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INCA/JURITEXT000046990269.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° J 22-81.056 F-D N° 00044 GM 11 JANVIER 2023 IRRECEVABILITE REJET CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 MM. [K] [O] et [N] [E] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-2, en date du 16 septembre 2021, qui, pour infractions à la législation sur les stupéfiants, les a condamnés, chacun, à six ans d'emprisonnement et a prononcé une mesure de confiscation. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de Mme Leprieur, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocats de M. [K] [O], les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocats de M. [N] [E], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Leprieur, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par ordonnance du 15 février 2019 de non-lieu partiel et de renvoi devant le tribunal correctionnel, le juge d'instruction a notamment ordonné le renvoi de MM. [K] [O] et [N] [E] des chefs d'association de malfaiteurs, infractions à la législation sur les stupéfiants et non-justification de ressources. 3. Par jugement du 5 juin 2019, le tribunal correctionnel, statuant contradictoirement à l'égard de M. [E] et par défaut à l'égard de M. [O], après avoir prononcé des relaxes partielles, a condamné, des chefs précités, le premier, à cinq ans d'emprisonnement et, le second, à six ans d'emprisonnement. Le tribunal a, en outre, décerné mandat d'arrêt à l'encontre de M. [O] et ordonné la confiscation de l'ensemble des scellés. 4. M. [O] a formé opposition, le 5 novembre 2020, suite à la notification du mandat d'arrêt. 5. Par jugement du 21 décembre 2020, le tribunal correctionnel, statuant sur son opposition, après avoir prononcé des relaxes partielles, l'a condamné, des mêmes chefs, à cinq ans d'emprisonnement. 6. Les prévenus ont relevé appel de ces décisions. Examen de la recevabilité du pourvoi formé par M. [O] 7. Le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'en avait fait son avocat, le 17 septembre 2021, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, était irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision, le 21 septembre 2021, par déclaration au greffe de l'établissement pénitentiaire. 8. Seul est recevable le pourvoi formé le 17 septembre 2021. Examen des moyens Sur le premier moyen et le second moyen, pris en sa première branche, proposés pour M. [E], ainsi que sur le premier moyen proposé pour M. [O] 9. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le second moyen proposé pour M. [O] Enoncé du moyen 10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable le moyen tiré de l'absence de motivation de l'ordonnance de renvoi de M. [O] devant le tribunal correctionnel, l'a déclaré coupable de transport et offre ou cession de produits stupéfiants et l'a condamné à une peine de six ans d'emprisonnement avec maintien en détention, alors « que le prévenu en fuite est recevable à contester, devant le tribunal correctionnel, la régularité de l'ordonnance le renvoyant devant cette juridiction ; qu'en affirmant, pour juger M. [O] irrecevable à soulever la nullité de l'ordonnance de renvoi, que l'ordonnance de renvoi avait, en application de l'article 179 du code de procédure pénale, purgé à son égard les nullités, quand cette purge ne couvrait pas l'ordonnance de renvoi elle-même, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 131, 134, 175, 179, 184, 385, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 11. Les juges relèvent que M. [O], qui connaissait l'existence des poursuites pénales engagées dans une affaire où il était mis en cause et qui avait quitté son domicile pour se dérober à l'enquête, ainsi que cela ressort de ses déclarations à l'audience de la cour d'appel, se trouvait en fuite, à la date à laquelle l'ordonnance de renvoi a été rendue. 12. Ils en déduisent qu'en raison de sa fuite, il ne pouvait bénéficier des dispositions de l'article 385 du code de procédure pénale, et contester la régularité de l'ordonnance de renvoi. 13. En prononçant ainsi, dès lors que le défaut d'information, qui avait empêché le demandeur de contester utilement la régularité de la procédure, procédait d'une manoeuvre de sa part, la cour d'appel a justifié sa décision. 14. Le moyen ne peut, dès lors, être admis. Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche, proposé pour M. [E] Enoncé du moyen 15. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [E] à la peine de six ans d'emprisonnement et à la peine complémentaire de confiscation des scellés, alors « que si l'article 222-49 alinéa 2 du code pénal permet de prononcer la confiscation de tout ou partie des biens du condamné, quelle qu'en soit la nature notamment dans le cas prévu par l'article 222-37 du code pénal relatif à la répression du trafic de stupéfiants, encore faut-il que les juges s'expliquent sur la nature des biens confisqués et sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée aux droits de propriété de l'intéressé par la mesure de confiscation de tout ou partie de son patrimoine ; qu'en l'absence de toute motivation de la peine complémentaire de confiscation des scellés, que la cour d'appel a confirmée, elle n'a pas justifié légalement sa décision au regard des articles 222-49 du code pénal, 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, et 593 du code de procédure pénale qu'elle a violés. » Réponse de la Cour Vu les articles 1er du Protocole n° 1 additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, 131-21, alinéa 6, et 132-1 du code pénal, 485, 512 et 593 du code de procédure pénale : 16. En matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle. 17. Le juge qui prononce une mesure de confiscation de tout ou partie du patrimoine est tenu d'apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété au regard de la gravité des faits et de la personnalité de leur auteur. 18. Pour confirmer la peine complémentaire de confiscation des scellés prononcée à l'encontre de M. [E], l'arrêt attaqué énonce que cette peine est prononcée au titre de la confiscation générale du patrimoine prévue par l'article 222-49, alinéa 2, du code pénal. 19. En prononçant ainsi, sans motiver la confiscation de patrimoine au regard de la personnalité du prévenu et de sa situation personnelle, ni apprécier la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée à son droit de propriété, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 20. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Portée et conséquences de la cassation 21. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la confiscation prononcée à l'encontre de M. [E]. Les autres dispositions seront donc maintenues. PAR CES MOTIFS, la Cour : Sur le pourvoi formé par M. [O] le 21 septembre 2021 : Le DECLARE IRRECEVABLE ; Sur le pourvoi formé par M. [O] le 17 septembre 2021 : Le REJETTE ; Sur le pourvoi formé par M. [E] : CASSE ET ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 16 septembre 2021, mais en ses seules dispositions ayant, en ce qui concerne M. [E], confirmé la peine complémentaire de confiscation, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° P 22-81.750 F-D N° 00043 GM 11 JANVIER 2023 DECHEANCE - REJET CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 M. [C] [S] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en Provence, en date du 15 janvier 2018, n° 2017/01816, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de meurtre en bande organisée, association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime, infractions à la législation sur les armes, recel aggravé et usage de fausse plaque d'immatriculation, a prononcé sur sa demande en annulation de pièces de la procédure. M. [G] [O] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la même chambre de l'instruction, en date du 15 janvier 2018, n° 2017/01810, qui, dans l'information suivie contre lui des mêmes chefs, a prononcé sur sa demande en annulation de pièces de la procédure. MM. [C] [S], [G] [O], [L] [I], [F] [P] et [Z] [X] [H] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-4, en date du 26 janvier 2022, qui, pour association de malfaiteurs en récidive, a condamné le premier, à onze ans d'emprisonnement, 15 000 euros d'amende, le deuxième, à quatorze ans d'emprisonnement, 20 000 euros d'amende, le troisième, à neuf ans d'emprisonnement, le quatrième, à quatorze ans d'emprisonnement, le dernier, à douze ans d'emprisonnement, 8 000 euros d'amende, a condamné l'ensemble des prévenus à cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation, cinq ans d'interdiction de séjour et a ordonné une mesure de confiscation. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires ont été produits. Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocats de M. [C] [S], les observations de la SCP Spinosi, avocats de M. [G] [O] et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 26 août 2016, [D] [J] a été tué à [Localité 2], par deux personnes qui circulaient sur un véhicule deux-roues. 3. L'exploitation des enregistrements de vidéosurveillance a révélé que les auteurs étaient accompagnés par un véhicule automobile, propriété de M. [C] [S] ; des renseignements relatifs au fait que la victime, notamment, avait profité de l'incarcération de M. [G] [O] et de son frère pour s'emparer d'un point de vente de stupéfiants sont parvenus aux enquêteurs. 4. M. [S], M. [O], M. [L] [I], M. [F] [P] M. [Z] [X] [H] et d'autres personnes impliquées ont été mis en examen. 5. M. [S] a présenté une requête en nullité de pièces de procédure qui a été rejetée par la chambre de l'instruction, par arrêt du 15 janvier 2018, n° 2017/01816, Il a formé, contre cette décision, un pourvoi en cassation, enregistré sous le numéro 18-80.754, dont l'examen immédiat a été refusé par une ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 20 avril 2018. 6. M. [O] a présenté une requête en nullité qui a été rejetée par la chambre de l'instruction, par arrêt du 15 janvier 2018, n° 2017/01810. Il a formé, contre cette décision, un pourvoi en cassation, enregistré sous le numéro 18-80.658, dont l'examen immédiat a été refusé par une ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 20 avril 2018. 7. Par arrêt du 14 novembre 2019, la chambre de l'instruction a ordonné la mise en accusation et le renvoi devant la cour d'assises de M. [S] pour assassinat, la disjonction des poursuites et le renvoi des personnes mises en examen devant le tribunal correctionnel à l'égard de tous les délits pour lesquels le juge d'instruction avait ordonné le renvoi. 8. Par jugement du 18 mars 2021, le tribunal correctionnel, après relaxe partielle, a condamné M. [S] pour dépôt d'armes et recel, l'a condamné pour association de malfaiteurs en récidive à onze ans d'emprisonnement, cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation et 15 000 euros d'amende. 9. Après relaxe partielle, il a condamné M. [O] pour dépôt d'armes et recel, l'a condamné pour association de malfaiteurs en récidive à quatorze ans d'emprisonnement et cinq ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation ; il a délivré mandat d'arrêt. 10. Il a statué à l'égard de MM. [I], [P] et [X] [H]. 11. Une peine complémentaire de confiscation a été prononcée. 12. MM. [S], [O], [I], [P] et [X] [H] ont relevé appel et le ministère public a formé appel incident. Déchéance des pourvois formés par M. [L] [I], M. [F] [P] et M. [Z] [X] [H] 13. MM. [I], [P] et [X] [H] n'ont pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par un avocat, un mémoire exposant leurs moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de les déclarer déchus de leur pourvoi par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale. Examen des moyens Sur le premier moyen proposé pour M. [S], et le troisième moyen proposé pour M. [O] 14. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen proposé pour M. [O] Enoncé du moyen 15. Le moyen critique l'arrêt de la chambre de l'instruction en ce qu'il a rejeté la requête en annulation de M. [O] en déclarant irrecevables l'ensemble des demandes qu'elle comportait, alors « que, tout individu qui présente un intérêt à obtenir l'annulation d'un acte dispose à ce titre d'un intérêt à agir ; que l'appréciation de sa qualité pour agir suppose, quant à elle, l'examen par la juridiction saisie de la finalité des dispositions dont la violation est alléguée, indispensable à l'appréciation de l'existence d'une atteinte éventuelle à un droit ou intérêt propre au requérant ; qu'en se bornant, pour déclarer irrecevable le moyen de nullité tiré de l'irrégularité de la mise en place d'un dispositif de géolocalisation le 28 août 2016 sur le véhicule Peugeot immatriculé [Immatriculation 1], à invoquer l'absence de droit de M. [O] sur le véhicule litigieux et sur l'immeuble dans lequel il a été nécessaire de s'introduire, sans jamais examiner la finalité des dispositions dont il alléguait la violation, pour apprécier en considération sa qualité pour agir, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision au regard des articles 6 et 8 de la Convention européenne, 171, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale.» Réponse de la Cour 16. Pour déclarer irrecevable la demande d'annulation de pièces présentée par M. [O], l'arrêt attaqué énonce que s'il ressort de la procédure que M. [S] a son domicile dans un logement situé dans la résidence où se sont introduits les enquêteurs, aucun élément du dossier ne permet de supposer que le requérant, M. [O], pourrait se prévaloir d'un quelconque droit sur tout ou partie de cet immeuble d'habitation ou de ses dépendances, droit que d'ailleurs il ne revendique pas. 17. Les juges ajoutent que le dispositif de géolocalisation a été installé sur le véhicule appartenant à M. [S], et qu'aucun élément du dossier ne permet non plus de supposer que M. [O] pourrait se prévaloir sur ce véhicule d'un quelconque droit qu'au demeurant il ne revendique pas. 18. Il en concluent que M. [O] n'a pas qualité pour se prévaloir de droits qui appartiennent en propre à d'autres personnes, qu'il ne peut donc invoquer une irrégularité dont il estime qu'elle aurait affecté les opérations effectuées par les officiers de police judiciaire, et que sa requête ne peut par conséquent qu'être déclarée irrecevable. 19. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a justifié sa décision. 20. En effet, pour déterminer la qualité du demandeur à agir en nullité, la chambre de l'instruction a recherché si la formalité substantielle ou prescrite à peine de nullité, dont la méconnaissance était alléguée, avait pour objet de préserver un droit ou un intérêt qui lui est propre. 21. Tel n'est pas le cas du requérant qui n'est ni propriétaire ni occupant du lieu à l'égard duquel il est prétendu que la pose d'un matériel de géolocalisation nécessitait l'autorisation prévue par l'article 230-34 du code de procédure pénale, autorisation qui a pour seul objet de préserver, à l'occasion d'une telle opération, l'intimité de la vie privée dudit propriétaire ou occupant. 22. Dès lors, le moyen doit être écarté. Sur le deuxième moyen proposé pour M. [O] Enoncé du moyen 23. Le moyen critique l'arrêt de la cour d'appel en ce qu'il a déclaré M. [O] coupable de participation à une association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un ou plusieurs crimes alors « que l'exploitation des données de géolocalisation du véhicule Peugeot 407 immatriculé [Immatriculation 1] présentant un caractère incontestablement déterminant de la déclaration de culpabilité retenue à l'encontre de M. [O], la cassation qui interviendra à l'encontre de l'arrêt rendu le 15 janvier 2018 par la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en ce qu'elle a déclaré les demandes du requérant irrecevables, entraînera nécessairement par voie de conséquence celle de l'arrêt rendu le 26 janvier 2022 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence. » Réponse de la Cour 24. Le demandeur ne peut prétendre utilement que l'arrêt de condamnation prononcé contre lui encourt la cassation, par voie de conséquence de la cassation de l'arrêt de la chambre de l'instruction, le moyen qu'il a présenté contre cette dernière décision étant écarté. 25. Le moyen est donc inopérant. Mais sur le deuxième moyen proposé pour M. [S] Enoncé du moyen 26. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté le moyen de nullité de la mesure de géolocalisation du véhicule Peugeot 407 immatriculé [Immatriculation 1], alors « que les emplacements de stationnement d'un immeuble collectif d'habitation constituent des lieux privés destinés à l'entrepôt de véhicules au sens de l'article 230-34 du code de procédure pénale ; qu'en retenant, pour dire que les enquêteurs avaient pu régulièrement s'introduire, sans l'autorisation écrite du procureur de la République, dans la résidence au sein de laquelle M. [S] demeure afin de mettre en place la balise permettant la géolocalisation de son véhicule, qui y était stationné, qu'il n'était pas établi que les enquêteurs se seraient introduits dans un lieu privé destiné ou utilisé à l'entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel au sens de l'alinéa 1er de l'article 230-34 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 230-34 du code de procédure pénale, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 230-34 du code de procédure pénale : 27. Selon ce texte, la pose ou le retrait d'un matériel destiné à la localisation en temps réel fait l'objet d'une décision écrite du juge d'instruction ou du procureur de la République lorsqu'elle implique l'introduction dans un lieu privé destiné ou utilisé à l'entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel, ou dans un véhicule situé sur la voie publique ou dans de tels lieux. 28. Doit être considéré comme un lieu privé au sens de ce texte tout lieu clos dont l'accès dépend du consentement de celui qui l'occupe, et n'est dès lors pas ouvert au public. 29. En effet, il résulte des travaux parlementaires préparatoires à l'adoption de la loi n° 2014-372 du 28 mars 2014 que le législateur a voulu soumettre l'intrusion dans tout véhicule ou tout lieu privé à l'autorisation d'un magistrat. En instituant une gradation entre lieux privés selon leur usage, il n'en a pas exclu certains du champ d'application du texte précité, dont l'objet est la protection de la vie privée. 30. Pour rejeter la demande d'annulation présentée par M. [S], la chambre de l'instruction énonce qu'il ne ressort pas des éléments qui lui sont soumis que, pour mettre en place le dispositif de géolocalisation sur le véhicule en cause, les enquêteurs se seraient introduits dans un lieu privé destiné ou utilisé à l'entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel. 31. En prononçant ainsi, alors qu'il résulte des pièces de la procédure que les enquêteurs ont procédé, sans autorisation écrite, à la pose de la balise de géolocalisation dans l'enceinte d'un ensemble immobilier en copropriété, dont l'accès était fermé par une barrière et interdit au public, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé. 32. La cassation est, dès lors, encourue. Portée et conséquences de la cassation 33. La cassation de l'arrêt de la chambre de l'instruction du 15 janvier 2018, limitée aux dispositions de l'arrêt concernant M. [S], sera étendue, par voie de conséquence, aux dispositions de l'arrêt de condamnation prononcé à son encontre. 34. M. [S] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel par arrêt de la chambre de l'instruction devenu définitif. La juridiction d'instruction est dessaisie. Il y a lieu, en conséquence, de renvoyer la cause devant la chambre des appels correctionnels de la cour d'appel d'Aix-en-Provence pour qu'il soit statué par celle-ci tant sur le moyen de nullité qui avait été proposé devant la chambre de l'instruction que sur le fond. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens de cassation proposés pour M. [S], la Cour : Sur les pourvois formés par M. [I], M. [P] et M. [X] [H] : CONSTATE la déchéance des pourvois ; Sur le pourvoi formé par M. [O] : LE REJETTE ; Sur le pourvoi formé par M. [S] : CASSE et ANNULE les arrêts susvisés de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 15 janvier 2018, n°2017/1816 et de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 26 janvier 2022, en leurs seules dispositions relatives à M. [S], toutes autres dispositions demeurant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, pour qu'il soit statué par celle-ci, à l'égard de ce seul prévenu, tant sur le moyen de nullité qui avait été proposé devant la chambre de l'instruction que sur le fond ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, et sa mention en marge ou à la suite des arrêts partiellement annulés ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° G 21-86.778 F-D N° 00038 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 Le procureur général près la cour d'appel de Paris a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, 2e section, en date du 19 octobre 2021, qui, dans la procédure suivie contre la société [1] du chef de travail dissimulé, a confirmé l'ordonnance de rejet d'une demande de maintien de saisie pénale rendue par le juge des libertés et de la détention. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société [1], et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Dans le cadre d'une enquête préliminaire ouverte à l'encontre de la société [1] pour des faits de travail dissimulé, les enquêteurs ont procédé, le 20 janvier 2020, sur autorisation du ministère public, à la saisie de deux comptes ouverts à son nom dans les livres de la banque [2], pour un montant total de 1 166 046,59 euros. 3. Par requête du 27 janvier 2020, le procureur de la République a saisi le juge des libertés et de la détention afin de solliciter l'autorisation de maintenir cette saisie. 4. Par ordonnance du 30 janvier suivant, le juge des libertés et de la détention a rejeté cette demande. 5. Le ministère public a interjeté appel de cette décision. Examen de la recevabilité du pourvoi formé par le procureur général contestée en défense 6. Le pourvoi formé contre l'arrêt de la chambre de l'instruction statuant sur le maintien de la saisie pénale ordonnée dans le cadre de l'enquête préliminaire est immédiatement recevable dès lors que, dans ce cadre, la société [1] est considérée comme un tiers, le fait que le procureur général soit le demandeur au pourvoi étant sans incidence. 7. En conséquence, le pourvoi formé par le procureur général à l'encontre de l'arrêt de la chambre de l'instruction statuant sur l'appel d'une ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant refusé le maintien d'une saisie effectuée sur le fondement de l'article 706-154 du code de procédure pénale est recevable. Examen du moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen est pris de la violation ou de la fausse application des dispositions des articles 706-154 et 591 du code de procédure pénale en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance rendue le 30 janvier 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris, rejetant la requête du procureur de la République aux fins de maintien de la saisie pénale d'un compte bancaire ouvert au nom de la société [1] dans les livres de la banque [2], alors qu'en retenant l'absence de l'enquête préliminaire à la procédure d'appel de l'ordonnance de saisie pénale, la chambre de l'instruction ajoute à la loi, en l'espèce les dispositions de l'article 706-154 du code de procédure pénale. Réponse de la Cour Vu les articles 706-154 et 593 du code de procédure pénale : 9. Il résulte du premier de ces textes qu'il appartient à la chambre de l'instruction, saisie d'un recours formé contre une ordonnance ayant rejeté le maintien de la saisie d'un compte bancaire, en vertu de l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur la légalité et le bien-fondé de cette mesure, au besoin en substituant aux motifs insuffisants, voire erronés, du premier juge des motifs répondant aux exigences légales. Pour ce faire, elle est tenue, lorsqu'elle constate qu'elle n'est pas en mesure de se prononcer en l'état des pièces dont elle dispose, de préciser, avant dire droit, les pièces qui lui paraissent nécessaires pour en demander la production par le ministère public, qui ne peut opposer un refus. A défaut de cette production, la chambre de l'instruction statue au vu des seuls éléments dont elle dispose. 10. Tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 11. Pour confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant la demande de maintien de la saisie pénale formulée par le ministère public, l'arrêt attaqué, après avoir rappelé les termes de l'article 706-154 du code de procédure pénale, énonce que ne figurent pas à la procédure l'enquête préliminaire visée par le juge des libertés et de la détention ni le procès-verbal de synthèse supposé établi le 23 janvier 2020 également visé par le juge des libertés et de la détention. 12. Les juges ajoutent qu'il leur appartient de s'assurer du versement au dossier produit devant eux des pièces fondant la décision contestée et de vérifier, à partir des pièces produites, l'existence d'indices graves ou concordants de la commission d'une infraction et sa possible imputation à une personne dans des conditions permettant de motiver une saisie pénale. 13. Ils relèvent que le délit de travail dissimulé nécessite de caractériser les éléments d'une relation de travail, en particulier l'existence d'un lien de subordination, et qu'une telle analyse nécessite incontestablement de pouvoir apprécier les éléments factuels rapportés par l'administration. 14. Ils concluent qu'en l'absence des pièces précitées, la chambre de l'instruction n'est pas en mesure de remettre en cause le bien fondé de la décision déférée qui doit dès lors être confirmée. 15. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 16. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 19 octobre 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° V 22-80.307 F-D N° 00047 GM 11 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 M. [H] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Agen, chambre correctionnelle, en date du 9 décembre 2021, qui, pour violences aggravées et dégradations, l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement avec sursis probatoire et a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [H] [F], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par jugement du 15 octobre 2020, le tribunal correctionnel a déclaré M. [H] [F] coupable de violences aggravées sur la personne de son épouse, Mme [W] [Z], et de destruction à son préjudice, et l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis. Il l'a également condamné à payer à Mme [Z], partie civile, la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral. 3. M. [F] et le ministère public ont relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche 4. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré M. [F] coupable de violences volontaires, alors « qu' en se fondant, pour retenir la culpabilité de M. [F] des faits de violences commises sur Mme [Z], sur le certificat médical établi par le docteur [M], sans répondre au moyen de M. [F] tiré de ce le docteur [M] et Mme [Z] travaillaient quotidiennement ensemble et étaient amis, ce qui était de nature à jeter un doute sur l'impartialité du docteur [M], la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 222-13 du code pénal et a méconnu l'article 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 6. Selon ce texte, tout jugement ou arrêt doit être motivé et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. 7. En déclarant le prévenu coupable, sans répondre aux conclusions dans lesquelles il a mis en cause l'impartialité du médecin ayant établi le certificat médical de la victime, expliquant qu'il exerce dans le même service hospitalier que celui où elle est infirmière-anesthésiste et que tous deux entretiennent des relations étroites et quotidiennes, la cour d'appel a méconnu la règle susvisée. 8. La cassation est, dès lors, encourue de ce chef. Et sur le second moyen Enoncé du moyen 9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a alloué la somme de 1 000 € à Mme [Z] en réparation de son préjudice moral, alors « que lorsqu'elle est saisie des seuls appels des prévenus et du ministère public, la cour d'appel ne peut augmenter, au profit des parties civiles, le montant des dommages et intérêts alloués en réparation du préjudice qu'elles ont subi, sauf pour réparer un préjudice souffert depuis la décision de première instance ; qu'en augmentant pour le porter à la somme de 1 000 € le montant des dommages et intérêts dus par M. [F] en réparation du préjudice moral subi par Mme [Z], quand Mme [Z] n'avait pas relevé appel du jugement en sollicitant une augmentation de la somme de 500 € fixée par le tribunal correctionnel en réparation de son préjudice moral ni sollicité le versement d'une somme complémentaire au titre de l'aggravation de son préjudice, la cour d'appel a violé l'article 515 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 515 du code de procédure pénale : 10. La cour d'appel ne peut, sur le seul appel du prévenu, aggraver son sort. 11. Il résulte de l'arrêt attaqué que, alors que le prévenu était seul appelant des dispositions civiles du jugement, la cour d'appel l'a condamné à verser, à la partie civile, une somme supérieure à celle qui avait été accordée par la juridiction du premier degré. 12. En prononçant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé. 13. La cassation est, par conséquent, également encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Agen, en date du 9 décembre 2021, et, pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Toulouse, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Agen, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° D 21-87.303 F-D N° 00046 GM 11 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 M. [P] [M] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-9, en date du 7 mai 2021, qui, pour dégradations et violences aggravées, l'a condamné à quatre mois d'emprisonnement et à deux ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la société Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [P] [M], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par jugement du 17 octobre 2018, M. [P] [M] a été déclaré coupable de dégradations et de violences aggravées, et condamné à quatre mois d'emprisonnement et deux ans d'interdiction de détenir ou porter une arme soumise à autorisation. 3. Il a relevé appel de cette décision, ainsi que le ministère public. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé sur l'action publique par arrêt contradictoire à signifier, alors : « 1°/ que lorsqu'en l'absence de l'appelant, prévenu libre, à l'adresse personnelle qu'il a déclarée dans l'acte d'appel, l'huissier dépose la citation à comparaître à son étude et en envoie une copie par lettre simple, accompagnée d'un récépissé que le destinataire est invité à réexpédier par voie postale ou à déposer à l'étude de l'huissier, la juridiction n'est pas valablement saisie en l'absence de retour dudit récépissé et de comparution à l'audience de la partie citée ; qu'en retenant que M. [M], qui n'a pas comparu, avait été régulièrement cité le 24 février 2021 par remise à étude du double de l'envoi d'une lettre simple à son domicile, sans constater qu'il avait été fait retour du récépissé censé avoir été adressé par lettre simple à M. [M] en même temps que la copie de la citation, la cour d'appel a violé les articles 503-1, 555 et 558 du code de procédure pénale ; 2°/ que la citation à comparaître n'est régulière que s'il résulte de l'acte de signification lui-même que les formalités prévues par l'article 558 du code de procédure pénale ont été respectées ; qu'en retenant que M. [M], qui n'a pas comparu, avait été régulièrement cité le 24 février 2021 par remise à étude du double de l'envoi d'une lettre simple à son domicile, quand le « procès-verbal de signification – remise à l'étude » de la citation à prévenu devant la cour d'appel faite à M. [M] par l'huissier le 24 février 2021, qui énonce qu'« après avoir vérifié la certitude du domicile du destinataire caractérisé par les éléments suivants : / La signification à personne, ou à domicile étant impossible, la copie du présent destinée à / [M] [P] / [Adresse 1] / est remise en l'étude sous enveloppe fermée, ne portant d'autre indication que, d'un côté les nom et adresse du destinataire, et de l'autre le cachet de l'huissier de justice apposé sur la fermeture du pli / Le domicile est confirmé par le préposé poste / Le destinataire de l'acte a été avisé de cette remise par lettre simple, conformément aux dispositions de l'article 558 du code de procédure pénale », ne mentionne pas l'envoi d'une copie de la citation, de sorte qu'il n'en résulte pas le respect des formalités prévues par l'article 558 du code de procédure pénale, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble les articles 503-1 et 555 du même code ; 3°/ que la citation à comparaître n'est régulière que s'il résulte de l'acte de signification lui-même que les formalités prévues par l'article 558 du code de procédure pénale ont été respectées ; qu'en retenant que M. [M], qui n'a pas comparu, avait été régulièrement cité le 24 février 2021 par remise à étude du double de l'envoi d'une lettre simple à son domicile, quand le procès-verbal de signification – remise à l'étude de la citation à prévenu devant la cour d'appel faite à M. [M] par l'huissier le 24 février 2021, qui énonce qu'« après avoir vérifié la certitude du domicile du destinataire caractérisé par les éléments suivants : / La signification à personne, ou à domicile étant impossible, la copie du présent destinée à / [M] [P] / [Adresse 1] / est remise en l'étude sous enveloppe fermée, ne portant d'autre indication que, d'un côté les nom et adresse du destinataire, et de l'autre le cachet de l'huissier de justice apposé sur la fermeture du pli / Le domicile est confirmé par le préposé poste / Le destinataire de l'acte a été avisé de cette remise par lettre simple, conformément aux dispositions de l'article 558 du code de procédure pénale », ne mentionne pas l'envoi du récépissé que le destinataire est invité à réexpédier, de sorte qu'il n'en résulte pas le respect des formalités prévues par l'article 558 du code de procédure pénale, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble les articles 503-1 et 555 du même code. » Réponse de la Cour 5. Pour statuer par arrêt contradictoire à signifier à l'égard du prévenu, absent à l'audience, la cour d'appel énonce qu'il a été régulièrement cité par un acte d'huissier de justice, déposé en l'étude de cet officier ministériel, et que l'avis de signification prévu par l'article 558 du code de procédure pénale a été adressé au demandeur par lettre simple, accompagné d'un récépissé, ces formalités ayant été accomplies dans les délais prévus par la loi. 6. En prononçant ainsi, par des motifs qui établissent que l'huissier de justice a accompli les formalités exigées par l'article 558 du code de procédure pénale, la cour d'appel n'a pas encouru les griefs allégués. 7. Dès lors, le moyen doit être écarté. Mais sur le second moyen Énoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [M] à un emprisonnement délictuel de quatre mois, alors : « 1°/ que le juge qui prononce, à partir du 24 mars 2020, en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement ferme doit, quels que soient le quantum et la décision prise quant à son éventuel aménagement, motiver ce choix en faisant apparaître qu'il a tenu compte des faits de l'espèce, de la personnalité de leur auteur, ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale, et il lui appartient d'établir, au regard de ces éléments, que la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine indispensable et que toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en se bornant à retenir qu'il y avait lieu de confirmer la décision entreprise « sur la peine justement appréciée par le premier juge, compte tenu de la nature des faits, de leur gravité mais également de la personnalité du prévenu qui a déjà été condamné » et, par motifs ainsi adoptés du jugement, que « le caractère ferme de la peine d'emprisonnement est justifié par les circonstances dans lesquelles les faits ont été commis, les antécédents judiciaires de l'intéressé et son absence à l'audience qui rendent toute autre peine manifestement inadéquate », la cour d'appel, qui n'a pas pris en considération la situation matérielle, familiale et sociale de M. [M] afin d'établir que toute autre sanction que la peine de prison ferme prononcée était manifestement inadéquate, a violé les articles 112-2, 2° et 132-19 du code pénal, ce dernier dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 ; 2°/ que la juridiction qui prononce une peine inférieure ou égale à six mois d'emprisonnement ferme doit ordonner, sauf impossibilité résultant de la personnalité ou de la situation du condamné, l'aménagement de la totalité de la peine ; qu'en condamnant M. [M] à une peine d'emprisonnement ferme de quatre mois sans caractériser l'impossibilité de son aménagement résultant de la personnalité ou de la situation du condamné, la cour d'appel a violé les articles 112-2, 3°, 132-19 et 132-25 du code pénal, ces deux derniers dans leur rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, et 464-2 du code de procédure pénale ; 3°/ que la mise à exécution d'une courte peine d'emprisonnement qui résulte nécessairement du refus d'aménager ne peut être fondée sur la circonstance que la juridiction ne dispose pas d'éléments suffisants pour se prononcer, de sorte que si le prévenu est non comparant, la juridiction de jugement ne peut refuser d'aménager la peine en se fondant sur sa seule absence et il lui appartient alors de rechercher, au vu des pièces de la procédure, si le principe d'un aménagement peut être ordonné ; qu'en prononçant à l'encontre de M. [M] une peine d'emprisonnement ferme de quatre mois sans l'aménager, motif pris que son absence à l'audience rend toute autre peine manifestement inadéquate, la cour d'appel a violé les articles 112-2, 3°, 132-19 et 132-25 du code pénal, ces deux derniers dans leur rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, et 464-2 du code de procédure pénale. ». Réponse de la Cour Vu les articles 132-19 et 132-25 du code pénal, 464-2 du code de procédure pénale : 9. Il résulte de ces textes que si la peine d'emprisonnement ferme est inférieure ou égale à six mois au sens de l'article D. 48-1-1 du code de procédure pénale, son aménagement est obligatoire et ce n'est qu'en cas d'impossibilité résultant de la personnalité ou de la situation du condamné que le juge peut l'écarter. Dans ce cas, le juge doit motiver spécialement sa décision, de façon précise et circonstanciée, au regard des faits de l'espèce, de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale du condamné. 10. Pour confirmer le jugement ayant condamné M. [M] à la peine de quatre mois d'emprisonnement, l'arrêt attaqué énonce que le premier juge, lequel a estimé que le caractère ferme de la peine d'emprisonnement était justifié par les circonstances dans lesquelles les faits ont été commis, les antécédents judiciaires de l'intéressé et son absence à l'audience, qui rendent toute autre peine manifestement inadéquate, et qu'en l'absence du prévenu lors de l'audience et au vu des éléments du dossier, il ne disposait pas d'éléments suffisants sur la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de l'intéressé pour aménager la peine d'emprisonnement ferme prononcée, a justement apprécié la peine adéquate compte-tenu de la nature des faits, de leur gravité mais également de la personnalité du prévenu. 11. En prononçant ainsi, alors que l'aménagement de la peine était obligatoire, sauf impossibilité qu'il appartenait au juge de caractériser et qui ne pouvait résulter de la seule absence du prévenu à l'audience, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés. 12. La cassation est par conséquent encourue. Portée et conséquences de la cassation 13. La cassation sera limitée à la peine, dès lors que la déclaration de culpabilité n'encourt pas la censure. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en ses seules dispositions sur la peine, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 7 mai 2021, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° R 22-82.879 F-D N° 00034 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 M. [N] [I], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 15 février 2022, qui, dans l'information suivie sur sa plainte contre personne non dénommée, des chefs de discrimination, atteinte à la liberté individuelle, soustraction, détournement ou destruction de biens, traite d'êtres humains, soumission d'une personne vulnérable ou dépendante à des conditions d'hébergement indignes, a déclaré sans objet sa demande de mesure d'instruction. Un mémoire personnel et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Seys, conseiller, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 29 mars 2021, M. [N] [I] a porté plainte et s'est constitué partie civile des chefs susvisés. 3. Par ordonnance du 12 mai suivant, le juge d'instruction a constaté le dépôt de la plainte avec constitution de partie civile. 4. Par déclaration du même jour, au visa de l'article 82-1 du code de procédure pénale, M. [I] a sollicité son audition. 5. Par requête enregistrée le 28 juin 2021, sur le fondement de l'article 81, alinéa 10, du code de procédure pénale, M. [I] a saisi directement la chambre de l'instruction de la demande précitée. 6. Postérieurement à cette saisine, le juge d'instruction a constaté l'irrecevabilité de la constitution de partie civile de M. [I], par une décision qui est frappée d'appel. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa seconde branche 7. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 8. Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir dit la requête en saisine directe sans objet, au motif que le juge d'instruction a rendu le 5 janvier 2022 une ordonnance d'irrecevabilité de constitution de partie civile, alors que cette plainte avait été précédée de plusieurs autres, adressées au procureur de la République, et que l'ordonnance précitée a été frappée d'appel. Réponse de la Cour Vu l'article 186, alinéa 2, du code de procédure pénale : 9. Il se déduit de ce texte que l'appel de la partie civile contre une ordonnance d'irrecevabilité de constitution de partie civile a un effet suspensif. 10. Pour dire, le 15 février 2022, sans objet la requête de M. [I] aux fins d'audition par le juge d'instruction, l'arrêt attaqué, après l'avoir déclarée recevable, énonce que ce magistrat avait rendu, le 5 janvier 2022, une ordonnance d'irrecevabilité de constitution de partie civile. 11. En se déterminant ainsi, alors que M. [I] avait, comme il le mentionnait dans son mémoire régulièrement déposé, relevé appel le 10 janvier 2022 de cette décision, qui, de ce fait, n'était pas définitive, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé. 12. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 15 février 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° J 22-81.240 F-D N° 00048 GM 11 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 M. [B] [I] et le groupement forestier [1], parties civiles, ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Riom, en date du 1er février 2022, qui, dans l'information suivie, sur leur plainte, contre M. [U] [K], du chef de dégradations, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction. Un mémoire, commun aux demandeurs, a été produit. Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, avocat de M. [B] [I], et du groupement forestier [1], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Par lettre recommandée du 9 décembre 2013, M. [B] [I], en son nom personnel et en qualité de gérant du groupement forestier [1], propriétaire de parcelles de bois mises à disposition d'une association de chasse, a porté plainte et s'est constitué partie civile pour des faits de dégradations. 3. M. [U] [K] a été mis en examen pour ces faits. 4. Le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu le 5 novembre 2019. 5. Les parties civiles ont relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé une ordonnance ayant dit n'y avoir lieu à suivre en l'état, alors : « 1°/ que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties ; qu'en disant n'y avoir lieu à suivre en l'état au motif que si M. [K] avait reconnu avoir volontairement « couché » un poteau, ce dernier n'avait pas été « abîmé », de sorte que la volonté de dégrader le bien d'autrui n'était pas établie, sans répondre aux conclusions des parties civiles faisant valoir que le poteau était scellé dans du béton et que M. [K] avait reconnu l'avoir descellé, ce qui caractérisait une dégradation volontaire, la cour a violé l'article 593 du code de procédure pénale ; 2°/ que le fait de volontairement « coucher » un poteau servant à délimiter une propriété privée constitue une dégradation de l'immeuble foncier qu'il a pour objet de délimiter, peu important que le poteau ne soit pas lui-même « abîmé » ; qu'en statuant ainsi au motif inopérant que si M. [K] avait reconnu avoir volontairement « couché » un poteau, ce dernier n'avait pas été « abîmé », de sorte que la volonté de dégrader le bien d'autrui n'était pas établie, la cour a violé l'article 322-1 du code pénal. » Réponse de la Cour 7. Pour confirmer l'ordonnance de non-lieu entreprise, la chambre de l'instruction énonce que, si le plaignant soutient être propriétaire d'une piste traversant plusieurs terrains, sa qualité de propriétaire n'est pas établie. L'arrêt attaqué précise que, le plaignant ayant obstrué cette piste avec son véhicule pour en interdire le passage, M. [K], visé par la plainte, s'est borné à coucher au sol, sans l'abîmer, un poteau situé à l'entrée de la piste, qui en limitait l'accès. Les juges retiennent qu'aucune autre dégradation n'est établie. 8. En l'état de ces constatations, dont elle a pu déduire que l'existence d'une infraction pénale n'était pas suffisamment caractérisée, la chambre de l'instruction, qui a relevé que l'information était complète, a justifié sa décision. 9. Il en résulte que le moyen, qui discute l'appréciation souveraine, par les juges du fond, des faits et circonstances de la cause, ne peut être admis. 10. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° S 22-84.007 F-D N° 00040 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 L'officier du ministère public près le tribunal de police de Beauvais a formé un pourvoi contre le jugement dudit tribunal, en date du 10 mai 2022, qui, après avoir constaté l'extinction de l'action publique par prescription, a relaxé M. [P] [W] du chef de contravention au code de la route. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte du jugement attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 7 février 2020, l'infraction de dépassement de véhicule à une intersection de routes a été relevée à l'encontre de M. [P] [W] sur la territoire de la commune de [Localité 1] (département de l'Oise). 3. L'avis de contravention afférent à cette infraction lui a été transmis le 22 février 2020. Le 12 mai suivant, M. [W] a transmis un courrier de contestation à l'officier du ministère public de Rennes. 4. Le 6 juin 2020, l'officier du ministère public de Rennes a transmis la procédure à l'officier du ministère public de Beauvais, dans le ressort duquel est domicilié le contrevenant. 5. Suite à des réquisitions en date du 11 mai 2021, M. [W] a été poursuivi par voie d'ordonnance pénale en date du 8 juin suivant puis, sur opposition, a été cité devant le tribunal de police du chef susvisé. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen est pris de la violation des articles 9 et 9-2 du code de procédure pénale. 7. Le moyen critique le jugement attaqué en ce qu'il a constaté l'extinction de l'action publique, alors que la transmission par voie électronique, le 6 juin 2020, du dossier concernant M. [W] entre les officiers du ministère public de Rennes et de Beauvais a interrompu la prescription. Réponse de la Cour Vu les articles 9 et 9-2 du code de procédure pénale : 8. Il résulte de ces textes que si, en matière de contravention, l'action publique se prescrit par une année révolue à compter du jour où l'infraction a été commise, c'est à la condition que, dans cet intervalle, il n'ait été procédé à aucun acte d'instruction ou de poursuite. 9. Pour constater l'extinction de l'action publique par la prescription, le jugement retient qu'aucun acte d'instruction ou de poursuite n'a été accompli entre l'avis de contravention du 22 février 2020 et l'acte d'enquête de l'officier du ministère public près le tribunal de police de Beauvais en date du 11 mai 2021. 10. En prononçant ainsi, alors que constituait un acte de poursuite la transmission de la procédure, le 6 juin 2020, à l'officier du ministère public territorialement compétent en raison du domicile du contrevenant, le tribunal de police a méconnu le sens et la portée des textes susvisés et du principe ci-dessus rappelé. 11. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement susvisé du tribunal de police de Beauvais, en date du 10 mai 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant le tribunal de police d'Amiens, à ce désigné par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe du tribunal de police de Beauvais et sa mention en marge ou à la suite du jugement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Z 22-80.173 F-D N° 00042 GM 11 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 M. [Z] [B] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-3, en date du 20 octobre 2021, qui, pour complicité d'infractions à la législation sur les stupéfiants et complicité de tentative d'exportation de stupéfiants, l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement, une interdiction définitive du territoire français et a ordonné une mesure de confiscation. Des mémoires en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Turbeaux, conseiller, les observations de Maître Laurent Goldman, avocat de M. [Z] [B], les observations de la société Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction générale des douanes et droits indirects, et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turbeaux, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par ordonnance du 11 janvier 2000, le juge d'instruction a ordonné le renvoi de M. [Z] [B] devant le tribunal correctionnel pour avoir été complice de détention, de transport et de tentative d'exportation de stupéfiants, tenté d'exporter des stupéfiants et commis des infractions douanières. 3. Par jugement du 9 mai 2017, le tribunal correctionnel a reçu le prévenu en son opposition au jugement prononcé par défaut à l'égard de M. [B] le 21 février 2000 ; il a déclaré ce dernier coupable des faits poursuivis, l'a condamné à quatre ans d'emprisonnement, une interdiction définitive du territoire français, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les pénalités douanières. 4. M. [B] a relevé appel et le ministère public a formé appel incident. 5. Par arrêt de défaut du 10 avril 2019, la chambre des appels correctionnels a constaté que l'appel du prévenu ne portant que sur les dispositions pénales et civiles du jugement, les dispositions douanières étaient devenues définitives, a relaxé M. [B] du chef de tentative d'exportation de stupéfiants, l'a déclaré coupable pour le surplus, l'a condamné à huit ans d'emprisonnement, une interdiction définitive du territoire français et a ordonné une mesure de confiscation. 6. M. [B] a formé opposition à cet arrêt, le 7 janvier 2020. Examen des moyens Sur le premier moyen 7. