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CONSTIT/CONSTEXT000029879710.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 1er octobre 2014 par le Conseil d’État (décision n° 382500 du 1er octobre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société de laboratoires de biologie médicale Bio Dômes Unilabs SELAS, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article L. 6211-21 du code de la santé publique. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de la santé publique ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu la loi n° 2013-442 du 30 mai 2013 portant réforme de la biologie médicale ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la requérante par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées le 24 octobre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 24 octobre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Frédéric Salat-Baroux, avocat au Barreau de Paris, pour la société requérante, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 25 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article L. 6211-21 du code de la santé publique dans sa rédaction résultant de la loi du 30 mai 2013 susvisée : « Sous réserve des coopérations dans le domaine de la biologie médicale menées entre des établissements de santé dans le cadre de conventions, de groupements de coopération sanitaire ou de communautés hospitalières de territoire et sous réserve des contrats de coopération mentionnés à l’article L. 6212-6, les examens de biologie médicale sont facturés au tarif des actes de biologie médicale fixé en application des articles L. 162-1-7 et L. 162-1-7-1 du code de la sécurité sociale » ; 2. Considérant que, selon la société requérante, en interdisant les remises sur le prix des examens réalisés par un laboratoire prestataire de service pour un autre laboratoire de biologie médicale ou pour un établissement de santé, ces dispositions apportent une restriction non justifiée à la liberté de fixation de leurs tarifs par les laboratoires de biologie médicale ; que l’augmentation du coût qui en résulte pour les établissements de santé porterait en outre atteinte à l’objectif de valeur constitutionnelle de bon emploi des deniers publics ; qu’enfin, en excluant du champ de cette interdiction les laboratoires intégrés à des établissements de santé et ceux ayant conclu avec d’autres laboratoires des contrats de coopération, ces dispositions porteraient atteinte au principe d’égalité devant la loi ; 3. Considérant que la liberté d’entreprendre découle de l’article 4 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; qu’il est loisible au législateur d’apporter à cette liberté des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; que le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ; 5. Considérant qu’en vertu des dispositions contestées, les examens de biologie médicale sont facturés au tarif de la nomenclature des actes de biologie médicale pris en application des articles L. 162-1-7 et L. 162-1-7-1 du code de la sécurité sociale ; que, toutefois, ce principe de tarification ne s’applique pas aux établissements de santé coopérant dans le cadre de conventions, aux établissements de santé coopérant dans le cadre de groupements de coopération sanitaire en vertu des articles L. 6133-1 à L. 6133-9 du code de la santé publique, aux établissements publics de santé coopérant dans le cadre de communautés hospitalières de territoire en vertu des articles L. 6132-1 à L. 6132-8 du même code et aux laboratoires privés ayant signé des contrats de coopération prévus par l’article L. 6212-6 du même code ; 6. Considérant qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu favoriser le développement des laboratoires de biologie médicale intégrés aux établissements de santé afin de maintenir des compétences en biologie médicale dans ces établissements et sur l’ensemble du territoire ; qu’il a également entendu encourager les contrats de coopération entre les laboratoires de biologie médicale pour que ceux-ci, lorsqu’ils sont situés dans un même territoire médical infrarégional, mutualisent certains de leurs moyens ; que la sécurité sociale prend en charge une large part des dépenses dans le secteur de la biologie médicale ; que ces dispositions poursuivent un but d’intérêt général ; qu’il n’appartient pas au Conseil constitutionnel, qui ne dispose pas d’un pouvoir d’appréciation de même nature que celui du Parlement, de substituer son appréciation à celle du législateur sur le choix de poursuivre de tels objectifs plutôt que de favoriser la concurrence par les prix dans ce secteur ; que, d’une part, les règles de tarification qui résultent de l’article L. 6211-21 du code de la santé publique n’entraînent pas une atteinte à la liberté d’entreprendre disproportionnée au regard des objectifs poursuivis ; que, d’autre part, les différences de traitement qui résultent des exceptions à la règle de facturation au tarif fixé sont en rapport direct avec l’objet de la loi ; qu’il suit de là que les griefs tirés de l’atteinte à la liberté d’entreprendre et de la violation du principe d’égalité doivent être écartés ; 7. Considérant que l’objectif à valeur constitutionnelle de bon usage des deniers publics ne peut, en lui-même, être invoqué à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution ; 8. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- L’article L. 6211-21 du code de la santé publique est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 4 décembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 5 décembre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029879711.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 2 octobre 2014 par le Conseil d’État (décision n° 382284 du 2 octobre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Jean-François V., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du paragraphe III de l’article 2 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code général des impôts ; Vu la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, notamment son article 2 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites par le requérant, enregistrées les 7 octobre et 8 novembre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 24 octobre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendu à l’audience publique du 25 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que le paragraphe I de l’article 2 de la loi du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 susvisée a ajouté au code général des impôts une section intitulée « Contribution exceptionnelle sur les hauts revenus » ; que l’unique article 223 sexies de cette section institue à la charge des contribuables passibles de l’impôt sur le revenu une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus ; qu’aux termes du paragraphe III de l’article 2 de la loi du 28 décembre 2011 : « A. - Le I est applicable à compter de l’imposition des revenus de l’année 2011 et jusqu’à l’imposition des revenus de l’année au titre de laquelle le déficit public des administrations publiques est nul. Ce déficit est constaté dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 3 du règlement (CE) n° 479/2009 du Conseil, du 25 mai 2009, relatif à l’application du protocole sur la procédure concernant les déficits excessifs annexé au traité instituant la Communauté européenne. » « B. - Le II s’applique aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues à compter du 1er janvier 2011 » ; 2. Considérant que, selon le requérant, en assujettissant à la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus des revenus qui ont supporté, antérieurement à la publication de la loi du 28 décembre 2011, un prélèvement libératoire au titre de l’imposition des revenus, les dispositions du paragraphe III de l’article 2 de cette loi méconnaissent la garantie des droits proclamée par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; qu’en outre, ces dispositions méconnaîtraient le principe d’égalité ; 3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots : « à compter de l’imposition des revenus de l’année 2011 et » figurant à la première phrase du A du paragraphe III de l’article 2 de la loi du 28 décembre 2011 ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; 5. Considérant qu’il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; qu’en particulier, il ne saurait, sans motif d’intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations ; 6. Considérant que le paragraphe I de l’article 2 de la loi du 28 décembre 2011 a pour objet d’instituer une contribution exceptionnelle sur les hauts revenus « à la charge des contribuables passibles de l’impôt sur le revenu » ; que cette contribution a pour assiette le montant des revenus et plus-values retenus pour l’établissement de l’impôt sur le revenu, sans qu’il soit fait application des règles de quotient définies à l’article 163-0 A du code général des impôts, majoré conformément au 1° du paragraphe IV de l’article 1417 du code général des impôts ; qu’elle est calculée en appliquant un taux de « 3 % à la fraction de revenu fiscal de référence supérieure à 250 000 € et inférieure ou égale à 500 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et à la fraction de revenu fiscal de référence supérieure à 500 000 € et inférieure ou égale à 1 000 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune » et un taux de « 4 % à la fraction de revenu fiscal de référence supérieure à 500 000 € pour les contribuables célibataires, veufs, séparés ou divorcés et à la fraction de revenu fiscal de référence supérieure à 1 000 000 € pour les contribuables soumis à imposition commune » ; que cette contribution est « déclarée, contrôlée et recouvrée selon les mêmes règles et sous les mêmes garanties et sanctions qu’en matière d’impôt sur le revenu » ; 7. Considérant qu’en prévoyant que le paragraphe I de l’article 2 de la loi du 28 décembre 2011 « est applicable à compter de l’imposition des revenus de l’année 2011 », le A du paragraphe III du même article a pour objet d’inclure dans l’assiette de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus tant les revenus entrant dans l’assiette de l’impôt sur le revenu que les autres revenus entrant dans la définition du revenu fiscal de référence, et notamment les revenus de capitaux mobiliers pour lesquels les prélèvements libératoires de l’impôt sur le revenu prévus au paragraphe I de l’article 117 quater et au paragraphe I de l’article 125 A du code général des impôts dans leur rédaction applicable en 2011 ont été opérés au cours de cette année 2011 ; 8. Considérant qu’en incluant dans l’assiette de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus les revenus perçus en 2011 et n’ayant pas fait l’objet d’un prélèvement libératoire de l’impôt sur le revenu, le législateur n’a pas méconnu la garantie des droits proclamée par l’article 16 de la Déclaration de 1789 ; 9. Considérant, toutefois, que la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus a également été rendue applicable par les dispositions contestées aux revenus perçus en 2011 soumis aux prélèvements libératoires prévus au paragraphe I de l’article 117 quater et au paragraphe I de l’article 125 A du code général des impôts ; que les contribuables ayant perçu en 2011 des revenus soumis à ces prélèvements libératoires pouvaient légitimement attendre de l’application de ce régime légal d’imposition d’être, sous réserve de l’acquittement des autres impôts alors existants, libérés de l’impôt au titre de ces revenus ; qu’en appliquant cette nouvelle contribution aux revenus ayant fait l’objet de ces prélèvements libératoires de l’impôt sur le revenu, le législateur a remis en cause les effets qui pouvaient légitimement être attendus par les contribuables de l’application du régime des prélèvements libératoires ; 10. Considérant que la volonté du législateur d’augmenter les recettes fiscales ne constitue pas un motif d’intérêt général suffisant pour mettre en cause les effets qui pouvaient légitimement être attendus d’une imposition à laquelle le législateur avait conféré un caractère libératoire pour l’année 2011 ; que, dès lors, les mots : « à compter de l’imposition des revenus de l’année 2011 et » figurant à la première phrase du A du paragraphe III de l’article 2 de la loi du 28 décembre 2011 ne sauraient, sans porter une atteinte injustifiée à la garantie des droits proclamée par l’article 16 de la Déclaration de 1789, être interprétés comme permettant d’inclure dans l’assiette de la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus due au titre des revenus de l’année 2011 les revenus de capitaux mobiliers soumis aux prélèvements libératoires de l’impôt sur le revenu prévus au paragraphe I de l’article 117 quater et au paragraphe I de l’article 125 A du code général des impôts ; que, sous cette réserve, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les exigences de l’article 16 de la Déclaration de 1789 ; 11. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires ni au principe d’égalité ni à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Sous la réserve énoncée au considérant 10, les mots : « à compter de l’imposition des revenus de l’année 2011 et » figurant à la première phrase du A du paragraphe III de l’article 2 de la loi 28 décembre 2011 de finances pour 2012 sont conformes à la Constitution. Article 2- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 4 décembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 5 décembre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029879705.xml
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son article 11 ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre VI bis de son titre II ; Vu la décision n° 2014-130 ORGA du 6 août 2014 ; Vu la lettre de démission de M. Olivier Dutheillet de Lamothe en date du 19 novembre 2014 ; Sur la proposition du Président du Conseil constitutionnel, D É C I D E : Article 1er.- Monsieur Jean Massot, président de section honoraire au Conseil d’État, est nommé président de la formation prévue au troisième alinéa de l’article 45-4 de l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, pour une durée de cinq ans à compter du 1er janvier 2015, en remplacement de M. Olivier Dutheillet de Lamothe. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 novembre 2014 ou siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 19 septembre 2014 par le Conseil d’État (décision n° 376800 du 19 septembre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par les sociétés ING Direct NV et ING Bank NV, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions du paragraphe II de l’article 209 du code général des impôts, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi n° 62-873 du 31 juillet 1962 de finances rectificative pour 1962 ; Vu la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 de finances pour 1987 ; Vu la loi n° 2001-1275 du 28 décembre 2001 de finances pour 2002 ; Vu le décret n° 63-1204 du 4 décembre 1963 portant incorporation dans le code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour les sociétés requérantes par Me Catherine Cassan et Me Philippe Durand, avocats au barreau des Hauts-de-Seine, enregistrées les 10 et 28 octobre et le 10 novembre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées les 14 octobre et 12 novembre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Vu la lettre du 23 octobre 2014 par laquelle le Conseil constitutionnel a soumis aux parties un grief susceptible d’être soulevé d’office ; Me Cassan, pour les sociétés requérantes, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 18 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes du paragraphe II de l’article 209 du code général des impôts dans sa rédaction postérieure à la loi du 30 décembre 1986 susvisée  : « Sous réserve d’un agrément préalable délivré par le ministre de l’économie et des finances et dans la mesure définie par cet agrément, les fusions de sociétés et opérations assimilées qui entrent dans les prévisions de l’article 210 A peuvent ouvrir droit, dans la limite édictée au I, troisième alinéa, au report des déficits antérieurs non encore déduits soit par les sociétés apporteuses, soit par les sociétés bénéficiaires des apports, sur les bénéfices ultérieurs de ces dernières » ; 2. Considérant que, selon les sociétés requérantes, en ne précisant pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de l’agrément prévu par les dispositions du paragraphe II de l’article 209 du code général des impôts, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions portant atteinte aux principes d’égalité devant la loi et les charges publiques ; - SUR LES DISPOSITIONS SOUMISES À L’EXAMEN DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL : 3. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; que le Conseil constitutionnel ne peut être saisi dans les conditions prévues par cet article que de dispositions de nature législative ; 4. Considérant que les dispositions contestées ont pour origine les premier et troisième alinéas de l’article 27 de la loi du 31 juillet 1962 susvisée ; qu’elles ont été réécrites et codifiées au premier alinéa du paragraphe II de l’article 209 du code général des impôts par le décret du 4 décembre 1963 susvisé ; 5. Considérant que les dispositions du second alinéa du paragraphe II de l’article 209 fixaient initialement une échéance à leur application ; que les dispositions du premier alinéa de ce paragraphe ont été reconduites par le législateur, d’abord à titre provisoire par les modifications successives de l’échéance fixée au second alinéa puis de manière pérenne, par l’effet de la suppression de cet alinéa par le paragraphe V de l’article 38 de la loi du 30 décembre 1986 susvisée ; qu’en reconduisant ainsi les dispositions contestées du paragraphe II de l’article 209 du code général des impôts, le législateur leur a implicitement, mais nécessairement, conféré un caractère législatif ; que, par suite, elles revêtent le caractère de dispositions législatives au sens de l’article 61-1 de la Constitution ; qu’il y a lieu pour le Conseil constitutionnel d’en connaître ; - SUR LA CONFORMITÉ DES DISPOSITIONS CONTESTÉES AUX DROITS ET LIBERTÉS QUE LA CONSTITUTION GARANTIT : 6. Considérant, d’une part, que la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit ; 7. Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant... l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures... » ; 8. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; qu’en particulier, pour assurer le respect du principe d’égalité, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu’il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ; 9. Considérant que le pouvoir donné par la loi à l’administration de fixer, contribuable par contribuable, les modalités de détermination de l’assiette d’une imposition méconnaît la compétence du législateur dans des conditions qui affectent, par elles-mêmes, le principe d’égalité devant les charges publiques ; 10. Considérant que les dispositions contestées sont relatives aux modalités de détermination de l’assiette de l’imposition des bénéfices des sociétés dans le cadre d’opérations de restructuration ; qu’elles permettent, sous réserve de l’obtention d’un agrément délivré par le ministre de l’économie et des finances, de reporter les déficits antérieurs non encore déduits soit par les sociétés apporteuses, soit par les sociétés bénéficiaires des apports sur les bénéfices ultérieurs de ces dernières ; 11. Considérant que les dispositions contestées ne sauraient, sans priver de garanties légales les exigences qui résultent de l’article 13 de la Déclaration de 1789, être interprétées comme permettant à l’administration de refuser cet agrément pour un autre motif que celui tiré de ce que l’opération de restructuration en cause ne satisfait pas aux conditions fixées par la loi ; que, sous cette réserve, le législateur n’a pas méconnu l’étendue de sa compétence en adoptant les dispositions contestées ; 12. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent, sous cette réserve, être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les dispositions du paragraphe II de l’article 209 du code général des impôts, dans leur rédaction postérieure à la loi n° 86-1317 du 30 décembre 1986 de finances pour 1987, sont conformes à la Constitution sous la réserve énoncée au considérant 11. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 28 novembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 27 octobre 2014, par le Premier ministre, dans les conditions prévues par le second alinéa de l’article 37 de la Constitution, d’une demande tendant à ce qu’il se prononce sur la nature juridique des dispositions suivantes du code de la sécurité sociale : - le premier alinéa ainsi que les mots « à compter de la date de l’arrivée au foyer » figurant au troisième alinéa de l’article L. 531-3 ; - le paragraphe II ainsi que le troisième alinéa du paragraphe VI de l’article L. 531-4 ; - l’article L. 531-7 ; - l’article L. 544-5 ; - le premier alinéa ainsi que les mots « mentionnés au premier alinéa » figurant au second alinéa de l’article L. 552-1. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 24, 25 et 26 ; Vu le code de la sécurité sociale ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution : « La loi détermine les principes fondamentaux… de la sécurité sociale » ; 2. Considérant que l’existence même des prestations familiales, la détermination des catégories de personnes appelées à en bénéficier ainsi que la nature des conditions exigées pour leur attribution sont au nombre des principes susmentionnés qui relèvent du domaine de la loi ; qu’il appartient, en revanche, au pouvoir réglementaire d’en préciser les éléments quantitatifs tels que les dates à compter desquelles les droits à prestations sont ouverts ou éteints ; 3. Considérant qu’il suit de là que les dispositions soumises à l’examen du Conseil constitutionnel, qui se bornent à fixer les dates d’ouverture et d’extinction des droits à prestations, ont le caractère réglementaire, D É C I D E : Article 1er.- Les dispositions soumises à l’examen du Conseil constitutionnel ont le caractère réglementaire. Article 2.- La présente décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 27 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 25 juin 2014, par le Premier ministre, dans les conditions prévues par le second alinéa de l'article 37 de la Constitution, d'une demande tendant à ce qu'il se prononce sur la nature juridique des mots : « Agence foncière et technique de la région parisienne » et « agence » figurant : - aux articles L. 321-29, L. 321-30, L. 321-31, L. 321-32 et L. 321-33 du code de l'urbanisme ; - à l'article L. 5219-1 du code général des collectivités territoriales ; - à l'article 7 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris ; - à l'annexe III de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public ; - ainsi qu'à l'intitulé de la section 3 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de l'urbanisme. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment ses articles 34 et 37 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 24, 25 et 26 ; Vu le code général des collectivités territoriales ; Vu le code de l'urbanisme ; Vu la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public ; Vu la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris ; Vu l'ordonnance n° 2011-1068 du 8 septembre 2011 relative aux établissements publics fonciers, aux établissements publics d'aménagement de l'État et à l'Agence foncière et technique de la région parisienne ; Vu la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, notamment le paragraphe I de son article 172 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que les dispositions de forme législative soumises à l'examen du Conseil constitutionnel se bornent à dénommer un établissement public de l'État ; qu'elles ne mettent en cause ni les règles concernant « la création de catégories d'établissements publics », qui relèvent de la loi en vertu de l'article 34 de la Constitution, ni aucun des autres principes ou règles placés par la Constitution dans le domaine de la loi ; que, dès lors, elles ont le caractère réglementaire, D É C I D E : Article 1er.- Les dispositions soumises à l'examen du Conseil constitutionnel ont le caractère réglementaire. Article 2.- La présente décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 8 juillet 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 9 juillet 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 7 mai 2014 par le président de la Polynésie française, dans les conditions prévues par l'article 12 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, d'une demande tendant à ce qu'il constate que « le paragraphe I de l'article L. 5843-2 du code général des collectivités territoriales en tant qu'il rend applicable en Polynésie française les articles L. 5721-3 et L. 5721-5 de ce code », le paragraphe III de l'article L. 5843-2 et l'article L. 5843-3 de ce code sont intervenus dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment ses articles 74 et 74-1 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ; Vu l'ordonnance n° 2007-1434 du 5 octobre 2007 portant extension des première, deuxième et cinquième parties du code général des collectivités territoriales aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics ; Vu la loi n° 2007-1720 du 7 décembre 2007 tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française, notamment son article 6 ; Vu la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer, notamment son article 66 ; Vu le code général des collectivités territoriales ; Vu les observations du président de l'assemblée de la Polynésie française, enregistrées le 20 mai 2014 ; Vu les observations du Premier ministre, enregistrées le 23 mai 2014 ; Vu les observations du président de la Polynésie française, enregistrées le 18 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004 susvisée, pris en application du neuvième alinéa de l'article 74 de la Constitution : « Lorsque le Conseil constitutionnel a constaté qu'une loi promulguée postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi organique est intervenue dans les matières ressortissant à la compétence de la Polynésie française, en tant qu'elle s'applique à cette dernière, cette loi peut être modifiée ou abrogée par l'Assemblée de la Polynésie française » ; que le président de la Polynésie française demande au Conseil constitutionnel de constater que « le paragraphe I de l'article L. 5843-2 du code général des collectivités territoriales en tant qu'il rend applicable en Polynésie française les articles L. 5721-3 et L. 5721-5 de ce code », le paragraphe III de l'article L. 5843-2 et l'article L. 5843-3 du même code sont intervenus dans une matière relevant de la compétence de cette collectivité d'outre-mer ; - SUR LES DISPOSITIONS DONT LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL EST SAISI : 2. Considérant que la demande du président de la Polynésie française porte sur les références « L. 5721-3 » et « L. 5721-5 » figurant au paragraphe I de l'article L. 5843-2, sur le paragraphe III de l'article L. 5843-2 et sur l'article L. 5843-3 du code général des collectivités territoriales ; 3. Considérant que l'article L. 5721-3 du code général des collectivités territoriales est relatif à la constitution, par voie de convention, des syndicats mixtes qui associent des collectivités territoriales, des groupements de collectivités territoriales et d'autres personnes morales de droit public et au contrôle des comptes et des budgets de ces syndicats par la chambre territoriale des comptes ; que l'article L. 5721-5 du même code est relatif à la réalisation de l'objet du syndicat mixte par voie d'exploitation directe ou par simple participation financière dans des sociétés ou organismes, ces modalités de participation étant fixées par la décision institutive ; qu'il ressort du paragraphe I de l'article L. 5843-2 du code général des collectivités territoriales que ces deux articles sont notamment applicables en Polynésie française, sous réserve des adaptations prévues au paragraphe III du même article ; 4. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 5843-3 du même code : « Les syndicats mixtes auxquels participent la Polynésie française sont soumis au contrôle de légalité, au contrôle budgétaire et au jugement des comptes dans les conditions fixées par la législation applicable aux communes de la Polynésie française » ; 5. Considérant qu'en vertu du second alinéa du même article, l'article L. 2573-43, relatif aux recettes de la section de fonctionnement des syndicats mixtes, est applicable aux syndicats mixtes auxquels participe la Polynésie française ; - SUR LA RECEVABILITÉ : 6. Considérant que les dispositions dont le Conseil constitutionnel est saisi ont pour origine l'ordonnance du 5 octobre 2007 susvisée, prise en application de l'article 74-1 de la Constitution ; que l'article 6 de la loi du 7 décembre 2007 susvisée, qui a modifié certaines des dispositions résultant de cette ordonnance, n'a pas procédé à sa ratification ; que, par suite, en l'absence de ratification de cette ordonnance par le Parlement dans le délai de dix-huit mois suivant sa publication, l'ordonnance du 5 octobre 2007 est devenue caduque ; que, toutefois, le paragraphe IV de l'article 66 de la loi du 27 mai 2009 susvisée, bien qu'intervenu après le 5 mars 2009, date à laquelle ladite ordonnance est devenue caduque, a donné force de loi à toutes les dispositions de l'ordonnance du 5 octobre 2007 à compter de sa publication ; qu'en conséquence, les articles L. 5843-2 et L. 5843-3 du code général des collectivités territoriales, qui fixent les règles applicables aux syndicats mixtes qui associent des collectivités territoriales, des groupements de collectivités territoriales et d'autres personnes morales de droit public en Polynésie française, sont des dispositions dont le Conseil constitutionnel peut être saisi en application de l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004 ; - SUR LE FOND : 7. Considérant que, lorsqu'il est saisi en application du neuvième alinéa de l'article 74 de la Constitution, dans les conditions prévues à l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004, il appartient seulement au Conseil constitutionnel d'apprécier si les dispositions qui lui sont soumises sont intervenues dans le domaine de compétence de la collectivité régie par l'article 74 ; qu'il ne lui appartient pas, au titre de cette procédure, de contrôler le respect, par le législateur, du domaine que la Constitution a réservé à la loi organique ; 8. Considérant qu'il ressort des deuxième et cinquième alinéas de l'article 74 de la Constitution que le législateur organique est compétent pour fixer « les règles d'organisation et de fonctionnement des institutions de la collectivité » régie par l'article 74 ; que le constituant n'a pas entendu permettre, en l'absence d'intervention du législateur organique, une délégation de compétence à la collectivité régie par l'article 74 pour fixer de telles règles ; qu'eu égard à la nature des personnes publiques que les syndicats mixtes en cause regroupent et aux missions qui sont confiées à ces établissements publics, les dispositions des articles L. 5843-2 et L. 5843-3 du code général des collectivités territoriales sont relatives à l'organisation et au fonctionnement des institutions de la Polynésie française ; que, par suite, elles relèvent, en application de l'article 74 de la Constitution, de la compétence du législateur organique ; qu'ainsi le législateur n'est pas intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française, D É C I D E : Article 1er .- Les références « L. 5721-3 » et « L. 5721-5 » figurant au paragraphe I de l'article L. 5843-2, les dispositions du paragraphe III de l'article L. 5843-2 et de l'article L. 5843-3 du code général des collectivités territoriales ne sont pas intervenues dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française. Article 2. - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 26 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 26 juin 2014, par le Premier ministre, dans les conditions prévues à l'article 39, quatrième alinéa, de la Constitution, de la présentation du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral pour laquelle la Conférence des présidents du Sénat a constaté, le 26 juin 2014, que les règles fixées par la loi organique prise en application du troisième alinéa de l'article 39 de la Constitution étaient méconnues. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ; Vu les observations présentées par M. Jean-Claude GAUDIN, sénateur, pour le groupe UMP du Sénat, enregistrées le 27 juin 2014 ; Vu les observations présentées par M. Jacques MÉZARD, sénateur, pour le groupe RDSE du Sénat, enregistrées le 27 juin 2014 ; Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 30 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral a été déposé sur le bureau du Sénat le 18 juin 2014 ; que la Conférence des présidents du Sénat, réunie le 26 juin 2014, a, en application du quatrième alinéa de l'article 39 de la Constitution, constaté la méconnaissance des règles fixées par la loi organique du 15 avril 2009 ; qu'en désaccord avec ce constat, le Premier ministre a saisi le Conseil constitutionnel afin qu'il se prononce sur le respect de ces règles ; 2. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 39 de la Constitution : « La présentation des projets de loi déposés devant l'Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions fixées par une loi organique » ; que son quatrième alinéa dispose : « Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l'ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l'assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours » ; 3. Considérant que, lorsqu'il est saisi, en application du quatrième alinéa de l'article 39 de la Constitution, d'un projet de loi pour lequel le respect des conditions de présentation fixées par la loi organique prise en application du troisième alinéa de l'article 39 fait l'objet d'un désaccord entre la Conférence des présidents de la première assemblée saisie et le Premier ministre, le Conseil constitutionnel ne peut statuer que sur la seule question de savoir si ladite présentation du projet de loi a respecté les conditions fixées par la loi organique du 15 avril 2009 ; qu'il ne saurait donc se prononcer sur la conformité des dispositions contenues dans ce projet à d'autres règles constitutionnelles, conformité qui ne pourrait faire l'objet de son appréciation que s'il en était saisi dans les conditions prévues aux articles 61 et 61-1 de la Constitution ; 4. Considérant que le projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral, déposé le 18 juin 2014 sur le bureau du Sénat, comprend quatre chapitres qui comportent des dispositions relatives à la délimitation des régions, aux modalités d'organisation des élections régionales, aux règles relatives au remplacement des conseillers départementaux ainsi qu'à la durée du mandat en cours des conseillers généraux et des conseillers régionaux ; 5. Considérant, en premier lieu, que, conformément à ce que prévoit l'article 7 de la loi organique du 15 avril 2009, ce projet de loi est précédé d'un exposé des motifs destiné à en présenter les principales caractéristiques et à mettre en valeur l'intérêt qui s'attache à son adoption ; 6. Considérant, en second lieu, que ce projet de loi est accompagné d'une étude d'impact qui a été mise à la disposition du Sénat dès la date de son dépôt ; que, d'une part, cette étude comprend, conformément au deuxième alinéa de l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009, des développements relatifs à différentes options possibles sur les délimitations des régions, les élections régionales et départementales et la durée des mandats des membres des conseils régionaux et des conseils départementaux ; qu'elle expose les raisons des choix opérés par le Gouvernement et en présente les conséquences prévisibles ; que, d'autre part, le contenu de cette étude d'impact répond à celles des autres prescriptions de l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 qui trouvent effectivement à s'appliquer compte tenu de l'objet des dispositions du projet de loi en cause ; qu'il ne saurait en particulier être fait grief à cette étude d'impact de ne pas comporter de développements sur l'évolution du nombre des emplois publics dès lors que le Gouvernement ne mentionne pas la modification de ce nombre dans les objectifs poursuivis par ce projet de loi ; qu'il n'est en outre pas établi qu'il a été soumis à des consultations dans des conditions qui auraient dû être exposées dans l'étude d'impact ; 7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les règles fixées par la loi organique du 15 avril 2009 pour la présentation des projets de loi en application du troisième alinéa de l'article 39 de la Constitution n'ont pas été méconnues, D É C I D E : Article 1er.- La présentation du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral est conforme aux conditions fixées par la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution. Article 2.- La présente décision sera notifiée aux présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat et au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er juillet 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d'ESTAING, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié, le 6 mai 2014, par MM. Jean-Claude GAUDIN, Gérard BAILLY, Philippe BAS, René BEAUMONT, Michel BÉCOT, Joël BILLARD, Jean BIZET, Mme Françoise BOOG, MM. Pierre BORDIER, Joël BOURDIN, Mme Marie-Thérèse BRUGUIÈRE, MM. François-Noël BUFFET, François CALVET, Christian CAMBON, Jean-Pierre CANTEGRIT, Jean-Noël CARDOUX, Jean-Claude CARLE, Mme Caroline CAYEUX, MM. Gérard CÉSAR, Pierre CHARON, Alain CHATILLON, Jean-Pierre CHAUVEAU, Gérard CORNU, Raymond COUDERC, Jean-Patrick COURTOIS, Mme Isabelle DEBRÉ, MM. Francis DELATTRE, Robert DEL PICCHIA, Gérard DÉRIOT, Philippe DOMINATI, Mme Marie-Annick DUCHÊNE, MM. Alain DUFAUT, André DULAIT, Hubert FALCO, André FERRAND, Alain FOUCHÉ, Jean-Paul FOURNIER, Yann GAILLARD, René GARREC, Mme Colette GIUDICELLI, MM. Alain GOURNAC, Francis GRIGNON, Charles GUENÉ, Pierre HÉRISSON, Michel HOUEL, Alain HOUPERT, Benoît HURÉ, Jean-François HUSSON, Jean-Jacques HYEST, Mme Sophie JOISSAINS, M. Roger KAROUTCHI, Mme Elisabeth LAMURE, MM. Gérard LARCHER, Robert LAUFOAULU, Daniel LAURENT, Antoine LEFÈVRE, Dominique de LEGGE, Philippe LEROY, Michel MAGRAS, Mme Hélène MASSON-MARET, M. Jean-François MAYET, Mme Colette MÉLOT, MM. Albéric de MONTGOLFIER, Philippe NACHBAR, Louis NÈGRE, Philippe PAUL, Jackie PIERRE, Rémy POINTEREAU, Ladislas PONIATOWSKI, Mme Catherine PROCACCIA, MM. Jean-Pierre RAFFARIN, Henri de RAINCOURT, Bruno RETAILLEAU, Charles REVET, Bernard SAUGEY, René-Paul SAVARY, Michel SAVIN, Bruno SIDO, Mmes Esther SITTLER, Catherine TROENDLÉ et M. Jean-Pierre VIAL, sénateurs ; Et, le 12 mai 2014, par MM. Christian JACOB, Élie ABOUD, Bernard ACCOYER, Yves ALBARELLO, Julien AUBERT, Sylvain BERRIOS, Etienne BLANC, Mme Valérie BOYER, MM. Dominique BUSSEREAU, Guillaume CHEVROLLIER, Philippe COCHET, François CORNUT-GENTILLE, Mme Marie-Christine DALLOZ, MM. Gérald DARMANIN, Bernard DEBRÉ, Bernard DEFLESSELLES, Mme Sophie DION, M. Daniel FASQUELLE, Mme Marie-Louise FORT, MM. Yves FOULON, Marc FRANCINA, Laurent FURST, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Mme Annie GENEVARD, MM. Guy GEOFFROY, Franck GILARD, Claude GOASGUEN, Jean-Pierre GORGES, Philippe GOSSELIN, Mme Arlette GROSSKOST, MM. Christophe GUILLOTEAU, Michel HEINRICH, Michel HERBILLON, Antoine HERTH, Patrick HETZEL, Guénhaël HUET, Mme Valérie LACROUTE, MM. Marc LAFFINEUR, Jacques LAMBLIN, Jean-François LAMOUR, Alain LEBOEUF, Philippe LE RAY, Mme Geneviève LEVY, MM. Jean-François MANCEL, Thierry MARIANI, Hervé MARITON, Alain MARLEIX, Olivier MARLEIX, Philippe MARTIN, Jean-Claude MATHIS, Pierre MOREL-A-L'HUISSIER, Jacques MYARD, Jean-Frédéric POISSON, Axel PONIATOWSKI, Mme Josette PONS, MM. Frédéric REISS, Franck RIESTER, Paul SALEN, François SCELLIER, Thierry SOLÈRE, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Michel TERROT, Jean-Marie TETART, Dominique TIAN, Jean-Pierre VIGIER et Philippe VITEL, députés. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement et abrogeant la directive 90/220/CEE du Conseil ; Vu le règlement (CE) n° 178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l'Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires ; Vu le règlement (CE) n° 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2003 concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés ; Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 19 mai 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que les sénateurs et les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié ; qu'ils soutiennent que cette interdiction est contraire au principe de primauté du droit européen, aux articles 55 et 88-1 de la Constitution et aux dispositions de plusieurs directives et règlements de l'Union européenne, en particulier l'article 23 de la directive du 12 mars 2001 susvisée et l'article 34 du règlement du 22 septembre 2003 susvisé ; que les sénateurs requérants font en outre valoir que l'interdiction définitive et générale imposée par ces dispositions méconnaît le principe de précaution ; que, selon eux, les dispositions de cette loi, notamment en ce qu'elles ne définissent pas les termes « génétiquement modifié » méconnaissent les exigences d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ; 2. Considérant, en premier lieu, d'une part, qu'aux termes de l'article 55 de la Constitution : « Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie » ; que, si ces dispositions confèrent aux traités, dans les conditions qu'elles définissent, une autorité supérieure à celle des lois, elles ne prescrivent ni n'impliquent que le respect de ce principe doive être assuré dans le cadre du contrôle de la conformité des lois à la Constitution ; que le moyen tiré du défaut de compatibilité d'une disposition législative aux engagements internationaux et européens de la France ne saurait être regardé comme un grief d'inconstitutionnalité ; que l'examen d'un tel grief fondé sur les traités ou le droit de l'Union européenne relève de la compétence des juridictions administratives et judiciaires ; 3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 88-1 de la Constitution : « La République participe à l'Union européenne constituée d'États qui ont choisi librement d'exercer en commun certaines de leurs compétences en vertu du traité sur l'Union européenne et du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, tels qu'ils résultent du traité signé à Lisbonne le 13 décembre 2007 » ; qu'ainsi, la transposition en droit interne d'une directive de l'Union européenne résulte d'une exigence constitutionnelle ; 4. Considérant qu'il appartient au Conseil constitutionnel, saisi dans les conditions prévues par l'article 61 de la Constitution d'une loi ayant pour objet de transposer en droit interne une directive de l'Union européenne, de veiller au respect de cette exigence ; que, toutefois, le contrôle qu'il exerce à cet effet est soumis à une double limite ; qu'en premier lieu, la transposition d'une directive ne saurait aller à l'encontre d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France, sauf à ce que le constituant y ait consenti ; qu'en second lieu, devant statuer avant la promulgation de la loi dans le délai prévu par l'article 61 de la Constitution, le Conseil constitutionnel ne peut saisir la Cour de justice de l'Union européenne sur le fondement de l'article 267 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ; qu'en conséquence, il ne saurait déclarer non conforme à l'article 88-1 de la Constitution qu'une disposition législative manifestement incompatible avec la directive qu'elle a pour objet de transposer ; qu'en tout état de cause, il appartient aux juridictions administratives et judiciaires d'exercer le contrôle de compatibilité de la loi au regard des engagements européens de la France et, le cas échéant, de saisir la Cour de justice de l'Union européenne à titre préjudiciel ; 5. Considérant qu'en l'espèce la loi déférée n'a pas pour objet de transposer une directive de l'Union européenne ; que, dès lors, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 88-1 de la Constitution doit être écarté ; 6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 5 de la Charte de l'environnement : « Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage » ; que les dispositions du paragraphe I de l'article unique de la loi déférée ont pour objet d'interdire, sans limitation de durée, la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié ; qu'est, dès lors, inopérant le grief tiré de ce que l'interdiction pérenne de la mise en culture de ces variétés de maïs méconnaîtrait le principe de précaution ; 7. Considérant, en troisième lieu, que l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, impose au législateur d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques ; qu'il doit en effet prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d'arbitraire, sans reporter sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n'a été confiée par la Constitution qu'à la loi ; que, contrairement à ce que soutiennent les sénateurs requérants, les dispositions du paragraphe I de l'article unique de la loi déférée qui prévoit que « la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié est interdite » ne sont entachées d'aucune inintelligibilité ; que, par suite, le grief doit être écarté ; 8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les dispositions de l'article unique de la loi déférée, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- La loi relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 28 mai 2014, où siégeaient: M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d'ESTAING, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Le Conseil constitutionnel a été saisi par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs de recours dirigés contre la loi relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifiés. Ces recours appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes. I/ Sur les griefs tirés de la violation des articles 55 et 88-1 de la Constitution A/ Les députés et les sénateurs auteurs des recours considèrent que la loi déférée serait incompatible avec les dispositions du droit communautaire et méconnaîtrait ainsi les articles 55 et 88-1 de la Constitution. B/ Ces griefs ne pourront qu'être écartés. 1/ On sait que le Conseil constitutionnel juge qu'il ne lui appartient pas, saisi en application de l'article 61 ou de l'article 61-1 de la Constitution, d'examiner la compatibilité d'une loi avec les engagements européens de la France. Ce n'est que lorsqu'il est saisi, dans les conditions prévues par l'article 61 de la Constitution d'une loi ayant pour objet de transposer en droit interne une directive communautaire, qu'il appartient au Conseil constitutionnel de veiller au respect de l'exigence constitutionnelle qui s'attache à la transposition en droit interne d'une directive communautaire (décision n° 2010-605 DC, cons. 16 et 18). La loi déférée n'a pas pour objet de transposer en droit interne une directive communautaire. Elle interdit la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié MON 810, seul maïs génétiquement modifié autorisé (parmi les 4950 variétés de maïs inscrites au catalogue européen, 229 portent l'évènement de transformation MON 810). Elle fait ainsi application des dispositions combinées de l'article 34 du règlement (CE) n°1829/2003 du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2003 et de l'article 54 du règlement (CE) n°178/2002 du Parlement européen et du Conseil du 28 janvier 2002 (cf CJUE C658/10 à C-68/10 du 8 septembre 2011 points 63 et 74). Ces dispositions permettent à un Etat membre de prendre des mesures conservatoires contre un organisme génétiquement modifié autorisé par la Commission européenne lorsque celui-ci est, de toute évidence, susceptible de présenter un risque grave pour la santé humaine, la santé animale ou l'environnement. Contrairement à ce que soutiennent les députés et les sénateurs requérants, elle n'a donc ni pour objet, ni pour effet, de modifier les règles relatives à la dissémination des organismes génétiquement modifiés dans l'environnement issues de la directive 2001/18/CE du Parlement européen et du Conseil du 12 mars 2001 relative à la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement dont la transposition a été achevée, comme la Commission européenne l'a constaté à l'occasion de l'affaire C-121/07 devant la Cour de justice de l'Union européenne, par la loi n° 2008-595 du 25 juin 2008 relative aux organismes génétiquement modifiés. La loi déférée ne modifie aucune des dispositions applicables aux organismes génétiquement modifiés prévues au code de l'environnement. Elle ne concerne pas l'ensemble des organismes génétiquement modifiés, ni même l'ensemble des plantes génétiquement modifiés. Elle n'interdit ni la commercialisation du maïs génétiquement modifié, ni la recherche ou les expérimentations sur ces maïs mais seulement la mise en production de cultures commerciales du maïs MON 810. Si les députés et les sénateurs auteurs des recours soutiennent que le législateur ne pouvait prendre une telle mesure à l'encontre du maïs MON 810, une telle demande vise à faire contrôler par le Conseil constitutionnel la compatibilité d'une loi avec les règlements communautaires précités. Elle ne peut qu'être écartée. Un tel contrôle incombe en effet aux juridictions administratives et judiciaires qui, saisies d'un litige dans lequel est invoquée l'incompatibilité d'une loi avec le droit de l'Union européenne, peuvent écarter si nécessaire l'application de dispositions législatives qui feraient obstacle à la pleine efficacité des normes de l'Union. 2/ Au demeurant, contrairement à ce que soutiennent les députés et les sénateurs requérants, l'interdiction de la mise en culture du maïs MON 810 ne méconnaît pas le droit communautaire. L'Autorité européenne de sécurité des aliments a mis en évidence, dans un avis publié le 8 décembre 2011, les risques environnementaux liés à la culture maïs MON 810. Ce maïs entraîne l'apparition de résistances dans les populations d'insectes qu'il vise et il augmente la mortalité des populations d'autres insectes sensibles. Des publications récentes ont apporté des éléments scientifiques nouveaux mettant en évidence des risques liés au maïs MON 810 tels que le développement rapide de résistance chez certains insectes ravageurs (Campagne et al., 2 juillet 2013), l'effet toxique sur les cellules d'organismes non cibles (Mezzomo et al., 16 mars 2013), la transmission de toxines à des prédateurs auxiliaires tels que les araignées (Zhou et al., 13 janvier 2014) ou l'impact du pollen du maïs MON 810 sur la mortalité accrue des larves de papillon (Holst et al., 10 février 2013). Un rapport publié en 2014 par le Département américain de l'agriculture (USDA) sur les cultures génétiquement modifiées résistantes à des insectes ou tolérantes à des herbicides, comme le maïs MON 810 et, d'ailleurs, tous les maïs génétiquement modifiés présents sur le marché mondial, fait état du développement de résistances chez 14 espèces de mauvaises herbes ainsi que chez certains insectes. Le développement de telles résistances conduit à la perte de moyens de lutte contre les ravageurs ou les adventices, et à terme à une utilisation accrue de pesticides nocifs pour l'environnement par les agriculteurs. Ces éléments scientifiques montrent que la mise en culture du maïs MON 810 est susceptible de présenter un risque important mettant en péril de façon manifeste l'environnement, ainsi qu'un danger de propagation d'organismes nuisibles devenus résistants. L'ensemble de ces éléments ont été communiqués à la Commission européenne en même temps que la notification de l'arrêté du 14 mars 2014 interdisant la commercialisation, l'utilisation et la culture du maïs MON 810, interdiction reprise par la loi déférée. Ils ont conduit la Commission à saisir l'Autorité européenne de sécurité des aliments. Ces griefs ne pourront donc qu'être écartés. II/ Sur la méconnaissance de l'article 5 de la Charte de l'environnement. A/ Les sénateurs auteurs du recours estiment que la loi déférée méconnaît le principe de précaution consacré par l'article 5 de la charte de l'environnement en prévoyant une interdiction du maïs MON 810 sans mettre en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et sans respecter le caractère provisoire et la règle de proportionnalité induits par le principe de précaution. B/ Le Gouvernement n'est pas de cet avis. 1/ Il estime, en premier lieu, que le grief est inopérant. Le Conseil a jugé qu'est inopérant le grief tiré de ce que l'interdiction pérenne du recours à un procédé dangereux méconnaîtrait le principe de précaution (décision n°2013-346 QPC du 11 octobre 2013, interdiction de la fracturation hydraulique, cons. 20). Le Gouvernement estime que le Conseil constitutionnel ne pourra qu'écarter comme inopérant le même grief dirigé contre la mesure d'interdiction prévue par la loi déférée. 2/ En tout état de cause, comme il a déjà été indiqué, la mesure d'interdiction ne peut être regardée comme étant disproportionnée compte tenu des enjeux de protection de l'environnement, de la nécessité de préserver les intérêts de l'ensemble des filières agricoles et de l'importance des surfaces potentiellement concernées en France. La loi déférée vise à préserver l'environnement eu égard aux risques et compte-tenu de l'importance des surfaces potentiellement concernées en France. Il convient, à cet égard, de rappeler que le maïs est cultivé sur l'ensemble du territoire national et représente près de 10% de la surface agricole utile (SAU) avec un peu plus de 3 millions d'ha, dont 1,7 millions d'ha en maïs grain. Il s'agit de la 2ème culture en termes de surface derrière le blé. L'interdiction de mise en culture du maïs MON 810 apparaît comme la seule mesure possible permettant d'assurer efficacement la protection de l'environnement. Certaines mesures de gestion ont certes pu être recommandées par l'Autorité européenne de sécurité des aliments en prévoyant notamment une distance d'isolement entre les cultures du maïs MON 810 et les habitats des insectes potentiellement menacés par la toxine contenue dans ce maïs et la mise en place de zones refuges équivalentes à 20% de la surface en maïs pour retarder l'apparition de résistances dans les populations cibles. Toutefois, des études scientifiques récentes (publication Campagne et al., 2013) remettent en cause l'efficacité des mesures de gestion recommandées par l'AESA pour retarder le développement d'insectes ravageurs résistants au maïs MON 810. Par ailleurs, la liste des espèces devant bénéficier d'une distance d'isolement suffisante avec les cultures de maïs MON 810 n'est pas déterminée. Eu égard aux risques graves soulevés tant par l'AESA que par des publications scientifiques récentes et fiables, l'interdiction de mise en culture du maïs MON810 apparaît donc comme la seule mesure possible permettant d'assurer efficacement la protection de l'environnement. Elle est également la seule mesure possible pour éviter que la mise en culture de maïs génétiquement modifié sur le territoire national ait des impacts économiques sur les autres filières en raison de la dissémination non contrôlable de pollen pouvant être à l'origine de présence fortuite d'OGM indésirable dans d'autres produits. La coexistence des OGM avec les filières de production de maïs conventionnel, biologique ou « sans OGM » est complexe à mettre en oeuvre. D'une part, il paraît difficile de fixer des distances d'isolement entre parcelles qui soient à la fois techniquement faisables et efficaces pour garantir une protection suffisante de l'ensemble des productions, notamment biologique et « sans OGM ». D'autre part, le problème de la coexistence ne peut être résolu uniquement par des mesures d'isolement sur le terrain. En effet, la mise en culture d'OGM aurait également des conséquences sur les entreprises de matériel agricole, les organismes de collecte, de transport, de stockage et de séchage des récoltes du maïs qui devraient mettre en place des systèmes de traçabilité et de ségrégation, voire du matériel dédié, pour assurer la séparation des filières. Enfin, le cas de l'apiculture est particulièrement préoccupant, dans la mesure où, du fait de leur biologie, la distance de butinage des abeilles varie constamment en fonction des sources de nourriture présentes et peut atteindre 13 km et qu'aucune solution technique satisfaisante n'existe actuellement pour éviter la présence de pollen génétiquement modifié dans les produits de la ruche. La mise en culture d'OGM obligerait les apiculteurs à éloigner leurs ruches de ces parcelles OGM entraînant ainsi des conséquences néfastes pour la production apicole. En effet, les apiculteurs doivent placer leurs ruches librement afin de bénéficier de plantes avoisinantes riche en nectar et en pollen. La mise en culture du maïs MON810 viendrait donc en contradiction avec les mesures prises ailleurs pour soutenir cette filière affectée, depuis une vingtaine d'années, par de graves problèmes de santé des abeilles ainsi qu'une baisse constante de la production de miel. Il convient au surplus de souligner que la mise en culture du maïs MON 810 est en contradiction avec la promotion des pratiques agricoles respectueuses de l'environnement. L'utilisation de maïs résistants aux insectes ou tolérants aux herbicides, outre les risques énoncés ci-dessus, conduit à une simplification et à une uniformisation des pratiques agricoles qui présentent de nombreux inconvénients, notamment un appauvrissement de la diversité des espèces et des variétés cultivées, ce qui a des conséquences négatives sur la biodiversité. Dans ces conditions, eu égard aux objectifs poursuivis, la mesure d'interdiction édictée par la loi déférée ne peut être regardée comme disproportionnée. Ce grief devra donc être écarté. III/ Sur la méconnaissance de l'article 34 de la Constitution A/ Les sénateurs auteurs du recours estiment que la loi déférée méconnaîtrait l'article 34 de la Constitution en étant insuffisamment claire et précise. B/ Un tel grief ne peut qu'être écarté. La loi déférée ne souffre d'aucune ambiguïté. Elle prévoit que la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié est interdite. La notion d'organisme génétiquement modifié est parfaitement précise puisqu'elle est définie à l'article L. 531-1 du code de l'environnement. De même, la mise en culture est une notion claire qui vise le semis des maïs OGM à des fins commerciales sans s'opposer ni à leur commercialisation, ni à ce que ces maïs puissent être cultivés à des fins de recherche ou d'expérimentation. Elle ne méconnaît donc pas l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi. Pour l'ensemble de ces raisons, le Gouvernement est d'avis que les griefs articulés dans les saisines ne sont pas de nature à conduire à la censure de la loi déférée. Aussi estime-t-il que le Conseil constitutionnel devra rejeter les recours dont il est saisi. Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les Conseillers, Les Sénateurs soussignés (1) ont l'honneur de soumettre à votre examen, conformément au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, la loi relative à l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié aux fins de déclarer contraire à la Constitution son unique article. Selon les Sénateurs requérants, l'article unique de cette loi, qui vise à interdire la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié, contrevient tant à la Constitution (notamment les articles 34, 55 et 88-1) qu'à plusieurs textes européens et à leur loi de transposition. 1- En ce qui concerne le manquement aux articles 55 et 88-1 de la Constitution En application du principe de primauté du droit communautaire (tant du droit européen primaire, tels les traités et principes généraux du droit européen) que dérivé (règlements, directives, décisions), le droit européen l'emporte sur toute disposition contraire de droit national. La déclaration 17 relative à la primauté, annexée à l'Acte final du traité de Lisbonne, précise que « les traités et le droit européen adopté par l'Union sur la base des traités priment le droit des Etats membres ». Cette situation est la conséquence de la supériorité du droit international sur le droit national, telle que prévue aux articles 55 et 88-1de la Constitution de 1946 et réaffirmée par une jurisprudence constante de votre Conseil. En effet, l'usage contentieux de l'article 88-1 confirme que la Constitution nationale contribue désormais à imposer la primauté du droit européen sur la Loi française. Sur le fondement de cet article, votre Conseil est compétent pour contrôler la compatibilité d'une loi de transposition avec une directive communautaire (Cons. Const., 10 juin 2004, N° 2004-496 DC). Tel est manifestement le cas de la loi soumise à votre contrôle, ladite loi pouvant être considérée comme abrogeant implicitement la loi du 25 juin 2008 transposant la directive 2001/18/CE. En effet, la présente loi ne respecte pas le droit européen en ce sens que celui-ci ne permet pas aux Etats membres de l'Union européenne de prendre une mesure d'interdiction générale de la mise en culture de variétés de plantes transgéniques sur un territoire national2, une fois cette mise en culture dûment autorisée - le régime général étant un régime d'autorisation communautaire au cas par cas qui vise à vérifier que cet OGM ne peut être autorisé que lorsqu'est prouvée son innocuité sur la santé et pour l'environnement. Ce régime, issu de la directive 2001/18, a été transposé en droit français (3) et explicité par la jurisprudence de la Cour de Justice de l'Union Européenne (4). En substance, le système d'autorisation de dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés dans l'environnement relève d'une procédure communautaire et les Etats membres ne peuvent s'opposer à la décision favorable de la Commission. Néanmoins, l'article 23 de la directive 2001/18/CE met en place une clause de sauvegarde provisoire (5) et précise ses modalités de mise en oeuvre. Cette clause de sauvegarde permet aux Etats membres de limiter ou d'interdire à titre provisoire l'utilisation d'OGM dès lors qu'en raison d'informations nouvelles, ils auraient des raisons précises de considérer que l'un de ces organismes présenterait un risque pour la santé humaine ou l'environnement. En sus de la directive 2001/18/CE, le règlement (CE) n° 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil du 22 septembre 2003 concerne spécifiquement les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés. Le maïs génétiquement modifié MON 810 est autorisé sur le fondement de ce règlement communautaire. A l'instar de l'interdiction provisoire prévue par la directive 2001/18/CE, l'article 34 du règlement 1829/2003 (6)prévoit les modalités de suspension de l'autorisation dans l'hypothèse de l'apparition d'un risque grave pour la santé humaine, la santé animale ou l'environnement. Dans ce cas, l'État membre ne peut adopter des mesures d'urgence que dans les conditions de procédure énoncées à l'article 54 du règlement n°178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002 (7), établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire et fixant notamment des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires. Il ressort de l'articulation de ces textes que, pour prendre des mesures de suspension ou d'interdiction de l'utilisation ou de la mise sur le marché d'un OGM, l'Etat membre doit informer la Commission des mesures envisagées et établir, outre l'urgence, l'existence d'une situation susceptible de présenter un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l'environnement. Informée de cette situation, l'autorité européenne évaluera la pertinence du risque dénoncé et, au vu de cette évaluation, aura, elle seule, la compétence de décider in fine le maintien ou le retrait de l'autorisation. Or, la présente loi ne respecte ni sur la forme ni sur le cadre juridique communautaire de suspension ou d'interdiction de la mise en culture d'une semence OGM précédemment autorisée. Elle est donc manifestement contraire à la directive 2001/18/CE et à sa loi de transposition du 25 juin 2008, qu'elle abrogerait implicitement, ainsi qu'au règlement (CE) n° 1829/2003. Elle procède par interdiction générale, sans apporter de justification (ni de l'urgence à agir ni de l'apparition d'un risque important mettant en péril de façon manifeste la santé humaine, la santé animale ou l'environnement) et sans respecter la procédure d'information de la Commission européenne. Le texte de l'exposé des motifs de la proposition de loi (8) mentionne, certes, des risques environnementaux et cite les avis de l'Autorité Européenne de Sécurité des Aliments (AESA) sur le maïs Mon 810. Pour autant, le Conseil d'État s'est référé, pour retenir l'absence de caractérisation d'un tel risque, au moins pour le MON 810, à ces mêmes avis, en estimant qu'il n'y avait pas d'éléments scientifiques nouveaux suffisamment probants pour décider d'une suspension ; et ceci en août 20139. Mais surtout, si ces risques étaient avérés, ils justifieraient la mise en oeuvre de la clause de sauvegarde telle que prévue par le droit communautaire et non l'adoption de la présente loi d'interdiction générale. En outre, la présente loi procède par généralisation en prévoyant, pour le présent et l'avenir, l'interdiction de la mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié, préemptant ainsi toute évolution du droit européen en la matière et mettant en cause toute autorisation actuelle ou nouvelle qui serait donnée dans le cadre des textes en vigueur. 2- En ce qui concerne le respect de la Charte de l'environnement Par ailleurs, il ne peut être allégué que la présente loi respecte le principe de précaution, tel qu'établi aux articles 1er et 5 de la Charte de l'environnement. En effet, ce principe n'est pas d'application immédiate et suppose de la part des autorités publiques la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. Parallèlement, en vertu d'une jurisprudence constante de la CJCE10, le principe de précaution doit s'appréhender comme la possibilité de prendre des mesures de protection d'urgence avec l'identification des conséquences potentiellement négatives. Or, la présente loi ne prévoit aucune nouvelle évaluation et, parce qu'elle procède par interdiction générale et immédiate de tous les maïs génétiquement modifiés, ne respecte ni le caractère provisoire ni la règle de proportionnalité induits par le principe de précaution. L'effectivité de la prise en compte du principe de précaution par le droit communautaire applicable aux OGM a été reconnu par la CJUE et par le Conseil d'Etat : « la politique de l'Union dans le domaine de l'environnement est fondée sur les principes de précaution et d'action préventive ; qu'il résulte de ce qui a été dit [précédemment] qu'eu égard à sa nature et sa portée, ce principe, tel qu'interprété par la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne, garantit l'effectivité du respect du principe de précaution énoncé à l'article 5 de la Charte de l'environnement » (11). 3- En ce qui concerne le manquement à l'article 34 de la Constitution Il découle de cet article 34 que si le législateur a été pendant longtemps totalement libre dans l'émission des règles, les lois édictées par lui doivent désormais répondre à certaines exigences de qualité. L'article 34 de la Constitution impose au législateur une exigence de clarté (Cons. Const., 29 déc. 1983 : n° 83-164 DC paragraphe 30) et de précision (Cons. Const. 20 juin 1998 : n° 98- 401 DC paragraphe 16) de la législation. Cette exigence, combinée avec l'objectif d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi (qui trouve son fondement dans les articles 4, 5, 6 et 16 DDH), qui englobe désormais le principe de clarté (Cons. Const. 27 juillet 2006 : n° 2006- 540 DC paragraphes 9 et 10), permet à votre Conseil de censurer des dispositions législatives peu claires ou trop imprécises (Cons. Const. 7 août 2008, n° 2008-568 DC paragraphe 15). Plus spécifiquement, les dispositions législatives doivent être particulièrement précises lorsqu'elles limitent l'exercice d'une liberté ou d'un droit, ce qui est le cas en l'espèce (Cons. Const. 18 sept. 1986, n° 86-217 DC paragraphe 35). Tel est manifestement le cas en l'espèce, la loi soumise à votre examen manquant manifestement aux principes de clarté et de précision. Il est significatif de constater que l'article unique de la loi est particulièrement peu clair. L'article dispose ainsi que « La mise en culture des variétés de maïs génétiquement modifié est interdite », sans même définir « génétiquement modifié ». Or, le titre troisième du Code de l'environnement est consacré à des organismes génétiquement modifiés tels qu'ils sont définis par l'article L.531-1 du Code de l'environnement c'est à dire comme "1° Organisme : toute entité biologique non cellulaire, cellulaire ou multicellulaire, capable de se reproduire ou de transférer du matériel génétique ; cette définition englobe les micro-organismes, y compris les virus, les viroïdes et les cultures de cellules végétales et animales ; 2° Organisme génétiquement modifié : organisme dont le matériel génétique a été modifié autrement que par multiplication ou recombinaison naturelles ". L'imprécision de la loi du 15 avril 2014 est donc particulièrement préjudiciable au citoyen qui, faute de définition, n'est pas en mesure de déterminer le champ de l'interdiction édictée, c'est à dire si ce dernier couvre les organismes dont le matériel génétique a été modifié par multiplication ou recombinaison naturelle ou, par exemple, s'il exclut les organismes génétiquement modifiés autorisés au titre des articles L 533-3 et suivants du Code de l'environnement. Indépendamment de la question de l'absence de définition de la notion d'organisme génétiquement modifié, l'article unique de la loi du 15 avril 2014 est imprécis en ce qu'il ne donne aucun élément relatif à son articulation avec la loi du 25 juin 2008 qui, elle, autorise la mise en culture de variétés de maïs et autres plantes génétiquement modifiés, consacrant « la liberté de consommer et de produire avec ou sans organismes génétiquement modifiés ». L'article L. 533-6 du Code de l'environnement dispose ainsi que "Les autorisations de mise sur le marché délivrées par les autres États membres de l'Union européenne ou l'autorité communautaire compétente en application de la réglementation communautaire valent autorisation au titre du présent chapitre". Or, votre Conseil veille à ce que la loi nouvelle ne crée pas de confusion dans l'esprit des citoyens (Cons. Const. 6 juillet 1994 : n° 94-341 DC paragraphe 6). En l'espèce, la contradiction entre la loi nouvelle et la loi du 25 juin 2008 place les sujets de droits dans une situation de confusion et de risque d'arbitraire, ce que sanctionne votre Conseil (Cons. Const. 12 janvier 2002, n° 2001-455 DC paragraphe 9). Ce manquement aux principes de clarté et de précision, contraire à l'objectif de valeur constitutionnelle d'intelligibilité et d'accessibilité de la loi, traduit un manquement du législateur à son obligation d'exercer pleinement sa compétence. Pour l'ensemble de ces motifs, il appartient à votre Conseil de censurer cette loi. Les Sénateurs soussignés complèteront, le cas échéant, cette demande dans des délais raisonnables. **************************** (1) Cf. Liste jointe (2) Cf. Considérant (56) de la directive 2001/18/CE (3) D'abord par des textes réglementaires (Décret n° 2007-358 du 19 mars 2007 relatif à la dissémination volontaire ou à toute autre fin que la mise sur le marché de produits composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés et décret n° 2007-359 du 19 mars 2007 relatif à la procédure d'autorisation de mise sur le marché de produits non destinés à l'alimentation composés en tout ou partie d'organismes génétiquement modifiés, parus au Journal officiel n° 67 du 20 mars 2007), puis par la loi 2008-595 du 25.06.2008 (4) CJUE, 8 sept. 2011, aff. Jtes C-58/10 à C-68/10, Monsanto et a. (5) « 1. Lorsqu'un État membre, en raison d'informations nouvelles ou complémentaires, devenues disponibles après que l'autorisation a été donnée et qui affectent l'évaluation des risques pour l'environnement ou en raison de la réévaluation des informations existantes sur la base de connaissances scientifiques nouvelles ou complémentaires, a des raisons précises de considérer qu'un OGM en tant que produit ou élément de produit ayant fait l'objet d'une notification en bonne et due forme et d'une autorisation écrite conformément à la présente directive présente un risque pour la santé humaine ou l'environnement, il peut limiter ou interdire, à titre provisoire, l'utilisation et/ou la vente de cet OGM en tant que produit ou élément de produit sur son territoire. L'État membre veille à ce qu'en cas de risque grave, des mesures d'urgence consistant, par exemple, à suspendre la mise sur le marché ou à y mettre fin, soient prises, y compris en ce qui concerne l'information du public. L'État membre informe immédiatement la Commission et les autres États membres des actions entreprises au titre du présent article et indique les motifs de sa décision, en fournissant sa réévaluation des risques pour l'environnement et en indiquant si les conditions de l'autorisation doivent être modifiées et comment ou s'il convient de mettre fin à l'autorisation et, le cas échéant, les informations nouvelles ou complémentaires sur lesquelles il fonde sa décision. 2. Dans un délai de soixante jours, une décision est prise en la matière selon la procédure prévue à l'article 30, paragraphe 2. Pour calculer ce délai de soixante jours, on ne tient pas compte des périodes durant lesquelles la Commission attend les informations complémentaires qu'elle a éventuellement demandées au notifiant ou demande l'avis d'un ou de plusieurs comités scientifiques qui ont été consultés. Le délai durant lequel la Commission attend l'avis du ou des comités scientifiques consultés ne peut dépasser soixante jours. De même, on ne tient pas compte du temps mis par le Conseil pour statuer conformément à la procédure prévue à l'article 30, paragraphe 2. » (6) « Lorsqu'un produit autorisé par le présent règlement ou conformément à celui-ci est, de toute évidence, susceptible de présenter un risque grave pour la santé humaine, la santé animale ou l'environnement ou si, au regard d'un avis de l'Autorité délivré conformément aux articles 10 et 22, il apparaît nécessaire de suspendre ou de modifier d'urgence une autorisation, des mesures sont arrêtées conformément aux procédures visées aux articles 53 et 54 du règlement (CE) n° 178/2002. » (7) 1. Lorsqu'un État membre informe officiellement la Commission de la nécessité de prendre des mesures d'urgence et que la Commission n'a pris aucune mesure conformément à l'article 53, cet État membre peut prendre des mesures conservatoires. Dans ce cas, il en informe immédiatement les autres États membres et la Commission. 2. Dans un délai de dix jours ouvrables, la Commission saisit le comité institué à l'article 58, paragraphe 1, conformément à la procédure prévue à l'article 58, paragraphe 2, en vue de la prorogation, de la modification ou de l'abrogation des mesures conservatoires nationales. 3. L'État membre peut maintenir les mesures conservatoires qu'il a prises au niveau national jusqu'à l'adoption des mesures communautaires. ». (8) Assemblée nationale, N°1797, quatorzième législature (9) Conseil d'Etat N°358103 du 1er août 2013 (10) Notamment arrêts national Farmer'Union et autres du 5 mai 1998, c-157/96, Royaume-Uni c. Commission du 5 mai 1998, C-180/96 et Commission c. France du 28 janvier 2010, C-333/08 (11) Conseil d'Etat N°358103 du 1er août 2013
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Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l’article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, le 3 décembre 2014, par MM. Bruno RETAILLEAU, Pascal ALLIZARD, Gérard BAILLY, François BAROIN, Philippe BAS, Christophe BÉCHU, Jérôme BIGNON, Jean BIZET, François BONHOMME, Gilbert BOUCHET, Michel BOUVARD, François-Noël BUFFET, François CALVET, Mme Agnès CANAYER, MM. Jean-Pierre CANTEGRIT, Jean-Noël CARDOUX, Jean-Claude CARLE, Mme Caroline CAYEUX, MM. Gérard CÉSAR, Patrick CHAIZE, Pierre CHARON, Daniel CHASSEING, Alain CHATILLON, François COMMEINHES, Gérard CORNU, Jean-Patrick COURTOIS, Philippe DALLIER, René DANESI, Mathieu DARNAUD, Serge DASSAULT, Mme Isabelle DEBRÉ, MM. Francis DELATTRE, Robert del PICCHIA, Gérard DÉRIOT, Mmes Catherine DEROCHE, Jacky DEROMEDI, Marie-Hélène DES ESGAULX, Chantal DESEYNE, Catherine DI FOLCO, MM. Eric DOLIGÉ, Philippe DOMINATI, Mmes Marie-Annick DUCHÊNE, Nicole DURANTON, MM. Jean-Yves DUSSERRE, Louis DUVERNOIS, Jean-Paul EMORINE, Mme Dominique ESTROSI SASSONE, MM. Hubert FALCO, Michel FONTAINE, Michel FORISSIER, Bernard FOURNIER, Jean-Paul FOURNIER, Christophe-André FRASSA, Pierre FROGIER, Mme Joëlle GARRIAUD-MAYLAM, MM. Jean-Claude GAUDIN, Jacques GAUTIER, Jacques GENEST, Bruno GILLES, Mme Colette GIUDICELLI, MM. Alain GOURNAC, Jean-Pierre GRAND, Daniel GREMILLET, François GROSDIDIER, Jacques GROSPERRIN, Mme Pascale GRUNY, MM. Charles GUENÉ, Michel HOUEL, Alain HOUPERT, Mme Christiane HUMMEL, MM. Benoît HURÉ, Jean-François HUSSON, Jean-Jacques HYEST, Mme Corinne IMBERT, M. Alain JOYANDET, Mme Christiane KAMMERMANN, M. Roger KAROUTCHI, Mme Fabienne KELLER, MM. Guy-Dominique KENNEL, Marc LAMÉNIE, Mme Elisabeth LAMURE, MM. Robert LAUFOAULU, Daniel LAURENT, Jean-René LECERF, Antoine LEFÈVRE, Jacques LEGENDRE, Dominique de LEGGE, Jean-Pierre LELEUX, Jean-Baptiste LEMOYNE, Jean-Claude LENOIR, Mme Vivette LOPEZ, MM. Michel MAGRAS, Claude MALHURET, Didier MANDELLI, Philippe MARINI, Mmes Colette MÉLOT, Brigitte MICOULEAU, MM. Alain MILON, Albéric de MONTGOLFIER, Jean-Marie MORISSET, Philippe MOUILLER, Philippe NACHBAR, Louis-Jean de NICOLAY, Philippe PAUL, Cédric PERRIN, Jackie PIERRE, François PILLET, Xavier PINTAT, Louis PINTON, Ladislas PONIATOWSKI, Hugues PORTELLI, Mmes Sophie PRIMAS, Catherine PROCACCIA, MM. Jean-Pierre RAFFARIN, Henri de RAINCOURT, Michel RAISON, André REICHARDT, Charles REVET, Didier ROBERT, Bernard SAUGEY, René-Paul SAVARY, Michel SAVIN, Bruno SIDO, André TRILLARD, Mme Catherine TROENDLÉ, MM. Michel VASPART, Jean-Pierre VIAL et Jean-Pierre VOGEL, sénateurs ; Et, le 5 décembre 2014, par MM. Christian JACOB, Élie ABOUD, Bernard ACCOYER, Yves ALBARELLO, Benoist APPARU, Mme Laurence ARRIBAGÉ, MM. Olivier AUDIBERT-TROIN, Jean-Pierre BARBIER, Sylvain BERRIOS, Etienne BLANC, Mme Valérie BOYER, MM. Xavier BRETON, Dominique BUSSEREAU, Olivier CARRÉ, Gilles CARREZ, Luc CHATEL, Gérard CHERPION, Guillaume CHEVROLLIER, Dino CINIERI, Eric CIOTTI, Philippe COCHET, François CORNUT-GENTILLE, Jean-Louis COSTES, Jean-Michel COUVE, Mme Marie-Christine DALLOZ, MM. Bernard DEFLESSELLES, Patrick DEVEDJIAN, Jean-Pierre DOOR, Dominique DORD, Mme Virginie DUBY-MULLER, M. François FILLON, Mme Marie-Louise FORT, MM. Marc FRANCINA, Claude de GANAY, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Guy GEOFFROY, Bernard GÉRARD, Alain GEST, Daniel GIBBES, Franck GILARD, Claude GOASGUEN, Philippe GOSSELIN, Mmes Claude GREFF, Anne GROMMERCH, M. Serge GROUARD, Mme Françoise GUÉGOT, MM. Jean-Claude GUIBAL, Christophe GUILLOTEAU, Patrick HETZEL, Guénhaël HUET, Denis JACQUAT, Christian KERT, Jacques KOSSOWSKI, Mme Valérie LACROUTE, MM. Marc LAFFINEUR, Jean-François LAMOUR, Mme Laure de LA RAUDIÈRE, M. Guillaume LARRIVÉ, Mme Isabelle LE CALLENNEC, MM. Marc LE FUR, Pierre LELLOUCHE, Dominique LE MÈNER, Pierre LEQUILLER, Philippe LE RAY, Céleste LETT, Mmes Geneviève LEVY, Véronique LOUWAGIE, MM. Gilles LURTON, Thierry MARIANI, Hervé MARITON, Alain MARLEIX, Jean-Claude MATHIS, François de MAZIÈRES, Damien MESLOT, Philippe MEUNIER, Yannick MOREAU, Pierre MOREL-A-L’HUISSIER, Alain MOYNE-BRESSAND, Patrick OLLIER, Bernard PERRUT, Jean-Frédéric POISSON, Mmes Bérengère POLETTI, Josette PONS, MM. Didier QUENTIN, Franck RIESTER, Arnaud ROBINET, Paul SALEN, François SCELLIER, Mme Claudine SCHMID, MM. Thierry SOLÈRE, Claude STURNI, Dominique TIAN, Philippe VITEL, Michel VOISIN, Eric WOERTH, Mme Marie-Jo ZIMMERMANN, MM. Thierry BENOIT, Charles de COURSON, Laurent DEGALLAIX, Stéphane DEMILLY, Yannick FAVENNEC, Jean-Christophe FROMANTIN, Meyer HABIB, Francis HILLMEYER, Jean-Christophe LAGARDE, Bertrand PANCHER, Michel PIRON, Franck REYNIER, Arnaud RICHARD, François ROCHEBLOINE, Rudy SALLES, François SAUVADET, Francis VERCAMER, Philippe VIGIER et Michel ZUMKELLER, députés. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de l’action sociale et des familles ; Vu le code de la construction et de l’habitation ; Vu le code de la santé publique ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le code du travail ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 ; Vu la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 ; Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 11 décembre 2014 ; Vu les observations en réplique présentées par les députés requérants, enregistrées le 12 décembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que les sénateurs et les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 ; qu’ils contestent la conformité à la Constitution de son article 85 ; que les députés mettent aussi en cause la conformité à la Constitution de ses articles 23, 61 et 63 ; - SUR L’ARTICLE 23 : 2. Considérant que l’article 23 prévoit le versement anticipé, aux organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale, de certaines cotisations sociales et autres contributions correspondant aux indemnités de congés payés dues aux salariés dont les employeurs sont affiliés à une caisse de congés payés ; que le législateur a ainsi entendu que le montant de ces cotisations sociales et autres contributions, antérieurement versées par ces employeurs à des caisses de congés payés, soient retenues à la source au bénéfice de la sécurité sociale ; 3. Considérant que le paragraphe I de l’article 23 modifie le code de la sécurité sociale ; que le 1° de ce paragraphe I supprime la disposition de l’article L. 136-5 du code de la sécurité sociale qui prévoit que la contribution sociale généralisée due sur les indemnités de congés payés est précomptée par les caisses de congés payés ; que le 2° de ce paragraphe I donne une nouvelle rédaction de l’article L. 243-1-3 du même code ; que le premier alinéa de cet article L. 243-1-3 prévoit que les employeurs affiliés à une caisse de congés payés s’acquittent, auprès des unions pour le recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales ou, le cas échéant, des caisses générales de sécurité sociale, des cotisations sociales et autres contributions correspondant aux indemnités de congés payés servies à leurs salariés par une caisse de congés payés ; que, pour les contributions versées au fonds national d’aide au logement et au titre du « versement transport », le 1° de l’article L. 243-1-3 dispose que les employeurs s’en acquittent par le versement libératoire de majorations proportionnelles aux cotisations et contributions correspondantes dont ils sont redevables au titre des rémunérations versées à leurs salariés ; que le 2° de l’article L. 243-1-3 prévoit, pour les cotisations de sécurité sociale, la contribution sociale généralisée, la contribution pour le remboursement de la dette sociale et la contribution de solidarité pour l’autonomie, que les employeurs s’acquittent d’un versement correspondant aux montants d’indemnités de congés payés dus aux caisses de congés payés ; que ce 2° prévoit un mécanisme d’ajustement, le cas échéant, pour la part salariale des cotisations sociales et autres contributions ; 4. Considérant que le paragraphe II de l’article 23 est relatif aux modalités d’entrée en vigueur de l’article L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale dans sa nouvelle rédaction ; que le A de ce paragraphe II prévoit que l’article L. 243-1-3 s’applique, s’agissant des cotisations sociales et autres contributions visées au 2° de cet article, aux périodes d’acquisition des droits à congés postérieures au 1er avril 2015 ; que le B de ce paragraphe II prévoit une période transitoire, fixée par décret et qui s’achèvera au plus tard le 1er avril 2018, pendant laquelle le versement anticipé des cotisations sociales et autres contributions visées au 2° de l’article L. 243-1-3 auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale est effectué non par les employeurs mais par les caisses de congés payés ; que le B du paragraphe II prévoit un ajustement, le cas échéant, sur la base des indemnités de congés payés effectivement versées aux salariés ; que le C de ce paragraphe II prévoit que les employeurs pourront, sans attendre l’échéance de la période transitoire, s’acquitter des cotisations sociales et autres contributions visées au 2° de l’article L. 243-1-3 auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale ; 5. Considérant que, selon les députés requérants, en modifiant les conditions dans lesquelles les caisses de congés payés participent au recouvrement des cotisations sociales et des autres contributions correspondant aux indemnités de congés payés servies aux salariés intéressés et en privant ainsi ces caisses d’une ressource de trésorerie, les dispositions de l’article 23 portent atteinte à la garantie des droits protégée par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; que les règles posées par l’article 23 seraient d’une telle complexité qu’elles méconnaîtraient l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ; qu’enfin, ces dispositions engendreraient des différences de traitement injustifiées entre les employeurs et salariés des secteurs d’activité relevant de caisses de congés payés et les autres, ainsi qu’entre les salariés des secteurs d’activité relevant d’une caisse de congés payés selon qu’ils prennent ou non l’intégralité de leurs congés, en violation du principe d’égalité devant la loi ; 6. Considérant, en premier lieu, que l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, impose au législateur d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques ; 7. Considérant, toutefois, que les dispositions du paragraphe I de l’article 23 de la loi déférée disposent que les employeurs affiliés à une caisse de congés payés devront, en vertu de l’article L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale, verser de manière anticipée aux organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale les cotisations sociales et autres contributions correspondant aux indemnités de congés payés servies à leurs salariés par les caisses de congés payés et prévoient un ajustement pour la part salariale des cotisations et autres contributions visées au 2° de l’article L. 243-1-3 du code de la sécurité sociale ; que les dispositions du paragraphe II de cet article 23, premièrement, prévoient des dates d’entrée en vigueur des nouvelles règles distinctes pour les contributions visées au 1° de l’article L. 243-1-3 et pour les cotisations sociales et autres contributions visées à son 2°, deuxièmement prévoient une période transitoire durant laquelle les caisses de congés payés seront chargées de reverser par anticipation ces cotisations sociales et contributions aux organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale et, troisièmement, prévoient que les employeurs pourront se charger de ces versements sans attendre l’échéance de la période transitoire ; que les dispositions de l’article 23 ne sont pas d’une complexité telle qu’elles porteraient atteinte à l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ; 8. Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; 9. Considérant qu’il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; qu’en particulier, il ne saurait, sans motif d’intérêt général suffisant, ni porter atteinte aux situations légalement acquises ni remettre en cause les effets qui peuvent légitimement être attendus de telles situations ; 10. Considérant que les caisses de congés payés prévues par les dispositions de l’article L. 3141-30 du code du travail sont chargées du service des indemnités de congés payés aux salariés des employeurs des secteurs d’activité relevant d’une telle caisse ; qu’elles ne tiennent de la loi aucun droit à bénéficier de l’avantage de trésorerie résultant du décalage entre la perception des cotisations sociales et autres contributions correspondant à ces indemnités auprès des employeurs et leur reversement ultérieur aux organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale ; que, par suite, en prévoyant que les cotisations sociales et autres contributions seront recouvrées par ces organismes lors de la perception par les caisses de congés payés des sommes dues par les employeurs au titre des indemnités de congés payés dues à leurs salariés, l’article 23 n’a ni porté atteinte à une situation légalement acquise ni remis en cause les effets qui pouvaient légitimement être attendus d’une telle situation ; 11. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration de 1789 : « La loi… doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; que le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l’objet de la loi qui l’établit ; 12. Considérant, d’une part, que les employeurs affiliés à une caisse de congés payés ne se trouvent pas, au regard des règles relatives au recouvrement des cotisations sociales et autres contributions correspondant aux indemnités de congés payés servies à leurs salariés, dans la même situation que les autres employeurs ; que la différence de traitement résultant de ce que les premiers seront à terme tenus, en vertu des dispositions contestées, de s’acquitter, auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale et par anticipation, des cotisations sociales et autres contributions correspondant aux indemnités de congés payés dues à leurs salariés est fondée sur une différence de situation en rapport direct avec l’objectif poursuivi par le législateur ; 13. Considérant, d’autre part, que dans l’hypothèse où le montant de la part salariale des cotisations sociales et autres contributions visées au 2° de l’article L. 243-1-3 acquitté par anticipation serait différent du montant dû compte tenu du nombre de jours de congés effectivement pris par un salarié dont l’employeur est affilié à une caisse de congés payés, la dernière phrase du 2° de l’article L. 243-1-3 prévoit un mécanisme d’ajustement ; que, par suite, les dispositions contestées n’instituent aucune différence de traitement entre les salariés dont l’employeur est affilié à une caisse de congés payés, selon que ces salariés prennent ou non l’intégralité de leurs congés ; 14. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le principe d’égalité devant la loi n’est pas méconnu ; 15. Considérant que l’article 23, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, doit être déclaré conforme à la Constitution ; - SUR L’ARTICLE 61 : 16. Considérant que l’article 61 remplace le second alinéa du b) du 5° de l’article L. 5121-1 du code de la santé publique par quatre alinéas ; que ces dispositions ont pour objet de modifier les critères en fonction desquels peuvent être inscrits au répertoire des spécialités génériques des médicaments à base de plantes soumis à l’autorisation de mise sur le marché ainsi que les spécialités dont la ou les substances actives sont exclusivement une ou plusieurs substances minérales ; que, pour apprécier si le médicament ou la substance active a une composition qualitative identique aux substances du même groupe générique, ces dispositions fixent notamment un critère selon lequel leur substance « n’est pas susceptible d’entraîner des différences significatives en termes d’efficacité thérapeutique ou d’effets indésirables » ; 17. Considérant que, selon les députés requérants, en ne précisant pas que l’inscription au répertoire des spécialités génériques des médicaments à base de plantes ou d’origine minérale est conditionnée par des études cliniques d’efficacité thérapeutique et en définissant de façon imprécise les conditions d’inscription à ce répertoire, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence et l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ; 18. Considérant qu’en prévoyant, parmi les critères permettant l’inscription au répertoire des génériques, que la substance active d’origine végétale ou la substance active minérale n’est susceptible d’entraîner des différences significatives ni en termes d’efficacité ni en termes d’effets thérapeutiques, le législateur a adopté des dispositions qui ne sont pas équivoques ou imprécises ; que, par suite, les griefs doivent être écartés ; que l’article 61, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, doit être déclaré conforme à la Constitution ; - SUR L’ARTICLE 63 : 19. Considérant que le paragraphe I de l’article 63 rétablit dans le code de la sécurité sociale un article L. 162-22-7-2, prévoyant une minoration forfaitaire des tarifs nationaux des prestations d’hospitalisation mentionnées au 1° de l’article L. 162-22-6, lorsqu’au moins une spécialité pharmaceutique mentionnée à l’article L. 162-22-7 est facturée en sus de cette prestation ; que sont fixées les conditions d’application de cette minoration forfaitaire selon la fréquence de prescription des spécialités pharmaceutiques précitées et leur part dans les dépenses totales afférentes à ces spécialités ; que le montant forfaitaire de la minoration et la liste des prestations d’hospitalisation pouvant en faire l’objet sont fixés par arrêté ; que « le montant de la minoration ne peut en aucun cas être facturé aux patients » ; que le paragraphe II de l’article 63 prévoit une application du paragraphe I à compter du 1er mars 2015 ; 20. Considérant que, selon les députés requérants, ces dispositions, qui n’auraient pas pris en compte les conséquences résultant de la possibilité que les tarifs nationaux des prestations d’hospitalisation soient majorés, porteraient atteinte au principe de sincérité des lois de financement de la sécurité sociale ; qu’en définissant de manière imprécise les critères d’application de la minoration forfaitaire, elles porteraient atteinte à l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ; qu’en conduisant à traiter de manière différente les établissements de santé et les assurés sociaux, elles seraient également contraires au principe d’égalité devant la loi ; qu’en dissuadant la prescription de certaines spécialités pharmaceutiques, elles méconnaîtraient la liberté de prescription des praticiens des établissements de santé, laquelle découlerait de l’objectif constitutionnel de protection de la santé ; 21. Considérant, en premier lieu, que les conséquences des dispositions de l’article 63 ont été évaluées et prises en compte dans la détermination des conditions générales de l’équilibre financier de la sécurité sociale ; que ces dispositions ne portent aucune atteinte à la sincérité de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 ; 22. Considérant, en deuxième lieu, d’une part, que la minoration forfaitaire des tarifs nationaux des prestations d’hospitalisation est rendue possible pour celles des prestations d’hospitalisation qui figureront sur une liste établie par arrêté ministériel ; que ne seront inscrites sur cette liste, arrêtée à l’échelle de l’ensemble du territoire, que les prestations d’hospitalisation pour lesquelles sont remplis les deux critères énoncés au deuxième alinéa de l’article L. 162-22-7-2 : une fréquence de prescription de spécialités pharmaceutiques de la liste mentionnée au premier alinéa du paragraphe I de l’article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale « au moins égale à 25 % de l’activité afférente à ces prestations » d’hospitalisation et le fait que ces spécialités « représentent au moins 15 % des dépenses totales afférentes aux spécialités inscrites sur cette même liste » ; 23. Considérant, d’autre part, que la minoration forfaitaire sera appliquée de façon unitaire à chacune des prestations d’hospitalisation figurant sur la liste établie par arrêté ministériel et pour laquelle une spécialité pharmaceutique de la liste mentionnée au premier alinéa du paragraphe I de l’article L. 162-22-7 du code de la sécurité sociale aura été facturée ; que les dispositions de l’article 63, qui ont pour seul objet de fixer les conditions de mise en œuvre du dispositif de minoration forfaitaire, ne sont pas entachées d’inintelligibilité ; 24. Considérant, en troisième lieu, d’une part, qu’en fixant des critères de fréquence de prescription et de part des dépenses en fonction desquels les tarifs nationaux applicables aux prestations d’hospitalisation pourront faire l’objet d’une minoration forfaitaire, le législateur a entendu limiter le recours à certaines des spécialités pharmaceutiques mentionnées à l’article L. 162-22-7 pour certaines prestations d’hospitalisation ; que la différence de traitement entre établissements de santé est en rapport direct avec les différences entre les pratiques de prescription de spécialités pharmaceutiques des établissements de santé ; que, d’autre part, le dernier alinéa de l’article L. 162-22-7-2 interdit de facturer aux patients la minoration forfaitaire instituée par cet article ; que, par suite, il n’en résulte aucune différence de traitement entre les assurés sociaux ; qu’il résulte de ce qui précède que le principe d’égalité devant la loi n’est pas méconnu ; 25. Considérant, en quatrième lieu, que le dispositif de minoration forfaitaire institué par l’article L. 162-22-7-2 est relatif à la détermination des tarifs nationaux des prestations d’hospitalisation appliqués aux établissements de santé visés à l’article L. 162-22-6 ; que ces dispositions, qui ne sont relatives ni aux conditions de la recherche pharmaceutique ni aux règles de prescription de spécialités pharmaceutiques par des professionnels de santé, ne portent pas atteinte aux exigences du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 relatives à la protection de la santé ; qu’elles ne portent, en tout état de cause, aucune atteinte au libre exercice de la profession médicale ; 26. Considérant que l’article 63, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, doit être déclaré conforme à la Constitution ; - SUR L’ARTICLE 85 : 27. Considérant que l’article L. 521-1 du code de la sécurité sociale définit les conditions de l’ouverture du droit au versement des allocations familiales ; que son article L. 521-3 fixe les conditions de la majoration des allocations familiales ; que le paragraphe I de l’article 85 de la loi complète l’article L. 521-1 par quatre alinéas aux termes desquels : « Le montant des allocations mentionnées aux deux premiers alinéas du présent article, ainsi que celui des majorations mentionnées à l’article L. 521-3 varient en fonction des ressources du ménage ou de la personne qui a la charge des enfants, selon un barème défini par décret. « Le montant des allocations familiales varie en fonction du nombre d’enfants à charge. « Les niveaux des plafonds de ressources, qui varient en fonction du nombre d’enfants à charge, sont révisés conformément à l’évolution annuelle de l’indice des prix à la consommation, hors tabac. « Un complément dégressif est versé lorsque les ressources du bénéficiaire dépassent l’un des plafonds, dans la limite de montants définis par décret. Les modalités de calcul de ces montants et celles du complément dégressif sont définies par décret » ; 28. Considérant que les requérants soutiennent que le cumul de la modulation des allocations familiales en fonction des ressources du foyer avec d’autres mesures qui ont limité les aides en faveur des familles, notamment l’abaissement du plafond du quotient familial, font supporter à une catégorie de familles une charge disproportionnée qui porte une atteinte inconstitutionnelle au principe d’égalité et à l’exigence de mise en œuvre d’une politique de solidarité nationale en faveur de la famille ; que les sénateurs requérants font, en outre, valoir qu’en ne prévoyant pas la modulation du montant des allocations familiales selon qu’un seul ou les deux membres du couple exercent une activité professionnelle, ces dispositions portent atteinte au principe d’égalité ; que les députés requérants soutiennent qu’en renvoyant au décret la fixation du barème de variation des allocations familiales en fonction des ressources du ménage le législateur a, compte tenu de la restriction apportée aux exigences qui résultent du dixième alinéa du Préambule de 1946, méconnu l’étendue de sa compétence ; 29. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution : « La loi détermine les principes fondamentaux… de la sécurité sociale » ; que son article 37 dispose : « Les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire » ; que, si, notamment, l’existence même des prestations familiales, la détermination des catégories de personnes appelées à en bénéficier ainsi que la nature des conditions que doivent remplir les bénéficiaires sont au nombre des principes susmentionnés qui relèvent du domaine de la loi, la fixation des montants et du barème de ces prestations en fonction des ressources des bénéficiaires relève du pouvoir réglementaire ; 30. Considérant, en second lieu, qu’aux termes du dixième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 : « La Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement » ; que selon son onzième alinéa : « Elle garantit à tous, notamment à l’enfant, à la mère et aux vieux travailleurs, la protection de la santé, la sécurité matérielle, le repos et les loisirs... » ; 31. Considérant qu’il incombe au législateur, comme à l’autorité réglementaire, conformément à leurs compétences respectives, de déterminer, dans le respect des principes posés par ces dispositions, les modalités concrètes de leur mise en œuvre ; 32. Considérant, en particulier, qu’il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine qui lui est réservé par l’article 34 de la Constitution, de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions ; qu’il ne lui est pas moins loisible d’adopter, pour la réalisation ou la conciliation d’objectifs de nature constitutionnelle, des modalités nouvelles dont il lui appartient d’apprécier l’opportunité et qui peuvent comporter la modification ou la suppression de dispositions qu’il estime excessives ou inutiles ; que, cependant, l’exercice de ce pouvoir ne saurait aboutir à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel ; 33. Considérant que l’exigence constitutionnelle résultant des dispositions précitées des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 implique la mise en œuvre d’une politique de solidarité nationale en faveur de la famille ; qu’il est cependant loisible au législateur, pour satisfaire à cette exigence, de choisir les modalités d’aide aux familles qui lui paraissent appropriées ; qu’outre les prestations familiales directement servies par les organismes de sécurité sociale, ces aides sont susceptibles de revêtir la forme de prestations, générales ou spécifiques, directes ou indirectes, apportées aux familles tant par les organismes de sécurité sociale que par les collectivités publiques ; que ces aides comprennent notamment le mécanisme fiscal du quotient familial ; 34. Considérant, en premier lieu que, d’une part, le régime des allocations familiales a pour objet la mise en œuvre de l’exigence constitutionnelle de solidarité nationale en faveur de la famille ; qu’en prévoyant que le montant des allocations familiales varie en fonction du nombre des enfants à charge et des ressources du ménage ou de la personne qui a la charge des enfants, les dispositions contestées instituent des différences de traitement en lien direct avec l’objet de ces allocations ; que, d’autre part, le principe d’égalité n’oblige pas à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes ; que par suite, doit être écarté le grief tiré de ce que les dispositions contestées ne prévoient pas que le montant des allocations familiales varie selon le nombre des membres du foyer qui exercent une activité professionnelle ; 35. Considérant, en second lieu, que les dispositions précitées des dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 ne font pas, par elles-mêmes, obstacle à ce que le législateur prévoie que le bénéfice des allocations familiales varie en fonction des ressources et renvoie au décret le pouvoir de fixer les critères de ressources et de montant des allocations ; que ces dispositions réglementaires ne sauraient toutefois remettre en cause les exigences du Préambule de 1946 compte tenu des autres formes d’aides aux familles ; que, sous cette réserve, le paragraphe I de l’article 85 de la loi n’est pas contraire aux dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 ; 36. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, sous la réserve énoncée au considérant 35, le paragraphe I de l’article 85 de la loi déférée doit être déclaré conforme à la Constitution ; - SUR L’ARTICLE 12 : 37. Considérant que l’article 12, qui modifie l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant de la loi du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 susvisée, prévoit que les taux de la cotisation instituée par cet article sont fixés par décret ; 38. Considérant que la conformité à la Constitution d’une loi déjà promulguée peut être appréciée à l’occasion de l’examen des dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine ; qu’en l’espèce, les dispositions de l’article 12 ont pour objet de compléter les dispositions de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale telles qu’elles résultent du 7° du paragraphe I de l’article 2 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014 ; 39. Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant… l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures » ; 40. Considérant que la cotisation instituée par l’article L. 834-1, qui a pour assiette les rémunérations versées par les employeurs à leurs salariés, et qui est recouvrée « selon les règles applicables en matière de sécurité sociale », a pour objet de concourir au financement du fonds national d’aide au logement ; que l’article L. 351-6 du code de la construction et de l’habitation charge ce fonds de financer l’aide personnalisée au logement, la prime de déménagement et les dépenses de gestion qui s’y rapportent ainsi que les dépenses du conseil national de l’habitat ; que ce fonds finance également l’allocation de logement ainsi que les dépenses de gestion qui s’y rapportent ; 41. Considérant que la cotisation instituée par l’article L. 834-1, dont les recettes concourent au financement du fonds national d’aide au logement, n’a pas pour objet d’ouvrir des droits à des prestations et avantages servis par un régime obligatoire de sécurité sociale ; qu’il s’ensuit que cette cotisation est au nombre des impositions de toutes natures au sens de l’article 34 de la Constitution ; 42. Considérant, qu’en renvoyant au décret le soin de fixer les taux de cette cotisation et en ne prévoyant aucun encadrement de la détermination de ces taux, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence ; que, par suite, l’article 12 de la loi déférée doit être déclaré contraire à la Constitution ; qu’il en va de même de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction résultant du 7° du paragraphe I de l’article 2 de la loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, lequel doit être déclaré contraire à la Constitution ; qu’il résulte du A du paragraphe VI de cet article 2 que le 7° du paragraphe I du même article ne s’applique qu’à compter du 1er janvier 2015 ; que la déclaration d’inconstitutionnalité de ce 7° a pour effet de maintenir en vigueur la rédaction de l’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale résultant de l’article 209 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 susvisée ; - SUR LES AUTRES DISPOSITIONS DE LA LOI : 43.  Considérant que le 3° du paragraphe I de l’article 16 est relatif aux recours contre des tiers par les organismes d’assurance maladie complémentaire ; 44. Considérant que cette disposition n’a pas d’effet sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement et ne relève pas non plus des autres catégories mentionnées au paragraphe V de l’article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale ; que, par suite, elle ne trouve pas sa place dans une loi de financement de la sécurité sociale ; 45. Considérant qu’il n’y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d’office, aucune autre question de conformité à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2015 : - l’article 12 ; - le 3° du paragraphe I de l’article 16. Article 2.- Sous la réserve énoncée au considérant 35, le paragraphe I de l’article 85 de la même loi est conforme à la Constitution. Article 3.- Les articles 23, 61 et 63 de la même loi sont conformes à la Constitution. Article 4.- L’article L. 834-1 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant du 7° du paragraphe I de l’article 2 de la loi n° 2014-892 du 8 août 2014 de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2014, est contraire à la Constitution. Article 5.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 décembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
