en déboutant la société Velcorex de sa demande subsidiaire en paiement du montant de cette facture, après avoir pourtant constaté que le dirigeant de la société JBA avait déclaré avoir expédié les marchandises au Maroc, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 5°/ que lorsque le créancier revendiquant fait la preuve de la présence en nature des marchandises au jour de l'ouverture de la procédure, il appartient au débiteur ou aux organes de la procédure de fournir des explications quant au sort des marchandises litigieuses, à défaut de quoi le débiteur est condamné à lui payer leur valeur ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande en paiement de la valeur des marchandises en cause formée par la société Velcorex, créancier revendiquant, la cour d'appel a affirmé que cette société ne formait pas une action en revendication du prix au sens de l'article L. 624-18 du code de commerce mais sollicitait une restitution par équivalent correspondant à la valeur des marchandises dès lors que la restitution en nature s'avérerait impossible, que la revendication du prix ne pouvait prospérer puisque les appelants affirmaient que la revente de ces marchandises n'était pas intervenue et que les conditions de la revendication en nature n'étant pas réunies, la demande en paiement par équivalent de la valeur des marchandises ne pouvait pas davantage prospérer ; qu'en statuant ainsi, quand la circonstance que la revendication en nature des marchandises est impossible n'exclut pas la condamnation du débiteur à payer au créancier revendiquant le montant de leur valeur lorsque la revente des marchandises n'est pas intervenue, la cour d'appel a violé l'article L. 624-16 du code de commerce. » Réponse de la Cour 3. Il résulte de la combinaison des articles L. 622-6 et L. 624-16 du code de commerce qu'il appartient au revendiquant de biens mobiliers d'apporter la preuve de ce que les biens revendiqués se retrouvent en nature entre les mains du débiteur au jour de l'ouverture de la procédure collective, sous réserve de l'établissement d'un inventaire. 4. L'arrêt retient que, si l'inventaire effectué par le commissaire-priseur produit au débat n'est pas daté, il a été transmis par l'administrateur à la société Velcorex le 17 février 2017, ce qui démontre qu'il a été établi avant cette date, soit moins de deux mois après le jugement d'ouverture. Il relève, ensuite, que cet inventaire détaille avec soin les matériels et meubles se trouvant dans les entrepôts français de la société JBA et mentionne, sous la rubrique « matériel sous réserve de propriété », plusieurs lots de cartons sans aucune référence à la société Velcorex et ajoute que le procès-verbal de recollement d'inventaire réalisé le 3 mars 2017 par le commissaire-priseur fait état d'un lot de tissus indéfinis sans rapprochement possible avec ceux revendiqués. L'arrêt relève encore que l'inventaire effectué par le commissaire-priseur au sein de la société Daesher, qui aurait pu détenir la marchandise sous réserve de propriété, mentionne l'existence d'un grand nombre de tissus sans permettre l'identification de marchandises provenant de la société Velcorex. Il en déduit qu'il est impossible de connaître la destination des marchandises revendiquées qui ne sont présentes ni dans les entrepôts de la société Daesher ni dans ceux de la société Bajha qui agit sous les ordres de la société JBA. 5. De ces constatations et appréciations souveraines, d'où il résulte, d'une part, que l'inventaire prévu à l'article L. 622-6 du code de commerce avait été établi de manière satisfaisante, d'autre part, que la société Velcorex ne rapportait pas la preuve que les marchandises dont elle revendiquait la propriété existaient en nature dans le patrimoine du débiteur au jour de l'ouverture de la procédure collective, la cour d'appel a exactement déduit que les demandes de la société Velcorex en revendication et en paiement de la valeur des marchandises devaient être rejetées. 6. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Velcorex since 1828 aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Velcorex since 1828 et la condamne à payer à la société Benoit et associés, en qualité de liquidateur judiciaire de la société JBA, la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour la société Velcorex since 1828. Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la société Velcorex de l'intégralité de ses demandes, principale comme subsidiaire ; AUX MOTIFS QUE la société Velcorex, société spécialisée dans l'activité de l'ennoblissement textile, était l'un des fournisseurs de la société JBA, dont M. [W] était le dirigeant, exerçant sous l'enseigne "Paul Brial", une activité de fabrication et vente en gros, demi-gros de tous articles de confection ; que par jugement du 20 décembre 2016, publié le 20 décembre 2016 au BODACC, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert le redressement judiciaire de la société JBA et a désigné la SCP Caviglioli Baron Fouquie en qualité d'administrateur avec une mission d'assistance et la Selarl Benoît et associés en qualité de mandataire judiciaire ; que le 16 janvier 2017, la société Velcorex a formé auprès de l'administrateur une demande en revendication de biens livrés avec clause de réserve de propriété pour une valeur totale de 71 044, 36€ TTC ; que par courrier du 17 février 2017, l'administrateur a informé la société Velcorex qu'il n'acquiesçait pas à sa demande de revendication ; qu'aufond, l'opposabilité à la procédure collective de la clause de réserve de propriété dont se prévaut la société Velcorex à l'appui de son action en revendication n'est pas contestée par les appelants ; qu'aux termes de l'article L.624-16, alinéa 2, du code de commerce peuvent être revendiqués, s'ils se retrouvent en nature au moment de l'ouverture de la procédure, les biens vendus avec une clause de réserve de propriété ; que le jugement d'ouverture a désigné la Selarl Catherine Chausson, commissaire-priseur judiciaire, à l'effet de procéder contradictoirement à un inventaire des biens de la société JBA dans un délai de quinze jours ; que si l'inventaire n'est pas daté, il a été établi avant le 17 février 2017, soit à une date proche du jugement d'ouverture, en l'occurrence moins de deux mois après ce jugement, puisqu'il a été transmis à cette date du 17 février par l'administrateur à la société Velcorex ; que le commissaire-priseur, qui a détaillé avec soin les différents matériels et meubles se trouvant dans les entrepôts français de la société JBA, mentionne sous la rubrique intitulée "matériel sous réserve de propriété" un lots de cartons avec la livraison de la collection été 2017 dont une partie est suspendue. Fournisseurs : Sté Bajha Textile" et différents lots de cartons sans aucune référence à la société Velcorex ; qu'aucun autre lot ne figure, sous cette rubrique avec la mention du fournisseur société Velcorex ; que ce n'est pas parce que le nom de la société Velcorex ne figure pas sur les lots mentionnés avec réserve de propriété que l'inventaire est incomplet et dénué de valeur probante ; que dans son ordonnance, le juge-commissaire a précisé, sans être contredit sur ce point par les parties, que le 3 mars 2017, le commissaire-priseur avait effectué un recollement d'inventaire en faisant état d'un lot de tissus indéfinis sans qu'on puisse faire un rapprochement entre les tissus, objet de la revendication, et ceux présents au sein des locaux de la société JBA ; que dès lors, l'inventaire dressé par le commissaire-priseur, qui est opposable à la société revendiquante et qui a force probante, n'établit pas qu'au jour du jugement d'ouverture, les marchandises, objet de la revendication, existaient en nature dans les locaux de la société JBA ; que bien que la société JBA eût dû indiquer au commissaire-priseur si certains lot de tissus, vendus avec clause de réserve de propriété, étaient détenus par des tiers, le juge-commissaire a relevé que le liquidateur l'avait informé que le dirigeant de la société JBA lui avait déclaré avoir expédié les tissus au Maroc, auprès de façonniers pour être transformés mais qu'une partie avait été retournée par le façonnier et serait entreposée au sein de la société Daesher sous réserve de douane ; que cependant, le juge-commissaire indique que l'inventaire effectué par le commissaire-priseur au sein de la société Daesher, dont aucune des parties n'a jugé utile de produire une copie devant la cour, mentionne l'existence d'un grand nombre de rouleaux de tissus sans permettre une identification précise de la présence de marchandises provenant de la société Velcorex ; que le constat d'huissier daté du 25 mai 2017, établi par la société Bajha Textile à la demande du liquidateur révèle qu'au sein des unités de stockage et de production, il n'y avait ni marchandises, ni produits ou matières premières portant la marque commerciale de la société Velcorex ; qu'il se déduit de ces éléments qu'il est impossible de savoir la destination des marchandises, objet de la revendication, qui ne sont présentes, ni dans les entrepôts de la société Daesher, ni dans ceux de la société Bajha qui agit sous les ordres de la société BJA ; qu'il en résulte que l'existence en nature des marchandises vendues avec clause de réserve de propriété, au jour du jugement d'ouverture, au sein des locaux français de la société JBA ou au sein des locaux d'un tiers détenant les marchandises au nom et pour le compte de la société JBA n'est pas établie ; qu'il y a donc lieu d'infirmer le jugement, et par voie de conséquence l'ordonnance du juge-commissaire, en ce qu'ils ont accueilli l'action en revendication de la société Velcorex ; que l'action en revendication en nature sera rejetée ; qu'il sera observé que la société Velcorex ne forme pas une action en revendication du prix au sens de l'article L.624-18 du code de commerce mais sollicite, tant à titre principal que subsidiaire, une restitution par équivalent, correspondant à la valeur des marchandises, dès lors que la restitution en nature s'avérerait impossible ; qu'au demeurant, la revendication du prix ne pourrait prospérer puisque les appelants affirment dans leurs conclusions que la revente des marchandises litigieuses n'est pas intervenue ; que les conditions de la revendication en nature n'étant pas réunies, la demande en paiement par équivalent de la valeur des marchandises revendiquées ne peut davantage prospérer ; que la société Velcorex doit en conséquence être déboutée de ses demandes, principale comme subsidiaire ; 1) ALORS QU'en présence d'un inventaire incomplet, sommaire ou inexploitable, qui équivaut à l'absence d'inventaire obligatoire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce, la preuve que le bien revendiqué, précédemment détenu par le débiteur, n'existe plus en nature au jour du jugement d'ouverture, incombe au liquidateur ; que l'inventaire dont la date ne peut pas être déterminée ne constitue pas un inventaire exploitable ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que par jugement du 20 décembre 2016, publié le même jour au BODACC, le tribunal de commerce de Toulouse a ouvert la procédure de redressement judiciaire de la société JBA et désigné la société Catherine Chausson, commissaire priseur judiciaire, à l'effet de procéder à un inventaire des biens dans un délai de quinze jours ; que pour affirmer que l'inventaire établi par le commissaire-priseur avait force probante et que la société Velcorex n'établissait pas qu'au jour du jugement d'ouverture, les marchandises objet de sa revendication existaient en nature dans les locaux de la société JBA, la cour d'appel a énoncé que si l'inventaire n'était pas daté, il avait été établi avant le 17 février 2017, soit moins de deux mois après le jugement, puisqu'il avait été transmis à cette date du 17 février par l'administrateur à la société Velcorex ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il ressortait que la date à laquelle l'inventaire avait été établi ne pouvait pas être déterminée, de sorte qu'il était inexploitable, violant ainsi les articles L. 622-6 et L. 624-16 du code de commerce et l'article 1315 devenu 1351 du code civil ; 2) ALORS QU'en présence d'un inventaire incomplet, sommaire ou inexploitable, qui équivaut à l'absence d'inventaire obligatoire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce, la preuve que le bien revendiqué, précédemment détenu par le débiteur, n'existe plus en nature au jour du jugement d'ouverture, incombe au liquidateur ; que, pour être complet, l'inventaire doit mentionner l'ensemble du patrimoine du débiteur, ce qui inclut les biens détenus par un tiers pour le compte de ce dernier ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'inventaire établi par le commissaire-priseur avait force probante, la cour d'appel a énoncé que ce n'est pas parce que le nom de la société Velcorex ne figurait pas sur les lots mentionnés avec réserve de propriété que l'inventaire était incomplet, de sorte que celui-ci n'établissait pas qu'au jour du jugement d'ouverture, les marchandises, objet de la revendication, existaient en nature dans les locaux de la société JBA ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations dont il ressortait que les appelants reconnaissaient dans leurs conclusions que la revente des marchandises litigieuses n'était pas intervenue et que le dirigeant de la société JBA avait déclaré les avoir expédiées au Maroc pour être transformées, de sorte qu'elles figuraient toujours dans le patrimoine du débiteur au jour du jugement d'ouverture, quand bien même auraient-elles été détenues par un tiers pour son compte, si bien qu'elle auraient dû figurer dans cet inventaire, la cour d'appel a violé les articles L. 622-6 et L. 624-16 du code de commerce et l'article 1315 devenu 1351 du code civil ; 3) ALORS QU'en présence d'un inventaire incomplet, sommaire ou inexploitable, qui équivaut à l'absence d'inventaire obligatoire prévu par l'article L. 622-6 du code de commerce, la preuve que le bien revendiqué, précédemment détenu par le débiteur, n'existe plus en nature au jour du jugement d'ouverture, incombe au liquidateur ; qu'en l'espèce, pour affirmer que l'inventaire dressé par le commissaire-priseur avait force probante, la cour d'appel a énoncé que dans son ordonnance du 20 octobre 2017, le juge-commissaire du tribunal de commerce de Toulouse avait précisé, sans être contredit sur ce point par les parties, que le 3 mars 2017, le commissaire-priseur avait effectué un récolement d'inventaire en faisant état d'un lot de tissus indéfinis sans qu'on puisse faire un rapprochement entre les tissus, objet de la revendication, et ceux présents au sein des locaux de la société JBA ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, dès lors qu'ils ne permettent pas d'exclure que les marchandises revendiquées existaient en nature dans le patrimoine de la société JBA au jour du jugement d'ouverture et privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-6 et L. 624-16 du code de commerce et de l'article 1315 devenu 1351 du code civil ; 4) ALORS subsidiairement QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motifs ; que dans ses conclusions d'appel (p. 9 à 11), la société Velcorex soutenait qu'à supposer même que l'inventaire ait été exhaustif, il était matériellement impossible que les marchandises ayant fait l'objet d'une facture n° 16037 du 2 décembre 2016 et livrées à la société JBA le 5 décembre suivant aient pu être transformées au Maroc à la date du jugement d'ouverture, soit le 20 décembre 2016 ; qu'elle produisait en ce sens, outre cette facture, une attestation du directeur de la société Velcorex du 6 avril 2017 et une déclaration du transporteur des marchandises, la société Gefco (resp. ses pièces nos 9, 10 et 11 en cause d'appel) ; qu'en déboutant la société Velcorex de sa demande subsidiaire en paiement du montant de cette facture, après avoir pourtant constaté que le dirigeant de la société JBA avait déclaré avoir expédié les marchandises au Maroc, sans répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 5) ALORS QUE lorsque le créancier revendiquant fait la preuve de la présence en nature des marchandises au jour de l'ouverture de la procédure, il appartient au débiteur ou aux organes de la procédure de fournir des explications quant au sort des marchandises litigieuses, à défaut de quoi le débiteur est condamné à lui payer leur valeur ; qu'en l'espèce, pour rejeter la demande en paiement de la valeur des marchandises en cause formée par la société Velcorex, créancier revendiquant, la cour d'appel a affirmé que cette société ne formait pas une action en revendication du prix au sens de l'article L. 624-18 du code de commerce mais sollicitait une restitution par équivalent correspondant à la valeur des marchandises dès lors que la restitution en nature s'avérerait impossible, que la revendication du prix ne pouvait prospérer puisque les appelants affirmaient que la revente de ces marchandises n'était pas intervenue et que les conditions de la revendication en nature n'étant pas réunies, la demande en paiement par équivalent de la valeur des marchandises ne pouvait pas davantage prospérer ; qu'en statuant ainsi, quand la circonstance que la revendication en nature des marchandises est impossible n'exclut pas la condamnation du débiteur à payer au créancier revendiquant le montant de leur valeur lorsque la revente des marchandises n'est pas intervenue, la cour d'appel a violé l'article L. 624-16 du code de commerce.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation M. VIGNEAU, président Arrêt n° 163 F-D Pourvoi n° F 21-19.202 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Banque palatine, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 21-19.202 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2021 par la cour d'appel de Poitiers (2e chambre civile), dans le litige l'opposant à M. [G] [J], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vallansan, conseiller, les observations de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Banque palatine, de la SCP Gaschignard, Loiseau et Massignon, avocat de M. [J], et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Vallansan, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Poitiers, 15 juin 2021), le 10 septembre 2015, la société Joyaux perles gemmes (la société) a conclu avec plusieurs de ses créanciers un accord de conciliation homologué par un jugement du 7 octobre 2015. Dans le cadre de cet accord, la société Banque palatine (la banque) a consenti à la société une ligne de crédit de 70 400 euros et, le 19 mai 2016, la société a émis au bénéfice de la banque un billet à ordre du même montant, à échéance du 29 juillet 2016, garanti par l'aval de M. [J]. 2. La société ayant été placée en redressement puis liquidation judiciaires les 13 juillet et 7 septembre 2016, la banque a déclaré sa créance le 10 août suivant, puis a assigné en paiement M. [J]. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. La banque fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors « que lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation recouvre l'intégralité de ses créances et des sûretés qui les garantissaient, il ne conserve pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord, dès lors que ces sûretés portent sur des créances antérieures à l'accord de conciliation ; qu'en revanche, le bénéfice de ces sûretés est conservé pour les nouveaux concours financiers accordés dans ce cadre ; qu'en jugeant au contraire que la société Banque Palatine ne pouvait se prévaloir de l'aval garantissant un nouveau concours accordé dans le cadre de l'accord de conciliation devenu caduc, la cour d'appel a violé l'article L. 611-12 du code de commerce. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 611-12 du code de commerce : 4. Si, selon ce texte, lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier, qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation, recouvre l'intégralité de ses créances et des sûretés qui les garantissaient, il ne conserve cependant pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord en contrepartie de ces délais ou de ces abandons de créances. 5. En revanche, le créancier, qui a consenti, pour les besoins de l'accord, une avance donnant naissance à une nouvelle créance, garantie par un cautionnement ou un aval, est en mesure de demander l'exécution par la caution ou l'avaliste de cet engagement, en dépit de la caducité de l'accord. 6. Pour rejeter la demande de la banque, l'arrêt relève que la ligne de crédit de 70 400 euros, dont le remboursement par la société a été garanti par l'aval de M. [J], a été consentie par la banque dans le cadre d'un accord de conciliation homologué et en déduit que le jugement d'ouverture, qui a eu pour effet d'entraîner la caducité de l'accord dans son intégralité, en ce compris les sûretés consenties dans ce seul cadre, a mis fin à l'aval consenti par M. [J]. 7. En statuant ainsi, alors que le billet à ordre, avalisé par M. [J], avait fait naître une nouvelle créance en paiement de l'effet de commerce, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ; Condamne M. [J] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [J] et le condamne à payer à la société Banque palatine la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Marc Lévis, avocat aux Conseils, pour la société Banque palatine. La société Banque Palatine fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR déboutée de ses demandes en paiement dirigées à l'encontre de M. [J] ; ALORS QUE si, lorsqu'il est mis fin de plein droit à un accord de conciliation en raison de l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire du débiteur, le créancier qui a consenti à celui-ci des délais ou des remises de dettes dans le cadre de l'accord de conciliation recouvre l'intégralité de ses créances et des sûretés qui les garantissaient, il ne conserve pas le bénéfice des nouvelles sûretés obtenues dans le cadre de l'accord, dès lors que ces sûretés portent sur des créances antérieures à l'accord de conciliation ; qu'en revanche, le bénéfice de ces sûretés est conservé pour les nouveaux concours financiers accordés dans ce cadre ; qu'en jugeant au contraire que la société Banque Palatine ne pouvait se prévaloir de l'aval garantissant un nouveau concours accordé dans le cadre de l'accord de conciliation devenu caduc, la cour d'appel a violé l'article L. 611-12 du code de commerce.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 180 F-D Pourvoi n° K 21-24.174 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 M. [S] [D], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 21-24.174 contre l'arrêt rendu le 14 septembre 2021 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société de Keating, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bapeco, 2°/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles, domicilié en son parquet général, [Adresse 4], 3°/ à M. [U] [L], domicilié [Adresse 3], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [D], de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société de Keating, ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Brahic-Lambrey, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Désistement partiel 1. Il est donné acte à M. [D] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre le procureur général près la cour d'appel de Versailles et M. [L]. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 14 septembre 2021), la société Bapeco, ayant pour gérant M. [D] de sa création, en 2010 au 24 février 2015, M. [L] du 24 février 2015 au 6 juillet 2015, M. [D] du 6 juillet 2015 au 1er septembre 2015 et M. [L] à partir du 1er septembre 2015, a été mise en liquidation judiciaire par un jugement du 18 juillet 2016 et la société de Keating désignée liquidateur. Cette dernière a assigné les dirigeants successifs en responsabilité pour insuffisance d'actif et sanction personnelle. Examen des moyens Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa première branche, ci-après annexés 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le second moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 4. M. [D] fait grief à l'arrêt de prononcer à son encontre une interdiction de gérer d'une durée de cinq ans, alors « que le juge qui prononce une mesure d'interdiction de gérer doit motiver sa décision, tant sur le principe que sur le quantum de la sanction, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé ; que pour prononcer contre M. [D] une interdiction de gérer d'une durée de cinq années, l'arrêt se borne à retenir que les articles L. 653-5-6° et L. 653-8 du code de commerce permettent de sanctionner d'une interdiction de gérer le fait d'avoir fait disparaître des documents comptables, de ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou d'avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables et que M. [D] ne produit aucun élément ou explication sur sa situation personnelle et financière ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. L'arrêt retient que le défaut de tenue d'une comptabilité complète a privé M. [D] de toute possibilité d'évaluation de la situation de l'entreprise et a contribué à une mauvaise appréciation de celle-ci. Il met en exergue le fait que la tenue d'une comptabilité au jour le jour aurait pu éviter des impayés datant des mois de décembre 2014, juillet 2015 et août 2015. Enfin, après avoir retenu la gravité du manquement relatif à la comptabilité, il constate, avant de déterminer le quantum de l'interdiction de gérer, que M. [D] ne produit aucun élément ou explication sur sa situation personnelle et financière. En l'état de ces motifs, la cour d'appel a satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. 6. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [D] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [D] et le condamne à payer à la société de Keating, en qualité de liquidateur de la société Bapeco, la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois, et signé par lui et Mme Vaissette, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Le Prado - Gilbert, avocat aux Conseils, pour M. [D]. PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [D] reproche à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamné, solidairement avec M. [L], à payer à la SELARL de Keating, en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société Bapeco, la somme de 400 000 euros au titre de sa responsabilité pour insuffisance d'actif ; 1°) ALORS QUE, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que, pour estimer que M. [D] avait commis une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif, la cour d'appel lui a imputé à faute l'absence de tenue d'une comptabilité complète, en ce qu'il produisait les bilans et comptes de résultats pour les exercices 2012, 2013 et 2014 mais pas les livres qu'il devait tenir tant durant ces périodes que durant les mois de 2015 pendant lesquels il a également occupé les fonctions de gérant ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant que le liquidateur ne justifiait pas avoir réclamé la comptabilité à M. [D], ce dont il se déduisait qu'il ne pouvait lui être reproché a posterio de n'avoir pas produit l'ensemble des éléments comptables, production que la carence du liquidateur à les lui réclamer rendait inutile, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ; 2°) ALORS QUE, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que, pour estimer que M. [D] avait commis une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif, la cour d'appel lui a imputé à faute l'absence de tenue d'une comptabilité complète, déduite de ce qu'il n'a pas produit les livres qu'il devait tenir, l'ayant privé de toute possibilité d'évaluation de la situation de l'entreprise et ayant contribué à une mauvaise appréciation de celle-ci, étant souligné que les déclarations de créance montraient des impayés datant des mois de décembre 2014, juillet 2015 et août 2015 qu'une tenue de comptabilité au jour le jour aurait pu éviter ; qu'en postulant ainsi que la tenue des livres avait constitué une faute de gestion ayant contribué à une mauvaise appréciation par le gérant de la situation de la débitrice, après avoir pourtant relevé qu'aucune faute tirée du retard apporté à la déclaration de cessation des paiements ne lui était reprochée par le liquidateur, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ; 3°) ALORS QUE, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que, pour imputer à faute à M. [D] le défaut de paiement des dettes fiscales, la cour d'appel, après avoir relevé que la proposition de rectification de l'inspection des finances publiques mentionne qu'aucune comptabilité ne lui a été présentée lors du contrôle, un préposé du liquidateur ayant précisé qu'elle était restée dans les locaux de débitrice et que le propriétaire des murs en interdisait l'accès, s'est fondée sur cette proposition de rectification, établissant que le chiffre d'affaires durant la période contrôlée n'a pas été intégralement déclaré, que la débitrice n'a pas payé la TVA due et en a déduit indûment ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que le liquidateur avait omis de réclamer à M. [D] la comptabilité de la débitrice et que ce dernier avait produit devant elle les bilans et comptes de résultats pour les exercices 2012, 2013 et 2014, ce dont il résultait que le défaut de tenue d'une comptabilité complète qu'elle lui imputait était sans lien de causalité avec la rectification prononcée par l'administration fiscale, et que le non-paiement des dettes fiscales ne pouvait lui être personnellement imputable, la cour d'appel a violé l'article L. 651-2 du code de commerce ; 4°) ALORS, en toute hypothèse, QUE, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que, pour imputer à faute à M. [D] le défaut de paiement des dettes fiscales, la cour d'appel s'est fondée sur la proposition de rectification établie par l'inspection des finances publiques, établissant que le chiffre d'affaires durant la période contrôlée n'a pas été intégralement déclaré, que la débitrice n'a pas payé la TVA due et en a déduit indûment ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que le liquidateur avait omis d'adresser cette proposition de rectification à M. [D], ce qui lui avait interdit de la contester, la cour d'appel qui s'est déterminée par des motifs impropres à établir que le non-paiement des dettes fiscales lui était personnellement imputable, a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 651-2 du code de commerce ; 5°) ALORS, en toute hypothèse, QUE, lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion ; que, pour imputer à faute à M. [D] le défaut de paiement des dettes fiscales, la cour d'appel, après avoir relevé que la proposition de rectification de l'inspection des finances publiques mentionne qu'aucune comptabilité ne lui a été présentée lors du contrôle, un préposé du liquidateur ayant précisé qu'elle était restée dans les locaux de débitrice et que le propriétaire des murs en interdisait l'accès, s'est fondée sur cette proposition de rectification, établissant que le chiffre d'affaires durant la période contrôlée n'a pas été intégralement déclaré, que la débitrice n'a pas payé la TVA due et en a déduit indûment ; qu'en statuant ainsi, tout en constatant que le liquidateur avait omis de réclamer à M. [D] la comptabilité de la débitrice, et sans considérer qu'il revenait au seul gérant de la débitrice, au moment du contrôle fiscal, de présenter à l'administration fiscale ladite comptabilité, ni relever que M. [D] aurait été informé de ce contrôle, la cour d'appel, qui s'est déterminée par des motifs impropres à établir le non-paiement des dettes fiscales lui était personnellement imputable, a violé l'article L. 651-2 du code de commerce. SECOND MOYEN DE CASSATION M. [D] reproche à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé à son encontre une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale pour une durée de cinq ans ; 1°) ALORS QUE la cour d'appel s'étant fondée, pour prononcer une sanction personnelle à l'encontre de M. [D], sur l'absence de tenue d'une comptabilité complète qu'elle lui avait imputée pour le condamner à supporter une partie de l'insuffisance d'actif, la cassation à intervenir sur le premier moyen entrainera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, celle du chef de l'arrêt prononçant à son encontre une sanction personnelle ; 2°) ALORS QUE le juge qui prononce une mesure d'interdiction de gérer doit motiver sa décision, tant sur le principe que sur le quantum de la sanction, au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l'intéressé ; que pour prononcer contre M. [D] une interdiction de gérer d'une durée de cinq années, l'arrêt se borne à retenir que les articles L. 653-5-6° et L. 653-8 du code de commerce permettent de sanctionner d'une interdiction de gérer le fait d'avoir fait disparaître des documents comptables, de ne pas avoir tenu de comptabilité lorsque les textes applicables en font obligation, ou d'avoir tenu une comptabilité fictive, manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions applicables et que M. [D] ne produit aucun élément ou explication sur sa situation personnelle et financière ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 166 F-D Pourvoi n° F 20-20.141 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 La société Arganeau, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], anciennement dénommée société HPVI, a formé le pourvoi n° F 20-20.141 contre l'arrêt rendu le 24 juin 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5 - chambre 3), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [Y] [E], domicilié [Adresse 4], 2°/ à M. [H] [R], domicilié [Adresse 1], 3°/ à la société Edeis, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], 4°/ à la société Rolesco, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 6], 5°/ à la société Dimaf, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 7], 6°/ à la société Tefa industries, dont le siège est [Adresse 8], 7°/ à la société Archibald, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], prise en qualité de liquidateur judiciaire de la société Tefa industries, défendeurs à la cassation. M. [E] et la société Rolesco ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt. M. [R] et la société Edeis ont formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt. M. [E] et la société Rolesco, demandeurs au pourvoi incident, invoquent, à l'appui de leur recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. M. [R] et la société Edeis, demandeurs au pourvoi incident éventuel, invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Arganeau, de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [E] et de la société Rolesco, de la SCP Spinosi, avocat de M. [R] et de la société Edeis, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Reprise d'instance 1. Il est donné acte à la société Arganeau de ce qu'elle reprend l'instance aux lieu et place de la société HPVI. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 24 juin 2020), la société Tefa industries (la locataire) est devenue preneuse à bail commercial de locaux initialement loués par la société HPVI, devenue la société Arganeau (la bailleresse), en exécution d'un plan de cession du preneur d'origine, la société Tefa industries, mise en redressement judiciaire, dont les sociétés Sogequip groupe et Rolesco, aux droits desquelles viennent les sociétés Edeis et Rolesco, se sont portées garantes solidaires. 3. Le 9 février 2010, la locataire a été mise en liquidation judiciaire, la société Archibald étant désignée liquidateur. La bailleresse a déclaré des créances qui ont été contestées. 4. Le 15 juin 2017, une cour d'appel a infirmé l'ordonnance par laquelle le juge-commissaire avait admis les créances et a invité la société HPVI à saisir la juridiction du fond compétente pour trancher les contestations, dans le délai d'un mois à peine de forclusion à compter de la signification de son arrêt et d'en justifier avant le 4 août 2017 et sursis à statuer jusqu'au 21 septembre 2017 ou, s'il est justifié de la saisine effective de la juridiction du fond avant cette date, jusqu'à la décision définitive de celle-ci. 5. La bailleresse a saisi le tribunal dans le délai imparti en fixation de ses créances au passif de la locataire et en condamnation des sociétés Edeis et Rolesco au paiement de ses créances. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses deuxième à neuvième branches, et sur les troisième et quatrième moyens du pourvoi principal de la société Arganeau, le premier moyen, pris en sa seconde branche, et le second moyen du pourvoi incident de M. [R] et de la société Edeis, et les trois moyens du pourvoi incident de la société Rolesco et de M. [E], ci-après annexés 6. La troisième chambre civile de la Cour de cassation a délibéré sur ces moyens, sur l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats à l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents Mme Teiller, présidente, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Aldigé, conseiller référendaire rapporteur, Mme Berdeaux, greffier de chambre. 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le sixième moyen du pourvoi principal, ci-après annexé 8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi incident de M. [R] et de la société Edeis, ci-après annexé 9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal 10. La troisième chambre civile de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, sur l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats à l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents Mme Teiller, présidente, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Aldigé, conseiller référendaire rapporteur, Mme Berdeaux, greffier de chambre. Enoncé du moyen 11. La bailleresse fait grief à l'arrêt de dire que sa créance à l'égard de la locataire s'élève à 195 323 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'état des locaux restitués, alors « que le preneur doit réparer l'entier préjudice qu'il a causé au bailleur en raison du manquement à son obligation d'entretien ; que la cour d'appel avait constaté que le locataire avait manqué à son obligation d'entretien, de sorte qu'il lui appartenait de réparer l'entier préjudice causé, évalué par l'expert judiciaire à la somme de 488 308 euros ; qu'en limitant la réparation accordée au locataire à 40 % du montant retenu par l'expert aux motifs qu'il convenait d'appliquer "un coefficient d'usure liée à la vétusté" des locaux loués qui étaient en état d'usage lors de la conclusion du contrat, la cour d'appel, qui n'a pas replacé le bailleur dans la situation dans laquelle il se serait trouvé en l'absence de la faute du preneur, a violé les articles 1730 et 1732 du code civil. » Réponse de la Cour 12. Sauf clause expresse mettant à la charge du locataire les réparations résultant de la vétusté, aucune des réparations réputées locatives n'est à la charge du locataire quand elles ne sont occasionnées que par vétusté, laquelle est souverainement appréciée par les juges du fond. 13. La cour d'appel a constaté, d'une part, qu'à l'entrée dans les lieux de la locataire, les locaux, construits dans les années 1970 et 1980, étaient en état d'usage et souffraient déjà d'un manque d'entretien du précédent locataire, d'autre part, que les plaques de la toiture étaient vétustes, ce dont il s'évinçait que certains désordres ne relevaient pas des réparations locatives à la charge de la locataire, mais étaient imputables à la vétusté. 14. Dès lors, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'entrer dans le détail de son calcul, a pu évaluer, comme elle l'a fait, le coût de la remise en état des locaux loués incombant à la locataire en tenant compte d'un coefficient de vétusté. 15. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le cinquième moyen du pourvoi principal 16. La troisième chambre civile de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, sur l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats à l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents Mme Teiller, présidente, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Aldigé, conseiller référendaire rapporteur, Mme Berdeaux, greffier de chambre. Enoncé du moyen 17. La bailleresse fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes de condamnation des sociétés Rolesco et Edeis, alors : « 1°/ que le tiers complice de la violation d'une obligation contractuelle est tenu de réparer le préjudice qui en résulte ; qu'en l'espèce, le bailleur avait appris au cours de l'expertise de M. [Z] [M] que le locataire avait consenti des sous-locations irrégulières et frauduleuses aux sociétés Rolesco et Edeis, lesquelles connaissaient parfaitement les termes du bail pour être associées de la société Tefa industries, locataire principal, de sorte qu'étant complices de la violation du bail elles devaient réparer le préjudice tiré de la perte des sous-loyers constitutifs de fruits civils qui revenaient au bailleur ; qu'en rejetant cette demande aux motifs que le bailleur ne rapportait pas la preuve du préjudice subi du fait des sous-locations non autorisées, lequel était pourtant constitué par la perte des sous-loyers qui, en leur qualité de fruits civils du bien loué, revenaient au bailleur, la cour d'appel a violé les articles 1382 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 546 et 547 du code civil ; 2°/ que le tiers complice de la violation d'une obligation contractuelle est tenu de réparer le préjudice qui en résulte ; qu'en rejetant la demande d'indemnisation formée à l'encontre des sous-locataires aux motifs que les sous-locations avaient pris fin avant la restitution des locaux et qu'il n'était pas démontré que le montant du loyer de ces sous-locations aurait excédé le montant du loyer dû par le locataire principal, la cour d'appel, qui s'est prononcée par motifs inopérants, a violé les articles 1382 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 546 et 547 du code civil. » Réponse de la Cour 18. D'une part, la cour d'appel, après avoir constaté que les sous-locations avaient pris fin avant la restitution des locaux et qu'il n'était pas démontré que le montant des loyers y afférents aurait excédé le montant du loyer dû par le locataire principal, a souverainement estimé que la bailleresse ne rapportait pas la preuve d'un préjudice consécutif aux sous-locations. 19. D'autre part, la cour d'appel, après avoir exactement énoncé que le bailleur ne peut exercer une action directe contre le sous-locataire dans la limite du sous-loyer qu'en cas de défaillance du locataire principal, et constaté que tel n'était pas le cas en l'espèce, a, à bon droit, alors que seul le locataire est tenu de restituer au propriétaire les sous-loyers constitutifs de fruits civils lorsque la sous-location n'a pas été autorisée par le bailleur, rejeté la demande de remboursement des sous-loyers dirigée par la bailleresse contre les sous-locataires. 20. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal 21. La troisième chambre civile de la Cour de cassation a délibéré sur ce moyen, sur l'avis de M. Sturlèse, avocat général, après débats à l'audience publique du 14 juin 2022 où étaient présents Mme Teiller, présidente, M. Echappé, conseiller doyen, Mme Aldigé, conseiller référendaire rapporteur, Mme Berdeaux, greffier de chambre. Enoncé du moyen 22. La bailleresse fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnisation au titre des remises de loyers accordées au nouveau locataire, alors « que le preneur doit réparer l'intégralité du préjudice causé par sa faute au bailleur ; qu'en l'espèce, en raison du défaut d'entretien des lieux loués par l'ancien locataire, l'exposante avait été contrainte de relouer le bien dès le 1er juillet 2009 en accordant d'importantes remises au nouveau locataire, de sorte qu'elle n'avait pu percevoir au second semestre de l'année 2009 que 12 000 euros du nouveau locataire, "lequel n'avait commencé à payer des loyers normaux (?) que début 2010" ; qu'en rejetant toute indemnisation de ce chef aux motifs que le bailleur avait déjà été indemnisé au titre de l'état des locaux restitués, quand le préjudice tiré de la remise en état des locaux était distinct de celui lié à la relocation du bien à des conditions défavorables, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. » Réponse de la Cour Vu l'article 1732 et l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : 23. Aux termes du premier de ces textes, le preneur répond des dégradations ou des pertes qui arrivent pendant sa jouissance, à moins qu'il ne prouve qu'elles ont eu lieu sans sa faute. 24. Il résulte du second et du principe de réparation intégrale du préjudice que les dommages et intérêts alloués à une victime doivent réparer le préjudice subi, sans qu'il en résulte pour elle ni perte ni profit. 25. Pour rejeter la demande de dommages et intérêts relative aux remises de loyers accordées au nouveau locataire en raison de l'état des locaux, l'arrêt retient que la bailleresse a déjà été indemnisée au titre du préjudice résultant de l'état des locaux restitués. 26. En statuant ainsi, alors que l'indemnisation du coût de la remise en état des locaux à raison des dégradations affectant le bien loué consécutivement à l'inexécution par la locataire de ses obligations ne réparait pas le préjudice allégué par la bailleresse d'avoir dû relouer le bien à des conditions défavorables, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR [E] MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de la société Arganeau formées au titre des remises de loyers accordées au nouveau locataire, l'arrêt rendu le 24 juin 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Rejette le pourvoi incident de la société Rolesco et de M. [E] et le pourvoi incident de M. [R] et de la société Edeis ; Condamne la société Tefa industries et la société Archibald, en qualité de liquidateur de cette société, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Arganeau, anciennement dénommée société HPVI PREMIER MOYEN DE CASSATION La société HPVI fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que la créance de la société HPVI à l'égard de la société Tefa Industries s'élevait à 195 323 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'état des locaux restitués, 1°/ ALORS QUE le preneur doit réparer l'entier préjudice qu'il a causé au bailleur en raison du manquement à son obligation d'entretien ; que la cour d'appel avait constaté que le locataire avait manqué à son obligation d'entretien, de sorte qu'il lui appartenait de réparer l'entier préjudice causé, évalué par l'expert judiciaire à la somme de 488 308 € (rapp. [U], prod. 7) ; qu'en limitant la réparation accordée au locataire à 40% du montant retenu par l'expert aux motifs qu'il convenait d'appliquer « un coefficient d'usure liée à la vétusté » des locaux loués qui étaient en état d'usage lors de la conclusion du contrat (arrêt attaqué, p. 16), la cour d'appel, qui n'a pas replacé le bailleur dans la situation dans laquelle il se serait trouvé en l'absence de la faute du preneur, a violé les articles 1730 et 1732 du code civil. 2°/ ALORS QUE la faute d'un tiers qui a concouru à la réalisation du dommage n'est pas de nature à limiter la responsabilité du débiteur de l'obligation inexécutée ; qu'en limitant la responsabilité du preneur pour manquement à son obligation d'entretien aux motifs inopérants que les locaux loués « souffraient déjà d'un manque d'entretien du précédent locataire » qui n'était pas imputable au preneur (arrêt attaqué, p. 16), quand la faute du preneur avait nécessairement concouru au dommage consistant dans la dégradation des lieux loués, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. 3°/ ALORS QUE le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens qu'il a relevé d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en limitant la réparation due au bailleur en relevant d'office le moyen tiré du fait que le coût du démoussage se trouvait renchéri par l'état de vétusté des tôles ondulées, lequel était imputable au bailleur (arrêt attaqué, p. 16), sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. 4°/ ALORS QU'il appartient au débiteur contractuel qui invoque un partage de responsabilité d'établir que le comportement du créancier est constitutif d'une faute ayant participé à la réalisation du dommage ; qu'en limitant la responsabilité du preneur aux motifs que le coût du démoussage est renchéri par l'état de vétusté des tôles ondulées, lequel était « imputable » au bailleur » (arrêt attaqué, p. 16), sans préciser le comportement du bailleur qui aurait été constitutif d'une faute contractuelle qui était seule de nature à limiter la responsabilité du preneur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. 5°/ ALORS QUE le preneur doit réparer l'entier préjudice qu'il a causé au bailleur en raison du manquement à son obligation d'entretien ; qu'en retenant que le coût du démoussage était renchéri par la vétusté des tôles ondulées, sans évaluer précisément le montant du renchérissement dont elle affirmait l'existence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. 6°/ ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les termes du litige ; qu'en l'espèce, le bailleur sollicitait une indemnisation au titre de la remise en état des locaux telle qu'elle avait été évaluée par l'expert à la somme de 488 308 € (concl. d'appel, p. 27 s.) ainsi qu'une indemnisation distincte au titre des remises accordées au nouveau locataire (concl. d'appel, p. 39), invoquant de ce chef deux préjudices distincts ; qu'en limitant l'indemnisation accordée au titre de la remise en état des lieux aux motifs que le préjudice subi par le preneur ne pouvait être équivalent à la remise accordée au nouveau locataire, puisque les travaux effectués par ce dernier étaient des travaux d'adaptation, que les grosses réparations avaient été transférées au nouveau locataire et que le loyer avait été augmenté, la cour d'appel, qui a analysé la demande comme portant sur un chef de préjudice unique, a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile. 7°/ ALORS QUE, en tout état de cause, l'indemnisation du bailleur, à raison des dégradations affectant l'immeuble loué qui sont la conséquence de l'inexécution par le preneur de ses obligations, n'est pas subordonnée à l'exécution des réparations par le bailleur ni à l'engagement effectif de dépenses ; qu'en limitant la réparation due au bailleur à 40 % du préjudice évalué par l'expert aux motifs que les travaux effectués par le nouveau locataire, s'ils avaient permis de remettre en état les locaux, étaient essentiellement des travaux d'adaptation aux nouvelles activités (arrêt attaqué, p. 16), la cour d'appel, qui s'est prononcée par motifs inopérants dès lors que le bailleur n'avait pas même à justifier de l'exécution des réparations, a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. 