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable l'appel formé par M. [B] sur les dispositions civiles du jugement qui n'en comporte pas et a constaté que les dispositions douanières du jugement sont définitives, alors « qu'il résulte de l'acte d'appel qu'en visant les dispositions pénales et civiles du jugement, qui ne comportait aucune autre disposition que celles statuant sur l'action publique exercée par le ministère public et l'action exercée par l'administration des douanes, M. [B] avait entendu faire porter son recours sur l'intégralité de la décision déférée, de sorte qu'en retenant néanmoins qu'il ne pouvait être déduit de l'acte d'appel que le prévenu avait entendu faire porter son appel sur les dispositions douanières, la cour d'appel a méconnu l'article 509 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 509 du code de procédure pénale : 9. Il résulte de ce texte que l'affaire est dévolue à la cour d'appel dans la limite fixée par l'acte d'appel et par la qualité de l'appelant. 10. L'arrêt attaqué, pour estimer que les dispositions douanières revêtent un caractère définitif, relève que l'appel du prévenu porte sur les dispositions civiles du jugement, qui n'en comporte pas, et qu'aucune des mentions figurant sur l'acte d'appel n'indique que le prévenu a entendu faire aussi porter son appel sur les dispositions douanières. 11. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé. 12. En effet, en visant les dispositions pénales et civiles du jugement, qui ne comportait aucune autre disposition que celles statuant sur l'action publique exercée par le ministère public et l'action exercée par l'administration des douanes, M. [B], dont l'acte d'appel énonce expressément les infractions douanières pour lesquelles il a été déclaré coupable et l'amende douanière à laquelle il a été condamné, a entendu faire porter son recours sur les dispositions douanières du jugement. 13. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris en date du 20 octobre 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° G 21-85.996 F-D N° 00050 GM 11 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 Mme [F] [V] [D] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 9e chambre, en date du 27 septembre 2021, qui, pour envois réitérés de messages malveillants, l'a condamnée à quatre mois d'emprisonnement avec sursis probatoire et a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Gouton, conseiller, les observations de Maître Occhipinti, avocat de Mme [F] [V] [D], et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Gouton, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Mme [F] [V] [D] a été poursuivie pour des faits de harcèlement moral sur conjoint, faits prévus et réprimés par l'article 222-33-2-1 du code pénal. 3. Par jugements du 18 septembre 2019 puis du 23 mars 2021, sur opposition formée à l'égard du premier jugement, le tribunal correctionnel l'a déclarée coupable de ces faits et l'a condamnée à huit mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pendant deux ans, devenu sursis probatoire, et a prononcé sur les intérêts civils. 4. La prévenue et le ministère public ont relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré Mme [D] coupable d'envoi, par la voie des communications électroniques, de messages malveillants réitérés en vue de troubler la tranquillité d'autrui et a prononcé sur les intérêts civils, alors « que s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée ; que la cour d'appel a requalifié l'infraction reprochée à Mme [D] de harcèlement moral en envoi par la voie de communications électroniques, de messages malveillants réitérés ; qu'en s'abstenant de mettre Mme [D] à même de se défendre sur cette nouvelle qualification, elle a violé les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 388, 512 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 388 du code de procédure pénale et 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme : 6. S'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en mesure de se défendre sur la nouvelle qualification envisagée. 7. Il résulte des pièces de procédure que, la prévenue ayant été poursuivie et reconnue coupable par la juridiction du premier degré de harcèlement moral n'ayant pas entraîné d'incapacité de travail sur la personne de son ancien conjoint, la cour d'appel a requalifié les faits en envoi, par la voie des communications électroniques, de messages malveillants réitérés, en vue de troubler sa tranquillité. 8. En procédant à cette requalification, sans avoir invité la prévenue à se défendre sur la nouvelle qualification qu'elle envisageait de retenir, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et le principe rappelé ci-dessus. 9. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai, en date du 27 septembre 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Y 21-86.240 F-D N° 00033 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 La société [1] et la caisse de retraite du personnel navigant de l'aéronautique civile, partie civile, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 21 octobre 2021, qui, pour travail dissimulé, prêt illicite de main d'oeuvre, marchandage et discrimination, a condamné, la première, à 100 000 euros d'amende, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Maziau, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société [1], les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la caisse de retraite du personnel navigant de l'aéronautique civile, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Maziau, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 29 décembre 2005, [H] [D], pilote d'hélicoptère, depuis décédé, a porté plainte et s'est constitué partie civile des chefs de travail dissimulé, marchandage de main d'oeuvre et discrimination, en exposant qu'ayant signé un contrat de travail avec la société [2] dont le siège social est situé à Jersey, il avait été débouté par le conseil de prud'hommes d'une action tendant à constater que la société [1] avait été son réel employeur et à réparer les conséquences de son licenciement qualifié d'abusif. 3. Par ordonnance en date du 18 janvier 2017, le juge d'instruction a renvoyé cette dernière société devant le tribunal correctionnel des chefs susvisés. 4. Par jugement du 9 avril 2018, le tribunal correctionnel a, sur l'action publique, rejeté l'exception d'incompétence soulevée par la société prévenue, requalifié les faits de complicité de prêt illicite de main d'oeuvre en prêt illicite de main d'oeuvre, l'a déclarée coupable de l'ensemble des faits reprochés, condamnée à une amende de 250 000 euros et a prononcé une peine de confiscation. 5. Statuant sur l'action civile, le tribunal correctionnel a déclaré recevable la constitution de partie civile de la caisse de retraite du personnel navigant de l'aéronautique civile (CRPN) et a condamné la société [1] à réparer tant son préjudice moral que son préjudice matériel, apprécié à 2 043 301 euros, sur la base des cotisations dues au titre de l'affiliation obligatoire de quatorze pilotes. 6. La société [1], la CRPN et le ministère public, notamment, ont relevé appel de cette décision. Sur les premier, troisième, quatrième et cinquième moyens proposés pour la société [1] 7. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le deuxième moyen proposé pour la société [1] Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré la société [1] coupable des chefs de prêt illicite de main d'oeuvre, de travail clandestin par dissimulation de salariés et de marchandage, alors : « 1°/ que l'interdiction de cumuler les qualifications lors de la déclaration de culpabilité s'applique aux cas où un fait ou des faits identiques sont en cause et où l'une des qualifications, telle qu'elles résultent des textes d'incrimination, correspond à un élément constitutif ou une circonstance aggravante de l'autre, qui seule doit alors être retenue ; que le délit de prêt illicite de main d'oeuvre est un élément constitutif du délit de marchandage ; qu'en condamnant la société [1] du chef de ces deux infractions, la cour d'appel a méconnu les articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 4 du protocole n° 7 additionnel à la même Convention, l'article 14-7 du Pacte international de New-York relatif aux droits civils et politiques, ensemble le principe ne bis in idem ; 2°/ que l'interdiction de cumuler les qualifications lors de la déclaration de culpabilité s'applique aux cas où un fait ou des faits identiques sont en cause et où l'une des qualifications retenues, dite spéciale, incrimine une modalité particulière de l'action répréhensible sanctionnée par l'autre infraction, dite générale ; que les délits de prêt illicite de main d'oeuvre et de marchandage constituent des qualifications spéciales incriminant une modalité particulière du travail clandestin par dissimulation de salarié ; qu'en condamnant la société [1] du chef de ces trois infractions, la cour d'appel a méconnu les articles 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 4 du protocole n° 7 additionnel à la même Convention, l'article 14-7 du Pacte international de New-York relatif aux droits civils et politiques, ensemble le principe ne bis in idem. » Réponse de la Cour 9. Par arrêt du 15 décembre 2021, la Cour de cassation a jugé que le moyen, qui invoque pour la première fois devant elle la violation du principe ne bis in idem en cas de poursuites concomitantes, est irrecevable (Crim., 15 décembre 2021, pourvoi n° 20-85.924, publié au Bulletin). 10. Cette règle ne méconnaît ni l'article 7 de la Convention européenne des droits de l'homme qui est étranger aux règles de recevabilité des moyens devant la Cour de cassation ni l'article 6 de ladite convention, l'irrecevabilité devant cette juridiction des moyens nouveaux qui ne sont pas d'ordre public et qui ne naissent pas de l'arrêt attaqué n'apportant pas une limitation excessive au droit d'accès des requérants à un tribunal. 11. Il s'ensuit que le moyen est irrecevable. Sur le septième moyen proposé pour la société [1] Enoncé du moyen 12. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré recevable la constitution de partie civile de la CRPN, alors « que l'affiliation à la CRPN suppose l'affiliation à l'URSSAF ; que la cassation à intervenir sur le deuxième moyen résultant de ce que les salariés de la société [2] n'avaient pas à s'affilier à l'URSSAF entraînera la cassation par voie de conséquence sur le présent moyen. » Réponse de la Cour 13. Il se déduit du rejet du deuxième moyen que ce moyen ne peut être accueilli. Mais sur le sixième moyen proposé pour la société [1] Enoncé du moyen 14. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement déféré sur la peine complémentaire de confiscation des scellés et objets saisis, alors « que hormis le cas où la confiscation, qu'elle soit en nature ou en valeur, porte sur un bien qui, dans sa totalité, constitue le produit de l'infraction, le juge, en ordonnant une telle mesure, doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé lorsqu'une telle garantie est invoquée ou procéder à cet examen d'office lorsqu'il s'agit d'une confiscation de tout ou partie du patrimoine ; qu'il incombe en conséquence au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable en application des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure et, le cas échéant, de s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du prévenu ; qu'en confirmant le jugement déféré sur la peine complémentaire de confiscation des scellés et objets saisis sans préciser à quel titre ces biens ont été confisqués, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les exigences de motivation rappelées ci-dessus ont été respectées, n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 131-21 du code pénal ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 1er du Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, 131-21 du code pénal et 593 du code de procédure pénale : 15. Il résulte des deux premiers de ces textes qu'hormis le cas où la confiscation, qu'elle soit en nature ou en valeur, porte sur un bien qui, dans sa totalité, constitue le produit ou l'objet de l'infraction, le juge, en ordonnant une telle mesure, doit apprécier le caractère proportionné de l'atteinte portée au droit de propriété de l'intéressé lorsqu'une telle garantie est invoquée ou procéder à cet examen d'office lorsqu'il s'agit d'une confiscation de tout ou partie du patrimoine. 16. Il incombe en conséquence au juge qui décide de confisquer un bien, après s'être assuré de son caractère confiscable au regard des conditions légales, de préciser la nature et l'origine de ce bien ainsi que le fondement de la mesure et, le cas échéant, de s'expliquer sur la nécessité et la proportionnalité de l'atteinte portée au droit de propriété du prévenu. 17. En application du dernier de ces textes, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 18. En confirmant, sans aucun motif, une confiscation des scellés et objets saisis ordonnée par le jugement, lui-même dépourvu de motivation, les juges n'ont pas mis la Cour de cassation en mesure de s'assurer que les exigences de motivation rappelées ci-dessus ont été respectées. 19. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Et sur le moyen unique proposé pour la CRPN Enoncé du moyen 20. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a débouté la CRPN de sa demande de réparation du préjudice matériel causé par les délits de travail dissimulé par dissimulation de salariés, prêt illicite de main d'oeuvre et marchandages à l'encontre de la société [1], alors : « 1°/ que la victime d'une infraction a droit à la réparation du préjudice personnel directement causé par l'infraction ; que l'action civile est recevable pour tous chefs de dommages, aussi bien matériels que corporels ou moraux, qui découleront des faits objets de la poursuite ; qu'il appartient aux juridictions du fond de réparer, dans les limites des conclusions des parties, le préjudice dont elles reconnaissent le principe et d'en rechercher l'étendue ; qu'à la suite de la condamnation de la société [1] pour travail dissimulé par dissimulation de salariés, prêt illicite de main d'oeuvre et marchandage, pour n'avoir pas payé les cotisations dues aux organismes sociaux pour les pilotes qui travaillaient pour elle, sous couvert d'une société étrangère, le tribunal correctionnel l'a condamnée à réparer tant le préjudice moral que le préjudice matériel causé à la CRPN par la perte de cotisations dues au titre de l'affiliation obligatoire des pilotes salariés à ladite caisse ; que, sur appel des prévenus comme de la CRPN contestant l'évaluation de son préjudice, la cour d'appel a infirmé partiellement le jugement entrepris, en estimant que la caisse ne pouvait prétendre à l'indemnisation d'un préjudice correspondant aux cotisations éludées, n'étant pas dans la même situation que les URSSAF ; que dès lors qu'il résulte des articles L. 426-1 du code de l'aviation civile et L. 6527-1 du code des transports lui ayant succédé que les pilotes d'aéronefs salariés sont obligatoirement affiliés à la CRPN qui perçoit les cotisations dues à ce titre et qu'elle constatait que « si [la société [1]] avait accompli les formalités, la CRPN aurait bénéficié de l'allocation obligatoire des salariés concernés et aurait perçu les cotisations » (arrêt, p. 32, §4), préjudice résultant directement du délit de travail dissimulé, en refusant d'indemniser la caisse pour la perte de ces cotisations, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences de ses propres constatations en violation des articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3 et 464 du code de procédure pénale et L. 426-1 du code de l'aviation civile, transféré à l'article L. 6527-1 du code des transports ; 2°/ que, toute personne a droit à la réparation du préjudice personnel causé directement par l'infraction, peu important son statut ; qu'en refusant d'indemniser la CRPN aux motifs que cette caisse n'est pas dans la même situation que les URSSAF n'ayant pas de pouvoir de contrôle et de sanction, n'étant pas chargée d'une mission de service public et n'ayant pas de prérogative de puissance publique, quand le défaut de mission de service public ou de prérogatives de puissance publique que constitue le pouvoir de contrôle n'était pas de nature à exclure le préjudice matériel causé par la perte de cotisations qu'elle constatait et le droit à réparation qui en découlait, la cour d'appel a violé les articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3 et 464 du code de procédure pénale et L. 426-1 du code de l'aviation civile, transféré à l'article L. 6527-1 du code des transports ; 3°/ que le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties ; que pour refuser l'indemnisation du préjudice correspondant au non-paiement de cotisations qui étaient dues, la cour d'appel a relevé que « les cotisations qu'elle aurait reçues au titre de l'affiliation des ‘salariés' identifiés par la caisse dans sa demande, n'auraient pas donné lieu à des prestations en retour au profit des pilotes en question, au jour de leur accession à la retraite » ; qu'en privant la CRPN de la réparation du préjudice résultant de l'absence de perception des cotisations dues pour les salariés non déclarés, au motif que ces salarié ne pourraient pas percevoir la retraite complémentaire résultant d'une affiliation inexistante, préjudice éventuel des salariés distinct de celui causé à la CRPN consistant dans la perte de cotisations du fait d'une faute de l'employeur, qui, par conséquent, ne peut pas tirer profit d'une telle situation pour voir limiter l'indemnisation de ladite caisse, la cour d'appel a encore violé les articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3 et 464 du code de procédure pénale ; 4°/ que les cotisations dues par l'employeur sont destinées à alimenter les ressources de la caisse de retraite, gérant un régime de sécurité sociale au bénéfice des salariés actuellement à la retraite et non au salarié cotisant actuellement ; que la caisse est tenue d'assurer l'équilibre de ses ressources ; qu'en prenant en considération le fait que le préjudice de la caisse ne serait pas établi dès lors que les salariés pour lesquels les cotisations ont été éludées n'y sont pas affiliés et ne pourraient en retour bénéficier des prestations qu'offre cette affiliation, quand un tel fait n'excluait pas l'atteinte à l'équilibre financier du régime de retraite complémentaire, les droits des salariés étant seulement éventuels au moment du paiement des cotisations et restant inférieurs aux cotisations éludées, la cour d'appel a encore violé les articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3 et 464 du code de procédure pénale ; 5°/ qu'en refusant d'indemniser la CRPN, aux motifs que les salariés qui n'avaient pas cotisé ne bénéficieraient pas des droits liés aux cotisations éludées, sans répondre aux conclusions de la CRPN qui soutenaient que les droits éventuels des salariés dissimulés par la prévenue resteraient en tout état de cause inférieurs aux cotisations éludées, pour lesquelles le droit à réparation subsistait, la cour d'appel a encore violé les articles 1382 (devenu 1240) du code civil, 2, 3 et 464 du code de procédure pénale ; 6°/ que la caisse qui gère le régime de retraite complémentaire du personnel de navigation de l'aéronautique civile auquel l'affiliation est obligatoire, a une mission d'intérêt général selon l'article L. 6527-2 du code des transports ; qu'elle est placée sous la tutelle du ministre de la sécurité sociale, selon le même article ; que l'organisation de ladite caisse est déterminée par la loi, que la moitié de ses administrateurs sont nommés par arrêté du ministre chargé de l'aviation civile et que participe à ses délibérations un commissaire du gouvernement selon l'article R. 426-2 du code de l'aviation civile ; que les ministres de la sécurité sociale et du budget peuvent annuler ses délibérations selon l'article R. 426-2 du code de l'aviation civile ; que le mode de calcul des cotisations est fixé par voie réglementaire selon l'article L. 6527-4 du code des transports reprenant les dispositions antérieures de l'article L. 426-1 du Code de l'aviation civile ; que les article R. 426-6 et suivants du code de l'aviation civile fixent l'assiette et les taux de cotisation au régime de retraite complémentaire ; que les majoration de retard sont fixées conformément aux dispositions du code de la sécurité sociale, selon l'article L. 426-5 du code de l'aviation civile ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions, que la CRPN est une personne de droit privé chargée d'une mission de service public ; que ladite caisse dispose de prérogatives de puissance publique, en ce qu'elle est habilitée à percevoir des cotisations de personnes obligées de s'affilier, sans considération de tout lien contractuel avec elle et qu'elle est tenue, même si elle ne dispose d'aucun pouvoir d'enquête et de sanction portant sur les employeurs qui ne versent pas les cotisations dues et en ce qu'elle a droit à des majorations de retard dans les conditions prévues par la loi, aggravées en cas de travail dissimulé ; que dès lors, en jugeant que la CRPN ne peut prétendre aux mêmes droits que les URSSAF, aux motifs qu'elle ne serait pas une personne chargée d'une mission de service public et n'aurait pas prérogatives de puissance publique, la cour d'appel a méconnu les articles L. 6527-1 et suivants du code des transports (antérieurement, L. 426-1 et suivants) et les article R. 426-2 à R. 426-10 du code de l'aviation civile ; 7°/ que serait-il considéré que la CRPN n'a pas de prérogatives de puissance publique, qu'elle n'en conservait pas moins le droit à l'indemnisation de son préjudice causé par le non-paiement des cotisations obligatoires, du fait de l'atteinte à la mission d'intérêt général qui lui est confiée ; que, dès lors, la cour d'appel a de plus ample méconnu les articles L. 6527-2 du code des transports, 1382 (devenu 1240) du code civil, 2 et 3 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 2 et 3 du code de procédure pénale et 1240 du code civil : 21. Il résulte des deux premiers de ces textes que le droit à réparation appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage, matériel ou moral, découlant des faits, objet de la poursuite. 22. En vertu du troisième, le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties. 23. Pour écarter la demande de la CRPN tendant à voir fixer son préjudice matériel à la somme de 12 707 888 euros, calculé sur la base des cotisations qu'elle aurait dû percevoir pendant la période de prévention, sur la base des rémunérations versées aux pilotes, telles qu'attestées par les virements bancaires effectués par la société [2], l'arrêt attaqué énonce que la société [1] a été déclarée coupable de faits de travail clandestin par dissimulation de salariés pour ne pas avoir effectué les déclarations obligatoires auprès des organismes de sécurité sociale notamment l'URSSAF. 24. Les juges observent que la CRPN étant une caisse de retraite, elle est susceptible de percevoir des cotisations mais aussi de servir en retour des prestations. 25. Ils en déduisent que les cotisations qu'elle aurait reçues au titre de l'affiliation des « salariés » identifiés par la caisse dans sa demande, n'auraient pas donné lieu à des prestations en retour au profit des pilotes en question, au jour de leur accession à la retraite. 26. Ils ajoutent que la CRPN n'est pas dans la même situation que le réseau des vingt-deux URSSAF régionales, réseau qui constitue le moteur du système de protection sociale avec pour mission principale la collecte des contributions sociales, sources de financement du régime général de la sécurité sociale. 27. Ils précisent à cet égard que si chaque URSSAF, investie de missions de contrôle, d'information et de prévention, dont les agents sont non seulement assermentés mais tenus au secret professionnel, constitue un organisme de droit privé chargé d'une mission de service public et investi à cette fin de prérogatives de puissance publique, qui l'habilitent à solliciter du juge pénal le paiement à titre de dommages-intérêts des cotisations éludées, la CRPN n'est pas une personne privée chargée d'une mission de service public et n'est nullement investie des prérogatives de puissance publique propres aux URSSAF. 28. En prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 29. En effet, la CRPN, qui est investie par la loi de la mission d'intérêt général de percevoir les cotisations du régime complémentaire obligatoire de retraite des pilotes salariés, peu important qu'elle dispose ou non de prérogatives de puissance publique, justifie d'un préjudice résultant directement du défaut de paiement desdites cotisations que la société [1] aurait dû acquitter si elle avait régulièrement déclaré, en qualité de salariés, les pilotes qu'elle a employés. 30. La cassation est par conséquent de nouveau encourue. Examen de la demande fondée sur l'article 618-1 du code de procédure pénale 31. Les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de la société [1] des chefs susvisés étant devenue définitive, par suite de la non-admission des deuxième, troisième, quatrième et cinquième moyens de cassation proposés pour la société prévenue, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande de la CRPN. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 21 octobre 2021, mais en ses seules dispositions relatives à la peine de confiscation et à l'indemnisation du préjudice matériel subi par la CRPN, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; FIXE à 2 500 euros la somme que la société [1] devra payer à la CRPN en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; DIT n'y avoir lieu à autre application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° V 21-85.524 F-D N° 00031 MAS2 10 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 Les sociétés [6], [4], [3], [5], [8] et [9] Group ont formé des pourvois contre l'ordonnance n° 57 du premier président de la cour d'appel de Paris, en date du 15 septembre 2021, qui a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention autorisant la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes à effectuer des opérations de visite et de saisie en vue de rechercher la preuve de pratiques commerciales prohibées. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Un mémoire, commun aux demandeurs, un mémoire en défense et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat des sociétés [6], [4], [3], [5], [8] et [9] Group, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat du ministre chargé de l'économie, et les conclusions de M. Lemoine, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'ordonnance attaquée et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La société [9] Group a notamment pour filiales les sociétés [8], [6], [5], [4] et [3] (sociétés [9]), dont les activités s'exercent dans le domaine des assurances affinitaires (extensions de garantie), de l'abonnement à des programmes d'avantages, de la création de sites internet, et des services événementiels. 3. Sur demande du ministre chargé de l'économie, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a, le 8 septembre 2020, ouvert une enquête portant sur l'existence de pratiques commerciales trompeuses réprimées par les articles L. 121-2 et suivants du code de la consommation dans les secteurs d'activité susvisés. 4. Saisi par requête du 9 septembre 2020, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris, par ordonnance du 11 septembre suivant, au visa des articles L. 512-51 et suivants du code de la consommation, a autorisé le service national d'enquêtes (SNE) de la DGCCRF à pratiquer, avant le 15 novembre 2020, des opérations de visite et de saisie dans les locaux des sociétés [9] et de toutes celles du même groupe situées aux mêmes adresses, d'une part, [Adresse 2], d'autre part, [Adresse 1] à [Localité 7] (26), adressant délégation, à cette fin, au juge compétent du tribunal judiciaire de Valence. 5. Trois autres ordonnances ont été prises, à la suite, une première, le 21 septembre 2020, par le magistrat commis, une deuxième, rectificative, le 24 septembre suivant, par ce même juge, une troisième, rectificative, le 29 octobre 2020, par le magistrat saisi initialement, aux fins de prorogation du délai susvisé et désignation d'officiers de police judiciaire pour l'exploitation des données et documents saisis. 6. Les opérations de visite et de saisie se sont déroulées dans l'ensemble des locaux visés, les 24 et 25 septembre 2020. 7. Les sociétés [9] ont chacune relevé appel des quatre ordonnances ci-dessus. Examen des moyens Sur les premier et cinquième moyens Enoncé des moyens 8. Le premier moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a confirmé en toutes leurs dispositions les ordonnances rendues les 11 septembre et 29 octobre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris ainsi que celles rendues les 21 et 24 septembre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Valence, alors : « 1°/ qu'en se bornant, pour rejeter les moyens tirés de la déloyauté des éléments produits par l'administration afin de justifier les visites et saisies ordonnées, à exercer un contrôle strictement formel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention et ainsi relever que « le JLD affirme que les pièces présentées à l'appui de la requête (?) ont une origine apparemment licite et qu'elles peuvent être utilisées pour la motivation de la présente ordonnance » et qu' « il en résulte que le juge a effectué le contrôle conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation » (ordonnance attaquée, p. 23, in fine) ou encore que « le JLD s'est donc assuré que les agissements reprochés sont distincts de ceux inclus dans le périmètre de la transaction » (ordonnance attaquée, p. 24, 1er §), sans rechercher lui-même si la demande d'autorisation des visites était fondée, notamment en s'interrogeant sur l'apparence de licéité des pièces présentées à l'appui de celle-ci comme il le lui était demandé (conclusions, pp. 22-38), le premier président a méconnu son office de juge d'appel et a violé les articles L. 512-52 et L. 512-63 du code de la consommation, 561 du code de procédure civile, 591 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ qu'en se bornant, pour rejeter le grief d'absence de justification et de nécessité des visites et saisies ordonnées, à exercer un contrôle strictement formel de l'ordonnance du JLD et ainsi relever que « le JLD dans sa décision précise « les agissements ont certainement été préparés selon des modalités secrètes et les documents nécessaires à la preuve de ceux-ci sont vraisemblablement conservés dans des lieux et sous une forme qui facilitent leur dissimulation ou leur destruction en cas de contrôle » » (ordonnance attaquée, p. 26, 2e §) pour immédiatement juger « qu'il en résulte que l'ordonnance du JLD du 11 septembre 2020 autorisant les visites domiciliaires était pleinement justifiée eu égard aux objectifs recherchés » (ibid.), sans rechercher lui-même si la demande d'autorisation des visites était fondée comme il le lui était demandé (conclusions, pp. 75-81), le premier président a méconnu son office de juge d'appel et a violé les articles L. 512-52 et L. 512-63 du code de la consommation, 561 du code de procédure civile, 591 et 593 du code de procédure pénale. » 9. Le cinquième moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a confirmé en toutes leurs dispositions les ordonnances rendues les 11 septembre et 29 octobre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris ainsi que celles rendues les 21 et 24 septembre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Valence, alors : « 1°/ qu'en se bornant à constater, de manière inopérante, que les sociétés font partie d'un même groupe, pour dire que « les preuves et éléments fournis par l'administration sont suffisants pour justifier des opérations de visite et de saisie, et cela à l'encontre de l'ensemble des sociétés du groupe » (ordonnance attaquée, p. 26, in limine), sans caractériser de présomptions d'existence de l'infraction reprochée à l'encontre de chacune des sociétés du groupe, le premier président a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 512-52 du code de la consommation ; 2°/ qu'en retenant que « le Premier Président, statuant en appel, apprécie l'existence des présomptions de fraude, sans être tenu de s'expliquer autrement sur la proportionnalité de la mesure qu'il confirmait » (ordonnance attaquée, p. 26, 3ème §) pour rejeter la demande des exposantes en ce sens, le premier président a violé, par refus d'application, l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme, ensemble l'article L. 512-52 du code de la consommation. » Réponse de la Cour 10. Les moyens sont réunis. 11. Pour confirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, l'ordonnance attaquée recense les éléments exposés dans la requête du SNE et détaille les secteurs d'activité visés par celle-ci. 12. Le premier président précise notamment qu'une précédente enquête, diligentée courant 2018, clôturée par une transaction signée le 5 juin 2019 avec les seules sociétés [8] et [5], filiales de la société [9] Group, a mis en évidence l'existence d'une méthode de vente trompeuse, ayant pour objectif d'amener les clients à acquérir, auprès de partenaires commerciaux, des produits dont l'acquisition était liée à des assurances affinitaires, commercialisées par les sociétés mises en cause. 13. Il relève que de nombreuses réclamations ont été formulées par des particuliers, dénonçant la poursuite de prélèvements bancaires sur leurs comptes malgré les demandes de résiliation faites auprès de l'une ou l'autre des sociétés susvisées. 14. Il observe qu'à l'occasion des investigations menées en 2018, a été découvert un protocole, en vigueur dans ces entreprises, définissant quatre niveaux de réclamations, seules celles de niveau quatre devant être traitées, les autres devant être ignorées ou différées selon divers procédés. 15. Après avoir exposé les liens capitalistiques et logistiques étroits entre les sociétés visées par la requête, il retient que, selon les éléments fournis par l'administration, tenant notamment à l'analyse de l'activité économique des entreprises concernées, d'une part, ce mode opératoire était susceptible d'être employé par les autres filiales de la société [9] Group, à savoir les sociétés [6], [4] et [3], d'autre part, de nouvelles réclamations, en nombre, dont il reprend certaines, à titre d'illustration, étaient parvenues à l'administration, postérieurement à la transaction susvisée. 16. Reprenant les motifs de l'ordonnance contestée, il ajoute que le premier juge, après analyse in concreto de la requête, a considéré que les éléments de preuve fournis étaient apparemment licites. Il relève que les pièces issues des précédents contrôles de 2018 et visées dans l'ordonnance contestée pouvaient être utilisées pour les nécessités de la seconde enquête. 17. Il observe enfin que l'administration n'est pas tenue de s'expliquer sur son choix de recourir à la procédure prévue aux articles L. 512-51 et suivants du code de la consommation, qui n'a pas de caractère subsidiaire. 18. Il se déduit de ce qui précède que le premier président, procédant à un examen des motifs retenus par le premier juge, a recensé les éléments produits par l'administration, relevé leur apparente licéité, décrit les secteurs d'activité concernés, constaté l'existence d'un faisceau d'indices de la mise en oeuvre de pratiques illicites, dont il a donné une description, par chacune des sociétés mises en cause. 19. En l'état de ces seuls motifs, exempts d'insuffisance comme de contradiction, le premier président, qui a répondu aux moyens péremptoires des conclusions dont il était saisi, a, sans méconnaître les principes conventionnels et légaux invoqués, souverainement apprécié, à partir de l'ensemble des éléments qui lui étaient soumis, d'une part, l'existence de présomptions d'agissement illicites à l'encontre de chacune des sociétés mises en cause, justifiant la mesure autorisée, d'autre part, la nécessité de celle-ci, en considération des impératifs de lutte contre de telles pratiques. 20. Les moyens seront donc écartés. Sur le deuxième moyen Énoncé du moyen 21. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a confirmé en toutes leurs dispositions les ordonnances rendues les 11 septembre et 29 octobre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris ainsi que celles rendues les 21 et 24 septembre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Valence, alors « qu'en retenant, pour considérer que les pièces n° 8 et 15 à 19 visées par le juge des libertés et de la détention n'étaient entachées d'aucune nullité, que les enquêtes de 2018 et 2020 étaient distinctes (ordonnance attaquée, p. 25, 2ème §), sans répondre au moyen tiré de ce que le périmètre de la transaction incluait les faits relatifs au traitement des demandes de résiliation, au regard notamment du procès-verbal d'infraction univoque du 5 mars 2019 (conclusions, p. 28, 29 et 30), de sorte que l'ordonnance ne pouvait autoriser des mesures d'enquête en vue d'établir l'existence d'infractions à l'encontre desquelles aucune poursuite n'était plus possible, sauf à violer l'effet extinctif de l'action publique attaché à la transaction, le premier président a méconnu l'article 593 du code de procédure pénale, ensemble les articles L. 523-4 et L. 523-1 du code de la consommation et L. 310-6-1 du code de commerce. » Réponse de la Cour 22. Pour écarter le grief pris de ce que l'objet des investigations autorisées recouvrait en partie celui des précédentes, menées en 2018 et ayant abouti à une transaction, l'ordonnance attaquée, après avoir énoncé que les réclamations visées par la requête du SNE étaient postérieures à ladite transaction, précise que ces deux enquêtes ne portaient pas sur les mêmes pratiques commerciales. 23. Le premier président relève en effet que la première enquête portait sur le délit de pratiques commerciales trompeuses constituées par le discours déloyal mis en place pour faire souscrire par les consommateurs un contrat d'assurances proposé par la société [8] ou d'abonnement à un programme de fidélité proposé par la société [5], alors que la seconde enquête concerne des soupçons de pratiques commerciales trompeuses sur le traitement des demandes de résiliation des consommateurs de tout ou partie d'un contrat portant sur diverses prestations de services offertes par le groupe [8]. 24. En se déterminant ainsi, le premier président, qui a répondu aux moyens péremptoires des conclusions dont il était saisi, a suffisamment justifié sa décision. 25. Le moyen, qui de plus manque en fait en ce qui concerne les sociétés [6], [4] et [3], doit être écarté. Sur le troisième moyen Énoncé du moyen 26. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a confirmé en toutes leurs dispositions les ordonnances rendues les 11 septembre et 29 octobre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris ainsi que celles rendues les 21 et 24 septembre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Valence, alors « qu'en jugeant qu'aucune violation des principes directeurs du procès équitable ne pouvait être soulevée (ordonnance attaquée, p. 24), sans répondre au moyen péremptoire tiré de ce que l'administration aurait dissimulé les réclamations des consommateurs produites au soutien de sa demande d'autorisation des mesures de visite et de saisie, en méconnaissance du schéma de traitement qu'elle avait pourtant mis en place avec les sociétés exposantes et dans le but de diligenter de nouvelles poursuites à l'encontre des sociétés exposantes une fois la transaction exécutée par ces dernières (conclusions, pp. 22-25), le premier président n'a pas justifié sa décision et a violé l'article 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 27. Pour écarter le grief pris de la déloyauté de la DGCCRF dans l'administration de la preuve, l'ordonnance attaquée énonce que, conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, le juge saisi a procédé à un contrôle de la licéité apparente des pièces et éléments produits par le SNE, afin de déterminer s'ils pouvaient être utilisés comme fondement de l'autorisation sollicitée. 28. Le premier président relève que les pièces concernées ont été annexées à la requête, qui en décrit la teneur, qu'elles sont mentionnées dans l'ordonnance contestée et que le premier juge, exposant leur contenu, a procédé à leur analyse. 29. Il ajoute que ce magistrat s'est par ailleurs assuré que les agissements reprochés sont distincts de ceux inclus dans le périmètre de la transaction. 30. En se déterminant ainsi, le premier président, qui a répondu aux moyens péremptoires des conclusions dont il était saisi, a suffisamment justifié sa décision. 31. Ainsi, le moyen ne peut être accueilli. Sur le quatrième moyen Énoncé du moyen 32. Le moyen critique l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a confirmé en toutes leurs dispositions les ordonnances rendues les 11 septembre et 29 octobre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Paris ainsi que celles rendues les 21 et 24 septembre 2020 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Valence, alors « que se trouve mise en cause au sens de l'article L. 512-64 du code de la consommation la personne visée par une demande d'autorisation de procéder dans ses locaux à des opérations de visite et de saisie sur le fondement de pièces saisies au cours d'une précédente visite domiciliaire effectuée chez un tiers ; qu'il en résulte que le procès-verbal et l'inventaire dressés à l'issue des opérations antérieures doivent être annexés tant à la requête qu'à l'ordonnance d'autorisation du juge des libertés et de la détention qui doit être notifiée au moment de la visite, assurant ainsi l'exercice du droit à un recours effectif de la personne mise en cause ; qu'en jugeant néanmoins régulières les ordonnances fondées sur des pièces saisies lors d'une précédente visite réalisée dans les locaux des sociétés [5], [8], [8] Group et [9] Group lorsque le droit au recours effectif des sociétés [6], [4] et [3] n'avait pas été effectivement garanti en l'absence de notification, au début des opérations de visite et de saisies du 24 septembre 2020, des ordonnances d'autorisation ainsi que des procès-verbaux et des inventaires relatifs aux opérations diligentées en octobre 2018, le premier président a violé les articles L. 512-64 du code de la consommation, 6 et 13 de la Convention européenne des droits de l'homme et 591 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 33. Pour écarter le grief pris de l'atteinte au droit à un recours effectif des sociétés mises en cause, l'ordonnance attaquée énonce que les diverses ordonnances des juges des libertés et de la détention ont été régulièrement notifiées aux occupants des lieux respectivement visés par ces décisions. 34. Le premier président ajoute qu'aucun texte n'impose à l'administration de notifier par ailleurs les pièces annexées à sa requête, auxquelles se réfère le premier juge saisi dans sa décision. 35. Il retient ensuite que les sociétés [6], [4] et [3] n'étaient pas concernées par la procédure de 2018. 36. C'est à tort que le premier président a jugé que les sociétés susvisées n'étaient pas concernées, dès lors que, visées par une demande d'autorisation de procéder dans leurs locaux à des opérations de visite et de saisie, présentée en 2020, fondée notamment sur des pièces saisies au cours d'une précédente visite domiciliaire effectuée en 2018 chez un tiers, elles se trouvaient mises en cause au sens des articles L. 512-52 et suivants du code de la consommation. 37. L'ordonnance attaquée n'encourt néanmoins pas la censure, pour les motifs qui suivent. 38. Le procès-verbal et l'inventaire dressés à l'issue d'opérations antérieures doivent être annexés tant à la requête qu'à l'ordonnance d'autorisation du juge des libertés et de la détention, qui doit être notifiée au moment de la visite, assurant ainsi l'exercice du droit à un recours effectif de la personne mise en cause. 39. Tel est le cas en l'espèce, car il se déduit des motifs de l'ordonnance attaquée, comme la Cour de cassation est en mesure de s'en assurer, que les pièces concernées (précédente ordonnance, procès-verbal et « protocole » saisi), annexées à la requête et décrites dans celle-ci, étaient visées dans l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, qui en a, de plus, exposé la teneur dans sa décision. 40. Ainsi, le moyen n'est pas fondé. 41. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Q 22-83.315 F-D N° 50080 GM 11 JANVIER 2023 NON-ADMISSION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 11 JANVIER 2023 M. [H] [T] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 7e chambre, en date du 11 avril 2022, qui, pour conduite d'un véhicule après usage de stupéfiants, l'a condamné à 400 euros d'amende avec sursis. Un mémoire personnel a été produit. M. [T] a déclaré se désister de son pourvoi, par lettre reçue le 22 décembre 2022. Sur le rapport de M. Laurent, conseiller, et les conclusions de Mme Chauvelot, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 30 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Laurent, conseiller rapporteur, M. de Larosière de Champfeu, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision. Examen de la recevabilité du désistement 1. D'une part, le désistement de pourvoi doit être pur et simple. Il ne peut être assorti de réserves ou de conditions. 2. D'autre part, le demandeur ne peut déclarer se désister de son pourvoi après que le rapport a été fait à l'audience. 3. M. [T] déclare se désister, sous réserve, si nécessaire, de saisir à nouveau la Cour de cassation. 4. Par ailleurs, le rapport ayant été fait à l'audience du 30 novembre 2022, l'affaire a été mise en délibéré au 11 janvier 2023. 5. Dès lors, le désistement de M. [T] n'est pas recevable. Examen des moyens Vu l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : 6. Après avoir examiné tant la recevabilité du recours que les pièces de procédure, la Cour de cassation constate qu'il n'existe, en l'espèce, aucun moyen de nature à permettre l'admission du pourvoi. EN CONSÉQUENCE, la Cour : DÉCLARE le pourvoi NON ADMIS ; Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° S 22-80.925 F-D N° 00012 ODVS 4 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 Mme [L] [K], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, chambre 5-3, en date du 14 janvier 2022, qui, dans la procédure suivie contre M. [B] [D] du chef d'homicide involontaire, a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Coirre, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de Mme [L] [K], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Coirre, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le [Date décès 1] 2010, [Z] [F] est décédé des suites de ses blessures après être entré en collision avec l'engin agricole conduit par M. [B] [D]. 3. M. [D] a été déclaré coupable d'homicide involontaire par conducteur non titulaire du permis de conduire d'un véhicule terrestre à moteur. 4. Par jugement ultérieur, le tribunal correctionnel a condamné M. [D] à payer à Mme [K], compagne de la victime décédée, la somme de 1 108 522,99 euros au titre de son préjudice économique. 5. Mme [K], M. [D] et son assureur, la société [2], ont interjeté appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fixé à la somme de 257 228,34 euros le montant du capital représentatif alloué à Mme [K] au titre de son préjudice économique, alors « que le préjudice économique d'une victime par ricochet doit être intégralement indemnisé ; que le capital représentatif des revenus annuels viager perdus par le foyer se calcule en multipliant le prix de l'euro de rente par une somme qui représente la perte de revenus du foyer, elle-même calculée en déduisant des revenus perçus par le foyer avant le décès la part d'autoconsommation de la victime défunte ; que la cour d'appel, qui avait ainsi calculé la perte de revenus du foyer en appliquant aux revenus perçus une part d'autoconsommation de 40 %, devait multiplier la somme ainsi obtenue par le prix de l'euro de rente ; qu'en multipliant au contraire le prix de l'euro de rente par 40 % de la somme représentant la perte de revenus, elle-même calculée en retranchant 40 % du montant des revenus au titre de la part d'autoconsommation, la cour d'appel, qui n'a ainsi pas indemnisé l'intégralité du préjudice économique de la veuve, a violé le principe de la réparation intégrale du préjudice, ensemble les articles 1240 du code civil, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 1240 du code civil : 7. Le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties. 8. Pour infirmer le jugement et condamner M. [D] à payer à Mme [K], au titre du préjudice économique, la somme de 257 228,34 euros, l'arrêt attaqué retient un taux de 40 % correspondant à la part de consommation de la victime décédée qu'il déduit du revenu annuel global net imposable du foyer pour l'année 2009, soit 173 640 euros, pour évaluer à 96 227 euros la perte annuelle du foyer, déduction également faite des revenus subsistants de Mme [K] de 7 957 euros. 9. Le juge impute de nouveau le taux d'autoconsommation de 40 % de la victime décédée à la somme de 96 227 euros pour évaluer à 38 490,80 euros la perte annuelle patrimoniale à capitaliser à partir d'un taux de rente viagère de 28,279 euros. 10. Il soustrait enfin de la somme de 1 088 481,33 euros ainsi obtenue (38 490,80 x 28,279) celle de 831 252,99 euros réglée par la CPAM (1 088 481,33 - 831 252,99 = 257 228,34). 11. En se déterminant ainsi, en déduisant à deux reprises la part de consommation personnelle de la victime décédée, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé. 12. La cassation est par conséquent encourue. Portée et conséquences de la cassation 13. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la condamnation de M. [D] à payer à Mme [K] la somme de 257 228,34 euros en réparation de son préjudice économique. Les autres dispositions seront donc maintenues. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 14 janvier 2022, mais en ses seules dispositions relatives à la condamnation de M. [D] à payer à Mme [K] la somme de 257 228,34 euros en réparation de son préjudice économique, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre janvier deux mille vingt-trois.