CONSTIT/CONSTEXT000029069385.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 2 avril 2014 par la Cour de cassation (première chambre civile, arrêt n° 497 du 2 avril 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Alain D., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du second alinéa de l'article 272 du code civil. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code civil ; Vu le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour le requérant par Me Véronique de Tienda-Jouhet, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 9 mai 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 24 avril 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Vu la lettre du 12 mai 2014 par laquelle le Conseil constitutionnel a soumis aux parties un grief susceptible d'être soulevé d'office ; Me de Tienda-Jouhet pour le requérant, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 20 mai 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que l'article 272 du code civil est relatif à la fixation de la prestation compensatoire qui peut être prononcée à l'occasion du divorce ; qu'aux termes de son second alinéa : « Dans la détermination des besoins et des ressources, le juge ne prend pas en considération les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail et les sommes versées au titre du droit à compensation d'un handicap » ; 2. Considérant que, selon le requérant, ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, excluent, pour le calcul de la prestation compensatoire, les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail et du droit à compensation d'un handicap, mais non les sommes versées au titre des pensions militaires d'invalidité ; qu'il en résulterait une violation du principe d'égalité devant la loi ; qu'en outre, en application de l'article 7 du règlement du 4 février 2010 susvisé, le Conseil constitutionnel a soulevé d'office le grief tiré de ce que, en interdisant à la juridiction de prendre en considération, pour le calcul de la prestation compensatoire, les sommes versées au titre de la réparation d'un accident ou de la compensation d'un handicap, alors que l'article 271 du code civil fait obligation à cette même juridiction de prendre en considération l'état de santé des époux, les dispositions contestées porteraient atteinte à l'égalité des époux devant la loi ; 3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 4. Considérant que, selon l'article 270 du code civil, la prestation compensatoire a pour objet « de compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives » des époux ; qu'aux termes de l'article 271 : « La prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l'époux à qui elle est versée et les ressources de l'autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l'évolution de celle-ci dans un avenir prévisible. « À cet effet, le juge prend en considération notamment : « - la durée du mariage ; « - l'âge et l'état de santé des époux ; « - leur qualification et leur situation professionnelles ; « - les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune pour l'éducation des enfants et du temps qu'il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ; « - le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ; « - leurs droits existants et prévisibles ; « - leur situation respective en matière de pensions de retraite en ayant estimé, autant qu'il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l'époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa » ; 5. Considérant que, par ces dispositions qui encadrent les modalités de fixation de la prestation compensatoire, le législateur a entendu impartir au juge de tenir compte, au cas par cas, de la situation globale de chacun des époux, au regard notamment de leurs ressources, de leur patrimoine, de leur état de santé et de leurs conditions de vie respectifs ; 6. Considérant que, pour le calcul de la prestation compensatoire, les dispositions du second alinéa de l'article 272 du code civil interdisent au juge de prendre en considération, dans la détermination des besoins et des ressources des époux, les sommes versées à l'un d'eux au titre de la réparation d'un accident du travail ou au titre de la compensation d'un handicap ; 7. Considérant, en premier lieu, qu'en excluant des éléments retenus pour le calcul de la prestation compensatoire les sommes versées au titre de la réparation des accidents du travail, ces dispositions empêchent de prendre en compte des ressources destinées à compenser, au moins en partie, une perte de revenu alors que, par ailleurs, toutes les autres prestations sont prises en considération dès lors qu'elles assurent un revenu de substitution ; 8. Considérant, en second lieu, qu'en application de l'article 271 du code civil, il incombe au juge, pour fixer la prestation compensatoire selon les besoins et ressources des époux, de tenir compte notamment de leur état de santé ; que les sommes versées à une personne au titre de la compensation de son handicap ne sauraient être détournées de leur objet pour être affectées au versement de la prestation compensatoire dont cette personne est débitrice ; que, toutefois, en excluant la prise en considération des sommes versées au titre de la compensation du handicap dans la détermination des besoins et ressources, les dispositions contestées ont pour effet d'empêcher le juge d'apprécier l'ensemble des besoins des époux, et notamment des charges liées à leur état de santé ; 9. Considérant que l'interdiction de prendre en considération, pour fixer le montant de la prestation compensatoire, les sommes versées à l'un des époux au titre de la réparation d'un accident du travail ou au titre de la compensation d'un handicap institue entre les époux des différences de traitement qui ne sont pas en rapport avec l'objet de la prestation compensatoire qui est de compenser la disparité que la rupture du mariage crée dans leurs conditions de vie respectives ; que, par suite, cette interdiction méconnaît l'égalité devant la loi ; que le second alinéa de l'article 272 du code civil doit être déclaré contraire à la Constitution ; 10. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 11. Considérant que l'abrogation du second alinéa de l'article 272 du code civil prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date ; que les prestations compensatoires fixées par des décisions définitives en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution ne peuvent être remises en cause sur le fondement de cette inconstitutionnalité, D É C I D E : Article 1er.- Le second alinéa de l'article 272 du code civil est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité prévue par l'article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées par son considérant 11. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance 28 mai 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 2 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029067395.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 2 avril 2014 par le Conseil d’État (décision n° 374873 du 1er avril 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la commune de Guyancourt, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du b) du 2° du paragraphe II de l’article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code général des collectivités territoriales ; Vu la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 ; Vu la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 ; Vu la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013 ; Vu la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la commune requérante par Me Manuel Delamarre, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, et la SCP Goutal Alibert et Associés, avocat au barreau de Paris enregistrées le 23 avril 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 24 avril 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Yvon Goutal, avocat au barreau de Paris, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 20 mai 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que le paragraphe II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales définit les modalités selon lesquelles les communes de la région d'Île-de-France contribuent au fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France ; qu'en particulier, le 2° de ce même paragraphe, dans sa rédaction issue de l'article 145 de la loi du 28 décembre 2011 susvisée, institue des mécanismes de plafonnement du prélèvement sur les ressources des communes ; qu'en vertu du b) de ce 2°, ce prélèvement « ne peut excéder 120 % en 2012, 130 % en 2013, 140 % en 2014 et, à compter de 2015, 150 % du montant du prélèvement opéré au titre de l'année 2009 conformément à l'article L. 2531-13 dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2009 » ; que l'article 134 de la loi du 29 décembre 2013 susvisée a eu pour effet de modifier les références de cette disposition, qui figure désormais inchangée au b) du 3° du paragraphe II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales ; 2. Considérant que, selon la commune requérante, en prévoyant un plafond du prélèvement au profit du fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France au bénéfice des seules communes ayant contribué à ce fonds en 2009, les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques ; que le législateur aurait institué sans aucune limitation de durée une différence de traitement injustifiée entre les communes selon qu'elles étaient ou non contributrices au fonds en 2009 ; que le critère de distinction retenu par le législateur ne serait pas rationnel au regard de l'objectif poursuivi ; 3. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; 4. Considérant qu'en vertu du premier alinéa de l'article L. 2531-12 du code général des collectivités territoriales, le fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France a pour objet de contribuer « à l'amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines d'Île-de-France supportant des charges particulières au regard des besoins sociaux de leur population sans disposer de ressources fiscales suffisantes » ; que le premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 2531-13 du même code, dans sa rédaction issue de la loi du 28 décembre 2011 susvisée, dispose que « les ressources du fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France en 2012, 2013, 2014 et 2015 sont fixées, respectivement, à 210, 230, 250 et 270 millions d'euros » ; que le législateur n'a pas fixé le montant des ressources du fonds à compter de l'année 2016 ; 5. Considérant que, par les dispositions contestées, le législateur a introduit un dispositif de plafonnement de la croissance du prélèvement sur les ressources communales au titre du fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France applicable aux seules communes contributrices à ce fonds en 2009 ; que le législateur a ainsi entendu limiter les conséquences de l'augmentation progressive des montants prélevés au titre du fonds entre 2012 et 2015 et retenir comme année de référence la dernière année précédant la réforme de la taxe professionnelle, laquelle a eu pour conséquence des modifications des paramètres de calcul des prélèvements au profit du fonds ; que, dans le même temps, la loi du 28 décembre 2011 susvisée a également introduit un dispositif prévoyant une division par deux du prélèvement pour les communes contribuant au fonds pour la première fois ; qu'elle a enfin instauré une règle applicable à l'ensemble des communes contributrices au fonds interdisant que le prélèvement puisse excéder une fraction des dépenses réelles de fonctionnement exposées par la commune au cours de l'avant-dernier exercice ; que la loi du 14 mars 2012 susvisée a introduit un dispositif limitant, pour l'année 2012, le prélèvement des communes qui sont également bénéficiaires du fonds au montant de l'attribution qu'elles perçoivent ; que la loi du 29 décembre 2012 susvisée a prévu que les communes ayant bénéficié de cette dernière disposition en 2012 verraient leur prélèvement abattu de 50 % en 2013 et de 25 % en 2014 ; qu'elle a également prévu l'annulation du prélèvement dû par les communes classées au titre de l'année précédente parmi les cent cinquante premières communes classées au titre de la dotation de solidarité urbaine en fonction de l'indice synthétique de ressources et de charges ; qu'enfin, la loi du 29 décembre 2013 susvisée a notamment plafonné la croissance du prélèvement dans les communes où ce prélèvement augmente de plus de 25 % par rapport à celui de l'exercice précédent à la moitié de la différence entre le prélèvement et 125 % du prélèvement opéré au titre de l'année précédente ; 6. Considérant que le législateur a réservé aux seules communes contributrices en 2009 le bénéfice du dispositif de plafonnement de la croissance du prélèvement des communes au fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France instauré par les dispositions contestées ; que la différence de traitement ainsi instituée entre les communes repose uniquement sur la date à laquelle elles ont commencé à contribuer au fonds ; que, s'il était loisible au législateur de prévoir, à titre transitoire, dans le cadre de la mise en oeuvre des nouvelles règles de plafonnement des contributions des communes, un dispositif spécifique réservé aux seules communes contributrices en 2009, il ne pouvait, compte tenu de l'objet de ce fonds, laisser subsister de façon pérenne une telle différence de traitement sans porter une atteinte caractérisée à l'égalité devant les charges publiques entre les communes contributrices au fonds ; que, par suite, les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant les charges publiques ; que le b) du 2°, devenu 3°, du paragraphe II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales, doit être déclaré contraire à la Constitution ; 7. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 8. Considérant qu'une déclaration d'inconstitutionnalité qui aurait pour effet d'imposer la révision du montant des prélèvements opérés au titre du fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France auprès de l'ensemble des communes contributrices pour l'année en cours et les années passées aurait des conséquences manifestement excessives ; qu'il y a donc lieu de reporter au 1er janvier 2015 la date de cette abrogation ; que les montants prélevés au titre du fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France pour les années 2012, 2013 et 2014 ne peuvent être contestés sur le fondement de cette inconstitutionnalité, D É C I D E : Article 1er.- Le b) du 2°, devenu 3°, du paragraphe II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales est contraire à la Constitution. Article 2. La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions prévues au considérant 8. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 5 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 6 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029067396.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 8 avril 2014 par la Cour de cassation (chambre commerciale, arrêt n° 453 du 8 avril 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société Beverage and Restauration Organisation SA, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du paragraphe II de l’article L. 631-15 du code de commerce. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de commerce ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la SELARL Bernard Beuzeboc, ès qualités de mandataire liquidateur à la liquidation de la société Beverage and Restauration Organisation SA, partie en défense, par Me Dominique Foussard, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées le 30 avril 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 30 avril 2014 ; Vu les observations produites pour la société requérante par la SELARL Lexavoué Normandie, avocat au barreau de Rouen, et Me Henry Mons, avocat au barreau de Lisieux, enregistrées les 9 et 14 mai 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Vincent Mosquet, avocat au barreau de Rouen, pour la société requérante, Me Foussard, pour la partie en défense et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 27 mai 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes du paragraphe II de l’article L. 631-15 du code de commerce : « À tout moment de la période d’observation, le tribunal, à la demande du débiteur, de l’administrateur, du mandataire judiciaire, d’un contrôleur, du ministère public ou d’office, peut ordonner la cessation partielle de l’activité ou prononce la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible. « Il statue après avoir entendu ou dûment appelé le débiteur, l’administrateur, le mandataire judiciaire, les contrôleurs et les représentants du comité d’entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel, et avoir recueilli l’avis du ministère public. « Lorsque le tribunal prononce la liquidation, il met fin à la période d’observation et, sous réserve des dispositions de l’article L. 641-10, à la mission de l’administrateur » ; 2. Considérant que, selon la société requérante, en permettant à la juridiction commerciale de se saisir d’office pour prononcer la liquidation judiciaire à tout moment de la période d’observation du redressement judiciaire, les dispositions du paragraphe II de l’article L. 631-15 du code de commerce méconnaissent les exigences découlant de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; 3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « ou d’office » figurant au premier alinéa du paragraphe II de l’article L. 631-15 du code de commerce ; 4. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; que le principe d’impartialité est indissociable de l’exercice de fonctions juridictionnelles ; qu’il en résulte qu’en principe une juridiction ne saurait disposer de la faculté d’introduire spontanément une instance au terme de laquelle elle prononce une décision revêtue de l’autorité de chose jugée ; que, si la Constitution ne confère pas à cette interdiction un caractère général et absolu, la saisine d’office d’une juridiction ne peut trouver de justification, lorsque la procédure n’a pas pour objet le prononcé de sanctions ayant le caractère d’une punition, qu’à la condition qu’elle soit fondée sur un motif d’intérêt général et que soient instituées par la loi des garanties propres à assurer le respect du principe d’impartialité ; 5. Considérant que la procédure de redressement judiciaire est ouverte à toute personne exerçant une activité commerciale ou artisanale, à tout agriculteur, à toute autre personne physique exerçant une activité professionnelle indépendante y compris une profession libérale soumise à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, ainsi qu’à toute personne morale de droit privé, qui, dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements ; que cette procédure est destinée à permettre la poursuite de l’activité du débiteur, le maintien de l’emploi dans l’entreprise et l’apurement du passif ; 6. Considérant que la procédure de liquidation judiciaire est ouverte à tout débiteur qui, ne pouvant faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible ; que cette procédure est destinée à mettre fin à l’activité de l’entreprise ou à réaliser le patrimoine du débiteur par une cession de ses droits et biens ; 7. Considérant qu’en application de l’article L. 621-3 du code de commerce, le jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire ouvre une période d’observation ; que cette période est destinée notamment à donner au tribunal en charge de la procédure l’ensemble des informations nécessaires pour apprécier la possibilité d’adopter un plan de redressement ; que, selon la deuxième phrase du second alinéa de l’article L. 631-1 du code de commerce, la procédure de redressement judiciaire « donne lieu à un plan arrêté par jugement à l’issue d'une période d'observation » ; 8. Considérant que les articles L. 621-2, L. 621-7 et L. 621-8 du code de commerce fixent notamment les pouvoirs que le tribunal peut exercer, le cas échéant d’office, au cours de la période d’observation ; qu’en outre, les dispositions contestées de l’article L. 631-15 permettent au juge de prononcer, à tout moment de la période d’observation, soit la cessation partielle de l’activité, soit la liquidation judiciaire lorsque le redressement judiciaire est manifestement impossible ; que l’article L. 631-16 prévoit que, s’il apparaît, au contraire, au cours de la période d’observation, que le débiteur dispose des sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers et acquitter les frais et les dettes afférents à la procédure, le tribunal peut également, en application des dispositions contestées, mettre fin d’office à cette procédure ; 9. Considérant que le tribunal saisi du redressement judiciaire doit se prononcer, au plus tard à l’issue de la période d’observation, sur la possibilité d’un plan de redressement ; que, par suite, en mettant un terme à la procédure d’observation pour ordonner la liquidation judiciaire lorsque le redressement est manifestement impossible, le tribunal ne se saisit pas d’une nouvelle instance au sens et pour l’application des exigences constitutionnelles précitées ; 10. Considérant, en second lieu, que la faculté pour le juge d’exercer certains pouvoirs d’office dans le cadre de l’instance dont il est saisi ne méconnaît pas le principe d’impartialité dès lors qu’elle est justifiée par un motif d’intérêt général et exercée dans le respect du principe du contradictoire ; 11. Considérant, d’une part, que les dispositions contestées ont pour objet de permettre que, lorsque les éléments recueillis au cours de la période d’observation font apparaître que le redressement de l’entreprise est manifestement impossible, la liquidation judiciaire ne soit pas retardée afin d’éviter l’aggravation irrémédiable de la situation de l’entreprise ; que, par suite, le législateur a poursuivi un but d’intérêt général ; 12. Considérant, d’autre part, que le deuxième alinéa du paragraphe II de l’article L. 631-15 du code de commerce prévoit que le juge prononce la liquidation judiciaire après avoir entendu notamment le débiteur, l’administrateur et le mandataire judiciaire et après avoir recueilli l’avis du ministère public ; que, par suite, la faculté conférée au tribunal de prononcer d’office la liquidation judiciaire au cours de la période d’observation est exercée dans le respect du principe du contradictoire ; 13. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que le grief tiré de ce que les dispositions contestées méconnaissent le principe d’impartialité des juridictions doit être écarté ; 14. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les mots « ou d’office », figurant au premier alinéa du paragraphe II de l’article L. 631-15 du code de commerce, sont conformes à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 5 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 6 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029067397.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 9 avril 2014 par le Conseil d'État (décision n° 375088 du 9 avril 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société Orange SA, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le livre des procédures fiscales ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la société requérante par CMS Bureau Francis Lefebvre, avocat au barreau des Hauts-de-Seine, enregistrées les 2 mai et 16 mai 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 2 mai 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Stéphane Austry, avocat au barreau des Hauts-de-Seine, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 27 mai 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales : « Lorsque le tribunal administratif rejette totalement ou partiellement la demande d'un contribuable tendant à obtenir l'annulation ou la réduction d'une imposition établie en matière d'impôts directs à la suite d'une rectification ou d'une taxation d'office, les cotisations ou fractions de cotisations maintenues à la charge du contribuable et pour lesquelles celui-ci avait présenté une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires au taux de l'intérêt de retard prévu à l'article 1727 du code général des impôts. Ces intérêts moratoires ne sont pas dus sur les cotisations ou fractions de cotisations d'impôts soumises à l'intérêt de retard mentionné à l'article 1727 du code général des impôts. « Ces dispositions sont également applicables en cas de désistement du contribuable auprès de la juridiction saisie. « Sur demande justifiée du contribuable, le montant des intérêts moratoires est réduit du montant des frais éventuellement engagés pour la constitution des garanties propres à assurer le recouvrement des impôts contestés. « Les intérêts courent du premier jour du treizième mois suivant celui de la date limite de paiement jusqu'au jour du paiement effectif des cotisations. Ils sont recouvrés dans les mêmes conditions et sous les mêmes garanties, sûretés et privilèges que les impositions auxquelles ils s'appliquent » ; 2. Considérant que, lorsqu'un tribunal administratif rejette la demande d'un contribuable qui avait sollicité le sursis de paiement des impositions contestées et avait constitué des garanties pour en assurer le recouvrement, les dispositions contestées permettent au contribuable d'imputer les frais engagés à cette fin sur les intérêts « moratoires » mis à sa charge du fait du retard de paiement des impositions induit par le sursis ; qu'en revanche, ces dispositions excluent une telle imputation lorsque le contribuable est redevable non pas des intérêts « moratoires » mais des intérêts « de retard » prévus par l'article 1727 du code général des impôts ; 3. Considérant que, selon la société requérante, les dispositions contestées créent ainsi une différence de traitement sans rapport avec l'objectif poursuivi par le législateur et portent atteinte aux principes d'égalité devant la loi et les charges publiques ; 4. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le troisième alinéa de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales ; 5. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « la Loi. . . doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 6. Considérant que le retard de paiement d'une imposition donne notamment lieu à l'application d'intérêts « moratoires », prévue par l'article L. 209 du livre des procédures fiscales, ou d'intérêts « de retard » en vertu de l'article 1727 du code général des impôts ; que les majorations ainsi instituées ont pour objet la compensation du préjudice subi par l'État du fait du paiement tardif des impôts ; 7. Considérant que le législateur a prévu la possibilité d'obtenir l'imputation des frais de constitution de garanties engagés par le contribuable lors de la demande de sursis de paiement d'impositions directes pour lesquelles le rejet de la contestation par le tribunal administratif ou le désistement du contribuable a pour conséquence la mise à la charge de ce dernier d'intérêts « moratoires » ; qu'il a ainsi entendu permettre que ces frais ne soient pas maintenus à la charge du contribuable lorsque ce dernier s'acquitte de sa dette fiscale ; 8. Considérant qu'en réservant la possibilité d'une imputation du montant des frais de constitution de garanties aux seuls cas où le terme du sursis de paiement de l'imposition contestée a pour conséquence l'application des intérêts « moratoires », à l'exclusion de ceux où sont applicables des intérêts « de retard », le législateur a traité différemment des contribuables qui, à l'occasion de la contestation d'une imposition, ont constitué des garanties pour obtenir un sursis de paiement de l'imposition contestée ; que cette différence de traitement est sans lien avec l'objectif poursuivi par le législateur ; que, par suite, les dispositions du troisième alinéa de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales méconnaissent le principe d'égalité devant la loi ; qu'elles doivent être déclarées contraires à la Constitution ; 9. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 10. Considérant, d'une part, que l'abrogation du troisième alinéa de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales aura pour effet, en faisant disparaître l'inconstitutionnalité constatée, de supprimer la faculté reconnue aux contribuables ayant demandé un sursis de paiement à l'occasion de certains contentieux fiscaux d'obtenir l'imputation des frais de garanties ; que le Conseil constitutionnel ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation de même nature que celui du Parlement ; que, par suite, il y a lieu de reporter au 1er janvier 2015 la date de l'abrogation du troisième alinéa de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales afin de permettre au législateur d'apprécier les suites qu'il convient de donner à cette déclaration d'inconstitutionnalité ; 11. Considérant, d'autre part, qu'afin de préserver l'effet utile de la présente décision, notamment à la solution des instances actuellement en cours, les frais de constitution de garanties engagés à l'occasion d'une demande de sursis de paiement formulée en application du premier alinéa de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales avant l'entrée en vigueur d'une nouvelle loi ou, au plus tard, avant le 1er janvier 2015 sont imputables soit sur les intérêts « moratoires » prévus par l'article L. 209 du livre des procédures fiscales, soit sur les intérêts « de retard » prévus par l'article 1727 du code général des impôts dus en cas de rejet, par la juridiction saisie, de la contestation de l'imposition, D É C I D E : Article 1er.- Le troisième alinéa de l'article L. 209 du livre des procédures fiscales est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité prévue par l'article 1er prend effet dans les conditions fixées aux considérants 10 et 11. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 5 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 6 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029641924.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 8 octobre 2014 d'une requête présentée par M. Pierre SCHWEITZER, demeurant à Strasbourg (Bas-Rhin), tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 28 septembre 2014 dans le département du Bas-Rhin en vue de la désignation de cinq sénateurs. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment son article 59 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 38 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958, « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l'élection » ; 2. Considérant que la requête présentée par M. SCHWEITZER invoque exclusivement la rupture d'égalité entre les candidats à l'élection qui résulterait des dispositions de l'article R. 162 du code électoral, lesquelles permettraient aux candidats membres du collège électoral pour l'élection des sénateurs d'avoir connaissance de la liste de ces électeurs avant les autres candidats ; 3. Considérant qu'il ressort des dispositions de l'article R. 146 du code électoral que le tableau des électeurs sénatoriaux est établi par le préfet et rendu public au plus tard le septième jour suivant l'élection des délégués et de leurs suppléants ; qu'il n'est pas allégué que cette règle a été méconnue ; que le grief unique du requérant est manifestement infondé ; que, par suite, sa requête doit être rejetée, D É C I D E : Article 1er.- La requête de M. Pierre SCHWEITZER est rejetée. Article 2.- La présente décision sera notifiée au président du Sénat et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 17 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029641918.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 juillet 2014 par le Conseil d’État (décision n° 378033 du 16 juillet 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société Praxair SAS, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des « neuvième à vingt-et-unième alinéas du paragraphe I de l’article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité dans leur rédaction applicable de 2005 à 2009 ». LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu le code de l’énergie ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité ; Vu la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, notamment son article 118 ; Vu la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, notamment ses articles 54 et 57 ; Vu la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie, notamment son article 7 ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, notamment son article 37 ; Vu la décision du Tribunal des conflits n° 1 565 du 10 juillet 1956 ; Vu la décision du Conseil d’État nos 265582 et 273093 du 13 mars 2006 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations en intervention produites pour les sociétés Intermap France SA, Les Boutiques Bonne Journée SAS, Volkswagen Group France et  Société Française du Radiotéléphone SA par la SELAFA CMS Bureau Francis Lefebvre, avocat au barreau des Hauts-de-Seine, enregistrées les 31 juillet et 26 août 2014 ; Vu les observations produites pour la société requérante par la SCP Delaporte, Briard, Trichet, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 6 et 27 août 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour la société DHL International Express par la SELAS FIDAL, avocat au barreau des Hauts-de-Seine, enregistrées le 7 août 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 7 août 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Floriane Beauthier, avocat au barreau de Paris, pour la société requérante, Me Cathy Goarant-Moraglia, avocat au barreau de Paris, et Me Claire Vannini, avocat au barreau de Paris, pour les sociétés Intermap France SA, Les Boutiques Bonne Journée SAS, Volkswagen Group France et Société Française du Radiotéléphone SA, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 23 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les dispositions des neuvième à vingt-et-unième alinéas du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 susvisée, dans leur version issue de l’article 118 de la loi du 30 décembre 2004 susvisée, dans celle issue des articles 54 et 57 de la loi du 13 juillet 2005 susvisée, et dans celle issue de l’article 7 de la loi du 7 décembre 2006 susvisée ; 2. Considérant que le paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000, dans sa rédaction résultant de l’article 118 de la loi du 30 décembre 2004, fixe le régime de la contribution au service public de l’électricité ; que cette contribution assure la compensation intégrale des charges imputables aux missions de service public assignées aux opérateurs électriques ; qu’aux termes des neuvième à vingt-et-unième alinéas du paragraphe I de cet article : « La compensation de ces charges, au profit des opérateurs qui les supportent, est assurée par des contributions dues par les consommateurs finals d’électricité installés sur le territoire national. « Le montant des contributions mentionnées ci-dessus est calculé au prorata de la quantité d’électricité consommée. Toutefois, l’électricité produite par un producteur pour son propre usage ou achetée pour son propre usage par un consommateur final à un tiers exploitant une installation de production sur le site de consommation n’est prise en compte pour le calcul de la contribution qu’à partir de 240 millions de kilowattheures par an et par site de production. « Le montant de la contribution due par site de consommation, par les consommateurs finals mentionnés au premier alinéa du I de l’article 22, ne peut excéder 500000 euros. Le même plafond est applicable à la contribution due par les entreprises mentionnées au deuxième alinéa du I de l’article 22 pour l’électricité de traction consommée sur le territoire national et à la contribution due par les entreprises mentionnées au quatrième alinéa du II de l’article 22 pour l’électricité consommée en aval des points de livraison d’électricité sur un réseau électriquement interconnecté. « Le montant de la contribution applicable à chaque kilowattheure est calculé de sorte que les contributions couvrent l’ensemble des charges visées aux a et b, ainsi que les frais de gestion exposés par la Caisse des dépôts et consignations, mentionnés ci-après. Le ministre chargé de l’énergie arrête ce montant sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie, effectuée annuellement. « La contribution applicable à chaque kilowattheure ne peut dépasser 7 % du tarif de vente du kilowattheure, hors abonnement et hors taxes, correspondant à une souscription d’une puissance de 6 kVA sans effacement ni horosaisonnalité. « Les contributions des consommateurs finals éligibles ayant exercé les droits accordés au III de l’article 22 alimentés par l’intermédiaire du réseau public de transport ou par un réseau public de distribution sont recouvrées par l’opérateur en charge de la gestion du réseau auquel ces consommateurs sont raccordés sous la forme d’un prélèvement additionnel aux tarifs d’utilisation des réseaux. Celles des consommateurs finals non éligibles et des consommateurs finals éligibles qui n’ont pas exercé les droits accordés au III de l’article 22 sont recouvrées par l’organisme en charge de la fourniture d’électricité qui les alimente, sous la forme d’un prélèvement additionnel aux tarifs réglementés de vente d’électricité. Le montant de la contribution est liquidé par l’organisme précité en fonction de la quantité d’électricité livrée au contributeur qui l’acquitte lors du règlement de sa facture d’électricité ou d’utilisation des réseaux. Les contributions effectivement recouvrées sont reversées aux opérateurs qui supportent les charges de service public par l’intermédiaire de la Caisse des dépôts et consignations. « Les producteurs d’électricité produisant pour leur propre usage et les consommateurs finals, qui ne sont pas alimentés par l’intermédiaire du réseau public de transport ou de distribution, acquittent spontanément leur contribution avant la fin du mois qui suit chaque semestre civil. À cet effet, ils adressent une déclaration indiquant la quantité d’électricité consommée au cours du semestre civil correspondant à la Commission de régulation de l’énergie et à la Caisse des dépôts et consignations. Ils procèdent dans le même délai au versement, auprès de la Caisse des dépôts et consignations, des contributions dues au profit des opérateurs qui supportent les charges de service public. En cas d’inobservation de ses obligations par un des contributeurs mentionnés au présent alinéa, la Commission de régulation de l’énergie procède, après avoir mis l’intéressé en mesure de présenter ses observations, à la liquidation des contributions dues. Le cas échéant, elle émet un état exécutoire. « La Caisse des dépôts et consignations reverse deux fois par an aux opérateurs qui supportent les charges visées aux 1° et 2° des a et b les sommes collectées. Le montant des contributions que les opérateurs reçoivent est arrêté par les ministres chargés de l’économie et de l’énergie, sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie. « La Caisse des dépôts et consignations retrace ces différentes opérations dans un compte spécifique. Les frais de gestion exposés par la caisse sont arrêtés annuellement par les ministres chargés de l’économie et de l’énergie. « Sans préjudice de l’application des sanctions prévues à l’article 41, en cas de défaut ou d’insuffisance de paiement de la contribution dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle elle est due, la Commission de régulation de l’énergie adresse une lettre de rappel assortie d’une pénalité de retard dont le taux est fixé à 10 % du montant de la contribution due. « Les dispositions de l’alinéa ci-dessus ne s’appliquent pas aux personnes qui bénéficient ou qui viennent à bénéficier du dispositif mentionné au 1° du III de l’article 2. « Lorsque le montant des contributions collectées ne correspond pas au montant constaté des charges de l’année, la régularisation intervient l’année suivante au titre des charges dues pour cette année. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées au cours de l’année, elles sont ajoutées au montant des charges de l’année suivante. « La Commission de régulation de l’énergie évalue chaque année dans son rapport annuel le fonctionnement du dispositif relatif aux charges du service public de l’électricité visées au présent I » ; 3. Considérant que le 1° du paragraphe I de l’article 54 de la loi du 13 juillet 2005 a complété le douzième alinéa du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 par une phrase ainsi rédigée : « Le montant de la contribution annuelle, fixé pour une année donnée, est applicable aux exercices suivants à défaut d’entrée en vigueur d’un nouvel arrêté pour l’année considérée » ; que le 2° du paragraphe I de ce même article 54 a supprimé la dernière phrase du seizième alinéa du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 ; que l’article 57 de la loi du 13 juillet 2005 a modifié le seizième alinéa du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 en prévoyant que le reversement, par la Caisse des dépôts et consignations, des sommes collectées au titre de la contribution au service public de l’électricité aux opérateurs supportant les charges imputables aux missions de service public intervient « quatre fois par an » ; 4. Considérant que le 1° du paragraphe IV de l’article 7 de la loi du 7 décembre 2006 a complété la première phrase du douzième alinéa du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 pour prévoir que les contributions au service public de l’électricité couvrent « le budget du médiateur national de l’énergie » ; que le 2° du paragraphe IV du même article a complété le seizième alinéa du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 pour prévoir que la Commission de régulation de l’énergie « verse au médiateur national de l’énergie une somme égale au montant de son budget le 1er janvier de chaque année » ; -SUR LES CONCLUSIONS DES SOCIÉTÉS INTERVENANTES : 5. Considérant que les sociétés intervenantes concluent à l’abrogation, d’une part, des dispositions contestées et, d’autre part, des dispositions des neuvième à vingt-et-unième alinéas du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000 dans leur rédaction résultant de l’article 37 de la loi du 29 décembre 2010 susvisée ainsi que des articles L. 121-10, L. 121-11 et L. 121-14 à L. 121-20 du code de l’énergie ; que le Conseil constitutionnel n’est pas saisi de ces dispositions par le Conseil d’État ; que, par suite, les conclusions des sociétés intervenantes ne doivent pas être admises en tant qu’elles portent sur ces dernières dispositions ; -SUR LA CONFORMITE DES DISPOSITIONS CONTESTEES AUX DROITS ET LIBERTES QUE LA CONSTITUTION GARANTIT : 6. Considérant que la société requérante et les sociétés intervenantes soutiennent qu’en adoptant les dispositions contestées, le législateur a méconnu l’étendue de sa compétence ; que les sociétés intervenantes soutiennent que ces dispositions méconnaissent le principe de l’égalité devant l’impôt et les charges publiques, ainsi que l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi ; . En ce qui concerne les griefs tirés de l’incompétence négative : 7. Considérant que, selon la société requérante, en ne précisant pas les modalités de détermination du taux de la contribution au service public de l’électricité, le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence, dans des conditions portant atteinte au droit de propriété ; que, selon la société requérante et les sociétés intervenantes, en ne précisant pas les règles relatives au recouvrement et au contentieux de cette contribution, le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence dans des conditions portant atteinte au droit de propriété, au droit à un recours juridictionnel effectif et au principe du consentement à l’impôt ; 8. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; que la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit ; 9. Considérant qu’aux termes de l’article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant... l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures... » ; qu’il s’ensuit que, lorsqu’il définit une imposition, le législateur doit déterminer ses modalités de recouvrement, lesquelles comprennent les règles régissant le contrôle, le recouvrement, le contentieux, les garanties et les sanctions applicables à cette imposition ; 10. Considérant, en premier lieu, que la méconnaissance par le législateur de l’étendue de sa compétence dans la détermination de l’assiette ou du taux d’une imposition n’affecte par elle-même aucun droit ou liberté que la Constitution garantit ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance par le législateur de sa compétence en matière de règles concernant le taux de la contribution au service public de l’électricité doit être écarté ; 11. Considérant, en second lieu, que la méconnaissance, par le législateur, de l’étendue de sa compétence dans la détermination des modalités de recouvrement d’une imposition n’affecte pas par elle-même le droit de propriété ; qu’en revanche, elle affecte par elle-même le droit à un recours effectif garanti par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; 12. Considérant, d’une part, que, selon le quatorzième alinéa du paragraphe I de l’article 5 de la loi du 10 février 2000, pour les consommateurs finals alimentés par l’intermédiaire du réseau public de transport ou de distribution, la contribution au service public de l’électricité est recouvrée soit par l’opérateur en charge de la gestion du réseau soit par l’organisme en charge de la fourniture d’électricité « sous la forme d’un prélèvement additionnel aux tarifs d’utilisation des réseaux » ou « aux tarifs réglementés de vente d’électricité », selon que les consommateurs sont ou non éligibles et qu’ils exercent ou non leur droit à l’éligibilité ; que le montant de la contribution au service public de l’électricité est liquidé par l’opérateur ou l’organisme susmentionnés en fonction de la quantité d’électricité livrée au contributeur qui l’acquitte lors du règlement de sa facture d’électricité ou d’utilisation des réseaux ; 13. Considérant que, selon le quinzième alinéa, les producteurs d’électricité produisant pour leur propre usage et les consommateurs finals qui ne sont pas alimentés par l’intermédiaire du réseau public de transport ou de distribution acquittent spontanément leur contribution avant la fin du mois qui suit chaque semestre civil ; qu’à cet effet, ils adressent à la Commission de régulation de l’énergie et à la Caisse des dépôts et consignations une déclaration indiquant la quantité d’électricité consommée au cours du semestre civil correspondant ; qu’ils procèdent dans le même délai au versement, auprès de la Caisse des dépôts et consignations, des contributions dues au profit des opérateurs qui supportent les charges de service public ; qu’en cas d’inobservation de ces obligations, la Commission de régulation de l’énergie procède, après avoir mis l’intéressé en mesure de présenter ses observations, à la liquidation des contributions dues ; qu’elle émet, le cas échéant, un état exécutoire ; 14. Considérant que, selon le dix-huitième alinéa, « en cas de défaut ou d’insuffisance de paiement de la contribution dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle elle est due, la Commission de régulation de l’énergie adresse une lettre de rappel assortie d’une pénalité de retard dont le taux est fixé à 10 % du montant de la contribution due » ; 15. Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces dispositions que le législateur a prévu des règles de recouvrement de la contribution au service public de l’électricité distinctes en fonction des catégories de contributeurs et des modalités de fourniture de l’électricité consommée ; que, d’une part, pour les consommateurs finals alimentés par l’intermédiaire du réseau public de transport ou de distribution qui acquittent leur contribution lors du règlement de leur facture d’électricité ou d’utilisation des réseaux, le législateur n’autorise ni le gestionnaire du réseau ni le fournisseur d’électricité à émettre un état exécutoire ; que, d’autre part, pour les producteurs d’électricité produisant pour leur propre usage et les consommateurs finals non alimentés par l’intermédiaire du réseau public de transport ou de distribution, la Commission de régulation de l’énergie est seule compétente pour recouvrer la contribution et, le cas échéant, émettre un état exécutoire ; qu’en outre, dans l’un et l’autre cas, la Commission de régulation de l’énergie est seule compétente pour adresser une lettre de rappel assortie de pénalités de retard lorsqu’elle constate un défaut ou une insuffisance de paiement ; que, par suite, le législateur a suffisamment défini les règles régissant le recouvrement de la contribution au service public de l’électricité ; 16. Considérant, d’autre part, qu’il résulte de la jurisprudence constante du Tribunal des conflits que le contentieux des impositions qui ne sont ni des contributions indirectes ni des impôts directs est compris dans le contentieux général des actes et des opérations de puissance publique relevant de la juridiction administrative ; qu’il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d’État que le contentieux de la contribution au service public de l’électricité relève, à ce titre, de la compétence de la juridiction administrative ; que, par suite, doivent être écartés, en tout état de cause, les griefs tirés de ce qu’en ne désignant pas la juridiction compétente pour connaître du contentieux de cette imposition, le législateur aurait méconnu l’étendue de sa compétence ; que, par suite, il a suffisamment défini les règles régissant le contentieux de la contribution au service public de l’électricité ; 17. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que les griefs tirés de l’incompétence négative doivent être écartés ; . En ce qui concerne les autres griefs : 18. Considérant que selon les sociétés intervenantes, en prévoyant des périodicités de versement de la contribution au service public de l’électricité différentes selon les catégories de contributeurs, le législateur a institué une différence de traitement contraire au principe d’égalité devant l’impôt et les charges publiques ; 19. Considérant qu’aux termes de l’article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; qu’en particulier, pour assurer le respect du principe d’égalité, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu’il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ; 20. Considérant que les différences de périodicité de versement retenues par le législateur correspondent à l’existence de modalités de recouvrement différentes en fonction des catégories de contributeurs et des modalités de fourniture de l’électricité consommée ; que cette différence de traitement est sans incidence sur la charge publique que constitue la contribution au service public de l’électricité ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant l’impôt et les charges publiques doit être écarté ; 21. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont en tout état de cause pas entachées d’inintelligibilité, ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; qu’elles doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les neuvième à vingt-et-unième alinéas du paragraphe I de l’article 5 de la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, dans leur version issue de l’article 118 de la loi n° 2004-1485 du 30 décembre 2004 de finances rectificative pour 2004, dans celle issue des articles 54 et 57 de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005 de programme fixant les orientations de la politique énergétique, et dans celle issue de l’article 7 de la loi n° 2006-1537 du 7 décembre 2006 relative au secteur de l’énergie, sont conformes à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 8 octobre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 juillet 2014 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 4428 du 16 juillet 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Maurice L., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale. Il a été saisi le même jour dans les mêmes conditions par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 4429 du même jour) d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Bernard T., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 706-88 du code de procédure pénale. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2004-492 DC du 2 mars 2004 ; Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2010-31 QPC du 22 septembre 2010 ; Vu la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, notamment son article 16 ; Vu la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, notamment son article 157 ; Vu la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales, notamment son article 4 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la SAS Consortium de réalisation et la SAS CDR Créances, parties en défense, par Me Benoît Chabert, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 7 août 2014 ; Vu les observations produites pour M. Maurice L. par Me Paul-Albert Iweins, avocat au barreau de Paris, enregistrées les 8 et 28 août 2014 ; Vu les observations produites pour M. Bernard T. par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 8 et 28 août 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 8 août 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Iweins et Me Frédéric Thiriez, pour les requérants, Me Chabert, pour les parties en défense et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 23 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’il y a lieu de joindre ces questions prioritaires de constitutionnalité pour statuer par une seule décision ; 2. Considérant que les questions prioritaires de constitutionnalité doivent être regardées comme portant sur les dispositions applicables au litige à l’occasion duquel elles ont été posées ; qu’ainsi le Conseil constitutionnel est saisi du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale, dans sa rédaction actuellement en vigueur, et de l’article 706-88 du même code, dans sa rédaction postérieure à la loi du 14 avril 2011 susvisée et antérieure à la loi 27 mai 2014 susvisée ; 3. Considérant que le titre XXV du livre IV du code de procédure pénale, qui, dans sa rédaction antérieure à la loi du 27 mai 2014 susvisée, comprend les articles 706-73 à 706-106, est consacré à la procédure applicable à la criminalité et à la délinquance organisée ; que l’article 706-73 fixe la liste des crimes et délits pour lesquels la procédure applicable à l’enquête, la poursuite, l’instruction et le jugement est soumise aux dispositions particulières de ce titre XXV ; que le 8° bis de cet article 706-73, dans sa rédaction résultant de la loi du 17 mai 2011 susvisée, désigne le « délit d’escroquerie en bande organisée prévu par le dernier alinéa de l’article 313-2 du code pénal » ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 706-88 du code de procédure pénale, dans sa rédaction postérieure à la loi du 14 avril 2011 : « Pour l’application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l’enquête ou de l’instruction relatives à l’une des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-73 l’exigent, la garde à vue d’une personne peut, à titre exceptionnel, faire l’objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune. « Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d’instruction. « La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer. « Lorsque la première prolongation est décidée, la personne gardée à vue est examinée par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue, qui est versé au dossier. La personne est avisée par l’officier de police judiciaire du droit de demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d’émargement, il en est fait mention. « Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la durée prévisible des investigations restant à réaliser à l’issue des premières quarante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et de la détention ou le juge d’instruction peuvent décider, selon les modalités prévues au deuxième alinéa, que la garde à vue fera l’objet d’une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit heures. « Par dérogation aux dispositions des articles 63-4 à 63-4-2, lorsque la personne est gardée à vue pour une infraction entrant dans le champ d’application de l’article 706-73, l’intervention de l’avocat peut être différée, en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes, pendant une durée maximale de quarante-huit heures ou, s’il s’agit d’une infraction mentionnée aux 3° ou 11° du même article 706-73, pendant une durée maximale de soixante-douze heures. « Le report de l’intervention de l’avocat jusqu’à la fin de la vingt-quatrième heure est décidé par le procureur de la République, d’office ou à la demande de l’officier de police judiciaire. Le report de l’intervention de l’avocat au-delà de la vingt-quatrième heure est décidé, dans les limites fixées au sixième alinéa, par le juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République. Lorsque la garde à vue intervient au cours d’une commission rogatoire, le report est décidé par le juge d’instruction. Dans tous les cas, la décision du magistrat, écrite et motivée, précise la durée pour laquelle l’intervention de l’avocat est différée. « Lorsqu’il est fait application des sixième et septième alinéas du présent article, l’avocat dispose, à partir du moment où il est autorisé à intervenir en garde à vue, des droits prévus aux articles 63-4 et 63-4-1, au premier alinéa de l’article 63-4-2 et à l’article 63-4-3 » ; 5. Considérant que, selon les requérants, en ce qu’elles permettent le recours à une mesure de garde à vue de quatre-vingt-seize heures dans le cadre d’une enquête ou d’une instruction portant sur des faits qualifiés d’escroquerie en bande organisée, les dispositions combinées du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale et de son article 706-88 méconnaissent le principe de rigueur nécessaire des mesures de contrainte dans la procédure pénale, la protection de la liberté individuelle et les droits de la défense ; 6. Considérant que, s’agissant de l’article 706-88 du code de procédure pénale, la question prioritaire de constitutionnalité ne porte que sur ses cinq premiers alinéas relatifs à la durée de la garde à vue ; - SUR LES NORMES DE CONSTITUTIONNALITE APPLICABLES : 7. Considérant qu’aux termes de l’article 7 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l’instant : il se rend coupable par la résistance » ; qu’aux termes de son article 9 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi » ; que son article 16 dispose : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; 8. Considérant que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution l’obligation de fixer lui-même le champ d’application de la loi pénale ; que, s’agissant de la procédure pénale, cette exigence s’impose notamment pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d’infractions ; 9. Considérant qu’il incombe au législateur d’assurer la conciliation entre, d’une part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d’autre part, l’exercice des libertés constitutionnellement garanties ; qu’au nombre de celles-ci figurent la liberté d’aller et venir, l’inviolabilité du domicile, le secret des correspondances et le respect de la vie privée, protégés par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, ainsi que la liberté individuelle, que l’article 66 de la Constitution place sous la protection de l’autorité judiciaire ; - SUR LES CINQ PREMIERS ALINÉAS DE L’ARTICLE 706-88 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE : 10. Considérant que les cinq premiers alinéas de l’article 706-88 du code de procédure pénale sont renvoyés au Conseil constitutionnel dans leur rédaction résultant de la loi du 9 mars 2004 susvisée ; que, dans les considérants 21 à 27 de sa décision du 2 mars 2004 susvisée, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné l’article 706-88 inséré dans le code de procédure pénale par l’article 1er de la loi du 9 mars 2004 ; qu’il a jugé que ces dispositions ne portaient pas une atteinte excessive à la liberté individuelle ; que, dans l’article 2 du dispositif de cette décision, il a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution ; que, par suite, les cinq premiers alinéas de l’article 706-88 ont déjà été déclarés conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d’une décision du Conseil constitutionnel ; que, comme le Conseil constitutionnel l’a jugé dans sa décision du 22 septembre 2010 susvisée, en l’absence de changement des circonstances, depuis la décision du 2 mars 2004 susvisée, en matière de lutte contre la délinquance et la criminalité organisées, il n’y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, de procéder à un nouvel examen de ces dispositions ; qu’au surplus, le grief tiré de ce que les dispositions contestées permettent le recours à une mesure de garde à vue de quatre-vingt-seize heures pour des faits d’escroquerie en bande organisée met en cause non l’article 706-88 du code de procédure pénale en lui-même, mais l’inscription de cette infraction dans la liste prévue par son article 706-73 ; -SUR LE 8° BIS DE L’ARTICLE 706-73 DU CODE DE PROCÉDURE PÉNALE : 11. Considérant que l’inscription d’un crime ou d’un délit dans la liste des infractions visées par l’article 706-73 du code de procédure pénale a pour effet de permettre, lors des enquêtes ou des instructions portant sur ce crime ou ce délit, la mise en œuvre d’une mesure de garde à vue dans les conditions prévues à l’article 706-88 du code de procédure pénale et le recours à ceux des pouvoirs spéciaux d’enquête ou d’instruction prévus par le titre XXV du livre IV du code de procédure pénale qui sont applicables à toutes les infractions visées par l’article 706-73 ; 12. Considérant que l’article 706-88 du code de procédure pénale prévoit que, si les nécessités d’une enquête l’exigent, la garde à vue d’une personne peut, à titre exceptionnel, faire l’objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune décidées par le juge des libertés et de la détention ou par le juge d’instruction ; que, dans ce cas, ces prolongations, qui s’ajoutent à la durée de droit commun définie par l’article 63 du même code, portent à quatre-vingt-seize heures la durée maximale de la garde à vue ; que cet article permet également que l’intervention de l’avocat soit différée pendant une durée maximale de quarante-huit heures, en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes ; que ce report est décidé par le juge d’instruction lorsque la garde à vue est mise en œuvre au cours d’une information judiciaire ; que, dans les autres cas, il est décidé par le procureur de la République pour la première prolongation et par le juge des libertés et de la détention pour la seconde ; 13. Considérant que l’escroquerie est un délit contre les biens défini par l’article 313-1 du code pénal comme « le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge » ; que, même lorsqu’il est commis en bande organisée, le délit d’escroquerie n’est pas susceptible de porter atteinte en lui-même à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes ; qu’en permettant de recourir à la garde à vue selon les modalités fixées par l’article 706-88 du code de procédure pénale au cours des enquêtes ou des instructions portant sur ce délit, le législateur a permis qu’il soit porté à la liberté individuelle et aux droits de la défense une atteinte qui ne peut être regardée comme proportionnée au but poursuivi ; que, par suite, le 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale méconnaît ces exigences constitutionnelles et doit être déclaré contraire à la Constitution ; - SUR LES CONSÉQUENCES DE L’ADOPTION DE LA LOI DU 27 MAI 2014 SUSVISEE : 14. Considérant que, selon le Premier ministre, la modification apportée à l’article 706-88 du code de procédure pénale par la loi du 27 mai 2014 susvisée a mis fin à l’inconstitutionnalité dénoncée par les requérants de sorte qu’il n’y aurait en tout état de cause pas lieu d’abroger les dispositions déclarées contraires à la Constitution ; 15. Considérant que l’article 4 de la loi du 27 mai 2014 susvisée a complété l’article 706-88 du code de procédure pénale par un alinéa aux termes duquel : « Le présent article n’est pas applicable au délit prévu au 8° bis de l’article 706-73 ou, lorsqu’elles concernent ce délit, aux infractions mentionnées aux 14° à 16° du même article. Toutefois, à titre exceptionnel, il peut être appliqué si les faits ont été commis dans des conditions portant atteinte à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes ou aux intérêts fondamentaux de la nation définis à l’article 410-1 du code pénal ou si l’un des faits constitutifs de l’infraction a été commis hors du territoire national, dès lors que la poursuite ou la réalisation des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité rend indispensable, en raison de leur complexité, la prolongation de la garde à vue. Les ordonnances prolongeant la garde à vue sont prises par le juge des libertés et de la détention, sur requête du procureur de la République ou du juge d’instruction. Elles sont spécialement motivées et font référence aux éléments de fait justifiant que les conditions prévues au présent alinéa sont réunies. Les sixième et septième alinéas du présent article ne sont pas applicables » ; 16. Considérant que ni les éléments constitutifs du délit d’escroquerie ni les circonstances aggravantes de ce délit ne font référence à des faits d’atteinte à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes ; que le fait d’obtenir la remise de fonds, de valeur ou d’un bien quelconque par violence ou menace est qualifié par ailleurs d’extorsion ; qu’en permettant le recours à la garde à vue dans les conditions prévues par l’article 706-88 du code de procédure pénale pour des faits d’escroquerie en bande organisée lorsque les faits ont été commis dans des conditions portant atteinte à la sécurité, à la dignité ou à la vie des personnes ou « aux intérêts fondamentaux de la nation définis à l’article 410-1 du code pénal » ou si l’un des faits constitutifs de l’infraction a été commis hors du territoire national, les dispositions ajoutées à l’article 706-88 du code de procédure pénale par la loi du 27 mai 2014 n’ont pas mis fin à l’inconstitutionnalité du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale ; - SUR LES EFFETS DANS LE TEMPS DE LA DECLARATION D’INCONSTITUTIONNALITE DU 8° BIS DE L’ARTICLE 706-73 DU CODE DE PROCEDURE PENALE : 17. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d’inconstitutionnalité doit bénéficier à l’auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l’article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l’abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l’intervention de cette déclaration ; 18. Considérant que l’inscription d’un crime ou d’un délit dans la liste des infractions visées par l’article 706-73 du code de procédure pénale a également pour effet de permettre le recours à ceux des pouvoirs spéciaux d’enquête ou d’instruction prévus par le titre XXV du livre IV du code de procédure pénale qui sont applicables à toutes les infractions visées par l’article 706-73 ; que, par suite, l’appréciation des effets dans le temps de la déclaration d’inconstitutionnalité du 8° bis de l’article 706-73 requiert d’apprécier également la conformité à la Constitution du recours à ces pouvoirs spéciaux d’enquête ou d’instruction ; 19. Considérant que l’article 706-80 du code de procédure pénale permet que, sauf opposition du procureur de la République préalablement informé, la compétence des officiers de police judiciaire et des agents de police judiciaire soit étendue à l’ensemble du territoire national pour la surveillance des personnes suspectées d’avoir commis certaines infractions ; que les articles 706-81 à 706-87 permettent au procureur de la République ou au juge d’instruction, lorsque les nécessités de l’enquête ou de l’instruction le justifient, d’autoriser l’organisation d’une opération d’infiltration d’un officier ou d’un agent de police judiciaire consistant « à surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs » ; 20. Considérant que les articles 706-89 à 706-94 fixent les conditions dans lesquelles, au cours d’une enquête préliminaire, d’une enquête de flagrance ou d’une instruction préparatoire, le juge des libertés et de la détention ou le juge d’instruction peut autoriser les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction en dehors des heures prévues par l’article 59 ; 21. Considérant que l’article 706-95 prévoit que, si les nécessités de l’enquête de flagrance ou de l’enquête préliminaire le justifient, le juge des libertés et de la détention peut autoriser l’interception, l’enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications ; 22. Considérant que les articles 706-96 à 706-102-9 prévoient que, lorsque les nécessités de l’information l’exigent, le juge d’instruction peut autoriser par ordonnance motivée la mise en place, sous son autorité et son contrôle, d’une part, d’un « dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, la captation, la fixation, la transmission et l’enregistrement de paroles prononcées par une ou plusieurs personnes à titre privé ou confidentiel, dans des lieux ou véhicules privés ou publics, ou de l’image d’une ou plusieurs personnes se trouvant dans un lieu privé » et, d’autre part, d’un « dispositif technique ayant pour objet, sans le consentement des intéressés, d’accéder, en tous lieux, à des données informatiques, de les enregistrer, les conserver et les transmettre, telles qu’elles s’affichent sur un écran pour l’utilisateur d’un système de traitement automatisé de données ou telles qu’il les y introduit par saisie de caractères » ; 23. Considérant que l’article 706-103 prévoit qu’au cours de l’information, le juge des libertés et de la détention peut, afin de garantir le paiement des amendes encourues ainsi que, le cas échéant, l’indemnisation des victimes, ordonner des mesures conservatoires sur les biens, meubles ou immeubles, divis ou indivis, de la personne mise en examen ; 24. Considérant qu’en permettant le recours à ces pouvoirs spéciaux d’enquête et d’instruction pour les délits d’escroquerie commis en bande organisée, le législateur a estimé que la difficulté d’appréhender les auteurs de ces infractions tient à l’existence d’un groupement ou d’un réseau dont l’identification, la connaissance et le démantèlement posent des problèmes complexes ; qu’eu égard à la gravité du délit d’escroquerie en bande organisée, le législateur a pu, à cette fin, fixer des règles spéciales de surveillance et d’investigation dans les enquêtes et les instructions portant sur une telle infraction ; que, compte tenu des garanties encadrant la mise en œuvre de ces mesures spéciales d’enquête et d’instruction, les atteintes au respect de la vie privée et au droit de propriété résultant de leur mise en œuvre ne revêtent pas un caractère disproportionné au regard du but poursuivi ; 25. Considérant, en premier lieu, que l’abrogation immédiate du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale aurait pour effet non seulement d’empêcher le recours à une garde à vue de quatre-vingt-seize heures pour des faits d’escroquerie en bande organisée, mais aussi de faire obstacle à l’usage des autres pouvoirs spéciaux de surveillance et d’investigation prévus par le titre XXV du livre IV du même code et aurait dès lors des conséquences manifestement excessives ; qu’afin de permettre au législateur de remédier à l’inconstitutionnalité du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale, il y a lieu de reporter au 1er septembre 2015 la date de cette abrogation ; 26. Considérant, en deuxième lieu, qu’afin de faire cesser l’inconstitutionnalité constatée à compter de la publication de la présente décision, il y a lieu de juger que les dispositions du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale ne sauraient être interprétées comme permettant, à compter de cette publication, pour des faits d’escroquerie en bande organisée, le recours à la garde à vue prévue par l’article 706-88 du code de procédure pénale ; 27. Considérant, en troisième lieu, que la remise en cause des actes de procédure pénale pris sur le fondement des dispositions déclarées inconstitutionnelles méconnaîtrait l’objectif de valeur constitutionnelle de recherche des auteurs d’infractions et aurait des conséquences manifestement excessives ; que, par suite, les mesures de garde à vue prises avant la publication de la présente décision et les autres mesures prises avant le 1er septembre 2015 en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité, D É C I D E : Article 1er.- Le 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 1er prend effet sous la réserve énoncée au considérant 26 et dans les conditions prévues aux considérants 25 et 27. Article 3.- Il n’y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel de statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité portant sur les cinq premiers alinéas de l’article 706-88 du code de procédure pénale. Article 4.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 9 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
CONSTIT/CONSTEXT000029641920.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 24 juillet 2014 par le Conseil d’État (décision nos 375869 et 375896 du 23 juillet 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la chambre syndicale des cochers chauffeurs CGT-taxis, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles L. 231-1 à L. 231-4 du code du tourisme, dans leur version issue de la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code du tourisme ; Vu le code des transports ; Vu la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 29 août et le 15 septembre 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour la SAS Allocab par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 29 août et 15 septembre 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour la Fédération Française de Transport de Personnes sur Réservation par Me Maxime de Guillenchmidt, avocat au barreau de Paris, enregistrées les 29 août et 15 septembre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Jérôme Rousseau, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour le syndicat requérant, Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour la société intervenante, Me Maxime de Guillenchmidt, pour la fédération intervenante et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 7 octobre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que l’article 4 de la loi du 22 juillet 2009 susvisée a donné une nouvelle rédaction du chapitre Ier du titre III du livre II du code du tourisme, intitulé « Exploitation de voitures de tourisme avec chauffeur » et comprenant les articles L. 231-1 à L. 231-4 aux termes desquels : « Art. L. 231-1 : Le présent chapitre s’applique aux entreprises qui mettent à la disposition de leur clientèle des voitures de tourisme avec chauffeur, suivant des conditions fixées à l’avance entre les parties. » ; « Art. L. 231-2 : Les entreprises mentionnées à l’article L. 231-1 doivent disposer d’une ou plusieurs voitures répondant à des conditions techniques et de confort, ainsi que d’un ou plusieurs chauffeurs titulaires du permis B et justifiant de conditions d’aptitude professionnelle définies par décret. « Elles sont immatriculées sur le registre mentionné au b de l’article L. 141-3 » ; « Art. L. 231-3 : Les voitures de tourisme avec chauffeur ne peuvent ni stationner sur la voie publique si elles n’ont pas fait l’objet d’une location préalable, ni être louées à la place. » ; « Art. L. 231-4 : Les conditions d’application du présent chapitre sont fixées par décret. » ; 2. Considérant que le syndicat requérant fait valoir que les techniques de réservation préalable au moyen de dispositifs électroniques mobiles permettent désormais de réserver une voiture avec chauffeur dans des conditions de rapidité et de simplicité qui conduisent en pratique à un empiétement sur l’activité pour laquelle les taxis jouissent d’un monopole ; que, compte tenu de la règlementation particulière à laquelle ces derniers sont seuls soumis, la possibilité d’une mise en concurrence des taxis avec les voitures de tourisme avec chauffeur porterait atteinte au principe d’égalité devant la loi ; que l’absence de règle imposant, pour les voitures de tourisme avec chauffeur, le respect d’un délai suffisant entre la réservation d’une voiture et la prise en charge du client porterait atteinte à la liberté d’entreprendre des taxis ; que l’insuffisante protection du monopole des taxis porterait atteinte au caractère patrimonial du droit de présentation de son successeur par le titulaire d’une licence de taxi et méconnaîtrait le droit de propriété ; qu’enfin, l’absence de restriction suffisante de l’activité de voiture de tourisme avec chauffeur méconnaîtrait les objectifs de sauvegarde de l’ordre public et de protection de l’environnement ; 3. Considérant que, selon la fédération intervenante, en interdisant aux voitures de tourisme avec chauffeur de « stationner sur la voie publique » sans préciser que cette interdiction ne porte que sur le stationnement dans l’attente de la clientèle, les dispositions de l’article L. 231-3 du code du tourisme portent atteinte à la liberté d’entreprendre et à la liberté d’aller et venir ; 4. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi : « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; que le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ; que si, en règle générale, ce principe impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n’en résulte pas pour autant qu’il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes ; 5. Considérant que la réglementation applicable aux taxis, définie par l’article L. 3121-1 du code des transports, repose sur un régime d’autorisation administrative ; que le propriétaire ou l’exploitant d’un taxi est titulaire, dans sa commune ou son service commun de rattachement, d’une autorisation administrative de stationnement sur la voie publique en attente de la clientèle ; que ces véhicules sont en outre dotés d’équipements spéciaux permettant la mise en œuvre d’un tarif réglementé ; 6. Considérant que les dispositions contestées du code du tourisme fixent les règles applicables à l’exploitation de voitures de tourisme avec chauffeur « suivant des conditions fixées à l’avance entre les parties » ; que cette activité est soumise à un régime d’immatriculation ; que le tarif des transports n’est pas réglementé ; que ces voitures ne peuvent ni stationner sur la voie publique si elles n’ont pas fait l’objet d’une location préalable ni être louées à la place ; 7. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que le législateur a distingué, d’une part, l’activité consistant à stationner et à circuler sur la voie publique en quête de clients en vue de leur transport et, d’autre part, l’activité de transport individuel de personnes sur réservation préalable ; que, poursuivant des objectifs d’ordre public, notamment de police de la circulation et du stationnement sur la voie publique, le législateur a réservé la première activité aux taxis qui l’exercent dans un cadre réglementé particulier ; que la seconde activité peut être exercée non seulement par les taxis mais également par d’autres professions, notamment celle de voitures de tourisme avec chauffeur ; que le principe d’égalité n’imposait pas que les taxis et les voitures de tourisme avec chauffeur soient traités différemment au regard de cette seconde activité ; que le droit reconnu par les dispositions contestées aux voitures de tourisme avec chauffeur d’exercer l’activité de transport public de personnes sur réservation préalable ne porte aucune atteinte au principe d’égalité devant la loi ; 8. Considérant, en deuxième lieu, que la liberté d’entreprendre découle de l’article 4 de la Déclaration de 1789 ; qu’il est loisible au législateur d’apporter à cette liberté des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi ; 9. Considérant que le droit reconnu par les dispositions contestées aux voitures de tourisme avec chauffeur d’exercer l’activité de transport public de personnes sur réservation préalable ne porte aucune atteinte à la liberté d’entreprendre des taxis ; 10. Considérant qu’en réservant aux taxis le droit de stationner et de circuler sur la voie publique « en quête de clients », le législateur n’a pas porté à la liberté d’entreprendre ou à la liberté d’aller et venir des voitures de tourisme avec chauffeur une atteinte disproportionnée au regard des objectifs d’ordre public poursuivis ; 11. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions contestées n’autorisent pas les voitures de tourisme avec chauffeur à stationner ou circuler sur la voie publique en quête de clients ; que, par suite, en tout état de cause, le grief tiré de l’atteinte au monopole des chauffeurs de taxis manque en fait ; 12. Considérant, en quatrième lieu, que l’objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l’ordre public ne peut, en lui-même, être invoqué à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution ; 13. Considérant, en cinquième lieu, qu’en vertu de l’article 1er de la Charte de l’environnement, « chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé » ; que le droit reconnu, par les dispositions contestées, aux voitures de tourisme avec chauffeur d’exercer l’activité de transport public de personnes sur réservation préalable ne méconnaît pas les exigences qui résultent de ces dispositions ; 14. Considérant que les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; qu’elles doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les articles L. 231-1 à L. 231-4 du code du tourisme, dans leur version issue de la loi n° 2009-888 du 22 juillet 2009 de développement et de modernisation des services touristiques sont conformes à la Constitution. Article 2. - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 17 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029641922.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 3 octobre 2014 d'une requête présentée par Mme Lydia SCHENARDI, demeurant à Grasse (Alpes-Maritimes), tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 28 septembre 2014 dans le département des Alpes-Maritimes en vue de la désignation de cinq sénateurs. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment son article 59 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article 38 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958, « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l'élection » ; 2. Considérant que la requête présentée par Mme SCHENARDI invoque exclusivement la nullité des bulletins de vote, d'une part, de la liste présentée par l'Union pour un Mouvement Populaire et l'Union des Démocrates Indépendants et, d'autre part, de la liste présentée par Europe Ecologie les Verts au motif que lesdits bulletins ne comportaient pas une « désignation suffisante » au sens de l'article L. 66 du code électoral ; 3. Considérant que la prise en compte de bulletins de vote ne mentionnant ni la nature de l'élection ni la date du scrutin ne méconnaît pas les exigences de l'article L. 66 du code électoral ; que le grief unique de la requérante est manifestement infondé ; que, par suite, sa requête doit être rejetée, D É C I D E : Article 1er.- La requête de Mme Lydia SCHENARDI est rejetée. Article 2.- La présente décision sera notifiée au président du Sénat et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 17 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029641923.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 6 octobre 2014 d'une requête présentée pour M. Jean-Paul LEONHARDT, demeurant à Hoenheim (Bas-Rhin) par Me André Kornmann, avocat au barreau de Strasbourg, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 28 septembre 2014 dans ce département en vue de la désignation de cinq sénateurs. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment son article 59 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 38 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 : « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l'élection » ; que le deuxième alinéa de l'article 35 dispose : « Le requérant doit annexer à la requête les pièces produites au soutien de ses moyens. Le Conseil peut lui accorder exceptionnellement un délai pour la production d'une partie de ces pièces. » ; 2. Considérant que les affirmations du requérant selon lesquelles les services de l'État ainsi qu'un candidat auraient porté atteinte à la neutralité des opérations électorales ne sont assorties d'aucun commencement de preuve ; que la circonstance que quarante-et-un électeurs n'ont pas pris part au vote n'est pas de nature à entacher la régularité du scrutin ; que l'affirmation selon laquelle « il conviendra d'analyser très en détail le compte de campagne de la liste UMP » ne constitue pas un grief ; que, par suite, la requête de M. LEONHARDT doit être rejetée, D É C I D E : Article 1er.- La requête de M. Jean-Paul LEONHARDT est rejetée. Article 2.- La présente décision sera notifiée au président du Sénat et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 17 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029641912.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 juillet 2014 par le président de la Polynésie française, dans les conditions prévues par l'article 12 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, d'une demande tendant à ce qu'il constate que sont intervenues dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française « certaines dispositions de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal et plus précisément : « - du I de l'article 6, en tant qu'il s'applique aux documents produits ou reçus par les administrations de la Polynésie française, de ses établissements publics ou des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé par elle chargées d'une mission de service public ; « - du deuxième alinéa du III de l'article 6 ; « - de l'article 7, sauf le renvoi auquel il procède vers l'article 6 ; « - des articles 8 à 12 et 14 à 25 ; « - de l'article 13, à l'exception du renvoi opéré en son second alinéa vers la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ; « - du I de l'article 59, en tant qu'il rend la loi applicable en Polynésie française ». LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment ses articles 74 et 74-1 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ; Vu la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal ; Vu l'ordonnance n° 2009-536 du 14 mai 2009 portant diverses dispositions d'adaptation du droit outre-mer, notamment son article 27 ; Vu la loi n° 2009-970 du 3 août 2009 relative à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et portant ratification d'ordonnances, notamment son article 10 ; Vu les observations du président de l'assemblée de la Polynésie française, enregistrées le 4 septembre 2014 ; Vu les observations du Premier ministre, enregistrées le 4 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004 susvisée, pris en application du neuvième alinéa de l'article 74 de la Constitution : « Lorsque le Conseil constitutionnel a constaté qu'une loi promulguée postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi organique est intervenue dans les matières ressortissant à la compétence de la Polynésie française, en tant qu'elle s'applique à cette dernière, cette loi peut être modifiée ou abrogée par l'assemblée de la Polynésie française » ; que le président de la Polynésie française demande au Conseil constitutionnel de constater que « certaines dispositions de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal et plus précisément du I de l'article 6, en tant qu'il s'applique aux documents produits ou reçus par les administrations de la Polynésie française, de ses établissements publics ou des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé par elle chargées d'une mission de service public, du deuxième alinéa du III de l'article 6, de l'article 7, sauf le renvoi auquel il procède vers l'article 6, des articles 8 à 12 et 14 à 25, de l'article 13, à l'exception du renvoi opéré en son second alinéa vers la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 et du I de l'article 59, en tant qu'il rend la loi applicable en Polynésie française » sont intervenues dans une matière relevant de la compétence de cette collectivité d'outre-mer ; 2. Considérant que l'article 27 de l'ordonnance du 14 mai 2009 susvisée a donné une nouvelle rédaction de l'article 59 de la loi du 17 juillet 1978 susvisée ; que cet article 59 est relatif à l'application de cette loi dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie ; que la demande du président de la Polynésie française ne porte que sur l'application à la Polynésie française des dispositions du paragraphe I et du deuxième alinéa du paragraphe III de l'article 6, des premier, deuxième et quatrième alinéa de l'article 7, des articles 8 à 12, du premier alinéa de l'article 13 et des articles 14 à 25 de la loi du 17 juillet 1978 qui y sont applicables en vertu du paragraphe I de l'article 59 ; que, par suite, la demande du président de la Polynésie française porte sur les mots « , en Polynésie française », figurant au paragraphe I de cet article 59 en tant qu'ils rendent applicables à la Polynésie française ces dispositions de la loi du 17 juillet 1978 ; 3. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu de l'article 7 de la loi organique du 27 février 2004, sont applicables de plein droit en Polynésie française les dispositions législatives et réglementaires qui sont relatives « aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de l'État et de ses établissements publics ou avec celles des communes et de leurs établissements publics » ; que les règles d'accès aux documents administratifs et de réutilisation des informations publiques relèvent des droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ; qu'il en résulte qu'en Polynésie française, les dispositions de la loi du 17 juillet 1978 susvisée s'appliquent de plein droit aux règles d'accès aux documents administratifs de l'État, des communes et de leurs établissements publics, des personnes publiques créées par eux ou des personnes de droit privé chargés par eux d'une mission de service public ; que, par suite, les dispositions de l'article 59 de la loi du 17 juillet 1978 qui rendent cette loi applicable « en Polynésie française » n'ont pas d'autre objet que de la rendre applicable aux documents administratifs de la Polynésie française, de ses établissements publics et des personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public ; 4. Considérant, en second lieu, d'une part, que l'article 74 de la Constitution réserve à l'État la compétence dans les matières énumérées au quatrième alinéa de son article 73 ; que parmi ces matières figurent les « garanties des libertés publiques » ; qu'en vertu des dispositions du 2° de l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004, qui reprend ces dispositions, les autorités de l'État sont compétentes en matière de « garanties des libertés publiques » ; que les règles relatives à l'étendue du droit des citoyens d'obtenir communication des documents administratifs mettent en cause les garanties des libertés publiques ; qu'il en résulte qu'il appartient à l'État de fixer les règles relatives à l'étendue de l'obligation de communication des documents administratifs de la Polynésie française, de ses établissements publics, des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public ; 5. Considérant que les dispositions des articles 6 et 7 de la loi du 17 juillet 1978 sont relatives à l'étendue de cette obligation de communication ; que, par suite, en rendant le paragraphe I et le deuxième alinéa du paragraphe III de l'article 6 et les premier, deuxième et quatrième alinéas de l'article 7 de cette loi applicables aux actes de la Polynésie française, de ses établissements publics, des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public, le législateur n'est pas intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française ; 6. Considérant d'autre part, que l'article 13 de la loi organique du 27 février 2004 dispose : « Les autorités de la Polynésie française sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'État par l'article 14 et celles qui ne sont pas dévolues aux communes en vertu des lois et règlements applicables en Polynésie française » ; que les droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration de la Polynésie française, de ses établissements publics et des personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public ne figurent pas au nombre des matières énumérées par l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 ; que les dispositions des articles 8 et 9 ainsi que celles des chapitres II, III et IV du titre Ier de la loi du 17 juillet 1978 sont relatives aux modalités et aux conditions dans lesquelles s'exerce le droit d'accès aux documents administratifs et aux règles de réutilisation des informations publiques ; qu'ainsi, en rendant ces dispositions applicables aux documents administratifs de la Polynésie française, de ses établissements publics et des personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public, le législateur est intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française, D É C I D E : Article 1er.- Les mots « , en Polynésie française », figurant au paragraphe I de l'article 59 de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal, en tant qu'ils rendent applicables à la Polynésie française les dispositions du paragraphe I et du deuxième alinéa du paragraphe III de l'article 6 et des premier, deuxième et quatrième alinéas de l'article 7 de cette même loi, ne sont pas intervenus dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française. Article 2.- Les mots « , en Polynésie française », figurant au paragraphe I de l'article 59 de cette même loi, en tant qu'ils rendent applicables à la Polynésie française les dispositions des articles 8 à 12, du premier alinéa de l'article 13 et des articles 14 à 25 de cette même loi, sont intervenus dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
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LE PRÉSIDENT DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son titre VII ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la lettre du Vice-Président du Conseil d’Etat en date du 1er octobre 2014 ; Vu la lettre du Premier président de la Cour des comptes en date du 17 octobre 2014 ; En application de la délibération du Conseil constitutionnel en date du 23 octobre 2014, D É C I D E : Article 1er.- Sont nommés rapporteurs adjoints auprès du Conseil constitutionnel pour la période octobre 2014-octobre 2015 : Mesdames Béatrice BOURGEOIS-MACHUREAU, Emmanuelle CORTOT-BOUCHER, Monsieur Bertrand DACOSTA, Mesdames Gaëlle DUMORTIER et Nathalie ESCAUT, maîtres des requêtes au Conseil d’Etat, ainsi que Messieurs Frédéric ANGERMANN, Laurent MICHELET, Madame Loguivy ROCHE, Messieurs Jean-Louis SCIACALUGA et Jean-François TRICAUD, conseillers référendaires à la Cour des comptes. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Fait à Paris, le 23 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029641914.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 26 juin 2014 par la Cour de cassation (deuxième chambre civile, arrêt n° 1356 du 26 juin 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société Assurances du Crédit mutuel, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 191-4 du code des assurances. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code des assurances ; Vu la loi d'Empire du 30 mai 1908 sur le contrat d'assurance (Reichsgezetz über den Versicherungsvertrag) ; Vu la loi du 1er juin 1924 mettant en vigueur la législation civile française dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; Vu la loi du 1er juin 1924 portant introduction des lois commerciales françaises dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; Vu la loi n° 91-412 du 6 mai 1991 introduisant dans le code des assurances des dispositions particulières aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations en intervention produites par l'Institut du droit local alsacien-mosellan, enregistrées les 17 juillet et 1er août 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 18 juillet 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me David Gaschignard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la société requérante, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 16 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que les articles L. 113-8 et L. 113-9 du code des assurances prévoient des sanctions lorsque les déclarations de l'assuré ne correspondent pas à la réalité de l'objet assuré ; qu'en vertu de l'article L. 113-8, l'assuré qui a omis de déclarer certains éléments lors de la conclusion du contrat d'assurance s'expose à la nullité du contrat s'il a agi de mauvaise foi ; qu'en vertu de l'article L. 113-9, l'omission ou la déclaration inexacte de la part de l'assuré dont la mauvaise foi n'est pas établie n'entraîne pas la nullité du contrat d'assurance ; que, dans le cas où la constatation d'une omission ou d'une inexactitude n'a lieu qu'après un sinistre, l'indemnité est réduite en proportion du taux des primes payées par rapport au taux des primes qui auraient été dues si les risques avaient été complètement et exactement déclarés ; 2. Considérant que les dispositions contestées de l'article L. 191-4 du même code fixent des règles particulières applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; qu'aux termes de cet article : « Il n'y a pas lieu à résiliation ni à réduction par application de l'article L. 113-9 si le risque omis ou dénaturé était connu de l'assureur ou s'il ne modifie pas l'étendue de ses obligations ou s'il est demeuré sans incidence sur la réalisation du sinistre » ; 3. Considérant que, selon la société requérante, ces dispositions instituent une règle dérogatoire à la règle fixée à l'article L. 113-9 du code des assurances relative à la réduction proportionnelle des indemnités d'assurances en cas d'omission ou de déclaration inexacte de l'assuré ; que, dans la mesure où la dérogation au droit commun aurait été aggravée par la loi du 6 mai 1991 susvisée, les différences de traitement en résultant porteraient atteinte au principe d'égalité devant la loi tel qu'il est garanti par l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; 4. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789 : « la loi... doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 5. Considérant, d'autre part, que la législation républicaine antérieure à l'entrée en vigueur de la Constitution de 1946 a consacré le principe selon lequel, tant qu'elles n'ont pas été remplacées par les dispositions de droit commun ou harmonisées avec elles, des dispositions législatives et réglementaires particulières aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle peuvent demeurer en vigueur ; qu'à défaut de leur abrogation ou de leur harmonisation avec le droit commun, ces dispositions particulières ne peuvent être aménagées que dans la mesure où les différences de traitement qui en résultent ne sont pas accrues et que leur champ d'application n'est pas élargi ; que telle est la portée du principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de dispositions particulières applicables dans les trois départements dont il s'agit ; que ce principe doit aussi être concilié avec les autres exigences constitutionnelles ; 6. Considérant que l'existence de règles particulières applicables au contrat d'assurance dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle trouve son origine dans la loi d'Empire du 30 mai 1908 susvisée ; que cette loi est au nombre des règles particulières antérieures à 1919 qui ont été maintenues en vigueur dans ces départements par les lois du 1er juin 1924 susvisées ; 7. Considérant, toutefois, que l'état du droit résultant de cette loi du 30 mai 1908 prévoyait que l'assuré ayant omis d'informer son assureur, ou ayant souscrit, sans mauvaise foi, une déclaration inexacte ou incomplète, pouvait néanmoins bénéficier des prestations d'assurance en cas de sinistre, soit si le risque omis ou dénaturé était effectivement connu de l'assureur, soit si ce risque n'avait pas influé sur la cause et la survenance du sinistre et n'avait pas modifié l'étendue de la prestation de l'assureur ; 8. Considérant que la loi du 6 mai 1991 a abrogé les dispositions de la loi du 30 mai 1908 et a introduit dans le code des assurances des dispositions particulières applicables dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ; qu'il ressort de l'article L. 191-4 que l'assuré ayant omis d'informer son assureur, ou ayant fait une déclaration inexacte ou incomplète, peut bénéficier des prestations d'assurance en cas de sinistre, soit lorsque le risque omis ou dénaturé était connu de l'assureur, soit lorsqu'il ne modifie pas l'étendue des obligations de l'assureur, soit lorsqu'il est demeuré sans incidence sur la réalisation du sinistre ; 9. Considérant qu'en aménageant, postérieurement à l'entrée en vigueur de la Constitution de 1946, les dispositions de droit local issues de la loi du 30 mai 1908, la loi du 6 mai 1991 a accru, par les dispositions contestées, la différence de traitement résultant de l'application de règles particulières dans les départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle ; qu'il s'ensuit que le principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de dispositions particulières applicables dans ces trois départements ne saurait faire obstacle à l'examen du grief tiré de ce que cette différence méconnaît le principe d'égalité devant la loi ; que cette différence entre les dispositions législatives relatives au contrat d'assurance n'est justifiée ni par une différence de situation ni par un motif d'intérêt général en rapport direct avec l'objet de la loi ; qu'elle méconnaît le principe d'égalité ; qu'il s'ensuit que l'article L. 191-4 du code des assurances doit être déclaré contraire à la Constitution ; 10. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 11. Considérant que l'abrogation de l'article L. 191-4 du code des assurances prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date, D É C I D E : Article 1er.- L'article L. 191-4 du code des assurances est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées au considérant 11. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 septembre 2014, où siégeaient : M. Jacques BARROT exerçant les fonctions de Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 26 septembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 27 juin 2014 par la Cour de cassation (chambre commerciale, arrêt n° 784 du 27 juin 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. François F., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du premier alinéa de l'article L. 651-2 du code de commerce dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 portant réforme du droit des entreprises en difficulté. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de commerce ; Vu l'ordonnance n° 2008-1345 du 18 décembre 2008 portant réforme du droit des entreprises en difficulté ; Vu la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d'allègement des procédures, notamment le 31° de son article 138 ; Vu l'arrêt de la Cour de cassation (chambre commerciale n° 08-21906) du 15 décembre 2009 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour M. Frédéric Torelli pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société de Négoce et d'intermédiation commerciale, partie en défense, par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 21 juillet 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 21 juillet 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Vu la lettre du 4 septembre 2014 par laquelle le Conseil constitutionnel a soumis aux parties un grief susceptible d'être soulevé d'office ; Me Frédéric Rocheteau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le requérant, Me Guillaume Hannotin, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la partie en défense, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 16 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 651-2 du code de commerce : « Lorsque la liquidation judiciaire d'une personne morale fait apparaître une insuffisance d'actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d'actif, décider que le montant de cette insuffisance d'actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d'entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables » ; 2. Considérant que, selon le requérant, le pouvoir laissé au juge d'apprécier entièrement les conséquences de la faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif méconnait le principe de responsabilité ainsi que le principe d'égalité devant la loi ; qu'en outre, en application de l'article 7 du règlement du 4 février 2010 susvisé, le Conseil constitutionnel a soulevé d'office le grief tiré de ce que, en s'abstenant d'encadrer les cas et conditions dans lesquels le juge peut décider, soit de faire supporter à un dirigeant dont la faute de gestion a contribué à l'insuffisance d'actif de l'entreprise tout ou partie du montant de cette insuffisance d'actif, soit au contraire de l'en exonérer, le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence dans des conditions portant atteinte au droit de propriété, à la liberté d'entreprendre et au principe de responsabilité ; 3. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; que la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit ; 4. Considérant qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution, la loi détermine les principes fondamentaux des obligations civiles et commerciales ; qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution, en particulier son article 34, sans reporter sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n'a été confiée par la Constitution qu'à la loi ; 5. Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'en principe tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; que la faculté d'agir en responsabilité met en oeuvre cette exigence constitutionnelle ; que, toutefois, cette dernière ne fait pas obstacle à ce que le législateur aménage, pour un motif d'intérêt général, les conditions dans lesquelles la responsabilité peut être engagée ; qu'il peut ainsi, pour un tel motif, apporter à ce principe des exclusions ou des limitations à condition qu'il n'en résulte une atteinte disproportionnée ni aux droits des victimes d'actes fautifs ni au droit à un recours juridictionnel effectif qui découle de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ; 6. Considérant que l'article 6 de la Déclaration de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 7. Considérant que les articles L. 651-1 à L. 651-4 du code de commerce sont relatifs à l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif d'une entreprise en liquidation judiciaire ; que cette action vise les dirigeants de droit ou de fait d'une personne morale, ainsi que les personnes physiques représentants permanents de ces dirigeants personnes morales et les entrepreneurs individuels à responsabilité limitée ; qu'elle ne peut être ouverte que lorsque la liquidation de la personne morale a été prononcée et fait apparaître une insuffisance d'actif ; que la condamnation ne peut excéder le montant de celle-ci ; que, selon le troisième alinéa de l'article L. 651-2, les sommes versées par les dirigeants ou l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée entrent dans le patrimoine du débiteur et sont réparties au prorata entre tous les créanciers ; que l'article L. 651-4 permet au tribunal d'obtenir, pour l'application de l'article L. 651-2, toutes informations sur la situation patrimoniale du dirigeant ou de l'entrepreneur individuel à responsabilité limitée ; 8. Considérant que, selon les dispositions contestées, la responsabilité des dirigeants d'une entreprise en liquidation est engagée lorsqu'est établie contre eux une faute de gestion ayant contribué à l'insuffisance d'actif ; que, lorsque ces conditions sont réunies, le tribunal peut décider que l'insuffisance d'actif sera supportée, en tout ou partie, par tous les dirigeants ou par certains d'entre eux ayant contribué à la faute de gestion et, en cas de pluralité de ceux-ci, de les déclarer solidairement responsables ; 9. Considérant qu'en permettant au tribunal d'exonérer en tout ou partie les dirigeants fautifs de la charge de l'insuffisance d'actif, le législateur a entendu prendre en compte, d'une part, la gravité et le nombre des fautes de gestion retenues contre eux et l'état de leur patrimoine et, d'autre part, les facteurs économiques qui peuvent conduire à la défaillance des entreprises ainsi que les risques inhérents à leur exploitation ; que ces aménagements aux conditions dans lesquelles le dirigeant responsable d'une insuffisance d'actif peut voir sa responsabilité engagée répondent à l'objectif d'intérêt général de favoriser la création et le développement des entreprises ; 10. Considérant qu'il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation, que le montant des sommes au versement desquelles les dirigeants sont condamnés doit être proportionné au nombre et à la gravité des fautes de gestion qu'ils ont commises ; que la décision relative à l'indemnisation est prise à l'issue d'une procédure contradictoire et justifiée par des motifs appropriés soumis au contrôle de la Cour de cassation ; 11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que, d'une part, les dispositions contestées n'ont pas pour effet de conférer à la juridiction saisie un pouvoir arbitraire dans la mise en oeuvre de l'action en responsabilité pour insuffisance d'actif ; que, d'autre part, les limitations apportées par ces dispositions au principe selon lequel tout fait quelconque de l'homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer sont en adéquation avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que ces dispositions ne portent pas d'atteinte disproportionnée aux droits des victimes d'actes fautifs ni au droit à un recours juridictionnel effectif ; que les différences de traitement entre dirigeants qui en résultent sont en rapport direct avec l'objet de la loi ; que, par suite, les griefs tirés de ce que ces dispositions seraient contraires aux articles 4, 6 et 16 de la Déclaration de 1789 doivent être écartés ; 12. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Le premier alinéa de l'article L. 651-2 du code de commerce est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 26 septembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 juillet 2014 par le Conseil d’État (décision n° 380406 du 16 juillet 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société SGI, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 1756 quater du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code général des impôts ; Vu la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la société requérante par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 6 et 11 août 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 7 août 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Louis Boré, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour la société requérante, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 23 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 1756 quater du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi du 21 juillet 2003 susvisée : « Lorsqu’il est établi qu’une personne a fourni volontairement de fausses informations ou n’a pas respecté les engagements qu’elle avait pris envers l’administration permettant d’obtenir pour autrui les avantages fiscaux prévus par les articles 199 undecies A, 199 undecies B, 217 undecies et 217 duodecies, elle est redevable d’une amende fiscale égale au montant de l’avantage fiscal indûment obtenu, sans préjudice des sanctions de droit commun. Il en est de même, dans le cas où un agrément n’est pas exigé, pour la personne qui s’est livrée à des agissements, manœuvres ou dissimulations ayant conduit à la remise en cause de ces aides pour autrui » ; 2. Considérant que la société requérante soutient à titre principal que, l’amende prévue par les dispositions contestées ne constituant pas une sanction ayant le caractère d’une punition, elle méconnaît le droit de propriété et le principe d’égalité devant les charges publiques ; qu’elle soutient à titre subsidiaire, si la qualification de sanction ayant le caractère d’une punition était retenue, que les dispositions contestées portent atteinte aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines ; - SUR LES NORMES DE CONSTITUTIONNALITÉ APPLICABLES : 3. Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que les principes énoncés par cet article s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition ; 4. Considérant que les articles 199 undecies A, 199 undecies B, 217 undecies et 217 duodecies du code général des impôts prévoient des avantages fiscaux pour les contribuables qui réalisent certains investissements outre-mer ; que le bénéfice de ces avantages fiscaux est, dans certains cas, subordonné à l’obtention d’un agrément ; que, si l’avantage fiscal apparaît finalement indu, l’administration peut exiger du contribuable son remboursement intégral ; 5. Considérant que les dispositions contestées prévoient une amende pour la personne qui a contribué à l’obtention par un tiers d’un avantage fiscal indu sur le fondement des articles 199 undecies A, 199 undecies B, 217 undecies et 217 duodecies du code général des impôts ; que la première phrase de l’article 1756 quater est relative aux investissements subordonnés à l’obtention d’un agrément ; qu’elle prévoit dans ce cas l’amende fiscale encourue par la personne qui a fourni volontairement de fausses informations ou qui n’a pas respecté les engagements qu’elle avait pris envers l’administration ; que la seconde phrase de l’article 1756 quater est relative aux investissements non subordonnés à l’obtention d’un agrément ; qu’elle prévoit dans ce cas l’amende fiscale encourue par la personne qui s’est livrée à des agissements, manœuvres ou dissimulations ayant conduit à la remise en cause de ces aides pour autrui ; qu’en toute hypothèse, cette amende fiscale est égale au montant de l’avantage fiscal indûment obtenu, sans préjudice des sanctions de droit commun ; 6. Considérant que cette amende fiscale, qui tend à réprimer les agissements des personnes ayant contribué à l’obtention, par un tiers, d’un avantage fiscal indu, a le caractère d’une punition ; que, par suite, les griefs tirés d’une atteinte au droit de propriété et au principe d’égalité devant les charges publiques sont inopérants ; qu’il appartient au Conseil constitutionnel d’examiner la conformité des dispositions contestées aux exigences qui résultent de l’article 8 de la Déclaration de 1789 ; - SUR LA CONFORMITÉ DES DISPOSITIONS CONTESTEÉS AUX DROITS ET LIBERTÉS QUE LA CONSTITUTION GARANTIT : 7. Considérant, en second lieu, que l’article 61-1 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité des dispositions législatives soumises à son examen aux droits et libertés que la Constitution garantit ; que, si la nécessité des peines attachées aux infractions relève du pouvoir d’appréciation du législateur, il incombe au Conseil constitutionnel de s’assurer de l’absence de disproportion manifeste entre l’infraction et la peine encourue ; qu’en outre, le principe d’individualisation des peines qui découle de l’article 8 de la Déclaration de 1789 implique que l’amende, lorsqu’elle constitue une sanction ayant le caractère d’une punition, ne puisse être appliquée que si l’administration, sous le contrôle du juge, l’a expressément prononcée en tenant compte des circonstances propres à chaque espèce ; qu’il ne saurait toutefois interdire au législateur de fixer des règles assurant une répression effective des infractions ; 8. Considérant qu’en fixant l’amende en lien avec l’avantage fiscal indûment obtenu, le législateur a entendu favoriser les investissements réalisés outre-mer en garantissant leur sécurité, tout en poursuivant un but de lutte contre la fraude fiscale qui constitue un objectif de valeur constitutionnelle ; qu’en prévoyant que le montant de l’amende fiscale est fixé en proportion de l’importance des sommes indûment obtenues, il a proportionné le montant de cette amende à la gravité des manquements réprimés ; que le taux de 100 % retenu n’est pas manifestement disproportionné ; 9. Considérant, toutefois, que l’amende prévue par l’article 1756 quater peut être appliquée soit si la personne a fourni « volontairement » de fausses informations, soit si elle « n’a pas respecté les engagements qu’elle avait pris envers l’administration », soit, dans le cas où un agrément n’est pas exigé, si elle s’est livrée à des agissements, manœuvres ou dissimulations ayant conduit à la remise en cause de ces aides pour autrui ; que, compte tenu des modalités de fixation de son montant en proportion de l’avantage obtenu par un tiers, cette amende pourrait revêtir un caractère manifestement hors de proportion avec la gravité des manquements réprimés si elle était appliquée sans que soit établi l’élément intentionnel de ces manquements ; que, par suite, les dispositions contestées doivent être interprétées comme prévoyant une amende applicable aux personnes qui ont agi sciemment et dans la connaissance soit du caractère erroné des informations qu’elles ont fournies, soit de la violation des engagements qu’elles avaient pris envers l’administration, soit des agissements, manœuvres ou dissimulations précités ; 10. Considérant que, d’autre part, l’amende prévue par l’article 1756 quater du code général des impôts s’applique « sans préjudice des sanctions de droit commun » ; que le principe d’un tel cumul de sanctions n’est pas, en lui-même, contraire au principe de proportionnalité des peines garanti par l’article 8 de la Déclaration de 1789 ; que, toutefois, lorsque deux sanctions prononcées pour un même fait sont susceptibles de se cumuler, le principe de proportionnalité implique qu’en tout état de cause, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues ; qu’il appartient donc aux autorités administratives et judiciaires compétentes de veiller au respect de cette exigence ; que, sous ces réserves, le grief tiré de la méconnaissance de l’article 8 de la Déclaration de 1789 doit être écarté ; 11. Considérant que les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; que, sous les réserves énoncées aux considérants 9 et 10, elles doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Sous les réserves énoncées aux considérants 9 et 10, l’article 1756 quater du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l’outre-mer, est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 8 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029641916.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 juin 2014 par le Conseil d'État (décision n° 380652 du 27 juin 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par l'association France Nature Environnement, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 173-12 du code de l'environnement. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de l'environnement ; Vu le code pénal ; Vu l'ordonnance n° 2012-34 du 11 janvier 2012 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de police judiciaire du code de l'environnement, notamment son article 3 ; Vu la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable, notamment son article 17 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour l'association requérante, enregistrées les 23 juillet et 6 août 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 23 juillet 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Hélène Daoulas-Hervé, avocat au barreau de Quimper, pour l'association requérante et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 16 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 173-12 du code de l'environnement, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 11 janvier 2012 susvisée : « I. - L'autorité administrative peut, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, transiger avec les personnes physiques et les personnes morales sur la poursuite des contraventions et délits prévus et réprimés par le présent code. « La transaction proposée par l'administration et acceptée par l'auteur de l'infraction doit être homologuée par le procureur de la République. « II. - Cette faculté n'est pas applicable aux contraventions des quatre premières classes pour lesquelles l'action publique est éteinte par le paiement d'une amende forfaitaire en application de l'article 529 du code de procédure pénale. « III. - La proposition de transaction est déterminée en fonction des circonstances et de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur ainsi que de ses ressources et de ses charges. « Elle précise l'amende transactionnelle que l'auteur de l'infraction devra payer, dont le montant ne peut excéder le tiers du montant de l'amende encourue, ainsi que, le cas échéant, les obligations qui lui seront imposées, tendant à faire cesser l'infraction, à éviter son renouvellement, à réparer le dommage ou à remettre en conformité les lieux. Elle fixe également les délais impartis pour le paiement et, s'il y a lieu, l'exécution des obligations. « IV. - L'acte par lequel le procureur de la République donne son accord à la proposition de transaction est interruptif de la prescription de l'action publique. « L'action publique est éteinte lorsque l'auteur de l'infraction a exécuté dans les délais impartis l'intégralité des obligations résultant pour lui de l'acceptation de la transaction. « V. - Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État » ; 2. Considérant que, selon l'association requérante, ces dispositions méconnaissent les principes de nécessité et de proportionnalité des peines, les droits de la défense, le droit au procès équitable de la victime de l'infraction, le respect de la présomption d'innocence, le principe d'égalité devant la loi ainsi que les articles 1er, 3 et 4 de la Charte de l'environnement ; - SUR LES GRIEFS TIRÉS DE LA MÉCONNAISSANCE DES EXIGENCES QUI RÉSULTENT DES ARTICLES 8 ET 16 DE LA DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN DE 1789 : 3. Considérant que, selon l'association requérante, en permettant un cumul de l'amende transactionnelle avec les sanctions administratives susceptibles d'être prononcées par l'autorité administrative en application de l'article L. 171-8 du code de l'environnement, les dispositions contestées méconnaissent le principe de proportionnalité des peines ; qu'en outre, elle fait valoir qu'en cas de poursuites et de condamnation faisant suite à une transaction qui n'a pas été entièrement exécutée, les dispositions contestées n'imposent pas qu'il soit tenu compte des sommes déjà versées et des autres obligations transactionnelles déjà exécutées ; qu'elle soutient également qu'en n'excluant pas les délits les plus graves du champ d'application de la transaction, le législateur a prévu une répression insuffisante de certaines infractions en matière d'environnement dans des conditions qui portent atteinte à l'article 8 de la Déclaration de 1789, aux articles 1er, 3 et 4 de la Charte de l'environnement, ainsi qu'aux objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public environnemental et de santé publique ; 4. Considérant que l'association requérante soutient également qu'en ne précisant pas que, lorsque l'administration propose une transaction, l'auteur de l'infraction est informé de la nature des faits à l'origine de la procédure et de leur qualification juridique, de son droit de bénéficier de l'assistance d'un avocat et d'avoir communication du procès-verbal d'infraction ainsi que, le cas échéant, des avis de l'autorité administrative recueillis au cours de l'enquête, les dispositions contestées méconnaissent les droits de la défense ; qu'en prévoyant que la transaction est homologuée par le ministère public, ces dispositions ne garantiraient pas le caractère libre et éclairé du consentement de l'auteur de l'infraction ; qu'en outre, en ne précisant pas que les victimes identifiées doivent être avisées de la mise en oeuvre de la transaction, ces dispositions méconnaîtraient les droits de la victime d'exercer un recours juridictionnel effectif ; 5. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que les principes énoncés par cet article s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition ; 6. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; que sont garantis par cette disposition le droit des personnes intéressées à exercer un recours juridictionnel effectif, le droit à un procès équitable, ainsi que les droits de la défense lorsqu'est en cause une sanction ayant le caractère d'une punition ; 7. Considérant que l'article L. 173-12 du code de l'environnement est relatif à la procédure par laquelle, tant que l'action publique n'est pas mise en mouvement, l'autorité administrative peut transiger avec les personnes physiques et les personnes morales sur la poursuite des délits et contraventions de cinquième classe prévus et réprimés par le code de l'environnement ; que la proposition de transaction qui doit être acceptée par l'auteur de l'infraction précise l'amende transactionnelle que celui-ci devra payer, dont le montant ne peut excéder le tiers du montant de l'amende encourue, ainsi que, le cas échéant, les obligations qui lui seront imposées tendant à faire cesser l'infraction, à éviter son renouvellement, à réparer le dommage ou à remettre en conformité les lieux ; que la transaction doit être homologuée par le procureur de la République ; 8. Considérant, en premier lieu, que les dispositions contestées organisent une procédure de transaction qui suppose l'accord libre et non équivoque, avec l'assistance éventuelle de son avocat, de l'auteur des faits ; qu'en outre la transaction homologuée ne présente, en elle-même, aucun caractère exécutoire et n'entraîne aucune privation ou restriction des droits de l'intéressé ; qu'elle doit être exécutée volontairement par ce dernier ; que, par suite, les mesures fixées dans la transaction ne revêtent pas le caractère de sanctions ayant le caractère d'une punition ; qu'il appartient au pouvoir réglementaire de préciser, sous le contrôle du juge, les règles de procédure transactionnelle ; 9. Considérant, en deuxième lieu, qu'en confiant au ministère public le pouvoir d'homologuer une procédure dont l'exécution volontaire par l'auteur de l'infraction a pour seul effet d'éteindre l'action publique, les dispositions contestées ne portent aucune atteinte aux exigences qui résultent de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ; 10. Considérant, en troisième lieu, que les dispositions contestées ne font pas obstacle au droit des victimes, avisées de la procédure par le procureur de la République dans les conditions de l'article 40-2 du code de procédure pénale, d'agir pour demander la réparation de leur préjudice devant les juridictions civiles ainsi que, dans le délai de la prescription de l'action publique, devant les juridictions répressives ; que, par suite, les dispositions contestées ne portent pas atteinte au droit des victimes d'exercer un recours juridictionnel effectif ; 11. Considérant, en quatrième lieu, que la transaction avec l'autorité administrative implique, de la part de cette dernière, la renonciation à poursuivre l'auteur des faits ; que, par suite, le grief tiré de ce que l'amende transactionnelle pourrait se cumuler avec une sanction administrative prononcée pour des mêmes faits manque en fait ; qu'en cas d'exécution incomplète des mesures prévues par la transaction homologuée, il résulte des paragraphes III et IV de l'article L. 173-12 qu'il appartient à l'administration de saisir le procureur de la République en vue de la mise en mouvement de l'action publique ; 12. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des dispositions du code pénal relatives au prononcé des peines que la juridiction prononce les peines et fixe leur régime en fonction des circonstances de l'infraction et de la personnalité de son auteur ; que, par suite, en cas de poursuites devant la juridiction répressive faisant suite à une transaction qui n'a pas été entièrement exécutée, il est tenu compte, s'il y a lieu, des sommes déjà versées ou des autres obligations respectées par l'auteur de l'infraction au titre de la transaction ; qu'il s'ensuit que manque en fait le grief tiré de ce que les dispositions contestées méconnaîtraient le principe de nécessité des peines en n'imposant pas au juge saisi de poursuites postérieures à une transaction qui n'a pas été complètement exécutée, qu'il soit tenu compte des sommes déjà versées et des autres obligations transactionnelles déjà exécutées ; 13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les griefs tirés de l'atteinte aux exigences des articles 8 et 16 de la Déclaration de 1789 doivent être écartés ; - SUR LES AUTRES GRIEFS : 14. Considérant, en premier lieu, que, selon l'association requérante, en n'interdisant pas que les déclarations de l'auteur de l'infraction pendant la phase transactionnelle puissent être utilisées à l'occasion des poursuites ultérieures, si la transaction échoue, les dispositions contestées méconnaissent le droit au respect de la présomption d'innocence ; 15. Considérant que ni le principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, qui découle de l'article 9 de la Déclaration de 1789, ni aucune autre exigence constitutionnelle ne fait obstacle à ce qu'une personne suspectée d'avoir commis une infraction reconnaisse librement sa culpabilité et consente à exécuter une peine ou des mesures de nature à faire cesser l'infraction ou en réparer les conséquences ; que, par suite, les dispositions contestées ne méconnaissent pas la présomption d'innocence ; 16. Considérant, en second lieu, que le pouvoir du procureur de la République de choisir les modalités de mise en oeuvre de l'action publique ou les alternatives aux poursuites ne méconnaît pas le principe d'égalité ; 17. Considérant que les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; qu'elles doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- L'article L. 173-12 du code de l'environnement est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 26 septembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 12 juin 2014 par le président de la Polynésie française, dans les conditions prévues par l'article 12 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, d'une demande tendant à ce qu'il constate que « l'article 26 de l'ordonnance n° 2009-536 du 14 mai 2009 portant diverses dispositions d'adaptation du droit outre-mer, en tant qu'il modifie l'article 11 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics », est intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment ses articles 74 et 74-1 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ; Vu la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics ; Vu l'ordonnance n° 2009-536 du 14 mai 2009 portant diverses dispositions d'adaptation du droit outre-mer, notamment son article 26 ; Vu la loi n° 2009-970 du 3 août 2009 relative à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et portant ratification d'ordonnances, notamment son article 10 ; Vu les observations du président de l'assemblée de la Polynésie française, enregistrées le 25 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004 susvisée, pris en application du neuvième alinéa de l'article 74 de la Constitution : « Lorsque le Conseil constitutionnel a constaté qu'une loi promulguée postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi organique est intervenue dans les matières ressortissant à la compétence de la Polynésie française, en tant qu'elle s'applique à cette dernière, cette loi peut être modifiée ou abrogée par l'assemblée de la Polynésie française » ; que le président de la Polynésie française demande au Conseil constitutionnel de constater que « l'article 26 de l'ordonnance n° 2009-536 du 14 mai 2009 portant diverses dispositions d'adaptation du droit outre-mer, en tant qu'il modifie l'article 11 de la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics » est intervenu dans une matière relevant de la compétence de cette collectivité d'outre-mer ; 2. Considérant que l'article 26 de l'ordonnance du 14 mai 2009 susvisée a donné une nouvelle rédaction de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée ; que cet article 11 est relatif à l'application de cette loi dans les collectivités d'outre-mer et en Nouvelle-Calédonie ; que la demande du président de la Polynésie française ne porte que sur les dispositions de cet article 11 ainsi modifié qui rendent cette loi applicable en Polynésie française ; que, par suite, elle porte sur les mots « , en Polynésie française », figurant au premier alinéa du paragraphe II de cet article 11, ainsi que sur le 2° de ce même paragraphe II qui dispose : « Pour l'application de la présente loi en Polynésie française, la référence aux départements est remplacée par la référence à la Polynésie française et à ses établissements publics » ; 3. Considérant, d'une part, qu'en application du troisième alinéa de l'article 74 de la Constitution, les deuxième à onzième alinéas de l'article 7 de la loi organique du 27 février 2004 déterminent les matières pour lesquelles les dispositions législatives et réglementaires de l'État sont applicables de plein droit en Polynésie française ; qu'à ce titre, le 7° de cet article 7 mentionne les « droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de l'État et de ses établissements publics ou avec celles des communes et de leurs établissements publics » ; que les règles de prescription des créances sur les personnes morales de droit public relèvent des droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ; qu'il en résulte qu'en Polynésie française, les dispositions de la loi du 31 décembre 1968 susvisée s'appliquent de plein droit aux créances sur l'État, les communes et leurs établissements publics ; que, par suite, les dispositions de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1968 qui rendent cette loi applicable « en Polynésie française » n'ont pas d'autre objet que de la rendre applicable aux créances sur la Polynésie française et ses établissements publics ; 4. Considérant, d'autre part, que l'article 13 de la loi organique du 27 février 2004 dispose : « Les autorités de la Polynésie française sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'État par l'article 14 et celles qui ne sont pas dévolues aux communes en vertu des lois et règlements applicables en Polynésie française » ; que les droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration de la Polynésie française et ses établissements publics ne figurent pas au nombre des matières énumérées par l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 ; qu'ainsi, en rendant la loi du 31 décembre 1968 applicable aux créances sur la Polynésie française et ses établissements publics, le législateur est intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française, D É C I D E : Article 1er.- Les mots « , en Polynésie française » figurant au premier alinéa du paragraphe II de l'article 11 de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'État, les départements, les communes et les établissements publics, ainsi que le 2° de ce même paragraphe II, introduits dans cette loi par l'article 26 de l'ordonnance n° 2009-536 du 14 mai 2009 portant diverses dispositions d'adaptation du droit outre-mer, sont intervenus dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française. Article 2- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 11 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 10 juin 2014 par le Conseil d'État (décision n° 376807 du 6 juin 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la commune de Tarascon, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 562-2 du code de l'environnement. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de l'environnement ; Vu l'ordonnance n° 2000-914 du 18 septembre 2000 relative à la partie législative du code de l'environnement ; Vu la loi n° 2003-591 du 2 juillet 2003 habilitant le gouvernement à simplifier le droit, notamment son article 31 ; Vu la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l'environnement ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations en intervention produites pour l'Association de Prévention des Incendies de Forêt du Var (APIFOVAR) ainsi que MM. René DEGUINE, Jean WEBER et Claude DEGAND par Me Jean-Jacques Israël, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 30 juin 2014 ; Vu les observations en intervention produites par l'association France Nature Environnement, enregistrées le 1er juillet 2014 ; Vu les observations produites pour la commune requérante par Me René-Pierre Clauzade, avocat au barreau de Marseille, enregistrées le 1er juillet 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 1er juillet 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Israël, pour l'APIFOVAR et autres, Me Cécile Grignon, avocat au barreau de Paris, pour l'association France Nature Environnement et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 17 juillet 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction postérieure à la loi du 12 juillet 2010 susvisée : « Lorsqu'un projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles contient certaines des dispositions mentionnées au 1° et au 2° du II de l'article L. 562-1 et que l'urgence le justifie, le préfet peut, après consultation des maires concernés, les rendre immédiatement opposables à toute personne publique ou privée par une décision rendue publique. « Ces dispositions cessent d'être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan approuvé » ; 2. Considérant que, selon la commune requérante, ces dispositions méconnaissent le principe de participation du public à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement, prévu à l'article 7 de la Charte de l'environnement, le principe de libre administration des collectivités territoriales ainsi que le droit de propriété garanti par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; - SUR LE GRIEF TIRÉ DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 7 DE LA CHARTE DE L'ENVIRONNEMENT : 3. Considérant que, selon la commune requérante, les dispositions de l'article L. 562-2 du code de l'environnement qui prévoient la seule consultation des maires des communes intéressées avant que le préfet décide de rendre immédiatement opposables certaines des dispositions d'un projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles, ne sont pas conformes aux dispositions de l'article 7 de la Charte de l'environnement qui imposent la participation du public à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ; 4. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; que la méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit ; 5. Considérant qu'aux termes de l'article 7 de la Charte de l'environnement : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement » ; que ces dispositions figurent au nombre des droits et libertés que la Constitution garantit ; qu'il incombe au législateur et, dans le cadre défini par la loi, aux autorités administratives de déterminer, dans le respect des principes ainsi énoncés, les modalités de la mise en oeuvre de ces dispositions ; 6. Considérant qu'en vertu du paragraphe I de l'article L. 562 1 du code de l'environnement, « L'État élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles tels que les inondations, les mouvements de terrain, les avalanches, les incendies de forêt, les séismes, les éruptions volcaniques, les tempêtes ou les cyclones » ; que les dispositions contestées de l'article L. 562-2 permettent au préfet de rendre immédiatement opposables certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles sur le territoire d'une commune, lorsque l'urgence le justifie et après consultation du maire ; que les dispositions qui peuvent ainsi être rendues opposables par anticipation sont celles qui ont pour objet : « 1° De délimiter les zones exposées aux risques en tenant compte de la nature et de l'intensité du risque encouru, d'y interdire tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation agricole, forestière, artisanale, commerciale ou industrielle ou, dans le cas où des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles, notamment afin de ne pas aggraver le risque pour les vies humaines, pourraient y être autorisés, prescrire les conditions dans lesquelles ils doivent être réalisés, utilisés ou exploités » et « 2° De délimiter les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux et y prévoir des mesures d'interdiction ou des prescriptions telles que prévues au 1° » ; 7. Considérant que la décision de rendre opposables par anticipation certaines dispositions du projet de plan a pour objet d'assurer la sécurité des personnes et des biens à l'égard des risques naturels prévisibles ; qu'elle ne peut être adoptée que si « l'urgence le justifie » ; qu'elle a pour seul effet d'interdire ou de restreindre, à titre provisoire et conservatoire, des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations ; que, par suite, elle ne constitue pas une décision publique ayant une incidence sur l'environnement au sens de l'article 7 de la Charte de l'environnement ; que le grief tiré de la méconnaissance de cet article est donc inopérant ; - SUR LE GRIEF TIRÉ DE LA VIOLATION DU PRINCIPE DE LIBRE ADMINISTRATION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES : 8. Considérant que, selon la commune requérante, l'opposabilité immédiate de certaines dispositions d'un projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles prive les communes de la possibilité d'exercer pleinement leurs compétences en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire conformément aux documents qu'elles ont élaborés et approuvés en faisant usage des compétences dont elles disposent ; qu'en outre, la seule obligation pour le préfet de consulter le maire au préalable serait insuffisante eu égard aux conséquences qu'emporte l'entrée en vigueur anticipée d'une telle servitude dont l'application n'est en réalité pas limitée dans le temps par la loi ; 9. Considérant que l'article 34 de la Constitution réserve au législateur la détermination des principes fondamentaux de la libre administration des collectivités territoriales ; que, si, selon le troisième alinéa de son article 72, les collectivités territoriales « s'administrent librement par des conseils élus », chacune d'elles le fait « dans les conditions prévues par la loi » ; 10. Considérant qu'en vertu de l'article L. 562-1 du code de l'environnement, l'élaboration du plan de prévention des risques naturels prévisibles relève de la compétence de l'État ; qu'ainsi, la décision du préfet de rendre opposables par anticipation certaines dispositions de ce projet de plan ne prive pas les communes des compétences qui leur sont dévolues par la loi ; que les communes ne sont pas davantage dessaisies de leurs compétences en matière d'urbanisme, celles-ci étant seulement soumises à l'obligation de respecter les dispositions rendues opposables par anticipation du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles ; que, par suite, les dispositions contestées ne portent aucune atteinte à la libre administration des collectivités territoriales ; - SUR LE GRIEF TIRÉ DE L'ATTEINTE AUX CONDITIONS D'EXERCICE DU DROIT DE PROPRIÉTÉ : 11. Considérant que, selon la commune requérante, l'article L. 562-2 du code de l'environnement porte atteinte aux conditions d'exercice du droit de propriété protégées par l'article 2 de la Déclaration de 1789 dès lors qu'il permet au préfet de prescrire des interdictions de construire ou de reconstruire pour des biens situés dans des zones qu'il délimite comme exposées à un risque naturel prévisible ; 12. Considérant que la propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration de 1789 ; qu'en l'absence de privation du droit de propriété au sens de l'article 17, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les limites apportées à son exercice doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi ; 13. Considérant qu'en vertu de l'article L. 562-4 du code de l'environnement, le plan de prévention des risques naturels prévisibles approuvé vaut servitude d'utilité publique ; que les plans de prévention des risques naturels prévisibles délimitent des zones exposées à des risques naturels dans lesquelles s'appliquent des contraintes d'urbanisme ; que le plan a ainsi pour effet, dans les zones exposées aux risques et dans les zones qui ne sont pas directement exposées aux risques mais où des constructions, des ouvrages, des aménagements ou des exploitations agricoles, forestières, artisanales, commerciales ou industrielles pourraient aggraver des risques ou en provoquer de nouveaux, d'interdire ou de restreindre les constructions ou de prescrire des mesures tendant à réduire la vulnérabilité ; que ces contraintes s'imposent directement aux personnes publiques ainsi qu'aux personnes privées et peuvent notamment fonder le refus d'une autorisation d'occupation ou d'utilisation du sol ou les conditions restrictives qui en assortissent l'octroi ; 14. Considérant que l'opposabilité anticipée des dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles répond à un objectif de sécurité publique ; que ces dispositions cessent d'être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan approuvé et sont donc provisoires ; qu'elles ont uniquement pour effet d'interdire ou de restreindre, dans l'attente de la publication du plan, des constructions, ouvrages, aménagements ou exploitations ; que la décision du préfet prise en application des dispositions soumises au Conseil constitutionnel et justifiée par l'urgence peut être contestée devant la juridiction compétente ; que le législateur n'a pas exclu toute indemnisation dans le cas exceptionnel où le propriétaire d'un bien supporterait une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi ; qu'ainsi, les pouvoirs conférés au préfet en application des dispositions contestées ne portent pas aux conditions d'exercice du droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ; que cette atteinte ne méconnaît donc pas l'article 2 de la Déclaration de 1789 ; 15. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- L'article L. 562-2 du code de l'environnement est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 9 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