8°/ ALORS QUE la réparation du préjudice doit être intégrale ; qu'en limitant la réparation due au bailleur à 40 % du préjudice évalué par l'expert aux motifs que les grosses réparations et celles résultant de la vétusté avaient été transmises au nouveau locataire (arrêt attaqué, p. 16), circonstance qui n'était pourtant pas de nature à limiter le préjudice tiré du défaut d'entretien imputable au locataire puisqu'elle n'influait pas sur le coût de la remise en état, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. 9°/ ALORS QUE la réparation du préjudice doit être intégrale ; qu'en limitant la réparation due au bailleur à 40 % du préjudice évalué par l'expert aux motifs que le « loyer avait été augmenté, ce qui est avantageux pour le bailleur » (arrêt attaqué, p. 16), sans expliquer en quoi cette circonstance avait une quelconque incidence sur le préjudice causé par la nécessaire remise en état des locaux dégradés par le preneur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION La société HPVI fait encore grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté sa demande d'indemnisation au titre des remises de loyers accordées au nouveau locataire. 1°/ ALORS QUE le preneur doit réparer l'intégralité du préjudice causé par sa faute au bailleur ; qu'en l'espèce, en raison du défaut d'entretien des lieux loués par l'ancien locataire, l'exposante avait été contrainte de relouer le bien dès le 1er juillet 2009 en accordant d'importantes remises au nouveau locataire, de sorte qu'elle n'avait pu percevoir au second semestre de l'année 2009 que 12 000 € du nouveau locataire, « lequel n'avait commencé à payer des loyers normaux (?) que début 2010 » (concl. d'appel, p. 32, b) ; qu'en rejetant toute indemnisation de ce chef aux motifs que le bailleur avait déjà été indemnisé au titre de l'état des locaux restitués, quand le préjudice tiré de la remise en état des locaux était distinct de celui lié à la relocation du bien à des conditions défavorables, la cour d'appel a violé les articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. 2°/ ALORS QUE le preneur doit réparer l'intégralité du préjudice causé par sa faute au bailleur ; qu'en rejetant toute indemnisation du bailleur au titre des remises accordées au nouveau locataire aux motifs que le bail conclu avec le nouveau locataire stipulait « un loyer plus important que celui réglé par l'ancien locataire » (arrêt attaqué, p. 20) et transférait la charge des grosses réparations et la vétusté, quand ces circonstances n'excluaient en rien l'existence d'un préjudice subi du fait des remises accordées au nouveau locataire, la cour d'appel a méconnu les articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. 3°/ ALORS QUE le preneur doit réparer l'intégralité du préjudice causé par sa faute au bailleur ; qu'en rejetant toute indemnisation du bailleur au titre des remises accordées au nouveau locataire aux motifs que les travaux réalisés par le locataire ne consistaient pas « en une simple remise en état des locaux mais aussi en des travaux d'adaptation à ses activités » (arrêt attaqué, p. 20), sans justifier en quoi cette circonstance était de nature à exclure tout préjudice au titre des remises accordées au nouveau locataire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 1732 du même code. TROISIÈME MOYEN DE CASSATION La société HPVI fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que la créance alléguée par la société HPVI en raison de la dissimulation du sous-locataire Upsilon était prescrite, ALORS QUE la charge de la preuve de la connaissance, par le titulaire d'un droit, des faits lui permettant de l'exercer incombe à celui qui se prévaut de la prescription ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé que la société HPVI avait déclaré n'avoir découvert la sous-location consentie à la société Upsilon que lors du rapport de M. [Z] [M] en février 2015, mais qu'elle n'en justifiait pas dès lors que le rapport ne mentionnait pas expressément cette sous-location, de sorte que sa demande était prescrite de ce chef ; qu'en se prononçant ainsi, quand c'est à celui qui se prévalait de la prescription d'établir que la société HPVI avait eu connaissance de cette sous-location plus de cinq avant l'assignation, délivrée en juillet 2017, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé les articles 1355 et 1224 du code civil. QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION La société HPVI fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté sa demande d'indemnisation au titre des travaux rendus nécessaires par la modification de la charpente métallique réalisée par la société Tefa Industries. 1°/ ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les documents en la cause ; qu'en l'espèce, l'expert judiciaire soulignait dans son rapport du 9 décembre 2009 (Rapp. [U], prod. 7), effectué au contradictoire des parties, que « sur toute la longueur du bardage côté Ouest et sur une hauteur de 2,50 m environ, des plaques de tôle ont été mises en doublage et soudées sur les poteaux d'ossature de la charpente sans l'autorisation du bailleur », ajoutant que des « trous ont été percés sur l'aile extérieure des-dits poteaux afin de servir d'appui à d'autres éléments » puis, enfin, que « la Société HPVi souhaite que la Société Tefa Industries puisse justifier en faisant appel à un bureau de contrôle que les éléments rapportés n'interfèrent pas sur la solidité de la structure du bâtiment » (Rapp. [U], prod. 7, p. 29), de sorte qu'il en résultait nécessairement que les travaux avaient bien été réalisés par la société Tefa Industries ; qu'en relevant toutefois qu'il ne résultait « pas du rapport d'expertise judiciaire que les tôles auraient été mises en place par la société Tefa Industries et non par le précédent locataire » (arrêt attaqué, p. 19), la cour d'appel a dénaturé ce rapport, en méconnaissance du principe précité. 2°/ ALORS QUE le preneur doit restituer le bien loué tel qu'il l'a reçu ; qu'en l'espèce, le bailleur rappelait que le preneur avait, en cours de bail et sans autorisation, procédé à des modifications de la charpente métallique du bâtiment ouest en apposant un doublage en acier non conforme, de sorte que le bailleur était de ce seul fait fondé à obtenir une indemnité destinée à couvrir le coût de la remise de la charpente dans son état initial (concl. d'appel HPVI, p. 36) ; qu'en rejetant les demandes formées par le bailleur aux motifs inopérants qu'aucune mesure de réparation n'était proposée par l'expert et qu'il n'était pas établi que la pose des plaques avait fragilisé la charpente, la cour d'appel a violé ensemble les articles 1730 et 555 du code civil. CINQUIÈME MOYEN DE CASSATION La société HPVI fait encore grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté ses demandes de condamnation des sociétés Rolesco et Edeis. 1°/ ALORS QUE le tiers complice de la violation d'une obligation contractuelle est tenu de réparer le préjudice qui en résulte ; qu'en l'espèce, le bailleur avait appris au cours de l'expertise de M. [Z] [M] que le locataire avait consenti des sous-locations irrégulières et frauduleuses aux sociétés Rolesco et Edeis, lesquelles connaissaient parfaitement les termes du bail pour être associées de la société Tefa Industries, locataire principal, de sorte qu'étant complices de la violation du bail elles devaient réparer le préjudice tiré de la perte des sous-loyers constitutifs de fruits civils qui revenaient au bailleur ; qu'en rejetant cette demande aux motifs que le bailleur ne rapportait pas la preuve du préjudice subi du fait des sous-locations non autorisées, lequel était pourtant constitué par la perte des sous-loyers qui, en leur qualité de fruits civils du bien loué, revenaient au bailleur, la cour d'appel a violé les articles 1382 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 546 et 547 du code civil. 2°/ ALORS QUE le tiers complice de la violation d'une obligation contractuelle est tenu de réparer le préjudice qui en résulte ; qu'en rejetant la demande d'indemnisation formée à l'encontre des sous-locataires aux motifs que les sous-locations avaient pris fin avant la restitution des locaux et qu'il n'était pas démontré que le montant du loyer de ces sous-locations aurait excédé le montant du loyer dû par le locataire principal, la cour d'appel, qui s'est prononcée par motifs inopérants, a violé les articles 1382 du code civil, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, et 546 et 547 du code civil. SIXIÈME MOYEN DE CASSATION La société HPVI fait encore grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté sa demande visant à reconnaître que la créance dont elle était titulaire bénéficiait du privilège du bailleur. ALORS QUE si le juge-commissaire a une compétence exclusive pour décider de l'admission ou du rejet des créances déclarées, la décision d'incompétence du juge-commissaire pour trancher une contestation investit le juge compétent régulièrement saisi du pouvoir de trancher cette contestation et ainsi, de se prononcer sur l'existence, le montant ou la nature chirographaire ou privilégiée de la créance déclarée ; qu'en l'espèce, en raison de l'incompétence du juge-commissaire, le bailleur a été invité à saisir la juridiction compétente au fond pour trancher les contestations relatives aux créances déclarées dont l'existence, le montant comme la nature privilégiée étaient contestées ; qu'en jugeant qu'elle n'avait pas le pouvoir de déterminer si la créance de la société HPVI était affectée du privilège du bailleur, ce qui était contesté, la cour d'appel a violé les articles L. 624-2 et R. 624-5 du code de commerce. Moyens produits au pourvoi incident par la SARL Le Prado - Gilbert, avocat aux Conseils, pour M. [E] et la société Rolesco. PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Rolesco et M. [E] font grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR fixé le montant mensuel de l'indemnité d'occupation due par la société Tefa Industries pour la période écoulée entre le 25 novembre 2008 et le 30 juin 2009 à la somme égale au montant du dernier loyer contractuel mensuel augmenté de la TVA et taxe foncière et D'AVOIR dit que la créance de la société HPVI à l'égard de la société Tefa industries s'élève au montant total en deniers ou quittances pour la période écoulée entre le 25 novembre 2008 et le 30 juin 2009 des indemnités d'occupation mensuelles telles que fixées ci-dessus ; ALORS QUE les motifs d'une ordonnance, fussent-ils le soutien nécessaire du dispositif, n'ont pas l'autorité de chose jugée ; qu'en retenant, pour juger que l'indemnité d'occupation avait couru jusqu'au 30 juin 2009, qu'il ressortait de l'ordonnance définitive du 16 février 2012 du juge de l'exécution d'Auxerre que la date de libération des lieux est le 30 juin 2009 (arrêt p.17, al. 4 et 5) cependant que cette ordonnance se borne dans son dispositif à liquider l'astreinte provisoire prononcée par l'ordonnance de référé du 10 février 2009 à la somme de 61 000 euros et à fixer la créance de la société HPVI au passif de la société Tefa Industries à la somme de 61 000 euros et que les motifs qui constataient que les locaux avaient été effectivement libérés le 30 juin 2009 n'ont pas l'autorité de la chose jugée, la cour d'appel a violé l'article 1355 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION La société Rolesco et M. [E] font grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que la créance de la société HPVI à l'égard de la société TEFA Industries s'élève à 62 762,25 euros au titre de l'ordonnance définitive du juge de l'exécution d'Auxerre en date du 10 septembre 2009 ; ALORS QUE les juges de la cour d'appel ne peuvent adopter les motifs du jugement que s'ils confirment la décision des premiers juges ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a infirmé le jugement sauf en ce qu'il avait dit que le jugement serait déclaré opposable à MM. [R], M. [E] et la société DIMAF ; qu'en renvoyant cependant à la motivation des premiers juges en l'absence d'éléments nouveaux (arrêt p.21, in fine) pour dire que la créance de la société HPVI à l'égard de la société TEFA industries s'élevait à la somme de 62 762,25 euros au titre de l'ordonnance définitive du juge de l'exécution d'Auxerre en date du 10 septembre 2009, la cour d'appel a violé les articles 455 et 955 du code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION La société Rolesco et M. [E] font grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit que les créances de la société HPVI à l'égard de la société TEFA Industries s'élèvent à 195 323 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant de l'état des locaux restitués, 61 000 euros au titre de la liquidation définitive de l'astreinte prononcée par l'ordonnance de référé du 10 février 2009, 62 762,25 euros au titre de l'ordonnance définitive du juge de l'exécution d'Auxerre en date du 10 septembre 2009, 4 878,23 euros au titre des dépens relatifs aux procédures antérieures, au montant total en deniers ou quittances, pour la période écoulée entre 25 novembre 2008 et le 30 juin 2009 des indemnités d'occupation mensuelles ; ALORS QUE la société Rolesco et M. [E] faisaient valoir à titre subsidiaire que le dépôt de garantie versé par la société Tefa Industries à la société HPVI devait être déduit du total de la créance de la société HPVI (cf. conclusions p.32); qu'en omettant de répondre à ce moyen pourtant péremptoire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi incident éventuel par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour M. [R] et la société Edeis. PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [H] [R] et la société EDEIS reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir dit que la déclaration de créances formée par courrier du 16 février 2010 de la société HPVI a interrompu la prescription et, partant, que les créances visées dans cette déclaration ne sont pas prescrites. 1°) Alors que, de première part, conformément à l'article 2243 du code civil, l'interruption du délai de prescription est non avenue si la demande est rejetée par une fin de non-recevoir ; qu'en l'espèce, en retenant, pour juger que les créances déclarées par la société HPVI le 16 février 2010 n'étaient pas prescrites, que l'arrêt du 15 juin 2017 rendu par la cour d'appel de Paris n'avait pas eu pour effet de rendre non avenue l'interruption du délai de prescription résultant de cette déclaration de créances, lorsque, par cette décision, la juridiction avait relevé son défaut de pouvoir juridictionnel par une fin de non-recevoir, la cour d'appel a violé ce texte, pris ensemble les articles 122 du code de procédure civile et L. 624-2 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2014-26 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives ; 2°) Alors que, de seconde part, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile en ne répondant pas au moyen, péremptoire, qui soutenait que l'action tendant à obtenir le versement d'indemnités d'occupation était prescrite (conclusions d'appel de la société EDEIS et de M. [R], pp. 18-22 SECOND MOYEN DE CASSATION M. [H] [R] et la société EDEIS reprochent à l'arrêt attaqué d'avoir fixé le montant mensuel de l'indemnité d'occupation due par la société TEFA INDUSTRIES pour la période écoulée entre le 25 novembre 2008 et le 30 juin 2009 à une somme égale au montant du dernier loyer contractuel mensuel augmenté de la TVA et taxe foncière et, partant, d'avoir dit que la société HPVI disposait, à l'égard de la société TEFA INDUSTRIES, d'une créance s'élevant au montant total en deniers ou quittances, pour la période écoulée entre le 25 novembre 2008 et le 30 juin 2009, des indemnités d'occupation mensuelles telles que fixées ci-dessus. Alors que, si l'indemnité d'occupation a pour objet de réparer le préjudice subi par le propriétaire du fait de la privation de son bien, le réparation ne peut, conformément à l'article 1382 du code civil, excéder le montant du préjudice ; qu'en l'espèce, en fixant le montant de l'indemnité d'occupation mensuelle à hauteur du dernier loyer contractuel mensuel augmenté de la TVA et de la taxe foncière à compter du 25 novembre 2008 et jusqu'au 30 juin 2009, sans tenir compte des versements déjà effectués par la société TEFA INDUSTRIES, dont elle venait pourtant de constater l'existence et qui s'élevaient à hauteur de 43.146,20 euros soit trois mois de loyer, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et, partant, a violé le texte précité, pris ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice ;
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Déchéance M. VIGNEAU, président Arrêt n° 167 F-D Pourvoi n° R 21-15.094 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 1°/ La société Ruffin mandataires et associés, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société [Adresse 4], elle-même désignée comme contrôleur dans la liquidation judiciaire de la société La Mouette, 2°/ la société MJS partners, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société La Mouette, ont formé le pourvoi n° R 21-15.094 contre l'arrêt rendu le 28 janvier 2021 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 2), dans le litige les opposant à la société Artois Touquet, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation. La société Artois Touquet a formé un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bélaval, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat des sociétés Ruffin mandataires et associés, ès qualités, et MJS partners, ès qualités, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Artois Touquet, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bélaval, conseiller rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Sur la déchéance du pourvoi, soulevée par la défense 1. Aux termes de l'article 1844-7-7° du code civil, la société prend fin par l'effet d'un jugement ordonnant la clôture de la liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif. Le liquidateur judiciaire n'a alors plus qualité pour la représenter. 2. Il résulte de l'article 978 du code de procédure civile que le délai de quatre mois pour remettre au greffe de la Cour de cassation et signifier au défendeur au pourvoi un mémoire, contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée, est imparti au demandeur au pourvoi à peine de déchéance du pourvoi. 3. Le 12 avril 2021, la société Ruffin mandataires et associés, en qualité de liquidateur de la société [Adresse 4], et la société MJS partners, en qualité de liquidateur de la société La Mouette, se sont pourvues en cassation contre l'arrêt du 28 janvier 2021 de la cour d'appel de Douai. Le 12 août 2021, elles ont, en ces mêmes qualités, remis au greffe de la Cour de cassation un mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée. Cependant, respectivement les 16 juin 2021 et 21 juillet 2021, les liquidations judiciaires des sociétés [Adresse 4] et La Mouette avaient été clôturées pour insuffisance d'actif, de sorte que les liquidateurs n'avaient plus qualité, à compter de ces dates, pour représenter les sociétés. 4. La requête en constatation de l'interruption d'instance déposée par la société La Mouette, le 18 octobre 2021, afin de permettre la désignation d'un mandataire ad hoc pour reprendre l'instance, ne pouvant avoir pour effet, s'il y était fait droit, d'interrompre l'instance avant l'expiration du délai de quatre mois précité, il s'ensuit que la déchéance du pourvoi est encourue. 5. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur la requête en interruption d'instance ni sur le pourvoi incident qui n'est qu'éventuel. PAR CES MOTIFS, la Cour : CONSTATE la déchéance du pourvoi ; Dit n'y avoir lieu de statuer sur la requête en interruption d'instance ni sur le pourvoi incident éventuel ; Condamne les sociétés [Adresse 4] et La Mouette aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
INCA/JURITEXT000047304588.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle sans renvoi M. VIGNEAU, président Arrêt n° 179 F-D Pourvoi n° A 21-20.738 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 8 MARS 2023 1°/ La société Mandataires judiciaires associés (MJA), société d'exercice libéral à forme anonyme, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de Mme [V] [U], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour ailleurs (UJA), 2°/ la société BTSG², société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], en la personne de M. [D] [H], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour ailleurs (UJA), ont formé le pourvoi n° A 21-20.738 contre l'arrêt rendu le 7 juin 2021 par la cour d'appel de Limoges (chambre économique et sociale), dans le litige les opposant : 1°/ à la société E. [E] et fils, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], 2°/ à M. [R] [E], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de liquidateur amiable et de mandataire ad hoc de la société E. [E] et fils, défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Barbot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Mandataires judiciaires associés (MJA), ès qualités, et de la société BTSG², ès qualités, de Me Occhipinti, avocat de la société E. [E] et fils et de M. [E], ès qualités, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Barbot, conseiller référendaire rapporteur, Mme Vaissette, conseiller doyen, et Mme Mamou, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Reprise d'instance 1. Il est donné acte aux sociétés MJA et BTSG², agissant en qualité de liquidateurs de la société Un Jour ailleurs (UJA), de leur reprise d'instance à l'égard de M. [E], en qualité de mandataire ad hoc de la société E. [E] et fils. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 7 juin 2021), rendu en référé, par un acte sous seing privé du 12 février 2020, la société E. [E] et fils (la société [E]) a vendu à la société Un Jour ailleurs (la société UJA) le droit au bail du local d'un immeuble situé à [Localité 5], pour le prix de 250 000 euros, sous conditions suspensives, la date de réitération de la cession par acte authentique étant fixée au plus tard le 30 mars 2020. Cet acte contenait une clause attributive de compétence au profit des tribunaux du lieu de situation de l'immeuble. 3. Le 29 mai 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la résolution du plan de sauvegarde de la société UJA, qui avait été arrêté le 16 juin 2014, et mis cette dernière en redressement judiciaire. 4. Le 10 juillet 2020, la société [E] a assigné en référé la société UJA et ses administrateurs judiciaires devant le président du tribunal de commerce de Limoges, désigné par la clause attributive de compétence, afin d'obtenir, par ordonnance valant vente, la réitération de la vente du droit au bail et leur condamnation à lui payer le prix de cession prévu par l'acte du 12 février 2020. 5. La société UJA et ses administrateurs se sont opposés à ces demandes, en soulevant, notamment, l'incompétence du juge des référés au profit du tribunal de la procédure collective. 6. Le 14 août 2020, au cours de l'instance d'appel afférente à l'ordonnance de référé qui a accueilli les demandes de la société [E], le redressement judiciaire de la société UJA a été converti en liquidation judiciaire. Les sociétés MJA et BTSG², désignées en qualité de liquidateurs, ont repris l'instance. Examen des moyens Sur les premier et troisième moyens, ci-après annexés 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 8. Les liquidateurs de la société UJA font grief à l'arrêt de rejeter leur exception d'incompétence matérielle et de retenir sa compétence pour connaître du litige, de constater la réalisation des conditions suspensives du contrat de cession de bail du 12 février 2020, et de les condamner solidairement, ès qualités, à payer à la société [E] la somme de 250 000 euros représentant le prix de cession du bail commercial et de rejeter leurs demandes, alors « que sans préjudice des pouvoirs attribués en premier ressort au juge-commissaire, le tribunal saisi d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire connaît de tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, à l'exception des actions en responsabilité civile exercées à l'encontre de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur qui sont de la compétence du tribunal de grande instance ; que relèvent de la compétence exclusive du tribunal de la procédure collective les litiges portant sur la détermination du caractère antérieur ou postérieur d'une créance et sur la continuation d'un contrat en cours ; que, pour dire que le juge des référés du tribunal de commerce de Limoges, désigné par une clause attributive de juridiction stipulée dans l'acte de cession litigieux, était compétent pour connaître des demandes de la société E. [E] et fils tendant à voir juger que la cession de droit au bail conclue par acte du 12 février 2020 était parfaite et à condamner la société à payer le prix de cession convenu, la cour d'appel a retenu que le "contrat concerné, à savoir l'acquisition du droit au bail, un contrat en cours d'exécution à la date du 29 mai 2020. Date à laquelle ont été prononcées la résolution du plan de sauvegarde et l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SASU UJA", la cour d'appel considérant que "Le litige portant sur ce contrat est donc un litige relatif à son exécution par la réitération du compromis et le paiement du prix fixé" et que de ce fait, "la difficulté d'exécution du contrat n'est pas née de la procédure de redressement prononcée le 25 mai 2020 et n'exerce pas sur cette même procédure une influence juridique" ; qu'en statuant de la sorte, quand les demandes formées par la société E. [E] et fils impliquaient qu'il soit statué sur le point de savoir si le contrat litigieux était ou non un contrat en cours, et de déterminer si la créance alléguée était antérieure ou postérieure à l'ouverture du redressement judiciaire de la société UJA, de sorte que le litige, dont la solution dépendait de l'application des règles de la procédure collective relevait de la compétence exclusive du tribunal de la faillite, la cour d'appel a violé l'article R. 662-3 du code de commerce. » Réponse de la Cour 9. Après avoir constaté que le plan de sauvegarde de la société UJA avait été résolu le 29 mai 2020, avec ouverture concomitante d'un redressement judiciaire, l'arrêt relève, d'abord, que l'acte du 12 février 2020 spécifiait clairement qu'à cette date, il existait un accord définitif des parties sur la chose et sur le prix, et que, à la suite de la réalisation des conditions suspensives prévues dans ce contrat, la vente est intervenue le 12 février 2020, soit avant le jugement d'ouverture du 29 mai 2020. 10. L'arrêt relève, ensuite, que la créance de prix de 250 000 euros, résultant de ce contrat, devait être honorée postérieurement au 30 mars 2020, après réitération de l'acte de vente. 11. De ces constatations et appréciations, desquelles il résulte que la vente avait été conclue avant l'ouverture du redressement judiciaire de la société UJA, la cour d'appel a exactement déduit que le litige, relatif aux difficultés d'exécution de ce contrat, n'était pas né de la procédure de redressement ouverte le 25 mai 2020 (lire le 29 mai 2020), ni n'était soumis à l'influence juridique de cette procédure, de sorte qu'il ne relevait pas de la compétence du tribunal de la procédure collective et qu'il convenait de faire application de la clause attributive de compétence stipulée dans le contrat. 12. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le moyen relevé d'office 13. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu les articles L. 622-21, I et L. 622-24 du code de commerce, rendus applicables au redressement judiciaire par l'article L. 631-14 du même code, et l'article 125 du code de procédure civile : 14. Il résulte de ces textes que la règle de l'arrêt des poursuites individuelles, consécutive à l'ouverture d'une procédure collective, constitue une fin de non-recevoir pouvant être proposée en tout état de cause dont le caractère d'ordre public impose au juge de la relever d'office. Lorsqu'une demande en paiement n'a pas été formée à l'occasion d'une instance en cours avant l'ouverture de la procédure collective du débiteur, mais seulement après cette ouverture, le créancier ne peut faire constater le principe de sa créance et en faire fixer le montant, autrement qu'en la déclarant et en se soumettant à la procédure de vérification du passif. 15. Pour condamner les liquidateurs de la société UJA à payer à la société [E] la somme de 250 000 euros correspondant au prix de cession du droit de bail prévu dans le contrat du 12 février 2020, l'arrêt retient, d'abord, que l'accord des parties sur la chose et sur le prix figure dans ce contrat, que les conditions suspensives qui y étaient prévues ont été remplies et que la question posée est celle de l'exécution du contrat par le paiement du prix du droit au bail. Il ajoute que la société [E] est fondée à faire valoir l'urgence et l'existence d'un dommage imminent, dès lors qu'elle se trouve dans une situation aboutissant à la perte de son unique actif et que, ayant cessé ses activités et licencié son personnel, elle n'est plus en mesure de payer le droit au bail. L'arrêt en déduit que la société [E] est fondée à poursuivre le paiement de ce droit. 16. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations, d'un côté, que la demande de la société [E] tendant au paiement du prix était fondée sur une vente conclue antérieurement au jugement du 29 mai 2020, lequel avait ouvert une nouvelle procédure collective à l'égard de la société UJA, de l'autre, que cette demande avait été formée par une assignation du 10 juillet 2020, soit postérieurement à ce jugement d'ouverture, la cour d'appel, qui devait relever, au besoin d'office, l'irrecevabilité de la demande, a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 17. D'une part, après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 18. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, la demande en paiement du prix de cession formée par la société [E] devant, en effet, être déclarée irrecevable, en vertu de la règle de l'arrêt des poursuites. 19. D'autre part, si cette cassation ne remet pas en cause l'arrêt en ce qu'il constate la réalisation des conditions suspensives du contrat du 12 février 2020, elle entraîne en revanche, la cassation, par voie de conséquence, de cette décision en ce qu'elle accueille la demande de la société [E] et en ce qu'elle condamne les liquidateurs de la société UJA aux dépens et au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ces chefs de dispositif se trouvant dans un lien de dépendance nécessaire avec celui condamnant ces liquidateurs au paiement du prix de cession. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le quatrième moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce que, confirmant l'ordonnance entreprise, il rejette l'exception d'incompétence soulevée par les parties défenderesses, retient sa compétence et constate la réalisation des conditions suspensives du contrat de cession de bail du 12 février 2020, et en ce que, déboutant les parties du surplus de leurs demandes, il rejette la demande des sociétés MJA et BTSG2 tendant à l'irrecevabilité des conclusions de la société E. [E] et fils, l'arrêt rendu le 7 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; DECLARE irrecevable la demande de la société E. [E] et fils tendant à la condamnation des sociétés MJA et BTSG², ès qualités, au paiement du prix de la cession du droit au bail prévu par le contrat du 12 février 2020 ; Condamne la société E. [E] et fils aux dépens, en ce compris ceux exposés devant les juges du fond ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois, et signé par lui et Mme Vaissette, conseiller doyen, en remplacement du conseiller référendaire rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Mandataires judiciaires associés (MJA), en la personne de Mme [V] [U], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour ailleurs (UJA), et la société BTSG², en la personne de M. [D] [H], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour ailleurs (UJA). PREMIER MOYEN DE CASSATION La Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U] agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H], agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), font grief à l'arrêt attaqué de les avoir déboutées de leur demande tendant à voir prononcée l'irrecevabilité des conclusions d'appel déposées par la société E. [E] et Fils, d'avoir confirmé l'ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de commerce de commerce de Limoges le 24 juillet 2020, en ce qu'elle avait rejeté l'exception d'incompétence matérielle soulevée par les parties défenderesses et retenu sa compétence pour connaître du litige, fait droit à la demande présentée par la société E. [E] et Fils, et constaté la réalisation des conditions suspensives du contrat de cession de bail commercial en date du 12 février 2020 conclu entre les sociétés E. [E] et Fils et UJA, d'avoir infirmé pour le surplus cette ordonnance et statuant à nouveau, d'avoir condamné solidairement la Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs, à payer à la société E. [E] et Fils la somme de 250.000 € représentant le prix de cession du bail commercial sis [Adresse 2], et de les avoir déboutées de leurs demandes, ALORS QUE sont irrecevables les conclusions d'appel déposées au nom d'une société, mentionnant un siège social qui ne correspond pas à son siège social effectif ; que cette irrecevabilité n'est pas subordonnée à la démonstration d'un grief causé à la partie qui la soulève ; qu'en l'espèce, les liquidateurs judiciaires de la société UJA ont soulevé l'irrecevabilité des deux jeux de conclusions déposées par la société E. [E] et Fils, au motif que celles-ci mentionnaient comme siège social l'adresse correspondant aux locaux du contrat de cession de droit au bail objet du litige, dont les clés leur avaient été remise par cette société, qui avait déclaré à plusieurs reprises avoir quitté les lieux (conclusions des exposantes, p. 5-6) ; que pour écarter cette irrecevabilité, la cour d'appel a retenu que la société E. [E] et Fils avait pu indiquer dans ses conclusions l'adresse des locaux objet du contrat litigieux comme constituant son siège social, dans la mesure où ce contrat ne pouvait être considéré comme exécuté tant que la cession n'avait « pas été réitérée après réalisation des conditions suspensives par le biais, notamment, de son paiement » et que le contrat en question devait être considéré comme un contrat en cours d'exécution dans l'attente du paiement, dans la mesure où le compromis du 12 février 2020 précisait qu'à cette date, il y avait d'ores et déjà accord sur la chose et sur le prix ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à établir que l'adresse indiquée dans les conclusions d'appel de la société E. [E] et Fis correspondait à son siège social effectif, la cour d'appel a violé les articles 960 et 961 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION La Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U] agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H], agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), font grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du 24 juillet 2020 du juge des référés du tribunal de commerce de Limoges, en ce qu'elle avait rejeté l'exception d'incompétence matérielle soulevée par les parties défenderesses et retenu sa compétence pour connaître du litige, et d'avoir constaté la réalisation des conditions suspensives du contrat de cession de bail commercial en date du 12 février 2020 conclu entre les sociétés E. [E] et Fils et UJA, d'avoir infirmé pour le surplus cette ordonnance et statuant à nouveau, d'avoir condamné solidairement la Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs, à payer à la société E. [E] et Fils la somme de 250.000 € représentant le prix de cession du bail commercial sis [Adresse 2], et de les avoir déboutées de leurs demandes, ALORS QUE sans préjudice des pouvoirs attribués en premier ressort au juge-commissaire, le tribunal saisi d'une procédure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire connaît de tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, à l'exception des actions en responsabilité civile exercées à l'encontre de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l'exécution du plan ou du liquidateur qui sont de la compétence du tribunal de grande instance ; que relèvent de la compétence exclusive du tribunal de la procédure collective les litiges portant sur la détermination du caractère antérieur ou postérieur d'une créance et sur la continuation d'un contrat en cours ; que, pour dire que le juge des référés du tribunal de commerce de Limoges, désigné par une clause attributive de juridiction stipulée dans l'acte de cession litigieux, était compétent pour connaître des demandes de la société E. [E] et Fils tendant à voir juger que la cession de droit au bail conclue par acte du 12 février 2020 était parfaite et à condamner la société à payer le prix de cession convenu, la cour d'appel a retenu que le « contrat concerné, à savoir l'acquisition du droit au bail, un contrat en cours d'exécution à la date du 29 mai 2020. Date à laquelle ont été prononcées la résolution du plan de sauvegarde et l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la SASU UJA » (arrêt, p. 7), la cour d'appel considérant que « Le litige portant sur ce contrat est donc un litige relatif à son exécution par la réitération du compromis et le paiement du prix fixé » et que de ce fait, « la difficulté d'exécution du contrat n'est pas née de la procédure de redressement prononcée le 25 mai 2020 et n'exerce pas sur cette même procédure une influence juridique » ; qu'en statuant de la sorte, quand les demandes formées par la société E. [E] et Fils impliquaient qu'il soit statué sur le point de savoir si le contrat litigieux était ou non un contrat en cours, et de déterminer si la créance alléguée était antérieure ou postérieure à l'ouverture du redressement judiciaire de la société UJA, de sorte que le litige, dont la solution dépendait de l'application des règles de la procédure collective relevait de la compétence exclusive du tribunal de la faillite, la cour d'appel a violé l'article R. 662-3 du code de commerce. TROISIEME MOYEN DE CASSATION La Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U] agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H], agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), font grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du 24 juillet 2020 du juge des référés du tribunal de commerce de Limoges, en ce qu'elle avait retenu sa compétence pour connaître du litige, fait droit à la demande présentée par la société E. [E] et Fils, et constaté la réalisation des conditions suspensives du contrat de cession de bail commercial en date du 12 février 2020 conclu entre les sociétés E. [E] et Fils et UJA, d'avoir infirmé pour le surplus cette ordonnance et statuant à nouveau, d'avoir condamné solidairement la Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs, à payer à la société E. [E] et Fils la somme de 250.000 € représentant le prix de cession du bail commercial sis [Adresse 2], et de les avoir déboutées de leurs demandes, ALORS QUE le juge des référés saisi sur le fondement de l'article 873, alinéa 1er, du code de procédure civile ne peut que prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'en jugeant que le contrat du 12 février 2020 était un contrat en cours qui se poursuivait malgré la procédure collective dont faisait l'objet la société UJA, et que la créance au titre du prix de cession n'était pas une créance antérieure, pour condamner les liquidateurs judiciaires de la société UJA à payer à la société E. [E] et Fils la somme de 250.000 € au titre du prix de cession du droit au bail objet du contrat conclu le 12 février 2020 entre ces deux sociétés, la cour d'appel, qui a tranché le litige au principal, a excédé les pouvoirs qu'elle tenait en qualité de juge des référés et violé l'article 873, alinéa 1er, du code de procédure civile. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION La Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U] agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H], agissant ès qualités de liquidateur de la société Un Jour Ailleurs (UJA), font grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du 24 juillet 2020 du juge des référés du tribunal de commerce de Limoges, en ce qu'elle avait fait droit à la demande présentée par la société E. [E] et Fils, et constaté la réalisation des conditions suspensives du contrat de cession de bail commercial en date du 12 février 2020 conclu entre les sociétés E. [E] et Fils et UJA, d'avoir infirmé pour le surplus cette ordonnance et statuant à nouveau, d'avoir condamné solidairement la Selafa MJA, prise en la personne de Me [V] [U], en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs et la SCP BTSG, prise en la personne de Me [D] [H] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Un Jour Ailleurs, à payer à la société E. [E] et Fils la somme de 250.000 € représentant le prix de cession du bail commercial sis [Adresse 2], et de les avoir déboutées de leurs demandes, 1°) ALORS QUE la créance de paiement du prix d'une cession d'un droit au bail, dès lors qu'elle est exigible avant l'ouverture de la procédure collective du cessionnaire, constitue une créance antérieure frappée d'interdiction de paiement ; qu'en l'espèce, l'acte de cession du 12 février 2020 par lequel la société E. [E] et Fils a cédé à la société UJA son droit au bail sur des locaux commerciaux stipulait que « les présentes conventions constituent, dès leur signature, un accord définitif sur la chose et sur le prix. Elles seront réitérées au plus tard le 30 mars 2020 par acte sous seing privé (?). La date ci-dessus mentionnée n'est pas extinctive, mais constitutive du point de départ à partir duquel l'une des parties pourra obliger l'autre à s'exécuter en cas de réalisation de toutes les conditions suspensives » ; qu'en jugeant, pour retenir que le litige portait sur l'exécution d'un contrat en cours et que la créance invoquée par la société E. [E] et Fils n'était pas une créance antérieure, que la « mention relative à l'absence d'extinction contractuelle » dans l'acte de cession faisait de ce contrat un contrat en cours d'exécution au jour de l'ouverture du redressement judiciaire de la société UJA le 29 mai 2020, quand il résultait de la clause précitée qu'à partir du 30 mars 2020, et sous réserve de la réalisation de l'ensemble des conditions suspensives, la cession du droit au bail détenu par la société E. [E] et Fils était parfaite et que chacune des parties pouvait exiger de l'autre qu'elle exécute son obligation, de sorte que la créance au titre du prix de cession était une créance antérieure à la procédure de redressement judiciaire de la société UJA, la cour d'appel a violé l'article 1103 du code civil, ensemble l'article L. 622-7 du code de commerce ; 2°) ALORS QU' en cas de résolution du plan de sauvegarde d'un débiteur et de prononcé d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire en raison de l'état de cessation des paiements, les créances nées avant la conversion de la procédure de sauvegarde constituent des créances antérieures ; qu'en retenant qu' « en tout état de cause, la créance du prix de cession du bail est née postérieurement au jugement du 16 juin 2014 du tribunal de commerce prononçant la mise en place d'un plan de sauvegarde en faveur de l'entreprise UJA » (arrêt, p. 7, 6ème §), la cour d'appel, qui s'est fondée sur un motif inopérant, a méconnu l'article L. 626-27 III du code de commerce ; 3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'administrateur judiciaire a seul la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours, en fournissant la prestation promise au cocontractant du débiteur ; que si la poursuite du contrat en cours peut être tacite, elle suppose néanmoins caractérisée la volonté claire et non équivoque de l'administrateur de poursuivre le contrat ; qu'en retenant, par motifs propres et adoptés, que le contrat de cession du 12 février 2020 était un contrat en cours qui se poursuivait malgré la procédure collective ouverte à l'encontre de la société UJA, sans caractériser l'accord expresse ou tacite des administrateurs judiciaires à la poursuite du contrat en cause, la cour d'appel a violé l'article L. 622-13 du code de commerce ; 4°) ALORS QUE seules les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure ou de la période d'observation, ou en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; qu'en condamnant les liquidateurs judiciaires de la société UJA à payer à la société E. [E] et Fils la somme de 250.000 € au titre du prix de cession du droit au bail objet du contrat passé le 12 février 2020, avant l'ouverture du redressement judiciaire de la société UJA, sans rechercher, ce que contestaient les liquidateurs dans leurs conclusions (p. 14-15) si la créance invoquée par la société E. [E] et Fils remplissaient les conditions posées pour bénéficier du privilège de créancier postérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 622-7 I et L. 622-17 du code de commerce.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 VL12 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 156 FS-D Pourvoi n° E 21-24.376 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 La société Christophe Arbeit partenariat constructions, anciennement Christophe Arbeit Architecteur , société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 21-24.376 contre l'arrêt rendu le 7 septembre 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [L] [O], 2°/ à M. [D], domiciliés tous deux [Adresse 2], 3°/ à M. [R] [Z], domicilié [Adresse 1], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de la société Christophe Arbeit partenariat constructions, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [O], et l'avis de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnoud, Conseiller doyen, MM Jessel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay et Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes Le Gall, de Cabarrus, Feydeau-Thieffry, conseillers référendaires, M. Chaumont avocat général, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Désistement partiel 1. Il est donné acte à la société Christophe Arbeit partenariat constructions du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. [Z]. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 7 septembre 2021), suivant contrats des 7 décembre 2010, les sociétés 01, 02 et 03, dont M. [Z] était le gérant, ont confié à la société Christophe Arbeit Architecteur, devenue la société Christophe Arbeit partenariat constructions (la société Arbeit), l'aménagement de locaux dans un centre commercial. Le 17 février 2012, la société Arbeit a sollicité en référé le règlement du solde des travaux effectués et obtenu la désignation d'un expert. 3. Durant les opérations d'expertise, les sociétés 01 et 02, qui étaient représentées par leur gérant et assistées de MM. [L] et [D] [O], avocats (les avocats), ont fait l'objet de mesures de sauvegarde prononcées les 10 décembre 2012 et 21 janvier 2013, puis de liquidation judiciaire les 21 mars et 2 avril 2013. Le 12 novembre 2013, la société Arbeit a procédé à la déclaration de ses créances, qui ont été rejetées comme tardives. Par décisions des 28 octobre 2014 et 10 septembre 2015, elle a obtenu un relevé de forclusion. 4. Le 26 août 2015, invoquant des fautes commises par les avocats des sociétés 01 et 02 et consistant à avoir continué à assurer la défense de celles-ci nonobstant la mise en oeuvre de la procédure de liquidation, la société Arbeit les a assignés en responsabilité et indemnisation. Examen des moyens Sur le second moyen, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui est irrecevable. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 6. La société Arbeit fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes à l'égard des avocats, alors : « 1°/ que l'avocat, se présentant comme investi d'un mandat de représentation en justice, est, en tant qu'auxiliaire de justice et en vertu de l'obligation de loyauté qui s'attache à cette qualité, tenu de s'assurer de l'identité et de l'existence de son mandant et, à cet égard, est responsable, même envers la partie adverse, de toute carence préjudiciable ; qu'en décidant le contraire et en retenant, en l'espèce, qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et Maître [L] [O], après avoir pourtant relevé qu'en leur qualité d'avocats, ils avaient continué à agir et à représenter les sociétés SARL 01 et SARL 02 et à déposer des dires aux noms de leurs clientes durant les opérations d'expertise judiciaire cependant que ces sociétés avaient été placées en liquidation judiciaire, de sorte qu'en l'absence de vérification à cet égard, ils avaient commis une faute engageant leur responsabilité à l'égard de la société Christophe Arbeit Architecteur, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 2°/ que, l'avocat, se présentant comme investi d'un mandat de représentation en justice, est, en tant qu'auxiliaire de justice et en vertu de l'obligation de loyauté qui s'attache à cette qualité, tenu de s'assurer de l'identité et de l'existence de son mandant et, à cet égard, est responsable, même envers la partie adverse, de toute carence préjudiciable ; qu'en se retranchant derrière les connaissances de M. [Z], gérant des SARL 01 et SARL 02 à qui il incombait « d'informer ses conseils de la situation juridique des sociétés dont il leur avait confié les intérêts », pour retenir qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de ses avocats, Maître [D] [O] et Maître [L] [O], quand il appartenait à ces derniers de procéder aux vérifications qui relevaient de leur mandat sans pouvoir se retrancher derrière le comportement de leur client pour se soustraire à leurs propres obligations, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 3°/ qu'il incombe aux avocats, auxiliaires de justice sur qui pèse une obligation de loyauté et d'information à l'égard de toutes les parties en cause, d'apporter la preuve qu'ils ont respecté cette obligation ; qu'en reprochant à la société Christophe Arbeit Architecteur de ne pas démontrer que Maître [D] [O] et Maître [L] [O] avaient eu connaissance des manquements de M. [Z] et de la situation des sociétés qu'ils représentaient, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et, ce faisant, violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil ; 4°/ qu'en estimant encore qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], au prétexte que « l'obligation de renseignement qui pèse sur l'avocat, ne lui impose pas d'assurer au lieu et place de son adversaire, la surveillance et les investigations nécessaires à la sauvegarde d'une créance qu'il combat » et qu'il incombait « au créancier et à son conseil de se soucier de la situation juridique du débiteur et de suivre régulièrement les publications légales, notamment en matière de procédures collectives » quand il était établi que par leur absence de vérification, Maître [D] [O] et Maître [L] [O] avaient commis une faute engageant leur responsabilité, peu important que leur adversaire fût également reprochable, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a de nouveau violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 5°/ qu'en retenant ensuite qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], au prétexte que M. [Z], gérant des SARL 01 et SARL 02, avait pu faire l'avance sans difficulté apparente des frais de consignation d'expertise, quand cet élément importait peu dans la mesure où, en matière de liquidation judiciaire, les frais d'expertise sont fréquemment pris en charge par l'ancien gérant et que le paiement de ces frais par M. [Z], durant une période où Maîtres [L] [O] et [D] [O] l'avaient assisté dans le cadre d'une procédure de sauvegarde emportant l'ouverture d'une période d'observation de six mois, aurait dû renforcer leur vigilance quant à la situation juridique de leur client, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a de nouveau violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 6°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en estimant qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], aux motifs adoptés que le gérant de la SARL 01 avait réglé la consignation complémentaire de 16 473,22 euros pour les honoraires de l'expert et aux motifs propres que la SARL 01 avait ainsi « pu faire l'avance sans difficulté apparente des frais de consignation d'expertise », quand le chèque de paiement de ces frais d'expertise n'avait pas été établi par la société débitrice concernée, mais par une autre société, à savoir la SARL 03, la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée dudit chèque et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents qui lui sont soumis ; 7°/ qu'en estimant enfin qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], au prétexte qu'il ne peut être considéré que ces derniers auraient dû avoir connaissance de la situation des sociétés SARL 01 et SARL 02 qu'ils représentaient, après avoir pourtant constaté que Maître [L] [O] avait assisté la SARL 01 lors de la procédure de placement sous sauvegarde le 10 décembre 2012 emportant, pour ladite société, l'ouverture d'une période d'observation de six mois, ce dont il s'évinçait que l'avocat ne pouvait ignorer les difficultés financières de sa cliente ni la date d'expiration de la période d'observation à laquelle elle avait été soumise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée. » Réponse de la Cour 7. Après avoir constaté que les avocats avaient continué à représenter les sociétés 01 et 02 et à déposer des observations au cours des opérations d'expertise, après leur mise en liquidation judiciaire, la cour d'appel a cependant retenu, par motifs propres et adoptés, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve versés aux débats, qu'il n'était pas démontré que les avocats avaient eu connaissance de la situation des sociétés et agi sans mandat avec une légèreté blâmable, que le gérant, ayant réglé la consignation complémentaire pour les honoraires de l'expert et continué à leur faire parvenir ses observations reprises dans plusieurs dires, aucun élément n'avait pu les conduire à s'interroger sur la situation des sociétés lors de la procédure expertale et que, dès qu'ils avaient eu connaissance des procédures de liquidation, ils s'étaient rapprochés des liquidateurs. 8. De ces seuls motifs, la cour d'appel, qui n'a pas inversé la charge de la preuve, a pu déduire que les avocats n'avaient pas commis de faute, de sorte que leur responsabilité envers la société Arbeit n'était pas engagée. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Arbeit partenariat constructions aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour la société Christophe Arbeit partenariat constructions PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions et d'avoir mis Maître [D] [O] et Maître [L] [O] hors de cause, alors : 1°) que l'avocat, se présentant comme investi d'un mandat de représentation en justice, est, en tant qu'auxiliaire de justice et en vertu de l'obligation de loyauté qui s'attache à cette qualité, tenu de s'assurer de l'identité et de l'existence de son mandant et, à cet égard, est responsable, même envers la partie adverse, de toute carence préjudiciable ; qu'en décidant le contraire et en retenant, en l'espèce, qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et Maître [L] [O], après avoir pourtant relevé qu'en leur qualité d'avocats, ils avaient continué à agir et à représenter les sociétés SARL 01 et SARL 02 et à déposer des dires aux noms de leurs clientes durant les opérations d'expertise judiciaire cependant que ces sociétés avaient été placées en liquidation judiciaire, de sorte qu'en l'absence de vérification à cet égard, ils avaient commis une faute engageant leur responsabilité à l'égard de la société Christophe Arbeit Architecteur, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 2°) que, l'avocat, se présentant comme investi d'un mandat de représentation en justice, est, en tant qu'auxiliaire de justice et en vertu de l'obligation de loyauté qui s'attache à cette qualité, tenu de s'assurer de l'identité et de l'existence de son mandant et, à cet égard, est responsable, même envers la partie adverse, de toute carence préjudiciable ; qu'en se retranchant derrière les connaissances de M. [Z], gérant des SARL 01 et SARL 02 à qui il incombait « d'informer ses conseils de la situation juridique des sociétés dont il leur avait confié les intérêts » (arrêt, p. 7), pour retenir qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de ses avocats, Maître [D] [O] et Maître [L] [O], quand il appartenait à ces derniers de procéder aux vérifications qui relevaient de leur mandat sans pouvoir se retrancher derrière le comportement de leur client pour se soustraire à leurs propres obligations, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 3°) qu'il incombe aux avocats, auxiliaires de justice sur qui pèse une obligation de loyauté et d'information à l'égard de toutes les parties en cause, d'apporter la preuve qu'ils ont respecté cette obligation ; qu'en reprochant à la société Christophe Arbeit Architecteur de ne pas démontrer que Maître [D] [O] et Maître [L] [O] avaient eu connaissance des manquements de M. [Z] et de la situation des sociétés qu'ils représentaient (arrêt, p. 6 et 7), la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et, ce faisant, violé l'article 1315, devenu 1353, du code civil ; 4°) qu'en estimant encore qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], au prétexte que « l'obligation de renseignement qui pèse sur l'avocat, ne lui impose pas d'assurer au lieu et place de son adversaire, la surveillance et les investigations nécessaires à la sauvegarde d'une créance qu'il combat » et qu'il incombait « au créancier et à son conseil de se soucier de la situation juridique du débiteur et de suivre régulièrement les publications légales, notamment en matière de procédures collectives » (arrêt, p. 6) quand il était établi que par leur absence de vérification, Maître [D] [O] et Maître [L] [O] avaient commis une faute engageant leur responsabilité, peu important que leur adversaire fût également reprochable, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a de nouveau violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 5°) qu'en retenant ensuite qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], au prétexte que M. [Z], gérant des SARL 01 et SARL 02, avait pu faire l'avance sans difficulté apparente des frais de consignation d'expertise (arrêt, p. 7), quand cet élément importait peu dans la mesure où, en matière de liquidation judiciaire, les frais d'expertise sont fréquemment pris en charge par l'ancien gérant et que le paiement de ces frais par M. [Z], durant une période où Maîtres [L] [O] et [D] [O] l'avaient assisté dans le cadre d'une procédure de sauvegarde emportant l'ouverture d'une période d'observation de six mois, aurait dû renforcer leur vigilance quant à la situation juridique de leur client, la cour d'appel, qui a statué par un motif inopérant, a de nouveau violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée ; 6°) que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en estimant qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], aux motifs adoptés que le gérant de la SARL 01 avait réglé la consignation complémentaire de 16 473,22 euros pour les honoraires de l'expert (jugement, p. 7, in fine) et aux motifs propres que la SARL 01 avait ainsi « pu faire l'avance sans difficulté apparente des frais de consignation d'expertise » (arrêt, p. 7), quand le chèque de paiement de ces frais d'expertise n'avait pas été établi par la société débitrice concernée, mais par une autre société, à savoir la SARL 03, la cour d'appel a dénaturé le sens et la portée dudit chèque et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents qui lui sont soumis ; 7°) qu'en estimant enfin qu'aucune faute ne pouvait être retenue à l'égard de Maître [D] [O] et de Maître [L] [O], au prétexte qu'il ne peut être considéré que ces derniers auraient dû avoir connaissance de la situation des sociétés SARL 01 et SARL 02 qu'ils représentaient (arrêt, p. 7), après avoir pourtant constaté que Maître [L] [O] avait assisté la SARL 01 lors de la procédure de placement sous sauvegarde le 10 décembre 2012 emportant, pour ladite société, l'ouverture d'une période d'observation de six mois (arrêt, p. 5 et 7), ce dont il s'évinçait que l'avocat ne pouvait ignorer les difficultés financières de sa cliente ni la date d'expiration de la période d'observation à laquelle elle avait été soumise, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil, ensemble l'article 3 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions et d'avoir limité à la somme de 2 000 euros les dommages et intérêts alloués à la SARL Christophe Arbeit Architecteur, alors : 1°) que toute perte de chance ouvre droit à réparation ; qu'en retenant par motifs adoptés des premiers juges, pour en déduire que la demande de la SARL Christophe Arbeit Architecteur tendant à solliciter des dommages et intérêts à hauteur du montant de la créance de la SARL 01 n'était pas justifiée, que le tribunal de commerce avait fait droit à son opposition à l'encontre de la décision refusant le relevé de forclusion au passif de la SARL 01 et qu'elle avait, par ailleurs, été relevée de la forclusion encourue au passif de la SARL 02 par ordonnance du juge commissaire rendue le 28 octobre 2014, si bien qu'elle avait pu en définitive déclarer ses créances auprès du mandataire judiciaire (jugement, p. 8), sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si l'admission des créances litigieuses plusieurs mois, voire années, après les autres créanciers n'avait pas impacté sur les probabilités de procéder à leur recouvrement et si ce fait n'était pas susceptible de constituer, en lui-même, un préjudice de nature à justifier une réduction du quantum de l'indemnité, mais non point le refus de toute indemnisation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 2°) que la réparation doit être à l'exacte mesure du préjudice effectivement subi ; qu'elle ne saurait donc revêtir un caractère forfaitaire ; qu'en l'espèce, la société exposante invoquait un préjudice économique lié à une prolongation de son activité, ainsi qu'à des déplacements et des formalités diverses (arrêt, p. 4, § 2) ; qu'en fixant ce préjudice économique à une somme forfaitaire de 2 000 € après avoir pourtant retenu qu'« en raison des fautes commises par Monsieur [R] [Z], la SARL Christophe Arbeit Architeteur a vu ses déclarations de créances rejetées comme tardives et a dû engager des procédures pour être relevée de la forclusion », la cour d'appel a méconnu le principe de la réparation intégrale et violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 3°) qu'en tout état de cause, en s'abstenant de répondre aux conclusions (pp. 13 et 14) par lesquelles la SARL Christophe Arbeit Architecteur faisait valoir, pièces à l'appui (pièces n°46, 47 et 48), que des frais avaient été exposés par elle inutilement, en raison de la déclaration tardive de ses créances, la contraignant, d'une part, à engager des frais de procédure s'élevant à la somme de 5.241,60 euros pour être accueillie dans le cadre des opérations de liquidation judiciaire des sociétés SARL 01 et 02, d'autre part, à maintenir son activité le temps de la procédure en cours, pour un surcoût d'un montant de 10.746,07 euros et, de troisième part, à des frais de déplacement lors des réunions d'expertise pour un coût de 1.866,16 euros, et que ces frais constituaient un chef de préjudice ouvrant droit à réparation, la cour d'appel a méconnu l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 157 FS-D Pourvoi n° R 21-24.087 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 La Société civile des producteurs phonographiques (SCPP), société civile à caractère variable, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 21-24.087 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l'opposant à la société RFM entreprises, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la Société civile des producteurs phonographiques, de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société RFM entreprises, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, MM. Jessel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Feydeau-Thieffry, M. Serrier, conseillers référendaires, Mme Mallet-Bricout, avocat général, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 septembre 2021), la Société civile des producteurs phonographiques (la SCPP), organisme de gestion collective, représente plus de trois mille producteurs de phonogrammes dont elle défend les intérêts et gère les catalogues phonographiques. A ce titre, elle autorise, pour le compte de ses adhérents, la reproduction, la mise à la disposition du public et la communication à celui-ci des phonogrammes du commerce et collecte les droits à rémunération prévus, en contrepartie de ces exploitations, par les dispositions de l'article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle. 2. La société RFM Entreprises, ayant pour activité la diffusion de services radiophoniques, édite, depuis 2006, des programmes musicaux en ligne, accessibles sur le site « rfm.fr » et communément désignés sous le terme de « webradios ». Ces webradios, telles « RFM Eurovision », « RFM Lounge », « RFM Slow » et « RFM Pop Rock », diffusées exclusivement sur le réseau internet, ne sont pas interactives avec le public, celui-ci n'intervenant pas dans le choix des phonogrammes programmés, et ne sont pas dédiées à un artiste-interprète ou à un compositeur ou à un album. 3. Le 31 mars 2015, a été conclu un contrat général d'intérêt commun, régissant, pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016, les conditions, notamment financières, de l'utilisation, par la société RFM Entreprises, sur ses webradios, des phonogrammes relevant du répertoire de la SCPP. 4. La loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, publiée au Journal officiel le 8 juillet 2016, a, en son article 13, complétant l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle par un 3°, étendu aux services de radiodiffusion en ligne non interactifs et non dédiés le champ d'application de la licence légale, jusque-là instituée au seul bénéfice des services de radiodiffusion par voie hertzienne terrestre et ainsi dispensé les éditeurs de webradios non interactives et non dédiées d'avoir à solliciter l'autorisation préalable des sociétés de gestion collective de producteurs de phonogrammes pour la diffusion des phonogrammes du commerce relevant de leur répertoire, cette diffusion étant désormais soumise à la licence légale, dont la rémunération équitable est la contrepartie. 5. Par lettre du 21 octobre 2016, la SCPP a proposé à la société RFM Entreprises de renouveler le contrat général d'intérêt commun pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017, en soutenant que la licence légale ne pouvait être applicable aux webradios tant que le barème de la rémunération équitable n'était pas fixé, soit par un accord collectif prévu à l'article L. 214-3 du code de la propriété intellectuelle, soit par la commission prévue à l'article L. 214-4 de ce code. 6. Par lettre du 15 février 2017, la société RFM Entreprises s'y est opposée, aux motifs que le contrat était devenu sans objet à la suite de l'extension du régime de la licence légale aux services de webradios et de l'application immédiate de l'article 13 de la loi du 7 juillet 2016 et que, dans l'attente de l'établissement du barème de rémunération équitable applicable aux webradios, les sommes afférentes à cette rémunération seraient provisionnées, puis versées rétroactivement à la Société pour la perception de la rémunération équitable sur la base du barème établi. 7. Le 10 mars 2017, la SCPP a assigné la société RFM Entreprises en contrefaçon des droits voisins des producteurs de phonogrammes sanctionnés par l'article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, au titre de la poursuite de la diffusion sur ses webradios, sans autorisation et sans paiement d'une quelconque rémunération, des phonogrammes de son répertoire, et de la violation des dispositions de l'article L. 213-1 du même code. Examen du moyen Enoncé du moyen 8. La SCPP fait grief à l'arrêt de dire que l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, instituant l'article L. 214-1, 3°, du code de la propriété intellectuelle, est entré en vigueur le 9 juillet 2016 et, en conséquence, de rejeter son action en contrefaçon, alors « que l'entrée en vigueur des dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ; que l'entrée en vigueur de la licence légale prévue au 3° de l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, est subordonnée à celle de l'accord collectif prévu à l'article L. 214-3 du même code ou, à défaut, de la décision de la commission prévue à l'article L. 241-4, instituant le barème et les modalités de versement de la rémunération équitable ; qu'en décidant que la disposition était entrée en vigueur le lendemain de sa publication, nonobstant l'absence d'accord collectif et de décision de la commission dédiée, à charge pour le juge judiciaire, en l'absence de règlement amiable, de fixer les indemnités compensatrices au bénéfice des titulaires de droits, la cour d'appel a violé l'article 1er du code civil, les articles L. 214-1 3°, L. 214-3 et L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle, interprétés à la lumière de l'article 8 § 2 de la directive 2006/115 du 12 décembre 2006, le principe de séparation des pouvoirs et la loi des 16-24 août 1790. » Réponse de la Cour 9. Après avoir constaté que la loi du 7 juillet 2016 ne prévoyait pas de dispositions transitoires pour l'application de son article 13 et n'en subordonnait pas l'entrée en vigueur à la publication d'un décret d'application, la cour d'appel a retenu, à bon droit, s'agissant de dispositions claires et précises en ce qu'elles étendaient aux webradios non interactives et non dédiées l'exception de licence légale, que le droit à rémunération équitable, contrepartie de la licence légale, trouvait à s'appliquer au bénéfice des titulaires de droits, quand bien même le barème de rémunération et les modalités de versement de la rémunération n'auraient pas encore été établis par les accords conventionnels prévus à l'article L. 214-3 du code de la propriété intellectuelle ou arrêtés par la commission visée à l'article L. 214-4 du même code, et qu'en conséquence l'article 13 de la loi du 7 juillet 2016 était entré en vigueur, par application des dispositions de l'article 1er du code civil, le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, soit le 9 juillet 2016. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la Société civile des producteurs phonographiques aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la Société civile des producteurs phonographiques. La SCPP reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, instituant l'article L. 214-1 3° du code de la propriété intellectuelle, était entré en vigueur le 9 juillet 2016 et de l'avoir en conséquence déboutée de son action en contrefaçon, ALORS QUE l'entrée en vigueur des dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ; que l'entrée en vigueur de la licence légale prévue au 3° de l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, est subordonnée à celle de l'accord collectif prévu à l'article L. 214-3 du même code ou, à défaut, de la décision de la commission prévue à l'article L. 241-4, instituant le barème et les modalités de versement de la rémunération équitable ; qu'en décidant que la disposition était entrée en vigueur le lendemain de sa publication, nonobstant l'absence d'accord collectif et de décision de la commission dédiée, à charge pour le juge judiciaire, en l'absence de règlement amiable, de fixer les indemnités compensatrices au bénéfice des titulaires de droits, la cour d'appel a violé l'article 1er du code civil, les articles L. 214-1 3°, L. 214-3 et L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle, interprétés à la lumière de l'article 8 § 2 de la directive 2006/115 du 12 décembre 2006, le principe de séparation des pouvoirs et la loi des 16-24 août 1790.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Déchéance M. CHAUVIN, président Arrêt n° 174 F-D Pourvoi n° G 22-50.005 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 Le procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, 4 boulevard du Palais, 75055 Paris cedex 01, a formé le pourvoi n° G 22-50.005 contre l'arrêt rendu le 16 décembre 2021 par la cour d'appel de Paris (audience solennelle), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [E] [B], domiciliée chez M. [Z] [O], [Adresse 1], 2°/ au bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris, domicilié [Adresse 2], pris en qualité de représentant de l'ordre, 3°/ au conseil de l'ordre des avocats au barreau de Paris, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Déchéance du pourvoi examinée d'office Vu l'article 978, alinéa 1er , du code de procédure civile : 1. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application du texte susvisé. 2. Il résulte de ce texte qu'à peine de déchéance du pourvoi, le mémoire en demande doit être signifié au défendeur n'ayant pas constitué avocat au plus tard dans le mois suivant l'expiration du délai de quatre mois à compter du pourvoi. 3. Le procureur général près la cour d'appel de Paris s'est pourvu en cassation le 15 février 2022 contre une décision rendue le 16 décembre 2021 par cette cour. 4. Il n'est pas justifié que le mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée remis au greffe le 13 juin 2022 ait été signifié à Mme [B], au bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris et au conseil de l'ordre des avocats au barreau de Paris, qui n'ont pas constitué avocat. 5. Il y a lieu, dès lors, de constater la déchéance du pourvoi. PAR CES MOTIFS, la Cour : CONSTATE la déchéance du pourvoi ; LAISSE les dépens à la charge du Trésor public ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 158 FS-D Pourvoi n° S 21-24.088 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 La Société civile des producteurs phonographiques (SCPP), société civile à caractère variable, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° S 21-24.088 contre l'arrêt rendu le 10 septembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l'opposant à la société Europe 2 entreprises, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la Société civile des producteurs phonographiques, de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Europe 2 entreprises, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, MM. Jessel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes de Cabarrus, Feydeau-Thieffry, M. Serrier, conseillers référendaires, Mme Mallet-Bricout, avocat général, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 septembre 2021), la Société civile des producteurs phonographiques (la SCPP), organisme de gestion collective, représente plus de trois mille producteurs de phonogrammes dont elle défend les intérêts et gère les catalogues phonographiques. A ce titre, elle autorise, pour le compte de ses adhérents, la reproduction, la mise à la disposition du public et la communication à celui-ci des phonogrammes du commerce et collecte les droits à rémunération prévus en contrepartie de ces exploitations par les dispositions de l'article L. 213-1 du code de la propriété intellectuelle. 2. La société Europe 2 Entreprises, ayant pour activité la diffusion de services radiophoniques, édite, depuis 2006, des programmes musicaux en ligne, accessibles sur le site « www.virginradio.fr » et communément désignés sous le terme de « webradios ». Ces webradios, telles « Virgin Radio Hits » et « Virgin Radio Rock », diffusées exclusivement sur le réseau internet, ne sont pas interactives avec le public, celui-ci n'intervenant pas dans le choix des phonogrammes programmés, et ne sont pas dédiées à un artiste-interprète ou à un compositeur ou à un album. 3. Le 31 mars 2015, a été conclu un contrat général d'intérêt commun, régissant, pour la période du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2016, les conditions, notamment financières, de l'utilisation, par la société Europe 2 Entreprises, sur ses webradios, des phonogrammes relevant du répertoire de la SCPP. 4. La loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, publiée au Journal officiel le 8 juillet 2016, a, en son article 13, complétant l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle par un 3°, étendu aux services de radiodiffusion en ligne non interactifs et non dédiés le champ d'application de la licence légale, jusque-là instituée au seul bénéfice des services de radiodiffusion par voie hertzienne terrestre et ainsi dispensé les éditeurs de webradios non interactives et non dédiées d'avoir à solliciter l'autorisation préalable des sociétés de gestion collective de producteurs de phonogrammes pour la diffusion des phonogrammes du commerce relevant de leur répertoire, cette diffusion étant désormais soumise à la licence légale, dont la rémunération équitable est la contrepartie. 5. Par lettre du 21 octobre 2016, la SCPP a proposé à la société Europe 2 Entreprises de renouveler le contrat général d'intérêt commun pour la période du 1er janvier 2017 au 31 décembre 2017, en soutenant que la licence légale ne pouvait être applicable aux webradios tant que le barème de la rémunération équitable n'était pas fixé, soit par un accord collectif prévu à l'article L. 214-3 du code de la propriété intellectuelle, soit par la commission prévue à l'article L. 214-4 de ce code. 6. Par lettre du 15 février 2017, la société Europe 2 Entreprises s'y est opposée, aux motifs que le contrat était devenu sans objet à la suite de l'extension du régime de la licence légale aux services de webradios et de l'application immédiate de l'article 13 de la loi du 7 juillet 2016 et que, dans l'attente de l'établissement du barème de rémunération équitable applicable aux webradios, les sommes afférentes à cette rémunération seraient provisionnées, puis versées rétroactivement à la Société pour la perception de la rémunération équitable sur la base du barème établi. 7. Le 10 mars 2017, la SCPP a assigné la société Europe 2 Entreprises en contrefaçon des droits voisins des producteurs de phonogrammes sanctionnés par l'article L. 335-4 du code de la propriété intellectuelle, au titre de la poursuite de la diffusion sur ses webradios, sans autorisation et sans paiement d'une quelconque rémunération, des phonogrammes de son répertoire, et de la violation des dispositions de l'article L. 213-1 du même code. Examen du moyen Enoncé du moyen 8. La SCPP fait grief à l'arrêt de dire que l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, instituant l'article L. 214-1, 3°, du code de la propriété intellectuelle, est entré en vigueur le 9 juillet 2016 et, en conséquence, de rejeter son action en contrefaçon, alors « que l'entrée en vigueur des dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ; que l'entrée en vigueur de la licence légale prévue au 3° de l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, est subordonnée à celle de l'accord collectif prévu à l'article L. 214-3 du même code ou, à défaut, de la décision de la commission prévue à l'article L. 241-4, instituant le barème et les modalités de versement de la rémunération équitable ; qu'en décidant que la disposition était entrée en vigueur le lendemain de sa publication, nonobstant l'absence d'accord collectif et de décision de la commission dédiée, à charge pour le juge judiciaire, en l'absence de règlement amiable, de fixer les indemnités compensatrices au bénéfice des titulaires de droits, la cour d'appel a violé l'article 1er du code civil, les articles L. 214-1 3°, L. 214-3 et L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle, interprétés à la lumière de l'article 8 § 2 de la directive 2006/115 du 12 décembre 2006, le principe de séparation des pouvoirs et la loi des 16-24 août 1790. » Réponse de la Cour 9. Après avoir constaté que la loi du 7 juillet 2016 ne prévoyait pas de dispositions transitoires pour l'application de son article 13 et n'en subordonnait pas l'entrée en vigueur à la publication d'un décret d'application, la cour d'appel a retenu, à bon droit,s'agissant de dispositions claires et précises en ce qu'elles étendaient aux webradios non interactives et non dédiées l'exception de licence légale, que le droit à rémunération équitable, contrepartie de la licence légale, trouvait à s'appliquer au bénéfice des titulaires de droits, quand bien même le barème de rémunération et les modalités de versement de la rémunération n'auraient pas encore été établis par les accords conventionnels prévus à l'article L. 214-3 du code de la propriété intellectuelle ou arrêtés par la commission visée à l'article L. 214-4 du même code, et qu'en conséquence l'article 13 de la loi du 7 juillet 2016 était entré en vigueur, par application des dispositions de l'article 1er du code civil, le lendemain de la publication de la loi au Journal officiel, soit le 9 juillet 2016. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la Société civile des producteurs phonographiques aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société civile des producteurs phonographiques. La SCPP reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit que l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, instituant l'article L. 214-1 3° du code de la propriété intellectuelle, était entré en vigueur le 9 juillet 2016 et de l'avoir en conséquence déboutée de son action en contrefaçon, ALORS QUE l'entrée en vigueur des dispositions dont l'exécution nécessite des mesures d'application est reportée à la date d'entrée en vigueur de ces mesures ; que l'entrée en vigueur de la licence légale prévue au 3° de l'article L. 214-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de l'article 13 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016, est subordonnée à celle de l'accord collectif prévu à l'article L. 214-3 du même code ou, à défaut, de la décision de la commission prévue à l'article L. 241-4, instituant le barème et les modalités de versement de la rémunération équitable ; qu'en décidant que la disposition était entrée en vigueur le lendemain de sa publication, nonobstant l'absence d'accord collectif et de décision de la commission dédiée, à charge pour le juge judiciaire, en l'absence de règlement amiable, de fixer les indemnités compensatrices au bénéfice des titulaires de droits, la cour d'appel a violé l'article 1er du code civil, les articles L. 214-1 3°, L. 214-3 et L. 214-4 du code de la propriété intellectuelle, interprétés à la lumière de l'article 8 § 2 de la directive 2006/115 du 12 décembre 2006, le principe de séparation des pouvoirs et la loi des 16-24 août 1790.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 161 FS-D Pourvoi n° X 21-24.783 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [F] [P], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 21-24.783 contre le jugement rendu le 29 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Tours, dans le litige l'opposant à la société A&P réceptions, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kerner-Menay, conseiller, les observations de la SCP Guérin-Gougeon, avocat de M. [P], de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société A&P réceptions, et l'avis écrit de M. Chaumont, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kerner-Menay, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, MM. Jessel, Mornet, Chevalier, Mme Bacache-Gibeili, conseillers, Mmes Le Gall, de Cabarrus, Thieffry, M. Serrier, conseillers référendaires, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Tours, 29 septembre 2021), rendu en dernier ressort, le 11 décembre 2019, M. [P] a, en vue du mariage de son fils prévu le 3 octobre 2020, conclu un contrat de réservation d'une salle de réception auprès de la société A&P réceptions (la société) et a payé un acompte de 2 375 euros. Le contrat stipulait qu'en cas d'annulation de la manifestation par le client, le montant de la location resterait intégralement dû à la société, sauf cas de force majeure. 2. A la suite de la publication, en raison de la crise sanitaire liée à la Covid-19, d'un arrêté préfectoral du 27 septembre 2020 fixant, pour les événements familiaux se déroulant à compter du 28 septembre et jusqu'au 12 octobre 2020, une jauge maximale de trente personnes, M. [P] a sollicité la résolution du contrat et la restitution de son acompte en invoquant l'existence d'une force majeure. 3. A titre reconventionnel, la société a sollicité le paiement d'une somme de 2 375 euros, correspondant au solde de la location. Examen des moyens Sur le premier moyen 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 5. M. [P] fait grief au jugement de rejeter l'ensemble de ses demandes, alors « que M. [P] soutenait qu'en raison de l'arrêté du 27 septembre 2020 instaurant une jauge de trente personnes, la société n'était pas en mesure de fournir la prestation convenue, qui consistait en une mise à disposition d'un espace destiné à accueillir plus de six cent personnes, élément essentiel sans lequel il n'aurait jamais contracté ; qu'en retenant que si cet arrêté faisait peser sur la société des contraintes, celles-ci ne rendaient pas impossible l'exécution du contrat dès lors qu'une réception demeurait possible dans la limite de trente personnes, sans rechercher si l'obligation de la société, au-delà de la seule mise à disposition d'un espace, ne consistait pas essentiellement à fournir cet espace avec une telle capacité d'accueil, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103, 1188 et 1218 du code civil. » Réponse de la Cour Vu les articles 1103 et 1218 du code civil : 6. Aux termes du premier de ces textes, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits. 7. Aux termes du second, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur. 8. Il s'en déduit que, si le créancier ne peut obtenir la résolution du contrat en soutenant que la force majeure l'a empêché de profiter de la contrepartie à laquelle il avait droit, il peut se prévaloir de l'inexécution par le débiteur de son obligation contractuelle en raison de la force majeure. 9. Pour rejeter les demandes de M. [P], le jugement retient que les contraintes liées à la crise sanitaire ne constituaient pas un élément irrésistible dès lors que la société était en mesure de fournir la prestation, M. [P] pouvant organiser une réception dans la salle louée dans la limite de trente convives. 10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'obligation de la société ne consistait pas à mettre à la disposition de M. [P] un espace dans lequel il pourrait accueillir effectivement plusieurs centaines de personnes qu'elle s'était trouvée elle-même dans l'impossibilité d'exécuter, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision. Et sur le troisième moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 11. M. [P] fait grief au jugement de le condamner à verser à la société la somme de 2 375 euros correspondant au solde dû en application du contrat, alors « que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen de cassation entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation de ce chef de dispositif par application de l'article 624 du code de procédure civile, le chef de dispositif faisant droit à une demande reconventionnelle d'application du contrat présentant un lien d'indivisibilité et de dépendance nécessaire avec celui rejetant la demande de résolution de ce même contrat. » Réponse de la Cour Vu l'article 624 du code de procédure civile : 12. En application de ce texte, la cassation des dispositions du jugement rejetant les demandes formées par M. [P] entraîne la cassation du chef de dispositif qui le condamne à payer à la société une somme correspondant au solde restant dû, lequel s'y attache par un lien d'indivisibilité et de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 29 septembre 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Tours ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Blois ; Condamne la société A&P réceptions aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Guérin-Gougeon, avocat aux Conseils, pour M. [P] PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [P] fait grief au jugement attaqué d'avoir rejeté l'ensemble de ses demandes ; 1°) Alors que les parties peuvent à tout moment donner expressément leur accord pour que la procédure se déroule sans audience ; que le tribunal judiciaire, qui a tenu une audience sans répondre à la demande de M. [P] de mise en place d'une procédure sans audience ni constater le refus de la société d'y recourir, a violé l'article 828 du code de procédure civile ; 2°) Alors qu'il ne résulte d'aucune mention du jugement que le tribunal se serait prononcé sur la demande de dispense d'audience – qu'il constatait –, formulée par M. [P] pour raison de santé ; que le tribunal judiciaire, qui n'a ce faisant pas mis à la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, a violé l'article 831 du code de procédure civile ; 3°) Alors que lorsque le juge dispense une partie d'audience, les échanges entre les parties se font par écrits, de sorte qu'il n'y a pas lieu, afin de respecter le principe de la contradiction à l'égard de la partie dispensée pour un motif légitime, d'organiser une audience où serait entendue seule la partie adverse ; qu'en dispensant M. [P] d'audience tout en constatant la tenue d'une audience à laquelle était présent le conseil de la société, le tribunal judiciaire a violé les articles 16 et 831 du code de procédure civile ; 4°) Alors que lorsqu'une partie est dispensée d'audience, le juge organise les échanges écrits entre les parties, qui doivent se communiquer leurs écritures par lettre recommandée avec avis de réception dont elles doivent justifier auprès du tribunal ; que le tribunal judiciaire, qui a dispensé M. [P] d'audience et constaté que, le jour de celle-ci, la société avait déposé des conclusions – sur lesquelles il s'est prononcé –, sans toutefois s'assurer qu'il avait été justifié de leur communication au demandeur par courrier recommandé ni constater l'organisation par lui des échanges écrits entre les parties, a violé les articles 15, 16 et 831 du code de procédure civile. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION M. [P] fait grief au jugement attaqué d'avoir rejeté l'ensemble de ses demandes ; 1°) Alors qu'en énonçant que M. [P] ne pouvait, en sa qualité de créancier de l'obligation de prestation de réservation de salle, obtenir la résolution du contrat en invoquant n'avoir pu profiter du contrat en raison d'un cas de force majeure ayant empêché le débiteur de s'exécuter, après avoir pourtant constaté que le contrat avait instauré la possibilité, de part et d'autre, d'annuler la réservation pour des raisons de force majeure, ce qui l'autorisait à invoquer la force majeure ayant affecté l'obligation de son cocontractant, le tribunal judiciaire, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1103 et 1218 du code civil ; 2°) Alors qu'en tout état de cause, le créancier d'une obligation de fournir une prestation de réservation de salle peut, pour demander la résolution du contrat, invoquer la force majeure résultant des restrictions administratives prises à l'occasion de l'épidémie de Covid-19 et ayant empêché le débiteur de s'exécuter ; qu'en énonçant qu'en sa qualité de créancier d'une telle obligation, M. [P] ne pouvait obtenir la résolution du contrat en invoquant n'avoir pu profiter du contrat en raison d'un cas de force majeure, résultant desdites restrictions administratives et ayant empêché le débiteur de s'exécuter, le tribunal judiciaire a violé l'article 1218 du code civil ; 3°) Alors que M. [P] soutenait (conclusions p. 13) qu'en raison de l'arrêté du 27 septembre 2020 instaurant une jauge de 30 personnes, la société A&P Réceptions n'était pas en mesure de fournir la prestation convenue, qui consistait en une mise à disposition d'un espace destiné à accueillir plus de 600 personnes, élément essentiel sans lequel il n'aurait jamais contracté ; qu'en retenant que si cet arrêté faisait peser sur la société des contraintes, celles-ci ne rendaient pas impossible l'exécution du contrat dès lors qu'une réception demeurait possible dans la limite de 30 personnes, sans rechercher si l'obligation de la société, au-delà de la seule mise à disposition d'un espace, ne consistait pas essentiellement à fournir cet espace avec une telle capacité d'accueil, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103, 1188 et 1218 du code civil ; 4°) Alors que M. [P] soutenait (conclusions p. 23) que le contrat était caduc en application de l'article 1186 du code civil, l'un de ses éléments essentiels ayant disparu ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, le tribunal judiciaire a violé l'article 455 du code de procédure civile. TROISIÈME MOYEN DE CASSATION M. [P] fait grief au jugement attaqué de l'avoir condamné à verser à la société A&P Réceptions la somme de 2 375 € correspondant au solde dû en application du contrat ; 1°) Alors que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen de cassation entraînera nécessairement, par voie de conséquence, la cassation de ce chef de dispositif par application de l'article 624 du code de procédure civile, le chef de dispositif faisant droit à une demande reconventionnelle d'application du contrat présentant un lien d'indivisibilité et de dépendance nécessaire avec celui rejetant la demande de résolution de ce même contrat ; 2°) Alors que s'il fallait déduire du jugement attaqué que la demande de dispense d'audience formulée par M. [P] pour raison de santé a été rejetée, voire qu'aucune demande de dispense n'a été présentée, il en résulte que la procédure était orale ; qu'en condamnant M. [P] reconventionnellement, sans toutefois constater que la société avait soumis cette prétention à l'oral lors de l'audience du 2 juin 2021, le tribunal a violé les articles 817 et 831 du code de procédure civile ; 3°) Alors qu'en énonçant que M. [P] ne pouvait, en sa qualité de créancier de l'obligation de prestation de réservation de salle, obtenir la résolution du contrat en invoquant n'avoir pu profiter du contrat en raison d'un cas de force majeure ayant empêché le débiteur de s'exécuter, après avoir pourtant constaté que le contrat avait instauré la possibilité, de part et d'autre, d'annuler la réservation pour des raisons de force majeure, ce qui l'autorisait à invoquer la force majeure ayant affecté l'obligation de son cocontractant, le tribunal judiciaire, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 1103 et 1218 du code civil ; 4°) Alors qu'en tout état de cause, le créancier d'une obligation de fournir une prestation de réservation de salle peut, pour demander la résolution du contrat, invoquer la force majeure résultant des restrictions administratives prises à l'occasion de l'épidémie de Covid-19 et ayant empêché le débiteur de s'exécuter ; qu'en énonçant qu'en sa qualité de créancier d'une telle obligation, M. [P] ne pouvait obtenir la résolution du contrat en invoquant n'avoir pu profiter du contrat en raison d'un cas de force majeure, résultant desdites restrictions administratives et ayant empêché le débiteur de s'exécuter, le tribunal judiciaire a violé l'article 1218 du code civil ; 5°) Alors que M. [P] soutenait (conclusions p. 13) qu'en raison de l'arrêté du 27 septembre 2020 instaurant une jauge de 30 personnes, la société A&P Réceptions n'était pas en mesure de fournir la prestation convenue, qui consistait en une mise à disposition d'un espace destiné à accueillir plus de 600 personnes, élément essentiel sans lequel il n'aurait jamais contracté ; qu'en retenant que si cet arrêté faisait peser sur la société des contraintes, celles-ci ne rendaient pas impossible l'exécution du contrat dès lors qu'une réception demeurait possible dans la limite de 30 personnes, sans rechercher si l'obligation de la société, au-delà de la seule mise à disposition d'un espace, ne consistait pas essentiellement à fournir cet espace avec une telle capacité d'accueil, le tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard des articles 1103, 1188 et 1218 du code civil ; 6°) Alors que M. [P] soutenait que le contrat était caduc en application de l'article 1186 du code civil, l'un de ses éléments essentiels ayant disparu ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, le tribunal judiciaire a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Déchéance M. CHAUVIN, président Arrêt n° 175 F-D Pourvoi n° J 22-50.006 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 Le procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, [Adresse 2], a formé le pourvoi n° J 22-50.006 contre l'arrêt rendu le 16 décembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 13), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [Z] [H], domicilié [Adresse 1], 2°/ au bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris, domicilié [Adresse 3], pris en sa qualité de représentant de l'ordre, 3°/ au conseil de l'ordre des avocats au barreau de Paris, dont le siège est [Adresse 3], défendeurs à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Déchéance du pourvoi examinée d'office Vu l'article 978, alinéa 1er, du code de procédure civile : 1. Conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, avis a été donné aux parties qu'il est fait application du texte susvisé. 2. Il résulte de ce texte qu'à peine de déchéance du pourvoi, le mémoire en demande doit être signifié au défendeur n'ayant pas constitué avocat au plus tard dans le mois suivant l'expiration du délai de quatre mois à compter du pourvoi. 3. Le procureur général près la cour d'appel de Paris s'est pourvu en cassation le 15 février 2022 contre une décision rendue le 16 décembre 2021 par cette cour. 4. Il n'est pas justifié que le mémoire contenant les moyens de droit invoqués contre la décision attaquée remis au greffe le 13 juin 2022 ait été signifié à M. [H], au bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Paris et au conseil de l'ordre des avocats au barreau de Paris, qui n'ont pas constitué avocat. 5. Il y a lieu, dès lors, de constater la déchéance du pourvoi . PAR CES MOTIFS, la Cour : CONSTATE la déchéance du pourvoi ; LAISSE les dépens à la charge du Trésor public ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 163 F-D Pourvoi n° Y 22-10.712 Aide juridictionnelle totale en défense au profit de M. [D]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 7 décembre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [I] [D], domicilié chez M. [S] [M], avocat, [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 22-10.712 contre l'ordonnance rendue le 30 juin 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris (service des étrangers, pôle 1, chambre 11), dans le litige l'opposant : 1°/ au préfet de l'Essonne, domicilié [Adresse 2], 2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié [Adresse 3], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. [D], et l'avis de M. Aparisi, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 30 juin 2021), et les pièces de la procédure, le 30 avril 2021, M. [D], de nationalité égyptienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une obligation de quitter le territoire français. Par ordonnances des 3 mai 2021 et 28 mai 2021, cette mesure a été prolongée à deux reprises. 2. Le 28 juin 2021, le juge des libertés et de la détention a été saisi par le préfet, sur le fondement de l' article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), d'une requête en troisième prolongation de la mesure de rétention. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. M. [D] fait grief à l'ordonnance de prolonger la mesure de rétention de quinze jours, alors « qu'à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4 pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours, si, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ; qu'en retenant, pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention dont M. [D] faisait l'objet et qui prenait fin le 29 juin à 10h55, que si le confinement du retenu a contraint l'autorité administrative à annuler deux vols prévus au mois de juin 2021, les deux refus du retenu de se soumettre au test PCR au cours du mois de mai 2021, en vue d'embarquer à destination de l'Égypte les 18 et 31 mai 2021, doivent être considérés comme constituant une obstruction continue qui ne peut être remise en cause par les périodes de confinement au sein du centre de rétention lesquelles résultent de circonstances insurmontables, le délégué du premier président de la cour d'appel - qui a ainsi constaté que M. [D] n'avait pas manifesté d'autre obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement depuis son refus de se soumettre à un test PCR en vue d'un vol programmé le 31 mai 2021 - a violé l'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 742-5, alinéa 1er, du CESEDA : 4. Selon ce texte, le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention, notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement. 5. Pour prolonger la rétention de M. [D], l'ordonnance retient qu'au cours du mois de mai 2021, celui-ci a refusé à deux reprises de se soumettre à un test PCR, ce qui caractérise une obstruction continue. 6. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que M. [D] n'avait pas manifesté d'autre obstruction à l'exécution d'office de la mesure que ces refus, le premier président a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 7. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 8. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendu le 30 juin 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour M. [D]. M. [D] reproche à l'ordonnance attaquée d'avoir ordonné la prolongation, pour la troisième fois et pour une durée de quinze jours supplémentaires à compter du 29 juin 2021 à 10h55, jusqu'au 14 juillet 2021 à 10h55, de sa rétention au centre d'hébergement de [Localité 4] ou dans tout autre centre d'hébergement ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire ; 1°) ALORS QU'à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4 pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours, si, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ; qu'en retenant, pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention dont M. [D] faisait l'objet et qui prenait fin le 29 juin à 10h55, que si le confinement du retenu a contraint l'autorité administrative à annuler deux vols prévus au mois de juin 2021, les deux refus du retenu de se soumettre au test PCR au cours du mois de mai 2021, en vue d'embarquer à destination de l'Égypte les 18 et 31 mai 2021, doivent être considérés comme constituant une obstruction continue qui ne peut être remise en cause par les périodes de confinement au sein du centre de rétention lesquelles résultent de circonstances insurmontables, le délégué du premier président de la cour d'appel - qui a ainsi constaté que M. [D] n'avait pas manifesté d'autre obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement depuis son refus de se soumettre à un test PCR en vue d'un vol programmé le 31 mai 2021 - a violé l'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; 2°) ALORS QU'à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l'article L. 742-4 pour une nouvelle période d'une durée maximale de quinze jours, si, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement ; qu'en retenant, par motifs éventuellement adoptés de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, pour ordonner une troisième prolongation de la mesure de rétention dont M. [D] faisait l'objet, que dès lors qu'aucun texte ne prévoit les conséquences administratives en cas de placement en isolement d'un centre de rétention administrative et de la suspension des tests PCR indispensables à l'exécution de la mesure d'éloignement, il n'existe aucune irrégularité démontrant une atteinte portée aux droits de M. [D] sur qui repose la charge de la preuve de l'existence d'une telle atteinte, quand seul importait le point de savoir si M. [D] avait commis une obstruction à l'exécution de la mesure d'éloignement dans les quinze derniers jours, le délégué du premier président de la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation des articles L. 742-5 et L. 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 162 F-D Pourvois n° C 21-21.476 D 21-21.477 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 La société BCV avocats-Abogados, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé les pourvois n° C 21-21.476, D 21-21.477 contre deux arrêts rendus les 12 février 2020 et 14 juin 2021 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans les litiges l'opposant à M. [Z] [M] [H], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation. La demanderesse au pourvoi n° C 21-21.476 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi n° D 21-21.477 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société BCV Avocats-Abogados, de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [H], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° C 21-21.476 et D 21-21.477 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Agen, 12 février 2020 et 14 juin 2021), M. [H], avocat au barreau de Toulouse, a saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau de Toulouse d'un litige relatif à une créance d'honoraires à l'égard à la société BCV Avocats-Abogados, société d'avocats inscrite au barreau de Bordeaux (la société d'avocats). En application des articles 179-1 et suivants du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, le 19 octobre 2018, les bâtonniers de l'ordre des avocats aux barreaux de Toulouse et Bordeaux ont désigné le bâtonnier de l'ordre des avocats au barreau d'Agen (le bâtonnier tiers) pour régler le différend. 3. Le 26 juillet 2019, M. [H] a formalisé une requête adressée au bâtonnier tiers qui, le 9 août suivant, a enjoint la société d'avocats de conclure pour le 30 septembre en vue d'une convocation le 16 octobre 2019. 4. Le 9 septembre 2019, la société d'avocats a saisi la cour d'appel d'Agen d'une requête en constatation du dessaisissement du bâtonnier tiers et en nullité de la décision du 9 août 2019. Par arrêt du 12 février 2020, la cour d'appel a rejeté la requête. 5. Par décision du 13 juillet 2020, le bâtonnier tiers a condamné la société d'avocats à payer à M. [H] la somme de 345 100 euros HT correspondant à 493 heures de travail sur la base horaire de 700 euros HT. Par arrêt du 14 juin 2021, la cour d'appel a confirmé cette décision. Examen des moyens Sur le moyen, pris en ses deux dernières branches, du pourvoi n° C 21-21.476, et sur le moyen, pris en ses quatre dernières branches, du pourvoi n° D 21-21.477, ci-après annexés 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en ses deux premières branches, du pourvoi n° C 21-21.476 Enoncé du moyen 7. La société d'avocats fait grief à l'arrêt du 12 février 2020 de rejeter sa requête, alors : « 1°/ que lorsqu'un différend d'ordre professionnel naît entre avocats relevant de barreaux différents, l'avocat le plus diligent saisit par requête son bâtonnier qui doit s'accorder avec celui de l'avocat défendeur sur la désignation du bâtonnier d'un barreau tiers ; que le tiers bâtonnier est saisi à réception de la requête initiale, sans que les avocats en litige n'aient à lui adresser une nouvelle requête ; qu'en décidant le contraire, pour dire que le tiers bâtonnier n'a été saisi qu'à réception de la nouvelle requête de Me [H], soit le 26 juillet 2019, et non à réception de la décision le désignant à laquelle était joint le dossier de Me [H], soit le 19 octobre 2018, la cour d'appel a violé les articles 142, 179-2 et 179-5 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 ; 2°/ qu'en tout état, lorsque la requête initiale est communiquée au tiers bâtonnier par le bâtonnier initialement saisi, le tiers bâtonnier doit à tout le moins être tenu pour saisi à compter du jour où il accuse réception auprès des avocats en litige de la requête initiale ; qu'en retenant que le tiers bâtonnier n'a été saisi qu'à réception de la nouvelle requête de Me [H], soit le 26 juillet 2019, quand ils constataient pourtant que le tiers bâtonnier avait reçu le 19 octobre 2018 la décision le désignant à laquelle était joint le dossier de Me [H] et en avait accusé réception auprès des avocats en litige par lettre du 6 février 2019, la cour d'appel a violé les articles 142, 179-2 et 179-5 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991. » Réponse de la Cour 8. Le bâtonnier d'un barreau tiers, désigné en application de l'article 179-2, alinéa 3, du décret du 27 novembre 1991, est saisi, conformément à l'article 142 du même décret, par l'une ou l'autre des parties, soit par requête déposée contre récépissé au secrétariat de l'ordre des avocats au barreau dont le bâtonnier désigné est membre, soit par lettre recommandée avec demande d'avis de réception à lui adressée. Selon l'article 179-5, le bâtonnier rend sa décision dans un délai de quatre mois à compter de sa saisine, susceptible de prorogation. 9. Après avoir relevé que le bâtonnier tiers avait reçu la requête de M. [H], dans les formes prescrites à l'article 142, le 26 juillet 2019, peu important que la requête initiale lui ait été transmise avec la désignation par les bâtonniers de l'ordre des avocats aux barreaux de Toulouse et de Bordeaux, la cour d'appel en a justement déduit que celui-ci avait été saisi à cette date, de sorte que la décision du 9 août 2019 avait été rendue dans le délai de quatre mois. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi n° D 21-21.477 Enoncé du moyen 11. La société d'avocats fait grief à l'arrêt du 14 juin 2021 de la condamner à payer à M. [H] la somme de 345 100 euros HT, alors « que les honoraires de l'avocat tiennent compte notamment de ses diligences ; que faute d'avoir recherché si le taux horaire qu'ils retenaient était justifié au regard de la nature des diligences accomplies par M. [H], les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, ensemble l'article 11 du règlement intérieur national de la profession d'avocat. » Réponse de la Cour 12. Sous le couvert du grief non fondé de défaut de base légale, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine par les juges du fond du montant des honoraires dus par la SCP en application de l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et de l'article 11 du règlement intérieur national de la profession d'avocat. 13. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Condamne la société BCV Avocats-Abogados aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société BCV Avocats-Abogados et la condamne à payer à M. [H] la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen au pourvoi n° C 21-21.476 produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société BCV avocats-Abogados. L'arrêt attaqué, critiqué par la société BCV, encourt la censure ; EN CE QU' il a rejeté la requête de la SELARL BCV enregistrée au greffe le 9 septembre 2019 ; ALORS QUE, premièrement, lorsqu'un différend d'ordre professionnel naît entre avocats relevant de barreaux différents, l'avocat le plus diligent saisit par requête son bâtonnier qui doit s'accorder avec celui de l'avocat défendeur sur la désignation du bâtonnier d'un barreau tiers ; que le tiers bâtonnier est saisi à réception de la requête initiale, sans que les avocats en litige n'aient à lui adresser une nouvelle requête ; qu'en décidant le contraire, pour dire que le tiers bâtonnier n'a été saisi qu'à réception de la nouvelle requête de Me [H], soit le 26 juillet 2019, et non à réception de la décision le désignant à laquelle était joint le dossier de Me [H], soit le 19 octobre 2018, la cour d'appel a violé les articles 142, 179-2 et 179-5 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 ; ALORS QUE, deuxièmement, et en tout état, lorsque la requête initiale est communiquée au tiers bâtonnier par le bâtonnier initialement saisi, le tiers bâtonnier doit à tout le moins être tenu pour saisi à compter du jour où il accuse réception auprès des avocats en litige de la requête initiale ; qu'en retenant que le tiers bâtonnier n'a été saisi qu'à réception de la nouvelle requête de Me [H], soit le 26 juillet 2019, quand ils constataient pourtant que le tiers bâtonnier avait reçu le 19 octobre 2018 la décision le désignant à laquelle était joint le dossier de Me [H] et en avait accusé réception auprès des avocats en litige par lettre du 6 février 2019, la cour d'appel a violé les articles 142, 179-2 et 179-5 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 ; ALORS QUE, troisièmement, tout acte accompli par un bâtonnier, quand il est dessaisi de l'affaire, est nul pour excès de pouvoirs ; qu'en opposant au surplus, pour rejeter la demande en nullité de la société BCV, que la fixation du calendrier de procédure ne serait pas une décision, les juges du fond ont violé les articles 144 et 179-5 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, ensemble les règles gouvernant l'excès de pouvoirs ; ALORS QUE, quatrièmement, tout acte accompli par un bâtonnier, quand il est dessaisi de l'affaire, est nul pour excès de pouvoirs ; qu'en opposant au surplus, pour rejeter la demande en nullité de la société BCV, que les textes afférents ne prévoient expressément aucune cause de nullité, les juges du fond ont violé les articles 144 et 179-5 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991, ensemble les règles gouvernant l'excès de pouvoirs. Moyen au pourvoi n° D 21-21.477 produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la société BCV avocats-Abogados. L'arrêt attaqué, critiqué par la société BCV, encourt la censure ; EN CE QU' il a, confirmant la décision du bâtonnier d'[Localité 3], condamné la société BCV, représentée par Me [J], à payer à Me [H] la somme de 345.100 euros HT correspondant à 493 heures de travail sur la base horaire de 700 euros HT ; ALORS QUE, premièrement, les honoraires de l'avocat tiennent compte notamment de ses diligences ; que faute d'avoir recherché si le taux horaire qu'ils retenaient était justifié au regard de la nature des diligences accomplies par Me [H], les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, ensemble l'article 11 du règlement intérieur national de la profession d'avocat ; ALORS QUE, deuxièmement, les honoraires de l'avocat tiennent compte notamment de sa notoriété ; qu'en opposant à la contestation de la société BCV portant sur la notoriété de Me [H] et suivant laquelle un taux horaire de 700 euros HT était pratiqué par des avocats faisant partie du « Legal 500 Paris », dont ne fait pas partie Me [H], qu'elle serait dédaigneuse et déplacée, les juges du fond, qui ont refusé de se prononcer sur la notoriété de Me [H], ont violé l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, ensemble l'article 11 du règlement intérieur national de la profession d'avocat ; ALORS QUE, troisièmement, il appartient à l'avocat de justifier des éléments permettant de fixer ses honoraires et notamment de sa notoriété ; qu'en opposant à la contestation de la société BCV portant sur la notoriété de Me [H] et suivant laquelle un taux horaire de 700 euros HT était pratiqué par des avocats faisant partie du « Legal 500 Paris », dont ne fait pas partie Me [H], que celle-ci n'était pas étayée par une documentation quelconque, les juges du fond, qui ont fait peser la charge de la preuve sur la société BCV, ont violé l'article 1315, devenu 1353 du code civil, ensemble les articles 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971 et article 11 du règlement intérieur national de la profession d'avocat ; ALORS QUE, quatrièmement, la rémunération des prestations accomplies par un avocat au profit d'un autre avocat dans le cadre d'une affaire que ce dernier traite doit tenir compte du service rendu et de la rémunération perçue par le second pour cette affaire ; qu'en allouant à Me [H] une somme 345.100 euros au titre des prestations qu'il a réalisées au profit de la société BCV dans le cadre du dossier WCA, sans s'expliquer sur le service rendu, ni sur le montant des honoraires perçus par la société BCV dans ce dossier, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 10 de la loi n°71-1130 du 31 décembre 1971, ensemble l'article 11 du règlement intérieur national de la profession d'avocat ; ALORS QUE, cinquièmement, et indépendamment même des règles relatives aux honoraires de l'avocat, faute d'avoir recherché si la somme allouée à Me [H] au terme de leur calcul n'était pas disproportionnée au regard des prestations fournies, en l'état de la rémunération perçue par la société BCV pour l'ensemble des diligences qu'elle a accomplies dans le cadre du dossier WCA, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1134, devenu 1103 du code civil, ensemble l'article 1er du protocole additionnel n°1 à la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 179 F-D Pourvoi n° P 21-23.234 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 L'Association pour le développement de l'accès aux soins dentaires (Addentis), association déclarée, dont le siège est [Adresse 5], a formé le pourvoi n° P 21-23.234 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 9-A), dans le litige l'opposant : 1°/ au syndicat Les Chirurgiens-dentistes de France, venant aux droits de la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD), dont le siège est [Adresse 4], 2°/ au Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes (CNOD), dont le siège est [Adresse 1], 3°/ à la Fédération nationale des centres de santé, dont le siège est [Adresse 3], 4°/ au syndicat des chirurgiens-dentistes de Seine-Saint-Denis, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de l'association Addentis, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat du syndicat Les Chirurgiens-dentistes de France et du syndicat des chirurgiens-dentistes de Seine-Saint-Denis, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat du Conseil national de l'ordre des chirurgiens dentistes, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 1er juillet 2021), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 26 avril 2017, pourvoi n° 16-14.036, 16-15.278, Bull. 2017, I, n° 93), l'Association pour le développement de l'accès aux soins dentaires Addentis (l'association), dont l'objet est la création et la gestion de centres de santé dentaires, a ouvert en Seine-Saint-Denis, à [Localité 8], le centre du Moulin, dont le journal Le Parisien, la revue Reflets et d'autres médias, notamment l'émission Capital, diffusée sur la chaîne de télévision M6, se sont fait l'écho, puis, à [Localité 6], le centre [Adresse 9] et, à [Localité 7], le centre Pablo Picasso. Elle a également créé un site internet et des plaquettes de présentation. 2. Le Conseil national de l'ordre des chirurgiens-dentistes et la Confédération nationale des syndicats dentaires devenue le Syndicat des chirurgiens-dentistes de France, estimant que l'association avait recouru à des procédés publicitaires pour promouvoir son activité au détriment des cabinets dentaires situés à proximité et ainsi commis des actes de concurrence déloyale à l'encontre des chirurgiens-dentistes exerçant à titre libéral, l'ont assignée afin d'obtenir le paiement de dommages-intérêts, la publication de la décision et une injonction de cesser immédiatement tout acte publicitaire et tout acte de concurrence déloyale. La Fédération nationale des centres de santé et le syndicat des chirurgiens-dentistes de Seine-Saint-Denis sont intervenus volontairement à l'instance. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. L'association fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de la profession de chirurgiens-dentistes, de lui enjoindre sous astreinte de supprimer « tous messages et actes de publicité » mentionnés dans l'arrêt et dans le dispositif comme constitutifs de concurrence déloyale et de la condamner au paiement de dommages-intérêts, alors : « 1°/ qu'un centre de santé peut sans commettre un acte de concurrence déloyale, recourir à tous les procédés y compris publicitaires non expressément interdits à la profession dont il emploie des membres ; qu'en enjoignant à l'association Addentis de supprimer tous ses messages qualifiés de publicitaires aux motifs qu'il "incombe nécessairement à l'association de s'abstenir de toute démarche ou publicité de nature commerciale" et qu'il "ressort finalement de la combinaison de la réglementation des centres de santé et des règles déontologiques applicables à leurs salariés, que la structure gérant un centre de santé commet une faute lorsque sa communication externe est de nature commerciale, qu'elle n'est pas conforme à la définition même d'un centre de santé ou crée une situation de concurrence déloyale entre les chirurgiens-dentistes salariés et les praticiens exerçant à titre libéral", la cour d'appel, qui n'a pas tenu compte de la suppression de l'interdiction de publicité faite aux chirurgiens-dentistes survenue depuis l'arrêt de cassation permettant sa saisine, a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil, ensemble les articles L. 6323-1, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2018-17 du 12 janvier 2018, et R. 4127-215 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue du décret n° 2020-1658 du 22 décembre 2020 ; 2°/ que jusqu'au 1er avril 2018, les centres de santé étaient autorisés à pratiquer "principalement" des soins de premier recours ; que depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n° 2018-17 du 12 janvier 2018, ces mêmes centres dispensent "des soins de premier recours et, le cas échéant, de second recours" ; qu'en condamnant l'association Addentis à payer des dommages et intérêts au CNOCD et en lui enjoignant de supprimer, pour l'avenir, ses messages publicitaires relatifs à son activité prothétique, soin de second recours, aux motifs que "le fait de centrer de manière délibérée sa communication publicitaire" sur cette activité constituerait une faute et "qu'en procédant à une publicité vantant [...] divers aspects d'une démarche commerciale portant en grande partie sur la pratique prothétique qui échappait au périmètre d'activité des centres de santé, l'association Addentis a créé de manière déloyale une distorsion de concurrence", alors même que les centres de santé ont toujours été autorisés à procéder à des soins de second recours, la cour d'appel a violé l'article L. 6323-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance susvisée ; 3°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que le SCDSSD et la CNSD reprochaient à l'association Addentis d'exercer son activité dans un but lucratif et de rompre l'égalité de moyens entre les praticiens en recourant à la publicité ; que le CNOCD faisait également ces deux griefs à l'exposante et lui reprochait, plus précisément, d'avoir eu recours à une publicité trompeuse ; qu'en reprochant néanmoins à l'association Addentis d'avoir "jeté le discrédit sur l'exercice libéral" et d'avoir "tenu un discours de dénigrement envers les praticiens exerçant à titre libéral", la cour d'appel, qui a relevé d'office le moyen tiré d'un prétendu dénigrement des praticiens libéraux, a violé l'article 16 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 4. En premier lieu, dans sa décision n° 2022-998 QPC du 3 juin 2022, le Conseil constitutionnel a retenu que, s'il résulte de l'interdiction de toute forme de publicité en faveur des centres de santé, prévue à l'article L. 6323-1-9 du code de la santé publique, une différence de traitement avec les professionnels de santé qui ne sont pas soumis à une telle interdiction, le législateur a, en adoptant ces dispositions, entendu éviter que ces centres, qui peuvent être créés et gérés notamment par des organismes à but lucratif, ne mettent en avant leurs conditions de prise en charge pour développer une pratique intensive de soins contraire à leur mission et de nature à porter atteinte à la qualité des soins dispensés et ainsi poursuivi un motif d'intérêt général et que, dans la mesure où l'interdiction de la publicité en faveur des centres de santé contribue à prévenir une telle pratique, la différence de traitement est en rapport avec l'objet de la loi, de sorte que le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi doit être écarté. Il s'en déduit que la cour d'appel n'avait pas à tenir compte de la suppression de l'interdiction de toute publicité à laquelle étaient soumis les chirurgiens-dentistes. 5. En deuxième lieu, c'est à bon droit que, se fondant sur la mission confiée aux centres de santé par l'article L. 6323-1-9 du code de la santé publique de dispenser des soins de premier recours et, le cas échéant, des soins de second recours, incluant les actes prothétiques, la cour d'appel a retenu que, bien qu'autorisée à pratiquer des soins de second recours, l'association ne pouvait, sans commettre de concurrence déloyale, recourir délibérément à une publicité à caractère commercial centrée sur ces actes et constituant la partie la plus rémunératrice de la pratique dentaire. 6. En troisième lieu, la cour d'appel qui s'est bornée à examiner, sans introduire de nouveaux éléments dans le débat, si l'existence d'une concurrence déloyale était établie, n'a pas méconnu le principe de la contradiction. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne l'association Addentis aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour l'association Addentis L'association Addentis fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait dit que l'association Addentis a commis des actes de concurrence déloyale à l'égard de la profession de chirurgiens-dentistes, de lui avoir enjoint de supprimer « tous messages et actes de publicité » mentionnés dans l'arrêt et dans le dispositif comme constitutifs de concurrence déloyale, et ce sous astreinte, et de l'avoir condamnée à verser au CNOCD la somme de 5 000 euros à titre de dommages et intérêts ; 1°/ ALORS QU'un centre de santé peut sans commettre un acte de concurrence déloyale, recourir à tous les procédés y compris publicitaires non expressément interdits à la profession dont il emploie des membres ; qu'en enjoignant à l'association Addentis de supprimer tous ses messages qualifiés de publicitaires aux motifs qu'il « incombe nécessairement à l'association de s'abstenir de toute démarche ou publicité de nature commerciale » (arrêt, p. 15, §3) et qu'il « ressort finalement de la combinaison de la réglementation des centres de santé et des règles déontologiques applicables à leurs salariés, que la structure gérant un centre de santé commet une faute lorsque sa communication externe est de nature commerciale, qu'elle n'est pas conforme à la définition même d'un centre de santé ou crée une situation de concurrence déloyale entre les chirurgiens-dentistes salariés et les praticiens exerçant à titre libéral » (arrêt, p. 15, §5), la cour d'appel, qui n'a pas tenu compte de la suppression de l'interdiction de publicité faite aux chirurgiens-dentistes survenue depuis l'arrêt de cassation permettant sa saisine, a violé l'article 1382 devenu 1240 du code civil, ensemble les articles L 6323-1, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2018-17 du 12 janvier 2018, et R 4127-215 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue du décret n° 2020-1658 du 22 décembre 2020 ; 2°/ ALORS QUE jusqu'au 1er avril 2018, les centres de santé étaient autorisés à pratiquer « principalement » des soins de premier recours ; que depuis l'entrée en vigueur de l'ordonnance n°2018-17 du 12 janvier 2018, ces mêmes centres dispensent « des soins de premier recours et, le cas échéant, de second recours » ; qu'en condamnant l'association Addentis à payer des dommages et intérêts au CNOCD et en lui enjoignant de supprimer, pour l'avenir, ses messages publicitaires relatifs à son activité prothétique, soin de second recours, aux motifs que « le fait de centrer de manière délibérée sa communication publicitaire » sur cette activité constituerait une faute (arrêt, p. 16, §5) et « qu'en procédant à une publicité vantant [...] divers aspects d'une démarche commerciale portant en grande partie sur la pratique prothétique qui échappait au périmètre d'activité des centres de santé, l'association Addentis a créé de manière déloyale une distorsion de concurrence » (arrêt, p. 18, in fine), alors même que les centres de santé ont toujours été autorisés à procéder à des soins de second recours, la cour d'appel a violé l'article L6323-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance susvisée ; 3°/ ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que le SCDSSD et la CNSD reprochaient à l'association Addentis d'exercer son activité dans un but lucratif (prod. n°8, pp. 11 à 13) et de rompre l'égalité de moyens entre les praticiens en recourant à la publicité (p.14 et suivantes) ; que le CNOCD faisait également ces deux griefs à l'exposante (prod. n°6, pp. 78 et 108) et lui reprochait, plus précisément, d'avoir eu recours à une publicité trompeuse ; qu'en reprochant néanmoins à l'association Addentis d'avoir « jeté le discrédit sur l'exercice libéral » (arrêt, p. 19, 1er §) et d'avoir « tenu un discours de dénigrement envers les praticiens exerçant à titre libéral » (arrêt, p. 17, avant-dernier paragraphe), la cour d'appel, qui a relevé d'office le moyen tiré d'un prétendu dénigrement des praticiens libéraux, a violé l'article 16 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 173 F-D Pourvoi n° M 21-17.827 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 Mme [Y] [J], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 21-17.827 contre le jugement rendu le 4 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Paris (pôle civil de proximité), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [O] [G], domicilié [Adresse 3], 2°/ à M. [D] [N], domicilié [Adresse 1], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme de Cabarrus, conseiller référendaire, les observations de la SCP Alain Bénabent , avocat de Mme [J], de Me Isabelle Galy, avocat de M. [G], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme de Cabarrus, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Paris, 4 mai 2021), rendu en dernier ressort, le 22 juin 2019, M. [G] a acquis de M. [N] un véhicule d'occasion qui lui a été présenté et vendu par l'intermédiaire de Mme [J], sa compagne. 2. Invoquant un bruit anormal du moteur, M. [G] a, par déclaration écrite au greffe, attrait devant un tribunal judiciaire M. [N] et Mme [J] en paiement du coût des travaux de réparation du véhicule, sur le fondement de la garantie des vices cachés. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 3. Mme [J] fait grief au jugement de la condamner solidairement avec M. [N] à payer à M. [G] une somme correspondant au coût des travaux de réparation du véhicule, alors « que le mandataire du vendeur n'est pas tenu à la garantie des vices cachés ; qu'en condamnant Mme [J], mandataire du propriétaire du véhicule vendu, sur le fondement de la garantie des vices cachés au motif que le prix de vente lui a été versé, le tribunal a violé l'article 1984 du code civil. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 4. M. [G] conteste la recevabilité du moyen. Il soutient que le moyen est nouveau et mélangé de fait et de droit. 5. Cependant, le moyen, qui ne se réfère à aucune considération de fait qui ne résulterait pas des énonciations du juge du fond, est de pur droit. 6. Le moyen est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu les articles 1984, alinéa 1er, et 1154, alinéa 1er, du code civil : 7. Aux termes du premier de ces textes, le mandat ou procuration est un acte par lequel une personne donne à une autre le pouvoir de faire quelque chose pour le mandant et en son nom. 8. Selon le second, lorsque le représentant agit dans la limite de ses pouvoirs au nom et pour le compte du représenté, celui-ci est seul tenu de l'engagement ainsi contracté. 9. Il en résulte que le mandant est seul tenu de l'engagement contracté en son nom et pour son compte par le mandataire qui n'est donc pas soumis à la garantie des vices cachés. 10. Pour condamner Mme [J], solidairement avec M. [N], au paiement d'une somme correspondant au coût des réparations du véhicule, le jugement retient que M. [G] justifie l'existence d'un vice caché, que M. [N] en était l'ancien propriétaire et que le prix de vente a été versé à Mme [J]. 11. En statuant ainsi, le tribunal a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 12. La cassation sur le chef de dispositif critiqué par le premier moyen, laquelle porte sur les condamnations prononcées à Mme [J] n'entraîne pas la cassation par voie de conséquence des chefs de dispositif condamnant M. [N], lesquels ne s'y rattachent pas par un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne Mme [J], solidairement avec M. [N], à payer à M. [G] la somme de 1 597,92 euros ainsi qu'aux dépens, le jugement rendu le 4 mai 2021, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Paris ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Paris, autrement composé ; Condamne M. [G] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [G] et le condamne à payer à Mme [J] la somme de 2 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour Mme [J] PREMIER MOYEN DE CASSATION Mme [Y] [J] fait grief au jugement attaqué de l'avoir condamnée solidairement avec M. [D] [N] à payer à M. [O] [G] la somme de 1.597,92 euros ; ALORS QUE le mandataire du vendeur n'est pas tenu à la garantie des vices cachés ; qu'en condamnant Mme [J], mandataire du propriétaire du véhicule vendu, sur le fondement de la garantie des vices cachés au motif que le prix de vente lui a été versé, le tribunal a violé l'article 1984 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE) Mme [Y] [J] fait grief au jugement attaqué de l'avoir condamnée solidairement avec M. [D] [N] à payer à M. [O] [G] la somme de 1.597,92 euros ; ALORS QUE la garantie des vices cachés suppose que les juges du fond constatent qu'un vice existait antérieurement à la vente, ce qu'il revient à l'acquéreur de prouver ; qu'en se contentant d'affirmer que « les défendeurs sont tenus des défauts cachés du véhicule dès lors que ces défauts sont découverts dans les semaines qui suivent la vente, qu'ils aient connu ou non le défaut qui affectait le véhicule » (cf. jugement p. 3, dernier §), sans constater que la preuve de l'antériorité du vice eût été rapportée, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1641 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 172 F-D Pourvoi n° P 22-13.854 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 La société PML, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 22-13.854 contre l'arrêt rendu le 3 décembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 2), dans le litige l'opposant à M. [D] [J], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société PML, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [I], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 décembre 2021), la société PML, qui conçoit et commercialise des boîtes à musique à manivelle incorporant des oeuvres musicales, a fabriqué quatre modèles incorporant les morceaux de [R] [V] « La Mer »,« Y a d'la joie », « Je Chante » et « Douce France », après avoir obtenu les autorisations de reproduction et de fragmentation de la SACEM ainsi que l'accord des Editions Raoul Breton avec lesquelles M. [J], légataire universel de [R] [V], décédé le 19 février 2001, avait conclu un contrat d'édition. 2. Le 9 janvier 2019, M. [J] a assigné la société PML en indemnisation de son préjudice pour violation de son droit moral. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. La société PML fait grief à l'arrêt de dire que la fabrication et la commercialisation des boîtes à musiques « La Mer »,« Y a d'la joie », « Je Chante » et « Douce France » sont constitutives d'une atteinte au droit moral de l'auteur, de la condamner à payer à M. [J] des dommages-intérêts et de lui ordonner de cesser la fabrication et la commercialisation de ces boîtes à musique et de détruire le stock en sa possession, alors « que le juge qui retient l'existence d'une atteinte portée au droit au respect de l'oeuvre, doit caractériser une altération ou une dénaturation de cette oeuvre ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait retenir que les boîtes à musique litigieuses portaient atteinte au droit moral de l'auteur, aux motifs inopérants et infondés que la mélodie qu'elles émettaient était « un arrangement musical dénué de parole constituant une simplification extrême de la mélodie originelle pour l'adapter à un seul instrument et lui permettre d'être entendue en tournant manuellement une petite manivelle », et au motif erronés que la mélodie variait nettement en fonction de la vitesse à laquelle la manivelle est actionnée et, que si à une certaine vitesse la mélodie entendue permettait de rappeler la chanson originelle, elle était, à d'autres vitesses, tout à fait inaudible, qu'en tout état de cause, on ne retrouvait pas, dans cette simplification excessive de la mélodie de [R] [V], la richesse et la texture de la musique originelle, et que la mélodie de douze secondes n'était pas une simple reproduction fragmentée des oeuvres pour lesquelles les autorisations de la SACEM et de la société Editions Raoul Breton étaient suffisantes mais un arrangement particulier, transformant l'oeuvre première et la banalisant, car en statuant comme elle l'a fait, par des motifs impropres à établir une atteinte au droit au respect des oeuvres « Je Chante », « Y a d'la Joie », « Douce France » et « La Mer », tenant à leur altération ou à leur dénaturation, la cour d'appel a violé l'article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle. » Réponse de la Cour 4. Ayant constaté que la mélodie produite par les boîtes à musiques litigieuses était un arrangement musical dénué de paroles constituant une simplification extrême de la mélodie originelle, qu'elle variait nettement en fonction de la vitesse et pouvait ainsi être inaudible, pour en déduire que cette simplification excessive, qui ne permettait pas de retrouver la richesse et la texture de la musique originelle, transformait l'oeuvre et la banalisait et n'était pas une simple reproduction fragmentée des oeuvres pour lesquelles les autorisations de la SACEM et de la société Editions Raoul Breton étaient suffisantes, la cour d'appel en a justement déduit que cet arrangement musical particulier portait atteinte au droit moral de l'auteur et requérait son autorisation ou celle de son ayant droit. 5. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société PML aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Cabinet, Munier-Apaire, avocat aux Conseils, pour la société PML La société PML fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR dit que la fabrication et la commercialisation par elle de boîtes à musique « Je Chante », « Y a d'la Joie », « Douce France » et « La Mer », sont constitutives d'une atteinte au droit moral de l'auteur, DE L'AVOIR condamnée à verser à M. [D] [J], légataire universel de [R] [V], la somme de 6.000 euros au total à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi, et DE LUI AVOIR ordonné de cesser la fabrication et la commercialisation des boîtes à musique « Je Chante », « Y a d'la Joie », « Douce France » et « La Mer », et de détruire les stocks en sa possession dans les 15 jours de la signification de l'arrêt ; ALORS QUE le juge qui retient l'existence d'une atteinte portée au droit au respect de l'oeuvre, doit caractériser une altération ou une dénaturation de cette oeuvre ; qu'en l'espèce, la cour d'appel ne pouvait retenir que les boîtes à musique litigieuses portaient atteinte au droit moral de l'auteur, aux motifs inopérants et infondés que la mélodie qu'elles émettaient était « un arrangement musical dénué de parole constituant une simplification extrême de la mélodie originelle pour l'adapter à un seul instrument et lui permettre d'être entendue en tournant manuellement une petite manivelle », et au motif erronés que la mélodie variait nettement en fonction de la vitesse à laquelle la manivelle est actionnée et, que si à une certaine vitesse la mélodie entendue permettait de rappeler la chanson originelle, elle était, à d'autres vitesses, tout à fait inaudible, qu'en tout état de cause, on ne retrouvait pas, dans cette simplification excessive de la mélodie de [R] [V], la richesse et la texture de la musique originelle, et que la mélodie de douze secondes n'était pas une simple reproduction fragmentée des oeuvres pour lesquelles les autorisations de la SACEM et de la société Editions Raoul Breton étaient suffisantes mais un arrangement particulier, transformant l'oeuvre première et la banalisant, car en statuant comme elle l'a fait, par des motifs impropres à établir une atteinte au droit au respect des oeuvres « Je Chante », « Y a d'la Joie », « Douce France » et « La Mer », tenant à leur altération ou à leur dénaturation, la cour d'appel a violé l'article L. 121-1 du code de la propriété intellectuelle.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Péremption d'instance M. CHAUVIN, président Arrêt n° 178 F-D Pourvoi n° W 11-14.668 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 La société Mondys, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 11-14.668 contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2011 par la cour d'appel de Colmar (3e chambre civile, section A), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [G] [U], domicilié [Adresse 3], 2°/ à la société Grenke location, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La société Grenke location a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Mondys, de la SCP Marc Lévis, avocat de la société Grenke location, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Le 2 novembre 2022, la SCP Marc Levis, agissant pour la société Grenke Location, a présenté une requête en constatation de la péremption d'instance à la suite de la décision de radiation rendue le 24 avril 2013 sur les pourvois principal et incident n° W 11.14-668 en cassation d'un arrêt rendu le 10 janvier 2011 par la cour d'appel de Colmar (3e chambre civile, section A). Péremption d'instance Vu la requête déposée le 2 novembre 2022 par la société Grenke location ; Vu l'article 386 du code de procédure civile : 1. Aux termes de ce texte, l'instance est périmée lorsque aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. 2. Par arrêt du 24 avril 2013, la première chambre civile de la Cour de cassation a prononcé la radiation des pourvois principal et incident n° W 11-14.668 formés respectivement par les société Mondys et Grenke location contre l'arrêt rendu le 10 janvier 2011 par la cour d'appel de Colmar (3e chambre civile, section A), en constatant que, par arrêt du 28 novembre 2012, l'instance avait été interrompue, les parties disposant d'un délai de quatre mois pour effectuer les diligences nécessaires à la reprise de l'instance, qui n'ont pas été accomplies. 3. Cet arrêt a été signifié les 29 avril, 5 mai et 7 mai 2014. 4. Aucune diligence n'ayant été accomplie pendant les deux ans qui ont suivi ces significations, il y a lieu de constater la péremption de l'instance. PAR CES MOTIFS, la Cour : CONSTATE la péremption de l'instance n° W 11.14-668 ; Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 170 F-D Pourvoi n° Z 21-25.590 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [P] [B], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-25.590 contre la décision rendue le 7 décembre 2021 par la commission nationale de discipline des membres du tribunal (commission nationale de discipline des conseillers prud'hommes), dans le litige l'opposant au directeur des services judiciaires, représentant le garde des sceaux, domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [B], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon la décision attaquée (commission nationale de discipline des conseillers prud'hommes, 7 décembre 2021), le ministre de la justice a saisi la commission nationale de discipline des conseillers prud'hommes de faits concernant M. [B]. Examen du moyen Enoncé du moyen 2. M. [B] fait grief à la décision de dire que ces faits sont constitutifs de fautes disciplinaires et de le suspendre pour une durée d'un mois, alors « que l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier, et que mention en soit faite dans la décision ; qu'en condamnant M. [B] à une peine disciplinaire, sans avoir relevé que lui ou son conseil avait été invité à prendre la parole en dernier, la cour d'appel a violé l'article R. 1442-22-13 du code du travail, ensemble l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Vu les articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et R. 1442-22-13 du code du travail : 3. En vertu du premier de ces textes, l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier et que mention en soit portée dans la décision. 4. Aux termes du second, après lecture du rapport et après audition du représentant du garde des sceaux, ministre de la justice, le conseiller prud'homme mis en cause est invité à fournir ses explications et moyens de défense sur les faits qui lui sont reprochés. 5. La décision condamne M. [B] à une peine disciplinaire sans constater que celui-ci, après lecture du rapport et après audition du représentant du garde des sceaux, ministre de la justice, ait été invité à fournir ses explications et moyens de défense sur les faits qui lui sont reprochés. 6. En statuant ainsi, la commission nationale de discipline des conseillers prud'hommes a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, la décision rendue le 7 décembre 2021, entre les parties, par la commission nationale de discipline des conseillers prud'hommes ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la commission nationale de discipline des conseillers prud'hommes autrement composée ; Condamne l'agent judiciaire de l'Etat aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la décision cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. [B] M. [B] fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que les faits étaient constitutifs de fautes disciplinaires et de l'AVOIR suspendu pour une durée d'un mois. ALORS QUE l'exigence d'un procès équitable implique qu'en matière disciplinaire la personne poursuivie ou son avocat soit entendu à l'audience et puisse avoir la parole en dernier, et que mention en soit faite dans la décision ; qu'en condamnant M. [B] à une peine disciplinaire, sans avoir relevé que lui ou son conseil avait été invité à prendre la parole en dernier, la cour d'appel a violé l'article R. 1442-22-13 du code du travail, ensemble l'article 6 § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation partielle sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 176 F-D Pourvoi n° F 21-25.205 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [R] [P]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 1er décembre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [R] [P], domicilié [Adresse 1], actuellement hospitalisé hôpital [5], [Adresse 3], a formé le pourvoi n° F 21-25.205 contre l'ordonnance rendue le 18 octobre 2021 par le premier président de la cour d'appel de Versailles, dans le litige l'opposant : 1°/ à l'hôpital [5], dont le siège est [Adresse 3], 2°/ à l'association Nouvelles Voies, dont le siège est [Adresse 2], prise en qualité de curateur de M. [R] [P], 3°/ au procureur général près la cour d'appel de Versailles, domicilié en son parquet général, [Adresse 4], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. [P], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Versailles, 18 octobre 2021), le 13 mai 2013, M. [P] a été admis en urgence en soins psychiatriques sans consentement, sous la forme d'une hospitalisation complète, par décision du directeur d'établissement et à la demande d'un tiers, sur le fondement de l'article L. 3212-3 du code de la santé publique. La mesure a, depuis, été maintenue de manière continue, sous différentes formes. Après une période de programme de soins débutée le 15 juin 2021, le directeur d'établissement a décidé, le 29 septembre 2021, d'une réadmission en hospitalisation complète du patient. 2. Le 1er octobre 2021, le directeur d'établissement a saisi le juge des libertés et de la détention d'une demande de prolongation de la mesure sur le fondement de l'article L. 3211-12-1 du code de la santé publique. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. M. [P] fait grief à l'ordonnance de rejeter les moyens d'irrégularités soulevés et d'ordonner le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète, alors « que le juge ne peut statuer sans avoir communication de la décision d'admission, en l'espèce du 13 mai 2013 ; qu'en outre la durée des soins ayant manifestement excédé une période continue d'un an à compter de l'admission en soins, le maintien de ces soins était subordonné à une évaluation médicale approfondie de l'état mental de la personne réalisée par le collège mentionné à l'article L. 3211-9 et cette évaluation devait être renouvelée tous les ans ; que le défaut de production de la décision d'admission et des évaluations annuelles, comme d'un des certificats médicaux, des avis médicaux ou des attestations mentionnés à l'article L. 3211-7 du code de la santé publique devant entraîner la levée de la mesure de soins, l'ordonnance attaquée a été rendue en violation des dispositions des articles L. 3211-7 et R. 3211-12 du code de la santé publique. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 3212-7, alinéa 3, R. 3211-12 et R. 3211-24 du code de la santé publique : 4. Selon le premier de ces textes, lorsque la durée des soins excède une période continue d'un an à compter de l'admission en soins, le maintien de ces soins est subordonné à une évaluation médicale approfondie de l'état mental de la personne réalisée par le collège mentionné à l'article L. 3211-9, cette évaluation étant renouvelée tous les ans. 5. Selon le troisième, la requête saisissant le juge des libertés et de la détention en contrôle obligatoire et systématique des mesures d'hospitalisation complète sans consentement doit être accompagnée des pièces énumérées au deuxième, parmi lesquelles figurent notamment la copie de la décision d'admission motivée, ainsi que, le cas échéant, l'avis du collège mentionné à l'article L. 3211-9. 6. Pour autoriser le maintien de l'hospitalisation complète de M. [P], l'ordonnance retient qu'il résulte des certificats médicaux produits que la mesure demeure adaptée, nécessaire et proportionnée à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis, celui-ci se trouvant dans l'impossibilité de consentir aux soins en raison des troubles décrits et ayant besoin de soins assortis d'une surveillance constante. 7. En statuant ainsi, alors qu'il ne ressort ni des décisions de première instance et d'appel ni des pièces de la procédure que la requête du directeur d'établissement était accompagnée de la décision d'admission du 13 mai 2013 et de la dernière évaluation médicale approfondie de l'état mental du patient maintenu en soins depuis cette date, le premier président a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 8. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond. 10. Les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'elle déclare l'appel de M. [P] recevable, l'ordonnance rendue le 18 octobre 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Versailles ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat aux Conseils, pour M. [P] Monsieur [P] fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir rejeté les moyens d'irrégularités soulevés et confirmé l'ordonnance du 6 octobre 2021 par laquelle le juge des libertés et de la détention de Nanterre a ordonné le maintien de la mesure de soins psychiatriques sous forme d'hospitalisation complète. 