INCA/JURITEXT000046990079.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° S 22-81.293 FS-D N° 00001 MAS2 4 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [F] [Z] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 3 février 2022, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'homicide et blessures involontaires, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure. Par ordonnance en date du 7 juillet 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi. Un mémoire personnel a été produit. Sur le rapport de M. Leblanc, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Aldebert, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Leblanc, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, M. Samuel, Mme Goanvic, MM. Sottet, Coirre, conseillers de la chambre, MM. Joly, Charmoillaux, Rouvière, conseillers référendaires, M. Aldebert, avocat général, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 31 mai 2015, les pompiers sont intervenus sur un incendie au domicile de [D] [V] et de son épouse, [T] [B]. Les deux filles mineures du couple ont été extraites du pavillon, blessées. Les deux parents sont décédés après leur transport à l'hôpital. 3. Une information a été ouverte sur ces faits. Le [1] ([1]) et plusieurs pompiers dont M. [F] [Z], ont été mis en examen des chefs, notamment, d'homicide et blessures involontaires. 4. Par requêtes, M. [Z] et un autre pompier ont demandé à la chambre de l'instruction d'annuler une contre expertise réalisée par M. [R], expert près la cour d'appel. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen est pris de la violation des articles 158 et 164 du code de procédure pénale. 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité de la contre-expertise, alors que les experts ne peuvent recevoir les déclarations de la partie civile nécessaires à l'exécution de leur mission que si le juge d'instruction ou le magistrat désigné par la juridiction les y a autorisés, avec l'accord de la partie intéressée et en présence de son avocat ou celui-ci dûment convoqué dans les conditions prévues par le deuxième alinéa de l'article 114 du code de procédure pénale, sauf renonciation écrite remise aux experts ; qu'en concédant que l'expert n'avait pas obtenu, de la part du juge d'instruction, l'autorisation expresse d'entendre les parties civiles, tout en considérant, d'une part, que la rencontre de l'expert chez les parties civiles « n'apparaît correspondre qu'à de simples échanges avec ces dernières et ne saurait permettre de retenir qu'il a recueilli des déclarations » et, d'autre part, que la note rédigée par la partie civile, et contenant plusieurs photographies, ne peut être assimilée à des déclarations au sens de l'article 164 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés. Réponse de la Cour Vu l'article 164 du code de procédure pénale : 7. Il résulte de ce texte que l'expert désigné ne peut recevoir, à titre de renseignement et pour le seul accomplissement de sa mission, les déclarations de la personne mise en examen, du témoin assisté ou de la partie civile, que si le juge d'instruction l'y a autorisé. 8. Pour écarter le moyen de nullité, selon lequel l'expert aurait recueilli, sans autorisation, les déclarations d'une partie civile et reçu de cette dernière une note accompagnée de photographies, l'arrêt attaqué énonce que seuls deux éléments relatifs à la partie civile ressortent de la lecture du rapport d'expertise, d'une part, la mention « Le 17 après-midi rencontre avec les Parties Civiles » et, d'autre part, la référence à un « Essai réalisé par le père des victimes sur une construction identique », daté du 14 janvier 2019, indiquant « Il m'a fallu modifier une fenêtre dans mon habitation, j'en ai donc profité pour chronométrer le temps d'extraction de la grille de défense (pose et modèle identique à celle de la salle de bain de chez ma fille). Je pensais mettre 2 minutes, alors que j'ai mis à peine 90 secondes sans pression de temps et sans effort particulier avec une simple massette ». 9. Les juges déduisent du premier de ces éléments que le terme retenu par l'expert de « rencontre avec les parties civiles » ne correspond qu'à de simples échanges et ne saurait permettre de retenir qu'il a recueilli leurs déclarations. 10. Ils relèvent quant au second de ces éléments que, daté du 14 janvier 2019, antérieur aux opérations expertales des 16 et 17 janvier 2019, il ne constitue qu'une simple note, accompagnée de photos, remise par le père de l'une des victimes à l'expert, auquel le juge d'instruction avait indiqué la possibilité de se faire remettre tout document, enregistrement, éléments techniques pouvant être utiles à l'exécution de sa mission. 11. Ils en déduisent que cette note ne peut être assimilée à des déclarations au sens de l'article 164 du code de procédure pénale, lesquelles n'y sont envisagées que dans leur acception orale. 12. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a violé le texte susvisé et le principe ci-dessus énoncé. 13. En effet, en organisant une rencontre avec les parties civiles pour échanger avec ces dernières, puis en intégrant à son rapport une note comportant les explications d'une d'entre elles pour les exploiter dans ses conclusions, l'expert qui a, ce faisant, procédé au recueil de déclarations sans y avoir été autorisé par le juge, a outrepassé les limites de la mission qui lui a été confiée. 14. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, en date du 3 février 2022, mais en ses seules dispositions ayant rejeté la requête en nullité de M. [F] [Z], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° C 22-82.131 F-D N° 00010 ODVS 4 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [R] [X] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 21 décembre 2021, qui, pour homicide et blessures involontaires aggravées et omission de porter secours, l'a condamné à cinq ans d'emprisonnement, l'interdiction de solliciter un permis de conduire pendant cinq ans, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Goanvic, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [R] [X], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Goanvic, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [R] [X] a été poursuivi des chefs sus visés. 3. Le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable de ces faits, a retenu l'altération de ses facultés mentales et l'a notamment condamné à cinq ans d'emprisonnement. 4.M. [X] et le ministère public ont relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur les premier et troisième moyens et sur le deuxième moyen pris en sa seconde branche. 5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen, en sa première branche, critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné à une peine d'emprisonnement délictuel de cinq ans et a décerné mandat de dépôt à son encontre, alors : « 1°/ que si la personne qui était atteinte, au moment des faits, d'un trouble psychique ou neuropsychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable, la juridiction doit toutefois tenir compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime, celle-ci étant réduite du tiers si est encourue une peine privative de liberté ; qu'en l'espèce, pour fixer à 5 ans la peine d'emprisonnement prononcée à l'encontre de M. [X], la cour d'appel a énoncé, par motif réputé adopté, que compte tenu de l'altération des facultés mentales de M. [X], la peine d'emprisonnement encourue est non pas de dix ans, mais de sept ans ; qu'en se prononçant ainsi quand, après réduction du tiers, la peine d'emprisonnement encourue était de 6 ans et 2/3 d'une année, la cour d'appel, qui s'est déterminée en considération d'un montant erroné de la peine encourue, peu important que la peine prononcée soit inférieure au maximum légal, a violé les dispositions des articles 111-3, 132-1, 122-1, 221-6 et 221-6-1 du code pénal et 591 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 132-1 du code pénal : 7. Il se déduit de ce texte que la juridiction détermine la nature, le quantum et le régime des peines qu'elle prononce en considération des limites fixées par la loi. 8. Pour condamner le prévenu à cinq ans d'emprisonnement, l'arrêt attaqué énonce que les premiers juges ont exactement retenu l'altération de ses facultés mentales. 9. Les juges relèvent qu'en application de l'article 122-1 du code pénal, le prévenu encourt non pas la peine de dix ans d'emprisonnement, mais celle de sept ans. 10. En retenant que le prévenu encourt sept ans d'emprisonnement, alors que la peine encourue était de quatre-vingt mois, soit six ans et huit mois, la cour d'appel, qui s'est déterminée en considération d'un montant erroné de la peine encourue, n'a pas justifié sa décision. 11. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Portée et conséquence de la cassation 12. La cassation sera limitée à la peine d'emprisonnement, toutes autres dispositions étant expressément maintenues. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes mais en ses seules dispositions ayant prononcé une peine d'emprisonnement, en date du 21 décembre 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nîmes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° K 22-82.069 F-D N° 00009 ODVS 4 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [N] [X] et la société [1] ont formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France, chambre correctionnelle, en date du 8 juillet 2021, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 29 janvier 2019, n° 18-80.985), dans la procédure suivie contre le premier du chef de blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de Mme Goanvic, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [N] [X] et de la société [1], les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [K] [S], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Goanvic, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée, en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [K] [S] a été blessé dans un accident de la circulation dont M. [N] [X], assuré auprès de la société [1], a été déclaré coupable. 3. Statuant ultérieurement sur intérêts civils, le tribunal correctionnel a, notamment, fixé le préjudice extra patrimonial de M. [S] à la somme de 276 653,80 euros, et condamné M. [X] à lui payer la somme de 121 853,80 euros après déduction de l'indemnité provisionnelle de 154 800 euros. 4. M. [X] et son assureur ont relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement qui avait condamné M. [X] à payer à M. [S] la somme de 121 853,80 euros après déduction de l'indemnité provisionnelle de 154 800 euros, condamné M. [S] à verser la seule somme de 22 555,74 euros à la société [1] et rejeté in extenso le surplus des demandes indemnitaires sollicitées par la société [1], alors « que la rente versée à la victime d'un accident du travail indemnise, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité et, d'autre part, le déficit fonctionnel permanent ; qu'en l'absence de perte de gains professionnels ou d'incidence professionnelle, cette rente indemnise nécessairement le poste de préjudice personnel du déficit fonctionnel permanent ; qu'en confirmant le jugement sur le montant de l'indemnisation due à M. [S] et en limitant à 22 555,74 euros la créance de remboursement de la société [1], cependant qu'il résultait de ses propres constatations que la partie civile avait perçu une rente d'accident du travail d'un montant de 213 180,74 euros qui, faute de pertes de gains professionnels ou d'incidence professionnelle, absorbait entièrement son déficit fonctionnel permanent fixé par les premiers juges à la somme de 190 625 euros, de sorte qu'aucune indemnité ne revenait à la victime de ce chef, et que la société [1] pouvait prétendre au remboursement de la totalité de cette somme indûment versée à la victime en exécution du jugement de première instance, la cour d'appel a violé les articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, dans leur rédaction issue de l'article 25 de la loi du 21 décembre 2006, L. 434-1 et L. 434-2 du code de la sécurité sociale et le principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime. » Réponse de la Cour 6. Pour confirmer le jugement sur le montant de l'indemnisation due à M. [S] en limitant à 22 555,74 euros la créance de la société [1], l'arrêt attaqué énonce que le montant de la rente attribuée à la victime au titre du risque accident du travail s'élève à 213 180,74 euros et constate que ce montant correspond à la somme estimée par les appelants dans leurs conclusions. 7. Le juge retient qu'en l'absence d'indemnisation d'un quelconque préjudice professionnel, la rente versée à la victime par l'organisme social ne peut qu'indemniser le préjudice personnel de la victime, c'est à dire le déficit fonctionnel permanent. 8. Il en déduit que cette rente de 213 180,74 euros, s'impute sur le montant de l'indemnisation du poste de préjudice du déficit permanent, fixé en première instance à 190 625 euros. 9. Il conclut qu'il y a lieu de faire droit à la demande de la société [1], mais seulement en ce qu'elle demande d'imputer la rente accident du travail sur le poste de préjudice fonctionnel permanent alloué à M. [S], de condamner ce dernier à verser le reliquat de 22 555,74 euros à la société [1] et de rejeter les autres demandes de l'assureur. 10. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a pris en compte les prestations versées au titre de la rente d'accident de travail et fait usage des modalités de calcul conformes aux règles applicables aux prestations ouvrant droit au recours de l'organisme social, a justifié sa décision. 11. Ainsi, le moyen doit être écarté. 12. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° M 22-81.449 F-D N° 00007 ODVS 4 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [N] [O] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Papeete, chambre correctionnelle, en date du 20 mai 2021, qui, pour homicide involontaire, l'a condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Goanvic, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [N] [O], et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Goanvic, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. [V] [C] a été transportée inconsciente dans un dispensaire où elle a été prise en charge par M. [N] [O], médecin urgentiste. Elle est décédée le lendemain d'une intoxication polymédicamenteuse. 3. A l'issue d'une information judiciaire, M. [O] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel du chef d'homicide involontaire. Il a été condamné à six mois d'emprisonnement avec sursis. 4. M. [O] et le ministère public ont relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le deuxième moyen 5. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen 6. Par arrêt du 10 août 2022, la Cour de cassation a dit n'y avoir lieu de transmettre au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité portant sur l'article 388 du code de procédure pénale. Il en résulte que le grief est devenu sans objet. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [O] à la peine de six mois d'emprisonnement assortie du sursis, alors « qu'en condamnant M. [O] à une peine de six mois d'emprisonnement assortie du sursis sans motiver sa décision au regard de sa personnalité et de sa situation matérielle, familiale et sociale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 485, 485-1 du code de procédure pénale, ensemble l'article 132-1 du code pénal. » Réponse de la Cour 8. Pour condamner le prévenu à six mois d'emprisonnement avec sursis l'arrêt attaqué énonce que le casier judiciaire de M. [O] ne porte trace d'aucune condamnation. 9. Le juge relève que la désinvolture de ce professionnel expérimenté justifie que soit prononcée une peine d'emprisonnement de six mois. 10. Il ajoute qu'il est accessible au sursis, lequel est justifié en l'espèce, s'agissant d'une faute involontaire, pour, tout en le sanctionnant, favoriser son amendement. 11. En statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision. 12. En effet, en l'absence d'autres éléments portés à leur connaissance, les juges qui prononcent une peine d'emprisonnement avec sursis en matière correctionnelle peuvent, sans méconnaître les dispositions de l'article 132-19 du code pénal, fonder leur appréciation de la personnalité du prévenu sur le seul casier judiciaire. 13. Ainsi le moyen n'est pas fondé. 14. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Y 22-81.782 F-D N° 00008 ODVS 4 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 Mme [I] [R] épouse [U], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 4-12, en date du 15 février 2022, qui, dans la procédure suivie contre M. [F] [P] des chefs d'homicide et blessures involontaires, a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires, en demande et en défense, ont été produits. Sur le rapport de Mme Goanvic, conseiller, les observations de la SCP Gaschignard, avocat de Mme [I] [U] [R], les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société [1] et les conclusions de M. Croizier, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Goanvic, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Dang Van Sung, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Mme [I] [R] a été blessée dans un accident de la circulation dont M. [F] [P], assuré par la société [1], a été déclaré coupable. 3. Statuant ultérieurement sur les intérêts civils, le tribunal a notamment condamné M. [P] à payer, à Mme [R], 382 613,63 euros en réparation de ses préjudices, dont 34 438,31 euros au titre des dépenses de santé futures. 3. Mme [R] et la société [1] ont relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le second moyen 4. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le premier moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a évalué le préjudice de Mme [R] au titre des dépenses de santé futures à la somme de 52 722,43 euros et l'a ainsi déboutée de sa demande en paiement à ce titre d'un montant total de 89 141,14 euros, alors : « 1°/ qu'il appartient aux juges du fond de fixer l'étendue du préjudice et de procéder à son évaluation indépendamment des prestations versées par les organismes sociaux ; qu'en refusant de mettre à la charge de M. [P] et de son assureur le coût des comprimés de Cacit indispensables au traitement médical de Mme [R] aux motifs inopérants « qu'il n'est pas établi [qu'ils] ne sont pas pris en charge par la sécurité sociale », et sans déterminer le préjudice de la victime, la cour d'appel a violé les articles L. 376-1, alinéa 4, du code de la sécurité sociale et 31 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985, ensemble le principe de la réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime ; 2°/ que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le payement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en rejetant les demandes de Mme [R] au titre des comprimés de Cacit indispensables à son traitement médical aux motifs qu'il n'était pas établi qu'ils n'étaient pas pris en charge par la sécurité sociale, quand, en l'absence de déclaration de créance des organismes sociaux à ce titre, il appartenait à M. [P] et son assureur, tenus d'indemniser ce chef de préjudice, de justifier du paiement de ces frais ou de la subrogation des organismes sociaux dans les droits de la victime, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et a violé l'article 1353 du code civil, ensemble l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985. » Réponse de la Cour Vu les articles 1240 du code civil et 593 du code de procédure pénale : 6. Selon le premier de ces textes, le préjudice résultant d'une infraction doit être réparé dans son intégralité, sans perte ni profit pour aucune des parties, et dans les limites des conclusions de celles-ci. 7. Selon le second, tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux chefs péremptoires des conclusions des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 8. Pour rejeter la demande de la partie civile, au titre des dépenses de santé futures, de remboursement d'un traitement par comprimés de calcium, l'arrêt attaqué énonce que, selon l'expert, Mme [R] présente une situation médicale complexe en raison, notamment, du syndrome du grêle court, conséquence des blessures dont elle a été victime, et que cet état nécessite un traitement viager par calcium et magnésium dont il n'est pas établi qu'il n'est pas pris en charge par la sécurité sociale et la mutuelle de la partie civile. 9. Les juges en déduisent qu'au vu des certificats médicaux, ordonnances et factures produites, le reste à charge annuel se limite à 2 099,03 euros, somme capitalisée viagèrement, soit 51 203,73 euros selon les motifs et 52 722,43 euros selon le dispositif de l'arrêt. 10. En se déterminant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés. 11. En effet, alors qu'il résultait de ses propres constatations que l'état de santé de la victime nécessitait un traitement à vie de calcium, fût-il non remboursé par l'organisme social ou la mutuelle de celle-ci, il lui appartenait, dans la limite des conclusions des parties, d'en évaluer le coût et de réparer ce préjudice dans son intégralité. 12. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 15 février 2022, mais en ses seules dispositions ayant rejeté la demande de remboursement du traitement viager par calcium et magnésium et fixé les demandes de santé futures à 52 722,43 euros, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° J 22-81.700 F-D N° 00041 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 M. [N] [M] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 6e section, en date du 15 février 2022, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction déclarant irrecevable sa constitution de partie civile contre personne non dénommée du chef de violences. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de M. [N] [M], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. M. [N] [M] a porté plainte et s'est constitué partie civile pour des faits de violences volontaires commises sur sa personne le 1er août 2004 au sein de l'hôpital [1] à [Localité 2] par deux agents de service. 3. Par ordonnance du 13 juillet 2021, le doyen des juges d'instruction a déclaré sa plainte irrecevable. 4. M. [M] a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de M. [N] [M], alors : « 1°/ qu'il résulte de l'article 222-13 du code pénal, que les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours sont punies de cinq ans d'emprisonnement et 75 000 € d'amende lorsqu'elles sont commises dans deux des circonstances prévues aux 1° et suivants de cet article ; qu'aux termes de l'article 222-13-7° du même code, constitue une des circonstances précitées le fait que ces violences aient été commises par une personne chargée d'une mission de service public dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ou de sa mission, tandis qu'aux termes de l'article 222-13-8° du même code, constitue également une des circonstances précitées le fait que ces violences aient été commises par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice ; qu'en l'espèce, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l'exposant, la chambre de l'instruction a énoncé que M. [M] dénonce des faits constitutifs d'une contravention ; qu'en statuant ainsi, tout en relevant qu'au soutien de sa plainte et de son mémoire, M. [M] exposait avoir été agressé par deux agents de l'hôpital [1], ce dont il résulte que les faits dénoncés par le plaignant étaient susceptibles de caractériser des violences volontaires ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours mais commises par plusieurs personnes chargées d'une mission de service public, agissant dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, de sorte qu'en cet état, les agissements ainsi mentionnés dans la plainte relevaient d'une qualification correctionnelle, la chambre de l'instruction a omis de tirer les conséquences légales de ses propres constatations ; 2°/ qu'il résulte de l'article 222-13 du code pénal, que les violences ayant entraîné une incapacité de travail inférieure ou égale à huit jours sont punies de sept ans d'emprisonnement et 100 000 € d'amende lorsqu'elles sont commises dans trois des circonstances prévues aux 1° et suivants de cet article ; qu'en l'espèce, aux termes de son mémoire régulièrement déposé le 17 janvier 2022 à 13 h 24 au greffe de la chambre de l'instruction, l'exposant a notamment fait valoir d'une part qu'au moment de l'agression qu'il a subie, il était une personne vulnérable à raison de son âge, au sens de l'article 222-13-2° du code pénal (mémoire, page 10), d'autre part que les auteurs de l'agression étaient des agents de l'hôpital, comme tels des personnes chargées d'une mission de service public, au sens de l'article 222-13-7°du même code (mémoire, page 20), enfin qu'il avait été agressé par plusieurs personnes, au sens de l'article 222-13-8° du même code, s'agissant de deux agents du SMUR, (mémoire, pages 5 et 8) ; que, dès lors, en se déterminant par la circonstance que les faits dénoncés par le plaignant étaient constitutifs d'une contravention, pour en déduire qu'il n'était pas recevable, en application de l'article 79 du code de procédure pénale, à solliciter l'ouverture d'une information pénale, sans répondre à ces chefs péremptoires du mémoire de l'exposant faisant valoir qu'au moins trois des circonstances aggravantes prévues à l'article 222-13 du code pénal étaient en l'espèce réunies, ce qui, indépendamment de la durée de l'incapacité totale de travail causée par les violences litigieuses, était de nature à caractériser un des délits prévus par ce dernier texte et non la contravention de l'article R. 624-1 du même code, la chambre de l'instruction a violé l'article 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 85 et 593 du code de procédure pénale : 6. Il résulte du premier de ces textes que toute personne qui se prétend lésée par un crime ou un délit peut en portant plainte se constituer partie civile devant le juge d'instruction compétent. 7. Tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 8. Pour confirmer l'irrecevabilité de la plainte avec constitution de partie civile de M. [M], la chambre de l'instruction retient que l'intéressé, qui dénonce des faits constitutifs d'une contravention, ne peut, par une constitution de partie civile, provoquer l'ouverture d'une information, droit réservé, par l'article 79 du code de procédure pénale, au procureur de la République. 9. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction, dont la décision équivalait, d'ailleurs, à un refus d'informer hors des cas limitativement prévus par l'article 86, alinéa 4, du code de procédure pénale, a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés, et n'a pas justifié sa décision. 10. En effet, d'une part, la plainte dénonçait des faits de violences susceptibles d'être aggravés a minima par la circonstance de pluralité d'auteurs, pouvant entraîner une qualification délictuelle sur le fondement de l'article 222-13 du code pénal, et la chambre de l'instruction ne pouvait se prononcer, sans instruction préalable, sur le caractère délictuel ou contraventionnel des faits dénoncés. 11. D'autre part, la chambre de l'instruction n'a pas répondu au mémoire régulièrement déposé devant elle par le plaignant, qui soutenait notamment que les circonstances aggravantes prévues à l'article 222-13, 2°, 7° et 8° du code pénal étaient constituées lors de son agression. 12. La cassation est dès lors encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 15 février 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° A 22-81.301 F-D N° 00025 ECF 5 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 La direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, partie poursuivante, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-14, en date du 16 février 2022, qui, pour transfert de capitaux sans déclaration, a condamné M. [T] [E] à une amende douanière et a ordonné une mesure de restitution. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Le 3 avril 2018, M. [T] [E] a été contrôlé par les agents des douanes à l'aéroport [2] alors qu'il allait embarquer dans un avion à destination de [Localité 1]. 3. Sur interpellation, il a déclaré transporter environ 10 000 euros et n'avoir procédé à aucune déclaration. 4. La fouille de sa sacoche a permis aux agents des douanes de découvrir une somme totale de 11 100 euros en espèces. 5. Les sommes découvertes ont été saisies et l'administration des douanes a fait citer M. [E] devant le tribunal correctionnel du chef de transfert sans déclaration de capitaux d'un montant supérieur à 10 000 euros. 6. Par jugement en date du 15 septembre 2020, le tribunal correctionnel a déclaré le prévenu coupable des faits qui lui étaient reprochés, l'a condamné au paiement d'une amende douanière de 5 550 euros et a ordonné la confiscation des sommes saisies. 7. M. [E] a interjeté appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a infirmé le jugement déféré sur la confiscation des sommes saisies et, statuant à nouveau, a rejeté la demande de confiscation de ces sommes formée par l'administration des douanes et a ordonné la restitution à M. [E] des sommes placées sous scellés n° 1097661, 1097662 et 1097663, alors : « 1°/ qu'en décidant de ne pas prononcer la confiscation des sommes illégalement transférées par M. [E] au motif que leur montant dépassait de manière minime le seuil de déclaration de 10 000 euros, quand elle ne pouvait libérer le prévenu, en considération de l'ampleur et de la gravité de l'infraction commise, que de la confiscation des moyens de transport ou des objets ayant servi à masquer la fraude, mais non de la confiscation des marchandises de fraude correspondant, en l'espèce, aux sommes d'argent qui n'avaient pas été déclarées par M. [E], la cour d'appel a violé l'article 369, § 1, du code des douanes ; 2°/ que le juge répressif doit obligatoirement prononcer la confiscation des sommes d'argent illégalement transférées par le prévenu dont il est plausible qu'il a commis une infraction douanière durant la consignation de ces sommes, dès lors que celles-ci ont une origine illicite ; qu'en décidant de ne pas prononcer la confiscation des sommes illégalement transférées par M. [E] au motif inopérant que leur montant dépassait de manière minime le seuil de déclaration de 10 000 euros, tout en relevant, non seulement que M. [E] avait été condamné pour un délit douanier durant la consignation des sommes, mais aussi qu'il n'avait jamais justifié de l'origine licite des fonds, ce dont il résultait que ces sommes avaient une origine illicite et devaient en conséquence être obligatoirement confisquées, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé les articles L. 152-4 du code monétaire et financier et 369, § 4, du code des douanes. » Réponse de la Cour 9. Pour dispenser le prévenu de la confiscation des sommes saisies, l'arrêt attaqué énonce qu'au vu de l'absence de déclaration d'espèces pour un dépassement minime de la somme de 10 000 euros, même si la confiscation de l'ensemble des sommes saisies est possible au regard du fait que M. [E] a été condamné pour un délit douanier (importation en contrebande de marchandises prohibées) par arrêt en date du 7 octobre 2016 confirmé par un arrêt de la Cour de cassation du 27 juin 2018, donc au temps de la consignation des sommes, et qu'il n'a jamais justifié de l'origine licite des fonds, la cour ne prononcera pas la confiscation des sommes saisies. 10. En statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision. 11. En effet, d'une part, les juges n'ont fait qu'user de la faculté qu'ils tiennent de l'article L. 152-4 du code des douanes de ne pas ordonner la confiscation des sommes transférées en méconnaissance des obligations déclaratives énoncées notamment à l'article L. 152-1 dudit code et saisies, y compris lorsque les conditions pour prononcer cette mesure sont remplies. 12. D'autre part, ni l'article 369, 4°, du code des douanes, qui ne vise que les marchandises dangereuses pour la santé ou la moralité et la sécurité publiques, les marchandises contrefaisantes, ainsi que celles qui sont soumises à des restrictions quantitatives, ni l'article 131-21, alinéa 7, du code pénal, au demeurant inapplicable en l'espèce, ne rendent obligatoire la confiscation de sommes d'argent, quand bien même elles seraient d'origine illicite. 13. Ainsi, le moyen doit être écarté. 14. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° A 21-83.160 F-D N° 00018 ECF 5 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 La banque [1] et M. [C] [U] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-12, en date du 6 avril 2021, qui, pour blanchiment aggravé, a condamné, la première, à 20 000 000 d'euros d'amende et cinq ans d'interdiction professionnelle, le second, à deux ans d'emprisonnement avec sursis et 150 000 euros d'amende, et a prononcé sur les intérêts civils. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Pauthe, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la banque [1] et de M. [C] [U], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'Etat français, et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pauthe, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La banque [1] et M. [C] [U] ont été poursuivis, la première pour blanchiment aggravé, le second pour blanchiment aggravé et violation par une personne physique d'une interdiction prononcée pour le contrôle judiciaire d'une personne morale. 3. Par jugement du 6 juillet 2017, le tribunal correctionnel a déclaré les prévenus coupables de ces infractions. Le tribunal correctionnel a également prononcé sur l'action civile, déclarant recevables les constitutions de partie civile de la direction générale des finances publiques et de l'Etat français, et condamnant la banque [1] et M. [U] à verser des dommages-intérêts à l'Etat français. 4. Les prévenus, le ministère public, ainsi que l'Etat français et la direction générale des finances publiques ont fait appel de cette condamnation. La direction générale des finances publiques s'est par la suite désistée de son appel, antérieurement à l'audience devant la cour d'appel. Examen des moyens Sur le premier moyen et le quatrième moyen, pris en ses trois premières branches, proposés pour M. [U], ainsi que le second moyen, pris en ses première, deuxième et troisième branches, proposé pour la banque [1] 5. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le deuxième moyen proposé pour M. [U] Énoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [U] à la peine de deux ans d'emprisonnement avec sursis et à 150 000 euros d'amende, alors : « 1°/ qu'en matière correctionnelle, toute peine doit être motivée en tenant compte de la gravité des faits, de la personnalité de leur auteur et de sa situation personnelle ; qu'en prononçant à l'encontre de M. [U] une peine d'emprisonnement, même avec sursis, sans s'expliquer ni sur la personnalité ni sur la situation personnelle de M. [U], autrement que par l'absence de casier judiciaire et le fait qu'il ne se remettrait pas en cause, la cour d'appel a violé les dispositions des articles 130-1, 132-1 et 132-20 du code pénal ; 2°/ que la juridiction qui prononce une peine d'amende doit motiver sa décision au regard des circonstances de l'infraction, de la personnalité et de la situation personnelle de son auteur, en tenant compte de ses ressources et de ses charges ; qu'en fixant le quantum de l'amende prononcée à l'encontre M. [U] à la somme de 150 000 euros, sans précision ni sur ses ressources, ni sur ses charges et sans aucunement s'expliquer sur sa situation personnelle et sur sa personnalité, autrement qu'à mentionner l'absence de casier judiciaire et le fait qu'il ne se remettrait pas en cause, la cour d'appel, à laquelle il appartenait de rechercher ces éléments pour déterminer la juste peine, sans pouvoir faire grief au prévenu qui a comparu devant elle et qu'elle pouvait interroger de ne pas les avoir spontanément fournis, a violé les dispositions des articles 132-1, 132-20 et 543 du code pénal. » Réponse de la Cour 7. Pour condamner M. [U] à deux ans d'emprisonnement avec sursis et 150 000 euros d'amende, l'arrêt attaqué énonce, notamment, que ce dernier est âgé de 57 ans, est de nationalité lettone, marié et père d'une fille demeurant en Grande-Bretagne, qu'il n'a ni résidence ni attache professionnelle ou privée en France, et qu'il n'a pas été condamné définitivement par une juridiction française. 8. Les juges relèvent également que le prévenu exerçait au sein de la banque les fonctions de « chairman de l'executive board », qu'aucune pièce sur l'état actuel de sa fortune n'a été communiquée à la cour, qu'il dispose d'une partie, certes minime, du capital de la banque, qu'aucun empêchement d'ordre financier n'a été documenté ou invoqué en cause d'appel, et que le cautionnement acquitté de 200 000 euros sera affecté au paiement de l'amende suivant I'article 142 du code de procédure pénale. 9. En statuant ainsi, par des motifs dont il résulte qu'elle s'est prononcée au regard de la personnalité de son auteur, de ses revenus et de ses charges, selon les indications qui ont pu apparaître au cours des débats, l'intéressé n'alléguant pas avoir fourni des éléments qui n'auraient pas été pris en compte, la cour d'appel a justifié sa décision sans méconnaître les dispositions légales invoquées. 10. Dès lors, le moyen doit être écarté. Sur le troisième moyen proposé pour M. [U] et le premier moyen proposé pour la banque [1] Énoncé des moyens 11. Le moyen proposé pour M. [U] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a accueilli la constitution de partie civile de l'Etat français et a condamné M. [U] à payer à l'Etat français, partie civile, solidairement avec d'autres prévenus la somme de 4 000 000 d'euros à titre de dommages intérêts, alors : « 1°/ que l'Etat ne peut agir en justice sans représentation ; qu'il s'agit d'une règle d'ordre public qui doit être relevée d'office ; qu'en s'abstenant de déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l'Etat français qui n'agissait, en l'espèce, par le truchement d'aucun représentant, la cour d'appel a violé le principe précité ; 2°/ qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 252 du livre des procédures fiscales, les comptables publics exercent « les actions liées indirectement au recouvrement des créances fiscales et qui, dès lors, n'ont pas une cause étrangère à l'impôt au sens de l'article 38 de la loi n° 55-366 du 3 avril 1955 » ; ainsi le recouvrement des impôts est confié aux comptables publics compétents ; en conséquence, l'action civile exercée pour obtenir une indemnisation du préjudice découlant d'une infraction de blanchiment de fraude fiscale entre dans ce champ matériel, et ne se conçoit que par le truchement d'un comptable public ; que l'Etat n'ayant été dans la présente procédure ni représenté, ni a fortiori représenté par un comptable public, son action devait être d'office déclarée irrecevable ; la cour d'appel a violé l'article L. 252 du livre des procédures fiscales précité. » 12. Le moyen proposé pour la banque [1] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a accueilli la constitution de partie civile de l'Etat français, alors : « 1°/ que l'Etat ne peut agir en justice sans représentation ; qu'il s'agit d'une règle d'ordre public qui doit être relevée d'office ; qu'en s'abstenant de déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l'Etat français qui n'agissait, en l'espèce, par le truchement d'aucun représentant, la cour d'appel a exposé sa décision à la censure, en violation du principe précité et des articles 591 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ qu'aux termes du second alinéa de l'article L. 252 du livre des procédures fiscales, les comptables publics exercent « les actions liées indirectement au recouvrement des créances fiscales et qui, dès lors, n'ont pas une cause étrangère à l'impôt au sens de l'article 38 de la loi n° 55-366 du 3 avril 1955 recouvrement des impôts est confié aux comptables publics compétents par arrêté du ministre chargé du budget » ; qu'en conséquence, l'action civile exercée pour obtenir une indemnisation du préjudice découlant d'une infraction de blanchiment de fraude fiscale entre dans ce champ matériel, et ne se conçoit que par le truchement d'un comptable public ; que l'Etat n'ayant été ici ni représenté, ni a fortiori représenté par un comptable public, son action devait être d'office déclarée irrecevable ; la cour d'appel a violé le texte précité. » Réponse de la Cour 13. Les moyens sont réunis. 14. Faute d'avoir été proposés devant les juges du fond, les moyens, mélangés de fait, sont nouveaux et, comme tels, irrecevables. 15. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; FIXE à 2 500 euros la somme globale que M. [U] et la banque [1] devront payer à l'Etat français en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° H 19-87.735 F-D N° 00019 ECF 5 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 MM. [K] [A], [S] [V], [EF] [U], [G] [FI], et [PF] [IM] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete, en date du 1er mars 2016, qui, dans l'information suivie contre MM. [AI] [E], [YB] [W], [F] [X], [BD] [M], [VV] [B], [K] [A], [S] [V], Mmes [RI] [J], [XW] [T], épouse [N], MM. [H] [L], [O] [SL], [G] [P] [FI], [D] [R], Mme [Z] [GL], M. [I] [EU], [PF] [IM], [C] [BE], Mme [OC] [YZ], M. [Y] [MZ], des chefs d'abus de confiance, abus de biens sociaux, corruption active et passive, favoritisme, prise illégale d'intérêts, recel, blanchiment, destruction de preuves, faux et usage, subornation de témoins, a rejeté la demande de constatation d'extinction de l'action publique par prescription. Le procureur général près la cour d'appel de Papeete, Mme [RI] [J], MM. [EF] [U], [H] [L], [G] [FI], [PF] [IM], [Y] [MZ], et l'Office des postes et télécommunications de Polynésie française, partie civile, ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete, en date du 19 novembre 2019, qui, dans la même information, a constaté la prescription de l'action publique à l'égard de MM. [A], [V], [BE], [EU], [FI], Mme [GL], MM. [W], [IM], [SL], [E] et [X]. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires, personnel et ampliatifs, des mémoires en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. [EF] [U], les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de MM. [K] [A] et [S] [V], les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocats de M. [G] [FI] et les conclusions de M. Valat, avocat général, après l'intervention de M. l'avocat général, la parole a été à nouveau donnée aux avocats présents et en dernier lieu aux avocats des demandeurs, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, M. Valat, avocat général, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte des arrêts attaqués et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 7 mars 2007, l'Office des postes et télécommunications de Polynésie française (OPT) a porté plainte et s'est constitué partie civile du chef d'abus de confiance, en exposant qu'une société dirigée par M. [S] [V], chargée de percevoir et de lui reverser les recettes correspondant aux annonces publicitaires figurant dans l'annuaire téléphonique, avait détourné une part importante des sommes qui lui avaient été remises par les annonceurs. 3. Une information a été ouverte le 30 mars 2007 du chef d'abus de confiance, puis étendue supplétivement aux chefs d'abus de biens sociaux, corruption active et passive, favoritisme, recel de favoritisme et d'abus de biens sociaux, blanchiment, destruction de preuves, faux et usage, subornation de témoins, et jointe à deux procédures distinctes par ordonnances du juge d'instruction en date des 18 décembre 2009 et 2 décembre 2010. 4. Le réquisitoire définitif a été établi le 23 septembre 2011. 5. Le 1er février 2012, les juges d'instruction ont ordonné le renvoi devant le tribunal correctionnel, notamment, de MM. [K] [A], [V], Mme [RI] [J], MM. [H] [L], [G] [FI], [PF] [IM] et [Y] [MZ]. 6. Par jugement du 15 janvier 2013, le tribunal correctionnel a condamné, le premier, pour trafic d'influence passif et corruption active, à cinq ans d'emprisonnement, 10 000 000 de francs pacifique d'amende, et cinq ans d'interdiction des droits civils, civiques et de famille, le deuxième, pour abus de confiance, trafic d'influence actif, corruption active, recel, à cinq ans d'emprisonnement, 10 000 000 de francs pacifique d'amende, et cinq ans d'interdiction des droits civils, civiques et de famille, le cinquième, pour favoritisme et corruption passive, à quatre ans d'emprisonnement, 10 000 000 de francs pacifique d'amende, et cinq ans d'interdiction de toute fonction publique, le sixième, pour corruption passive, à deux ans d'emprisonnement dont un an avec sursis, 5 000 000 de francs pacifique d'amende, et cinq ans d'interdiction des droits civils, civiques et de famille, le septième, pour complicité d'abus de confiance, de favoritisme, de corruption, et de trafic d'influence, à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis, 2 000 000 de francs pacifique d'amende, et cinq ans d'interdiction de gérer, et a prononcé sur les intérêts civils. 7. Il a relaxé Mme [J] et M. [L]. 8. MM. [A], [V], [FI], [IM], ainsi que quatre autres prévenus, ont relevé appel de cette décision et le ministère public a formé des appels incidents, du 16 au 22 janvier 2013. 9. M. [MZ], ainsi que l'OPT, partie civile, ont formé appel des dispositions civiles du jugement le 24 janvier 2013. 10. Par arrêt définitif du 24 juin 2014, la cour d'appel a prononcé la nullité de l'ordonnance de renvoi rendue par les juges d'instruction le 1er février 2012 ainsi que du jugement du 15 janvier 2013, en toutes leurs dispositions, et ordonné le renvoi de la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction de l'instruction aux fins de régularisation. 11. Par arrêt du 16 avril 2015, la cour d'appel a déclaré irrecevables les citations à comparaître devant elle délivrées, à la demande du procureur général, à MM. [A], [V], [FI], [IM], [MZ] et à quatre autres personnes mises en examen. 12. Le 7 juin 2015, le procureur de la République a saisi le juge d'instruction de réquisitions aux fins de renvoi devant le tribunal correctionnel de MM. [A], [V], [FI], [IM], [MZ] et de huit autres personnes mises en examen. 13. Le 1er mars 2016, la chambre de l'instruction a rejeté les demandes de MM. [A], [V], [FI], [EU] et [IM], aux fins de constatation de la prescription de l'action publique. 14. Le 19 mars 2018, le procureur de la République a saisi le juge d'instruction, en application des dispositions de l'article 82 du code de procédure pénale, de réquisitions tendant à l'établissement d'une ordonnance de règlement. À défaut de réponse dans le délai légal prévu par cet article, il a saisi la chambre de l'instruction par requête du 27 mars 2018. Examen de la recevabilité des pourvois formés par M. [EF] [U] 15. Les pourvois de M. [U], qui n'était pas partie aux arrêts attaqués, sont irrecevables. Déchéance des pourvois formés par MM. [V], [FI] et [IM] contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 1er mars 2016 16. MM. [V], [FI] et [IM] n'ont pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par leur avocat, un mémoire exposant leurs moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de les déclarer déchus de leurs pourvois par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale. Déchéance des pourvois formés par Mme [J], MM. [L], [FI], [IM], [MZ] et l'OPT, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 19 novembre 2019 17. Mme [J], MM. [L], [FI], [IM], [MZ] et l'OPT, n'ont pas déposé dans le délai légal, personnellement ou par leur avocat, un mémoire exposant leurs moyens de cassation. Il y a lieu, en conséquence, de les déclarer déchus de leurs pourvois par application de l'article 590-1 du code de procédure pénale. Sur les moyens du pourvoi formé par M. [A] contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 1er mars 2016 18. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen du pourvoi formé par le procureur général contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 19 novembre 2019, pris en ses troisième et quatrième branches 19. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le moyen du pourvoi formé par le procureur général contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 19 novembre 2019, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 20. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a constaté l'acquisition de la prescription de l'action publique à l'égard de MM. [A], [V], [BE], [EU], [FI], Mme [GL], MM. [W], [IM], [SL], [E] et [X], alors : 1°/ que constitue un acte de poursuite ou d'instruction interruptif de prescription, l'acte qui a pour objet de constater une infraction, d'en découvrir ou d'en convaincre les auteurs ; que toute décision statuant sur la nullité d'une ordonnance de renvoi constitue un acte d'instruction interruptif de prescription ; qu'en l'espèce, il résulte de la procédure que dans son arrêt du 24 juin 2014, la cour d'appel de Papeete a prononcé la nullité de l'ordonnance de renvoi et du jugement qui a suivi et ordonné le renvoi de la procédure au ministère public ; qu'en affirmant que cet arrêt ne constitue pas un acte interruptif de prescription, la chambre de l'instruction a violé les articles 2, 7, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ que l'exercice d'une voie de recours constitue un acte de poursuite interruptif de prescription ; qu'en l'espèce, il ressort de la procédure que plusieurs prévenus, ainsi que l'OPT, partie civile, ont, par actes des 16 et 24 janvier 2013, interjeté appel du jugement du tribunal correctionnel de Papeete en date du 15 janvier 2013 ; qu'en ne tenant aucun compte de ces actes d'appel et en jugeant qu'aucun acte interruptif de prescription n'était intervenu dans le délai de trois ans à compter du réquisitoire définitif du 23 septembre 2011, la chambre de l'instruction a violé les articles 2, 7, 8, 591 et 593 du code de procédure pénale. Réponse de la Cour Vu les articles 7 et 8 du code de procédure pénale, dans leur rédaction antérieure à la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 : 21. Il résulte de ces textes que tout acte de poursuite ou d'instruction, ainsi que tout jugement ou arrêt, interrompt le cours de la prescription de l'action publique. 22. Pour constater la prescription de l'action publique, l'arrêt attaqué énonce notamment qu'il convient d'examiner si, compte tenu de l'annulation de l'ordonnance de renvoi et du jugement du 15 janvier 2013, des actes interruptifs de prescription sont intervenus entre le 23 septembre 2011, date du réquisitoire définitif qui est le dernier acte interruptif de prescription antérieur à l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel annulée, et le 23 septembre 2014. 23. Ils relèvent que l'arrêt du 24 juin 2014 ayant annulé I'ordonnance de renvoi et le jugement du 15 janvier 2013 est définitif, que sa lecture fait ressortir que le ministère public n'a pas manifesté à l'audience la volonté de poursuivre l'exercice de l'action publique, et que cet arrêt a renvoyé la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction d'instruction aux fins de régularisation. 24. Ils retiennent que cette décision n'est autre que la sanction de la non-conformité requise, qui trouve sa légitimité au regard des dispositions de l'article 385, alinéa 2, du code de procédure pénale selon lesquelles, si l'ordonnance n'a pas été rendue conformément aux dispositions de l'article 184, le tribunal renvoie la procédure au ministère public pour lui permettre de saisir à nouveau la juridiction d'instruction aux fins de régularisation, et ne peut être considérée comme un acte de poursuite interruptif de prescription. 25. Ils ajoutent qu'en conséquence, l'arrêt du 24 juin 2014 n'est pas un acte interruptif de prescription, et que le dernier acte de poursuite interruptif de prescription est constitué par le réquisitoire définitif du 23 septembre 2011. 26. Ils en concluent qu'aucun acte interruptif de prescription n'est intervenu entre le 23 septembre 2011 et le 23 septembre 2014, le seul acte postérieur, à savoir le réquisitoire du ministère public tendant à la clôture de l'information, étant daté du 7 juin 2015. 27. En se déterminant ainsi, alors que le cours de la prescription de l'action publique avait été successivement interrompu par les appels formés du 16 janvier 2013 au 22 janvier 2013 par les prévenus et le ministère public à l'encontre du jugement du tribunal correctionnel en date du 15 janvier 2013, peu important que celui-ci ait été ultérieurement annulé, puis par l'arrêt de la chambre de l'instruction du 24 juin 2014 ayant prononcé l'annulation de I'ordonnance de renvoi rendue par le juge d'instruction et du jugement du 15 janvier 2013, arrêt qui n'a pas été frappé de pourvoi et qui, même erroné, est revêtu de l'autorité de la chose jugée, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé. 28. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : Sur les pourvois formés par M. [U] : Les DÉCLARE IRRECEVABLES ; Sur les pourvois formés par MM. [V], [FI] et [IM] contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 1er mars 2016 : CONSTATE la déchéance des pourvois ; Sur le pourvoi formé par M. [A] contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 1er mars 2016 : Le DÉCLARE NON ADMIS ; Sur les pourvois formés par Mme [J], MM. [L], [FI], [IM], [MZ] et l'Office des postes et télécommunications de Polynésie française, contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 19 novembre 2019 : CONSTATE la déchéance des pourvois ; Sur le pourvoi formé par le procureur général contre l'arrêt de la chambre de l'instruction du 19 novembre 2019 : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete, en date du 19 novembre 2019, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Papeete et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° X 21-86.906 F-D N° 00027 ECF 5 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 MM. [U] [N] [W] et [O] [T] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 18 novembre 2021, qui, pour escroquerie aggravée, a condamné, le premier, à quatre ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis probatoire, 15 000 euros d'amende, une interdiction définitive de gérer, le second, à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis probatoire, 30 000 euros d'amende, a prononcé une mesure de confiscation et a statué sur les intérêts civils. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. de Lamy, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet et de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocats de M. [U] [N] [W] et de M. [O] [T], les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de l'Etat français et de la direction générale des finances publiques, et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. de Lamy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Par jugement du 27 janvier 2019, le tribunal correctionnel a déclaré MM. [U] [N] [W] et [O] [T] coupables d'escroquerie commise en bande organisée et a prononcé une peine. 3. MM. [N] [W] et [T], notamment, ont relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur les premiers moyens proposés pour MM. [N] [W] et [T] Enoncé des moyens 4. Le moyen proposé pour M. [N] [W] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déclaré coupable d'escroquerie commise en bande organisée, alors « que selon l'article 406 du code de procédure pénale, le président ou l'un des assesseurs par lui désigné, après avoir constaté son identité et donné connaissance de l'acte qui a saisi le tribunal correctionnel, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; que ces dispositions sont applicables devant la chambre des appels correctionnels par l'effet des dispositions de l'article 512 du même code ; qu'aux termes de l'article 802 du code de procédure pénale, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ne peut prononcer la nullité que lorsque celle-ci a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne ; qu'en cas de notification tardive, cette atteinte est caractérisée lorsque le prévenu prend la parole avant d'avoir reçu cet avertissement ; qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que M. [N] [W], qui a comparu en qualité de prévenu, assisté de son avocat, à l'audience de la cour d'appel du 29 septembre 2021, n'a été informé de son droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire qu'après s'être exprimé sur les motifs de son appel ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles 406, 512 et 802 du code de procédure pénale. » 5. Le moyen proposé pour M. [T] critique l'arrêt attaqué en ce qu'il l'a déclaré, en qualité de gérant de fait de la société [1], coupable du chef d'escroquerie à la TVA en bande organisée, alors « que le prévenu doit être informé de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ; que la protection des droits de la défense recherchée par ce texte n'est assurée que si le prévenu est informé de ce droit à l'ouverture de l'audience, après la constatation de l'identité du prévenu et, en tout état de cause, avant que la parole ne lui soit donnée ; qu'en l'espèce, M. [T] n'a été informé de son droit à garder le silence qu'après avoir été invité à indiquer les motifs de son appel ; que dès lors l'arrêt ne satisfait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale et viole les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 406, 512, 802, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 6. Les moyens sont réunis. Vu les articles 406, 512 et 802 du code de procédure pénale : 7. Selon l'article 406 du code de procédure pénale, le président ou l'un des assesseurs par lui désigné, après avoir constaté son identité et donné connaissance de l'acte qui a saisi le tribunal correctionnel, informe le prévenu de son droit, au cours des débats, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. 8. Ces dispositions sont applicables devant la chambre des appels correctionnels par l'effet de l'article 512 du même code. 9. Aux termes de l'article 802 du code de procédure pénale, en cas de violation des formes prescrites par la loi à peine de nullité ou d'inobservation des formalités substantielles, toute juridiction, y compris la Cour de cassation, qui est saisie d'une demande d'annulation ne peut prononcer la nullité que lorsque la violation a eu pour effet de porter atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne. 10. En l'absence de l'information exigée par l'article 406 précité, cette atteinte est nécessairement caractérisée. 11. En cas de notification tardive, cette atteinte est également caractérisée lorsque le prévenu prend la parole avant d'avoir reçu cet avertissement. 12. Il résulte des mentions de l'arrêt attaqué et des notes d'audience que MM. [N] [W] et [T], qui ont comparu en qualité de prévenus, assistés de leurs avocats, à l'audience de la cour d'appel du 29 septembre 2021, n'ont été informés du droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui leur sont posées ou de se taire qu'après qu'ils ont indiqué les motifs de l'appel. 13. En statuant ainsi, alors que les prévenus ont pris la parole lors des débats avant qu'il ait été procédé à la notification, la cour d'appel a méconnu le sens et la portée des textes susvisés. 14. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés pour MM. [N] [W] et [T], la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 18 novembre 2021, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° V 21-86.237 F-D N° 00017 ECF 5 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 M. [G] [X] et la société [4] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la cour d'appel de Caen, chambre correctionnelle, en date du 31 mars 2021, qui a condamné, le premier, pour banqueroute, recours au service d'un travailleur dissimulé, obstacle à l'accomplissement des devoirs d'un inspecteur du travail, exercice illégal de la profession de vétérinaire, violation d'une interdiction de gérer, marchandage, à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis, 30 000 euros d'amende, trois ans d'interdiction de gérer, la seconde, pour travail dissimulé, recel, marchandage, à 30 000 euros d'amende, a ordonné une mesure de confiscation, et a prononcé sur les intérêts civils. Les pourvois sont joints en raison de la connexité. Un mémoire commun aux demandeurs et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. d'Huy, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de M. [G] [X] et de la société [4], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. d'Huy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La société [3], ayant pour gérant M. [G] [X], a fait l'objet, sur intervention de l'URSSAF de l'Orne, d'une procédure de redressement judiciaire par jugement du tribunal judiciaire en date du 5 décembre 2011, avant que ne soit prononcée sa liquidation judiciaire par cette même juridiction, le 12 juin 2012, l'état de cessation des paiements étant fixé au 17 novembre 2011. 3. Par courrier du 27 juin 2012, le mandataire judiciaire a porté plainte auprès du procureur de la République pour détournement d'actifs. 4. Parallèlement, M. [X] a acquis, le 20 juillet 2009, la nue-propriété d'un haras situé à [Localité 5] (61), sa mère disposant de l'usufruit, et y a installé la société [4], société créée avec sa mère et dont il était le gérant, ayant pour activité l'élevage, la prise en pension, l'achat et la vente de chevaux. 5. Au terme d'une enquête préliminaire, M. [X] et la société [4] ont été cités devant le tribunal correctionnel des chefs précités. 6. Par jugement du 18 décembre 2018, le tribunal correctionnel a requalifié les faits de recours aux services d'une personne exerçant un travail dissimulé, reprochés à M. [X] et la société [4], en exécution d'un travail dissimulé, les a respectivement déclarés coupables de ce dernier chef et du surplus des faits reprochés, et condamné, le premier, à trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis, 30 000 euros d'amende, trois ans d'interdiction de gérer et à une mesure de confiscation, la seconde, à 30 000 euros d'amende. 7. M. [X], la société [4] et le procureur de la République ont fait appel de cette décision. Examen des moyens Sur les premier au huitième moyens 8. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission des pourvois au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le neuvième moyen Enoncé du moyen 9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à aménagement ab initio de la partie ferme de l'emprisonnement, alors : « qu'il résulte des articles 132-19 et 132-25 du code pénal et 464-2 du code de procédure pénale que si la peine d'emprisonnement ferme est supérieure à six mois et inférieure ou égale à un an au sens de l'article D. 48-1-1 du code de procédure pénale, son aménagement est le principe et le juge ne peut l'écarter que s'il constate que la situation ou la personnalité du condamné ne permettent pas son prononcé ou s'il relève une impossibilité matérielle de le faire. Dans ce cas, le juge doit motiver spécialement sa décision, de façon précise et circonstanciée, au regard des faits de l'espèce, de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale du condamné ; qu'en l'espèce, pour dire n'y avoir lieu à aménagement ab initio de la partie ferme d'un an de la peine d'emprisonnement prononcée à l'encontre de M. [X], la cour d'appel se borne à relever qu'un aménagement n'est pas possible car ce dernier « a déclaré habiter en Belgique à [Localité 8] » ; qu'en prononçant par ces seuls motifs, sans établir avoir interrogé le prévenu, comparant à l'audience, sur l'ensemble des éléments leur permettant d'apprécier si un aménagement de peine, au moins dans son principe était possible, dès lors qu'il était établi que M. [X] était propriétaire d'un haras en France, et sans avoir, le cas échéant, ordonné des investigations complémentaires, les juges d'appel n'ont pas satisfait à l'obligation spéciale de motivation qui leur est prescrite par la loi, en violation des articles 132-19 et 132-25 du code pénal, 464-2 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la cour 10. Après avoir prononcé à l'encontre de M. [X] une peine de trois ans d'emprisonnement dont deux ans avec sursis, la cour d'appel retient que celui-ci a déclaré habiter à [Localité 8] en Belgique et qu'il n'est donc pas possible d'envisager un aménagement de peine ab initio. 11. En l'état de ces énonciations la cour d'appel a justifié sa décision. 12. D'une part, M. [X] ne fait pas état d'un domicile autre que celui qu'il a déclaré en Belgique, ni d'une quelconque possibilité d'un éventuel aménagement d'une peine privative de liberté en France. 13. D'autre part, si certaines condamnations et décisions, définies à l'article 764-2 du code de procédure pénale, notamment les condamnations à des mesures de probation, ainsi que les peines privatives de liberté régies par les articles 728-10 à 728-70 du même code, peuvent donner lieu à une exécution transfrontalière, aucune disposition légale ne prévoit une telle exécution s'agissant des peines privatives de liberté ayant fait l'objet d'un aménagement de peine sous écrou, de sorte qu'il n'est effectivement pas possible de faire exécuter une peine aménagée à l'étranger. 14. En conséquence, le moyen n'est pas fondé. Mais sur le dixième moyen Enoncé du moyen 15. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a ordonné la confiscation en valeur à l'encontre de M. [X] de la nue-propriété de la ferme équestre sise au [Localité 6], sur les communes de [Localité 5] et [Localité 7], et des terres agricoles sises à [Localité 5], [Localité 7], [Localité 1] et [Localité 2], sur le fondement de l'article 131-21, alinéa 9, du code pénal, alors : « 1°/ qu'il incombe au juge qui décide de confisquer un bien en valeur de préciser quel est le fondement du caractère confiscable du bien auquel le bien confisqué se substitue et de s'assurer que la valeur de ce bien n'excède pas celle de l'instrument, de l'objet ou du produit de l'infraction ; que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier sa décision ; qu'en se bornant à ordonner la confiscation en valeur de la nue-propriété de la ferme équestre et des terres agricoles saisies au seul visa de l'article 131-21, alinéa 9, du code pénal, sans préciser ni sa valeur, sinon par la référence à son prix d'acquisition en 2009, ni le fondement du caractère confiscable du bien auquel le bien confisqué se substitue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 131-21 et 132-1 du code pénal, ensemble les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ qu'il est constant que le montant d'une confiscation pénale en valeur ne doit pas excéder le montant du produit des infractions dont le prévenu a été déclaré coupable ; qu'il résulte en l'espèce de l'ordonnance portant saisie pénale des biens immobiliers litigieux du 11 mai 2017 visée à l'arrêt attaqué, que ces biens avaient été évalués par les services de la direction départementale des finances publiques de l'Orne à « 1 368 800 euros, soit 958 160 euros pour la nue-propriété », la valeur vénale ayant été évaluée, par ces mêmes services à la somme de 1 711 000 euros ; que sur le montant du produit des infractions dont M. [X] a été déclaré coupable, l'arrêt attaqué fait état des « sommes détournées et [de] la valeur des biens détournés au moins égale à 200 000 euros, somme à laquelle il convient d'ajouter la dispersion des gains obtenus hors impôts et cotisations au travers de l'exercice de travail dissimulé de vétérinaire durant presque 4 ans et le gain obtenu sur le coût réduit de la main-d'oeuvre lié aux travaux de rénovation hors réfection de la couverture et aux travaux agricoles confiés à l'entreprise de [J] [Z] [B], soit un total d'au moins 500 000 à 700 000 euros » ; qu'en prononçant ainsi la confiscation en valeur d'un bien dont la valeur excédait largement le montant par ailleurs incertain, contestable et approximatif du produit des infractions dont le prévenu a été déclaré coupable, la cour d'appel a méconnu l'article 131-21 du code pénal et les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ; 3°/ que le produit du délit de travail dissimulé correspond à la seule économie réalisée par la fraude ; qu'en retenant au titre du produit du délit de travail dissimulé de vétérinaire les « gains obtenus hors impôts et cotisations », quand ce produit ne pouvait être constitué du montant des gains obtenus mais de la seule économie résultant de l'absence de versement des sommes dues au titre de l'impôt et des cotisations sociales, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 131-21 du code pénal et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 131-21 du code pénal et 593 du code de procédure pénale : 16. Selon le premier de ces textes, la peine complémentaire de confiscation porte notamment sur les biens qui sont l'instrument, l'objet ou le produit direct ou indirect de l'infraction, à l'exception des biens susceptibles de restitution à la victime, et la confiscation peut être ordonnée en valeur. 17. Il incombe en conséquence au juge qui décide de confisquer un bien en valeur notamment de préciser quel est le fondement du caractère confiscable du bien auquel le bien confisqué se substitue, et de s'assurer que la valeur de ce bien n'excède pas celle de l'instrument, de l'objet ou du produit de l'infraction. 18. Il résulte du second que tout jugement ou arrêt doit comporter les motifs propres à justifier la décision. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 19. Pour prononcer la confiscation en valeur du produit de l'infraction portant sur une ferme équestre et des terrains agricoles, l'arrêt attaqué énonce que le site du haras de Montfort sur lequel était exploité la société [4] a été acquis le 20 juillet 2009 par M. [X] et sa mère pour un prix de 750 000 euros, cette dernière disposant de l'usufruit évalué à 300 000 euros et M. [X] de la nue-propriété évaluée à 450 000 euros. 20. Les juges relèvent que la rénovation de cette ferme équestre a été réalisée et surtout financée au travers d'une multitude d'infractions commises par M. [X] en son nom propre et ès qualités de gérant de la société [3] et de la société [4]. 21. Ils précisent que les sommes détournées et la valeur des biens détournés sont au moins égales à 200 000 euros, somme à laquelle il convient d'ajouter la dispersion des gains obtenus hors impôts et cotisations au travers de l'exercice du travail dissimulé de vétérinaire durant presque quatre ans et le gain obtenu sur le coût réduit de la main d'oeuvre lié aux travaux de rénovation hors réfection de la couverture et aux travaux agricoles confiés à une entreprise, soit un total d'au moins 500 000 à 700 000 euros. 22. La cour d'appel conclut qu'au regard de la valeur des biens en nue-propriété dont est propriétaire M. [X], cette valeur ne pouvant être augmentée des aménagements et rénovations opérés depuis l'acquisition, ceux-ci ayant été financés en grande partie par les infractions commises, il n'est pas disproportionné de prononcer la confiscation en valeur de la nue-propriété des biens en question appartenant à M. [X]. 23. En prononçant ainsi, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 24. En effet, d'une part, pour déterminer la valeur des biens susceptibles de confiscation en valeur, la cour d'appel devait se baser sur leur valeur au moment de la confiscation. 25. D'autre part, en indiquant que le produit des infractions était d'au moins 500 000 à 700 000 euros, elle n'a pas suffisamment déterminé le montant de ce produit confiscable en valeur. 26. Enfin, elle ne s'est pas assurée que la valeur des biens confisqués n'excédait pas celle du produit des infractions poursuivies et, si cette valeur était supérieure, qu'elle était cantonnée à la hauteur de ce produit. 27. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Caen en date du 31 mars 2021, mais en ses seules dispositions relatives à la confiscation de la nue-propriété de la ferme équestre et des terres agricoles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Caen et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Z 22-81.116 F-D N° 00024 ECF 5 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 M. [U] [X], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 1er février 2022, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction refusant d'informer sur sa plainte des chefs d'abus de biens sociaux, recel, présentation de comptes inexacts, escroquerie et abus de voix ou de pouvoir. Des mémoires, ampliatif et additionnel, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de M. [U] [X], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [U] [X] a porté plainte et s'est constitué partie civile auprès du juge d'instruction des chefs susvisés. 3. Il a exposé qu'il était initialement actionnaire à 50 % de la société Autre voyage, agence de voyage spécialisée dans l'organisation de pèlerinages à La Mecque. Cette société avait connu en 2013 une baisse d'activité qui avait conduit à l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire. Un administrateur provisoire ayant été nommé par le tribunal de commerce, une augmentation de capital a été décidée pour refinancer la société, à laquelle M. [X] avait refusé de participer, entraînant une dilution de sa participation dans la société. 4. M. [X], mettant en cause les dirigeants de la société Autre voyage, a indiqué que la baisse d'activité de la société en 2013 était due au fait que la société, qui traitait jusqu'alors en direct avec les autorités saoudiennes pour négocier le quota de pèlerins qu'elle prenait en charge, avait abandonné cette pratique et eu recours, alors qu'elle n'en avait pas légalement la possibilité, à un intermédiaire fictif, la société [1] (la société [1]), qui aurait facturé ses prestations à un coût près de six fois supérieur à celui exposé antérieurement. Il a dénoncé le recours à un intermédiaire sans doute fictif, produisant des contrats passés dans le même temps par la société Autre voyage directement avec des prestataires saoudiens. 5. A la suite des réquisitions de non-informer du procureur de la République, le juge d'instruction a entendu M. [X] et procédé à certaines vérifications. 6. Le 28 mai 2021 le juge d'instruction a rendu une ordonnance disant n'y avoir lieu à informer en l'état des chefs d'infractions dénoncées par M. [X]. 7. Celui-ci a formé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance de refus d'informer rendue par le juge d'instruction, alors : « 1°/ que ne peuvent motiver une ordonnance de refus d'informer des éléments de pur fait qu'il appartient à l'information de faire apparaître ou vérifier ; qu'en statuant par des motifs fondés exclusivement sur des constatations et appréciations de fait que seule une information aurait permis de faire apparaître ou vérifier, la chambre de l'instruction a violé l'article 86 du code de procédure pénale ; 2°/ que la juridiction d'instruction, régulièrement saisie d'une plainte avec constitution de partie civile a, quelles que soient les réquisitions prises par le ministère public, le devoir d'instruire dans la mesure qu'il appartient et que cette obligation ne cesse que si, pour des causes affectant l'action publique elle-même, les faits ne peuvent légalement comporter une poursuite ou si, à supposer ces faits démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale ; que le refus d'informer doit être justifié par la preuve de ce que les faits n'ont, à l'évidence, pas été commis ; qu'en prononçant une ordonnance de refus d'informer, en considérant que les faits n'avaient, à l'évidence, pas été commis, d'une part, et en se fondant pour cela sur des investigations complémentaires menées par le magistrat instructeur, qui excluaient une telle évidence, d'autre part, la chambre de l'instruction s'est contredite et ainsi violé l'article 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu les articles 85 et 86 du code de procédure pénale : 9. Il résulte de ces textes que la juridiction d'instruction régulièrement saisie d'une plainte avec constitution de partie civile a le devoir d'instruire, quelles que soient les réquisitions du ministère public. Cette obligation ne cesse, suivant les dispositions de l'alinéa 4 de l'article 86, que si, pour des causes affectant l'action publique elle-même, les faits ne peuvent comporter légalement une poursuite ou si, à supposer les faits démontrés, ils ne peuvent admettre aucune qualification pénale. 10. Pour confirmer l'ordonnance de refus d'informer du juge d'instruction, l'arrêt attaqué énonce que, s'agissant du prétendu manque d'effectivité des prestations réalisées par la société [1], l'administrateur provisoire de la société Autre Voyage a explicité que les relations entre celle-ci et la société [1], qui était son correspondant local en Arabie Saoudite depuis 2011, étaient nécessaires afin d'organiser les démarches dans ce pays et garantir la solvabilité à l'égard des fournisseurs locaux. 11. Il relève que les documents communiqués par l'administrateur judiciaire à l'appui de ses affirmations et les pièces du cabinet d'expertise-comptable viennent corroborer le fait que la société Autre voyage a bien pris en charge trois-cent-soixante pèlerins au cours du second semestre 2013 afin d'effectuer le pèlerinage du Hadj et qu'aucun élément probant versé en procédure ne permet de douter de la réalité des prestations fournies par la société Autre voyage et son correspondant saoudien. 12. S'agissant de la prétendue surfacturation des prestations, l'arrêt attaqué énonce que l'examen des éléments analytiques comptables spécifiques aux pèlerinages des années 2012 et 2013 de la société Autre voyage fait ressortir que le coût des pèlerinages supporté par cette société (comprenant les prestations de la société [1]) était en 2012 de 1 843 000 euros et en 2013 de 1 765 000 euros et qu'il ressort de tous les documents provenant de la procédure collective que les allégations de M. [X] imputant les difficultés financières de la société en 2013 à une surfacturation des prestations de la société [1] sont sans fondement dès lors que l'année 2013 a vu une baisse importante du chiffre d'affaires de la société liée notamment aux retards pris dans l'organisation des pèlerinages et à la baisse du nombre de pèlerins. 13. Il relève que l'organisation du Hadj en 2013, loin de grever les comptes, a permis à la société Autre voyage de dégager sur ce poste un résultat net positif. 14. Il retient que ces documents font ressortir que ce sont la baisse du chiffre d'affaires et le poids des charges dites fixes qui ont grevé les comptes de la société en 2013 et ont engendré un résultat net négatif s'agissant de l'ensemble de l'activité de la société cette année-là. 15. Les juges ajoutent qu'en tout état de cause, il découle de l'ensemble des développements qui précèdent qu'aucun des éléments constitutifs de l'infraction d'abus de biens sociaux ne dispose de la moindre base factuelle, qu'il s'agisse de l'absence de réalité des facturations, de l'existence de surfacturations ou de tout autre élément objectif pouvant matérialiser un des éléments de ce délit, aucune autre qualification pénale n'apparaissant en outre devoir s'appliquer aux faits dénoncés par la partie civile. 16. En se déterminant ainsi, par des motifs dont il résulte qu'elle s'est prononcée sur le fond même de l'affaire, en s'appuyant sur des faits en contradiction avec les allégations de la plainte dont seule une information aurait pu éventuellement établir l'exactitude, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 17. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les autres moyens de cassation proposés, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 1er février 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° E 21-87.442 F-D N° 00023 ECF 5 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 La [1], partie poursuivante, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris, chambre 2-13, en date du 25 novembre 2021, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de M. [S] [X], Mme [B] [I], épouse [X], M. [T] [I] et Mme [L] [E], épouse [I], du chef notamment de blanchiment douanier. Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la [1], les observations de la SCP Ricard, Bendel-Vasseur, Ghnassia, avocat de M. [S] [X], Mme [B] [I], épouse [X], M. [T] [I] et Mme [L] [E], épouse [I], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. A compter de septembre 2013, la [1] (la [1]) a procédé à des investigations sur les activités de M. [S] [X] et son épouse Mme [B] [I], à la suite d'un renseignement selon lequel ce couple collectait d'importantes sommes en espèces provenant d'activités de contrebande de produits textiles auprès de grossistes, pour les transférer ensuite à l'étranger, sous couvert de fausses identités et via des bureaux de transferts électroniques. 3. Ont notamment été opérées des surveillances, au cours desquelles les enquêteurs ont indiqué avoir vu les époux [X], de manière quotidienne, se rendre dans des sociétés de grossistes ainsi qu'auprès d'établissements de transfert d'argent. 4. Le 28 novembre 2013, les agents des douanes ont exposé avoir vu les époux [X] se rendre au domicile de M. [T] [I], frère de Mme [X] et de son épouse, Mme [L] [E]. M. [X], porteur d'un sac en bandoulière semblant relativement lourd, était ressorti quelques minutes plus tard avec son sac manifestement plus rempli qu'à l'arrivée, avant de se rendre à l'adresse de la société [2], puis de procéder à quelques allers-retours auprès de différents magasins. 5. Les agents des douanes ont procédé au contrôle de l'intéressé et découvert la somme de 3 955 euros dans son portefeuille, son sac renfermant quant à lui une somme totale de 150 000 euros. 6. Ils ont alors procédé à la visite des domiciles de M. et Mme [X] et M. et Mme [I]. Des visites domiciliaires ont également été menées au sein de sociétés de transfert de fonds, dont les représentants ont confirmé, bordereaux à l'appui, que M. [X] leur avait déposé des sommes destinées à être transférées en Chine. 7. M. et Mme [X], ainsi que M. et Mme [I] ont été placés en retenue douanière. 8. L'enquête de la [1] a fait l'objet d'un reportage télévisé. 9. L'enquête judiciaire qui a suivi a été confiée au service national de la douane judiciaire. 10. A l'issue des investigations douanières et judiciaires, M. et Mme [X], ainsi que M. et Mme [I], ont été cités des chefs de blanchiment douanier, blanchiment et opération de banque effectuée à titre habituel par une personne autre qu'un établissement de crédit. 11. Par jugement en date du 9 juillet 2018, rendu par défaut, le tribunal correctionnel a déclaré les prévenus coupables des faits qui leur étaient reprochés et les a condamnés, chacun, à une peine d'emprisonnement de quatre ans, ainsi qu'à l'interdiction du territoire français pour une durée de dix ans. 12. Les époux [X] et [I] ont également été condamnés solidairement au paiement d'une amende douanière de 37 446 581 euros et la confiscation de scellés pour un total de 481 925 euros a été ordonnée. 13. Les prévenus ont formé opposition à cette décision. 14. Par jugement contradictoire en date du 25 septembre 2019, après avoir annulé une partie de la procédure, le tribunal correctionnel a relaxé les prévenus, ordonné des restitutions et rejeté les demandes de l'administration des douanes. 15. L'administration des douanes et le ministère public ont formé appel de cette décision. Sur la recevabilité du pourvoi contestée en défense 16. Le mémoire en défense fait valoir que la déclaration de pourvoi n'indique pas l'identité de la personne ayant formé le pourvoi au nom de la [1]. 17. Il résulte de la déclaration de pourvoi que, conformément aux dispositions de l'article 576 du code de procédure pénale, un inspecteur, agent poursuivant de la [1] a signé cette déclaration et que le greffier, qui l'a établie, a attesté la qualité du signataire. 18. Au surplus, la signature figurant sur la déclaration de pourvoi est identique à celles de la déclaration d'appel et du mémoire produit en appel au nom de l'administration des douanes par M. [M] [P], inspecteur à la [1]. 19. Il en résulte que le pourvoi et le mémoire sont recevables. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche 20. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen, pris en ses autres branches Enoncé du moyen 21. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a annulé, parmi les procès-verbaux établis par la [1], les PV n° 693 à 708 et les pièces annexes non numérotées, le PV n° 709 et les pièces jointes A1 et A2, le PV n° 710 et les pièces jointes A1, A2 et A3, les PV n° 711 à 713, le folio 2 à compter des mots : « nous y avons observé les faits suivants » du PV n° 714, les PV n° 715 à 722 et les pièces annexes non numérotées, le paragraphe intitulé : « concernant l'observation de l'activité de [B] [X] et de [S] [X] » dans les folios 2 à 5 et les folios 6 à compter du paragraphe : « confirmation de l'utilisation du boîtier téléphonique IMEI portant le numéro 864722013286850 par le couple [B] [I]/[S] [X] et de contacts téléphoniques avec les grossistes chinois », 7 et 8 du PV n° 723, le PV n° 727 et ses annexes non numérotées, les PV n° 728 à 731, le PV non numéroté du 3 décembre 2013 de remise à receveur des sommes saisies et le PV non numéroté du 3 décembre 2013 de constatation d'erreur matérielle quant aux sommes saisies, ainsi que la totalité des procès-verbaux établis par le [4] et a rejeté la demande de supplément d'information présentée par le conseil de M. et Mme [X], alors : « 2°/ qu'en annulant la majeure partie des procès-verbaux établis par des agents de la [1] et, de manière subséquente, la totalité des procès-verbaux établis par des agents du [4] aux motifs que les premiers auraient été dressés en présence de journalistes et auraient constitué le support nécessaire des seconds, tout en relevant que rien ne permettait en l'état de déterminer à partir de quelle date les journalistes avaient été présents, ce dont il résultait qu'il n'était pas possible de s'assurer que des journalistes étaient présents lors de l'établissement des procès-verbaux par les agents de la [1], la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 2, 9 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 11 et 28 du code de procédure pénale ; 3°/ qu'en constatant que rien ne permettait en l'état de déterminer à partir de quelle date les journalistes avaient été présents, tout en affirmant, par ailleurs, qu'il serait avéré sans conteste que les journalistes avaient filmé, voire enregistré, outre les opérations de surveillance et filatures, les réunions internes à la [1] et interviewé les enquêteurs et que tout porterait à croire que les procès-verbaux antérieurs à celui qui avait relaté l'interpellation de M. [X] avaient été effectués en partie, voire en totalité avec la présence des journalistes, caméra au poing, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ; 4°/ qu'en relevant que « tout porte à croire » que les procès-verbaux antérieurs à celui qui avait relaté l'interpellation de M. [X] avaient été effectués « en partie, voire en totalité » avec la présence des journalistes, caméra au poing, la cour d'appel, qui a ainsi été dans l'incapacité d'affirmer avec certitude que des procès-verbaux auraient été établis en présence de journalistes et de préciser avec exactitude quels étaient les procès-verbaux qui auraient été dressés en présence de journalistes, a entaché sa décision de motifs tout à la fois dubitatifs et ambigus en violation de l'article 593 du code de procédure pénale ; 5°/ qu'en refusant d'ordonner un supplément d'information pour déterminer à quel moment les journalistes avaient été présents aux motifs qu'il se heurterait à l'ancienneté du reportage et à la possibilité que les journalistes aient été présents mais n'aient pas filmé dans de bonnes conditions, tout en relevant que seule la communication des rushes du reportage, sous couvert d'un supplément d'information, aurait permis de vérifier à quel moment les journalistes avaient été présents, ce dont il résultait qu'elle devait ordonner ce supplément d'instruction dont elle reconnaissait elle-même la nécessité, la cour d'appel a violé les articles 591 et 593 du code de procédure pénale ; 6°/ qu'en affirmant que les procès-verbaux n° 709 et 710 relatant respectivement l'audition de M. [R], gérant de la société [2], et l'audition de M. [Z], employé de la société [3], devaient être annulés, dès lors qu'ils auraient été en lien, sur un plan intellectuel et d'un point de vue chronologique, avec les actes précédents qui avaient été annulés, sans rechercher si ces actes constituaient le support nécessaire et exclusif de ces deux procès-verbaux d'audition, seul cas dans lequel ceux-ci devaient être annulés de manière subséquente, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 174, 385 et 802 du code de procédure pénale. ». Réponse de la Cour Sur le moyen, pris en ses deuxième, troisième, quatrième et cinquième branches 22. Pour confirmer l'annulation des procès-verbaux établis par la [1] avant le 28 novembre 2013 en raison de la présence de journalistes lors des investigations menées, l'arrêt attaqué relève qu'aucun procès-verbal soumis à l'examen judiciaire ne porte mention de la présence de journalistes et que les visites domiciliaires ont été faites sous le régime de la flagrance, donc sans nécessité d'un quelconque assentiment de la part des personnes mises en cause et retenues. 23. Il énonce que rien ne permet en l'état de déterminer à partir de quelle date les journalistes ont été présents et que, concrètement, seule la communication des rushes du reportage, sous couvert d'un supplément d'information, aurait permis à la cour de vérifier à quel moment les journalistes ont été présents. 24. Il retient que ce supplément d'information, sollicité également par le conseil des époux [X], et écarté par les premiers juges, se heurte toutefois à l'ancienneté du reportage ainsi qu'à la possibilité que les journalistes aient été présents mais n'aient pas filmé dans de bonnes conditions. 25. Les juges ajoutent qu'il résulte en tout état de cause d'un des commentaires en voix off du reportage que celui-ci a « duré plus d'un an », le renseignement anonyme datant de septembre 2013 et que les journalistes ont filmé, voire enregistré, outre les opérations de surveillance et filatures, les réunions internes à la [1] et interviewé les enquêteurs, en vertu d'une véritable « immersion » selon le terme utilisé dans le reportage. 26. Ils constatent également que les agents des douanes ont été filmés pendant qu'ils préparaient le contrôle des époux [X], prévu pour deux jours plus tard, le 28 novembre 2013. 27. Ils exposent qu'il en découle la nullité des procès-verbaux n° 714 à 722, relatant des investigations antérieures au 28 novembre 2013 mais aussi celle du procès-verbal n° 727, la demande d'information faite à la sociétré [3], établissement de transfert de fonds, étant à mettre en lien avec la surveillance qui a permis de mettre en évidence les noms et adresses des bureaux de transfert électronique et qu'il est indifférent de dire que les procès-verbaux sont antérieurs au procès-verbal relatant l'interpellation de M. [X] en présence de journalistes, ou encore, qu'ils relèvent du pouvoir général d'obtention de documents par les agents des douanes en vertu de l'article 65 du code des douanes. 28. La cour d'appel en conclut que tout porte à croire, sachant que la [1] a refusé de communiquer les rushes malgré la sommation délivrée par le conseil des époux [X], que ces procès-verbaux ont été effectués en partie voire en totalité avec la présence des journalistes, caméra au poing, le « Protocole d'accord pour la réalisation d'un reportage », pièce obtenue par les époux [X] en réponse à leur sommation de communiquer les rushes, n'apportant aucune limitation à la présence des journalistes. 29. En statuant ainsi, par des motifs relevant de son appréciation souveraine, dont il résulte que, d'une part, le supplément d'information sollicité n'est plus possible, d'autre part, les éléments qui lui ont été soumis permettent d'affirmer la présence des journalistes lors des actes d'enquête auxquels a procédé la [1] antérieurement au 28 novembre 2013, la cour d'appel a justifié sa décision. 30. Ainsi, les griefs doivent être écartés. Mais sur le moyen, pris en sa sixième branche Vu l'article 174 du code de procédure pénale : 31. Il résulte du deuxième alinéa de ce texte que lorsqu'une juridiction constate la nullité d'un acte de la procédure, seuls doivent être annulés par voie de conséquence les actes et pièces qui ont pour support nécessaire l'acte entaché de nullité. 32. En l'espèce, pour annuler par voie de conséquence les procès-verbaux n° 709 et 710 dressés par les agents des douanes, relatant les auditions du gérant de la société de transfert [2] et d'un employé de la société de transfert [3], l'arrêt attaqué énonce que ces actes sont intervenus concomitamment aux actes viciés et qu'ils sont donc en lien avec eux, sur un plan intellectuel et même d'un point de vue chronologique. 33. En statuant ainsi, par des motifs dont il ne résulte pas que les procès-verbaux litigieux avaient pour support nécessaire les actes entachés de nullités, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé. 34. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Portée et conséquences de la cassation 35. La cassation à intervenir concerne les dispositions relatives à l'annulation des procès-verbaux n° 709 et 710 de la procédure de la [1]. 36. La cassation concerne également les dispositions relatives à la relaxe des prévenus, ainsi qu'aux restitutions ordonnées et au rejet des demandes de l'administration des douanes et des droits indirects. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 25 novembre 2021, mais en ses seules dispositions ayant confirmé l'annulation des procès-verbaux n° 709 et 710 de la [1], ayant relaxé les prévenus, ordonné une mesure de restitution et rejeté les demandes de l'administration des douanes et des droits indirects, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Paris, autrement composée à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° R 21-85.796 F-D N° 00015 ECF 5 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 Le cabinet Lysandre a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 23 septembre 2021, qui, dans l'information suivie, notamment, contre M. [E] [V] des chefs de travail dissimulé en bande organisée, blanchiment en bande organisée, tentative de ce délit, faux et usage, recel et complicité, a confirmé l'ordonnance de maintien de saisie pénale rendue par le juge d'instruction. Un mémoire et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat du cabinet Lysandre, et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. A la suite du signalement effectué par le service des maniements de fonds de la CARPA, des investigations conduites, d'abord dans le cadre d'une enquête préliminaire, puis d'une information judiciaire, ont révélé l'existence d'un système occulte de rémunération d'employés non déclarés et de transfert des fonds issus du travail dissimulé vers l'étranger et mis en cause le cabinet d'avocat Lysandre et, notamment, M. [E] [V]. 3. Le 19 octobre 2020, le juge d'instruction a ordonné la saisie pénale en valeur du compte bancaire ouvert au nom du cabinet Lysandre par une ordonnance à l'encontre de laquelle M. [V] et le cabinet Lysandre ont interjeté appel. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa troisième branche 4. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen, pris en ses autres branches Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a prononcé le maintien de la saisie, pratiquée le 13 octobre 2020, du solde créditeur du compte du cabinet Lysandre ouvert dans les livres de la CRCAM Paris Ile-de-France, s'élevant à 56 897,50 euros, alors : « 1°/ que les dispositions de l'article 706-154 du code de procédure pénale méconnaissent tant le droit au respect de la vie privée, découlant de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, que les droits de la défense, dont le respect est garanti par l'article 16 de ladite Déclaration, en ce qu'elles permettent la saisie de sommes d'argent déposées sur le compte bancaire d'un avocat, et le maintien de cette saisie, sans garanties procédurales spécifiques concernant la protection du secret professionnel de l'avocat ; que la déclaration d'inconstitutionnalité qui adviendra de ce chef, sur la question prioritaire de constitutionnalité posée par le cabinet Lysandre par écrit distinct du présent mémoire, conduira à l'annulation de l'arrêt attaqué ; 2°/ que les dispositions de l'article 706-154 du code de procédure pénale, en ce qu'elles permettent la saisie de sommes d'argent déposées sur le compte bancaire d'un avocat, ainsi que le maintien de cette saisie, sans garanties procédurales spécifiques concernant la protection du secret professionnel, et notamment sans que le bâtonnier ou son délégué soient informés et puissent, le cas échéant, s'opposer à la mesure ou à son maintien, méconnaissent les exigences liées à la protection du secret professionnel de l'avocat, dès lors que, pour obtenir la mainlevée de la saisie, l'avocat peut être contraint de justifier de l'origine des sommes figurant sur son compte et d'établir que ces sommes ne constituent pas le produit d'une infraction, mais correspondent à des honoraires perçus en contrepartie de prestations licites ; que la saisie peut ainsi conduire, sans être accompagnée de garanties procédurales adéquates, à la révélation d'éléments couverts par le secret professionnel, tels que l'identité des clients de l'avocat, la nature des prestations que ce dernier fournit à ses clients, les conventions d'honoraires qu'il a passées avec ceux-ci et les facturations y afférentes ; qu'il suit de là que la saisie du solde créditeur du compte détenu par le cabinet Lysandre dans les livres du [1], réalisée en application de l'article 706-154 du code de procédure pénale, a été pratiquée et maintenue irrégulièrement ; qu'en ne prononçant pas la mainlevée de cette saisie, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Sur le moyen, pris en sa première branche 6. Le grief est devenu sans objet, dès lors que, par décision n° 2022-1002 QPC du 8 juillet 2022, le Conseil constitutionnel a déclaré l'article 706-154 du code de procédure pénale conforme à la Constitution. Sur le moyen, pris en sa deuxième branche 7. Selon l'article 706-154 du code de procédure pénale, l'ordonnance par laquelle le juge des libertés et de la détention, ou le juge d'instruction, se prononce sur le maintien ou la mainlevée de la saisie d'une somme d'argent versée sur un compte ouvert auprès d'un établissement habilité par la loi à tenir des comptes de dépôts, effectuée par un officier de police judiciaire, est notifiée au ministère public, au titulaire du compte et, s'ils sont connus, aux tiers ayant des droits sur ce compte, qui peuvent la déférer à la chambre de l'instruction dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'ordonnance. 8. Ces dispositions ont pour seul objet de prévoir un recours contre la saisie d'une somme d'argent dont l'exécution n'implique en elle-même ni recherche de preuves, ni investigations, ni divulgation d'informations se rapportant à cette somme. 9. Cette saisie doit être justifiée par l'existence d'indices laissant présumer la commission de l'infraction sur la base de laquelle elle est ordonnée et s'applique indifféremment à l'ensemble des sommes inscrites sur un compte bancaire au moment de sa réalisation et à concurrence, le cas échéant, du montant indiqué dans la décision de saisie. Sa contestation n'implique pas de justifier de l'origine de la somme qui en fait l'objet. Par conséquent, dans le cas où la saisie porte sur les sommes versées sur le compte professionnel d'un avocat, ce dernier peut la contester sans être tenu de révéler des informations portant sur ses clients ou les prestations à l'origine des sommes saisies. 10. Enfin, à supposer même que l'avocat soit amené, pour exercer ses droits de la défense, à révéler des informations couvertes par le secret professionnel pour contester la saisie d'une somme versée sur son compte, il peut le faire sous la condition que ces révélations lui soient imposées par les strictes exigences de sa propre défense devant une juridiction. 11. Il résulte de ce qui précède que les dispositions de l'article 706-154 du code de procédure pénale assurent une conciliation équilibrée entre, d'une part, les droits de la défense et, d'autre part, le droit de toute personne au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance, qui inclut la confidentialité de la correspondance entre un avocat et son client, garanti par l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme. 12. Dès lors, le grief doit être écarté. 13. Par ailleurs l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° P 22-85.982 F-D N° 00099 MAS2 4 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [Z] [T] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 7e section, en date du 27 septembre 2022, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, d'arrestation, enlèvement, détention ou séquestration sans libération avant le septième jour en bande organisée, blanchiment et association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention rejetant ses demandes de mise en liberté. Des mémoires ont été produits. Sur le rapport de M. Charmoillaux, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [Z] [T], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Charmoillaux, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. M. [Z] [T] a été mis en examen des chefs susvisés et a été placé en détention provisoire. 3. Une première demande de mise en liberté, formée le 9 août 2022, a été communiquée le jour même au ministère public, qui a pris ses réquisitions le 10 août 2022. 4. Une seconde demande de mise en liberté, formée le 10 août 2022, a été communiquée le 12 août 2022 au ministère public, qui a pris ses réquisitions le 16 août 2022. 5. Le juge d'instruction a, par ordonnance du 24 août 2022, saisi le juge des libertés et de la détention qui a rejeté les demandes de mise en liberté par ordonnance du 6 septembre 2022. 6. M. [T] a relevé appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté « le moyen de nullité », dit l'appel mal fondé et confirmé l'ordonnance du 6 septembre 2022 par laquelle le juge des libertés et de la détention a rejeté les demandes de mise en liberté formées par l'exposant, alors : 1°/ que le délai qui doit être pris en compte pour vérifier le respect de l'exigence de célérité formulée à l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme a pour point de départ la date de formulation de la demande d'élargissement ou d'introduction du recours et pour terme la décision par laquelle il est définitivement statué sur la légalité de la détention de la personne détenue ; qu'il s'ensuit que dans le cas d'une demande de mise en liberté adressée au juge d'instruction, transmise au juge des libertés et de la détention qui la rejette, puis examinée par la Chambre de l'instruction sur l'appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, le délai qui doit être pris en compte a alors pour point de départ la date de formulation de la demande de mise en liberté au juge d'instruction et pour terme la décision de la Chambre de l'instruction ; qu'il résulte de la procédure que l'avocat de Monsieur [T] a formé deux demandes de mise en liberté les 9 et 10 août 2022 ; qu'il a été statué sur ces demandes par le juge des libertés et de la détention le 6 septembre 2022, soit 28 jours plus tard, puis par la Chambre de l'instruction sur appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le 27 septembre 2022, soit 49 jours après la formulation de la première de ces demandes ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande de remise en liberté d'office de Monsieur [T], à relever qu'il avait été statué sur sa demande par le juge des libertés et de la détention « dans un délai de 28 jours, délai non-contraire aux dispositions de la Convention européenne des droits de l'Homme », sans rechercher si le délai total de 49 jours s'étant écoulé entre la demande formée par l'exposant et la décision qu'elle rendait sur appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention, seul délai correspondant au délai de la procédure prise dans son ensemble, était lui-même compatible avec ces dispositions, la Chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions précitées, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale ; 2°/ que lorsque le délai écoulé entre la date de formulation de la demande d'élargissement et la décision par laquelle il est définitivement statué sur la légalité de la détention de la personne détenue apparaît excessif au regard de l'exigence de « bref délai » posée par l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'Homme, il appartient à la juridiction rejetant cette demande d'élargissement de justifier sa décision par des motifs exceptionnels permettant d'expliquer et de justifier cette lenteur ; qu'au cas d'espèce, il apparaît d'emblée que le délai entre la date de formulation des demandes de mise en liberté au juge d'instruction et la décision de la Chambre de l'instruction, soit 49 jours, est excessif au regard de l'exigence de « bref délai » ; qu'en outre les lenteurs dans le jugement des demandes de Monsieur [T] résultent uniquement des retards successifs dans le traitement de ces demandes par le juge d'instruction et le juge des libertés et de la détention et du retard dans la notification de l'ordonnance de ce dernier magistrat ; qu'en se bornant toutefois, pour ne pas faire droit au moyen tiré de la violation de l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'Homme, à reprocher à Monsieur [T] de ne pas l'avoir saisie plus tôt, sans relever aucune circonstance exceptionnelle permettant d'expliquer et de justifier les lenteurs imputables au service de la justice, la Chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des dispositions précitées, ensemble les articles 148, 591 et 593 du Code de procédure pénale ; 3°/ que lorsque le délai écoulé entre la date de formulation de la demande d'élargissement et la décision par laquelle il est définitivement statué sur la légalité de la détention de la personne détenue apparaît excessif au regard de l'exigence de « bref délai » posée par l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'Homme, il appartient à la juridiction rejetant cette demande d'élargissement de justifier sa décision par des motifs exceptionnels permettant d'expliquer et de justifier cette lenteur ; qu'au cas d'espèce, il apparaît d'emblée que le délai entre la date de formulation des demandes de mise en liberté au juge d'instruction et la décision de la Chambre de l'instruction, soit 49 jours, est excessif au regard de l'exigence de « bref délai » ; qu'en outre les lenteurs dans le jugement des demandes de Monsieur [T] résultent uniquement des retards successifs dans le traitement de ces demandes par le juge d'instruction et le juge des libertés et de la détention et du retard dans la notification de l'ordonnance de ce dernier magistrat ; que s'il résulte des dispositions de l'article 148, alinéa 5, du Code de procédure pénale, un droit pour la personne détenue à saisir directement la Chambre de l'instruction d'une demande de remise en liberté lorsqu'il n'a pas été statué sur celle-ci par le juge des libertés et de la détention dans le délai légal de trois jours ouvrables, on ne saurait toutefois reprocher à la personne détenue, de ne pas avoir volontairement dessaisi le juge des libertés et de la détention et de s'être ainsi privée d'un degré de juridiction pouvant potentiellement lui être favorable ; qu'en se bornant ainsi, pour ne pas faire droit au moyen tiré de la violation de l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'Homme, à reprocher à Monsieur [T] de ne pas l'avoir saisie plus tôt, quand ce motif est inopérant à expliquer et justifier les lenteurs du service de la justice, lesquelles ne peuvent s'expliquer par la seule volonté de Monsieur [T] d'attendre la décision du juge des libertés et de la détention, la Chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'Homme, 148, 591 et 593 du Code de procédure pénale ; 4°/ que quand bien même il résulterait des dispositions de l'article 148, alinéa 5, du Code de procédure pénale, une obligation incombant à la personne détenue de limiter les délais de recours en saisissant immédiatement la Chambre de l'instruction, il résulte de l'analyse des délais de la présente procédure que si Monsieur [T] s'était conformé à cette obligation, la Chambre de l'instruction aurait statué au terme d'un délai excédant l'obligation de « bref délai » posée par l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'Homme, de sorte qu'en statuant ainsi par un moyen inopérant en fait, la Chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'Homme, 148, 591 et 593 du Code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 8. Pour écarter le moyen tiré de la violation de l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme et confirmer l'ordonnance ayant rejeté les demandes de mise en liberté de M. [T], l'arrêt attaqué énonce que l'intéressé pouvait en tout état de cause, faute de décision du juge des libertés et de la détention intervenue dans les délais prévus par la loi, saisir la chambre de l'instruction afin qu'il soit statué plus rapidement sur sa demande. 