CONSTIT/CONSTEXT000029797226.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 4 septembre 2014, par recours enregistré au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 3 septembre 2014, présenté par le président de l’assemblée de la province des Îles Loyauté, dans les conditions prévues à l’article 104 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, de la conformité à la Constitution de la loi du pays relative à l’accès à l’emploi titulaire des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution et notamment ses articles 76 et 77 ; Vu la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie, ensemble la décision du Conseil n° 99-410 DC du 15 mars 1999 ; Vu l’avis du Conseil d’État en date du 16 juillet 2013, transmis au Conseil constitutionnel en application de l’article 100 de la loi organique susvisée ; Vu les observations, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et transmises au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 12 septembre 2014, présentées par le président de l’assemblée de la province Nord ; Vu les observations, enregistrées au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie et transmises au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 17 septembre 2014, présentées par la présidente du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que le 21 janvier 2014, le congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté une loi du pays relative à l’accès à l’emploi titulaire des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie ; qu’à la demande de douze membres du congrès, et conformément aux articles 103 et 104 de la loi organique susvisée, ce texte a fait l’objet d’une nouvelle délibération, intervenue le 27 août 2014 ; que l’auteur de la saisine conteste la conformité à la Constitution de son article 1er ; 2. Considérant que l’article 1er de la loi du pays déférée est applicable aux agents non fonctionnaires qui occupent un emploi correspondant à un besoin permanent au sein des services de la Nouvelle-Calédonie et de ses institutions, des provinces, des communes, ainsi que de leurs établissements publics ou des syndicats mixtes, et qui justifient d’au moins trois ans d’équivalent temps plein au cours des cinq dernières années ; que cet article 1er prévoit, en leur faveur, la mise en place, pour une durée maximum de cinq ans, d’un dispositif d’intégration directe aux corps et cadres d’emploi dont les fonctions correspondent à celles au titre desquelles ces agents ont été recrutés ; 3. Considérant que selon les présidents des assemblées des provinces Nord et des Îles Loyauté, les dispositions contestées méconnaissent le principe de préférence locale pour l’accès à l’emploi dès lors que le dispositif d’intégration d’agents non titulaires institué par elles ne comporte pas de disposition favorisant les personnes durablement installées en Nouvelle-Calédonie ; qu’ils soutiennent également que les dispositions contestées méconnaissent le principe d’égalité ; 4. Considérant que le contrôle du Conseil constitutionnel sur les lois du pays de la Nouvelle-Calédonie doit s’exercer non seulement au regard de la Constitution, mais également au regard des orientations définies par l’accord de Nouméa et des dispositions organiques prises pour leur application ; 5. Considérant que le principe de mesures favorisant les personnes durablement établies en Nouvelle-Calédonie pour l’accès à un emploi salarié ou à une profession indépendante, ou pour l’exercice d’un emploi dans la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie ou dans la fonction publique communale, trouve son fondement constitutionnel dans l’accord de Nouméa ; que celui-ci stipule en effet, dans son préambule, qu’ « afin de tenir compte de l’étroitesse du marché du travail, des dispositions seront définies pour favoriser l’accès à l’emploi local des personnes durablement établies en Nouvelle-Calédonie » ; qu’en outre, en vertu du point 2 de l’accord, la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie, qui fonde les restrictions apportées au corps électoral appelé à désigner les « institutions du pays », sert aussi de « référence pour la mise au point des dispositions qui seront définies pour préserver l’emploi local » ; qu’enfin, selon le point 3.1.1 de l’accord de Nouméa : « la Nouvelle-Calédonie mettra en place, en liaison avec l’État, des mesures destinées à offrir des garanties particulières pour le droit à l’emploi de ses habitants. La réglementation sur l’entrée des personnes non établies en Nouvelle-Calédonie sera confortée. « Pour les professions indépendantes, le droit d’établissement pourra être restreint pour les personnes non établies en Nouvelle-Calédonie. « Pour les salariés du secteur privé et pour la fonction publique territoriale, une réglementation locale sera définie pour privilégier l’accès à l’emploi des habitants » ; 6. Considérant que l’article 77 de la Constitution a habilité le législateur organique à déterminer, pour la Nouvelle-Calédonie, « les règles relatives… à l’emploi » ; 7. Considérant que l’article 24 de la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie susvisée dispose, en son alinéa 1er, que « Dans le but de soutenir ou de promouvoir l’emploi local, la Nouvelle-Calédonie prend au bénéfice des citoyens de la Nouvelle-Calédonie et des personnes qui justifient d’une durée suffisante de résidence des mesures visant à favoriser l’exercice d’un emploi salarié, sous réserve qu’elles ne portent pas atteinte aux avantages individuels et collectifs dont bénéficient à la date de leur publication les autres salariés » ; que le même article dispose, en son alinéa 2 que « de telles mesures sont appliquées dans les mêmes conditions à la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie et à la fonction publique communale. La Nouvelle-Calédonie peut également prendre des mesures visant à restreindre l’accession à l’exercice d’une profession libérale à des personnes qui ne justifient pas d’une durée suffisante de résidence » ; que son alinéa 3 dispose : « La durée et les modalités de ces mesures sont définies par des lois du pays » ; que, dans sa décision du 15 mars 1999 susvisée, le Conseil constitutionnel a examiné les dispositions de cet article 24 de la loi organique du 19 mars 1999 ; qu’il a jugé qu’il appartient aux « lois du pays » prises en application de l’article 24, et susceptibles d’être soumises au contrôle du Conseil constitutionnel, de fixer, pour chaque type d’activité professionnelle et chaque secteur d’activité, la « durée suffisante de résidence » mentionnée aux premier et deuxième alinéas de cet article en se fondant sur des critères objectifs et rationnels en relation directe avec la promotion de l’emploi local, sans imposer de restrictions autres que celles strictement nécessaires à la mise en œuvre de l’accord de Nouméa ; 8. Considérant qu’il résulte de ces dispositions qu’il appartient au législateur du pays de mettre en œuvre le principe de préférence locale pour l’accès à l’emploi, consacré par l’accord de Nouméa, dans les mêmes conditions pour l’accès à l’emploi dans la fonction publique que pour l’emploi salarié ; 9. Considérant que les dispositions contestées ne comportent aucune disposition favorisant l’accès à l’emploi dans la fonction publique au bénéfice des citoyens de la Nouvelle-Calédonie et des personnes qui justifient d’une durée suffisante de résidence ; que, par suite, elles méconnaissent le principe de préférence locale pour l’accès à l’emploi en Nouvelle-Calédonie consacré par l’accord de Nouméa ; 10. Considérant que, par suite et sans qu’il soit besoin d’examiner l’autre grief, les dispositions de l’article 1er de la loi du pays déférée, ainsi que de ses articles 2 à 11 qui n’en sont pas séparables, doivent être déclarées contraires à la Constitution ; 11. Considérant qu’il n’y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, d’examiner d’office aucune question de conformité à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les articles 1er à 11 de la loi du pays relative à l’accès à l’emploi titulaire des fonctions publiques de Nouvelle-Calédonie sont contraires à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et au Journal officiel de la Nouvelle-Calédonie. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 21 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 21 novembre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029797232.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 22 octobre 2014, par le Premier ministre, conformément aux articles 46, alinéa 5, et 61, alinéa 1er, de la Constitution, de la loi organique portant application de l’article 68 de la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment son article 68 dans sa rédaction résultant de la loi constitutionnelle n° 2007-238 du 23 février 2007 portant modification du titre IX de la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que la loi organique soumise à l’examen du Conseil constitutionnel a été prise sur le fondement de l’article 68 de la Constitution ; qu’elle a été adoptée dans le respect des règles de procédure prévues par les trois premiers alinéas de l’article 46 de la Constitution ; - SUR LES NORMES DE CONSTITUTIONNALITÉ APPLICABLES : 2. Considérant que l’article unique de la loi constitutionnelle du 23 février 2007 susvisée a donné une nouvelle rédaction des articles 67 et 68 de la Constitution ; 3. Considérant qu’aux termes de l’article 67 : « Le Président de la République n’est pas responsable des actes accomplis en cette qualité, sous réserve des dispositions des articles 53-2 et 68. « Il ne peut, durant son mandat et devant aucune juridiction ou autorité administrative française, être requis de témoigner non plus que faire l’objet d’une action, d’un acte d’information, d’instruction ou de poursuite. Tout délai de prescription ou de forclusion est suspendu. « Les instances et procédures auxquelles il est ainsi fait obstacle peuvent être reprises ou engagées contre lui à l’expiration d’un délai d’un mois suivant la cessation des fonctions » ; 4. Considérant que l’article 68 dispose : « Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour. « La proposition de réunion de la Haute Cour adoptée par une des assemblées du Parlement est aussitôt transmise à l’autre qui se prononce dans les quinze jours. « La Haute Cour est présidée par le président de l’Assemblée nationale. Elle statue dans un délai d’un mois, à bulletins secrets, sur la destitution. Sa décision est d’effet immédiat. « Les décisions prises en application du présent article le sont à la majorité des deux tiers des membres composant l’assemblée concernée ou la Haute Cour. Toute délégation de vote est interdite. Seuls sont recensés les votes favorables à la proposition de réunion de la Haute Cour ou à la destitution. « Une loi organique fixe les conditions d’application du présent article » ; 5. Considérant qu’il ressort de ces dispositions que, sous la seule réserve prévue à l’article 53-2 de la Constitution pour la Cour pénale internationale, le Président de la République n’est responsable devant aucune juridiction des actes accomplis en cette qualité ; que la Haute Cour, instituée à la suite de la suppression de la Haute Cour de justice, ne constitue pas une juridiction chargée de juger le Président de la République pour des infractions commises par lui en cette qualité, mais une assemblée parlementaire compétente pour prononcer sa destitution en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat ; 6. Considérant, en premier lieu, que le premier alinéa de l’article 3 de la Constitution dispose : « La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum » ; que, par suite, l’exigence de clarté et de sincérité des débats parlementaires, qui résulte notamment du premier alinéa de l’article 3 de la Constitution, s’impose aux débats devant le Parlement constitué en Haute Cour ; 7. Considérant, en deuxième lieu, que l’article 5 de la Constitution dispose : « Le Président de la République veille au respect de la Constitution. Il assure, par son arbitrage, le fonctionnement régulier des pouvoirs publics ainsi que la continuité de l’Etat. - Il est le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire et du respect des traités » ; qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; que le principe de la séparation des pouvoirs s’applique à l’égard du Président de la République ; 8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il appartient au législateur organique de fixer les conditions d’application de l’article 68 de la Constitution dans le respect de cet article ainsi que de l’exigence de clarté et de sincérité des débats devant le Parlement constitué en Haute Cour ; qu’il ne saurait apporter aux prérogatives du Président de la République et au principe de la séparation des pouvoirs d’autres atteintes que celles qui sont expressément prévues par cet article ; - SUR LA DÉCISION DE RÉUNIR LA HAUTE COUR : 9. Considérant que les articles 1er à 4 sont relatifs à la décision de réunir la Haute Cour ; que l’article 1er porte sur la proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour ; que l’article 2 porte sur l’examen de la proposition de résolution par l’assemblée devant laquelle elle a été déposée ; que l’article 3 porte sur l’examen de la proposition de résolution par la seconde assemblée ; que l’article 4 porte sur la conséquence du rejet de la proposition de résolution par l’une ou l’autre assemblée ; . En ce qui concerne la proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour : 10. Considérant que le premier alinéa de l’article 1er prévoit que la décision de réunir la Haute Cour résulte de l’adoption d’une proposition de résolution par l’Assemblée nationale et le Sénat ; que son deuxième alinéa prévoit que la proposition de résolution doit exposer les motifs susceptibles de caractériser un manquement au sens du premier alinéa de l’article 68 de la Constitution et être signée par au moins un dixième des membres de l’assemblée devant laquelle elle est déposée ; que son troisième alinéa prévoit qu’un député ou un sénateur ne peut être signataire de plus d’une proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour durant un même mandat présidentiel ; que son quatrième alinéa prévoit que la proposition de résolution est communiquée sans délai par le Président de l’assemblée au Président de la République et au Premier ministre ; que son cinquième alinéa prévoit qu’aucun amendement n’est recevable à aucun stade de son examen dans l’une ou l’autre assemblée ; que son sixième alinéa prévoit que l’examen de la proposition de résolution ne peut faire l’objet de plus d’une lecture dans chaque assemblée ; 11. Considérant que l’article 68 de la Constitution n’a pas entendu conférer aux  membres du Parlement un droit individuel à proposer la réunion de la Haute Cour ; qu’en exigeant qu’une proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour recueille la signature d’au moins un dixième des membres de l’assemblée devant laquelle elle est déposée, la troisième phrase du deuxième alinéa de l’article 1er n’a pas méconnu les exigences de l’article 68 de la Constitution ; 12. Considérant, en revanche, qu’en limitant le droit de chaque membre du Parlement à la signature d’une seule proposition de résolution par mandat présidentiel, le troisième alinéa de l’article 1er a apporté aux modalités de mise en œuvre de l’article 68 de la Constitution une restriction d’une ampleur telle qu’elle en méconnaît la portée ; que, par suite, le troisième alinéa de l’article 1er est contraire à la Constitution ; 13. Considérant que le surplus de l’article 1er est conforme à la Constitution ; . En ce qui concerne l’examen de la proposition de résolution par l’assemblée devant laquelle elle a été déposée : 14. Considérant que le premier alinéa de l’article 2 prévoit que le Bureau de l’assemblée devant laquelle la proposition de résolution a été déposée vérifie sa recevabilité au regard des conditions posées au deuxième alinéa de l’article 1er ; qu’en vertu du deuxième alinéa de l’article 2, la proposition de résolution ne peut être mise en discussion si elle n’a pas été communiquée par le président de l’assemblée au Président de la République ainsi qu’au Premier ministre ou si le Bureau a constaté qu’elle n’est pas recevable ; que son troisième alinéa prévoit, dans le cas contraire, premièrement, que la proposition de résolution est envoyée, pour examen, à la commission permanente compétente en matière de lois constitutionnelles, deuxièmement, que, sans préjudice des dispositions de l’article 48 de la Constitution, elle est inscrite à l’ordre du jour de l’assemblée au plus tard le treizième jour suivant les conclusions de la commission et, troisièmement, que le vote de l’assemblée intervient au plus tard le quinzième jour ; que son quatrième alinéa prévoit que, lorsque la clôture de la session fait obstacle à l’inscription à l’ordre du jour et au vote susmentionnés, l’inscription à l’ordre du jour intervient au plus tard le premier jour de la session suivante ; que les dispositions de l’article 2 n’ont pour objet ni d’imposer à la commission permanente compétente en matière de lois constitutionnelles de l’assemblée devant laquelle la proposition de résolution a été déposée de conclure à l’adoption ou au rejet de cette proposition, ni même d’imposer à ladite commission d’examiner cette proposition  ; 15. Considérant que, pour que la procédure de destitution du Président de la République puisse se poursuivre, les dispositions de l’article 2 imposent qu’une proposition de résolution ayant été adoptée ou rejetée par la commission permanente compétente en matière de lois constitutionnelles de l’assemblée devant laquelle elle a été déposée soit inscrite à l’ordre du jour au plus tard le treizième jour suivant les conclusions de la commission et qu’elle soit soumise au vote au plus tard le quinzième jour ; que l’inscription de ladite proposition de résolution à l’ordre du jour de cette assemblée ne peut intervenir que dans les conditions prévues par l’article 48 de la Constitution ; que les dispositions de l’article 2 n’ont pas pour effet d’entraîner « de droit » cette inscription à l’ordre du jour ; qu’en cas de non respect des conditions prévues par l’article 48 de la Constitution et l’article 2 de la loi organique déférée, la proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour devient caduque ; 16. Considérant que, par suite, les dispositions de l’article 2 sont conformes à la Constitution ; . En ce qui concerne l’examen de la proposition de résolution par la seconde assemblée : 17. Considérant que le premier alinéa de l’article 3 prévoit que la proposition de résolution adoptée par une assemblée est immédiatement transmise à l’autre assemblée et que cette proposition de résolution est envoyée à la commission permanente compétente en matière de lois constitutionnelles, qui conclut à son adoption ou à son rejet ; que son deuxième alinéa prévoit que cette proposition de résolution est inscrite « de droit » à l’ordre de jour de l’assemblée au plus tard le treizième jour suivant sa transmission et que le vote de cette assemblée intervient « de droit » au plus tard le quinzième jour suivant sa transmission ; qu’en imposant, d’une part, l’examen de la proposition de résolution par la commission permanente compétente en matière de lois constitutionnelles de la seconde assemblée et, d’autre part, l’inscription « de droit » de ladite proposition à l’ordre du jour de cette seconde assemblée dans le délai susmentionné, les dispositions des premier et deuxième alinéas de l’article 3 mettent en œuvre celles du deuxième alinéa de l’article 68 de la Constitution ; 18. Considérant que le troisième alinéa de l’article 3 prévoit que lorsque la clôture de la session fait obstacle à l’inscription à l’ordre du jour et au vote susmentionnés, l’inscription à l’ordre du jour intervient au plus tard le premier jour de la session ordinaire suivante ; qu’en adoptant ces dispositions, le législateur organique a entendu assurer la conciliation des exigences découlant du deuxième alinéa de l’article 68 de la Constitution et de celles de ses articles 28 et 29 ; que les dispositions de l’article 3 ne sont pas contraires à la Constitution ; . En ce qui concerne la conséquence du rejet de la proposition de résolution par l’une ou l’autre assemblée : 19. Considérant que l’article 4 prévoit que le rejet de la proposition de résolution par l’une des deux assemblées met un terme à la procédure tendant à la réunion de la Haute Cour ; que les dispositions de cet article s’appliquent indépendamment des hypothèses visées à l’article  2 qui peuvent aboutir à l’irrecevabilité ou à la caducité de la proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour ; qu’elles ne sont pas contraires à la Constitution ; - SUR LA PROCÉDURE DEVANT LA HAUTE COUR : 20. Considérant que les articles 5 à 7 sont relatifs à la Haute Cour ; que l’article 5 porte sur la composition et les pouvoirs du Bureau de la Haute Cour ; que l’article 6 porte sur la composition et les pouvoirs de la commission chargée de recueillir toute information nécessaire à l’accomplissement de sa mission par la Haute Cour ; que l’article 7 est relatif aux débats devant la Haute Cour ; . En ce qui concerne le Bureau de la Haute Cour : 21. Considérant, en premier lieu, que le premier alinéa de l’article 5 prévoit que le Bureau de la Haute Cour « se réunit aussitôt » lorsqu’une proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour a été adoptée par chacune des assemblées ; que son deuxième alinéa prévoit que ce Bureau « est composé de vingt-deux membres désignés, en leur sein et en nombre égal, par le Bureau de l’Assemblée nationale et par celui du Sénat, en s’efforçant de reproduire la configuration politique de chaque assemblée » ; que son troisième alinéa précise que le Bureau de la Haute Cour est présidé par le Président de la Haute Cour ; 22. Considérant qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions que le Président de l’Assemblée nationale, qui préside la Haute Cour en vertu de la première phrase du troisième alinéa de l’article 68 de la Constitution, préside également de droit le Bureau de la Haute Cour sans qu’il soit désigné comme un des vingt-deux membres de ce Bureau ; 23. Considérant qu’aucune disposition de la Constitution ne s’oppose à ce que la désignation des membres du Bureau de la Haute Cour soit organisée au sein des Bureaux respectifs des deux assemblées du Parlement ; que les dispositions des trois premiers alinéas de l’article 5 sont conformes à la Constitution ; 24. Considérant, en deuxième lieu, que le dernier alinéa de l’article 5 charge le Bureau de la Haute Cour de prendre « les dispositions nécessaires pour organiser les travaux de la Haute Cour » ; 25. Considérant que le respect du principe de la séparation des pouvoirs ainsi que l’exigence de clarté et de sincérité des débats devant la Haute Cour imposent que les règles relatives aux débats devant la Haute Cour qui n’ont pas été prévues par le législateur organique soient fixées par un règlement de la Haute Cour, soumis à l’examen du Conseil constitutionnel en application de l’article 61 de la Constitution ; que les dispositions du dernier alinéa de l’article 5 de la loi organique, qui sont relatives à la compétence du Bureau de la Haute Cour pour l’organisation des travaux, n’ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de permettre à ce Bureau de fixer les règles relatives aux débats devant la Haute Cour ; que, sous cette réserve, les dispositions du dernier alinéa de l’article 5 sont conformes à la Constitution ; . En ce qui concerne la commission chargée de recueillir toute information nécessaire à l’accomplissement de sa mission par la Haute Cour : 26. Considérant que le premier alinéa de l’article 6 crée une commission, constituée de six vice-présidents de l’Assemblée nationale et de six vice-présidents du Sénat, qui « est chargée de recueillir toute information nécessaire à l’accomplissement de sa mission par la Haute Cour » ; qu’il précise que la composition de la commission s’efforce de reproduire la configuration politique de chaque assemblée ; 27. Considérant que ces dispositions laissent aux règlements des assemblées le soin de fixer les conditions de désignation des vice-présidents appelés à siéger au sein de la commission, dans le cas où le nombre de vice-présidents d’une assemblée excèderait celui fixé par le premier alinéa de l’article 6 de la loi organique ; que la commission peut se réunir dès que la proposition de résolution tendant à la réunion de la Haute Cour a été adoptée par chacune des assemblées ; que les dispositions du premier alinéa de l’article 6 sont conformes à la Constitution ; 28. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article 6 : « La commission dispose des prérogatives reconnues aux commissions d’enquête aux II à IV de l’article 6 de l’ordonnance n° 58-1100 du 17 novembre 1958 relative au fonctionnement des assemblées parlementaires dans les mêmes limites que celles fixées au deuxième alinéa de l’article 67 de la Constitution » ; 29. Considérant qu’aux termes des paragraphes II à IV de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 susvisée : « II. Les articles L. 143-5 et L. 132-4 du code des juridictions financières sont applicables aux commissions d’enquête dans les mêmes conditions qu’aux commissions des finances. « Les rapporteurs des commissions d’enquête exercent leur mission sur pièces et sur place. Tous les renseignements de nature à faciliter cette mission doivent leur être fournis. Ils sont habilités à se faire communiquer tous documents de service, à l’exception de ceux revêtant un caractère secret et concernant la défense nationale, les affaires étrangères, la sécurité intérieure ou extérieure de l’Etat, et sous réserve du respect du principe de la séparation de l’autorité judiciaire et des autres pouvoirs. « Toute personne dont une commission d’enquête a jugé l’audition utile est tenue de déférer à la convocation qui lui est délivrée, si besoin est, par un huissier ou un agent de la force publique, à la requête du président de la commission. A l’exception des mineurs de seize ans, elle est entendue sous serment. Elle est, en outre, tenue de déposer, sous réserve des dispositions des articles 226-13 et 226-14 du code pénal. Les dispositions du troisième alinéa de l’article 41 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse lui sont applicables. « Toute personne qui participe ou a participé aux travaux de l’Autorité de contrôle prudentiel, de l’Autorité des marchés financiers ou des autorités auxquelles elles ont succédé, toute personne qui participe ou a participé à l’accomplissement des missions du Haut Conseil de stabilité financière ainsi que toute personne mentionnée au premier alinéa du I de l’article L. 511-33 du code monétaire et financier est déliée du secret professionnel à l’égard de la commission, lorsque celle-ci a décidé l’application du secret conformément aux dispositions du premier alinéa du IV. Dans ce cas, le rapport publié à la fin des travaux de la commission, ni aucun autre document public, ne pourra faire état des informations recueillies par levée du secret professionnel. « III. La personne qui ne comparaît pas ou refuse de déposer ou de prêter serment devant une commission d’enquête est passible de deux ans d’emprisonnement et de 7 500 euros d’amende. « Le refus de communiquer les documents visés au deuxième alinéa du II est passible des mêmes peines. « Dans les cas visés aux deux précédents alinéas, le tribunal peut en outre prononcer l’interdiction, en tout ou partie, de l’exercice des droits civiques mentionnés à l’article 131-26 du code pénal, pour une durée maximale de deux ans à compter du jour où la personne condamnée a subi sa peine. « En cas de faux témoignage ou de subornation de témoin, les dispositions des articles 434-13, 434-14 et 434-15 du code pénal sont respectivement applicables. « Les poursuites prévues au présent article sont exercées à la requête du président de la commission ou, lorsque le rapport de la commission a été publié, à la requête du bureau de l’assemblée intéressée. « IV. Les auditions auxquelles procèdent les commissions d’enquête sont publiques. Les commissions organisent cette publicité par les moyens de leur choix. Toutefois, elles peuvent décider l’application du secret ; dans ce cas, les dispositions du dernier alinéa du présent article sont applicables. « Les personnes entendues par une commission d’enquête sont admises à prendre connaissance du compte rendu de leur audition. Cette communication a lieu sur place lorsque l’audition a été effectuée sous le régime du secret. Aucune correction ne peut être apportée au compte rendu. Toutefois, l’intéressé peut faire part de ses observations par écrit. Ces observations sont soumises à la commission, qui peut décider d’en faire état dans son rapport. « L’assemblée intéressée peut décider, par un vote spécial et après s’être constituée en comité secret de ne pas autoriser la publication de tout ou partie du rapport d’une commission d’enquête. « Sera punie des peines prévues à l’article 226-13 du code pénal toute personne qui, dans un délai de vingt-cinq ans, sous réserve des délais plus longs prévus à l’article L. 213-2 du code du patrimoine, divulguera ou publiera une information relative aux travaux non publics d’une commission d’enquête, sauf si le rapport publié à la fin des travaux de la commission a fait état de cette information » ; 30. Considérant que l’ensemble des dispositions de l’ordonnance du 17 novembre 1958 qui sont rendues applicables à la commission chargée de recueillir toute information nécessaire à l’accomplissement de sa mission par la Haute Cour le sont dans leur rédaction en vigueur à la date de l’adoption définitive de la loi organique ; qu’aucune des dispositions de l’ordonnance du 17 novembre 1958 qui sont rendues applicables n’est contraire à la Constitution ; 31. Considérant toutefois que les dispositions de l’avant-dernier alinéa du paragraphe IV de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 permettent à une assemblée, après s’être constituée en comité secret, de ne pas autoriser la publication de tout ou partie du rapport d’une commission ; que ces dispositions ne sont pas applicables à la Haute Cour, dans la mesure où le dernier alinéa de l’article 6 de la loi organique impose une publicité du rapport de la commission ; que les dispositions du deuxième alinéa de l’article 6 sont conformes à la Constitution ; 32. Considérant qu’aux termes du troisième alinéa de l’article 6 de la loi organique : « Sur sa demande, le Président de la République ou son représentant est entendu par la commission. Il peut se faire assister par toute personne de son choix » ; 33. Considérant que ces dispositions, qui permettent au Président de la République de s’exprimer sur sa demande devant la commission chargée de recueillir toute information nécessaire à l’accomplissement de sa mission par la Haute Cour, ne sauraient, sans porter atteinte au principe de la séparation des pouvoirs ainsi qu’aux exigences constitutionnelles qui résultent du deuxième alinéa de l’article 67 de la Constitution, permettre à la commission de faire usage des prérogatives des paragraphes II à IV de l’article 6 de l’ordonnance du 17 novembre 1958 lorsqu’elle entend le Président de la République, son représentant ou la personne qui l’assiste ; que ces dispositions n’ont pas non plus pour objet ou pour effet de permettre, dans le cadre des travaux d’élaboration du rapport par la commission, de fixer de manière réduite le temps de parole du Président de la République, de son « représentant » ou de la personne qui l’assiste ; que, sous ces réserves, les dispositions du troisième alinéa de l’article 6 doivent être déclarées conformes à la Constitution ; 34. Considérant qu’aux termes du dernier alinéa de l’article 6 de la loi organique : « La commission élabore, dans les quinze jours suivant l’adoption de la résolution, un rapport qui est distribué aux membres de la Haute Cour, communiqué au Président de la République et au Premier ministre et rendu public » ; 35. Considérant que ces dispositions fixent un délai maximal de quinze jours à la commission pour élaborer un rapport, alors que la Haute Cour doit statuer dans un délai d’un mois, en vertu du troisième alinéa de l’article 68 de la Constitution ; que le délai imparti à la commission ne prive pas cette dernière de la faculté, selon des modalités fixées par le règlement de la Haute Cour,  de recueillir d’autres informations nécessaires à l’accomplissement de sa mission par la Haute Cour une fois le délai de quinze jours expiré ; que ces dispositions, qui ne méconnaissent aucune exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution ; . En ce qui concerne les débats devant la Haute-Cour : 36. Considérant, en premier lieu, que les deux premiers alinéas de l’article 7 de la loi organique disposent : « Les débats de la Haute Cour sont publics. - Outre les membres de la Haute Cour, peuvent seuls y prendre part le Président de la République et le Premier ministre » ; qu’en prévoyant la participation du Premier ministre aux débats devant la Haute Cour alors que la procédure de destitution de l’article 68 de la Constitution ne le met pas en cause et qu’une telle participation n’est pas prévue par cet article, ces dispositions sont contraires à la Constitution ; que, par suite, les mots : « et le Premier ministre » doivent être déclarés contraires à la Constitution ; que, par voie de conséquence, les mots : « peuvent seuls » figurant à ce deuxième alinéa doivent être remplacés par les mots : « peut seul » ; que, pour le surplus, les deux premiers alinéas de l’article 7 sont conformes à la Constitution ; 37. Considérant, en deuxième lieu, que le troisième alinéa de l’article 7 dispose : « Le temps de parole est limité, dans des conditions fixées par le Bureau de la Haute Cour. Le Président de la République peut prendre ou reprendre la parole en dernier » ; que le respect du principe de la séparation des pouvoirs ainsi que l’exigence de clarté et de sincérité des débats devant la Haute Cour imposent en particulier que le temps minimal de parole des membres de la Haute Cour et les conditions dans lesquelles le temps de parole du Président de la République peut être fixé soient déterminés par le règlement de la Haute Cour soumis à l’examen du Conseil constitutionnel en application de l’article 61 de la Constitution ; qu’en confiant au Bureau de la Haute Cour le pouvoir de fixer les conditions dans lesquelles le temps de parole est limité, les dispositions de la première phrase du troisième alinéa de l’article 7 ont méconnu ces exigences constitutionnelles ; que, par suite, dans cette phrase, les mots : « dans des conditions fixées par le Bureau de la Haute Cour » doivent être déclarés contraires à la Constitution ; 38. Considérant, en troisième lieu, que le quatrième alinéa de cet article dispose que le Président de la République peut, à tout moment, se faire assister ou représenter par toute personne de son choix ; que ces dispositions sont conformes à la Constitution ; 39. Considérant, en quatrième lieu, que la seconde phrase du quatrième alinéa de l’article 68 de la Constitution dispose : « Toute délégation de vote est interdite. Seuls sont recensés les votes favorables à la proposition de réunion de la Haute Cour ou à la destitution » ; qu’en l’absence de toute disposition, dans la loi organique, organisant les autres modalités du scrutin, il appartiendra au règlement de la Haute Cour d’y pourvoir ; 40. Considérant, en cinquième lieu, que les cinquième et sixième alinéas de l’article 7 disposent : « Le vote doit commencer au plus tard quarante-huit heures après l’ouverture des débats.- La Haute Cour est dessaisie si elle n’a pas statué dans le délai d’un mois prévu au troisième alinéa de l’article 68 de la Constitution » ; qu’en prévoyant le dessaisissement de la Haute Cour si elle n’a pas statué dans le délai d’un mois à compter de l’adoption, par la seconde assemblée, de la proposition aux fins de la réunion de la Haute Cour, le sixième alinéa de l’article 7 assure le respect des dispositions du troisième alinéa de l’article 68 de la Constitution ; que, toutefois, en interdisant en tout état de cause que les débats devant la Haute Cour durent plus de quarante-huit heures, les dispositions du cinquième alinéa de cet article 7 ont, compte tenu du délai d’un mois précité, permis que soient imposées à ces débats des restrictions qui ne peuvent être regardées comme nécessaires et qui sont de nature à porter une atteinte injustifiée au principe de clarté et de sincérité des débats ; que, par suite, le cinquième alinéa de l’article 7 de la loi organique doit être déclaré contraire à la Constitution ; 41. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que les débats devant la Haute Cour sur la proposition de destitution du Président de la République ne sauraient être ouverts sans que la Haute Cour ait, au préalable, adopté son règlement ; que sous cette réserve, le surplus de l’article 7 est conforme à la Constitution ; 42. Considérant que les dispositions de l’article 8 de la loi organique sont conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi organique portant application de l’article 68 de la Constitution : - le troisième alinéa de l’article 1er ; - au deuxième alinéa de l’article 7, les mots : « et le Premier ministre » ; en conséquence, les mots : « peuvent seuls » figurant à ce deuxième alinéa doivent être remplacés par les mots : « peut seul » ; - à la première phrase du troisième alinéa de l’article 7, les mots : « , dans des conditions fixées par le Bureau de la Haute Cour » ; - le cinquième alinéa de l’article 7. Article 2.- Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de cette même loi organique : - le dernier alinéa de l’article 5, sous la réserve énoncée au considérant 25 ; - le troisième alinéa de l’article 6, sous les réserves énoncées au considérant 33 ; - le surplus de l’article 7, sous la réserve énoncée au considérant 41. Article 3.- Les autres dispositions de la même loi organique sont conformes à la Constitution. Article 4.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 novembre 2014, où siégeaient: M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d’ESTAING, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 19 novembre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029797227.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 9 septembre 2014 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 4893 du 3 septembre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Nadav B., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit « de l’article 706-88, alinéas 7 à 9 » du code de procédure pénale. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code pénal ; Vu le code de procédure pénale ; Vu la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, notamment son article 16 ; Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2014-420/421 QPC du 9 octobre 2014 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour le requérant par la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées le 2 octobre 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour l’ordre des avocats au barreau de Marseille par Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées le 2 octobre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées les 2 et 17 octobre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Hélène Farge, pour le requérant, Me Spinosi, pour la partie intervenante et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 12 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 706-88 du code de procédure pénale, dans sa rédaction postérieure à la loi du 14 avril 2011 susvisée : « Pour l’application des articles 63, 77 et 154, si les nécessités de l’enquête ou de l’instruction relatives à l’une des infractions entrant dans le champ d’application de l’article 706-73 l’exigent, la garde à vue d’une personne peut, à titre exceptionnel, faire l’objet de deux prolongations supplémentaires de vingt-quatre heures chacune. « Ces prolongations sont autorisées, par décision écrite et motivée, soit, à la requête du procureur de la République, par le juge des libertés et de la détention, soit par le juge d’instruction. « La personne gardée à vue doit être présentée au magistrat qui statue sur la prolongation préalablement à cette décision. La seconde prolongation peut toutefois, à titre exceptionnel, être autorisée sans présentation préalable de la personne en raison des nécessités des investigations en cours ou à effectuer. « Lorsque la première prolongation est décidée, la personne gardée à vue est examinée par un médecin désigné par le procureur de la République, le juge d’instruction ou l’officier de police judiciaire. Le médecin délivre un certificat médical par lequel il doit notamment se prononcer sur l’aptitude au maintien en garde à vue, qui est versé au dossier. La personne est avisée par l’officier de police judiciaire du droit de demander un nouvel examen médical. Ces examens médicaux sont de droit. Mention de cet avis est portée au procès-verbal et émargée par la personne intéressée ; en cas de refus d’émargement, il en est fait mention. « Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, si la durée prévisible des investigations restant à réaliser à l’issue des premières quarante-huit heures de garde à vue le justifie, le juge des libertés et de la détention ou le juge d’instruction peuvent décider, selon les modalités prévues au deuxième alinéa, que la garde à vue fera l’objet d’une seule prolongation supplémentaire de quarante-huit heures. « Par dérogation aux dispositions des articles 63-4 à 63-4-2, lorsque la personne est gardée à vue pour une infraction entrant dans le champ d’application de l’article 706-73, l’intervention de l’avocat peut être différée, en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes, pendant une durée maximale de quarante-huit heures ou, s’il s’agit d’une infraction mentionnée aux 3° ou 11° du même article 706-73, pendant une durée maximale de soixante-douze heures. « Le report de l’intervention de l’avocat jusqu’à la fin de la vingt-quatrième heure est décidé par le procureur de la République, d’office ou à la demande de l’officier de police judiciaire. Le report de l’intervention de l’avocat au-delà de la vingt-quatrième heure est décidé, dans les limites fixées au sixième alinéa, par le juge des libertés et de la détention statuant à la requête du procureur de la République. Lorsque la garde à vue intervient au cours d’une commission rogatoire, le report est décidé par le juge d’instruction. Dans tous les cas, la décision du magistrat, écrite et motivée, précise la durée pour laquelle l’intervention de l’avocat est différée. « Lorsqu’il est fait application des sixième et septième alinéas du présent article, l’avocat dispose, à partir du moment où il est autorisé à intervenir en garde à vue, des droits prévus aux articles 63-4 et 63-4-1, au premier alinéa de l’article 63-4-2 et à l’article 63-4-3 » ; 2. Considérant que, selon le requérant, les dispositions contestées méconnaissent le principe de rigueur nécessaire des mesures de contrainte dans la procédure pénale et les droits de la défense ; qu’il en irait en particulier ainsi en ce que ces dispositions permettent de reporter l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue dans le cadre d’une enquête ou d’une instruction portant sur des faits qualifiés d’escroquerie en bande organisée en application du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale ; que, selon la partie intervenante, le principe même de la possibilité de reporter l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue méconnaît ces exigences constitutionnelles ; 3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les sixième à huitième alinéas de l’article 706-88 du code de procédure pénale ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 7 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Nul homme ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi, et selon les formes qu’elle a prescrites. Ceux qui sollicitent, expédient, exécutent ou font exécuter des ordres arbitraires, doivent être punis ; mais tout citoyen appelé ou saisi en vertu de la loi doit obéir à l’instant : il se rend coupable par la résistance » ; qu’aux termes de son article 9 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable, s’il est jugé indispensable de l’arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s’assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi » ; que son article 16 dispose : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; 5. Considérant que le législateur tient de l’article 34 de la Constitution l’obligation de fixer lui-même le champ d’application de la loi pénale ; que, s’agissant de la procédure pénale, cette exigence s’impose notamment pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d’infractions ; 6. Considérant, en outre, qu’il incombe au législateur d’assurer la conciliation entre, d’une part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle, et, d’autre part, l’exercice des libertés constitutionnellement garanties ; qu’au nombre de celles-ci figure le respect des droits de la défense, qui découle de l’article 16 de la Déclaration de 1789 ; 7. Considérant que les articles 63-4 à 63-4-2 du code de procédure pénale sont relatifs aux modalités selon lesquelles une personne placée en garde à vue peut bénéficier de l’assistance d’un avocat ; que l’article 63-4 prévoit que la personne gardée à vue peut avoir un entretien confidentiel d’une durée de trente minutes avec un avocat ; que l’article 63-4-1 prévoit que l’avocat peut consulter le procès-verbal constatant la notification du placement en garde à vue et des droits qui y sont attachés, les certificats médicaux établis à l’occasion de la mesure de garde à vue ainsi que les procès-verbaux d’interrogatoire de la personne en cause ; que l’article 63-4-2 prévoit que l’avocat peut être présent lors des interrogatoires et confrontations de la personne gardée à vue ; que les trois derniers alinéas de cet article fixent les conditions dans lesquelles le juge des libertés et de la détention peut autoriser le report de la présence de l’avocat lors des auditions ou confrontations ; 8. Considérant que l’article 706-88 du code de procédure pénale fixe des règles particulières applicables à la garde à vue d’une personne suspectée d’avoir commis une des infractions relevant de la délinquance et la criminalité organisées dont la liste est fixée par l’article 706-73 du même code ; que le a) de l’article 16 de la loi du 14 avril 2011 susvisée a remplacé le dernier alinéa de l’article 706-88 du code de procédure pénale par trois nouveaux alinéas ; que ces sixième à huitième alinéas prévoient que l’intervention de l’avocat au cours de la garde à vue peut être différée pendant une durée maximale de quarante-huit heures ou, s’il s’agit d’une infraction mentionnée aux 3° ou 11° du même article 706-73, pendant une durée maximale de soixante-douze heures ; que la décision de différer l’intervention de l’avocat doit être écrite et motivée en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes ; que ce report est décidé par le juge d’instruction lorsque la garde à vue est mise en œuvre au cours d’une information judiciaire ; que, dans les autres cas, il est décidé par le procureur de la République, jusqu’à la vingt-quatrième heure, et par le juge des libertés et de la détention, au delà de cette limite ; 9. Considérant que le respect des droits de la défense impose, en principe, qu’une personne soupçonnée d’avoir commis une infraction ne peut être entendue, alors qu’elle est retenue contre sa volonté, sans bénéficier de l’assistance effective d’un avocat ; que, toutefois, cette exigence constitutionnelle n’interdit pas qu’en raison de la particulière gravité ou de la complexité de certaines infractions commises par des personnes agissant en groupe ou en réseau, l’assistance de l’avocat à la personne gardée à vue puisse être reportée par une décision du procureur de la République, du juge d’instruction ou du juge des libertés et de la détention, lorsqu’un tel report apparaît nécessaire pour permettre le recueil ou la conservation des preuves ou prévenir une atteinte aux personnes ; 10. Considérant, en premier lieu, que l’appréciation du caractère proportionné, au regard de la gravité et de la complexité des faits à l’origine de l’enquête ou de l’instruction, de l’atteinte aux droits de la défense qui résulte de la faculté de report de l’intervention de l’avocat ne peut s’apprécier qu’au regard des dispositions qui énoncent les infractions pour lesquelles sont autorisées ces mesures dérogatoires aux règles de droit commun relatives à la garde à vue ; que le grief tiré de ce que les dispositions contestées permettent le report de l’intervention de l’avocat lorsque la personne gardée à vue est suspectée d’avoir participé à des faits d’escroquerie en bande organisée met en cause non l’article 706-88 du code de procédure pénale en lui-même, mais la mention du délit d’escroquerie en bande organisée au 8° bis de l’article 706-73 ; qu’au surplus, par sa décision du 9 octobre 2014 susvisée, le Conseil constitutionnel a déclaré ce 8° bis contraire à la Constitution ; qu’il a reporté au 1er septembre 2015 la date de l’abrogation de cette disposition et a jugé, d’une part que les dispositions du 8° bis de l’article 706-73 du code de procédure pénale ne sauraient être interprétées comme permettant, à compter de la publication de la décision du 9 octobre 2014, pour des faits d’escroquerie en bande organisée, le recours à la garde à vue prévue par l’article 706-88 du code de procédure pénale et, d’autre part, que les mesures de garde à vue prises avant la publication de la décision du 9 octobre 2014 en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité ; 11. Considérant, en deuxième lieu, que, si le report de l’intervention de l’avocat dans les conditions prévues par l’article 706-88 du code de procédure pénale ne peut être décidé que lorsque la personne gardée à vue est suspectée d’avoir commis l’une des infractions prévues par l’article 706-73, cette condition n’est pas suffisante pour justifier ce report ; qu’en effet, le report de l’intervention de l’avocat en application des dispositions contestées doit en outre être motivé, au cas par cas, en considération de raisons impérieuses tenant aux circonstances particulières de l’enquête ou de l’instruction, soit pour permettre le recueil ou la conservation des preuves, soit pour prévenir une atteinte aux personnes ; que la décision initiale de reporter cette intervention appartient, selon le cas, au procureur de la République ou au juge d’instruction ; qu’il incombe en particulier à ce magistrat d’apprécier, en fonction des circonstances de l’affaire, si le report doit s’appliquer à l’ensemble des modalités d’intervention de l’avocat en application de l’article 706-88 ou si les modalités de report de l’intervention de l’avocat prévues par les trois derniers alinéas de l’article 63-4-2 sont suffisantes ; 12. Considérant, en troisième lieu, qu’il appartient au magistrat compétent de fixer, en considération des raisons impérieuses rappelées ci-dessus, par une décision écrite et motivée, la durée pendant laquelle l’intervention de l’avocat est reportée ; qu’au-delà de vingt-quatre heures, ce report ne peut être décidé que par un magistrat du siège ; que cette durée ne peut en tout état de cause excéder quarante-huit heures ou, en matière de terrorisme et de trafic de stupéfiants, soixante-douze heures ; 13. Considérant, en quatrième lieu, qu’en application des dispositions de l’article 63-1 du code de procédure pénale, même lorsqu’il est fait application des dispositions contestées, la personne placée en garde à vue est notamment informée, dès le début de la garde à vue, « de la qualification, de la date et du lieu présumés de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre ainsi que des motifs mentionnés aux 1° à 6° de l’article 62-2 justifiant son placement en garde à vue », « du droit de consulter, dans les meilleurs délais et au plus tard avant l’éventuelle prolongation de la garde à vue, les documents mentionnés à l’article 63-4-1 », ainsi que du droit « de se taire » ; 14. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’en elles-mêmes, les dispositions des sixième à huitième alinéas de l’article 706-88 du code de procédure pénale ne portent pas une atteinte disproportionnée au droits de la défense ; qu’elles ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit et doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les sixième à huitième alinéas de l’article 706-88 du code de procédure pénale, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue, sont conformes à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 21 novembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 10 septembre 2014 par le président de la Polynésie française, dans les conditions prévues par l’article 12 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, d’une demande tendant à ce qu’il constate que « des dispositions du 2°, 3°, 8° au 26°, 29° au 36° du I et celles du V de l’article 10 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures » sont intervenues dans des matières ressortissant à la compétence de la Polynésie française. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment ses articles 74 et 74-1 ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française ; Vu la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures ; Vu les observations du Premier ministre, enregistrées le 26 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant, qu’aux termes de l’article 12 de la loi organique du 27 février 2004 susvisée, pris en application du neuvième alinéa de l’article 74 de la Constitution : « Lorsque le Conseil constitutionnel a constaté qu’une loi promulguée postérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi organique est intervenue dans les matières ressortissant à la compétence de la Polynésie française, en tant qu’elle s’applique à cette dernière, cette loi peut être modifiée ou abrogée par l’assemblée de la Polynésie française » ; que le président de la Polynésie française demande au Conseil constitutionnel de constater que les dispositions du 2° du paragraphe I de l’article 10 de la loi du 12 mai 2009 susvisée, qui modifient l’article 1672 du code civil, ainsi que celles des 3°, 8° au 26°, 29° au 36° du même paragraphe et celles du paragraphe V du même article sont intervenues dans une matière ressortissant à la compétence de cette collectivité d’outre-mer ; - SUR LES DISPOSITIONS DONT LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL EST SAISI : 2. Considérant que celles  des dispositions du 2° du paragraphe  I de l’article 10 de la loi du 12 mai 2009 sur lesquelles porte la demande du président de la Polynésie française ainsi que celles des 3°, 8° à 14°, 16° à 26°, 29°, 30°, 32°, 34° à 36° du même paragraphe modifient les articles 524, 585, 1606, 1655, 1659, 1662, 1664, 1667, 1668, 1671 1672, 1696, 1697, 1714, 1743, 1779, 1801, 1819, 1827 à 1829, 1839, 1874, 1875, 1879, 1894, 1895, 1919, 1953, 1964, 2373, 2387, 2388 et 2392 du code civil ; que les dispositions des 15°, 17° et 33° du de ce même paragraphe modifient les intitulés de la section 1 du chapitre III du titre VIII du livre III, celui de la section 4 du chapitre IV du même titre, celui du paragraphe 2 de la section 4 du chapitre IV du même titre et celui du chapitre II du sous-titre III du titre II du livre IV du code civil ; que les dispositions du 31° de ce même paragraphe I de ce même article 10 de la même loi abrogent l’article 1982 du code civil ; 3. Considérant que le paragraphe V de l’article 10 de la loi du 12 mai 2009 dispose « Le I est applicable dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie » ; 4. Considérant que la demande du président de la Polynésie française doit être regardée comme portant sur les mots « , en Polynésie française » figurant au paragraphe V de l’article 10 de la loi du 12 mai 2009 en tant qu’ils rendent applicables, dans cette collectivité, les dispositions du 2° du paragraphe I  de cet article 10, qui modifient l’article 1672 du code civil, ainsi que celles des 3°, 8° au 26°, 29° au 36° du même paragraphe ; - SUR LA COMPÉTENCE DE LA POLYNÉSIE FRANCAISE : 5. Considérant que le premier alinéa de l’article 13 de la loi organique du 27 février 2004 dispose : « Les autorités de la Polynésie française sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l’État par l’article 14 et celles qui ne sont pas dévolues aux communes en vertu des lois et règlements applicables en Polynésie française » ; que son article 14 dispose : « Les autorités de l’État sont compétentes dans les seules matières suivantes : - 1° Nationalité ; droits civiques ; droit électoral ; droits civils, état et capacité des personnes, notamment actes de l’état civil, absence, mariage, divorce, filiation ; autorité parentale ; régimes matrimoniaux, successions et libéralités » ; qu’il résulte de ces dispositions combinées que la Polynésie française est compétente en matière de droit civil à l’exception des matières expressément réservées à la compétence de l’État par le 1° de l’article 14 de la loi organique du 27 février 2004 ; 6. Considérant que les dispositions susmentionnées du code civil qui ont été modifiées ou abrogées par les dispositions susmentionnées du paragraphe I de l’article 10 de la loi du 12 mai 2009 ne sont relatives à aucune des matières qui ressortissent à la compétence de l’État en vertu des dispositions du 1° de l’article 14 de la loi organique du 27 février 2004 ; que, par suite, en rendant applicables en Polynésie française les dispositions du 2° du paragraphe I de l’article 10 de la loi du 12 mai 2009, qui modifient l’article 1672 du code civil, ainsi que celles des 3°, 8° au 26° et 29° au 36°du même paragraphe, les mots : « , en Polynésie française » figurant au paragraphe V de ce même article 10 sont intervenus dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française, D É C I D E : Article 1er.- Sont intervenus dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française  les mots « , en Polynésie française » figurant au paragraphe V de l’article 10 de la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009 de simplification et de clarification du droit et d’allègement des procédures, en tant qu’ils rendent applicables en Polynésie française les dispositions du 2° du paragraphe I de cet article 10, qui modifient l’article 1672 du code civil, ainsi que celles des 3°, 8° au 26° et 29° au 36° du même paragraphe. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 19 novembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi les 10, 16 et 28 octobre 2014 de trois demandes présentées par M. Jean-Louis M. et tendant à ce que le Conseil constitutionnel se prononce, en application de la dernière phrase du premier alinéa de l’article 23-7 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, sur des questions prioritaires de constitutionnalité posée par lui devant le Premier président de la Cour de cassation à l’occasion de recours contre des décisions rendues en matière d’aide juridictionnelle. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant, en premier lieu, que M. M. a déposé au bureau d’aide juridictionnelle de la Cour de cassation, le 18 juin 2013, une demande d’aide juridictionnelle en vue de former des requêtes en rabat d’arrêt contre deux arrêts de la Cour de cassation des 7 juin 2007 et 19 février 2009 ; que le président du bureau d’aide juridictionnelle a rejeté cette demande le 22 mai 2014 ; que M. M. a formé un recours contre cette décision le 10 juin 2014 devant le Premier président de la Cour de cassation et posé à cette occasion une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 2,7, 20, 23, 25 et 70 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée ; 2. Considérant, en deuxième lieu, que M. M. a déposé au bureau d’aide juridictionnelle de la Cour de cassation, le 21 février 2014, une demande d’aide juridictionnelle en vue de former une requête en rabat d’arrêt contre un arrêt de la Cour de cassation du 25 février 2009 ; que le président du bureau d’aide juridictionnelle a déclaré cette demande irrecevable le 20 mars 2014 ; que, le 22 avril 2014, M. M. a formé un recours contre cette décision devant le Premier président de la Cour de cassation et posé à cette occasion une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions susmentionnées de la loi du 10 juillet 1991 ainsi que de l’article 1er de la loi organique n° 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application de l’article 61-1 de la Constitution, des articles 9 et 10 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances et de l’article 33 de la loi n° 2011-94 du 25 janvier 2011 portant réforme de la représentation devant les cours d’appel ; 3. Considérant, en troisième lieu, que M. M. a déposé au bureau d’aide juridictionnelle de la Cour de cassation une demande d’aide juridictionnelle en vue de se pourvoir en cassation contre un arrêt de la cour d’appel de Paris du 25 avril 2013 ; que, par décision du 28 mars 2014, le bureau d’aide juridictionnelle a rejeté cette demande ; que M. M. a formé un recours contre cette décision devant le Premier président de la Cour de cassation le 14 avril 2014 et posé à cette occasion une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des mêmes dispositions que celles visées par la précédente question prioritaire de constitutionnalité ; 4. Considérant que par trois demandes distinctes enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel les 10, 16 et 28 octobre 2014, M. M. soutient que la Cour de cassation ne s’est pas prononcée sur ces trois questions prioritaires de constitutionnalité dans le délai de trois mois à compter de sa saisine ; qu’il entend transmettre ces questions au Conseil constitutionnel en application de l’article 23-7 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée ; 5. Considérant qu’il y a lieu de joindre ces trois demandes pour statuer par une même décision ; 6. Considérant que, d’une part, aux termes de l’article 61-1 de la Constitution « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; 7. Considérant que, pour l’application de ces dispositions, les articles 23-1 et 23-2 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 fixent les conditions dans lesquelles une question prioritaire de constitutionnalité posée devant les juridictions relevant du Conseil d’État ou de la Cour de cassation peut être transmise au Conseil d’État ou à la Cour de cassation ; que l’article 23-5 fixe les conditions dans lesquelles une question prioritaire de constitutionnalité peut être posée à l’occasion d’une instance devant le Conseil d’État ou la Cour de cassation ; que la première phrase de l’article 23-4 et la première phrase de l’article 23-5 imposent au Conseil d’État et à la Cour de cassation de se prononcer dans un délai de trois mois sur le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel ; que la dernière phrase du premier alinéa de son article 23-7 dispose : « Si le Conseil d’État ou la Cour de cassation ne s’est pas prononcé dans les délais prévus aux articles 23-4 et 23-5, la question est transmise au Conseil constitutionnel » ; 8. Considérant, d’autre part, que, selon l’article 13 de la loi du 10 juillet 1991 susvisée, le bureau d’aide juridictionnelle établi au siège de chaque tribunal de grande instance est chargé de se prononcer sur les demandes d’admission à l’aide juridictionnelle relatives aux instances portées devant les juridictions du premier et du second degré, à l’exécution de leurs décisions et aux transactions avant l’introduction de l’instance ; que selon l’article 14 de ladite loi, les bureaux d’aide juridictionnelle institués auprès de la Cour de cassation, du Conseil d’État, des commissions de recours des réfugiés se prononcent sur les demandes relatives aux affaires portées devant chacune de ces juridictions ainsi que, s’il y a lieu, aux actes de procédure d’exécution ; que le bureau près le Conseil d’État est également compétent pour les demandes relevant du Tribunal des conflits et de la Cour supérieure d’arbitrage ; que son article 23 dispose : « Les décisions du bureau d’aide juridictionnelle, de la section du bureau ou de leur premier président peuvent être déférées, selon le cas, au président de la cour d’appel ou de la Cour de cassation, au président de la cour administrative d’appel, au président de la section du contentieux du Conseil d’État, au vice-président du Tribunal des conflits, au président de la Cour nationale du droit d’asile ou au membre de la juridiction qu’ils ont délégué. Ces autorités statuent sans recours » ; 9. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la procédure d’admission à l’aide juridictionnelle n’est pas, en tout état de cause, au sens de l’article 61-1 de la Constitution, une instance en cours à l’occasion de laquelle une question prioritaire de constitutionnalité peut être posée ; que les demandes de M. M. ne sont donc pas recevables, D É C I D E : Article 1er.- Les demandes de M. Jean-Louis M. sont rejetées. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 21 novembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 17 septembre 2014 par la Cour de cassation (première chambre civile, arrêt n° 1180 du 17 septembre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par Mme Barbara D., Mme Evelyne C., Mme Anne-Maxence M., M. Jean-Matthieu M., Mme Jacqueline M., M. Paul M., Mme Jacquelyn M. épouse M. et Mme Alexina M., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de « l’article 1er du décret du 19 juillet 1793 tel qu’interprété par l’arrêt des chambres réunies de la Cour de cassation du 27 mai 1842 » . LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi décrétée le 19 juillet 1793 relative aux droits de propriété des auteurs d’écrits en tout genre, compositeurs de musique, peintres et dessinateurs ; Vu la loi du 11 mars 1902 étendant aux œuvres de sculpture l’application de la loi des 19-24 juillet 1793 sur la propriété artistique et littéraire ; Vu la loi du 11 avril 1910 relative à la protection du droit des auteurs en matière de reproduction des œuvres d’art ; Vu la loi n° 57-298 du 11 mars 1957 sur la propriété littéraire et artistique ; Vu les arrêts de la Cour de cassation du 27 mai 1842 (chambres réunies), 19 mars 1926 (chambre criminelle), 16 juin 1982 (première chambre civile, n° 81-10805) et 25 mai 2005 (première chambre civile, n° 02-17305) ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour M. Pierre K., partie en défense, par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 9 et 24 octobre 2014 ; Vu les observations produites pour les requérants par la SCP Roger, Sevaux et Mathonnet, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées le 10 octobre 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour M. Claude R. pris en son nom personnel, Mme Paloma R., l’EURL Picasso Administration, M. Claude R. en sa qualité d’administrateur de la succession PICASSO, par Me Didier Le Prado, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 10 et 27 octobre 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour M. Bernard R. par la SCP Bernard Hemery et Carole Thomas-Raquin, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 10 et 27 octobre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 10 octobre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Anne Sevaux, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour les requérants, Me Emmanuel Piwnica, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour la partie en défense, Me Carole Thomas-Raquin et Me Le Prado pour les parties intervenantes, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 12 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 1er de la loi décrétée le 19 juillet 1793 relative aux droits de propriété des auteurs d’écrits en tout genre, compositeurs de musique, peintres et dessinateurs, dans sa rédaction issue de la loi du 11 mars 1902 susvisée : « Les auteurs d’écrits en tout genre, les compositeurs de musique, les architectes, les statuaires, les peintres et dessinateurs qui feront graver des tableaux ou dessins, jouiront, durant leur vie entière, du droit exclusif de vendre, faire vendre, distribuer leurs ouvrages dans le territoire de la République, et d’en céder la propriété en tout ou en partie. « Le même droit appartiendra aux sculpteurs et dessinateurs d’ornement, quels que soient le mérite et la destination de l’œuvre » ; 2. Considérant qu’il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que, pour la vente intervenue antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 11 avril 1910 susvisée, la cession d’une œuvre faite sans réserve transfère également à l’acquéreur le droit de la reproduire ; 3. Considérant que, selon les requérants, ces dispositions ainsi interprétées ont pour effet de priver l’auteur d’une œuvre qui en cède le support matériel de son droit de propriété intellectuelle sans qu’il y ait consenti ; qu’en faisant de la propriété incorporelle un simple accessoire de la propriété sur l’œuvre, elles porteraient atteinte à la protection constitutionnelle du droit de propriété ; qu’elles méconnaîtraient également le droit au maintien des contrats légalement conclus et l’objectif à valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité  de la loi ; que les parties intervenantes reprochent encore aux dispositions contestées de porter atteinte à la liberté contractuelle ; -SUR LES GRIEFS TIRÉS D’UNE ATTEINTE AU DROIT DE PROPRIÉTÉ ET À LA LIBERTÉ CONTRACTUELLE : 4. Considérant que la propriété figure au nombre des droits de l’homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; qu’aux termes de son article 17 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité » ; qu’en l’absence de privation du droit de propriété au sens de cet article, il résulte néanmoins de l’article 2 de la Déclaration de 1789 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d’intérêt général et proportionnées à l’objectif poursuivi ; 5. Considérant que les finalités et les conditions d’exercice du droit de propriété ont connu depuis 1789 une évolution caractérisée par une extension de son champ d’application à des domaines nouveaux et, notamment, à la propriété intellectuelle ; qu’à ce titre, figure le droit, pour les titulaires du droit d’auteur et de droits voisins, de jouir de leurs droits de propriété intellectuelle et de les protéger dans le cadre défini par la loi et les engagements internationaux de la France ; 6. Considérant qu’il est loisible au législateur d’apporter à la liberté contractuelle, qui découle de l’article 4 de la Déclaration de 1789, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l’intérêt général, à la condition qu’il n’en résulte pas d’atteintes disproportionnées au regard de l’objectif poursuivi ; 7. Considérant que les dispositions contestées, telles qu’interprétées selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, sont applicables aux ventes réalisées avant l’entrée en vigueur de la loi du 11 avril 1910 ; qu’elles déterminent l’étendue de la cession volontairement réalisée par l’auteur de l’œuvre ; que les dispositions contestées instaurent une règle de présomption qui respecte la faculté, pour les parties à l’acte de cession, de réserver le droit de reproduction ; que ni la protection constitutionnelle des droits de la propriété intellectuelle ni celle de la liberté contractuelle ne s’opposent à une règle selon laquelle la cession du support matériel de l’œuvre emporte cession du droit de reproduction à moins que les parties décident d’y déroger  par une stipulation contraire ; que, par suite, les griefs tirés d’une atteinte au droit de propriété et à la liberté contractuelle doivent être écartés ; -SUR LES AUTRES GRIEFS : 8. Considérant qu’il est à tout moment loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d’abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d’autres dispositions ; que, ce faisant, il ne saurait toutefois priver de garanties légales des exigences constitutionnelles ; qu’en particulier, il méconnaîtrait la garantie des droits proclamée par l’article 16 de la Déclaration de 1789 s’il portait aux situations légalement acquises une atteinte qui ne soit justifiée par un motif d’intérêt général suffisant ; que, de même, il ne respecterait pas les exigences résultant des articles 4 et 16 de la Déclaration de 1789 s’il portait aux contrats légalement conclus une atteinte qui ne soit justifiée par un tel motif ; 9. Considérant que la loi décrétée le 19 juillet 1793 telle qu’interprétée par la Cour de cassation n’a porté atteinte ni aux conventions légalement conclues ni à une situation légalement acquise ; que, par suite, les griefs doivent être écartés ; 10. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont en tout état de cause pas inintelligibles, ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit et doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- L’article 1er de la loi décrétée le 19  juillet 1793 relative aux droits de propriété des auteurs d’écrits en tout genre, compositeurs de musique, peintres et dessinateurs, dans sa rédaction résultant de la loi du 11 mars 1902 étendant aux œuvres de sculpture l’application de cette loi, est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 21 novembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 10 septembre 2014 par le Conseil d’État (décision n° 381108 du 10 septembre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Pierre T., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816 sur les finances. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi du 28 avril 1816 modifiée sur les finances ; Vu l’ordonnance n° 45-2590 du 2 novembre 1945 relative au statut du notariat, notamment ses articles 1er et 1er bis ; Vu la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l’allégement des démarches administratives, notamment son article 29 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour le requérant par Me Jean de Calbiac, avocat au barreau de Paris, enregistrées les 1er et 16 octobre 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour le Conseil supérieur du notariat par le cabinet Veil Jourde, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 2 octobre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 2 octobre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Jean de Calbiac pour le requérant, Me Emmanuel Glaser, avocat au barreau de Paris, pour la partie intervenante et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 12 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816 susvisée : « Les avocats à la Cour de cassation, notaires, greffiers, huissiers, courtiers, commissaires-priseurs pourront présenter à l’agrément de Sa Majesté des successeurs, pourvu qu’ils réunissent les qualités exigées par les lois. Cette faculté n’aura pas lieu pour les titulaires destitués. Les successeurs présentés à l’agrément, en application du présent alinéa, peuvent être des personnes physiques ou des sociétés civiles professionnelles. « Il sera statué par une loi particulière, sur l’exécution de cette disposition, et sur les moyens d’en faire jouir les héritiers et ayants-cause desdits officiers. « Cette faculté de présenter des successeurs ne déroge point, au surplus, au droit de Sa Majesté de réduire le nombre desdits fonctionnaires, notamment celui des notaires, dans les cas prévus par la loi du 25 ventôse an XI sur le notariat » ; 2. Considérant que, selon le requérant, les notaires exercent une fonction qui est au nombre des « dignités, places et emplois publics » au sens de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; qu’en permettant à tout notaire titulaire d’un office de présenter son successeur à l’agrément du garde des sceaux, ministre de la justice, les dispositions contestées méconnaîtraient le principe d’égale admissibilité aux « dignités, places et emplois publics » ; qu’en outre, le requérant fait valoir que ces dispositions méconnaissent le principe d’égalité devant la commande publique garanti par les articles 6 et 14 de la Déclaration de 1789 ; 3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le mot « notaires » figurant dans la première phrase du premier alinéa de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816 ; 4. Considérant que, selon l’article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse. Tous les citoyens étant égaux à ses yeux sont également admissibles à toutes dignités, places et emplois publics, selon leur capacité, et sans autre distinction que celle de leurs vertus et de leurs talents » ; 5. Considérant que le premier alinéa de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816 permet aux notaires titulaires d’un office de présenter à l’agrément du garde des sceaux, ministre de la justice, des successeurs « pourvu qu’ils réunissent les qualités exigées par les lois » ; qu’en vertu du même alinéa, cette faculté n’a pas lieu pour les titulaires destitués ; 6. Considérant que l’article 1er de l’ordonnance du 2 novembre 1945 susvisée dispose : « Les notaires sont les officiers publics, établis pour recevoir tous les actes et contrats auxquels les parties doivent ou veulent faire donner le caractère d’authenticité attaché aux actes de l’autorité publique, et pour en assurer la date, en conserver le dépôt, en délivrer des grosses et expéditions » ; 7. Considérant que l’article 1er bis de cette même ordonnance précise les modalités d’exercice de la profession de notaire ; qu’il prévoit, en particulier, que « le notaire peut exercer sa profession soit à titre individuel, soit dans le cadre d’une société civile professionnelle ou d’une société d’exercice libéral, soit en qualité de salarié d’une personne physique ou morale titulaire d’un office notarial » ; qu’ainsi, les notaires exercent une profession réglementée dans un cadre libéral au sens du paragraphe I de l’article 29 de la loi du 22 mars 2012 susvisée ; 8. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que, s’ils participent à l’exercice de l’autorité publique et ont ainsi la qualité d’officier public nommé par le garde des sceaux, les notaires titulaires d’un office n’occupent pas des « dignités, places et emplois publics » au sens de l’article 6 de la Déclaration de 1789 ; que, par suite, le grief tiré de ce que le droit reconnu au notaire de présenter son successeur à l’agrément du garde des sceaux méconnaîtrait le principe d’égal accès aux dignités, places et emplois publics est inopérant ; 9. Considérant que la nomination d’un notaire ne constitue pas une commande publique ; que, dès lors, le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité devant la commande publique est également inopérant ; que, par suite, le mot « notaires » figurant dans la première phrase du premier alinéa de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816, qui n’est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Le mot « notaires » figurant dans la première phrase du premier alinéa de l’article 91 de la loi du 28 avril 1816 modifiée sur les finances est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 21 novembre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029775098.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 25 août 2014 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 4789 du 20 août 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par l’association Mouvement raëlien international, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des deuxième et troisième alinéas de l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour l’association requérante par Me Dominique Foussard, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, enregistrées les 16 septembre et 1er octobre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 16 septembre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Foussard pour l’association requérante, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 21 octobre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 susvisée : « Toute association qui voudra obtenir la capacité juridique prévue par l’article 6 devra être rendue publique par les soins de ses fondateurs. « La déclaration préalable en sera faite à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l’arrondissement où l’association aura son siège social. Elle fera connaître le titre et l’objet de l’association, le siège de ses établissements et les noms, professions et domiciles et nationalités de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de son administration. Un exemplaire des statuts est joint à la déclaration. Il sera donné récépissé de celle-ci dans le délai de cinq jours. « Lorsque l’association aura son siège social à l’étranger, la déclaration préalable prévue à l’alinéa précédent sera faite à la préfecture du département où est situé le siège de son principal établissement. « L’association n’est rendue publique que par une insertion au Journal officiel, sur production de ce récépissé. « Les associations sont tenues de faire connaître, dans les trois mois, tous les changements survenus dans leur administration, ainsi que toutes les modifications apportées à leurs statuts. « Ces modifications et changements ne sont opposables aux tiers qu’à partir du jour où ils auront été déclarés. « Les modifications et changements seront en outre consignés sur un registre spécial qui devra être présenté aux autorités administratives ou judiciaires chaque fois qu’elles en feront la demande » ; 2. Considérant que, selon l’association requérante, les dispositions des deuxième et troisième alinéas de cet article, qui exigent qu’une association ayant son siège social à l’étranger et souhaitant ester en justice en France dépose sa déclaration préalable à la préfecture du département où est situé le siège de son principal établissement, interdisent à une association n’ayant pas d’établissement principal en France d’ester en justice et méconnaissent donc son droit à un recours effectif ; 3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le troisième alinéa de l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 susvisée ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; qu’il ressort de cette disposition qu’il ne doit pas être porté d’atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d’exercer un recours effectif devant une juridiction ; 5. Considérant que les quatre premiers alinéas de l’article 6 de la loi du 1er juillet 1901 susvisée prévoient que toute association régulièrement déclarée peut, sans aucune autorisation spéciale, ester en justice, recevoir des dons manuels ainsi que des dons d’établissements d’utilité publique, acquérir à titre onéreux, posséder et administrer les cotisations de ses membres, le local destiné à l’administration de l’association et à la réunion de ses membres et les immeubles strictement nécessaires à l’accomplissement du but qu’elle se propose ; que l’article 5 de cette loi dispose que, pour obtenir la capacité juridique prévue par l’article 6, toute association doit être rendue publique par ses fondateurs ; que, pour les associations ayant leur siège social en France, l’acquisition de la personnalité morale est subordonnée à la déclaration préalable de leur existence à la préfecture du département ou à la sous-préfecture de l’arrondissement où l’association a son siège social ; que, pour les associations ayant leur siège social à l’étranger, le troisième alinéa de l’article 5 prévoit que la déclaration doit être faite à la préfecture du département où est situé le siège de son principal établissement ; qu’en toute hypothèse, l’association n’est rendue publique que par une insertion au Journal officiel ; 6. Considérant qu’aucune exigence constitutionnelle ne fait obstacle à ce que la reconnaissance en France de la personnalité morale des associations ayant leur siège social à l’étranger et disposant d’un établissement en France soit subordonnée, comme pour les associations ayant leur siège social en France, à une déclaration préalable de leur part à la préfecture du département où est situé le siège de leur principal établissement ; 7. Considérant, toutefois, que les dispositions du troisième alinéa de l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 n’ont pas pour objet et ne sauraient, sans porter une atteinte injustifiée au droit d’exercer un recours juridictionnel effectif, être interprétées comme privant les associations ayant leur siège à l’étranger, dotées de la personnalité morale en vertu de la législation dont elles relèvent mais qui ne disposent d’aucun établissement en France, de la qualité pour agir devant les juridictions françaises dans le respect des règles qui encadrent la recevabilité de l’action en justice ; que, sous cette réserve, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les exigences de l’article 16 de la Déclaration de 1789 ; 8. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Sous la réserve énoncée au considérant 7, le troisième alinéa de l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 6 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 7 novembre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029775099.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 3 septembre 2014 par la Cour de cassation (chambre commerciale, arrêt n° 838 du 2 septembre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par la Société Mutuelle Saint-Christophe, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions du 1° de l’article 1001 du code général des impôts. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code général des impôts ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la société requérante par la SELARL FIDAL, avocat au barreau des Hauts-de-Seine, enregistrées les 29 septembre et 13 octobre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 29 septembre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Sylvie Vaquieri, avocat au barreau des Hauts-de-Seine, pour la société requérante, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 4 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes du 1° de l’article 1001 du code général des impôts,  le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d’assurances est fixé : « Pour les assurances contre l’incendie : « À 7 % pour les assurances contre l’incendie relatives à des risques agricoles non exonérés ; sont, d’une manière générale, considérées comme présentant le caractère d’assurance de risques agricoles, les assurances de tous les risques des personnes physiques ou morales exerçant exclusivement ou principalement une profession agricole ou connexe à l’agriculture telles que ces professions sont définies par les articles L. 722-9 et L. 722-28 du code rural et de la pêche maritime, ainsi que les assurances des risques des membres de leurs familles vivant avec eux sur l’exploitation et de leur personnel et les assurances des risques, par leur nature, spécifiquement agricoles ou connexes ; « À 24 % pour les assurances contre l’incendie souscrites auprès des caisses départementales ; « À 30 % pour toutes les autres assurances contre l’incendie ; « Toutefois les taux de la taxe sont réduits à 7 % pour les assurances contre l’incendie des biens affectés de façon permanente et exclusive à une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, ainsi que des bâtiments administratifs des collectivités locales » ; 2. Considérant que la société requérante soutient qu’en ne permettant pas aux établissements d’enseignement privés de bénéficier, pour leurs bâtiments, du taux réduit de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance contre l’incendie appliqué aux établissements d’enseignement publics qui occupent des bâtiments administratifs des collectivités territoriales, les dispositions contestées portent atteinte au principe d’égalité ainsi qu’au principe constitutionnel de la liberté d’enseignement ; que, selon elle, il conviendrait, en tout état de cause, de prévoir que les établissements d’enseignement privés soient regardés, pour l’application de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance, comme exerçant une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ; 3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le dernier alinéa du 1° de l’article 1001 du code général des impôts ; 4. Considérant, en premier lieu, qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; qu’aux termes de l’article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; qu’en vertu de l’article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être assujettis les contribuables ; qu’en particulier, pour assurer le respect du principe d’égalité, il doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu’il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ; 5. Considérant qu’en vertu des dispositions précitées du quatrième alinéa du 1° de l’article 1001 du code général des impôts, le taux normal de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance contre l’incendie est fixé à 30 % ; que, par dérogation, ce taux est fixé, notamment, à 24 % pour les assurances souscrites auprès des caisses départementales et à 7 % pour les biens affectés de façon permanente et exclusive à une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, ainsi que pour les bâtiments administratifs des collectivités territoriales, respectivement par les troisième et dernier alinéas du 1° de l’article 1001 ; qu’il en résulte que les contrats d’assurance contre l’incendie souscrits pour les bâtiments occupés par des établissements d’enseignement publics ouvrent droit au bénéfice du taux réduit de 7 % prévu par le dernier alinéa du 1° de l’article 1001 lorsqu’il s’agit de bâtiments administratifs des collectivités territoriales ; 6.  Considérant, d’une part, que le principe d’égalité devant l’impôt et les charges publiques n’impose pas que les personnes privées soient soumises à des règles d’assujettissement à l’impôt identiques à celles qui s’appliquent aux personnes morales de droit public ; que ce principe ne fait pas davantage obstacle à ce que le législateur prévoie des taux d’imposition différents pour la taxe spéciale sur les contrats d’assurance selon que sont assurés les biens affectés de façon permanente et exclusive à une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole ou d’autres biens ; que, par suite, doit être écarté le grief tiré de ce que serait contraire à ce principe la règle prévoyant un taux réduit de la taxe spéciale sur les contrats d’assurance contre l’incendie des bâtiments administratifs des collectivités territoriales, d’une part, et des biens affectés de façon permanente et exclusive à une activité industrielle, commerciale, artisanale ou agricole, d’autre part, alors que les contrats d’assurance portant sur des biens affectés à des personnes privées, pour des activités de service à caractère non commercial, tel que les établissements d’enseignement privés, sont soumis à un taux d’imposition supérieur ; que, d’autre part, les taux de 24 % ou 30 % qui sont susceptibles d’être appliqués pour les assurances contre l’incendie de bâtiments occupés par des établissements d’enseignement privés ne font pas peser sur ces derniers une charge excessive au regard de leurs facultés contributives ; que, par suite, le dernier alinéa du 1° de l’article 1001 du code général des impôts ne porte pas atteinte au principe d’égalité devant l’impôt et les charges publiques ; 7. Considérant, en second lieu, que la liberté de l’enseignement constitue l’un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, réaffirmés par le Préambule de la Constitution de 1946 auquel se réfère le Préambule de la Constitution de 1958 ; 8. Considérant que l’application du taux normal de la taxe spéciale sur les contrats d’assurances contre l’incendie aux bâtiments occupés par des établissements d’enseignement privés n’est pas de nature à porter atteinte à la liberté d’enseignement ; que le grief doit être écarté ; 9. Considérant que le dernier alinéa du 1° de l’article 1001 du code général des impôts n’est contraire à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; qu’il doit être déclaré conforme à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Le dernier alinéa du 1° de l’article 1001 du code général des impôts est conforme à la Constitution. Article2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 13 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 14 novembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 9 septembre 2014 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 4895 du 3 septembre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Mario S., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 1° de l’article 696-4 du code de procédure pénale. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de procédure pénale ; Vu la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 1er octobre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Jérôme Rousseau, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour le requérant, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 4 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que, dans sa rédaction résultant de la loi du 9 mars 2004 susvisée, le 1°  de l’article 696-4 du code de procédure pénale dispose que l’extradition n’est pas accordée : « Lorsque la personne réclamée a la nationalité française, cette dernière étant appréciée à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise » ; 2. Considérant que, selon le requérant, en prévoyant que, pour l’application de la règle selon laquelle la France n’extrade pas ses nationaux, la nationalité de la personne dont l’extradition est demandée est appréciée à l’époque de la commission de l’infraction, ces dispositions procèdent à une distinction entre Français qui méconnaît le principe d’égalité ; 3. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « , cette dernière étant appréciée à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise » figurant au 1° de l’article 696-4 du code de procédure pénale ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu’elle protège, soit qu’elle punisse » ; que le principe d’égalité ne s’oppose ni à ce que législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général, pourvu que, dans l’un et l’autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l’objet de la loi qui l’établit ; 5. Considérant que le premier alinéa de l’article 696-2 du code de procédure pénale dispose : « Le gouvernement français peut remettre, sur leur demande, aux gouvernements étrangers, toute personne n’ayant pas la nationalité française qui, étant l’objet d’une poursuite intentée au nom de l’État requérant ou d’une condamnation prononcée par ses tribunaux, est trouvée sur le territoire de la République » ; que l’article 696-4 du même code énumère les cas dans lesquels l’extradition n’est pas accordée ; que le 1° de cet article prévoit que la nationalité française de la personne dont l’extradition est réclamée y fait obstacle, et précise que la nationalité est appréciée à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise ; 6. Considérant qu’en interdisant l’extradition des nationaux français, le législateur a reconnu à ces derniers le droit de n’être pas remis à une autorité étrangère pour les besoins de poursuites ou d’une condamnation pour une infraction pénale ; que la différence de traitement dans l’application de cette protection, selon que la personne avait ou non la nationalité française à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise, est fondée sur une différence de situation en rapport direct avec l’objet de la loi ; que le législateur a également entendu faire obstacle à l’utilisation des règles relatives à l’acquisition de la nationalité pour échapper à l’extradition ; que, par suite, en prévoyant que la nationalité de la personne dont l’extradition est demandée s’apprécie à l’époque de l’infraction, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe d’égalité devant la loi ; 7. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les mots « , cette dernière étant appréciée à l’époque de l’infraction pour laquelle l’extradition est requise » figurant au 1° de l’article 696-4 du code de procédure pénale sont conformes à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 13 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 14 novembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 8 septembre 2014 par le Conseil d’État (décision du Conseil d’État n° 381813 du 8 septembre 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Alain L., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l’article 2 de la loi du 23 juin 1941 relative à l’exportation des œuvres d’art. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi n° 2595 du 23 juin 1941 relative à l’exportation des œuvres d’art ; Vu la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992 relative aux produits soumis à certaines restrictions de circulation et à la complémentarité entre les services de police, de gendarmerie et de douane ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour le requérant par Me Lionel Levain, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 30 septembre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 30 septembre 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Levain, pour le requérant, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 4 novembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes de l’article 2 de la loi du 23 juin 1941 relative à l’exportation des œuvres d’art : « L’État a le droit de retenir, soit pour son compte, soit pour le compte d’un département, d’une commune ou d’un établissement public, au prix fixé par l’exportateur, les objets proposés à l’exportation. « Ce droit pourra s’exercer pendant une période de six mois » ; 2. Considérant que, selon le requérant, les dispositions contestées, qui permettent à l’État de retenir certaines œuvres d’art au profit de collections publiques, portent atteinte au droit de propriété ; qu’il fait notamment valoir que ces dispositions ne prévoient pas une juste et préalable indemnisation du propriétaire de l’œuvre ainsi expropriée ; 3. Considérant qu’aux termes de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité » ; qu’afin de se conformer à ces exigences constitutionnelles, la loi ne peut autoriser qu’une personne ne soit privée de sa propriété qu’en vertu d’une nécessité publique légalement constatée ; 4.  Considérant que la loi du 23 juin 1941 a régi l’exportation des œuvres auxquelles elle était applicable jusqu’à son abrogation par la loi du 31 décembre 1992 susvisée ; qu’elle avait pour objet d’interdire la sortie du territoire, sans contrôle, des objets présentant un intérêt national d’histoire ou d’art ; qu’en vertu de l’article 1er de la loi du 23 juin 1941, l’exportation de tels objets requiert la délivrance d’une autorisation du secrétaire d’État à l’Éducation nationale et à la Jeunesse, qui doit se prononcer dans le délai d’un mois à compter de la déclaration fournie à la douane par le propriétaire qui entend exporter ces objets ; que ce régime d’autorisation est applicable aux objets d’ameublement antérieurs à 1830, aux œuvres des peintres, graveurs, dessinateurs, sculpteurs et décorateurs antérieures au 1er janvier 1900 ainsi qu’aux objets provenant des fouilles pratiquées en France ou en Algérie ; 5. Considérant que les dispositions contestées de l’article 2 de la loi du 23 juin 1941 instaurent, au profit de l’État, le droit de « retenir » les objets dont l’autorisation d’exportation a été refusée en application de l’article 1er ; que ce droit peut être exercé pendant une période de six mois suivant la demande tendant à obtenir cette autorisation d’exporter sans que le propriétaire ne manifeste aucune intention de les aliéner ; que, par suite, cette appropriation par une personne publique de biens mobiliers entraîne une privation du droit de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789 ; 6. Considérant que la possibilité de refuser l’autorisation d’exportation assure la réalisation de l’objectif d’intérêt général de maintien sur le territoire national des objets présentant un intérêt national d’histoire ou d’art ; que la privation de propriété permise par les dispositions contestées alors en vigueur n’est pas nécessaire pour atteindre un tel objectif ; qu’en prévoyant l’acquisition forcée de ces biens par une personne publique, alors que leur sortie du territoire national a déjà été refusée, le législateur a instauré une privation de propriété sans fixer les critères établissant une nécessité publique ; que, par suite, les dispositions contestées ne répondent pas à un motif de nécessité publique ; 7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la privation du droit de propriété permise par les dispositions contestées méconnaît les exigences de l’article 17 de la Déclaration de 1789 ; que, par suite, l’article 2 de la loi du 23 juin 1941 doit être déclaré contraire à la Constitution ; 8. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l’article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d’une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d’être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d’inconstitutionnalité doit bénéficier à l’auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l’article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l’abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l’intervention de cette déclaration ; 9. Considérant que la déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 2 de la loi du 23 juin 1941 prend effet à compter de la date de la publication de la présente décision ; qu’elle peut être invoquée dans toutes les instances introduites à la date de la publication de la présente décision et non jugées définitivement à cette date, D É C I D E : Article 1er.- Les dispositions de l’article 2 de la loi du 23 juin 1941 relative à l’exportation des œuvres d’art sont contraires à la Constitution. Article 2.- La déclaration d’inconstitutionnalité de l’article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées par son considérant 9. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 13 novembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 14 novembre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029708937.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 3 octobre 2014 d’une requête présentée par Mme Lydia SCHENARDI, demeurant à Grasse (Alpes-Maritimes), tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 28 septembre 2014 dans le département des Alpes-Maritimes en vue de la désignation de cinq sénateurs. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment son article 59 ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’en vertu du deuxième alinéa de l’article 38 de l’ordonnance susvisée du 7 novembre 1958, « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l’élection » ; 2. Considérant que la requête présentée par Mme SCHENARDI invoque exclusivement la nullité des bulletins de vote, d’une part, de la liste présentée par l’Union pour un Mouvement Populaire et l’Union des Démocrates Indépendants et, d’autre part, de la liste présentée par Europe Ecologie les Verts au motif que lesdits bulletins ne comportaient pas une « désignation suffisante » au sens de l’article L. 66 du code électoral ; 3. Considérant que la prise en compte de bulletins de vote ne mentionnant ni la nature de l’élection ni la date du scrutin ne méconnaît pas les exigences de l’article L. 66 du code électoral ; que le grief unique de la requérante est manifestement infondé ; que, par suite, sa requête doit être rejetée, D É C I D E : Article 1er.- La requête de Mme Lydia SCHENARDI est rejetée. Article 2.- La présente décision sera notifiée au président du Sénat et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 17 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029708933.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 25 juillet 2014 par le Conseil d’État (décision nos 380743, 380744 et 380745 du 23 juillet 2014), dans les conditions prévues à l’article 61-1 de la Constitution, d’une question prioritaire de constitutionnalité posée par MM. Stéphane R., Jean-François R. et Bernard S., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles L. 311-2, L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3, L. 314-4 et L. 314-18 du code des juridictions financières. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code des juridictions financières ; Vu la loi n° 95-851 du 24 juillet 1995 relative à la partie législative du livre III du code des juridictions financières, notamment son article 1er ; Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2005-198 L du 3 mars 2005 ; Vu le décret n° 2005-677 du 17 juin 2005 modifiant le livre III du code des juridictions financières, notamment son article 1er ; Vu la décision du Conseil d’État n° 222160 du 30 juin 2003 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour M. Bernard S. par la SCP UGGC Avocats, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 6 août 2014 ; Vu les observations produites pour M. Jean-François R. par Me Jean-Alain Michel, avocat au barreau de Paris, enregistrées les 28 août et 11 septembre 2014 ; Vu les observations produites pour M. Stéphane R. par Me Jean-Etienne Giamarchi et le cabinet Gibson, Dunn et Crutcher LLP, avocats au barreau de Paris, enregistrées les 28 août et 15 septembre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 29 août 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Nicolas Baverez, avocat au barreau de Paris, pour M. Stéphane R., Me Jean-Alain Michel pour M. Jean-François R., Me Thierry Dal Farra, avocat au barreau de Paris, pour M. Bernard S., et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l’audience publique du 14 octobre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que les requérants contestent, en premier lieu, les articles L. 311-2, L. 311-3 et L. 311-5 du code des juridictions financières, relatifs à la composition de la Cour de discipline budgétaire et financière ; qu’ils contestent, en deuxième lieu, les articles L. 314-3 et L. 314-4 du même code, relatifs à la procédure d’instruction et aux poursuites devant cette Cour ; qu’ils contestent, en troisième lieu, les articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1 et L. 313-11 du même code, relatifs aux infractions réprimées par la Cour et aux sanctions encourues ainsi que l’article L. 314-18 du même code relatif au cumul avec l’action pénale et l’action disciplinaire ; - SUR LA COMPOSITION DE LA COUR DE DISCIPLINE BUDGÉTAIRE ET FINANCIÈRE : 2. Considérant qu’aux termes de l’article L. 311-2 du code des juridictions financières : « La Cour est composée comme suit : « - le premier président de la Cour des comptes, président ; « - le président de la section des finances du Conseil d’État, vice-président ; « - un nombre égal de conseillers d’État et de conseillers maîtres à la Cour des comptes. » ; 3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 311-3 du même code : « Les conseillers d’État et conseillers maîtres à la Cour des comptes sont nommés à la Cour par décret pris en conseil des ministres pour une durée de cinq ans. » ; 4. Considérant qu’aux termes de l’article L. 311-5 du même code : « L’instruction des affaires est confiée à des rapporteurs » ; 5. Considérant que, selon les requérants, en prévoyant que la Cour de discipline budgétaire et financière est composée de conseillers d’État et de conseillers maîtres à la Cour des comptes nommés à la Cour par le pouvoir exécutif, les articles L. 311-2 et L. 311-3 du code des juridictions financières méconnaissent les principes d’impartialité et d’indépendance des juridictions et la séparation des pouvoirs ; qu’ils soutiennent également qu’en ne prévoyant ni l’obligation pour les membres de la Cour de prêter serment avant l’exercice de leurs fonctions juridictionnelles ni l’existence d’une procédure disciplinaire propre aux membres de la Cour, ces dispositions méconnaissent les principes protégés par l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; qu’en outre, ils font valoir qu’en ne prévoyant pas de garanties légales à la nomination des rapporteurs chargés de l’instruction des affaires par l’article L. 311-5, le législateur a également méconnu les principes d’impartialité et d’indépendance ; . En ce qui concerne les dispositions soumises à l’examen du Conseil constitutionnel : 6. Considérant qu’aux termes du premier alinéa de l’article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l’occasion d’une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d’État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; que le Conseil constitutionnel ne peut être saisi dans les conditions prévues par cet article que de dispositions de nature législative ; 7. Considérant que, dans sa décision du 3 mars 2005 susvisée, le Conseil constitutionnel a jugé que le nombre de membres du Conseil d’État et de la Cour des comptes composant la Cour de discipline budgétaire et financière, figurant aux quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 311-2 du code des juridictions financières, dans sa version issue de l’article 1er de la loi du 24 juillet 1995 susvisée, a le caractère réglementaire ; que le paragraphe I de l’article 1er du décret du 17 juin 2005 susvisé a remplacé les quatrième et cinquième alinéas de l’article L. 311-2 du code des juridictions financières par un alinéa ainsi rédigé : « - un nombre égal de conseillers d’État et de conseillers maîtres à la Cour des comptes » ; que, par suite, les modifications relatives à la fixation du nombre de conseillers d’État et de conseillers maîtres à la Cour des comptes membres de la Cour de discipline budgétaire et financière apportées par ce décret ne sont pas de nature législative ; 8. Considérant, toutefois, que le Conseil constitutionnel ne saurait statuer que sur les seules dispositions de nature législative applicables au litige qui lui sont renvoyées ; que, lorsqu’il est saisi de dispositions législatives partiellement modifiées par décret et que ces modifications ne sont pas séparables des autres dispositions, il revient au Conseil constitutionnel de se prononcer sur celles de ces dispositions qui revêtent une nature législative au sens de l’article 61-1 de la Constitution, en prenant en compte l’ensemble des dispositions qui lui sont renvoyées ; . En ce qui concerne les exigences de l’article 16 de la Déclaration de 1789 : 9. Considérant qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; que les principes d’impartialité et d’indépendance sont indissociables de l’exercice de fonctions juridictionnelles ; 10. Considérant, en premier lieu, que l’ensemble des membres nommés à la Cour de discipline budgétaire et financière sont soumis aux dispositions statutaires applicables aux membres du Conseil d’État ou aux membres de la Cour des comptes ; qu’ils bénéficient des garanties d’impartialité et d’indépendance attachées à leur statut respectif ; que, par suite, les dispositions des articles L. 311-2 et L. 311-3 du code des juridictions financières, relatives à la composition de la Cour de discipline budgétaire et financière, ne portent atteinte ni aux principes d’impartialité et d’indépendance des juridictions ni à la séparation des pouvoirs ; 11. Considérant, en second lieu, que l’article L. 311-4 prévoit que les fonctions du ministère public près la Cour sont remplies par le procureur général près la Cour des comptes, assisté d’un avocat général et, s’il y a lieu, de commissaires du Gouvernement ; que le second alinéa de l’article L. 314-3 charge le président de la Cour de discipline budgétaire et financière de désigner un rapporteur chargé de l’instruction ; que cette instruction constitue une enquête administrative préalable à la saisine de la Cour ; qu’une fois cette instruction terminée, le dossier est soumis au procureur général qui décide du classement de l’affaire ou du renvoi devant la Cour ; que, par suite, est inopérant le grief tiré de la méconnaissance des principes d’impartialité et d’indépendance dans l’exercice de fonctions juridictionnelles à l’encontre des dispositions de l’article L. 311-5, relatives à la nomination des rapporteurs à qui est confiée l’instruction des affaires avant que le ministère public ne décide s’il convient de saisir la Cour ; 12. Considérant que les dispositions de l’article L. 311-2 qui sont de nature législative, et les articles L. 311-3 et L. 311-5 du code des juridictions financières, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarés conformes à la Constitution ; - SUR LA PROCÉDURE : 13. Considérant qu’aux termes de l’article L. 314-3 du code des juridictions financières : « Si le procureur général estime qu’il n’y a pas lieu à poursuites, il procède au classement de l’affaire. « Dans le cas contraire, il transmet le dossier au président de la Cour, qui désigne un rapporteur chargé de l’instruction. Cette instruction peut être ouverte contre une personne non dénommée. » ; 14. Considérant qu’aux termes de l’article L. 314-4 du même code : « Le rapporteur a qualité pour procéder à toutes enquêtes et investigations utiles auprès de toutes administrations, se faire communiquer tous documents, même secrets, entendre ou questionner oralement ou par écrit tous témoins et toutes personnes dont la responsabilité paraîtrait engagée. « À la demande du rapporteur, des enquêtes peuvent être faites par des fonctionnaires appartenant à des corps ou services de contrôle ou d’inspection désignés par le ministre dont relèvent ces corps ou services. « Les personnes à l’égard desquelles auront été relevés des faits de nature à donner lieu à renvoi devant la Cour en sont avisées, à la diligence du ministère public, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, précisant qu’elles sont autorisées à se faire assister, dans la suite de la procédure, par un conseil de leur choix. « Le procureur général suit le déroulement de l’instruction dont il est tenu informé par le rapporteur. « Lorsque l’instruction est terminée, le dossier est soumis au procureur général, qui peut décider le classement de l’affaire s’il estime qu’il n’y a pas lieu à poursuites. » 15. Considérant que, selon les requérants, les dispositions des articles L. 314-3 et L. 314-4 du code des juridictions financières méconnaissent les principes du contradictoire, du respect des droits de la défense et de la présomption d’innocence ; qu’ils font valoir que ces dispositions n’organisent aucun contrôle juridictionnel sur les décisions d’investigation prises par le rapporteur, ne prévoient pas, au stade de l’instruction, la possibilité pour la personne mise en cause d’obtenir la communication du dossier et de faire entendre des témoins ou de demander une confrontation et n’imposent pas le respect du secret de l’instruction ; qu’en outre, ils soutiennent qu’en ne prévoyant pas la possibilité pour la personne mise en cause de récuser l’un des membres de la formation de jugement, le législateur a méconnu les principes d’indépendance et d’impartialité qui découlent de l’article 16 de la Déclaration de 1789 ; 16. Considérant qu’en vertu de l’article 9 de la Déclaration de 1789, tout homme est présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable ; 17. Considérant que l’article 16 de la Déclaration de 1789 implique notamment qu’aucune sanction ayant le caractère d’une punition ne puisse être infligée à une personne sans que celle-ci ait été mise à même de présenter ses observations sur les faits qui lui sont reprochés ; que le principe des droits de la défense s’impose aux autorités disposant d’un pouvoir de sanction sans qu’il soit besoin pour le législateur d’en rappeler l’existence ; 18. Considérant, en premier lieu, que l’article L. 314-3 prévoit que, lorsque le procureur général estime qu’il y a lieu à poursuites, il transmet le dossier au président de la Cour qui désigne un rapporteur chargé de l’instruction ; que l’article L. 314-4 définit les pouvoirs d’instruction du rapporteur ; que selon le troisième alinéa de cet article, les personnes à l’égard desquelles auront été relevés des faits de nature à donner lieu à renvoi devant la Cour en sont avisées, à la diligence du ministère public, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, précisant qu’elles sont autorisées à se faire assister, dans la suite de la procédure, par un conseil de leur choix ; qu’en vertu du quatrième alinéa de ce même article, le procureur général suit le déroulement de l’instruction dont il est tenu informé par le rapporteur ; qu’en vertu du dernier alinéa de ce même article, le procureur général, auquel le dossier est soumis lorsque l’instruction est terminée, peut décider le classement de l’affaire s’il estime qu’il n’y a pas lieu à poursuites ; que les pouvoirs conférés au rapporteur par l’article L. 314-4 s’exercent au cours d’une phase d’enquête administrative préalable à la décision du procureur général de classer l’affaire par décision motivée ou de la renvoyer devant la Cour avec des conclusions motivées en application de l’article L. 314-6 ; qu’en n’organisant ni une procédure contradictoire ni un contrôle juridictionnel à ce stade de la procédure, les dispositions des articles L. 314-3 et L. 314-4 ne méconnaissent pas la garantie des droits des personnes pouvant faire l’objet d’enquêtes ou d’investigations préalables au renvoi d’une affaire devant la Cour de discipline budgétaire et financière ; 19. Considérant, en second lieu, qu’il ressort de la jurisprudence constante du Conseil d’État que devant une juridiction administrative, doivent être observées les règles générales de procédure, dont l’application n’est pas incompatible avec son organisation ou n’a pas été écartée par une disposition expresse ; qu’au nombre de ces règles sont comprises celles qui régissent la récusation ; qu’en vertu de celles-ci, tout justiciable est recevable à présenter à la juridiction saisie une demande de récusation de l’un de ses membres, dès qu’il a connaissance d’une cause de récusation ; que, lorsqu’elle se prononce sur une demande de récusation, la juridiction en cause doit statuer sans la participation de celui de ses membres qui en est l’objet ; que, par suite, le grief tiré de ce que les dispositions relatives à la Cour de discipline budgétaire et financière ne prévoiraient pas la possibilité d’une récusation doit être écarté ; 20. Considérant que, par suite, les articles L. 313-3 et L. 314-4 du code des juridictions financières, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarés conformes à la Constitution ; - SUR LES SANCTIONS : 21. Considérant qu’aux termes de l’article L. 313-1 du code des juridictions financières : « Toute personne visée à l’article L. 312-1 qui aura engagé une dépense sans respecter les règles applicables en matière de contrôle financier portant sur l’engagement des dépenses sera passible d’une amende dont le minimum ne pourra être inférieur à 150 euros et dont le maximum pourra atteindre le montant du traitement ou salaire brut annuel qui lui était alloué à la date à laquelle le fait a été commis. » ; 22. Considérant qu’aux termes de l’article L. 313-4 du même code : « Toute personne visée à l’article L. 312-1 qui, en dehors des cas prévus aux articles précédents, aura enfreint les règles relatives à l’exécution des recettes et des dépenses de l’État ou des collectivités, établissements et organismes mentionnés à ce même article ou à la gestion des biens leur appartenant ou qui, chargée de la tutelle desdites collectivités, desdits établissements ou organismes, aura donné son approbation aux décisions incriminées sera passible de l’amende prévue à l’article L. 313-1. « Lorsque les faits incriminés constituent une gestion occulte au sens du paragraphe XI de l’article 60 de la loi de finances pour 1963 (n° 63-156 du 23 février 1963), la Cour des comptes peut déférer à la Cour de discipline budgétaire et financière les comptables de fait quand leurs agissements ont entraîné des infractions prévues au présent titre. » ; 23. Considérant qu’aux termes de l’article L. 313-6 du même code : « Toute personne visée à l’article L. 312-1 qui, dans l’exercice de ses fonctions ou attributions, aura, en méconnaissance de ses obligations, procuré à autrui un avantage injustifié, pécuniaire ou en nature, entraînant un préjudice pour le Trésor, la collectivité ou l’organisme intéressé, ou aura tenté de procurer un tel avantage sera passible d’une amende dont le minimum ne pourra être inférieur à 300 euros et dont le maximum pourra atteindre le double du montant du traitement ou salaire brut annuel qui lui était alloué à la date de l’infraction. » ; 24. Considérant qu’aux termes de l’article L. 313-7-1 du même code : « Toute personne visée à l’article L. 312-1 chargée de responsabilités au sein de l’un des organismes mentionnés aux articles L. 133-1 et L. 133-2 qui, dans l’exercice de ses fonctions, aura causé un préjudice grave à cet organisme, par des agissements manifestement incompatibles avec les intérêts de celui-ci, par des carences graves dans les contrôles qui lui incombaient ou par des omissions ou négligences répétées dans son rôle de direction sera passible de l’amende prévue à l’article L. 313-1. » ; 25. Considérant qu’aux termes de l’article L. 313-11 du même code : « Les sanctions prononcées en vertu des articles L. 313-1 à L. 313-4 ne pourront se cumuler que dans la limite du maximum applicable en vertu de ces mêmes articles et de l’article L. 313-8. « Les sanctions prononcées en vertu des articles L. 313-1 à L. 313-6 ne pourront se cumuler que dans la limite du maximum applicable en vertu des articles L. 313-6 et L. 313-8. » ; 26. Considérant qu’aux termes de l’article L. 314-18 du même code : « Les poursuites devant la Cour ne font pas obstacle à l’exercice de l’action pénale et de l’action disciplinaire. « Si l’instruction permet ou a permis de relever à la charge d’une personne mentionnée à l’article L. 312-1 des faits qui paraissent de nature à justifier une sanction disciplinaire, le président de la Cour signale ces faits à l’autorité ayant pouvoir disciplinaire sur l’intéressé. Cette autorité doit, dans le délai de six mois, faire connaître au président de la Cour par une communication motivée les mesures qu’elle a prises. « Si l’instruction fait apparaître des faits susceptibles de constituer des délits ou des crimes, le procureur général transmet le dossier au procureur de la République dans les conditions prévues à l’article 40 du code de procédure pénale et avise de cette transmission le ministre ou l’autorité dont relève l’intéressé. « Si la Cour estime, en statuant sur les poursuites, qu’une sanction disciplinaire peut être encourue, elle communique le dossier à l’autorité compétente. Cette autorité doit, dans le délai de six mois, faire connaître à la Cour, par une communication motivée, les mesures qu’elle a prises. « Le procureur de la République peut transmettre au procureur général près la Cour des comptes, ministère public près la Cour de discipline budgétaire et financière, d’office ou à la demande de ce dernier, la copie de toute pièce d’une procédure judiciaire relative à des faits de nature à constituer des infractions prévues et sanctionnées par les articles L. 313-1 à L. 313-14 » ; 27. Considérant que les requérants soutiennent qu’en prévoyant que les articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6 et L. 313-7-1, en définissant de manière trop imprécise les obligations dont la méconnaissance est réprimée, portent atteinte au principe de légalité des délits et des peines ; qu’ils font également valoir que par ces dispositions ainsi que par celles de l’article L. 313-11 relatives au cumul des sanctions pouvant être prononcées par la Cour, le législateur a méconnu le principe de proportionnalité des peines ; qu’enfin, en permettant le cumul des poursuites devant la Cour de discipline budgétaire et financière et de l’action pénale ou de l’action disciplinaire, l’article L. 314-18 du code des juridictions financières méconnaît le principe non bis in idem ; 28. Considérant qu’aux termes de l’article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que les principes énoncés par cet article s’appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d’une punition ; 29. Considérant, en premier lieu, que l’exigence d’une définition des manquements réprimés se trouve satisfaite, en matière disciplinaire, dès lors que les textes applicables font référence aux obligations auxquelles les intéressés sont soumis en raison de l’activité qu’ils exercent, de la profession à laquelle ils appartiennent ou de l’institution dont ils relèvent ; 30. Considérant que sont justiciables de la Cour de discipline budgétaire et financière les personnes énumérées aux articles L. 312-1 et L. 312-2 ; que les dispositions de l’article L. 313-1 font expressément référence à la méconnaissance des règles applicables en matière de contrôle financier portant sur l’engagement des dépenses ; que celles de l’article L. 313-4 font expressément référence à la méconnaissance des règles relatives à l’exécution des recettes, des dépenses ou à la gestion des biens de l’État ou des collectivités, établissements et organismes mentionnés à l’article L. 312-1 et aux agissements qui ont entraîné des infractions prévues par le titre Ier du livre III de la partie législative du code des juridictions financières ; que celles de l’article L. 313-6 font expressément référence au fait de procurer à autrui ou tenter de procurer à autrui un avantage injustifié, pécuniaire ou en nature, entraînant un préjudice pour le Trésor, la collectivité ou l’organisme intéressé ; que celles de l’article L. 313-7-1 font expressément référence au fait de causer dans l’exercice de ses fonctions un préjudice grave à un organisme mentionné aux articles L. 133-1 et L. 133-2, par des agissements manifestement incompatibles avec les intérêts de celui-ci, par des carences graves dans les contrôles ou par des omissions ou négligences répétées dans le rôle de direction ; 31. Considérant que, par suite, les dispositions des articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6 et L. 313-7-1 ne méconnaissent pas l’exigence d’une définition claire et précise des infractions réprimées ; 32. Considérant, en deuxième lieu, que l’article 61-1 de la Constitution ne confère pas au Conseil constitutionnel un pouvoir général d’appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, mais lui donne seulement compétence pour se prononcer sur la conformité des dispositions législatives soumises à son examen aux droits et libertés que la Constitution garantit ; que, si la nécessité des peines attachées aux infractions relève du pouvoir d’appréciation du législateur, il incombe au Conseil constitutionnel de s’assurer, en matière disciplinaire, de l’absence d’inadéquation manifeste entre les sanctions encourues et les obligations dont elles tendent à réprimer la méconnaissance ; 33. Considérant que chacun des articles L. 313-1, L. 313-4 et L. 313-7-1 réprime les fautes qu’il définit d’une amende dont le maximum est le montant du traitement ou salaire brut annuel alloué à la personne condamnée à la date de l’infraction ; que l’article L. 313-6 réprime les fautes qu’il définit d’une amende dont le maximum est le double de ce traitement ou salaire brut ; que l’article L. 313-11 limite le cumul des sanctions prononcées par la Cour de discipline budgétaire et financière en vertu des articles L. 313-1 à L. 313-4 « dans la limite du maximum applicable en vertu de ces mêmes articles et de l’article L. 313-8 » ; que l’article L. 313-11 limite par ailleurs le cumul des sanctions prononcées en vertu des articles L. 313-1 à L. 313-6 « dans la limite du maximum applicable en vertu des articles L. 313-6 et L. 313-8 » ; 34. Considérant que le principe de nécessité des peines n’interdit pas au législateur de prévoir que certains faits puissent donner lieu à différentes qualifications ; que le principe de proportionnalité des peines ne fait pas obstacle à ce que, lorsque des faits peuvent recevoir plusieurs qualifications ayant un objet ou une finalité différents, le maximum des sanctions prononcées par la même juridiction ou autorité répressive puisse être plus sévère que pour des faits qui ne pourraient recevoir que l’une de ces qualifications ; que les sanctions prévues par les articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1 et L. 313-11 du code des juridictions financières ne sont pas contraires aux principes de nécessité et de proportionnalité des peines ; 35. Considérant, en troisième lieu, que le principe de la nécessité des peines ne fait pas obstacle à ce que les mêmes faits commis par une même personne puissent faire l’objet de poursuites différentes aux fins de sanctions de nature disciplinaire ou pénale en application de corps de règles distincts devant leurs propres ordres de juridictions ; 36. Considérant qu’en vertu du premier alinéa de l’article L. 314-18 du code des juridictions financières, « les poursuites devant la Cour ne font pas obstacle à l’exercice de l’action pénale et de l’action disciplinaire » ; que ce cumul de poursuites peut conduire à un cumul de sanctions prononcées, d’une part, par la Cour de discipline budgétaire et financière et, d’autre part, par une juridiction pénale ou une autorité disciplinaire ; que le principe d’un tel cumul des sanctions prononcées par une juridiction disciplinaire spéciale avec celles prononcées par une juridiction pénale ou une autorité disciplinaire n’est pas, en lui-même, contraire au principe de proportionnalité des peines garanti par l’article 8 de la Déclaration de 1789 ; 37. Considérant que, toutefois, lorsque plusieurs sanctions prononcées pour un même fait sont susceptibles de se cumuler, le principe de proportionnalité implique qu’en tout état de cause, le montant global des sanctions éventuellement prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l’une des sanctions encourues ; qu’il appartient donc aux autorités juridictionnelles et disciplinaires compétentes de veiller au respect de cette exigence et de tenir compte, lorsqu’elles se prononcent, des sanctions de même nature antérieurement infligées ; que, sous cette réserve, l’article L. 314-18 du code des juridictions financières n’est pas contraire aux principes de nécessité et  de proportionnalité des peines ; 38. Considérant que les articles L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11 et L. 314-18 du code des juridictions financières ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit ; que, sous la réserve énoncée au considérant 37, ils doivent être déclarés conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Les dispositions de l’article L. 311-2 qui ont valeur législative ainsi que les articles L. 311-3, L. 311-5, L. 313-1, L. 313-4, L. 313-6, L. 313-7-1, L. 313-11, L. 314-3 et L. 314-4 du code des juridictions financières sont conformes à la Constitution. Article 2.