1°) ALORS QUE le juge ne peut statuer sans avoir communication de la décision d'admission, en l'espèce du 13 mai 2013 ; qu'en outre la durée des soins ayant manifestement excédé une période continue d'un an à compter de l'admission en soins, le maintien de ces soins était subordonné à une évaluation médicale approfondie de l'état mental de la personne réalisée par le collège mentionné à l'article L. 3211-9 et cette évaluation devait être renouvelée tous les ans ; que le défaut de production de la décision d'admission et des évaluations annuelles, comme d'un des certificats médicaux, des avis médicaux ou des attestations mentionnés à l'article L.3211-7 du code de la santé publique devant entraîner la levée de la mesure de soins, l'ordonnance attaquée a été rendue en violation des dispositions des articles L.3211-7 et R.3211-12 du code de la santé publique ; 2°) ALORS QUE toute décision d'admission comme de réadmission d'une personne faisant l'objet de soins psychiatriques en application des dispositions du code de la santé publiques relatives à l'hospitalisation sans consentement (articles L. 3212-1 à L. 3213-11) doit comporter les raisons qui la motivent afin de permettre une information du patient rapide, juste et appropriée à son état ; qu'une simple référence au certificat médical constatant les troubles justifiant le prononcé de la mesure d'admission en hospitalisation complète ne constitue pas la motivation exigée, la décision devant au moins reprendre les termes du certificat médical s'il n'est pas annexé, et ne suffit pas à une juste information de la patiente et porte atteinte à ses droits ; qu'en jugeant le contraire, le premier président de la cour d'appel a violé les articles L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ainsi que les articles L. 3211-3 et L.3211-12-1 du code de la santé publique ; 3°) ALORS QUE la computation légale des délais de procédure, ne sont pas applicables aux délais prévus à l'article L. 3211-7 du code de la santé publique, qui prescrit un examen médical mensuel du patient admis en soins psychiatriques sans consentement sur décision du directeur de l'établissement, cette obligation étant de nature administrative non contentieuse, en sorte que le premier délai coure à compter du lendemain de l'admission de la personne en soins psychiatriques sans consentement et les délais suivants, le lendemain de chaque examen médical, chacun de ces délais expirant le jour du mois suivant portant le même quantième, sans prorogation en cas d'expiration un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé ; qu'il ressort des constatations de l'ordonnance et de l'avis médical du 12 août 2021 que le certificat mensuel du 5 août 2021 a été établi par un médecin psychiatre de l'établissement d'accueil, « absent ce jour », ce qui interroge sur sa réalité, d'autant qu'il n'a pas été produit, et que le prochain rendez-vous du requérant a été fixé au 9 septembre 2021, soit après le 5 septembre 2021 ; qu'en validant le maintien de l'hospitalisation au vu de l'avis médical du 12 août 2021, l'ordonnance attaquée a violé les articles L. 3213-3 et R. 3211-7 du code de la santé publique et les articles 640 à 642 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 164 F-D Pourvoi n° F 21-23.986 Aide juridictionnelle totale en défense au profit de M. [Y]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 13 juin 2022. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 Le préfet de police, domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 21-23.986 contre l'ordonnance rendue le 27 septembre 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris (service des étrangers, pôle 1, chambre 11), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [V] [Y], domicilié [Adresse 3], 2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié [Adresse 2], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat du préfet de police, de Me Bertrand, avocat de M. [Y], et l'avis de M. Aparisi, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 27 septembre 2021), et les pièces de la procédure, le 23 septembre 2021, M. [Y], de nationalité afghane, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une décision de transfert en Roumanie. 2. Le juge des libertés et de la détention a été saisi, le 24 septembre 2021, par M. [Y] d'une contestation de la décision de placement en rétention sur le fondement de l'article L. 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et, le 25 septembre 2021, par le préfet d'une requête en prolongation de la mesure sur le fondement de l'article L. 742-1 du même code. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. Le préfet fait grief à l'ordonnance de rejeter sa requête, alors « que le juge administratif est seul compétent pour connaître de la légalité des décisions relatives au séjour et à l'éloignement, quand bien même leur illégalité serait invoquée par voie d'exception à l'occasion de la contestation, devant le juge judiciaire, de la décision de placement en rétention ; que le premier président s'est prononcé en considération de l'absence de suspension des éloignements forcés vers l'Afghanistan par la Roumanie, pays vers lequel M. [Y] devait être transféré, et du danger avéré auquel il serait soumis en cas de renvoi vers l'Afghanistan, pour en déduire que la rétention ne serait pas justifiée par la perspective raisonnable d'un éloignement à l'issue de la rétention ; que sous couvert d'appréciation de la justification de la perspective raisonnable d'éloignement à l'issue de la rétention, le premier président a porté une appréciation sur la légalité de la mesure de transfert, laquelle est distincte de la mesure de rétention, et a ainsi commis un excès de pouvoir en violation de la loi des 16-24 août 1790, du décret du 16 fructidor an III et des articles L. 572-4, L. 572-6, L. 742-1 et L. 742-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui organisent la répartition des compétences entre les deux ordres de juridictions. » Réponse de la Cour Vu la loi des 16-24 août 1790, le décret du 16 fructidor an III et les articles L. 572-4 et L. 741-10 du CESEDA : 4. Il résulte du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires, posé par les deux premiers de ces textes, qu'à l'exception des matières réservées par nature à l'autorité judiciaire et sauf disposition législative contraire, il n'appartient qu'à la juridiction administrative de connaître des recours contre les décisions prises par l'administration dans l'exercice de ses prérogatives de puissance publique. 5. Il résulte du troisième que l'étranger qui fait l'objet d'une décision de transfert peut en demander l'annulation au président du tribunal administratif. 6. Selon le dernier de ces textes, l'étranger qui fait l'objet d'une décision de placement en rétention peut la contester devant le juge des libertés et de la détention. 7. Le législateur a ainsi organisé deux compétences parallèles, exclusives l'une de l'autre. 8. Il s'en déduit que le juge administratif est seul compétent pour connaître de la légalité des décisions relatives au séjour et à l'éloignement, quand bien même leur illégalité serait invoquée par voie d'exception à l'occasion de la contestation, devant le juge judiciaire, de la décision de placement en rétention. 9. Pour remettre en liberté M. [Y], l'ordonnance retient que celui-ci est exposé à un risque réel et actuel de subir un traitement inhumain et dégradant en Afghanistan et qu'en l'absence de suspension des éloignements forcés vers l'Afghanistan par la Roumanie, la rétention n'est pas justifiée par la perspective raisonnable d'un éloignement à son issue. 10. En statuant ainsi, le premier président, qui, sous le couvert d'une appréciation de la perspective raisonnable d'un éloignement à l'issue de la rétention, a porté une appréciation sur la légalité de la décision administrative de transfert, a excédé ses pouvoirs en violation des textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 11. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 12. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 27 septembre 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [Y] ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour le préfet de police. Le préfet de police fait grief à l'ordonnance infirmative attaquée de rejeter sa requête tendant à la prolongation de la rétention et de remettre M. [Y] en liberté, alors : 1°) que le juge administratif est seul compétent pour connaître de la légalité des décisions relatives au séjour et à l'éloignement, quand bien même leur illégalité serait invoquée par voie d'exception à l'occasion de la contestation, devant le juge judiciaire, de la décision de placement en rétention ; que le premier président s'est prononcé en considération de l'absence de suspension des éloignements forcés vers l'Afghanistan par la Roumanie, pays vers lequel M. [Y] devait être transféré, et du danger avéré auquel il serait soumis en cas de renvoi vers l'Afghanistan, pour en déduire que la rétention ne serait pas justifiée par la perspective raisonnable d'un éloignement à l'issue de la rétention ; que sous couvert d'appréciation de la justification de la perspective raisonnable d'éloignement à l'issue de la rétention , le premier président a porté une appréciation sur la légalité de la mesure de transfert, laquelle est distincte de la mesure de rétention, et a ainsi commis un excès de pouvoir en violation de la loi des 16-24 août 1790, du décret du 16 fructidor an III et des articles L.572-4, L. 572-6, L. 742-1 et L. 742-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui organisent la répartition des compétences entre les deux ordres de juridictions ; 2°) que la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 n'est pas applicable à la rétention décidée pour assurer le transfert de la personne retenue vers l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale ; que les garanties de la personne placée en rétention sont assurées par l'article 28 du règlement UE 604/2013 du Parlement européen et du Conseil ; qu'en interprétant l'article L. 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à la lumière de l'article 15 de la directive précitée, le premier président a violé la directive précitée par fausse application ; 3°) qu'eu égard au niveau de protection des libertés et des droits fondamentaux dans les Etats membres de l'Union européenne, lorsque la demande de protection internationale a été introduite dans un Etat autre que la France, que cet Etat a accepté de prendre ou de reprendre en charge le demandeur et en l'absence de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, les craintes dont le demandeur fait état quant au défaut de protection dans cet Etat membre doivent en principe être présumées non fondées, sauf à ce que l'intéressé apporte, par tout moyen, la preuve contraire ; que la seule circonstance qu'à la suite du rejet de sa demande de protection par cet Etat membre l'intéressé serait susceptible de faire l'objet d'une mesure d'éloignement ne saurait caractériser la méconnaissance par cet Etat de ses obligations ; qu'en affirmant que la rétention n'était pas justifiée par la perspective - 3 – raisonnable d'un éloignement à l'issue de la rétention en considération de l'absence de suspension des éloignements forcés vers l'Afghanistan par la Roumanie, pays vers lequel M. [Y] devait être transféré, et du danger avéré auquel il serait soumis en cas de renvoi vers l'Afghanistan, pour en déduire que la rétention ne serait pas justifiée par la perspective raisonnable d'un éloignement à l'issue de la détention, sans établir qu'il existerait en Roumanie des défaillances systémiques dans le traitement des demandeurs d'asile, le premier président a privé sa décision de base légale au regard du 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ; 4°) qu'un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ ; qu'il résulte des pièces du dossier que la demande du préfet de prolongation de la rétention de M. [Y], formulée le 25 septembre 2021, était destinée à permettre son transfert vers la Roumanie, organisé le 27 septembre 2021, par le vol AF1888 à destination de Bucarest ; qu'en affirmant, malgré ces éléments, que la rétention n'était pas justifiée par la perspective raisonnable d'un éloignement à l'issue de la rétention en considération de l'absence de suspension des éloignements forcés vers l'Afghanistan par la Roumanie, pays vers lequel M. [Y] devait être transféré, et du danger avéré auquel il serait soumis en cas de renvoi vers l'Afghanistan, pour en déduire que la rétention ne serait pas justifiée par la perspective raisonnable d'un éloignement à l'issue de la détention, le premier président, qui s'est prononcé par un motif inopérant, a violé l'article L. 741-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 165 F-D Pourvoi n° Y 21-24.117 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [M] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 21-24.117 contre l'arrêt rendu le 13 septembre 2021 par la cour d'appel de Limoges (chambre économique et sociale), dans le litige l'opposant à la société Fidal, société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de Me Ridoux, avocat de M. [H], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Fidal, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Limoges, 13 septembre 2021), le 5 janvier 2004, M. [H] (le salarié) a été engagé en qualité d'avocat salarié par la société Fidal (l'employeur). 2. Le 4 mars 2019, il a été convoqué à un entretien préalable à son licenciement 3. Le 20 mars 2019, il a été licencié pour faute. 4. Le 10 mars 2020, il a saisi le bâtonnier du barreau de Limoges d'une contestation du bien-fondé de son licenciement et sollicité le paiement de dommages-intérêts. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deux dernières branches, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 6. Le salarié fait grief à l'arrêt de dire que son licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse et de rejeter sa demande en dommages-intérêts, alors « qu'est sans cause réelle et sérieuse le licenciement disciplinaire fondé sur des faits prescrits à la date d'engagement de la procédure de licenciement, en l'absence de faits de même nature commis dans le délai de prescription ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que les faits prétendument commis par le salarié pendant le délai de prescription sont constitutifs d'erreurs techniques dans l'établissement d'un acte de cession d'agent commercial, d'erreur sur l'étendue de l'obligation de conseil dans le cadre d'une cession d'entreprise, de manquement à l'obligation d'établir une lettre de mission et un devis, de manquement à la pluridisciplinarité, ce dont il résulte que ces agissements ne sont pas de même nature que ceux, plus anciens et prescrits, également reprochés au salarié, consistant en l'absence de certaines mentions dans un acte de cession de parts sociales, ainsi qu'en l'absence de soumission pour visa au directeur du département de divers actes ; qu'en rejetant néanmoins le moyen tiré de la prescription, la cour d'appel a violé l'article L. 1332-4 du code du travail. » Réponse de la Cour 7. Si, aux termes de l'article L. 1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement de poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, ce texte ne fait pas obstacle à la prise en considération de faits antérieurs à deux mois dès lors que le comportement du salarié s'est poursuivi ou s'est réitéré dans ce délai. 8. Ayant examiné la nature des différents manquements imputés au salarié dans la lettre de licenciement au titre d'un non-respect des règles déontologiques et internes à la société, d'un non-respect des règles générales du fonctionnement du cabinet et d'une absence de travail en équipe, la cour d'appel a retenu que, si certains faits étaient antérieurs au 4 janvier 2019, d'autres manquements reprochés entre le 4 février 2019 et le 1er mars 2019 étaient similaires et autorisaient la société à sanctionner les faits antérieurs au 4 janvier 2019 et que, postérieurement à des mises en garde des 24 novembre 2017 et 24 octobre 2018, l'avocat avait poursuivi certains errements. 9. Elle a pu en déduire que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [H] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par Me Ridoux, avocat aux Conseils, pour M. [H]. M. [M] [H] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse et de L'AVOIR débouté de sa demande en paiement de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; 1°) ALORS, de première part, QU'est sans cause réelle et sérieuse le licenciement disciplinaire fondé sur des faits prescrits à la date d'engagement de la procédure de licenciement, en l'absence de faits de même nature commis dans le délai de prescription ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que les faits prétendument commis par le salarié pendant le délai de prescription sont constitutifs d'erreurs techniques dans l'établissement d'un acte de cession d'agent commercial, d'erreur sur l'étendue de l'obligation de conseil dans le cadre d'une cession d'entreprise, de manquement à l'obligation d'établir une lettre de mission et un devis, de manquement à la pluridisciplinarité, ce dont il résulte que ces agissements ne sont pas de même nature que ceux, plus anciens et prescrits, également reprochés au salarié, consistant en l'absence de certaines mentions dans un acte de cession de parts sociales, ainsi qu'en l'absence de soumission pour visa au directeur du département de divers actes ; qu'en rejetant néanmoins le moyen tiré de la prescription, la cour d'appel a violé l'article L. 1332-4 du code du travail ; 2°) ALORS, de deuxième part, QU'est sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé pour faute à raison de faits relevant, en l'absence de mauvaise volonté délibérée du salarié, d'une insuffisance professionnelle ; qu'en se bornant, pour dire justifié le licenciement pour faute de M. [H], à relever quelques erreurs techniques commises par le salarié dans l'exécution de son travail ainsi que des manquements ponctuels aux règles déontologiques et de fonctionnement du cabinet, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la mauvaise volonté délibérée du salarié de commettre ces faits, a violé les articles L. 1235-1 et L. L. 1331-1 du code du travail ; 3°) ALORS, de troisième part, QUE l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ; que méconnaît l'objet du litige le juge qui tient pour constant un fait dont l'exactitude est discutée ; que devant la cour d'appel, M. [H] a invoqué la prescription des griefs afférents à l'acte de cession d'agent commercial immobilier du 31 décembre 2018 (conclusions d'appel, p. 4), ce dont il résulte nécessairement qu'il contestait que l'employeur n'ait eu connaissance de cet acte que le 4 février 2019, postérieurement à l'engagement des poursuites disciplinaires ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel, qui a méconnu l'objet du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 177 F-D Pourvoi n° P 22-10.174 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [C] [O] [B]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 9 novembre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [C] [O] [B], domicilié chez M. [H] [W], avocat, [Adresse 1], a formé le pourvoi n° P 22-10.174 contre l'ordonnance rendue le 22 mai 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant au préfet de l'Essonne, domicilié préfecture de l'Essonne, [Adresse 2], défendeur à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. [O] [B], et l'avis de M. Aparisi, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Feydeau-Thieffry, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'ordonnance attaquée rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 22 mai 2021), et les pièces de la procédure, le 18 mai 2021, M. [O] [B], de nationalité guinéenne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une décision de transfert aux autorités allemandes responsables de l'examen de sa demande d'asile. 2. Le 19 mai 2021, le juge des libertés et de la détention a été saisi par M. [O] [B] d'une contestation de la décision de placement en rétention sur le fondement de l'article L. 712-1, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) et par le préfet d'une demande de première prolongation de la mesure sur le fondement de l'article L. 742-1 du même code. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le moyen relevé d'office 4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu l'article R. 743-18, alinéa 2, du CESEDA : 5. Il résulte de ce texte que, lorsque le premier président statue sur un appel formé contre une ordonnance du juge des libertés et de la détention en matière de rétention administrative, la comparution des parties à l'audience est facultative. 6. Pour rejeter la requête en contestation de la décision de placement en rétention et prolonger la rétention de M. [O] [B], l'ordonnance relève que cette requête n'a été soutenue en aucun de ses moyens. 7. En statuant ainsi, alors qu'il lui incombait, même en l'absence de M. [O] [B] et de son avocat, de répondre au moyen figurant dans les conclusions qui lui avait été adressées, le premier président a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 8. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit statué sur le fond dès lors que, les délais pour statuer étant expirés, il ne reste plus rien à juger. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 22 mai 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour M. [O] [B] Monsieur [C] [O] [B] fait grief à la décision infirmative attaquée d'AVOIR rejeté ses moyens de nullité du placement en rétention, rejeté la requête en contestation de placement en rétention et ordonné la prolongation de la détention de Monsieur [O] [B] dans les locaux ne dépendant pas de l'administration pénitentiaire pour une durée de 28 jours ; 1/ ALORS QUE l'irrégularité résultant de ce que l'arrêté de placement en rétention, qui doit être communiquée à l'étranger dans une langue qu'il comprend par l'intermédiaire d'un interprète, l'a été, sans nécessité, par l'intermédiaire de moyens de télécommunications, porte nécessairement atteinte aux droits de la personne en cause ; qu'en décidant, pour rejeter l'exception de nullité, qu'aucune atteinte aux droits de Monsieur [O] [B] ne résultait de ce que la notification à celui-ci de l'arrêté de placement en rétention avait été faite par le truchement d'un interprétariat téléphonique, le délégué du premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 743-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; 2/ ALORS QU'est déloyale la pratique ayant consisté à mentionner sur la convocation à un rendez-vous à la préfecture de Monsieur [O] [B], au cours duquel celui-ci a été placé en rétention, un rendez-vous ultérieur, conduisant ainsi celui-ci à penser qu'il ne serait pas placé en rétention à l'occasion de ce premier rendez-vous ; qu'en décidant du contraire, le délégué du premier président de la cour d'appel a méconnu les stipulations de l'article 5, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 3/ ALORS QU'en se bornant à retenir, pour rejeter la requête en contestation d'arrêté de placement en rétention et ordonner, sur la requête du préfet, la prolongation de la rétention de Monsieur [O] [B], que « la requête en contestation de l'arrêté de placement en rétention n'a été soutenue en aucun de ses moyens », sans motiver sa décision sur le bien-fondé de la requête du préfet et la justification légale d'un maintien en rétention, le délégué du premier président de la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article 455 du code de procédure civile et des articles 5 et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des libertés fondamentales ; 4/ ALORS QU'en se bornant, pour infirmer l'ordonnance entreprise, rejeter la requête en contestation d'arrêté de placement en rétention et ordonner, sur la requête du préfet, la prolongation de la rétention de Monsieur [O] [B], à affirmer que l'intéressé se serait vu notifier régulièrement l'arrêté en placement de rétention, que l'administration n'aurait pas fait preuve de déloyauté et que la requête en contestation de l'arrêté de placement en rétention n'a été soutenue en aucun de ses moyens, sans se prononcer sur la légalité du maintien de la mesure de rétention administrative, le délégué du premier président de la cour d'appel a méconnu l'effet dévolutif de l'appel et a violé les articles 561 et 562 du code de procédure civile ; 5/ ALORS QUE dans ses conclusions en vue de l'audience du 22 mai 2021, Monsieur [O] [B] faisait valoir qu'il avait respecté toutes les convocations, qu'il avait toujours justifié du même hébergement et que dès lors « l'arrêté de placement en rétention était irrégulier dans la mesure où il n'est pas proportionné, en l'absence de risque non négligeable de fuite » ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef des conclusions, le délégué du premier président de la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet de la requête en responsabilité M. CHAUVIN, Président, Arrêt n° 171 F-D Pourvoi n° D 21-50.020 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [C] [T], domicilié [Adresse 1], a formé la requête en responsabilité n° D 21-50.020 contre l'avis rendu le 4 octobre 2018 par le conseil de l'ordre des avocats à la Cour de cassation, dans le litige l'opposant à M. [I] [G], domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Le Gall, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [T], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. [G], et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents, Mme Le Gall, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Le 2 octobre 2004, M. [T] a souscrit auprès d'une banque un prêt à la consommation. Il a adhéré à l'assurance de groupe souscrite par la banque auprès de la Caisse nationale de prévoyance assurances (la CNP) couvrant les risques décès, perte totale et irréversible d'autonomie et incapacité temporaire de travail (ITT), à hauteur de 100 %. 2. Le bulletin d'adhésion prévoyait qu'en cas de déclaration inexacte sur son état de santé, l'assuré ne serait couvert qu'en cas de sinistre de nature accidentelle, l'accident étant défini comme « tout événement non intentionnel, générateur d'une atteinte corporelle, provenant exclusivement de l'action soudaine d'une cause extérieure. » 3. Le 30 septembre 2006, le syndrome de Guillain-Barré lui a été diagnostiqué et un arrêt de travail de six mois renouvelable lui a été prescrit. 4. M. [T] a demandé à la CNP de prendre en charge les échéances du prêt au titre de la garantie ITT, ce que l'assureur a refusé au motif, d'une part, que l'intéressé avait fait une déclaration inexacte en indiquant, lors de l'adhésion, ne pas être atteint d'hypertension artérielle et ne pas devoir subir de traitement médical dans les prochains mois, d'autre part, que la cause de l'incapacité temporaire de travail n'était pas de nature accidentelle. 5. Un jugement du 3 juillet 2008 a condamné la CNP à prendre en charge les échéances du prêt. 6. Par un premier arrêt du 29 mars 2011, la cour d'appel de Paris a considéré que M. [T] avait fait une fausse déclaration intentionnelle lors de son adhésion à l'assurance, de sorte qu'il ne pouvait bénéficier de la garantie qu'en cas de sinistre accidentel. Sur ce second point, elle a ordonné une expertise médicale. 7. Par un second arrêt du 26 novembre 2013, la cour d'appel a retenu que le syndrome de Guillain-Barré dont M. [T] était atteint ne pouvait provenir exclusivement de l'action soudaine d'une cause extérieure et a, en conséquence, rejeté les demandes de M. [T]. 8. Celui-ci a mandaté M. [G], avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, qui a formé un pourvoi en cassation contre chacun de ces deux arrêts. 9. Par un arrêt du 14 avril 2016 (2e Civ., 14 avril 2016, pourvois n° 14-19.961 et 14-21.367), la Cour de cassation a rejeté les pourvois. 10. Par requête du 24 janvier 2018, M. [T], soutenant que M. [G] avait omis d'invoquer certains moyens qui auraient été de nature à entraîner la cassation, a saisi pour avis le Conseil de l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation afin de mettre en cause sa responsabilité civile professionnelle. 11. Par avis du 4 octobre 2018, le Conseil de l'ordre a conclu que la responsabilité de M. [G] n'était pas engagée. 12. Par requête reçue au greffe le 25 mars 2021, M. [T] a saisi la Cour de cassation, en application de l'article 13, alinéa 2, de l'ordonnance du 10 septembre 1817 et de l'article R. 411-3 du code de l'organisation judiciaire. Examen de la requête Enoncé de la requête 13. M. [T] sollicite la condamnation de M. [G] à lui payer la somme de 50 000 euros en réparation d'une perte de chance d'obtenir la cassation des arrêts attaqués, de bénéficier de la prise en charge des échéances du prêt et ne pas subir de tracas liés aux procédures judiciaires, outre la somme de 2 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. 14. Il expose qu'au titre du pourvoi contre l'arrêt du 29 mars 2011, M. [G] n'a pas formé de moyen tiré de la dénaturation d'un certificat médical relatif à sa prise en charge, ni de moyen tiré d'un défaut de réponse à conclusions, lesquels auraient permis d'emporter la cassation de l'arrêt. 15. Il ajoute qu'au titre du pourvoi contre l'arrêt du 26 novembre 2013, M. [G] a omis de former un moyen tiré d'un défaut de réponse à conclusions, lequel présentait des chances sérieuses de succès. 16. M. [G] conclut au rejet de la requête. Réponse de la Cour Vu l'article 13, alinéa 2, de l'ordonnance du 10 septembre 1817 modifiée : 17. En premier lieu, M. [T] reproche à M. [G] de ne pas avoir formé de grief tiré d'une dénaturation du certificat médical, dans le pourvoi formé contre l'arrêt du 29 mars 2011. 18. Toutefois, si les constatations de la cour d'appel sont erronées quant à la durée du traitement suivi par M. [T] et mentionné sur le certificat, ces motifs sont surabondants dès lors que la cour d'appel s'est fondée sur une contradiction dans les déclarations de M. [T] qui avait attesté, lors de la souscription de l'assurance en 2004, ne pas devoir subir un traitement médical dans les prochains mois, mais avait indiqué, lors de sa demande de prise en charge du prêt en 2007, qu'il était suivi depuis dix ans pour cholestérol élevé et hypertension et que le certificat médical confirme la prise du traitement. Il en résulte que le grief prétendument omis n'aurait pas prospéré et ne peut donc entraîner la responsabilité de l'avocat. 19. En deuxième lieu, M. [T] reproche à M. [G] de ne pas avoir formé de grief tiré d'un défaut de réponse à conclusions, dans le pourvoi formé contre l'arrêt du 29 mars 2011. 20. Cependant, M. [T] avait déclaré, lors de la souscription de l'assurance, ne pas devoir suivre de traitement médical au cours des prochains mois, ce qui était erroné dès lors que la prise d'un traitement était constatée, peu important que ce soit à titre préventif pour une tension artérielle normale haute et non pour une hypertension artérielle. La cour d'appel n'ayant pas à répondre à de telles conclusions, le moyen prétendument omis aurait donc été inopérant, de sorte qu'aucune faute ne peut être retenue à ce titre. 21. En dernier lieu, M. [T] reproche à M. [G] de ne pas avoir formé de grief tiré d'un défaut de réponse à conclusions, dans le pourvoi formé contre l'arrêt du 26 novembre 2013. 22. Il est constant que l'arrêt du 26 novembre 2013 vise, au titre des dernières conclusions de M. [T], celles du 5 février 2013, alors que celui-ci avait déposé de nouvelles conclusions le 24 septembre suivant, contestant l'origine génétique de l'apparition du syndrome de Guillain Barré. 23. Néanmoins, ces conclusions ne comportaient pas de moyen nouveau et citaient un article de la doctrine médicale en ce sens, ainsi qu'une définition du mimétisme moléculaire. 24. Or, la cour d'appel qui n'aurait été aucunement tenue de se prononcer sur ces éléments médicaux, ni de suivre M. [T] dans le détail de son argumentation, s'est fondée sur l'expertise médicale qu'elle avait ordonnée, pour en conclure que le syndrome dont était atteint M. [T] ne provenait pas exclusivement de l'action soudaine d'une cause extérieure. Il en résulte que le grief tiré d'un défaut de réponse à conclusions n'aurait pu prospérer, de sorte que la faute alléguée n'est pas constituée. 25. L'existence d'une faute de M. [G] n'étant pas établie, la requête en responsabilité doit être rejetée. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE la requête ; Condamne M. [T] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 167 F-D Pourvoi n° J 22-10.699 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [Z]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 7 décembre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [I] [Z], domicilié chez SAER / France terre d'asile, [Adresse 1], a formé le pourvoi n° J 22-10.699 contre l'ordonnance rendue le 9 juin 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant : 1°/ au préfet de [Localité 4], domicilié préfecture de [Localité 4], [Adresse 3], 2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, [Adresse 2], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [Z], et l'avis de M. Aparisi, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 9 juin 2021), et les pièces de la procédure, le 3 juin 2021 à 11h27, M. [Z], de nationalité tunisienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une obligation de quitter le territoire français. 2. Le juge des libertés et de la détention a été saisi, le 5 juin 2021 à 11h20, par M. [Z] d'une contestation de la décision de placement en rétention sur le fondement de l'article L. 741-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA). Examen du moyen Enoncé du moyen 3. M. [Z] fait grief à l'ordonnance de déclarer son appel irrecevable, alors « que l'article L. 743-23 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que Le premier président de la cour d'appel ou son délégué peut, par ordonnance motivée et sans avoir préalablement convoqué les parties, rejeter les déclarations d'appel manifestement irrecevables ; qu'il résulte, par ailleurs, des articles L. 741-10, R. 741-3 et R. 743-2 du même code l'étranger qui fait l'objet d'une décision de placement en rétention peut la contester dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification devant le juge des libertés et de la détention en le saisissant, à peine d'irrecevabilité, d'une requête motivée ; qu'en décidant, en l'espèce, que l'appel est manifestement irrecevable, faute pour l'intéressé d'avoir présenté tous ses moyens de contestation au juge des libertés et de la détention dans le délai de 48 heures, quand il est constant que celui-ci a adressé au greffe, le 5 juin 2021 à 11h20, une requête motivée en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative qui lui avait été notifiée le 3 juin 2021, à 11h30, soit dans le délai de 48 heures, le délégué du premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 743-23 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble les articles L.741-10, R.741-3 et R.743-2 du même code. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 741-10, alinéa 1er, et R. 743-11 du CESEDA : 4. Aux termes du premier de ces textes, l'étranger qui fait l'objet d'une décision de placement en rétention peut la contester devant le juge des libertés et de la détention, dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification. 5. Selon le second, la déclaration d'appel doit être motivée à peine d'irrecevabilité. 6. Pour déclarer l'appel de M. [Z] irrecevable, l'ordonnance retient que l'appel est dénué de motivation dès lors que tous les moyens de contestation de l'arrêté de placement en rétention sont irrecevables comme tardifs en l'absence d'introduction, dans les quarante-huit heures, d'une requête en contestation de l'arrêté devant le juge des libertés et de la détention. 7. En statuant ainsi, alors qu'il résultait des constatations du juge des libertés et de la détention que M. [Z] l'avait saisi, moins de quarante-huit heures après la notification de son placement en rétention, d'une requête motivée en contestation de la régularité de cette décision, le premier président a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 8. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 9 juin 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [Z] ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour M. [Z]. M. [Z] fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir déclaré son appel irrecevable ; Alors que l'article L.743-23 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile prévoit que « Le premier président de la cour d'appel ou son délégué peut, par ordonnance motivée et sans avoir préalablement convoqué les parties, rejeter les déclarations d'appel manifestement irrecevables » ; qu'il résulte, par ailleurs, des articles L. 741-10, R. 741-3 et R. 743-2 du même code l'étranger qui fait l'objet d'une décision de placement en rétention peut la contester dans un délai de quarante-huit heures à compter de sa notification devant le juge des libertés et de la détention en le saisissant, à peine d'irrecevabilité, d'une requête motivée ; qu'en décidant, en l'espèce, que l'appel est manifestement irrecevable, faute pour l'intéressé d'avoir présenté tous ses moyens de contestation au juge des libertés et de la détention dans le délai de 48 heures, quand il est constant que celui-ci a adressé au greffe, le 5 juin 2021 à 11h20, une requête motivée en contestation de la régularité de la décision de placement en rétention administrative qui lui avait été notifiée le 3 juin 2021, à 11h30, soit dans le délai de 48 heures, le délégué du premier président de la cour d'appel a violé l'article L. 743-23 du code l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ensemble les articles L. 741-10, R. 741-3 et R. 743-2 du même code.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 166 F-D Pourvoi n° F 21-25.872 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 Mme [U] [D], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° F 21-25.872 contre l'ordonnance rendue le 26 octobre 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant : 1°/ au préfet de l'Essonne, domicilié [Adresse 3], 2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de Mme [D], et l'avis de M. Aparisi, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 26 octobre 2021), et les pièces de la procédure, le 17 septembre 2021, Mme [D], de nationalité vietnamienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placée en rétention administrative, en exécution d'un arrêté du 3 février 2021 pris par le préfet de l'Essonne et prononçant une obligation de quitter ce territoire. Par ordonnance du 25 septembre 2021, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention pour vingt-huit jours. 2. Par ordonnance du 11 octobre 2021, le juge des référés du tribunal administratif de Melun a suspendu l'exécution de la décision du 3 février 2021. 3. Le 23 octobre 2021, le juge des libertés et de la détention a été saisi par le préfet, sur le fondement de l'article L. 742-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), d'une requête en deuxième prolongation de la mesure de rétention. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Mme [D] fait grief à l'ordonnance de prolonger sa rétention administrative, alors « que, s'agissant d'une mesure de privation de liberté régie par les articles 66 de la Constitution, 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 740-1, L. 741-1, L. 741-3 et L. 752-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la rétention administrative doit être strictement nécessaire et proportionnée à l'objectif de mise en oeuvre de la mesure d'éloignement du ressortissant étranger dont la rétention est l'accessoire, de sorte que cette rétention doit immédiatement cesser dès l'instant où la mesure d'éloignement ne peut plus être exécutée à brève échéance ; qu'en confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant le placement dans un centre de rétention administrative de Mme [D], alors même que la mesure d'éloignement dont elle faisait l'objet avait auparavant été suspendue par le juge administratif, l'ordonnance rendue par la cour d'appel de Paris a violé les exigences constitutionnelles, conventionnelle et légales précitées. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 741-3 du CESEDA : 5. Aux termes de ce texte, un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L'administration exerce toute diligence à cet effet. 6. L'ordonnance prolonge la rétention administrative de Mme [D], tout en constatant que le juge des référés du tribunal administratif a suspendu l'exécution de la décision du 3 février 2021. 7. En statuant ainsi, alors que la suspension prononcée faisait obstacle au départ de Mme [D], le premier président a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 8. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 9. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 26 octobre 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de la ordonnance cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour Mme [D]. Mme [D] fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir confirmé l'ordonnance du 23 octobre 2021 du juge des libertés et de la détention prolongeant son placement dans un centre de rétention administrative pour une durée de trente jours à compter du même jour ; Alors que, s'agissant d'une mesure de privation de liberté régie par les articles 66 de la Constitution, 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, L. 740-1, L. 741-1, L. 741-3 et L. 752-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la rétention administrative doit être strictement nécessaire et proportionnée à l'objectif de mise en oeuvre de la mesure d'éloignement du ressortissant étranger dont la rétention est l'accessoire, de sorte que cette rétention doit immédiatement cesser dès l'instant où la mesure d'éloignement ne peut plus être exécutée à brève échéance ; qu'en confirmant l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant le placement dans un centre de rétention administrative de Mme [D], alors même que la mesure d'éloignement dont elle faisait l'objet avait auparavant été suspendue par le juge administratif, l'ordonnance rendue par la cour d'appel de Paris a violé les exigences constitutionnelles, conventionnelle et légales précitées.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Cassation sans renvoi M. CHAUVIN, président Arrêt n° 168 F-D Pourvoi n° A 22-12.094 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [T] [P]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 7 décembre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [T] [P], domicilié chez M. [R] [S], avocat, domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° A 22-12.094 contre l'ordonnance rendue le 29 juin 2021 par le premier président de la cour d'appel de Paris, dans le litige l'opposant au préfet de l'Essonne, domicilié [Adresse 2], défendeur à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Mornet, conseiller, les observations de Me Bertrand, avocat de M. [P], et l'avis de M. Aparisi, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Mornet, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel (Paris, 29 juin 2021), et les pièces de la procédure, le 28 avril 2021, M. [P], de nationalité tunisienne, en situation irrégulière sur le territoire national, a été placé en rétention administrative, en exécution d'une obligation de quitter le territoire français. Cette mesure a été prolongée à deux reprises. 2. Le 27 juin 2021, le juge des libertés et de la détention a été saisi par le préfet, sur le fondement de l' article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA), d'une requête en troisième prolongation de la mesure de rétention. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. M. [P] fait grief à l'ordonnance de prolonger la mesure de rétention d'une durée de quinze jours, alors « qu'avant l'expiration de la durée maximale de rétention, le juge judiciaire peut, à titre exceptionnel, être à nouveau saisi, notamment lorsque, "dans les quinze derniers jours", l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement le concernant ; qu'après avoir constaté que ce délai de quinze jours avait été "dépassé d'une journée" en l'espèce, puisque le refus par M. [P] de se soumettre à un test PCR-Covid était en date du 11 juin 2021 et la saisine du juge judiciaire à l'initiative du préfet de l'Essonne était intervenue le 27 juin suivant, soit plus de quinze jours plus tard, le premier président a considéré que cette circonstance n'emportait aucune conséquence dans la mesure où M. [P] exprimait une "opposition systématique" aux tests PCR-Covid, de sorte que "l'obstruction continue" ainsi manifestée par l'intéressé avait persisté postérieurement à la date du 11 juin 2021 ; qu'en statuant ainsi quand il résultait de ses propres constatations que M. [P] n'avait pas manifesté d'autre obstruction à l'exécution d'office de la mesure que son refus de se soumettre à un test PCR-Covid le 11 juin 2021, le premier président a violé l'article L. 742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 742-5 du CESEDA : 4. Selon ce texte, le juge des libertés et de la détention peut, à titre exceptionnel, être saisi d'une demande de troisième prolongation de la rétention notamment lorsque, dans les quinze derniers jours, l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement. 5. Pour prolonger la rétention de M. [P], l'ordonnance retient que, si le délai de quinze jours prévu par l'article L. 742-5 du CESEDA a été dépassé d'une journée, le refus de subir un test PCR opposé le 11 juin 2021, constituant un quatrième refus, s'analyse en un acte d'obstruction répété et que cette opposition systématique chaque fois qu'un test PCR a été nécessaire pour un vol programmé caractérise une obstruction continue. 6. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations que M. [P] n'avait manifesté aucune obstruction à l'exécution d'office de la décision d'éloignement dans les quinze derniers jours, le premier président a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 7. Tel que suggéré par le demandeur au pourvoi, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1er, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 8. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond, dès lors que, les délais légaux pour statuer sur la mesure étant expirés, il ne reste plus rien à juger. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'ordonnance rendue le 29 juin 2021, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance cassée ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour M. [T] [P] M. [T] [P] fait grief à la décision attaquée d'avoir ordonné une troisième prolongation de sa rétention administrative pour une durée de quinze jours à compter du 27 juin 2021, ALORS QU' avant l'expiration de la durée maximale de rétention, le juge judiciaire peut, à titre exceptionnel, être à nouveau saisi, notamment lorsque, « dans les quinze derniers jours », l'étranger a fait obstruction à l'exécution d'office de la mesure d'éloignement le concernant ; qu'après avoir constaté que ce délai de quinze jours avait été « dépassé d'une journée » en l'espèce, puisque le refus par M. [P] de se soumettre à un test PCR-COVID était en date du 11 juin 2021 et la saisine du juge judiciaire à l'initiative du préfet de l'Essonne était intervenue le 27 juin suivant, soit plus de quinze jours plus tard, le premier président a considéré que cette circonstance n'emportait aucune conséquence dans la mesure où M. [P] exprimait une « opposition systématique » aux tests PCR-COVID, de sorte que « l'obstruction continue » ainsi manifestée par l'intéressé avait persisté postérieurement à la date du 11 juin 2021 ; qu'en statuant ainsi quand il résultait de ses propres constatations que M. [P] n'avait pas manifesté d'autre obstruction à l'exécution d'office de la mesure que son refus de se soumettre à un test PCR-COVID le 11 juin 2021, le premier président a violé l'article L.742-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 8 mars 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 169 F-D Pourvoi n° K 21-19.275 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 8 MARS 2023 M. [B] [P], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° K 21-19.275 contre l'arrêt rendu le 14 mai 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5 - chambre 2), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [W] [X], domicilié [Adresse 1] (États-Unis), 2°/ à la société [X] France, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Chevalier, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [P], de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de M. [X] et de la société [X] France, et l'avis de Mme Mallet-Bricout, avocat général, après débats en l'audience publique du 24 janvier 2023 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Chevalier, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 mai 2021), M. [P], designer-plumassier, a collaboré avec la société [X] [Localité 4], spécialisée dans la ganterie et les accessoires de maroquinerie, entre 2006 et 2007. 2. Les 30 septembre et 10 octobre 2016, il a assigné en contrefaçon de ses droits d'auteur et atteinte à ses droits moraux cette société et son gérant, M. [X], au titre de l'exploitation des sacs à main « Riva 3 » et « Riva 4 » sans son autorisation. Examen des moyens Sur les deuxième et troisième moyens, 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Et sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. M. [P] fait grief à l'arrêt de dire que l'action en contrefaçon de ses droits d'auteur sur les sacs Riva 3 et Riva 4 dirigée contre la société [X] [Localité 4] et M. [X] est prescrite et de rejeter par conséquent l'ensemble des demandes fondées sur la contrefaçon, alors « que le juge qui décide que la demande dont il est saisie est irrecevable excède ses pouvoirs en statuant au fond ; qu'en confirmant en toutes ses dispositions le jugement qui, après avoir déclaré irrecevable l'action en contrefaçon de M. [P], a rejeté ses demandes, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles 122 et 562 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. Les premiers juges ayant, dans les motifs de leur décision, jugé irrecevable l'action de M. [P] en contrefaçon de ses droits d'auteur sans l'examiner au fond, le moyen, qui relève une simple impropriété des termes du dispositif du jugement rejetant ses demandes, confirmé par la cour d'appel, sans caractériser un excès de pouvoir, ne peut être accueilli. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [P] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [P] et le condamne à payer à la société [X] [Localité 4] et à M. [X] la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit mars deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour M. [P] PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [P] grief à l'arrêt confirmatif attaqué de dire que l'action en contrefaçon de ses droits d'auteur sur les sacs Riva 3 et Riva 4 dirigée contre la société [X] [Localité 4] et M. [X] est prescrite et de rejeter par conséquent l'ensemble des demandes fondées sur la contrefaçon, alors : que le juge qui décide que la demande dont elle est saisie est irrecevable excède ses pouvoirs en statuant au fond ; qu'en confirmant en toutes ses dispositions le jugement qui, après avoir déclaré irrecevable l'action en contrefaçon de M. [P], a rejeté ses demandes, la cour d'appel a excédé ses pouvoirs et violé les articles 122 et 562 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) M. [P] fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de dire que son action en contrefaçon de ses droits d'auteur sur les sacs Riva 3 et Riva 4 dirigée contre la société [X] [Localité 4] et M. [X] était prescrite, alors : 1°) que l'action en contrefaçon de droits d'auteur se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître le dernier fait lui permettant de l'exercer ; que, pour juger que l'action de M. [P] était prescrite, la cour d'appel a retenu qu'il avait eu connaissance dès l'année 2007 des faits qu'il invoquait à l'encontre de la société [X] et M. [X] et fixé à cette date le point de départ du délai de prescription de l'action en contrefaçon, retenant ainsi à ce titre le premier acte de contrefaçon et non le dernier acte connu ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 1240 et 2224 du code civil ; 2°) que, subsidiairement, l'action en contrefaçon de droits d'auteur se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître chaque acte lui permettant de l'exercer ; que, pour juger que l'action de M. [P] était prescrite, la cour d'appel a retenu qu'il avait eu connaissance dès l'année 2007 des faits qu'il invoquait à l'encontre de la société [X] et M. [X] et fixé à cette date le point de départ du délai de prescription de l'action en contrefaçon, retenant ainsi à ce titre le premier acte de contrefaçon et non chaque acte connu ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 1240 et 2224 du code civil ; 3°) que, en toute hypothèse, dans le cas où la situation donnant lieu à fin de non-recevoir est susceptible d'être régularisée, l'irrecevabilité sera écartée si sa cause a disparu au moment où le juge statue ; que le point de départ du délai de prescription d'une action en contrefaçon ne devant pas être fixé à la date du premier acte de contrefaçon mais soit à la date de connaissance du dernier acte connu soit à la date de connaissance de chaque acte commis, la fin de non-recevoir tirée de la prescription est écartée lorsqu'est produite la preuve de l'exploitation d'un bien contrefaisant pendant le cours de la procédure, de nature à démontrer, lorsque le juge statue, la permanence des actes de contrefaçon et, en conséquence, l'absence de prescription de l'action en contrefaçon de droits d'auteur ; qu'en écartant toute force probante au procès-verbal de constat d'huissier du 27 mars 2019 pour établir la continuité de l'exploitation des sacs litigieux, au prétexte inopérant qu'ils étaient postérieurs à l'assignation introductive d'instance, la cour d'appel a violé les articles 1240, 2219 et 2224 du code civil et 126 du code de procédure civile ; 4°) qu'à tout le moins, en jugeant que M. [P] se prévaudrait vainement d'une exploitation continue des sacs litigieux pendant les cinq années précédant l'assignation introductive d'instance de septembre-octobre 2016 car il ne produirait pour l'établir que « des pièces dénuées de valeur probante, telles des captures d'écran de sites internet, dont les conditions de réalisation ne sont pas renseignées et la date certaine n'est pas établie », sans examiner les autres pièces produites par le demandeur et notamment la pièce produite sous le numéro 12, dont la société [X] et M. [X] ne contestaient pas la date, correspondant à un article paru dans le magazine Madame [T] en 2012 promouvant la commercialisation d'un sac Ball Bag moins de cinq ans avant l'introduction de l'instance, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) M. [P] fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de rejeter ses demandes tendant à voir interdire à la société [X] [Localité 4] et Monsieur [W] [X] l'exploitation des sacs Ball Bag sous quelque forme que ce soit et ce sous astreinte de 5 000 euros par infraction constatée et de 10 000 euros par jour de retard et à voir ordonner la publication de l'arrêt à intervenir dans trois journaux ou périodiques et sur la page d'accueil des sites internet de la société [X] [Localité 4] alors : Que, le droit moral de l'auteur est imprescriptible et son droit patrimonial ouvert pendant soixante-dix ans après son décès, seules les actions en paiement des créances nées des atteintes qui sont portées à l'un ou à l'autre étant soumises à la prescription de droit commun de cinq ans ; qu'en jugeant prescrites par application des règles de droit commun la demande de M. [P] tendant à voir interdire l'exploitation des sacs Ball Bag portant atteinte à ses droits moraux et patrimoniaux d'auteur des oeuvres créées en 2007 dont il faisait la liste ainsi que la demande de publication de la décision à venir, la cour d'appel a violé, par refus d'application, les articles L. 121-1 et L. 123-1 du code de la propriété intellectuelle et par fausse application, l'article 2224 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 ISG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 218 F-D Pourvoi n° Z 21-14.067 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 Mme [G] [B], veuve [T], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-14.067 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant à M. [Z] [W], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de Mme [B], veuve [T], de la SARL Corlay, avocat de M. [W], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 novembre 2020), agissant sur le fondement d'une reconnaissance de dette notariée du 5 novembre 2010, Mme [T] a fait délivrer, par acte du 12 novembre 2018, un commandement de payer aux fins de saisie-vente à M. [W] qui a saisi un juge de l'exécution d'une contestation. Examen du moyen Enoncé du moyen 2. Mme [T] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a annulé le commandement à fin de saisie-vente du 15 novembre 2018 et rejeté ses demandes reconventionnelles, alors « que la prescription doit être invoquée de bonne foi ; que Mme [T] faisait valoir que l'acte notarié de reconnaissance de dette s'inscrivait dans un ensemble d'opérations dont la finalité était de restituer la maison familiale sise à [Adresse 2] et adjugée à M. [W] à son ancienne propriétaire ; qu'elle démontrait ainsi que la demande de remboursement des fonds prêtés à M. [W] n'avait de sens qu'en l'absence de rétrocession par ce dernier de l'ensemble immobilier ; qu'elle établissait, preuves à l'appui, que jusqu'à l'été 2018, M. [W] lui avait expressément laissé penser qu'il ne se considérait pas véritablement comme propriétaire de l'immeuble et qu'il lui rétrocéderait, afin qu'elle s'abstienne de lui demander le remboursement des sommes prêtées en vue de l'adjudication ; qu'elle faisait valoir à cet égard, preuves à l'appui, que M. [W] lui remettait au fur et à mesure tous les documents concernant la maison et qu'elle continuait de payer la taxe d'habitation, mais aussi les factures d'électricité afférentes à l'immeuble, notamment pour les années 2017 et 2018 ; que dès lors, en jugeant que l'action en paiement était prescrite et en se contentant d'affirmer que les relations de confiance invoquées entre les parties ne constituaient pas un cas d'empêchement d'agir prévu par la loi, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si M. [W] n'avait pas invoqué la prescription de mauvaise foi, en laissant délibérément penser à Mme [T], notamment par des actes positifs jusqu'à l'écoulement du délai de prescription, qu'il ne se considérait pas comme propriétaire du bien adjugé, qu'il lui rétrocéderait et qu'elle n'avait donc pas à solliciter le remboursement des sommes à lui prêtées en vue de cette adjudication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du Code civil. » Réponse de la Cour 3. Ayant retenu que les raisons d'équité invoquées ne pouvaient prospérer dès lors que les relations de confiance invoquées par Mme [T] ne constituaient pas un cas d'empêchement prévu par la loi ou par la convention ou encore par la force majeure, au sens de l'article 2234 du code civil, et qu'elle ne pouvait valablement laisser entendre que l'exercice de son action en recouvrement de sa créance était subordonné à la perte de la relation de confiance entretenue avec M. [W] dans la perspective d'une rétrocession du bien nonobstant la vente sur saisie immobilière dont il avait précédemment fait l'objet, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [B], veuve [T] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [B], veuve [T] et la condamne à payer à M. [W] la somme de 1 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat aux Conseils, pour Mme [G] [B], veuve [T] Mme [B] veuve [T] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a annulé le commandement à fin de saisie-vente en date du 15 novembre 2018 et rejeté ses demandes reconventionnelles ; ALORS QUE la prescription doit être invoquée de bonne foi ; que Mme [T] faisait valoir que l'acte notarié de reconnaissance de dette s'inscrivait dans un ensemble d'opérations dont la finalité était de restituer la maison familiale sise à [Adresse 2] et adjugée à M. [W] à son ancienne propriétaire (conclusions d'appel de Mme [T], p. 14) ; qu'elle démontrait ainsi que la demande de remboursement des fonds prêtés à M. [W] n'avait de sens qu'en l'absence de rétrocession par ce dernier de l'ensemble immobilier ; qu'elle établissait, preuves à l'appui, que jusqu'à l'été 2018, M. [W] lui avait expressément laissé penser qu'il ne se considérait pas véritablement comme propriétaire de l'immeuble et qu'il lui rétrocèderait, afin qu'elle s'abstienne de lui demander le remboursement des sommes prêtées en vue de l'adjudication (conclusions d'appel de Mme [T], p. 9 et p. 13) ; qu'elle faisait valoir à cet égard, preuves à l'appui, que M. [W] lui remettait au fur et à mesure tous les documents concernant la maison (conclusions d'appel de Mme [T], p. 13 ; pièce n°9 – production, n°6) et qu'elle continuait de payer la taxe d'habitation, mais aussi les factures d'électricité afférentes à l'immeuble, notamment pour les années 2017 et 2018 (conclusions d'appel de Mme [T], p. 4 – pièce n°3, production n°5) ; que dès lors, en jugeant que l'action en paiement était prescrite et en se contentant d'affirmer que les relations de confiance invoquées entre les parties ne constituaient pas un cas d'empêchement d'agir prévu par la loi, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si M. [W] n'avait pas invoqué la prescription de mauvaise foi, en laissant délibérément penser à Mme [T], notamment par des actes positifs jusqu'à l'écoulement du délai de prescription, qu'il ne se considérait pas comme propriétaire du bien adjugé, qu'il lui rétrocèderait et qu'elle n'avait donc pas à solliciter le remboursement des sommes à lui prêtées en vue de cette adjudication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du Code civil.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 225 F-D Pourvoi n° X 21-18.389 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 Mme [J] [B], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 21-18.389 contre l'arrêt rendu le 25 mars 2021 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant à la société RATP Habitat, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée Logis transport, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [B], de Me Haas, avocat de la société RATP Habitat, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 mars 2021), la société RATP Habitat a poursuivi l'expulsion de Mme [B] en lui faisant délivrer un commandement de quitter les lieux le 9 mars 2018 puis un procès-verbal de nullité d'expulsion le 18 mai 2018 et un procès-verbal d'expulsion le 1er août 2018. 2. Mme [B] a saisi un juge de l'exécution à fin de sursis à statuer, puis en nullité du commandement, enfin en nullité du procès-verbal d'expulsion. 3. Après jonction des différentes procédures, le juge de l'exécution a rejeté la demande de sursis à statuer et a débouté Mme [B] de ses autres demandes. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Mme [B] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du procès-verbal d'expulsion, de sa demande de réintégration dans les lieux sous astreinte, de sa demande en paiement des frais d'expulsion, et de ses plus amples demandes, alors : « 1°/ en premier lieu que dans les sociétés titulaires d'un office d'huissier de justice, chaque associé exerce les fonctions d'huissier au nom de la société, de sorte que le défaut de mention, sur un acte d'huissier, de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, constituent des irrégularités de fond ; qu'en jugeant, à propos du procès-verbal d'expulsion, du procès-verbal de tentative d'expulsion et du commandement de quitter les lieux, que « l'absence de précision de ce que la société officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, ne peut conduire à l'annulation de l'acte qu'à la condition que l'irrégularité ait causé un grief au destinataire de l'acte », et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissiers de justice », la cour d'appel a violé les articles 8 de la loi n°66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, 45 et 47 du décret n°69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l'application à la profession d'huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles, 114, 117, 648 et 649 du code de procédure civile ; 2°/ en deuxième lieu que, subsidiairement, en jugeant que « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Mme [B], et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice », bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Mme [B] n'ait pas pu vérifier si la personne qui leur avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil ; 3°/ en troisième lieu que, subsidiairement, en jugeant qu'en ce qui concerne le commandement de quitter les lieux, « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Mme [B], et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice », bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Mme [B] n'ait pas pu vérifier si la personne qui leur avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil. » Réponse de la Cour 5. Selon l'article 648 du code de procédure civile, tout acte d'huissier de justice indique notamment les noms, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice. 6. Aux termes de l'article 649 du même code, la nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure. 7. En application du second alinéa de l'article 114 du code de procédure civile, la nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité. 8. Ayant relevé, d'une part, que le commandement de quitter les lieux du 9 mars 2018, le procès-verbal de tentative d'expulsion du 18 mai 2018 et le procès-verbal d'expulsion du 1er août 2018 ne comportaient pas la mention de ce que la société qui emploie l'huissier de justice officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, et exactement retenu, d'autre part, que ce défaut de mention de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention "société civile professionnelle " ou des initiales " SCP ", ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, qui ne concerne que les modalités d'organisation de l'activité d'huissier de justice, n'a pas d'incidence sur le pouvoir des huissiers de justice, officiers ministériels, ayant instrumenté en l'occurrence, la cour d'appel en a exactement déduit que cette irrégularité constitue un vice de forme qui n'est sanctionné par la nullité de l'acte que s'il en résulte un grief, dont elle a souverainement estimé que Mme [B] ne justifiait pas. 9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [B] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [B] et la condamne à payer à la société RATP Habitat la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme [B] Madame [B] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du procès-verbal d'expulsion, de sa demande de réintégration dans les lieux sous astreinte, de sa demande en paiement des frais d'expulsion, et de ses plus amples demandes ; ALORS en premier lieu QUE dans les sociétés titulaires d'un office d'huissier de justice, chaque associé exerce les fonctions d'huissier au nom de la société, de sorte que le défaut de mention, sur un acte d'huissier, de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, constituent des irrégularités de fond ; qu'en jugeant, à propos du procès-verbal d'expulsion, du procès-verbal de tentative d'expulsion et du commandement de quitter les lieux, que « l'absence de précision de ce que la société officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, ne peut conduire à l'annulation de l'acte qu'à la condition que l'irrégularité ait causé un grief au destinataire de l'acte » (arrêt, p.5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissiers de justice » (ibid.), la cour d'appel a violé les articles 8 de la loi n°66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, 45 et 47 du décret n°69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l'application à la profession d'huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles, 114, 117, 648 et 649 du code de procédure civile ; ALORS en deuxième lieu QUE, subsidiairement, en jugeant que « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Madame [B] (arrêt, p.5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice » (ibid.), bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Madame [B] n'ait pas pu vérifier si la personne qui lui avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil ; ALORS en troisième lieu QUE, subsidiairement, en jugeant qu'en ce qui concerne le commandement de quitter les lieux, « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Madame [B] (arrêt, p.5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice » (ibid.), bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Madame [B] n'ait pas pu vérifier si la personne qui lui avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 226 F-D Pourvoi n° G 21-16.237 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 M. [L] [H], domicilié [Adresse 4] (Suisse), a formé le pourvoi n° G 21-16.237 contre l'arrêt rendu le 17 décembre 2020 par la cour d'appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [N] [M], 2°/ à Mme [V] [S], épouse [M], tous deux domiciliés [Adresse 5], 3°/ à M. [I] [P] [F], 4°/ à Mme [A] [R], épouse [F], tous deux domiciliés [Adresse 1], 5°/ à la société Crédit logement, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], 6°/ au Trésor public, dont le siège est [Adresse 3], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de M. [H], de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de la société Crédit logement, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 17 décembre 2020), sur des poursuites de saisie immobilière diligentées par la société Crédit logement (le Crédit logement), un juge de l'exécution a, par jugement du 19 mai 2017, adjugé le bien saisi à M. [H] pour la somme de 403 000 euros. 2. Ce dernier n'ayant pas consigné l'intégralité du prix, le Crédit logement a obtenu le 18 octobre 2017 la délivrance d'un certificat de non-paiement. 3. Le Crédit logement a ensuite sollicité, par requête du 11 décembre 2017, l'ouverture d'une procédure de réitération d'enchères. 4. Par jugement du 16 mars 2018, il a été procédé à une seconde adjudication du bien au prix de 351 000 euros. 5. Constatant qu'il restait un capital de 150 672,50 euros sur la somme consignée par M. [H], le Crédit logement a saisi le juge de l'exécution pour obtenir notamment sa condamnation à lui verser la différence entre le montant de la dernière enchère qu'il a portée et le prix d'adjudication résultant du jugement du 16 mars 2018. 6. Par jugement du 7 février 2020, ce juge a débouté M. [H] de ses demandes en nullité et en dommages-intérêts, l'a condamné à payer au Crédit logement la somme de 52 000 euros correspondant à la différence de prix entre la première et la seconde enchère, et a dit que les sommes consignées dans le cadre de l'adjudication constatée par jugement du 19 mai 2017 devront faire l'objet d'un projet de distribution conforme aux articles L. 331-1 et suivants du code de procédure civile. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. M. [H] fait grief à l'arrêt attaqué de le débouter de ses demandes en nullité, en restitution des sommes versées ou consignées et de sa demande en dommages et intérêts dirigée contre la Crédit logement, alors « que la requête en réitération d'enchères ne peut pas être déposée le même jour que la signification à personne du certificat de non-paiement, puisque c'est faute pour l'adjudicataire de satisfaire à la sommation qui lui a été faite que l'immeuble est remis en vente par la voie d'une nouvelle adjudication; qu'en écartant le moyen de M. [H] sur ce point au motif que la date de notification d'un acte judiciaire ou extra-judiciaire à l'étranger était, à l'égard de celui qui y procédait, la date d'expédition de l'acte, soit le 17 novembre 2017, tout en constatant que M. [H] n'avait été touché à personne que le 11 décembre 2017, soit le jour même de la requête en réitération d'enchères, la cour d'appel a violé les articles R. 322-67, R. 322-68 et R. 322-69 du code des procédures civiles d'exécution. » Réponse de la Cour 8. Selon l'article R. 322-67 du code des procédures civiles d'exécution, toute personne qui poursuit la réitération des enchères fait signifier un certificat constatant que l'adjudicataire n'a pas justifié du versement du prix ou de sa consignation ou du paiement des frais taxés ou des droits de mutation, par un acte comportant, à peine de nullité, la sommation d'avoir à payer le prix, les frais taxés et les droits de mutation dans un délai de huit jours. 9. Selon les premier, deuxième et troisième alinéa de l'article R. 322-69 du même code, faute pour l'adjudicataire de satisfaire à la sommation qui lui a été faite, l'immeuble est remis en vente par la voie d'une nouvelle adjudication, la nouvelle audience de vente étant fixée sur requête de la partie qui poursuit la réitération des enchères à une date comprise dans un délai de deux à quatre mois suivant la date de la signification du certificat du greffe à l'acquéreur. 10. Quelle que soit la gravité des irrégularités alléguées, seuls affectent la validité d'un acte de procédure, soit les vices de forme faisant grief, soit les irrégularités de fond limitativement énumérées à l'article 117 du code de procédure civile. 11. Ayant constaté que le Crédit logement justifiait de la transmission à l'autorité suisse compétente, en date du 17 novembre 2017, d'un acte de signification du certificat de non-consignation, la cour d'appel, qui a souverainement retenu que M. [H] avait été touché à personne le 11 décembre 2017 et qu'il n'avait nullement payé le prix de vente et les frais subséquents dans le délai de 8 jours de la sommation, qu'il n'avait pas davantage exercé de recours contre ce certificat dans le délai prescrit alors même que la signification qui lui avait été faite reproduisait les mentions impératives détaillées à l'article R. 322-67 relatives aux voies de recours dont il disposait, en a exactement déduit que, les conditions de délivrance puis de signification du certificat de non-paiement étant strictement conformes aux dispositions légales du code de procédure civile et du code des procédures civiles d'exécution, M. [H] devait être débouté de sa demande visant à obtenir la nullité de tous les actes accomplis par le Crédit logement à compter du 18 octobre 2017. 12. Le moyen est, dès lors, mal fondé. Sur le second moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 13. M. [H] fait grief à l'arrêt de le condamner à verser la somme de 52 000 euros à la société Crédit logement, en sa qualité de créancier poursuivant, en vue d'une distribution conformément à la procédure prévue aux articles R. 331-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, de le débouter de sa demande en restitution des sommes de 98 672,50 euros et de 12 300 euros consignées ou versées et d'ordonner la déconsignation de l'intégralité des fonds consignés, concernant la vente par adjudication constatée le 19 mai 2017 par le juge de l'exécution de Thonon-les-Bains en disant que cette somme devra être distribuée conformément à la procédure prévue aux articles R. 331-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, alors «que l'adjudicataire défaillant est seulement tenu au paiement de la différence entre son enchère et le prix de la revente, si celui-ci est moindre et ne peut prétendre à la répétition des sommes qu'il a acquittées à ce titre; que « les sommes qu'il a acquittées » doivent s'entendre uniquement de la différence entre son enchère et le prix de la revente ; qu'il était constant que la différence entre l'enchère de M. [H] et le prix de la revente du bien était de 52 000 euros, montant réclamé par le Crédit logement ; qu'en déboutant M. [H] de sa demande de restitution des sommes de 98 672,50 euros et de 12 300 euros consignées sur le compte séquestre, la cour d'appel a violé l'article L. 322-12 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution. » Réponse de la Cour 14. L'article L. 322-12 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution dispose d'une part que l'adjudicataire défaillant est tenu au paiement de la différence entre son enchère et le prix de la revente, si celui-ci est moindre, et d'autre part qu'il ne peut prétendre à la répétition des sommes qu'il a acquittées. 15. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé. Sur le second moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 16. M. [H] fait le même grief à l'arrêt, alors « que si l'article L. 322-12 du code des procédures civiles d'exécution devait s'interpréter comme empêchant la restitution de toutes les sommes consignées, et pas seulement la différence entre l'enchère et le prix de la revente, cette disposition constituerait une atteinte injustifiée au respect des biens de l'adjudicataire au regard de l'impossibilité dans laquelle il se trouverait d'obtenir, à la suite de la résolution de la vente, la restitution des sommes qu'il a acquittées, outre l'obligation dans laquelle il se trouve de payer la différence entre son enchère et le prix de la revente ; qu'en faisant application de l'article L. 322-12 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution pour débouter M. [H] de sa demande en restitution des sommes de 98 672,50 euros et de 12 300 euros, la cour d'appel a violé l'article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droit de l'homme et des libertés fondamentales. » Recevabilité du moyen, contestée par la défense 17. Le Crédit logement conteste la recevabilité du moyen. Il soutient qu'il est nouveau, mélangé de fait et de droit. Réponse de la Cour 18. Il ne résulte ni de l'arrêt ni des conclusions de M. [H] que celui-ci ait soutenu devant la cour d'appel une violation de l'article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ce grief, qui suppose une appréciation de l'atteinte invoquée, ne repose sur aucune considération de fait retenue par les juges du fond. 19. Le grief, nouveau et mélangé de fait et de droit, n'est donc pas recevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [H] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. [H] PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [H] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes en nullité, en restitution des sommes versées ou consignées et de sa demande en dommages et intérêts dirigée contre la SA Crédit Logement ; Alors que la requête en réitération d'enchères ne peut pas être déposée le même jour que la signification à personne du certificat de non-paiement, puisque c'est faute pour l'adjudicataire de satisfaire à la sommation qui lui a été faite que l'immeuble est remis en vente par la voie d'une nouvelle adjudication. ; qu'en écartant le moyen de M. [H] sur ce point au motif que la date de notification d'un acte judiciaire ou extra-judiciaire à l'étranger était, à l'égard de celui qui y procédait, la date d'expédition de l'acte, soit le 17 novembre 2017, tout en constatant que M. [H] n'avait été touché à personne que le 11 décembre 2017, soit le jour même de la requête en réitération d'enchères, la cour d'appel a violé les articles R. 322-67, R. 322-68 et R. 322-69 du code des procédures civiles d'exécution. SECOND MOYEN DE CASSATION M. [H] reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné à verser la somme de 52 000 euros à la société Crédit Logement, en sa qualité de créancier poursuivant, en vue d'une distribution conformément à la procédure prévue aux articles R. 331-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution, de l'avoir débouté de sa demande en restitution des sommes de 98 672,50 euros et de 12 300 euros consignées ou versées et d'avoir ordonné la déconsignation de l'intégralité des fonds consignés, concernant la vente par adjudication constatée le 19 mai 2017 par le juge de l'exécution de Thonon-les-Bains et dit que cette somme devra être distribuée conformément à la procédure prévue aux articles R. 331-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ; Alors 1°) que l'adjudicataire défaillant est seulement tenu au paiement de la différence entre son enchère et le prix de la revente, si celui-ci est moindre et ne peut prétendre à la répétition des sommes qu'il a acquittées à ce titre ; que « les sommes qu'il a acquittées » doivent s'entendre uniquement de la différence entre son enchère et le prix de la revente ; qu'il était constant que la différence entre l'enchère de M. [H] et le prix de la revente du bien était de 52 000 euros, montant réclamé par le Crédit Logement ; qu'en déboutant M. [H] de sa demande de restitution des sommes de 98 672,50 euros et de 12 300 euros consignées sur le compte séquestre, la cour d'appel a violé l'article L. 322-12 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution ; Alors 2°) que si l'article L. 322-12 du code des procédures civiles d'exécution devait s'interpréter comme empêchant la restitution de toutes les sommes consignées, et pas seulement la différence entre l'enchère et le prix de la revente, cette disposition constituerait une atteinte injustifiée au respect des biens de l'adjudicataire au regard de l'impossibilité dans laquelle il se trouverait d'obtenir, à la suite de la résolution de la vente, la restitution des sommes qu'il a acquittées, outre l'obligation dans laquelle il se trouve de payer la différence entre son enchère et le prix de la revente ; qu'en faisant application de l'article L. 322-12 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution pour débouter M. [H] de sa demande en restitution des sommes de 98 672,50 euros et de 12 300 euros, la cour d'appel a violé l'article premier du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droit de l'homme et des libertés fondamentales.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 220 F-D Pourvoi n° B 21-14.069 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 La société Locami, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° B 21-14.069 contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant à M. [R] [U], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Cardini, conseiller référendaire, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Locami, de la SARL Corlay, avocat de M. [U], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, M. Cardini, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 19 novembre 2020), agissant sur le fondement d'une reconnaissance de dette notariée en date du 5 novembre 2010, la société civile immobilière Locami (la SCI), ayant pour gérante Mme [X], a fait délivrer, par acte du 12 novembre 2018, un commandement de payer aux fins de saisie-vente à M. [U] qui a saisi un juge de l'exécution d'une contestation. Examen du moyen Enoncé du moyen 2. La SCI fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il a annulé le commandement à fin de saisie-vente en date du 15 novembre 2018 et rejeté ses demandes reconventionnelles, alors « que la prescription doit être invoquée de bonne foi ; que la SCI Locami faisait valoir que l'acte notarié de reconnaissance de dette s'inscrivait dans un ensemble d'opérations dont la finalité était de restituer la maison sise à [Localité 3] et adjugée à M. [U], à son ancienne propriétaire, à savoir Mme [X], gérante de la SCI Locami ; qu'elle démontrait ainsi que la demande de remboursement des fonds prêtés à M. [U] n'avait de sens qu'en l'absence de rétrocession par ce dernier de l'ensemble immobilier ; qu'elle établissait, preuves à l'appui, que jusqu'à l'été 2018, M. [U] avait expressément laissé penser à la gérante de la SCI Locami qu'il ne se considérait pas véritablement comme propriétaire de l'immeuble et qu'il lui rétrocèderait, afin qu'elle s'abstienne de lui demander le remboursement des sommes prêtées en vue de l'adjudication ; qu'elle faisait valoir à cet égard, preuves à l'appui, que M. [U] remettait au fur et à mesure à Mme [X] tous les documents concernant la maison et qu'elle continuait de payer la taxe d'habitation, mais aussi les factures d'électricité afférentes à l'immeuble, notamment pour les années 2017 et 2018 ; que dès lors, en jugeant que l'action en paiement était prescrite et en se contentant d'affirmer que les relations de confiance invoquées entre les parties ne constituaient pas un cas d'empêchement d'agir prévu par la loi, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si M. [U] n'avait pas invoqué la prescription de mauvaise foi, en laissant délibérément penser à Mme [X], gérante de la SCI Locami, notamment par des actes positifs jusqu'à l'écoulement du délai de prescription, qu'il ne se considérait pas comme propriétaire du bien adjugé, qu'il lui rétrocèderait et qu'elle n'avait donc pas à solliciter le remboursement des sommes à lui prêtées en vue de cette adjudication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du code civil. » Réponse de la Cour 3. Ayant retenu que les raisons d'équité invoquées ne pouvaient prospérer dès lors que les relations de confiance invoquées qui ne concernent que la personne de Mme [X], non attraite en la présente procédure et non concernée par la créance de la SCI, ne constituaient pas un cas d'empêchement prévu par la loi ou par la convention ou encore par la force majeure, au sens de l'article 2234 du code civil, et que la SCI ne pouvait valablement laisser entendre que l'exercice de son action en recouvrement de sa propre créance était subordonné à la perte de la relation de confiance entretenue avec M. [U], qui plus est par un tiers, dans la perspective d'une rétrocession du bien nonobstant la vente sur saisie immobilière dont il avait précédemment fait l'objet, la cour d'appel, qui a effectué la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision. 4. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la SCI Locami aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la SCI Locami et la condamne à payer à M. [U] la somme de 1 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat aux Conseils, pour la société Locami La SCI Locami FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il a annulé le commandement à fin de saisie-vente en date du 15 novembre 2018 et rejeté ses demandes reconventionnelles ; ALORS QUE la prescription doit être invoquée de bonne foi ; que la SCI Locami faisait valoir que l'acte notarié de reconnaissance de dette s'inscrivait dans un ensemble d'opérations dont la finalité était de restituer la maison sise à [Localité 3] et adjugée à M. [U], à son ancienne propriétaire, à savoir Mme [X], gérante de la SCI Locami (conclusions d'appel de la SCI Locami, p. 14) ; qu'elle démontrait ainsi que la demande de remboursement des fonds prêtés à M. [U] n'avait de sens qu'en l'absence de rétrocession par ce dernier de l'ensemble immobilier ; qu'elle établissait, preuves à l'appui, que jusqu'à l'été 2018, M. [U] avait expressément laissé penser à la gérante de la SCI Locami qu'il ne se considérait pas véritablement comme propriétaire de l'immeuble et qu'il lui rétrocèderait, afin qu'elle s'abstienne de lui demander le remboursement des sommes prêtées en vue de l'adjudication (conclusions d'appel de la SCI Locami, p. 9-10 et p. 13-14) ; qu'elle faisait valoir à cet égard, preuves à l'appui, que M. [U] remettait au fur et à mesure à Mme [X] tous les documents concernant la maison (conclusions d'appel de la SCI Locami, p. 13-14 ; pièce n°9 – production, n°6) et qu'elle continuait de payer la taxe d'habitation, mais aussi les factures d'électricité afférentes à l'immeuble, notamment pour les années 2017 et 2018 (conclusions d'appel de la SCI Locami, p. 3-4 – pièce n°3, production n°5) ; que dès lors, en jugeant que l'action en paiement était prescrite et en se contentant d'affirmer que les relations de confiance invoquées entre les parties ne constituaient pas un cas d'empêchement d'agir prévu par la loi, sans rechercher, comme cela lui était demandé, si M. [U] n'avait pas invoqué la prescription de mauvaise foi, en laissant délibérément penser à Mme [X], gérante de la SCI Locami, notamment par des actes positifs jusqu'à l'écoulement du délai de prescription, qu'il ne se considérait pas comme propriétaire du bien adjugé, qu'il lui rétrocèderait et qu'elle n'avait donc pas à solliciter le remboursement des sommes à lui prêtées en vue de cette adjudication, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2234 du Code civil.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 224 F-D Pourvoi n° W 21-18.388 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 Mme [J] [C], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° W 21-18.388 contre l'arrêt rendu le 25 mars 2021 par la cour d'appel de Versailles (16ème chambre), dans le litige l'opposant à la société RATP Habitat, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée Logis transport, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [C], de Me Haas, avocat de la société RATP Habitat, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 mars 2021), la société RATP Habitat a poursuivi l'expulsion de Mme [C] en lui faisant délivrer un commandement de quitter les lieux le 9 mars 2018 puis un procès-verbal de nullité d'expulsion le 18 mai 2018 et un procès-verbal d'expulsion le 29 août 2018. 2. Mme [C] a saisi un juge de l'exécution à fin de sursis à statuer, puis en nullité en nullité du commandement, enfin en nullité du procès-verbal d'expulsion. 3. Après jonction des différentes procédures, le juge de l'exécution a rejeté la demande de sursis à statuer et débouté Mme [C] de ses autres demandes. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Mme [C] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du procès-verbal d'expulsion, de sa demande de réintégration dans les lieux sous astreinte, de sa demande en paiement des frais d'expulsion, et de ses plus amples demandes, alors : « 1°/ en premier lieu que dans les sociétés titulaires d'un office d'huissier de justice, chaque associé exerce les fonctions d'huissier au nom de la société, de sorte que le défaut de mention, sur un acte d'huissier, de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, constituent des irrégularités de fond ; qu'en jugeant, à propos du procès-verbal d'expulsion, du procès-verbal de tentative d'expulsion et du commandement de quitter les lieux, que « l'absence de précision de ce que la société officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, ne peut conduire à l'annulation de l'acte qu'à la condition que l'irrégularité ait causé un grief au destinataire de l'acte », et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissiers de justice », la cour d'appel a violé les articles 8 de la loi n°66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, 45 et 47 du décret n°69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l'application à la profession d'huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles, 114, 117, 648 et 649 du code de procédure civile ; 2°/ en deuxième lieu que, subsidiairement, en jugeant que « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Mme [C], et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice », bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Mme [C] n'ait pas pu vérifier si la personne qui leur avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil ; 3°/ en troisième lieu que, subsidiairement, en jugeant qu'en ce qui concerne le commandement de quitter les lieux, « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Mme [C], et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice », bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Mme [C] n'ait pas pu vérifier si la personne qui leur avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil. » Réponse de la Cour 5. Selon l'article 648 du code de procédure civile, tout acte d'huissier de justice indique notamment les noms, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice. 6. Aux termes de l'article 649 du même code, la nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure. 7. En application du second alinéa de l'article 114 du code de procédure civile, la nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité. 8. Ayant relevé, d'une part, que le commandement de quitter les lieux du 9 mars 2018, le procès-verbal de tentative d'expulsion du 18 mai 2018 et le procès-verbal d'expulsion du 29 août 2018 ne comportaient pas la mention de ce que la société qui emploie l'huissier de justice officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, et exactement retenu, d'autre part, que ce défaut de mention de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention "société civile professionnelle " ou des initiales " SCP ", ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, qui ne concerne que les modalités d'organisation de l'activité d'huissier de justice, n'a pas d'incidence sur le pouvoir des huissiers de justice, officiers ministériels, ayant instrumenté en l'occurrence, la cour d'appel en a exactement déduit que cette irrégularité constitue un vice de forme qui n'est sanctionné par la nullité de l'acte que s'il en résulte un grief, dont elle a souverainement estimé que Mme [C] ne justifiait pas. 9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [C] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [C] et la condamne à payer à la société RATP Habitat la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme [C] Madame [C] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du procès-verbal d'expulsion, de sa demande de réintégration dans les lieux sous astreinte, de sa demande en paiement des frais d'expulsion, et de ses plus amples demandes ; ALORS en premier lieu QUE dans les sociétés titulaires d'un office d'huissier de justice, chaque associé exerce les fonctions d'huissier au nom de la société, de sorte que le défaut de mention, sur un acte d'huissier, de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, constituent des irrégularités de fond ; qu'en jugeant, à propos du procès-verbal d'expulsion, du procès-verbal de tentative d'expulsion et du commandement de quitter les lieux, que « l'absence de précision de ce que la société officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, ne peut conduire à l'annulation de l'acte qu'à la condition que l'irrégularité ait causé un grief au destinataire de l'acte » (arrêt, p.5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissiers de justice » (ibid.), la cour d'appel a violé les articles 8 de la loi n°66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, 45 et 47 du décret n°69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l'application à la profession d'huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles, 114, 117, 648 et 649 du code de procédure civile ; ALORS en deuxième lieu QUE, subsidiairement, en jugeant que « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Madame [C] (arrêt, p.5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice » (ibid.), bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Madame [C] n'ait pas pu vérifier si la personne qui lui avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil ; ALORS en troisième lieu QUE, subsidiairement, en jugeant qu'en ce qui concerne le commandement de quitter les lieux, « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Madame [C] (arrêt, p.5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice » (ibid.), bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Madame [C] n'ait pas pu vérifier si la personne qui lui avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 FD COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Annulation M. PIREYRE, président Arrêt n° 217 F-D Pourvoi n° M 21-20.495 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 1°/ Mme [N] [H], épouse [Z], domiciliée [Adresse 3], 2°/ Mme [I] [Z], domiciliée [Adresse 4], 3°/ M. [V] [Z], domicilié [Adresse 1], ont formé le pourvoi n° M 21-20.495 contre l'arrêt rendu le 27 mai 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-7), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Natal, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ à la société Hong Kong buffet, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [N] [H], épouse [Z], de Mme [I] [Z] et de M. [V] [Z], de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de la société Natal, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué ( Aix-en-Provence, 27 mai 2021), Mme [N] [H], épouse [Z], Mme [I] [Z] et M. [V] [Z] (les consorts [Z]), estimant que la sous-location, consentie par la société Natal à la société Hong Kong buffet des locaux lui appartenant et de ceux appartenant aux consorts [Z], aurait été conclue en fraude de leurs droits, ont assigné ces sociétés aux fins de résiliation du bail et de paiement de dommages et intérêts en réparation de leurs préjudices. 2. Les consorts [Z] ont interjeté appel le 8 juillet 2019 du jugement d'un tribunal de grande instance du 20 juin 2019 ayant rejeté leurs demandes. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. Les consorts [Z] font grief à l'arrêt de confirmer le jugement en ce qu'il avait déclaré irrecevable comme prescrite leur action fondée sur l'absence de participation à l'acte de sous-location, déclaré recevable en la forme leur action en résiliation du bail commercial fondé sur la déloyauté et rejeté leurs demandes en résiliation du bail commercial, expulsion et paiement de dommages-intérêts, alors « que si la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions, ni l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ni l'annulation du jugement, cette règle de procédure n'est applicable que dans les instances introduites par une déclaration d'appel postérieure au 17 septembre 2020 ; qu'en énonçant, pour confirmer le jugement, que les conclusions des appelants, qui comportaient un dispositif ne concluant pas à l'infirmation totale ou partielle du jugement déféré, ne respectaient pas les dispositions de l'article 954 du code de procédure en ne déterminant pas l'objet du litige porté devant les juges d'appel qui, dès lors, ne pouvaient pas réformer la décision déférée, sauf à statuer ultra petita, la cour d'appel, qui a ainsi appliqué une règle de procédure qui n'était pas prévisible pour les parties à la date à laquelle il avait été relevé appel, soit le 8 juillet 2019, a privé les appelants d'un procès équitable et a, dès lors, violé les articles 542 et 954 du code de procédure civile, ensemble l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Vu les articles 542, 908 et 954 du code de procédure civile et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 4. L'objet du litige devant la cour d'appel étant déterminé par les prétentions des parties, le respect de l'obligation faite à l'appelant de conclure conformément à l'article 908 s'apprécie nécessairement en considération des prescriptions de l'article 954. 5. Il résulte de ce dernier texte, en son deuxième alinéa, que le dispositif des conclusions de l'appelant remises dans le délai de l'article 908 doit comporter une prétention sollicitant expressément l'infirmation ou l'annulation du jugement frappé d'appel. 6. À défaut, en application de l'article 908, la déclaration d'appel est caduque ou, conformément à l'article 954, alinéa 3, la cour d'appel ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif, ne peut que confirmer le jugement. 7. Ainsi, l'appelant doit dans le dispositif de ses conclusions mentionner qu'il demande l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ou l'annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue de relever d'office la caducité de l'appel. Lorsque l'incident est soulevé par une partie, ou relevé d'office par le conseiller de la mise en état, ce dernier, ou le cas échéant la cour d'appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d'appel si les conditions en sont réunies (2e Civ., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-15-766, publié). 8. Cette obligation de mentionner expressément la demande d'infirmation ou d'annulation du jugement, affirmée pour la première fois par un arrêt publié (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié), fait peser sur les parties une charge procédurale nouvelle. Son application immédiate dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date de cet arrêt, aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable. 9. Pour confirmer le jugement, l'arrêt, après avoir relevé que la déclaration d'appel a été remise le 8 juillet 2019, retient que les conclusions des consorts [Z] comportent un dispositif ne concluant pas à l'infirmation totale ou partielle du jugement déféré et que la cour d'appel ne peut donc pas réformer la décision déférée sauf à statuer ultra petita. 