9. En l'état de ces seules énonciations, la chambre de l'instruction a justifié sa décision, sans méconnaître les textes visés au moyen. 10. En effet, en premier lieu, M. [T] ne saurait se faire un grief du retard pris pour statuer en première instance sur ses demandes de mise en liberté, dès lors qu'il a n'a pas exercé la faculté que lui donnait l'article 148, alinéa 5, du code de procédure pénale de saisir directement la juridiction du second degré, laquelle est alors tenue de se prononcer dans les vingt jours, à peine de mise en liberté d'office. 11. En second lieu, la chambre de l'instruction, qui a statué quatorze jours après l'appel formé par l'intéressé de l'ordonnance de rejet par le juge des libertés et de la détention de ses demandes de mise en liberté, a elle-même jugé dans le bref délai prescrit par l'article 194, alinéa 3, du code de procédure pénale. 12. Dès lors, le moyen doit être écarté. 13. Par ailleurs, l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3, 143-1 et suivants du code de procédure pénale. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° E 22-86.043 F-D N° 00100 MAS2 4 JANVIER 2023 NON-LIEU A STATUER M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [B] [V] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France, chambre correctionnelle, en date du 6 octobre 2022, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de destruction par incendie de bois, forêt, lande, maquis ou plantation d'autrui, a annulé le jugement le plaçant sous assignation à résidence avec surveillance électronique. Un mémoire personnel a été produit. Sur le rapport de M. Rouvière, conseiller référendaire, et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Rouvière, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu l'article 606 du code de procédure pénale : 1. M. [B] [V] a été mis en examen du chef susvisé et placé en détention provisoire. 2. Après que le juge d'instruction a ordonné le renvoi de M. [V] devant le tribunal correctionnel et son maintien en détention provisoire, celui-ci a saisi le tribunal correctionnel d'une demande de placement sous assignation à résidence avec surveillance électronique, à laquelle il a été répondu favorablement par jugement du 17 août 2022. 3. Le procureur de la République a relevé appel de cette décision. 4. Après la déclaration de pourvoi formée contre l'arrêt de la cour d'appel de Fort-de-France du 6 octobre 2022, annulant le jugement du tribunal correctionnel, M. [V] a été de nouveau écroué, le 10 octobre 2022 et, par arrêt du 18 octobre 2022, la chambre de l'instruction a confirmé l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel et ordonné le maintien de l'intéressé en détention. 5. Depuis cette date, M. [V] est détenu en vertu de ce dernier titre de détention, postérieur à la déclaration de pourvoi. 6. Dès lors, le pourvoi formé contre l'arrêt du 6 octobre 2022 est devenu sans objet. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° G 22-86.046 F-D N° 00101 MAS2 4 JANVIER 2023 NON-LIEU A STATUER M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [S] [R] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 15 juillet 2022, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative de meurtre en bande organisée, violences aggravées et infractions à la législation sur les armes, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Sottet, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [S] [R], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Sottet, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu l'article 606 du code de procédure pénale ; 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. [S] [R] a été mis en examen des chefs susvisés et placé en détention provisoire le 28 janvier 2021. 2. Le 1er septembre 2022, le juge d'instruction l'a mis en liberté sous contrôle judiciaire. 3. Dès lors, le pourvoi qu'il a formé contre l'arrêt de la chambre de l'instruction ayant confirmé la prolongation de la détention provisoire est sans objet à ce jour. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Y 22-82.449 F-D N° 00022 ECF 5 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 M. [H] [V] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 2e section, en date du 24 mars 2022, qui, dans la procédure suivie des chefs de blanchiment et fraude fiscale, aggravés, a confirmé l'ordonnance de saisie pénale rendue par le juge des libertés et de la détention. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Ascensi, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [H] [V], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Ascensi, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. M. [H] [V] a été mis en cause dans le cadre de l'enquête préliminaire diligentée du chef susvisé. 3. Par ordonnance du 18 février 2020, le juge des libertés et de la détention a ordonné la saisie en valeur d'un immeuble appartenant à l'intéressé, en cantonnant la saisie à la somme de 1 247 000 euros. 4. M. [V] a interjeté appel de la décision. Examen du moyen Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches 5. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit que la saisie en valeur portant sur l'immeuble situé sur la commune de [Localité 4] au [Adresse 1], figurant au cadastre section [Cadastre 2], lot n° 104, dont est propriétaire M. [H] [V], serait cantonnée à hauteur de 966 279 euros, alors : « 3°/ que la saisie d'un bien appartenant à la personne poursuivie ne peut être autorisée qu'à la condition de constituer une mesure proportionnée au regard notamment de la gravité des faits reprochés à la personne poursuivie ; qu'en l'espèce, après avoir retenu que M. [V] était poursuivi pour avoir éludé l'impôt à hauteur de 966 279 euros, et pour blanchiment à hauteur de 1 247 000 euros, la chambre de l'instruction a considéré que si la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires avait remis en cause certains rehaussements proposés par l'administration fiscale, cette commission n'émettait qu'un simple avis dont il ne pouvait être tenu compte, et a estimé qu' « alors que M. [V] garde l'usage du bien, la saisie n'apparaît pas disproportionnée en son principe au regard de la gravité des faits et de l'importance de la fraude », mais qu'elle devait être cantonnée « à hauteur de la somme de (p. 6, dernier §) ; qu'en statuant de la sorte, sans tenir compte, ainsi qu'elle y était invitée, pour apprécier le caractère éventuellement disproportionné de la saisie, de la circonstance que les enquêteurs de l'Office Central de Lutte contre la Corruption et les Infractions Financières et Fiscales (Oclciff) avaient écarté toute fraude de M. [V] au titre de la somme de 399 860 euros issue de quatre virements bancaires provenant de la société [3], la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des articles 706-141 du code de procédure pénale et 131-21 du code pénal, et violé l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l'homme, l'article 6, § 1, de cette Convention et l'article 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 7. Tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 8. Pour évaluer à la somme de 966 279 euros le montant de l'impôt éludé, et cantonner à cette somme la saisie en valeur, à titre d'objet du délit de blanchiment, de l'immeuble appartenant à M. [V], l'arrêt retient notamment qu'il existe contre l'intéressé des indices de la commission du délit de blanchiment de fraude fiscale, qu'il a été incapable de justifier de l'origine des sommes en causes et qu'il a procédé à leur dissimulation au moyen de comptes bancaires ouverts à l'étranger et de faux prêts. 9. Les juges ajoutent que le mémoire ne remet pas en cause le principe des infractions, mais le montant du produit de celles-ci qui a été contesté devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires qui a remis en cause certains rehaussements, mais que cette commission émet un simple avis qui ne lie pas l'administration, de sorte qu'il ne peut en être tenu compte dans le cadre de l'examen de l'appel. 10. Ils concluent qu'au regard de ces éléments, et dès lors que l'intéressé garde l'usage de l'immeuble, la saisie n'apparaît pas disproportionnée en son principe au regard de la gravité des faits et de l'importance de la fraude. 11. En se déterminant ainsi, sans répondre au moyen du demandeur soutenant que les enquêteurs avaient eux-mêmes estimé que la perception de la somme de 399 860 euros, en la forme de quatre virements bancaires provenant de la société [3], n'était pas frauduleuse, la chambre de l'instruction a insuffisamment justifié sa décision. 12. La cassation est par conséquent encourue. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 24 mars 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° J 21-81.305 F-D N° 00020 ECF 5 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 M. [M] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel d'Amiens, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2021, qui, pour escroqueries, blanchiment, travail dissimulé, association de malfaiteurs, l'a condamné à un an d'emprisonnement, 15 000 euros d'amende, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils. Des mémoires ont été produits, en demande et en défense. Sur le rapport de M. Turcey, conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [M] [F], les observations de Me Balat, avocat de M. [D] [O], et les conclusions de M. Valat, avocat général, après débats en l'audience publique du 23 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Turcey, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et Mme Coste-Floret, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. A l'issue d'une information judiciaire ouverte le 14 octobre 2014, concernant la revente sur internet de véhicules automobiles achetés en Belgique et dont le kilométrage avait été modifié, M. [M] [F] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel qui, par jugement du 27 août 2019, l'a condamné pour escroqueries, blanchiment, travail dissimulé, association de malfaiteurs, à huit mois d'emprisonnement, a ordonné une mesure de confiscation et a prononcé sur les intérêts civils. 3. Il a relevé appel de cette décision. Le ministère public ainsi qu'une partie civile ont formé appel incident. Examen des moyens Sur les premier, deuxième, troisième et quatrième moyens, et sur le cinquième moyen, pris en ses troisième et quatrième branches 4. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le sixième moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [F] sur l'action civile, à payer diverses sommes à titre de dommages et intérêts aux parties civiles, alors « que seul peut être indemnisé le préjudice direct et personnel résultant des faits objet de la poursuite ; qu'en condamnant M. [F] à payer des dommages et intérêts aux parties civiles sans caractériser ni les prétendus préjudices ni le lien de causalité entre ceux-ci et les infractions retenues, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 2, 3, 593 du code de procédure pénale et 1382 devenu 1240 du code civil. » Réponse de la Cour 6. Pour fixer le montant de l'indemnité propre à réparer le dommage subi par les parties civiles, après avoir condamné le prévenu du chef d'escroquerie au préjudice de chacune d'entre elles, les manoeuvres retenues par les juges consistant en la modification à la baisse du kilométrage affiché par les véhicules qu'elles ont ainsi été déterminées à acheter, l'arrêt énonce que les prévenus, dont M. [F], ont contesté les sommes allouées à chaque partie civile régulièrement constituée et reçue devant le tribunal correctionnel, sans pour autant apporter à la cour d'éléments permettant d'établir une appréciation erronée des juges du fond quant à l'indemnisation des préjudices de ces parties civiles. 7. Les juges du second degré, après avoir rappelé les circonstances des escroqueries dont le prévenu a été déclaré coupable, et les prétentions des parties civiles, ont motivé leur décision de manière distincte à l'égard de chacune d'entre elles, et conclu qu'en conséquence, les dispositions civiles du jugement déféré seront confirmées, sous les réserves reprises au dispositif de l'arrêt, les premiers juges ayant fait une juste appréciation des conséquences civiles des infractions poursuivies et réprimées. 8. En l'état de ces énonciations, la cour d'appel, qui n'a fait qu'user de son pouvoir d'apprécier souverainement, sans insuffisance ni contradiction, dans la limite des conclusions des parties, et des faits, objet de la poursuite, l'indemnité propre à réparer, pour chaque partie civile, les dommages résultant directement de l'infraction, a justifié sa décision. 9. Ainsi, le moyen doit être écarté. Mais sur le cinquième moyen, pris en ses deux premières branches Enoncé du moyen 10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [F] en répression, à une peine d'emprisonnement d'un an sans aménagement, à une amende de 15 000 euros et a ordonné la confiscation des sommes de 2 039 euros et 6 200 euros saisies à son encontre, alors : « 1°/ que le juge qui prononce une peine d'emprisonnement sans sursis doit en justifier la nécessité au regard des faits de l'espèce, de la gravité de l'infraction, de la personnalité de son auteur, de sa situation matérielle, familiale et sociale ainsi que du caractère inadéquat de toute autre sanction ; qu'en condamnant M. [F], à une peine d'emprisonnement d'un an sans sursis et sans aménagement, sans s'expliquer sur la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu qu'elle devait prendre en considération pour fonder sa décision, ni sur le caractère inadéquat de toute autre sanction, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 132-19 du code pénal dans sa rédaction alors en vigueur ; 2°/ que si la peine prononcée n'est pas supérieure à deux ans, ou à un an pour une personne en état de récidive légale, le juge, qui décide de ne pas l'aménager, doit, soit constater une impossibilité matérielle de le faire, soit motiver spécialement sa décision au regard des faits de l'espèce et de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu ; que la cour d'appel a refusé d'aménager la peine d'un an d'emprisonnement prononcée à l'encontre du prévenu compte tenu de l'importance des faits qui se sont poursuivis durant plus de trois et demi et en raison du précédent sursis que la justice lui avait accordé le 9 juin 2015 et dont il n'a pas su s'emparer ; qu'en se déterminant ainsi sans constater une impossibilité matérielle d'aménager la peine et sans spécialement motiver sa décision au regard de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 132-19 du code pénal dans sa rédaction alors en vigueur. » Réponse de la Cour Vu les articles 132-19 et 132-25 du code pénal, 464-2 du code de procédure pénale dans leur rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, applicables à partir du 24 mars 2020, et 593 du code de procédure pénale : 11. Il se déduit du premier de ces textes que le juge qui prononce, en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement ferme doit, quels que soient le quantum et la décision prise quant à son éventuel aménagement, motiver ce choix en faisant apparaître qu'il a tenu compte des faits de l'espèce, de la personnalité de leur auteur, ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale. Il lui appartient d'établir, au regard de ces éléments, que la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine indispensable et que toute autre sanction est manifestement inadéquate. 12. Il résulte des deux premiers de ces textes que si la peine ferme d'emprisonnement prononcée est supérieure à six mois et inférieure ou égale à un an, la peine doit être aménagée si la personnalité et la situation du condamné le permettent, et sauf impossibilité matérielle. 13. Selon le troisième, la juridiction de jugement qui prononce une peine d'emprisonnement ferme supérieure à six mois ou inférieure ou égale à un an doit soit ordonner son aménagement en déterminant la mesure adaptée, soit, si elle ne dispose pas d'éléments lui permettant de déterminer celle-ci, ordonner la convocation du condamné devant le juge de l'application des peines, soit, s'agissant d'une peine d'au moins six mois, délivrer un mandat de dépôt à effet différé, soit, dans les cas prévus aux articles 397-4, 465 et 465-1 du code de procédure pénale, décerner un mandat de dépôt ou d'arrêt contre le condamné. Si le juge décerne un mandat d'arrêt ou de dépôt, à effet différé ou non, il doit motiver sa décision au regard des faits de l'espèce, de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale du condamné. 14. Pour condamner le prévenu à la peine d'un an d'emprisonnement, sans aménagement, l'arrêt attaqué énonce que ce dernier est âgé de 60 ans et a indiqué avoir repris son activité professionnelle depuis 2016, ayant la qualité de fonctionnaire selon ses déclarations, et peut être considéré comme socialement inséré, bénéficiant d'un emploi pérenne et d'une situation de famille stable. 15. Les juges relèvent que les antécédents judiciaires de M. [F] doivent être soulignés, et plus spécifiquement la condamnation prononcée le 9 juin 2015 pour blanchiment de fraude fiscale, travail dissimulé par achat et revente de véhicules sans immatriculation au répertoire des métiers ou au registre du commerce et des sociétés pour un total de 50 800 euros, et escroquerie par modification du compteur d'un véhicule automobile, faits commis entre le 1er janvier 2012 et le 30 septembre 2012, une peine de trois mois d'emprisonnement avec sursis ayant été prononcée. 16. Ils retiennent que cette précédente condamnation marque l'avertissement judiciaire dont a bénéficié le prévenu, la peine assortie du sursis simple devant conduire ce dernier à une réelle introspection afin de prendre conscience du caractère infractionnel de son comportement, et éviter ainsi tout risque de réitération ou de récidive, mais que, loin de manifester une volonté de s'affranchir de ses anciennes activités, le prévenu a affirmé au cours de l'enquête et de l'instruction qu'il entendait faire ce qu'il voulait, étant dans un pays libre. 17. Ils ajoutent qu'une telle attitude révèle incontestablement l'absence de prise de conscience du caractère non seulement délictueux des actes commis, mais par ailleurs de la dangerosité de ces actes, étant rappelé que certains véhicules présentés sous un meilleur jour que la réalité ont eu des défaillances techniques particulièrement graves. 18. Ils en concluent qu'une peine d'un an d'emprisonnement apparaît justifiée et adaptée tant au regard de la gravité des faits commis qu'à la personnalité de M. [F], et qu'aucun aménagement de cette peine ne sera ordonné compte tenu de l'importance des faits, lesquels se sont poursuivis durant plus de trois ans et demi, et en raison du précédent sursis que la justice avait accordé au prévenu et dont il n'a pas su s'emparer. 19. En se déterminant ainsi, d'une part, sans constater que la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendaient une peine d'emprisonnement ferme indispensable et que toute autre sanction était manifestement inadéquate, d'autre part, sans constater que la situation ou la personnalité du condamné ne permettaient pas l'aménagement de cette peine ou relever une impossibilité matérielle de le faire, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision. 20. La cassation est par conséquent encourue. Examen de la demande fondée sur l'article 618-1 du code de procédure pénale 21. Les dispositions de ce texte sont applicables en cas de rejet du pourvoi, qu'il soit total ou partiel. La déclaration de culpabilité de M. [F], demandeur au pourvoi partiellement rejeté, étant devenue définitive, par suite de la non-admission de ses premier, deuxième, troisième et quatrième moyens, il y a lieu de faire partiellement droit à la demande. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel d'Amiens, en date du 20 janvier 2021, mais en ses seules dispositions relatives aux peines concernant M. [F], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Rouen, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; FIXE à 2 500 euros la somme que M. [F] devra payer à M. [O] au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel d'Amiens, et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° P 22-86.051 F-D N° 00118 GM 5 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 Le procureur général près la cour d'appel de Douai a formé un pourvoi contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 4e chambre, en date du 8 septembre 2022, qui, dans la procédure suivie contre M. [Y] [U] des chefs d'infraction à la législation sur les stupéfiants et association de malfaiteurs, l'a placé sous contrôle judiciaire. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. d'Huy, conseiller, et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. d'Huy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. M. [Y] [U] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel de Lille des chefs susvisés. 3. Par jugement du 4 mars 2022, rendu par défaut, le tribunal correctionnel l'a déclaré coupable des faits poursuivis, l'a condamné à neuf ans d'emprisonnement, 100 000 euros d'amende et a décerné un mandat d'arrêt à son encontre. 4. Le mandat d'arrêt a été notifié à M. [U] le 19 août 2022 et il a formé opposition au jugement le même jour. 5. Par ordonnance du juge des libertés et de la détention, il a été placé en détention provisoire à l'issue d'un débat différé, le 24 août 2022. 6. Il a interjeté appel de cette décision. Examen du moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen est pris de la violation des articles 509 et 591 du code de procédure pénale. 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a fait droit à l'exception de nullité du mandat d'arrêt décerné à l'encontre du prévenu et ordonné sa mise en liberté et son placement sous contrôle judiciaire, alors qu'en raison de l'effet dévolutif de l'appel, l'insuffisance de motivation d'une décision rendue dans le contentieux de la détention provisoire n'emporte pas l'illégalité de la détention ; qu'il appartient en effet aux juges saisis en appel de statuer sur la nécessité ou l'absence de nécessité de la détention suivant des motifs qui leur sont propres au regard des dispositions de l'article 144 du code de procédure pénale, ces motifs se substituant à ceux, insuffisants, contradictoires ou erronés des premiers juges ; qu'ainsi, le seul défaut de respect par le tribunal correctionnel de l'exigence de motivation prévue par l'article 465 du code de procédure pénale ne pouvait avoir pour effet de priver le mandat d'arrêt décerné de sa légalité et, par voie de conséquence, entraîner la nullité de la décision du juge des libertés et de la détention qui a ordonné le placement en détention provisoire du prévenu. Réponse de la Cour Vu les articles 509 et 144 du code de procédure pénale : 9. Il se déduit de ces articles qu'en raison de l'effet dévolutif de l'appel, il appartient à la cour d'appel, saisie par l'appelant d'une décision du juge des libertés et de la détention ordonnant son placement en détention provisoire en vertu d'un mandat d'arrêt décerné par le tribunal correctionnel, d'examiner la validité de ce mandat à l'origine de la détention provisoire et de se prononcer sur le bien-fondé et la nécessité de cette mesure par des motifs répondant aux exigences légales. 10. Le seul défaut de respect par le tribunal de l'exigence de motivation du mandat d'arrêt prévue par l'article 465 du code de procédure pénale n'a pas pour effet de priver le titre de détention décerné de sa légalité. 11. Pour constater la nullité du mandat d'arrêt et ordonner en conséquence la mise en liberté du prévenu et son placement sous contrôle judiciaire, l'arrêt attaqué énonce que le jugement du tribunal correctionnel de Lille, rendu par défaut à l'égard de M. [U], est dépourvu de toute motivation concernant le mandat d'arrêt et que ce mandat, qui ne figure d'ailleurs que dans le dispositif du jugement, a ainsi été décerné en méconnaissance des dispositions de l'article 465 du code de procédure pénale. 12. Il ajoute qu'il appartenait au juge des libertés et de la détention d'exercer un contrôle effectif de la régularité du mandat, support exclusif et nécessaire de l'interpellation du prévenu. 13. En prononçant ainsi, la chambre de l'instruction de la cour d'appel, si elle a examiné à juste titre la validité du mandat d'arrêt, a cependant méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés. 14. La cassation est par conséquent encourue. Portée et conséquences de la cassation 15. La cassation interviendra avec renvoi afin de permettre à la cour d'appel d'examiner le bien-fondé de la détention provisoire et de se déterminer par des considérations de droit et de fait répondant aux exigences de l'article 144 du code de procédure pénale. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Douai, en date du 8 septembre 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Douai, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Douai et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Q 22-86.098 F-D N° 00119 GM 5 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 [U] [F] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Douai, en date du 13 juillet 2022, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de viol, agression sexuelle et violences, aggravés, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction prolongeant son placement provisoire. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de M. Pauthe, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [U] [F], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Pauthe, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 30 décembre 2021, [U] [F], mineur comme étant né le [Date naissance 1] 2006, a été mis en examen des chefs de viol incestueux commis sur un mineur de 15 ans, agression sexuelle incestueuse sur un mineur de 15 ans et violence sur un mineur de 15 ans sans incapacité, puis placé sous contrôle judiciaire par ordonnance du juge d'instruction, avec l'obligation de respecter une mesure de placement provisoire en application de l'article 331-2 du code de la justice pénale des mineurs. 3. Le même jour, il a été l'objet d'une ordonnance de placement provisoire à l'établissement de placement éducatif Pays-du-Hainaut. 4. Cette mesure de placement a été prolongée pour une durée de six mois par ordonnance du juge d'instruction en date du 30 juin 2022 dont il a été relevé appel, avec demande de comparution personnelle. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé l'ordonnance en ce qu'elle avait ordonné la prolongation du placement de [U] [F] à l'EPE Pays-du-Hainaut missions hébergement diversifié pour une durée de six mois, alors « que lorsque la personne mise en examen comparaît devant la chambre de l'instruction, elle ne peut être entendue qu'après avoir été informée de son droit de se taire sur les faits qui lui sont reprochés ; qu'il ne ressort d'aucune mention de l'arrêt attaqué que [U] [F], mis en examen, qui comparaissait devant la chambre de l'instruction, ait été informé de son droit de se taire sur les faits qui lui sont reprochés ; que la chambre de l'instruction a ainsi violé l'article 199 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 6. Il se déduit de l'article 199, alinéa 4, du code de procédure pénale, dans sa rédaction issue de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021, que la personne mise en examen qui comparaît devant la chambre de l'instruction ne peut être entendue qu'après avoir été informée de son droit de se taire sur les faits qui lui sont reprochés. 7. Selon les mentions de l'arrêt attaqué, [U] [F], comparant devant la chambre de l'instruction saisie de l'appel formé contre l'ordonnance du juge d'instruction prolongeant la mesure de placement provisoire prise dans le cadre du contrôle judiciaire, n'a pas été averti de son droit de se taire. 8. Si c'est à tort que le mineur mis en examen n'a pas été informé de son droit de se taire sur les faits reprochés, l'arrêt n'encourt pas pour autant la censure, le défaut de notification du droit de se taire sur les faits étant sans incidence sur la régularité de la décision rendue en matière de mesure de sûreté. 9. Ainsi, le moyen doit être écarté. 10. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° X 21-85.940 F-D N° 00121 GM 5 JANVIER 2023 SURSIS A STATUER M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 [H] [S], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, en date du 16 septembre 2021, qui a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction déclarant irrecevable sa constitution de partie civile des chefs d'escroqueries et abus de biens sociaux. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Chafaï, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [H] [S], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chafaï, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. 1. Il résulte de la copie d'un acte de décès dressé par le service de l'état civil de la commune de [Localité 2] (30) que [H] [S] est décédé le [Date décès 1] 2022. 2. La Cour de cassation, saisie par [H] [S] d'un pourvoi contre un arrêt déclarant irrecevable sa constitution de partie civile, demeure compétente pour statuer. 3. Il y a lieu de surseoir à statuer afin de savoir si, éventuellement, les ayants droit de [H] [S] entendent reprendre l'instance. PAR CES MOTIFS, la Cour : SURSEOIT à statuer sur le pourvoi ; RENVOIE l'affaire à l'audience du 1er juin 2023 ; DIT que les ayants droit de [H] [S] devront indiquer avant le 15 mai 2023 s'ils entendent reprendre l'instance ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° M 22-81.472 F-D N° 00029 MAS2 10 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 Mme [U] [J], MM. [I] et [V] [H] ont formé des pourvois contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 10 février 2022, qui, dans l'information suivie contre eux des chefs notamment de recel et blanchiment aggravés et infractions à la législation sur les armes, a prononcé sur leurs demandes d'annulation de pièces de la procédure. Par ordonnance en date du 27 juin 2022, le président de la chambre criminelle a joint les pourvois et prescrit leur examen immédiat. Un mémoire, commun aux demandeurs, et des observations complémentaires ont été produits. Sur le rapport de M. Seys, conseiller, les observations de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de Mme [U] [J] et de MM. [I] et [V] [H], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Seys, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Une information a été ouverte à l'unique cabinet d'instruction d'un tribunal, des chefs de vols aggravés. 3. Les investigations effectuées par la suite ont mis en évidence d'autres faits, portés à la connaissance du procureur de la République par ordonnance de soit-communiqué du 13 janvier 2021. 4. Le même jour, une nouvelle information a été ouverte du chef de blanchiment aggravé, et le président du tribunal judiciaire, agissant en remplacement du magistrat instructeur empêché, a, après avoir établi deux soit-transmis à cette fin, par procès-verbal, versé au dossier de la procédure des pièces extraites de l'information initiale et délivré deux commissions rogatoires. 5. Le 14 janvier 2021, ce même magistrat a pris une ordonnance par laquelle il s'est désigné pour remplacer, les 13 et 14 janvier 2021, le juge d'instruction empêché. 6. Des investigations et perquisitions ont été effectuées en exécution des deux délégations ci-dessus, à l'issue desquelles Mme [U] [J], MM. [I] et [V] [H] ont été mis en examen des chefs susvisés. 7. Des requêtes en annulation de pièces de la procédure ont été déposées pour les intéressés les 7 et 10 mai 2021. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa quatrième branche 8. Le grief n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le moyen, pris en ses première à troisième branches Enoncé du moyen 9. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a rejeté la requête en nullité de Mme [J] et de M. [I] [H], ainsi que celle de M. [V] [H], alors : « 1°/ que seule l'assemblée des magistrats du siège peut désigner le juge du tribunal qui remplace le juge d'instruction absent, malade ou empêché ; qu'en se bornant à considérer que la chronologie aurait établit l'urgence à prendre les décisions d'instruction contestées et aurait expliqué l'impossibilité matérielle de réunir une assemblée générale disposant de plus d'un quorum suffisant dans le laps de temps de quelques heures imposé par les circonstances, sans vérifier si l'assemblée générale des magistrats du siège avait désigné un ou des remplaçants du juge d'instruction, la chambre de l'instruction n'a pas suffisamment motivé sa décision et a violé les articles 50 alinéa 4 du code de procédure pénale, R. 212-36 du code de l'organisation judiciaire et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ que seule l'assemblée des magistrats du siège peut désigner le juge du tribunal qui remplace le juge d'instruction absent, malade ou empêché ; qu'en se bornant à constater, pour considérer que les actes d'instruction effectués par le président du tribunal judiciaire n'auraient pas méconnu les dispositions de l'ordonnance de roulement du 16 décembre 2020 que cette ordonnance aurait été prise en application des décisions de l'assemblée générale du même jour pour la période du 4 janvier au 9 juillet 2021, et qu'y figuraient en tant que suppléants et en cas d'empêchement de Mme [Y], le nom de tous les magistrats du siège, y compris celui du président M. [W] et qu'y étaient spécialement mentionnés pour les commissions rogatoires outre Mme [Y], juge en charge de l'instruction, M. [W], qu'enfin cette ordonnance aurait indiqué qu'en cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire pourra suppléer à toutes les fonctions de la juridiction, sans vérifier si les désignations mentionnées par 8 sur 19 cette ordonnance résultaient d'un vote de l'assemblée générale des magistrats du siège, la chambre de l'instruction a insuffisamment motivé sa décision et a violé les articles 50 alinéa 4 du code de procédure pénale, R. 212-36 du code de l'organisation judiciaire et 593 du code de procédure pénale ; 3°/ que l'ordonnance de roulement du 16 décembre 2020 prévoyait que le président M. [W] pouvait suppléer Mme [Y] en cas d'empêchement de cette dernière, mais uniquement dans le cas où Mmes, [N] [D], [B] [G], [B] [E], juges, étaient elles-mêmes empêchées et en vertu d'une ordonnance préalable ; qu'en statuant comme elle l'a fait, après avoir constaté que les actes argués de nullité, en particulier le soit-communiqué et la commission rogatoire, avaient été effectués par le président du tribunal judiciaire le 13 janvier 2021, quand il est constant et acquis au débat que ce n'était que par une ordonnance du 14 janvier 2021 donc postérieure à ces actes qu'il s'était lui-même désigné pour remplacer le juge d'instruction empêché, la chambre de l'instruction a méconnu les dispositions de l'ordonnance de roulement du 16 décembre 2020, ensemble les articles 50 alinéa 4 du code de procédure pénale, R. 212-36 du code de l'organisation judiciaire et 591 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour 10. Pour rejeter le moyen pris de l'irrégularité de la désignation des magistrats remplaçant le juge d'instruction, l'arrêt attaqué énonce que l'ordonnance de roulement du 16 décembre 2020 a été prise en application des décisions de l'assemblée générale des magistrats du même jour et que tous les juges du siège, y compris le président du tribunal, y figurent en qualité de remplaçant du juge d'instruction en cas d'empêchement de ce dernier. 11. Les juges ajoutent, après avoir relevé qu'il ressortait d'une interception téléphonique en date du 13 janvier 2021 que des lingots d'or devaient être livrés à M. [V] [H] par l'employé d'une fonderie, que cette chronologie des faits, qui établit l'urgence à prendre les décisions d'instruction contestées, explique aussi l'impossibilité matérielle de réunir une assemblée générale disposant d'un quorum suffisant, dans le laps de temps de quelques heures imposé par les circonstances rappelées ci-dessus. 12. C'est à tort que la chambre de l'instruction a retenu que le remplacement du juge d'instruction avait été régulièrement prévu, alors que le seul renvoi à l'ordonnance de roulement, prise au seul visa de l'avis de l'assemblée générale, était insuffisant pour établir que cette assemblée avait effectivement désigné nominativement un ou plusieurs magistrats pour remplacer le juge d'instruction. 13. L'arrêt n'encourt néanmoins pas la censure, dès lors que le juge d'instruction étant empêché et aucun magistrat n'ayant été désigné pour le remplacer, le président du tribunal, qui ne disposait pas du temps nécessaire pour réunir une assemblée générale compte tenu de l'urgence, était compétent, en application des articles 84, alinéas 3 et 4, et 50, alinéa 4, du code de procédure pénale, pour accomplir les actes d'instruction contestés. 14. Ainsi, le moyen doit être écarté. 15. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° H 22-82.733 F-D N° 00028 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 M. [V] [X] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 6 avril 2022, qui, dans l'information suivie contre lui du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants en récidive, a prononcé sur sa demande d'annulation de pièces de la procédure. Par ordonnance en date du 27 juin 2022, le président de la chambre criminelle a prescrit l'examen immédiat du pourvoi. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Ménotti, conseiller, les observations de Me Laurent Goldman, avocat de M. [V] [X], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Ménotti, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 12 mars 2021, les services de police, munis d'un mandat de recherche et d'un mandat d'arrêt visant M. [V] [X], se sont rendus dans un appartement où ils ont été reçus par la personne recherchée et sa compagne, Mme [P] [Y]. 3. Constatant que trois pains de résine de cannabis se trouvaient posés bien en vue sur le plan de travail de la cuisine, les enquêteurs ont procédé à une saisie incidente et, agissant en flagrance, ont effectué une perquisition dans l'appartement, en la seule présence de Mme [Y], M. [X] ayant quitté les lieux avec les enquêteurs venus pour l'exécution des mandats. C'est dans ces conditions que les policiers ont découvert d'autres produits stupéfiants dans différents endroits de l'appartement qu'ils ont présentés à Mme [Y], laquelle a assisté à la pesée des produits, mais n'a pas signé le procès-verbal. 4. A la suite de l'information ouverte le 26 mars 2021, M. [X] a été mis en examen le 7 octobre suivant du chef précité. 5. Il a déposé une requête en nullité le 16 décembre suivant. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 6. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a écarté la nullité de la perquisition réalisée à son domicile, alors : « 1°/ que les opérations de perquisition sont faites en présence de la personne au domicile de laquelle la perquisition a lieu ; qu'il résulte de la procédure que Mme [Y], en la seule présence de laquelle s'est déroulée la perquisition, après que M. [X], domicilié dans les lieux, ait été emmené par les fonctionnaires de police, était domiciliée dans un autre lieu, de sorte qu'en retenant, pour tenir la perquisition pour régulière, qu'elle était occupante des lieux perquisitionnés et donc légitime à assister aux opérations de perquisition, la chambre de l'instruction n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 57 et 593 du code de procédure pénale ; 2°/ que les opérations de perquisition sont faites en présence de chaque personne domiciliée au lieu auquel la perquisition a lieu ; qu'en refusant d'annuler la perquisition réalisée hors sa présence au domicile de M. [X], emmené par les fonctionnaires de police avant le début de celle-ci, la chambre de l'instruction a méconnu l'article 57 du code de procédure pénale ; 3°/ qu'à peine de nullité, le procès-verbal de perquisition doit être signé par la personne au domicile de laquelle les opérations ont eu lieu ; qu'en retenant, pour écarter la nullité du procès-verbal de perquisition, qui n'avait pas été signé par Mme [Y], présente lors des opérations, que cette formalité ne serait pas prévue à peine de nullité, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 57 et 59 du code de procédure pénale ; 4°/ que l'absence de signature du procès-verbal de perquisition cause nécessairement un grief au requérant qui conteste la présence, à son domicile, des objets qui y ont été saisis ; qu'en retenant, pour écarter la nullité du procès-verbal de perquisition non signé par Mme [Y], que M. [X], qui contestait la présence à son domicile des objets saisis, ne justifierait pas d'une atteinte à ses intérêts puisque la perquisition avait été menée en présence de sa compagne, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 57, 59, 171 et 802 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Sur le premier moyen, pris en ses deux premières branches 7. Pour rejeter les griefs pris de l'absence de M. [X] lors de la perquisition effectuée à son domicile, l'arrêt attaqué énonce que les opérations ont eu lieu en présence de Mme [Y], compagne de M. [X], qui était au même titre que ce dernier occupante des lieux et donc légitime à assister aux opérations. 8. En statuant ainsi, et dès lors qu'il suffisait de recueillir l'assentiment de l'un des occupants des lieux, la chambre de l'instruction a fait l'exacte application des dispositions visées au moyen. 9. Les griefs peuvent être écartés. Mais sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches Vu l'article 57 du code de procédure pénale : 10. Il résulte de ce texte que le procès-verbal de perquisition doit être signé par la personne ayant assisté aux opérations. 11. Pour écarter l'argumentation de la défense tendant à voir déclarer nulle la perquisition effectuée le 12 mars 2021 en raison de l'absence de M. [X] lors des opérations et du défaut de signature de Mme [Y] sur le procès-verbal, l'arrêt attaqué énonce, d'une part, que la compagne de M. [X] était occupante des lieux au même titre que lui, et donc légitime à assister aux opérations de perquisition, et, d'autre part, que M. [X] ne justifie pas de l'atteinte portée à ses intérêts du fait de l'absence de signature de Mme [Y] sur le procès-verbal de perquisition. 12. En se déterminant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé. 13. En effet, M. [X], comme toute partie, a qualité pour invoquer la méconnaissance de la formalité prise de l'absence de signature du procès-verbal de perquisition et saisie. 14. Par ailleurs, il est bien fondé à invoquer un grief résultant du défaut de signature du procès-verbal de perquisition dès lors qu'il a contesté la découverte des produits stupéfiants lors de son interrogatoire de première comparution. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 6 avril 2022, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ; RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° U 22-86.171 F-D N° 00120 GM 5 JANVIER 2023 NON-LIEU A STATUER M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 M. [Z] [X] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Basse-Terre, en date du 6 octobre 2022, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de violence avec usage d'une arme ayant entraîné la mort sans intention de la donner en récidive, a ordonné la prolongation exceptionnelle de sa détention provisoire. Sur le rapport de M. de Lamy, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [Z] [X], et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, M. de Lamy, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu l'article 606 du code de procédure pénale : 1. Il ressort de la fiche pénale versée au dossier que M. [Z] [X] a été jugé le 18 novembre 2022 par la cour d'assises de la Guadeloupe et condamné à la peine, notamment, de douze ans de réclusion criminelle avec maintien en détention. 2. Il s'ensuit que le pourvoi formé par l'intéressé est devenu sans objet. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° N 22-86.004 F-D N° 00098 MAS2 4 JANVIER 2023 NON-LIEU A STATUER M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 4 JANVIER 2023 M. [Y] [P] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 28 septembre 2022, qui, dans la procédure suivie contre lui du chef de viol, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Hairon, conseiller, les observations de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de M. [Y] [P], et les conclusions de M. Quintard, avocat général, après débats en l'audience publique du 4 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Hairon, conseiller rapporteur, Mme Ingall-Montagnier, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu l'article 606 du code de procédure pénale : 1. Par ordonnance de mise en accusation en date du 21 octobre 2022, le juge d'instruction a renvoyé M. [Y] [P] devant la cour d'assises des Alpes-Maritimes, et rappelé que le mandat de dépôt décerné à son encontre conservait sa force exécutoire en application de l'article 181 du code de procédure pénale. 2. En application de ces dispositions, l'ordonnance de règlement rend caduc le titre de détention, sur les effets duquel l'arrêt s'est prononcé. 3. M. [P] se trouvant ainsi détenu par l'effet d'une nouvelle décision prise par le juge d'instruction et exécutoire nonobstant appel, le pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction, qui, le 28 septembre 2022, dans la même procédure, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire, est devenu sans objet. PAR CES MOTIFS, la Cour : DIT n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Q 22-80.969 F-D N° 00037 MAS2 10 JANVIER 2023 REJET M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 M. [N] [R] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Douai, 6e chambre, en date du 17 janvier 2022, qui, pour violation du secret professionnel, l'a condamné à 5 000 euros d'amende et à trois mois d'interdiction professionnelle. Des mémoires ampliatif et personnel ont été produits. Sur le rapport de M. Michon, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de M. [N] [R], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Michon, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. Suite au décès d'[X] [E], enfant mineure de M. [O] [M] et Mme [H] [E], une information judiciaire a été ouverte pour coups mortels aggravés. Ont été mis en examen les parents de l'enfant, ainsi que ses grands-parents, Mme [I] [E], assistée par M. [C] [F], avocat, et M. [K] [E], assisté par M. [N] [R], avocat. 3. M. [R] s'est entretenu de la procédure avec M. [K] [E] en présence constante de son épouse, et hors la présence de l'avocat de cette dernière. 4. Des écoutes téléphoniques ayant révélé de possibles violations du secret de l'instruction, une enquête a été diligentée, à la suite de laquelle M. [R] a été renvoyé devant le tribunal correctionnel pour violation du secret professionnel. 5. Le tribunal l'a déclaré coupable par jugement du 7 juillet 2020, dont M. [R] a relevé appel. Examen de la recevabilité du mémoire personnel 6. Le mémoire personnel, reçu au greffe de la Cour de cassation le 22 février 2022, soit plus d'un mois après la déclaration de pourvoi, faite le 20 janvier 2022, ne remplit pas les conditions exigées par l'article 585 du code de procédure pénale et ne saisit pas la Cour de cassation des moyens qu'il pourrait contenir. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses première et troisième branches, et le second moyen 7. Les griefs ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 8. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a confirmé le jugement du tribunal correctionnel de Valenciennes du 7 juillet 2020 ayant déclaré M. [R] coupable de violation du secret professionnel, a condamné M. [R] au paiement d'une amende de 5 000 euros et a prononcé à son égard une interdiction d'exercice professionnel de trois mois, alors : « 2°/ que l'infraction de violation du secret professionnel de l'avocat suppose la révélation par l'avocat à un tiers d'une information à caractère secret ; qu'en conséquence, ne porte nullement atteinte au secret professionnel auquel il est tenu l'avocat qui s'entretient d'une affaire en cours d'instruction avec son client, mis en examen, et son épouse, également mise en examen dans la même affaire, chaque personne mise en examen étant partie à la procédure et disposant du droit d'accéder et de prendre connaissance des éléments du dossier d'instruction ; que dès lors, en jugeant que Maître [R], avocat de M. [E], avait violé le secret professionnel auquel il était tenu en recevant ensemble les deux époux mis en examen et en évoquant le dossier devant Mme [E], cependant que les époux [E] étaient tous les deux parties à la procédure comme étant mis en examen, de sorte que Maître [R] n'avait au cours de l'entretien litigieux aucunement révélé à un tiers une information à caractère secret, la cour d'appel a violé l'article 226-13 du code pénal. » Réponse de la Cour 9. Pour déclarer le prévenu coupable de violation du secret professionnel, l'arrêt attaqué énonce notamment, par motifs propres et adoptés, que le fait de s'entretenir avec son client en présence de l'épouse de celui-ci, certes mise en cause dans la même procédure, mais aux intérêts divergents et défendue par un conseil distinct, caractérise cette infraction. 10. En statuant ainsi, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen pour les motifs qui suivent. 11. Tout d'abord, aucun texte du code de procédure pénale ou du règlement intérieur normalisé de la profession d'avocat n'autorise l'avocat à communiquer des renseignements tirés d'une procédure pénale à une personne qui n'est pas son client, fût-elle par ailleurs partie à la procédure. 12. Ensuite, il n'est pas soutenu, et encore moins démontré, que la communication des éléments du dossier d'instruction à Mme [I] [E] aurait été indispensable à l'exercice des droits de la défense du client de l'avocat. 13. Dès lors, le moyen n'est pas fondé. 14. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° W 22-82.838 F-D N° 00039 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION SANS RENVOI M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 Mme [S] [W] a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 8e chambre, en date du 13 avril 2022, qui, pour diffamation publique envers une personne chargée d'un mandat public, l'a condamnée à 500 euros d'amende avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils. Un mémoire personnel a été produit. Sur le rapport de Mme Ménotti, conseiller, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Ménotti, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. Le 12 juillet 2020, M. [G] [M], premier adjoint au maire de [Localité 3], a déposé plainte au commissariat d'[Localité 1] contre Mme [S] [W], qui, sur le réseau Facebook, l'a mis en cause en ces termes : « A [Localité 3], LREM et le Modem ont désigné un 1er adjoint au Maire déjà condamné pour des violences conjugales ». 3. Le 15 juillet 2020, le parquet d'Ajaccio a transmis la procédure pour compétence au procureur de la République de Versailles qui, le 3 août 2020, a saisi le commissaire de police de [Localité 2] pour procéder à l'audition de Mme [W], laquelle est intervenue le 27 octobre 2020. 4. Les juges du premier degré ont condamné Mme [W] pour diffamation publique envers un citoyen chargé d'un mandat public. 5. Mme [W] a relevé appel de cette décision, le ministère public appel incident. Examen des moyens Sur le premier moyen 6. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le second moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné Mme [W] pour diffamation publique, alors que les faits étaient prescrits depuis le 12 octobre 2020, soit trois mois après le dépôt de plainte du 12 juillet précédent. Réponse de la Cour Vu l'article 65, alinéas 1 et 2, de la loi du 29 juillet 1881 : 8. Selon ce texte, la prescription en matière de délits de presse ne peut être interrompue que par des actes de poursuite ou d'instruction réguliers survenant dans le délai de trois mois à compter des faits ou du dernier de ces actes s'il en a été fait. Avant l'engagement des poursuites, seules des réquisitions aux fins d'enquête articulant et qualifiant l'infraction à raison de laquelle l'enquête est ordonnée sont interruptives de prescription. 9. En l'espèce, la publication litigieuse du 10 juillet 2020 a fait courir la prescription de trois mois, laquelle n'a été interrompue ni par la plainte simple de M. [M] du 12 juillet 2020, ni par la transmission de la procédure au procureur de Versailles le 15 juillet suivant, ni par le soit-transmis de ce dernier mandatant le commissaire de police pour procéder à l'audition de Mme [W] le 3 août 2020 dès lors que ces réquisitions n'articulent et ne qualifient pas les faits conformément aux prescriptions de l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881. 10. La prescription était donc acquise le 10 octobre 2020, soit antérieurement à l'audition de Mme [W] le 27 octobre suivant. 11. En l'absence d'acte interruptif de prescription dans le délai de trois mois couru à compter de la publication litigieuse du 10 juillet 2020, la cour d'appel, à laquelle il appartenait de relever d'office une telle exception péremptoire et d'ordre public, a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé. 12. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Portée et conséquences de la cassation 13. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 13 avril 2022 ; CONSTATE que les faits sont prescrits ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; RAPPELLE que, du fait de la présente décision, le jugement de première instance perd toute force exécutoire ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