- L’article L. 314-18 du même code est conforme à la Constitution, sous la réserve énoncée au considérant 37. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 23-11 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 24 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029708940.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 8 octobre 2014 d’une requête présentée par M. Pierre SCHWEITZER, demeurant à Strasbourg (Bas-Rhin), tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 28 septembre 2014 dans le département du Bas-Rhin en vue de la désignation de cinq sénateurs. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment son article 59 ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’en vertu du deuxième alinéa de l’article 38 de l’ordonnance susvisée du 7 novembre 1958, « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l’élection » ; 2. Considérant que la requête présentée par M. SCHWEITZER invoque exclusivement la rupture d’égalité entre les candidats à l’élection qui résulterait des dispositions de l’article R. 162 du code électoral, lesquelles permettraient aux candidats membres du collège électoral pour l’élection des sénateurs d’avoir connaissance de la liste de ces électeurs avant les autres candidats ; 3. Considérant qu’il ressort des dispositions de l’article R. 146 du code électoral que le tableau des électeurs sénatoriaux est établi par le préfet et rendu public au plus tard le septième jour suivant l’élection des délégués et de leurs suppléants ; qu’il n’est pas allégué que cette règle a été méconnue ; que le grief unique du requérant est manifestement infondé ; que, par suite, sa requête doit être rejetée, D É C I D E : Article 1er.- La requête de M. Pierre SCHWEITZER est rejetée. Article 2.- La présente décision sera notifiée au président du Sénat et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 17 octobre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt, le 15 septembre 2014, par MM. Christian JACOB, Élie ABOUD, Benoist APPARU, Mme Laurence ARRIBAGÉ, MM. Olivier AUDIBERT-TROIN, Jean-Pierre BARBIER, Étienne BLANC, Jean-Claude BOUCHET, Xavier BRETON, Philippe BRIAND, Luc CHATEL, Guillaume CHEVROLLIER, Edouard COURTIAL, Mme Sophie DION, M. David DOUILLET, Mme Marianne DUBOIS, MM. Christian ESTROSI, Daniel FASQUELLE, Mme Marie-Louise FORT, MM. Marc FRANCINA, Claude de GANAY, Sauveur GANDOLFI-SCHEIT, Mme Annie GENEVARD, MM. Guy GEOFFROY, Bernard GÉRARD, Daniel GIBBES, Franck GILARD, Philippe GOSSELIN, Serge GROUARD, Mme Françoise GUÉGOT, MM. Antoine HERTH, Patrick HETZEL, Guénhaël HUET, Sébastien HUYGHE, Mmes Valérie LACROUTE, Laure de LA RAUDIÈRE, MM. Guillaume LARRIVÉ, Charles de LA VERPILLIÈRE, Marc LE FUR, Philippe LE RAY, Céleste LETT, Mmes Geneviève LEVY, Véronique LOUWAGIE, MM. Gilles LURTON, Thierry MARIANI, Hervé MARITON, Alain MARLEIX, Olivier MARLEIX, Alain MARSAUD, Patrice MARTIN-LALANDE, Pierre MOREL-A-L'HUISSIER, Alain MOYNE-BRESSAND, Mme Dominique NACHURY, M. Bernard PERRUT, Mme Josette PONS, MM. Christophe PRIOU, Didier QUENTIN, Frédéric REISS, Bernard REYNES, Martial SADDIER, François SCELLIER, Alain SUGUENOT, Lionel TARDY, Jean-Charles TAUGOURDEAU, Jean-Marie TETART, Dominique TIAN, François VANNSON, Mme Catherine VAUTRIN, M. Jean-Pierre VIGIER et Mme Marie-Jo ZIMMERMANN, députés. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code rural et de la pêche maritime ; Vu le code de la santé publique ; Vu les observations du Gouvernement, enregistrées le 29 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt ; qu'ils mettent en cause la conformité à la Constitution de certaines dispositions de ses articles 3, 4, 29, 32 et 48 ; - SUR CERTAINES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 3 : 2. Considérant que le 2° de l'article 3 complète le titre Ier du livre III du code rural et de la pêche maritime par un chapitre V, comprenant les articles L. 315-1 à L. 315-6, qui institue le groupement d'intérêt économique et environnemental ; qu'aux termes des deux premiers alinéas de l'article L. 315-1 : « Peut être reconnue comme groupement d'intérêt économique et environnemental toute personne morale dont les membres portent collectivement un projet pluriannuel de modification ou de consolidation de leurs systèmes ou modes de production agricole et de leurs pratiques agronomiques en visant une performance à la fois économique, sociale et environnementale. La performance sociale se définit comme la mise en œuvre de mesures de nature à améliorer les conditions de travail des membres du groupement et de leurs salariés, à favoriser l'emploi ou à lutter contre l'isolement en milieu rural. « Cette personne morale doit comprendre plusieurs exploitants agricoles et peut comporter d'autres personnes physiques ou morales, privées ou publiques. Les exploitants agricoles doivent détenir ensemble la majorité des voix au sein des instances du groupement » ; 3. Considérant que l'article L. 315-2 fixe les conditions que le projet pluriannuel doit remplir pour être reconnu comme groupement d'intérêt économique et environnemental ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 315-6 : « Tout ou partie des actions prévues dans le projet pluriannuel mentionné à l'article L. 315-1 et relatives à la production agricole peuvent bénéficier de majorations dans l'attribution des aides publiques. Les critères déterminant la majoration des aides publiques privilégient les exploitants agricoles » ; 4. Considérant que, selon les requérants, en permettant que les groupements d'intérêt économique et environnemental puissent bénéficier de majorations d'aides publiques, les dispositions du premier alinéa de l'article L. 315-6 entraînent une rupture d'égalité entre les agriculteurs qui se groupent au sein d'une telle structure et ceux qui choisissent de s'organiser selon un autre mode ; que le choix de faire varier les aides publiques en fonction d'un mode d'organisation ne serait pas en rapport avec le but poursuivi dès lors que les agriculteurs qui ne seront pas organisés selon les règles prévues par les dispositions contestées peuvent néanmoins satisfaire à des critères de performance économique, sociale et environnementale équivalents à ceux auxquels doivent satisfaire les groupements d'intérêt économique et environnemental ; qu'en ne précisant pas les critères selon lesquels les majorations d'aide publique sont attribuées, les dispositions de l'article L. 315-6 méconnaîtraient également le principe d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi ; 5. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 6. Considérant qu'il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34 ; que le plein exercice de cette compétence, ainsi que l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, lui imposent d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques ; 7. Considérant, d'une part, qu'il ressort des deux premiers alinéas de l'article L. 315-1 que toute personne morale comprenant plusieurs exploitants agricoles peut être reconnue comme un groupement d'intérêt économique et environnemental, quel que soit le mode d'organisation des exploitations et la forme juridique de cette personne morale ; que, par suite, le grief tiré de ce que les dispositions contestées entraîneraient des différences de traitement selon les modalités d'organisation des exploitations agricoles manque en fait ; 8. Considérant, d'autre part, que la définition des critères d'attribution des aides publiques ne met en cause aucun des principes fondamentaux ou règles que la Constitution place dans le domaine de la loi ; que le grief tiré de ce que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence doit être écarté ; 9. Considérant que les dispositions du premier alinéa de l'article L. 315-6 du code rural et de la pêche maritime, tel qu'il résulte du 2° de l'article 3 de la loi déférée, qui ne sont pas inintelligibles et ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution ; - SUR LE PARAGRAPHE VII DE L'ARTICLE 4 : 10. Considérant que le paragraphe VII de l'article 4 a pour objet de modifier les dispositions du chapitre II du titre IX du livre IV du code rural et de la pêche maritime relatives à la désignation des assesseurs des tribunaux paritaires des baux ruraux ; qu'il prévoit une désignation de ces assesseurs par ordonnance du premier président de la cour d'appel prise après avis du président du tribunal paritaire des baux ruraux sur une liste dressée par l'autorité compétente de l'État sur la base des propositions des organisations syndicales représentatives ; 11. Considérant que les députés requérants soutiennent que les dispositions du paragraphe VII de l'article 4, introduites en deuxième lecture, n'assurent pas une représentation équilibrée des propriétaires bailleurs et des preneurs et méconnaissent, par voie de conséquence, les exigences d'indépendance et d'impartialité qui résultent de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ; 12. Considérant qu'il ressort de l'économie de l'article 45 de la Constitution, et notamment de son premier alinéa, que les adjonctions ou modifications qui peuvent être apportées à un projet ou une proposition de loi, après la première lecture, par les membres du Parlement et par le Gouvernement doivent être en relation directe avec une disposition restant en discussion, c'est-à-dire qui n'a pas été adoptée dans les mêmes termes par l'une et l'autre assemblées ; que, toutefois, ne sont pas soumis à cette dernière obligation les amendements destinés à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d'examen ou à corriger une erreur matérielle ; 13. Considérant que l'amendement dont est issu le paragraphe VII de l'article 4 a été introduit en deuxième lecture à l'Assemblée nationale ; qu'à ce stade de la procédure, les dispositions de l'article 4 avaient pour objet d'instaurer un dispositif de surveillance annuelle de l'azote épandu dans certains territoires, de modifier des règles relatives aux baux agricoles ainsi que des dispositions relatives au développement rural ; que l'adjonction du paragraphe VII n'était pas, à ce stade de la procédure, en relation directe avec une disposition restant en discussion ; qu'elle n'était pas non plus destinée à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d'examen ou à corriger une erreur matérielle ; qu'il s'ensuit que le paragraphe VII de l'article 4 a été adopté selon une procédure contraire à la Constitution ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner le grief soulevé par les députés requérants, il doit être déclaré contraire à cette dernière ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, du paragraphe XXIV de l'article 93, qui est relatif aux modalités de l'entrée en vigueur du paragraphe VII de l'article 4 ; - SUR CERTAINES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 29 : 14. Considérant que l'article 29 est relatif aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural ; qu'il modifie notamment les conditions de mise en œuvre du droit de préemption dont elles disposent pour l'exercice de leurs missions ; 15. Considérant que les requérants mettent en cause les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime ainsi que le dernier alinéa de l'article L. 143-7-1, tels qu'ils résultent de cet article 29 ; . En ce qui concerne les cinquième et sixième alinéas de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime : 16. Considérant que l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime est relatif au droit de préemption institué au profit des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural ; que les alinéas 41 à 47 de l'article 29 remplacent les deux premiers alinéas de cet article L. 143-1 par six alinéas ; qu'aux termes des cinquième et sixième alinéas de cet article ainsi modifié : « Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural peuvent exercer leur droit de préemption en cas d'aliénation à titre onéreux de l'usufruit ou de la nue-propriété des biens mentionnés au présent article. Elles ne peuvent préempter la nue-propriété de ces biens que dans les cas où elles en détiennent l'usufruit ou sont en mesure de l'acquérir concomitamment, ou lorsque la durée de l'usufruit restant à courir ne dépasse pas deux ans, ou dans le but de la rétrocéder, dans un délai maximal de cinq ans, à l'usufruitier de ces biens. « Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural peuvent, sous réserve du I de l'article L. 143-7, exercer leur droit de préemption en cas d'aliénation à titre onéreux de la totalité des parts ou actions d'une société ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole, lorsque l'exercice de ce droit a pour objet l'installation d'un agriculteur » ; 17. Considérant que, selon les requérants, d'une part, la possibilité donnée aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural de préempter les cessions onéreuses de l'usufruit ou de la nue-propriété peut conduire à imposer au nu-propriétaire ou à l'usufruitier de devoir exercer sur le bien en cause des droits concurrents avec une société anonyme ; que ce pouvoir permettrait en outre à la société d'aménagement foncier et d'établissement rural d'intervenir dans des opérations de démembrement motivées par des objectifs de gestion patrimoniale et d'empêcher la réunion de l'usufruit et de la nue-propriété entre les mains d'une seule personne ; qu'il en résulterait une atteinte disproportionnée aux conditions d'exercice du droit de propriété ; que, d'autre part, la possibilité de préempter la totalité des parts sociales d'une société ayant pour objet l'exploitation ou la propriété agricole pourrait, « en méconnaissance du principe de l'affectio societatis qui est un élément essentiel de la liberté contractuelle », imposer aux associés et au rétrocessionnaire choisi par la société d'aménagement foncier et d'établissement rural d'être liés par un contrat de société ; 18. Considérant qu'il est loisible au législateur d'apporter aux conditions d'exercice du droit de propriété des personnes privées, protégé par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et à la liberté contractuelle, qui découle de son article 4, des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi ; - Quant à la mise en œuvre du droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural : 19. Considérant que l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime institue un droit de préemption au profit des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural en cas d'aliénation à titre onéreux de biens immobiliers à usage agricole et de biens mobiliers qui leur sont attachés ou de terrains nus à vocation agricole ; que ce droit peut également être exercé en cas d'aliénation à titre onéreux de bâtiments d'habitation faisant partie d'une exploitation agricole ; que l'article L. 143-2 définit les objectifs pour lesquels ce droit peut être mis en œuvre ; que, dans la rédaction de cet article résultant du 7° de l'article 29, ces objectifs sont : « 1° L'installation, la réinstallation ou le maintien des agriculteurs ; « 2° La consolidation d'exploitations afin de permettre à celles-ci d'atteindre une dimension économique viable au regard des critères du schéma directeur régional des exploitations agricoles et l'amélioration de la répartition parcellaire des exploitations existantes, dans les conditions prévues à l'article L. 331-2 ; « 3° La préservation de l'équilibre des exploitations lorsqu'il est compromis par l'emprise de travaux d'intérêt public ; « 4° La sauvegarde du caractère familial de l'exploitation ; « 5° La lutte contre la spéculation foncière ; « 6° La conservation d'exploitations viables existantes lorsqu'elle est compromise par la cession séparée des terres et de bâtiments d'habitation ou d'exploitation ; « 7° La mise en valeur et la protection de la forêt ainsi que l'amélioration des structures sylvicoles dans le cadre des conventions passées avec l'Etat ; « 8° La protection de l'environnement, principalement par la mise en œuvre de pratiques agricoles adaptées, dans le cadre de stratégies définies par l'État, les collectivités territoriales ou leurs établissements publics ou approuvées par ces personnes publiques en application du présent code ou du code de l'environnement ; « 9° Dans les conditions prévues par le chapitre III du titre IV du livre Ier du code de l'urbanisme, la protection et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains » ; 20. Considérant que la conformité à la Constitution d'une loi déjà promulguée peut être appréciée à l'occasion de l'examen des dispositions législatives qui la modifient, la complètent ou affectent son domaine ; que les dispositions contestées de l'article 29 modifient et affectent le domaine de l'article L. 143-2 du code rural et de la pêche maritime ; 21. Considérant que le 1° de l'article 29 donne une nouvelle rédaction du paragraphe I de l'article L. 141-1 du code rural et de la pêche maritime relatif aux missions des sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural ; qu'il dispose que ces sociétés ont pour mission de « favoriser l'installation, le maintien et la consolidation d'exploitations agricoles ou forestières afin que celles-ci atteignent une dimension économique viable au regard des critères du schéma directeur régional des exploitations agricoles, ainsi que l'amélioration de la répartition parcellaire des exploitations » ; qu'il dispose en outre qu'elles « concourent » à la diversité des systèmes de production, à la diversité des paysages, à la protection des ressources naturelles et au maintien de la diversité biologique, qu'elles « contribuent » au développement durable des territoires ruraux et qu'elles « assurent » la transparence du marché foncier rural ; que le législateur n'a pas entendu modifier ces dispositions relatives à l'objet de ces sociétés en définissant, à l'article L.143-2 du même code, les objectifs de leur droit de préemption ; que les dispositions de cet article L. 143-2 n'ont pas pour objet et ne sauraient, sans porter aux conditions d'exercice du droit de propriété et à la liberté contractuelle une atteinte disproportionnée au regard de l'objet des missions de ces sociétés, permettre que l'exercice du droit de préemption qui leur est confié par les dispositions de l'article L. 143-1 soit mis en œuvre pour des motifs qui ne se rattachent pas principalement à leur mission de favoriser l'installation, le maintien et la consolidation d'exploitations agricoles ou forestières afin que celles-ci atteignent une dimension économique viable au regard des critères du schéma directeur régional des exploitations agricoles, ainsi que l'amélioration de la répartition parcellaire des exploitations ; que, sous cette réserve, les dispositions de l'article L. 143-2 du code rural et de la pêche maritime sont conformes à la Constitution ; - Quant au cinquième alinéa de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime : 22. Considérant que l'article L. 143-3 dispose qu'à peine de nullité, « la société d'aménagement foncier et d'établissement rural doit justifier sa décision de préemption par référence explicite et motivée à l'un ou à plusieurs des objectifs ci-dessus définis, et la porter à la connaissance des intéressés. Elle doit également motiver et publier la décision de rétrocession et annoncer préalablement à toute rétrocession son intention de mettre en vente les fonds acquis par préemption ou à l'amiable » ; que l'article L. 143-4 fixe la liste des transferts de propriété à titre onéreux qui ne peuvent faire l'objet d'un droit de préemption ; que sont notamment visés par cet article les acquisitions effectuées par des cohéritiers sur licitation amiable ou judiciaire et les cessions consenties à des parents ou alliés jusqu'au quatrième degré inclus, ou à des cohéritiers ou à leur conjoint survivant ainsi que les actes conclus entre indivisaires en application des articles 815-14, 815-15 et 883 du code civil ; qu'en outre le b) du 8° de l'article 29 de la loi déférée complète cet article L. 143-4 par un 9° qui exclut du droit de préemption « les acquisitions de la nue-propriété d'un bien par ses usufruitiers et celles de l'usufruit d'un bien par ses nu-propriétaires » ; 23. Considérant, d'une part, qu'en autorisant les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural à exercer leur droit de préemption sur l'usufruit des biens susmentionnés, les dispositions contestées ont pour objet de permettre que l'accomplissement, par ces sociétés, de leurs missions d'intérêt général ne puisse être tenu en échec du seul fait que la propriété de ces biens est démembrée ; qu'eu égard aux garanties qui entourent la mise en œuvre du droit de préemption et, en particulier, les exclusions précitées prévues par l'article L. 143-4, l'instauration d'un droit de préemption à l'occasion d'une cession du seul usufruit ne porte pas aux conditions d'exercice du droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ; 24. Considérant, d'autre part, que l'exercice, par une société d'aménagement foncier et d'établissement rural, de son droit de préemption sur la nue-propriété est possible soit lorsque cette société détient déjà l'usufruit du bien, soit lorsqu'elle est en mesure de l'acquérir concomitamment, soit lorsque la durée de l'usufruit restant à courir ne dépasse pas deux ans, soit « dans le but de la rétrocéder, dans un délai maximal de cinq ans, à l'usufruitier de ces biens » ; que, dans les trois premiers cas, les dispositions contestées encadrent précisément les conditions d'exercice du droit de préemption sur la nue-propriété d'un bien en fixant des conditions qui sont en adéquation avec l'objectif poursuivi ; que toutefois, eu égard à l'incidence de la durée de la détention de la nue-propriété sur la valeur de celle-ci et en l'absence de garantie légale faisant obstacle à ce que les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural conservent la nue-propriété de biens au-delà du délai de cinq ans prévu par ces dispositions, la faculté donnée à ces sociétés d'exercer leur droit de préemption sur la nue-propriété dans le but de la rétrocéder à l'usufruitier porte aux conditions d'exercice du droit de propriété une atteinte disproportionnée au regard des missions qu'ils leurs sont confiées ; que, par suite, au cinquième alinéa de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime, les mots « ou dans le but de la rétrocéder, dans un délai maximum de cinq ans, à l'usufruitier de ces biens » doivent être déclarés contraires à la Constitution ; - Quant au sixième alinéa de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime : 25. Considérant que la préemption des parts ou actions d'une société ayant pour objet principal l'exploitation ou la propriété agricole lorsque l'exercice de ce droit a pour objet l'installation d'un agriculteur, n'est possible qu'en cas d'aliénation à titre onéreux de la totalité de ces parts ou actions ; que, par suite, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les dispositions du sixième alinéa de l'article L. 143-1 n'ont ni pour objet ni pour effet de permettre aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural de s'imposer comme coactionnaire ou associé dans une société ; 26. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le surplus du cinquième alinéa de l'article L. 143-1 et son sixième alinéa, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarés conformes à la Constitution ; . En ce qui concerne la modification de l'article L. 143-7-1 : 27. Considérant que le 9° l'article L. 143-2 et l'article L. 143-7-1 du code rural et de la pêche maritime ainsi que le 2° de l'article L. 143-3 du code de l'urbanisme prévoient que les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural peuvent exercer un droit de préemption, à la demande et au nom du département, à l'intérieur des périmètres d'intervention définis en application de l'article L. 143-1 du code de l'urbanisme et dans le but d'assurer la protection et la mise en valeur des espaces agricoles et naturels périurbains ; que le troisième alinéa de l'article L. 143-7-1 susmentionné dispose en particulier : « Le droit de préemption prévu par le 9° de l'article L. 143-2 peut être exercé pour l'acquisition d'une fraction d'une unité foncière comprise dans les périmètres mentionnés au premier alinéa. Dans ce cas, le propriétaire peut exiger que le titulaire du droit de préemption se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière. Le prix d'acquisition fixé par la juridiction compétente en matière d'expropriation tient compte de l'éventuelle dépréciation subie, du fait de la préemption partielle, par la fraction restante de l'unité foncière » ; 28. Considérant que le b) du 10° de l'article 29 complète cet article par un alinéa aux termes duquel : « Lorsque la société d'aménagement foncier et d'établissement rural exerce, à la demande et au nom du département, le droit de préemption prévu au 9° de l'article L. 143-2, elle peut faire usage de la procédure de révision du prix de vente prévue à l'article L. 143-10 » ; 29. Considérant que, selon les requérants, en prévoyant que la société d'aménagement foncier et d'établissement rural pourra désormais faire usage de la révision du prix prévue à l'article L. 143-10 du code rural et de la pêche maritime, ces dispositions privent d'effet la compétence du juge de l'expropriation, prévue par le troisième alinéa de l'article L. 143-7-1, et, par suite, la garantie que représente, pour le propriétaire qui voit le droit de préemption s'exercer sur une partie des biens mis en vente, le droit à obtenir la compensation de la dépréciation subie du fait de la préemption partielle ; que seraient par suite méconnus, d'une part, le droit à une indemnisation juste et préalable du bien faisant l'objet de la préemption et, d'autre part, le droit du propriétaire à disposer librement de son bien ; 30. Considérant, toutefois, que, si les dispositions de l'article L. 143-7-1 prévoient que la juridiction compétente pour statuer sur le prix lorsque le propriétaire peut exiger que le titulaire du droit de préemption se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière est « la juridiction compétente en matière d'expropriation », les dispositions de l'article L. 143-10 prévoient qu'en cas de demande de réduction de prix par la société qui exerce le droit de préemption, le demandeur peut demander la révision du prix proposé « au tribunal compétent de l'ordre judiciaire » ; qu'il s'ensuit qu'en cas de révision du prix de vente mis en œuvre à l'occasion de l'exercice du droit de préemption sur une fraction d'une unité foncière, la juridiction compétente en matière d'expropriation est compétente pour statuer tant sur la contestation de la révision du prix de vente que sur l'éventuelle dépréciation subie sur la fraction restante de l'unité foncière du fait de la préemption partielle ; que le grief manque en fait ; 31. Considérant que les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 143-7-1 du code rural et de la pêche maritime, tel qu'il résulte du b) du 10° de l'article 29, qui ne méconnaissent aucune exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution ; - SUR L'ARTICLE 32 : 32. Considérant que l'article 32 est relatif au contrôle des structures des exploitations agricoles ; qu'il modifie notamment les cas et conditions dans lesquels doivent être délivrées les autorisations administratives d'exploiter ; 33. Considérant que les requérants mettent en cause le 2° de l'article L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime et le troisième alinéa de son article L. 331-7, tels qu'ils résultent de cet article 32 ; . En ce qui concerne le 2° de l'article L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime : 34. Considérant que le 1° du paragraphe III de l'article 32 insère dans le code rural et de la pêche maritime un nouvel article L. 331-1-1, dont le 2° définit la notion d' « agrandissement d'exploitation » ; que, lorsque la surface totale qu'il est envisagé de mettre en valeur excède le seuil fixé par le schéma directeur régional des exploitations agricoles, les « agrandissements d'exploitation » sont soumis, dans le cadre du contrôle des structures des exploitations agricoles, à un régime d'autorisation administrative ou, à titre dérogatoire, à un régime de déclaration préalable, prévus par les dispositions de l'article L. 331-2 du même code ; 35. Considérant que, selon les requérants, en qualifiant d' « agrandissement d'exploitation » toute prise de participation, directe ou indirecte, dans une autre exploitation agricole, les dispositions du 2° de l'article L. 331-1-1 portent atteinte à la liberté d'entreprendre et au droit de propriété ; 36. Considérant qu'il ressort de l'article L. 331-1 du code rural et de la pêche maritime, tel que modifié par les dispositions du 1° du paragraphe III de l'article 32, que le contrôle des structures des exploitations agricoles a pour objectif principal de favoriser l'installation d'agriculteurs et peut concomitamment avoir pour objet accessoire de consolider ou maintenir les exploitations, promouvoir le développement des systèmes de production et maintenir une agriculture diversifiée, riche en emplois et génératrice de valeur ajoutée ; qu'en incluant les prises de participation dans la notion d' « agrandissement d'exploitation », le législateur a entendu renforcer l'efficacité de ce contrôle, tout en faisant obstacle au contournement de ses règles ; qu'il a ainsi poursuivi un but d'intérêt général ; 37. Considérant toutefois, que les dispositions du 2° de l'article L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime qualifient d'agrandissement d'exploitation agricole toute prise de participation, quelle que soit son importance ; qu'en ne réservant pas cette qualification aux prises de participation conduisant à une participation significative dans une autre exploitation agricole, ces dispositions ont porté au droit de propriété et à la liberté d'entreprendre une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ; que, par suite, dans ce 2°, les mots : « ou de prendre, directement ou indirectement, participation dans une autre exploitation agricole » doivent être déclarés contraires à la Constitution ; 38. Considérant que le surplus des dispositions du 2° de l'article L. 331-1-1, inséré dans le code rural et de la pêche maritime par les dispositions du 1° du paragraphe III de l'article 32, qui ne méconnaît aucune exigence constitutionnelle, doit être déclaré conforme à la Constitution ; . En ce qui concerne le troisième alinéa de l'article L. 331-7 du code rural et de la pêche maritime : 39. Considérant que le a) du 5° du paragraphe III de l'article 32 modifie l'article L. 331-7 en y insérant un nouveau troisième alinéa aux termes duquel : « Lorsqu'elle constate qu'une réduction du nombre d'emplois salariés ou non salariés, permanents ou saisonniers, intervient dans un délai de cinq ans à compter de la mise à disposition de terres à une société, l'autorité administrative peut réexaminer l'autorisation mentionnée à l'article L. 331-2 qu'elle a délivrée. Pour ce faire, elle prescrit à l'intéressé de présenter une nouvelle demande dans un délai qu'elle détermine et qui ne peut être inférieur à un mois. Elle notifie cette injonction à l'intéressé dans un délai d'un an à compter de cette réduction et au plus tard six mois à compter du jour où elle en a eu connaissance. » ; 40. Considérant que, selon les requérants, les dispositions contestées portent atteinte à la liberté d'entreprendre dès lors qu'elles ont pour effet, compte tenu des ajustements du volume de main-d'œuvre rendus nécessaires par les variations de l'activité économique, de contraindre les sociétés d'exploitation agricoles à solliciter chaque année une nouvelle autorisation d'exploiter ; 41. Considérant qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu préserver l'emploi agricole ; qu'il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général ; 42. Considérant, toutefois, que ces dispositions ont pour effet d'interdire aux sociétés d'exploitation agricole, pendant la période de cinq ans suivant l'attribution de leur autorisation d'exploiter, d'ajuster le volume de leur main-d'œuvre en fonction des besoins de leur exploitation compte tenu des fluctuations de l'activité économique, sauf à s'exposer au risque de voir leur autorisation d'exploiter remise en cause ; 43. Considérant que les dispositions contestées font ainsi peser sur les choix économiques des sociétés d'exploitation agricoles et sur leur gestion des contraintes qui portent tant au droit de propriété qu'à la liberté d'entreprendre une atteinte manifestement disproportionnée au regard de l'objectif poursuivi ; que, par suite, les dispositions du a) du 5° du paragraphe III de l'article 32 doivent être déclarées contraires à la Constitution ; qu'il en va de même, par voie de conséquence, des dispositions du b) du 5° du même paragraphe III ; - SUR CERTAINES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 48 : 44. Considérant que le 2° du paragraphe I de l'article 48 insère notamment dans le code de la santé publique un nouvel article L. 5141-14-2 qui interdit les remises, rabais, ristournes, la différenciation des conditions générales et particulières de vente ou la remise d'unités gratuites et toutes pratiques équivalentes à l'occasion de la vente de médicaments vétérinaires contenant une ou plusieurs substances antibiotiques ; 45. Considérant que, selon les requérants, en interdisant les incitations commerciales accordées à l'occasion de la vente de médicaments vétérinaires contenant des substances antibiotiques, ces dispositions porteraient atteinte à la liberté d'entreprendre ; 46. Considérant que, par les dispositions contestées, le législateur a entendu interdire les incitations commerciales susceptibles d'encourager l'usage de médicaments antibiotiques en médecine vétérinaire afin de lutter contre « l'antibiorésistance » ; qu'il a ainsi poursuivi un but d'intérêt général ; que l'interdiction instituée par les dispositions contestées, qui ne vise que les médicaments antibiotiques destinés aux animaux, ne porte pas une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre ; que, par suite, le grief tiré de la méconnaissance de la liberté d'entreprendre doit être écarté ; 47. Considérant que les dispositions de l'article L. 5141-14-2, inséré dans le code de la santé publique par les dispositions du 2° du paragraphe I de l'article 48, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, doivent être déclarées conformes à la Constitution ; - SUR LA PLACE D'AUTRES DISPOSITIONS DANS LA LOI DÉFÉRÉE : 48. Considérant que le paragraphe VII de l'article 13 a pour objet de modifier le dernier alinéa de l'article L. 2152-1 du code du travail afin d'appliquer aux coopératives d'utilisation de matériel agricole les règles de représentativité des organisations professionnelles d'employeurs prévues pour les branches couvrant exclusivement les activités agricoles ; 49. Considérant que le 5° du paragraphe I de l'article 60 a pour objet d'insérer dans le code rural et de la pêche maritime un nouvel article L. 811-2-1 qui crée un observatoire de l'enseignement technique agricole ; 50. Considérant que le paragraphe VI de l'article 67 prévoit la remise au Parlement d'un rapport de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie relatif à la sollicitation des ressources en « bois-énergie » ; 51. Considérant que les amendements dont sont issues les dispositions susmentionnées ont été introduits en deuxième lecture à l'Assemblée nationale ou au Sénat ; que ces adjonctions n'étaient pas, à ce stade de la procédure, en relation directe avec une disposition restant en discussion ; qu'elles n'étaient pas non plus destinées à assurer le respect de la Constitution, à opérer une coordination avec des textes en cours d'examen ou à corriger une erreur matérielle ; qu'il s'ensuit que le paragraphe VII de l'article 13, le 5° du paragraphe I de l'article 60 et le paragraphe VI de l'article 67 ont été adoptés selon une procédure contraire à la Constitution ; qu'ils doivent être déclarés contraires à cette dernière ; 52. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune autre question de conformité à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt : - le paragraphe VII de l'article 4 ; - le paragraphe VII de l'article 13 ; - au a) du 5° de l'article 29, les mots « ou dans le but de la rétrocéder, dans un délai maximal de cinq ans, à l'usufruitier de ces biens », figurant au cinquième alinéa de l'article L. 143-1 du code rural et de la pêche maritime ; - au 1° du paragraphe III de l'article 32, les mots : « ou de prendre, directement ou indirectement, participation dans une autre exploitation agricole » figurant au 2° de l'article L. 331-1-1 du même code ; - les a) et b) du 5° du paragraphe III de l'article 32 ; - le 5° du paragraphe I de l'article 60 ; - le paragraphe VI de l'article 67 ; - le paragraphe XXIV de l'article 93. Article 2. - Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de cette même loi : - les articles L. 315-1 à L. 315-6 du code rural et de la pêche maritime, tels qu'ils résultent du 2° de l'article 3 ; - le surplus du cinquième alinéa de l'article L. 143-1 du même code, ainsi que son sixième alinéa, tels qu'ils résultent du a) du 5° de l'article 29 ; - le dernier alinéa de l'article L. 143-7-1, tel qu'il résulte du b) du 10° de l'article 29 ; - le surplus du 2° de l'article L. 331-1-1 du code rural et de la pêche maritime, tel qu'il résulte du 1° du paragraphe III de l'article 32 ; - l'article L. 5141-14- 2 du code de la santé publique, tel qu'il résulte du 2° du paragraphe I de l'article 48. Article 3.- L'article L. 143-2 du même code, dans sa rédaction résultant de l'article 29 de la même loi, est conforme à la Constitution sous la réserve énoncée au considérant 21. Article 4.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 9 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d'ESTAING, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
CONSTIT/CONSTEXT000029708942.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 18 septembre 2014, par le Président de l’Assemblée nationale, conformément aux dispositions du premier alinéa de l’article 61 de la Constitution, d’une résolution en date du 17 septembre 2014 tendant à modifier le règlement de l’Assemblée nationale afin de doter les groupes parlementaires d’un statut d’association ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d’association ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que l’article unique de la résolution soumise à l’examen du Conseil constitutionnel tend à modifier l’article 20 du règlement de l’Assemblée nationale afin d’imposer la constitution des groupes auxquels les députés peuvent adhérer ou s’apparenter « sous forme d’association, présidée par le président du groupe et composée des membres du groupe et apparentés » ; que cet article se limite à prévoir que ces groupes parlementaires, créés conformément à l’article 19 du même règlement, se constituent et se déclarent dans les formes prévues par l’article 5 de la loi du 1er juillet 1901 susvisée pour les associations déclarées ; que ces obligations n’emportent aucun contrôle sur la constitution des groupes parlementaires et ne sont dès lors contraires à aucune disposition de la Constitution ; 2. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la résolution soumise à l’examen du Conseil constitutionnel doit être déclarée conforme à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- La résolution adoptée par l'Assemblée nationale le 17 septembre 2014 est déclarée conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Valéry GISCARD d’ESTAING, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.
CONSTIT/CONSTEXT000029708939.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 6 octobre 2014 d’une requête présentée pour M. Jean-Paul LEONHARDT, demeurant à Hoenheim (Bas-Rhin) par Me André Kornmann, avocat au barreau de Strasbourg, et tendant à l’annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 28 septembre 2014 dans ce département en vue de la désignation de cinq sénateurs. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment son article 59 ; Vu l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 38, alinéa 2 ; Vu le code électoral ; Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu’aux termes du deuxième alinéa de l’article 38 de l’ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 : « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l’élection » ; que le deuxième alinéa de l’article 35 dispose : « Le requérant doit annexer à la requête les pièces produites au soutien de ses moyens. Le Conseil peut lui accorder exceptionnellement un délai pour la production d’une partie de ces pièces. » ; 2. Considérant que les affirmations du requérant selon lesquelles les services de l’État ainsi qu’un candidat auraient porté atteinte à la neutralité des opérations électorales ne sont assorties d’aucun commencement de preuve ; que la circonstance que quarante-et-un électeurs n’ont pas pris part au vote n’est pas de nature à entacher la régularité du scrutin ; que l’affirmation selon laquelle « il conviendra d’analyser très en détail le compte de campagne de la liste UMP » ne constitue pas un grief ; que, par suite, la requête de M. LEONHARDT doit être rejetée, D É C I D E : Article 1er.- La requête de M. Jean-Paul LEONHARDT est rejetée. Article 2.- La présente décision sera notifiée au président du Sénat et publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 16 octobre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 17 octobre 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029124089.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 11 avril 2014 par le Conseil d'État (décision n° 371921 du 11 avril 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. et Mme Bernard M., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 2° du 1 de l'article 109, du 6° de l'article 112, du 8 ter de l'article 150-0 D et du second alinéa de l'article 161 du code général des impôts. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de commerce ; Vu le code général des impôts ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour les requérants par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 2 mai 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 6 mai 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendu à l'audience publique du 10 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes du 2° du 1 de l'article 109 du code général des impôts, sont considérées comme revenus distribués : « Toutes les sommes ou valeurs mises à la disposition des associés, actionnaires ou porteurs de parts et non prélevées sur les bénéfices » ; 2. Considérant qu'aux termes du 6° de l'article 112 du même code, ne sont pas considérées comme revenus distribués : « Les sommes ou valeurs attribuées aux actionnaires au titre du rachat de leurs actions, lorsque ce rachat est effectué dans les conditions prévues aux articles L. 225-208 ou L. 225-209 à L. 225-212 du code de commerce. Le régime des plus-values prévu, selon les cas, aux articles 39 duodecies, 150-0 A ou 150 UB est alors applicable » ; 3. Considérant que le 6 du paragraphe II de l'article 150-0-A du même code renvoie à l'article 150-0 D le calcul de la plus-value de cession réalisée par le bénéficiaire lors d'un rachat d'actions ; qu'aux termes du 8 ter de l'article 150-0 D du même code : « Le gain net mentionné au 6 du II de l'article 150-0 A est égal à la différence entre le montant du remboursement et le prix ou la valeur d'acquisition ou de souscription des titres rachetés, diminuée du montant du revenu distribué imposable à l'impôt sur le revenu au titre du rachat dans les conditions prévues aux articles 109, 112, 120 et 161 » ; 4. Considérant que la première phrase du premier alinéa de l'article 161 du même code prévoit que le boni attribué lors de la liquidation d'une société aux titulaires de droits sociaux en sus de leur apport n'est compris, le cas échéant, dans les bases de l'impôt sur le revenu que jusqu'à concurrence de l'excédent du remboursement des droits sociaux annulés sur le prix d'acquisition de ces droits dans le cas où ce dernier est supérieur au montant de l'apport ; qu'aux termes du second alinéa du même article : « Les dispositions de la première phrase du premier alinéa sont applicables dans le cas où la société rachète au cours de son existence les droits de certains associés, actionnaires ou porteurs de parts bénéficiaires » ; 5. Considérant que, selon les requérants, les dispositions contestées instituent, en méconnaissance des principes d'égalité devant la loi et les charges publiques, une différence de traitement entre les actionnaires ou associés personnes physiques dont les actions ou parts sociales sont rachetées par la société émettrice, selon la procédure de rachat employée ; que cette dernière dépendrait de l'objectif poursuivi par la société émettrice alors que la situation du contribuable cédant serait identique quelle que soit la procédure de rachat employée ; qu'ils font valoir que cette différence de traitement ne repose sur aucun critère objectif et rationnel en rapport avec l'objet de la loi et, par suite, méconnaît les principes d'égalité devant la loi et les charges publiques ; 6. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les dispositions du 6° de l'article 112 du code général des impôts ; 7. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « la Loi... doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 8. Considérant qu'il résulte des dispositions combinées du 2° du 1 de l'article 109, du 8 ter de l'article 150-0 D et du second alinéa de l'article 161 du code général des impôts que le rachat de ses actions ou parts sociales par la société émettrice est susceptible de dégager pour l'actionnaire ou l'associé personne physique, d'une part, une plus-value soumise à l'impôt sur le revenu selon le régime des plus-values de cession pour la différence entre la valeur de l'apport et le prix d'acquisition et, d'autre part, un revenu distribué imposable dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers pour la différence entre le prix de rachat des titres et leur prix ou valeur d'acquisition ou de souscription ou, s'il est supérieur, le montant des apports compris dans la valeur nominale des titres rachetés ; 9. Considérant que, par dérogation à ces dispositions, le 6° de l'article 112 du code général des impôts prévoit que les sommes ou valeurs attribuées aux actionnaires au titre du rachat de leurs actions par la société émettrice sont soumises, pour leur ensemble, à un régime de plus-values de cession des valeurs mobilières lorsque ce rachat est effectué dans les conditions prévues aux articles L. 225-208 ou L. 225-209 à L. 225-212 du code de commerce ; que l'article L. 225-208 autorise le rachat par une société anonyme de ses propres actions en vue d'une redistribution aux salariés ; que l'article L. 225-209 autorise le rachat par une société anonyme de ses propres actions dans le cadre d'un plan de rachat d'actions ; que les articles L. 225-210 à L. 225-212 définissent les conditions dans lesquelles ces opérations de rachat doivent être effectuées ; 10. Considérant que lorsqu'un rachat d'actions ou de parts sociales est effectué en vue d'une réduction du capital non motivée par des pertes, conformément à l'article L. 225-207 du code de commerce, les sommes ou valeurs reçues à ce titre par l'actionnaire ou l'associé personne physique cédant sont soumises au régime fiscal de droit commun alors que, dans certaines hypothèses prévues par l'article L. 225-209 du même code, un rachat effectué dans le cadre d'un plan de rachat d'actions peut aboutir à une réduction du capital non motivée par des pertes tout en ouvrant droit au bénéfice du régime fiscal des plus-values de cession de valeurs mobilières ; que, par ailleurs, le régime d'imposition de droit commun est applicable, notamment, à un rachat effectué en cas de refus d'agrément conformément à l'article L. 228-24 du même code ; que la différence de traitement entre les actionnaires ou associés personnes physiques cédants pour l'imposition des sommes ou valeurs reçues au titre du rachat de leurs actions ou parts sociales par la société émettrice ne repose ni sur une différence de situation entre les procédures de rachat ni sur un motif d'intérêt général en rapport direct avec l'objet de la loi ; 11. Considérant que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief, les dispositions du 6° de l'article 112 du code général des impôts doivent être déclarées contraires à la Constitution ; 12. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 13. Considérant, d'une part, que le Conseil constitutionnel ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation de même nature que celui du Parlement ; que, dès lors, il y a lieu de reporter au 1er janvier 2015 la date de l'abrogation des dispositions déclarées contraires à la Constitution afin de permettre au législateur d'apprécier les suites qu'il convient de donner à cette déclaration d'inconstitutionnalité ; 14. Considérant, d'autre part, qu'afin de préserver l'effet utile de la présente décision, notamment à la solution des instances en cours, les sommes ou valeurs reçues avant le 1er janvier 2014 par les actionnaires ou associés personnes physiques au titre du rachat de leurs actions ou parts sociales par la société émettrice, lorsque ce rachat a été effectué selon une procédure autorisée par la loi, ne sont pas considérées comme des revenus distribués et sont imposées selon le régime des plus-values de cession prévu, selon les cas, aux articles 39 duodecies, 150-0 A ou 150 UB du code général des impôts ; qu'à défaut de l'entrée en vigueur d'une loi déterminant de nouvelles règles applicables pour l'année 2014, il en va de même des sommes ou valeurs reçues avant le 1er janvier 2015, D É C I D E : Article 1er.- Le 6° de l'article 112 du code général des impôts est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité prévue par l'article 1er prend effet dans les conditions fixées par les considérants 13 et 14. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 19 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 20 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029124088.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 11 avril 2014 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 2135 du 9 avril 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Laurent L., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du cinquième alinéa de l'article 380-11 du code de procédure pénale. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de procédure pénale ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour le requérant par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 2 et 19 mai 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 5 mai 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Emmanuel Piwnica, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le requérant, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 3 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes du cinquième alinéa de l'article 380-11 du code de procédure pénale : « La caducité de l'appel de l'accusé résulte également de la constatation, par le président de la cour d'assises, que ce dernier a pris la fuite et n'a pas pu être retrouvé avant l'ouverture de l'audience ou au cours de son déroulement » ; 2. Considérant que, selon le requérant, en privant de son droit d'appel l'accusé qui n'était pas présent lors des débats devant la cour d'assises statuant en appel, ces dispositions méconnaissent le principe d'égalité et le droit à un recours effectif ; qu'en outre, l'absence de pouvoir d'appréciation du président de la cour d'assises méconnaîtrait les exigences issues de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; 3. Considérant qu'aux termes de l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution » ; qu'est garanti par ces dispositions le respect des droits de la défense ; qu'il en résulte également qu'il ne doit pas être porté d'atteintes substantielles au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction ; 4. Considérant que les articles 317 à 320-1 du code de procédure pénale imposent la comparution personnelle de l'accusé devant la cour d'assises ; que, pour le jugement des accusés absents sans excuse valable, le législateur a organisé la procédure du défaut en matière criminelle, régie par les articles 379-2 à 379-6 du même code ; que, toutefois, l'article 380-1 exclut cette procédure devant la cour d'assises statuant en appel ; 5. Considérant que l'article 380-2 du code de procédure pénale reconnaît à l'accusé la faculté de faire appel de l'arrêt de condamnation rendu par la cour d'assises en premier ressort ; que les quatre premiers alinéas de l'article 380-11 du même code prévoient la faculté pour l'accusé de se désister de son appel, jusqu'à son interrogatoire par le président de la cour ; que le cinquième alinéa dispose que l'appel formé par l'accusé est caduc lorsque le président de la cour d'assises constate qu'il a pris la fuite et qu'il n'a pu être retrouvé, avant l'ouverture du procès ou au cours de son déroulement ; que ces dernières dispositions poursuivent l'objectif d'intérêt général d'assurer la comparution personnelle de l'accusé en cause d'appel afin que le procès puisse être utilement conduit à son terme et qu'il soit définitivement statué sur l'accusation ; 6. Considérant que les dispositions contestées s'appliquent à l'accusé qui a régulièrement relevé appel de sa condamnation ; qu'elles le privent du droit de faire réexaminer l'affaire par la juridiction saisie du seul fait que, à un moment quelconque du procès, il s'est soustrait à l'obligation de comparaître tout en rendant immédiatement exécutoire la condamnation contestée ; que ces dispositions portent au droit à un recours juridictionnel effectif une atteinte disproportionnée au regard de l'objectif d'intérêt général poursuivi ; que, par suite, elles méconnaissent les exigences résultant de l'article 16 de la Déclaration de 1789 ; que sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, ces dispositions doivent être déclarées contraires à la Constitution ; 7. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 8. Considérant que l'abrogation du cinquième alinéa de l'article 380-11 du code de procédure pénale prend effet à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date ; qu'afin de permettre le jugement en appel des accusés en fuite, il y a lieu de prévoir que, nonobstant les dispositions de l'article 380-1 du code de procédure pénale, ils pourront être jugés selon la procédure du défaut en matière criminelle, D É C I D E : Article 1er.- Le cinquième alinéa de l'article 380-11 du code de procédure pénale est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité prévue par l'article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées par son considérant 8. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance 12 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 13 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029124086.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 9 avril 2014 par la Cour de cassation (chambre sociale, arrêt n° 940 du 9 avril 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. David V., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 2° de l'article L. 1243-10 du code du travail. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code du travail ; Vu le code de la sécurité sociale ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites par le requérant, enregistrées les 29 avril et 19 mai 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 2 mai 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendu à l'audience publique du 3 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes du 2° de l'article L. 1243-10 du code du travail, l'indemnité de fin de contrat à durée déterminée n'est pas due : « Lorsque le contrat est conclu avec un jeune pour une période comprise dans ses vacances scolaires ou universitaires » ; 2. Considérant que, selon le requérant, en s'abstenant de fixer une limite d'âge précisant la notion de « jeune », le législateur a méconnu l'étendue de sa compétence ; qu'en outre, les différences de traitement instituées, d'une part, entre les étudiants, selon leur âge, et, d'autre part, entre les étudiants et les autres personnes employées en contrat à durée déterminée ne seraient pas en rapport avec l'objet de l'indemnité de fin de contrat et porteraient atteinte au principe d'égalité devant la loi ; 3. Considérant que l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 4. Considérant, en premier lieu, que les dispositions contestées ne s'appliquent qu'aux élèves ou étudiants qui n'ont pas dépassé l'âge limite, prévu par l'article L. 381-4 du code de la sécurité sociale, pour être affiliées obligatoirement aux assurances sociales au titre de leur inscription dans un établissement scolaire ou universitaire ; que, par suite, d'une part, le grief tiré de ce qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur n'aurait pas défini la notion de « jeune » manque en fait ; que, d'autre part, le principe d'égalité ne fait pas obstacle à ce que l'application de dispositions législatives relatives aux élèves ou aux étudiants soit soumise à une limite d'âge ; 5. Considérant, en second lieu, que selon l'article L. 1243-8 du code du travail, l'indemnité de fin de contrat est versée au salarié employé en contrat à durée déterminée afin de « compenser la précarité de sa situation » lorsqu'à l'issue de son contrat, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par un contrat à durée indéterminée ; que l'exclusion prévue par les dispositions contestées ne s'applique qu'aux contrats conclus pour une période de travail accompli pendant les vacances scolaires ou universitaires ; que les étudiants employés selon un contrat de travail à durée déterminée pour une période comprise dans leurs périodes de vacances scolaires ou universitaires ne sont dans une situation identique ni à celle des étudiants qui cumulent un emploi avec la poursuite de leurs études ni à celle des autres salariés en contrat de travail à durée déterminée ; qu'en excluant le versement de cette indemnité lorsque le contrat est conclu avec un élève ou un étudiant employé pendant ses vacances scolaires ou universitaires et qui a vocation, à l'issue de ces vacances, à reprendre sa scolarité ou ses études, le législateur a institué une différence de traitement fondée sur une différence de situation en rapport direct avec l'objet de la loi ; 6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les griefs tirés de l'atteinte au principe d'égalité doivent être écartés ; que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Le 2° de l'article L. 1243-10 du code du travail est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 12 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 13 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029124087.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 9 avril 2014 par la Cour de cassation (chambre sociale, arrêt n° 941 du 9 avril 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Lionel A., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 3° de l'article L. 1242-2 et du 1° de l'article L. 1243-10 du code du travail. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code du travail ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour l'association Solidarités international, partie en défense, par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, enregistrées le 30 avril 2014 ; Vu les observations produites par le requérant, enregistrées les 2 et 16 mai 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 2 mai 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Thomas Lyon-Caen, pour la partie en défense, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 3 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que l'article L. 1242-2 du code du travail fixe les cas dans lesquels, pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, un contrat de travail à durée déterminée peut être conclu ; qu'à ce titre, le 3° de cet article désigne les « emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois » ; 2. Considérant qu'aux termes du 1° de l'article L. 1243-10 du code du travail, l'indemnité de fin de contrat à durée déterminée n'est pas due : « Lorsque le contrat est conclu au titre du 3° de l'article L. 1242-2 ou de l'article L. 1242-3, sauf dispositions conventionnelles plus favorables » ; 3. Considérant que, selon le requérant, la notion « d'usage » mentionnée à l'article L. 1242-2 est inintelligible et insusceptible de constituer un critère objectif et rationnel pour fonder une différence de traitement entre salariés quant aux conditions de recours au contrat de travail à durée déterminée et aux modalités d'indemnisation des salariés employés au moyen de tels contrats ; qu'en outre, ces dispositions institueraient entre salariés de différents secteurs d'activité des différences qui méconnaissent le principe d'égalité devant la loi ; 4. Considérant que l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; 5. Considérant, en premier lieu, que le premier alinéa de l'article L. 1221-2 du code du travail dispose : « Le contrat de travail à durée indéterminée est la forme normale et générale de la relation de travail » ; que les dispositions de l'article L. 1242-2 du code du travail déterminent les cas dans lesquels il peut toutefois être recouru au contrat de travail à durée déterminée ; que le 3° de cet article permet ainsi le recours à cette catégorie de contrat soit pour des emplois saisonniers soit pour des emplois qui revêtent un caractère par nature temporaire et pour lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée ; 6. Considérant que, d'une part, le recours au contrat de travail à durée déterminée pour les emplois présentant un caractère par nature temporaire n'est possible que dans certains secteurs d'activité définis par décret ou par convention ou accord collectif étendu, dans lesquels il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée ; que la décision de l'autorité administrative d'inscrire un secteur d'activité dans la liste des secteurs prévue par les dispositions contestées ou d'étendre une convention ou un accord collectif procédant à une telle inscription peut être contestée devant la juridiction compétente ; que s'il appartient aux autorités administratives, sous le contrôle du juge, d'apprécier si, dans un secteur déterminé, il est « d'usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée », ces dispositions n'ont pas pour effet de conférer à ces autorités un pouvoir arbitraire et ne sont en tout état de cause pas inintelligibles ; qu'en outre, le recours au contrat de travail à durée déterminée en application de ces dispositions n'est possible, dans un des secteurs ainsi définis, que s'il est établi que l'emploi en cause présente un caractère par nature temporaire ; 7. Considérant que, d'autre part, en permettant le recours au contrat à durée déterminée pour des emplois « à caractère saisonnier » ou qui présentent un caractère « par nature temporaire », le législateur a établi une différence de traitement fondée sur une différence de situation en rapport direct avec l'objet de la loi ; 8. Considérant que, par suite, le grief tiré de ce que le 3° de l'article L. 1242-2 du code du travail méconnaît le principe d'égalité devant la loi doit être écarté ; 9. Considérant, en second lieu, que selon l'article L. 1243-8 du code du travail, l'indemnité de fin de contrat est versée au salarié lié par un contrat à durée déterminée afin de « compenser la précarité de sa situation » lorsqu'à l'issue de son contrat, les relations contractuelles de travail ne se poursuivent pas par la conclusion d'un contrat à durée indéterminée ; que les dispositions contestées écartent le versement de cette indemnité lorsque le contrat est conclu au titre du 3° de l'article L. 1242-2 du code du travail ou de l'article L. 1242-3 ; 10. Considérant que l'article L. 1242-3 du code du travail permet le recours au contrat à durée déterminée pour des contrats conclus au titre de dispositions légales destinées à favoriser le recrutement de certaines catégories de personnes sans emploi ou lorsque l'employeur s'engage, pour une durée et dans des conditions déterminées par décret, à assurer un complément de formation professionnelle au salarié ; qu'en prévoyant que l'employeur n'est pas tenu de verser l'indemnité de fin de contrat, d'une part, pour de tels contrats et, d'autre part, lorsque le recours au contrat à durée déterminée résulte de la nature des emplois en cause en raison de leur caractère saisonnier ou, par nature, temporaire, le législateur a institué des différences de traitement fondées sur une différence de situation en rapport direct avec la particularité des emplois en cause ; que, par suite, le grief tiré de ce que le 1° de l'article L. 1243-10 du code du travail méconnaît le principe d'égalité doit être écarté ; 11. Considérant que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Le 3° de l'article L. 1242-2 et le 1° de l'article L. 1243-10 du code du travail sont conformes à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 12 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 13 juin 2014.
CONSTIT/CONSTEXT000029124090.xml
Le Conseil constitutionnel a été saisi le 11 avril 2014 par le Conseil d'État (décision n° 375278 du 11 avril 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la commune de Salbris, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code général des collectivités territoriales ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 6 mai 2014 ; Vu les observations produites pour la commune requérante par Me Philippe Bluteau, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 19 mai 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Bluteau, pour la commune requérante, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 10 juin 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes du paragraphe I de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral : « Sans préjudice des dispositions de l'article L. 5212-7, le nombre et la répartition des délégués sont établis : « - soit, dans les communautés de communes et les communautés d'agglomération, par accord des deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant la moitié de la population totale de celles-ci ou de la moitié des conseils municipaux des communes intéressées représentant les deux tiers de la population totale. Cette répartition tient compte de la population de chaque commune. Chaque commune dispose d'au moins un siège et aucune commune ne peut disposer de plus de la moitié des sièges. Le nombre de sièges total ne peut excéder de plus de 25 % le nombre de sièges qui serait attribué en application des III et IV du présent article ; « - soit selon les modalités prévues aux II à VI du présent article » ; 2. Considérant que, selon la commune requérante, en permettant un accord de répartition des sièges au conseil communautaire approuvé par une majorité qualifiée de communes membres sans imposer une répartition sur des bases essentiellement démographiques, les dispositions du deuxième alinéa de ce paragraphe I méconnaissent le principe d'égalité devant le suffrage ; 3. Considérant que, selon le premier alinéa de l'article 72 de la Constitution : « les collectivités territoriales de la République sont les communes, les départements, les régions, les collectivités à statut particulier et les collectivités d'outre-mer régies par l'article 74. Toute autre collectivité territoriale est créée par la loi » ; que le troisième alinéa du même article dispose que ces collectivités « s'administrent librement par des conseils élus » dans les conditions prévues par la loi ; que selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret » ; que l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; 4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, dès lors que des établissements publics de coopération entre les collectivités territoriales exercent en lieu et place de ces dernières des compétences qui leur auraient été sinon dévolues, leurs organes délibérants doivent être élus sur des bases essentiellement démographiques ; que s'il s'ensuit que la répartition des sièges doit respecter un principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque collectivité territoriale participante, il peut être toutefois tenu compte dans une mesure limitée d'autres considérations d'intérêt général et notamment de la possibilité qui serait laissée à chacune de ces collectivités de disposer d'au moins un représentant au sein de cet organe délibérant ; 5. Considérant que les dispositions contestées prévoient les modalités de détermination du nombre et de la répartition des délégués des communes au sein des organes délibérants des communautés de communes et des communautés d'agglomération ; qu'en vertu de ces dispositions, le nombre et la répartition des sièges peuvent être fixés par accord des deux tiers des conseils municipaux représentant la moitié de la population ou de la moitié des conseils municipaux représentant les deux tiers de la population ; que le nombre des sièges est plafonné par la loi ; que leur répartition doit tenir compte de la population de chaque commune et assurer à chacune d'entre elles au moins un siège, sans qu'aucune ne puisse disposer de plus de la moitié des sièges ; qu'en vertu du paragraphe II de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales, à défaut de cet accord, les sièges sont attribués à la représentation proportionnelle de la population de chaque commune, à la plus forte moyenne ; que leur nombre est fixé en fonction de la population totale des communes membres de l'établissement public de coopération intercommunale ; que chaque commune dispose d'au moins un siège ; 6. Considérant qu'en permettant un accord sur la détermination du nombre et de la répartition des sièges des conseillers communautaires et en imposant seulement que, pour cette répartition, il soit tenu compte de la population, ces dispositions permettent qu'il soit dérogé au principe général de proportionnalité par rapport à la population de chaque commune membre de l'établissement public de coopération intercommunale dans une mesure qui est manifestement disproportionnée ; que, par suite, elles méconnaissent le principe d'égalité devant le suffrage et doivent être déclarées contraires à la Constitution ; 7. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 8. Considérant, en premier lieu, que la déclaration d'inconstitutionnalité du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales entre en vigueur à compter de la publication de la présente décision ; qu'elle est applicable à toutes les opérations de détermination du nombre et de la répartition des sièges de conseillers communautaires réalisées postérieurement à cette date ; 9. Considérant, en second lieu, que la remise en cause immédiate de la répartition des sièges dans l'ensemble des communautés de communes et des communautés d'agglomération où elle a été réalisée avant la publication de la présente décision en application des dispositions déclarées contraires à la Constitution entraînerait des conséquences manifestement excessives ; que, d'une part, afin de préserver l'effet utile de la déclaration d'inconstitutionnalité à la solution des instances en cours à la date de la présente décision, il y a lieu de prévoir que l'abrogation du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales est applicable dans ces instances ; que, d'autre part, afin de garantir le respect du principe d'égalité devant le suffrage pour les élections à venir, il y a lieu de prévoir la remise en cause du nombre et de la répartition des sièges dans les communautés de communes et les communautés d'agglomération au sein desquelles le conseil municipal d'au moins une des communes membres est, postérieurement à la date de la publication de la présente décision, partiellement ou intégralement renouvelé, D É C I D E : Article 1er.- Le deuxième alinéa du paragraphe I de l'article L. 5211-6-1 du code général des collectivités territoriales est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité prévue par l'article 1er prend effet à compter de la publication de la présente décision dans les conditions fixées aux considérants 8 et 9. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 19 juin 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 20 juin 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 2 juillet 2014 par le Conseil d'État (décisions nos 377207 et 379955 du 2 juillet 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par les sociétés Red Bull On Premise et Red Bull Off Premise, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 1613 bis A du code général des impôts. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code général des impôts ; Vu la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2012-659 DC du 13 décembre 2012 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour les sociétés requérantes par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 25 juillet et 11 août 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées les 25 juillet et 11 août 2014 ; Vu la lettre du 4 août 2014 par laquelle le Conseil constitutionnel a invité les parties à produire des observations sur les volumes consommés en France de boissons contenant un seuil minimal de 220 milligrammes de caféine pour 1 000 millilitres, en distinguant selon que ces boissons sont « dites énergisantes » ou non ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me François Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour les sociétés requérantes, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 11 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article 1613 bis A du code général des impôts : « I. - Il est institué une contribution perçue sur les boissons dites énergisantes contenant un seuil minimal de 220 milligrammes de caféine pour 1 000 millilitres, destinées à la consommation humaine : « 1° Relevant des codes NC 2009 et NC 2202 du tarif des douanes ; « 2° Conditionnées dans des récipients destinés à la vente au détail, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un professionnel. « II. - Le taux de la contribution est fixé à 100 EUR par hectolitre. « Ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2014, dans une proportion égale au taux de croissance de l'indice des prix à la consommation hors tabac de l'avant-dernière année. Il est exprimé avec deux chiffres significatifs après la virgule, le deuxième chiffre étant augmenté d'une unité si le chiffre suivant est égal ou supérieur à cinq. Il est constaté par arrêté du ministre chargé du budget, publié au Journal officiel. « III. - 1. La contribution est due à raison des boissons mentionnées au I par leurs fabricants établis en France, leurs importateurs et les personnes qui réalisent en France des acquisitions intracommunautaires, sur toutes les quantités livrées à titre onéreux ou gratuit. « 2. Sont également redevables de la contribution les personnes qui, dans le cadre de leur activité commerciale, fournissent à titre onéreux ou gratuit à leurs clients des boissons consommables en l'état mentionnées au I dont elles ont préalablement assemblé les différents composants présentés dans des récipients non destinés à la vente au détail. « IV. - Les expéditions vers un autre État membre de l'Union européenne ou un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen ainsi que les exportations vers un pays tiers sont exonérées de la contribution lorsqu'elles sont réalisées directement par les personnes mentionnées au 1 du III. « Les personnes qui acquièrent auprès d'un redevable de la contribution, qui reçoivent en provenance d'un autre État membre de l'Union européenne ou d'un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, ou qui importent en provenance de pays tiers des boissons mentionnées au I qu'elles destinent à une livraison vers un autre État membre de l'Union européenne ou un autre État partie à l'accord sur l'Espace économique européen, ou à une exportation vers un pays tiers acquièrent, reçoivent ou importent ces boissons en franchise de la contribution. « Pour bénéficier des dispositions du deuxième alinéa du présent IV, les intéressés doivent adresser au fournisseur, lorsqu'il est situé en France, et dans tous les cas au service des douanes dont ils dépendent, une attestation certifiant que les boissons sont destinées à faire l'objet d'une livraison ou d'une exportation mentionnée au même alinéa. Cette attestation comporte l'engagement d'acquitter la contribution au cas où la boisson ne recevrait pas la destination qui a motivé la franchise. Une copie de l'attestation est conservée à l'appui de la comptabilité des intéressés. « V. - La contribution mentionnée au I est acquittée auprès de l'administration des douanes. Elle est recouvrée et contrôlée selon les règles, sanctions, garanties et privilèges applicables au droit spécifique mentionné à l'article 520 A. Le droit de reprise de l'administration s'exerce dans les mêmes délais. « VI. - Le produit de la contribution mentionnée au I est affecté à la Caisse nationale de l'assurance maladie des travailleurs salariés » ; 2. Considérant que, selon les sociétés requérantes, les dispositions contestées méconnaissent l'autorité de la chose jugée attachée à une décision du Conseil constitutionnel ainsi que le droit au recours consacré par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; qu'elles méconnaîtraient également le principe d'égalité devant l'impôt et les charges publiques et porteraient atteinte à la liberté d'entreprendre ; - SUR LE GRIEF TIRÉ DE LA VIOLATION DE L'AUTORITÉ DE LA CHOSE JUGÉE PAR LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL : 3. Considérant que selon les sociétés requérantes, en adoptant les dispositions contestées, le législateur aurait méconnu la décision du Conseil constitutionnel du 13 décembre 2012 susvisée, et par là-même les principes de respect de l'autorité de la chose jugée par le Conseil constitutionnel et de droit au recours ; 4. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles » ; que l'autorité des décisions visées par cette disposition s'attache non seulement à leur dispositif mais aussi aux motifs qui en sont le soutien nécessaire et en constituent le fondement même ; 5. Considérant que si l'autorité attachée à une décision du Conseil constitutionnel déclarant inconstitutionnelles des dispositions d'une loi ne peut en principe être utilement invoquée à l'encontre d'une autre loi conçue en termes distincts, il n'en va pas ainsi lorsque les dispositions de cette loi, bien que rédigées sous une forme différente, ont, en substance, un objet analogue à celui des dispositions législatives déclarées contraires à la Constitution ; 6. Considérant que, dans sa décision du 13 décembre 2012 susvisée, le Conseil constitutionnel a examiné les dispositions de l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 qui, à des fins de lutte contre la consommation alcoolique des jeunes, créaient une contribution sur les boissons contenant un seuil minimal de 220 milligrammes de caféine ou de 300 milligrammes de taurine pour 1 000 millilitres conditionnées pour la vente au détail et destinées à la consommation humaine, au taux de 50 euros par hectolitre et dont sont redevables les fabricants de ces boissons établis en France ou leurs importateurs ; qu'il a jugé qu'en taxant des boissons ne contenant pas d'alcool à des fins de lutte contre la consommation alcoolique des jeunes, le législateur avait établi une imposition qui n'était pas fondée sur des critères objectifs et rationnels en rapport avec l'objectif poursuivi et que, par suite, le législateur avait méconnu les exigences de l'article 13 de la Déclaration de 1789 ; que le Conseil constitutionnel a donc déclaré les dispositions de l'article 25 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013 contraires à la Constitution ; 7. Considérant que les dispositions contestées ont été introduites par la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 ; qu'elles instaurent une contribution qui porte sur les boissons contenant un seuil minimal de 220 milligrammes de caféine pour 1 000 millilitres conditionnées pour la vente au détail et destinées à la consommation humaine ; que le taux de la contribution est de 100 euros par hectolitre ; que sont redevables de cette imposition les fabricants de ces boissons établis en France ou leurs importateurs ; 8. Considérant qu'il ressort des travaux parlementaires de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2014 qu'en créant cette imposition, le législateur a entendu prévenir les effets indésirables sur la santé de boissons ayant une teneur élevée en caféine ; que, si les dispositions contestées instituent une contribution dont l'assiette et le taux présentent des similitudes avec les dispositions déclarées contraires à la Constitution dans la décision du 13 décembre 2012, ces dispositions ont un objet différent de celui des dispositions censurées ; que, par suite, en adoptant les dispositions contestées, le législateur n'a pas méconnu l'autorité qui s'attache, en vertu de l'article 62 de la Constitution, à la décision du Conseil constitutionnel du 13 décembre 2012 ; - SUR LE GRIEF TIRÉ DE LA VIOLATION DES PRINCIPES D'ÉGALITÉ DEVANT L'IMPÔT ET LES CHARGES PUBLIQUES : 9. Considérant que, selon les sociétés requérantes, le seuil d'imposition prévu par les dispositions contestées n'est pas pertinent au regard de l'objectif poursuivi par le législateur ; que cette imposition ne s'appliquerait pas à toutes les boissons comportant de la caféine ; qu'il en résulterait une violation du principe d'égalité devant l'impôt ; que les dispositions contestées méconnaîtraient également l'égalité devant les charges publiques, en faisant peser sur les contribuables une charge excessive en raison du taux de l'imposition et de l'indexation annuelle de son barème sur l'indice des prix à la consommation ; 10. Considérant qu'aux termes de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; que cette exigence ne serait pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives ; qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, il doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; 11. Considérant, en premier lieu, que sont assujetties à la contribution créée par les dispositions contestées les boissons conditionnées dans des récipients destinés à la vente au détail et dont la teneur en caféine excède le seuil de 220 milligrammes pour 1 000 millilitres ; qu'ainsi, la différence instituée entre les boissons selon leur teneur en caféine est en rapport direct avec l'objectif de protection de la santé publique poursuivi ; 12. Considérant toutefois que sont exclues du champ d'application de cette imposition les boissons faisant l'objet d'une commercialisation dans les mêmes formes et ayant une teneur en caféine supérieure à 220 milligrammes pour 1 000 millilitres dès lors qu'elles ne sont pas des boissons « dites énergisantes » ; que la différence ainsi instituée entre les boissons destinées à la vente au détail et contenant une teneur en caféine identique selon qu'elles sont ou non qualifiées de boissons « dites énergisantes » entraîne une différence de traitement qui est sans rapport avec l'objet de l'imposition et, par suite, contraire au principe d'égalité devant l'impôt ; 13. Considérant, en second lieu, que le taux de la contribution est fixé à 100 euros par hectolitre ; que ce tarif est relevé au 1er janvier de chaque année à compter du 1er janvier 2014, en fonction de l'évolution de l'indice des prix à la consommation hors tabac de l'avant-dernière année ; que ce niveau d'imposition ne revêt pas un caractère confiscatoire ; 14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'au premier alinéa du paragraphe I de l'article 1613 bis A, les mots « dites énergisantes » doivent être déclarés contraires à la Constitution ; que, pour le surplus, les dispositions de cet article ne sont pas contraires aux principes d'égalité devant l'impôt et les charges publiques ; que ces dispositions, qui ne méconnaissent ni la liberté d'entreprendre ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution ; - SUR LES EFFETS DE LA DÉCLARATION D'INCONSTITUTIONNALITÉ : 15. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 16. Considérant que l'entrée en vigueur immédiate de l'abrogation des dispositions déclarées contraires à la Constitution aurait pour effet d'élargir l'assiette d'une imposition ; qu'afin de permettre au législateur de tirer les conséquences de la déclaration d'inconstitutionnalité des mots « dites énergisantes » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article 1613 bis A du code général des impôts, il y a lieu de reporter au 1er janvier 2015 la date de l'abrogation de ces mots, D É C I D E : Article 1er.- Les mots « dites énergisantes » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article 1613 bis A du code général des impôts sont contraires à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet au 1er janvier 2015 dans les conditions fixées au considérant 16. Article 3.- L'article 1613 bis A du code général des impôts est, pour le surplus, conforme à la Constitution. Article 4.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 19 septembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 23 juin 2014 par le Conseil d'État (décision n° 376694 du 23 juin 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par la société PV-CP Distribution, relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du dernier alinéa du paragraphe II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code général des impôts ; Vu la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour la société requérante par la SCP Baker et McKenzie, avocat au barreau de Paris, enregistrées les 11 et 24 juillet 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 15 juillet 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Eric Meier, avocat au barreau de Paris, pour la société requérante, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 9 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que l'article 1647 B sexies du code général des impôts est relatif au plafonnement de la contribution économique territoriale en fonction de la valeur ajoutée ; qu'aux termes du dernier alinéa du paragraphe II de cet article : « En cas de transmission universelle du patrimoine mentionnée à l'article 1844-5 du code civil, de cession ou de cessation d'entreprise au cours de l'année d'imposition, le montant de la cotisation foncière des entreprises de l'entreprise dissoute est ajusté en fonction du rapport entre la durée de la période de référence mentionnée à l'article 1586 quinquies du présent code et l'année civile » ; 2. Considérant que, selon la société requérante, les dispositions contestées créent une différence de traitement, selon la durée restant à courir entre la date de l'opération de restructuration de l'entreprise et la fin de l'exercice fiscal, sans rapport avec l'objectif poursuivi par le législateur et portent atteinte aux principes d'égalité devant la loi et les charges publiques ; 3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « la Loi. . .doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse » ; que le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit ; qu'aux termes de l'article 13 de la Déclaration de 1789 : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives ; qu'en particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, il doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose ; que cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques ; 4. Considérant que la contribution économique territoriale prévue par l'article 1447-0 du code général des impôts est composée d'une cotisation foncière des entreprises et d'une cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ; que l'article 1647 B sexies prévoit que, sur demande du redevable effectuée dans le délai de réclamation prévu pour la cotisation foncière des entreprises, la contribution économique territoriale est plafonnée en fonction de la valeur ajoutée produite par l'entreprise ; que cet article fixe le taux de ce plafonnement à 3 % de cette valeur ajoutée et prévoit que le dégrèvement résultant du plafonnement s'impute uniquement sur la cotisation foncière des entreprises ; qu'en vertu du paragraphe I de l'article 1478 du même code, la cotisation foncière des entreprises est due pour l'année entière par le redevable qui exerce l'activité le 1er janvier ; 5. Considérant qu'avant l'adoption des dispositions contestées, les règles relatives au plafonnement de la contribution économique territoriale conduisaient à ce que, en cas de transmission universelle de patrimoine, de cession ou de cessation d'entreprise en cours d'exercice fiscal, le montant du dégrèvement résultant du plafonnement était d'autant plus important que l'opération de restructuration intervenait à une date proche du début dudit exercice ; qu'il ressort des travaux préparatoires de la loi du 29 décembre 2010 susvisée qu'en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu éviter l'optimisation fiscale du mécanisme du plafonnement afin que le montant du dégrèvement en résultant ne dépende plus de la date de l'opération de restructuration ; qu'il a, à cet effet, prévu que le montant de la cotisation foncière des entreprises pris en compte pour le calcul du dégrèvement est ajusté en fonction du rapport entre la période effective d'exercice de l'activité et l'année civile ; 6. Considérant, toutefois, qu'en raison du fait générateur retenu, les dispositions contestées ont pour effet de laisser à la charge de l'entreprise redevable l'intégralité de la cotisation foncière des entreprises, sans bénéfice du plafonnement, pour la période de l'année postérieure à l'opération de restructuration ; que, par suite, plus l'opération de restructuration intervient à une date proche du début de l'exercice fiscal, plus le montant de la contribution économique territoriale dû est important par rapport à celui qui aurait été versé en l'absence de restructuration ; que la différence de traitement ainsi instituée entre les entreprises redevables de la cotisation foncière des entreprises n'est pas justifiée par une différence de situation entre elles en rapport avec l'objectif poursuivi et, par suite, méconnaît les principes d'égalité devant la loi et les charges publiques ; qu'il suit de là que le dernier alinéa du paragraphe II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts doit être déclaré contraire à la Constitution ; 7. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause » ; que, si, en principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration ; 8. Considérant que l'entrée en vigueur immédiate de l'abrogation des dispositions déclarées contraires à la Constitution aurait pour effet de rétablir le mécanisme de plafonnement tel qu'il existait antérieurement ; qu'afin de permettre au législateur de tirer les conséquences de la déclaration d'inconstitutionnalité des dispositions contestées, il y a lieu de reporter au 1er janvier 2015 la date de leur abrogation ; que, par ailleurs, afin de préserver l'effet utile de la présente décision, notamment à la solution des demandes de dégrèvement, réclamations et instances en cours, il appartient aux administrations et aux juridictions saisies de surseoir à statuer jusqu'à l'entrée en vigueur de la nouvelle loi ou, au plus tard, jusqu'au 1er janvier 2015 dans les procédures en cours ou à venir dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles, D É C I D E : Article 1er.- Le dernier alinéa du paragraphe II de l'article 1647 B sexies du code général des impôts est contraire à la Constitution. Article 2.- La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions prévues au considérant 8. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 19 septembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 30 juin 2014 par le président de la Polynésie française, dans les conditions prévues à l'article 12 de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004, d'une demande tendant à ce qu'il constate que « l'ensemble des dispositions de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public introduites en Polynésie française par l'article 27 de l'ordonnance n° 2009-536 du 14 mai 2009 portant diverses dispositions d'adaptation du droit outre-mer, et ratifiées par l'article 10, I, 3° de la loi n° 2009-970 du 3 août 2009 relative à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et portant ratification d'ordonnances. . . sont intervenues dans le domaine de compétence de la Polynésie française tel que défini par la loi organique susmentionnée, en tant qu'elles s'appliquent aux administrations de la Polynésie française, de ses établissements publics ou des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé par elle chargées d'une mission de service public ». LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution, notamment ses articles 74 et 74-1 ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française ; Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ; Vu l'ordonnance n° 2009-536 du 14 mai 2009 portant diverses dispositions d'adaptation du droit outre-mer, notamment son article 27 ; Vu la loi n° 2009-970 du 3 août 2009 relative à l'évolution institutionnelle de la Nouvelle-Calédonie et portant ratification d'ordonnances, notamment son article 10 ; Vu les observations du Premier ministre, enregistrées le 9 juillet 2014 ; Vu les observations du président de l'assemblée de la Polynésie française, enregistrées le 10 juillet 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article 12 de la loi organique du 27 février 2004 susvisée, pris en application du neuvième alinéa de l'article 74 de la Constitution : « Lorsque le Conseil constitutionnel a constaté qu'une loi promulguée postérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi organique est intervenue dans les matières ressortissant à la compétence de la Polynésie française, en tant qu'elle s'applique à cette dernière, cette loi peut être modifiée ou abrogée par l'assemblée de la Polynésie française » ; que le président de la Polynésie française demande au Conseil constitutionnel de constater que l'ensemble des dispositions de la loi du 11 juillet 1979 susvisée sont intervenues dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française en tant qu'elles s'appliquent aux administrations de la Polynésie française, de ses établissements publics ou des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public ; 2. Considérant que, postérieurement à l'entrée en vigueur de la loi organique du 27 février 2004, l'article 27 de l'ordonnance du 14 mai 2009 susvisée a inséré dans la loi du 11 juillet 1979 un nouvel article 12 prévoyant l'application de cette loi en Polynésie française, dans les îles Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie ; que la demande du président de la Polynésie française porte sur les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 ainsi introduites en Polynésie française ; que, par suite, elle porte sur les mots « en Polynésie française, » figurant à l'article 12 de la loi du 11 juillet 1979 ; 3. Considérant, d'une part, qu'en application du troisième alinéa de l'article 74 de la Constitution, les deuxième à onzième alinéas de l'article 7 de la loi organique du 27 février 2004 déterminent les matières pour lesquelles les dispositions législatives et réglementaires de l'État sont applicables de plein droit en Polynésie française ; qu'à ce titre, le 7° de cet article 7 mentionne les « droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de l'État et de ses établissements publics ou avec celles des communes et de leurs établissements publics » ; que les règles relatives à la motivation des actes administratifs relèvent des droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ; qu'il en résulte qu'en Polynésie française, les dispositions de la loi du 11 juillet 1979 s'appliquent de plein droit aux actes administratifs des administrations de l'État et de ses établissements publics, ainsi qu'à ceux des administrations des communes et de leurs établissements publics ; que les mots « en Polynésie française, » figurant à l'article 12 de la loi du 11 juillet 1979 n'ont pas d'autre objet que de rendre applicables les dispositions de cette loi aux actes administratifs des administrations de la Polynésie française et de ses établissements publics ou des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public ; 4. Considérant, d'autre part, que l'article 13 de la loi organique du 27 février 2004 dispose : « Les autorités de la Polynésie française sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas dévolues à l'État par l'article 14 et celles qui ne sont pas dévolues aux communes en vertu des lois et règlements applicables en Polynésie française » ; que les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations de la Polynésie française et de ses établissements publics ne figurent pas au nombre des matières énumérées par l'article 14 de la loi organique du 27 février 2004 ; qu'ainsi, en rendant la loi du 11 juillet 1979 applicable aux actes administratifs des administrations de la Polynésie française et de ses établissements publics ou des autres personnes publiques créées par elle ou des personnes de droit privé chargées par elle d'une mission de service public, le législateur est intervenu dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française, D É C I D E : Article 1er.- Les mots « en Polynésie française, » figurant à l'article 12 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public sont intervenus dans une matière ressortissant à la compétence de la Polynésie française. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 19 septembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 20 juin 2014 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 3450 du 17 juin 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Laurent D., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 226-19 du code pénal et L. 1223-3 du code de la santé publique. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code pénal ; Vu le code de la santé publique ; Vu la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ; Vu la loi n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2004-499 DC du 29 juillet 2004 ; Vu la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, notamment son article 116 ; Vu l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine ; Vu la loi n° 2011-2012 du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour le requérant par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 15 juillet, 30 juillet et 27 août 2014 ; Vu les observations produites pour l'Établissement français du sang et M. Ramdane B., parties en défense, par la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 15 juillet, 30 juillet et 2 septembre 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 15 juillet 2014 ; Vu la lettre du 31 juillet 2014 par laquelle le Conseil constitutionnel a invité les parties à produire des observations sur la question de savoir si l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine, dont sont issues les dispositions de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique, ont été ratifiées ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Patrice Spinosi pour le requérant, Me Claire Waquet et Me Pierre-Yves Fouré, avocat au barreau de Paris, pour les parties en défense et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 9 septembre 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant qu'aux termes de l'article 226-19 du code pénal, dans sa rédaction résultant de l'article 14 de la loi du 6 août 2004 susvisée : « Le fait, hors les cas prévus par la loi, de mettre ou de conserver en mémoire informatisée, sans le consentement exprès de l'intéressé, des données à caractère personnel qui, directement ou indirectement, font apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou les appartenances syndicales des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou à l'orientation sexuelle de celles-ci, est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende » ; « Est puni des mêmes peines le fait, hors les cas prévus par la loi, de mettre ou de conserver en mémoire informatisée des données à caractère personnel concernant des infractions, des condamnations ou des mesures de sûreté » ; 2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi du 9 août 2004 susvisée : « Les établissements de transfusion sanguine, le centre de transfusion sanguine des armées et les établissements de santé autorisés à conserver et distribuer des produits sanguins labiles doivent se doter de bonnes pratiques dont les principes sont définis par un règlement établi par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé après l'avis de l'Établissement français du sang, homologué par arrêté du ministre chargé de la santé et du ministre de la défense et publié au Journal officiel de la République française » ; 3. Considérant que, dans sa rédaction résultant du paragraphe III de l'article 4 de l'ordonnance du 1er septembre 2005 susvisée, ce même article L. 1223-3 dispose : « Les établissements de transfusion sanguine, le centre de transfusion sanguine des armées et les établissements de santé autorisés à conserver et distribuer ou délivrer des produits sanguins labiles doivent se doter de bonnes pratiques dont les principes sont définis par décision de l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé après avis de l'Établissement français du sang et du centre de transfusion sanguine des armées » ; 4. Considérant que, selon le requérant, en faisant exception à l'obligation de recueillir le consentement exprès d'une personne désireuse de donner son sang pour mettre ou conserver en mémoire informatisée des données à caractère personnel relatives à la santé et l'orientation sexuelle de cette dernière, les dispositions combinées des articles 226-19 du code pénal et L. 1223-3 du code de la santé publique méconnaissent le principe de légalité des délits et des peines, le principe de nécessité des peines, ainsi que la « prévisibilité de la loi » ; qu'en outre, en renvoyant à des dispositions législatives indéfinies et indéterminées, et notamment à celles de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique, les exceptions à l'exigence de consentement prévue par l'article 226-19 du code pénal, le législateur aurait méconnu le « principe constitutionnel de consentement à la captation et à la conservation des données personnelles » ; - SUR LES DISPOSITIONS SOUMISES À L'EXAMEN DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL : 5. Considérant, en premier lieu, que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le premier alinéa de l'article 226-19 du code pénal ; 6. Considérant, en second lieu, qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, de remettre en cause la décision par laquelle le Conseil d'État ou la Cour de cassation a jugé, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée, qu'une disposition était ou non applicable au litige ou à la procédure ou constituait ou non le fondement des poursuites ; qu'en l'absence de précision, dans la décision du Conseil d'État ou de la Cour de cassation, sur la version des dispositions renvoyée au Conseil constitutionnel, la question prioritaire de constitutionnalité doit être regardée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée ; qu'au regard des faits à l'origine du litige, l'article L. 1223-3 du code de la santé publique doit être regardé comme ayant été renvoyé au Conseil constitutionnel tant dans sa version antérieure à l'ordonnance du 1er septembre 2005 susvisée que dans sa version postérieure à cette ordonnance ; 7. Considérant, toutefois, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé » ; que le Conseil constitutionnel ne peut être saisi dans les conditions prévues par cet article que de dispositions de nature législative ; 8. Considérant que ni la loi du 29 décembre 2011 susvisée ni aucune autre disposition législative n'a procédé à la ratification de l'ordonnance du 1er septembre 2005 ; que les dispositions de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique, dans leur rédaction issue du paragraphe III de l'article 4 de l'ordonnance du 1er septembre 2005, ne revêtent pas le caractère de dispositions législatives au sens de l'article 61-1 de la Constitution ; qu'il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel d'en connaître ; que, par suite, le Conseil constitutionnel est seulement saisi de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique dans sa rédaction issue de la loi du 9 août 2004 ; - SUR LA CONSTITUTIONNALITÉ DES DISPOSITIONS CONTESTÉES : 9. Considérant que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis ; 10. Considérant que le premier alinéa de l'article 226-19 du code pénal punit de cinq ans d'emprisonnement et de 300 000 euros d'amende le fait, « hors les cas prévus par la loi », de mettre ou de conserver en mémoire informatisée, sans le consentement exprès de l'intéressé, des données à caractère personnel qui font apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, ou les appartenances syndicales des personnes, « ou qui sont relatives à la santé ou à l'orientation sexuelle de celles-ci » ; 11. Considérant que les dispositions de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique n'ont pas pour objet de définir une exception à cette incrimination ; que de telles exceptions sont en particulier définies par l'article 8 de la loi du 6 janvier 1978 susvisée ; que le premier paragraphe de cet article interdit de collecter les données à caractère personnel qui font apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l'appartenance syndicale des personnes, « ou qui sont relatives à la santé ou à la vie sexuelle de celles-ci » ; que son second paragraphe énumère les exceptions à ce principe et, notamment, « les traitements nécessaires aux fins de la médecine préventive, des diagnostics médicaux, de l'administration de soins ou de traitements, ou de la gestion de services de santé » ; que, dans sa décision du 29 juillet 2004 susvisée, le Conseil constitutionnel a déclaré conforme à la Constitution l'article 8 de la loi du 6 janvier 1978 dans sa rédaction issue de l'article 2 de la loi du 6 août 2004 susvisée ; 12. Considérant, d'une part, qu'en adoptant l'article 226-19, le législateur a défini de manière claire et précise le délit d'enregistrement ou de conservation en mémoire informatisée des données à caractère personnel ; qu'en prévoyant des exceptions dans les « cas prévus par la loi » à l'incrimination qu'elles définissent, les dispositions de cet article ne méconnaissent pas le principe de légalité des délits et des peines ; 13. Considérant qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de porter une appréciation sur les mesures réglementaires prises pour l'application des dispositions de l'article 8 de la loi du 6 janvier 1978 ; 14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les dispositions du premier alinéa de l'article 226-19 du code pénal ne portent aucune atteinte au principe de légalité des délits et des peines ; 15. Considérant, d'autre part, que les dispositions de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique, qui se bornent à imposer aux établissements de transfusion sanguine de « se doter de bonnes pratiques dont les principes sont définis par un règlement établi par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé après l'avis de l'Établissement français du sang, homologué par arrêté du ministre chargé de la santé et du ministre de la défense », ne méconnaissent aucun droit ou liberté que la Constitution garantit ; 16. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Il n'y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, de statuer sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 1223-3 du code de la santé publique dans sa rédaction issue du paragraphe III de l'article 4 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine. Article 2.- Sont conformes à la Constitution : - le premier alinéa de l'article 226-19 du code pénal, dans sa rédaction issue de l'article 14 de la loi n° 2004-801 du 6 août 2004 relative à la protection des personnes physiques à l'égard des traitements de données à caractère personnel et modifiant la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés ; - l'article L. 1223-3 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique. Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 septembre 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 19 septembre 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 14 mai 2014 par le Conseil d'État (décision n° 375765 du 14 mai 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Dominique S., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des troisième, quatrième et sixième alinéas de l'article 721 du code de procédure pénale. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de procédure pénale ; Vu la loi n° 2004-404 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité ; Vu la loi n° 2012-409 du 27 mars 2012 de programmation relative à l'exécution des peines ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites par le requérant, enregistrées les 5 et 20 juin 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 5 juin 2014 ; Vu les observations en intervention produites pour l'association « Observatoire international des prisons - section française » par Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, enregistrées les 5 et 20 juin 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me Spinosi, pour l'association intervenante et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 1er juillet 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que l'article premier de l'article 721 du code de procédure pénale dispose que chaque condamné bénéficie d'un crédit de réduction de peine calculé sur la durée de la condamnation prononcée ; qu'aux termes des troisième et quatrième alinéas de cet article, dans sa rédaction résultant de la loi du 27 mars 2012 susvisée : « En cas de mauvaise conduite du condamné en détention, le juge de l'application des peines peut être saisi par le chef d'établissement ou sur réquisitions du procureur de la République aux fins de retrait, à hauteur de trois mois maximum par an et de sept jours par mois, de cette réduction de peine. Il peut également ordonner le retrait lorsque la personne a été condamnée pour les crimes ou délits, commis sur un mineur, de meurtre ou assassinat, torture ou actes de barbarie, viol, agression sexuelle ou atteinte sexuelle et qu'elle refuse pendant son incarcération de suivre le traitement qui lui est proposé par le juge de l'application des peines, sur avis médical, en application des articles 717-1 ou 763-7. Il en est de même lorsque le juge de l'application des peines est informé, en application de l'article 717-1, que le condamné ne suit pas de façon régulière le traitement qu'il lui a proposé. La décision du juge de l'application des peines est prise dans les conditions prévues à l'article 712-5. « Lorsque le condamné est en état de récidive légale, le retrait prévu par le troisième alinéa du présent article est alors de deux mois maximum par an et de cinq jours par mois » ; 2. Considérant que le sixième alinéa de ce même article dispose : « Lors de sa mise sous écrou, le condamné est informé par le greffe de la date prévisible de libération compte tenu de la réduction de peine prévue par le premier alinéa, des possibilités de retrait, en cas de mauvaise conduite ou de commission d'une nouvelle infraction après sa libération, de tout ou partie de cette réduction. Cette information lui est à nouveau communiquée au moment de sa libération » ; 3. Considérant que, selon le requérant, le retrait du crédit de réduction de peine constitue une peine distincte de celle qui a été prononcée par la juridiction de jugement et qui s'ajoute à cette dernière ; qu'en raison de son objet répressif, un tel retrait devrait en tout état de cause être regardé comme une sanction ayant le caractère d'une punition au sens de l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; qu'en permettant que le juge de l'application des peines prononce ce retrait en cas de « mauvaise conduite » alors que cette notion n'est pas précisément définie, le législateur aurait méconnu le principe de légalité des délits et des peines et l'exigence d'une définition précise des crimes et délits ; 4. Considérant que la question prioritaire de constitutionnalité porte sur la première phrase du troisième alinéa de l'article 721 du code de procédure pénale ainsi que sur le sixième alinéa de cet article ; 5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ; que les principes énoncés par cet article s'appliquent non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition ; que le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration de 1789, l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis ; 6. Considérant que l'article 721 du code de procédure pénale est relatif aux réductions de peines, dites « ordinaires », dont tout détenu condamné bénéficie s'il satisfait à la condition de bonne conduite prévue par la loi ; que cette réduction est calculée à concurrence de trois mois pour la première année de détention, de deux mois pour les années suivantes et, pour une peine de moins d'un an ou pour la partie de peine inférieure à une année pleine, de sept jours par mois ; que les condamnés en état de récidive légale bénéficient d'un crédit de réduction de peine d'une durée inférieure ; que lorsqu'il commence à exécuter la peine d'emprisonnement, le condamné est informé du crédit de réduction de peine calculé sur la durée de la détention ; qu'est également portée à sa connaissance la possibilité que ce crédit de réduction de peine fasse l'objet de retraits en cas de mauvaise conduite ; 7. Considérant que le retrait d'un crédit de réduction de peine en cas de mauvaise conduite du condamné a pour conséquence que le condamné exécute totalement ou partiellement la peine telle qu'elle a été prononcée par la juridiction de jugement ; qu'un tel retrait ne constitue donc ni une peine ni une sanction ayant le caractère d'une punition ; que, par suite, les griefs tirés de la violation de l'article 8 de la Déclaration de 1789 et de l'article 34 de la Constitution sont inopérants ; 8. Considérant que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- La première phrase du troisième alinéa de l'article 721 du code de procédure pénale et le sixième alinéa de cet article sont conformes à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 juillet 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 11 juillet 2014.