10. En statuant ainsi, la cour d'appel a donné une portée aux articles 542 et 954 du code de procédure civile qui, pour être conforme à l'état du droit applicable depuis le 17 septembre 2020, n'était pas prévisible pour les parties à la date à laquelle il a été relevé appel, soit le 8 juillet 2019, l'application de cette règle de procédure, aboutissant à priver les consorts [Z] d'un procès équitable au sens de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. PAR CES MOTIFS, la Cour : ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 27 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne la société Natal et la société Hong Kong buffet aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Natal et la condamne à payer à Mme [N] [H], épouse [Z], Mme [I] [Z] et M. [V] [Z] la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SAS Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour Mme [N] [H], épouse [Z], Mme [I] [Z] et M. [V] [Z]. Mme [N] [Z], Mme [I] [Z] et M. [V] [Z] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait déclaré irrecevable comme prescrite leur action fondée sur l'absence de participation à l'acte de sous-location, déclaré recevable en la forme leur action en résiliation du bail commercial fondé sur la déloyauté et rejeté leurs demandes en résiliation du bail commercial, expulsion et paiement de dommages-intérêts ; ALORS QUE si la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement lorsque l'appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions, ni l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ni l'annulation du jugement, cette règle de procédure n'est applicable que dans les instances introduites par une déclaration d'appel postérieure au 17 septembre 2020 ; qu'en énonçant, pour confirmer le jugement, que les conclusions des appelants, qui comportaient un dispositif ne concluant pas à l'infirmation totale ou partielle du jugement déféré, ne respectaient pas les dispositions de l'article 954 du code de procédure en ne déterminant pas l'objet du litige porté devant les juges d'appel qui, dès lors, ne pouvaient pas réformer la décision déférée, sauf à statuer ultra petita, la cour d'appel, qui a ainsi appliqué une règle de procédure qui n'était pas prévisible pour les parties à la date à laquelle il avait été relevé appel, soit le 8 juillet 2019, a privé les appelants d'un procès équitable et a, dès lors, violé les articles 542 et 954 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 FD COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Interruption d'instance (avec reprise) par arrêt M. PIREYRE, président Arrêt n° 208 F-D Pourvoi n° N 20-19.250 Aide juridictionnelle totale pour M. [T] [Y]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 14 janvier 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 1°/ M. [D] [Y], domicilié [Adresse 3], 2°/ Mme [N] [Y], domiciliée [Adresse 2], 3°/ Mme [I] [T], veuve [Y], domiciliée [Adresse 3], ont formé le pourvoi n° N 20-19.250 contre l'arrêt rendu le 4 juin 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 2-1), dans le litige les opposant : 1°/ à l'association SHM, dont le siège est [Adresse 1], prise en qualité de tuteur de [T] [Y] décédé le 12 mars 2022, 2°/ au procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, domicilié en son parquet général, rue Peyresc, 13100 Aix-en-Provence, défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de M. [D] [Y], de Mme [N] [Y] et de Mme [T], veuve [Y], de la SARL Ortscheidt, avocat de l'association SHM, prise en qualité de tuteur de [T] [Y] décédé le 12 mars 2022, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure Vu les articles 370 et 376 du code de procédure civile : 1. M. [D] [Y], Mme [N] [Y], Mme [I] [T], veuve [Y] se sont pourvus par déclaration du 21 août 2020 contre un arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence du 4 juin 2020 dans une instance concernant notamment l'Association SHM, prise en sa qualité de tuteur de M. [T] [Y]. 2. Il est justifié par la SARL Jérôme Ortscheidt que M. [T] [Y] est décédé le 12 mars 2022, et que la notification du décès aux demandeurs a été effectuée le 28 juin 2022. 3. L'instance est donc interrompue et il y a lieu d'inviter les parties à reprendre celle-ci. PAR CES MOTIFS, la Cour : CONSTATE l'interruption de l'instance ; Impartit aux parties un délai de quatre mois à compter de ce jour pour effectuer les diligences nécessaires à la reprise de l'instance et dit qu'à défaut de l'accomplissement dans ce délai des diligences nécessaires, la radiation du pourvoi sera prononcée ; Dit que l'affaire sera à nouveau examinée à l'audience de formation restreinte du 13 juin 2023 ; Réserve les dépens ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SAS Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour M. [D] [Y], Mme [N] [Y] et Mme [I] [T], veuve [Y]. M. [D] [Y], Mme [N] [Y] et Mme [I] [T], veuve [Y], font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable la tierce opposition qu'ils avaient formé contre le jugement d'adoption ; 1°) ALORS QUE la tierce opposition incidente qui peut être formée sans limitation de temps peut viser tout jugement produit au cours d'une instance quelle que soit la partie qui l'a produit ou qui en a sollicité la production ; qu'en considérant par principe, pour déclarer irrecevable la tierce opposition des consorts [Y], que la tierce opposition incidente devait être strictement limitée aux hypothèses où un jugement est produit par celui qui s'en prévaut de manière spontanée et en retenant ensuite que le jugement n'avait été produit que sur incident des consorts [Y], de sorte qu'ils ne pouvaient faire valoir que cette pièce avait été produite par [T] [Y], la cour d'appel a violé l'article 586 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE la tierce opposition peut être formée sans limitation de temps contre un jugement produit au cours d'une autre instance par celui auquel on l'oppose, sans autre condition à moins que ce jugement ait été notifié avec indications des voies et délais de recours ; qu'en retenant, pour déclarer échu le délai pour former tierce opposition contre le jugement d'adoption attaqué, que les consorts [Y] avaient connaissance du jugement d'adoption pour l'avoir envoyé au tuteur de M. [T] [Y] en février 2016 sans rechercher si ledit jugement avait fait l'objet d'une notification aux consorts [Y] indiquant les voies et délais de recours, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 586 du code de procédure civile et 353-2 du code civil ; 3°) ALORS QUE le sort de l'action principale en nullité de l'acte de dévolution successorale initiée par les consorts [Y] et contestée par le tuteur de M. [T] [Y] de même que la seule qualité de défendeur à l'action de ce dernier dépendaient de la validité du jugement d'adoption objet de la tierce-opposition et le tuteur de M. [T] [Y], se prévalant expressément de sa qualité d'enfant adopté a opposé au moins implicitement ce jugement en dépit d'une production non spontanée ; qu'en considérant, par motifs adoptés qu'aucune prétention ni demande en lien avec ce jugement n'était formée dans le cadre de l'instance puis, par motifs propres, que le tuteur de M. [T] [Y] ne s'était pas prévalu de sa qualité d'enfant adopté et n'avait pas produit le jugement d'adoption, la cour d'appel a méconnu les termes du litiges, violant ainsi les articles 4 et 5 du code de procédure civile et, dénaturant les écritures de M. [T] [Y], a méconnu le principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturé les documents soumis à son examen.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 206 F-D Pourvoi n° R 21-10.241 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 1°/ la société Artémis et Orion, société par actions simplifiée unipersonnelle, 2°/ la société La Licorne, société à responsabilité limitée, ayant toutes deux leur siège [Adresse 2], ont formé le pourvoi n° R 21-10.241 contre l'arrêt rendu le 27 octobre 2020 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-1), dans le litige les opposant : 1°/ à la Société civile immobilière La Licorne, dont le siège est [Adresse 7], 2°/ à Mme [E] [N], épouse [M], domiciliée [Adresse 10], prise en son nom personnel et en son ancienne qualité de mandataire ad hoc de la Société civile immobilière La Licorne, 3°/ à la société Notre Dame du bon voyage centre de rééducation fonctionnelle, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], 4°/ à M. [P] [W], domicilié [Adresse 3], 5°/ à Mme [H] [W], domiciliée [Adresse 4], 6°/ à Mme [C] [W], épouse [I], domiciliée [Adresse 9], 7°/ à Mme [A] [N], domiciliée [Adresse 8], ces quatre derniers pris en leur nom personnel et en qualité d'ayants droit de [F] veuve [W], 8°/ à M. [G] [Y], domicilié [Adresse 1], pris en qualité d'administrateur provisoire de la Société civile immobilière La Licorne, 9°/ à la Société civile immobilière La Licorne, dont le siège est [Adresse 7], prise en la personne de son mandataire ad hoc, Mme [E] [N], épouse [M], défendeurs à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Artémis et Orion et de la société La Licorne, de Me Bertrand, avocat de Mme [N], épouse [M], en son nom personnel et en son ancienne qualité de mandataire ad hoc de la Société civile immobilière La Licorne, et de la société Notre Dame du bon voyage centre de rééducation fonctionnelle, de la SCP Spinosi, avocat de M. [Y], en qualité d'administrateur provisoire de la Société civile immobilière La Licorne, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 octobre 2020), la Société civile immobilière La Licorne (la SCI), qui a pour associées la société Notre Dame du bon voyage centre de rééducation fonctionnelle, Mme [M] et Mme [N], a conclu un compromis de vente le 28 mai 2015 avec la société Artémis et Orion avec faculté de substitution, portant sur un terrain, pour réaliser une opération immobilière. L'acte authentique devait être réitéré avant le 20 mars 2016, avec une possibilité de prorogation ne pouvant excéder le 4 avril 2016. 2. Pour la réalisation du projet, la société Artémis et Orion a constitué la société La Licorne. 3. L'acte authentique entre la SCI et la société Artémis et Orion n'ayant pas été réitéré, la SCI a fait acter la résiliation du compromis. 4. Le 29 mai 2017, la société Artémis et Orion et la société La Licorne ont assigné la SCI devant un tribunal de grande instance pour que le jugement à intervenir vaille vente et être autorisées à poser des tirants sur une partie du terrain restée la propriété de la SCI. 5. Les héritiers d'[Z] et [F] [W], M. [W], Mme [W], Mme [I] et Mme [N], propriétaires d'une parcelle voisine, se prévalant d'un préjudice résultant de l'absence de réitération de la vente, sont intervenus volontairement devant le tribunal de grande instance. 6. La société Artémis et Orion et la société La Licorne, qui ont relevé appel le 15 mars 2019 du jugement les ayant déboutées de leurs demandes et les ayant condamnées au paiement d'une clause pénale et de dommages-intérêts, ont été autorisées à assigner les intimés à jour fixe. 7. Après que la société Notre Dame du bon voyage centre de rééducation fonctionnelle et Mme [M], agissant en son nom personnel et en qualité de mandataire ad hoc de la SCI, ont soulevé la nullité de la déclaration d'appel, les sociétés appelantes ont formé, le 18 février 2020, une seconde déclaration d'appel, intimant la SCI, représentée par son administrateur provisoire, M. [Y], et ont à nouveau été autorisées à assigner à jour fixe. Recevabilité du pourvoi contestée par la défense 8. La société Notre Dame du bon voyage centre de rééducation fonctionnelle et Mme [M], agissant à titre personnel et en son ancienne qualité de mandataire ad hoc de la SCI, d'une part, la SCI prise en la personne de son administrateur provisoire, d'autre part, soulèvent l'irrecevabilité du pourvoi sur le fondement de l'article 975 du code de procédure civile en faisant valoir que les demanderesses au pourvoi mentionnent dans la déclaration de pourvoi que l'adresse de leur siège social est « [Adresse 2], alors que cette adresse n'existe pas, et qu'à supposer qu'il s'agisse d'une erreur, elles n'ont pas établi leur siège social à l'adresse « [Adresse 2] », une telle domiciliation ne pouvant qu'être fictive au vu des constatations de l'arrêt attaqué et leur causant un grief puisque les défenderesses se trouvent dans l'impossibilité de pouvoir exécuter les condamnations prononcées par la cour d'appel à leur profit. 9. L'absence ou l'inexactitude de la mention relative au domicile du demandeur en cassation exigée par l'article 975 du code de procédure civile constitue un vice de forme susceptible d'entraîner la nullité de la déclaration de pourvoi s'il est justifié que cette irrégularité cause un grief au défendeur. 10. Aux termes de l'article 115 du code de procédure civile, la nullité est couverte par la régularisation ultérieure de l'acte si aucune forclusion n'est intervenue et si la régularisation ne laisse subsister aucun grief. 11. Selon l'article 2241 du code civil, la demande en justice, même en référé, interrompt le délai de prescription ainsi que le délai de forclusion. Il en est de même lorsqu'elle est portée devant une juridiction incompétente ou lorsque l'acte de saisine de la juridiction est annulé par l'effet d'un vice de procédure. Aux termes de l'article 2242 du même code, l'interruption résultant de la demande en justice produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance. 12. La Cour de cassation juge, concernant la procédure d'appel, qu'il résulte des textes précités, d'une part, que les délais de prescription et de forclusion, interrompus par l'effet de l'annulation d'un acte de saisine entaché d'un vice de procédure, recommencent à courir à compter de cette décision d'annulation (2e Civ., 16 octobre 2014, pourvoi n° 13-22.088, publié), d'autre part, que l'acte de saisine de la juridiction, même entaché d'un vice de procédure, interrompt les délais de prescription comme de forclusion (2e Civ., 1er juin 2017, pourvoi n° 16-14.300, publié). 13. Cette interprétation, relative à l'acte de saisine de la cour d'appel, doit être transposée, en ce qui concerne la Cour de cassation, à la déclaration de pourvoi. 14. Il en résulte que la déclaration de pourvoi, même entachée d'un vice de forme, interrompt les délais de prescription comme de forclusion et que l'interruption produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance. 15. L'irrégularité peut être régularisée pendant toute la durée de l'instance de cassation par le dépôt d'une déclaration de pourvoi rectificative ou d'un mémoire du demandeur contenant l'indication de son domicile personnel, et, le cas échéant, par une nouvelle déclaration de pourvoi formée, dans le délai de l'article 612 du code de procédure civile, à compter du prononcé de l'arrêt déclarant le pourvoi irrecevable. 16. Il ressort du procès-verbal d'huissier de justice du 1er février 2021 produit en défense qu'il n'y a pas d'« [Adresse 6], de sorte que l'adresse figurant dans la déclaration de pourvoi est inexacte. 17. Cette erreur a toutefois été régularisée par mémoire dont il résulte que la société Artémis et Orion et la société La Licorne déclarent respectivement une adresse située « [Adresse 2], dont la réalité à la date de la déclaration de pourvoi résulte de deux constats des 7 et 23 décembre 2020. 18. Le pourvoi est, dès lors, recevable. Examen du moyen Enoncé du moyen 19. La société Artémis et Orion et la société La Licorne font grief à l'arrêt de déclarer nulle la déclaration d'appel du 15 mars 2019, ainsi que la procédure subséquente, de dire que l'assignation du 5 août 2020 délivrée dans le cadre de l'appel du 18 février 2020 est nulle, de sorte que la déclaration d'appel du 18 février 2020 est caduque, et de juger en toute hypothèse que les conclusions prises par les appelantes dans le cadre de cet appel du 18 février 2020 sont irrecevables en sorte que l'appel serait également non soutenu, alors : « 1°/ que l'erreur affectant la mention dans la déclaration d'appel du siège social de l'appelant peut être régularisée ; que par ailleurs, pour l'application de l'article 901 du code de procédure civile, une société, tant qu'elle n'a pas fait choix d'un nouveau siège social, est réputée conserver ledit siège au lieu fixé par les statuts et publié au registre du commerce, sauf à ce que ce siège présente un caractère fictif ou frauduleux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la déclaration d'appel du 15 mars 2019 et l'assignation à jour fixe que les exposantes avaient fait délivrer le 5 août 2020 étaient nulles, motif pris de ce que ces actes mentionnaient un siège social erroné et qu'aucune régularisation n'avait résulté de la mention par les conclusions des appelantes d'une nouvelle adresse, le [Adresse 2], elle-même erronée ; qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que le procès-verbal d'huissier du 26 août 2020 mentionnait que les sociétés exposantes étaient domiciliées dans leurs Kbis [Adresse 2], sans démontrer soit que ce siège social était fictif ou frauduleux, soit que les appelantes auraient entre temps déplacé leur siège social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 901 du code de procédure civile ; 2°/ subsidiairement, qu'un acte ne peut être annulé pour vice de forme que si celui qui s'en plaint démontre que ce vice lui a fait grief, lequel doit être la conséquence de l'irrégularité en cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que Mme [M] et la société Notre-Dame de Bon Voyage Centre de Rééducation Fonctionnelle justifiaient d'un grief de nature à fonder l'annulation de la déclaration d'appel du 15 mars 2019 et l'assignation à jour fixe du 5 août 2020, à raison de l'impossibilité d'exécuter le jugement qui en résulterait ; qu'en statuant ainsi, bien que les demanderesses à l'incident ne justifient que d'une créance provisoire de 1.500 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile et que la cour ait constaté que la radiation du rôle avait été refusée en l'état de l'impossibilité pour les exposantes d'exécuter le jugement, ce dont il se déduisait que l'indication éventuelle d'une adresse erronée dans les actes de procédure n'avait pas causé l'impossibilité d'exécution retenue et était sans emport sur la possibilité d'exécuter ou non le jugement, la cour d'appel a violé l'article 114 du code de procédure civile, ensemble l'article 901 du code de procédure civile ; 3°/ très subsidiairement, que, si des restrictions peuvent être apportées au droit d'accès au juge d'appel, celles-ci doivent poursuivre un but légitime et lui être proportionnées ; qu'en l'espèce, en considérant que la déclaration d'appel des exposantes du 15 mars 2019 et l'assignation du 5 août 2020 étaient nulles à raison du grief causé par l'erreur affectant la mention de leur siège social dans ces actes, quand les demanderesses à l'incident ne justifiaient que d'une créance provisoire de 1.500 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile et que les exposantes avaient été condamnées par le jugement querellé à des sommes si importantes qu'elles étaient dans l'impossibilité de les acquitter, la cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel des exposantes et a violé l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 4°/ qu'en tout état de cause, une motivation par voie de simple affirmation abstraite équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, en affirmant abstraitement et péremptoirement que les conclusions déposées dans la seconde instance étaient irrecevables, sans préciser le vice dont elles auraient été atteintes, ce qui empêche tout contrôle du juge de cassation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 20. Ayant constaté, d'une part, qu'il résultait des mentions du procès-verbal d'huissier de justice du 26 août 2020 que les sociétés appelantes étaient inconnues à l'adresse figurant dans les extraits K Bis et, d'autre part, que faute de pouvoir localiser ces sociétés, qui n'avaient pas exécuté le jugement spontanément alors qu'il était revêtu de l'exécution provisoire, la société Notre Dame du bon voyage centre de rééducation fonctionnelle et Mme [M] étaient dans l'impossibilité de poursuivre l'exécution de cette décision, c'est par une appréciation souveraine de l'absence de grief et sans encourir les autres griefs du moyen que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait. 21. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. Mise hors de cause 22. Il y a lieu de mettre hors de cause Mme [M] en sa seule qualité de mandataire ad hoc de la SCI, désormais pourvue d'un administrateur provisoire qui la représente devant la Cour de cassation. PAR CES MOTIFS, la Cour : DÉCLARE le pourvoi recevable ; REJETTE le pourvoi ; MET HORS DE CAUSE Mme [M] en sa qualité de mandataire ad hoc de la Société civile immobilière La Licorne ; Condamne la société Artémis et Orion et la société La Licorne aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Artémis et Orion et par la société La Licorne et les condamne à payer à la société Notre Dame du bon voyage centre de rééducation fonctionnelle et à Mme [M], agissant en son nom personnel, la somme globale de 3 000 euros, et à M. [Y], en qualité d'administrateur provisoire de la Société civile immobilière La Licorne, la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Artémis et Orion et la société La Licorne La SARL La Licorne et la SAS Artémis et Orion font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR déclaré nulle leur déclaration d'appel du 15 mars 2019, ainsi que la procédure subséquente, d'AVOIR dit que l'assignation du 5 août 2020 délivrée dans le cadre de l'appel du 18 février 2020 était nulle, de sorte que la déclaration d'appel du 18 février 2020 était caduque, et d'AVOIR jugé en toute hypothèse que les conclusions prises par les appelantes dans le cadre de cet appel du 18 février 2020 étaient irrecevables en sorte que l'appel serait également non-soutenu ; 1°) ALORS QUE l'erreur affectant la mention dans la déclaration d'appel du siège social de l'appelant peut être régularisée ; que par ailleurs, pour l'application de l'article 901 du code de procédure civile, une société, tant qu'elle n'a pas fait choix d'un nouveau siège social, est réputée conserver ledit siège au lieu fixé par les statuts et publié au registre du commerce, sauf à ce que ce siège présente un caractère fictif ou frauduleux ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a considéré que la déclaration d'appel du 15 mars 2019 et l'assignation à jour fixe que les exposantes avaient fait délivrer le 5 août 2020 étaient nulles, motif pris de ce que ces actes mentionnaient un siège social erroné et qu'aucune régularisation n'avait résulté de la mention par les conclusions des appelantes d'une nouvelle adresse, le [Adresse 2], elle-même erronée ; qu'en statuant ainsi, après avoir constaté que le procès-verbal d'huissier du 26 août 2020 mentionnait que les sociétés exposantes étaient domiciliées dans leurs Kbis [Adresse 2], sans démontrer soit que ce siège social était fictif ou frauduleux, soit que les appelantes auraient entre temps déplacé leur siège social, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 901 du Code de procédure civile ; 2°) ALORS SUBSIDIAIREMENT QU'un acte ne peut être annulé pour vice de forme que si celui qui s'en plaint démontre que ce vice lui a fait grief, lequel doit être la conséquence de l'irrégularité en cause ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que Mme [M] et la société Notre-Dame de Bon Voyage Centre de Rééducation Fonctionnelle justifiaient d'un grief de nature à fonder l'annulation de la déclaration d'appel du 15 mars 2019 et l'assignation à jour fixe du 5 août 2020, à raison de l'impossibilité d'exécuter le jugement qui en résulterait ; qu'en statuant ainsi, bien que les demanderesses à l'incident ne justifient que d'une créance provisoire de 1.500 € chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et que la cour ait constaté que la radiation du rôle avait été refusée en l'état de l'impossibilité pour les exposantes d'exécuter le jugement, ce dont il se déduisait que l'indication éventuelle d'une adresse erronée dans les actes de procédure n'avait pas causé l'impossibilité d'exécution retenue et était sans emport sur la possibilité d'exécuter ou non le jugement, la cour d'appel a violé l'article 114 du Code de procédure civile, ensemble l'article 901 du Code de procédure civile ; 3°) ALORS TRÈS SUBSIDIAIREMENT QUE, si des restrictions peuvent être apportées au droit d'accès au juge d'appel, celles-ci doivent poursuivre un but légitime et lui être proportionnées ; qu'en l'espèce, en considérant que la déclaration d'appel des exposantes du 15 mars 2019 et l'assignation du 5 août 2020 étaient nulles à raison du grief causé par l'erreur affectant la mention de leur siège social dans ces actes, quand les demanderesses à l'incident ne justifiaient que d'une créance provisoire de 1.500 € chacune au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et que les exposantes avaient été condamnées par le jugement querellé à des sommes si importantes qu'elles étaient dans l'impossibilité de les acquitter, la cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel des exposantes et a violé l'article 6§1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 4°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QU'une motivation par voie de simple affirmation abstraite équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, en affirmant abstraitement et péremptoirement que les conclusions déposées dans la seconde instance étaient irrecevables, sans préciser le vice dont elles auraient été atteintes (V. p. 12, §4), ce qui empêche tout contrôle du juge de cassation, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Annulation M. PIREYRE, président Arrêt n° 216 F-D Pourvoi n° U 21-17.719 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 Mme [Y] [G], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-17.719 contre l'arrêt rendu le 7 avril 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Jive Software Limited, société de droit étranger, dont le siège est [Adresse 2] (Royaume-Uni), défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bohnert, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [G], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Jive Software Limited, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bohnert, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 7 avril 2021), Mme [G], salariée de la société Jive Software Limited, ayant saisi un conseil des prud'hommes aux fins de voir constater la nullité de son licenciement, a interjeté appel, le 9 novembre 2018, du jugement qui l'a débouté de ses demandes. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 2. Mme [G] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris et de la débouter de l'ensemble de ses demandes, alors « que s'il a été jugé qu'il résultait des articles 542 et 954 du code de procédure civile que, lorsque l'appelant ne demandait dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne pouvait que confirmer le jugement, la Cour de cassation a précisé, dans son arrêt du 17 septembre 2020, que cette solution n'était pas applicable « dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date du présent arrêt » ; qu'en l'espèce, pour confirmer la jugement entrepris, la cour d'appel a jugé que, « en l'état des dernières conclusions déposées par Mme [G], la cour n'est saisie d'aucune demande d'infirmation, de réformation ou d'annulation du jugement du conseil de prud'hommes. En conséquence, la cour ne peut que confirmer le jugement. C'est vainement que Mme [G] soutient que sa carence serait sans conséquence sur le litige, ses dernières conclusions ayant été signifiées postérieurement à la décision de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 17 septembre 2020 » ; qu'en statuant ainsi, quand l'exposante avait interjeté appel le 9 novembre 2018, la cour d'appel, qui a fait application de manière imprévisible d'une règle inapplicable, a violé l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme. » Réponse de la Cour Vu les articles 542, 908 et 954 du code de procédure civile et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : 3. L'objet du litige devant la cour d'appel étant déterminé par les prétentions des parties, le respect de l'obligation faite à l'appelant de conclure conformément à l'article 908 s'apprécie nécessairement en considération des prescriptions de l'article 954. 4. Il résulte de ce dernier texte, en son deuxième alinéa, que le dispositif des conclusions de l'appelant remises dans le délai de l'article 908 doit comporter une prétention sollicitant expressément l'infirmation ou l'annulation du jugement frappé d'appel. 5. À défaut, en application de l'article 908, la déclaration d'appel est caduque ou, conformément à l'article 954, alinéa 3, la cour d'appel ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif, ne peut que confirmer le jugement. 6. Ainsi, l'appelant doit dans le dispositif de ses conclusions mentionner qu'il demande l'infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l'anéantissement, ou l'annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue de relever d'office la caducité de l'appel. Lorsque l'incident est soulevé par une partie, ou relevé d'office par le conseiller de la mise en état, ce dernier, ou le cas échéant la cour d'appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d'appel si les conditions en sont réunies (2e Civ., 4 novembre 2021, pourvoi n° 20-15-766, publié). 7. Cette obligation de mentionner expressément la demande d'infirmation ou d'annulation du jugement, affirmée pour la première fois par un arrêt publié (2e Civ., 17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626, publié), fait peser sur les parties une charge procédurale nouvelle. Son application immédiate dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure à la date de cet arrêt, aboutirait à priver les appelants du droit à un procès équitable. 8. Pour confirmer le jugement, l'arrêt, après avoir relevé que l'appel a été formé le 9 novembre 2018, retient que dans ses dernières conclusions adressées à la cour, Mme [G] ne forme plus aucune demande d'infirmation, d'annulation, ou de réformation des chefs du jugement entrepris et qu'en conséquence la cour d'appel ne peut que confirmer le jugement. 9. En statuant ainsi, la cour d'appel a donné une portée aux articles 542, 908 et 954 du code de procédure civile qui, pour être conforme à l'état du droit applicable depuis le 17 septembre 2020, n'était pas prévisible pour les parties à la date à laquelle il a été relevé appel, soit le 9 novembre 2018, l'application de cette règle de procédure, qui instaure une charge procédurale nouvelle dans l'instance en cours, aboutissant à priver Mme [G] d'un procès équitable au sens de l'article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société Jive Software Limited aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Jive Software Limited et la condamne à payer à Mme [G] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé et signé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour Mme [G] Mme [G] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris et de l'AVOIR déboutée de l'ensemble de ses demandes ; 1°) ALORS QUE, s'il a été jugé qu'il résultait des articles 542 et 954 du code de procédure civile que, lorsque l'appelant ne demandait dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, la cour d'appel ne pouvait que confirmer le jugement, la Cour de cassation a précisé, dans son arrêt du 17 septembre 2020, que cette solution n'était pas applicable « dans les instances introduites par une déclaration d'appel antérieure aÌ la date du présent arrêt » ; qu'en l'espèce, pour confirmer la jugement entrepris, la cour d'appel a jugé que, « en l'état des dernières conclusions déposées par Mme [G], la cour n'est saisie d'aucune demande d'infirmation, de réformation ou d'annulation du jugement du conseil de prud'hommes. En conséquence, la cour ne peut que confirmer le jugement. C'est vainement que Mme [G] soutient que sa carence serait sans conséquence sur le litige, ses dernières conclusions ayant été signifiées postérieurement aÌ la décision de la deuxième chambre civile de la Cour de cassation du 17 septembre 2020 » ; qu'en statuant ainsi, quand l'exposante avait interjeté appel le 9 novembre 2018, la cour d'appel, qui a fait application de manière imprévisible d'une règle inapplicable, a violé l'article 6, §1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme ; 2°) ALORS EN TOUT ÉTAT DE CAUSE QU'une simple erreur matérielle est dénué d'effet juridique ; qu'en l'espèce, il est constant que, si les dernières conclusions d'appel de l'exposante ne demandaient dans le dispositif de ses conclusions ni l'infirmation ni l'annulation du jugement, ses précédentes écritures comportaient cette mention, sans que son absence dans les dernières écritures ne traduise la moindre évolution de son argumentation, ni ne crée la moindre confusion quant à son sens ; qu'en affirmant pourtant n'avoir été saisie d'aucune demande en considération d'une simple omission matérielle, la cour d'appel a consacré un formalisme excessif et a de plus fort violé l'article 6, §1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 FD COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 223 F-D Pourvoi n° V 21-18.387 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 Mme [P] [Y], domiciliée chez Mme [S] [G], [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 21-18.387 contre l'arrêt rendu le 25 mars 2021 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant à la société RATP Habitat, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée Logis transport, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Latreille, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme [Y], de Me Haas, avocat de la société RATP Habitat, et l'avis de Mme Trassoudaine-Verger, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Latreille, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 25 mars 2021), la société RATP Habitat a poursuivi l'expulsion de Mme [Y] en lui faisant délivrer un commandement de quitter les lieux le 9 mars 2018 puis un procès-verbal de nullité d'expulsion le 18 mai 2018 et un procès-verbal d'expulsion le 1er août 2018. 2. Mme [Y] a saisi un juge de l'exécution à fin de sursis à statuer puis, en nullité du commandement, enfin en nullité du procès-verbal d'expulsion. 3. Après jonction des différentes procédures, le juge de l'exécution a rejeté la demande de sursis à statuer et débouté Mme [Y] de ses autres demandes. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Mme [Y] fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du procès-verbal d'expulsion, de sa demande de réintégration dans les lieux sous astreinte, de sa demande en paiement des frais d'expulsion, et de ses plus amples demandes, alors : « 1° / en premier lieu que dans les sociétés titulaires d'un office d'huissier de justice, chaque associé exerce les fonctions d'huissier au nom de la société, de sorte que le défaut de mention, sur un acte d'huissier, de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, constituent des irrégularités de fond ; qu'en jugeant, à propos du procès-verbal d'expulsion, du procès-verbal de tentative d'expulsion et du commandement de quitter les lieux, que « l'absence de précision de ce que la société officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, ne peut conduire à l'annulation de l'acte qu'à la condition que l'irrégularité ait causé un grief au destinataire de l'acte », et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissiers de justice », la cour d'appel a violé les articles 8 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, 45 et 47 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l'application à la profession d'huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles, 114, 117, 648 et 649 du code de procédure civile ; 2°/ en deuxième lieu que, subsidiairement, en jugeant que « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Mme [Y], et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice », bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Mme [Y] n'ait pas pu vérifier si la personne qui leur avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil ; 3°/ en troisième lieu que, subsidiairement, en jugeant qu'en ce qui concerne le commandement de quitter les lieux, « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Mme [Y], et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice », bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Mme [Y] n'ait pas pu vérifier si la personne qui leur avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil. » Réponse de la Cour 5. Selon l'article 648 du code de procédure civile, tout acte d'huissier de justice indique notamment les noms, prénoms, demeure et signature de l'huissier de justice. 6. Aux termes de l'article 649 du même code, la nullité des actes d'huissier de justice est régie par les dispositions qui gouvernent la nullité des actes de procédure. 7. En application du second alinéa de l'article 114 du code de procédure civile, la nullité pour vice de forme ne peut être prononcée qu'à charge pour la partie qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité. 8. Ayant relevé, d'une part, que le commandement de quitter les lieux du 9 mars 2018, le procès-verbal de tentative d'expulsion du 18 mai 2018 et le procès-verbal d'expulsion du 1er août .2018 ne comportaient pas la mention de ce que la société qui emploie l'huissier de justice officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, et exactement retenu, d'autre part, que ce défaut de mention de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, qui ne concerne que les modalités d'organisation de l'activité d'huissier de justice, n'a pas d'incidence sur le pouvoir des huissiers de justice, officiers ministériels, ayant instrumenté en l'occurrence, la cour d'appel en a exactement déduit que cette irrégularité constitue un vice de forme qui n'est sanctionné par la nullité de l'acte que s'il en résulte un grief, dont elle a souverainement estimé que Mme [Y] ne justifiait pas. 9. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [Y] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [Y] et la condamne à payer à la société RATP Habitat la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme [Y]. Madame [Y] fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de nullité du procès-verbal d'expulsion, de sa demande de réintégration dans les lieux sous astreinte, de sa demande en paiement des frais d'expulsion, et de ses plus amples demandes ; ALORS en premier lieu QUE dans les sociétés titulaires d'un office d'huissier de justice, chaque associé exerce les fonctions d'huissier au nom de la société, de sorte que le défaut de mention, sur un acte d'huissier, de la dénomination sociale de la société précédée ou suivie de la mention « société civile professionnelle » ou des initiales « SCP », ainsi que le défaut d'indication du titulaire de l'office ministériel, constituent des irrégularités de fond ; qu'en jugeant, à propos du procès-verbal d'expulsion, du procès-verbal de tentative d'expulsion et du commandement de quitter les lieux, que « l'absence de précision de ce que la société officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office, ne peut conduire à l'annulation de l'acte qu'à la condition que l'irrégularité ait causé un grief au destinataire de l'acte » (arrêt, p. 5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissiers de justice » (ibid.), la cour d'appel a violé les articles 8 de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles professionnelles, 45 et 47 du décret n° 69-1274 du 31 décembre 1969 pris pour l'application à la profession d'huissier de justice de la loi n° 66-879 du 29 novembre 1966 sur les sociétés civiles professionnelles, 114, 117, 648 et 649 du code de procédure civile ; ALORS en deuxième lieu QUE, subsidiairement, en jugeant que « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Madame [Y] (arrêt, p. 5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice » (ibid.), bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Madame [Y] n'ait pas pu vérifier si la personne qui lui avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil ; ALORS en troisième lieu QUE, subsidiairement, en jugeant qu'en ce qui concerne le commandement de quitter les lieux, « l'absence de précision de ce que la société qui l'emploie officie sous forme de SCP, ou de ce qu'il s'agit d'une SCP titulaire d'un office d'huissier de justice, ou d'une SCP d'huissiers de justice dont chaque associé est titulaire de l'office » n'aurait causé aucun grief à Madame [Y] (arrêt, p. 5), et que « les actes contestés précisent en outre le numéro de Siret de la société d'huissiers 384 625 612 permettant la levée d'un extrait Kbis, dont la simple consultation confirme qu'il s'agit d'une SCP d'exercice en commun par ses membres de la profession d'huissier de justice » (ibid.), bien que du fait de l'irrégularité dénoncée Madame [Y] n'ait pas pu vérifier si la personne qui lui avait signifié cet acte avait la qualité d'officier ministériel, l'extrait Kbis en question ne précisant pas davantage qui de la SCP ou de ses associés est titulaire de l'office ministériel, la cour d'appel a violé les articles 114 et 648 du code de procédure civile, ensemble l'article 1369 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 FD COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 227 F-D Pourvoi n° E 20-20.025 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 M. [O] [H], domicilié [Adresse 3], a formé le pourvoi n° E 20-20.025 contre l'arrêt rendu le 23 juin 2020 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant au Fonds commun de titrisation Castanea, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], représenté par la société MCS et associés, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la Société générale, ayant pour société de gestion la société Equitis gestion, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bonnet, conseiller référendaire, les observations de la SAS Hannotin, Avocats, avocat de M. [H], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 23 juin 2020), le 16 septembre 2004, la Société générale, aux droits de laquelle vient le Fonds commun de tritisation Castanea, ayant pour société de gestion la société Equitis gestion (la banque), a consenti à la SCI Auberge-Relais de Traverson (la société) un prêt immobilier, avec la caution solidaire des associés, M. [H] et Mme [L], épouse [H]. 2. La société ayant été défaillante dans le règlement des échéances, la banque l'a assignée, ainsi que M. et Mme [H], devant un tribunal de grande instance aux fins de condamnation au paiement du solde du prêt, lequel, par jugement du 26 septembre 2007, a condamné solidairement la société et M. et Mme [H] à payer à la banque une somme. [G] [H] est décédée le 13 février 2008. 3. Le 12 mai 2017, la banque a assigné M. [H] devant un tribunal d'instance aux fins de saisie de ses rémunérations entre les mains de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL). Examen du moyen Enoncé du moyen 4. M. [H] fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, d'ordonner au bénéfice de la banque la saisie des rémunérations du travail de M. [H] entre les mains de la CNRACL ou de tout autre tiers saisi pour avoir paiement des sommes dues en vertu du jugement du tribunal de grande instance de Nancy du 26 septembre 2007, alors : « 1°/ que le juge est tenu de vérifier si les diligences mentionnées au procès-verbal sont suffisantes et si l'adresse du destinataire n'aurait pas pu être obtenue selon le moyen indiqué par les conclusions ; qu'au cas présent, l'huissier s'est borné à « contacte[r] l'administration des PTT qui, sous couvert du secret, a refusé de lui communiquer une quelconque adresse » ; que M. [H] faisait valoir dans ses conclusions l'huissier aurait pu, tout simplement, consulter les « Pages blanches », ou encore la mairie, les services de police, ou en particulier les services du Greffe du tribunal de grande instance dont dépendait le tribunal d'instance de Nancy, dont M. [H] démontrait, pièces à l'appui, qu'il connaissait sa nouvelle adresse ; que, pour juger la signification par procès-verbal de recherches infructueuses valable, la cour d'appel s'est bornée à énoncer qu'en contactant l'administration des PTT qui lui aurait opposé le secret et en précisant que M. [H] n'habitait plus à sa précédente adresse, l'huissier aurait effectué « toutes les diligences nécessaires » ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'adresse du destinataire n'aurait pas pu être obtenue selon les moyens indiqués par les conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 659 du code de procédure civile ; 2°/ que M. [H] faisait valoir que la société générale avait connaissance de sa véritable adresse et avait délibérément fait signifier le jugement à une adresse inexacte ; que la cour d'appel n'a aucunement répondu à ce moyen, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ; 3°/ qu'en tout état de cause, M. [H] faisait valoir que la signification produite aux débats indiquait porter sur un jugement du 25 octobre 2007 et non du 26 septembre 2007, ce qui faisait sérieusement douter qu'il s'agissait là de la signification du jugement litigieux du 26 septembre 2007 ; que la cour d'appel n'a aucunement répondu à ce moyen, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ». Réponse de la Cour 5. Ayant relevé que la signification était régulière dès lors que le jugement du 26 septembre 2007 avait été signifié à M. [H] le 25 octobre 2007, selon les formes prévues à l'article 659 du code de procédure civile, et qu'il n'était pas contesté que l'adresse à laquelle l'huissier de justice avait effectué ses diligences correspondait à celle que M. et Mme [H] avaient eux-mêmes mentionnée, le 9 août 2007, dans leur saisine du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nancy, et que l'huissier, après s'être rendu sur les lieux et avoir constaté que l'appartement était vide d'occupant, avait contacté les services des postes qui, sous couvert du secret, avait refusé de lui communiquer une quelconque adresse, c'est sans encourir les griefs du moyen que la cour d'appel, a statué comme elle l'a fait. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [H] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la la SAS Hannotin, Avocats, avocat aux Conseils, pour M. [H]. Monsieur [H] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement et, statuant à nouveau, d'avoir ordonné au bénéfice de la Société Générale la saisie des rémunérations du travail de [O] [H] entre les mains de la CNARCL ou de tout autre tiers saisi pour avoir paiement des sommes dues en vertu du jugement du tribunal de grande instance de Nancy du 26 septembre 2007 ; 1°) Alors que le juge est tenu de vérifier si les diligences mentionnées au procès-verbal sont suffisantes et si l'adresse du destinataire n'aurait pas pu être obtenue selon le moyen indiqué par les conclusions ; qu'au cas présent, l'huissier s'est borné à « contacte[r] l'administration des PTT qui, sous couvert du secret, a refusé de lui communiquer une quelconque adresse » (arrêt, p. 4) ; que M. [H] faisait valoir dans ses conclusions l'huissier aurait pu, tout simplement, consulter les « Pages blanches », ou encore la mairie, les services de police, ou en particulier les services du Greffe du tribunal de grande instance dont dépendait le tribunal d'instance de Nancy, dont M. [H] démontrait, pièces à l'appui, qu'il connaissait sa nouvelle adresse (v. conclusions d'appel, p. 11-12) ; que, pour juger la signification par procès-verbal de recherches infructueuses valable, la cour d'appel s'est bornée à énoncer qu'en contactant l'administration des PTT qui lui aurait opposé le secret et en précisant que M. [H] n'habitait plus à sa précédente adresse, l'huissier aurait effectué « toutes les diligences nécessaires » (arrêt attaqué, p. 5) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si l'adresse du destinataire n'aurait pas pu être obtenue selon les moyens indiqués par les conclusions, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 659 du code de procédure civile ; 2°) Alors que M. [H] faisait valoir que la société générale avait connaissance de sa véritable adresse et avait délibérément fait signifier le jugement à une adresse inexacte (conclusions d'appel, p. 12) ; que la cour d'appel n'a aucunement répondu à ce moyen, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ; 3°) Alors que, en tout état de cause, M. [H] faisait valoir que la signification produite aux débats indiquait porter sur un jugement du 25 octobre 2007 et non du 26 septembre 2007, ce qui faisait sérieusement douter qu'il s'agissait là de la signification du jugement litigieux du 26 septembre 2007 (conclusions d'appel, p. 9-10) ; que la cour d'appel n'a aucunement répondu à ce moyen, en violation de l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 209 F-D Pourvoi n° Q 21-17.163 Aide juridictionnelle totale en demande au profit de M. [C] [W]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 4 mars 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 1°/ M. [K] [W], 2°/ Mme [N] [S], épouse [W], 3°/ M. [C] [W], tous trois domiciliés [Adresse 2], ont formé le pourvoi n° Q 21-17.163 contre l'arrêt rendu le 12 octobre 2020 par la cour d'appel de Basse-Terre (2e chambre civile), dans le litige les opposant : 1°/ à M. [T] [D], domicilié [Adresse 3], 2°/ à la société CRD Habitat, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat de M. [K] [W], Mme [N] [S], épouse [W], et M. [C] [W], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [D], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 12 octobre 2020), dans un litige les opposant à M. [D], M. [K] [W], Mme [N] [W] et M. [C] [W] ont relevé appel, par déclaration du 25 juillet 2019, d'un jugement du juge de l'exécution du 8 juillet 2019. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, ci-après annexé 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en ses première, deuxième et cinquième branches Enoncé du moyen 3. M. [K] [W], Mme [N] [W] et M. [C] [W] font grief à l'arrêt de constater l'absence d'effet dévolutif de leur déclaration d'appel et de dire qu'elle n'était saisie d'aucune demande, alors : « 1°/ qu'il résulte de l'article 930-1 du code de procédure civile que la déclaration d'appel est faite par voie électronique ; qu'il résulte de l'article 6 de l'arrêté du ministère de la justice du 30 mars 2011 régissant les modalités techniques de la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel applicable à l'espèce que les parties ont la possibilité d'annexer un document sous forme de fichier informatique à leur déclaration d'appel ; qu'en l'espèce, un fichier au sein duquel les appelants avaient listé les différents chefs du jugement qu'ils critiquaient était annexé à la déclaration d'appel laquelle s'y reportait expressément en précisant que « l'objet de l'appel est précisé dans la déclaration d'appel ci-jointe » ; qu'en retenant que « s'il n'est pas établi que la déclaration d'appel a dépassé sa taille maximale de 4 080 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'est pas la déclaration d'appel » (arrêt, p. 6, § 9), pour exclure l'effet dévolutif de l'appel, la cour d'appel, qui a ainsi, introduisant une limite au champ de l'effet dévolutif de la déclaration d'appel par voie informatique que la loi ne prévoit pas, la cour d'appel a violé les articles 562 et 901, 4° du code de procédure civile ensemble les articles 930-1 et 748-1 et suivants du même code ; 2°/ subsidiairement, que seule la déclaration d'appel qui s'abstient de viser les chefs du jugement critiqué est dépourvue d'effet dévolutif ; que la désignation des chefs du jugement critiqué au sein d'un fichier joint à la déclaration d'appel plutôt que dans le corps même de cette déclaration d'appel n'équivaut pas à une absence de désignation des chefs de jugement critiqué, mais constitue tout au plus un vice de forme susceptible d'être sanctionné par la nullité de la déclaration d'appel ; que pour juger que la déclaration d'appel opérée par les consorts [W], dont la nullité n'avait pas été prononcée, ne produisait aucun effet dévolutif aux motifs que les chefs du jugement critiqués étaient visés dans un fichier annexé, la cour d'appel a violé les articles 562 et 901, 4° du code de procédure civile, ensemble l'article 114 du même code et l'arrêté ministériel du 30 mars 2011 pris en application de l'article 748-6 et 930-1 du code de procédure civile ; 5°/ en toute hypothèse que les limitations apportées au droit d'accès au juge doivent être proportionnées à l'objectif visé ; qu'après avoir constaté que les consorts [W] « ont interjeté appel sur l'ensemble des chefs de cette décision à l'exception de celle rejetant la fin de non-recevoir tirée de leur défaut de qualité à agir » et que les chefs du jugement critiqués étaient listés au sein d'un fichier régulièrement annexé à la déclaration d'appel et auquel la déclaration d'appel faisait un renvoi exprès en retenant, pour néanmoins considérer qu'elle n'était saisie d'aucune demande, motifs pris de ce que « s'il n'est pas établi que la déclaration d'appel a dépassé sa taille maximale de 4 080 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'est pas la déclaration d'appel », la cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge, au point de l'atteindre dans sa substance même, en violation de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour 4. Selon l'article 901, 4°, du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, la déclaration d'appel est faite, à peine de nullité, par acte contenant notamment les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. 