INCA/JURITEXT000046990163.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° Z 22-84.796 F-D N° 00117 5 JANVIER 2023 GM IRRECEVABILITÉ M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 5 JANVIER 2023 M. [N] [Y], partie civile, a présenté, par mémoire spécial reçu le 23 décembre 2022, une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi formé par lui contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 7 avril 2022, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée, du chef d'escroquerie, a confirmé l'ordonnance de non-lieu du juge d'instruction. Sur le rapport de Mme Chafaï, conseiller référendaire, et les conclusions de Mme Viriot-Barrial, avocat général, après débats en l'audience publique du 5 janvier 2023 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Chafaï, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. 1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée : « L'article 584 du Code de Procédure Pénale disposant que : « Le demandeur en cassation, soit en faisant sa déclaration, soit dans les dix jours suivants, peut déposer, au greffe de la juridiction qui a rendu la décision attaquée, un mémoire, signé par lui, contenant ses moyens de cassation. Le greffier lui en délivre reçu » L'avocat général considérant que ce texte réserve au seul requérant la possibilité de déposer et de signer un mémoire personnel devant la Cour de Cassation, cette disposition ne paraît pas conforme à la Constitution au regard de l'accessibilité à la loi qui découle de l'article 5 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen qui dispose : « La Loi n'a le droit de défendre que les actions nuisibles à la Société. Tout ce qui n'est pas défendu par la Loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu'elle n'ordonne pas ». 2. La question, qui n'est soutenue par aucun mémoire, n'explicite pas en quoi les dispositions de ce texte porteraient atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et n'est dès lors pas recevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : DECLARE IRRECEVABLE la question prioritaire de constitutionnalité ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du cinq janvier deux mille vingt-trois.
INCA/JURITEXT000046990175.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° J 22-82.712 F-D N° 00036 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 M. [S] [C], partie civile, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 6e section, en date du 2 décembre 2021, qui, dans l'information suivie sur sa plainte contre personne non dénommée, des chefs de dénonciation calomnieuse, faux témoignage et abus de faiblesse, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction. Un mémoire a été produit. Sur le rapport de Mme Thomas, conseiller, les observations de Me Bouthors, avocat de M. [S] [C], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Thomas, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit. 2. M. [S] [C] a porté plainte et s'est constitué partie civile des chefs de dénonciation calomnieuse et faux témoignage à la suite des déclarations de M. [U] [G], confortées par le témoignage de son amie, Mme [J] [V], l'accusant d'être l'auteur de la violente agression subie par M. [G] le 23 janvier 2014 dans le hall de son immeuble, cette dénonciation ayant abouti à une décision de classement sans suite. 3. Dans la même plainte, M. [C], exposant être vulnérable comme atteint du syndrome d'Asperger, a dénoncé des faits d'abus de faiblesse à l'encontre de Mme [V], dont il a auparavant été proche et à laquelle il a remis de substantielles sommes d'argent. 4. À l'issue de l'information judiciaire, le juge d'instruction a, par ordonnance du 22 juin 2020, dit n'y avoir lieu à suivre. 5. M. [C] a relevé appel de cette décision. Examen des moyens Sur le premier moyen 6. Il n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Mais sur le second moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à suivre du chef d'abus de faiblesse, alors « qu'en se bornant à dire que les affirmations opposées des parties ne peuvent suffire à caractériser des charges suffisantes d'un abus de faiblesse, la cour n'a pas rempli son office et a manqué de répondre aux articulations essentielles du mémoire de la partie civile (mémoire p. 29 – prod.) montrant que dans un court laps de temps, M. [C] avait été mis en situation de donner à Mme [V] de fortes sommes qu'elle ne remboursera jamais ; qu'en ne s'expliquant nullement sur la vulnérabilité particulière du requérant atteint du symptôme d'Asperger, la cour a méconnu l'article 223-15-2 du code pénal, ensemble les articles 211, 212, 591 et 593 du code de procédure pénale. » Réponse de la Cour Vu l'article 593 du code de procédure pénale : 8. Tout arrêt de la chambre de l'instruction doit comporter les motifs propres à justifier la décision et répondre aux articulations essentielles des mémoires des parties. L'insuffisance ou la contradiction des motifs équivaut à leur absence. 9. Pour confirmer l'ordonnance de non-lieu du chef d'abus de faiblesse, l'arrêt attaqué énonce que Mme [V], à l'opposé des termes de la plainte, a contesté avoir abusé de la faiblesse du plaignant, ayant seulement accepté des cadeaux, et affirmé avoir proposé le remboursement des sommes prêtées. 10. En se déterminant par ces seuls motifs, inopérants à établir l'absence de charges suffisantes au regard des autres éléments du dossier, et sans répondre aux articulations essentielles du mémoire qui faisait valoir que le plaignant était en situation de faiblesse, que la personne désignée dans la plainte en avait profité en connaissance de cause et qu'elle avait bénéficié de la remise de substantielles sommes d'argent, disproportionnées au regard des revenus du plaignant, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision. 11. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 2 décembre 2021, mais en ses seules dispositions ayant confirmé le non-lieu à suivre du chef d'abus de faiblesse, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée, RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant : N° R 22-81.476 F-D N° 00035 MAS2 10 JANVIER 2023 CASSATION PARTIELLE SANS RENVOI M. BONNAL président, R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E ________________________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, DU 10 JANVIER 2023 La société FMC automobiles a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 18e chambre, en date du 7 février 2022, qui, pour contraventions au code de la route, l'a condamnée à cinq amendes de 1 000 euros. Un mémoire personnel a été produit. Sur le rapport de M. Dary, conseiller, et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 29 novembre 2022 où étaient présents M. Bonnal, président, M. Dary, conseiller rapporteur, Mme Labrousse, conseiller de la chambre, et Mme Sommier, greffier de chambre, la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit. 2. La société FMC automobiles a été citée devant le tribunal de police pour cinq contraventions de non-transmission de l'identité et de l'adresse du conducteur du véhicule, faits commis les 13, 14 et 15 juillet 2019, ayant donné lieu à l'envoi de cinq avis. 3. Ces contraventions ont fait suite à cinq infractions d'excès de vitesse relevées par appareils de contrôle automatique homologués, les 17, 21, 23 et 24 mai 2019, ayant donné lieu à autant d'avis de contravention initiale. 4. Par jugement du 16 novembre 2020, le tribunal de police a déclaré la société FMC automobiles coupable des infractions poursuivies et l'a condamnée au paiement de cinq amendes de 1 875 euros. 5. La société prévenue a formé appel principal et l'officier du ministère public a interjeté appel incident le même jour. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche, et le deuxième moyen 6. Ils ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi au sens de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 7. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, en violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 537, 593 et 801 du code de procédure pénale, omis de répondre au troisième moyen soulevé, tel qu'indiqué dans les notes d'audience, relatif à la commission, un samedi et un jour férié, en l'espèce les 13 et 14 juillet 2019, des infractions de non-désignation relevées par procès-verbaux n° 8303935431, n° 8307966431, n° 8307298431 et n° 8308787421, alors qu'en vertu de l'article 801 du code de procédure pénale, tout délai prévu par une disposition de procédure pénale pour l'accomplissement d'un acte ou d'une formalité expire le dernier jour à vingt-quatre heures, mais que le délai qui expirerait normalement un samedi ou un dimanche ou un jour férié ou chômé est prorogé jusqu'au premier jour ouvrable suivant ; que le délai de désignation au sens de l'article L. 121-6 du code de la route est un délai qui permet d'effectuer un acte ou une formalité au sens du code de procédure pénale ; que, dès lors, il ne peut être reproché au prévenu de ne pas avoir désigné le conducteur un samedi ou un jour férié. Réponse de la Cour 8. Le demandeur ne saurait reprocher à l'arrêt attaqué de ne pas avoir répondu à son argumentation relative à l'application des dispositions de l'article 801 du code de procédure pénale dès lors que l'arrêt n'en fait pas mention et que ladite argumentation n'a pas été développée dans des conclusions régulièrement déposées. 9. Ainsi, le moyen sera écarté. Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 10. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a, en violation des articles L. 121-6, L. 130-9, L. 121-1 du code de la route et 537 du code de procédure pénale, déclaré la prévenue coupable d'avoir commis les contraventions de non désignation du conducteur du véhicule, alors que la date d'envoi des avis de contravention faisant suite aux excès de vitesse, les 28, 29 mai et 3 juin 2019, n'est pas mentionnée dans les procès-verbaux de constatation des infractions poursuivies ; que dès lors, le point de départ du délai de quarante-cinq jours au cours duquel le représentant légal avait l'obligation de désigner le conducteur n'est pas établi ; que, par conséquent, il n'est pas démontré que le délai précité était échu les 13, 14 et 15 juillet 2019, dates de commission des infractions apparaissant dans la prévention ; qu'ainsi la preuve de l'absence de désignation à l'issue du délai de quarante-cinq jours, élément matériel de l'infraction, n'est pas rapportée. Réponse de la Cour Vu l'article L. 121-6 du code de la route : 11. Aux termes de ce texte, le représentant légal de la personne morale titulaire du certificat d'immatriculation d'un véhicule ayant donné lieu à un avis de contravention au code de la route dispose d'un délai de quarante-cinq jours à compter de l'envoi ou de la remise de l'avis de contravention pour indiquer l'identité et l'adresse du conducteur du véhicule lors de l'infraction. 12. Il résulte de l'examen des pièces de procédure dont la Cour de cassation a le contrôle que les quatre procès-verbaux de contravention initiale ayant donné lieu aux avis n° 3613453316, n° 3647125316, n° 3693401346 et n° 3694828396 ont été envoyés à la société FMC automobiles, les 28 et 29 mai 2019, de sorte, ainsi que l'a relevé l'arrêt attaqué, qu'à l'expiration du délai de quarante-cinq jours, soit les 13 et 14 juillet 2019, le représentant légal n'ayant pas transmis à l'autorité désignée sur ces avis l'identité et l'adresse des conducteurs en cause, les infractions de non-transmission de l'identité et de l'adresse du conducteur du véhicule étaient constituées. 13. En revanche, pour ce qui concerne l'infraction initiale d'excès de vitesse ayant donné lieu à l'avis n° 3609663336, celui-ci ayant été envoyé le 3 juin 2019, le délai de quarante-cinq jours n'expirait que le 18 juillet suivant, de sorte que, contrairement aux énonciations de l'arrêt attaqué, à la date de la prévention, le 15 juillet précédent, le délai n'était pas échu. 14. La cassation est par conséquent encourue de ce chef. Portée et conséquences de la cassation 15. La cassation à intervenir ne concerne que les dispositions relatives à la déclaration de culpabilité et à la peine concernant la contravention de non-transmission de l'identité et de l'adresse du conducteur du véhicule, commise le 15 juillet 2019 à [Localité 2], [Adresse 1]. Les autres dispositions seront donc maintenues. 16. La cassation aura lieu sans renvoi, la Cour de cassation étant en mesure d'appliquer directement la règle de droit et de mettre fin au litige, ainsi que le permet l'article L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 7 février 2022, mais en ses seules dispositions relatives à la déclaration de culpabilité et à la peine concernant la contravention de non-transmission de l'identité et de l'adresse du conducteur du véhicule, commise le 15 juillet 2019 à [Localité 2], [Adresse 1], toutes autres dispositions étant expressément maintenues ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; RAPPELLE que du fait de la présente décision, le jugement de première instance perd toute force exécutoire s'agissant de celle seule contravention ; ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 21 F-D Pourvoi n° E 21-21.846 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 La société Beauté Prestige International Shiseido EMEA, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 21-21.846 contre l'arrêt rendu le 30 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 1 - chambre 3), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Amazon Europe Core, société à responsabilité limitée, 2°/ à la société Amazon services Europe, société à responsabilité limitée, ayant toutes deux leur siège [Adresse 1] (Luxembourg), 3°/ à la société Amazon France logistique, société par actions simplifiée unipersonnelle, 4°/ à la société Amazon France services, société par actions simplifiée unipersonnelle, ayant toutes deux leur siège [Adresse 3], défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA, de la SARL Delvolvé et Trichet, avocat des sociétés Amazon Europe Core, Amazon services Europe, Amazon France logistique et Amazon France services, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué, rendu en référé (Paris, 30 juin 2021), le groupe Amazon, notamment par ses sociétés Amazon Europe Core, Amazone Services Europe, Amazon France logistique, Amazon France services (les sociétés Amazon), commercialise des produits, soit directement, soit par l'intermédiaire de vendeurs tiers, via ses plateformes en ligne, les sites français amazon.fr et étrangers, amazon.uk, amazon.de, amazon.it, amazon.es. 2. La société Beauté Prestige International Shiseido EMEA (la société BPI), entité française du groupe international Shiseido, qui crée et commercialise des parfums de marque dont elle est licenciée, a organisé en France et dans l'Espace Economique Européen un réseau de distribution sélective pour la commercialisation de ses parfums. 3. Soutenant que les sociétés Amazon procédaient à la vente non autorisée de ses parfums, directement ou par des vendeurs tiers sur les plateformes Amazon, avec de possibles livraisons en France, la société BPI les a assignées en référé pour obtenir la cessation des actes illicites. Elle a, en cause d'appel, demandé en outre le paiement d'une provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice subi. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. La société BPI fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à référé et de rejeter ses demandes de provision et de communication de pièces, alors : « 1°/ que même si le référé est devenu sans objet au moment où elle statue, il appartient à la cour d'appel de déterminer si la demande était justifiée lorsque le premier juge avait statué ; qu'en l'espèce, pour infirmer la décision du juge des référés ayant notamment ordonné aux sociétés du groupe Amazon de cesser immédiatement et pour l'avenir la commercialisation en France, par le biais de ses plateformes française, allemande, anglaise, italienne et espagnole, des produits fabriqués et commercialisés par la société BPI, la cour d'appel a retenu qu'il était constant qu'à la date à laquelle le premier juge a statué, la société Amazon Services Europe avait procédé au retrait sur Amazon.fr des offres de produits protégés par ce réseau, le premier juge lui en ayant donné acte, le constat réalisé à la demande des sociétés Amazon le 6 juillet 2020 établissant que les deux offres identifiées par le constat d'huissier à la demande de la société BPI le même jour mais antérieurement avaient été supprimées ; qu'en statuant de la sorte, quand il lui appartenait de déterminer si les demandes présentées par la société BPI n'étaient pas fondées au jour où le premier juge avait statué, et alors qu'elle a constaté que postérieurement au prononcé de l'ordonnance entreprise, des offres de produits commercialisés par la société Beauté Prestige avaient été proposées sur la plateforme amazon.fr avant d'en être retirées, la cour d'appel a violé les articles 561 et 873 du code de procédure civile. 2°/ que constitue un trouble manifestement illicite la vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective par des tiers non autorisés ; que le juge des référés a le pouvoir d'ordonner à un hébergeur de contenus internet de procéder au retrait et à la suppression pour l'avenir des annonces de vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective ou exclusive dès lors que les mesures ordonnées sont proportionnées au but poursuivi et n'aboutissent pas à imposer à cet hébergeur une obligation générale de surveillance des informations qu'il transmet ou stocke ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'Amazon ne contestait pas l'existence ni la licéité du réseau de distribution sélective invoqué par la société BPI, et qu'avaient été constatées les ventes de produits dûment protégés par ce réseau de distribution sur les plateformes française, allemande, anglaise, italienne et espagnole d'Amazon (Ibid.) ; que pour rejeter les demandes de la société BPI tendant à voir ordonner la cessation de la commercialisation par des vendeurs professionnels de produits du groupe Shiseido sur ces plateformes, la cour d'appel a retenu que la responsabilité des sociétés Amazon ne pouvait être recherchée qu'à la condition que ces dernières ne puissent se prévaloir du statut d'hébergeur, et a considéré qu'en l'occurrence, il n'était pas établi avec l'évidence requise en référé qu'Amazon avait exercé un rôle actif dans les processus de ventes litigieuses et ainsi excédé son rôle d'hébergeur ; qu'en statuant de la sorte, quand les sociétés Amazon, quand bien même il n'aurait pas été démontré qu'elles n'avaient pas dépassé le rôle de simple hébergeur s'agissant des ventes en cause, pouvaient se voir imposer en référé l'obligation de faire cesser les ventes illicites de produits qui leur avaient été signalées par la société BPI, comme méconnaissant la protection que leur conférait son réseau de distribution sélective, et constituant en outre des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, la cour d'appel a violé les articles 6-1-2 et 6-1-7 de la loi du 21 juin 2004, L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile ; 3°/ qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence ; qu'en outre, tout fait quelconque causant à autrui un dommage oblige son auteur à le réparer ; qu'en retenant que la responsabilité des sociétés Amazon dans les faits dénoncés dépendait "de la détermination de leur qualification d'hébergeur ou d'éditeur, laquelle repose sur le rôle actif ou passif attribué à ces sociétés dans le processus de vente de produits en violation d'un réseau de distribution sélective" et qu'en l'occurrence, les éléments invoqués par la société BPI étaient insuffisants pour établir, avec l'évidence requise en référé, qu'Amazon avait eu un rôle actif dans le processus de vente des produits litigieux, sans prendre en considération, comme elle y était invitée, les ventes directes réalisées par Amazon de produits protégés par le réseau de distribution sélective de la société BPI, ce qui était de nature à engager sa responsabilité personnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873 du code de procédure civile ; 4°/ que le juge des référés, saisi d'une demande tendant à la cessation d'un trouble manifestement illicite, peut ordonner toute mesure destinée à y mettre un terme, quand bien même il serait amené à trancher une contestation sérieuse ; que pour dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu que la responsabilité des sociétés Amazon supposait que ces dernières puissent être qualifiées d'éditeur, ce qui impliquait que soit établi le rôle actif des sociétés Amazon dans le processus de vente des produits et qu'en l'occurrence cette preuve n'était pas rapportée "avec l'évidence requise en référé" ; qu'en statuant de la sorte, quand le trouble manifestement illicite invoqué par la société BPI était caractérisé par les ventes de ses produits via les plateformes Amazon, en dehors du réseau de distribution sélective qu'elle avait mis en place et qu'il lui incombait de déterminer si les sociétés Amazon avaient ou non la qualité d'éditeur ou de simple hébergeur, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé l'article 873 du code de procédure civile ; 5°/ que la société BPI faisait valoir que pour être référencé par Amazon et avoir accès à ses plateformes de vente, les tiers-vendeurs devaient conclure un contrat avec la société Amazon Services Europe (contrat ASE) et un autre avec la société Amazon Payment Europe (contrat APE) ; qu'elle soulignait qu'aux termes de l'article 11 du contrat ASE, Amazon proposait aux tiers-vendeurs un "accord d'autofacturation" consistant en l'achat de certains produits directement par Amazon, avec émission d'une facture en leur nom et pour leur compte ; qu'en vertu du contrat ASE, Amazon proposait également aux tiers-vendeurs différents services pour faciliter les ventes, tels des modalités de paiement intégré, des services de stockage, ou des actions de promotion ou de publicité ; que la société BPI faisait également valoir que les deux contrats ASE et APE permettaient à Amazon de rembourser au consommateur final une transaction du vendeur-tiers, en application de la "garantie A à Z", et de bénéficier d'un droit d'usage sur les éléments, marques, logos ou avis du vendeur-tiers ; qu'elle soulignait encore qu'Amazon était rémunérée par les vendeurs-tiers par des commissions dépendant notamment du nombre de transactions effectuées ; qu'en se bornant à énoncer, sans procéder à la moindre analyse des éléments produits par la société BPI, que "de la complexité de ce corpus contractuel, il s'évince que le rôle actif des sociétés appelantes et spécialement de la société Amazon Services Europe et par conséquent l'absence de qualité d'hébergeur, comme l'a retenu le premier juge, ne ressort pas avec l'évidence requise en référé mais au contraire nécessite un examen au fond qui échappe au pouvoir du juge des référés", la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873 du code de procédure civile ; 6°/ que la violation de l'interdiction de revente hors réseau est sanctionnée par le droit de l'Etat sur le territoire duquel le dommage se manifeste ; que pour infirmer l'ordonnance entreprise et dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu qu'en application de l'article L. 442-2 du code de commerce, un revendeur non agréé dans un réseau de distribution sélective peut librement vendre en France, sans se rendre responsable d'une violation dudit réseau, lorsqu'il s'est approvisionné ou est établi dans un pays ne faisant pas l'objet d'un réseau de distribution sélective, et a considéré qu'en l'occurrence, la société BPI ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un réseau de distribution sélective dans l'un des pays où étaient basées les plateformes ; qu'en statuant de la sorte, quand la société BPI sollicitait la cessation de la commercialisation de ses produits sur le territoire français, protégé par son réseau de distribution sélective dont la cour d'appel a admis le caractère licite, de sorte qu'il était opposable aux tiers, y compris implantés hors du territoire protégé par ce réseau, la cour d'appel a violé l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873 du code de procédure civile ; 7°/ qu'il incombe au revendeur hors réseau de rapporter la preuve qu'il a licitement acquis les produits pour les revendre ; qu'en jugeant que la société BPI, sur qui pesait la charge de la preuve, ne justifiait pas que ses produits commercialisés sur les sites amazon.co.uk, amazon.de, amazon.it et amazon.es ont été acquis en France en violation du seul réseau de distribution sélective démontré, soit le réseau français, quand il incombait aux revendeurs concernés de prouver qu'ils avaient licitement acquis ses produits en vue de leur revente, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil. » Réponse de la Cour 5. En premier lieu, après avoir exactement énoncé que la juridiction des référés, saisie en application de l'article 873 du code de procédure civile, doit, tant en première instance qu'en appel, se placer, pour ordonner ou refuser des mesures conservatoires ou de remise en état, à la date à laquelle elle prononce sa décision et rappelé que l'existence et la licéité d'un réseau de distribution sélective des produits de la société BPI en France n'étaient pas contestées par les sociétés Amazon, l'arrêt relève qu'il est constant qu'à la date où le premier juge a statué, le 21 juillet 2020, la société Amazon Services Europe avait procédé au retrait sur Amazon.fr des offres de produits protégés par ce réseau, le constat, réalisé à la demande des sociétés Amazon le 6 juillet 2020, établissant que les deux offres identifiées par le constat du même jour mais antérieur, à la demande de la société BPI, avaient été supprimées. Il ajoute qu'il résulte du constat d'huissier de justice dressé le 20 décembre 2020 à la demande des sociétés Amazon que les quelques offres encore présentes sur amazon.fr, postérieurement à l'ordonnance entreprise, ont été supprimées. 6. En cet état, c'est à bon droit qu'abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, la cour d'appel a dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de la société BPI, s'agissant des ventes en France depuis le site Amazon.fr, et, par conséquent, a infirmé la décision du premier juge de ce chef. 7. En second lieu, ayant constaté qu'il n'était versé aux débats par la société BPI aucun contrat de distribution sélective signé entre elle et un ou plusieurs distributeurs dans l'un ou l'autre des pays vers lesquels les sites amazon.co.uk, amazon.de, amazon.it et amazon.es dirigeaient leur activité, c'est sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel en a déduit que cette société ne justifiait pas que ses produits commercialisés sur ces sites avaient été acquis en France en violation du seul réseau de distribution sélective démontré, à savoir le réseau français, de sorte que le caractère manifestement illicite des ventes à partir de ces sites n'était pas établi avec l'évidence requise en référé. 8. Le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus. Sur le second moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 9. La société BPI fait le même grief à l'arrêt, alors « que la cassation du chef de dispositif d'une décision de justice entraîne l'annulation de tous les chefs de dispositif de cette décision qui entretiennent avec le chef cassé un lien de d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que pour rejeter la demande de la société BPI en versement d'une provision à valoir sur son préjudice, la cour d'appel a retenu que "le trouble manifestement illicite résultant de la violation d'un réseau de distribution sélective n'étant pas considéré comme établi", il n'y avait pas lieu de faire droit à cette demande ; qu'il en résulte que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, qui reproche à la cour d'appel d'avoir rejeté les demandes de la société BPI tendant à la mise en oeuvre des mesures propres à faire cesser le trouble manifestement illicite résultant des actes de revente de produits en dehors de son réseau de distribution sélective entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt attaqué ayant rejeté la demande de versement d'une provision formée par la société BPI, en application de l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 10. Le rejet du premier moyen rend le moyen sans portée. Mais sur ce moyen, pris en sa troisième branche Enoncé du moyen 11. La société BPI fait le même grief à l'arrêt , alors « que la société Beauté Prestige International faisait valoir que les sociétés du groupe Amazon avaient procédé à des ventes directes de produits protégés par son réseau de distribution, et qu'Amazon avait admis dans ses écritures avoir retiré de nombreuses offres de tels produits, y compris après le prononcé de l'ordonnance de référé entreprise ; qu'en s'abstenant de rechercher s'il n'était pas ainsi établi qu'Amazon avait commis des actes de concurrence déloyale engageant sa responsabilité et justifiant l'octroi d'une provision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 442-2 du code de commerce, 1240 du code civil et 873, alinéa 2, du code de procédure civile : 12. Aux termes du premier de ces textes, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services, de participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence. 13. Aux termes du deuxième, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. 14. Aux termes du troisième, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce, statuant en référé, peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. 15. Pour rejeter la demande de provision en réparation du préjudice subi formée par la société BPI, l'arrêt retient que le trouble manifestement illicite résultant de la violation d'un réseau de distribution sélective n'a pas été considéré comme établi. 16. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si les sociétés Amazon, ayant admis avoir procédé à des ventes directes de produits protégés par le réseau de distribution avant de retirer ces offres, n'avaient pas commis des actes engageant leur responsabilité de nature à justifier l'octroi d'une provision, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de provision formée par la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 30 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne les sociétés Amazon Europe Core, Amazone Services Europe, Amazon France logistique et Amazon France services aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés Amazon Europe Core, Amazone Services Europe, Amazon France logistique et Amazon France services et les condamne in solidum à payer à la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA. PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Beauté Prestige International fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé et d'avoir rejeté ses demandes de provision et de communication de pièces ; Alors 1°) que même si le référé est devenu sans objet au moment où elle statue, il appartient à la cour d'appel de déterminer si la demande était justifiée lorsque le premier juge avait statué ; qu'en l'espèce, pour infirmer la décision du juge des référés ayant notamment ordonné aux sociétés du groupe Amazon de cesser immédiatement et pour l'avenir la commercialisation en France, par le biais de ses plateformes française, allemande, anglaise, italienne et espagnole, des produits fabriqués et commercialisés par la société Beauté Prestige International, la cour d'appel a retenu qu'il était constant qu'à la date à laquelle le premier juge a statué, la société Amazon Services Europe avait procédé au retrait sur Amazon.fr des offres de produits protégés par ce réseau, le premier juge lui en ayant donné acte, le constat réalisé à la demande des sociétés Amazon le 6 juillet 2020 établissant que les deux offres identifiées par le constat d'huissier à la demande de la société Beauté Prestige International le même jour mais antérieurement avaient été supprimées ; qu'en statuant de la sorte, quand il lui appartenait de déterminer si les demandes présentées par la société Beauté Prestige International n'étaient pas fondées au jour où le premier juge avait statué, et alors qu'elle a constaté que postérieurement au prononcé de l'ordonnance entreprise, des offres de produits commercialisés par la société Beauté Prestige avaient été proposées sur la plate-forme amazon.fr avant d'en être retirées, la cour d'appel a violé les articles 561 et 873 du code de procédure civile ; Alors 2°) que constitue un trouble manifestement illicite la vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective par des tiers non autorisés ; que le juge des référés a le pouvoir d'ordonner à un hébergeur de contenus internet de procéder au retrait et à la suppression pour l'avenir des annonces de vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective ou exclusive dès lors que les mesures ordonnées sont proportionnées au but poursuivi et n'aboutissent pas à imposer à cet hébergeur une obligation générale de surveillance des informations qu'il transmet ou stocke ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé (arrêt, p. 9, 9ème §) qu'Amazon ne contestait pas l'existence ni la licéité du réseau de distribution sélective invoqué par la société Beauté Prestige International, et qu'avaient été constatées les ventes de produits dument protégés par ce réseau de distribution sur les plateformes française, allemande, anglaise, italienne et espagnole d'Amazon (Ibid.) ; que pour rejeter les demandes de la société Beauté Prestige International tendant à voir ordonner la cessation de la commercialisation par des vendeurs professionnels de produits du groupe Shiseido sur ces plateformes, la cour d'appel a retenu que la responsabilité des sociétés Amazon ne pouvait être recherchée qu'à la condition que ces dernières ne puissent se prévaloir du statut d'hébergeur, et a considéré qu'en l'occurrence, il n'était pas établi avec l'évidence requise en référé qu'Amazon avait exercé un rôle actif dans les processus de ventes litigieuses et ainsi excédé son rôle d'hébergeur (arrêt, p. 10, 1er à 5ème §) ; qu'en statuant de la sorte, quand les sociétés Amazon, quand bien même il n'aurait pas été démontré qu'elles n'avaient pas dépassé le rôle de simple hébergeur s'agissant des ventes en cause, pouvaient se voir imposer en référé l'obligation de faire cesser les ventes illicites de produits qui leur avaient été signalées par la société Beauté Prestige International, comme méconnaissant la protection que leur conférait son réseau de distribution sélective, et constituant en outre des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, la cour d'appel a violé les articles 6-1-2 et 6-1-7 de la loi du 21 juin 2004, L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile ; Alors 3°) qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services de participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence ; qu'en outre, tout fait quelconque causant à autrui un dommage oblige son auteur à le réparer ; qu'en retenant que la responsabilité des sociétés Amazon dans les faits dénoncés dépendait « de la détermination de leur qualification d'hébergeur ou d'éditeur, laquelle repose sur le rôle actif ou passif attribué à ces sociétés dans le processus de vente de produits en violation d'un réseau de distribution sélective » (arrêt, p. 10, 1er §) et qu'en l'occurrence, les éléments invoqués par la société Beauté Prestige International étaient insuffisants pour établir, avec l'évidence requise en référé, qu'Amazon avait eu un rôle actif dans le processus de vente des produits litigieux (Ibid., 2ème à 5ème §), sans prendre en considération, comme elle y était invitée (conclusions d'appel de la société Beauté Prestige International, p. 18 ; p. 54 à 57), les ventes directes réalisées par Amazon de produits protégés par le réseau de distribution sélective de la société Beauté Prestige International, ce qui était de nature à engager sa responsabilité personnelle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873 du code de procédure civile ; Alors 4°) que le juge des référés, saisi d'une demande tendant à la cessation d'un trouble manifestement illicite, peut ordonner toute mesure destinée à y mettre un terme, quand bien même il serait amené à trancher une contestation sérieuse ; que pour dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu que la responsabilité des sociétés Amazon supposait que ces dernières puissent être qualifiées d'éditeur, ce qui impliquait que soit établi le rôle actif des sociétés Amazon dans le processus de vente des produits et qu'en l'occurrence cette preuve n'était pas rapportée « avec l'évidence requise en référé » ; qu'en statuant de la sorte, quand le trouble manifestement illicite invoqué par la société Beauté Prestige International était caractérisé par les ventes de ses produits via les plateformes Amazon, en dehors du réseau de distribution sélective qu'elle avait mis en place et qu'il lui incombait de déterminer si les sociétés Amazon avaient ou non la qualité d'éditeur ou de simple hébergeur, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé l'article 873 du code de procédure civile ; Alors 5°) que la société Beauté Prestige International faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 33 à 35) que pour être référencé par Amazon et avoir accès à ses plateformes de vente, les tiers-vendeurs devaient conclure un contrat avec la société Amazon Services Europe (contrat ASE) et un autre avec la société Amazon Payment Europe (contrat APE) ; qu'elle soulignait qu'aux termes de l'article 11 du contrat ASE, Amazon proposait aux tiers-vendeurs un « accord d'autofacturation » consistant en l'achat de certains produits directement par Amazon, avec émission d'une facture en leur nom et pour leur compte ; qu'en vertu du contrat ASE, Amazon proposait également aux tiers-vendeurs différents services pour faciliter les ventes, tels des modalités de paiement intégré, des services de stockage, ou des actions de promotion ou de publicité ; que la société Beauté Prestige International faisait également valoir que les deux contrats ASE et APE permettaient à Amazon de rembourser au consommateur final une transaction du vendeur-tiers, en application de la « garantie A à Z », et de bénéficier d'un droit d'usage sur les éléments, marques, logos ou avis du vendeur-tiers ; qu'elle soulignait encore qu'Amazon était rémunérée par les vendeurs-tiers par des commissions dépendant notamment du nombre de transactions effectuées ; qu'en se bornant à énoncer, sans procéder à la moindre analyse des éléments produits par la société Beauté Prestige International, que « de la complexité de ce corpus contractuel, il s'évince que le rôle actif des sociétés appelantes et spécialement de la société Amazon Services Europe et par conséquent l'absence de qualité d'hébergeur, comme l'a retenu le premier juge, ne ressort pas avec l'évidence requise en référé mais au contraire nécessite un examen au fond qui échappe au pouvoir du juge des référés », la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873 du code de procédure civile ; Alors 6°) et en tout état de cause que la violation de l'interdiction de revente hors réseau est sanctionnée par le droit de l'Etat sur le territoire duquel le dommage se manifeste ; que pour infirmer l'ordonnance entreprise et dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu qu'en application de l'article L. 442-2 du code de commerce, un revendeur non agréé dans un réseau de distribution sélective peut librement vendre en France, sans se rendre responsable d'une violation dudit réseau, lorsqu'il s'est approvisionné ou est établi dans un pays ne faisant pas l'objet d'un réseau de distribution sélective, et a considéré qu'en l'occurrence, la société Beauté Prestige International ne rapportait pas la preuve de l'existence d'un réseau de distribution sélective dans l'un des pays où étaient basées les plateformes (p. 10) ; qu'en statuant de la sorte, quand la société Beauté Prestige International sollicitait la cessation de la commercialisation de ses produits sur le territoire français, protégé par son réseau de distribution sélective dont la cour d'appel a admis le caractère licite, de sorte qu'il était opposable aux tiers, y compris implantés hors du territoire protégé par ce réseau, la cour d'appel a violé l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873 du code de procédure civile ; Alors 7°) qu'il incombe au revendeur hors réseau de rapporter la preuve qu'il a licitement acquis les produits pour les revendre ; qu'en jugeant que la société Beauté Prestige International, sur qui pesait la charge de la preuve, ne justifiait pas que ses produits commercialisés sur les sites amazon.co.uk, amazon.de, amazon.it et amazon.es ont été acquis en France en violation du seul réseau de distribution sélective démontré, soit le réseau français, quand il incombait aux revendeurs concernés de prouver qu'ils avaient licitement acquis ses produits en vue de leur revente, la cour d'appel a violé l'article 1353 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION La société Beauté Prestige International fait grief à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé, et d'avoir rejeté ses demandes de provision et de communication de pièces ; Alors 1°) que la cassation du chef de dispositif d'une décision de justice entraîne l'annulation de tous les chefs de dispositif de cette décision qui entretiennent avec le chef cassé un lien de d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; que pour rejeter la demande de la société Beauté Prestige International en versement d'une provision à valoir sur son préjudice, la cour d'appel a retenu que « le trouble manifestement illicite résultant de la violation d'un réseau de distribution sélective n'étant pas considéré comme établi », il n'y avait pas lieu de faire droit à cette demande (arrêt, p. 11, 3ème §) ; qu'il en résulte que la cassation à intervenir sur le premier moyen de cassation, qui reproche à la cour d'appel d'avoir rejeté les demandes de la société Beauté Prestige International tendant à la mise en oeuvre des mesures propres à faire cesser le trouble manifestement illicite résultant des actes de revente de produits en dehors de son réseau de distribution sélective entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif de l'arrêt attaqué ayant rejeté la demande de versement d'une provision formée par la société Beauté Prestige International, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; Alors 2°) et en outre que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que les sociétés du groupe Amazon avaient reconnu avoir commercialisé des produits en dehors du réseau de distribution mis en place en France par la société Beauté Prestige International, y compris après le prononcé de l'ordonnance de référé entreprise (arrêt, p. 9, 9ème et 10ème §) ; qu'en rejetant néanmoins la demande de provision formée par la société Beauté Prestige International, à valoir sur le préjudice qui était résulté pour elle de ces actes de revente hors réseau, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile ; Alors 3°) et en toute hypothèse que la société Beauté Prestige International faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 54 à 57 ; également p. 8 ; p. 18 ; p. 46) que les sociétés du groupe Amazon avaient procédé à des ventes directes de produits protégés par son réseau de distribution, et qu'Amazon avait admis dans ses écritures avoir retiré de nombreuses offres de tels produits, y compris après le prononcé de l'ordonnance de référé entreprise ; qu'en s'abstenant de rechercher s'il n'était pas ainsi établi qu'Amazon avait commis des actes de concurrence déloyale engageant sa responsabilité et justifiant l'octroi d'une provision, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-2 du code de commerce, ensemble l'article 1240 du code civil et l'article 873, alinéa 2, du code de procédure civile.