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Le Conseil constitutionnel a été saisi le 16 mai 2014 par la Cour de cassation (troisième chambre civile, arrêt n° 800 du 16 mai 2014), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Clément B., Mme Fabienne B., Mme Jacqueline B., Mme Caroline L. épouse B., Mme Fernande C., M. Pascal C., M. Yannick C., M. Christian C., Mme Colette N. épouse C., Mme Claudine C., Mme Stéphanie C., Mme Marie-Claude D., M. Michel D., Mme Nicole D., Mme Corinne D., Mme Marie-Claude D., M. Jean-Luc G., Mme Adrienne G., Mme Farida H., M. Mourad H., Mme Josette H., Mme Chantal L., Mme Claire L., M. Sébastien L., M. Olivier L., M. Michel L., Mme Nicole C. épouse L., M. Carlos L., Mme Hava N. épouse L., Mme Janine L. épouse M., M. Daniel M., Mme Dominique C. épouse M., Mme Danièle N., M. Youcef R., M. André S., Mme Jeannine J. épouse S., M. Dorsamy S., Mme Rajindree I. épouse S., M. Alain S., Mme Yvonne S., M. Daniel S., M. Gérard S., Mme Véronique de T., M. Benoît V. et Mme Gisèle V., relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du quatrième alinéa de l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu le code de la construction et de l'habitation ; Vu la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ; Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Vu les observations produites pour les requérants par la SCP Morel - Chadel - Moisson, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 10 juin 2014 ; Vu les observations produites pour le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis. . . à Paris, partie en défense, représenté par Paris Habitat OPH, son syndic, par la SCP Meier-Bourdeau Lécuyer, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 10 juin 2014 ; Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 10 juin 2014 ; Vu les pièces produites et jointes au dossier ; Me François Morel, avocat au barreau de Paris, pour les requérants, Me Patrice Lebatteux, avocat au barreau de Paris, pour la partie en défense, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 1er juillet 2014 ; Le rapporteur ayant été entendu ; 1. Considérant que l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation est applicable aux copropriétés issues de la vente de certains appartements par un organisme d'habitations à loyer modéré ; qu'aux termes du quatrième alinéa de cet article : « Les dispositions du deuxième alinéa du I de l'article 22 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965 précitée ne s'appliquent pas à l'organisme d'habitations à loyer modéré vendeur » ; 2. Considérant que, selon les requérants, en écartant les dispositions de la loi du 10 juillet 1965 qui limitent le nombre de voix dont un copropriétaire majoritaire dispose en assemblée générale, les dispositions contestées permettent à un tel copropriétaire d'imposer ses décisions à l'ensemble des autres copropriétaires et portent une atteinte disproportionnée à l'exercice du droit de propriété de ces derniers ; 3. Considérant que la propriété figure au nombre des droits de l'homme consacrés par les articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ; qu'aux termes de son article 17 : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité » ; qu'en l'absence de privation du droit de propriété au sens de cet article, il résulte néanmoins de l'article 2 de la Déclaration de 1789 que les atteintes portées à ce droit doivent être justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi ; 4. Considérant qu'il appartient au législateur compétent en application de l'article 34 de la Constitution pour fixer les principes fondamentaux de la propriété et des droits réels, de définir les droits de la copropriété d'un immeuble bâti sans porter d'atteinte injustifiée aux droits des copropriétaires ; 5. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 susvisée : « Chaque copropriétaire dispose d'un nombre de voix correspondant à sa quote-part dans les parties communes. Toutefois, lorsqu'un copropriétaire possède une quote-part des parties communes supérieure à la moitié, le nombre de voix dont il dispose est réduit à la somme des voix des autres copropriétaires » ; qu'en prévoyant que ces dispositions ne s'appliquent pas à l'organisme d'habitations à loyer modéré vendeur, les dispositions contestées ont pour seul effet d'écarter l'application de la deuxième phrase du deuxième alinéa du paragraphe I de l'article 22 de la loi du 10 juillet 1965 qui réduit le nombre des voix du copropriétaire majoritaire par exception à la règle de proportionnalité ; 6. Considérant que le Conseil constitutionnel n'est pas saisi des dispositions qui énumèrent les décisions qui peuvent être adoptées par l'assemblée générale des copropriétaires et fixent les différentes règles de majorité applicables pour l'adoption de ces décisions ; que la disposition contestée par la présente question prioritaire de constitutionnalité est relative au nombre des voix dont disposent les copropriétaires en assemblée générale ; que, s'il appartient aux juridictions compétentes de faire obstacle aux abus de majorité commis par un ou plusieurs copropriétaires, ni le droit de propriété ni aucun autre principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit qu'un copropriétaire dont la quote-part dans les parties communes est majoritaire puisse disposer, en assemblée générale, d'un nombre de voix proportionnel à l'importance de ses droits dans l'immeuble ; que, par suite, doivent être écartés les griefs tirés de ce que le quatrième alinéa de l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation porterait atteinte au droit de propriété ; 7. Considérant que les dispositions contestées, qui ne sont contraires ni au principe d'égalité ni à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution, D É C I D E : Article 1er.- Le quatrième alinéa de l'article L. 443-15 du code de la construction et de l'habitation est conforme à la Constitution. Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 juillet 2014, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI. Rendu public le 11 juillet 2014.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 11 septembre 2020 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 1865 du 9 septembre 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour la société Beiser environnement et M. Bernard C. par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-865 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 706-43 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019 prise en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code de procédure pénale ; - l'ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019 prise en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour les requérants par la SCP Piwnica et Molinié, enregistrées le 30 septembre 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 1er octobre 2020 ; - les secondes observations présentées pour les requérants par la SCP Piwnica et Molinié, enregistrées le 15 octobre 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Emmanuel Piwnica, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour les requérants, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 12 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article 706-43 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 18 septembre 2019 mentionnée ci-dessus, prévoit :« L'action publique est exercée à l'encontre de la personne morale prise en la personne de son représentant légal à l'époque des poursuites. Ce dernier représente la personne morale à tous les actes de la procédure. Toutefois, lorsque des poursuites pour des mêmes faits ou des faits connexes sont engagées à l'encontre du représentant légal, celui-ci peut saisir par requête le président du tribunal judiciaire aux fins de désignation d'un mandataire de justice pour représenter la personne morale. « La personne morale peut également être représentée par toute personne bénéficiant, conformément à la loi ou à ses statuts, d'une délégation de pouvoir à cet effet. « La personne chargée de représenter la personne morale en application du deuxième alinéa doit faire connaître son identité à la juridiction saisie, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. « Il en est de même en cas de changement du représentant légal en cours de procédure. « En l'absence de toute personne habilitée à représenter la personne morale dans les conditions prévues au présent article, le président du tribunal judiciaire désigne, à la requête du ministère public, du juge d'instruction ou de la partie civile, un mandataire de justice pour la représenter ». 2. Les requérants reprochent à ces dispositions de méconnaître les droits de la défense de la personne morale lorsque des poursuites pénales sont engagées à la fois contre elle et contre son représentant légal pour les mêmes faits ou des faits connexes. Le représentant légal ayant dans cette hypothèse la faculté, et non l'obligation, de solliciter la désignation d'un mandataire de justice pour représenter la personne morale, cette dernière s'en trouverait selon eux exposée au risque que le représentant légal opère des choix de défense contraires aux intérêts de celle-ci s'il entendait faire prévaloir ses propres intérêts. 3. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le mot « peut » figurant à la dernière phrase du premier alinéa de l'article 706-43 du code de procédure pénale. 4. Selon l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Sont garantis par cette disposition les droits de la défense. 5. En application des dispositions contestées, lorsque le représentant légal d'une personne morale fait l'objet de poursuites pénales en même temps que celle-ci pour les mêmes faits ou pour des faits connexes, il dispose seul de la faculté de solliciter du président du tribunal judiciaire la désignation d'un mandataire de justice pour assurer à sa place la représentation de la personne morale. Il peut en résulter, en cas de conflit d'intérêts entre la personne morale et le représentant légal, que ce dernier, afin de faire prévaloir ses propres intérêts, s'abstienne de demander la désignation d'un tel mandataire, ce qui pourrait être de nature à léser ceux de la personne morale. 6. Toutefois, dans cette hypothèse, les organes d'une personne morale demeurent compétents, dans les conditions prévues par la loi ou les statuts, pour imposer à son représentant légal de solliciter la désignation d'un mandataire de justice, lui retirer son mandat de représentation en justice ou désigner un autre représentant légal. 7. Par ailleurs, les dispositions du deuxième alinéa de l'article 706-43 du code de procédure pénale permettent une représentation de la personne morale par toute personne bénéficiant, conformément à la loi ou à ses statuts, d'une délégation de pouvoir à cet effet. Cette délégation de pouvoir peut être octroyée à tout moment par les organes de la personne morale. 8. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance des droits de la défense doit être écarté. 9. Les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Le mot « peut » figurant à la dernière phrase du premier alinéa de l'article 706-43 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2019-964 du 18 septembre 2019 prise en application de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice, est conforme à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 novembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD et Michel PINAULT. Rendu public le 19 novembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 28 septembre 2020 par le Conseil d'État (décision n° 441908 du 25 septembre 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Louis-Christophe L. par la SELARL Cabinet Bornhauser, avocat au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-868 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 150 UA du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, et de l'article 150 VI du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code général des impôts ; - la loi n° 76-660 du 19 juillet 1976 portant imposition des plus-values et création d'une taxe forfaitaire sur les métaux précieux, les bijoux, les objets d'art, de collection et d'antiquité ; - la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005 ; - la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour le requérant par Me Marc Bornhauser, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 14 octobre 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 15 octobre 2020 ; - les secondes observations présentées pour le requérant par Me Bornhauser, enregistrées le 28 octobre 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Bornhauser pour le requérant et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 18 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article 150 UA du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi du 30 décembre 2005 mentionnée ci-dessus, prévoit : « I. - Sous réserve des dispositions de l'article 150 VI et de celles qui sont propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices agricoles et aux bénéfices non commerciaux, les plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux de biens meubles ou de droits relatifs à ces biens, par des personnes physiques, domiciliées en France au sens de l'article 4 B, ou des sociétés ou groupements qui relèvent des articles 8 à 8 quinquies dont le siège est situé en France, sont passibles de l'impôt sur le revenu dans les conditions prévues aux articles 150 V à 150 VH. « II. - Les dispositions du I ne s'appliquent pas : « 1° Aux meubles meublants, aux appareils ménagers et aux voitures automobiles. Toutefois, cette disposition n'est pas applicable à ces biens lorsqu'ils constituent des objets d'art, de collection ou d'antiquité pour lesquels l'option prévue à l'article 150 VL a été exercée ; « 2° Aux meubles, autres que les métaux précieux mentionnés au 1° du I de l'article 150 VI, dont le prix de cession est inférieur ou égal à 5 000 € ». 2. L'article 150 VI du même code, dans sa rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2013 mentionnée ci-dessus, prévoit : « I. - Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices professionnels, sont soumises à une taxe forfaitaire dans les conditions prévues aux articles 150 VJ à 150 VM les cessions à titre onéreux ou les exportations, autres que temporaires, hors du territoire des États membres de l'Union européenne : « 1° De métaux précieux ; « 2° De bijoux, d'objets d'art, de collection ou d'antiquité. « II. - Les dispositions du I sont applicables aux cessions réalisées dans un autre État membre de l'Union européenne ». 3. Le requérant soutient que ces dispositions seraient contraires aux principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques. Il leur reproche d'exclure du champ d'application de la taxe forfaitaire instituée par l'article 150 VI du code général des impôts, la vente, hors de l'Union européenne, d'objets précieux détenus par des personnes domiciliées fiscalement en France. Ce faisant, ces contribuables seraient privés de la possibilité, reconnue à ceux qui vendent de tels objets en France ou dans un autre État membre de l'Union européenne, d'opter soit pour ce régime d'imposition soit pour celui, de droit commun, d'imposition des plus-values mobilières. Une telle différence de traitement serait à la fois injustifiée et sans rapport avec l'objet initial de la loi. 4. Le requérant estime également qu'en soumettant l'exportation d'objets précieux hors de l'Union européenne à la taxe forfaitaire, les dispositions contestées assimilent cette exportation à une vente. Or, selon lui, cette assimilation se fonderait, de manière injustifiée, sur une présomption de fraude et elle aurait pour conséquence, lorsque l'exportation n'est pas suivie d'une vente, d'imposer le contribuable sur un revenu dont il ne dispose pas et, lorsqu'elle est bien suivie d'une vente et donne lieu à la perception d'une plus-value, de l'assujettir à une double imposition, à la taxe forfaitaire dans un premier temps et au régime général d'imposition des plus-values dans un second temps. 5. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « les cessions à titre onéreux ou les exportations, autres que temporaires, hors du territoire des États membres de l'Union européenne » figurant au paragraphe I de l'article 150 VI du code général des impôts et sur le paragraphe II du même article. - Sur le fond : 6. Selon l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 7. Selon l'article 13 de cette même déclaration : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». En vertu de l'article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives. En particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose. Cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. 8. L'article 150 VI du code général des impôts soumet à une taxe forfaitaire le produit de la cession à titre onéreux de certains objets précieux, lorsque cette cession obéit à trois conditions. D'une part, elle doit porter sur des métaux précieux, des bijoux ou des objets d'art, de collection ou d'antiquité. D'autre part, cet objet doit appartenir à une personne domiciliée fiscalement en France. Enfin, la cession doit être réalisée en France ou dans un autre État membre de l'Union européenne. En vertu de l'article 150 UA du même code, l'assujettissement à cette taxe forfaitaire dispense le contribuable de devoir acquitter l'imposition de droit commun des plus-values mobilières prévue à ce même article. L'article 150 VL du même code permet toutefois au contribuable d'opter pour ce dernier régime d'imposition plutôt que pour celui de la taxe forfaitaire. Enfin, le bien exporté, à titre définitif, hors de l'Union européenne est soumis à la taxe forfaitaire. . En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance, du fait de l'assujettissement de certaines exportations à la taxe forfaitaire, du principe d'égalité devant les charges publiques : 9. Il ressort des travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1976 mentionnée ci-dessus, qui est à l'origine des dispositions contestées, que, en assujettissant à la taxe forfaitaire les exportations définitives hors de France, quel que soit l'objet de ces exportations, le législateur a entendu prévenir le risque que le bien soit soustrait, par l'exportation, à l'imposition forfaitaire en cas de cession ultérieure. Toutefois, il n'a pas instauré pour ce faire une présomption de fraude ou d'évasion fiscales mais seulement choisi d'avancer le moment où la capacité contributive que confère la détention de ce bien est imposée au moment où ce bien quitte définitivement le territoire de l'Union européenne. 10. Par ailleurs, ces dispositions n'ont ni pour effet d'assujettir le contribuable à une imposition dont l'assiette inclurait une capacité contributive dont il ne disposerait pas ni pour effet de le soumettre à une double imposition. 11. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques doit être écarté. . En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance, du fait de l'exclusion du champ de la taxe forfaitaire des cessions à titre onéreux réalisées en dehors de l'Union européenne, du principe d'égalité devant la loi : 12. En vertu des dispositions contestées, la taxe forfaitaire ne peut s'appliquer qu'aux cessions à titre onéreux d'objets précieux, réalisées en France ou dans un autre État membre de l'Union européenne. Seuls les contribuables cédant leur bien dans l'un de ces États peuvent donc choisir d'être imposés selon le régime de la taxation forfaitaire ou selon le régime général d'imposition des plus-values. Il en résulte une différence de traitement avec les contribuables dont les biens sont cédés dans d'autres États étrangers, qui sont nécessairement assujettis à ce seul second régime d'imposition. 13. Toutefois, il ressort des travaux préparatoires de la loi du 19 juillet 1976 que le législateur a considéré que le régime général d'imposition des plus-values qu'il instaurait par cette loi n'était pas adapté au cas des biens mobiliers précieux. En effet, ce régime général repose sur la comparaison entre la valeur d'acquisition d'un bien et sa valeur au moment de sa cession. Or, le législateur a estimé que, compte tenu des règles de cession des biens mobiliers, qui sont peu formalistes, les propriétaires d'objets précieux ne seraient pas toujours en mesure d'apporter la preuve de la date et de la valeur initiale d'acquisition de ces biens. La taxe forfaitaire a donc pour objet d'offrir aux contribuables en cause une modalité d'imposition du revenu plus simple et plus adaptée à la nature du bien cédé que celles du régime général d'imposition des plus-values. 14. Or, au regard de cet objet, il n'y a pas de différence de situation entre les contribuables imposés en France selon que la cession est réalisée au sein de l'Union européenne ou en dehors. La différence de traitement contestée, qui n'est pas non plus justifiée par un motif d'intérêt général, est donc contraire au principe d'égalité devant la loi. 15. Par conséquent, le paragraphe II de l'article 150 VI du code général des impôts doit être déclaré contraire à la Constitution. 16. En revanche, le reste des dispositions contestées, qui ne méconnaît aucun droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 17. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 18. En l'espèce, aucun motif ne justifie de reporter la prise d'effet de la déclaration d'inconstitutionnalité. Celle-ci intervient donc à compter de la date de la publication de la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Le paragraphe II de l'article 150 VI du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, est contraire à la Constitution. Article 2. - Les mots « les cessions à titre onéreux ou les exportations, autres que temporaires, hors du territoire des États membres de l'Union européenne » figurant au paragraphe I de l'article 150 VI du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la même loi, sont conformes à la Constitution. Article 3. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 18 de cette décision. Article 4. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 26 novembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 27 novembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 25 septembre 2020 par la Cour de cassation (deuxième chambre civile, arrêt n° 1138 du 24 septembre 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour la société Getzner France par Me François Vaccaro, avocat au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-866 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété ; - l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 modifiant l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour la société requérante par Me Vaccaro, enregistrées le 6 octobre 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 12 octobre 2020 ; - les observations en intervention présentées pour l'ordre des avocats au barreau de Paris par la SCP Nicolaÿ - de Lanouvelle - Hannotin, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour le syndicat des avocats de France et le syndicat de la magistrature par la société d'avocats Meier-Bourdeau Lécuyer, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ; - les observations présentées pour la société Gerb, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par Me Bruno Weil, avocat au barreau de Paris ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Vaccaro pour la société requérante, Me Vanessa Krespine, avocate au barreau de Paris, pour la société Gestal et la société d'interventions et réalisations en bobinage, électricité et mécanique, parties au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, Me Weil pour la société Gerb, Me David van der Vlist, avocat au barreau de Paris, pour le syndicat des avocats de France et le syndicat de la magistrature, Me Florent Loyseau de Grandmaison, avocat au barreau de Paris, pour l'ordre des avocats au barreau de Paris, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 12 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 mentionnée ci-dessus dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 20 mai 2020 mentionnée ci-dessus. 2. L'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020, dans cette rédaction, prévoit :« Lorsque la représentation est obligatoire ou que les parties sont assistées ou représentées par un avocat, le juge ou le président de la formation de jugement peut, à tout moment de la procédure, décider qu'elle se déroule selon la procédure sans audience. Il en informe les parties par tout moyen. « À l'exception des procédures en référé, des procédures accélérées au fond et des procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé, les parties disposent d'un délai de quinze jours pour s'opposer à la procédure sans audience. À défaut d'opposition, la procédure est exclusivement écrite. La communication entre les parties est faite par notification entre avocats. Il en est justifié dans les délais impartis par le juge. « En matière de soins psychiatriques sans consentement, la personne hospitalisée peut à tout moment demander à être entendue par le juge des libertés et de la détention. Cette audition peut être réalisée par tout moyen permettant de s'assurer de son identité et garantissant la qualité de la transmission et la confidentialité des échanges. « Le présent article s'applique aux affaires dans lesquelles la mise en délibéré de l'affaire est annoncée pendant la période mentionnée à l'article 1er ». 3. La société requérante reproche à ces dispositions de permettre au juge, dans certains contentieux civils, d'imposer aux parties une procédure sans audience. Il en résulterait une méconnaissance du droit à un procès équitable garanti par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Pour les mêmes motifs, ces dispositions méconnaîtraient également l'article 55 de la Constitution dans la mesure où cette procédure sans audience contreviendrait aux principes consacrés par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. 4. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « À l'exception des procédures en référé, des procédures accélérées au fond et des procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé » figurant à la première phrase du deuxième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020. 5. Selon le syndicat des avocats de France et le syndicat de la magistrature, les dispositions contestées sont contraires aux droits de la défense et au droit à un recours juridictionnel effectif, dès lors que les procédures d'urgence auxquelles elles s'appliquent peuvent aboutir à des décisions exécutoires de plein droit et porter sur le fond de l'affaire. 6. L'ordre des avocats au barreau de Paris estime, d'abord, que les dispositions contestées contreviendraient au droit à un procès équitable, aux droits de la défense et au principe du contradictoire, aux motifs qu'elles instaureraient une mesure disproportionnée au regard de l'objectif de lutte contre l'épidémie de covid-19 et que la décision de tenir une procédure sans audience, qui peut être imposée à tout moment, n'est ni motivée ni susceptible de recours. Il soutient, ensuite, que ces dispositions méconnaîtraient aussi le principe d'égalité devant la justice dans la mesure où le juge serait entièrement libre de décider d'une dispense d'audience et où une partie pourrait demander une telle dispense dans son seul intérêt, sans possibilité pour son adversaire de s'y opposer, rompant ainsi l'équilibre des droits des parties. Il fait valoir, enfin, que ces dispositions seraient contraires à un « principe de présence », qu'il demande au Conseil constitutionnel de reconnaître, qui garantirait la présence physique du justiciable devant le juge. - Sur les dispositions soumises à l'examen du Conseil constitutionnel : 7. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». Le Conseil constitutionnel ne peut être saisi dans les conditions prévues par cet article que de dispositions de nature législative. 8. Si les dispositions d'une ordonnance adoptée selon la procédure prévue à l'article 38 de la Constitution acquièrent valeur législative à compter de sa signature lorsqu'elles ont été ratifiées par le législateur, elles doivent être regardées, dès l'expiration du délai fixé par la loi d'habilitation autorisant le Gouvernement à prendre des ordonnances et dans les matières qui sont du domaine législatif, comme des dispositions législatives au sens de l'article 61-1 de la Constitution. Leur conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit peut donc être contestée par une question prioritaire de constitutionnalité. 9. En l'espèce, d'une part, le premier alinéa du paragraphe I de l'article 11 de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus, sur le fondement duquel a été adoptée l'ordonnance du 25 mars 2020 dont sont issues les dispositions contestées, habilitait le Gouvernement, en application de l'article 38 de la Constitution, à prendre des ordonnances dans un délai de trois mois à compter de la publication de cette loi. Cette publication étant intervenue le 24 mars 2020, le délai de l'habilitation a expiré le 24 juin 2020. 10. D'autre part, les dispositions contestées permettent d'imposer une procédure juridictionnelle sans audience aux parties à certaines instances civiles répondant à une condition d'urgence. Si elles relèvent du domaine de la procédure civile, ces dispositions mettent également en cause des règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques, qui relèvent de la loi en vertu de l'article 34 de la Constitution. 11. Par conséquent, les dispositions contestées doivent, à compter du 25 juin 2020, être regardées comme des dispositions législatives au sens de l'article 61-1 de la Constitution. Il y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de se prononcer sur la constitutionnalité de celles-ci. - Sur le fond : . En ce qui concerne les griefs tirés de la méconnaissance des droits de la défense et du droit à un procès équitable : 12. Selon l'article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Sont garantis par cette disposition les droits de la défense et le droit à un procès équitable. 13. L'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020, applicable pendant l'état d'urgence sanitaire déclaré par la loi du 23 mars 2020 et pendant un mois après la fin de celui-ci, permet au juge ou au président d'une formation de jugement d'une juridiction judiciaire statuant en matière non pénale de décider que la procédure se déroule sans audience. Ce juge ou ce président en informe alors les parties, qui disposent d'un délai de quinze jours pour s'y opposer. Les dispositions contestées, qui s'appliquent devant les juridictions civiles, sociales et commerciales, excluent cependant cette possibilité d'opposition dans les procédures en référé, les procédures accélérées au fond et celles dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé. 14. Or, l'organisation d'une audience devant ces juridictions est une garantie légale des exigences constitutionnelles des droits de la défense et du droit à un procès équitable. Il est loisible au législateur, dans le domaine qui lui est réservé par l'article 34 de la Constitution, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions. Cependant, l'exercice de ce pouvoir ne saurait aboutir à priver de garanties légales des exigences de caractère constitutionnel. 15. En premier lieu, les dispositions contestées visent à favoriser le maintien de l'activité des juridictions civiles, sociales et commerciales malgré les mesures d'urgence sanitaire prises pour lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. Ces dispositions poursuivent ainsi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et contribuent à la mise en œuvre du principe constitutionnel de continuité du fonctionnement de la justice. 16. En deuxième lieu, la procédure sans audience ne s'applique qu'aux affaires pour lesquelles la mise en délibéré a été annoncée durant l'état d'urgence sanitaire déclaré par la loi du 23 mars 2020 ou pendant le mois suivant sa cessation. 17. En troisième lieu, les dispositions contestées visent à éviter que l'opposition d'une partie à l'absence de tenue d'une audience conduise au report du jugement de l'affaire à une date éloignée, dans l'attente de meilleures conditions sanitaires. Ces dispositions permettent donc aux juridictions de statuer dans des délais compatibles avec la célérité qu'exigent les procédures d'urgence en cause. 18. En dernier lieu, d'une part, les dispositions contestées ne sont applicables que lorsque les parties doivent être représentées par un avocat ou lorsqu'elles ont choisi d'être représentées ou assistées par un avocat. Cette condition garantit ainsi aux justiciables la possibilité de défendre utilement leur cause dans le cadre d'une procédure écrite. D'autre part, l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020, qui prévoit que la communication entre les parties « est faite par notification entre avocats » et qu'il « en est justifié dans les délais impartis par le juge », impose de respecter une procédure écrite contradictoire. Enfin, les dispositions contestées se bornent à offrir une faculté au juge, à qui il appartient, en fonction des circonstances propres à chaque espèce, de s'assurer qu'une audience n'est pas nécessaire pour garantir le caractère équitable de la procédure et les droits de la défense. 19. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu du contexte sanitaire particulier résultant de l'épidémie de covid-19 durant la période d'application des dispositions contestées, celles-ci ne privent pas de garanties légales les exigences constitutionnelles des droits de la défense et du droit à un procès équitable. Les griefs tirés de la méconnaissance de ces droits doivent donc être écartés. . En ce qui concerne les autres griefs : 20. En premier lieu, aux termes de l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi est « la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Il résulte de la combinaison de ces dispositions avec celles de l'article 16 de la Déclaration de 1789 que, si le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s'appliquent, c'est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect du principe des droits de la défense, qui implique en particulier l'existence d'une procédure juste et équitable garantissant l'équilibre des droits des parties. 21. D'une part, les dispositions contestées n'instituent pas de différence de traitement entre les parties à une même procédure, le demandeur et le défendeur étant tous deux placés dans l'impossibilité de décider de la procédure sans audience ou de s'y opposer. D'autre part, loin de conférer un pouvoir discrétionnaire au juge pour décider de la tenue ou non d'une audience, ces dispositions ne lui permettent de recourir à la procédure sans audience que dans les conditions précitées, c'est-à-dire dans les instances civiles urgentes dans lesquelles le caractère équitable de la procédure et le respect des droits de la défense peuvent être assurés par des échanges exclusivement écrits entre les avocats. Le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la justice doit donc être écarté. 22. En second lieu, il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, lorsqu'il est saisi en application de l'article 61-1 de la Constitution, d'examiner la conformité d'une disposition législative aux stipulations d'un traité ou d'un accord international. Ainsi, le grief tiré de la violation de la convention précitée ne peut qu'être écarté. 23. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le droit à un recours juridictionnel effectif, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « À l'exception des procédures en référé, des procédures accélérées au fond et des procédures dans lesquelles le juge doit statuer dans un délai déterminé » figurant à la première phrase du deuxième alinéa de l'article 8 de l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2020-595 du 20 mai 2020 modifiant l'ordonnance n° 2020-304 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables aux juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière non pénale et aux contrats de syndic de copropriété, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 novembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD et Michel PINAULT. Rendu public le 19 novembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 25 septembre 2020 par le Conseil d'État (décision n° 440014 du même jour), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Matthias E. par Me Julien Schaeffer, avocat au barreau de Strasbourg. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-867 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 6361-12 du code des transports, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code des transports ; - l'ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports, ratifiée par l'article 1er de la loi n° 2012-375 du 19 mars 2012 relative à l'organisation du service et à l'information des passagers dans les entreprises de transport aérien de passagers et à diverses dispositions dans le domaine des transports ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 14 octobre 2020 ; - les observations présentées pour le requérant par Me Schaeffer, enregistrées le 15 octobre 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour le requérant par Me Schaeffer, enregistrées le 30 octobre 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Schaeffer pour le requérant, Me Frédéric Thiriez, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 18 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 6361-12 du code des transports, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 28 octobre 2010 mentionnée ci-dessus, prévoit :« L'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires prononce une amende administrative à l'encontre : « 1° De la personne exerçant une activité de transport aérien public au sens de l'article L. 6412-1 ; « 2° De la personne au profit de laquelle est exercée une activité de transport aérien au sens de l'article L. 6400-1 ; « 3° De la personne exerçant une activité aérienne, rémunérée ou non, autre que celles mentionnées aux 1° et 2° du présent article ; « 4° Du fréteur dans le cas défini par l'article L. 6400-2, « ne respectant pas les mesures prises par l'autorité administrative sur un aérodrome fixant : « a) Des restrictions permanentes ou temporaires d'usage de certains types d'aéronefs en fonction de leurs émissions atmosphériques polluantes, de la classification acoustique, de leur capacité en sièges ou de leur masse maximale certifiée au décollage ; « b) Des restrictions permanentes ou temporaires apportées à l'exercice de certaines activités en raison des nuisances environnementales qu'elles occasionnent ; « c) Des procédures particulières de décollage ou d'atterrissage en vue de limiter les nuisances environnementales engendrées par ces phases de vol ; « d) Des règles relatives aux essais moteurs ; « e) Des valeurs maximales de bruit ou d'émissions atmosphériques polluantes à ne pas dépasser ». 2. Le requérant soutient que l'article L. 6361-12 du code des transports permet de punir des personnes pour des manquements imputables à l'usage d'un aéronef même lorsqu'elles ne disposent pas de la maîtrise effective de cet aéronef, qui relève des seuls commandant de bord ou équipage de l'appareil. Il en résulterait une méconnaissance du principe selon lequel nul ne peut être punissable que de son propre fait, garanti par les articles 8 et 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Pour les mêmes motifs, le requérant fait valoir que cet article serait contraire au principe d'égalité devant les charges publiques. 3. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les 1° à 4° de l'article L. 6361-12 du code des transports. 4. En premier lieu, l'article 8 de la Déclaration de 1789 dispose : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Selon son article 9, tout homme est « présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable ». Il résulte de ces articles que nul n'est punissable que de son propre fait. Ce principe s'applique non seulement aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition. 5. Il résulte du sixième alinéa et des a à e de l'article L. 6361-12 du code des transports que l'Autorité de contrôle des nuisances aéroportuaires peut prononcer une amende administrative à l'encontre de certaines personnes ne respectant pas les restrictions à l'usage de certains types d'aéronefs ou à l'exercice de certaines activités aériennes, les procédures particulières de décollage ou d'atterrissage, les règles relatives aux essais moteurs et aux valeurs maximales de bruit ou d'émissions atmosphériques polluantes. Les dispositions contestées prévoient que ces personnes peuvent être celles exerçant une activité de transport aérien public, celles au profit desquelles est exercée une activité de transport aérien, celles exerçant une autre activité aérienne ainsi que celles exerçant l'activité de fréteur. 6. Ainsi, les dispositions contestées se bornent à énumérer des personnes participant à l'activité aérienne et susceptibles, à cette occasion, de manquer au respect de l'une des restrictions, procédures ou règles précitées. Elles n'ont, ni par elles-mêmes ni en raison de la portée effective que leur confèrerait une interprétation jurisprudentielle constante, pour objet ou pour effet de rendre une personne responsable d'un manquement qui ne lui serait pas imputable. 7. Dès lors, et en tout état de cause, manque en fait le grief tiré de la méconnaissance du principe selon lequel nul n'est punissable que de son propre fait. 8. En second lieu, le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant les charges publiques est inopérant à l'encontre de dispositions instituant une sanction ayant le caractère d'une punition au sens de l'article 8 de la Déclaration de 1789. 9. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les 1° à 4° de l'article L. 6361-12 du code des transports, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2010-1307 du 28 octobre 2010 relative à la partie législative du code des transports, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 26 novembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 27 novembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 7 octobre 2020 d'une requête présentée par M. Jean-Paul LEONHARDT, candidat à l'élection qui s'est déroulée dans le département du Bas-Rhin, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans ce département le 27 septembre 2020 en vue de la désignation de cinq sénateurs. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-5691 SEN. Il a également été saisi le 5 octobre 2020 d'une requête tendant aux mêmes fins présentée par M. André KORNMANN. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-5694 SEN. Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment son article 59 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le deuxième alinéa de son article 38 ; - le code électoral ; - le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs, notamment le deuxième alinéa de son article 8 ; Au vu des pièces suivantes : - le mémoire complémentaire présenté par M. KORNMANN, enregistré le 18 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les requêtes mentionnées ci-dessus sont dirigées contre la même élection. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision. 2. Selon le deuxième alinéa de l'article 38 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l'élection ». - Sur la requête de M. Jean-Paul LEONHARDT : 3. À l'appui de sa requête, M. LEONHARDT développe plusieurs griefs. Toutefois, ni la circonstance que trente-huit électeurs n'auraient pas pris part au vote ni le fait, à le supposer établi, que des électeurs aient dû attendre longuement, en raison du contexte sanitaire, pour pouvoir voter ne sont de nature à entacher d'irrégularité le scrutin. Il en va de même concernant le grief tiré de ce que plusieurs candidats issus du même parti se seraient présentés sur des listes distinctes. 4. Dès lors, la requête doit être rejetée. - Sur la requête de M. André KORNMANN : 5. Selon le second alinéa de l'article 33 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, « le droit de contester une élection appartient à toutes les personnes inscrites sur les listes électorales ou les listes électorales consulaires de la circonscription dans laquelle il a été procédé à l'élection ainsi qu'aux personnes qui ont fait acte de candidature ». 6. Il résulte de l'instruction que le requérant, qui n'est pas inscrit sur les listes électorales du département du Bas-Rhin, ne s'est pas porté candidat dans cette circonscription. La circonstance qu'il aurait été candidat dans une autre circonscription ne saurait lui donner qualité pour contester les opérations électorales auxquelles il a été procédé dans ce département. Dès lors, sa requête est irrecevable. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les requêtes de MM. Jean-Paul LEONHARDT et André KORNMANN sont rejetées. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 décembre 2020, où siégeaient : M. Alain JUPPÉ exerçant les fonctions de Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 11 décembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 9 octobre 2020 d'une requête présentée par M. Michel CLOG, candidat à l'élection qui s'est déroulée dans la 1ère circonscription du département du Haut-Rhin en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 20 et 27 septembre 2020 dans cette circonscription. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-5692 AN. Il a également été saisi le 5 octobre 2020 d'une requête tendant aux mêmes fins présentée par M. André KORNMANN, inscrit sur les listes électorales de la commune de Colmar, située dans la 1ère circonscription du département du Haut-Rhin. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-5693 AN. Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment son article 59 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le deuxième alinéa de son article 38 ; - le code électoral ; - le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs, notamment le deuxième alinéa de son article 8 ; Au vu des pièces suivantes : - le mémoire complémentaire présenté par M. Michel CLOG, enregistré le 12 octobre 2020 ; - le mémoire complémentaire présenté par M. André KORNMANN, enregistré le 23 octobre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les requêtes mentionnées ci-dessus sont dirigées contre la même élection. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par une seule décision. 2. Selon le deuxième alinéa de l'article 38 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l'élection ». - Sur la requête de M. Michel CLOG : 3. Selon le premier alinéa de l'article 33 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, l'élection d'un député ou d'un sénateur peut être contestée devant le Conseil constitutionnel jusqu'au dixième jour qui suit la proclamation des résultats de l'élection, au plus tard à dix-huit heures. 4. M. CLOG soutient que ce délai doit être décompté à partir du 29 septembre 2020, date de publication au Journal officiel de la communication du 28 septembre 2020 du ministre de l'intérieur faite en application de l'article L.O. 179 du code électoral informant le président de l'Assemblée nationale de l'élection comme député, le 27 septembre 2020, de M. Yves HEMEDINGER dans la 1ère circonscription du Haut-Rhin. 5. Toutefois, les résultats du scrutin du 27 septembre 2020 pour l'élection d'un député dans cette circonscription ont été proclamés le 28 septembre 2020. La requête de M. CLOG a été déposée auprès de la préfecture du Haut-Rhin le 9 octobre 2020. Elle est tardive et doit, par suite, être rejetée comme irrecevable. - Sur la requête de M. André KORNMANN : 6. À l'appui de sa requête dirigée contre le scrutin qui s'est déroulé les 20 et 27 septembre 2020 dans la 1ère circonscription du département du Haut-Rhin, M. KORNMANN fait valoir que l'ancien député de cette circonscription et son ancienne suppléante auraient participé, deux jours avant le second tour du scrutin, à la célébration religieuse, à Colmar, des obsèques de l'ancien maire de cette commune. Toutefois, ces faits, à les supposer établis, sont dénués d'incidence sur la régularité du scrutin. 7. En outre, les griefs invoqués pour la première fois par le requérant dans le mémoire complémentaire enregistré le 23 octobre 2020 ont été présentés après l'expiration du délai de dix jours fixé par l'article 33 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. Ils sont, dès lors, irrecevables. 8. La requête de M. KORNMANN doit donc être rejetée. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les requêtes de MM. Michel CLOG et André KORNMANN sont rejetées. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 décembre 2020, où siégeaient : M. Alain JUPPÉ exerçant les fonctions de Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 11 décembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi relative aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières, sous le n° 2020-809 DC, le 10 novembre 2020, par Mme Valérie RABAULT, MM. Jean-Luc MÉLENCHON, André CHASSAIGNE, Joël AVIRAGNET, Mmes Marie-Noëlle BATTISTEL, Gisèle BIÉMOURET, MM. Jean-Louis BRICOUT, Alain DAVID, Mme Laurence DUMONT, MM. Olivier FAURE, Guillaume GAROT, David HABIB, Christian HUTIN, Mme Chantal JOURDAN, M. Régis JUANICO, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Serge LETCHIMY, Mme Josette MANIN, M. Philippe NAILLET, Mmes George PAU-LANGEVIN, Christine PIRES BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Claudia ROUAUX, M. Hervé SAULIGNAC, Mmes Sylvie TOLMONT, Cécile UNTERMAIER, Hélène VAINQUEUR-CHRISTOPHE, M. Boris VALLAUD, Mme Michèle VICTORY, M. Gérard LESEUL, Mmes Isabelle SANTIAGO, Clémentine AUTAIN, MM. Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Mme Caroline FIAT, MM. Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Mmes Danièle OBONO, Mathilde PANOT, MM. Loïc PRUD'HOMME, Adrien QUATENNENS, Jean-Hugues RATENON, Mmes Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, M. François RUFFIN, Mme Bénédicte TAURINE, M. Alain BRUNEEL, Mme Marie-George BUFFET, MM. Pierre DHARRÉVILLE, Jean-Paul DUFRÈGNE, Mme Elsa FAUCILLON, MM. Sébastien JUMEL, Jean-Paul LECOQ, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC, Mmes Karine LEBON, Manuéla KÉCLARD-MONDÉSIR, MM. Moetai BROTHERSON, Jean-Philippe NILOR, Gabriel SERVILLE, Mmes Delphine BAGARRY, Delphine BATHO, Émilie CARIOU, Annie CHAPELIER, M. Guillaume CHICHE, Mmes Yolaine de COURSON, Paula FORTEZA, Albane GAILLOT, MM. Hubert JULIEN-LAFERRIÈRE, Matthieu ORPHELIN, Aurélien TACHÉ, Mme Frédérique TUFFNELL, MM. Cédric VILLANI, Olivier FALORNI, François-Michel LAMBERT, Paul MOLAC, Bertrand PANCHER, Jean-Michel CLÉMENT, Paul-André COLOMBANI, Benoît SIMIAN, Mme Jennifer De TEMMERMAN et M. Sébastien NADOT, députés. Il a également été saisi le 12 novembre 2020, par M. Patrick KANNER, Mme Éliane ASSASSI, MM. Guillaume GONTARD, David ASSOULINE, Mme Florence BLATRIX-CONTAT, M. Hussein BOURGI, Mme Isabelle BRIQUET, M. Rémi CARDON, Mmes Catherine CONCONNE, Hélène CONWAY-MOURET, M. Thierry COZIC, Mme Marie-Pierre de LA GONTRIE, MM. Gilbert-Luc DEVINAZ, Jérôme DURAIN, Rémi FÉRAUD, Mme Corinne FÉRET, M. Jean-Luc FICHET, Mme Martine FILLEUL, M. Hervé GILLÉ, Mme Laurence HARRIBEY, M. Jean-Michel HOULLEGATTE, Mme Victoire JASMIN, MM. Éric JEANSANNETAS, Patrice JOLY, Bernard JOMIER, Éric KERROUCHE, Mme Annie LE HOUEROU, M. Jean-Yves LECONTE, Mmes Claudine LEPAGE, Monique LUBIN, MM. Didier MARIE, Serge MÉRILLOU, Mmes Michelle MEUNIER, Émilienne POUMIROL, Angèle PRÉVILLE, MM. Claude RAYNAL, Christian REDON-SARRAZY, Mmes Sylvie ROBERT, Laurence ROSSIGNOL, MM. Lucien STANZIONE, Rachid TEMAL, Jean-Claude TISSOT, Mickaël VALLET, André VALLINI, Mme Sabine VAN HEGHE, MM. Yannick VAUGRENARD, Fabien GAY, Jérémy BACCHI, Mme Cécile CUKIERMAN, MM. Pierre LAURENT, Gérard LAHELLEC, Pascal SAVOLDELLI, Mme Cathy APOURCEAU-POLY, MM. Éric BOCQUET, Pierre OUZOULIAS, Mmes Laurence COHEN, Marie-Noëlle LIENEMANN, Marie-Claude VARAILLAS, Michelle GRÉAUME, Céline BRULIN, MM. Jean-Pierre CORBISEZ, Henri CABANEL, Guy BENARROCHE, Mme Esther BENBASSA, MM. Thomas DOSSUS, Joël LABBÉ, Paul Toussaint PARIGI, Daniel SALMON, Mmes Sophie TAILLÉ-POLIAN, Monique de MARCO, Raymonde PONCET MONGE, MM. Ronan DANTEC et Jacques FERNIQUE, sénateurs. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ; - le règlement CE n° 1107/2009 du 21 octobre 2009 concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et abrogeant les directives 79/117/CEE et 91/414/CEE du Conseil ; - le code rural et de la pêche maritime ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 27 novembre 2020 ; Au vu des observations en réplique présentées par Mme Delphine BATHO ainsi que certains des autres députés requérants, enregistrées le 3 décembre 2020 ; Au vu des observations en réplique présentées par les sénateurs requérants, enregistrées le 4 décembre 2020 ; Au vu des nouvelles observations du Gouvernement, enregistrées le 8 décembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi relative aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières. Les députés en contestent la procédure d'adoption. Les députés et les sénateurs requérants critiquent également certaines dispositions de son article 1er. - Sur la procédure d'adoption de la loi : 2. Les députés requérants font valoir que l'étude d'impact jointe au projet de loi à l'origine de la loi déférée aurait méconnu les prescriptions de l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 mentionnée ci-dessus. Selon eux, d'une part, cette étude comportait des inexactitudes flagrantes dans l'estimation des conséquences du virus de la jaunisse de la betterave sur la perte de son rendement en sucre, sur la situation de la filière industrielle et sur la souveraineté alimentaire de la France. D'autre part, elle ne recensait pas les options alternatives à l'autorisation de l'utilisation de produits contenant des néonicotinoïdes. Enfin, elle n'exposait pas avec précision l'évaluation des conséquences économiques, financières, sociales et environnementales de l'utilisation de ces produits. 3. Aux termes des troisième et quatrième alinéas de l'article 39 de la Constitution : « La présentation des projets de loi déposés devant l'Assemblée nationale ou le Sénat répond aux conditions fixées par une loi organique. - Les projets de loi ne peuvent être inscrits à l'ordre du jour si la Conférence des présidents de la première assemblée saisie constate que les règles fixées par la loi organique sont méconnues. En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l'assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours ». Aux termes du premier alinéa de l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009 : « Les projets de loi font l'objet d'une étude d'impact. Les documents rendant compte de cette étude d'impact sont joints aux projets de loi dès leur transmission au Conseil d'État. Ils sont déposés sur le bureau de la première assemblée saisie en même temps que les projets de loi auxquels ils se rapportent ». Selon le premier alinéa de l'article 9 de la même loi organique, la Conférence des présidents de l'assemblée sur le bureau de laquelle le projet de loi a été déposé dispose d'un délai de dix jours suivant le dépôt pour constater que les règles relatives aux études d'impact sont méconnues. 4. Le projet de loi à l'origine de la loi déférée a été déposé le 3 septembre 2020 sur le bureau de l'Assemblée nationale. La Conférence des présidents de l'Assemblée nationale a bien été saisie d'une demande tendant à constater que les règles relatives aux études d'impact étaient méconnues. Réunie le 15 septembre 2020, elle a estimé que tel n'était pas le cas. Il y a donc lieu pour le Conseil constitutionnel de se prononcer sur le grief tiré de ce que l'étude d'impact méconnaîtrait l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009. 5. L'étude d'impact jointe au projet de loi à l'origine de la loi déférée traitait de l'ensemble des questions énumérées par l'article 8 de la loi organique du 15 avril 2009. Au regard du contenu de cette étude, le grief tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté. - Sur certaines dispositions de l'article 1er : 6. L'article 1er de la loi déférée, qui modifie l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, introduit une dérogation à l'interdiction d'utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives de la famille des néonicotinoïdes, précisées par décret, et de semences traitées avec ces produits. 7. Les députés requérants soutiennent tout d'abord qu'en renvoyant à un décret la détermination de ces substances, le législateur aurait restreint la portée de l'interdiction qu'il avait préalablement édictée et méconnu le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé protégé par l'article 1er de la Charte de l'environnement. 8. Les députés requérants soutiennent ensuite qu'en permettant l'utilisation à titre dérogatoire de semences traitées avec des substances de la famille des néonicotinoïdes, le législateur aurait autorisé qu'il soit porté à l'environnement des atteintes certaines, irréversibles et massives. Ce faisant, d'une part, il aurait opéré une conciliation manifestement déséquilibrée entre la liberté d'entreprendre et les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de l'environnement et de la santé. D'autre part, il aurait également violé les articles 1er, 2, 3, 5 et 6 de la Charte de l'environnement, desquels il résulterait respectivement le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé, le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement, le devoir de prévention des atteintes à l'environnement, le principe de précaution et le principe selon lequel les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. Enfin, il aurait méconnu le droit de propriété des apiculteurs et des personnes vivant à proximité des lieux où seront utilisés les produits autorisés. Ils soutiennent par ailleurs que les dispositions contestées sont également entachées d'incompétence négative dans la mesure où elles ne définiraient pas suffisamment précisément les conditions dans lesquelles une dérogation peut être autorisée. 9. Les sénateurs requérants rejoignent les députés dans la critique de la dérogation apportée par le législateur à l'interdiction d'utilisation des produits contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes. Avec eux, ils estiment que cette dérogation méconnaîtrait un principe de non-régression en matière environnementale, qui se déduirait, notamment, de l'article 2 de la Charte de l'environnement et qu'ils demandent au Conseil constitutionnel de reconnaître. Ce principe interdirait au législateur de diminuer, sans justification suffisante, le niveau de protection légale dont bénéficie l'environnement. 10. Par ailleurs, les sénateurs requérants font valoir que cette dérogation priverait de garanties légales les exigences constitutionnelles relatives à la protection de l'environnement, en se référant aux six premiers articles de la Charte de l'environnement. Compte tenu de la dangerosité de ces substances pour la santé humaine, le législateur aurait également méconnu l'exigence constitutionnelle de protection de la santé. 11. Les sénateurs requérants soutiennent enfin que ce même article procéderait à une adaptation incomplète du droit interne au règlement du 21 octobre 2009 mentionné ci-dessus, en méconnaissance de l'obligation résultant de l'article 88-1 de la Constitution. . En ce qui concerne les normes de référence : 12. L'article 1er de la Charte de l'environnement dispose que « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». Aux termes de son article 2, « Toute personne a le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement ». Aux termes de son article 6, « Les politiques publiques doivent promouvoir un développement durable. À cet effet, elles concilient la protection et la mise en valeur de l'environnement, le développement économique et le progrès social ». 13. S'il est loisible au législateur, statuant dans le domaine de sa compétence, de modifier des textes antérieurs ou d'abroger ceux-ci en leur substituant, le cas échéant, d'autres dispositions, il doit prendre en compte, notamment, le devoir de prendre part à la préservation et à l'amélioration de l'environnement mentionné à l'article 2 de la Charte de l'environnement et ne saurait priver de garanties légales le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé consacré par l'article 1er de la Charte de l'environnement. 14. Les limitations portées par le législateur à l'exercice de ce droit ne sauraient être que liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par un motif d'intérêt général et proportionnées à l'objectif poursuivi. . En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance de l'article 1er de la Charte de l'environnement : - S'agissant de la détermination des substances dont l'utilisation est interdite : 15. Le premier alinéa du paragraphe II de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime prévoit qu'est interdite l'utilisation de produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives de la famille des néonicotinoïdes ou présentant des modes d'action identiques à ceux de ces substances ainsi que l'utilisation des semences traitées avec ces produits. La liste de ces substances doit être précisée par décret. 16. Sauf à dénaturer le principe posé par le législateur d'une interdiction générale de l'utilisation des produits phytopharmaceutiques contenant une ou des substances actives de la famille des néonicotinoïdes ou présentant des modes d'action identiques, ce renvoi à un décret ne saurait s'interpréter comme conférant au pouvoir réglementaire la faculté de décider de ne pas soumettre à l'interdiction certaines des substances en cause. Il vise seulement à imposer au pouvoir réglementaire d'en établir la liste, en faisant le cas échéant usage de la possibilité que lui confère le règlement du 21 octobre 2009 d'interdire des substances dont il estime que, bien qu'approuvées par la Commission européenne, elles présentent un risque grave pour la santé humaine ou animale ou l'environnement. 17. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance de l'article 1er de la Charte de l'environnement par les mots « précisées par décret » figurant au premier alinéa du paragraphe II de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime doit être écarté. - S'agissant des dérogations à l'interdiction d'utilisation des produits contenant des néonicotinoïdes ou d'autres substances assimilées : 18. Le deuxième alinéa du paragraphe II de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime permet, par dérogation au premier alinéa de ce paragraphe, d'autoriser l'usage de certains produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes ou présentant des modes d'action identiques à ceux de ces substances. 19. Ces produits ont des incidences sur la biodiversité, en particulier pour les insectes pollinisateurs et les oiseaux ainsi que des conséquences sur la qualité de l'eau et des sols et induisent des risques pour la santé humaine. 20. Toutefois, en premier lieu, le législateur a cantonné l'application de ces dispositions au traitement des betteraves sucrières, ainsi que le prévoit l'article L. 253-8-3 du code rural et de la pêche maritime introduit par l'article 2 de la loi déférée. Il résulte des travaux préparatoires que le législateur a, ainsi, entendu faire face aux graves dangers qui menacent la culture de ces plantes, en raison d'infestations massives de pucerons vecteurs de maladies virales, et préserver en conséquence les entreprises agricoles et industrielles de ce secteur et leurs capacités de production. Il a, ce faisant, poursuivi un motif d'intérêt général. 21. En deuxième lieu, les dispositions contestées ne permettent de déroger à l'interdiction d'utilisation des produits en cause qu'à titre transitoire, le temps que puissent être mises au point des solutions alternatives. Cette possibilité est ouverte exclusivement jusqu'au 1er juillet 2023. 22. En troisième lieu, cette dérogation ne peut être mise en œuvre que par arrêté conjoint des ministres de l'agriculture et de l'environnement, pris après avis d'un conseil de surveillance spécialement créé, au paragraphe II bis de l'article L. 253-8, et dans les conditions prévues à l'article 53 du règlement européen du 21 octobre 2009, applicable aux situations d'urgence en matière de protection phytosanitaire. Cet article 53 ne permet qu'un « usage limité et contrôlé » des produits en cause, dans le cadre d'une autorisation délivrée pour une période n'excédant pas cent-vingt jours, à condition que cet usage soit justifié par « des circonstances particulières » et qu'il s'impose « en raison d'un danger qui ne peut être maîtrisé par d'autres moyens raisonnables ». 23. En dernier lieu, d'une part, en visant « l'emploi de semences traitées avec des produits » contenant les substances en cause, les dispositions contestées n'autorisent que les traitements directement appliqués sur les semences, à l'exclusion de toute pulvérisation, ce qui est de nature à limiter les risques de dispersion de ces substances. D'autre part, en application du dernier alinéa du paragraphe II de l'article L. 253-8, lorsqu'un tel traitement est appliqué, le semis, la plantation et la replantation de végétaux attractifs d'insectes pollinisateurs sont temporairement interdits, afin de réduire l'exposition de ces insectes aux résidus de produits employés. 24. Il résulte de tout ce qui précède que, compte tenu en particulier de ce qu'elles sont applicables exclusivement jusqu'au 1er juillet 2023, les dispositions du deuxième alinéa du paragraphe II de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime ne privent pas de garanties légales le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé garanti par l'article 1er de la Charte de l'environnement et que la limitation apportée à l'exercice de ce droit est justifiée par un motif d'intérêt général et proportionnée à l'objectif poursuivi. 25. Par ailleurs, loin de contrevenir aux dispositions du règlement européen du 21 octobre 2009, le renvoi aux conditions prévues à l'article 53 dudit règlement pour prévoir les dérogations mentionnées ci-dessus à l'interdiction d'emploi de certains produits phytopharmaceutiques vise à en assurer le respect. Le grief tiré de la méconnaissance de l'article 88-1 de la Constitution doit donc être écarté. 26. Les dispositions contestées ne méconnaissent pas non plus les articles 2, 3, 4, 5 et 6 de la Charte de l'environnement, le droit de propriété ainsi que l'exigence de protection de la santé et ne sont pas entachées d'incompétence négative. 27. Il résulte de tout ce qui précède que les mots « précisées par décret » figurant au premier alinéa du paragraphe II de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime et le deuxième alinéa du même paragraphe, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. - Sur les autres dispositions : 28. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « précisées par décret » figurant au premier alinéa du paragraphe II de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime, dans sa rédaction résultant de l'article 1er de la loi relative aux conditions de mise sur le marché de certains produits phytopharmaceutiques en cas de danger sanitaire pour les betteraves sucrières, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Le deuxième alinéa du même paragraphe II, qui est applicable exclusivement jusqu'au 1er juillet 2023, est conforme à la Constitution. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 décembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 10 décembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique, sous le n° 2020-807 DC, le 3 novembre 2020, par Mme Valérie RABAULT, MM. Jean-Luc MÉLENCHON, André CHASSAIGNE, Joël AVIRAGNET, Mmes Marie-Noëlle BATTISTEL, Gisèle BIÉMOURET, MM. Jean-Louis BRICOUT, Alain DAVID, Mme Laurence DUMONT, MM. Olivier FAURE, Guillaume GAROT, David HABIB, Christian HUTIN, Mme Chantal JOURDAN, M. Régis JUANICO, Mme Marietta KARAMANLI, M. Serge LETCHIMY, Mme Josette MANIN, M. Philippe NAILLET, Mmes George PAU-LANGEVIN, Christine PIRES BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Claudia ROUAUX, M. Hervé SAULIGNAC, Mmes Sylvie TOLMONT, Hélène VAINQUEUR-CHRISTOPHE, M. Boris VALLAUD, Mme Michèle VICTORY, M. Gérard LESEUL, Mmes Isabelle SANTIAGO, Clémentine AUTAIN, MM. Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Mme Caroline FIAT, MM. Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Mmes Danièle OBONO, Mathilde PANOT, MM. Loïc PRUD'HOMME, Adrien QUATENNENS, Jean-Hugues RATENON, Mmes Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, M. François RUFFIN, Mme Bénédicte TAURINE, M. Alain BRUNEEL, Mme Marie-George BUFFET, MM. Pierre DHARRÉVILLE, Jean-Paul DUFRÈGNE, Mme Elsa FAUCILLON, MM. Sébastien JUMEL, Jean-Paul LECOQ, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC, Mme Manuéla KÉCLARD-MONDÉSIR, MM. Moetai BROTHERSON, Jean-Philippe NILOR, Gabriel SERVILLE, Mmes Karine LEBON, Delphine BAGARRY, Delphine BATHO, Émilie CARIOU, M. Guillaume CHICHE, Mmes Yolaine de COURSON, Paula FORTEZA, Albane GAILLOT, MM. Hubert JULIEN-LAFERRIÈRE, Matthieu ORPHELIN, Aurélien TACHÉ, Mme Frédérique TUFFNELL, M. Cédric VILLANI, Mmes Martine WONNER, Jennifer De TEMMERMAN, Frédérique DUMAS, MM. Jean-Michel CLÉMENT, Paul-André COLOMBANI et Sébastien NADOT, députés. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi organique n° 2009-403 du 15 avril 2009 relative à l'application des articles 34-1, 39 et 44 de la Constitution ; - le code de la commande publique ; - le code de l'environnement ; - le code de l'urbanisme ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées les 17 et 18 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi d'accélération et de simplification de l'action publique. Ils contestent sa procédure d'adoption et la place dans cette loi des articles 79 et 131, 132, 133 et 142. Ils contestent également la conformité à la Constitution de certaines dispositions de ses articles 34, 44, 56, 131, 132 et 142. - Sur la procédure d'adoption de la loi : 2. Les députés requérants reprochent au Gouvernement d'avoir introduit par amendement au Sénat puis à l'Assemblée nationale de nombreuses dispositions nouvelles et substantielles, ce qui lui aurait permis de contourner les exigences procédurales d'une étude d'impact et d'un examen par le Conseil d'État, en méconnaissance de l'article 39 de la Constitution. 3. L'article 39 de la Constitution et la loi organique du 15 avril 2009 mentionnée ci-dessus n'imposent la présentation d'une étude d'impact, la consultation du Conseil d'État et une délibération en conseil des ministres que pour les projets de loi avant leur dépôt sur le bureau de la première assemblée saisie et non pour les amendements. Par conséquent, est inopérant le grief selon lequel le Gouvernement aurait méconnu ces exigences procédurales en exerçant le droit d'amendement qu'il tient du premier alinéa de l'article 44 de la Constitution. 4. Il résulte de ce qui précède que la loi déférée a été adoptée selon une procédure conforme à la Constitution. - Sur certaines dispositions de l'article 34 : 5. L'article 34 de la loi déférée modifie les articles L. 512-5, L. 512-7 et L. 512-10 du code de l'environnement, afin d'aménager les conditions d'application des règles et prescriptions en matière d'installations classées pour la protection de l'environnement. 6. Les députés requérants, d'une part, reprochent à ces dispositions d'étendre aux projets en cours d'instruction, ayant fait l'objet d'une demande d'autorisation complète, les facilités aujourd'hui accordées aux installations existantes pour se mettre en conformité avec de nouvelles prescriptions en matière environnementale. Ils contestent, d'autre part, l'absence d'application, à ces mêmes projets et aux installations existantes, de ces prescriptions lorsqu'elles concernent le gros œuvre. Ils critiquent, enfin, le fait que la demande soit présumée complète dès lors qu'elle répond aux seules conditions de forme prévues par le code de l'environnement. Ils en concluent à la violation des articles 1er et 3 de la Charte de l'environnement, ainsi que d'un principe de non-régression du droit de l'environnement qu'ils demandent au Conseil constitutionnel de reconnaître. 7. L'article 1er de la Charte de l'environnement dispose : « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». Son article 3 dispose : « Toute personne doit, dans les conditions définies par la loi, prévenir les atteintes qu'elle est susceptible de porter à l'environnement ou, à défaut, en limiter les conséquences ». Il incombe au législateur et, dans le cadre défini par la loi, aux autorités administratives de déterminer, dans le respect des principes ainsi énoncés par cet article, les modalités de la mise en œuvre de ces dispositions. 8. En application de l'article L. 512-5 du code de l'environnement, le ministre compétent peut fixer par arrêté les règles générales et les prescriptions techniques applicables aux installations classées pour la protection de l'environnement soumises à autorisation. Ces règles et prescriptions déterminent les mesures propres à prévenir et à réduire les risques d'accident ou de pollution de toute nature ainsi que les conditions d'insertion dans l'environnement de l'installation et de remise en état du site après arrêt de l'exploitation. Alors que de tels arrêtés s'imposent de plein droit aux installations nouvelles, ils ne s'appliquent aux installations existantes que dans les délais et les conditions qu'ils déterminent. Il en va de même, en vertu des articles L. 512-7 et L. 512-10 du même code, de l'application des prescriptions générales fixées par arrêté ministériel relatives aux installations soumises à autorisation simplifiée et à certaines catégories d'installations soumises à déclaration. 9. Les dispositions contestées, d'une part, écartent l'application de telles prescriptions, lorsqu'elles concernent le gros œuvre, aux installations classées existantes ainsi qu'aux projets en cours d'instruction ayant fait l'objet d'une demande d'autorisation complète à la date de publication de l'arrêté. Elles permettent, d'autre part, d'appliquer à ces mêmes projets les délais et conditions de mise en conformité, fixés par arrêté, dont bénéficient les installations existantes. Dans les deux cas, la demande est présumée complète lorsqu'elle répond aux conditions de forme prévues par le code de l'environnement. 10. En premier lieu, il résulte des termes mêmes des dispositions contestées que celles-ci ne sont pas applicables lorsqu'y fait obstacle un motif tiré de la sécurité, de la santé ou de la salubrité publiques ou du respect des engagements internationaux de la France, notamment du droit de l'Union européenne. 11. En deuxième lieu, d'une part, en étendant aux projets en cours d'instruction les délais et conditions de mise en conformité accordés aux installations existantes, les dispositions contestées se bornent à reporter la mise en œuvre des règles et prescriptions protectrices de l'environnement fixées par l'arrêté ministériel et à aligner leurs modalités d'application sur celles retenues pour les installations existantes. Elles ne dispensent donc nullement les installations prévues par ces projets de respecter ces règles et prescriptions. 12. D'autre part, les dispositions contestées relatives au gros œuvre ont pour seul effet d'éviter que certaines nouvelles prescriptions, uniquement relatives aux constructions, par leur application rétroactive, aient des conséquences disproportionnées sur des installations déjà existantes et sur des projets en cours d'instruction ayant déjà fait l'objet d'une demande d'autorisation complète. 13. Enfin, la demande d'autorisation n'est présumée complète, au sens des dispositions contestées, que lorsqu'elle répond aux conditions de forme prévues par le code de l'environnement. Par ailleurs, lorsqu'il se prononce sur cette demande, le préfet doit prendre en compte l'ensemble des règles de fond prévues par le code de l'environnement au regard desquelles cette autorisation peut être délivrée. 14. En dernier lieu, les dispositions contestées ne font pas obstacle, en tant que de besoin, à l'édiction par le préfet, pour chaque projet, de prescriptions particulières complétant ou renforçant les règles et prescriptions générales fixées par arrêté ministériel. 15. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées ne méconnaissent ni l'article 1er ni l'article 3 de la Charte de l'environnement et que, en tout état de cause, elles n'entraînent pas de régression de la protection de l'environnement. Les griefs doivent donc être écartés. 16. Par conséquent, les troisième à sixième alinéas de l'article L. 512-5 du code de l'environnement, les quatre derniers alinéas du paragraphe III de l'article L. 512-7 du même code et le quatrième alinéa de l'article L. 512-10 du même code, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. - Sur certaines dispositions de l'article 44 : 17. L'article 44 modifie les modalités de consultation du public sur certains projets ayant des incidences sur l'environnement. 18. Les députés requérants soutiennent que ces dispositions, du fait de leur imprécision, donneraient au préfet une latitude excessive pour déterminer si le projet en cause doit être soumis à une enquête publique ou à une simple procédure de consultation par voie électronique. Le législateur aurait ainsi méconnu l'étendue de la compétence que lui confère l'article 7 de la Charte de l'environnement. Ils reprochent également à ces dispositions de ne pas comporter de critères relatifs à la protection de la santé publique, ce qui contreviendrait aux articles 1er et 7 de la même charte. 19. Selon l'article 7 de la Charte de l'environnement : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ». Depuis l'entrée en vigueur de cette Charte, il incombe au législateur et, dans le cadre défini par la loi, aux autorités administratives de déterminer, dans le respect des principes ainsi énoncés, les modalités de la mise en œuvre de ces dispositions. 20. L'article 44 modifie les articles L. 181-9 et L. 181-10 du code de l'environnement afin de permettre de consulter le public sur les projets soumis à autorisation environnementale, autres que ceux mentionnés au paragraphe I de l'article L. 123-2, par la voie de la procédure électronique prévue à l'article L. 123-19 plutôt que par la voie d'une enquête publique. 21. Ainsi, en application des dispositions contestées, une telle enquête n'est plus requise que lorsque le préfet chargé d'organiser la consultation l'estime nécessaire en raison « de ses impacts sur l'environnement ainsi que des enjeux socio-économiques qui s'y attachent ou de ses impacts sur l'aménagement du territoire ». En retenant de tels critères, qui imposent au préfet d'apprécier l'importance des incidences du projet sur l'environnement pour déterminer les modalités de participation du public, le législateur a suffisamment défini les conditions d'exercice du droit protégé par l'article 7 de la Charte de l'environnement. 22. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance de cet article doit être écarté. Le b du paragraphe I de l'article L. 181-10 du code de l'environnement, qui ne méconnaît pas non plus l'article 1er de la Charte de l'environnement ni aucune autre exigence constitutionnelle, est donc conforme à la Constitution. - Sur certaines dispositions de l'article 56 : 23. Le paragraphe I de l'article 56 modifie l'article L. 181-30 du code de l'environnement afin de permettre au préfet d'autoriser l'exécution anticipée de certains travaux de construction avant la délivrance de l'autorisation environnementale. 24. Les députés requérants reprochent à ces dispositions de méconnaître les articles 1er et 3 de la Charte de l'environnement dès lors que l'exécution de tels travaux, sans attendre que les conditions nécessaires à la préservation de l'environnement aient été fixées par l'autorisation environnementale, serait susceptible de porter une atteinte irréversible à l'environnement. Ils font également valoir que cette exécution anticipée priverait d'effet un éventuel référé-suspension introduit contre l'autorisation environnementale, à défaut pour le juge administratif de pouvoir suspendre une autorisation déjà exécutée. Il en résulterait une méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif. Enfin, ils soutiennent que ces dispositions porteraient atteinte au principe de sécurité juridique découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dans la mesure où, en dépit du fait que les travaux sont autorisés par l'autorité administrative, le pétitionnaire les exécute à ses frais et risques et peut en conséquence voir sa responsabilité civile ou pénale engagée. 25. En application du premier alinéa de l'article L. 181-30 du code de l'environnement, les permis de construire, d'aménager et de démolir ainsi que les décisions de non-opposition à déclaration préalable requis en application du code de l'urbanisme ne peuvent, en principe, pas recevoir exécution avant la délivrance de l'autorisation environnementale. Les dispositions contestées prévoient que, par dérogation, le préfet peut autoriser, à la demande du pétitionnaire et à ses frais et risques, l'exécution anticipée des permis et décisions requis pour permettre à ce dernier de commencer certains travaux de construction. 26. En premier lieu, il résulte du renvoi opéré par les dispositions contestées au paragraphe I de l'article L. 181-2 et au paragraphe I de l'article L. 214-3 du code de l'environnement que l'autorisation préfectorale ne peut concerner que les travaux dont la réalisation ne nécessite pas l'une des décisions exigées au titre des législations spéciales couvertes par l'autorisation environnementale, telles que l'autorisation pour l'émission de gaz à effet de serre, l'autorisation de défrichement, la dérogation aux interdictions édictées pour la conservation de sites d'intérêt géologique, d'habitats naturels, d'espèces animales non domestiques ou végétales non cultivées et de leurs habitats ou encore l'absence d'opposition au titre du régime d'évaluation des incidences Natura 2000. 27. En second lieu, d'une part, cette autorisation ne peut être accordée au pétitionnaire qu'après que le préfet a eu connaissance de l'autorisation d'urbanisme. D'autre part, elle peut être contestée devant le juge administratif dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir ou d'un référé-suspension. À cet égard, cette autorisation ne peut intervenir qu'après que la possibilité de commencer les travaux, avant la délivrance de l'autorisation environnementale, a été portée à la connaissance du public dans le cadre de la procédure de consultation prévue à l'article L. 181-9 du code de l'environnement ou en application du paragraphe I de l'article L. 181-10 de ce même code. La décision spéciale, qui doit être motivée et désigner les travaux dont l'exécution peut être anticipée, ne peut elle-même être prise avant l'expiration du délai courant à partir de la fin de cette procédure de consultation et fait l'objet des mêmes modalités de publicité que l'autorisation environnementale. 28. Dans ces conditions, les dispositions contestées ne méconnaissent ni l'article 1er ni l'article 3 de la Charte de l'environnement. Elles ne méconnaissent pas davantage le droit à un recours juridictionnel effectif. 29. Par conséquent, les deux derniers alinéas de l'article L. 181-30 du code de l'environnement, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. - Sur la place de l'article 79 dans la loi déférée : 30. Le paragraphe I de l'article 79 habilite le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour modifier des règles applicables à l'Office national des forêts et aux chambres d'agriculture. Son paragraphe II prévoit que certaines organisations syndicales seront associées à l'élaboration de ces ordonnances. Son paragraphe III dispose qu'un projet de loi de ratification des ordonnances devra être déposé dans un délai de trois mois à compter de la publication des ordonnances. 31. Les députés requérants soutiennent que cet article n'a pas sa place dans la loi déférée au motif qu'il a été introduit en première lecture selon une procédure contraire à l'article 45 de la Constitution. 32. Aux termes de la dernière phrase du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». Il appartient au Conseil constitutionnel de déclarer contraires à la Constitution les dispositions introduites en méconnaissance de cette règle de procédure. Dans ce cas, le Conseil constitutionnel ne préjuge pas de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles. 33. L'article 33 devenu 79 figurait dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat, première assemblée saisie. Les modifications qui y ont été apportées en première lecture ne peuvent être regardées comme dépourvues de lien, même indirect, avec les dispositions initiales de cet article. Le grief tiré de la méconnaissance de l'article 45 de la Constitution doit donc être écarté. - Sur la place des articles 131, 132, 133 et 142 dans la loi déférée et sur certaines dispositions des articles 131, 132 et 142 : 34. L'article 131 modifie certaines dispositions du code de la commande publique afin, d'une part, de permettre, dans certains cas, aux acheteurs publics de passer un marché sans publicité ni mise en concurrence, d'autre part, de prévoir de nouveaux critères d'attribution des marchés globaux et, enfin, de préserver les intérêts de certaines entreprises en difficulté durant la passation ou l'exécution d'un marché public ou d'un contrat de concession. 35. L'article 132 complète le code de la commande publique afin d'adapter, en cas de circonstances exceptionnelles, certaines règles de passation et d'exécution des marchés publics et des contrats de concession. 36. L'article 133 étend aux marchés publics, conclus avant le 1er avril 2016, le dispositif de modification des contrats en cours d'exécution prévu actuellement par le code de la commande publique. 37. L'article 142 prévoit que les acheteurs peuvent temporairement conclure un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence pour répondre à un besoin dont la valeur est estimée à 100 000 euros. . En ce qui concerne la place des articles 131, 132, 133 et 142 dans la loi déférée : 38. Les députés requérants font valoir que les articles 131, 132, 133 et 142 n'ont pas leur place dans cette loi au motif qu'ils ont été introduits en première lecture selon une procédure contraire à l'article 45 de la Constitution. 39. Introduites en première lecture, les dispositions des articles 131, 132, 133 et 142 ne peuvent être regardées comme dépourvues de lien, même indirect, avec le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat, qui comportait, à son article 46, des dispositions qui excluaient de l'application des procédures de passation des marchés publics et des contrats de concession, les services de représentation devant les juridictions et de consultation juridique. Le grief tiré de la méconnaissance de l'article 45 de la Constitution doit donc être écarté. . En ce qui concerne certaines dispositions de l'article 131 : 40. L'article 131 modifie les articles L. 2122-1 et L. 2322-1 du code de la commande publique afin de prévoir que les acheteurs publics peuvent passer un marché sans publicité ni mise en concurrence, dans des cas où un motif d'intérêt général le justifie. 41. Les députés requérants font valoir que, faute de déterminer les motifs d'intérêt général permettant une telle dérogation aux règles de la commande publique, l'article 131 serait entaché d'incompétence négative. 42. Aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi détermine les principes fondamentaux … de la libre administration des collectivités territoriales, de leurs compétences et de leurs ressources ». Il en résulte que relèvent du domaine de la loi la définition des procédures de passation des marchés passés par les collectivités territoriales, leurs groupements et les établissements publics locaux ainsi que la définition des règles et modalités encadrant l'usage de ces procédures. 43. Par les dispositions contestées, le législateur a renvoyé au pouvoir réglementaire la détermination des motifs d'intérêt général susceptibles de justifier, compte tenu des circonstances de l'espèce, de déroger aux règles de publicité et de mise en concurrence préalables. Il a précisé que ces dérogations ne sauraient s'appliquer que dans le cas où, en raison notamment de l'existence d'une première procédure infructueuse, d'une urgence particulière, de son objet ou de sa valeur estimée, le recours à ces règles serait manifestement contraire à de tels motifs. Le grief tiré de la méconnaissance, par le législateur, de l'étendue de sa compétence doit donc être écarté. 44. Par ailleurs, ces dispositions n'exonèrent pas les acheteurs publics du respect des exigences constitutionnelles d'égalité devant la commande publique et de bon usage des deniers publics rappelées à l'article L. 3 du code de la commande publique. 45. Il résulte de ce qui précède que les mots « ou à un motif d'intérêt général » figurant aux articles L. 2122-1 et L. 2322-1 du code de la commande publique, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. . En ce qui concerne certaines dispositions de l'article 132 : 46. L'article 132 insère dans le code de la commande publique deux nouveaux livres autorisant le pouvoir réglementaire, en cas de circonstances exceptionnelles, à mettre en œuvre des mesures dérogeant aux règles de passation et d'exécution des marchés publics et des contrats de concession afin de permettre la poursuite de ces procédures. 47. Les députés requérants soutiennent qu'en prévoyant que de telles règles dérogatoires peuvent être décidées par le pouvoir réglementaire en cas de « circonstances exceptionnelles », le législateur aurait, compte tenu du caractère indéfini de cette expression, méconnu le principe de clarté de la loi ainsi que l'étendue de sa compétence. 48. L'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, impose au législateur d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques. 49. En premier lieu, les dispositions dérogatoires aux règles de la commande publique prévues par l'article 132 de la loi déférée ne peuvent être mises en œuvre que « lorsqu'il est fait usage de prérogatives prévues par la loi tendant à reconnaître l'existence de circonstances exceptionnelles ou à mettre en œuvre des mesures temporaires tendant à faire face à de telles circonstances ». Ces circonstances exceptionnelles ne peuvent être que celles définies comme telles par les lois sur le fondement desquelles les prérogatives précitées sont mises en œuvre. 50. En second lieu, les circonstances exceptionnelles justifiant la mise en œuvre de ces règles dérogatoires doivent affecter les modalités de passation ou les conditions d'exécution d'un marché public ou d'un contrat de concession. 51. Il résulte de ce qui précède que les mots « circonstances exceptionnelles » figurant au premier alinéa des articles L. 2711-1 et L. 3411-1 du code de la commande publique ne sont ni inintelligibles ni entachés d'incompétence négative. Ces dispositions, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. . En ce qui concerne certaines dispositions de l'article 142 : 52. Le paragraphe I de l'article 142 autorise temporairement les acheteurs à conclure un marché de travaux sans publicité ni mise en concurrence préalables, dès lors que la valeur estimée du besoin auquel répond ce marché est inférieure à un seuil de 100 000 euros hors taxes. 53. Selon les députés requérants, le relèvement du seuil ainsi opéré créerait une rupture d'égalité devant la commande publique. D'une part, il favoriserait excessivement les grandes entreprises au détriment des petites et moyennes entreprises puisque, en l'absence de publicité ou de mise en concurrence, seules les premières seraient en mesure de conclure directement avec les acheteurs de tels marchés. D'autre part, faute que l'existence de difficultés d'accès à la commande publique résultant des procédures de publicité et de mise en concurrence ait été démontrée, la mesure contestée serait privée de toute justification. Enfin, cette mesure aggraverait les risques de corruption. 54. Il appartient au législateur, lorsqu'il définit les règles applicables à la commande publique, de respecter les principes d'égalité devant la commande publique et de bon usage des deniers publics qui découlent des articles 6, 14 et 15 de la Déclaration de 1789. 55. Le paragraphe I de l'article 142 de la loi déférée fixe à 100 000 euros hors taxes le seuil de valeur en deçà duquel les marchés de travaux sont dispensés de publicité et de mise en concurrence préalables. Cette dispense s'étend aux lots d'un même marché, relatifs à des travaux, dont le montant est inférieur à ce seuil, à la condition que leur montant total n'excède pas 20 % de la valeur totale estimée de tous les lots de ce marché. 56. En premier lieu, il ressort des travaux parlementaires qu'en instaurant ce seuil de dispense, le législateur a entendu faciliter la passation des seuls marchés publics de travaux, en allégeant le formalisme des procédures applicables, afin de contribuer à la reprise de l'activité dans le secteur des chantiers publics, touché par la crise économique consécutive à la crise sanitaire causée par l'épidémie de covid-19. En fixant au 31 décembre 2022 la fin de cette dispense, le législateur en a limité la durée à la période qu'il a estimée nécessaire à cette reprise d'activité. 57. En second lieu, cette dispense n'exonère pas les acheteurs publics du respect des exigences constitutionnelles d'égalité devant la commande publique et de bon usage des deniers publics rappelées à l'article L. 3 du code de la commande publique. 58. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la commande publique doit être écarté. 59. Par conséquent, les deux premiers alinéas du paragraphe I de l'article 142, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. - Sur la place d'autres dispositions dans la loi déférée : 60. La loi déférée a pour origine le projet de loi déposé le 5 février 2020 sur le bureau du Sénat, première assemblée saisie. Ce projet de loi comportait cinquante articles répartis en cinq titres. Son premier titre prévoyait la suppression ou le regroupement de certaines commissions administratives. Son deuxième titre organisait la déconcentration de certaines décisions administratives individuelles dans les secteurs de la culture, de l'économie et de la santé. Son troisième titre comportait des dispositions relatives à la simplification des procédures d'autorisation ou de consultation du public en matière environnementale, d'archéologie préventive ou d'approvisionnement des plateformes industrielles en électricité. Son quatrième titre traitait de diverses mesures de simplification relatives à la vérification administrative des adresses, à la déchéance des délégataires de service public, aux agréments en matière de tourisme, aux registres du personnel de l'aviation civile, à l'Office national des forêts et aux chambres d'agriculture, à l'accueil des jeunes enfants, aux certificats médicaux de pratique sportive, à la délivrance de documents provisoires aux étrangers, à l'examen du permis de conduire, à la vente de produits de santé, au service national universel, au livret d'épargne populaire, à l'intéressement des salariés, aux reventes à perte et aux promotions sur les produits alimentaires. Le dernier titre du projet de loi visait, quant à lui, à revenir sur certaines mesures de sur-transposition de directives européennes en matière de fixation des honoraires d'avocats intervenant dans le cadre d'un contrat d'assurance de protection juridique, de marchés publics et contrats de concession de service ayant pour objet la représentation en justice et la consultation juridique, de conformité des équipements radioélectriques, d'« espaces aériens surjacents » et de trésors nationaux. 61. L'article 30 de la loi déférée autorise les établissements publics de l'État qui exercent des missions similaires sur des périmètres géographiques distincts à mutualiser leurs fonctions support. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 19 du projet de loi initial qui, au titre de la déconcentration de certaines décisions administratives, autorisaient notamment un décret en Conseil d'État à confier à une seule agence régionale de santé la gestion administrative des procédures ou l'adoption des décisions individuelles prises, en application d'une législation spécifique dans le domaine sanitaire, par le ministre chargé de la santé ou d'autres agences régionales de santé. 62. L'article 51 permet à toute personne publique ou privée intéressée d'apporter un concours financier aux ouvrages et aménagements dans le cadre des contrats de concession autoroutière. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, des articles 21 et 23 du projet de loi initial. 63. L'article 63 organise le couplage des travaux d'installations des réseaux de télécommunications en fibre optique avec ceux réalisés pour raccorder une installation de production d'électricité au réseau public de distribution d'électricité. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 28 du projet de loi initial qui autorisaient les plateformes industrielles fortement consommatrices d'électricité à bénéficier de conditions particulières d'approvisionnement en électricité. 64. L'article 65 modifie le régime juridique de distribution publique de gaz. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, des articles 27 et 28 du projet de loi initial. 65. L'article 66 porte de 40 % à 60 % le plafond du taux de réfaction des coûts de raccordement des installations de biométhane aux réseaux de transport et de distribution de gaz naturel. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, des articles 24 et 28 du projet de loi initial. 66. L'article 68 étend les compétences de l'Agence nationale de la cohésion des territoires et les compétences des régions à la formation à la citoyenneté numérique et à la protection des données personnelles. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 29 du projet de loi initial qui étaient relatives à la généralisation de l'expérimentation de vérification automatique du domicile déclaré par un administré demandant la délivrance de certains documents d'identité ou d'immatriculation. 67. L'article 69 organise une expérimentation relative à la publication par le ministre de l'éducation nationale d'une évaluation de la charge normative des textes réglementaires. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 7 du projet de loi initial relatives à la suppression de l'observatoire national de la sécurité et de l'accessibilité des établissements d'enseignement. 68. L'article 71 sanctionne d'une amende administrative les personnes fournissant illégalement un service de lettre recommandée électronique. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 44 du projet de loi initial qui habilitaient le Gouvernement à prendre par ordonnance certaines mesures relevant du domaine de la loi en matière de vente à perte et de promotion sur les denrées et produits alimentaires. 69. L'article 74 aggrave les peines pour violation de domicile. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 8 du projet de loi initial qui, au titre de la suppression ou du regroupement de certaines commissions administratives, supprimaient le comité de suivi du droit au logement opposable et confiaient ses missions au haut comité pour le logement des personnes défavorisées. 70. L'article 80 prévoit la communication directe, notamment aux experts forestiers, par l'administration fiscale, des données cadastrales en matière forestière. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 33 du projet de loi initial, qui habilitaient le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi relatives au recrutement par l'Office national des forêts d'agents contractuels de droit privé exerçant certaines de ses missions, à la modification de la composition du conseil d'administration de cet office et à l'alignement des règles applicables aux agents des chambres de l'agriculture sur celles du code du travail. 71. L'article 81 prolonge l'expérimentation du transfert de certaines missions aux chambres d'agriculture. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 33 précitées. 72. L'article 85 autorise la détermination par décret des volumes d'eau susceptibles d'être prélevés dans certains bassins hydrographiques en déséquilibre significatif. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 20 du projet de loi initial, qui, au titre de la déconcentration de certaines décisions administratives, transféraient au centre scientifique et technique du bâtiment et au centre d'études et de recherches de l'industrie du béton la compétence des ministres chargés de l'écologie et de la santé pour délivrer des agréments aux dispositifs de traitement destinés à être intégrés dans des installations d'assainissement non collectif. Elles ne présentent pas non plus de lien, même indirect, avec les dispositions précitées de l'article 21 du même projet de loi. 73. L'article 86 donne compétence en premier et dernier ressort aux cours administratives d'appel pour connaître des recours dirigés contre les décisions relatives aux projets d'ouvrages de prélèvement d'eau à usage d'irrigation. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, de l'article 20 du projet de loi initial. 74. L'article 88 supprime la limite de superficie des cessions foncières gratuites de l'État aux collectivités territoriales en Guyane. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 11 du projet de loi initial, qui, au titre de la suppression ou du regroupement de certaines commissions administratives, supprimaient la commission nationale d'évaluation des politiques publiques de l'État outre-mer ni avec celles, précitées, de l'article 33 du même projet de loi. 75. L'article 102 exclut de l'assiette des cotisations sociales les avantages fournis par l'employeur pour favoriser la pratique du sport en entreprise. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 37 du projet de loi initial qui se bornaient à remplacer par une simple déclaration parentale le certificat médical de non-contre-indication actuellement requis pour les mineurs souhaitant obtenir une licence d'une fédération sportive ou participer à une compétition. 76. L'article 103 exonère de leur responsabilité civile les propriétaires et gestionnaires de sites naturels pour les dommages causés dans le cadre de la pratique des sports de nature. L'article 104 prévoit que l'usage d'un faux certificat médical pour l'inscription à une compétition ou une manifestation sportive exonère de toute responsabilité leur organisateur ou la fédération sportive intéressée. Introduites en première lecture, ces dispositions, qui traitent du régime de responsabilité applicable dans le cadre de la pratique sportive, ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, de l'article 37 du projet de loi initial. 77. L'article 110 étend le champ des missions de la Monnaie de Paris. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, de l'article 33 du projet de loi initial. 78. L'article 115 prévoit l'information des assurés sur les modalités de résiliation unilatérale d'un contrat d'assurance-emprunteur. L'article 116 prévoit l'insertion dans les contrats d'assurance-risque d'une mention informant les assurés de leur possibilité de recourir à une contre-expertise. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 45 du projet de loi initial, relatives aux modalités de fixation des honoraires d'avocats intervenant dans le cadre de l'exécution d'un contrat d'assurance de protection juridique. 79. L'article 123 impose à la direction générale des finances publiques de transmettre directement à CCI France les informations relatives à la taxe sur les surfaces commerciales. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent de lien, même indirect, avec aucune des dispositions du projet de loi initial. 80. L'article 129 modifie la composition des conseils d'administration des offices publics de l'habitat pour y prévoir la présence de personnalités qualifiées désignées par les organisations syndicales représentatives et celle de représentants du personnel desdits offices. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles précitées, de l'article 33 du projet de loi initial. 81. L'article 135 modifie les conditions de recours à la visioconférence dans le cadre de la comparution des personnes détenues devant les juridictions d'instruction et de jugement. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 2 du projet de loi initial qui, au titre de la suppression ou du regroupement de certaines commissions administratives, supprimaient la commission du suivi de la détention provisoire. 82. L'article 136 modifie le droit de la propriété intellectuelle applicable aux pièces détachées pour automobiles. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles de l'article 18 du projet de loi initial qui, au titre de la déconcentration de certaines décisions administratives, transféraient au directeur général de l'institut national de la propriété industrielle la compétence du ministre chargé de l'économie et des finances pour prendre les décisions d'interdiction de divulgation et de libre exploitation des brevets d'invention. 83. L'article 137 procède à la ratification, sans modification, de l'ordonnance portant réorganisation de la Banque publique d'investissement. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, de l'article 33 du projet de loi initial. 84. L'article 149 prévoit la remise par le Gouvernement d'un rapport au Parlement dressant un état des lieux des ouvrages d'irrigation faisant l'objet d'un contentieux. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles, précitées, de l'article 20 du projet de loi initial. 85. Ces dispositions ne présentent pas non plus de lien, même indirect, avec aucune autre des dispositions qui figuraient dans le projet de loi déposé sur le bureau du Sénat. 86. Sans que le Conseil constitutionnel ne préjuge de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles, il y a lieu de constater que, adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires. - Sur les autres dispositions : 87. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune autre question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Sont contraires à la Constitution les articles 30, 51, 63, 65, 66, 68, 69, 71, 74, 80, 81, 85, 86, 88, 102, 103, 104, 110, 115, 116, 123, 129, 135, 136, 137 et 149 de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique. Article 2. - Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes : - les troisième à sixième alinéas de l'article L. 512-5 du code de l'environnement, les quatre derniers alinéas du paragraphe III de l'article L. 512-7 du même code et le quatrième alinéa de l'article L. 512-10 du même code, dans leur rédaction résultant de l'article 34 de la loi d'accélération et de simplification de l'action publique ; - le b du paragraphe I de l'article L. 181-10 du code de l'environnement, dans sa rédaction résultant de l'article 44 de la même loi ; - les deux derniers alinéas de l'article L. 181-30 du code de l'environnement dans rédaction résultant de l'article 56 de la même loi ; - les mots « ou à un motif d'intérêt général » figurant aux articles L. 2122-1 et L. 2322-1 du code de la commande publique, dans leur rédaction résultant de l'article 131 de la même loi ; - les mots « circonstances exceptionnelles » figurant au premier alinéa des articles L. 2711-1 et L. 3411-1 du code de la commande publique, dans leur rédaction résultant de l'article 132 de la même loi ; - les deux premiers alinéas du paragraphe I de l'article 142 de la même loi. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 3 décembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 3 décembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 29 septembre 2020 par le Conseil d'État (décisions nos 441059 et 442045 du 28 septembre 2020) dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée par M. Pierre-Chanel T. et autres. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-869 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit : - de l'article L. 3841-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ; - de l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - de l'article 1er de la loi du 11 mai 2020 mentionnée ci-dessus ; - et de l'article 5 de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'accord sur la Nouvelle-Calédonie, signé à Nouméa le 5 mai 1998 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - l'ordonnance n° 2020-463 du 22 avril 2020 adaptant l'état d'urgence sanitaire à la Nouvelle-Calédonie, à la Polynésie française et aux îles Wallis et Futuna, prise sur le fondement de l'habilitation prévue à l'article 3 de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus, qui a expiré le 24 mai 2020 ; - la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ; - la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées par les requérants, enregistrées le 9 octobre 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 16 octobre 2020 ; - les secondes observations présentées par les requérants, enregistrées le 23 octobre 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 26 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 3841-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi du 11 mai 2020 mentionnée ci-dessus, prévoit :« Le chapitre Ier bis du titre III du livre Ier de la troisième partie est applicable en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française dans sa rédaction résultant de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions jusqu'au 1er avril 2021, sous réserve des adaptations suivantes : « 1° Les références au département sont remplacées, selon le cas, par la référence à la Nouvelle-Calédonie ou par la référence à la Polynésie française ; « 2° Le premier alinéa du I de l'article L. 3131-17 est remplacé par les deux alinéas suivants : « Lorsque le Premier ministre ou le ministre chargé de la santé prennent des mesures mentionnées aux articles L. 3131-15 et L. 3131-16 et les rendent applicables à la Nouvelle-Calédonie ou à la Polynésie française, ils peuvent habiliter le haut-commissaire à les adapter en fonction des circonstances locales et à prendre toutes les mesures générales ou individuelles d'application de ces dispositions, lorsqu'elles relèvent de la compétence de l'État et après consultation du gouvernement de la collectivité. « Lorsqu'une des mesures mentionnées aux 1°, 2° et 5° à 9° du I de l'article L. 3131-15 ou à l'article L. 3131-16 doit s'appliquer dans un champ géographique qui n'excède pas la Nouvelle-Calédonie ou la Polynésie française, les autorités mentionnées aux mêmes articles peuvent habiliter le haut-commissaire à la décider lui-même, assortie des adaptations nécessaires s'il y a lieu et dans les mêmes conditions qu'au premier alinéa ». 2. L'article 4 de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus prévoit :« Par dérogation aux dispositions de l'article L. 3131-13 du code de la santé publique, l'état d'urgence sanitaire est déclaré pour une durée de deux mois à compter de l'entrée en vigueur de la présente loi. « L'état d'urgence sanitaire entre en vigueur sur l'ensemble du territoire national. Toutefois, un décret en conseil des ministres pris sur le rapport du ministre chargé de la santé peut en limiter l'application à certaines des circonscriptions territoriales qu'il précise. « La prorogation de l'état d'urgence sanitaire au delà de la durée prévue au premier alinéa du présent article ne peut être autorisée que par la loi. « Il peut être mis fin à l'état d'urgence sanitaire par décret en conseil des ministres avant l'expiration du délai fixé au même premier alinéa ». 3. L'article 1er de la loi du 11 mai 2020 mentionnée ci-dessus prévoit :« I. - L'état d'urgence sanitaire déclaré par l'article 4 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 est prorogé jusqu'au 10 juillet 2020 inclus. « II. - Le chapitre VI du titre III du livre Ier de la troisième partie du code de la santé publique est complété par un article L. 3136-2 ainsi rédigé : « "Art. L. 3136-2. - L'article 121-3 du code pénal est applicable en tenant compte des compétences, du pouvoir et des moyens dont disposait l'auteur des faits dans la situation de crise ayant justifié l'état d'urgence sanitaire, ainsi que de la nature de ses missions ou de ses fonctions, notamment en tant qu'autorité locale ou employeur." « III. - L'ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale sur le fondement de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 est ainsi modifiée : « 1° L'avant-dernier alinéa de l'article 4 est complété par une phrase ainsi rédigée : "Lorsque la détention provisoire d'une personne a été ordonnée ou prolongée sur le motif prévu au 5° et, le cas échéant, aux 4° et 7° de l'article 144 du même code, l'avocat de la personne mise en examen peut également adresser par courrier électronique au juge d'instruction une demande de mise en liberté si celle-ci est motivée par l'existence de nouvelles garanties de représentation de la personne ; dans les autres cas, toute demande de mise en liberté formée par courrier électronique est irrecevable ; cette irrecevabilité est constatée par le juge d'instruction qui en informe par courrier électronique l'avocat et elle n'est pas susceptible d'appel devant la chambre de l'instruction." ; « 2° Après l'article 16, il est inséré un article 16-1 ainsi rédigé : « "Art. 16-1. - À compter du 11 mai 2020, la prolongation de plein droit des délais de détention provisoire prévue à l'article 16 n'est plus applicable aux titres de détention dont l'échéance intervient à compter de cette date et les détentions ne peuvent être prolongées que par une décision de la juridiction compétente prise après un débat contradictoire intervenant, le cas échéant, selon les modalités prévues à l'article 19. « "Si l'échéance du titre de détention en cours, résultant des règles de droit commun du code de procédure pénale, intervient avant le 11 juin 2020, la juridiction compétente dispose d'un délai d'un mois à compter de cette échéance pour se prononcer sur sa prolongation, sans qu'il en résulte la mise en liberté de la personne, dont le titre de détention est prorogé jusqu'à cette décision. Cette prorogation s'impute sur la durée de la prolongation décidée par la juridiction. En ce qui concerne les délais de détention au cours de l'instruction, cette durée est celle prévue par les dispositions de droit commun ; toutefois, s'il s'agit de la dernière échéance possible, la prolongation peut être ordonnée selon les cas pour les durées prévues à l'article 16 de la présente ordonnance. « "En ce qui concerne les délais d'audiencement, la prolongation peut être ordonnée pour les durées prévues au même article 16, y compris si elle intervient après le 11 juin 2020. « "La prolongation de plein droit du délai de détention intervenue au cours de l'instruction avant le 11 mai 2020, en application dudit article 16, n'a pas pour effet d'allonger la durée maximale totale de la détention en application des dispositions du code de procédure pénale, sauf si cette prolongation a porté sur la dernière échéance possible. « "Lorsque la détention provisoire au cours de l'instruction a été prolongée de plein droit en application de l'article 16 de la présente ordonnance pour une durée de six mois, cette prolongation ne peut maintenir ses effets jusqu'à son terme que par une décision prise par le juge des libertés et de la détention selon les modalités prévues à l'article 145 du code de procédure pénale et, le cas échéant, à l'article 19 de la présente ordonnance. La décision doit intervenir au moins trois mois avant le terme de la prolongation. Si une décision de prolongation n'intervient pas avant cette date, la personne est remise en liberté si elle n'est pas détenue pour une autre cause. « "Pour les délais de détention en matière d'audiencement, la prolongation de plein droit des délais de détention ou celle décidée en application du troisième alinéa du présent article a pour effet d'allonger la durée maximale totale de la détention possible jusqu'à la date de l'audience prévue en application des dispositions du code de procédure pénale. « "Les dispositions du présent article sont applicables aux assignations à résidence sous surveillance électronique." ; « 3° Après l'article 18, il est inséré un article 18-1 ainsi rédigé : « "Art. 18-1. - Par dérogation à l'article 148-4 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction peut être directement saisie d'une demande de mise en liberté lorsque la personne n'a pas comparu, dans les deux mois suivant la prolongation de plein droit de la détention provisoire intervenue en application de l'article 16 de la présente ordonnance, devant le juge d'instruction ou le magistrat par lui délégué, y compris selon les modalités prévues à l'article 706-71 du code de procédure pénale. Le cas échéant, la chambre de l'instruction statue dans les conditions prévues au premier alinéa de l'article 18 de la présente ordonnance." ». 4. L'article 5 de la loi du 9 juillet 2020 mentionnée ci-dessus prévoit :« L'article 1er est applicable en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, sous réserve des adaptations suivantes : « 1° Après le 4° du I, il est inséré un 5° ainsi rédigé : « "5° Habiliter le haut-commissaire à prendre, dans le strict respect de la répartition des compétences, des mesures de mise en quarantaine des personnes susceptibles d'être affectées et de placement et maintien en isolement des personnes affectées dans les conditions prévues au II des articles L. 3131-15 et L. 3131-17 du code de la santé publique." ; « 2° Le II est ainsi rédigé : « "II. - Lorsque le Premier ministre prend des mesures mentionnées au I et les rend applicables à la Nouvelle-Calédonie ou à la Polynésie française, il peut habiliter le haut-commissaire à les adapter en fonction des circonstances locales et à prendre toutes les mesures générales ou individuelles d'application de ces dispositions lorsqu'elles relèvent de la compétence de l'État, après consultation du Gouvernement de la collectivité. « "Lorsqu'une des mesures mentionnées au même I doit s'appliquer dans un champ géographique qui n'excède pas la Nouvelle-Calédonie ou la Polynésie française, le Premier ministre peut habiliter le haut-commissaire à la décider lui-même, assortie des adaptations nécessaires s'il y a lieu et dans les mêmes conditions qu'au premier alinéa du présent II." ; « 3° Le VII est applicable, sous réserve des adaptations prévues à l'article L. 3841-3 du code de la santé publique. « La présente loi sera exécutée comme loi de l'État ». 5. Les requérants soutiennent que ces dispositions, en ce qu'elles rendent applicables en Nouvelle-Calédonie, sous réserve de certaines adaptations, le régime d'état d'urgence sanitaire et le régime transitoire qui en organise la sortie, méconnaîtraient la répartition des compétences entre l'État et la Nouvelle-Calédonie, compte tenu de la compétence exclusive dévolue aux institutions de ce territoire en matière de santé publique. Il en résulterait une méconnaissance, d'une part, du principe de libre administration des collectivités territoriales tel qu'il est défini aux articles 72 et 72-2 de la Constitution et, d'autre part, d'un « principe de non-intervention de l'État dans les domaines de compétence transférés à la Nouvelle-Calédonie », que les requérants demandent au Conseil constitutionnel de reconnaître sur le fondement de l'article 77 de la Constitution et du point 5 du préambule de l'accord de Nouméa, et d'un « principe de l'irréversibilité de l'organisation politique découlant de l'accord de Nouméa », qu'ils invitent également le Conseil à reconnaître sur le fondement du point 5 de cet accord. 6. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte, d'une part, sur les mots « en Nouvelle-Calédonie et » figurant au premier alinéa de l'article L. 3841-2 du code de la santé publique, sur les mots « selon le cas, par la référence à la Nouvelle-Calédonie ou » figurant au deuxième alinéa de ce même article, sur les mots « à la Nouvelle-Calédonie ou » figurant à son quatrième alinéa ainsi que sur les mots « la Nouvelle-Calédonie ou » figurant à son cinquième alinéa. Elle porte, d'autre part, sur les mots « en Nouvelle-Calédonie et » figurant au premier alinéa de l'article 5 de la loi du 9 juillet 2020, sur les mots « à la Nouvelle-Calédonie ou » figurant au cinquième alinéa de ce même article ainsi que sur les mots « la Nouvelle-Calédonie ou » figurant à son sixième alinéa. 7. Le 5 mai 1998, a été signé à Nouméa, entre le Gouvernement de la République française et les représentants des principales formations politiques de Nouvelle-Calédonie, un « accord sur la Nouvelle-Calédonie » qui, outre un « Préambule », comprend un « Document d'orientation » relatif, en son point 3, aux « compétences » dévolues à l'État et à la Nouvelle-Calédonie, aux termes duquel :« Les compétences détenues par l'État seront transférées à la Nouvelle-Calédonie dans les conditions suivantes : « - certaines seront transférées dès la mise en œuvre de la nouvelle organisation politique ; « - d'autres le seront dans des étapes intermédiaires ; « - d'autres seront partagées entre l'État et la Nouvelle-Calédonie ; « - les dernières, de caractère régalien, ne pourront être transférées qu'à l'issue de la consultation mentionnée au 5… ». 8. Les institutions de la Nouvelle-Calédonie sont régies par le titre XIII de la Constitution, qui comprend les articles 76 et 77. 9. En vertu de l'article 76 de la Constitution, « Les populations de la Nouvelle-Calédonie sont appelées à se prononcer avant le 31 décembre 1998 sur les dispositions de l'accord signé à Nouméa le 5 mai 1998 et publié le 27 mai 1998 au Journal officiel de la République française… ». 10. Aux termes de l'article 77 de la Constitution :« Après approbation de l'accord lors de la consultation prévue à l'article 76, la loi organique, prise après avis de l'assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie, détermine, pour assurer l'évolution de la Nouvelle-Calédonie dans le respect des orientations définies par cet accord et selon les modalités nécessaires à sa mise en œuvre : « - les compétences de l'État qui seront transférées, de façon définitive, aux institutions de la Nouvelle-Calédonie, l'échelonnement et les modalités de ces transferts, ainsi que la répartition des charges résultant de ceux-ci… ». 11. Il en résulte que si le législateur est compétent pour rendre applicables en Nouvelle-Calédonie des dispositions législatives, c'est à la condition que ces dispositions n'interviennent pas dans des matières relevant des compétences ayant été transférées aux institutions de la Nouvelle-Calédonie, de façon définitive, par la loi organique dans le respect des orientations définies par l'accord de Nouméa auxquelles le titre XIII de la Constitution confère valeur constitutionnelle. 12. La méconnaissance du domaine des compétences ainsi définitivement transférées peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité. 13. Les dispositions contestées ont pour objet de rendre applicables en Nouvelle-Calédonie, sous réserve de certaines adaptations, le régime de l'état d'urgence sanitaire et le régime transitoire qui en organise la sortie. 14. Il résulte du 4° de l'article 22 de la loi organique du 19 mars 1999 mentionnée ci-dessus, prise en application de l'article 77 de la Constitution, que les compétences dévolues à la Nouvelle-Calédonie comprennent la réglementation en matière de « Protection sociale, hygiène publique et santé, contrôle sanitaire aux frontières ». Toutefois, conformément au point 3.3 de l'accord de Nouméa, qui stipule que l'ordre public reste de la compétence de l'État jusqu'à la nouvelle organisation politique résultant de la consultation des populations intéressées prévue au cours du mandat du congrès de la Nouvelle-Calédonie commençant en 2014, le 1° du paragraphe I de l'article 21 de cette loi organique prévoit que l'État est compétent en matière de « garanties des libertés publiques ». 15. En premier lieu, d'une part, en application des dispositions contestées de l'article L. 3841-2 du code de la santé publique issues de l'ordonnance du 22 avril 2020 mentionnée ci-dessus, la déclaration de l'état d'urgence sanitaire, qui ne peut être décidée, en vertu de l'article L. 3131-12 du même code, qu'« en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population », permet au Premier ministre, au ministre chargé de la santé et, lorsqu'il reçoit leur habilitation, au haut-commissaire de prendre ou adapter, sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie, diverses mesures afin de faire face à une crise sanitaire grave. En application de l'article L. 3131-15 du même code, peuvent à ce titre être décidés, aux seules fins de garantir la santé publique, la réglementation ou l'interdiction de la circulation des personnes et des véhicules, l'interdiction de sortie du domicile, des mesures de mise en quarantaine et d'isolement, la réglementation de l'ouverture et la fermeture provisoire d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, l'interdiction des rassemblements sur la voie publique, la réquisition des biens et services ainsi que de toute personne nécessaire à la lutte contre la catastrophe sanitaire, le contrôle temporaire des prix de certains produits, des mesures permettant la mise à disposition des patients de médicaments appropriés pour l'éradication de la catastrophe sanitaire et toute autre mesure réglementaire limitant la liberté d'entreprendre. 16. D'autre part, en application des articles 1er et 5 de la loi du 9 juillet 2020 relative au régime transitoire organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, le Premier ministre, le ministre chargé de la santé et le haut-commissaire peuvent prendre ou adapter, sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie, diverses mesures dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. Ils peuvent ainsi réglementer ou interdire la circulation des personnes et des véhicules ainsi que des moyens de transport collectif, réglementer l'ouverture ou ordonner la fermeture provisoire des établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, réglementer les rassemblements de personnes, les réunions et les activités se déroulant sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public et imposer la réalisation d'un examen biologique de dépistage pour l'usage des transports publics aériens. 17. Si elles poursuivent un objectif de protection de la santé publique, ces mesures exceptionnelles, temporaires et limitées à la mesure strictement nécessaire pour répondre à une catastrophe sanitaire et à ses conséquences, se rattachent à la garantie des libertés publiques et ne relèvent donc pas de la compétence de la Nouvelle-Calédonie. 18. En second lieu, en étendant à la Nouvelle-Calédonie les mesures prévues par l'article L. 3131-16 du code de la santé publique permettant au ministre chargé de la santé ou au haut-commissaire de prescrire ou d'adapter, dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré, « toute mesure réglementaire relative à l'organisation et au fonctionnement du dispositif de santé », autre que celles prévues à l'article L. 3131-15, pour mettre fin à la catastrophe sanitaire, le législateur n'a visé que les mesures qui, parce qu'elles concernent l'ordre public ou les garanties des libertés publiques, relèvent de la compétence de l'État. Cette extension est donc sans incidence sur les compétences de la Nouvelle-Calédonie en matière de santé. 19. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le principe de libre administration des collectivités territoriales ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. Sont conformes à la Constitution : - les mots « en Nouvelle-Calédonie et » figurant au premier alinéa de l'article L. 3841-2 du code de la santé publique, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, les mots « selon le cas, par la référence à la Nouvelle-Calédonie ou » figurant au deuxième alinéa de ce même article, les mots « à la Nouvelle-Calédonie ou » figurant à son quatrième alinéa ainsi que les mots « la Nouvelle-Calédonie ou » figurant à son cinquième alinéa ; - les mots « en Nouvelle-Calédonie et » figurant au premier alinéa de l'article 5 de la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, les mots « à la Nouvelle-Calédonie ou » figurant au cinquième alinéa de ce même article ainsi que les mots « la Nouvelle-Calédonie ou » figurant à son sixième alinéa. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 3 décembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 4 décembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 15 octobre 2020 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 2196 du 14 octobre 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour la société Ambulances secours rapides du bassin par Me Laurent Babin, avocat au barreau de Bordeaux. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-870 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 61-1 du code de procédure pénale. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code de procédure pénale ; - la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales ; - la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ; - la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-762 QPC du 8 février 2019 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 2 novembre 2020 ; - les observations en intervention présentées pour la société Intégral par Me Jean Gonthier, avocat au barreau de Bordeaux, enregistrées le même jour ; - les observations présentées pour la société requérante par Me Babin et la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 17 novembre 2020 ; - les secondes observations en intervention présentées pour la société Intégral par Me Gonthier et la SCP Waquet, Farge, Hazan, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Babin pour la société requérante, Me Claire Waquet, avocate au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la requérante et la partie intervenante, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 26 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi de l'article 61-1 du code de procédure pénale dans sa rédaction issue de la loi du 27 mai 2014 mentionnée ci-dessus. 2. L'article 61-1 du code de procédure pénale, dans cette rédaction, prévoit :« La personne à l'égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ne peut être entendue librement sur ces faits qu'après avoir été informée : « 1° De la qualification, de la date et du lieu présumés de l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre ; « 2° Du droit de quitter à tout moment les locaux où elle est entendue ; « 3° Le cas échéant, du droit d'être assistée par un interprète ; « 4° Du droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; « 5° Si l'infraction pour laquelle elle est entendue est un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement, du droit d'être assistée au cours de son audition ou de sa confrontation, selon les modalités prévues aux articles 63-4-3 et 63-4-4, par un avocat choisi par elle ou, à sa demande, désigné d'office par le bâtonnier de l'ordre des avocats ; elle est informée que les frais seront à sa charge sauf si elle remplit les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle, qui lui sont rappelées par tout moyen ; elle peut accepter expressément de poursuivre l'audition hors la présence de son avocat ; « 6° De la possibilité de bénéficier, le cas échéant gratuitement, de conseils juridiques dans une structure d'accès au droit. « La notification des informations données en application du présent article est mentionnée au procès-verbal. « Si le déroulement de l'enquête le permet, lorsqu'une convocation écrite est adressée à la personne en vue de son audition, cette convocation indique l'infraction dont elle est soupçonnée, son droit d'être assistée par un avocat ainsi que les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle, les modalités de désignation d'un avocat d'office et les lieux où elle peut obtenir des conseils juridiques avant cette audition. « Le présent article n'est pas applicable si la personne a été conduite, sous contrainte, par la force publique devant l'officier de police judiciaire ». 3. La société requérante soutient que ces dispositions méconnaîtraient les droits de la défense au motif qu'elles priveraient du droit à l'assistance d'un avocat une personne entendue librement lorsque l'infraction qu'elle est soupçonnée d'avoir commise ou tenté de commettre n'est pas un crime ou un délit puni d'une peine d'emprisonnement. 4. En réponse aux observations du Premier ministre qui conclut au non-lieu à statuer au motif que ces dispositions ont déjà été déclarées contraires à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel du 8 février 2019 mentionnée ci-dessus, la société requérante soutient que leur modification par la loi du 23 mars 2019 mentionnée ci-dessus constitue un changement des circonstances justifiant leur réexamen. 5. Aux termes du troisième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Les décisions du Conseil constitutionnel ne sont susceptibles d'aucun recours. Elles s'imposent aux pouvoirs publics et à toutes les autorités administratives et juridictionnelles ». 6. L'autorité des décisions visées par cette disposition s'attache non seulement à leur dispositif mais aussi aux motifs qui en sont le soutien nécessaire et en constituent le fondement même. Elle fait obstacle à ce que le Conseil soit saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la même version d'une disposition déclarée contraire à la Constitution, sauf changement des circonstances. 7. Dans sa décision du 8 février 2019, le Conseil constitutionnel a déclaré l'article 61-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi du 27 mai 2014, contraire à la Constitution et décidé de reporter son abrogation au 1er janvier 2020. 8. Le fait que la loi du 23 mars 2019 ait donné une nouvelle rédaction à l'article 61-1 du code de procédure pénale, applicable à compter du 1er juin 2019, ne constitue pas un changement des circonstances justifiant le réexamen de cet article dans sa rédaction issue de la loi du 27 mai 2014, seule applicable au litige. 9. Par suite, même si le grief d'inconstitutionnalité soulevé en l'espèce par la société requérante diffère de celui qui avait justifié la censure, il n'y a pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, de se prononcer sur la question prioritaire de constitutionnalité. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Il n'y a pas lieu de statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 61-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2014-535 du 27 mai 2014 portant transposition de la directive 2012/13/UE du Parlement européen et du Conseil, du 22 mai 2012, relative au droit à l'information dans le cadre des procédures pénales. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 3 décembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 4 décembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 5 octobre 2020 d'une requête présentée par M. Sylvio LETARD, inscrit sur les listes électorales de la commune de Sinnamary en Guyane, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 27 septembre 2020, en Guyane, en vue de la désignation de deux sénateurs. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-5687 SEN. Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment son article 59 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le deuxième alinéa de son article 38 ; - le code électoral ; - le décret n° 2020-812 du 29 juin 2020 portant convocation des collèges électoraux pour l'élection des sénateurs ; - le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs, notamment le deuxième alinéa de son article 8 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Selon le deuxième alinéa de l'article 38 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, « le Conseil, sans instruction contradictoire préalable, peut rejeter, par décision motivée, les requêtes irrecevables ou ne contenant que des griefs qui manifestement ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l'élection ». 2. La requête présentée par M. LETARD dénonce le fait que les conseillers à l'Assemblée de Guyane n'auraient pas dû prendre part au vote pour la désignation des sénateurs de Guyane puisqu'il ne s'agirait pas de « conseillers départementaux » au sens du 3° de l'article L. 280 du code électoral qui fixe la composition du collège électoral appelé à élire les sénateurs. Elle fait également valoir que le décret du 29 juin 2020 mentionné ci-dessus, portant convocation des collèges électoraux sénatoriaux, aurait indûment mentionné la Guyane avec les autres départements de la série 2. 3. Toutefois, d'une part, le 2° bis de l'article L. 280 du code électoral dispose que les conseillers à l'Assemblée de Guyane entrent dans la composition du collège électoral appelé à élire les sénateurs de la Guyane. D'autre part, la Guyane relève bien de la série 2 du tableau n° 5 annexé au code électoral fixant la répartition, pour les départements, la Nouvelle-Calédonie, les collectivités d'outre-mer et les Français établis hors de France, des sièges de sénateurs entre les séries. Les griefs du requérant sont donc manifestement infondés. Par suite, sa requête doit être rejetée. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - La requête de M. Sylvio LETARD est rejetée. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 décembre 2020, où siégeaient : M. Alain JUPPÉ exerçant les fonctions de Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 11 décembre 2020
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 1er octobre 2020 d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. André KORNMANN. Cette question a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-5684 SEN/QPC. Elle a été posée à l'occasion de la requête présentée par M. KORNMANN, candidat à l'élection qui s'est déroulée dans le département de la Haute-Saône, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé le 27 septembre 2020 dans ce département en vue de la désignation de deux sénateurs. Cette requête a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel, le 1er octobre 2020, sous le n° 2020-5684 SEN. Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment son article 59 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le deuxième alinéa de son article 38 ; - le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs, notamment son article 16-1 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. À l'appui de sa requête dirigée contre le scrutin qui s'est déroulé le 27 septembre 2020 dans le département de la Haute-Saône, M. KORNMANN soutient que l'existence de deux modes de scrutin pour l'élection des sénateurs méconnaîtrait le principe d'égalité. 2. Selon l'article 16-1 du règlement mentionné ci-dessus, « Lorsqu'une question prioritaire de constitutionnalité est soulevée à l'occasion d'une procédure en cours devant lui, le Conseil constitutionnel procède selon les dispositions du règlement intérieur sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité. - Le Conseil peut toutefois, par décision motivée, rejeter sans instruction contradictoire préalable les questions prioritaires de constitutionnalité qui ne réunissent pas les conditions prévues par la seconde phrase du troisième alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ». 3. Pour satisfaire aux conditions prévues par la seconde phrase du troisième alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, la question prioritaire de constitutionnalité doit contester une disposition législative applicable au litige ou à la procédure et qui n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances. En outre, la question doit être nouvelle ou présenter un caractère sérieux. 4. Faute de préciser la disposition législative qui est contestée, la question prioritaire de constitutionnalité ne satisfait pas à ces conditions et doit, par conséquent, être rejetée. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - La question prioritaire de constitutionnalité est rejetée. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 10 décembre 2020, où siégeaient : M. Alain JUPPÉ exerçant les fonctions de Président, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 11 décembre 2020.