5. En application de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du même décret, seul l'acte d'appel emporte dévolution des chefs critiqués du jugement. 6. En application des articles 748-1 et 930-1 du même code, cet acte est accompli et transmis par voie électronique. Selon le second de ces textes, en son dernier alinéa, un arrêté du garde des Sceaux définit les modalités des échanges par voie électronique. 7. L'arrêté du 30 mars 2011 relatif à la communication par voie électronique aux procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel qui vise les articles 748-1 à 748-7 et 930-1 et est applicable en la cause, prévoit, notamment en son article 6, que lorsqu'un document doit être joint à un acte, le document est communiqué sous la forme d'un fichier séparé du fichier au format XML contenant l'acte sous forme de message de données. Le fichier contenant le document joint accompagnant l'acte est un fichier au format PDF. Le fichier au format PDF est produit soit au moyen d'un dispositif de numérisation par scanner si le document à communiquer est établi sur support papier, soit par enregistrement direct au format PDF au moyen de l'outil informatique utilisé pour créer et conserver le document original sous forme numérique. 8. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions, que les mentions prévues par l'article 901 du code de procédure civile dans sa version alors applicable, doivent figurer dans la déclaration d'appel, laquelle est un acte de procédure se suffisant à lui seul. 9. Cependant, en cas d'empêchement d'ordre technique, l'appelant peut compléter la déclaration d'appel par un document faisant corps avec elle et auquel elle doit renvoyer. 10. Après avoir rappelé les dispositions des articles 562 et 901 du code de procédure civile, relevé que les chefs de jugement contestés étaient en réalité exclusivement explicités dans une annexe intitulée « déclaration d'appel devant la cour d'appel » et fait ressortir qu'il n'existait aucun empêchement d'ordre technique, la cour d'appel en a exactement déduit, sans méconnaître les exigences de l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, que ce document ne vaut pas déclaration d'appel, seul l'acte d'appel opérant la dévolution des chefs critiqués du jugement. 11. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [K] [W], Mme [N] [S], épouse [W] et M. [C] [W] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Delvolvé et Trichet, avocat aux Conseils, pour M. [K] [W], Mme [N] [S], épouse [W] et M. [C] [W]. M. [K] [W], Mme [N] [W] et M. [C] [W] font grief à la décision attaquée d'avoir constaté l'absence d'effet dévolutif de leur déclaration d'appel et d'avoir dit que la cour n'était saisie d'aucune demande ; 1°) Alors qu'il résulte de l'article 930-1 du code de procédure civile que la déclaration d'appel est faite par voie électronique ; qu'il résulte de l'article 6 de l'arrêté du ministère de la justice du 30 mars 2011 régissant les modalités techniques de la communication par voie électronique dans les procédures avec représentation obligatoire devant les cours d'appel applicable à l'espèce que les parties ont la possibilité d'annexer un document sous forme de fichier informatique à leur déclaration d'appel ; qu'en l'espèce, un fichier au sein duquel les appelants avaient listé les différents chefs du jugement qu'ils critiquaient était annexé à la déclaration d'appel laquelle s'y reportait expressément en précisant que « " l'objet de l'appel est précisé dans la déclaration d'appel ci-jointe " » (arrêt, p. 6, § 10) ; qu'en retenant que « s'il n'est pas établi que la déclaration d'appel a dépassé sa taille maximale de 4 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'est pas la déclaration d'appel » (arrêt, p. 6, § 9), pour exclure l'effet dévolutif de l'appel, la cour d'appel, qui a ainsi, introduisant une limite au champ de l'effet dévolutif de la déclaration d'appel par voie informatique que la loi ne prévoit pas, la cour d'appel a violé les articles 562 et 901, 4° du code de procédure civile ensemble les articles 930-1 et 748-1 et suivants du même code ; 2°) Alors, subsidiairement, que seule la déclaration d'appel qui s'abstient de viser les chefs du jugement critiqué est dépourvue d'effet dévolutif ; que la désignation des chefs du jugement critiqué au sein d'un fichier joint à la déclaration d'appel plutôt que dans le corps même de cette déclaration d'appel n'équivaut pas à une absence de désignation des chefs de jugement critiqué, mais constitue tout au plus un vice de forme susceptible d'être sanctionné par la nullité de la déclaration d'appel ; que pour juger que la déclaration d'appel opérée par les consorts [W], dont la nullité n'avait pas été prononcée, ne produisait aucun effet dévolutif aux motifs que les chefs du jugement critiqués étaient visés dans un fichier annexé, la cour d'appel a violé les articles 562 et 901, 4° du code de procédure civile, ensemble l'article 114 du même code et l'arrêté ministériel du 30 mars 2011 pris en application de l'article 748-6 et 930-1 du code de procédure civile ; 3°) Alors, très subsidiairement, que pour retenir que la déclaration d'appel n'a eu aucun effet dévolutif aux motifs que « s'il n'est pas établi que la déclaration d'appel a dépassé sa taille maximale de 4 080 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'est pas la déclaration d'appel » (arrêt, p. 6, § 9), la cour d'appel qui s'est bornée à constater que les chefs du jugement critiqués étaient visés dans un fichier annexé à la déclaration d'appel, sans constater que la déclaration d'appel avait, en l'espèce, dépassé la taille maximale de 4 080 caractères, a privé sa décision de base légale au regard des articles 562 et 901, 4° du code de procédure civile, ensemble l'arrêté ministériel du 30 mars 2011 pris en application de l'article 748-6 et 930-1 du code de procédure civile ; 4°) Alors, en outre, que le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen tirée de ce que « s'il n'est pas établi que la déclaration d'appel a dépassé sa taille maximale de 4 080 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'est pas la déclaration d'appel » (arrêt, p. 6, § 9), sans inviter les parties à s'en expliquer, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile, ensemble l'article 16, § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 5°) Alors en toute hypothèse que les limitations apportées au droit d'accès au juge doivent être proportionnées à l'objectif visé ; qu'après avoir constaté que les consorts [W] « ont interjeté appel sur l'ensemble des chefs de cette décision à l'exception de celle rejetant la fin de non-recevoir tirée de leur défaut de qualité à agir » (arrêt, p. 4, § 4) et que les chefs du jugement critiqués étaient listés au sein d'un fichier régulièrement annexé à la déclaration d'appel et auquel la déclaration d'appel faisait un renvoi exprès en retenant, pour néanmoins considérer qu'elle n'était saisie d'aucune demande, motifs pris de ce que « s'il n'est pas établi que la déclaration d'appel a dépassé sa taille maximale de 4 080 caractères, les chefs de jugement critiqués doivent figurer sur la déclaration d'appel et non sur une annexe qui n'est pas la déclaration d'appel » (arrêt, p. 6, § 9), la cour d'appel a porté une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge, au point de l'atteindre dans sa substance même, en violation de l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 210 F-D Pourvoi n° J 21-17.825 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 M. [U] [J], domicilié [Adresse 2], pris en qualité de gérant de la société Bowlingstar, a formé le pourvoi n° J 21-17.825 contre l'arrêt rendu le 8 avril 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige l'opposant à la société BTSG, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], pris en la personne de M. [N] [Y] en qualité de liquidateur judiciaire de la société Bowlingstar, défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Durin-Karsenty, conseiller, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [J], pris en qualité de gérant de la société Bowlingstar, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Durin-Karsenty, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué et les productions (Paris, 8 avril 2021), à la suite de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à l'égard de la société Bowlingstar dont il était le gérant, M. [J] a été condamné au paiement d'une somme au titre de l'insuffisance d'actif, par un jugement du tribunal de commerce du 10 décembre 2019 dont il a relevé appel. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 2. M. [J] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables toutes ses conclusions et de confirmer le jugement ayant dit qu'il avait commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société et l'ayant en conséquence condamné à payer au liquidateur de la société ès qualités une somme de 119 633 euros alors « que le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ; que l'arrêt se prononce au visa des conclusions déposées le 3 septembre 2020 ; qu'en statuant ainsi, sans se référer aux nouvelles conclusions déposées le 17 février 2021 par M. [J] et complétant son argumentation précédente avec de nouvelles productions à l'appui, la cour d'appel, qui ne les a pas prises en considération dans sa motivation, a violé les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 4, du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 455 et 954, alinéa 4, du code de procédure civile : 3. Il résulte de ces textes que le juge doit statuer sur les dernières conclusions déposées. 4. Pour confirmer le jugement déféré, l'arrêt se prononce au visa de conclusions qualifiées par lui de « dernières » déposées le 3 septembre 2020, en exposant succinctement les prétentions de l'appelant. 5. En statuant ainsi, alors qu'il résulte des productions que M. [J] avait déposé, le 17 février 2021, des conclusions complétant sa précédente argumentation en produisant de nouvelles pièces visées dans le bordereau figurant en annexe, la cour d'appel, qui s'est prononcée par des motifs dont il ne résulte pas qu'elle les aurait prises en considération, a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 8 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société BTSG, prise en la personne de M. [Y], en qualité de liquidateur de la société Bowlingstar, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour M. [J], pris en qualité de gérant de la société Bowlingstar M. [J] FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables toutes ses conclusions et confirmé le jugement ayant dit qu'il avait commis des fautes de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif de la société et l'ayant en conséquence condamné à payer au liquidateur de la société ès qualités une somme de 119 633 euros ; 1°) ALORS QUE le juge, qui ne peut statuer que sur les dernières conclusions déposées, doit viser celles-ci avec l'indication de leur date ; que l'arrêt se prononce au visa des conclusions déposées le 3 septembre 2020 (arrêt, p. 2, § 7) ; qu'en statuant ainsi, sans se référer aux nouvelles conclusions déposées le 17 février 2021 par M. [J] et complétant son argumentation précédente avec de nouvelles productions à l'appui, la cour d'appel, qui ne les a pas prises en considération dans sa motivation, a violé les articles 455, alinéa 1er, et 954, alinéa 4, du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE M. [J] a fait valoir, dans ses conclusions déposées le 17 février 2021, que la réalité de son domicile était établie par les pièces nos 19 à 23 (conclusions du 17 février 2021, p. 7, § 8 et 9) ; qu'à supposer même que la cour d'appel ait statué sur les dernières conclusions de M. [J], elle a, en jugeant que « Monsieur [J], alors que l'irrecevabilité de ses conclusions était soulevée n'a produit aucune pièce justifiant de son domicile réel » (arrêt, p. 4, § 1), dénaturé par omission les pièces nos 19 à 23, en violation de l'interdiction faite au juge de dénaturer les documents de la cause ; 3°) ALORS QUE la cour d'appel a en outre, en statuant ainsi, dénaturé le bordereau de communication des pièces joint aux conclusions du 17 février 2021, qui comportaient des pièces démontrant que l'adresse de M. [J] mentionnée sur les conclusions était exacte ; 4°) ALORS QUE pour déclarer irrecevables les conclusions de M. [J], la cour d'appel a jugé que celui-ci « dissimul[ait] son adresse réelle en jouant avec deux adresses où il ne se trouve pas quand on tente de le toucher » (arrêt p. 4, § 2) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ses constatations n'établissaient pas que M. [J] avait été domicilié en 2013 [Adresse 2], puis jusqu'en mars 2020 [Adresse 3], et de nouveau [Adresse 2] à compter de cette date, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 960 et 961 du code de procédure civile ; 5°) ALORS QUE la cour d'appel ne relevait pas l'existence d'une adresse autre que celles de la [Adresse 2] et de la [Adresse 3] ; qu'il résultait donc de ses constatations que M. [J] était nécessairement domicilié à l'une ou l'autre de ces adresses de sorte qu'au moins un des jeux de conclusions, soit le premier, indiquant l'adresse de la [Adresse 3], soit les suivants, mentionnant l'adresse [Adresse 2], était recevable ; que pour déclarer irrecevables les conclusions de M. [J], la cour d'appel a jugé que celui-ci « dissimul[ait] son adresse réelle en jouant avec deux adresses où il ne se trouve pas quand on tente de le toucher » (arrêt p. 4, § 2) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 960 et 961 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 FD COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 229 F-D Pourvoi n° Q 21-18.750 Aide juridictionnelle totale en demande pour Mme [H]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 20 mai 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 Mme [K] [H], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Q 21-18.750 contre l'arrêt rendu le 8 octobre 2020 par la cour d'appel de Versailles (11e chambre), dans le litige l'opposant à la société Ap'aips, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bonnet, conseiller référendaire, les observations de la SAS Hannotin avocats, avocat de Mme [H], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 8 octobre 2020), Mme [H] a sollicité, le 8 octobre 2019, le bénéfice de l'aide juridictionnelle, puis a relevé appel, le 4 novembre 2019, d'un jugement d'un conseil des prud'hommes ayant rejeté ses demandes 2. L'aide juridictionnelle a été accordée à Mme [H] le 8 août 2020. 3. Mme [H] a déféré à la cour d'appel l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 28 mai 2020 prononçant la caducité de la déclaration d'appel en application de l'article 908 du code de procédure civile, faute pour celle-ci d'avoir déposé ses conclusions dans le délai imparti par ce texte. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. Mme [H] fait grief à l'arrêt de confirmer l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 28 mai 2020 en ce qu'elle a prononcé la caducité de sa déclaration d'appel, alors « que le droit à un procès équitable implique celui d'un accès à un tribunal ; qu'il ne peut être concret et effectif que s'il est garanti une interruption des délais de procédure à l'auteur d'une demande d'aide juridictionnelle ; qu'au cas présent, Mme [H], qui n'avait pas reçu notification du jugement de première instance par le greffe du conseil des prud'hommes et qui n'avait pas non plus été informée de la réception de sa demande d'aide juridictionnelle pour interjeter appel par le bureau d'aide juridictionnelle compétent, a été contrainte de former une déclaration d'appel pour préserver son droit d'appel ; que, sans attendre l'examen de sa demande d'aide juridictionnelle, les juges du fond ont prononcé à l'encontre de Mme [H] la caducité de sa première déclaration d'appel puis l'irrecevabilité de sa seconde déclaration ; qu'en statuant ainsi, sans tenir compte des défaillances du service public de la justice qui avaient conduit Mme [H] à interjeter appel nonobstant sa demande d'aide juridictionnelle, la cour d'appel, qui a porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de Mme [H] d'accéder à un tribunal, a méconnu ce droit garanti par l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et violé les articles 38 du décret n° 91-647 du 10 juillet 1991 en sa rédaction applicable à la cause et 908 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. Il résulte de l'article 38 du décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que le point de départ d'un délai de recours est reporté, au profit de celui qui demande le bénéfice de l'aide juridictionnelle avant l'expiration de ce délai, au jour de la notification de la décision statuant définitivement sur cette demande ou, en cas d'admission, à la date, si elle est plus tardive, du jour de la désignation d'un auxiliaire de justice en vue d'assister ou de représenter le bénéficiaire de cette aide pour l'exercice de ce recours. Le point de départ des délais impartis pour conclure ou former appel incident est reporté de manière identique au profit des parties à une instance d'appel sollicitant le bénéfice de l'aide juridictionnelle au cours des délais mentionnés aux articles 905-2, 909 et 910 du code de procédure civile. 6. Ces règles, qui se bornent à prévoir, au profit de l'appelant, un report du délai de recours au plus tard jusqu'au jour de la désignation d'un auxiliaire de justice, ne permettent pas un nouveau report du point de départ du délai pour remettre ses conclusions au greffe, en application de l'article 908 du code de procédure civile, même si la demande d'aide juridictionnelle a été formée antérieurement à la déclaration d'appel et un huissier de justice désigné postérieurement à celle-ci. 7. Elles poursuivent néanmoins un but légitime au sens de l'article 6, §, 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en l'occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice. Elles sont, en outre, accessibles et prévisibles, et ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d'accès au juge d'appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé. 8. En effet, en se conformant à l'article 38 du décret précité, la partie qui entend former un appel au bénéfice de l'aide juridictionnelle est mise en mesure, de manière effective, par la désignation d'un avocat et d'autres auxiliaires de justice, d'accomplir l'ensemble des actes de la procédure. 9. Ce dispositif, dénué d'ambiguïté pour un avocat, permet de garantir un accès effectif au juge d'appel au profit de toute personne dont la situation pécuniaire la rend éligible au bénéfice d'une aide juridictionnelle au jour où elle entend former un appel. 10. C'est donc sans méconnaître l'article 6, §, 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que la cour d'appel, ayant constaté, que la salariée n'avait pas remis au greffe ses conclusions dans le délai de trois mois de la déclaration d'appel, en a exactement déduit que la déclaration d'appel était caduque. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [H] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SAS Hannotin avocats, avocat aux Conseils, pour Mme [H]. Madame [H] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état en date du 28 mai 2020 en ce qu'elle a prononcé la caducité de sa déclaration d'appel ; Alors que le droit à un procès équitable implique celui d'un accès à un tribunal ; qu'il ne peut être concret et effectif que s'il est garanti une interruption des délais de procédure à l'auteur d'une demande d'aide juridictionnelle ; qu'au cas présent, Mme [H], qui n'avait pas reçu notification du jugement de première instance par le greffe du conseil des prud'hommes et qui n'avait pas non plus été informée de la réception de sa demande d'aide juridictionnelle pour interjeter appel par le bureau d'aide juridictionnelle compétent, a été contrainte de former une déclaration d'appel pour préserver son droit d'appel ; que, sans attendre l'examen de sa demande d'aide juridictionnelle, les juges du fond ont prononcé à l'encontre de Mme [H] la caducité de sa première déclaration d'appel puis l'irrecevabilité de sa seconde déclaration ; qu'en statuant ainsi, sans tenir compte des défaillances du service public de la justice qui avaient conduit Mme [H] à interjeter appel nonobstant sa demande d'aide juridictionnelle, la cour d'appel, qui a porté une atteinte disproportionnée à la substance même du droit de Mme [H] d'accéder à un tribunal, a méconnu ce droit garanti par l'article 6 § 1 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et violé les articles 38 du décret n° 91-647 du 10 juillet 1991 en sa rédaction applicable à la cause et 908 du code de procédure civile ;
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 FD COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Irrecevabilité M. PIREYRE, président Arrêt n° 215 F-D Pourvoi n° S 21-14.612 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 1°/ M. [T] [S], 2°/ Mme [M] [P], tous deux domiciliés [Adresse 5], 3°/ la société Yams, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], 4°/ la société ES tourisme, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], 5°/ la société Jets, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], 6°/ la société Mana partenaires, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5], ont formé le pourvoi n° S 21-14.612 contre l'ordonnance rendue le 19 novembre 2019 et l'arrêt rendu le 9 décembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 4), dans le litige les opposant : 1°/ à la société River, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], exerçant sous la dénomination Karavel et prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de la société Karavel et de la société LHT, 2°/ à la société Un monde à deux, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ayant droit de la société Toorism, défenderesses à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Jollec, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [S], de Mme [P], de la société Yams, de la société ES tourisme, de la société Jets et de la société Mana partenaires, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société River, exerçant sous la dénomination Karavel et prise tant en son nom personnel qu'en qualité d'ayant droit de la société Karavel et de la société LHT, de la société Un monde à deux, prise tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ayant droit de la société Toorism, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Jollec, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Recevabilité du pourvoi en ce qu'il est dirigé contre l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 19 novembre 2019, examinée d'office Vu l'article 609 du code de procédure civile : 1. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application du texte susvisé. 2. Le pourvoi en cassation n'est recevable que si le demandeur a intérêt à agir. 3. M. [S], la société Yams, Mme [P], la société ES tourisme, la société Jets, la société Mana partenaires se sont pourvus en cassation contre une ordonnance du conseiller de la mise en état qui a rejeté leur demande d'écarter les conclusions n° 2 de l'appelant au motif qu'ils n'avaient pas disposé d'un temps utile pour y répondre. 4. Les demandeurs au pourvoi ne justifient d'aucun intérêt à agir dès lors que sous l'empire du droit applicable au litige, antérieur au décret n° 2019-1333 du 11 décembre 2019, les attributions du conseiller de la mise en état étaient limitativement énumérées, par le renvoi effectué par l'article 907 du code de procédure civile, aux articles 763 à 772-1 du même code et par l'article 914. Or, aucune de ces dispositions ne lui confère le pouvoir d'écarter du débat des conclusions qui n'ont pas été produites en temps utile. Seule la cour d'appel disposait de ce pouvoir. 5. Le pourvoi n'est, dès lors, pas recevable. PAR CES MOTIFS, la cour : DÉCLARE IRRECEVABLE le pourvoi ; CONDAMNE M. [S], la société Yams, Mme [P], la société ES tourisme, la société Jets, la société Mana partenaires au dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. [S], la société Yams, Mme [P], la société ES tourisme, la société Jets et la société Mana partenaires et les condamne à payer aux sociétés River et Un monde à deux la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 LM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Désistement M. PIREYRE, président Arrêt n° 232 F-D Pourvoi n° P 21-21.532 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 1°/ la société Paprec Grand-Est, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], anciennement dénommée Paprec Réseau, 2°/ la société Paprec France, dont le siège est [Adresse 3], ont formé le pourvoi n° P 21-21.532 contre l'arrêt rendu le 24 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-2), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Entreprise Bronzo, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], 2°/ à la société Silim, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesses à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vendryes, conseiller, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de la société Paprec Grand-Est, anciennement dénommée Paprec Réseau et de la société Paprec France, de la SARL Cabinet Munier-Apaire, avocat de la société Entreprise Bronzo et de la société Silim, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Vendryes, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. 1. Par acte déposé au greffe de la Cour de cassation le 10 décembre 2022, la SCP Doumic-Seiller, avocat à la Cour de cassation, a déclaré, au nom de la société Paprec Grand-Est, anciennement dénommée Paprec Réseau et de la société Paprec France, se désister du pourvoi formé par elles contre un arrêt rendu le 24 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence dans une instance les opposant à la société Entreprise Bronzo et à la société Silim. 2. En application de l'article 1026 du code de procédure civile, ce désistement, intervenu après le dépôt du rapport, doit être constaté par arrêt. PAR CES MOTIFS, la Cour : DONNE ACTE à la société Paprec Grand-Est, anciennement dénommée Paprec Réseau et à la société Paprec France de leur désistement de pourvoi ; Condamne la société Paprec Grand-Est, anciennement dénommée Paprec Réseau et la société Paprec France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Paprec Grand-Est, anciennement dénommée Paprec Réseau et par la société Paprec France et les condamne à payer à la société Entreprise Bronzo et à la société Silim la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.
INCA/JURITEXT000047304436.xml
LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 CM COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Rejet M. PIREYRE, président Arrêt n° 230 F-D Pourvoi n° Q 21-18.957 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 La société Royale Center 1, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Q 21-18.957 contre l'arrêt rendu le 27 avril 2021 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, section 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [Z] [D], domicilié [Adresse 2], 2°/ à la commune de [Localité 4], représentée par son maire en exercice, domicilié [Adresse 3], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bonnet, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Royale Center 1, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de M. [D], de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de la commune de [Localité 4], représentée par son maire en exercice, et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Bonnet, conseiller référendaire rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 27 avril 2021) à l'occasion d'un litige en bornage motivé notamment par la présence d'objets sur des parcelles de terrain, entre, d'une part, la SCI Royale Center I (la société), et, d'autre part, la commune de [Localité 4] et M. [D], un tribunal d'instance a ordonné une expertise aux fins de bornage. 2. Par jugement du 7 décembre 2017, le tribunal a homologué le rapport d'expertise, ordonné les opérations de bornage et enjoint sous astreinte à la société de procéder à l'enlèvement des objets et matériaux qu'elle avait entreposés sur ce qu'elle avait estimé être sa propriété. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. La société fait grief à l'arrêt de dire que l'affaire opposant la société, appelante, à M. [D], intimé, et à la commune de [Localité 4], intimée, était périmée et de constater le dessaisissement de la cour d'appel des instances RG 18/00273 et 20/00751, alors « que l'appréciation du caractère significatif de l'exécution de la décision frappée d'appel est faite en considération de ce qui a été décidé par le premier juge dans le dispositif de sa décision ; qu'en constatant la péremption de l'instance, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la réalisation des opérations de bornage, postérieurement à la signification de l'ordonnance de radiation du rôle le 24 juillet 2018, et le paiement par la société Royale Center I, le 6 décembre 2019, de la part des frais de bornage que le jugement entrepris l'avait condamnée à payer ne constituaient pas un acte d'exécution significative ayant interrompu le délai de péremption de l'instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526 et 480 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. Aux termes de l'article 386 du code de procédure civile, l'instance est périmée lorsqu'aucune des parties n'accomplit de diligences pendant deux ans. Lorsqu'en application de l'article 526 du même code, l'appel fait l'objet d'une radiation du rôle faute pour l'appelant de justifier avoir exécuté la décision frappée d'appel, tout acte d'exécution significative de cette décision manifeste la volonté non équivoque de l'exécuter et constitue par conséquent une diligence interrompant le délai de péremption de l'instance d'appel. 6. Ayant relevé que la société n'avait pas procédé à l'enlèvement des matériaux et objets entreposés au-delà de sa limité de propriété, enlèvement ordonné par le premier juge sous astreinte, qu'elle produisait des factures d'achats dont le rapport avec les matériaux acquis n'était absolument pas établi, la cour d'appel, qui a fait ressortir que la société n'avait pas exécuté de manière significative la décision de première instance et qui n'avait pas à effectuer une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a ainsi légalement justifié sa décision. 7. Le moyen n'est, dès lors, pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la SCI Royale Center I aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la SCI Royale Center I et la condamne à payer à la commune de [Localité 4], représentée par son maire en exercice, et à M. [D] la somme de 3 000 euros chacun ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la société Royale Center 1 La société Royale Center I fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que l'affaire opposant la SCI Royale Center I, appelante, à M. [Z] [D], intimé, et à la commune de [Localité 4], intimée, était périmée et d'AVOIR constaté le dessaisissement de la cour des instances RG nos 18/00273 et 20/00751 ; 1°) ALORS QUE l'appréciation du caractère significatif de l'exécution de la décision frappée d'appel est faite en considération de ce qui a été décidé par le premier juge dans le dispositif de sa décision ; qu'en constatant la péremption de l'instance, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la réalisation des opérations de bornage, postérieurement à la signification de l'ordonnance de radiation du rôle le 24 juillet 2018, et le paiement par la société Royale Center I, le 6 décembre 2019, de la part des frais de bornage que le jugement entrepris l'avait condamnée à payer ne constituaient pas un acte d'exécution significative ayant interrompu le délai de péremption de l'instance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526 et 480 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause ; qu'en retenant, pour constater la péremption de l'instance, que la société Royale Center I « n'a[vait] pas procédé à l'enlèvement des matériaux et objet entreposés au-delà de sa limite de propriété, enlèvement ordonné par le premier juge » (arrêt, p. 5, pénultième paragraphe), quand le tribunal d'instance lui avait seulement enjoint de « procéder à l'enlèvement de tous objets et matériaux lui appartenant entreposés au-delà de sa limite de propriété » (jugement entrepris, p. 4, § 6 du dispositif), la cour d'appel a dénaturé le jugement dont appel et violé le principe interdisant au juge de dénaturer les documents de la cause ; 3°) ALORS QU'en toute hypothèse, en se bornant à relever que la qualité de nue-propriétaire de la société Royale Center I « n'a[vait] strictement aucune incidence quant aux objets et matériaux constituant des meubles qu'elle d[evait] enlever » (arrêt, p. 6, § 1er), sans rechercher, comme elle y était invitée, qui, de M. et Mme [C] ou de l'appelante, était propriétaire des objets et matériaux entreposés sur le chemin litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 526 et 480 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 FD COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 Cassation M. PIREYRE, président Arrêt n° 213 F-D Pourvoi n° T 21-16.913 Aide juridictionnelle totale en demande pour M. [V]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 24 mars 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 M. [B] [V], domicilié [Adresse 14], a formé le pourvoi n° T 21-16.913 contre le jugement rendu le 17 février 2020 par le tribunal judiciaire de Bobigny (service surendettement et PRP), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société [15], dont le siège est chez la société [10], [Adresse 5], 2°/ à la société [7], société par actions simplifiée, dont le siège est chez la société [9], [Adresse 6], ayant un établissement secondaire [Adresse 2], 3°/ à la société [11], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], 4°/ à la société [8], dont le siège est [Adresse 1], 5°/ à Pôle emploi d'[Localité 12], dont le siège est [Adresse 13], 6°/ à la société [11], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], 7°/ Mme [X] [W] [P], épouse [V], domiciliée [Adresse 14], défendeurs à la cassation. Mme [X] [W] [P], épouse [V] a formé un pourvoi incident contre le même jugement. Le demandeur au pourvoi principal et la demanderesse au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, les deux moyens de cassation communs annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vendryes, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. et Mme [V], et l'avis de M. Adida-Canac, avocat général, après débats en l'audience publique du 17 janvier 2023 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Vendryes, conseiller rapporteur, Mme Martinel, conseiller doyen, et Mme Thomas, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny, 17 février 2020), rendu en dernier ressort, M. et Mme [V] ont été déclarés irrecevables au bénéfice du traitement de la situation de surendettement des particuliers. Sur le premier moyen pris en ses deuxième, troisième, cinquième et sixième branches Enoncé du moyen 2. M. et Mme [V] font grief au jugement de les déclarer irrecevables au bénéfice du traitement de la situation de surendettement des particuliers alors : « 2°/ que le seul fait pour un débiteur de n'avoir pas sollicité l'intégralité des aides sociales auxquelles il pouvait avoir droit ne suffit pas à caractériser sa volonté d'organiser ou d'aggraver intentionnellement son surendettement ; qu'en déduisant la mauvaise foi de M. et Mme [V] de ce que ceux-ci n'ont pas fait valoir l'ensemble de leurs droits auprès de la caisse d'allocations familiales, le tribunal a statué par un motif impropre à caractériser la mauvaise foi des débiteurs, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation ; 3°/ que le débiteur en situation de surendettement est présumé de bonne foi ; que la mauvaise foi suppose d'établir, d'une part, que le débiteur a organisé ou a aggravé intentionnellement son insolvabilité à l'effet d'échapper au règlement de ses dettes, et d'autre part, que son comportement est en lien direct avec son surendettement ; qu'en déduisant de l'aide mensuelle de 228,81 euros versée par la caisse d'allocation familiale au titre de l'aide au logement que M. et Mme [V], parents de deux enfants, n'ont manifestement pas fait valoir l'ensemble de leurs droits auprès de la caisse, sans vérifier si M. et Mme [V] réunissaient les conditions pour obtenir une aide plus importante, ni indiquer, fût-ce approximativement, le montant qu'ils auraient pu obtenir de la caisse, le tribunal a statué par un motif impropre à s'assurer que cette éventuelle abstention de M. et Mme [V] était en relation directe avec leur surendettement, et qu'elle témoignait de leur volonté de provoquer ou d'aggraver leur situation de surendettement ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation ; 5°/ que le seul fait pour un débiteur d'apporter une aide financière à ses parents ne suffit pas à établir sa volonté d'organiser ou d'aggraver son surendettement ; qu'en déduisant la mauvaise foi de M. et Mme [V] de ce que M. [V] admettait apporter une aide financière à son père pour lui permettre de rembourser un prêt ayant servi à l'acquisition d'une maison au Bengladesh, le tribunal a statué par un motif impropre à caractériser la mauvaise foi des débiteurs, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation ; 6°/ que le débiteur en situation de surendettement est présumé de bonne foi ; que la mauvaise foi suppose d'établir, d'une part, que le débiteur a organisé ou a aggravé intentionnellement son insolvabilité à l'effet d'échapper au règlement de ses dettes, et d'autre part, que son comportement est en lien direct avec son surendettement ; qu'en déduisant en l'espèce la mauvaise foi de M. et Mme [V] de ce que M. [V] admettait apporter une aide financière à son père pour lui permettre de rembourser un prêt ayant servi à l'acquisition d'une maison au Bengladesh, sans apporter aucune indication quant à l'ancienneté et au montant de cette aide, le tribunal a statué par un motif impropre à s'assurer que cette aide était en relation directe avec le surendettement de M. et Mme [V] , et qu'elle témoignait de leur volonté de provoquer ou d'aggraver leur situation de surendettement ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 711-1 du code de la consommation : 3. Selon ce texte, le bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement est ouvert aux personnes physiques de bonne foi. 4. Pour déclarer M. et Mme [V] irrecevables à la procédure de surendettement, le jugement retient d'une part que, parents de deux enfants et au regard du montant des aides sociales perçues, ils n'ont manifestement pas fait valoir l'ensemble de leurs droits auprès de la caisse d'allocations familiales afin de dégager plus de ressources susceptibles de désintéresser leurs créanciers, que d'autre part, l'aide financière apportée par M. [V] à son père afin de rembourser un prêt contracté pour l'acquisition d'une maison au Bangladesh est contraire à la bonne foi imposant que les débiteurs ne privilégient pas une aide familiale au détriment de l'ensemble de leurs créanciers. 5. En se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'absence de bonne foi, le juge du contentieux de la protection n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny le 17 février 2020 ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Bobigny (juge des contentieux de la protection) autrement composé ; Condamne les sociétés [15], [7], [11], [11], [8] et Pôle emploi d'[Localité 12] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé en l'audience publique du deux mars deux mille vingt-trois par Mme Martinel, conseiller doyen, et signé par elle, en remplacement du président empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens communs produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. [V], demandeur au pourvoi principal et Mme [V], demanderesse au pourvoi incident. PREMIER MOYEN DE CASSATION Le jugement attaqué par M. et Mme [V] encourt la censure ; EN CE QU' il a déclaré M. et Mme [V] irrecevables au bénéfice d'un traitement de leur situation de surendettement ; ALORS QUE, premièrement, le motif hypothétique équivaut à un défaut de motifs ; qu'en faisant état de ce que le montant de l'aide au logement versée par la caisse d'allocations familiales faisait ressortir que M. et Mme [V] « n'ont manifestement pas fait valoir l'ensemble de leurs droits auprès de la caisse », le tribunal a statué par un motif hypothétique, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ; ALORS QUE, deuxièmement, le seul fait pour un débiteur de n'avoir pas sollicité l'intégralité des aides sociales auxquelles il pouvait avoir droit ne suffit pas à caractériser sa volonté d'organiser ou d'aggraver intentionnellement son surendettement ; qu'en déduisant la mauvaise foi de M. et Mme [V] de ce que ceux-ci n'ont pas fait valoir l'ensemble de leurs droits auprès de la caisse d'allocations familiales, le tribunal a statué par un motif impropre à caractériser la mauvaise foi des débiteurs, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation ; ALORS QUE, troisièmement, le débiteur en situation de surendettement est présumé de bonne foi ; que la mauvaise foi suppose d'établir, d'une part, que le débiteur a organisé ou a aggravé intentionnellement son insolvabilité à l'effet d'échapper au règlement de ses dettes, et d'autre part, que son comportement est en lien direct avec son surendettement ; qu'en déduisant de l'aide mensuelle de 228,81 euros versée par la caisse d'allocation familiale au titre de l'aide au logement que M. et Mme [V], parents de deux enfants, n'ont manifestement pas fait valoir l'ensemble de leurs droits auprès de la caisse, sans vérifier si M. et Mme [V] réunissaient les conditions pour obtenir une aide plus importante, ni indiquer, fût-ce approximativement, le montant qu'ils auraient pu obtenir de la caisse, le tribunal a statué par un motif impropre à s'assurer que cette éventuelle abstention de M. et Mme [V] était en relation directe avec leur surendettement, et qu'elle témoignait de leur volonté de provoquer ou d'aggraver leur situation de surendettement ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation ; ALORS QUE, quatrièmement, le seul fait pour un débiteur d'apporter une aide financière à ses parents ne suffit pas à caractériser sa mauvaise foi à l'égard de ses créanciers ; qu'en affirmant que la bonne foi impose que les débiteurs ne privilégient pas une aide familiale au détriment de leurs créanciers, le tribunal a commis une erreur de droit, en violation de l'article L. 711-1 du code de la consommation ; ALORS QUE, cinquièmement, le seul fait pour un débiteur d'apporter une aide financière à ses parents ne suffit pas à établir sa volonté d'organiser ou d'aggraver son surendettement ; qu'en déduisant la mauvaise foi de M. et Mme [V] de ce que celui-ci admettait apporter une aide financière à son père pour lui permettre de rembourser un prêt ayant servi à l'acquisition d'une maison au Bengladesh, le tribunal a statué par un motif impropre à caractériser la mauvaise foi des débiteurs, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation ; ET ALORS QUE, sixièmement, le débiteur en situation de surendettement est présumé de bonne foi ; que la mauvaise foi suppose d'établir, d'une part, que le débiteur a organisé ou a aggravé intentionnellement son insolvabilité à l'effet d'échapper au règlement de ses dettes, et d'autre part, que son comportement est en lien direct avec son surendettement ; qu'en déduisant en l'espèce la mauvaise foi de M. et Mme [V] de ce que M. [V] admettait apporter une aide financière à son père pour lui permettre de rembourser un prêt ayant servi à l'acquisition d'une maison au Bengladesh, sans apporter aucune indication quant à l'ancienneté et au montant de cette aide, le tribunal a statué par un motif impropre à s'assurer que cette aide était en relation directe avec le surendettement de M. et Mme [V], et qu'elle témoignait de leur volonté de provoquer ou d'aggraver leur situation de surendettement ; qu'en statuant de la sorte, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation. SECOND MOYEN DE CASSATION Le jugement attaqué par Mme [V] encourt la censure ; EN CE QU' il a déclaré M. et Mme [V] irrecevables au bénéfice d'un traitement de leur situation de surendettement ; ALORS QUE, lorsque la situation de surendettement touche deux époux, les juges doivent s'attacher à examiner la situation de chacun d'eux individuellement ; qu'ils ne sauraient à ce titre imputer à l'un des époux le comportement de son conjoint ; qu'en privant Mme [V] du bénéfice d'une mesure de traitement de sa situation de surendettement au motif que M. [V] avait apporté une aide financière à son propre père, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 711-1 du code de la consommation.
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LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 2 COUR DE CASSATION TJ ______________________ QUESTION PRIORITAIRE de CONSTITUTIONNALITÉ ______________________ Audience publique du 2 mars 2023 NON-LIEU À RENVOI Mme TAILLANDIER-THOMAS, conseiller doyen faisant fonction de président Arrêt n° 346 F-D Affaire n° H 22-40.022 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 2 MARS 2023 Le tribunal judiciaire de Montpellier a transmis à la Cour de cassation, suite au jugement rendu le 15 décembre 2022, la question prioritaire de constitutionnalité, reçue le 20 décembre 2022, dans l'instance mettant en cause : D'une part, Mme [C] [H], domiciliée [Adresse 2], D'autre part, La caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, dont le siège est [Adresse 1]. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Cassignard, conseiller, et l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 28 février 2023 où étaient présentes Mme Taillandier-Thomas, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Cassignard, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller faisant fonction de doyen, et Mme Catherine, greffier de chambre, la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. La caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault ayant refusé par décision du 23 janvier 2018 à Mme [H] (l'allocataire), titulaire d'une pension d'invalidité ayant un enfant à charge, le bénéfice de l'allocation supplémentaire d'invalidité, celle-ci a saisi d'un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale et présenté, par un écrit distinct et motivé, une question prioritaire de constitutionnalité. Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité 2. Par jugement du 15 décembre 2022, le tribunal judiciaire de Montpellier a transmis une question prioritaire de constitutionnalité, enregistrée au greffe de la Cour de cassation le 20 décembre 2022, ainsi rédigée : « Les articles L. 815-24 et L. 815-24-1 du code de la sécurité sociale portent-t-ils atteinte aux droits et libertés garantis par l'article 1 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, l'article 1 de la constitution du 4 octobre 1958 et surtout les alinéas 10 et 11 du préambule de la constitution du 27 octobre 1946 ? » Examen de la question prioritaire de constitutionnalité 3. Les dispositions contestées sont applicables au litige, qui concerne un refus de versement d'allocation supplémentaire d'invalidité, consécutif à une décision de refus de versement d'allocation supplémentaire d'invalidité au motif que les ressources de l'allocataire étaient supérieures au plafond fixé par l'article D. 815-19 du code de la sécurité sociale. 4. Elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel. 5. Cependant, d'une part, la question posée, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle. 6. D'autre part, la question posée ne présente pas un caractère sérieux. 7. Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec la loi qui l'établit. Les dispositions législatives critiquées ne prévoient certes pas une majoration de l'allocation supplémentaire d'invalidité par personne à charge, contrairement à d'autres prestations comme le revenu de solidarité active et la prime d'activité, mais ces dernières prestations visent à assurer aux personnes sans ressources un niveau minimum de revenu qui varie selon la composition du foyer, tandis que l'allocation supplémentaire d'invalidité concerne des personnes déjà bénéficiaires d'une pension d'invalidité ou de retraite. Il ne saurait être soutenu, dès lors qu'elles s'appliquent à des situations distinctes au regard de l'objectif qu'elles poursuivent, qu'elles méconnaissent le principe de l'égalité devant la loi énoncé aux articles 1er de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et 1er de la Constitution du 4 octobre 1958, ni les exigences qui découlent des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. 8. En conséquence, il n'y a pas lieu de renvoyer la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT N'Y AVOIR LIEU DE RENVOYER au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars deux mille vingt-trois.