INCA/JURITEXT000046990251.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 22 F-D Pourvoi n° F 21-21.847 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 La société Beauté Prestige International Shiseido EMEA, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 21-21.847 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2021 par la cour d'appel de Paris ( pôle 1, chambre 2), dans le litige l'opposant à la société Ebay Marketplaces GmbH, dont le siège est [Adresse 1]), défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société Ebay Marketplaces GmbH, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué, rendu en matière de référé (Paris, 1er juillet 2021), la société Ebay gère et exploite la plateforme www.ebay.fr sur laquelle des offres de produits divers sont postées par des tiers. 2. La société Beauté Prestige International Shiseido EMEA (la société BPI) produit et commercialise des cosmétiques et des parfums sous la marque Shiseido et sous d'autres marques de luxe. 3. Soutenant que des ventes effectuées sur le site Ebay portaient atteinte à son réseau de distribution sélective et sont ainsi constitutives d'actes de concurrence déloyale, la société BPI a assigné en référé la société Ebay Marketplaces GmbH (la société Ebay) en cessation de la commercialisation des produits en France par le biais de la plateforme et en paiement d'une provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice causé. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa quatrième branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur ce moyen, pris en ses première, deuxième, troisième et cinquième branches Enoncé du moyen 5. La société BPI fait grief à l'arrêt de dire n'y avoir lieu à référé sur ses demandes dirigées contre la société Ebay, alors : « 1°/ que constitue un trouble manifestement illicite la vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective par des tiers non autorisés ; que le juge des référés a le pouvoir d'ordonner à un hébergeur de contenus internet de procéder au retrait et à la suppression pour l'avenir des annonces de vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective ou exclusive dès lors que les mesures ordonnées sont proportionnées au but poursuivi et n'aboutissent pas à imposer à cet hébergeur une obligation générale de surveillance des informations qu'il transmet ou stocke ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Ebay ne contestait pas l'existence ni la licéité du réseau de distribution sélective invoqué par la société BPI, et que cette dernière versait aux débats un procès-verbal de constat d'huissier du 2 septembre 2019 établissant la vente sur la plateforme Ebay de produits dument protégés par ce réseau de distribution ; que pour rejeter les demandes de la société BPI tendant à voir ordonner la cessation de la commercialisation par des vendeurs professionnels de produits du groupe Shiseido sur la plateforme https://www.ebay.fr, la cour d'appel a retenu que la responsabilité de la société Ebay Marketplaces ne pouvait être recherchée qu'à la condition que cette dernière ne puisse se prévaloir du statut d'hébergeur, et a considéré qu'en l'occurrence, il n'était pas établi avec l'évidence requise en référé que la société Ebay Marketplaces avait exercé un rôle actif dans les processus de ventes litigieuses et ainsi excédé son rôle d'hébergeur ; qu'elle ajouté que la société BPI ne justifiait pas avoir demandé le retrait de telle ou telle vente illicite après en avoir démontré l'illicéité, mais avait seulement procédé de façon globale, de sorte que les demandes faites à l'encontre de la société Ebay ne pouvaient aboutir, n'étant pas établi que cette dernière société avait eu connaissance de l'illicéité reprochée au sens de l'article 6-1-2 de la loi du 21 juin 2004 dans des conditions engageant sa responsabilité civile ; qu'en statuant de la sorte, quand la société Ebay Marketplaces, quand bien même il n'aurait pas été démontré qu'elle n'avait pas dépassé le rôle de simple hébergeur s'agissant des ventes en cause, pouvait se voir imposer l'obligation de faire cesser les ventes illicites de produits qui lui avaient été signalées par la société BPI, comme méconnaissant la protection que leur conférait son réseau de distribution sélective, la cour d'appel a violé les articles 6-1-2 et 6-1-7 de la loi du 21 juin 2004, L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile ; 2°/ que pour infirmer l'ordonnance entreprise et dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu que les captures d'écran produites par la société BPI, si elles démontraient "largement les ventes de produits protégés et qui ne devraient pas être vendus sur le site Ebay", ne permettaient pas de démontrer "qui [étaient] les vendeurs, [étaient-ils] professionnels ou particuliers, ces derniers n'étant pas concernés par l'interdiction" ; qu'en statuant ainsi, quand, dès lors que la société la société BPI avait établi la licéité de son réseau de distribution sélective et produit aux débats les contrats de détaillants agréés aux termes desquels ces derniers s'engageaient à ne vendre que dans leur point de vente et que les ventes sur un site internet devaient se faire sur le site du détaillant et avec une autorisation écrite préalable de la société la société BPI, et qu'elle établissait la vente de produits protégés par ce réseau sur la plateforme https://www.ebay.fr, il incombait à la société Ebay Marketplaces, gestionnaire de la plateforme https://www.ebay.fr, d'établir l'identité des vendeurs concernés, afin le cas échéant d'établir que ces derniers n'auraient pas été concernés par l'interdiction de vente hors réseau des produits litigieux, la cour d'appel a méconnu les articles L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile et l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil ; 3°/ que la violation de l'interdiction de revente hors réseau est sanctionnée par le droit de l'Etat sur le territoire duquel le dommage se manifeste ; qu'un réseau de distribution sélective dont la preuve de la licéité est rapportée est opposable aux tiers ; que pour infirmer l'ordonnance entreprise et dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu que les captures d'écran produites par la société BPI, si elles démontraient "largement les ventes de produits protégés et qui ne devraient pas être vendus sur le site Ebay", ne permettaient pas de démontrer si les vendeurs étaient ou non agréés et vendaient au mépris de leur propre contrat de détaillant agréé, ou si elles étaient réalisées par des tiers à l'approvisionnement illicite ; qu'en statuant de la sorte, quand, dès lors que la société BPI avait établi la licéité de son réseau de distribution sélective et produit aux débats les contrats de détaillants agréés aux termes desquels ces derniers s'engageaient à ne vendre que dans leur point de vente et que les ventes sur un site internet devaient se faire sur le site du détaillant et avec une autorisation écrite préalable de la société BPI, et qu'elle établissait la vente de produits protégés par ce réseau sur la plateforme https://www.ebay.fr, il incombait à la société Ebay Marketplaces, gestionnaire de cette plateforme, de prouver l'identité des vendeurs concernés, la cour d'appel a encore violé les articles L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile et l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil ; 5°/ que la cour d'appel a constaté qu'aux termes de ses conditions générales, Ebay proposait aux vendeurs professionnels ayant souscrit ces services contre paiement diverses prestations permettant de promouvoir les ventes ; que la cour d'appel a toutefois retenu que les conditions générales de vente d'Ebay précisaient que cette dernière n'intervenait pas dans les transactions entre vendeurs et acheteurs et ne contrôlait ni la qualité ni les droits des vendeurs sur les produits mis en vente, et que ce n'était que sur demande et via les "outils de vente" qu'Ebay donnait aux vendeurs des indications statistiques sur les ventes et leur performance, et que le pouvoir de contrôle et de sanction a posteriori d'Ebay ne supposait pas une intervention directe sur les produits vendus ; qu'elle a estimé qu'il n'était pas établi que les conditions générales d'Ebay comportaient la fourniture systématique de services pour "booster les ventes", faire bénéficier du service d'assistant vendeurs ou envoyer des messages spontanés pour rediriger les acheteurs vers ces produits et il apparaissait au contraire que ce n'était que sur souscription d'options particulières que le rôle d'Ebay était plus actif, rôle qui en l'espèce n'était pas démontré, aucun élément du dossier ne permettant d'établir qu'ils auraient en l'espèce été utilisés pour les ventes incriminées, de sorte qu'il ne pouvait être présumé que la société Ebay avait en l'espèce participé plus activement à ces ventes que ne le fait un simple hébergeur ; qu'en statuant de la sorte, quand il n'incombait pas à la société BPI de prouver que les services proposés par la société Ebay Marketplaces avaient effectivement été utilisés pour les ventes litigieuses de produits protégés par son réseau de distribution sélective, mais à cette dernière, qui était seule en mesure de le faire, de démontrer que tel n'avait pas été le cas, la cour d'appel a violé les articles L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile et l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil. » Réponse de la Cour 6. L'article L. 442-2 du code de commerce dispose : « Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par toute personne exerçant des activités de production, de distribution ou de services, de participer directement ou indirectement à la violation de l'interdiction de revente hors réseau faite au distributeur lié par un accord de distribution sélective ou exclusive exempté au titre des règles applicables du droit de la concurrence. » 7. Il résulte de ce texte que les ventes accomplies par de simples particuliers ne sont pas susceptibles de constituer une violation d'une interdiction de revente hors réseau de distribution sélective. 8. Après avoir exactement retenu que les particuliers n'étaient pas concernés par l'interdiction de revendre des produits faisant l'objet d'un réseau de distribution sélective, l'arrêt retient que les captures d'écran produites par la société BPI ne permettent pas de démontrer si les vendeurs sont des professionnels ou des particuliers. 9. Par ces seuls motifs, abstraction faite de ceux, surabondants, critiqués par les première et cinquième branches, c'est sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel a considéré que le trouble manifestement illicite n'était pas caractérisé avec l'évidence requise en référé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA et la condamne à payer à la société Ebay Marketplaces GmbH la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Beauté Prestige International Shiseido EMEA. La société Beauté Prestige International reproche à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit n'y avoir lieu à référé sur ses demandes dirigées contre la société Ebay Marketplaces GmbH ; Alors 1°) que constitue un trouble manifestement illicite la vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective par des tiers non autorisés ; que le juge des référés a le pouvoir d'ordonner à un hébergeur de contenus internet de procéder au retrait et à la suppression pour l'avenir des annonces de vente de produits protégés par un réseau de distribution sélective ou exclusive dès lors que les mesures ordonnées sont proportionnées au but poursuivi et n'aboutissent pas à imposer à cet hébergeur une obligation générale de surveillance des informations qu'il transmet ou stocke ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté (arrêt, p. 8, 5ème à 7ème §) que la société Ebay ne contestait pas l'existence ni la licéité du réseau de distribution sélective invoqué par la société Beauté Prestige International, et que cette dernière versait aux débats un procès-verbal de constat d'huissier du 2 septembre 2019 établissant la vente sur la plateforme Ebay de produits dument protégés par ce réseau de distribution ; que pour rejeter les demandes de la société Beauté Prestige International tendant à voir ordonner la cessation de la commercialisation par des vendeurs professionnels de produits du groupe Shiseido sur la plateforme https://www.ebay.fr, la cour d'appel a retenu que la responsabilité de la société Ebay Marketplaces ne pouvait être recherchée qu'à la condition que cette dernière ne puisse se prévaloir du statut d'hébergeur, et a considéré qu'en l'occurrence, il n'était pas établi avec l'évidence requise en référé que la société Ebay Marketplaces avait exercé un rôle actif dans les processus de ventes litigieuses et ainsi excédé son rôle d'hébergeur (arrêt, p. 9 à 11) ; qu'elle ajouté que la société Beauté Prestige International ne justifiait pas avoir demandé le retrait de telle ou telle vente illicite après en avoir démontré l'illicéité, mais avait seulement procédé de façon globale, de sorte que les demandes faites à l'encontre de la société Ebay ne pouvaient aboutir, n'étant pas établi que cette dernière société avait eu connaissance de l'illicéité reprochée au sens de l'article 6-1-2 de la loi du 21 juin 2004 dans des conditions engageant sa responsabilité civile (p. 11, 4ème §) ; qu'en statuant de la sorte, quand la société Ebay Marketplaces, quand bien même il n'aurait pas été démontré qu'elle n'avait pas dépassé le rôle de simple hébergeur s'agissant des ventes en cause, pouvait se voir imposer l'obligation de faire cesser les ventes illicites de produits qui lui avaient été signalées par la société Beauté Prestige International, comme méconnaissant la protection que leur conférait son réseau de distribution sélective, la cour d'appel a violé les articles 6-1-2 et 6-1-7 de la loi du 21 juin 2004, L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile ; Alors 2°) et en tout état de cause que pour infirmer l'ordonnance entreprise et dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu que les captures d'écran produites par la société Beauté Prestige International, si elles démontraient « largement les ventes de produits protégés et qui ne devraient pas être vendus sur le site Ebay », ne permettaient pas de démontrer « qui [étaient] les vendeurs, [étaient-ils] professionnels ou particuliers, ces derniers n'étant pas concernés par l'interdiction » (arrêt, p. 10, 3ème §) ; qu'en statuant ainsi, quand, dès lors que la société Beauté Prestige International avait établi la licéité de son réseau de distribution sélective et produit aux débats les contrats de détaillants agréés aux termes desquels ces derniers s'engageaient à ne vendre que dans leur point de vente et que les ventes sur un site internet devaient se faire sur le site du détaillant et avec une autorisation écrite préalable de la société Beauté Prestige International, et qu'elle établissait la vente de produits protégés par ce réseau sur la plateforme https://www.ebay.fr (arrêt, p. 8, 5ème à 7ème §), il incombait à la société Ebay Marketplaces, gestionnaire de la plateforme https://www.ebay.fr, d'établir l'identité des vendeurs concernés, afin le cas échéant d'établir que ces derniers n'auraient pas été concernés par l'interdiction de vente hors réseau des produits litigieux, la cour d'appel a méconnu les articles L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile et l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil ; Alors 3°) et en outre que la violation de l'interdiction de revente hors réseau est sanctionnée par le droit de l'Etat sur le territoire duquel le dommage se manifeste ; qu'un réseau de distribution sélective dont la preuve de la licéité est rapportée est opposable aux tiers ; que pour infirmer l'ordonnance entreprise et dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu que les captures d'écran produites par la société Beauté Prestige International, si elles démontraient « largement les ventes de produits protégés et qui ne devraient pas être vendus sur le site Ebay », ne permettaient pas de démontrer si les vendeurs étaient ou non agréés et vendaient au mépris de leur propre contrat de détaillant agréé, ou si elles étaient réalisées par des tiers à l'approvisionnement illicite (arrêt, p. 10, 3ème §) ; qu'en statuant de la sorte, quand, dès lors que la société Beauté Prestige International avait établi la licéité de son réseau de distribution sélective et produit aux débats les contrats de détaillants agréés aux termes desquels ces derniers s'engageaient à ne vendre que dans leur point de vente et que les ventes sur un site internet devaient se faire sur le site du détaillant et avec une autorisation écrite préalable de la société Beauté Prestige International, et qu'elle établissait la vente de produits protégés par ce réseau sur la plateforme https://www.ebay.fr (arrêt, p. 8, 5ème à 7ème §), il incombait à la société Ebay Marketplaces, gestionnaire de cette plateforme, de prouver l'identité des vendeurs concernés, la cour d'appel a encore violé les articles L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile et l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil ; Alors 4°) que le juge des référés, saisi d'une demande tendant à la cessation d'un trouble manifestement illicite, peut ordonner toute mesure destinée à y mettre un terme, quand bien même il serait amené à trancher une contestation sérieuse ; que pour dire n'y avoir lieu à référé, la cour d'appel a retenu que la responsabilité de la société Ebay Marketplaces GmbH supposait qu'il soit établi que cette dernière ne puisse se prévaloir de la qualité d'hébergeur, ce qui impliquait que soit établi le rôle actif de la société Ebay Marketplaces GmbH dans le processus de vente des produits et qu'en l'occurrence, cette preuve n'était pas rapportée « avec l'évidence requise en référé » ; qu'en statuant de la sorte, quand le trouble manifestement illicite invoqué par la société Beauté Prestige International était caractérisé par les ventes de ses produits via la plateforme https://www.ebay.fr, en dehors du réseau de distribution sélective qu'elle avait mis en place et que le juge des référés avait le pouvoir de déterminer si la société Ebay Marketplaces avait ou non la qualité d'éditeur ou de simple hébergeur, la cour d'appel, qui a méconnu l'étendue de ses pouvoirs, a violé l'article 873 du code de procédure civile ; Alors 5°) et en tout état de cause, que la cour d'appel a constaté qu'aux termes de ses conditions générales, Ebay proposait aux vendeurs professionnels ayant souscrit ces services contre paiement diverses prestations permettant de promouvoir les ventes (arrêt, p. 10, dernier §) ; que la cour d'appel a toutefois retenu que les conditions générales de vente d'Ebay précisaient que cette dernière n'intervenait pas dans les transactions entre vendeurs et acheteurs et ne contrôlait ni la qualité ni les droits des vendeurs sur les produits mis en vente, et que ce n'était que sur demande et via les « outils de vente » qu'Ebay donnait aux vendeurs des indications statistiques sur les ventes et leur performance, et que le pouvoir de contrôle et de sanction a posteriori d'Ebay ne supposait pas une intervention directe sur les produits vendus (arrêt, p. 11, 1er §) ; qu'elle a estimé qu'il n'était pas établi que les conditions générales d'Ebay comportaient la fourniture systématique de services pour « booster les ventes », faire bénéficier du service d'assistant vendeurs ou envoyer des messages spontanés pour rediriger les acheteurs vers ces produits et il apparaissait au contraire que ce n'était que sur souscription d'options particulières que le rôle d'Ebay était plus actif, rôle qui en l'espèce n'était pas démontré, aucun élément du dossier ne permettant d'établir qu'ils auraient en l'espèce été utilisés pour les ventes incriminées, de sorte qu'il ne pouvait être présumé que la société Ebay avait en l'espèce participé plus activement à ces ventes que ne le fait un simple hébergeur (arrêt, p. 11, 2ème §) ; qu'en statuant de la sorte, quand il n'incombait pas à la société Beauté Prestige International de prouver que les services proposés par la société Ebay Marketplaces avaient effectivement été utilisés pour les ventes litigieuses de produits protégés par son réseau de distribution sélective, mais à cette dernière, qui était seule en mesure de le faire, de démontrer que tel n'avait pas été le cas, la cour d'appel a violé les articles L. 442-2 du code de commerce et 1240 du code civil, ensemble l'article 873 du code de procédure civile et l'article 1353 (anciennement 1315) du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation M. VIGNEAU, président Arrêt n° 26 F-D Pourvoi n° D 21-16.739 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 La société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° D 21-16.739 contre le jugement rendu le 1er avril 2021 par le président du tribunal judiciaire de Fort-de-France, statuant selon la procédure accélérée au fond, dans le litige l'opposant à la société Guadeloupe entretien maintenance, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (président du tribunal judiciaire de Fort-de-France, 1er avril 2021), la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes, entité adjudicatrice, a publié au Journal officiel de l'Union européenne un avis en vue de l'attribution d'un marché public ayant pour objet la maintenance de ses installations de climatisation. 2. Elle a informé la société Guadeloupe entretien maintenance que son offre, classée en deuxième position, derrière l'offre de la société Idex énergie Antilles Guyane, n'avait pas été retenue. 3. La société Guadeloupe entretien maintenance a assigné la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes en procédure accélérée au fond, sur le fondement des articles 1441-1 du code de procédure civile et 5 de l'ordonnance n° 2009- 515 du 7 mai 2009, en demandant la communication des caractéristiques et des avantages de l'offre de la société Idex énergie Antilles Guyane et, en particulier, le montant de son offre pour chacun des sous-critères financiers. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 4. La société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes fait grief au jugement de dire que les éléments d'information contenus dans la lettre du 3 février 2021 sont insuffisants pour permettre à la société Guadeloupe entretien maintenance de contester utilement les motifs du rejet de son offre et ne sont pas conformes aux obligations d'information du soumissionnaire évincé et de lui ordonner de communiquer à cette société, dans un délai de 15 jours, les caractéristiques et avantages de l'offre de la société Idex énergie Antilles Guyane, les montants relatifs à la partie prix unitaires du BPU et la part du taux de marge constituant respectivement les 2e et 3e sous-critères financiers de l'offre, alors « que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes a opposé au reproche que lui faisait la société Guadeloupe entretien maintenance d'avoir manqué à son obligation de communiquer les caractéristiques et les avantages de l'offre retenue, les dispositions de l'article L. 2132-1 du code de la commande publique qui imposent à l'acheteur de "ne pas communiquer des informations confidentielles dont il a eu connaissance à la faveur d'une procédure de passation", ainsi que les dispositions de l'article L. 151-1 du code de commerce, protégeant le secret des affaires, et a invoqué un arrêt de la Cour de cassation (Com. 6 décembre 2016, n° 15-26.414, publié au bulletin) ayant jugé que "l'acheteur soumis aux règles de la commande publique doit communiquer aux candidats dont l'offre a été écartée pour un autre motif que son caractère inapproprié, irrégulier ou inacceptable les caractéristiques et les avantages relatifs de l'offre retenue et notamment, dans le cadre d'un appel d'offres mettant en oeuvre des critères de sélection fondés sur cet élément, son prix, sauf à établir, ce qui n'était pas invoqué en l'espèce, qu'une telle divulgation serait contraire à la loi, en particulier violerait le secret industriel et commercial, serait contraire à l'intérêt public, ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre les opérateurs économiques", pour en conclure qu'elle "n'était pas tenue, dans le cadre de la présente procédure, de communiquer les informations demandées sauf à méconnaître les droits de l'attributaire à entraver le jeu de la concurrence, a fortiori en Guadeloupe" ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans se prononcer, comme il y était invité, sur l'atteinte au secret des affaires pouvant résulter de la communication à la société Guadeloupe entretien maintenance des informations qu'elle réclamait, le président du tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 455 du code de procédure civile : 5. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs. 6. En ordonnant à la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes de communiquer à la société Guadeloupe entretien maintenance, dans un délai de 15 jours, les caractéristiques et avantages de l'offre de la société Idex énergie Antilles Guyane, les montants relatifs à la partie prix unitaires du BPU et la part du taux de marge constituant respectivement les 2e et 3e sous-critères financiers de l'offre, sans répondre aux conclusions par lesquelles la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes faisait valoir qu'elle était tenue, en application de l'article L. 2132-1 du code de la commande publique et de l'article L. 151-1 du code de commerce, protégeant le secret des affaires, de ne pas communiquer des informations confidentielles dont elle a eu connaissance à la faveur d'une procédure de passation de marché, ce dont elle déduisait qu'elle ne pouvait communiquer les informations demandées sauf à méconnaître les droits de l'attributaire, le président du tribunal a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 1er avril 2021, entre les parties, par le président du tribunal judiciaire de Fort-de-France ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant la juridiction du président du tribunal judiciaire de Fort-de-France, autrement composé ; Condamne la société Guadeloupe entretien maintenance aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Guadeloupe entretien maintenance à payer à la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Aéroportuaire Guadeloupe pôle Caraïbes. La Société aéroportuaire Guadeloupe Pôle Caraïbes (SAGPC) fait grief au jugement attaqué d'avoir dit que les éléments d'information contenus dans la lettre du 3 février 2021 étaient insuffisants pour permettre à la SAS Guadeloupe entretien maintenance de contester utilement les motifs du rejet de son offre et n'étaient pas conformes aux obligations d'information du soumissionnaire évincé et de lui avoir ordonné de communiquer à la SAS Guadeloupe entretien maintenance, dans un délai de 15 jours, les caractéristiques et avantages de l'offre de la société Idex énergie Antilles Guyane, les montants relatifs à la partie à prix unitaires du BPU et la part du taux de marge constituant respectivement les 2e et 3e sous-critères financiers de l'offre ; Alors 1°) qu'aux termes de l'article R. 2181-4, 2° du code de la commande publique, l'entité adjudicatrice communique au soumissionnaire les caractéristiques et les avantages de l'offre retenue ; que, dans ses conclusions (§ n° 25), la SAGPC a fait valoir qu'elle avait satisfait à son obligation de communication, dès lors qu'elle avait communiqué à la société GEM, dans son courrier de rejet du 3 février 2021, les notes obtenues par l'attributaire, figurant dans un tableau ; qu'elle a ajouté (§ n° 27) que, dans son courrier en réponse à la demande de la société GEM, du 12 février 2021, elle lui avait communiqué « l'ensemble des notes attribuées au titre des critères, sous-critères et sous-critères de second rang (‘‘sous sous-critères'') », ce qui avait permis à cette dernière de « prendre pleinement connaissance des caractéristiques de l'offre retenue au regard de la sienne », étant précisé qu' « un extrait du rapport d'analyse des offres (RAO) concernant les appréciations portées sur l'offre technique de la société GEM est d'ailleurs versé au débat » ; que le juge du référé précontractuel a énoncé que les éléments transmis par la SAGPC « se limitent aux notes attribuées au titre des sous-critères financiers concernant essentiellement l'offre de la (société GEM) », que « les données chiffrées sont insuffisantes à elles seules pour porter une appréciation comparée des caractéristiques techniques entre les deux offres et notamment à clarifier l'attribution du marché à la société Idex énergie Antilles Guyane » et que si la SAGPC « a bien transmis à la SAS Guadeloupe entretien maintenance les éléments de l'offre de la société Idex énergie Antilles Guyane relatifs à la partie à prix forfaitaire, les éléments relatifs à la partie prix unitaires ainsi que le taux de remise sur le prix hors-BPU n'ont pas été communiqués, alors que ces deux points constituent des éléments d'appréciation des offres respectivement des 2e et 3e sous-critères financiers » ; qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il y était invité, si les éléments communiqués par l'entité adjudicatrice ne suffisaient pas, à eux seuls, à établir qu'elle avait communiqué au soumissionnaire les caractéristiques et avantages de l'offre retenue, le président du tribunal judiciaire a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée, ensemble l'article 6 de l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 ; Alors 2°) et en toute hypothèse que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions, la SAGPC a opposé au reproche que lui faisait la société GEM d'avoir manqué à son obligation de communiquer les caractéristiques et les avantages de l'offre retenue, les dispositions de l'article L. 2132-1 du code de la commande publique qui imposent à l'acheteur de « ne pas communiquer des informations confidentielles dont il a eu connaissance à la faveur d'une procédure de passation » (concl., § n° 34), ainsi que les dispositions de l'article L. 151-1 du code de commerce, protégeant le secret des affaires (concl., n° 35), et a invoqué un arrêt de la Cour de cassation (Com. 6 décembre 2016, n° 15-26.414, publié au bulletin) ayant jugé que « l'acheteur soumis aux règles de la commande publique doit communiquer aux candidats dont l'offre a été écartée pour un autre motif que son caractère inapproprié, irrégulier ou inacceptable les caractéristiques et les avantages relatifs de l'offre retenue et notamment, dans le cadre d'un appel d'offres mettant en oeuvre des critères de sélection fondés sur cet élément, son prix, sauf à établir, ce qui n'était pas invoqué en l'espèce, qu'une telle divulgation serait contraire à la loi, en particulier violerait le secret industriel et commercial, serait contraire à l'intérêt public, ou pourrait nuire à une concurrence loyale entre les opérateurs économiques », pour en conclure (§ n° 36) qu'elle « n'était pas tenue, dans le cadre de la présente procédure, de communiquer les informations demandées sauf à méconnaître les droits de l'attributaire à entraver le jeu de la concurrence, a fortiori en Guadeloupe » ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans se prononcer, comme il y était invité, sur l'atteinte au secret des affaires pouvant résulter de la communication à la société GEM des informations qu'elle réclamait, le premier président du tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; Alors 3°) que dans ses conclusions (§ n° 37), la SAGPC avait pareillement opposé au reproche qui lui faisait la société GEM d'avoir omis de lui transmettre le « montant de la partie à prix unitaires du marché », et le « prix global du sous-critère relatif au BPU », le secret des affaires, renvoyant à ses développement précédents (§ n° 34 s.) ; qu'en statuant comme il l'a fait, sans se prononcer sur ces chefs de conclusions, par lesquelles la SAGPC invoquait un risque d'atteinte au secret des affaires, le premier président du tribunal judiciaire a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 23 F-D Pourvoi n° Z 21-23.221 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 1°/ La société Avpro Solar, société à responsabilité limitée, 2°/ la société ENR Gardon, société à responsabilité limitée, ayant toutes deux leur siège [Adresse 4], ont formé le pourvoi n° Z 21-23.221 contre l'arrêt rendu le 23 juillet 2021 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Enedis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 5], 2°/ à la société XL Insurance Company SE, compagnie d'assurance de droit irlandais, dont le siège est [Adresse 3] (Irlande), (autorisée et contrôlée par la Central Bank of Ireland, agissant par l'intermédiaire de sa succursale française, dont le siège est [Adresse 2]), venant aux droits de la société Axa Corporate Solutions Assurances, 3°/ à la société Etude Balincourt, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], en la personne de M. [D], mandataire judiciaire, désigné en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société ENR Gardon et de la société Avpro Solar, défenderesses à la cassation. Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat des sociétés Avpro Solar et ENR Gardon, de la SCP Spinosi, avocat de la société XL Insurance Company SE, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Poillot-Peruzzetto, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 23 juillet 2021), en septembre 2009, la société Avpro Solar (la société Avpro) a fait une demande de proposition technique et financière (PTF) à la société Enedis pour le raccordement de son installation photovoltaïque au réseau public. Cette dernière a enregistré le dossier complet à la date du 21 septembre 2009 et, le 18 mars 2010, lui a adressé une PTF, laquelle a été acceptée le 24 mars suivant. 2. Le 29 octobre 2010, la société Enedis a communiqué à la société Avpro un projet de convention de raccordement dont celle-ci n'a pas fait retour dans le délai de trois mois prévu sous peine de caducité. 3. Un décret du 9 décembre 2010 a suspendu, pour trois mois, l'obligation d'achat de l'électricité par la société EDF et imposé aux producteurs, n'ayant pas notifié leur acceptation de la PTF avant le 2 décembre 2010 ou n'ayant pas mis en service leur installation dans un délai de 18 mois à compter de l'acceptation de la PTF, de reformer une demande de PTF à l'issue du moratoire. 4. Le 24 février 2011, la société Enedis a notifié la caducité de la convention à la société Avpro. Celle-ci, reprochant à celle-là de ne pas lui avoir adressé, dix jours avant l'expiration du délai, la lettre de relance prévue à l'article 1.9.4 de la procédure réglementée de traitement des demandes de raccordement des installations de production aux réseaux publics de distribution alors applicable, a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions (Cordis) de la Commission de régulation de l'Energie (la CRE). 5. Par une décision du 19 septembre 2012, le Cordis a donné acte aux parties de leur accord pour réintégrer le projet dans la file d'attente à la date du 21 septembre 2009, ordonné à la société Enedis d'exécuter les travaux dès réception de l'accord de la société Avpro sur la convention de raccordement et fixé la date limite de mise en service de la centrale au 1er mars 2014. 6. La société ENR Gardon, venant aux droits de la société Avpro, a fait retour de la convention le 19 juin 2013, la société Enedis a achevé les travaux de raccordement le 24 octobre 2013 et l'installation a été mise en service le 11 avril 2014. 7. La société EDF ayant refusé d'acheter l'électricité au tarif de l'arrêté du 12 janvier 2010 en raison du non-respect de la date d'installation fixée par le Cordis, et après rejet de leur demande d'annulation de cette décision par le tribunal administratif de Paris, les sociétés Avpro et ENR Gardon, soutenant que la société Enedis avait exclu à tort leur projet de la file d'attente les privant du bénéfice des tarifs d'achat d'électricité produite fixés par les arrêtés des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010, l'ont assignée en réparation de leur préjudice. Elles ont, par conclusions du 25 août 2017, formé leurs demandes sur le fondement, en outre, de la faute résultant du dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la PTF. 8. La société Enedis a appelé en la cause son assureur, la société Axa Corporate Solutions, devenue la société XL Insurance Company. 9. Par un jugement du 14 novembre 2017, les sociétés Avpro et ENR Gardon, mises en redressement judiciaire, ont fait l'objet d'un plan de redressement, la société Etude Balincourt étant nommée en qualité de commissaire à l'exécution du plan. Examen des moyens Sur le troisième moyen, ci-après annexé 10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 11. La société Avpro fait grief à l'arrêt d'avoir déclaré irrecevable ses demandes, alors « que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ; qu'en se contentant d'énoncer, pour accueillir la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Avpro opposée par la société Enedis, que "le seul fait qu[e] [cette société] soit caution des prêts obtenus par la société ENR Gardon ne lui confér[ait] pas [un] intérêt à agir", sans rechercher, comme cela lui était demandé, si la société Avpro n'avait pas un intérêt légitime à ce que la responsabilité délictuelle de la société Enedis soit engagée de façon à ce que les dommages et intérêts par celle-ci versés soient affectés au remboursement des prêts contractés par la société ENR Gardon, sans qu'il soit nécessaire d'actionner la caution, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 31 du code de procédure civile. » Réponse de la cour 12. L'arrêt retient que la société Avpro ne contestant pas avoir transmis à la société ENR Gardon l'intégralité des droits dont elle disposait à l'encontre de la société Enedis, elle ne justifie pas de l'intérêt à agir qu'elle invoque et que le seul fait qu'elle soit caution des prêts obtenus par la société ENR Gardon ne lui confère pas cet intérêt. 13. Par ces seuls motifs, rendant inopérante la recherche invoquée par le moyen, dès lors qu'en l'absence d'action à l'encontre de la caution, il n'était pas justifié d'un préjudice né et actuel subi par celle-ci, la cour d'appel a légalement justifié sa décision. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 14. La société ENR Gardon fait grief à l'arrêt de rejeter la demande d'indemnisation des sociétés Avpro et ENR Gardon fondée sur le défaut de transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau dans le délai de trois mois et, statuant à nouveau de ce chef, de déclarer irrecevable, comme prescrite, l'action exercée par elle sur le fondement d'une faute de la société Enedis résultant du dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la PTF de raccordement au réseau, alors « que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; que la dévolution est opérée par l'acte d'appel, la cour d'appel se trouvant saisie des chefs du jugement expressément critiqués par l'appelant et étant alors dans l'obligation de statuer à nouveau en fait et en droit sur le litige ; que la circonstance qu'elle ne soit tenue d'examiner que les moyens expressément invoqués dans la discussion au soutien des prétentions énoncées par l'appelant dans le dispositif de ses conclusions ne saurait dispenser la cour d'appel de se conformer à une telle obligation ; qu'au cas présent, l'appel interjeté par les sociétés Avpro et ENR Gardon à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 12 juillet 2019 visait expressément le chef de dispositif par lequel le tribunal avait rejeté la demande d'indemnisation de ces sociétés fondée sur le défaut de transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau dans le délai de trois mois, de sorte que par l'effet dévolutif de l'appel, la cour d'appel était saisie de la connaissance de ce chef de dispositif qui était expressément critiqué par les sociétés Avpro et ENR Gardon ; qu'en refusant de statuer sur la demande des sociétés Avpro et ENR Gardon tendant à obtenir la réformation du jugement ayant dit prescrite la demande formulée par ces sociétés fondée sur la faute liée au dépassement du délai de transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau dans le délai de trois mois, au motif inopérant que ces dernières ne formulaient aucun moyen dans leurs écritures d'appel au soutien de cette demande, la cour d'appel a violé les articles 4, 562 et 954 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour Vu les articles 4, 562 et 954 du code de procédure civile : 15. Aux termes du premier de ces textes, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. Ces prétentions sont fixées par l'acte introductif d'instance et par les conclusions en défense. 16. Aux termes du deuxième, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. 17. Aux termes du troisième, les conclusions d'appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l'article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. 18. Dès lors que la dévolution est opérée par l'acte d'appel, la cour d'appel se trouve saisie des chefs du jugement expressément critiqués par l'appelant et est dans l'obligation de statuer à nouveau en fait et en droit sur le litige, sans être limitée aux seuls moyens expressément invoqués dans la discussion au soutien des prétentions énoncées par l'appelant dans le dispositif de ses conclusions. 19. Pour déclarer irrecevable, comme prescrite, l'action exercée par la société ENR Gardon sur le fondement d'une faute de la société Enedis résultant du dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la PTF de raccordement au réseau, l'arrêt retient que si, dans le dispositif de ses conclusions d'appel, la société ENR demande la réformation du jugement « en ce qu'il a dit prescrite la demande fondée sur la faute liée au dépassement du délai de transmission de la PTF dans le délai de trois mois », elle n'énonce cependant aucun moyen à l'appui de sa prétention. 20. En statuant ainsi, alors que, saisie par l'effet dévolutif d'un jugement ayant statué sur la fin de non-recevoir, tirée de la prescription, soulevée par la société Enedis à laquelle avait défendu la société ENR, il lui appartenait de s'assurer que les éléments qui avait permis de retenir cette fin de non-recevoir étaient réunis, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevable comme étant prescrite l'action exercée par la société ENR Gardon sur le fondement d'une faute de la société Enedis résultant du dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la proposition technique financière et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 23 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Versailles autrement composée ; Condamne les sociétés Enedis et XL Insurance Company aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société XL Insurance Company et condamne les sociétés Enedis et XL Insurance Company à payer à la société ENR Gardon la somme globale de 3 000 euros et rejette les autres demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour les sociétés Avpro Solar et ENR Gardon. PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Avpro Solar fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de la société Avpro Solar et, statuant à nouveau de ce chef, d'avoir dit que cette société était irrecevable en ses demandes ; Alors que l'action est ouverte à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention, sous réserve des cas dans lesquels la loi attribue le droit d'agir aux seules personnes qu'elle qualifie pour élever ou combattre une prétention, ou pour défendre un intérêt déterminé ; qu' en se contentant d'énoncer, pour accueillir la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Avpro Solar opposée par la société Enedis, que « le seul fait qu[e] [cette société] soit caution des prêts obtenus par la société ENR Gardon ne lui confér[ait] pas [un] intérêt à agir » (arrêt, p. 10, § 2), sans rechercher, comme cela lui était demandé (conclusions d'appel des sociétés exposantes, p. 7), si la société Avpro Solar n'avait pas un intérêt légitime à ce que la responsabilité délictuelle de la société Enedis soit engagée de façon à ce que les dommages et intérêts par celle-ci versés soient affectés au remboursement des prêts contractés par la société ENR Gardon, sans qu'il soit nécessaire d'actionner la caution, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 31 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION La société ENR Gardon fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait « rejeté la demande d'indemnisation » des sociétés Avpro Solar et ENR Gardon fondée sur le défaut de transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau dans le délai de trois mois et, statuant à nouveau de ce chef, d'avoir déclaré irrecevable, comme étant prescrite, l'action exercée par la société ENR Gardon sur le fondement d'une faute de la société Enedis résultant du dépassement du délai de trois mois dans la transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ; 1° Alors que l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent ; que la dévolution est opérée par l'acte d'appel, la cour d'appel se trouvant saisie des chefs du jugement expressément critiqués par l'appelant et étant alors dans l'obligation de statuer à nouveau en fait et en droit sur le litige ; que la circonstance qu'elle ne soit tenue d'examiner que les moyens expressément invoqués dans la discussion au soutien des prétentions énoncées par l'appelant dans le dispositif de ses conclusions ne saurait dispenser la cour d'appel de se conformer à une telle obligation ; qu'au cas présent, l'appel interjeté par les sociétés Avpro Solar et ENR Gardon à l'encontre du jugement du Tribunal de commerce de Nanterre du 12 juillet 2019 visait expressément le chef de dispositif par lequel le Tribunal avait rejeté la demande d'indemnisation de ces sociétés fondée sur le défaut de transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau dans le délai de trois mois, de sorte que par l'effet dévolutif de l'appel, la cour d'appel était saisie de la connaissance de ce chef de dispositif qui était expressément critiqué par les sociétés Avpro Solar et ENR Gardon ; qu'en refusant de statuer sur la demande des sociétés Avpro Solar et ENR Gardon tendant à obtenir la réformation du jugement ayant dit prescrite la demande formulée par ces sociétés fondée sur la faute liée au dépassement du délai de transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau dans le délai de trois mois, au motif inopérant que ces dernières ne formulaient aucun moyen dans leurs écritures d'appel au soutien de cette demande, la cour d'appel a violé les articles 4, 562 et 954 du code de procédure civile, ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2° Alors, en tout état de cause, que le juge ne peut dénaturer les termes du litige ; que la société ENR Gardon sollicitait dans le dispositif de ses conclusions l'infirmation du jugement en ce qu'il avait déclaré prescrite sa demande fondée sur la faute liée au dépassement du délai de transmission de la proposition technique et financière de raccordement au réseau dans le délai de trois mois et formulait au soutien de cette demande, dans le corps de ses écritures d'appel, le moyen tiré de ce que cette faute présentait un caractère « accessoire » à la faute principale commise par Enedis, ayant consisté à sortir irrégulièrement la société Avpro Solar de la liste d'attente du raccordement et se trouvant à l'origine du dommage dont les sociétés exposantes demandaient réparation, et n'avait une incidence qu'au titre de la seule évaluation du préjudice subi, ce dont il était déduit que « la demande d'indemnisation des sociétés appelantes sur la base du tarif de 0,60 €/kWh [était] parfaitement recevable et fondée, contrairement à ce qu'[avait] jugé le tribunal » (conclusions d'appel des sociétés exposantes, p. 21) ; qu'en affirmant que la société ENR Gardon « n'énon[çait] aucun moyen à l'appui de cette prétention, de sorte que, par application de l'article 954 [du code de procédure civile], la cour n'[était] pas en mesure de statuer sur celle-ci » (arrêt, p. 11, § 1), la cour d'appel a dénaturé les conclusions de la société ENR Gardon, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 3° Alors, encore, que tout jugement doit être motivé ; que lorsqu'elle infirme le jugement, la cour d'appel ne peut fonder sa décision exclusivement en s'appropriant les motifs que les premiers juges avaient retenus pour justifier le chef de dispositif infirmé ; qu'au cas présent, pour infirmer le chef de dispositif du jugement ayant rejeté la demande d'indemnisation des sociétés Avpro Solar et ENR Gardon fondée sur le défaut de transmission de la PTF dans le délai de trois mois, la cour d'appel a retenu que si dans le dispositif du jugement, le tribunal a dit rejeter la demande, il résultait de ses motifs que cette demande était irrecevable comme prescrite ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a n'a donné aucune motivation propre à sa décision et violé l'article 455 du code de procédure civile. TROISIEME MOYEN DE CASSATION La société ENR Gardon fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait dit qu'il n'existait pas de lien de causalité entre la faute de nature délictuelle commise par la société Enedis, ayant consisté à omettre d'adresser à la société Avpro Solar un courrier de préavis au moins dix jours avant l'expiration du délai d'offre de la convention de raccordement, et les différents préjudices subis par celle-ci, et de l'avoir en conséquence déboutée de toutes ses demandes d'indemnisation ; 1° Alors qu'ouvre droit à réparation le dommage en lien causal direct et certain avec la faute ; qu'ayant constaté, d'une part, par motifs adoptés, que pour bénéficier de l'obligation d'achat au titre de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010, « Avpro Solar ayant notifié son acceptation de la PTF le 24 mars 2010, la mise en service, ou en l'espèce, l'achèvement de la centrale aurait dû intervenir le 24 septembre 2011 au plus tard » et que « la centrale n'était pas achevée à cette date » (jugement, p. 10, in fine), et d'autre part, par motifs propres, que la société ENR Gardon avait légitimement été conduite à interrompre les travaux d'installation de la centrale « entre la sortie de la file d'attente en février 2011 et la notification de la décision du Cordis en octobre 2012 » (arrêt, p. 13, in fine et p. 14, § 1) du fait de la notification par le gestionnaire, le 24 février 2011, de la caducité de la convention de raccordement et du classement sans suite de son projet, la cour d'appel aurait dû en déduire qu'il existait un lien de causalité direct et certain entre la faute commise par la société Enedis, ayant consisté à sortir irrégulièrement la société Avpro Solar de la file d'attente du raccordement, et le préjudice subi par celle-ci, constitué par la perte du bénéfice de l'obligation d'achat au titre de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010, puisqu'à la date du 24 septembre 2011, soit onze mois seulement après l'acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau, les travaux d'installation de la centrale n'avaient pu être achevés en raison de la notification de la caducité de la convention de raccordement par la société Enedis le 24 février 2011 ; qu'en jugeant, au contraire, que « le lien de causalité entre la faute de la société Enedis et les préjudices invoqués par la société ENR Gardon n'[était] [?] pas établi » (arrêt, p. 14, § 4), la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations et a violé l'article 1382 du code civil (dans sa rédaction applicable en la cause) ; 2° Alors, subsidiairement, qu'ouvre droit à réparation le dommage en lien causal direct et certain avec la faute ; que pour rejeter la demande d'indemnisation des sociétés Avpro Solar et ENR Gardon dirigée contre la société Enedis, la cour d'appel a estimé que le préjudice subi par ces sociétés n'avait pas pour « cause déterminante » la faute commise par le gestionnaire mais « la durée des travaux de construction de l'installation par la société ENR Gardon, durée non conforme aux dispositions de l'article 4 du décret du 9 décembre 2010 », ce dont elle a déduit que « le lien de causalité entre la faute de la société Enedis et les préjudices invoqués par la société ENR Gardon n'[était] [?] pas établi » (arrêt, p. 14, § 4) ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher, ainsi que cela lui était pourtant expressément demandé (conclusions d'appel des sociétés exposantes, p. 16 et 17) si la faute consistant pour la société Enedis à avoir omis d'envoyer à la société Avpro Solar un courrier de relance au moins dix jours avant l'expiration du délai de trois mois dont celle-ci disposait pour signer la convention de raccordement et à avoir provoqué la sortie irrégulière du projet de la file d'attente du raccordement jusqu'à la décision du Cordis, n'avait pas eu pour conséquence directe et immédiate d'empêcher celle-ci, aux droits de laquelle était venue la société ENR Gardon, d'achever les travaux d'installation avant l'expiration du délai incompressible d'achèvement de le centrale expirant le 24 septembre 2011, leur faisant ainsi définitivement perdre le bénéfice de l'obligation d'achat au titre de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1382 du code civil (dans sa rédaction applicable en la cause) ; 3° Alors, enfin, que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'au cas présent, pour rejeter la demande d'indemnisation des sociétés Avpro Solar et ENR Gardon et juger qu'il n'existait aucun lien de causalité entre la faute commise par la société Enedis et le préjudice subi par ces sociétés, la cour d'appel a estimé que « la cause déterminante » de ce préjudice n'était pas la faute commise par le gestionnaire mais « la durée des travaux de construction de l'installation par la société ENR Gardon, durée non conforme aux dispositions de l'article 4 du décret du 9 décembre 2010 » (arrêt, p. 14, § 3) ; qu'en statuant ainsi, quand la perte du bénéfice de l'obligation d'achat au titre de l'article 3 du décret du 9 décembre 2010 n'était liée qu'à l'absence d'achèvement des travaux dans les dix-huit mois à compter de l'acceptation de la position technique et financière de raccordement au réseau, c'est-à-dire avant le 24 septembre 2011, et non à la durée effective des travaux postérieurement à cette date, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à exclure tout lien de causalité entre la faute commise par la société Enedis et le préjudice subi par les sociétés exposantes et a violé l'article 1382 du code civil (dans sa rédaction applicable en la cause).