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La proposition de loi, présentée en application de l'article 11 de la Constitution, visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris a été la première à faire l'objet de la procédure dite du référendum d'initiative partagée (RIP). Instituée par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, cette procédure est régie par les troisième à sixième alinéas de l'article 11 de la Constitution et précisée par la loi organique n° 2013-1114 du 6 décembre 2013 portant application de l'article 11 de la Constitution, qui a modifié l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel. Dans sa décision n° 2019-1 RIP du 9 mai 2019[1], le Conseil constitutionnel a jugé que cette proposition de loi était conforme aux conditions fixées par l'article 11 de la Constitution et par l'article 45-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. En application de l'article 3 de la loi organique du 6 décembre 2013, le ministre de l'intérieur a ensuite mis en œuvre, sous le contrôle du Conseil constitutionnel, le recueil des soutiens apportés par les électeurs à la proposition de loi. Cette période de recueil des soutiens a été ouverte pour neuf mois, à compter du 13 juin 2019 à zéro heure, et a pris fin le 12 mars 2020 à minuit [2]. Dans sa décision n° 2019-1-8 RIP du 26 mars 2020[3], le Conseil constitutionnel a constaté que la proposition de loi n'avait pas obtenu le soutien d'au moins un dixième des électeurs inscrits sur les listes électorales, ainsi que le requiert l'article 11 de la Constitution pour permettre la poursuite de la procédure devant le Parlement et, le cas échéant, conduire à l'organisation d'un référendum. Le 26 mai 2020, le Gouvernement a détruit les données collectées dans le cadre des opérations de recueil des soutiens, conformément à l'article 7 de la loi organique du 6 décembre 2013 (qui fixe un délai de deux mois pour cette destruction à compter de la publication au Journal officiel de la déclaration par le Conseil constitutionnel du nombre de soutiens obtenus, soit en l'espèce au plus tard le 27 mai 2020). À l'issue de cette première mise en œuvre, partielle, de la procédure de référendum d'initiative partagée, le Conseil constitutionnel a estimé nécessaire, à l'instar de la pratique suivie en matière électorale et référendaire, de formuler des observations. 1. - Les résultats des opérations de recueil des soutiens Comme l'indique la décision n° 2019-1-8 RIP précitée, la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris a recueilli 1 093 030 soutiens d'électeurs inscrits sur les listes électorales. Au total, 1 148 337 soutiens avaient été enregistrés, qu'il s'agisse des soutiens directement apportés par les électeurs sur le site internet du ministère de l'intérieur consacré à cette procédure, de ceux déposés auprès d'une mairie ou d'un consulat ou encore de ceux ajoutés à la suite d'une décision de la formation d'examen des réclamations (voir le point 4.b. ci-dessous). Parmi ces soutiens, 55 307 ont été invalidés par le ministère de l'intérieur dans le cadre de ses opérations de contrôle prévues à l'article 4 du décret du 11 décembre 2014[4] . Ces contrôles visent à s'assurer de la validité du numéro de carte nationale d'identité ou de passeport renseigné lors du dépôt du soutien, de l'absence de double soutien et, le cas échéant, de la qualité d'électeur de la personne (par interrogation du répertoire électoral unique ou du fichier général des électeurs de Nouvelle-Calédonie). Ils doivent être effectués dans un délai de cinq jours, délai au terme duquel le soutien est soit rejeté, soit réputé valide et alors publié. La plupart des invalidations ont résulté du fait que la personne avait déjà apporté son soutien (36 442 cas) ou qu'elle avait commis une erreur dans la saisie du numéro de sa pièce d'identité (18 019 cas). 2. - Le recueil des soutiens par voie électronique Le législateur organique de 2013 a fait le choix d'une procédure de recueil des soutiens presque totalement électronique. Dès 2014, le ministère de l'intérieur, en lien avec le Conseil constitutionnel, a conçu un site internet afin de mettre en œuvre cette procédure. C'est ce site qui a été utilisé pour recueillir les soutiens à la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris. a. - Pour sa première application, cette procédure électronique s'est révélée suffisamment efficace pour garantir la fiabilité des résultats constatés à l'issue de la période de recueil des soutiens. En particulier, la vérification préalable de l'inscription de l'internaute dans le répertoire électoral unique (REU), par un premier formulaire informatique dédié[5], a permis de s'assurer de la qualité d'électeur de l'auteur du soutien (ce qui a néanmoins occasionné plusieurs difficultés, évoquées plus bas). En outre, si pendant les neuf mois de recueil, le site internet a connu quelques indisponibilités du fait de problèmes techniques ou de mises à jour, elles ont été finalement peu nombreuses. Certaines d'entre elles ont résulté de perturbations affectant l'application, gérée par l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), permettant de consulter le REU. D'autres moments d'indisponibilité, à chaque fois d'une durée brève, ont été la conséquence de mises à jour du site visant à corriger certains de ses dysfonctionnements ou à actualiser le référentiel des communes répertoriées par l'Insee. Les citoyens en ont, autant que possible, été informés par un message figurant sur le site, qui les invitait à réitérer leur démarche plus tard. De même, le site a fait l'objet de peu d'attaques informatiques, que les dispositifs de sécurité ont permis de parer. Enfin, les opérations de contrôle ont conduit à ne recenser que très peu de tentatives d'usurpation d'identité. Si quelques rares réclamations formées devant le Conseil constitutionnel ont porté sur ce point, celles-ci étaient insuffisamment étayées (voir le point 4.b. ci-dessous). Quelques tentatives d'utilisation frauduleuse du nom d'une tierce personne ont été décelées avant même que le soutien soit rendu public. Elles ont été signalées par le secrétaire général du Conseil constitutionnel au procureur de la République, sur le fondement de l'article 40 du code de procédure pénale. b. - Toutefois, cette procédure électronique de recueil des soutiens a également présenté certaines insuffisances et plusieurs défauts. Si ceux-ci n'ont pas eu de conséquences déterminantes sur l'issue des opérations, elles ont pu contribuer à altérer la confiance des citoyens dans cette procédure. Les points suivants, d'inégale importance, méritent ainsi d'être signalés : - le manque d'ergonomie générale du site internet, souvent perçu comme étant d'un usage complexe, peu intuitif et insuffisamment adapté à une consultation destinée à un large public ; - les problèmes techniques de compatibilité du site avec certains navigateurs internet ; - la difficulté pour les citoyens, en particulier dans les premiers mois, à pouvoir renseigner sur le site leur commune d'inscription sur les listes électorales (ce qui a suscité de nombreuses réclamations auprès du Conseil constitutionnel) ; - la difficulté, plus généralement, à être reconnu comme électeur inscrit au REU, en raison notamment des nombreuses discordances entre les éléments d'état civil du citoyen et les données figurant dans le REU (date de naissance, orthographe de son nom, masculinisation ou féminisation de son prénom, ordre de ses prénoms, etc.). À supposer qu'il ait compris qu'une telle discordance était à l'origine de l'impossibilité d'être reconnu comme électeur et donc d'apporter son soutien, le citoyen devait alors choisir entre renseigner un état civil erroné mais conforme au REU ou bien demander à l'Insee, au préalable, de corriger son état civil tel qu'il figure au REU[6] ; - l'absence de confirmation du dépôt du soutien à l'issue de la procédure de saisie, alors pourtant qu'une adresse électronique était demandée au citoyen (laquelle n'avait vocation à servir qu'en cas de réclamation). Cela a conduit de nombreux électeurs à douter de la réussite de l'enregistrement de leur soutien, cette incertitude n'étant levée que lorsque celui-ci apparaissait publiquement, ce qui pouvait prendre jusqu'à cinq jours compte tenu du délai réglementaire déjà mentionné. Dans le doute, certains citoyens ont réitéré leur soutien, créant ainsi des doublons auxquels les autorités de contrôle ont dû ensuite remédier ; - la difficulté pour l'électeur de vérifier que son soutien a bien été validé au bout de cinq jours, soit en consultant la liste publique classée par ordre alphabétique, opération rendue fastidieuse par les nombreux tests de reconnaissance humaine[7], soit en essayant de s'identifier grâce à son numéro de récépissé de dépôt, s'il l'avait conservé ; - le refus de l'application informatique de considérer comme valides certaines pièces d'identité en raison par exemple de leur ancienneté ou de leur délivrance outre-mer ou à l'étranger ; - l'impossibilité de contrôler, avant le dépôt du soutien, la qualité d'électeur des personnes se présentant comme inscrites sur les listes électorales en Nouvelle-Calédonie, ces listes n'étant pas intégrées au REU. La plupart de ces difficultés n'ont cependant pas eu de conséquences déterminantes sur l'issue des opérations. En premier lieu, les électeurs qui s'y sont heurtés ont parfois renouvelé, cette fois avec succès, la procédure d'enregistrement de leur soutien. En deuxième lieu, il a été remédié à certaines de ces difficultés au cours de la période de recueil. D'une part, des correctifs informatiques ont permis des améliorations : mises à jour de la liste des communes ; réparation des dysfonctionnements liés au rejet de certaines pièces d'identité ; retrait, dans le formulaire de soutien, de la mention du lieu de naissance, qui était source d'erreurs ; précision dans les termes utilisés sur le site, notamment pour mieux définir la notion de « nom de famille », etc. D'autre part, des vérifications manuelles ont été mises en place par le greffe du Conseil constitutionnel, en lien avec le ministère de l'intérieur et l'Insee, afin notamment de lever les difficultés de reconnaissance dans le REU. En dernier lieu, l'écart séparant le nombre des soutiens enregistrés et le seuil d'un dixième des électeurs a été d'une importance suffisante pour qu'il puisse être affirmé que, en tout état de cause, les obstacles qui auraient empêché certains électeurs de soutenir la proposition de loi n'ont eu aucune incidence sur l'issue de la procédure. Il est cependant possible que ces difficultés aient contribué à altérer la confiance de certains électeurs dans cette procédure et les aient dissuadés d'y participer. c. - Les difficultés observées ci-dessus devraient conduire le ministère de l'intérieur et, plus largement, les pouvoirs publics à réfléchir aux possibles améliorations du dispositif électronique de recueil des soutiens. À cet égard, un travail de rétro-ingénierie et de retour d'expérience a été engagé par le Conseil constitutionnel et le ministère de l'intérieur de façon à ce que des progrès puissent être faits sans attendre la prochaine mise en œuvre de la procédure d'initiative partagée et sans préjudice d'éventuelles évolutions de son cadre juridique. Certaines améliorations sont d'ordre technique : meilleure accessibilité et ergonomie du site internet, envoi d'un accusé de réception électronique au citoyen lorsqu'il a déposé son soutien avec succès puis au moment où celui-ci est rendu public, etc. Elles ne devront pas, cependant, s'effectuer au détriment de la préservation de l'authenticité des soutiens. Certaines contraintes imposées aux déposants sont en effet la contrepartie du degré de sécurité élevé qu'exige la procédure : le soutien d'une proposition de loi susceptible d'être soumise au Parlement ou à référendum en application de la Constitution doit être entouré de davantage de garanties que la signature en quelques clics d'une pétition initiée par un internaute. D'autres possibles évolutions dépassent le cadre strictement technique. En premier lieu, il convient de signaler le cas particulier des électeurs de Nouvelle-Calédonie, qui sont les seuls à ne pas figurer dans le répertoire électoral unique[8]. Faute de pouvoir contrôler a priori leur qualité d'électeur, une procédure ad hoc de vérification a été prévue à l'article 4 du décret du 11 décembre 2014, confiant à l'Institut de la statistique et des études économiques (Isee) de la Nouvelle-Calédonie le soin de confirmer, dans le délai de cinq jours déjà évoqué, que l'auteur du soutien est inscrit au fichier général des électeurs de Nouvelle-Calédonie. Cette procédure s'est, en pratique, avérée peu efficiente, en raison notamment de réponses tardives ou erronées de l'Isee, qui ont parfois entraîné des doublons dans les soutiens. Les modalités de contrôle des soutiens apportés par des électeurs inscrits en Nouvelle-Calédonie appellent donc une réflexion spécifique. En second lieu, s'agissant cette fois de l'ensemble des électeurs, la question du renforcement de l'identification électronique des auteurs de soutiens mérite d'être posée. Le dispositif actuel permet certes de vérifier que la personne déposant son soutien dispose des informations requises pour être reconnue comme électeur au sens du REU, mais il ne garantit pas, même si un numéro de carte nationale d'identité ou de passeport est ensuite demandé sur le site, que cette personne est bien celle qu'elle prétend être. Un renforcement de l'authenticité de l'identité numérique de l'auteur du soutien constituerait donc un progrès. Celui-ci est cependant tributaire de la généralisation de solutions technologiques telles que l'identification par « FranceConnect »[9] ou, demain, par la carte nationale d'identité électronique. Une telle évolution vers une identification plus solide n'est, par ailleurs, pas sans lien avec la question de la publicité des soutiens. Le législateur organique de 2013 a choisi d'assimiler le soutien à une proposition de loi à la signature d'une pétition plutôt qu'à l'expression d'un suffrage. Comme l'a souligné le Conseil constitutionnel à l'époque, ce choix vise à « garantir l'authenticité » de la liste des soutiens « en reconnaissant à toute personne le droit de vérifier, dès le début de la période de recueil des soutiens et à tout moment, qu'elle-même ou toute autre personne figure ou ne figure pas sur cette liste »[10]. Toutefois, même si cette publicité est entourée de garanties protectrices de la vie privée et assurant le respect de la Constitution[11], sa justification est parfois mal comprise, ce qui a pu susciter la méfiance de certains électeurs et les dissuader de soutenir la proposition de loi, par crainte de la révélation de leurs opinions politiques et de possibles utilisations abusives de telles informations, par exemple par leur employeur ou à des fins de prospection électorale. Un moyen radical d'y remédier serait de renoncer à cette publicité. Toutefois, en l'état actuel des dispositifs technologiques susceptibles de garantir l'identité numérique d'une personne, la publicité de la liste des soutiens demeure un élément important permettant de contribuer à son authenticité. En définitive, pour une première expérience de participation citoyenne à l'échelon national, sous une forme quasi-entièrement électronique, le bilan peut rassurer quant à la faisabilité d'une procédure principalement numérique. Certaines des difficultés rencontrées appellent néanmoins, pour l'avenir, des améliorations du dispositif. 3. - Le recueil des soutiens en mairie et à l'étranger Le législateur organique a apporté un seul aménagement au caractère électronique de la procédure de recueil des soutiens, en prévoyant que tout électeur peut faire enregistrer son soutien présenté sur papier par un agent de la commune la plus peuplée de chaque canton (ou d'une circonscription administrative équivalente) ou par un agent d'un consulat (article 6 de la loi organique du 6 décembre 2013). Le soutien est alors, dans les quarante-huit heures, enregistré électroniquement, dans la même application que celle utilisée pour le site internet, par un agent habilité et disposant à cet effet d'un identifiant et d'un mot de passe. Au total, 7 903 soutiens ont ainsi été déposés auprès d'une mairie et 34 auprès d'un consulat. Cette procédure a connu quelques difficultés de mise en place au début de la période de recueil des soutiens, en raison notamment de retards dans la transmission aux communes des identifiants et des mots de passe. Par ailleurs, des cas de non-respect du délai de quarante-huit heures ont été rapportés, sans emporter néanmoins de conséquences sur l'enregistrement de ces soutiens[12]. Cette possibilité d'apporter son soutien sur papier s'est avérée utile, non seulement pour les personnes ne disposant pas d'un accès à internet, mais aussi pour les autres, qui ont ainsi pu contourner certaines des difficultés techniques de dépôt sur le site (voir le point 2.b. ci-dessus). 4. - Le rôle du Conseil constitutionnel pendant la période de recueil des soutiens a. - La mission générale de contrôle de la procédure C'est « sous le contrôle du Conseil constitutionnel » que le ministre de l'intérieur met en œuvre le recueil des soutiens apportés à une proposition de loi présentée en application de l'article 11 de la Constitution (article 3 de la loi organique du 6 décembre 2013). En outre, selon le premier alinéa de l'article 45-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, le « Conseil constitutionnel veille à la régularité des opérations de recueil des soutiens à une proposition de loi ». À ce titre, le Conseil constitutionnel a veillé, tout au long de la période, à la fiabilité et à la solidité du dispositif électronique de recueil des soutiens déployé par le Gouvernement. Il a aussi veillé à ce que des améliorations régulières soient apportées par le ministère de l'intérieur au site internet consacré à ce recueil, notamment par les correctifs informatiques déjà évoqués (voir le point 2.b.). Le Conseil constitutionnel a également pris part à la bonne information des citoyens, à travers l'organisation d'une conférence de presse d'ouverture de la période de recueil des soutiens, puis la mise en place, avec le ministère de l'intérieur, de « foires aux questions » sur le site internet du Gouvernement et sur son propre site. En outre, à la suite du constat d'irrégularités dans le traitement de certains soutiens, le Conseil constitutionnel a prescrit que des corrections soient apportées à la liste des soutiens. En particulier, ont ainsi été acceptés, d'une part, des soutiens d'électeurs de Nouvelle-Calédonie qui avaient, à tort, été rejetés par l'application ou par le ministère de l'intérieur dans le cadre de ses vérifications (voir également le point 2.c. ci-dessus) et, d'autre part, des soutiens d'électeurs invalidés en raison de certaines particularités du numéro de leur carte d'identité ou de leur passeport. Par ailleurs, le Conseil constitutionnel a décidé de rendre public tous les quinze jours, par communiqué de presse, le nombre de soutiens enregistrés sur le site internet du ministère de l'intérieur. Il a fait état de cette décision dans les communiqués de presse qu'il a publiés les 30 juillet et 29 août 2019[13]. b. - L'examen des réclamations et des recours * En application du deuxième alinéa de l'article 45-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, le Conseil constitutionnel examine et tranche définitivement toutes les réclamations. Il peut être saisi par tout électeur durant la période de recueil des soutiens ou dans un délai de dix jours suivant sa clôture. Pour traiter ces réclamations, le législateur organique a institué une « formation » composée de trois membres désignés pour une durée de cinq ans par le Conseil constitutionnel, sur proposition de son président, parmi les magistrats de l'ordre judiciaire ou les membres des juridictions administratives [14]. Il résulte de l'article 45-4 précité que les réclamations sont soumises soit à cette formation d'examen des réclamations (FER) soit, sur renvoi de celle-ci, au « Conseil assemblé » lui-même - faculté qui a été utilisée par la formation à trois reprises. Les décisions de la formation sont susceptibles de recours devant le Conseil constitutionnel, qui a rendu quatre décisions à ce titre. Pour certaines affaires, la formation et le Conseil ont sollicité le ministère de l'intérieur (afin, par exemple, de vérifier auprès de l'Insee l'inscription d'un électeur sur les listes électorales) et ont eu recours à des rapporteurs-adjoints choisis parmi les maîtres des requêtes du Conseil d'État et les conseillers référendaires à la Cour des comptes, comme le permet l'article 45-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. * Au total, le Conseil constitutionnel a reçu 4 243 réclamations d'électeurs, qui ont été traitées de la façon suivante. - En premier lieu, 52 réclamations ont été examinées par la formation d'examen des réclamations et ont donné lieu, du fait de jonctions, à 47 décisions[15]. À quatre reprises, la formation a constaté que c'est à tort que des soutiens n'avaient pu être enregistrés sur le site internet au motif que leurs auteurs n'auraient pas eu la qualité d'électeur et a donc ordonné l'ajout de leur nom à la liste des soutiens. Les autres décisions rendues par la formation ont conclu au rejet des réclamations. En particulier, la formation a rejeté les réclamations de ressortissants d'autres États membres de l'Union européenne qui se plaignaient de ne pas pouvoir apporter leur soutien à la proposition de loi alors que, résidant en France, ils peuvent participer aux élections municipales et européennes. Cette circonstance ne permettait cependant pas de les considérer comme des électeurs inscrits sur les listes électorales, au sens de l'article 11 de la Constitution et de l'article 5 de la loi organique du 6 décembre 2013. Cette interprétation ressortait d'ailleurs des travaux préparatoires de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 et de ceux des dispositions organiques prises pour sa mise en œuvre, selon lesquels l'électorat susceptible de soutenir une telle proposition de loi devait être le même que celui appelé à s'exprimer à l'occasion de l'éventuel référendum portant sur cette proposition. La formation a également fait application du troisième alinéa de l'article 5 de la loi organique du 6 décembre 2013, selon lequel un soutien ne peut être retiré. Alors que certains électeurs avaient réclamé de pouvoir retirer leur soutien par crainte que la publication de leur nom puisse leur nuire, la formation n'a pu que répondre que cette publicité était prévue par la loi organique (voir le point 2.c. ci-dessus) et que d'éventuels usages abusifs des noms figurant sur la liste publique pouvaient être sanctionnés pénalement[16]. Par ailleurs, certains réclamants demandaient le retrait de leur nom de la liste en faisant valoir que le soutien déposé en leur nom avait en réalité été frauduleusement apporté par un tiers. Toutefois, en l'absence de toute précision à l'appui de telles allégations et après un supplément d'instruction pour l'un des cas, la formation n'a reconnu l'existence d'aucune des usurpations d'identité alléguées[17]. - En deuxième lieu, le Conseil constitutionnel a rendu trois décisions sur renvoi de la formation d'examen des réclamations[18] et rejeté quatre recours contre des décisions de la formation[19]. En particulier, dans sa décision n° 2019-1-1 RIP du 10 septembre 2019, le Conseil, saisi sur renvoi de la formation, a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur une réclamation demandant d'enjoindre au ministre de l'intérieur d'informer régulièrement les électeurs du nombre des soutiens obtenus par la proposition de loi, dès lors que le Conseil avait d'ores et déjà décidé de rendre publique cette information tous les quinze jours (voir le point 4.a. ci-dessus)[20]. Dans sa décision n° 2019-1-2 RIP du 15 octobre 2019, également saisi sur renvoi de la formation, le Conseil a rejeté une réclamation lui demandant d'adopter des recommandations afin d'améliorer l'information des électeurs sur l'opération de recueil des soutiens. Il a jugé que le principe de pluralisme des courants d'idées et d'opinions n'impliquait pas, par lui-même, que des mesures soient nécessairement prises, notamment par le Gouvernement, pour assurer l'information des électeurs sur l'existence, les modalités et les enjeux d'une opération de recueil des soutiens à une proposition de loi au titre du troisième alinéa de l'article 11 de la Constitution ou pour organiser la communication audiovisuelle des opinions en faveur ou en défaveur de ce soutien. Ainsi, « il revient aux sociétés de l'audiovisuel, public comme privé, de définir elles-mêmes, dans le respect de la loi du 30 septembre 1986 et sous le contrôle du Conseil supérieur de l'audiovisuel, les modalités d'information des citoyens sur le recueil des soutiens à la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris »[21] . - En dernier lieu, avec l'assentiment de la formation d'examen des réclamations, l'ensemble des autres réclamations, au nombre de 4 188, ont fait l'objet d'un examen administratif. Celui-ci a pris la forme, dans de très rares cas, d'un classement sans suite et, dans la plupart des cas, d'une réponse du greffe du Conseil constitutionnel par courrier électronique. Une grande partie de ces réponses (environ 60 %) a simplement consisté à constater que la réclamation n'avait plus d'objet, son auteur ayant entre-temps réussi à apporter son soutien à la proposition de loi. Les autres réponses ont, pour l'essentiel, visé à résoudre des difficultés d'identification des électeurs par le REU (voir le point 2.b. ci-dessus), des problèmes informatiques (accessibilité et maniabilité du site internet du ministère de l'intérieur, dysfonctionnements liés au navigateur…) ou des difficultés de compréhension par les électeurs de la procédure de référendum d'initiative partagée. D'autres réclamations n'avaient pas d'autre objet que de manifester le mécontentement de citoyens à l'égard des modalités de recueil des soutiens ou, d'une manière plus générale, à propos de la communication publique relative à la proposition de loi. c. - Des évolutions nécessaires Le contenu des réclamations reçues par le Conseil constitutionnel et le décalage entre leur nombre et celui des décisions rendues par la formation d'examen des réclamations et par le Conseil (seules 55 réclamations sur 4 243, soit 1,3 %, ont fait l'objet d'une telle décision) témoignent de l'inadaptation du dispositif actuel. Le greffe du Conseil a été contraint de réaliser un important travail de tri des réclamations et d'apporter lui-même des réponses à toutes les réclamations qui, faute de présenter un caractère juridique, ne pouvaient être soumises à la formation ad hoc et relevaient davantage d'une mission d'assistance aux utilisateurs du site internet ou d'information publique sur la procédure de référendum d'initiative partagée. Ce constat appelle des évolutions dans les modalités de recueil des soutiens. Celles-ci peuvent être de plus ou moins grande ampleur, selon qu'elles s'inscrivent dans le cadre législatif existant ou dans un cadre modifié. À législation organique inchangée, il conviendrait à tout le moins, afin de limiter le nombre de réclamations adressées directement au Conseil constitutionnel, de prévoir, sur le site internet de recueil des soutiens, un dispositif administratif permettant aux citoyens de poser des questions sur la procédure ou les enjeux de la consultation et de faire état de difficultés rencontrées lors du dépôt du soutien. En effet, le site actuel n'offre d'autre choix à l'électeur que de former une « réclamation » - qui n'en a souvent que le nom - auprès du Conseil constitutionnel. Ce dispositif pourrait également, en lien avec l'Insee, offrir à l'électeur la possibilité de vérifier sous quel état civil il est inscrit au REU. Ces fonctionnalités supplémentaires permettraient de réduire le nombre des saisines adressées au Conseil constitutionnel qui, en réalité, ne relèvent pas de sa compétence et, surtout, favoriseraient une résolution rapide des problèmes techniques rencontrés par les citoyens. Des évolutions plus profondes mériteraient cependant d'être envisagées, dans le cadre d'une réflexion sur l'adaptation de la loi organique prise en application de l'article 11 de la Constitution. Compte tenu de la nature d'un grand nombre de réclamations, qui nécessitent moins de statuer sur des irrégularités alléguées que de procéder à de simples vérifications administratives (telles que l'inscription de l'électeur sur les listes électorales), le législateur organique pourrait prévoir que la recevabilité d'une réclamation est subordonnée au rejet d'une contestation préalable auprès d'une commission administrative indépendante. Le Conseil constitutionnel pourrait être saisi des décisions prises par cette commission, sur lesquelles il pourrait décider de se prononcer, selon les cas, soit immédiatement, soit au moment où il statue sur le nombre de soutiens obtenus à l'issue de la période de recueil. Afin de préserver la possibilité, pour le Conseil constitutionnel, de trancher certaines questions portant sur l'organisation générale des opérations de recueil, le législateur organique pourrait soit limiter la compétence de la commission à l'examen des seules réclamations relatives à un soutien déterminé, soit permettre à cette commission de saisir le Conseil afin de lui soumettre directement certaines réclamations soulevant des questions de principe. De telles modifications ne remettraient pas en cause la mission générale de contrôle des opérations de recueil des soutiens par le Conseil constitutionnel, mais lui permettraient au contraire de se consacrer aux seules difficultés juridiques soulevées par ces opérations et, ainsi, de se concentrer sur son rôle de garant de l'exercice démocratique pendant toute la procédure. 5. - Les autres réflexions et évolutions possibles Cette première expérience de mise en œuvre de la procédure de référendum d'initiative partagée a fait apparaître plusieurs incertitudes et suscité certaines interrogations qui méritent d'être évoquées ici même s'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel de les trancher. Si la plupart de ces difficultés ont pu, en l'espèce, trouver une réponse dans le cadre juridique existant, il serait utile, en vue de nouveaux usages de cette procédure et a fortiori en cas d'extension de celle-ci[22], qu'une réflexion soit menée sur certaines évolutions possibles au regard des questions qui ont été soulevées. En premier lieu, la procédure reste dissuasive et peu lisible pour des citoyens susceptibles de soutenir une proposition de loi dès lors que le nombre de soutiens à atteindre est très élevé (environ 4,7 millions) et que, même dans le cas où ce nombre serait atteint, la tenue d'un référendum n'est qu'hypothétique (un examen du texte par les deux assemblées suffisant à mettre un terme à la procédure). En deuxième lieu, la question de l'articulation entre l'initiative parlementaire faisant l'objet de la mise en œuvre de la procédure, d'une part, et d'éventuels travaux législatifs ayant le même objet, d'autre part, pourrait être redéfinie dans le sens d'une plus grande lisibilité[23] . En troisième lieu, il n'existe aucune disposition relative à l'organisation d'un débat public ou d'une campagne d'information audiovisuelle sur une proposition de loi déposée en application de l'article 11 de la Constitution, ce qui a pu susciter insatisfactions et incompréhensions. Une réflexion sur l'intérêt de définir un dispositif d'information du public pourrait en conséquence être utilement menée. En dernier lieu, les textes en vigueur sont peu diserts sur le rôle des partis politiques dans les opérations de recueil des soutiens. Les seules dispositions existantes sont relatives aux dons et aux prêts de personnes physiques aux partis politiques en vue de financer des actions tendant à favoriser ou défavoriser ce recueil[24]. La question du rôle des partis politiques pourrait donc, elle aussi, faire l'objet d'une réflexion, notamment quant à l'opportunité de mettre en place un financement public de telles actions ou à la nécessité d'encadrer certaines pratiques - telles que celle consistant, dans l'espace public, à proposer aux électeurs d'utiliser des terminaux mis à leur disposition par les partis pour recueillir leur soutien. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 juin 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 18 juin 2020 . [1] Décision n° 2019-1 RIP du 9 mai 2019, Proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris. [2] Décret n° 2019-572 du 11 juin 2019 portant ouverture de la période de recueil des soutiens apportés à la proposition de loi n° 1867 présentée en application de l'article 11 de la Constitution visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris présentée en application de l'article 11 de la Constitution. [3] Décision n° 2019-1-8 RIP du 26 mars 2020, Déclaration du 26 mars 2020 relative au nombre de soutiens obtenus par la proposition de loi visant à affirmer le caractère de service public national de l'exploitation des aérodromes de Paris. [4] Décret n° 2014-1488 du 11 décembre 2014 relatif au traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Soutien d'une proposition de loi au titre du troisième alinéa de l'article 11 de la Constitution ». [5] Vérification prévue par l'article 2-1 du décret du 11 décembre 2014, introduit par le décret n° 2019-578 du 12 juin 2019 modifiant le décret n° 2014-1488 du 11 décembre 2014 relatif au traitement automatisé de données à caractère personnel dénommé « Soutien d'une proposition de loi au titre du troisième alinéa de l'article 11 de la Constitution ». [6] Le REU est, en effet, construit à partir de l'état civil tel qu'il figure dans le répertoire national d'identification des personnes physiques de l'Insee. [7] Dont le principe même n'est pas en cause : la formation d'examen des réclamations a considéré que ces dispositifs techniques, dits « anti-robot », « visent à prévenir les intrusions sur le site internet et l'utilisation frauduleuse des données qu'il contient » et qu'ils « n'interdisent ni la vérification, par chacun, de la présence ou de l'absence de son propre nom sur cette liste, ni la vérification, par les tiers, que n'y figure le nom d'aucune personne qui n'aurait pas la qualité d'électeur » (décision n° 2019-1-34 FER du 12 décembre 2019, M. David L.). [8] La Nouvelle-Calédonie connaît trois listes électorales distinctes : la liste électorale générale pour les scrutins nationaux et municipaux ; la liste électorale spéciale pour les élections des membres des assemblées de province et du congrès de la Nouvelle-Calédonie ; la liste électorale spéciale pour la consultation sur l'accession de la Nouvelle-Calédonie à la pleine souveraineté prévue par l'article 77 de la Constitution. Les fichiers d'électeurs correspondants sont gérés par l'Institut de la statistique et des études économiques de la Nouvelle-Calédonie (articles 189 et 219 de la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie). [9] « FranceConnect » est un téléservice créé par la direction interministérielle du numérique et du système d'information et de communication de l'État permettant aux internautes de s'identifier et de s'authentifier auprès de différents services en ligne d'organismes publics en utilisant une identité numérique déjà vérifiée sur un autre service (par exemple sur impots.gouv.fr ou ameli.fr). [10] Décision n° 2013-681 DC du 5 décembre 2013, Loi organique portant application de l'article 11 de la Constitution, cons. 28. [11] Ibidem. [12] Voir sur ce point la décision du Conseil constitutionnel n° 2019-1-6 RIP du 12 mars 2020, M. David L., paragr. 3. [13] Cf. décision n° 2019-1-1 RIP du 10 septembre 2019, M. Paul C, paragr. 3. [14] Troisième alinéa de l'article 45-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. Cette formation est composée de M. Jean Massot, président de section honoraire au Conseil d'État, président de la formation, de Mme Edwige Belliard, conseillère d'État, et de M. Michel Arnould, doyen honoraire de la chambre criminelle de la Cour de cassation. [15] Décisions nos 2019-1-1 FER à 2019-1-17 FER du 27 septembre 2019, nos 2019-1-18 FER à 2019-1-33 FER du 24 octobre 2019, nos 2019-1-34 FER à 2019-1-43 FER du 12 décembre 2019 et nos 2019-1-44 FER à 2019-1-47 FER du 23 janvier 2020. Ces décisions ne sont pas publiques, mais seulement notifiées au réclamant. [16] Notamment par l'article L. 558-42 du code électoral, qui punit de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 euros d'amende le fait de reproduire des données collectées, dans le cadre de la procédure de recueil des soutiens, à d'autres fins que celles de vérification et de contrôle. [17] Ce qu'a confirmé le Conseil constitutionnel, dans ce dernier cas, par sa décision n° 2019-1-4 RIP du 12 mars 2020, M. Nicolas G. [18] Décisions nos 2019-1-1 RIP précitée, 2019-1-2 RIP du 15 octobre 2019, M. Christian S. et autres et 2019-1-7 RIP du 12 mars 2020, M. Gilbert B. Ces décisions ont été notifiées au réclamant et publiées sur le site internet du Conseil constitutionnel. [19] Décisions du 12 mars 2020 nos 2019-1-3 RIP, M. Frédéric L., 2019-1-4 RIP précitée, 2019-1-5 RIP, M. David L. et 2019-1-6 RIP précitée. Ces décisions ont été notifiées à l'auteur du recours et publiées sur le site internet du Conseil constitutionnel. [20] Décision n° 2019-1-1 RIP précitée, paragr. 3. [21] Décision n° 2019-1-2 RIP précitée, paragr. 5. [22] Comme l'ont proposé le projet de loi constitutionnelle et le projet de loi organique pour un renouveau de la vie démocratique déposés le 29 août 2019 à l'Assemblée nationale (nos 2203 et 2204). [23] Décision n° 2019-1 RIP du 9 mai 2019. [24] Article L. 558-37 du code électoral.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 14 mai 2020 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêts nos 868, 867 et 869 du 13 mai 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, de trois questions prioritaires de constitutionnalité. Ces questions ont été respectivement posées pour MM. Oussman G. et Mohamed T. par la SCP Célice, Texidor, Perier, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, et pour M. Toufik B. par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elles ont été enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous les nos 2020-846 QPC, 2020-847 QPC et 2020-848 QPC. Elles sont relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit « des dispositions de l'alinéa 4 de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique qui incriminent la violation d'interdictions ou obligations édictées en application du 2° de l'article L. 3131-15 du même code ». Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations en intervention présentées pour M. Malek M. par Me Rosanna Lendom, avocate au barreau de Grasse, enregistrées le 22 mai 2020 ; - les observations en intervention présentées pour M. Yvan A. par Me Cloé Fonteix, avocate au barreau de Nice, enregistrées le 26 mai 2020 ; - les observations présentées pour M. Oussman G. par la SCP Célice, Texidor, Périer, enregistrées le 28 mai 2020 ; - les observations présentées pour M. Mohamed T. par la SCP Célice, Texidor, Périer, enregistrées le même jour ; - les observations présentées pour M. Toufik B. par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour la ligue des droits de l'homme par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le même jour ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour M. Toufik B. par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le 5 juin 2020 ; - les secondes observations en intervention présentées pour M. Yvan A. par Me Fonteix, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Bertrand Perier, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, et Me Aurélien Bourdier, avocat au barreau de Poitiers, pour M. Oussman G., Me Raphaël Kempf, avocat au barreau de Paris, pour M. Mohamed T., Me Antoine Ory, avocat au barreau de Paris, pour M. Toufik B., Me Lendom pour M. Malek M., Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la ligue des droits de l'homme, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 17 juin 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Il y a lieu de joindre les trois questions prioritaires de constitutionnalité pour y statuer par une seule décision. 2. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi du quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique dans sa rédaction résultant de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus. 3. Le troisième alinéa de cet article L. 3136-1 punit de peines contraventionnelles la violation des interdictions ou obligations édictées en application des articles L. 3131-1 et L. 3131-15 à L. 3131-17 du code de la santé publique parmi lesquelles figure, au 2° de l'article L. 3131-15, l'interdiction de sortir de son domicile sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux ou de santé. Le quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du même code, dans la rédaction mentionnée ci-dessus, prévoit :« Si les violations prévues au troisième alinéa du présent article sont verbalisées à plus de trois reprises dans un délai de trente jours, les faits sont punis de six mois d'emprisonnement et de 3 750 € d'amende ainsi que de la peine complémentaire de travail d'intérêt général, selon les modalités prévues à l'article 131-8 du code pénal et selon les conditions prévues aux articles 131-22 à 131-24 du même code, et de la peine complémentaire de suspension, pour une durée de trois ans au plus, du permis de conduire lorsque l'infraction a été commise à l'aide d'un véhicule ». 4. En premier lieu, les requérants estiment que ces dispositions méconnaîtraient le principe de légalité des délits et des peines. Ils font valoir que le législateur aurait abandonné au pouvoir réglementaire la définition des éléments constitutifs du délit qu'elles répriment dès lors qu'il a laissé à ce dernier la définition des cas dans lesquels une personne peut sortir de son domicile et les conditions dans lesquelles le respect de cette interdiction est contrôlé. Ils soutiennent également que la notion de verbalisation serait équivoque et que les termes de « besoins familiaux ou de santé » seraient imprécis. Deux requérants font valoir en outre que l'imprécision des dispositions permettrait qu'une même sortie non autorisée puisse faire l'objet de plusieurs verbalisations. 5. En deuxième lieu, les requérants reprochent à ces dispositions de méconnaître le principe de la présomption d'innocence, les droits de la défense et le droit à un recours juridictionnel effectif. Cette méconnaissance résulterait de la possibilité de caractériser le délit alors que les contraventions des trois premières violations n'auraient pas encore été soumises à un juge. De plus, ils soutiennent que le délit serait constitué par la simple constatation de plus de trois verbalisations et présenterait, ce faisant, un caractère automatique. 6. En dernier lieu, un requérant fait valoir que, en prévoyant une peine de six mois d'emprisonnement, ces dispositions méconnaîtraient le principe de proportionnalité des peines. D'une part, la peine choisie pour réprimer les comportements incriminés serait manifestement disproportionnée. D'autre part, le délit réprimerait des violations qui ont déjà été punies de contraventions au mépris du principe non bis in idem. 7. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le renvoi opéré, au sein du quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique, au 2° de l'article L. 3131-15 du même code. 8. Les parties intervenantes développent les mêmes griefs que les requérants. - Sur le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines : 9. Selon l'article 8 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Selon l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant … la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ». Le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration de 1789, l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire. 10. Le 2° de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique permet au Premier ministre, dans les circonscriptions territoriales où l'état d'urgence sanitaire est déclaré et pour garantir la santé publique, d'interdire aux personnes de sortir de leur domicile sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux et de santé. Les dispositions contestées répriment la violation de cette interdiction lorsqu'elle est commise alors que, dans les trente jours précédents, trois autres violations de la même interdiction ont déjà été verbalisées. La violation de cette interdiction est alors punie de six mois d'emprisonnement et de 3 750 euros d'amende. 11. En premier lieu, ni la notion de verbalisation qui désigne le fait de dresser un procès-verbal d'infraction ni la référence aux « déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux et de santé » ne présentent de caractère imprécis ou équivoque. Par ailleurs, en retenant comme élément constitutif du délit le fait que la personne ait été précédemment verbalisée « à plus de trois reprises », le législateur n'a pas adopté des dispositions imprécises. En particulier, ces dispositions ne permettent pas qu'une même sortie, qui constitue une seule violation de l'interdiction de sortir, puisse être verbalisée à plusieurs reprises. 12. En second lieu, d'une part, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a réprimé la méconnaissance de l'interdiction de sortir qui peut être mise en œuvre lorsqu'est déclaré l'état d'urgence sanitaire. Il a défini les éléments essentiels de cette interdiction. Il y a ainsi apporté deux exceptions pour les déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux et de santé. S'il ressort des travaux préparatoires que le législateur n'a pas exclu que le pouvoir réglementaire prévoie d'autres exceptions, celles-ci ne peuvent, conformément au dernier alinéa de l'article L. 3131-15, que viser à garantir que cette interdiction soit strictement proportionnée aux risques sanitaires encourus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu. D'autre part, le législateur a prévu que le délit n'est constitué que lorsque la violation de l'interdiction de sortir est commise alors que, dans les trente jours précédents, trois autres violations de la même interdiction ont déjà été verbalisées. Ainsi, le législateur a suffisamment déterminé le champ de l'obligation et les conditions dans lesquelles sa méconnaissance constitue un délit. 13. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines doit être écarté. - Sur les autres griefs : 14. En premier lieu, le tribunal correctionnel saisi de poursuites d'une violation de l'interdiction de sortir apprécie les éléments constitutifs de l'infraction et notamment la régularité et le bien-fondé des précédentes verbalisations. Les dispositions contestées, qui n'instaurent aucune présomption de culpabilité, ne méconnaissent ni la présomption d'innocence ni les droits de la défense. 15. En second lieu, d'une part, en sanctionnant la quatrième violation de l'interdiction de sortir, les dispositions contestées punissent des faits distincts de ceux réprimés lors des trois premières violations. D'autre part, l'incrimination a pour objet d'assurer le respect de mesures prises pour garantir la santé publique durant l'état d'urgence sanitaire qui peut être déclaré en cas de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population. Compte tenu des risques induits durant une telle période par le comportement réprimé, les peines instituées ne sont pas manifestement disproportionnées. Dès lors, le grief tiré de la méconnaissance du principe de proportionnalité des peines doit être écarté. 16. Les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le droit à un recours juridictionnel effectif, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Le renvoi opéré, au sein du quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique dans sa rédaction résultant de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, au 2° de l'article L. 3131-15 du même code, est conforme à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 juin 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 26 juin 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 25 mars 2020 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 782 du 24 mars 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Théo S. par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-845 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit « des dispositions combinées » de l'article 321-1 du code pénal et de l'article 421-2-5 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code pénal ; - le code de procédure pénale ; - le code de la sécurité intérieure ; - l'ordonnance n° 2000-916 du 19 septembre 2000 portant adaptation de la valeur en euros de certains montants exprimés en francs dans les textes législatifs ; - la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique ; - la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme ; - les décisions du Conseil constitutionnel nos 2016-611 QPC du 10 février 2017 et 2017-682 QPC du 15 décembre 2017 ; - la décision du Conseil constitutionnel n° 2018-706 QPC du 18 mai 2018 ; - l'arrêt de la Cour de cassation du 7 janvier 2020 (chambre criminelle, n° 19-80.136) ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour le requérant par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le 23 avril 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour la ligue des droits de l'homme par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour le requérant par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le 11 mai 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le requérant et la partie intervenante, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 2 juin 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi de l'article 321-1 du code pénal dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 19 septembre 2000 mentionnée ci-dessus. 2. L'article 321-1 du code pénal, dans cette rédaction, prévoit : « Le recel est le fait de dissimuler, de détenir ou de transmettre une chose, ou de faire office d'intermédiaire afin de la transmettre, en sachant que cette chose provient d'un crime ou d'un délit. « Constitue également un recel le fait, en connaissance de cause, de bénéficier, par tout moyen, du produit d'un crime ou d'un délit. « Le recel est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende ». 3. L'article 421-2-5 du même code, dans sa rédaction résultant de la loi du 13 novembre 2014 mentionnée ci-dessus, prévoit : « Le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l'apologie de ces actes est puni de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende. « Les peines sont portées à sept ans d'emprisonnement et à 100 000 € d'amende lorsque les faits ont été commis en utilisant un service de communication au public en ligne. « Lorsque les faits sont commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle ou de la communication au public en ligne, les dispositions particulières des lois qui régissent ces matières sont applicables en ce qui concerne la détermination des personnes responsables ». 4. Le requérant et l'association intervenante soutiennent que ces dispositions qui, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, répriment le recel d'apologie d'actes de terrorisme méconnaissent la liberté d'expression et de communication et les principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines. Selon eux, dans la mesure où il n'y aurait pas de différence substantielle et fondamentale entre la consultation d'un site internet terroriste et le téléchargement ou la détention sur un support informatique du contenu de tels sites, rien ne distinguerait ce délit de recel de celui de consultation habituelle de sites internet terroristes jugé contraire à la liberté de communication dans les décisions du 10 février 2017 et du 15 décembre 2017 mentionnées ci-dessus. Au surplus, le requérant et l'association intervenante dénoncent le fait que la répression du délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme serait aggravée par rapport à celle du délit de consultation habituelle de sites internet terroristes, puisqu'aucune cause exonératoire n'est prévue, que l'infraction n'a pas à être commise de manière habituelle et qu'elle se fonde sur la seule détention matérielle du message en cause, sans exiger qu'il ait été consulté par l'intéressé. 5. En posant une question prioritaire de constitutionnalité, tout justiciable a le droit de contester la constitutionnalité de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante confère à la disposition législative contestée. 6. Dans sa décision du 7 janvier 2020 mentionnée ci-dessus et dans sa décision du 24 mars 2020 mentionnée ci-dessus, la Cour de cassation a jugé qu'entre dans les prévisions des articles 321-1 et 421-2-5 du code pénal le fait de détenir, en toute connaissance de cause, des fichiers ou des documents caractérisant l'apologie d'actes de terrorisme, lorsque cette détention s'accompagne d'une adhésion à l'idéologie exprimée dans ces fichiers ou documents. Elle a ainsi reconnu l'existence d'un délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme. 7. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « ou de faire publiquement l'apologie de ces actes » figurant au premier alinéa de l'article 421-2-5 du code pénal. - Sur la recevabilité : 8. Selon les dispositions combinées du troisième alinéa de l'article 23-2 et du troisième alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qu'il a déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une de ses décisions, sauf changement des circonstances. 9. Dans sa décision du 18 mai 2018 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné les mots « ou de faire publiquement l'apologie de ces actes » figurant au premier alinéa de l'article 421-2-5 du code pénal, dans la même rédaction que celle contestée par le requérant. Il a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif de cette décision. 10. Toutefois, l'interprétation de ces dispositions résultant des décisions mentionnées au paragraphe 6, intervenue depuis cette déclaration de conformité, constitue un changement des circonstances justifiant le réexamen des dispositions contestées. - Sur le fond : 11. Aux termes de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen 1789 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». 12. Aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant ... les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ». Sur ce fondement, il est loisible au législateur d'édicter des règles de nature à concilier la poursuite de l'objectif de lutte contre l'incitation et la provocation au terrorisme, qui participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public et de prévention des infractions, avec l'exercice du droit de libre communication et de la liberté de parler, écrire et imprimer. Toutefois, la liberté d'expression et de communication est d'autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés. Les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi. 13. Le délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme punit le fait de détenir des fichiers ou des documents caractérisant une telle apologie, en toute connaissance de cause et en adhésion avec l'idéologie ainsi exprimée, de cinq ans d'emprisonnement et de 375 000 euros d'amende. Conformément à l'article 321-4 du code pénal, cette peine est portée à sept ans d'emprisonnement et 100 000 euros d'amende lorsque le délit d'apologie qui fait l'objet du recel a été commis sous la circonstance aggravante du recours à un service de communication au public en ligne. En vertu de l'article 321-2 du même code, la peine encourue s'élève à dix ans d'emprisonnement et 750 000 euros d'amende lorsque le recel est commis de façon habituelle ou en bande organisée. 14. Ce délit a pour objet, d'une part, de prévenir la diffusion publique d'idées et de propos dangereux en lien avec le terrorisme et, d'autre part, de prévenir l'endoctrinement d'individus susceptibles de réitérer de tels propos ou de commettre des actes de terrorisme. 15. En premier lieu, comme le Conseil constitutionnel l'a relevé dans ses décisions des 10 février et 15 décembre 2017, la législation comprend un ensemble d'infractions pénales autres que l'incrimination contestée et de dispositions procédurales pénales spécifiques ayant pour objet de prévenir la commission d'actes de terrorisme. 16. Ainsi, l'article 421-2-1 du code pénal réprime le fait de participer à un groupement formé ou à une entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'un acte de terrorisme. L'article 421-2-4 du même code sanctionne le fait d'adresser à une personne des offres ou des promesses, de lui proposer des dons, présents ou avantages quelconques, de la menacer ou d'exercer sur elle des pressions afin qu'elle participe à un groupement ou une entente prévus à l'article 421-2-1 ou qu'elle commette un acte de terrorisme. L'article 421-2-5, indépendamment de sa combinaison avec l'infraction de recel, sanctionne le fait de provoquer directement à des actes de terrorisme ou de faire publiquement l'apologie de ces actes. Enfin, l'article 421-2-6 réprime le fait de préparer la commission d'un acte de terrorisme dès lors que cette préparation est intentionnellement en relation avec une entreprise individuelle ayant pour but de troubler gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur et qu'elle est caractérisée par le fait de détenir, de se procurer, de tenter de se procurer ou de fabriquer des objets ou des substances de nature à créer un danger pour autrui ainsi que par d'autres agissements tels que la consultation habituelle d'un ou de plusieurs services de communication au public en ligne provoquant directement à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie ou par la détention des documents présentant les mêmes provocation ou apologie. 17. Dans le cadre des procédures d'enquête relatives à ces infractions, les magistrats et enquêteurs disposent de pouvoirs étendus pour procéder à des mesures d'interception de correspondances émises par voie de communication électronique, de recueil des données techniques de connexion, de sonorisation, de fixation d'images et de captation de données informatiques. Par ailleurs, sauf pour les faits réprimés par l'article 421-2-5 du code pénal, des dispositions procédurales spécifiques en matière de garde à vue et de perquisitions sont applicables. 18. Par ailleurs, comme le Conseil l'a également relevé dans ces mêmes décisions, le législateur a conféré à l'autorité administrative de nombreux pouvoirs afin de prévenir la commission d'actes de terrorisme. 19. Ainsi, en application du 4° de l'article L. 811-3 du code de la sécurité intérieure, les services spécialisés de renseignement peuvent recourir aux techniques mentionnées au titre V du livre VIII de ce même code pour le recueil des renseignements relatifs à la prévention du terrorisme. Ces services peuvent accéder à des données de connexion, procéder à des interceptions de sécurité, sonoriser des lieux et véhicules et capter des images et données informatiques. 20. En application de l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 mentionnée ci-dessus, lorsque les nécessités de la lutte contre la provocation à des actes terroristes ou l'apologie de tels actes relevant de l'article 421-2-5 du code pénal le justifient, l'autorité administrative peut demander à tout éditeur ou hébergeur d'un service de communication au public en ligne de retirer les contenus qui contreviennent à cet article. Selon l'article 706-23 du code de procédure pénale, l'arrêt d'un service de communication au public en ligne peut également être prononcé par le juge des référés pour les faits prévus à l'article 421-2-5 du code pénal lorsqu'ils constituent un trouble manifestement illicite. L'article 421-2-5-1 du même code réprime le fait d'extraire, de reproduire et de transmettre intentionnellement des données faisant l'apologie publique d'actes de terrorisme ou provoquant directement à ces actes afin d'entraver, en connaissance de cause, l'efficacité des procédures précitées. 21. Enfin, conformément au chapitre VIII du titre II du livre II du code de la sécurité intérieure, l'autorité administrative peut, aux fins de prévenir la commission d'actes de terrorisme, prescrire des mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance à toute personne à l'égard de laquelle il existe des raisons sérieuses de penser que son comportement constitue une menace d'une particulière gravité pour la sécurité et l'ordre publics et qui soutient, diffuse, lorsque cette diffusion s'accompagne d'une manifestation d'adhésion à l'idéologie exprimée, ou adhère à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme ou faisant l'apologie de tels actes. 22. Dès lors, au regard de l'exigence de nécessité de l'atteinte portée à la liberté d'expression et de communication, les autorités administrative et judiciaire disposent, indépendamment du délit contesté, de nombreuses prérogatives, non seulement pour lutter contre la diffusion publique d'apologies d'actes de terrorisme et réprimer leurs auteurs, mais aussi pour surveiller une personne consultant ou collectant ces messages et pour l'interpeller et la sanctionner lorsque cette consultation ou cette collection s'accompagnent d'un comportement révélant une intention terroriste, avant même que ce projet soit entré dans sa phase d'exécution. 23. En second lieu, s'agissant des exigences d'adaptation et de proportionnalité requises en matière d'atteinte à la liberté d'expression et de communication, d'une part, si l'apologie publique d'actes de terrorisme favorise la large diffusion d'idées et de propos dangereux, la détention des fichiers ou documents apologétiques n'y participe qu'à la condition de donner lieu ensuite à une nouvelle diffusion publique. 24. D'autre part, l'incrimination de recel d'apologie d'actes de terrorisme n'exige pas que l'auteur du recel ait la volonté de commettre des actes terroristes ou d'en faire l'apologie. Si, conformément à l'interprétation qu'en a retenue la Cour de cassation, la poursuite de cette infraction suppose d'établir l'adhésion du receleur à l'idéologie exprimée dans les fichiers ou documents apologétiques, ni cette adhésion ni la détention matérielle desdits fichiers ou documents ne sont susceptibles d'établir, à elles seules, l'existence d'une volonté de commettre des actes terroristes ou d'en faire l'apologie. 25. Le délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme réprime donc d'une peine qui peut s'élever, selon les cas, à cinq, sept ou dix ans d'emprisonnement le seul fait de détenir des fichiers ou des documents faisant l'apologie d'actes de terrorisme sans que soit retenue l'intention terroriste ou apologétique du receleur comme élément constitutif de l'infraction. 26. Il résulte de tout ce qui précède que le délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme porte à la liberté d'expression et de communication une atteinte qui n'est pas nécessaire, adaptée et proportionnée. Les mots « ou de faire publiquement l'apologie de ces actes » figurant au premier alinéa de l'article 421-2-5 du code pénal ne sauraient donc, sans méconnaître cette liberté, être interprétés comme réprimant un tel délit. 27. Sous cette réserve, et pour les mêmes motifs que ceux énoncés dans la décision du Conseil constitutionnel du 18 mai 2018, les dispositions contestées ne méconnaissent ni la liberté d'expression et de communication, ni les principes de légalité, de nécessité et de proportionnalité des délits et des peines. Ces dispositions, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent, sous cette même réserve, être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Sous la réserve énoncée au paragraphe 26, les mots « ou de faire publiquement l'apologie de ces actes » figurant au premier alinéa de l'article 421-2-5 du code pénal, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 juin 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 19 juin 2020 .
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet, sous le n° 2020-801 DC, le 18 mai 2020, par MM. Bruno RETAILLEAU, Pascal ALLIZARD, Serge BABARY, Philippe BAS, Jérôme BASCHER, Mmes Martine BERTHET, Anne-Marie BERTRAND, MM. Jean BIZET, Bernard BONNE , Gilbert BOUCHET, Yves BOULOUX, Jean-Marc BOYER, Max BRISSON, Mme Marie-Thérèse BRUGUIÈRE, MM. François CALVET, Christian CAMBON, Mme Agnès CANAYER, M. Jean-Noël CARDOUX, Mme Anne CHAIN-LARCHÉ, MM. Patrick CHAIZE, Pierre CHARON, Alain CHATILLON, Mme Marta de CIDRAC, MM. Pierre CUYPERS, Philippe DALLIER, René DANESI, Mathieu DARNAUD, Gérard DÉRIOT, Mmes Catherine DEROCHE, Chantal DESEYNE, M. Laurent DUPLOMB, Mmes Dominique ESTROSI SASSONE, Jacqueline EUSTACHE-BRINIO, MM. Bernard FOURNIER, Jordi GINESTA, Daniel GREMILLET, Jacques GROSPERRIN, Mme Pascale GRUNY, MM. Charles GUENÉ, Alain HOUPERT, Benoît HURÉ, Mme Corinne IMBERT, MM. Roger KAROUTCHI, Marc LAMÉNIE, Mme Élisabeth LAMURE, MM. Daniel LAURENT, Antoine LEFÈVRE, Dominique de LEGGE, Ronan LE GLEUT, Jean-Pierre LELEUX, Henri LEROY, Mmes Brigitte LHERBIER, Vivette LOPEZ, Viviane MALET, Marie MERCIER, M. Sébastien MEURANT, Mme Brigitte MICOULEAU, M. Albéric de MONTGOLFIER, Mme Patricia MORHET-RICHAUD, MM. Jean-Marie MORISSET, Philippe MOUILLER, Philippe NACHBAR, Mme Sylviane NOËL, MM. Claude NOUGEIN, Olivier PACCAUD, Philippe PAUL, Jackie PIERRE, Ladislas PONIATOWSKI, Mmes Sophie PRIMAS, Isabelle RAIMOND-PAVERO, M. Michel RAISON, Mme Françoise RAMOND, MM. Jean-François RAPIN, André REICHARDT, René-Paul SAVARY, Michel SAVIN, Alain SCHMITZ, Vincent SEGOUIN, Bruno SIDO, Mme Esther SITTLER, M. Jean SOL, Mme Catherine TROENDLÉ, MM. Michel VASPART, Jean-Pierre VIAL et Jean-Pierre VOGEL, ainsi que Mme Annick BILLON, M. Philippe BONNECARRÈRE, Mmes Françoise FÉRAT, Catherine FOURNIER, Françoise GATEL, Nathalie GOULET, Jocelyne GUIDEZ, M. Loïc HERVÉ, Mme Sophie JOISSAINS, MM. Laurent LAFON, Michel LAUGIER, Mme Anne-Catherine LOISIER, MM. Pascal MARTIN, Jean-Marie MIZZON, Mmes Catherine MORIN-DESAILLY, Sonia de la PROVÔTÉ, Nadia SOLLOGOUB et Dominique VÉRIEN, sénateurs. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la directive 2000/31/CE du Parlement européen et du Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des services de la société de l'information, et notamment du commerce électronique, dans le marché intérieur (« directive sur le commerce électronique ») ; - la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication ; - la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 10 juin 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet. Ils contestent certaines dispositions de ses articles 1er et 7 et ses articles 4, 5 et 8. - Sur certaines dispositions de l'article 1er : . En ce qui concerne le paragraphe I : 2. Le paragraphe I de l'article 1er de la loi déférée modifie l'article 6-1 de la loi du 21 juin 2004 mentionnée ci-dessus prévoyant que l'autorité administrative peut demander aux hébergeurs ou aux éditeurs d'un service de communication en ligne de retirer certains contenus à caractère terroriste ou pédopornographique et, en l'absence de retrait dans un délai de vingt-quatre heures, lui permet de notifier la liste des adresses des contenus incriminés aux fournisseurs d'accès à internet qui doivent alors sans délai en empêcher l'accès. Le paragraphe I de l'article 1er réduit à une heure le délai dont disposent les éditeurs et hébergeurs pour retirer les contenus notifiés par l'autorité administrative et prévoit, en cas de manquement à cette obligation, l'application d'une peine d'un an d'emprisonnement et de 250 000 euros d'amende. 3. Les sénateurs requérants font valoir que ces dispositions, adoptées en nouvelle lecture, l'auraient été en méconnaissance de l'article 45 de la Constitution. Ils reprochent ensuite à ce paragraphe, qui aurait pour objet la transposition de la directive du 8 juin 2000 mentionnée ci-dessus, d'être manifestement incompatible avec celle-ci. Ils font également valoir que l'atteinte portée à la liberté d'expression et de communication serait disproportionnée en raison de l'absence de garanties suffisantes. En outre, ils soutiennent que ces dispositions imposeraient à l'ensemble des éditeurs et hébergeurs des sujétions impossibles à satisfaire et méconnaîtraient, ce faisant, le principe d'égalité devant les charges publiques. 4. Aux termes de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». En l'état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu'à l'importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l'expression des idées et des opinions, ce droit implique la liberté d'accéder à ces services et de s'y exprimer. 5. L'article 34 de la Constitution dispose : « La loi fixe les règles concernant ... les droits civiques et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques ». Sur ce fondement, il est loisible au législateur d'édicter des règles concernant l'exercice du droit de libre communication et de la liberté de parler, d'écrire et d'imprimer. Il lui est aussi loisible, à ce titre, d'instituer des dispositions destinées à faire cesser des abus de l'exercice de la liberté d'expression et de communication qui portent atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers. Cependant, la liberté d'expression et de communication est d'autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés. Il s'ensuit que les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi. 6. La diffusion d'images pornographiques représentant des mineurs, d'une part, et la provocation à des actes de terrorisme ou l'apologie de tels actes, d'autre part, constituent des abus de la liberté d'expression et de communication qui portent gravement atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers. En imposant aux éditeurs et hébergeurs de retirer, à la demande de l'administration, les contenus que cette dernière estime contraires aux articles 227-23 et 421-2-5 du code pénal, le législateur a entendu faire cesser de tels abus. 7. Toutefois, d'une part, la détermination du caractère illicite des contenus en cause ne repose pas sur leur caractère manifeste. Elle est soumise à la seule appréciation de l'administration. D'autre part, l'engagement d'un recours contre la demande de retrait n'est pas suspensif et le délai d'une heure laissé à l'éditeur ou l'hébergeur pour retirer ou rendre inaccessible le contenu visé ne lui permet pas d'obtenir une décision du juge avant d'être contraint de le retirer. Enfin, l'hébergeur ou l'éditeur qui ne défère pas à cette demande dans ce délai peut être condamné à une peine d'emprisonnement d'un an et à 250 000 euros d'amende. 8. Dès lors, le législateur a porté à la liberté d'expression et de communication une atteinte qui n'est pas adaptée, nécessaire et proportionnée au but poursuivi. 9. Par conséquent, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, le paragraphe I de l'article 1er de la loi est contraire à la Constitution. . En ce qui concerne le paragraphe II : 10. Le paragraphe II de l'article 1er crée un article 6-2 dans la loi du 21 juin 2004 imposant à certains opérateurs de plateforme en ligne, sous peine de sanction pénale, de retirer ou de rendre inaccessibles dans un délai de vingt-quatre heures des contenus illicites en raison de leur caractère haineux ou sexuel. 11. Les sénateurs requérants reprochent tout d'abord à ce paragraphe, qui aurait pour objet la transposition de la directive du 8 juin 2000, d'être manifestement incompatible avec celle-ci. Ils soutiennent ensuite que le délit sanctionnant l'absence de retrait des contenus incriminés serait contraire à la liberté d'expression et de communication. À ce titre, ils font valoir que l'atteinte portée à cette liberté ne serait pas nécessaire dès lors qu'il existe de nombreuses dispositions législatives permettant de prévenir et de réprimer la diffusion de tels propos. Cette atteinte serait également disproportionnée dans la mesure où la brièveté du délai laissé aux opérateurs pour procéder à ce retrait, couplée à la difficulté pour eux de déterminer si des propos sont ou non manifestement illicites, les incitera à retirer tout contenu signalé comme potentiellement illicite. Les sénateurs requérants estiment également que ces dispositions méconnaîtraient le principe de légalité des délits. Selon eux, le délit créé ne serait pas défini en des termes suffisamment clairs et précis dès lors qu'il pourrait résulter d'une simple négligence de l'opérateur et que ce dernier devra se livrer à un travail de qualification juridique complexe pour identifier les propos illicites. Enfin, l'absence de retrait d'un propos haineux ou à caractère sexuel étant susceptible d'être poursuivie sous plusieurs qualifications pénales, il en résulterait une violation des principes de nécessité des peines et d'égalité devant la loi pénale. 12. En application des dispositions contestées, certains opérateurs de plateforme en ligne dont l'activité dépasse des seuils définis par décret doivent, sous peine de sanction pénale, retirer ou rendre inaccessible tout contenu qui leur est signalé dès lors que ce contenu peut manifestement relever de certaines qualifications pénales énumérées par ces dispositions. Il s'agit des infractions d'apologie à la commission de certains crimes ; de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ou à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap ou de provocation à la discrimination à l'égard de ces dernières personnes ; de contestation d'un crime contre l'humanité tels qu'ils sont définis par l'article 6 du statut du tribunal militaire international annexé à l'accord de Londres du 8 août 1945 et qui ont été commis soit par les membres d'une organisation déclarée criminelle en application de l'article 9 dudit statut, soit par une personne reconnue coupable de tels crimes par une juridiction française ou internationale ; de négation, de minoration ou de banalisation de façon outrancière de l'existence d'un crime de génocide, d'un autre crime contre l'humanité que ceux précités, d'un crime de réduction en esclavage ou d'exploitation d'une personne réduite en esclavage ou d'un crime de guerre lorsque ce crime a donné lieu à une condamnation prononcée par une juridiction française ou internationale ; d'injure commise envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ou envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou identité de genre ou de leur handicap ; de harcèlement sexuel ; de transmission d'une image ou d'une représentation d'un mineur lorsque cette image ou cette représentation présente un caractère pornographique ; de provocation directe à des actes de terrorisme ou d'apologie de ces actes ; de diffusion d'un message à caractère pornographique susceptible d'être vu ou perçu par un mineur. 13. En adoptant ces dispositions, le législateur a voulu prévenir la commission d'actes troublant gravement l'ordre public et éviter la diffusion de propos faisant l'éloge de tels actes. Il a ainsi entendu faire cesser des abus de l'exercice de la liberté d'expression qui portent atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers. 14. Toutefois, en premier lieu, l'obligation de retrait s'impose à l'opérateur dès lors qu'une personne lui a signalé un contenu illicite en précisant son identité, la localisation de ce contenu et les motifs légaux pour lesquels il est manifestement illicite. Elle n'est pas subordonnée à l'intervention préalable d'un juge ni soumise à aucune autre condition. Il appartient donc à l'opérateur d'examiner tous les contenus qui lui sont signalés, aussi nombreux soient-ils, afin de ne pas risquer d'être sanctionné pénalement. 15. En deuxième lieu, s'il appartient aux opérateurs de plateforme en ligne de ne retirer que les contenus manifestement illicites, le législateur a retenu de multiples qualifications pénales justifiant le retrait de ces contenus. En outre, son examen ne doit pas se limiter au motif indiqué dans le signalement. Il revient en conséquence à l'opérateur d'examiner les contenus signalés au regard de l'ensemble de ces infractions, alors même que les éléments constitutifs de certaines d'entre elles peuvent présenter une technicité juridique ou, s'agissant notamment de délits de presse, appeler une appréciation au regard du contexte d'énonciation ou de diffusion des contenus en cause. 16. En troisième lieu, le législateur a contraint les opérateurs de plateforme en ligne à remplir leur obligation de retrait dans un délai de vingt-quatre heures. Or, compte tenu des difficultés précitées d'appréciation du caractère manifeste de l'illicéité des contenus signalés et du risque de signalements nombreux, le cas échéant infondés, un tel délai est particulièrement bref. 17. En quatrième lieu, s'il résulte des travaux parlementaires que le législateur a entendu prévoir au dernier alinéa du paragraphe I du nouvel article 6-2 une cause exonératoire de responsabilité pour les opérateurs de plateforme en ligne, celle-ci, selon laquelle « Le caractère intentionnel de l'infraction … peut résulter de l'absence d'examen proportionné et nécessaire du contenu notifié » n'est pas rédigée en des termes permettant d'en déterminer la portée. Aucune autre cause d'exonération de responsabilité spécifique n'est prévue, tenant par exemple à une multiplicité de signalements dans un même temps. 18. En dernier lieu, le fait de ne pas respecter l'obligation de retirer ou de rendre inaccessibles des contenus manifestement illicites est puni de 250 000 euros d'amende. En outre, la sanction pénale est encourue pour chaque défaut de retrait et non en considération de leur répétition. 19. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu des difficultés d'appréciation du caractère manifestement illicite des contenus signalés dans le délai imparti, de la peine encourue dès le premier manquement et de l'absence de cause spécifique d'exonération de responsabilité, les dispositions contestées ne peuvent qu'inciter les opérateurs de plateforme en ligne à retirer les contenus qui leur sont signalés, qu'ils soient ou non manifestement illicites. Elles portent donc une atteinte à l'exercice de la liberté d'expression et de communication qui n'est pas nécessaire, adaptée et proportionnée. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, le paragraphe II de l'article 1er est contraire à la Constitution. 20. Il en va de même de l'article 3 de la loi déférée, qui complète le nouvel article 6-2 de la loi du 21 juin 2004, des mots « et à l'avant-dernier alinéa du I de l'article 6-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, » figurant au second alinéa de l'article 10 et du 1° de l'article 12, qui en sont inséparables. - Sur les articles 4, 5, 7, 8, 9 et 18 : 21. Les articles 4, 5, 7, 8, 9 et 18 définissent certaines obligations de contrôle des contenus illicites auxquelles peuvent être soumis certains opérateurs ainsi que leur régime d'entrée en vigueur. 22. Les sénateurs requérants reprochent aux articles 4, 5 et 7, qui auraient pour objet la transposition de la directive du 8 juin 2000, d'être manifestement incompatibles avec celle-ci. Par ailleurs, selon eux, la sanction prévue par l'article 7, susceptible d'être prononcée par le Conseil supérieur de l'audiovisuel à l'encontre des opérateurs manquant à leurs obligations méconnaîtrait l'article 16 de la Déclaration de 1789, faute qu'aient été prévues des garanties suffisantes au regard de son montant et en raison du risque de cumul de sanctions administratives infligées, pour des mêmes faits, dans plusieurs États membres de l'Union européenne. Enfin, l'article 8 autorisant l'administration à demander à certains opérateurs d'empêcher l'accès à des sites reprenant un contenu déjà jugé illicite serait soit entaché d'incompétence négative soit dépourvu de portée normative. Il méconnaîtrait également la liberté d'expression et de communication faute d'avoir prévu des garanties suffisantes. 23. Toutefois, sans qu'il soit besoin d'examiner ces griefs, en premier lieu, l'article 4 insère un article 6-3 dans la loi du 21 juin 2004, qui détermine la liste des obligations auxquelles sont tenus les opérateurs mentionnés aux premier et deuxième alinéas du nouvel article 6-2 de la même loi, créé par le paragraphe II de l'article 1er de la loi déférée, aux fins de lutter contre la diffusion en ligne de contenus mentionnés au même premier alinéa de cet article 6-2. L'article 5 complète cette liste. Parmi ces obligations, plusieurs sont directement liées aux conditions de mise en œuvre de l'obligation de retrait de certains contenus instituée par le paragraphe II de l'article 1er. Ce paragraphe II ayant été déclaré contraire à la Constitution, il en va de même, par voie de conséquence, des articles 4 et 5 de la loi déférée. 24. En deuxième lieu, le paragraphe I de l'article 7 insère dans la loi du 30 septembre 1986 mentionnée ci-dessus, un article 17-3 déterminant les compétences du Conseil supérieur de l'audiovisuel pour veiller ou encourager au respect des dispositions des articles 6-2 et 6-3 de la loi du 21 juin 2004, créés par le paragraphe II de l'article 1er et les articles 4 et 5 de la loi déférée. Le paragraphe II du même article 7 complète, aux mêmes fins, l'article 19 de la loi du 30 septembre 1986. Les paragraphes I et II de l'article 1er et les articles 4 et 5 ayant été déclarés contraires à la Constitution, il en va de même, par voie de conséquence, des deux premiers paragraphes de l'article 7 de la loi déférée ainsi que du reste des dispositions de cet article 7, qui en sont inséparables. Il en va de même du paragraphe II de l'article 19, qui est inséparable de l'article 7. 25. En troisième lieu, l'article 8 de la loi déférée insère dans la loi du 21 juin 2004 un article 6-4 définissant les conditions dans lesquelles l'administration peut demander à un opérateur d'empêcher l'accès à un site reprenant un contenu dont un juge a considéré qu'il relevait des infractions prévues au premier alinéa du paragraphe I de l'article 6-2 créé par le paragraphe II de l'article 1er de la loi déférée. L'intéressé est alors inscrit sur une liste tenue par l'administration. Ce paragraphe II ayant été déclaré contraire à la Constitution, il en va de même, par voie de conséquence, de l'article 8 et de l'article 9, qui, en ce qu'il régit les relations entre certains annonceurs et les opérateurs inscrits sur la liste tenue par l'administration, est inséparable de cet article 8. 26. En dernier lieu, les articles 4, 5 et 7 ayant été déclarés contraires à la Constitution, il en va de même des références à ces articles figurant à l'article 18, qui en détermine les modalités d'entrée en vigueur. - Sur la place d'autres dispositions dans la loi déférée : 27. Aux termes de la dernière phrase du premier alinéa de l'article 45 de la Constitution : « Sans préjudice de l'application des articles 40 et 41, tout amendement est recevable en première lecture dès lors qu'il présente un lien, même indirect, avec le texte déposé ou transmis ». Il appartient au Conseil constitutionnel de déclarer contraires à la Constitution les dispositions introduites en méconnaissance de cette règle de procédure. Dans ce cas, le Conseil constitutionnel ne préjuge pas de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles. 28. La loi déférée a pour origine la proposition de loi déposée le 20 mars 2019 sur le bureau de l'Assemblée nationale, première assemblée saisie. Dans cette rédaction, cette proposition comportait huit articles. Son article 1er imposait à certains opérateurs de plateforme en ligne de retirer sous vingt-quatre heures certains contenus publics manifestement illicites, sous peine de sanction par le Conseil supérieur de l'audiovisuel. Son article 2 modifiait les modalités de signalement de contenus illicites aux hébergeurs. Son article 3 imposait aux opérateurs de plateforme en ligne de mettre à disposition du public des informations sur les recours dont disposent, notamment, les victimes de contenus illicites mentionnés à l'article 1er. Son article 4 confiait au Conseil supérieur de l'audiovisuel le soin de veiller à la lutte contre la diffusion de contenus illicites sur internet. Son article 5 obligeait les opérateurs de plateforme en ligne à disposer d'un représentant légal en France et augmentait l'amende sanctionnant la méconnaissance des obligations existantes. Son article 6 conférait à l'autorité administrative un pouvoir d'injonction afin d'empêcher l'accès à des contenus dupliquant des contenus interdits par une décision judiciaire. Son article 7 prévoyait un rapport annuel au Parlement sur l'exécution de la loi et sur les moyens consacrés à la lutte contre les contenus illicites, y compris en matière d'éducation, de prévention et d'accompagnement des victimes. Son article 8 était relatif à la recevabilité financière de la proposition de loi. 29. L'article 11 de la loi déférée modifie les articles 138 du code de procédure pénale et 132-45 du code pénal afin de compléter la liste des obligations susceptibles d'être prononcées dans le cadre d'un contrôle judiciaire ou d'un sursis probatoire, en y ajoutant l'interdiction d'adresser des messages, notamment électroniques, à la victime. Introduites en première lecture, ces dispositions, applicables à tout contrôle judiciaire ainsi qu'à tout sursis probatoire, quelle que soit l'infraction en cause, ne présentent pas de lien, même indirect, avec l'article 1er du texte initial qui instaurait une sanction administrative réprimant l'absence de retrait de certains contenus illicites publiés sur internet, ni avec son article 3 qui prévoyait des mesures d'information des victimes visées par de tels contenus, ni avec aucune autre des dispositions qui figuraient dans la proposition de loi déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale. 30. Les 2° et 3° de l'article 12 modifient les dispositions des articles 510 et 512 du code de procédure pénale relatives à l'appel des décisions rendues à juge unique en matière correctionnelle. Introduites en première lecture, ces dispositions ne présentent pas de lien, même indirect, avec celles qui figuraient dans la proposition de loi déposée sur le bureau de l'Assemblée nationale. 31. Sans que le Conseil constitutionnel ne préjuge de la conformité du contenu de ces dispositions aux autres exigences constitutionnelles, il y a lieu de constater que, adoptées selon une procédure contraire à la Constitution, elles lui sont donc contraires. - Sur les autres dispositions : 32. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune autre question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Sont contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi visant à lutter contre les contenus haineux sur internet : - les paragraphes I et II de son article 1er ; - son article 3 ; - son article 4 ; - son article 5 ; - son article 7 ; - son article 8 ; - son article 9 ; - les mots « et à l'avant-dernier alinéa du I de l'article 6-2 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique, » figurant au second alinéa de son article 10 ; - le 1° de son article 12 ; - les mots « 4 et 5 ainsi que les I, II et III de l'article 7 » figurant à la première phrase de son article 18 et la seconde phrase de ce même article ; - le paragraphe II de son article 19 ; - son article 11 et les 2° et 3° de son article 12. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 juin 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Valéry GISCARD d'ESTAING, Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT Rendu public le 18 juin 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 6 mars 2020 par la Cour de cassation (première chambre civile, arrêt n° 273 du 5 mars 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Éric G. par Me Raphaël Mayet, avocat au barreau de Versailles. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-844 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi organique n° 2020-365 du 30 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour le requérant par Me Mayet, enregistrées le 16 mars 2020 ; - les observations en intervention présentées pour la ligue des droits de l'homme par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 30 mars 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 2 avril 2020 ; - les observations en intervention présentées par l'association Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour l'association Avocats, droits et psychiatrie par Me Corinne Vaillant, avocate au barreau de Paris, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour le requérant par Me Mayet, enregistrées le 6 avril 2020 ; - les secondes observations en intervention présentées pour l'association Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie par Me Jean-Marc Panfili, avocat au barreau de Montauban, enregistrées le 9 avril 2020 ; - les observations présentées pour le centre hospitalier intercommunal de Poissy Saint-Germain-en-Laye, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Baraduc-Duhamel-Rameix, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 20 avril 2020 ; - les secondes observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 21 avril 2020 ; - les secondes observations en intervention présentées pour l'association Avocats, droits et psychiatrie par Me Vaillant, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Mayet, pour le requérant, Me Elisabeth Baraduc-Bénabent, avocate au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le centre hospitalier intercommunal de Poissy Saint-Germain-en-Laye, Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la ligue des droits de l'homme, Me Vaillant, pour l'association Avocats, droits et psychiatrie, Me Panfili, pour l'association Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 2 juin 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi du 26 janvier 2016 mentionnée ci-dessus, prévoit : « L'isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours. Il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision d'un psychiatre, prise pour une durée limitée. Leur mise en œuvre doit faire l'objet d'une surveillance stricte confiée par l'établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin. « Un registre est tenu dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie et désigné par le directeur général de l'agence régionale de santé pour assurer des soins psychiatriques sans consentement en application du I de l'article L. 3222-1. Pour chaque mesure d'isolement ou de contention, ce registre mentionne le nom du psychiatre ayant décidé cette mesure, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé l'ayant surveillée. Le registre, qui peut être établi sous forme numérique, doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires. « L'établissement établit annuellement un rapport rendant compte des pratiques d'admission en chambre d'isolement et de contention, la politique définie pour limiter le recours à ces pratiques et l'évaluation de sa mise en œuvre. Ce rapport est transmis pour avis à la commission des usagers prévue à l'article L. 1112-3 et au conseil de surveillance prévu à l'article L. 6143-1 ». 2. Le requérant, rejoint par les parties intervenantes, soutient que ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, méconnaîtraient la liberté individuelle protégée par l'article 66 de la Constitution en ce qu'elles ne prévoient pas de contrôle juridictionnel systématique des mesures d'isolement et de contention mises en œuvre dans les établissements de soins psychiatriques, non plus qu'aucune voie de recours en faveur de la personne qui en fait l'objet. L'une des parties intervenantes dénonce également à ce titre une méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif. - Sur le fond : 3. Aux termes de l'article 66 de la Constitution : « Nul ne peut être arbitrairement détenu. - L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». La liberté individuelle, dont la protection est confiée à l'autorité judiciaire, ne saurait être entravée par une rigueur non nécessaire. Les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis. 4. Dans le cadre d'une prise en charge dans un établissement assurant des soins psychiatriques sans consentement, l'isolement consiste à placer la personne hospitalisée dans une chambre fermée et la contention à l'immobiliser. Ces mesures ne sont pas nécessairement mises en œuvre lors d'une hospitalisation sans consentement et n'en sont donc pas la conséquence directe. Elles peuvent être décidées sans le consentement de la personne. Par suite, l'isolement et la contention constituent une privation de liberté. 5. En application du premier alinéa de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, le placement à l'isolement ou sous contention d'une personne prise en charge en soins psychiatriques sans consentement ne peut être décidé que par un psychiatre pour une durée limitée lorsque de telles mesures constituent l'unique moyen de prévenir un dommage immédiat ou imminent pour elle-même ou autrui. Leur mise en œuvre doit alors faire l'objet d'une surveillance stricte confiée par l'établissement d'accueil à des professionnels de santé désignés à cette fin. Il résulte, en outre, des deux autres alinéas de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique que tout établissement de santé chargé d'assurer des soins psychiatriques sans consentement doit, d'une part, veiller à la traçabilité des mesures d'isolement et de contention en tenant un registre mentionnant, pour chaque mesure, le nom du psychiatre qui a pris la décision, sa date et son heure, sa durée et le nom des professionnels de santé l'ayant surveillée. Ce registre doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au Contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués et aux parlementaires. D'autre part, l'établissement de santé doit établir un rapport annuel rendant compte des pratiques d'admission en chambre d'isolement et de contention, de la politique définie pour limiter le recours à ces pratiques et de l'évaluation de sa mise en œuvre. Ce rapport est transmis pour avis à la commission des usagers et au conseil de surveillance de l'établissement. 6. En adoptant ces dispositions, le législateur a fixé des conditions de fond et des garanties de procédure propres à assurer que le placement à l'isolement ou sous contention, dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement, n'intervienne que dans les cas où ces mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à l'état de la personne qui en fait l'objet. 7. Si l'article 66 de la Constitution exige que toute privation de liberté soit placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, il n'impose pas que cette dernière soit saisie préalablement à toute mesure de privation de liberté. Dès lors, en ce qu'elles permettent le placement à l'isolement ou sous contention dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement, les dispositions contestées ne méconnaissent pas l'article 66 de la Constitution. 8. En revanche, la liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible. Or, si le législateur a prévu que le recours à l'isolement et à la contention ne peut être décidé par un psychiatre que pour une durée limitée, il n'a pas fixé cette limite ni prévu les conditions dans lesquelles au-delà d'une certaine durée, le maintien de ces mesures est soumis au contrôle du juge judiciaire. Il s'ensuit qu'aucune disposition législative ne soumet le maintien à l'isolement ou sous contention à une juridiction judiciaire dans des conditions répondant aux exigences de l'article 66 de la Constitution. 9. Par conséquent et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief, le premier alinéa de l'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique doit être déclaré contraire à la Constitution. Il en va de même, par voie de conséquence, des deux autres alinéas de cet article. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 10. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 11. En l'espèce, l'abrogation immédiate des dispositions déclarées contraires à la Constitution, en ce qu'elle ferait obstacle à toute possibilité de placement à l'isolement ou sous contention des personnes admises en soins psychiatriques sous contrainte, entraînerait des conséquences manifestement excessives. Par suite, il y a lieu de reporter au 31 décembre 2020 la date de l'abrogation des dispositions contestées. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - L'article L. 3222-5-1 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé, est contraire à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 11 de cette décision. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 juin 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 19 juin 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 26 mai 2020 par le Conseil d'État (décision n° 440335 du 25 mai 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour Mme Patricia W. par Mes Romain Geoffret et Maxime Rosier, avocats au barreau de Montpellier. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-850 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 262 du code électoral, dans sa rédaction résultant de la loi n° 82-974 du 19 novembre 1982 modifiant le code électoral et le code des communes relative à l'élection des conseillers municipaux et aux conditions d'inscription des français établis hors de France sur les listes électorales. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code électoral ; - la loi n° 82-974 du 19 novembre 1982 modifiant le code électoral et le code des communes relative à l'élection des conseillers municipaux et aux conditions d'inscription des français établis hors de France sur les listes électorales ; - la loi n° 2013-403 du 17 mai 2013 relative à l'élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral ; - les décisions du Conseil constitutionnel nos 82-146 DC du 18 novembre 1982 et 2013-667 DC du 16 mai 2013 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour la requérante par Mes Geoffret et Rosier, enregistrées le 3 juin 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Geoffret pour la requérante et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 15 juin 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Dans sa rédaction résultant de la loi du 19 novembre 1982 mentionnée ci-dessus, l'article L. 262 du code électoral, relatif au mode de scrutin applicable à l'élection des conseillers municipaux des communes d'au moins 1 000 habitants, prévoit :« Au premier tour de scrutin, il est attribué à la liste qui a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés un nombre de sièges égal à la moitié du nombre des sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l'entier supérieur lorsqu'il y a plus de quatre sièges à pourvoir et à l'entier inférieur lorsqu'il y a moins de quatre sièges à pourvoir. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application des dispositions du troisième alinéa ci-après. « Si aucune liste n'a recueilli la majorité absolue des suffrages exprimés au premier tour, il est procédé à un deuxième tour. Il est attribué à la liste qui a obtenu le plus de voix un nombre de sièges égal à la moitié du nombre des sièges à pourvoir, arrondi, le cas échéant, à l'entier supérieur lorsqu'il y a plus de quatre sièges à pourvoir et à l'entier inférieur lorsqu'il y a moins de quatre sièges à pourvoir. En cas d'égalité de suffrages entre les listes arrivées en tête, ces sièges sont attribués à la liste dont les candidats ont la moyenne d'âge la plus élevée. Cette attribution opérée, les autres sièges sont répartis entre toutes les listes à la représentation proportionnelle suivant la règle de la plus forte moyenne, sous réserve de l'application des dispositions du troisième alinéa ci-après. « Les listes qui n'ont pas obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés ne sont pas admises à répartition des sièges. « Les sièges sont attribués aux candidats dans l'ordre de présentation sur chaque liste. « Si plusieurs listes ont la même moyenne pour l'attribution du dernier siège, celui-ci revient à la liste qui a obtenu le plus grand nombre de suffrages. En cas d'égalité de suffrages, le siège est attribué au plus âgé des candidats susceptibles d'être proclamés élus ». 2. Selon la requérante, si ces dispositions ont déjà été déclarées conformes à la Constitution par la décision du Conseil constitutionnel du 18 novembre 1982 mentionnée ci-dessus, la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008 inscrivant le principe de pluralisme des courants d'idées et d'opinions à l'article 4 de la Constitution et la consécration jurisprudentielle du principe de sincérité du scrutin intervenue depuis lors constitueraient des changements de circonstances justifiant leur réexamen. Elle invoque également, au soutien d'un tel réexamen, l'extension du champ d'application de ces dispositions, initialement applicables aux communes d'au moins 3 500 habitants, à celles d'au moins 1 000 habitants par la loi du 17 mai 2013 mentionnée ci-dessus, d'une part, et l'important taux d'abstention constaté lors du premier tour des élections municipales organisé le 15 mars 2020, d'autre part. 3. Sur le fond, la requérante reproche aux dispositions renvoyées de permettre que l'élection du conseil municipal d'une commune d'au moins 1 000 habitants puisse être acquise dès le premier tour de scrutin, sans exiger que la liste ayant obtenu la majorité absolue des suffrages exprimés ait également recueilli un nombre de suffrages correspondant à une part minimale du nombre des électeurs inscrits. En premier lieu, il en résulterait une méconnaissance des principes d'égalité devant la loi et devant le suffrage, dès lors que, dans les communes de moins de 1 000 habitants, l'élection dès le premier tour nécessite d'avoir réuni, non seulement la majorité absolue des suffrages exprimés, mais aussi un nombre de suffrages égal au quart des électeurs inscrits. En deuxième lieu, en permettant l'élection de conseillers municipaux dont la requérante juge qu'ils seraient dépourvus de toute représentativité minimale, ces dispositions contreviendraient à un principe d'« équité du scrutin », aux principes de sincérité et de loyauté du scrutin, au « principe démocratique » et au principe de la souveraineté nationale. En dernier lieu, ces dispositions seraient contraires à un principe fondamental reconnu par les lois de la République, que la requérante demande au Conseil constitutionnel de reconnaître, selon lequel, pour toute élection locale à deux tours, nul ne peut être élu au premier tour de scrutin s'il n'a réuni un nombre de suffrages égal au quart des électeurs inscrits. 4. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « la majorité absolue des suffrages exprimés » figurant à la première phrase du premier alinéa et du deuxième alinéa de l'article L. 262 du code électoral. 5. Selon les dispositions combinées du troisième alinéa de l'article 23-2 et du troisième alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qu'il a déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une de ses décisions, sauf changement des circonstances. 6. Dans sa décision du 18 novembre 1982, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné l'article L. 262 du code électoral, dans la même rédaction que celle contestée par la requérante. Il a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif de sa décision. 7. Si, depuis cette décision, le champ d'application de ces dispositions a été étendu aux communes d'au moins 1 000 habitants, les dispositions prévoyant cette extension ont été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 16 mai 2013 mentionnée ci-dessus. En outre, ni la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, ni la mention explicite du principe de sincérité du scrutin dans des décisions du Conseil constitutionnel postérieures aux décisions précitées ne constituent un changement des circonstances justifiant le réexamen des dispositions contestées. Enfin, le taux d'abstention des électeurs lors du scrutin qui s'est tenu le 15 mars 2020 et le contexte particulier lié à l'épidémie de covid-19 ne constituent pas non plus un changement des circonstances justifiant un tel réexamen. 8. Dès lors, il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel d'examiner la question prioritaire de constitutionnalité. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Il n'y a pas lieu de statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article L. 262 du code électoral, dans sa rédaction résultant de la loi n° 82-974 du 19 novembre 1982 modifiant le code électoral et le code des communes relative à l'élection des conseillers municipaux et aux conditions d'inscription des français établis hors de France sur les listes électorales. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 juin 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 17 juin 2020 .
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 26 mai 2020 par le Conseil d'État (décision n° 440217 du 25 mai 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Daniel D. et autres par Me Céline Alinot, avocate au barreau de Nice. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-849 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des paragraphes I, III et IV de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code électoral ; - le code de la santé publique ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - l'ordonnance n° 2020-390 du 1er avril 2020 relative au report du second tour du renouvellement général des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers de la métropole de Lyon de 2020 et à l'établissement de l'aide publique pour 2021 ; - le décret n° 2019-928 du 4 septembre 2019 fixant la date du renouvellement des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon, et portant convocation des électeurs ; - le décret n° 2020-267 du 17 mars 2020 portant report du second tour du renouvellement des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon, initialement fixé au 22 mars 2020 par le décret n° 2019-928 du 4 septembre 2019 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour les requérants par Me Alinot, enregistrées le 28 mai 2020 ; - les observations en intervention présentées par M. Jean-Louis M., enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour Mme Béatrice D. et autres par Me Étienne Tête, avocat au barreau de Lyon, enregistrées le 2 juin 2020 ; - les observations en intervention présentées pour Mme Françoise G. par Me Sébastien Plunian, avocat au barreau de Valence, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour M. Jean-Claude B. par Me Sarah Margaroli, avocate au barreau de Paris, enregistrées le 3 juin 2020 ; - les observations en intervention présentées pour M. Pierre-Yves M. par Me Margaroli, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour M. Pierre S. par Me Arié Alimi, avocat au barreau de Paris, enregistrées le même jour ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les secondes observations en intervention présentées par M. Jean-Louis M., enregistrées le 5 juin 2020 ; - les secondes observations présentées pour les requérants par Me Alinot, enregistrées le 8 juin 2020 ; - les secondes observations en intervention présentées pour Mme Béatrice D. et autres par Me Tête, enregistrées le même jour ; - les secondes observations en intervention présentées pour MM. Jean-Claude B. et Pierre-Yves M. par Me Margaroli, enregistrées le 10 juin 2020 ; - les secondes observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Alinot pour les requérants, Me Philippe Prigent, avocat au barreau de Paris, pour M. Jean-Louis M., Me Margaroli, pour MM. Jean-Claude B. et Pierre-Yves M., Me Alimi, pour M. Pierre S., et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 15 juin 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus dans sa rédaction initiale. 2. Le paragraphe I de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020, dans cette rédaction, prévoit :« Lorsque, à la suite du premier tour organisé le 15 mars 2020 pour l'élection des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon, un second tour est nécessaire pour attribuer les sièges qui n'ont pas été pourvus, ce second tour, initialement fixé au 22 mars 2020, est reporté au plus tard en juin 2020, en raison des circonstances exceptionnelles liées à l'impérative protection de la population face à l'épidémie de covid-19. Sa date est fixée par décret en conseil des ministres, pris le mercredi 27 mai 2020 au plus tard si la situation sanitaire permet l'organisation des opérations électorales au regard, notamment, de l'analyse du comité de scientifiques institué sur le fondement de l'article L. 3131-19 du code de la santé publique. « Les déclarations de candidature à ce second tour sont déposées au plus tard le mardi qui suit la publication du décret de convocation des électeurs. « Si la situation sanitaire ne permet pas l'organisation du second tour au plus tard au mois de juin 2020, le mandat des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers d'arrondissement, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains concernés est prolongé pour une durée fixée par la loi. Les électeurs sont convoqués par décret pour les deux tours de scrutin, qui ont lieu dans les trente jours qui précèdent l'achèvement des mandats ainsi prolongés. La loi détermine aussi les modalités d'entrée en fonction des conseillers municipaux élus dès le premier tour dans les communes de moins de 1 000 habitants pour lesquelles le conseil municipal n'a pas été élu au complet. « Dans tous les cas, l'élection régulière des conseillers municipaux et communautaires, des conseillers d'arrondissement, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 reste acquise, conformément à l'article 3 de la Constitution ». 3. Le paragraphe III de ce même article, dans cette même rédaction, prévoit :« Les conseillers municipaux et communautaires élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 entrent en fonction à une date fixée par décret au plus tard au mois de juin 2020, aussitôt que la situation sanitaire le permet au regard de l'analyse du comité de scientifiques. La première réunion du conseil municipal se tient de plein droit au plus tôt cinq jours et au plus tard dix jours après cette entrée en fonction. « Par dérogation, dans les communes de moins de 1 000 habitants pour lesquelles le conseil municipal n'a pas été élu au complet, les conseillers municipaux élus au premier tour entrent en fonction le lendemain du second tour de l'élection ou, s'il n'a pas lieu, dans les conditions prévues par la loi mentionnée au troisième alinéa du I du présent article. « Par dérogation, les conseillers d'arrondissement et les conseillers de Paris élus au premier tour entrent en fonction le lendemain du second tour de l'élection ou, s'il n'a pas lieu, dans les conditions prévues par la loi mentionnée au même troisième alinéa ». 4. Le paragraphe IV de ce même article, dans cette même rédaction, prévoit :« Par dérogation à l'article L. 227 du code électoral : « 1° Dans les communes pour lesquelles le conseil municipal a été élu au complet, les conseillers municipaux en exercice avant le premier tour conservent leur mandat jusqu'à l'entrée en fonction des conseillers municipaux élus au premier tour. Le cas échéant, leur mandat de conseiller communautaire est également prorogé jusqu'à cette même date ; « 2° Dans les communes, autres que celles mentionnées au 3° du présent IV, pour lesquelles le conseil municipal n'a pas été élu au complet, les conseillers municipaux en exercice avant le premier tour conservent leur mandat jusqu'au second tour. Le cas échéant, leur mandat de conseiller communautaire est également prorogé jusqu'au second tour, sous réserve du 3 du VII ; « 3° Dans les secteurs des communes mentionnées au chapitre IV du titre IV du livre Ier du code électoral, les conseillers d'arrondissement, les conseillers municipaux et, à Paris, les conseillers de Paris en exercice avant le premier tour conservent leur mandat jusqu'au second tour. Le cas échéant, leur mandat de conseiller communautaire est également prorogé jusqu'au second tour, sous réserve du 3 du VII du présent article. « Par dérogation à l'article L. 224-1 du code électoral, le mandat des conseillers métropolitains de Lyon en exercice avant le premier tour est prorogé jusqu'au second tour. « Les délégations attribuées aux élus dont le mandat est prolongé non plus qu'aucune délibération ne deviennent caduques de ce seul fait ». 5. En premier lieu, les requérants reprochent à ces dispositions, adoptées postérieurement au premier tour des élections municipales, qui s'est tenu le 15 mars 2020, d'en reporter le second tour à une date indéterminée, susceptible d'être fixée jusqu'à la fin du mois de juin par le pouvoir réglementaire. Selon eux, d'une part, le législateur ne pouvait pas interrompre un processus électoral en cours et aurait donc dû annuler les résultats du scrutin du 15 mars 2020 afin d'organiser de nouvelles élections municipales. D'autre part, alors que le scrutin à deux tours formerait un bloc indissociable, ces dispositions permettent que le second tour ait lieu plus de trois mois après le premier tour, ce qui constituerait un délai excessif. Enfin, en prévoyant la tenue de ce second tour pendant la crise sanitaire causée par l'épidémie de covid-19, le législateur créerait les conditions d'une forte abstention des électeurs. Il en résulterait une méconnaissance des principes de sincérité du scrutin et d'égalité devant le suffrage. 6. En deuxième lieu, les requérants soutiennent que les dispositions renvoyées auraient pour effet de valider les résultats du premier tour des élections municipales, sans égard pour les contestations en cours devant le juge de l'élection. Il en résulterait une violation de la séparation des pouvoirs et de la garantie des droits. 7. En dernier lieu, les requérants reprochent à ces dispositions de fixer des dates d'entrée en fonction et des durées de mandat des conseillers municipaux différentes selon qu'ils ont été élus dès le premier tour ou qu'ils le seront à l'issue du second tour reporté. Il en résulterait une méconnaissance du principe d'égalité devant le suffrage. 8. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les premier et dernier alinéas du paragraphe I de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020. 9. Les intervenants au soutien de la question prioritaire de constitutionnalité soulèvent des griefs similaires à ceux des requérants. En outre, selon l'un des intervenants, en prévoyant un second tour en juin 2020 alors que l'épidémie n'est pas totalement maîtrisée, les dispositions contestées entraîneraient une « abstention contrainte et programmée », méconnaissant ainsi la liberté de vote et la sincérité du scrutin. De plus, en favorisant les élus sortants et en soumettant les candidats à des contraintes très strictes pour mener leur campagne électorale, ces dispositions entraîneraient une rupture de l'égalité devant le suffrage et contreviendraient au principe de sincérité du scrutin. 10. Un autre intervenant reproche aux dispositions contestées d'entériner les résultats du premier tour, y compris dans les communes dans lesquelles le conseil municipal a été élu au complet. Il en résulterait une méconnaissance des principes de sincérité du scrutin et d'égalité devant le suffrage, dans la mesure où ce scrutin, organisé pendant l'épidémie de covid-19, a donné lieu à une très forte abstention. En outre, la validation des résultats du premier tour porterait une atteinte inconstitutionnelle au droit à un recours juridictionnel effectif. - Sur certaines interventions : 11. Selon le deuxième alinéa de l'article 6 du règlement intérieur du 4 février 2010 mentionné ci-dessus, seules les personnes justifiant d'un « intérêt spécial » sont admises à présenter une intervention. 12. Les requérants concluent à l'irrecevabilité des demandes d'intervention présentées par Mme Béatrice D. et autres, Mme Françoise G., M. Pierre-Yves M. et M. Jean-Claude B.. Ils soutiennent que ces personnes ne justifieraient pas d'un intérêt spécial à intervenir aux motifs, notamment, qu'elles sont parties à d'autres instances en cours et que leurs interventions ont pour objet de soutenir la conformité à la Constitution des dispositions contestées. 13. Toutefois, ces quatre demandes en intervention sont présentées par des personnes ayant été élues lors du premier tour des élections municipales organisé le 15 mars 2020. Elles sont parties en défense de contestations électorales déposées devant le tribunal administratif, à l'occasion desquelles l'auteur de ces contestations a déposé une question prioritaire de constitutionnalité portant sur tout ou partie des dispositions contestées dans la présente question prioritaire de constitutionnalité. Par conséquent, elles disposent d'un intérêt spécial à intervenir. Les conclusions aux fins d'irrecevabilité de ces interventions doivent donc être rejetées. - Sur les conclusions aux fins de non-lieu : 14. Un des intervenants soutient qu'il n'y aurait pas lieu pour le Conseil constitutionnel de statuer sur la conformité des dispositions contestées aux droits et libertés que la Constitution garantit, dans la mesure où celles-ci seront prochainement modifiées ou remplacées par des dispositions nouvelles, résultant d'un projet de loi déposé auprès de l'Assemblée nationale le 27 mai 2020, qui pourraient s'appliquer aux instances en cours devant le juge de l'élection. 15. Toutefois, à supposer même que ce projet de loi puisse avoir de telles conséquences, en tout état de cause, la modification ou l'abrogation ultérieure de la disposition contestée ne fait pas disparaître l'atteinte éventuelle aux droits et libertés que la Constitution garantit et n'ôte donc pas son effet utile à la question prioritaire de constitutionnalité. Les conclusions aux fins de non-lieu doivent donc être rejetées. - Sur le fond : . En ce qui concerne le premier alinéa du paragraphe I de l'article 19 : S'agissant du report du second tour des élections municipales : 16. Selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret ». Il en résulte le principe de sincérité du scrutin. 17. L'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 dispose que la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Il résulte de cette disposition et du troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution le principe de l'égalité devant le suffrage. 18. Le législateur, compétent en application de l'article 34 de la Constitution pour fixer les règles concernant le régime électoral des assemblées locales, peut, à ce titre, déterminer la durée du mandat des élus qui composent l'organe délibérant d'une collectivité territoriale. Toutefois, dans l'exercice de cette compétence, il doit se conformer aux principes constitutionnels, qui impliquent notamment que les électeurs soient appelés à exercer leur droit de suffrage, garanti par l'article 3 de la Constitution, selon une périodicité raisonnable. 19. En application de l'article L. 227 du code électoral, le décret du 4 septembre 2019 mentionné ci-dessus a fixé au 15 mars 2020 la date du premier tour de scrutin des élections municipales. Conformément à l'article L. 56 du même code, selon lequel, en cas de deuxième tour de scrutin, il y est procédé le dimanche suivant le premier tour, l'article 6 du même décret a fixé la date du second tour au 22 mars 2020. En raison de l'épidémie de covid-19, le décret du 17 mars 2020 mentionné ci-dessus a abrogé cet article 6. 20. Selon le premier alinéa du paragraphe I de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020, en raison des circonstances exceptionnelles liées à l'épidémie de covid-19, le second tour des élections municipales initialement fixé au 22 mars 2020 aura lieu au plus tard en juin 2020, à condition que la situation sanitaire permette l'organisation des opérations électorales. Si cette condition n'était pas remplie, le troisième alinéa du même paragraphe I prévoit que les électeurs des communes dont le conseil municipal n'a pas été élu au complet à l'issue du premier tour seraient à nouveau convoqués pour les deux tours de scrutin, dans des conditions à définir par une nouvelle loi. Dans l'une et l'autre de ces hypothèses, en vertu du dernier alinéa du même paragraphe, l'élection régulière des conseillers municipaux élus dès le premier tour organisé le 15 mars 2020 reste acquise. 21. Ainsi, les dispositions contestées suspendent les opérations électorales postérieurement à la tenue du premier tour et reportent l'organisation du second tour. Si elles remettent en cause l'unité de déroulement des opérations électorales, elles permettent, contrairement à une annulation du premier tour, de préserver l'expression du suffrage lors de celui-ci. Toutefois, le législateur ne saurait, sans méconnaître les exigences résultant de l'article 3 de la Constitution, autoriser une telle modification du déroulement des opérations électorales qu'à la condition qu'elle soit justifiée par un motif impérieux d'intérêt général et que, par les modalités qu'il a retenues, il n'en résulte pas une méconnaissance du droit de suffrage, du principe de sincérité du scrutin ou de l'égalité devant le suffrage. 22. D'une part, en adoptant les dispositions contestées, alors que le choix avait été fait, avant qu'il n'intervienne, de maintenir le premier tour de scrutin, le législateur a entendu éviter que la tenue du deuxième tour de scrutin initialement prévu le 22 mars 2020 et la campagne électorale qui devait le précéder ne contribuent à la propagation de l'épidémie de covid-19, dans un contexte sanitaire ayant donné lieu à des mesures de confinement de la population. Ces dispositions sont donc justifiées par un motif impérieux d'intérêt général. 23. D'autre part, en premier lieu, le législateur a prévu que le second tour des élections municipales aurait lieu au plus tard au mois de juin 2020. Le délai maximal ainsi fixé pour la tenue du second tour était, lors de son adoption, adapté à la gravité de la situation sanitaire et à l'incertitude entourant l'évolution de l'épidémie. 24. En deuxième lieu, le législateur a imposé au pouvoir réglementaire de fixer la date de ce second tour, par décret en conseil des ministres pris le 27 mai 2020 au plus tard. Il a subordonné cette fixation à la condition que la situation sanitaire le permette, compte tenu notamment de l'analyse du comité de scientifiques prévu à l'article L. 3131-19 du code de la santé publique. 25. En troisième lieu, si les requérants et certains intervenants font valoir que, en raison de l'épidémie de covid-19, l'organisation du second tour avant la fin du mois de juin 2020 risque de nuire à la participation des électeurs, ce scrutin ne peut se tenir que si la situation sanitaire le permet. Dès lors, les dispositions contestées ne favorisent pas par elles-mêmes l'abstention. Il appartiendra, le cas échéant, au juge de l'élection, saisi d'un tel grief, d'apprécier si le niveau de l'abstention a pu ou non altérer, dans les circonstances de l'espèce, la sincérité du scrutin. 26. En dernier lieu, plusieurs mesures d'adaptation du droit électoral contribuent à assurer, malgré le délai séparant les deux tours de scrutin, la continuité des opérations électorales, l'égalité entre les candidats au cours de la campagne et la sincérité du scrutin. En particulier, afin de préserver l'unité du corps électoral entre les deux tours, l'ordonnance du 1er avril 2020 mentionnée ci-dessus dispose que, sauf exceptions, le second tour du scrutin initialement fixé au 22 mars 2020 aura lieu à partir des listes électorales et des listes électorales complémentaires établies pour le premier tour. 27. En outre, les 6° et 7° du paragraphe XII de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020 permettent, par dérogation au code électoral, de majorer par décret les plafonds de dépenses électorales applicables et d'obtenir le remboursement d'une partie des dépenses de propagande ayant été engagées pour le second tour initialement prévu le 22 mars 2020. Ces dispositions concourent à garantir le respect de l'égalité entre les candidats au cours de la campagne électorale. 28. Enfin, afin de préserver les possibilités de contester les résultats du premier tour en dépit de la suspension du scrutin, les électeurs ont pu, par dérogation au troisième alinéa de l'article L. 68 du code électoral, obtenir communication des listes d'émargement des bureaux de vote à compter de l'entrée en vigueur du décret de convocation pour le second tour et jusqu'à l'expiration du délai de recours contentieux. 29. Il résulte de ce qui précède que le report du second tour des élections municipales au plus tard en juin 2020 ne méconnaît ni le droit de suffrage, ni le principe de sincérité du scrutin, ni celui d'égalité devant le suffrage. S'agissant des conséquences du report du second tour sur les mandats des conseillers municipaux et sur le contentieux de l'élection : 30. D'une part, s'il résulte des dispositions contestées une différence de durée de mandat entre les conseillers municipaux élus dès le premier tour et ceux élus à l'issue du second tour organisé au plus tard en juin 2020, cette différence de traitement repose sur une différence de situation au regard de l'élection et répond directement à la volonté du législateur d'assurer la mise en œuvre des objectifs qu'il s'est fixés en reportant le second tour. 31. D'autre part, pour les communes dans lesquelles un second tour est nécessaire, les dispositions contestées n'ont aucune incidence sur les éventuelles contestations devant le juge de l'élection des opérations électorales du premier tour. Elles ne portent donc pas d'atteinte à la séparation des pouvoirs et au droit à un recours juridictionnel effectif garantis par l'article 16 de la Déclaration de 1789. 32. Il résulte de tout ce qui précède que le premier alinéa du paragraphe I de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020 ne méconnaît ni le droit de suffrage, ni les principes de sincérité du scrutin et d'égalité devant le suffrage, ni les exigences de l'article 16 de la Déclaration de 1789. Cet alinéa, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution. . En ce qui concerne le dernier alinéa du paragraphe I de l'article 19 : 33. Le dernier alinéa du paragraphe I de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020 se borne à préciser que ni le report du second tour au plus tard en juin 2020 ni l'éventuelle organisation de deux nouveaux tours de scrutin après cette date n'ont de conséquence sur les mandats régulièrement acquis dès le premier tour organisé le 15 mars 2020. Ces dispositions n'ont ainsi ni pour objet ni pour effet de valider rétroactivement les opérations électorales du premier tour ayant donné lieu à l'attribution de sièges. Dès lors, elles ne font pas obstacle à ce que ces opérations soient contestées devant le juge de l'élection. 34. Dès lors, les griefs tirés de la méconnaissance des exigences de l'article 16 de la Déclaration de 1789 et des principes de sincérité du scrutin et d'égalité devant le suffrage doivent être écartés. 35. Par conséquent, le dernier alinéa du paragraphe I de l'article 19 de la loi du 23 mars 2020, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doit être déclaré conforme à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les premier et dernier alinéas du paragraphe I de l'article 19 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19, dans sa rédaction initiale, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 juin 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 17 juin 2020 .
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 27 mai 2020 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêts nos 971 et 973 du 26 mai 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, de deux questions prioritaires de constitutionnalité. Ces questions ont été respectivement posées pour MM. Sofiane A. et Djemil H. par la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elles ont été enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous les nos 2020-851 QPC et 2020-852 QPC. Elles sont relatives, pour la première, à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du 2° du paragraphe I de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 et, pour la seconde, à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du d de ce même 2°. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour M. Djemil H. par la SCP Waquet, Farge, Hazan, enregistrées le 4 juin 2020 ; - les observations présentées pour M. Sofiane A. par la SCP Waquet, Farge, Hazan, enregistrées le 5 juin 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour le Conseil national des barreaux, la Conférence des bâtonniers et le Syndicat des avocats de France par la SCP Anne Sevaux et Paul Mathonnet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour la ligue des droits de l'homme par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ; - les observations en intervention présentées pour M. Christian M. par Me François Danglehant, avocat au barreau de Seine Saint-Denis, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour M. Sofiane A. par la SCP Waquet, Farge, Hazan, enregistrées le 10 juin 2020 ; - les secondes observations présentées pour M. Djemil H. par la SCP Waquet, Farge, Hazan, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour M. Christian M. par Me Danglehant, enregistrées le 12 juin 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Hélène Farge, avocate au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le premier requérant, Me Claire Waquet, avocate au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le second requérant, Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la ligue des droits de l'homme, Me Danglehant, pour M. Christian M., Me Paul Mathonnet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le Conseil national des barreaux, la Conférence des bâtonniers et le Syndicat des avocats de France, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 25 juin 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Il y a lieu de joindre les deux questions prioritaires de constitutionnalité pour y statuer par une seule décision. 2. Le paragraphe I de l'article 11 de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus habilite le Gouvernement, sur le fondement de l'article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnance certaines mesures relevant du domaine de la loi. Le 2° prévoit qu'il peut prendre : « Afin de faire face aux conséquences, notamment de nature administrative ou juridictionnelle, de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, toute mesure : « a) Adaptant les délais et procédures applicables au dépôt et au traitement des déclarations et demandes présentées aux autorités administratives, les délais et les modalités de consultation du public ou de toute instance ou autorité, préalables à la prise d'une décision par une autorité administrative et, le cas échéant, les délais dans lesquels cette décision peut ou doit être prise ou peut naitre ainsi que les délais de réalisation par toute personne de contrôles, travaux et prescriptions de toute nature imposées par les lois et règlements, à moins que ceux-ci ne résultent d'une décision de justice ; « b) Adaptant, interrompant, suspendant ou reportant le terme des délais prévus à peine de nullité, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, déchéance d'un droit, fin d'un agrément ou d'une autorisation ou cessation d'une mesure, à l'exception des mesures privatives de liberté et des sanctions. Ces mesures sont rendues applicables à compter du 12 mars 2020 et ne peuvent excéder de plus de trois mois la fin des mesures de police administrative prises par le Gouvernement pour ralentir la propagation de l'épidémie de covid-19 ; « c) Adaptant, aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 parmi les personnes participant à la conduite et au déroulement des instances, les règles relatives à la compétence territoriale et aux formations de jugement des juridictions de l'ordre administratif et de l'ordre judiciaire ainsi que les règles relatives aux délais de procédure et de jugement, à la publicité des audiences et à leur tenue, au recours à la visioconférence devant ces juridictions et aux modalités de saisine de la juridiction et d'organisation du contradictoire devant les juridictions ; « d) Adaptant, aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 parmi les personnes participant à ces procédures, les règles relatives au déroulement des gardes à vue, pour permettre l'intervention à distance de l'avocat et la prolongation de ces mesures pour au plus la durée légalement prévue sans présentation de la personne devant le magistrat compétent, et les règles relatives au déroulement et à la durée des détentions provisoires et des assignations à résidence sous surveillance électronique, pour permettre l'allongement des délais au cours de l'instruction et en matière d'audiencement, pour une durée proportionnée à celle de droit commun et ne pouvant excéder trois mois en matière délictuelle et six mois en appel ou en matière criminelle, et la prolongation de ces mesures au vu des seules réquisitions écrites du parquet et des observations écrites de la personne et de son avocat ; « e) Aménageant aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 parmi les personnes participant ou impliquées dans ces procédures, d'une part, les règles relatives à l'exécution et l'application des peines privatives de liberté pour assouplir les modalités d'affectation des détenus dans les établissements pénitentiaires ainsi que les modalités d'exécution des fins de peine et, d'autre part, les règles relatives à l'exécution des mesures de placement et autres mesures éducatives prises en application de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante ; « f) Simplifiant et adaptant les conditions dans lesquelles les assemblées et les organes dirigeants collégiaux des personnes morales de droit privé et autres entités se réunissent et délibèrent ainsi que les règles relatives aux assemblées générales ; « g) Simplifiant, précisant et adaptant les règles relatives à l'établissement, l'arrêté, l'audit, la revue, l'approbation et la publication des comptes et des autres documents que les personnes morales de droit privé et autres entités sont tenues de déposer ou de publier, notamment celles relatives aux délais, ainsi qu'adaptant les règles relatives à l'affectation des bénéfices et au paiement des dividendes ; « h) Adaptant les dispositions relatives à l'organisation de la Banque publique d'investissement créée par l'ordonnance n° 2005-722 du 29 juin 2005 relative à la Banque publique d'investissement afin de renforcer sa capacité à accorder des garanties ; « i) Simplifiant et adaptant le droit applicable au fonctionnement des établissements publics et des instances collégiales administratives, y compris les organes dirigeants des autorités administratives ou publiques indépendantes, notamment les règles relatives à la tenue des réunions dématérialisées ou le recours à la visioconférence ; « j) Adaptant le droit de la copropriété des immeubles bâtis pour tenir compte, notamment pour la désignation des syndics, de l'impossibilité ou des difficultés de réunion des assemblées générales de copropriétaires ; « k) Dérogeant aux dispositions du chapitre III du titre II du livre VII du code rural et de la pêche maritime afin de proroger, pour une période n'allant pas au-delà du 31 décembre 2020, la durée des mandats des membres du conseil d'administration des caisses départementales de mutualité sociale agricole, des caisses pluridépartementales de mutualité sociale agricole et du conseil central d'administration de la mutualité sociale agricole ; « l) Permettant aux autorités compétentes pour la détermination des modalités d'accès aux formations de l'enseignement supérieur, des modalités de délivrance des diplômes de l'enseignement supérieur ou des modalités de déroulement des concours ou examens d'accès à la fonction publique d'apporter à ces modalités toutes les modifications nécessaires pour garantir la continuité de leur mise en œuvre, dans le respect du principe d'égalité de traitement des candidats ; « m) Permettant aux autorités compétentes de prendre toutes mesures relevant du code de la santé publique et du code de la recherche afin, dans le respect des meilleures pratiques médicales et de la sécurité des personnes, de simplifier et d'accélérer la recherche fondamentale et clinique visant à lutter contre l'épidémie de covid-19 ». 3. Les requérants, rejoints par certaines parties intervenantes, soutiennent que ces dispositions méconnaîtraient les exigences découlant de l'article 66 de la Constitution ainsi que les droits de la défense en permettant aux ordonnances prises sur le fondement de cette loi d'habilitation de prévoir une prolongation automatique de tous les titres de détention provisoire venant à expiration durant la période d'état d'urgence sanitaire, sans que cette prolongation soit subordonnée à l'intervention d'un juge. Par ailleurs, un des requérants reproche au législateur de ne pas avoir suffisamment précisé, dans la loi d'habilitation, les conditions de cette prolongation automatique de la détention provisoire, ce qui serait constitutif d'une incompétence négative. 4. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « des détentions provisoires » figurant au d du 2° du paragraphe I de l'article 11 de la loi du 23 mars 2020. - Sur l'intervention de M. Christian M. : 5. Selon le deuxième alinéa de l'article 6 du règlement intérieur du 4 février 2010 mentionné ci-dessus, seules les personnes justifiant d'un « intérêt spécial » sont admises à présenter une intervention. 6. M. Christian M. conteste, non la possibilité accordée au Gouvernement d'allonger les délais de détention provisoire, mais celle d'augmenter les délais impartis à la chambre de l'instruction pour statuer sur une demande de mise en liberté. Ses griefs ne portant pas sur les dispositions contestées, il ne justifie donc pas d'un intérêt spécial à intervenir dans la procédure de la présente question prioritaire de constitutionnalité. Par conséquent, son intervention n'est pas admise. - Sur le fond : . En ce qui concerne le contrôle exercé par le Conseil constitutionnel sur les textes adoptés sur le fondement de l'article 38 de la Constitution : 7. Aux termes de l'article 38 de la Constitution : « Le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. - Les ordonnances sont prises en Conseil des ministres après avis du Conseil d'État. Elles entrent en vigueur dès leur publication mais deviennent caduques si le projet de loi de ratification n'est pas déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation. Elles ne peuvent être ratifiées que de manière expresse. - À l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif ». 8. D'une part, si le premier alinéa de l'article 38 de la Constitution fait obligation au Gouvernement d'indiquer avec précision au Parlement, afin de justifier la demande qu'il présente, la finalité des mesures qu'il se propose de prendre par voie d'ordonnances ainsi que leur domaine d'intervention, il n'impose pas au Gouvernement de faire connaître au Parlement la teneur des ordonnances qu'il prendra en vertu de cette habilitation. Les dispositions d'une loi d'habilitation ne sauraient, ni par elles-mêmes, ni par les conséquences qui en découlent nécessairement, méconnaître une règle ou un principe de valeur constitutionnelle. En outre, elles ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser le Gouvernement, dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en application de l'article 38 de la Constitution, de respecter les règles et principes de valeur constitutionnelle. 9. Aux termes de l'article 61-1 de la Constitution : « Lorsque, à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction, il est soutenu qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, le Conseil constitutionnel peut être saisi de cette question sur renvoi du Conseil d'État ou de la Cour de cassation qui se prononce dans un délai déterminé ». Par conséquent, le Conseil constitutionnel ne saurait être saisi, sur le fondement de cet article 61-1, que de griefs tirés de ce que les dispositions d'une loi d'habilitation portent atteinte, par elles-mêmes ou par les conséquences qui en découlent nécessairement, aux droits et libertés que la Constitution garantit. 10. D'autre part, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi, sur le fondement de ce même article 61-1, que de dispositions législatives. Or, si le deuxième alinéa de l'article 38 de la Constitution prévoit que la procédure d'habilitation du Gouvernement à prendre des ordonnances se clôt, en principe, par leur soumission à la ratification expresse du Parlement, il dispose qu'elles entrent en vigueur dès leur publication. Par ailleurs, conformément à ce même alinéa, dès lors qu'un projet de loi de ratification a été déposé devant le Parlement avant la date fixée par la loi d'habilitation, les ordonnances demeurent en vigueur y compris si le Parlement ne s'est pas expressément prononcé sur leur ratification. Enfin, en vertu du dernier alinéa de l'article 38 de la Constitution, à l'expiration du délai de l'habilitation fixé par la loi, les dispositions d'une ordonnance prise sur son fondement ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif. 11. Si les dispositions d'une ordonnance acquièrent valeur législative à compter de sa signature lorsqu'elles ont été ratifiées par le législateur, elles doivent être regardées, dès l'expiration du délai de l'habilitation et dans les matières qui sont du domaine législatif, comme des dispositions législatives au sens de l'article 61-1 de la Constitution. Leur conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit ne peut donc être contestée que par une question prioritaire de constitutionnalité. . En ce qui concerne la constitutionnalité des dispositions contestées : 12. Aux termes de l'article 66 de la Constitution : « Nul ne peut être arbitrairement détenu. - L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi ». La liberté individuelle ne peut être tenue pour sauvegardée que si le juge intervient dans le plus court délai possible. 13. Les dispositions contestées du d du 2° du paragraphe I de l'article 11 de la loi du 23 mars 2020 habilitaient le Gouvernement à prendre, par voie d'ordonnance, des mesures adaptant les règles relatives au déroulement et à la durée des détentions provisoires aux seules fins de limiter la propagation de l'épidémie de covid-19 pour permettre, d'une part, l'allongement des délais au cours de l'instruction et en matière d'audiencement, pour une durée proportionnée à celle de droit commun et ne pouvant excéder trois mois en matière délictuelle et six mois en appel ou en matière criminelle, et, d'autre part, la prolongation de ces mesures au vu des seules réquisitions écrites du parquet et des observations écrites de la personne et de son avocat. 14. Dès lors, les dispositions contestées n'excluent pas toute intervention d'un juge lors de la prolongation d'un titre de détention provisoire venant à expiration durant la période d'application de l'état d'urgence sanitaire. Elles ne portent donc atteinte ni par elles-mêmes, ni par les conséquences qui en découlent nécessairement, aux exigences de l'article 66 de la Constitution imposant l'intervention d'un juge dans le plus court délai possible en cas de privation de liberté. L'inconstitutionnalité alléguée par les requérants ne pourrait résulter que de l'ordonnance prise sur le fondement de ces dispositions. 15. Les dispositions d'une loi d'habilitation ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser le Gouvernement, dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en application de l'article 38 de la Constitution, du respect des règles et principes de valeur constitutionnelle, notamment les exigences résultant de son article 66 s'agissant des modalités de l'intervention du juge judiciaire en cas de prolongation d'une mesure de détention provisoire. 16. Le grief tiré de la méconnaissance de ces exigences par la loi d'habilitation doit donc être écarté. Il en va de même du grief tiré de l'incompétence négative dirigé contre les dispositions contestées, qui est inopérant à l'égard d'une loi d'habilitation. 17. Les mots « des détentions provisoires » figurant au d du 2° du paragraphe I de l'article 11 de la loi du 23 mars 2020, qui ne méconnaissent pas non plus les droits de la défense ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarés conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - L'intervention de M. Christian M. n'est pas admise. Article 2. - Les mots « des détentions provisoires » figurant au d du 2° du paragraphe I de l'article 11 de la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 sont conformes à la Constitution. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 2 juillet 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 3 juillet 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire, sous le n° 2020-803 DC, le 4 juillet 2020, par MM. Patrick KANNER, Maurice ANTISTE, Mme Viviane ARTIGALAS, MM. David ASSOULINE, Claude BÉRIT-DÉBAT, Jacques BIGOT, Joël BIGOT, Mmes Maryvonne BLONDIN, Nicole BONNEFOY, MM. Yannick BOTREL, Michel BOUTANT, Thierry CARCENAC, Mmes Catherine CONCONNE, Hélène CONWAY-MOURET, MM. Roland COURTEAU, Michel DAGBERT, Yves DAUDIGNY, Marc DAUNIS, Mme Marie-Pierre de la GONTRIE, MM. Gilbert-Luc DEVINAZ, Jérôme DURAIN, Alain DURAN, Vincent ÉBLÉ, Rémi FÉRAUD, Mme Corinne FÉRET, M. Jean-Luc FICHET, Mmes Martine FILLEUL, Annie GUILLEMOT, Laurence HARRIBEY, MM. Jean-Michel HOULLEGATTE, Olivier JACQUIN, Mme Victoire JASMIN, MM. Patrice JOLY, Bernard JOMIER, Mme Gisèle JOURDA, MM. Éric KERROUCHE, Jean-Yves LECONTE, Mme Claudine LEPAGE, M. Jean-Jacques LOZACH, Mme Monique LUBIN, MM. Victorin LUREL, Jacques-Bernard MAGNER, Christian MANABLE, Didier MARIE, Mmes Michelle MEUNIER, Marie-Pierre MONIER, M. Franck MONTAUGÉ, Mmes Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Angèle PRÉVILLE, M. Claude RAYNAL, Mmes Sylvie ROBERT, Laurence ROSSIGNOL, MM. Jean-Pierre SUEUR, Simon SUTOUR, Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN, MM. Rachid TEMAL, Jean-Claude TISSOT, Mme Nelly TOCQUEVILLE, MM. Jean-Marc TODESCHINI, Jean-Louis TOURENNE, André VALLINI, Mme Sabine VAN HEGHE et M. Yannick VAUGRENARD, sénateurs. Le 5 juillet 2020, le Premier ministre a demandé au Conseil constitutionnel de statuer selon la procédure d'urgence prévue au troisième alinéa de l'article 61 de la Constitution. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code de la santé publique ; - le code de la sécurité intérieure ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 7 juillet 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire. Ils contestent certaines dispositions de son article 1er. - Sur certaines dispositions du premier alinéa du paragraphe I de l'article 1er : 2. Le paragraphe I de l'article 1er de la loi déférée permet au Premier ministre, pendant une période déterminée, de prendre diverses mesures de réglementation ou d'interdiction dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. 3. Selon les sénateurs requérants, en prévoyant que les mesures qu'elles édictent sont applicables « hors des territoires mentionnés à l'article 2 » alors que cet article mentionne l'ensemble des territoires de la République, les dispositions du premier alinéa du paragraphe I de l'article 1er seraient entachées d'inintelligibilité. 4. L'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, impose au législateur d'adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques. 5. Le premier alinéa du paragraphe I de l'article 1er prévoit que, du 11 juillet au 30 octobre 2020, le Premier ministre peut prendre diverses mesures dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. Ces mesures peuvent uniquement être prises « hors des territoires mentionnés à l'article 2 ». 6. D'une part, en application du paragraphe I de l'article 2, l'état d'urgence sanitaire est prorogé jusqu'au 30 octobre 2020 sur les seuls territoires de la Guyane et de Mayotte. Toutefois, conformément au deuxième alinéa de l'article L. 3131-14 du code de la santé publique, il peut être mis fin à cet état d'urgence par décret en conseil des ministres avant cette date. D'autre part, le paragraphe II de ce même article 2 rappelle que l'état d'urgence sanitaire peut, par ailleurs, toujours être déclaré dans les autres territoires de la République aux conditions prévues au premier alinéa de l'article L. 3131-13 du code de la santé publique, lorsque l'évolution locale de la situation sanitaire met en péril la santé de la population. Enfin, le paragraphe III de ce même article 2 indique que le régime transitoire prévu par l'article 1er s'applique sur un territoire lorsque l'état d'urgence sanitaire n'est pas déclaré sur celui-ci. 7. Il en résulte que, en prévoyant que les dispositions de l'article 1er ne s'appliquent pas sur les territoires mentionnés à l'article 2, le législateur a indiqué que le régime transitoire prévu par cet article 1er ne peut être mis en œuvre sur un territoire sur lequel l'état d'urgence sanitaire est déclaré. Ces dispositions ne sont donc ni imprécises ni équivoques. Le grief tiré de la méconnaissance de l'objectif de valeur constitutionnelle d'accessibilité et d'intelligibilité doit donc être écarté. - Sur le 1° du paragraphe I de l'article 1er : 8. Le 1° du paragraphe I de l'article 1er permet au Premier ministre de réglementer ou interdire sous certaines conditions la circulation des personnes et des véhicules ainsi que celle des moyens de transport collectif. 9. Les sénateurs requérants reprochent à ces dispositions de permettre aux pouvoirs publics de méconnaître la liberté d'aller et de venir dans la mesure où elles seraient susceptibles de conduire à une totale interdiction de circulation alors même que les conditions de recours à l'état d'urgence sanitaire ne sont plus réunies. 10. Aux termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la Nation « garantit à tous … la protection de la santé ». Il en découle un objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. 11. Il appartient au législateur d'assurer la conciliation entre cet objectif de valeur constitutionnelle et le respect des droits et libertés reconnus à toutes les personnes qui résident sur le territoire de la République. Parmi ces droits et libertés figure la liberté d'aller et de venir, composante de la liberté personnelle protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789. 12. En premier lieu, la circulation des personnes et des véhicules étant un vecteur de propagation de l'épidémie de covid-19, le législateur a entendu permettre aux pouvoirs publics de prendre des mesures visant à restreindre les déplacements, en particulier dans les zones de circulation active du virus, pour limiter les risques sanitaires liés à cette épidémie. Il a ainsi poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de santé. 13. En deuxième lieu, ces mesures ne peuvent être prononcées que pour la période allant du 11 juillet au 30 octobre 2020, durant laquelle le législateur a estimé qu'un risque important de propagation de l'épidémie persistait. Il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, qui ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, de remettre en cause l'appréciation par le législateur de ce risque, dès lors que cette appréciation n'est pas, en l'état des connaissances, manifestement inadéquate au regard de la situation présente. 14. En troisième lieu, en vertu du premier alinéa du paragraphe I de l'article 1er, les mesures contestées ne peuvent être prises que dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. Selon le paragraphe III de ce même article, elles doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. Conformément au paragraphe IV, ces mesures peuvent faire l'objet d'un référé-suspension ou d'un référé-liberté devant le juge administratif. 15. En dernier lieu, d'une part, l'interdiction de circulation des personnes et des véhicules ainsi que l'interdiction d'accès aux moyens de transport collectif de voyageurs ne peut être édictée que dans les territoires où une circulation active du virus a été constatée. D'autre part, il ressort des travaux parlementaires que l'interdiction de circulation des personnes ne peut conduire à leur interdire de sortir de leur domicile ou de ses alentours. Enfin, l'ensemble des mesures susceptibles d'être prises en application des dispositions contestées s'appliquent sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux, professionnels et de santé. 16. Il résulte de ce qui précède que, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a procédé à une conciliation équilibrée entre les exigences constitutionnelles précitées. 17. Par conséquent, le 1° du paragraphe I de l'article 1er, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution. - Sur le second alinéa du 2° et le 3° du paragraphe I de l'article 1er : 18. Le second alinéa du 2° du paragraphe I de l'article 1er permet au Premier ministre d'ordonner la fermeture provisoire de certaines catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion. Le 3° du même paragraphe I l'autorise à réglementer les rassemblements de personnes, les réunions et les activités se déroulant sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public. 19. Pour les sénateurs requérants, l'état d'urgence sanitaire s'achevant le 10 juillet 2020, ces dispositions n'auraient plus de justification. En outre, ils dénoncent le fait que le 3° autoriserait le Premier ministre à interdire les rassemblements ou les réunions de personnes à partir d'un certain seuil ou à substituer au régime déclaratif actuel applicable aux manifestations un régime d'autorisation préalable. Faute de garanties suffisantes, de telles interdictions, qui pourraient être prononcées largement pour lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19, méconnaîtraient la liberté de manifestation et la liberté de réunion. 20. Aux termes de l'article 11 de la Déclaration de 1789 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». La liberté d'expression et de communication, dont découle le droit d'expression collective des idées et des opinions, est d'autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés. Il s'ensuit que les atteintes portées à l'exercice de cette liberté et de ce droit doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi. 21. En premier lieu, d'une part, la compétence conférée au Premier ministre pour ordonner la fermeture provisoire de certaines catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion est subordonnée au fait que les activités qui s'y déroulent, par leur nature même, ne permettent pas de garantir la mise en œuvre des mesures susceptibles de prévenir les risques de propagation du virus. Ces fermetures peuvent également être ordonnées lorsque les établissements en cause sont situés dans certaines parties du territoire dans lesquelles est constatée une circulation active du virus. Dans l'un comme dans l'autre cas, l'objet de telles fermetures provisoires ne peut être que de remédier au risque accru de contamination que présente la fréquentation publique de ces lieux. Ces mesures répondent donc à l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. 22. D'autre part, la mesure de fermeture provisoire ne s'applique qu'aux lieux ou établissements accessibles au public. Elle ne concerne pas les locaux d'habitation ni les parties de tels établissements qui n'ont pas vocation à accueillir du public. En outre, elle est également soumise aux conditions et garanties mentionnées aux paragraphes 13 et 14. 23. En second lieu, la réglementation des rassemblements, activités ou réunions rendue possible par les dispositions contestées vise à déterminer les conditions dans lesquelles ils doivent se tenir pour limiter la propagation de l'épidémie. 24. D'une part, les rassemblements de personnes, les réunions ou les activités qui se déroulent sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public présentent un risque accru de propagation de l'épidémie du fait de la rencontre ponctuelle d'un nombre important de personnes venant, parfois, de lieux éloignés. Une telle réglementation répond donc à l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. 25. D'autre part, le 3° du paragraphe I de l'article 1er énonce qu'il s'applique sans préjudice des articles L. 211-2 et L. 211-4 du code de la sécurité intérieure. Il ressort de cette référence, à la lumière des travaux préparatoires, que le législateur n'a pas autorisé le Premier ministre à substituer un régime d'autorisation préalable au régime déclaratif qui s'applique à l'organisation des manifestations sur la voie publique. En outre, les mesures de réglementation adoptées par le Premier ministre sont soumises aux conditions et garanties mentionnées aux paragraphes 13 et 14 et, en particulier, elles ne peuvent se fonder, comme il a été mentionné au paragraphe 14, que sur des motifs tenant à l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutte contre la propagation de l'épidémie de covid-19. 26. Il résulte de tout ce qui précède que, en adoptant les dispositions contestées, le législateur n'a pas porté au droit d'expression collective des idées et des opinions une atteinte qui ne serait pas nécessaire, adaptée et proportionnée à l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. Ces dispositions, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont conformes à la Constitution. - Sur certaines dispositions du paragraphe VII de l'article 1er : 27. Le paragraphe VII de l'article 1er de la loi rend notamment applicable le quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique aux mesures de réglementation et d'interdiction qui peuvent être prises par le pouvoir réglementaire en application des paragraphes I et II du même article 1er. Ce quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 réprime la violation répétée de ces réglementations ou interdictions d'une peine délictuelle. 28. Les sénateurs requérants font valoir que ces dispositions méconnaîtraient le principe de légalité des délits et des peines. Ils soutiennent que les mesures dont la méconnaissance constitue un délit ne sont pas suffisamment définies par le législateur qui en aurait laissé la détermination au pouvoir réglementaire. 29. Selon l'article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». Selon l'article 34 de la Constitution : « La loi fixe les règles concernant … la détermination des crimes et délits ainsi que les peines qui leur sont applicables ». Le législateur tient de l'article 34 de la Constitution, ainsi que du principe de légalité des délits et des peines qui résulte de l'article 8 de la Déclaration de 1789, l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale et de définir les crimes et délits en termes suffisamment clairs et précis pour exclure l'arbitraire. 30. En premier lieu, les paragraphes I et de II de l'article 1er de la loi autorisent le pouvoir réglementaire à prendre, du 11 juillet 2020 au 30 octobre 2020, certaines mesures de réglementation ou d'interdiction dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. 31. D'une part, le législateur a prévu aux 1° à 4° du paragraphe I de l'article 1er que le Premier ministre peut, sous réserve des déplacements strictement indispensables aux besoins familiaux, professionnels et de santé, réglementer la circulation des personnes et des véhicules ainsi que l'accès aux moyens de transport collectif et, pour les seuls transports aériens et maritimes, interdire ou restreindre les déplacements de personnes et la circulation des moyens de transport. Sous la même réserve et dans les parties du territoire où est constatée une circulation active du virus responsable de l'épidémie de covid-19, le Premier ministre peut interdire la circulation des personnes et des véhicules et l'accès aux moyens de transport collectif. Le Premier ministre peut également réglementer l'ouverture au public d'une ou plusieurs catégories d'établissements recevant du public ainsi que des lieux de réunion, à l'exception des locaux à usage d'habitation, en garantissant l'accès des personnes aux biens et services de première nécessité ainsi que, tout en garantissant ce même accès, prononcer la fermeture provisoire de ces mêmes établissements et lieux de réunion lorsqu'ils accueillent des activités qui, par leur nature même, ne permettent pas de garantir la mise en œuvre des mesures de nature à prévenir les risques de propagation du virus ou lorsqu'ils se situent dans certaines parties du territoire dans lesquelles est constatée une circulation active du virus. Le Premier ministre peut aussi réglementer les rassemblements de personnes, les réunions et les activités sur la voie publique et dans les lieux ouverts au public. Il peut enfin imposer aux personnes souhaitant se déplacer par transport public aérien à destination ou en provenance du territoire métropolitain ou de l'une des collectivités mentionnées à l'article 72-3 de la Constitution de présenter le résultat d'un examen biologique de dépistage virologique ne concluant pas à une contamination par le covid-19. En outre, le paragraphe II de l'article 1er prévoit que, lorsque le Premier ministre prend de telles mesures, il peut habiliter le préfet à prendre toute mesure générale ou individuelle d'application ou lorsque les mesures doivent s'appliquer dans un champ géographique qui n'excède pas le territoire d'un département, habiliter le préfet à les décider lui-même. Dès lors, le législateur a défini les éléments essentiels de ces mesures de réglementation et d'interdiction. 32. D'autre part, le paragraphe III de l'article 1er exige que ces mesures soient strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu et qu'il y soit mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. 33. En second lieu, il résulte du quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique que la violation de ces réglementations ou interdictions ne constitue un délit que lorsqu'elle est commise alors que, dans les trente jours précédents, trois autres violations de la même obligation ou interdiction ont déjà été verbalisées. 34. Dès lors, le législateur a suffisamment déterminé le champ des obligations et interdictions qui peuvent être édictées par le pouvoir réglementaire ainsi que les conditions dans lesquelles leur méconnaissance constitue un délit. Par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines doit être écarté. 35. Par conséquent, le renvoi opéré par le paragraphe VII de l'article 1er de la loi au quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution. - Sur les autres dispositions : 36. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de la loi organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire : - le 1°, le second alinéa du 2° et le 3° du paragraphe I de l'article 1er ; - le renvoi opéré par le paragraphe VII du même article 1er au quatrième alinéa de l'article L. 3136-1 du code de la santé publique. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 9 juillet 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 9 juillet 2020
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, le 3 juin 2020, par le Premier ministre, dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 37 de la Constitution d'une demande enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-286 L. Le Premier ministre demande au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la nature juridique des dispositions du paragraphe IX de l'article 6 de la loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020, à l'exception de son premier alinéa et de son 1° ainsi que des mots « Il est composé : » qui précèdent celui-ci. Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment ses articles 34 et 37 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 24, 25 et 26 ; - la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ; - la loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Aux termes du dix-huitième alinéa de l'article 34 de la Constitution, « les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'État dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique ». Selon l'article 34 de la loi organique du 1er août 2001 mentionnée ci-dessus, la loi de finances peut comporter « toutes dispositions relatives à l'information et au contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ». Toutefois, les modalités de mise en œuvre de cette information et de ce contrôle relèvent du domaine du règlement. 2. Le paragraphe IX de l'article 6 de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus instaure un comité placé auprès du Premier ministre chargé de veiller au suivi de la mise en œuvre et à l'évaluation des mesures de soutien financier aux entreprises confrontées à l'épidémie de covid-19. 3. En premier lieu, les a à e du même paragraphe prévoient, à ce titre, que la mission du comité porte sur la garantie de l'État aux prêts de trésorerie, sur la garantie de l'État accordée à la caisse centrale de réassurance pour certaines opérations d'assurance ou de réassurance, sur le fonds de solidarité créé à destination des entreprises particulièrement touchées par les conséquences économiques, financières et sociales de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des mesures prises pour limiter cette propagation, sur le dispositif d'activité partielle ainsi que sur les prêts et avances remboursables accordés sur le compte de concours financiers « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ». Ces mesures sont soit financées par l'État, soit correspondent à des garanties, des prêts ou des avances remboursables accordés par l'État. Elles concernent donc la gestion des finances publiques. 4. En second lieu, il résulte de ces mêmes dispositions ainsi que des deux derniers alinéas du paragraphe IX que les documents communiqués par le Gouvernement au comité, au nombre desquels le législateur a expressément prévu les statistiques hebdomadaires sur la plupart de ces dispositifs, doivent être transmis, pour information, aux commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. En outre, le comité établit un rapport public un an après la promulgation de la loi du 23 mars 2020. 5. Il résulte des travaux parlementaires qu'en adoptant les dispositions précitées, le législateur a entendu assurer l'information du Parlement sur des mesures qui intéressent la gestion des finances publiques. Elles sont au nombre des dispositions dont la loi organique du 1er août 2001 permet l'inclusion dans une loi de finances. Par suite, elles ont un caractère législatif. 6. En revanche, les dispositions de la première phrase du huitième alinéa et des dixième à treizième alinéas du paragraphe IX, qui prévoient une partie de la composition du comité, ainsi que le quatorzième alinéa, qui dispose que ses membres exercent leurs fonctions à titre gratuit, constituent des modalités de mise en œuvre qui relèvent du domaine du règlement. Par conséquent, elles ont un caractère réglementaire. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Ont un caractère législatif les dispositions suivantes du paragraphe IX de l'article 6 la loi n° 2020-289 du 23 mars 2020 de finances rectificative pour 2020 : - les deuxième à septième alinéas ; - les quinzième et seizième alinéas. Article 2. - Ont un caractère réglementaire les dispositions suivantes du même paragraphe IX : - la première phrase du huitième alinéa ; - les dixième à quatorzième alinéas. Article 3. - Cette décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 2 juillet 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 2 juillet 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 13 février 2020 par la Cour de cassation (deuxième chambre civile, arrêt n° 301 du même jour), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Emmanuel W. par la SCP David Gaschignard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-840 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 723-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi organique n° 2020-365 du 30 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour la Caisse nationale des barreaux français, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Gatineau-Fattaccini-Rebeyrol, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 5 mars 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 9 mars 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me David Gaschignard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le requérant, Me Jean-Jacques Gatineau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la Caisse nationale des barreaux français, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 12 mai 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Dans sa rédaction résultant de la loi du 21 août 2003 mentionnée ci-dessus, l'article L. 723-11 du code de la sécurité sociale, relatif au régime d'assurance vieillesse des avocats, prévoit : « Les assurés ne justifiant pas d'une durée d'assurance déterminée ont droit à une fraction de l'allocation aux vieux travailleurs salariés mentionnée au chapitre Ier du titre Ier du livre VIII en fonction de cette durée ». 2. Le requérant reproche à ces dispositions de soumettre à des modalités de calcul différentes la pension de retraite bénéficiant aux avocats au titre de leur régime d'assurance vieillesse de base, selon la durée de cotisation dont ils peuvent justifier auprès de la Caisse nationale des barreaux français. En effet, lorsque cette durée est supérieure ou égale à celle déterminée en application de ces dispositions, la pension versée aux avocats est calculée en proportion de la durée d'assurance à la Caisse nationale des barreaux français alors que, en deçà du seuil requis, elle se limite à une fraction de l'allocation aux vieux travailleurs salariés. Selon le requérant, il en résulterait, en premier lieu, une violation du principe d'égalité devant la loi en raison, d'une part, de la différence de traitement injustifiée entre les assurés sociaux relevant d'un même régime d'assurance vieillesse, d'autre part, de l'effet de seuil excessif qu'engendreraient ces dispositions. Le requérant fait également valoir, en deuxième lieu, que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence dans des conditions affectant le principe d'égalité devant la loi en ne déterminant pas lui-même la durée d'assurance minimale ouvrant droit à une pension de retraite de base. En dernier lieu, il soutient que ces dispositions porteraient une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens garanti par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. 3. La méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit. 4. Aux termes de l'article 34 de la Constitution : « La loi détermine … les principes fondamentaux … de la sécurité sociale ». Il incombe au législateur d'exercer pleinement la compétence que lui confie la Constitution et, en particulier, son article 34. Au nombre de ces principes fondamentaux de la sécurité sociale, et qui comme tels relèvent du domaine de la loi, il y a lieu de ranger l'existence même d'un régime spécial de sécurité sociale. Il en va de même de la détermination des prestations et des catégories de bénéficiaires ainsi que de la définition de la nature des conditions exigées pour l'attribution des prestations. En revanche, ressortissent à la compétence du pouvoir réglementaire les modalités d'application de ces principes, à condition de ne pas en dénaturer la portée. 5. Selon l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 6. En application de l'article L. 723-1 du code de la sécurité sociale, tous les avocats sont affiliés de plein droit à la Caisse nationale des barreaux français, qui est chargée de gérer leur régime d'assurance vieillesse de base. Selon le paragraphe I de l'article L. 723-10-1 du même code, lorsqu'un assuré relevant de ce régime atteint l'âge de départ à la retraite après avoir accompli la durée d'assurance fixée par le pouvoir réglementaire en application du deuxième alinéa de l'article L. 351-1, le montant de sa pension de retraite est calculé en proportion de la durée d'assurance à la Caisse nationale des barreaux français, jusqu'à un maximum dit « taux plein ». À défaut de justifier d'une durée d'assurance suffisante, il résulte des dispositions contestées que l'intéressé ne peut prétendre qu'au bénéfice d'une fraction, précisée par voie réglementaire en fonction de cette durée, de l'allocation aux vieux travailleurs salariés. 7. En premier lieu, en exigeant le respect d'une durée d'assurance déterminée comme condition d'ouverture du droit à une pension de retraite de base à taux plein et en prévoyant le versement d'une pension minorée correspondant à une fraction de l'allocation aux vieux travailleurs salariés pour les assurés ne justifiant pas de cette durée d'assurance, le législateur a déterminé les prestations susceptibles d'être allouées aux assurés du régime d'assurance vieillesse des avocats et a défini la nature de la condition exigée pour l'attribution de chacune de ces prestations. Dès lors, il pouvait, sans méconnaître sa propre compétence, renvoyer au pouvoir réglementaire la détermination de la durée d'assurance minimale ouvrant droit à une pension de retraite de base. 8. En second lieu, en prévoyant une attribution de prestation différente selon la durée de cotisation auprès de la Caisse nationale des barreaux français, les dispositions contestées instituent une différence de traitement entre les assurés sociaux relevant du même régime de retraite. 9. Toutefois, d'une part, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu inciter les avocats à poursuivre des carrières suffisamment longues pour garantir le financement de leur propre régime d'assurance vieillesse et éviter ainsi que les pensions de retraite versées à ceux qui ne justifient pas d'une durée d'assurance minimale ne grèvent trop lourdement les ressources de la Caisse nationale des barreaux français. Dès lors, la différence de traitement contestée est justifiée par un motif d'intérêt général et en rapport avec l'objet de la loi, qui est d'assurer l'équilibre financier de ce régime de retraite. 10. D'autre part, le caractère excessif ou non de l'effet de seuil contesté dépend de la durée d'assurance et du montant de fraction de l'allocation aux vieux travailleurs salariés, tous deux déterminés, non par la loi, mais par le pouvoir réglementaire. 11. Le grief tiré de l'atteinte au principe d'égalité devant la loi doit donc être écarté. 12. Les dispositions de l'article L. 723-11 du code de la sécurité sociale, qui n'entraînent aucune privation de propriété au sens de l'article 17 de la Déclaration de 1789, ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit. Par conséquent, elles doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - L'article L. 723-11 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2003-775 du 21 août 2003 portant réforme des retraites, est conforme à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 mai 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 20 mai 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 2 mars 2020 par le Conseil d'État (décision n° 436454 du 28 février 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour M. Rémi V. par Me Christian Mear, avocat au barreau de Rennes. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-842 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des mots « lorsque son versement résulte d'une décision de justice et » figurant au 2° du paragraphe II de l'article 156 du code général des impôts. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code civil ; - le code général des impôts ; - le décret n° 2015-608 du 3 juin 2015 portant incorporation au code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code ; - le décret n° 2016-775 du 10 juin 2016 portant incorporation au code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 25 mars 2020 ; - les observations présentées pour le requérant par Me Paul Harand, avocat au barreau de Rennes, enregistrées le 17 avril 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 12 mai 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi des mots « lorsque son versement résulte d'une décision de justice et » figurant au 2° du paragraphe II de l'article 156 du code général des impôts dans ses rédactions résultant des décrets du 3 juin 2015 et du 10 juin 2016 mentionnés ci-dessus. 2. Le 2° du paragraphe II de l'article 156 du code général des impôts prévoit que, pour la détermination du revenu imposable à l'impôt sur le revenu, la contribution aux charges du mariage peut être déduite « lorsque son versement résulte d'une décision de justice et » à condition que les époux fassent l'objet d'une imposition séparée. 3. Le requérant soutient que ces dispositions seraient contraires aux principes d'égalité devant la loi et devant les charges publiques. Elles introduiraient une différence de traitement injustifiée entre les contribuables qui versent une contribution aux charges du mariage selon que leur contribution est versée ou non en exécution d'une décision de justice puisque la contribution ne peut être déduite du revenu que dans le premier cas. - Sur le fond : 4. Selon l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 5. Les époux doivent, au titre de leurs droits et devoirs respectifs, contribuer aux charges du mariage. L'article 214 du code civil prévoit que, si les conventions matrimoniales ne règlent pas cette contribution, les époux contribuent à proportion de leurs facultés respectives. Si l'un des époux ne remplit pas ses obligations, il peut y être judiciairement contraint par l'autre. 6. Le 2° du paragraphe II de l'article 156 du code général des impôts prévoit que cette contribution peut être déduite du revenu de celui qui la verse en exécution d'une décision de justice lorsque les époux font l'objet d'une imposition distincte. Ce faisant, les dispositions contestées instituent une différence de traitement entre les contribuables selon que leur contribution est versée ou non en exécution d'une décision de justice. 7. Or, d'une part, la décision de justice rendue dans ce cadre a pour objet soit de contraindre un des époux à s'acquitter de son obligation de contribuer aux charges du mariage, soit d'homologuer la convention par laquelle les époux se sont accordés sur le montant et les modalités de cette contribution. Ainsi, une telle décision de justice n'a ni pour objet ni nécessairement pour effet de garantir l'absence de toute optimisation fiscale. D'autre part, le simple fait qu'un contribuable s'acquitte spontanément de son obligation légale sans y avoir été contraint par une décision de justice ne permet pas de caractériser une telle optimisation. 8. Dès lors, la différence de traitement contestée n'est justifiée ni par une différence de situation au regard de la lutte contre l'optimisation fiscale ni par une autre différence de situation en rapport avec l'objet de la loi. Elle n'est pas non plus justifiée par un motif d'intérêt général. 9. Par conséquent, les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant la loi et doivent donc, sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre grief, être déclarées contraires à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 10. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 11. En premier lieu, les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans leurs rédactions contestées résultant des décrets du 3 juin 2015 et du 10 juin 2016, ne sont plus en vigueur. 12. En second lieu, la déclaration d'inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de publication de la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « lorsque son versement résulte d'une décision de justice et » figurant au 2° du paragraphe II de l'article 156 du code général des impôts, dans ses rédactions résultant du décret n° 2015-608 du 3 juin 2015 portant incorporation au code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code et du décret n° 2016-775 du 10 juin 2016 portant incorporation au code général des impôts de divers textes modifiant et complétant certaines dispositions de ce code, sont contraires à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées aux paragraphes 11 et 12 de cette décision. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 28 mai 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 28 mai 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 13 février 2020 par le Conseil d'État (décision n° 433539 du 12 février 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour les associations La Quadrature du Net, French Data Network, Franciliens.Net et la Fédération des fournisseurs d'accès à internet associatifs par Me Alexis Fitzjean Ó Cobhthaigh, avocat au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-841 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des trois derniers alinéas de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi organique n° 2020-365 du 30 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - le code de la propriété intellectuelle ; - la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet ; - les décisions du Conseil constitutionnel nos 2009-580 du 10 juin 2009 et 2015-715 DC du 5 août 2015 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour les associations requérantes par Me Fitzjean Ó Cobhthaigh, enregistrées le 9 mars 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Fitzjean Ó Cobhthaigh pour les associations requérantes et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 12 mai 2020 ; Au vu de la note en délibéré présentée pour les associations requérantes par Me Fitzjean Ó Cobhthaigh, enregistrée le 13 mai 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi du 12 juin 2009 mentionnée ci-dessus, précise les pouvoirs des agents de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, pour l'exercice de ses missions. Ses trois derniers alinéas prévoient :« Ils peuvent, pour les nécessités de la procédure, obtenir tous documents, quel qu'en soit le support, y compris les données conservées et traitées par les opérateurs de communications électroniques en application de l'article L. 34-1 du code des postes et des communications électroniques et les prestataires mentionnés aux 1 et 2 du I de l'article 6 de la loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique. « Ils peuvent également obtenir copie des documents mentionnés à l'alinéa précédent. « Ils peuvent, notamment, obtenir des opérateurs de communications électroniques l'identité, l'adresse postale, l'adresse électronique et les coordonnées téléphoniques de l'abonné dont l'accès à des services de communication au public en ligne a été utilisé à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d'œuvres ou d'objets protégés sans l'autorisation des titulaires des droits prévus aux livres Ier et II lorsqu'elle est requise ». 2. Les associations requérantes estiment que ces dispositions méconnaissent le droit au respect de la vie privée, la protection des données à caractère personnel et le secret des correspondances. Elles leur reprochent, en effet, d'autoriser les agents de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet à se faire communiquer tous documents, quel qu'en soit le support, y compris les données de connexion, sans limiter le champ de ces documents ni prévoir suffisamment de garanties. - Sur la recevabilité : 3. Selon les dispositions combinées du troisième alinéa de l'article 23-2 et du troisième alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel ne peut être saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à une disposition qu'il a déjà déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une de ses décisions, sauf changement des circonstances. 4. Dans sa décision du 10 juin 2009 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a spécialement examiné les trois derniers alinéas de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans la même rédaction que celle contestée par les associations requérantes. Il a déclaré ces dispositions conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif de cette décision. 5. Toutefois, depuis cette déclaration de conformité, le Conseil constitutionnel a jugé contraires au droit au respect de la vie privée, dans sa décision du 5 août 2015 mentionnée ci-dessus, des dispositions instaurant un droit de communication des données de connexion au profit des agents de l'Autorité de la concurrence analogue à celui prévu par les dispositions contestées. Cette décision constitue un changement des circonstances justifiant le réexamen des dispositions contestées. - Sur le fond : 6. En vertu de l'article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques. Il incombe au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de la propriété intellectuelle et, d'autre part, l'exercice des droits et des libertés constitutionnellement garantis. Au nombre de ces derniers figure le droit au respect de la vie privée protégé par les articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. 7. En vertu de l'article L. 336-3 du code de la propriété intellectuelle, le titulaire d'un accès à des services de communication au public en ligne a l'obligation de veiller à ce que cet accès ne fasse pas l'objet d'une utilisation à des fins de reproduction, de représentation, de mise à disposition ou de communication au public d'œuvres ou d'objets protégés par un droit d'auteur ou par un droit voisin, sans l'autorisation des titulaires de ses droits, lorsqu'elle est requise. Au sein de la Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet, la commission de protection des droits est chargée, lorsqu'elle est saisie d'un manquement à cette obligation, de prendre les mesures destinées à en assurer le respect. Il s'agit, conformément à l'article L. 331-25 du même code, d'adresser aux auteurs des manquements à l'obligation précitée une recommandation leur rappelant le contenu de cette obligation, leur enjoignant de la respecter et leur indiquant les sanctions encourues à défaut. . En ce qui concerne le droit de communication portant sur certaines informations d'identification des abonnés : 8. À l'exception du mot « notamment », les dispositions du dernier alinéa de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle confèrent aux agents de la Haute autorité le droit d'obtenir communication, par les opérateurs de communication électronique, de l'identité, de l'adresse postale, de l'adresse électronique et des coordonnées téléphoniques de l'abonné dont l'accès à des services de communication au public en ligne a été utilisé en violation de l'obligation énoncée à l'article L. 336-3. 9. En premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu renforcer la lutte contre les pratiques de contrefaçon sur internet, qui répond à l'objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle. 10. En deuxième lieu, ce droit de communication, qui n'est pas assorti d'un pouvoir d'exécution forcée, n'est ouvert qu'aux agents publics de la Haute autorité, dûment habilités et assermentés, qui sont soumis, dans l'utilisation de ces données, au secret professionnel. 11. En dernier lieu, d'une part, le champ des informations en cause se limite à l'identité et aux coordonnées électroniques, téléphoniques et postales des auteurs des manquements à l'obligation énoncée à l'article L. 336-3. D'autre part, ces informations sont nécessaires pour que leur soit adressée la recommandation mentionnée au paragraphe 7. Elles présentent donc un lien direct avec l'objet de la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits. 12. Il résulte de ce qui précède que le législateur a assorti le droit de communication contesté de garanties propres à assurer, entre le respect de la vie privée et l'objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle, une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée. 13. À l'exception du mot « notamment », le dernier alinéa de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, qui ne méconnaît pas non plus le secret des correspondances, ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, est conforme à la Constitution. . En ce qui concerne le droit de communication portant sur tous documents et les données de connexion : 14. Les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle et le mot « notamment » figurant au cinquième alinéa du même article confèrent aux agents de la Haute autorité le droit d'obtenir communication et copie de tous documents, quel qu'en soit le support, y compris les données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique. 15. L'exercice de ce droit répond aux mêmes fins et garanties que celles énoncées aux paragraphes 9 et 10. En outre, le troisième alinéa de l'article L. 331-21 subordonne son exercice aux nécessités de la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits. 16. Toutefois, d'une part, en faisant porter le droit de communication sur « tous documents, quel qu'en soit le support » et en ne précisant pas les personnes auprès desquelles il est susceptible de s'exercer, le législateur n'a ni limité le champ d'exercice de ce droit de communication ni garanti que les documents en faisant l'objet présentent un lien direct avec le manquement à l'obligation énoncée à l'article L. 336-3 du code de la propriété intellectuelle, qui justifie la procédure mise en œuvre par la commission de protection des droits. 17. D'autre part, ce droit de communication peut également s'exercer sur toutes les données de connexion détenues par les opérateurs de communication électronique. Or, compte tenu de leur nature et des traitements dont elles peuvent faire l'objet, de telles données fournissent sur les personnes en cause des informations nombreuses et précises, particulièrement attentatoires à leur vie privée. Elles ne présentent pas non plus nécessairement de lien direct avec le manquement à l'obligation énoncée à l'article L. 336-3. 18. Il résulte de ce qui précède que, dans ces conditions, le législateur n'a pas entouré la procédure prévue par les dispositions contestées de garanties propres à assurer une conciliation qui ne soit pas manifestement déséquilibrée entre le droit au respect de la vie privée et l'objectif de sauvegarde de la propriété intellectuelle. 19. Par conséquent, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre grief, les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle ainsi que le mot « notamment » figurant au dernier alinéa du même article doivent être déclarés contraires à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 20. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 21. En l'espèce, l'abrogation immédiate des dispositions déclarées contraires à la Constitution entraînerait des conséquences manifestement excessives. Par suite, il y a lieu de reporter au 31 décembre 2020 la date de l'abrogation des dispositions contestées. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009 favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, ainsi que le mot « notamment » figurant au cinquième et dernier alinéa du même article sont contraires à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 21 de cette décision. Article 3. - Le reste du dernier alinéa de l'article L. 331-21 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la même loi, est conforme à la Constitution. Article 4. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 mai 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 20 mai 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 5 mars 2020 par le Conseil d'État (décision n° 434742 du 4 mars 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour l'association Force 5 par la SCP Garreau Bauer-Violas Feschotte-Desbois, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-843 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 311-5 du code de l'énergie, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code de l'énergie ; - le code de l'environnement ; - l'ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie, ratifiée par l'article 38 de la loi n° 2013-619 du 16 juillet 2013 portant diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine du développement durable ; - la loi n° 2012-1460 du 27 décembre 2012 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement ; - l'ordonnance n° 2013-714 du 5 août 2013 relative à la mise en œuvre du principe de participation du public défini à l'article 7 de la Charte de l'environnement ; - la décision du Conseil d'État n° 412493 du 25 février 2019 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations en intervention présentées par l'association France Nature Environnement, enregistrées le 11 mars 2020 ; - les observations présentées pour les sociétés Total Direct Énergie Génération et Compagnie électrique de Bretagne, parties au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 25 mars 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 26 mars 2020 ; - les secondes observations en intervention présentées par l'association France Nature Environnement, enregistrées le 7 avril 2020 ; - les secondes observations présentées pour l'association requérante par la SCP Bauer-Violas Feschotte-Desbois Sebagh, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 16 avril 2020 ; - les secondes observations présentées pour les sociétés Total Direct Énergie Génération et Compagnie électrique de Bretagne par la SCP Piwnica et Molinié, enregistrées le 17 avril 2020 ; - les observations complémentaires présentées par le Premier ministre à la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l'instruction, enregistrées le 6 mai 2020 ; - les observations complémentaires présentées pour l'association intervenante à la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l'instruction, enregistrées le même jour ; - les observations complémentaires présentées pour l'association requérante par la SCP Bauer-Violas Feschotte-Desbois Sebagh à la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l'instruction, enregistrées le 7 mai 2020 ; - les observations complémentaires présentées pour les sociétés Total Direct Énergie Génération et Compagnie électrique de Bretagne par la SCP Piwnica et Molinié à la demande du Conseil constitutionnel pour les besoins de l'instruction, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Fabrice Sebagh, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour l'association requérante, Me François Molinié, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour les parties au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, Me Alexandre Faro, avocat au barreau de Paris, pour l'association intervenante et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 12 mai 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 311-5 du code de l'énergie, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 mai 2011 mentionnée ci-dessus, prévoit :« L'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité est délivrée par l'autorité administrative en tenant compte des critères suivants : « 1° La sécurité et la sûreté des réseaux publics d'électricité, des installations et des équipements associés ; « 2° Le choix des sites, l'occupation des sols et l'utilisation du domaine public ; « 3° L'efficacité énergétique ; « 4° Les capacités techniques, économiques et financières du candidat ou du demandeur ; « 5° La compatibilité avec les principes et les missions de service public, notamment avec les objectifs de programmation pluriannuelle des investissements et la protection de l'environnement ; « 6° Le respect de la législation sociale en vigueur. « L'autorisation est nominative et incessible. En cas de changement d'exploitant, l'autorisation ne peut être transférée au nouvel exploitant que par décision de l'autorité administrative ». 2. L'association requérante soutient que la décision administrative autorisant l'exploitation d'une installation de production d'électricité a une incidence directe et significative sur l'environnement. Dès lors, en ne prévoyant aucun dispositif permettant la participation du public à l'élaboration de cette décision, le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence et l'article 7 de la Charte de l'environnement. 3. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « par l'autorité administrative » figurant au premier alinéa de l'article L. 311-5 du code de l'énergie. - Sur le fond : 4. La méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit. 5. Selon l'article 7 de la Charte de l'environnement : « Toute personne a le droit, dans les conditions et les limites définies par la loi, d'accéder aux informations relatives à l'environnement détenues par les autorités publiques et de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ». Depuis l'entrée en vigueur de cette Charte, il incombe au législateur et, dans le cadre défini par la loi, aux autorités administratives de déterminer, dans le respect des principes ainsi énoncés, les modalités de la mise en œuvre de ces dispositions. 6. Selon l'article L. 311-1 du code de l'énergie, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 9 mai 2011, l'exploitation d'une installation de production électrique est subordonnée à une autorisation administrative délivrée, selon la procédure prévue aux articles L. 311-5 et L. 311-6 du même code, à l'opérateur qui en fait la demande ou qui est désigné au terme d'un appel d'offres en application de l'article L. 311-10. . En ce qui concerne l'incidence sur l'environnement de la décision autorisant l'exploitation d'une installation de production d'électricité : 7. Aux termes de l'article L. 311-5, lorsqu'elle se prononce sur l'autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité, l'autorité administrative tient compte, notamment, du « choix des sites » d'implantation de l'installation, des conséquences sur l'« occupation des sols » et sur l'« utilisation du domaine public », de l'« efficacité énergétique » de l'installation et de la compatibilité du projet avec « la protection de l'environnement ». Selon la jurisprudence constante du Conseil d'État, l'autorisation administrative ainsi délivrée désigne non seulement le titulaire de cette autorisation mais également le mode de production et la capacité autorisée ainsi que le lieu d'implantation de l'installation. 8. Il résulte de ce qui précède que la décision autorisant, sur le fondement de l'article L. 311-5, l'exploitation d'une installation de production d'électricité constitue une décision publique ayant une incidence sur l'environnement au sens de l'article 7 de la Charte de l'environnement. Est indifférente à cet égard la circonstance que l'implantation effective de l'installation puisse nécessiter l'adoption d'autres décisions administratives postérieurement à la délivrance de l'autorisation. . En ce qui concerne la participation du public à l'élaboration de la décision autorisant l'exploitation d'une installation de production d'électricité : 9. En premier lieu, avant l'ordonnance du 5 août 2013 mentionnée ci-dessus, aucune disposition n'assurait la mise en œuvre du principe de participation du public à l'élaboration des décisions publiques prévues à l'article L. 311-5 du code de l'énergie. S'il est loisible au législateur, compétent pour fixer les conditions et limites de l'exercice du droit protégé par l'article 7 de la Charte de l'environnement, de prévoir des modalités particulières de participation du public lorsqu'une même opération fait l'objet de décisions publiques successives, c'est à la condition que ces modalités garantissent une appréciation complète des incidences directes et significatives de ces décisions sur l'environnement. Or, en l'espèce, ni les dispositions contestées ni aucune autre disposition législative ne prévoyaient un tel dispositif. Par conséquent, le législateur a méconnu, pendant cette période, les exigences de l'article 7 de la Charte de l'environnement. 10. En second lieu, l'ordonnance du 5 août 2013, prise sur le fondement de l'article 38 de la Constitution à la suite de l'habilitation conférée au Gouvernement par l'article 12 de la loi du 27 décembre 2012 mentionnée ci-dessus, a inséré dans le code de l'environnement l'article L. 120-1-1, entré en vigueur le 1er septembre 2013. Applicable aux décisions individuelles des autorités publiques ayant une incidence sur l'environnement qui n'appartiennent pas à une catégorie de décisions pour lesquelles des dispositions législatives particulières ont prévu une participation du public, cet article L. 120-1-1 prévoit la mise à disposition du public par voie électronique du projet de décision ou, lorsque la décision est prise sur demande, du dossier de demande. Il permet ensuite au public de déposer ses observations, par voie électronique, dans un délai qui ne peut être inférieur à quinze jours à compter de la mise à disposition. 11. D'une part, cet article L. 120-1-1 institue une procédure qui répond aux exigences d'accès du public aux informations relatives à l'environnement et de participation à l'élaboration des décisions publiques prévues à l'article 7 de la Charte de l'environnement. D'autre part, si un projet de loi de ratification de l'ordonnance du 5 août 2013 a été déposé dans le délai fixé par l'article 12 de la loi du 27 décembre 2012, le Parlement ne s'est pas prononcé sur cette ratification. Toutefois, conformément au dernier alinéa de l'article 38 de la Constitution, à l'expiration du délai de l'habilitation fixé par le même article 12, c'est-à-dire à partir du 1er septembre 2013, les dispositions de cette ordonnance ne pouvaient plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif. Dès lors, à compter de cette date, elles doivent être regardées comme des dispositions législatives. Ainsi, les conditions et les limites de la procédure de participation du public prévue à l'article L. 120-1-1 sont « définies par la loi » au sens de l'article 7 de la Charte de l'environnement. 12. Par conséquent, à partir du 1er septembre 2013, les dispositions contestées de l'article L. 311-5 du code de l'énergie ne méconnaissaient plus cet article 7. Elles n'étaient, par ailleurs, contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit. 13. Il résulte de tout ce qui précède que ces dispositions, dans leur rédaction contestée, applicable du 1er juin 2011 au 18 août 2015, doivent être déclarées contraires à la Constitution jusqu'au 31 août 2013 et conformes à la Constitution à compter du 1er septembre 2013. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 14. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 15. En premier lieu, les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans leur rédaction contestée issue de l'ordonnance du 9 mai 2011, ne sont plus en vigueur. 16. En second lieu, la remise en cause des mesures ayant été prises avant le 1er septembre 2013 sur le fondement des dispositions déclarées contraires à la Constitution avant cette date aurait des conséquences manifestement excessives. Par suite, ces mesures ne peuvent être contestées sur le fondement de cette inconstitutionnalité. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « par l'autorité administrative » figurant au premier alinéa de l'article L. 311-5 du code de l'énergie, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 portant codification de la partie législative du code de l'énergie, étaient contraires à la Constitution jusqu'au 31 août 2013. Article 2. - Les mots « par l'autorité administrative » figurant au premier alinéa de l'article L. 311-5 du code de l'énergie, dans la même rédaction, sont conformes à la Constitution à compter du 1er septembre 2013. Article 3. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées aux paragraphes 15 et 16 de cette décision. Article 4. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 28 mai 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 28 mai 2020.
CONSTIT/CONSTEXT000042397485.xml
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, le 28 août 2020, par le Premier ministre, dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 37 de la Constitution d'une demande enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-288 L. Le Premier ministre demande au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la nature juridique de la seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 311-6 du code du tourisme. Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment ses articles 34 et 37 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 24, 25 et 26 ; - le code du tourisme ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 311-6 du code du tourisme fixe les conditions auxquelles les établissements touristiques d'hébergement peuvent se voir attribuer, sur demande de l'exploitant, le classement en hôtel de tourisme. En vertu de la seconde phrase de son premier alinéa, ce classement est valable pour une durée de cinq ans. 2. Ces dernières dispositions ne mettent en cause ni les principes fondamentaux « du régime de la propriété, des droits réels et des obligations civiles et commerciales », qui relèvent de la loi en vertu de l'article 34 de la Constitution, ni aucun des autres principes ou règles placés par la Constitution dans le domaine de la loi. Elles ont donc un caractère réglementaire. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - La seconde phrase du premier alinéa de l'article L. 311-6 du code du tourisme a un caractère réglementaire. Article 2. - Cette décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 septembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 17 septembre 2020.
CONSTIT/CONSTEXT000042397491.xml
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 9 juillet 2020 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêts nos 1433 et 1434 du 8 juillet 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, de deux questions prioritaires de constitutionnalité. Ces questions ont été respectivement posées pour MM. Geoffrey F. et Ossama H. par la SCP Spinosi et Sureau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elles ont été enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous les nos 2020-858 QPC et 2020-859 QPC. Elles sont relatives à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 137-3, 144 et 144-1 du code de procédure pénale. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; - le code de justice administrative ; - le code de procédure pénale ; - la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes ; - la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire ; - la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ; - la décision du Conseil d'État n° 410677 du 28 juillet 2017 ; - les arrêts nos 1399 et 1400 de la Cour de cassation du 8 juillet 2020 (chambre criminelle, nos 20-81.731 et 20-81.739) ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations en intervention présentées pour le Conseil national des barreaux et l'association Conférence des bâtonniers de France et d'outre-mer par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 29 juillet 2020 ; - les observations en intervention présentées pour les associations Section française de l'observatoire international des prisons, Avocats pour la défense des droits des détenus et Ligue des droits de l'homme par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le 30 juillet 2020 ; - les observations présentées pour les requérants par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le 31 juillet 2020 ; - les observations en intervention présentées pour le syndicat des avocats de France par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour le Conseil national des barreaux et l'association Conférence des bâtonniers de France et d'outre-mer par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, enregistrées le 4 août 2020 ; - les secondes observations présentées pour les requérants par la SCP Spinosi et Sureau, enregistrées le 17 août 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Patrice Spinosi, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le premier requérant et les associations Section française de l'observatoire international des prisons et Ligue des droits de l'homme, Me Maxime Gouache, avocat au barreau de Nantes, pour le second requérant, Me Amélie Morineau, avocate au barreau de Paris, pour l'association Avocats pour la défense des droits des détenus, Me Louis Boré, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le Conseil national des barreaux et l'association Conférence des bâtonniers de France et d'outre-mer, Me Paul Mathonnet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour le syndicat des avocats de France et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 22 septembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Il y a lieu de joindre les deux questions prioritaires de constitutionnalité pour y statuer par une seule décision. 2. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi de l'article 137-3 du code de procédure pénale dans sa rédaction résultant de la loi du 23 mars 2019 mentionnée ci-dessus, de l'article 144 du même code dans sa rédaction résultant de la loi du 24 novembre 2009 mentionnée ci-dessus et de l'article 144-1 du même code dans sa rédaction résultant de la loi du 15 juin 2000 mentionnée ci-dessus. 3. L'article 137-3 du code de procédure pénale, dans cette rédaction, prévoit : « Le juge des libertés et de la détention statue par ordonnance motivée. Lorsqu'il ordonne ou prolonge une détention provisoire ou qu'il rejette une demande de mise en liberté, l'ordonnance doit comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait sur le caractère insuffisant des obligations du contrôle judiciaire ou de l'assignation à résidence avec surveillance électronique et le motif de la détention par référence aux seules dispositions des articles 143-1 et 144. « Dans tous les cas, l'ordonnance est notifiée à la personne mise en examen qui en reçoit copie intégrale contre émargement au dossier de la procédure ». 4. L'article 144 du code de procédure pénale, dans cette rédaction, prévoit : « La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à l'un ou plusieurs des objectifs suivants et que ceux-ci ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique : « 1° Conserver les preuves ou les indices matériels qui sont nécessaires à la manifestation de la vérité ; « 2° Empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ainsi que sur leur famille ; « 3° Empêcher une concertation frauduleuse entre la personne mise en examen et ses coauteurs ou complices ; « 4° Protéger la personne mise en examen ; « 5° Garantir le maintien de la personne mise en examen à la disposition de la justice ; « 6° Mettre fin à l'infraction ou prévenir son renouvellement ; « 7° Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l'affaire. Toutefois, le présent alinéa n'est pas applicable en matière correctionnelle ». 5. L'article 144-1 du code de procédure pénale, dans cette rédaction, prévoit : « La détention provisoire ne peut excéder une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés à la personne mise en examen et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité. « Le juge d'instruction ou, s'il est saisi, le juge des libertés et de la détention doit ordonner la mise en liberté immédiate de la personne placée en détention provisoire, selon les modalités prévues par l'article 147, dès que les conditions prévues à l'article 144 et au présent article ne sont plus remplies ». 6. S'appuyant sur l'interprétation de ces dispositions qu'aurait effectuée la Cour de cassation dans ses décisions de renvoi, les requérants, rejoints par les parties intervenantes, considèrent que, faute d'imposer au juge judiciaire de faire cesser des conditions de détention provisoire contraires à la dignité de la personne humaine, le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence dans une mesure affectant le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, celui de prohibition des traitements inhumains et dégradants, la liberté individuelle, le droit à un recours juridictionnel effectif et le droit au respect de la vie privée. Les requérants dénoncent également, pour les mêmes motifs, la méconnaissance directe, par les dispositions renvoyées, des mêmes exigences constitutionnelles. 7. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le second alinéa de l'article 144-1 du code de procédure pénale. - Sur l'interprétation des dispositions soumises à l'examen du Conseil constitutionnel : 8. L'article 61-1 de la Constitution reconnaît à tout justiciable le droit de voir examiner, à sa demande, le moyen tiré de ce qu'une disposition législative méconnaît les droits et libertés que la Constitution garantit. En imposant, au cinquième alinéa de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 mentionnée ci-dessus et au deuxième alinéa de son article 23-5, l'examen par priorité des moyens de constitutionnalité avant les moyens tirés du défaut de conformité d'une disposition législative aux engagements internationaux de la France, le législateur organique a entendu garantir le respect de la Constitution et rappeler sa place au sommet de l'ordre juridique interne. 9. Il s'en déduit que le juge appelé à se prononcer sur le caractère sérieux d'une question prioritaire de constitutionnalité ne peut, pour réfuter ce caractère sérieux, se fonder sur l'interprétation de la disposition législative contestée qu'impose sa conformité aux engagements internationaux de la France, que cette interprétation soit formée simultanément à la décision qu'il rend ou l'ait été auparavant. Il n'appartient pas non plus au Conseil constitutionnel saisi d'une telle question prioritaire de constitutionnalité de tenir compte de cette interprétation pour conclure à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit. 10. En revanche, ces mêmes exigences ne s'opposent nullement à ce que soit contestée, dans le cadre d'une question prioritaire de constitutionnalité, la portée effective qu'une telle interprétation confère à une disposition législative, si l'inconstitutionnalité alléguée procède bien de cette interprétation. 11. Dès lors, en l'espèce, contrairement à ce que soutient le Premier ministre, il y a lieu pour le Conseil constitutionnel de se prononcer sur les dispositions contestées indépendamment de l'interprétation opérée par la Cour de cassation dans ses arrêts nos 1399 et 1400 du 8 juillet 2020 mentionnés ci-dessus, pour les rendre compatibles avec les exigences découlant de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. - Sur la conformité des dispositions contestées aux droits et libertés que la Constitution garantit : 12. Le Préambule de la Constitution de 1946 a réaffirmé et proclamé des droits, libertés et principes constitutionnels en soulignant d'emblée que : « Au lendemain de la victoire remportée par les peuples libres sur les régimes qui ont tenté d'asservir et de dégrader la personne humaine, le peuple français proclame à nouveau que tout être humain, sans distinction de race, de religion ni de croyance, possède des droits inaliénables et sacrés ». Il en ressort que la sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation est un principe à valeur constitutionnelle. 13. Aux termes de l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ». Selon son article 16 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Il résulte de cette disposition qu'il ne doit pas être porté d'atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction. 14. Il s'en déduit qu'il appartient aux autorités judiciaires ainsi qu'aux autorités administratives de veiller à ce que la privation de liberté des personnes placées en détention provisoire soit, en toutes circonstances, mise en œuvre dans le respect de la dignité de la personne. Il appartient, en outre, aux autorités et juridictions compétentes de prévenir et de réprimer les agissements portant atteinte à la dignité de la personne placée en détention provisoire et d'ordonner la réparation des préjudices subis. Enfin, il incombe au législateur de garantir aux personnes placées en détention provisoire la possibilité de saisir le juge de conditions de détention contraires à la dignité de la personne humaine, afin qu'il y soit mis fin. 15. En premier lieu, si une personne placée en détention provisoire et exposée à des conditions de détention contraires à la dignité de la personne humaine peut saisir le juge administratif en référé, sur le fondement des articles L. 521-2 ou L. 521-3 du code de justice administrative, les mesures que ce juge est susceptible de prononcer dans ce cadre, qui peuvent dépendre de la possibilité pour l'administration de les mettre en œuvre utilement et à très bref délai, ne garantissent pas, en toutes circonstances, qu'il soit mis fin à la détention indigne. 16. En second lieu, d'une part, si, en vertu de l'article 148 du code de procédure pénale, la personne placée en détention provisoire peut à tout moment former une demande de mise en liberté, le juge n'est tenu d'y donner suite que dans les cas prévus au second alinéa de l'article 144-1 du même code. Or, il s'agit du cas où la détention provisoire excède une durée raisonnable, au regard de la gravité des faits reprochés et de la complexité des investigations nécessaires à la manifestation de la vérité, et du cas où la détention n'est plus justifiée par l'une des causes énumérées à l'article 144 du même code, qui relèvent toutes des exigences propres à la sauvegarde de l'ordre public ou à la recherche des auteurs d'infractions. D'autre part, si l'article 147-1 du même code autorise le juge à ordonner la mise en liberté d'une personne placée en détention provisoire, ce n'est que dans la situation où une expertise médicale établit que cette personne est atteinte d'une pathologie engageant le pronostic vital ou que son état de santé physique ou mentale est incompatible avec le maintien en détention. Dès lors, aucun recours devant le juge judiciaire ne permet au justiciable d'obtenir qu'il soit mis fin aux atteintes à sa dignité résultant des conditions de sa détention provisoire. 17. Par conséquent, et indépendamment des actions en responsabilité susceptibles d'être engagées à raison de conditions de détention indignes, les dispositions contestées méconnaissent les exigences constitutionnelles précitées. Sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres griefs, elles doivent donc être déclarées contraires à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 18. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 19. En l'espèce, l'abrogation immédiate des dispositions déclarées contraires à la Constitution, en ce qu'elle ferait obstacle à la remise en liberté des personnes placées en détention provisoire lorsque cette détention n'est plus justifiée ou excède un délai raisonnable, entraînerait des conséquences manifestement excessives. Par suite, il y a lieu de reporter au 1er mars 2021 la date de cette abrogation. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Le second alinéa de l'article 144-1 du code de procédure pénale, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes, est contraire à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 19 de cette décision. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er octobre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 2 octobre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 8 juillet 2020 par la Cour de cassation (chambre commerciale, arrêt n° 474 du même jour), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour la société Bâtiment mayennais par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-857 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 11 à 20 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la directive 2007/66/CE du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2007 modifiant les directives 89/665/CEE et 92/13/CEE du Conseil en ce qui concerne l'amélioration de l'efficacité des procédures de recours en matière de passation des marchés publics ; - l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique, ratifiée par l'article 113 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allégement des démarches administratives ; - la décision du Conseil d'État n° 358994 du 4 avril 2014 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour la société Méduane Habitat, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Yves Richard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 29 juillet 2020 ; - les observations présentées pour la société requérante par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, enregistrées le 30 juillet 2020 ; - les observations présentées pour la société Karaca construction, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Hélène Didier et François Pinet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le même jour ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour la société requérante par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, enregistrées le 12 août 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Fabrice Sebagh, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la société requérante, Me Yves Richard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la société Méduane Habitat, Me François Pinet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la société Karaca construction et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 22 septembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article 11 de l'ordonnance du 7 mai 2009 mentionnée ci-dessus prévoit : « Les personnes qui ont un intérêt à conclure l'un des contrats de droit privé mentionnés aux articles 2 et 5 de la présente ordonnance et qui sont susceptibles d'être lésées par des manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles ils sont soumis peuvent saisir le juge d'un recours en contestation de la validité du contrat. « La demande est portée devant la juridiction judiciaire ». 2. L'article 12 de la même ordonnance prévoit : « Le recours régi par la présente section n'est pas ouvert au demandeur ayant fait usage du recours prévu à l'article 2 ou à l'article 5 dès lors que le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice a respecté la suspension prévue à l'article 4 ou à l'article 8 et s'est conformé à la décision juridictionnelle rendue sur ce recours ». 3. L'article 13 de la même ordonnance prévoit : « Le recours régi par le présent article ne peut être exercé ni à l'égard des contrats dont la passation n'est pas soumise à une obligation de publicité préalable lorsque le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice a, avant la conclusion du contrat, rendu publique son intention de le conclure et observé un délai de onze jours après cette publication, ni à l'égard des contrats soumis à publicité préalable auxquels ne s'applique pas l'obligation de communiquer la décision d'attribution aux candidats non retenus lorsque le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice a accompli la même formalité. « La même exclusion s'applique aux contrats fondés sur un accord-cadre ou un système d'acquisition dynamique lorsque le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice a envoyé aux titulaires la décision d'attribution du contrat et observé un délai de seize jours entre cet envoi et la conclusion du contrat, délai réduit à onze jours si la décision a été communiquée à tous les titulaires par voie électronique ». 4. L'article 14 de la même ordonnance prévoit : « À l'exception des demandes reconventionnelles en dommages et intérêts fondées exclusivement sur la demande initiale, aucune demande tendant à l'octroi de dommages et intérêts ne peut être présentée à l'occasion du recours régi par la présente section ». 5. L'article 15 de la même ordonnance prévoit : « À la demande du requérant, le juge peut suspendre l'exécution du contrat pour la durée de l'instance, sauf s'il estime, en considération de l'ensemble des intérêts susceptibles d'être lésés et notamment de l'intérêt public, que les conséquences négatives de cette mesure pourraient l'emporter sur ses avantages ». 6. L'article 16 de la même ordonnance prévoit : « Est nul tout contrat conclu lorsque aucune des mesures de publicité requises pour sa passation n'a été prise, ou lorsque a été omise une publication au Journal officiel de l'Union européenne dans le cas où une telle publication est prescrite. « Est également nul tout contrat conclu en méconnaissance des modalités de remise en concurrence prévues pour la passation des contrats fondés sur un accord-cadre ou un système d'acquisition dynamique. « Le juge prononce de même la nullité du contrat lorsque celui-ci a été signé avant l'expiration du délai exigé après l'envoi de la décision d'attribution aux opérateurs économiques ayant présenté une candidature ou une offre ou pendant la suspension prévue à l'article 4 ou à l'article 8 ci-dessus si, en outre, deux conditions sont réunies : la méconnaissance de ces obligations a privé le demandeur du droit d'exercer le recours prévu par les articles 2 et 5, et les obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles sa passation est soumise ont été méconnues d'une manière affectant les chances de l'auteur du recours d'obtenir le contrat ». 7. L'article 17 de la même ordonnance prévoit : « Toutefois, dans les cas prévus à l'article 16, le juge peut sanctionner le manquement soit par la résiliation du contrat, soit par la réduction de sa durée, soit par une pénalité financière imposée au pouvoir adjudicateur ou à l'entité adjudicatrice, si le prononcé de la nullité du contrat se heurte à une raison impérieuse d'intérêt général. « Cette raison ne peut être constituée par la prise en compte d'un intérêt économique que si la nullité du contrat entraîne des conséquences disproportionnées et que l'intérêt économique atteint n'est pas directement lié au contrat ». 8. L'article 18 de la même ordonnance prévoit : « Dans le cas où le contrat a été signé avant l'expiration du délai exigé après l'envoi de la décision d'attribution aux opérateurs économiques ayant présenté une candidature ou une offre ou pendant la suspension prévue à l'article 4 ou à l'article 8 de la présente ordonnance, le juge peut prononcer la nullité du contrat, le résilier, en réduire la durée ou imposer une pénalité financière ». 9. L'article 19 de la même ordonnance prévoit : « Les mesures mentionnées aux articles 15 à 18 peuvent être prononcées d'office par le juge. Il en informe préalablement les parties et les invite à présenter leurs observations dans des conditions fixées par voie réglementaire. « Le juge procède de même lorsqu'il envisage d'imposer une pénalité financière ». 10. L'article 20 de la même ordonnance prévoit : « Le montant des pénalités financières prévues aux articles 17 et 18 tient compte de manière proportionnée de leur objet dissuasif, sans pouvoir excéder 20 % du montant hors taxes du contrat. « Le montant des pénalités financières est versé au Trésor public ». 11. La société requérante reproche tout d'abord à ces dispositions de méconnaître le droit à un recours juridictionnel effectif. En effet, elles limiteraient de manière excessive les manquements qui peuvent être invoqués, après la signature d'un contrat de droit privé de la commande publique, par les concurrents évincés afin d'en obtenir la nullité. Elle soutient que, de plus, aucune autre voie de recours ne serait ouverte. 12. Ensuite, la société requérante soutient que les candidats évincés d'un contrat administratif de la commande publique disposent, après la signature du contrat, d'une voie de recours supplémentaire reconnue par la jurisprudence administrative. Ces dispositions seraient donc contraires au principe d'égalité devant la loi. 13. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur l'article 16 de l'ordonnance du 7 mai 2009. - Sur le contrôle exercé par le Conseil constitutionnel : 14. Le Premier ministre fait valoir que, dans la mesure où les dispositions contestées appliqueraient les dispositions inconditionnelles et précises de la directive du 11 décembre 2007 mentionnée ci-dessus, il n'y aurait pas lieu, pour le Conseil constitutionnel, en l'absence de mise en cause d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France, de se prononcer sur leur conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit. 15. En l'absence de mise en cause d'une règle ou d'un principe inhérent à l'identité constitutionnelle de la France, le Conseil constitutionnel n'est pas compétent pour contrôler la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de dispositions législatives qui se bornent à tirer les conséquences nécessaires de dispositions inconditionnelles et précises d'une directive ou des dispositions d'un règlement de l'Union européenne. 16. Les dispositions inconditionnelles et précises de la directive du 11 décembre 2007, dont l'article 16 de l'ordonnance du 7 mai 2009 tire les conséquences nécessaires, se bornent à imposer aux États membres de l'Union européenne de créer un recours permettant d'obtenir l'annulation d'un contrat de la commande publique lorsque certains manquements qu'elles déterminent ont été commis lors de sa passation. Ces dispositions n'empêchent pas les États de prévoir que d'autres manquements puissent également conduire à l'annulation du contrat et leur confèrent ainsi une marge d'appréciation pour adopter des dispositions complémentaires. 17. Dès lors, il y a lieu de statuer sur la méconnaissance, par les dispositions contestées, des droits et libertés que la Constitution garantit en ce que ces dispositions ne prévoient pas d'autres cas d'annulation du contrat que ceux imposés par la directive du 11 décembre 2007. - Sur la conformité des dispositions contestées aux droits et libertés que la Constitution garantit : . En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif : 18. Selon l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Il résulte de cette disposition qu'il ne doit pas être porté d'atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction. 19. Les personnes qui ont un intérêt à conclure un contrat de droit privé de la commande publique et qui sont susceptibles d'être lésées par des manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence auxquelles est soumise la passation d'un tel contrat peuvent, après sa signature, saisir le juge judiciaire d'un référé contractuel afin d'en obtenir la nullité. Les dispositions contestées déterminent limitativement les cas dans lesquels le juge d'un tel référé peut prononcer cette nullité. Tel est le cas lorsque aucune des mesures de publicité requises pour la passation du contrat n'a été prise, lorsque a été omise une publication au Journal officiel de l'Union européenne dans le cas où cette publication était prescrite ou lorsque le contrat est conclu en méconnaissance des modalités de remise en concurrence prévues pour la passation des contrats fondés sur un accord-cadre ou un système d'acquisition dynamique. Tel est également le cas lorsque le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice n'a pas respecté l'obligation qui peut lui être faite d'observer un délai minimal entre l'envoi de la décision d'attribution aux candidats évincés et la signature du contrat ou lorsque le contrat a été signé alors qu'un référé précontractuel était encore pendant et que les obligations de publicité et de mise en concurrence ont été méconnues d'une manière affectant les chances de l'auteur du recours d'obtenir le contrat. 20. Ainsi, sauf dans le cas où l'autorité adjudicatrice a fait irrégulièrement obstacle à une saisine du juge du référé précontractuel, les dispositions contestées ne permettent pas aux requérants d'invoquer en référé contractuel les autres manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence susceptibles de les avoir lésés, afin d'obtenir l'annulation du contrat. 21. Toutefois, en premier lieu, en limitant les cas d'annulation des contrats de droit privé de la commande publique aux violations les plus graves des obligations de publicité et de mise en concurrence, le législateur a entendu éviter une remise en cause trop fréquente de ces contrats après leur signature et assurer la sécurité juridique des relations contractuelles. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général. 22. En second lieu, d'une part, conformément aux articles 3 et 6 de l'ordonnance du 7 mai 2009, les personnes ayant intérêt à conclure un contrat de droit privé de la commande publique peuvent, avant sa signature, former un référé précontractuel. Dans ce cas, elles peuvent invoquer tout manquement qui, eu égard à sa portée et au stade de la procédure auquel il se rapporte, est susceptible de les avoir lésées ou risque de les léser. Le juge peut alors prendre des mesures tendant à ce que l'autorité responsable du manquement se conforme à ses obligations, dans un délai qu'il fixe, et à ce que soit suspendue l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation du contrat. À cet égard, la circonstance que le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice ne soit pas toujours obligé de communiquer la décision d'attribution du contrat aux candidats non retenus et d'observer, après cette communication, un délai avant de signer le contrat n'a ni pour objet ni nécessairement pour effet de priver les candidats évincés de la possibilité de former, dès le rejet de leur offre et jusqu'à la signature du contrat, un référé précontractuel. 23. D'autre part, les dispositions contestées ne font pas obstacle à ce qu'un candidat irrégulièrement évincé exerce, parmi les voies de recours de droit commun, une action en responsabilité contre la personne responsable du manquement dénoncé. 24. Il résulte de ce qui précède que, au regard des conséquences qu'entraîne l'éviction d'un candidat à un contrat privé de la commande publique, les dispositions contestées ne portent pas d'atteinte disproportionnée au droit à un recours juridictionnel effectif. . En ce qui concerne le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi : 25. Selon l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 26. Il résulte de la jurisprudence constante du Conseil d'État que les candidats évincés d'un contrat administratif de la commande publique peuvent, après la signature du contrat, former en sus du référé contractuel un recours en contestation de la validité de ce contrat ouvert devant le juge administratif à tout tiers à un contrat administratif susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses. Les candidats évincés d'un contrat privé de la commande publique ne bénéficient pas devant le juge judiciaire d'un recours identique. Toutefois, les contrats administratifs et les contrats de droit privé répondent à des finalités et des régimes différents. Ainsi, les candidats évincés d'un contrat privé de la commande publique sont dans une situation différente des candidats évincés d'un contrat administratif de la commande publique. Dès lors, la différence de traitement dénoncée, qui est en rapport avec l'objet de la loi, ne méconnaît pas en tout état de cause le principe d'égalité devant la loi. 27. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - L'article 16 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux contrats de la commande publique est conforme à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er octobre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 2 octobre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI d'une requête présentée par M. Stéphane Hauchemaille, enregistrée le 23 août 2020 au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-29 ELEC, demandant au Conseil constitutionnel d'annuler ou de réformer l'annexe 1 du mémento à l'usage des candidats aux élections sénatoriales du 27 septembre 2020. Il a également été saisi le même jour, à l'occasion de cette requête, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Hauchemaille. Cette question est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles L.O. 276 et L. 279 du code électoral ainsi que du paragraphe III du tableau n° 5 et du tableau n° 6 annexés au même code. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code électoral ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 9 septembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. En vertu de la mission de contrôle de la régularité des élections des députés et des sénateurs qui lui est conférée par l'article 59 de la Constitution, le Conseil constitutionnel peut exceptionnellement statuer sur les requêtes mettant en cause des élections à venir, dans les cas où l'irrecevabilité qui serait opposée à ces requêtes risquerait de compromettre gravement l'efficacité de son contrôle de l'élection des députés et des sénateurs, vicierait le déroulement général des opérations électorales ou porterait atteinte au fonctionnement normal des pouvoirs publics. 2. L'annexe 1 du mémento à l'usage des candidats aux élections sénatoriales du 27 septembre 2020 élaboré par le ministre de l'intérieur rappelle, dans un tableau, la liste des départements ou collectivités appartenant à la série 2 ainsi que le nombre de sièges de sénateurs dans chacun de ces départements ou collectivités. Cette annexe n'a que la valeur d'une circulaire se bornant à reproduire les dispositions législatives applicables à cette élection figurant au paragraphe III du tableau n° 5 et au tableau n° 6 annexés au code électoral. Dès lors, les conditions qui permettent exceptionnellement au Conseil constitutionnel de statuer avant la proclamation des résultats des élections ne sont pas remplies. 3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la question prioritaire de constitutionnalité, la requête de M. Hauchemaille doit être rejetée. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - La requête de M. Stéphane Hauchemaille est rejetée. Article 2. - Cette décision sera notifiée à M. Hauchemaille et au Sénat et publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 septembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 17 septembre 2020.
CONSTIT/CONSTEXT000042397487.xml
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 11 juin 2020 par le Conseil d'État (décision n° 433276 du 10 juin 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour Mme Samiha B. par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-855 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2015-401 du 9 avril 2015 relative à la gestion, au recouvrement et à la contestation du forfait de post-stationnement prévu à l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code général des collectivités territoriales ; - l'ordonnance n° 2015-401 du 9 avril 2015 relative à la gestion, au recouvrement et à la contestation du forfait de post-stationnement prévu à l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales, ratifiée par l'article 40 de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour la requérante par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, enregistrées le 24 juin 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 26 juin 2020 ; - les secondes observations présentées pour la requérante par la SCP de Chaisemartin, Doumic-Seiller, enregistrées le 3 juillet 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Arnaud de Chaisemartin, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la requérante, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 30 juillet 2020 ; Au vu de la note en délibéré présentée par le Premier ministre, enregistrée le 3 septembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 9 avril 2015 mentionnée ci-dessus, prévoit : « La recevabilité du recours contentieux contre la décision rendue à l'issue du recours administratif préalable obligatoire et contre le titre exécutoire émis est subordonnée au paiement préalable du montant de l'avis de paiement du forfait de post-stationnement et de la majoration prévue au IV de l'article L. 2333-87 si un titre exécutoire a été émis ». 2. La requérante reproche à ces dispositions de subordonner la recevabilité des recours contre les décisions individuelles mettant à la charge d'un justiciable un forfait de post-stationnement au paiement préalable, par l'intéressé, du montant de ce forfait et de son éventuelle majoration, sans prévoir aucune exception. Il en résulterait une méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif. - Sur le fond : 3. Selon l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Il résulte de cette disposition qu'il ne doit pas être porté d'atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction. 4. L'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales, dans ses rédactions applicables en même temps que les dispositions contestées, prévoit que le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale ou du syndicat mixte compétent pour l'organisation de la mobilité peut instituer une redevance de stationnement, dont il détermine le barème tarifaire. Cette redevance doit être payée par le conducteur dès le début du stationnement. À défaut, l'intéressé s'expose à devoir s'acquitter d'un forfait de post-stationnement, qui peut faire l'objet d'une majoration s'il n'est pas payé à temps. Les décisions individuelles relatives à ces forfaits et majorations peuvent faire l'objet d'un recours contentieux devant la Commission du contentieux du stationnement payant. 5. L'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales subordonne la recevabilité de tels recours au paiement préalable du forfait de post-stationnement contesté et de sa majoration éventuelle. 6. En imposant ainsi que le forfait et la majoration soient acquittés avant de pouvoir les contester devant le juge, le législateur a entendu, dans un but de bonne administration de la justice, prévenir les recours dilatoires dans un contentieux exclusivement pécuniaire susceptible de concerner un très grand nombre de personnes. 7. Cependant, en premier lieu, si, conformément à l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales, le montant du forfait de post-stationnement ne peut excéder celui de la redevance due, aucune disposition législative ne garantit que la somme à payer pour contester des forfaits de post-stationnement et leur majoration éventuelle ne soit d'un montant trop élevé. 8. En second lieu, le législateur n'a apporté à l'exigence de paiement préalable desdits forfaits et majorations aucune exception tenant compte de certaines circonstances ou de la situation particulière de certains redevables. 9. Il résulte de tout ce qui précède que le législateur n'a pas prévu les garanties de nature à assurer que l'exigence de paiement préalable ne porte pas d'atteinte substantielle au droit d'exercer un recours juridictionnel effectif. Les dispositions contestées doivent donc être déclarées contraires à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 10. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 11. Aucun motif ne justifie de reporter la prise d'effet de la déclaration d'inconstitutionnalité. Celle-ci intervient donc à compter de la date de la publication de la présente décision. La déclaration d'inconstitutionnalité est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - L'article L. 2333-87-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 2015-401 du 9 avril 2015 relative à la gestion, au recouvrement et à la contestation du forfait de post-stationnement prévu à l'article L. 2333-87 du code général des collectivités territoriales, est contraire à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 11 de cette décision. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 8 septembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 9 septembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, le 28 août 2020, par le Premier ministre, dans les conditions prévues au second alinéa de l'article 37 de la Constitution d'une demande enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-287 L. Le Premier ministre demande au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la nature juridique des mots « renouvelable une fois » figurant au deuxième alinéa de l'article L. 142-1 du code de la construction et de l'habitation. Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment ses articles 34 et 37 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment ses articles 24, 25 et 26 ; - le code de la construction et de l'habitation ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Le huitième alinéa de l'article 34 de la Constitution dispose que la loi fixe les règles concernant la création de catégories d'établissements publics. Il en résulte que le législateur est compétent pour en fixer les règles constitutives. 2. Le centre scientifique et technique du bâtiment est un établissement public industriel et commercial, doté de l'autonomie financière et placé sous l'autorité du ministre chargé de la construction. Selon le premier alinéa de l'article L. 142-1 du code de la construction et de l'habitation, il a pour mission, d'une part, de procéder ou faire procéder à des recherches scientifiques et techniques directement liées à la préparation ou à la mise en œuvre des politiques publiques en matière de construction et d'habitat et, d'autre part, d'apporter son concours aux services ministériels dans leurs activités de définition, de mise en œuvre et d'évaluation des politiques publiques en matière de construction et d'habitat. 3. En vertu du deuxième alinéa de l'article L. 142-1 du même code, le président du conseil d'administration du centre scientifique et technique du bâtiment est nommé en conseil des ministres pour un mandat de cinq ans. 4. Les dispositions dont le déclassement est demandé prévoient que ce mandat n'est renouvelable qu'une fois. Ces dispositions ne figurent pas au nombre des règles constitutives qui relèvent de la compétence du législateur en application du huitième alinéa de l'article 34 de la Constitution. Compte tenu des missions dévolues au centre scientifique et technique du bâtiment, elles ne mettent pas non plus en cause les autres principes ou règles placés par la Constitution dans le domaine de la loi. Elles ont donc un caractère réglementaire. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « renouvelable une fois » figurant au deuxième alinéa de l'article L. 142-1 du code de la construction et de l'habitation ont un caractère réglementaire. Article 2. - Cette décision sera notifiée au Premier ministre et publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 septembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 17 septembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Au vu des textes suivants : - la Constitution, notamment son article 59 ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment son article 56 ; - le code électoral ; - le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour l'élection des députés et sénateurs ; Et après avoir entendu le rapporteur ; Article 1er. - Le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs est ainsi modifié : I. - Au second alinéa de l'article 2, le mot « après » est remplacé par le mot « auprès ». II. - L'article 8 est complété par un alinéa ainsi rédigé : « Par dérogation à l'alinéa précédent, le président du Conseil constitutionnel peut confier directement au Conseil assemblé l'examen des requêtes pour lesquelles une instruction contradictoire préalable n'est pas obligatoire parce qu'elles sont irrecevables ou ne contiennent que des griefs qui, manifestement, ne peuvent avoir une influence sur les résultats de l'élection. Il désigne un rapporteur parmi les membres du Conseil. ». III. - L'article 9 est ainsi modifié : 1° - À la première phrase du premier alinéa, les mots : « à celui ou » et les mots : « à son ou » sont supprimés ; 2° - La même phrase est complétée par les mots : « ou à toute autre personne intéressée » ; 3° - Le deuxième alinéa est supprimé ; 4° - Le troisième alinéa est complété par la phrase suivante : « Les observations en réplique ne peuvent avoir d'autre objet que de répondre aux observations présentées en défense ou de développer des moyens invoqués dans la requête, à l'exclusion de tout moyen nouveau. » ; 5° - Après le troisième alinéa sont insérés deux alinéas ainsi rédigés : « Lorsque le requérant a produit des observations en réplique, la section les communique aux personnes mentionnées au premier alinéa et leur fixe un délai pour en prendre connaissance ainsi que pour produire des observations écrites. « Sauf décision contraire de la section ou du Conseil assemblé prise à titre exceptionnel, les observations et pièces qui sont produites après l'expiration des délais fixés en application des premier à troisième alinéas du présent article ne sont pas versées à la procédure. » ; 6° - Au quatrième alinéa, le mot : « peut » est remplacé par les mots : « et le Conseil assemblé peuvent ». IV. - Après l'article 9, il est inséré un article 9-1 ainsi rédigé : « Lorsqu'il est fait application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, la saisine du Conseil constitutionnel par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques est notifiée à toute personne susceptible de se voir déclarée inéligible en application de cet article. Les personnes intéressées sont invitées par le Conseil constitutionnel à adresser tous moyens de défense, dans les conditions mentionnées à l'article 7-1. Elles peuvent désigner, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 3, la personne de leur choix pour les représenter ou les assister, ensemble ou séparément, dans les différents actes de la procédure. Le Conseil constitutionnel fixe le délai qui leur est imparti pour prendre connaissance de la saisine et des pièces du dossier ainsi que pour produire leurs observations écrites. Il peut, exceptionnellement, sur la demande qui lui en serait faite, accorder un délai supplémentaire. « Le président du Conseil constitutionnel charge de l'instruction de la saisine l'une des sections prévues à l'article 36 de l'ordonnance du 7 novembre 1958. Il désigne un rapporteur qui peut être choisi parmi les rapporteurs adjoints. « Si la saisine ne présente pas de difficulté particulière, le président peut directement en confier l'examen au Conseil assemblé. Il désigne un rapporteur parmi les membres du Conseil. ». V. - À l'article 10, les mots : « et notamment aux cas prévus à l'article précédent » sont supprimés. VI. - À l'article 10, au dernier alinéa de l'article 15 et au deuxième alinéa de l'article 17, les mots : « et 9 » sont remplacés par les mots : «, 9 et 9-1 ». Article 2. - L'article 1er entre en vigueur le 18 septembre 2020. Il est applicable aux procédures enregistrées à compter de cette date. Article 3. - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 septembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 17 septembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 24 juin 2020 par la Cour de cassation (chambre sociale, arrêt n° 644 du 18 juin 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour Mme Suzanne A. et autres par Me João Viegas, avocat au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-856 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article 100 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 ; - la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015 ; - la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Thouin-Palat Boucard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 16 juillet 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 17 juillet 2020 ; - les observations présentées pour les requérants par Me Viegas, enregistrées le 29 juillet 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Viegas, pour les requérants, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 8 septembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article 100 de la loi du 29 décembre 2014 mentionnée ci-dessus, dans sa rédaction résultant de la loi du 29 décembre 2016 mentionnée ci-dessus, prévoit : « La République française reconnaît le caractère discriminatoire et abusif du licenciement pour faits de grève des mineurs grévistes en 1948 et 1952, amnistiés en application de la loi n° 81-736 du 4 août 1981 portant amnistie, les atteintes ainsi portées à leurs droits fondamentaux et les préjudices qui leur furent ainsi causés. « Elle ouvre aux mineurs dont les dossiers ont été instruits par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, en application de l'article 107 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005, le bénéfice des mesures suivantes : « 1° Une allocation forfaitaire de 30 000 €. « En cas de décès de l'intéressé, l'allocation forfaitaire est versée au conjoint survivant. Lorsque l'intéressé a contracté plusieurs mariages, l'allocation est répartie entre le conjoint survivant et le ou les précédents conjoints. « Si l'un des conjoints ou ex-conjoints est décédé, l'allocation à laquelle il aurait pu prétendre est répartie en parts égales entre les enfants nés de son union avec l'intéressé. « Une allocation spécifique de 5 000 € est par ailleurs versée aux enfants de ces mineurs. « Les demandes de bénéfice aux allocations forfaitaire et spécifique sont adressées jusqu'au 1er juin 2017 à l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, qui assure leur liquidation et leur versement. « Ces allocations forfaitaire et spécifique sont exonérées d'impôt sur le revenu ainsi que de l'ensemble des cotisations et contributions sociales ; « 2° Pour le calcul des prestations de chauffage et de logement en espèces, les bénéficiaires peuvent faire valoir auprès de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs tout élément permettant de justifier une reconstitution de carrière qui pourrait conduire à un calcul plus favorable de ces prestations ; « 3° Les mineurs qui ont été déchus de leurs distinctions honorifiques et ceux qui, titulaires d'un grade militaire, ont été dégradés du fait de leur participation à ces grèves, sont réintégrés dans leurs différentes distinctions et leur grade ; « 4° Les grèves des mineurs qui ont eu lieu en 1941, 1948 et 1952 sont enseignées à travers les programmes scolaires et intégrées aux programmes de recherche en histoire et en sciences humaines. Une mission composée par les ministères chargés de la culture et de l'éducation nationale propose au Gouvernement des actions commémoratives adaptées ». 2. Dans leurs observations produites devant la Cour de cassation, les requérants, qui n'ont pas présenté de premières observations devant le Conseil constitutionnel, reprochent à ces dispositions de subordonner le bénéfice des allocations qu'elles instituent en faveur des mineurs et de leurs enfants à une double condition. D'une part, une demande de prestations de chauffage et de logement, formée par le mineur ou son conjoint survivant, doit avoir été préalablement instruite par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs. D'autre part, les allocations forfaitaire et spécifique doivent avoir été demandées au plus tard le 1er juin 2017. Ils dénoncent la différence de traitement inconstitutionnelle qui en résulterait pour les enfants de mineurs selon que leurs parents ont procédé ou non à une telle demande en temps utile. Le principe d'égalité devant la loi serait ainsi méconnu. 3. En outre, dans leurs secondes observations devant le Conseil constitutionnel, les requérants dénoncent, pour la première fois, la différence de traitement opérée par le cinquième alinéa de l'article 100 de la loi du 29 décembre 2014 entre les enfants de mineurs, selon qu'ils sont issus d'un mariage ou nés hors mariage. Toutefois, selon le quatrième alinéa de l'article 1er du règlement intérieur du 4 février 2010 mentionné ci-dessus, les secondes observations « ne peuvent avoir pour autre objet que de répondre aux premières ». Elles ne peuvent donc pas comporter de griefs nouveaux. Dès lors, le grief soulevé par les requérants dans leurs secondes observations ne peut être retenu pour déterminer les dispositions contestées. 4. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « dont les dossiers ont été instruits par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, en application de l'article 107 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 » figurant au deuxième alinéa de l'article 100 de la loi du 29 décembre 2014, ainsi que sur les mots « jusqu'au 1er juin 2017 » qui figurent au septième alinéa de cet article. - Sur le fond : 5. Selon l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 6. L'article 100 de la loi du 29 décembre 2014 reconnaît le caractère discriminatoire et abusif du licenciement des mineurs ayant participé aux grèves de 1948 et 1952 et crée en particulier deux allocations au titre des atteintes portées à leurs droits fondamentaux et des préjudices causés par leur licenciement. D'une part, une allocation forfaitaire de 30 000 euros est accordée à ces mineurs ou, s'ils sont décédés, à leur conjoint survivant. Cette allocation est, le cas échéant, répartie entre le conjoint survivant et les précédents conjoints et, si l'un d'eux est décédé, la part qui devait lui revenir est répartie entre les enfants nés de son union avec le mineur. D'autre part, une allocation spécifique de 5 000 euros est allouée aux enfants des mineurs licenciés pour faits de grève. 7. En application des deuxième et septième alinéas de l'article 100, le versement des allocations ne peut intervenir que si une demande de prestations de chauffage et de logement a été formée par le mineur ou son conjoint survivant jusqu'au 1er juin 2017 auprès de l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs et instruite par celle-ci en application de l'article 107 de la loi du 30 décembre 2004 mentionnée ci-dessus. 8. D'une part, si le bénéfice de ces prestations pouvait ainsi être sollicité jusqu'à la date limite de présentation des demandes de versement de l'allocation forfaitaire, les précédents conjoints des mineurs ainsi que leurs enfants ne peuvent prétendre au versement de cette allocation lorsque le mineur et son conjoint survivant sont décédés avant l'entrée en vigueur des dispositions contestées sans avoir demandé à bénéficier de ces prestations. Ce faisant, ces dispositions opèrent, pour le bénéfice de cette allocation, une différence de traitement entre les personnes admises à venir en représentation du mineur ou de son conjoint survivant selon que ces derniers ont pu solliciter ou non, de leur vivant, le bénéfice des prestations de chauffage et de logement. 9. D'autre part, une autre différence de traitement est instaurée pour le bénéfice de l'allocation spécifique réservée aux enfants des mineurs, selon que ces mineurs ou leurs conjoints survivants ont sollicité ou non pour eux-mêmes le bénéfice des prestations de chauffage et de logement. 10. Or, ces différences de traitement sont sans rapport avec l'objet de la loi, qui visait à réparer certains préjudices subis par les mineurs licenciés pour faits de grève en 1948 et 1952 et par leur famille. Par conséquent, les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant la loi. Elles doivent donc être déclarées contraires à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 11. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 12. Aucun motif ne justifie de reporter la prise d'effet de la déclaration d'inconstitutionnalité. Celle-ci intervient donc à compter de la date de la publication de la présente décision. Elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « dont les dossiers ont été instruits par l'Agence nationale pour la garantie des droits des mineurs, en application de l'article 107 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 » figurant au deuxième alinéa de l'article 100 de la loi n° 2014-1654 du 29 décembre 2014 de finances pour 2015, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-1918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016, ainsi que les mots « jusqu'au 1er juin 2017 » figurant au septième alinéa de ce même article, sont contraires à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 12 de cette décision. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 septembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 18 septembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 22 juillet 2020 par le Conseil d'État (décision nos 438805 et 438996 du même jour), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour l'union de syndicats Fédération nationale de l'immobilier par Me Marc Sénac de Monsembernard, avocat au barreau de Paris, et pour l'association française de l'immobilier locatif par Mes Yann Aguila et Guillaume Froger, avocats au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-861 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du paragraphe X bis de l'article 199 novovicies du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code général des impôts ; - la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour l'association requérante par Mes Aguila et Froger, enregistrées le 6 août 2020 ; - les observations en intervention présentées pour le syndicat Anacofi-Immobilier par Me Emmanuelle Pouts-Saint-Germé, avocate au barreau de Paris, enregistrées le 11 août 2020 ; - les observations présentées pour l'union de syndicats professionnels requérante par Me Sénac de Monsembernard, enregistrées le 13 août 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Sénac de Monsembernard pour l'union de syndicats professionnels requérante, Me Aguila pour l'association requérante, Me Nicolas Jarroux, avocat au barreau de Bordeaux, pour le syndicat intervenant et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 6 octobre 2020 ; Au vu de la note en délibéré présentée par le Premier ministre, enregistrée le 9 octobre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Le paragraphe X bis de l'article 199 novovicies du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi du 28 décembre 2018 mentionnée ci-dessus, prévoit :« Le montant des frais et commissions directs et indirects imputés au titre d'une même acquisition de logement ouvrant droit à la réduction d'impôt prévue au présent article par les personnes physiques ou morales exerçant, au titre de l'acquisition, une activité de conseil ou de gestion au sens de l'article L. 321-1 du code monétaire et financier, un acte de démarchage au sens de l'article L. 341-1 du même code ou une activité d'intermédiation en biens divers au sens de l'article L. 550-1 dudit code ou qui se livrent ou prêtent leur concours à l'opération au sens de l'article 1er de la loi n° 70-9 du 2 janvier 1970 réglementant les conditions d'exercice des activités relatives à certaines opérations portant sur les immeubles et les fonds de commerce ne peut excéder un plafond exprimé en pourcentage du prix de revient et fixé par décret. « Pour l'application du présent X bis, les frais et commissions directs et indirects s'entendent des frais et commissions versés par le promoteur ou le vendeur aux intermédiaires mentionnés au premier alinéa. « Ces dispositions s'appliquent à toutes les acquisitions de logements mentionnées au A du I, pour lesquelles l'acquéreur demande le bénéfice de la réduction d'impôt prévue au présent article. « Une estimation du montant des frais et commissions directs et indirects effectivement imputés ainsi que leur part dans le prix de revient sont communiquées à l'acquéreur lors de la signature du contrat prévu à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. Le montant définitif de ces frais et commissions figure dans l'acte authentique d'acquisition du logement. « Tout dépassement du plafond prévu au premier alinéa du présent X bis est passible d'une amende administrative due par le vendeur cosignataire de l'acte authentique. Son montant ne peut excéder dix fois les frais excédant le plafond ». 2. Les parties requérantes, rejointes par le syndicat intervenant, reprochent en premier lieu à ces dispositions de limiter l'application du plafonnement qu'elles instaurent aux seuls frais de commercialisation facturés par les intermédiaires intervenant lors d'une acquisition de logement ouvrant droit à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 novovicies du code général des impôts. Ce faisant, les frais de commercialisation directement appliqués par les promoteurs en sont exclus lorsqu'ils vendent de tels logements sans recourir à des intermédiaires, alors que ces frais seraient également intégrés au prix de revient du bien qui sert d'assiette de calcul de la réduction d'impôt. La différence de traitement ainsi opérée, selon que les promoteurs réalisent des ventes de logement avec ou sans le recours à des intermédiaires, ne serait justifiée ni par une différence de situation ni par un motif d'intérêt général. Elle ne serait pas davantage en rapport avec l'objet de la loi qui serait d'éviter la captation de la réduction d'impôt au détriment de l'acquéreur. Il en résulterait une méconnaissance du principe d'égalité devant la loi. Selon le syndicat intervenant, ces dispositions méconnaîtraient également ce principe en ce qu'elles réservent l'application du plafonnement aux ventes de logements neufs et en l'état futur d'achèvement, à l'exclusion des autres catégories de logements ouvrant droit à la réduction d'impôt. 3. Les parties requérantes et intervenante soutiennent, en deuxième lieu, que le plafonnement des frais de commercialisation versés aux intermédiaires apporterait une restriction non justifiée à la liberté de fixation de leurs tarifs et inciterait les promoteurs à prendre en charge eux-mêmes les frais de commercialisation pour la vente de logements éligibles à la réduction d'impôt, ce qui mettrait en péril la viabilité économique des intermédiaires ainsi que des promoteurs qui n'auraient pas les capacités d'assumer de tels frais. En outre, les intermédiaires seraient contraints de plafonner leurs frais et commissions pour l'ensemble des ventes de logements éligibles à la réduction d'impôt, faute de savoir en temps utile si l'acquéreur entend en demander le bénéfice. Il en résulterait une méconnaissance de la liberté d'entreprendre. L'une des parties requérantes reproche au surplus au législateur d'avoir méconnu l'étendue de sa compétence, dans des conditions affectant cette liberté, en renvoyant au pouvoir réglementaire le soin de fixer le niveau du plafond des frais et commissions d'intermédiation commerciale. Il en irait de même, selon le syndicat intervenant, dans la mesure où le législateur n'a pas défini la notion de « prix de revient » permettant de déterminer la base de plafonnement de ces frais et commissions. 4. Les parties requérantes reprochent, en dernier lieu, à ces dispositions de porter atteinte au principe de légalité des délits et des peines et d'être à cet égard entachées d'incompétence négative en raison, d'une part, du renvoi au pouvoir réglementaire de la détermination du niveau du plafonnement des frais d'intermédiation commerciale et du quantum de l'amende encourue en cas de dépassement de ce plafond, d'autre part, de l'absence de définition de la notion de « frais et commissions directs et indirects ». Ce principe de légalité serait également méconnu du fait de l'incertitude dans laquelle se trouverait le vendeur quant à l'intention de l'acquéreur de demander effectivement le bénéfice de la réduction d'impôt. L'union de syndicats professionnels requérante dénonce, sur ce point, une violation du principe selon lequel « nul ne peut être punissable que de son propre fait ». 5. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les trois premiers et le dernier alinéas du paragraphe X bis de l'article 199 novovicies du code général des impôts. - Sur les griefs tirés de la méconnaissance de la liberté d'entreprendre et de l'incompétence négative : 6. La liberté d'entreprendre découle de l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789. Il est loisible au législateur d'apporter à cette liberté des limitations liées à des exigences constitutionnelles ou justifiées par l'intérêt général, à la condition qu'il n'en résulte pas d'atteintes disproportionnées au regard de l'objectif poursuivi. 7. La méconnaissance par le législateur de sa propre compétence ne peut être invoquée à l'appui d'une question prioritaire de constitutionnalité que dans le cas où cette méconnaissance affecte par elle-même un droit ou une liberté que la Constitution garantit. 8. L'article 199 novovicies du code général des impôts prévoit une réduction d'impôt sur le revenu en faveur des contribuables qui acquièrent un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement situé dans une zone géographique où l'accès au parc locatif existant est en tension ou qui font construire, réhabilitent ou transforment un logement situé dans une telle zone, à condition qu'ils s'engagent à le louer selon certaines modalités. Cette réduction d'impôt, dont le taux varie en fonction de la durée de l'engagement locatif, est calculée en fonction du prix de revient du logement. 9. En application des dispositions contestées, lorsque des frais et commissions sont versés, au titre d'une opération d'acquisition d'un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement, par le vendeur ou le promoteur à des personnes exerçant en qualité d'intermédiaire une activité de conseil ou de gestion d'investissement, un acte de démarchage bancaire ou financier ou une activité d'intermédiation en biens divers ou qui se livrent ou prêtent leur concours à l'opération immobilière, le montant de ces frais et commissions ne peut excéder un plafond exprimé en pourcentage du prix de revient et fixé par décret. 10. L'instauration de ce plafond limite la liberté de ces intermédiaires de fixer les tarifs de leurs prestations et porte donc atteinte à la liberté d'entreprendre. 11. Toutefois, en premier lieu, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu lutter contre certaines tarifications abusives en matière de commercialisation conduisant au détournement de l'avantage fiscal accordé au contribuable au titre de l'investissement locatif en application de l'article 199 novovicies précité. Il a ainsi poursuivi un objectif d'intérêt général. 12. En deuxième lieu, d'une part, le champ d'application du plafonnement imposé aux intermédiaires est restreint aux frais de commercialisation qu'ils facturent au titre des acquisitions de logements neufs et en l'état futur d'achèvement situés dans une zone géographique où l'accès au parc locatif existant est en tension. D'autre part, le plafonnement s'applique uniquement lorsque l'acquéreur demande le bénéfice de la réduction d'impôt. Il ne concerne donc qu'une part limitée de l'activité d'intermédiation commerciale en matière immobilière. 13. En troisième lieu, afin de permettre aux intermédiaires de fixer les frais de commercialisation qu'ils sont autorisés à pratiquer sur les logements éligibles à la réduction d'impôt, il appartient à l'acquéreur de faire connaître au vendeur ou au promoteur son intention de bénéficier de cet avantage fiscal en temps utile, au plus tard lors de la signature du contrat préliminaire de vente d'un logement en l'état futur d'achèvement ou du contrat de vente. 14. En dernier lieu, d'une part, si le législateur a renvoyé à un décret le soin de fixer le plafond des frais et commissions d'intermédiation commerciale, il a veillé à ce que ce plafond soit proportionné au prix de revient du logement, dont la définition relève en tout état de cause du pouvoir réglementaire. D'autre part, il appartient à ce dernier de fixer ce plafond à un niveau suffisamment élevé pour éviter les seules tarifications abusives. 15. Il résulte de ce qui précède que l'atteinte portée à la liberté d'entreprendre ne présente pas un caractère disproportionné et que le législateur n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence. - Sur le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi : 16. Selon l'article 6 de la Déclaration de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 17. En premier lieu, les dispositions contestées instituent une différence de traitement entre les prestations de commercialisation des logements ouvrant droit à la réduction d'impôt précitée, selon qu'elles sont effectuées par les intermédiaires, qui sont soumis au plafonnement, ou par les promoteurs eux-mêmes, qui n'y sont pas soumis. 18. Toutefois, comme énoncé au paragraphe 11, en adoptant ces dispositions, le législateur a entendu lutter contre certaines tarifications abusives en matière de commercialisation conduisant au détournement de l'avantage fiscal accordé au contribuable au titre de l'investissement locatif en application de l'article 199 novovicies précité. 19. Au regard de cet objet, le législateur, qui a constaté certains frais de commercialisation abusifs pratiqués par des intermédiaires, a pu considérer que ces derniers étaient placés dans une situation différente des promoteurs qui procèdent eux-mêmes à la commercialisation de logements éligibles à la réduction d'impôt. 20. Dès lors, la différence de traitement contestée, qui repose sur une différence de situation, est en rapport direct avec l'objet de la loi. 21. En second lieu, le plafonnement des frais de commercialisation ne s'applique pas aux logements que l'acquéreur fait construire ainsi qu'aux logements déjà existants mentionnés au B du paragraphe I de l'article 199 novovicies. 22. Toutefois, le législateur a estimé que ces logements, lorsqu'ils sont éligibles à la réduction d'impôt, sont moins sujets à des frais de commercialisation abusifs que les logements neufs et en l'état futur d'achèvement. 23. La différence de traitement critiquée par le syndicat intervenant, qui est ainsi fondée sur une différence de situation, est en rapport avec l'objet de la loi. 24. Il résulte de tout ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance du principe d'égalité devant la loi doit être écarté. - Sur le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines : 25. Selon l'article 8 de la Déclaration de 1789 : « La loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires, et nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée ». En vertu du principe de légalité des délits et des peines, le législateur ou, dans son domaine de compétence, le pouvoir réglementaire, doivent fixer les sanctions ayant le caractère d'une punition en des termes suffisamment clairs et précis. 26. Le dernier alinéa du paragraphe X bis de l'article 199 novovicies sanctionne la méconnaissance du plafond des frais et commissions directs et indirects versés à des intermédiaires d'une amende administrative due par le vendeur, dont le montant ne peut être supérieur à dix fois les frais excédant ce plafond. 27. En premier lieu, ni les termes de « prix de revient » ni ceux de « frais et commissions directs et indirects », rapportés à l'activité d'intermédiation commerciale, ne présentent de caractère imprécis ou équivoque. 28. En deuxième lieu, en adoptant les dispositions contestées, le législateur a réprimé la méconnaissance du plafond applicable à ces frais par le vendeur. Comme énoncé au paragraphe 13, il appartient à l'acquéreur de faire connaître au vendeur ou au promoteur son intention de bénéficier de cet avantage fiscal en temps utile, au plus tard lors de la signature du contrat préliminaire de vente d'un logement en l'état futur d'achèvement ou du contrat de vente. Seul est ainsi sanctionné le fait pour le vendeur d'avoir dépassé le plafond des frais d'intermédiation commerciale au titre de la vente d'un logement éligible à la réduction d'impôt, alors que l'acquéreur lui avait fait connaître son intention d'en bénéficier. 29. Ce faisant, le législateur a défini les éléments essentiels de l'obligation dont la méconnaissance est sanctionnée. 30. En dernier lieu, le législateur n'a pas méconnu l'étendue de sa compétence dans la détermination de la sanction applicable au vendeur dès lors qu'il a prévu que l'amende ne peut dépasser un montant qu'il a fixé à dix fois les frais excédant le plafond des frais de commercialisation. 31. Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de la méconnaissance du principe de légalité des délits et des peines doit être écarté. 32. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le principe selon lequel « nul ne peut être punissable que de son propre fait » ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les trois premiers et le dernier alinéas du paragraphe X bis de l'article 199 novovicies du code général des impôts, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 octobre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 15 octobre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 29 juillet 2020 par le Conseil d'État (décision n° 436586 du même jour), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour la communauté de communes Chinon, Vienne et Loire par la SCP Colin - Stoclet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-862 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du paragraphe II de l'article 250 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, dans sa rédaction initiale. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code général des collectivités territoriales ; - la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour la communauté de communes requérante par la SCP Colin - Stoclet, enregistrées le 19 août 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 20 août 2020 ; - les secondes observations présentées pour la communauté de communes requérante par la SCP Colin - Stoclet, enregistrées le 4 septembre 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Mathieu Stoclet, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la communauté de communes requérante et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 6 octobre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Le paragraphe II de l'article 250 de la loi du 28 décembre 2018 mentionnée ci-dessus, dans sa rédaction initiale, prévoit :« À compter de 2019, le prélèvement opéré en 2018 en application du troisième alinéa de l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction antérieure à la présente loi, est reconduit chaque année. « En cas de différence, pour un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, entre le périmètre constaté au 1er janvier de chaque année et celui existant au 1er janvier de l'année précédente, le prélèvement est recalculé de la manière suivante : « 1° En calculant, la part du prélèvement de l'année précédente afférente à chaque commune membre d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre au 1er janvier de l'année précédente, par répartition du montant du prélèvement au prorata de la population de la commune dans la population de l'établissement ; « 2° Puis en additionnant les parts, calculées conformément au 1° du présent II, de chacune des communes que cet établissement regroupe au 1er janvier de l'année en cours ». 2. La communauté de communes requérante reproche à ces dispositions de maintenir de manière pérenne, pour les seuls établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre qui y étaient assujettis en 2018, le prélèvement acquitté cette année-là au titre de la contribution au redressement des finances publiques. Ce faisant, le montant à acquitter ne rendrait plus compte des caractéristiques démographiques ou financières des établissements publics en cause. Il en résulterait une différence de traitement injustifiée entre les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre, selon qu'ils ont ou non été assujettis à ce prélèvement en 2018, et une charge excessive pour ceux qui y ont été assujettis. La communauté de communes requérante soutient également que ce prélèvement serait susceptible de peser fortement sur les capacités d'autofinancement des établissements publics en cause et contreviendrait, pour cette raison, aux principes de libre administration et d'autonomie financière des collectivités territoriales. 3. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le premier alinéa du paragraphe II de l'article 250 de la loi du 28 décembre 2018. - Sur le fond : 4. Selon l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ». En particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, le législateur doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose. Cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. 5. Jusqu'en 2018, en application de l'article L. 5211-28 du code général des collectivités territoriales, la dotation d'intercommunalité de chaque établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre était minorée, en fonction de ses recettes réelles de fonctionnement, afin de le faire participer à l'effort budgétaire de redressement des comptes publics. Lorsque, cette minoration excédait le montant de la dotation d'intercommunalité susceptible de revenir à un établissement public, celui-ci était assujetti, pour le solde restant, à un prélèvement de l'État sur les compensations d'exonération dues ou, à défaut, sur le produit de la fiscalité locale. L'objet de ce prélèvement était, ainsi, d'assurer que tous les établissements publics de coopération intercommunale participent, à hauteur de leur richesse relative, à l'effort de redressement des finances publiques. 6. Depuis la réforme de la dotation d'intercommunalité organisée par l'article 250 de la loi du 28 décembre 2018, le montant de la contribution des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre au redressement des finances publiques a été directement intégré à la dotation d'intercommunalité par une minoration de son montant global avant répartition individuelle. Les dispositions contestées de cet article 250 ont toutefois maintenu, de manière pérenne, pour les seuls établissements publics de coopération intercommunale qui y avaient été assujettis en 2018, le prélèvement précité, en en fixant le montant à celui appliqué cette même année 2018. 7. La différence de traitement ainsi instaurée entre les établissements publics de coopération intercommunale repose uniquement sur la circonstance que, compte tenu de leur niveau de richesse relative et des montants de dotation individuelle d'intercommunalité et de contribution au redressement des finances publiques qui en découlaient, ils ont été ou non soumis à ce prélèvement en 2018. Si le législateur a prévu, aux trois derniers alinéas de l'article 250 de la loi du 28 décembre 2018, que, lorsque le périmètre des établissements publics de coopération intercommunale change, le montant du prélèvement à acquitter doit être recalculé en conséquence, aucune autre évolution de la situation, notamment financière ou démographique, des établissements publics intéressés n'est susceptible de remettre en cause ni leur assujettissement au prélèvement ni son montant. 8. Or, s'il était loisible au législateur de prévoir, dans le cadre de la réforme de la dotation d'intercommunalité, le maintien à titre transitoire du prélèvement auquel certains établissements publics de coopération intercommunale étaient jusqu'alors soumis, afin de garantir qu'ils continueraient à participer, à hauteur de leur richesse relative constatée en 2018, au redressement des finances publiques, il ne pouvait, compte tenu de l'objet de ce prélèvement et sans autre possibilité d'ajustement, laisser subsister de façon pérenne une telle différence de traitement sans porter une atteinte caractérisée à l'égalité devant les charges publiques. 9. Par conséquent, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres griefs, les dispositions contestées doivent être déclarées contraires à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 10. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 11. En l'espèce, en premier lieu, les dispositions déclarées contraires à la Constitution, dans leur rédaction contestée, ne sont plus en vigueur. 12. En second lieu, la remise en cause de l'ensemble des prélèvements opérés sur le fondement de ces dispositions aurait des conséquences manifestement excessives. Par suite, ces prélèvements ne peuvent être contestés sur le fondement de cette inconstitutionnalité. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Le premier alinéa du paragraphe II de l'article 250 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, dans sa rédaction initiale, est contraire à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 12 de cette décision. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 octobre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 15 octobre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 11 septembre 2020 par la Cour de cassation (deuxième chambre civile, arrêt n° 1034 du 10 septembre 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour la société Route destination voyages par la SCP Piwnica et Molinié, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-864 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit de l'article L. 243-7-5 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code de la sécurité sociale ; - la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées pour l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du Nord - Pas-de-Calais, partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées les 23 et 30 septembre 2020 et le 1er octobre 2020 ; - les observations présentées pour la société requérante par la SCP Piwnica et Molinié, enregistrées le 30 septembre 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 1er octobre 2020 ; - les secondes observations présentées pour la société requérante par la SCP Piwnica et Molinié, enregistrées le 15 octobre 2020 ; - la lettre du 30 octobre 2020 par laquelle le Conseil constitutionnel a communiqué aux parties un grief susceptible d'être relevé d'office ; - les observations en réponse présentées pour la société requérante par la SCP Piwnica et Molinié, enregistrées le 2 novembre 2020 ; - les observations en réponse présentées pour l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du Nord - Pas-de-Calais par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Emmanuel Piwnica, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour la société requérante, Me Jean-Jacques Gatineau, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, pour l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales du Nord - Pas-de-Calais, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 3 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. L'article L. 243-7-5 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi du 17 décembre 2012 mentionnée ci-dessus, prévoit :« Les organismes de recouvrement mentionnés aux articles L. 213-1 et L. 752-4 peuvent procéder au redressement des cotisations et contributions dues sur la base des informations contenues dans les procès-verbaux de travail dissimulé qui leur sont transmis par les agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail. Ces organismes ainsi que ceux mentionnés à l'article L. 611-8 du présent code mettent en recouvrement ces cotisations et contributions ». 2. La société requérante soutient que ces dispositions, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, méconnaîtraient les droits de la défense et le principe du contradictoire au motif qu'elles autoriseraient les organismes de recouvrement à procéder au redressement de cotisations et contributions sociales sur la base de procès-verbaux de travail dissimulé sans que ces procès-verbaux soient préalablement communiqués aux personnes faisant l'objet du redressement. Selon elle, ces dispositions seraient également contraires au principe d'égalité devant la justice au motif que, parmi les personnes qui font l'objet d'un tel redressement, seules celles qui sont poursuivies pénalement pourraient obtenir communication des procès-verbaux dans le cadre de la procédure pénale. 3. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « sur la base des informations contenues dans les procès-verbaux de travail dissimulé » figurant à la première phrase de l'article L. 243-7-5 du code de la sécurité sociale. - Sur les conclusions aux fins de non-lieu : 4. La partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée soutient qu'il n'y aurait pas lieu pour le Conseil constitutionnel de statuer sur la conformité des dispositions contestées aux droits et libertés que la Constitution garantit, dans la mesure où, selon elle, les griefs de la société requérante seraient, en réalité, dirigés contre l'article R. 243-59 du code de la sécurité sociale qui détermine la procédure contradictoire applicable aux redressements de cotisations et contributions sociales. Toutefois, une telle argumentation n'est pas de nature à remettre en cause la recevabilité de la question prioritaire de constitutionnalité dont le Conseil constitutionnel est saisi, telle que renvoyée par la Cour de cassation. - Sur le fond : 5. Selon l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Cette disposition implique notamment qu'aucune sanction ayant le caractère d'une punition ne puisse être infligée à une personne sans que celle-ci ait été mise à même de présenter ses observations sur les faits qui lui sont reprochés. Le principe du contradictoire s'impose aux autorités disposant d'un pouvoir de sanction sans qu'il soit besoin pour le législateur d'en rappeler l'existence. 6. Les dispositions contestées se bornent à autoriser les organismes de protection sociale et de recouvrement des cotisations et contributions sociales à procéder à des redressements sur la base des informations contenues dans les procès-verbaux de travail dissimulé qui leur sont transmis par les agents d'autres organismes. Elles n'ont, ni par elles-mêmes ni en raison de la portée effective qu'une interprétation jurisprudentielle constante leur aurait conférée, pour objet ou pour effet de faire obstacle à l'application des dispositions législatives ou réglementaires instituant une procédure contradictoire en cas de redressement de ces cotisations ou contributions après constatation des faits de travail dissimulé. 7. Dès lors, le grief tiré de la méconnaissance de l'article 16 de la Déclaration de 1789 doit être écarté. Les dispositions contestées, qui ne méconnaissent pas non plus le principe d'égalité devant la justice ni aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « sur la base des informations contenues dans les procès-verbaux de travail dissimulé » figurant à la première phrase de l'article L. 243-7-5 du code de la sécurité sociale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 12 novembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD et Michel PINAULT. Rendu public le 13 novembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 10 septembre 2020 par la Cour de cassation (première chambre civile, arrêt n° 615 du même jour), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée pour la société Manpower France par Me Romain Chiss, avocat au barreau de Paris. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-863 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du second alinéa de l'article 54 et du premier alinéa de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ; - l'ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 modifiant la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse ; - la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté ; - les arrêts de la Cour de cassation du 5 février 1992 et du 14 novembre 2002 (deuxième chambre civile, nos 90-16.022 et 00-16.808) ; - la décision du Conseil constitutionnel n° 2019-786 QPC du 24 mai 2019 ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées par M. Maxence L., partie au litige à l'occasion duquel la question prioritaire de constitutionnalité a été posée, enregistrées le 17 septembre 2020 ; - les observations présentées pour la société requérante par Me Chiss et par la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, enregistrées le 1er octobre 2020 ; - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le même jour ; - les secondes observations présentées pour la société requérante par Me Chiss et par la SCP Waquet, Farge, Hazan, enregistrées le 16 octobre 2020 ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu Me Claire Waquet, avocate au Conseil d'État et à la Cour de cassation, et Me Chiss, pour la société requérante, et M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 3 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La question prioritaire de constitutionnalité doit être considérée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée. Dès lors, le Conseil constitutionnel est saisi du second alinéa de l'article 54 de la loi du 29 juillet 1881 mentionnée ci-dessus dans sa rédaction résultant de l'ordonnance du 13 septembre 1945 mentionnée ci-dessus, modifiée par la décision du Conseil constitutionnel du 24 mai 2019 mentionnée ci-dessus, et du premier alinéa de l'article 55 de la même loi dans sa rédaction résultant de la loi du 27 janvier 2017 mentionnée ci-dessus. 2. L'article 54 de la loi du 29 juillet 1881, dans cette rédaction, fixe un délai entre la citation et la comparution en matière d'infractions commises par voie de presse. Son second alinéa prévoit :« Toutefois, en cas de diffamation ou d'injure pendant la période électorale contre un candidat à une fonction électorale, ce délai sera réduit à vingt-quatre heures, outre le délai de distance, et les dispositions des articles 55 et 56 ne seront pas applicables ». 3. Le premier alinéa de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881, dans sa rédaction mentionnée ci-dessus, prévoit :« Quand le prévenu voudra être admis à prouver la vérité des faits diffamatoires, conformément aux dispositions de l'article 35 de la présente loi, il devra, dans le délai de dix jours après la signification de la citation, faire signifier au ministère public ou au plaignant au domicile par lui élu, suivant qu'il est assigné à la requête de l'un ou de l'autre : ». 4. La société requérante soutient que les dispositions de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881, telles qu'interprétées par la Cour de cassation, interdisent à la juridiction civile des référés, saisie par une personne qui s'estime victime d'une diffamation, de statuer avant l'expiration d'un délai de dix jours à compter de cette saisine, ce qui empêcherait le prononcé de mesures conservatoires de nature à préserver ses intérêts. Il en résulterait une méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif. Par ailleurs, elle reproche aux dispositions de l'article 54 de la même loi de ne pas écarter l'application de ce délai de dix jours lorsque la diffamation intervient durant une campagne électorale, notamment en vue d'élections professionnelles, et vise une personne autre qu'un candidat. Il en résulterait, là encore, une méconnaissance du droit à un recours juridictionnel effectif, ainsi que du principe de sincérité du scrutin garanti, en particulier, par l'article 3 de la Constitution. 5. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur les mots « contre un candidat à une fonction électorale » figurant au second alinéa de l'article 54 de la loi du 29 juillet 1881 et sur les mots « dans le délai de dix jours après la signification de la citation » figurant au premier alinéa de l'article 55 de la même loi. - Sur les dispositions contestées de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881 : 6. Selon l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». Il résulte de cette disposition qu'il ne doit pas être porté d'atteinte substantielle au droit des personnes intéressées d'exercer un recours effectif devant une juridiction. 7. Aux termes de l'article 11 de la Déclaration de 1789 : « La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l'homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l'abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ». La liberté d'expression et de communication est d'autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés. 8. Il résulte de l'article 16 de la Déclaration de 1789 qu'est garanti le respect des droits de la défense. 9. En application de la loi du 29 juillet 1881, le prévenu poursuivi pour diffamation peut, sous certaines conditions, s'exonérer de toute responsabilité en prouvant la vérité des faits diffamatoires. Pour ce faire, le premier alinéa de son article 55 lui impose, dans le délai de dix jours après la signification de la citation, de faire signifier au ministère public ou au plaignant les faits articulés et qualifiés dans la citation, desquels il entend prouver la vérité, la copie des pièces et les noms, professions et demeures des témoins par lesquels il entend faire la preuve. Il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de cassation que ce délai de dix jours s'applique non seulement en matière pénale, mais aussi en matière civile, y compris en référé. 10. En premier lieu, en instituant ce délai de dix jours, le législateur a souhaité permettre à l'auteur des propos susceptibles d'être jugés diffamatoires de préparer sa défense et, à cette fin, de disposer du temps nécessaire à la formulation de l'offre de preuve tendant à établir la vérité des faits en cause. Il a ainsi apporté une garantie en faveur de l'exercice de la liberté d'expression et de communication et des droits de la défense. 11. En second lieu, d'une part, si les dispositions contestées empêchent le juge de statuer sans délai, y compris à titre conservatoire, elles ne privent pas la personne qui s'estime diffamée de la possibilité d'obtenir, à l'expiration du délai de dix jours, que soient prescrites les mesures nécessaires à la protection de ses intérêts. D'autre part, ces dispositions ne font pas davantage obstacle à ce que cette personne puisse obtenir réparation du préjudice que lui a, le cas échéant, causé la diffamation. 12. Il résulte de ce qui précède que le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, la liberté d'expression et de communication et les droits de la défense et, d'autre part, le droit à un recours juridictionnel effectif. 13. Les dispositions contestées de l'article 55 de la loi du 29 juillet 1881, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent donc être déclarées conformes à la Constitution. - Sur les dispositions contestées de l'article 54 de la loi du 29 juillet 1881 : 14. Selon le troisième alinéa de l'article 3 de la Constitution, le suffrage « est toujours universel, égal et secret ». Il en résulte, en matière d'élections à des mandats et fonctions politiques, le principe de sincérité du scrutin. 15. Aux termes du huitième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 : « Tout travailleur participe, par l'intermédiaire de ses délégués, à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises ». Il en résulte, en matière d'élections professionnelles, le principe de sincérité du scrutin. 16. Applicables aux élections politiques, mais aussi, notamment, aux élections professionnelles, les dispositions contestées de l'article 54 de la loi du 29 juillet 1881 définissent les cas dans lesquels, en période électorale, le délai de dix jours accordé au défendeur en matière de diffamation par l'article 55 n'est, par exception, pas opposable lorsque la diffamation vise un candidat à l'élection. 17. En premier lieu, la liberté d'expression revêt une importance particulière dans le débat politique et au cours des campagnes électorales. Elle garantit à la fois l'information de chacun et la défense de toutes les opinions mais prémunit aussi contre les conséquences des abus commis sur son fondement en permettant d'y répondre et de les dénoncer, notamment en cas de diffamation. 18. En second lieu, même dans le cas où, au cours de la période électorale, une diffamation vise une personne autre qu'un candidat, les dispositions contestées ne privent pas le juge de l'élection, saisi d'un tel grief, de la faculté d'apprécier si la diffamation alléguée a pu altérer, dans les circonstances de l'espèce, la sincérité du scrutin et, le cas échéant, de prononcer l'annulation de l'élection. 19. Par conséquent, et compte tenu des motifs énoncés aux paragraphes 10 et 11, le législateur a assuré une conciliation qui n'est pas manifestement déséquilibrée entre, d'une part, la liberté d'expression et de communication et les droits de la défense et, d'autre part, le principe de sincérité du scrutin et le droit à un recours juridictionnel effectif. 20. Les dispositions contestées de l'article 54 de la loi du 29 juillet 1881, qui ne méconnaissent aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, doivent donc être déclarées conformes à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les mots « contre un candidat à une fonction électorale » figurant au second alinéa de l'article 54 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, dans sa rédaction résultant de l'ordonnance n° 45-2090 du 13 septembre 1945 modifiant la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, modifiée par la décision du Conseil constitutionnel n° 2019-786 QPC du 24 mai 2019, et les mots « dans le délai de dix jours après la signification de la citation » figurant au premier alinéa de l'article 55 de la même loi, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, sont conformes à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 12 novembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD et Michel PINAULT. Rendu public le 13 novembre 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire, sous le n° 2020-808 DC, le 7 novembre 2020, par Mme Valérie RABAULT, MM. Jean-Luc MÉLENCHON, André CHASSAIGNE, Joël AVIRAGNET, Mmes Marie-Noëlle BATTISTEL, Gisèle BIÉMOURET, MM. Jean-Louis BRICOUT, Alain DAVID, Mme Laurence DUMONT, MM. Olivier FAURE, Guillaume GAROT, David HABIB, Christian HUTIN, Mme Chantal JOURDAN, M. Régis JUANICO, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Serge LETCHIMY, Mme Josette MANIN, M. Philippe NAILLET, Mmes George PAU-LANGEVIN, Christine PIRES BEAUNE, M. Dominique POTIER, Mme Claudia ROUAUX, M. Hervé SAULIGNAC, Mmes Sylvie TOLMONT, Cécile UNTERMAIER, Hélène VAINQUEUR-CHRISTOPHE, M. Boris VALLAUD, Mme Michèle VICTORY, M. Gérard LESEUL, Mmes Isabelle SANTIAGO, Clémentine AUTAIN, MM. Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Mme Caroline FIAT, MM. Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Mmes Danièle OBONO, Mathilde PANOT, MM. Loïc PRUD'HOMME, Adrien QUATENNENS, Jean-Hugues RATENON, Mmes Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, M. François RUFFIN, Mme Bénédicte TAURINE, M. Alain BRUNEEL, Mme Marie-George BUFFET, MM. Pierre DHARRÉVILLE, Jean-Paul DUFRÈGNE, Mme Elsa FAUCILLON, MM. Sébastien JUMEL, Jean-Paul LECOQ, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC, Mmes Karine LEBON, Manuéla KÉCLARD-MONDÉSIR, MM. Moetai BROTHERSON, Jean-Philippe NILOR, MM. Jean-Félix ACQUAVIVA, Bertrand PANCHER, Charles de COURSON, M. Benoit SIMIAN, Mme Jennifer de TEMMERMAN, M. Jean-Michel CLÉMENT et Mme Frédérique DUMAS, députés. Il a également été saisi, le même jour, par MM. Patrick KANNER, Maurice ANTISTE, Mme Viviane ARTIGALAS, MM. David ASSOULINE, Joël BIGOT, Mmes Florence BLATRIX-CONTAT, Nicole BONNEFOY, M. Hussein BOURGI, Mme Isabelle BRIQUET, M. Rémi CARDON, Mmes Marie-Arlette CARLOTTI, Catherine CONCONNE, Hélène CONWAY-MOURET, MM. Thierry COZIC, Michel DAGBERT, Mme Marie-Pierre de la GONTRIE, MM. Gilbert-Luc DEVINAZ, Jérôme DURAIN, Vincent ÉBLÉ, Mme Frédérique ESPAGNAC, M. Rémi FÉRAUD, Mme Corinne FÉRET, M. Jean-Luc FICHET, Mme Martine FILLEUL, M. Hervé GILLÉ, Mme Laurence HARRIBEY, MM. Jean-Michel HOULLEGATTE, Olivier JACQUIN, Mme Victoire JASMIN, MM. Éric JEANSANNETAS, Bernard JOMIER, Mme Gisèle JOURDA, M. Éric KERROUCHE, Mme Annie LE HOUEROU, M. Jean-Yves LECONTE, Mme Claudine LEPAGE, M. Jean-Jacques LOZACH, Mme Monique LUBIN, MM. Victorin LUREL, Didier MARIE, Mme Michelle MEUNIER, M. Jean-Jacques MICHAU, Mme Marie-Pierre MONIER, M. Sébastien PLA, Mmes Émilienne POUMIROL, Angèle PRÉVILLE, MM. Claude RAYNAL, Christian REDON-SARRAZY, Mme Sylvie ROBERT, M. Gilbert ROGER, Mme Laurence ROSSIGNOL, MM. Lucien STANZIONE, Jean-Pierre SUEUR, Rachid TEMAL, Jean-Claude TISSOT, Jean-Marc TODESCHINI, Mickaël VALLET, André VALLINI, Mme Sabine VAN HEGHE et M. Yannick VAUGRENARD, sénateurs. Le 9 novembre 2020, le Premier ministre a demandé au Conseil constitutionnel de statuer selon la procédure d'urgence prévue au troisième alinéa de l'article 61 de la Constitution. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ; - la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ; - la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne ; - la loi n° 2020-856 du 9 juillet 2020 organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire ; - le code de la santé publique ; - le décret n° 2020-1257 du 14 octobre 2020 déclarant l'état d'urgence sanitaire ; - la décision du Conseil constitutionnel n° 2020-800 DC du 11 mai 2020 ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 10 novembre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Les députés et les sénateurs requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire. Ils contestent son article 1er ainsi que certaines dispositions de ses articles 2 et 10. Les députés requérants contestent également certaines dispositions de son article 5. - Sur l'article 1er : 2. L'article 1er de la loi déférée proroge jusqu'au 16 février 2021 l'état d'urgence sanitaire déclaré par le décret du 14 octobre 2020 mentionné ci-dessus. 3. Les députés et sénateurs requérants contestent la constitutionnalité de cette prorogation. Selon les premiers, celle-ci permettrait la mise en œuvre de mesures portant, au regard des nécessités sanitaires, une atteinte disproportionnée aux droits et libertés constitutionnellement garantis, notamment la liberté d'aller et de venir, le droit au respect de la vie privée, la liberté d'entreprendre et la liberté d'expression et de communication. Pour les seconds, en prévoyant une prorogation de l'état d'urgence sanitaire d'une durée de quatre mois sans qu'il soit nécessaire que le Parlement intervienne à nouveau dans ce délai, le législateur aurait opéré une conciliation déséquilibrée entre l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et les droits et libertés précités. 4. Aux termes du onzième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, la Nation « garantit à tous … la protection de la santé ». Il en découle un objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. 5. La Constitution n'exclut pas la possibilité pour le législateur de prévoir un régime d'état d'urgence sanitaire. Il lui appartient, dans ce cadre, d'assurer la conciliation entre l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et le respect des droits et libertés reconnus à tous ceux qui résident sur le territoire de la République. 6. En premier lieu, l'état d'urgence sanitaire vise à permettre aux pouvoirs publics de prendre des mesures afin de faire face à une crise sanitaire grave. Le législateur a estimé, au regard des données scientifiques disponibles sur la situation sanitaire, que l'épidémie de covid-19 se répand à une vitesse élevée contribuant, compte tenu par ailleurs des capacités actuelles de prise en charge des patients par le système de santé, à un état de catastrophe sanitaire mettant en péril, par sa nature et sa gravité, la santé de la population. Il a par ailleurs considéré, au regard de la dynamique de l'épidémie et de la période hivernale à venir, que cet état devrait perdurer au moins durant les quatre mois à venir. Cette appréciation est corroborée par les avis des 19 et 26 octobre 2020 du comité de scientifiques prévu par l'article L. 3131-19 du code de la santé publique. Il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, qui ne dispose pas d'un pouvoir général d'appréciation et de décision de même nature que celui du Parlement, de remettre en cause l'appréciation par le législateur de l'existence d'une catastrophe sanitaire et de sa persistance prévisible dans les quatre prochains mois, dès lors que, comme c'est le cas en l'espèce, cette appréciation n'est pas, en l'état des connaissances, manifestement inadéquate au regard de la situation présente de l'ensemble du territoire français. 7. En deuxième lieu, en vertu du premier alinéa du paragraphe I de l'article L. 3131-15 du code de la santé publique, les mesures prévues dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire ne peuvent en tout état de cause être prises qu'aux seules fins de garantir la santé publique. Selon le paragraphe III du même article, elles doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. Le juge est chargé de s'assurer que de telles mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à la finalité qu'elles poursuivent. 8. En dernier lieu, quand la situation sanitaire le permet, il doit être mis fin à l'état d'urgence sanitaire par décret en conseil des ministres avant l'expiration du délai fixé par la loi le prorogeant. 9. Il résulte de ce qui précède que le législateur a pu, sans méconnaître aucune exigence constitutionnelle, proroger l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 16 février 2021. Par conséquent, l'article 1er est conforme à la Constitution. - Sur certaines dispositions de l'article 2 : 10. Les paragraphes I et II de l'article 2 de la loi prorogent jusqu'au 1er avril 2021, dans les territoires où l'état d'urgence sanitaire n'est pas en cours d'application, le régime transitoire organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire prévu par l'article 1er de la loi du 9 juillet 2020 mentionnée ci-dessus. 11. Selon les députés et les sénateurs requérants, en prévoyant, malgré l'absence d'éléments objectifs permettant d'anticiper la situation sanitaire de la France jusqu'à cette date, que le régime transitoire organisant la sortie de l'état d'urgence sanitaire s'appliquera automatiquement, sans nouvelle intervention du Parlement, dès l'expiration du terme fixé pour l'état d'urgence sanitaire ou sa levée anticipée, le législateur n'aurait pas opéré une conciliation équilibrée entre l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé et les droits et libertés susceptibles d'être en cause. Selon les sénateurs requérants, il en résulterait également une méconnaissance par le législateur de l'étendue de sa compétence et une atteinte au principe de la séparation des pouvoirs. 12. En premier lieu, en prévoyant un régime transitoire de sortie de l'état d'urgence sanitaire, le législateur a entendu permettre aux pouvoirs publics de prendre des mesures visant à lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. Il a dès à présent estimé qu'un risque important de propagation de l'épidémie persisterait au-delà de la période d'application de l'état d'urgence sanitaire, jusqu'au 1er avril 2021. Compte tenu des éléments mentionnés au paragraphe 6, il n'a pas, en l'état des connaissances, procédé à une appréciation manifestement inadéquate au regard de la situation présente. 13. En deuxième lieu, en vertu du premier alinéa du paragraphe I de l'article 1er de la loi du 9 juillet 2020, les mesures susceptibles d'être prononcées dans le cadre du régime transitoire ne peuvent être prises que dans l'intérêt de la santé publique et aux seules fins de lutter contre la propagation de l'épidémie de covid-19. Selon le paragraphe III de ce même article, elles doivent être strictement proportionnées aux risques sanitaires encourus et appropriées aux circonstances de temps et de lieu. Il y est mis fin sans délai lorsqu'elles ne sont plus nécessaires. Le juge est chargé de s'assurer que de telles mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à la finalité qu'elles poursuivent. 14. En troisième lieu, d'une part, le législateur, compétent pour établir un régime d'état d'urgence sanitaire, l'est également pour confier au pouvoir réglementaire le soin d'en anticiper la fin par rapport au terme qu'il a fixé, lorsque les conditions n'en sont plus réunies. D'autre part, le législateur a précisé dans la loi la date à laquelle le régime transitoire, succédant à cet état d'urgence, prendra fin. 15. Il résulte de tout ce qui précède que le législateur a pu, sans méconnaître l'étendue de sa compétence ni aucune autre exigence constitutionnelle, proroger le régime transitoire précité jusqu'au 1er avril 2021 et prévoir son application automatique à l'issue du délai d'expiration de l'état d'urgence sanitaire. Par conséquent, le 1° du paragraphe I et le paragraphe II de l'article 2 sont conformes à la Constitution. - Sur certaines dispositions de l'article 5 : 16. L'article 5 modifie l'article 11 de la loi du 11 mai 2020 mentionnée ci-dessus qui organise les conditions dans lesquelles les données relatives à la santé des personnes atteintes par le virus responsable de la covid-19 et des personnes en contact avec elles sont, le cas échéant sans leur consentement, traitées et partagées à travers un système d'information ad hoc. 17. Les députés requérants font valoir que cet article 5 méconnaîtrait le droit au respect de la vie privée au motif qu'il prolonge le traitement et le partage de ces données jusqu'au 1er avril 2021 et qu'il élargit le champ des personnes y ayant accès. 18. La liberté proclamée par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 implique le droit au respect de la vie privée. Par suite, la collecte, l'enregistrement, la conservation, la consultation et la communication de données à caractère personnel doivent être justifiés par un motif d'intérêt général et mis en œuvre de manière adéquate et proportionnée à cet objectif. Lorsque sont en cause des données à caractère personnel de nature médicale, une particulière vigilance doit être observée dans la conduite de ces opérations et la détermination de leurs modalités. 19. L'article 5 modifie le paragraphe I de l'article 11 de la loi du 11 mai 2020 afin de prévoir que le traitement et le partage des données à caractère personnel prévus par cet article 11 ne peuvent être mis en œuvre au plus tard que jusqu'au 1er avril 2021. Il modifie également le paragraphe III du même article 11 afin de donner accès à ces données à certains professionnels de santé et de prévoir qu'elles peuvent être communiquées aux organismes qui assurent l'accompagnement social des personnes infectées ou susceptibles de l'être pendant et après la fin des prescriptions médicales et d'isolement prophylactiques. 20. En premier lieu, par la décision du 11 mai 2020 mentionnée ci-dessus, le Conseil constitutionnel a, pour les motifs énoncés aux paragraphes 63 à 78 et sous les réserves énoncées aux paragraphes 67, 73 et 74 de cette décision, jugé conforme à la Constitution le système d'information prévu par l'article 11 de la loi du 11 mai 2020. En particulier, comme le Conseil constitutionnel l'a jugé au paragraphe 63 de sa décision, en adoptant l'article 11 de la loi du 11 mai 2020, le législateur a entendu renforcer les moyens de lutte contre l'épidémie de covid-19 par l'identification des chaînes de contamination. Il a ainsi poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de protection de la santé. Comme il ressort des paragraphes 66 à 67 de cette même décision, les données à caractère personnel qui font l'objet du système de traitement et de partage prévu par cet article 11 sont les seules données strictement nécessaires à la poursuite des finalités propres à ce système. 21. En deuxième lieu, d'une part, en ouvrant l'accès à ces données aux professionnels de santé figurant sur une liste prévue par décret et habilités à la réalisation des examens de dépistage virologique ou sérologique, le législateur a visé les personnels qui participent à l'établissement du diagnostic et à l'identification des chaînes de contamination. De plus, il résulte des dispositions du paragraphe III de l'article 11 que ces professionnels ne peuvent avoir accès qu'aux seules données nécessaires à leur intervention et dans la stricte mesure où leur intervention sert les finalités poursuivies par le système d'information. 22. D'autre part, si les dispositions contestées prévoient que les organismes qui assurent l'accompagnement social des personnes infectées ou susceptibles de l'être peuvent recevoir les données contenues dans ce système, cette communication est subordonnée au recueil préalable du consentement des intéressés. En outre, cette communication ne peut porter que sur les données strictement nécessaires à l'exercice de la mission de ces organismes. 23. Enfin, le législateur, qui a estimé qu'un risque important de propagation de l'épidémie persistait jusqu'au 1er avril 2021, a prévu que le dispositif instauré à l'article 11 de la loi du 11 mai 2020 pourra être appliqué au plus tard jusqu'à cette date. Pour les motifs précédemment mentionnés, cette appréciation n'est pas, en l'état des connaissances, manifestement inadéquate au regard de la situation présente. 24. Il résulte de tout ce qui précède que, sous les mêmes réserves que celles énoncées aux paragraphes 73 et 74 de la décision du 11 mai 2020, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le droit au respect de la vie privée. 25. Dès lors, les mots « tard, jusqu'au 1er avril 2021 » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article 11 de la loi du 11 mai 2020 ainsi que les mots « professionnels de santé autorisés à réaliser les examens de dépistage virologique ou sérologique » et les mots « Les organismes qui assurent l'accompagnement social des intéressés dans les conditions prévues au 5° du II du présent article peuvent également recevoir les données strictement nécessaires à l'exercice de leur mission » figurant à la deuxième phrase du paragraphe III du même article 11, qui ne méconnaissent aucune autre exigence constitutionnelle, sont, sous les réserves énoncées au paragraphe précédent, conformes à la Constitution. - Sur certaines dispositions de l'article 10 : 26. L'article 10 habilite le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures tendant à prolonger, rétablir ou adapter certaines dispositions elles-mêmes précédemment adoptées par voie d'ordonnance pour remédier aux conséquences de la crise sanitaire. 27. Les députés et sénateurs requérants reprochent à l'habilitation prévue au paragraphe I de cet article 10 de renvoyer à de précédentes habilitations législatives. Compte tenu du nombre de ces renvois et de l'importance des champs couverts par les dispositions auxquelles il est fait référence, le domaine d'intervention de l'habilitation serait imprécis. Pour les sénateurs requérants, il serait, ce faisant, impossible de déterminer si les finalités poursuivies par la loi, notamment celle d'adaptation desdites dispositions, sont bien conformes à la Constitution. Les dispositions de l'article 38 de la Constitution s'en trouveraient donc méconnues. Il en résulterait également, pour les députés requérants, une méconnaissance des exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. 28. Aux termes du premier alinéa de l'article 38 de la Constitution : « Le Gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi ». Si cette disposition fait obligation au Gouvernement d'indiquer avec précision au Parlement, afin de justifier la demande qu'il présente, la finalité des mesures qu'il se propose de prendre par voie d'ordonnances ainsi que leur domaine d'intervention, elle n'impose pas au Gouvernement de faire connaître au Parlement la teneur des ordonnances qu'il prendra en vertu de cette habilitation. 29. Les dispositions d'une loi d'habilitation ne sauraient, ni par elles-mêmes, ni par les conséquences qui en découlent nécessairement, méconnaître une règle ou un principe de valeur constitutionnelle. En outre, elles ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser le Gouvernement, dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en application de l'article 38 de la Constitution, de respecter les règles et principes de valeur constitutionnelle. 30. Le paragraphe I de l'article 10 habilite le Gouvernement à adopter, par ordonnances, certaines mesures relevant du domaine de la loi nécessaires pour faire face aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des décisions prises pour limiter cette propagation. Ces mesures consistent exclusivement en la prolongation ou le rétablissement des dispositions précédemment adoptées, par voie d'ordonnances, sur le fondement de plusieurs des habilitations législatives prévues au paragraphe I de l'article 11 et à l'article 16 de la loi du 23 mars 2020 mentionnée ci-dessus ainsi qu'à l'article 1er de la loi du 17 juin 2020 mentionnée ci-dessus. Le même paragraphe I de l'article 10 habilite le Gouvernement à apporter à ces dispositions ainsi prolongées ou rétablies les modifications nécessaires à cette prolongation ou à ce rétablissement ainsi qu'à leur adaptation à l'état de la situation sanitaire en cours. 31. En premier lieu, l'habilitation conférée au Gouvernement par les dispositions contestées de l'article 10 ne vise pas à permettre la prolongation ou le rétablissement des précédentes habilitations prévues par les lois du 23 mars et du 17 juin 2020, mais seulement à autoriser la prolongation ou le rétablissement, sous réserve de certaines modifications, des mesures adoptées, par voie d'ordonnances, sur le fondement de ces habilitations. L'ensemble de ces mesures est suffisamment défini par le renvoi, dans la loi déférée, aux dispositions des deux lois précitées qui prévoyaient lesdites habilitations. Par conséquent, en renvoyant à ces dispositions, le législateur a suffisamment précisé, aux 1° et 2° du paragraphe I de l'article 10, le domaine d'intervention de l'habilitation conférée au Gouvernement. 32. En deuxième lieu, l'habilitation contestée autorise seulement le Gouvernement à prolonger ou à rétablir les mesures mentionnées au paragraphe précédent ou à les modifier dans la seule mesure nécessaire, d'une part, à cette prolongation ou ce rétablissement et, d'autre part, à leur adaptation aux conditions particulières de l'état de la situation sanitaire. En outre, l'unique objet des ordonnances ainsi adoptées ne peut être que de remédier aux conséquences de la propagation de l'épidémie de covid-19 et des décisions prises pour limiter cette propagation. Dès lors, les finalités de l'habilitation contestée sont, elles aussi, suffisamment définies. 33. En dernier lieu, il appartiendra au Gouvernement qui mettra en œuvre l'habilitation contestée de respecter les règles et principes de valeur constitutionnelle. Le cas échéant, le Conseil constitutionnel pourra ultérieurement être saisi des ordonnances prises sur le fondement de cette habilitation, une fois le délai d'habilitation expiré ou leur ratification intervenue, pour examiner leur conformité aux exigences constitutionnelles. 34. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées ne méconnaissent pas l'article 38 de la Constitution. Elles n'ont pas non plus été adoptées selon une procédure contraire aux exigences de clarté et de sincérité du débat parlementaire. Le paragraphe I de l'article 10, qui ne méconnaît aucune autre exigence constitutionnelle, est conforme à la Constitution. - Sur les autres dispositions : 35. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Sous les réserves énoncées au paragraphe 24, sont conformes à la Constitution : - les mots « tard, jusqu'au 1er avril 2021 » figurant au premier alinéa du paragraphe I de l'article 11 de la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions, dans sa rédaction résultant de l'article 5 de la loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire ; - les mots « professionnels de santé autorisés à réaliser les examens de dépistage virologique ou sérologique » figurant à la première phrase du paragraphe III de l'article 11 de la loi du 11 mai 2020, dans sa rédaction résultant du même article 5 ; - les mots « Les organismes qui assurent l'accompagnement social des intéressés dans les conditions prévues au 5° du II du présent article peuvent également recevoir les données strictement nécessaires à l'exercice de leur mission » figurant à la deuxième phrase du paragraphe III de l'article 11 de la loi du 11 mai 2020, dans sa rédaction résultant du même article 5. Article 2. - Sont conformes à la Constitution les dispositions suivantes de la loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire : - l'article 1er ; - le 1° du paragraphe I et le paragraphe II de l'article 2 ; - le paragraphe I de l'article 10. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 13 novembre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 13 novembre 2020
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 16 juillet 2020 par le Conseil d'État (décision nos 439031 et 439216 du 15 juillet 2020), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité. Cette question a été posée par le syndicat des agrégés de l'enseignement supérieur et par le syndicat national des collèges et des lycées. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2020-860 QPC. Elle est relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit du dixième alinéa du paragraphe I de l'article 72 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique ; - le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ; Au vu des pièces suivantes : - les observations présentées par le Premier ministre, enregistrées le 6 août 2020 ; - les observations présentées par le syndicat des agrégés de l'enseignement supérieur, enregistrées le 20 août 2020 ; - les observations présentées par le syndicat national des collèges et des lycées, enregistrées le même jour ; - les autres pièces produites et jointes au dossier ; Après avoir entendu M. Philippe Blanc, désigné par le Premier ministre, à l'audience publique du 6 octobre 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Le dixième alinéa du paragraphe I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019 mentionnée ci-dessus prévoit :« Durant la procédure de rupture conventionnelle, le fonctionnaire peut se faire assister par un conseiller désigné par une organisation syndicale représentative de son choix ». 2. Les requérants reprochent à ces dispositions d'interdire aux organisations syndicales non représentatives d'assister un fonctionnaire au cours d'une procédure de rupture conventionnelle. Ils soutiennent qu'elles instaureraient deux différences de traitement injustifiées : l'une entre les syndicats représentatifs et les syndicats non représentatifs ; l'autre entre les fonctionnaires, selon qu'ils sont ou non adhérents d'un syndicat représentatif. Il en résulterait une méconnaissance du principe d'égalité devant la loi. Ils soutiennent également que ces dispositions seraient contraires à la liberté syndicale, à la liberté personnelle, à la garantie des droits, à la liberté contractuelle, à la liberté d'entreprendre des syndicats et à des principes, qu'ils invitent le Conseil constitutionnel à reconnaître, de pluralisme syndical et de libre concurrence entre syndicats. 3. Par conséquent, la question prioritaire de constitutionnalité porte sur le mot « représentative » figurant au dixième alinéa du paragraphe I de l'article 72 de la loi du 6 août 2019. - Sur le fond : 4. Selon l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi « doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse ». Le principe d'égalité ne s'oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes, ni à ce qu'il déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que, dans l'un et l'autre cas, la différence de traitement qui en résulte soit en rapport direct avec l'objet de la loi qui l'établit. 5. L'article 72 de la loi du 6 août 2019, applicable du 1er janvier 2020 au 31 décembre 2025, permet à un fonctionnaire et à son administration de convenir en commun, sous la forme d'une rupture conventionnelle, des conditions de la cessation définitive des fonctions, qui entraîne radiation des cadres et perte de la qualité de fonctionnaire. Cette rupture, qui ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties, résulte d'une convention signée par le fonctionnaire et son administration, dans laquelle est, notamment, défini le montant de l'indemnité spécifique de rupture. Durant la procédure de rupture conventionnelle, le fonctionnaire ne peut se faire assister que par un conseiller désigné par une organisation syndicale représentative de son choix. 6. Les dispositions contestées, qui réservent aux organisations syndicales représentatives la faculté de désigner un conseiller aux fins d'assister le fonctionnaire durant la procédure de rupture conventionnelle, établissent une différence de traitement entre ces organisations et les organisations syndicales non représentatives. 7. En adoptant ces dispositions, le législateur a entendu accorder une garantie au fonctionnaire durant la procédure de rupture conventionnelle. Toutefois, le caractère représentatif ou non d'un syndicat ne détermine pas la capacité du conseiller qu'il a désigné à assurer l'assistance du fonctionnaire dans ce cadre. Dès lors, la différence de traitement est sans rapport avec l'objet de la loi. 8. Par conséquent, les dispositions contestées méconnaissent le principe d'égalité devant la loi. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, elles doivent donc être déclarées contraires à la Constitution. - Sur les effets de la déclaration d'inconstitutionnalité : 9. Selon le deuxième alinéa de l'article 62 de la Constitution : « Une disposition déclarée inconstitutionnelle sur le fondement de l'article 61-1 est abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil constitutionnel ou d'une date ultérieure fixée par cette décision. Le Conseil constitutionnel détermine les conditions et limites dans lesquelles les effets que la disposition a produits sont susceptibles d'être remis en cause ». En principe, la déclaration d'inconstitutionnalité doit bénéficier à l'auteur de la question prioritaire de constitutionnalité et la disposition déclarée contraire à la Constitution ne peut être appliquée dans les instances en cours à la date de la publication de la décision du Conseil constitutionnel. Cependant, les dispositions de l'article 62 de la Constitution réservent à ce dernier le pouvoir tant de fixer la date de l'abrogation et de reporter dans le temps ses effets que de prévoir la remise en cause des effets que la disposition a produits avant l'intervention de cette déclaration. Ces mêmes dispositions réservent également au Conseil constitutionnel le pouvoir de s'opposer à l'engagement de la responsabilité de l'État du fait des dispositions déclarées inconstitutionnelles ou d'en déterminer les conditions ou limites particulières. 10. Aucun motif ne justifie de reporter la prise d'effet de la déclaration d'inconstitutionnalité. Celle-ci intervient donc à compter de la date de la publication de la présente décision. Elle est applicable à toutes les affaires non jugées définitivement à cette date. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Le mot « représentative » figurant au dixième alinéa du paragraphe I de l'article 72 de la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique est contraire à la Constitution. Article 2. - La déclaration d'inconstitutionnalité de l'article 1er prend effet dans les conditions fixées au paragraphe 10 de cette décision. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 octobre 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 15 octobre 2020.
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LE PRÉSIDENT DU CONSEIL CONSTITUTIONNEL, Vu la Constitution du 4 octobre 1958, notamment son titre VII ; Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; Vu la lettre du vice-président du Conseil d'État en date du 8 juillet 2020 ; Vu la lettre du Premier président de la Cour des comptes en date du 1er octobre 2020 ; En application de la délibération du Conseil constitutionnel en date du 14 octobre 2020, Article 1er. - Sont nommés rapporteurs adjoints auprès du Conseil constitutionnel pour la période octobre 2020 - octobre 2021 : Madame Émilie BOKDAM-TOGNETTI, Messieurs Nicolas POLGE, Alexandre LALLET, Frédéric DIEU et Guillaume ODINET, maîtres des requêtes au Conseil d'État, ainsi que Mesdames Marie-Aimée GASPARI et Nathalie REULAND, Messieurs Grégoire HERBIN, Olivier FOMBARON et Nicolas PÉHAU, conseillers référendaires à la Cour des comptes. Article 2. - La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Fait à Paris, le 14 octobre 2020 Laurent FABIUS
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine, sous le n° 2020-805 DC, le 27 juillet 2020, par le président de l'Assemblée nationale. Il a également été saisi, le 28 juillet 2020, par MM. Patrick KANNER, Maurice ANTISTE, Mme Viviane ARTIGALAS, MM. David ASSOULINE, Claude BÉRIT-DÉBAT, Joël BIGOT, Mmes Maryvonne BLONDIN, Nicole BONNEFOY, M. Yannick BOTREL, Mme Muriel CABARET, M. Thierry CARCENAC, Mmes Catherine CONCONNE, Hélène CONWAY-MOURET, MM. Roland COURTEAU, Michel DAGBERT, Yves DAUDIGNY, Marc DAUNIS, Mme Marie-Pierre de la GONTRIE, MM. Gilbert-Luc DEVINAZ, Jérôme DURAIN, Alain DURAN, Vincent ÉBLÉ, Rémi FÉRAUD, Mme Corinne FÉRET, M. Jean-Luc FICHET, Mme Martine FILLEUL, M. Hervé GILLÉ, Mme Annie GUILLEMOT, MM. Jean-Michel HOULLEGATTE, Olivier JACQUIN, Mme Victoire JASMIN, MM. Patrice JOLY, Bernard JOMIER, Mme Gisèle JOURDA, MM. Éric KERROUCHE, Jean-Yves LECONTE, Mme Claudine LEPAGE, M. Jean-Jacques LOZACH, Mme Monique LUBIN, MM. Victorin LUREL, Didier MARIE, Rachel MAZUIR, Mmes Michelle MEUNIER, Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Angèle PRÉVILLE, M. Claude RAYNAL, Mme Sylvie ROBERT, M. Gilbert ROGER, Mmes Laurence ROSSIGNOL, Marie-Noëlle SCHOELLER, MM. Jean-Pierre SUEUR, Simon SUTOUR, Mme Sophie TAILLÉ-POLIAN, MM. Rachid TEMAL, Jean-Claude TISSOT, Mme Nelly TOCQUEVILLE, MM. Jean-Marc TODESCHINI, Jean-Louis TOURENNE, André VALLINI et Yannick VAUGRENARD, sénateurs. Il a enfin été saisi, le 29 juillet 2020, par Mme Valérie RABAULT, MM. Jean-Luc MÉLENCHON, André CHASSAIGNE, Joël AVIRAGNET, Mmes Marie-Noëlle BATTISTEL, Gisèle BIÉMOURET, MM. Jean-Louis BRICOUT, Alain DAVID, Mme Laurence DUMONT, MM. Olivier FAURE, Guillaume GAROT, David HABIB, Christian HUTIN, Régis JUANICO, Mme Marietta KARAMANLI, MM. Jérôme LAMBERT, Serge LETCHIMY, Mme Josette MANIN, M. Philippe NAILLET, Mmes George PAU-LANGEVIN, Christine PIRES BEAUNE, MM. Dominique POTIER, Joaquim PUEYO, Mme Claudia ROUAUX, M. Hervé SAULIGNAC, Mmes Sylvie TOLMONT, Cécile UNTERMAIER, Hélène VAINQUEUR-CHRISTOPHE, M. Boris VALLAUD, Mmes Michèle VICTORY, Clémentine AUTAIN, MM. Ugo BERNALICIS, Éric COQUEREL, Alexis CORBIÈRE, Mme Caroline FIAT, MM. Bastien LACHAUD, Michel LARIVE, Mmes Danièle OBONO, Mathilde PANOT, MM. Loïc PRUD'HOMME, Adrien QUATENNENS, Jean-Hugues RATENON, Mmes Muriel RESSIGUIER, Sabine RUBIN, M. François RUFFIN, Mmes Bénédicte TAURINE, Manuéla KÉCLARD-MONDÉSIR, MM. Moetai BROTHERSON, Gabriel SERVILLE, Alain BRUNEEL, Mme Marie-George BUFFET, MM. Pierre DHARRÉVILLE, Jean-Paul DUFRÈGNE, Mme Elsa FAUCILLON, MM. Sébastien JUMEL, Jean-Paul LECOQ, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC, Jean-Félix ACQUAVIVA, Michel CASTELLANI, Jean-Michel CLÉMENT, Paul-André COLOMBANI, Charles de COURSON, Mmes Frédérique DUMAS, Sandrine JOSSO, MM. François-Michel LAMBERT, Paul MOLAC, Bertrand PANCHER et Mme Sylvia PINEL, députés. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code pénal ; - le code de procédure pénale ; Au vu des observations du Gouvernement, enregistrées le 3 août 2020 ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. Le président de l'Assemblée nationale, les sénateurs et les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine. Le président de l'Assemblée nationale demande au Conseil constitutionnel de se prononcer sur la conformité à la Constitution de son article 1er. Les sénateurs et les députés requérants contestent ce même article 1er. - Sur l'article 1er : 2. L'article 1er de la loi déférée crée, aux articles 706-25-15 et suivants du code de procédure pénale, une « mesure de sûreté » applicable aux auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine. 3. Cette nouvelle mesure est applicable à trois conditions. D'une part, la personne doit avoir été condamnée pour avoir commis une infraction terroriste mentionnée aux articles 421-1 à 421-6 du code pénal, à l'exclusion des infractions relatives à la provocation au terrorisme et à l'apologie de celui-ci. D'autre part, la personne doit avoir été condamnée à une peine privative de liberté d'une durée d'au moins cinq ans ou, en cas de récidive légale, d'au moins trois ans. Enfin, elle doit présenter, à la fin de l'exécution de sa peine, une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive et par une adhésion persistante à une idéologie ou à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme. 4. Cette mesure est prise au vu d'un avis motivé de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté, chargée d'évaluer la dangerosité de la personne. Elle est ordonnée par la juridiction régionale de la rétention de sûreté de Paris ou, en ce qui concerne les mineurs, par le tribunal pour enfants de Paris. 5. La mesure de sûreté impose à la personne de respecter une ou plusieurs des obligations ou interdictions suivantes : répondre aux convocations du juge de l'application des peines ou du service pénitentiaire d'insertion et de probation ; recevoir les visites de ce service et lui communiquer les renseignements ou documents de nature à permettre le contrôle de ses moyens d'existence et de l'exécution de ses obligations ; prévenir ce service de ses changements d'emploi ou de résidence ou de tout déplacement dont la durée excéderait quinze jours et rendre compte de son retour ; obtenir l'autorisation préalable du juge de l'application des peines lorsque le changement d'emploi ou de résidence est de nature à faire obstacle à l'exécution de la mesure de sûreté ; exercer une activité professionnelle ou suivre un enseignement ou une formation professionnelle ; établir sa résidence en un lieu déterminé ; obtenir l'autorisation préalable du juge de l'application des peines pour tout déplacement à l'étranger ; ne pas se livrer à l'activité dans l'exercice ou à l'occasion de laquelle l'infraction a été commise ; se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, dans la limite de trois fois par semaine ou, en cas de placement sous surveillance électronique mobile, d'une fois par semaine ; ne pas entrer en relation avec certaines personnes ou catégories de personnes spécialement désignées ; s'abstenir de paraître en tout lieu, toute catégorie de lieux ou toute zone spécialement désignés ; ne pas détenir ou porter une arme ; respecter les conditions d'une prise en charge sanitaire, sociale, éducative ou psychologique, destinée à permettre sa réinsertion et l'acquisition des valeurs de la citoyenneté, le cas échéant au sein d'un établissement d'accueil adapté dans lequel elle est tenue de résider ; être placée, sous réserve de son consentement, sous surveillance électronique mobile. La méconnaissance de ces obligations ou interdictions est punie de trois ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende. 6. La mesure est ordonnée pour une durée maximale d'un an. Elle peut, sous certaines conditions, être renouvelée pour la même durée, dans la limite de cinq ans ou de dix ans lorsque les faits commis par le condamné constituent un crime ou un délit puni de dix ans d'emprisonnement. Lorsque le condamné est mineur, ces limites sont ramenées à, respectivement, trois ans et cinq ans. 7. Le président de l'Assemblée nationale demande au Conseil constitutionnel d'examiner la conformité de ces dispositions à l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et à l'article 66 de la Constitution. Selon les sénateurs requérants, ces mêmes dispositions entraveraient la liberté personnelle par une rigueur non nécessaire et porteraient à la liberté individuelle, à la liberté d'aller et de venir et au droit au respect de la vie privée une atteinte qui ne serait ni nécessaire, ni adaptée, ni proportionnée à l'objectif poursuivi par le législateur. Les députés requérants présentent les mêmes griefs et y ajoutent que le principe de légalité des délits et des peines serait méconnu en raison de la subjectivité de l'appréciation de la dangerosité d'une personne. Ils estiment également que le cumul de certaines des obligations prévues par la loi confère à la mesure contestée un caractère privatif de liberté justifiant l'application du principe de non-rétroactivité de la loi pénale. 8. Aux termes de l'article 9 de la Déclaration de 1789 : « Tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi ». 9. Si la mesure prévue à l'article 706-25-15 du code de procédure pénale est prononcée en considération d'une condamnation pénale et succède à l'accomplissement de la peine, elle n'est pas décidée lors de la condamnation par la juridiction de jugement mais à l'expiration de la peine, par la juridiction régionale de la rétention de sûreté. Elle repose non sur la culpabilité de la personne condamnée, mais sur sa particulière dangerosité appréciée par la juridiction régionale à la date de sa décision. Elle a pour but d'empêcher et de prévenir la récidive. Ainsi, cette mesure n'est ni une peine ni une sanction ayant le caractère d'une punition. 10. Toutefois, bien que dépourvue de caractère punitif, elle doit respecter le principe, résultant des articles 2, 4 et 9 de la Déclaration de 1789, selon lequel la liberté personnelle ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit nécessaire. Il incombe au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et, d'autre part, l'exercice des droits et libertés constitutionnellement garantis. Au nombre de ceux-ci figurent la liberté d'aller et de venir, composante de la liberté personnelle, le droit au respect de la vie privée protégé par l'article 2 de la Déclaration de 1789 et le droit de mener une vie familiale normale qui résulte du dixième alinéa du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946. Les atteintes portées à l'exercice de ces droits et libertés doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à l'objectif de prévention poursuivi. 11. Le terrorisme trouble gravement l'ordre public par l'intimidation ou la terreur. L'objectif de lutte contre le terrorisme participe de l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. 12. La mesure de sûreté prévue par l'article 706-25-15 du code de procédure pénale vise à soumettre des auteurs d'infractions terroristes, dès leur sortie de détention, à des obligations et interdictions afin de prévenir leur récidive. Par les dispositions contestées, le législateur a, comme il y était fondé, voulu lutter contre le terrorisme et prévenir la commission d'actes troublant gravement l'ordre public. Il a poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public. 13. D'une part, cette mesure s'ajoute à celles existantes visant à prévenir la récidive des infractions les plus graves, telles que le suivi socio-judiciaire, la surveillance judiciaire, la rétention de sûreté, la surveillance de sûreté et l'inscription au fichier judiciaire national automatisé des auteurs d'infractions terroristes. Elle s'ajoute également aux mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance visant à prévenir la commission d'actes de terrorisme. D'autre part, elle vise à répondre au risque particulier de récidive que présente une personne qui persiste à adhérer, à l'issue de sa peine, à une idéologie ou à des thèses incitant à la commission d'actes de terrorisme. 14. Toutefois, s'il est loisible au législateur de prévoir des mesures de sûreté fondées sur la particulière dangerosité, évaluée à partir d'éléments objectifs, de l'auteur d'un acte terroriste et visant à prévenir la récidive de telles infractions, c'est à la condition qu'aucune mesure moins attentatoire aux droits et libertés constitutionnellement garantis ne soit suffisante pour prévenir la commission de ces actes et que les conditions de mise en œuvre de ces mesures et leur durée soient adaptées et proportionnées à l'objectif poursuivi. Le respect de cette exigence s'impose a fortiori lorsque la personne a déjà exécuté sa peine. 15. En premier lieu, la mesure contestée permet d'imposer diverses obligations ou interdictions, le cas échéant de manière cumulative, qui portent atteinte à la liberté d'aller et de venir, au droit au respect de la vie privée et au droit de mener une vie familiale normale. Tel est ainsi le cas de l'obligation d'établir sa résidence dans un lieu déterminé, de l'obligation de se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie, jusqu'à trois fois par semaine, de l'interdiction de se livrer à certaines activités, de l'interdiction d'entrer en relation avec certaines personnes ou de paraître dans certains lieux, catégories de lieux ou zones et de l'obligation de respecter les conditions d'une prise en charge sanitaire, sociale, éducative ou psychologique. 16. En deuxième lieu, la durée de la mesure de sûreté en accroît la rigueur. Or, si la mesure contestée peut être ordonnée pour une période d'un an, elle peut être renouvelée et durer jusqu'à cinq ans voire, dans certains cas, dix ans. Si la personne était mineure lors de la commission des faits, ces durées sont respectivement de trois et cinq ans. Les durées maximales s'appliquent en considération de la peine encourue, quel que soit le quantum de la peine prononcée. 17. En troisième lieu, d'une part, si la mesure contestée ne peut être prononcée qu'à l'encontre d'une personne condamnée pour une infraction terroriste, elle peut être appliquée dès lors que la personne a été condamnée à une peine privative de liberté supérieure ou égale à cinq ans ou à trois ans si l'infraction a été commise en état de récidive légale. D'autre part, elle peut être prononcée y compris si cette peine a été assortie en partie d'un sursis simple. Ainsi, il résulte du premier alinéa du paragraphe I de l'article 706-25-15 et du premier alinéa de l'article 706-25-16 que la mesure de sûreté peut être prononcée dès lors que la partie ferme de la peine est au moins égale à trois mois d'emprisonnement, et ce alors même que, en prononçant un sursis simple, la juridiction de jugement n'a pas jugé utile de prévoir que la partie de la peine assortie du sursis s'exécuterait sous la forme d'une mise à l'épreuve ou d'un sursis probatoire, mesures pourtant de nature à assurer un suivi de la personne après son emprisonnement. 18. En quatrième lieu, la mesure ne peut être prononcée qu'en raison de la dangerosité de la personne caractérisée notamment par la probabilité très élevée qu'elle récidive. Toutefois, alors que la mesure de sûreté ne peut intervenir qu'à l'issue de l'exécution d'une peine d'emprisonnement, il n'est pas exigé que la personne ait pu, pendant l'exécution de cette peine, bénéficier de mesures de nature à favoriser sa réinsertion. 19. En dernier lieu, les renouvellements de la mesure de sûreté peuvent être décidés aux mêmes conditions que la décision initiale, sans qu'il soit exigé que la dangerosité de la personne soit corroborée par des éléments nouveaux ou complémentaires. 20. Il résulte de tout ce qui précède que les dispositions contestées méconnaissent les exigences constitutionnelles précitées. Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres griefs, il y a donc lieu de déclarer contraires à la Constitution l'article 1er de la loi déférée et, par voie de conséquence, ses articles 2 et 4. - Sur les autres dispositions : 21. Le Conseil constitutionnel n'a soulevé d'office aucune question de conformité à la Constitution et ne s'est donc pas prononcé sur la constitutionnalité des autres dispositions que celles examinées dans la présente décision. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Les articles 1er, 2 et 4 de la loi instaurant des mesures de sûreté à l'encontre des auteurs d'infractions terroristes à l'issue de leur peine sont contraires à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 août 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 7 août 2020.
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, le 24 juillet 2020, par le Premier ministre, sous le n° 2020-804 DC, conformément au cinquième alinéa de l'article 46 et au premier alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi organique relative à la dette sociale et à l'autonomie. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - le code de la sécurité sociale ; - l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La loi organique soumise à l'examen du Conseil constitutionnel a été prise sur le fondement du dixième-neuvième alinéa de l'article 34 de la Constitution, selon lequel « Les lois de financement de la sécurité sociale déterminent les conditions générales de son équilibre financier et, compte tenu de leurs prévisions de recettes, fixent ses objectifs de dépenses, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique », et du premier alinéa de son article 47-1, qui dispose que « Le Parlement vote les projets de loi de financement de la sécurité sociale dans les conditions prévues par une loi organique ». Elle a été adoptée dans le respect des règles de procédure prévues par les trois premiers alinéas de son article 46. - Sur l'article 1er : 2. L'article 1er de la loi organique déférée donne une nouvelle rédaction à l'article 4 bis de l'ordonnance du 24 janvier 1996 mentionnée ci-dessus. En particulier, il prévoit que tout nouveau transfert de dette à la Caisse d'amortissement de la dette sociale est accompagné d'une augmentation de ses recettes permettant de ne pas accroître la durée d'amortissement de la dette sociale au-delà du 31 décembre 2033. Il précise que, pour l'application de cette règle, les recettes correspondent soit au produit d'impositions de toute nature dont l'assiette porte sur l'ensemble des revenus perçus par les personnes physiques, soit à des prélèvements sur les fonds des organismes chargés de la mise en réserve de recettes au profit des régimes obligatoires de base de sécurité sociale. Il prévoit que la loi de financement de la sécurité sociale assure, chaque année, le respect de cette règle. 3. D'une part, il ressort des termes mêmes de ces dispositions que la loi de financement de la sécurité sociale doit prévoir l'ensemble des ressources affectées au remboursement de la dette sociale jusqu'au terme prévu pour celui-ci. Le Conseil constitutionnel sera ainsi mis à même de vérifier que ces ressources sont suffisantes pour que ce terme ne soit pas dépassé. 4. D'autre part, ces dispositions doivent être combinées avec celles du premier alinéa du 2° du C du paragraphe I de l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, qui prévoient que la loi de financement de la sécurité sociale « détermine, pour l'année à venir, de manière sincère, les conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale compte tenu notamment des conditions économiques générales et de leur évolution prévisible » et que « cet équilibre est défini au regard des données économiques, sociales et financières décrites dans le rapport prévu à l'article 50 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances ». Dès lors, les lois de financement de la sécurité sociale ne sauraient conduire à un transfert, au profit de la Caisse d'amortissement de la dette sociale, de recettes affectées aux régimes de sécurité sociale et aux organismes concourant à leur financement, sans compensation de nature à éviter une dégradation des conditions générales de l'équilibre financier de la sécurité sociale de l'année à venir. 5. Sous la réserve énoncée au paragraphe précédent, l'article 1er de la loi organique est conforme à la Constitution. - Sur l'article 2 : 6. Le 1° de l'article 2 modifie l'article L.O. 111-3 du code de la sécurité sociale, qui définit le contenu de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année. D'une part, il fixe à trois, au lieu de cinq, le nombre minimal de sous-objectifs de l'objectif national de dépenses d'assurance-maladie fixé par la loi de financement de la sécurité sociale. D'autre part, il élargit aux mesures ayant un effet sur la dette des régimes obligatoires de base de sécurité sociale les dispositions susceptibles de figurer, sous certaines conditions, dans une loi de financement de la sécurité sociale. 7. Le 2° de l'article 2 modifie l'article L.O. 111-4 du même code, afin d'ajouter, dans les annexes jointes au projet de loi de financement de la sécurité sociale de l'année, des informations sur les dépenses relatives au soutien à l'autonomie des personnes âgées et des personnes en situation de handicap. 8. L'article 2 est conforme à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - Sous la réserve énoncée au paragraphe 4, l'article 1er de la loi organique relative à la dette sociale et à l'autonomie est conforme à la Constitution. Article 2. - Les autres dispositions de la même loi organique sont conformes à la Constitution. Article 3. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 août 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 7 août 2020
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LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, le 28 juillet 2020, par le Premier ministre, sous le n° 2020-806 DC, conformément au cinquième alinéa de l'article 46 et au premier alinéa de l'article 61 de la Constitution, de la loi organique prorogeant le mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental. Au vu des textes suivants : - la Constitution ; - l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; - l'ordonnance n° 58-1360 du 29 décembre 1958 portant loi organique relative au Conseil économique et social ; Et après avoir entendu le rapporteur ; LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT : 1. La loi organique soumise à l'examen du Conseil constitutionnel a été prise sur le fondement de l'article 71 de la Constitution. Elle a été adoptée dans le respect des règles de procédure prévues par les trois premiers alinéas de son article 46. 2. L'article 1er de cette loi organique proroge la durée du mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental jusqu'à l'entrée en vigueur de la loi organique résultant de l'adoption du projet de loi organique relatif au Conseil économique, social et environnemental délibéré en conseil des ministres le 7 juillet 2020 et, au plus tard, jusqu'au 1er juin 2021. Cette prorogation du mandat de cinq ans prévu à l'article 9 de l'ordonnance du 29 décembre 1958 mentionnée ci-dessus et qui devait atteindre son terme le 14 novembre 2020 est d'une courte durée et revêt un caractère exceptionnel et transitoire. L'article 1er est conforme à la Constitution. 3. L'article 2 modifie l'intitulé de l'ordonnance du 29 décembre 1958. Il est conforme à la Constitution. LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE : Article 1er. - La loi organique prorogeant le mandat des membres du Conseil économique, social et environnemental est conforme à la Constitution. Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française. Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 7 août 2020, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT. Rendu public le 7 août 2020.