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. DB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation M. VIGNEAU, président Arrêt n° 29 F-D Pourvoi n° M 19-19.567 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 Le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (INPI), domicilié[Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 19-19.567 contre l'arrêt rendu le 21 mai 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige l'opposant à la société Thales, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations de Me Bertrand, avocat du directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Thales, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 mai 2019), le 17 décembre 2010, la société Thales a déposé la demande de brevet français n° 10 04947, intitulé « Procédé d'affichage temporel de la mission d'un aéronef », publiée le 22 juin 2012 sous le numéro 2 969 124, modifiée le 21 juillet 2014. 2. Par décision du 17 juillet 2018, le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI) a rejeté la demande de brevet au motif, notamment, que son objet ne concernait qu'une présentation d'informations associée à une méthode mathématique, dépourvue de caractéristiques techniques au sens de l'article L. 611-10, 2° du code de la propriété intellectuelle. 3. La société Thales a formé un recours contre cette décision. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. Le directeur général de l'INPI fait grief à l'arrêt d'annuler sa décision du 17 juillet 2018, alors « qu'aux termes de l'article L. 612-12 du code de la propriété intellectuelle, est rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet (?) 5° Dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention au sens de l'article L. 611-10 , deuxième paragraphe de ce code ; que, selon ce texte, ne sont pas considérées comme des inventions au sens du premier alinéa de cet article les présentations d'informations ; que la cour d'appel a considéré que la revendication 1, ainsi que les revendications dépendantes 2 à 7, de la demande de brevet déposée par la société Thales n'étaient pas exclues de la brevetabilité en ce qu'elles visent des moyens techniques, distincts du contenu des informations elles-mêmes, pour la raison que ces moyens, consistant à permettre un affichage partiel de la "timeline", à recentrer automatiquement la "timeline" sur l'heure courante et à utiliser une fonction de loupe pour dilater l'échelle des temps et entraîner le déplacement du symbole de l'avion sur la représentation graphique, aident le pilote à sélectionner parmi les informations les plus pertinentes ; que contrairement à ce qu'a énoncé la cour d'appel des caractéristiques qui définissent la manière dont les informations sont visualisées selon un certain agencement (affichage partiel ou total) ne peuvent être regardées comme apportant une contribution technique, un tel agencement transmettant tout au plus des informations d'une manière qu'un utilisateur peut considérer intuitivement comme particulièrement cohérente ; qu'en se bornant ainsi à reproduire les termes du brevet demandé par la société Thales, sans justifier l'existence d'une contribution technique apportée par la demande de brevet ni expliquer en quoi les moyens revendiqués dans la demande de brevet, laquelle ne portait ni sur l'obtention des informations en cause ni sur la technologie de représentation de ces informations mais uniquement sur l'amélioration d'un système d'affichage d'informations préenregistrées relatives à un plan de vol indépendamment des circonstances spécifiques de ce vol, avaient le caractère de moyens techniques distincts de la simple présentation d'informations, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 611-10, 2° et L. 612-12, 5° du code de la propriété intellectuelle. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 611-10, 2°, d) du code de la propriété intellectuelle et l'article L. 612-12, alinéa 1, 5° du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 : 5. Il résulte du premier de ces textes que ne sont pas considérées comme des inventions les présentations d'informations. Selon le second, doit être rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention au sens de l'article L. 611-10, deuxième paragraphe. 6. Pour considérer que la demande de brevet en cause porte sur une invention et, par conséquent, annuler la décision de rejet du directeur général de l'INPI, après avoir écarté la brevetabilité de la première caractéristique de la revendication 1, en retenant qu'elle n'a pour objet que la transmission et la présentation d'informations, l'arrêt retient que la seconde caractéristique de cette revendication, qui prévoit que la longueur de la « timeline » est supérieure à celle de la première fenêtre graphique et que l'utilisateur (le pilote) peut n'en afficher qu'une partie, est un moyen technique distinct du contenu des informations elles-mêmes, qui aide le pilote à sélectionner, parmi celles-ci, les plus pertinentes et produit ainsi un effet technique. Il en déduit que la revendication 1, prise dans son ensemble, n'est pas exclue de la brevetabilité, de même que les revendications 2 à 7, placées dans sa dépendance. 7. En se déterminant ainsi, en se bornant à reproduire les termes de la revendication 1, sans établir l'existence d'une contribution technique apportée par la demande de brevet ni expliquer en quoi les moyens revendiqués dans cette demande avaient le caractère de moyens techniques distincts de la simple présentation d'informations, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 21 mai 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ; Condamne la société Thales aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par Me Bertrand, avocat aux Conseils, pour le directeur général de l'Institut national de la propriété industrielle (l'INPI). Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir annulé la décision rendue le 17 juillet 2018 par le directeur général de l'INPI ; AUX MOTIFS QUE la demande de brevet litigieux, qui a pour objet un « procédé d'affichage temporel de la mission d'un aéronef », a été déposée le 17 décembre 2010 ; qu'elle comportait initialement 8 revendications, lesquelles, le 21 juillet 2014, ont fait l'objet d'une réduction à 7, essentiellement du fait de la fusion des revendications 1 et 2 ; qu'il est décrit que le domaine de l'invention est celui des systèmes d'affichage de cockpit et en particulier des systèmes dédiés à la navigation et à l'accomplissement d'un vol ou d'une mission ; Que dans l'état de la technique antérieure, les cockpits des aéronefs modernes sont dotés de systèmes de visualisation comportant entre autres deux types de fenêtres qui sont : - d'une part, une fenêtre appelée « Navigation Display » ou « ND » offrant une vue graphique et géographique de la situation de I'avion, - d'autre part une fenêtre affichant sous une forme de tableau la liste des points de passage ou « waypoints » du plan de vol de l'aéronef ou « WL » ; Que la figure 5 du brevet permet de préciser que ce tableau ''WL', trié par points de passage successifs, décrit pour chacun d'entre eux son nom, puis l'heure de passage, la vitesse et l'altitude de l'aéronef ; Que la figure 4 fournit un exemple d'écran unique sur un avion Falcon comprenant à gauche la fenêtre « ND » montrant l'avion dans sa situation géographique, et à droite la fenêtre « WL » comportant la liste successive de ses points de passage ; Que selon le brevet, l'inconvénient majeur de ces représentations, y compris sur les systèmes les plus aboutis, est leur manque d'intégration et d'inter-corrélation ne permettant pas de les mettre aisément en relation logique ; que les différentes fenêtres affichent des informations complémentaires dont les opérateurs doivent vérifier la cohérence et l'adéquation avec les capacités de l'aéronef en fonction des conditions environnementales et contextuelles rencontrées ; qu'alors que le point commun entre toutes les informations affichées sur les fenêtres de l'art antérieur est le temps, un axe des temps est une représentation aujourd'hui totalement absente des cockpits, en dehors de l'heure de passage indiquée en face de chacun des points de passage ; que la vision des informations dans l'espace temporel demande aux opérateurs des calculs mentaux, fonction des distances et de la vitesse courante ou future de l'aéronef ; Que le procédé selon l'invention est basé sur une échelle des temps ; qu'il permet d'obtenir une représentation cohérente et intégrée de la mission de l'aéronef ; qu'en d'autres termes, il offre aux équipages techniques des vues concises et efficaces de leur mission, leur permettant entre autres de comprendre, d'anticiper et de prendre les décisions en toute connaissance de l'état de l'avion et de son environnement ; qu'on améliore ainsi la perception de la situation de l'aéronef pendant la mission de l'équipage ; Que plus précisément, l'invention a pour objet un procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation, caractérisé en ce que les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou « timeline », les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement ; Que cette description, qui correspond à l'ancienne revendication 1 du brevet, est éclairée par la figure 6 représentant une fenêtre « timeline » : orientée « passé » vers le bas et « futur » vers le haut, coupée verticalement en son centre par une ligne des temps, comprenant à sa gauche les heures de passage et à sa droite les points de passage remarquables précisant des mentions telles que la vitesse, l'altitude, outre la position actuelle de l'avion représentée par un symbole « A » ; Qu'avantageusement, la longueur de la 'timeline' étant supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affiche alors qu'une partie de la « timeline », partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation ; Que cette caractéristique, qui permet à l'utilisateur de n'afficher qu'une partie de la « timeline », et qui correspond à l'ancienne revendication 2, a été fusionnée avec l'ancienne revendication 1 dans la rédaction de la nouvelle revendication 1 ; Qu'avantageusement, la première fenêtre comporte un premier symbole représentatif de l'aéronef, ledit premier symbole étant situé, dans un mode de fonctionnement standard, sur l'échelle graduée à l'heure courante ; Que cette caractéristique qui insère dans la première fenêtre à l'heure courante un symbole représentatif de l'aéronef, correspond à l'ancienne revendication 3 devenue la revendication 2 ; Qu'avantageusement, lorsque l'heure courante est située hors de la fenêtre graphique, le premier symbole est affiché en haut ou en bas de la fenêtre, une action prédéterminée de l'utilisateur sur ledit symbole centrant automatiquement la « timeline » sur l'heure courante ; Que cette caractéristique qui permet à l'utilisateur, en exerçant une action sur le symbole de l'aéronef, de centrer la « timeline » sur l'heure courante, correspond à l'ancienne revendication 4 devenue la revendication 3 ; Qu'avantageusement, la première fenêtre graphique comporte une fonction « loupe » permettant de dilater l'échelle des temps d'un facteur prédéterminé dans une plage horaire prédéterminée centrée sur un instant imposé par l'utilisateur du dispositif de visualisation ; Que cette caractéristique qui permet à l'utilisateur de dilater l'échelle des temps, correspond à l'ancienne revendication 5 devenue la revendication 4 ; Qu'avantageusement, la mission étant un plan de vol, chaque étape correspondant à un point de passage du plan de vol ou « waypoint », l'affichage comprend une seconde fenêtre graphique représentant une vue cartographique dudit plan de vol, ladite seconde fenêtre comportant également un second symbole représentatif de l'aéronef, ledit second symbole étant situé, dans un mode de fonctionnement standard, sur la vue cartographique à l'heure courante ; Que cette caractéristique qui prévoit une seconde fenêtre représentant une vue cartographique du plan de vol comportant un second symbole représentatif de l'aéronef, correspond à l'ancienne revendication 6 devenue la revendication 5 ; Qu'avantageusement, la première fenêtre et la seconde fenêtre sont disposées sur le même écran de visualisation, juxtaposées l'une à l'autre, ou sur des écrans différents ; Que cette caractéristique, qui prévoit que les deux fenêtres peuvent être juxtaposées sur le même écran, correspond à l'ancienne revendication 7 devenue la revendication 6 ; Qu'avantageusement, le déplacement de la loupe entraîne le déplacement du second symbole sur la vue cartographique de façon que la position de ce second symbole soit représentative de la position que l'aéronef occuperait effectivement à l'instant indiqué par la loupe ; Que cette caractéristique, qui permet à l'utilisateur en déplaçant la loupe sur la première fenêtre de modifier la position de l'aéronef sur la seconde fenêtre, correspond à l'ancienne revendication 8 devenue la revendication 7 ; qu'après leur modification intervenue le 21 juillet 2014, les revendications se lisent ainsi : 1. Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef sur un écran d'un dispositif de visualisation, la mission étant un plan de vol, chaque étape correspondant à un point de passage du plan de vol ou « waypoint », caractérisé en ce que les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou « timeline » (TL), les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement, la longueur de la « timeline » étant supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affichant alors qu'une partie de la « timeline », partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation. 2. Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon la revendication l, caractérisé en ce que la première fenêtre comporte un premier symbole (A) représentatif de l'aéronef, ledit premier symbole étant situé, dans un mode de fonctionnement standard, sur l'échelle graduée à l 'heure courante. 3. Procédé d'affichage des étapes d'une mission d 'un aéronef selon l 'une des revendications 1 ou 2, caractérisé en ce que, lorsque l 'heure courante est située hors de la fenêtre graphique, le premier symbole est affiché en haut ou en bas de la fenêtre, une action prédéterminée de l'utilisateur sur ledit symbole centrant automatiquement la « timeline » sur l'heure courante. 4. Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon l'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que la première fenêtre graphique comporte une fonction «loupe » (L) permettant de dilater l 'échelle des temps d'un facteur prédéterminé dans une plage horaire prédéterminée centrée sur un instant imposé par l'utilisateur d'un dispositif de visualisation. 5. Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon l 'une des revendications précédentes, caractérisé en ce que l'affichage comprend une seconde fenêtre graphique (ND) représentant une vue cartographique dudit plan de vol, ladite seconde fenêtre comportant également un second symbole (A') représentatif de l'aéronef, ledit second symbole étant situé, dans un mode de fonctionnement standard, sur la vue cartographique à l'heure courante. 6. Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon la revendication 5, caractérisé en ce que la première fenêtre et la seconde fenêtre sont disposées sur le même écran de visualisation (DS), juxtaposées l'une à l'autre, ou sur des écrans différents. 7. Procédé d'affichage des étapes d'une mission d'un aéronef selon l 'une des revendications 2 à 6, caractérisé en ce que le déplacement de la loupe entraîne le déplacement du second symbole sur la vue cartographique de façon que la position de ce second symbole soit représentative de la position que l 'aéronef occuperait effectivement à l 'instant indiqué par la loupe ; que pour rejeter la demande de brevet, le directeur général de l'INPI a analysé ces revendications au regard des dispositions : - de l'article L.611-10 2º du code de la propriété intellectuelle selon lequel ne sont pas considérées comme des inventions (...) notamment a) les découvertes ainsi que les théories scientifiques et les méthodes mathématiques (...) d) les présentations d'informations en tant que telles ; - de l'article L.612-12 du même code selon lequel est rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet (...) 5º Dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention au sens de l'article L611-10, deuxième paragraphe ; 6º Dont la description ou les revendications ne permettent pas d'appliquer les dispositions de l'article L. 612-14 ; Qu'il sera précisé que l'article L. 612-14 précité dispose que la demande de brevet donne lieu à l'établissement d'un rapport de recherche sur l'état des éléments de la technique ; Que prenant en considération essentiellement la revendication 1, le directeur de l'INPI a estimé notamment : que le problème que la demande de brevet se propose de résoudre est de faciliter la lecture et la corrélation des données relatives aux étapes d'une mission d'aéronef fournies aux opérateurs par différentes fenêtres de moyens d'affichage présents dans le cockpit ; qu'en l'absence de tels moyens de facilitation, les opérateurs doivent notamment vérifier par eux-mêmes la cohérence des informations fournies par les différentes fenêtres d'affichage ; qu'il n'est pas mentionné de problème lié à la technologie de représentation des données d'une mission ou d'un plan de vol d'aéronef, mais uniquement lié à l'interprétation que les opérateurs doivent faire de ces données ; qu'il s'agit donc d'un problème d'ordre intellectuel et donc non technique, contrairement aux affirmations du déposant ; Qu'analysant plus particulièrement la partie finale de cette revendication 1 selon laquelle « la longueur de la « timeline » étant supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affichant alors qu'une partie de la « timeline », partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation », il a considéré : que même si l'affichage d'une partie de la 'timeline' est imposé par un utilisateur, force est de constater que la description ne précise pas par quel moyen technique l'utilisateur impose 'une partie de la timeline' et que cette caractéristique n'est pas caractérisée sur le plan technique dans la description et ne saurait donc suffire à conférer un caractère technique proposé ; qu'aucun effet technique n'émerge des interactions homme-machine décrites dans la demande ; Qu'il a enfin ajouté : que les revendications dépendantes nº 2 à 7 ne contiennent aucune caractéristique technique supplémentaire susceptible de conférer le caractère technique requis au procédé revendiqué ; qu'en conséquence, l'objet de la demande de brevet, malgré l'intitulé des revendications, ne concerne qu'une présentation d'informations associée à une méthode mathématique ; que cet objet ne peut manifestement pas être considéré comme une invention au sens de l'article L.611-10 2º du code de la propriété intellectuelle ; qu'en outre, faute de caractéristiques techniques suffisantes, l'objet de la demande ne peut faire l'objet d'une comparaison avec l'état de la technique et ne permet donc pas l'établissement d'un rapport de recherche conformément aux dispositions de l'article L. 612-14 du code de la propriété intellectuelle ; que pour demander à la cour d'annuler la décision du directeur général de l'INPI, la société Thales, après avoir décrit le cadre juridique dans lequel se pose le litige, puis analysé la portée du brevet, soutient notamment : que la revendication 1 n'est pas une simple présentation d'informations mais a un caractère technique dans la mesure ou elle impose nécessairement des moyens techniques de sélection de la longueur de la timeline pour être mise en oeuvre ; que la revendication 3 a aussi un caractère technique dès lors que le procédé qui y est décrit permet à l'utilisateur, grâce à une action mécanique, de recentrer automatiquement la vue temporelle sur l'heure courante et la position courante de l'avion ; que la revendication 4, relative à l'utilisation d'une loupe pour dilater l'échelle des temps, a bien un effet technique et l'action de l'utilisateur constitue bien une tâche technique ; que la revendication 7, selon laquelle le déplacement de la loupe sur la timeline entraîne le déplacement du symbole de l'aéronef sur la représentation graphique, constitue aussi une tâche technique au moyen d'un processus d'interaction homme machine ; concernant la prétendue impossibilité d'établir un rapport de recherche, que l'INPI a totalement omis de faire état des caractéristiques techniques précitées ; que pour demander le rejet du recours, le directeur général de l'INPI, après avoir rappelé les éléments de droit, soutient notamment : que la revendication 1, qui spécifie seulement un résultat à atteindre, en l'espèce imposer l'affichage d'une partie de la timeline, sans clairement exposer le moyen technique permettant d'atteindre ce résultat, ne suffit pas à conférer un caractère technique à l'invention ni à permettre une comparaison avec l'art antérieur en réalisant un rapport de recherche ; que les revendications 2, 5 et 6, qui ne se rapportent qu'à une présentation d'informations, ne sont pas défendues par la société Thales ; que la revendication nº 3, qui a pour objet une action prédéterminée de l'utilisateur sur le symbole représentant l'aéronef en dehors de la timeline centrant automatiquement la timeline sur l'heure courante, ne précise pas la manière dont la vue temporelle est recentrée de sorte qu'aucune solution technique n'est ainsi revendiquée, et qu'en l'absence de précision, l'Institut n'a pas été en mesure d'établir un rapport de recherche confrontant à l'art antérieur les caractéristiques techniques apportées ; que la revendication nº 4 a trait à une « fonction loupe permettant de dilater l'échelle des temps », c'est-à-dire à « zoomer ou dézoomer », sans explication sur la solution technique apportée pour atteindre un tel résultat ; que seul le résultat étant revendiqué et la solution technique n'étant pas décrite, non seulement il n'a pas été permis à l'Institut d'établir un rapport de recherche de l'art antérieur, mais encore les conditions de brevetabilité ne sont pas réunies ; que la revendication nº 7, qui présente un système où le déplacement de la loupe sur la timeline met également en mouvement la loupe sur la vue cartographique, n'apporte pas, en tant que telle, de solution technique à un problème technique, et permet seulement une présentation plus conviviale de données préenregistrées à l'instant choisi par l'utilisateur ; qu'en droit, l'article L.613-12 du code de la propriété intellectuelle énonce les cas dans lesquels une demande de brevet peut être rejetée par le directeur général de l'INPI ; que contrairement aux pouvoirs de l'OEB, qui permettent un examen complet des conditions de fond de brevetabilité, ceux du directeur général de l'INPI sont strictement limités, ne permettant pas en particulier une appréciation des conditions de description suffisante, d'application industrielle ou d'activité inventive ; que s'il peut soulever l'absence de nouveauté, c'est à la seule condition que celle-ci résulte manifestement du rapport de recherche ; Que, sous réserve de ce qui précède, l'article L. 613-12 précité énonce que l'office français peut notamment rejeter la demande (...) 5º dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention au sens de l'article L. 611-10, deuxième paragraphe ; que ce dernier texte dispose que ne sont notamment pas considérées comme des inventions (...) d) les présentations d'informations, l'alinéa suivant précisant que la brevetabilité n'est alors exclue que dans la mesure où le brevet ne concerne que cet élément [les présentations d'informations] considéré en tant que tel ; Que les directives d'examen de l'INPI et de l'OEB permettent alors de mieux appréhender ce que l'on doit entendre par une « présentation d'informations considérée en tant que telle » ne permettant pas de qualifier le brevet demandé comme une invention ; Que l'office français précise que si toute présentation d'information caractérisée uniquement par l'information qu'elle contient n'est pas brevetable, en revanche la façon de présenter une information, pour autant qu'elle soit distincte du contenu de l'information, peut présenter des caractéristiques techniques brevetables ; Que l'office européen spécifie qu'on entend par « présentations d'informations » la transmission d'informations à un utilisateur, visant à la fois le contenu cognitif de l'information et la manière dont celle-ci est présentée ; qu'en revanche, elle ne s'étend pas aux moyens techniques utilisés pour générer de telles présentations d'informations ; qu'il ajoute qu'il convient de prendre en considération l'objet de la revendication dans son ensemble ; qu'en particulier, une revendication qui a pour objet l'utilisation de moyens techniques pour présenter des informations ou qui définit une telle utilisation revêt dans son ensemble un caractère technique et n'est donc pas exclue de la brevetabilité ; qu'analysant ensuite cette notion dans le contexte de l'activité inventive (ce que ne peut faire l'INPI), l'OEB précise qu'une caractéristique qui définit une présentation d'informations produit un effet technique si elle aide de façon crédible l'utilisateur à effectuer une tâche technique au moyen d'un processus d'interaction homme-machine continu et/ou guidé ; qu'en fait, les revendications du brevet contesté se rapportent à la transmission d'informations à un utilisateur, spécifiquement le pilote ou le copilote d'un aéronef, pour que celui-ci obtienne une représentation cohérente et intégrée de sa mission, lui permettant en particulier de comprendre, d'anticiper et de prendre les décisions en toute connaissance de l'état de l'avion et de son environnement ; qu'il a déjà été examiné que la revendication 1 actuelle fusionne les revendications 1 et 2 d'origine ; qu'il en découle qu'elle est caractérisée : 1 - en ce que les différentes étapes sont affichées dans une première fenêtre graphique comportant une échelle graduée en temps ou « timeline » (TL), les différentes étapes étant affichées en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement, 2 - en ce que si la longueur de la « timeline » est supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, la fenêtre graphique n'affiche alors qu'une partie de la 'timeline', partie imposée par l'utilisateur du dispositif de visualisation ; que la première caractéristique revendique la fenêtre comportant la « timeline » laquelle affiche les différentes étapes en regard de l'horaire correspondant à leur accomplissement ; qu'il a été décrit ci-dessus qu'une telle fenêtre, orientée 'passé' vers le bas et 'futur' vers le haut, coupée verticalement en son centre par une ligne des temps, comprend à sa gauche les heures de passage et à sa droite les points de passage remarquables incluant des mentions telles que la vitesse, l'altitude, outre la position actuelle de l'avion représentée par un symbole 'A' ; qu'il apparaît ainsi que cette caractéristique, bien que centrale du brevet dont la délivrance est requise, n'a pour objet que la transmission d'informations au pilote de l'aéronef, visant à la fois le contenu cognitif de l'information (les heures de passage et les points de passage) et la manière dont celle-ci est présentée (en fonction d'une ligne des temps) ; qu'elle ne revendique aucune caractéristique technique distincte et n'est donc pas par elle-même brevetable ; Qu'en revanche, la seconde caractéristique revendique que : lorsque la longueur de la 'timeline' est supérieure à la longueur de la première fenêtre graphique, l'utilisateur (le pilote) peut alors n'afficher qu'une partie de la « timeline » (qu'il « impose ») ; Qu'il s'agit dès lors d'un moyen technique distinct du contenu des informations elles-mêmes, étant précisé que ce moyen aidant le pilote à sélectionner parmi celles-ci les plus pertinentes produit aussi un effet technique tel que défini ci-dessus ; Que pour soutenir que cette caractéristique ne serait néanmoins pas brevetable, le directeur général de l'INPI fait valoir d'abord qu'elle spécifierait seulement un résultat à atteindre, en l'espèce imposer l'affichage d'une partie de la timeline, sans clairement exposer le moyen technique permettant d'atteindre ce résultat ; que cependant, alors qu'au stade de l'enregistrement le directeur général de l'INPI ne dispose pas du pouvoir d'apprécier une insuffisance de description du brevet, ce moyen est inopérant ; qu'il fait valoir ensuite que cette insuffisance de caractère technique ne permettrait pas une comparaison avec l'art antérieur en réalisant un rapport de recherche ; que cependant, rien n'empêche de rechercher dans l'art antérieur, par exemple dans la fenêtre « WL » affichant sous forme de tableau la liste des points de passage, si l'utilisateur peut, lorsque la longueur de cette liste est supérieure à la longueur de la fenêtre, n'afficher qu'une partie de ladite liste ; Qu'en conséquence la revendication 1, prise dans son ensemble, n'est pas exclue de la brevetabilité ; Que les revendications 2 à 7, qui dépendantes de la revendication 1 en reprennent les caractéristiques, ne sont en conséquence pas non plus exclues de la brevetabilité ; Qu'en tant que de besoin, la cour ajoutera que : la revendication 3, qui permet au pilote, grâce à une action mécanique, de recentrer automatiquement la vue temporelle sur l'heure courante et la position courante de l'avion, la revendication 4, qui lui permet d'utiliser une loupe pour dilater l'échelle des temps, la revendication 7, qui lui permet, en déplaçant la loupe sur la timeline, d'entraîner le déplacement du symbole de l'aéronef sur la représentation graphique, sont, pour les mêmes motifs qu'examinés ci-dessus, des moyens techniques distincts du contenu des informations elles-mêmes, lesquels aidant le pilote à sélectionner parmi celles-ci les plus pertinentes, produisent aussi un effet technique ; que les moyens soulevés par le directeur général de l'INPI visant en réalité à soulever une insuffisance de description sont inopérants à ce stade de la procédure ; qu'enfin il n'est pas justifié qu'il ne puisse être recherché dans les fenêtres de l'art antérieur des procédés permettant au pilote de recentrer automatiquement la vue temporelle sur l'heure courante et la position courante de l'avion, d'utiliser une loupe pour dilater une échelle des temps, ou, en déplaçant une telle loupe, d'entraîner le déplacement du symbole de l'aéronef sur la fenêtre de représentation graphique (arrêt attaqué p. 3 à 10) ; ALORS, d'une part, QU'aux termes de l'article L 612-12 du Code de la propriété intellectuelle, est rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet (?) 5° Dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention au sens de l'article L 611-10 , deuxième paragraphe de ce Code ; que, selon ce texte, ne sont pas considérées comme des inventions au sens du premier alinéa de cet article les présentations d'informations ; que la cour d'appel a considéré que la revendication 1, ainsi que les revendications dépendantes 2 à 7, de la demande de brevet déposée par la société Thales n'étaient pas exclues de la brevetabilité en ce qu'elles visent des moyens techniques, distincts du contenu des informations elles-mêmes, pour la raison que ces moyens, consistant à permettre un affichage partiel de la « timeline », à recentrer automatiquement la « timeline » sur l'heure courante et à utiliser une fonction de loupe pour dilater l'échelle des temps et entraîner le déplacement du symbole de l'avion sur la représentation graphique, aident le pilote à sélectionner parmi les informations les informations les plus pertinentes ; que contrairement à ce qu'a énoncé la cour d'appel des caractéristiques qui définissent la manière dont les informations sont visualisées selon un certain agencement (affichage partiel ou total) ne peuvent être regardées comme apportant une contribution technique, un tel agencement transmettant tout au plus des informations d'une manière qu'un utilisateur peut considérer intuitivement comme particulièrement cohérente ; qu'en se bornant ainsi à reproduire les termes du brevet demandé par la société Thales, sans justifier l'existence d'une contribution technique apportée par la demande de brevet ni expliquer en quoi les moyens revendiqués dans la demande de brevet, laquelle ne portait ni sur l'obtention des informations en cause ni sur la technologie de représentation de ces informations mais uniquement sur l'amélioration d'un système d'affichage d'informations préenregistrées relatives à un plan de vol indépendamment des circonstances spécifiques de ce vol, avaient le caractère de moyens techniques distincts de la simple présentation d'informations, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 611-10, 2° et L.612-12, 5° du Code de la propriété intellectuelle ; ALORS, d'autre part, QUE, lors de la délivrance du brevet, le directeur de l'INPI procède à un examen de certaines des conditions de brevetabilité et a le pouvoir de rejeter une demande dont l'objet ne peut manifestement être considéré comme une invention, telle qu'une présentation d'informations ; que sauf à consacrer la possibilité de déposer une demande de brevet portant sur de pures considérations abstraites, il appartient au directeur de l'INPI, dans l'exercice de son contrôle effectif préalable de la demande de brevet, de s'assurer que les revendications et la description de la demande exposent les moyens techniques mis en oeuvre pour parvenir à un résultat spécifique et qu'elles ne se bornent pas à décrire une telle finalité sans préciser les moyens techniques propres à y parvenir ; qu'un tel examen, qui ressortit à la question de savoir si l'objet de la demande de brevet a le caractère d'une invention au sens de l'article L 611-10 du code de la propriété intellectuelle, est étranger à l'appréciation du caractère suffisant ou non de la description ; qu'en rejetant le moyen tiré par le directeur de l'INPI de ce que la demande de brevet ne faisait qu'exposer des moyens à atteindre (imposer l'affichage d'une partie de la « timeline », possibilité de recentrer la vue temporelle de l'avion, fonction de loupe) sans décrire ni identifier les moyens techniques mis en oeuvre pour atteindre ces résultats, de sorte que l'objet de la demande de brevet, relative à l'amélioration d'un système d'affichage de données préenregistrées adéquates à un plan de vol qui ne portait que sur une présentation d'informations en tant que telle, n'avait pas le caractère d'une invention au sens de l'article L 611-10 du Code de la propriété intellectuelle, au motif inopérant que le directeur de l'INPI ne disposait pas à ce stade du pouvoir d'apprécier une insuffisance de description du brevet, la cour d'appel a violé les articles L 612-11, L 612-12 et L 611-10, 2° du Code de la propriété intellectuelle ; ALORS, de troisième part, QU' aux termes de l'article L 612-12, 6° du Code de la propriété intellectuelle, est rejetée, en tout ou partie, toute demande de brevet (?) 6° Dont la description et les revendications ne permettent pas d'appliquer les dispositions de l'article L 612-14, selon lesquelles la demande de brevet donne lieu à l'établissement d'un rapport de recherche sur les éléments de la technique qui peuvent être pris en considération pour apprécier la brevetabilité de l'invention ; que ce rapport de recherche ne peut être établi qu'à la condition que la demande de brevet comporte les éléments techniques propres à permettre de procéder à une comparaison avec les éléments de l'état de la technique; qu'en affirmant que le moyen de l'INPI tiré de l'impossibilité d'établir le rapport de recherche n'était pas fondé au motif que « rien n'empêche de rechercher dans l'art antérieur, par exemple dans la fenêtre « WL » affichant sous forme de tableau la liste des points de passage, si l'utilisateur peut, lorsque la longueur de cette liste est supérieure à la longueur de la fenêtre, n'afficher qu'une partie de ladite liste », sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur la possibilité effective de procéder à une comparaison de la demande de brevet et de l'art antérieur, de façon à pouvoir établir le rapport de recherche, en l'absence de toute mention dans les revendications et la description de la demande de brevet, laquelle ne comportait aucune précision des moyens techniques propres à parvenir aux résultats qu'il exposait, d'éléments techniques pouvant être comparés avec l'état de la technique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.612-11, L.612-12 et L. 612-14 du code de la propriété intellectuelle ; ALORS, de quatrième part et enfin, QU'il appartient à l'auteur de la demande de brevet d'exposer les moyens techniques mis en oeuvre pour parvenir au but à atteindre, de manière notamment à permettre l'établissement du rapport de recherche visé à l'article L.612-14 du code de la propriété intellectuelle ; qu'il lui revient donc de démontrer que sa demande comporte les moyens techniques pour permettre cette recherche sur l'état de la technique antérieure ; qu'en affirmant que le moyen de l'INPI tiré de l'impossibilité d'établir le rapport de recherche n'était pas fondé au motif qu'il n'était « pas justifié qu'il ne puisse être recherché dans les fenêtres de l'art antérieur des procédés permettant au pilote de recentrer automatiquement la vue temporelle sur l'heure courante et la position courante de l'avion, d'utiliser une loupe pour dilater une échelle des temps, ou, en déplaçant une telle loupe, d'entraîner le déplacement du symbole de l'aéronef sur la fenêtre de représentation graphique », la cour d'appel, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1353 du code civil.
INCA/JURITEXT000046990257.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 30 F-D Pourvoi n° Y 21-20.437 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 La société Saint-Gobain Isover, société anonyme, dont le siège est [Adresse 4], a formé le pourvoi n° Y 21-20.437 contre l'arrêt rendu le 8 juin 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [O] [Y], domicilié [Adresse 1], 2°/ à M. [V] [J], domicilié [Adresse 3], 3°/ à M. [N] [U], domicilié [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les six moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Saint-Gobain Isover, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de MM. [Y], [J] et [U], et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 8 juin 2021), la société Saint-Gobain Isover, qui a pour activité la conception, la fabrication et la commercialisation, sous la marque « Isover », enregistrée depuis 1937, de systèmes d'isolation, permettant de traiter les parties extérieures et intérieures des bâtiments, associant des laines minérales à performances thermiques, phoniques et ignifuges, des membranes assurant l'étanchéité à l'air des parois, ainsi que des ossatures et accessoires nécessaires à leur mise en oeuvre, est immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous la dénomination sociale Saint-Gobain Isover depuis le 7 juillet 2006 pour exercer une activité de fabrication, d'achat et de vente de tous produits d'origine minérale, organique ou végétale destinés à l'isolation, et exploite son activité sous le nom commercial et l'enseigne Saint-Gobain Isover et Isover Saint-Gobain ainsi que sur internet. 2. Elle est titulaire : - de la marque française semi-figurative en couleurs : déposée le 19 février 1999 sous le n° 99776398, pour désigner les produits suivants en classes 17 et 19 : « Matières servant à calfeutrer, à étouper et à isoler ; matériaux isolants à base de laine minérale ou fibres minérales sous forme de laine en vrac, bandes, voiles, feutres, nappes, panneaux, plaques, bourrelets, coquilles, tuyaux, rouleaux et pièces moulées, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à l'étanchéité. Matériaux isolants revêtus d'un surfaçage. Dispositifs de fixation en plastique pour matériaux de construction ; dispositifs de fixation en plastique pour produits d'isolation et d'étanchéité. Matériaux de construction non métalliques. Produits bitumineux, ossatures non métalliques pour la construction ; dispositifs de fixation non métalliques pour la construction ; panneaux, plaques, rouleaux, surfacés ou non, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à la protection contre l'humidité et le feu utilisés dans la construction des murs, cloisons, plafonds, sous-plafonds, sols, toitures, sous-toitures, bardages et complexes d'isolation sous étanchéité » ; - de la même marque semi-figurative en couleurs de l'Union européenne déposée le 7 juin 1999 sous le n° 1196948, et sous priorité de la marque française précitée, pour désigner les mêmes produits. 3. Elle est également titulaire des noms de domaine « Isover.com » et « Isover.fr », enregistrés respectivement le 11 décembre 1996 et le 21 septembre 1999. 4. Le 5 avril 2016, MM. [U], [Y] et [J] ont déposé une demande de marque française semi-figurative en couleurs : sous le n° 4262247, pour désigner, en classes 16, 17 et 27, les « produits de l'imprimerie ; articles de papeterie ; papier ; feuilles métalliques isolantes ; tentures murales non en matières textiles ; papiers peints ». 5. Au mois de juillet 2016, la société Saint-Gobain Isover a constaté que M. [J] exploitait la dénomination « Isocover », notamment sur le site internet http://www.isocover.fr (devenu https://isocover.fr) dont il a enregistré le nom de domaine le 15 avril 2016, pour proposer à la vente des papiers peints isolants. 6. La dénomination était utilisée seule sous la forme « IsocoverTM » ou associée à un logo et au slogan « Isolation wallpaper for radio frequency identification ». 7. La société Saint-Gobain Isover a assigné MM. [U], [Y] et [J] en contrefaçon de ses marques « Isover », atteinte à la marque renommée, concurrence déloyale et nullité de la marque « Isocover » et a sollicité diverses mesures accessoires. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses troisième à huitième branches, sur le deuxième moyen, pris en ses première et troisième branches, sur le quatrième moyen et sur le cinquième moyen, ci-après annexés 8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches Enoncé du moyen 9. La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n° 1196948 « Isover » par la marque n° 4262247 « Isocover », alors : « 1°/ que l'appréciation globale du risque de confusion entre deux marques se fonde sur l'impression d'ensemble qu'elles produisent sur le consommateur moyen des produits ou des services tels que désignés dans leurs demandes d'enregistrement, indépendamment des produits ou services effectivement commercialisés sous les marques en présence ; que la demande d'enregistrement des marques "Isover" visait : "Matières servant à calfeutrer, à étouper et à isoler ; matériaux isolants à base de laine minérale ou fibres minérales sous forme de laine en vrac, bandes, voiles, feutres, nappes, panneaux, plaques, bourrelets, coquilles, tuyaux, rouleaux et pièces moulées, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à l'étanchéité. Matériaux isolants revêtus d'un surfaçage. Dispositifs de fixation en plastique pour matériaux de construction ; dispositifs de fixation en plastique pour produits d'isolation et d'étanchéité. Matériaux de construction non métalliques. Produits bitumineux, ossatures non métalliques pour la construction ; dispositifs de fixation non métalliques pour la construction ; panneaux, plaques, rouleaux, surfacés ou non, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à la protection contre l'humidité et le feu utilisés dans la construction des murs, cloisons, plafonds, sous-plafonds, sols, toitures, sous-toitures, bardages et complexes d'isolation sous étanchéité", tandis que la demande d'enregistrement de la marque "Isocover" visait : "Produits de l'imprimerie ; articles de papeterie ; papier ; feuilles métalliques isolantes ; tentures murales non en matières textiles ; papiers peints" ; qu'en énonçant, pour affirmer que les publics de référence des produits en cause étaient différents, que les premiers étaient des "produits isolants traditionnels" et les seconds des "solutions d'isolation très spécifiques", la cour d'appel, qui s'est référée, non aux produits visés dans la demande d'enregistrement de la marque "Isocover", qui ne présentent pas de spécificité, mais aux produits effectivement commercialisés sous cette marque, qui répondent à des demandes spécifiques, a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, ensemble l'article 9 du règlement 207/2009 ; 2°/ qu'en toute hypothèse, en se bornant, pour rejeter l'action en contrefaçon, à affirmer que les publics de référence des produits en cause n'étaient pas identiques, celui des produits visés par les marques de la société Saint-Gobain Isover étant essentiellement composé de professionnels du bâtiment de second oeuvre et de particuliers entreprenant des travaux de construction et d'isolation, et celui des produits visés par la marque contestée étant constitué de professionnels de l'aménagement intérieur ou de solutions d'isolation très spécifiques, ainsi que des particuliers amateurs de décoration d'intérieur, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les publics de référence ne se recoupaient pas au moins partiellement, le second oeuvre s'entendant des travaux de finition, lesquels rejoignent l'aménagement intérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, et de l'article 9 du règlement 207/2009. » Réponse de la Cour 10. Après avoir énoncé que le risque de confusion doit s'apprécier globalement par référence au contenu des enregistrements des marques vis-à-vis du public pertinent des produits tels que désignés par ces enregistrements et sans tenir compte de ceux effectivement exploités sous la marque, l'arrêt relève, par motifs adoptés, que la locution anglaise « Isolator wallpapers for radio frequency identification », présente dans la marque semi-figurative « Isocover », permet de préciser le domaine des produits concernés par celle-ci puis retient que le public de référence est constitué, pour les produits visés dans l'enregistrement des marques « Isover », de professionnels du bâtiment de second oeuvre et de particuliers entreprenant des travaux de construction et d'isolation et, pour les produits visés par la marque « Isocover », de professionnels de l'aménagement intérieur ou de solutions d'isolation très spécifique, à la différence des produits isolants traditionnels visés dans le dépôt de la marque première, ainsi que de particuliers amateurs de décoration intérieure. 11. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel, qui a apprécié concrètement le public pertinent au regard des produits visés respectivement dans l'enregistrement des marques en présence, sans se référer aux produits effectivement commercialisés sous la marque « Isocover », et qui, ayant procédé à la recherche qui lui était demandée, a considéré que, contrairement à ce que soutenait la société Saint-Gobain Isover, le public pertinent n'est pas strictement identique, a fait une exacte application des articles L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle, interprété à la lumière de l'article 5 de la directive n° 2008/95, et de l'article 9 du règlement n° 207/2009. 12. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le deuxième moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 13. La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n° 1196948 « Isover » par l'usage du terme et du logo « Isocover », alors « que pour exclure le risque de confusion entre les marques "Isover" et le terme et le logo "Isocover", la cour d'appel s'est référée à l'analyse des ressemblances entre les marques "Isover" et "Isocover" ; que la censure à intervenir sur le premier moyen entraînera la cassation du chef de dispositif critiqué, en application de l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 14. Le rejet du premier moyen rend sans portée le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence. Sur le troisième moyen Enoncé du moyen 15. La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n° 1196948 « Isover » par l'usage du nom de domaine « isocover.fr », alors « que la cour d'appel a exclu tout risque de confusion entre les marques "Isover" et le nom de domaine "isover.fr" "pour les mêmes raisons que développées précédemment" ; que la censure à intervenir sur les deux premiers moyens entraînera la cassation du chef de dispositif critiqué, en application de l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 16. Le rejet des deux premiers moyens rend sans portée le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence. Sur le sixième moyen Enoncé du moyen 17. La société Saint-Gobain Isover fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en nullité de la marque française semi-figurative n° 4262247 « Isocover », alors : « 1°/ que pour exclure que la marque "Isocover" porte atteinte aux marques antérieures "Isover" ou à la marque renommée éponyme, la cour d'appel a énoncé que, "comme indiqué précédemment, eu égard à l'absence de similitudes visuelles, sonores et conceptuelles entre les signes et de risque de confusion en conséquence pour le public concerné, l'atteinte à la marque "Isover" par la marque seconde n'est pas constituée" ; que la censure à intervenir sur les premier et quatrième moyens de cassation entraînera la cassation de ce chef de dispositif, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; 2°/ que la société Saint-Gobain Isover invoquait, au soutien de sa demande d'annulation de la marque "Isocover", l'atteinte à l'ensemble des "signes distinctifs lui appartenant", incluant ses noms de domaine "isover.fr" et "isover.com" ainsi que l'enseigne "Isover", et sollicitait l'annulation de la marque litigieuse notamment en tant qu'elle portait atteinte aux noms de domaine "isover.fr" et "isover.com" et à l'enseigne "Isover" ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande en nullité de la marque "Isocover", à rechercher si la marque litigieuse portait atteinte aux marques, à la dénomination sociale et au nom commercial de la société Saint-Gobain Isover, sans répondre au chef de conclusions tiré de l'atteinte à ses noms de domaine et à son enseigne, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 18. D'une part, le rejet des premier et quatrième moyens rend sans portée le moyen qui invoque la cassation par voie de conséquence. 19. D'autre part, en dépit de la formule générale du dispositif qui « rejette la demande en nullité de la marque semi-figurative française "Isocover" n° 164262247 », la cour d'appel n'a pas statué sur le chef de demande tiré des atteintes alléguées aux droits antérieurs constitués des noms de domaine « isover.com » et « isover.fr » ainsi que de l'enseigne de la société Saint-Gobain Isover, dès lors qu'il ne résulte pas des motifs de la décision qu'elle les ait examinées. 20. L'omission de statuer pouvant être réparée par la procédure prévue à l'article 463 du code de procédure civile, le moyen n'est pas recevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Saint-Gobain Isover aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Saint-Gobain Isover et la condamne à payer à MM. [Y], [J] et [U] la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Saint-Gobain Isover. PREMIER MOYEN DE CASSATION (contrefaçon des marques « Isover » par la marque « Isocover ») La société Saint-Gobain Isover reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n°1196948 « Isover » par la marque n° 4262247 « Isocover », 1) ALORS QUE l'appréciation globale du risque de confusion entre deux marques se fonde sur l'impression d'ensemble qu'elles produisent sur le consommateur moyen des produits ou des services tels que désignés dans leurs demandes d'enregistrement, indépendamment des produits ou services effectivement commercialisés sous les marques en présence ; que la demande d'enregistrement des marques « Isover » visait : « Matières servant à calfeutrer, à étouper et à isoler ; matériaux isolants à base de laine minérale ou fibres minérales sous forme de laine en vrac, bandes, voiles, feutres, nappes, panneaux, plaques, bourrelets, coquilles, tuyaux, rouleaux et pièces moulées, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à l'étanchéité. Matériaux isolants revêtus d'un surfaçage. Dispositifs de fixation en plastique pour matériaux de construction ; dispositifs de fixation en plastique pour produits d'isolation et d'étanchéité. Matériaux de construction non métalliques. Produits bitumineux, ossatures non métalliques pour la construction ; dispositifs de fixation non métalliques pour la construction ; panneaux, plaques, rouleaux, surfacés ou non, destinés à l'isolation thermique et acoustique et à la protection contre l'humidité et le feu utilisés dans la construction des murs, cloisons, plafonds, sous-plafonds, sols, toitures, sous-toitures, bardages et complexes d'isolation sous étanchéité », tandis que la demande d'enregistrement de la marque « Isocover » visait : « Produits de l'imprimerie ; articles de papeterie ; papier ; feuilles métalliques isolantes ; tentures murales non en matières textiles ; papiers peints » ; qu'en énonçant, pour affirmer que les publics de référence des produits en cause étaient différents, que les premiers étaient des « produits isolants traditionnels » et les seconds des « solutions d'isolation très spécifiques », la cour d'appel, qui s'est référée, non aux produits visés dans la demande d'enregistrement de la marque « Isocover », qui ne présentent pas de spécificité, mais aux produits effectivement commercialisés sous cette marque, qui répondent à des demandes spécifiques, a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, ensemble l'article 9 du règlement 207/2009 ; 2) ALORS QU' en toute hypothèse, en se bornant, pour rejeter l'action en contrefaçon, à affirmer que les publics de référence des produits en cause n'étaient pas identiques, celui des produits visés par les marques de la société Saint-Gobain Isover étant essentiellement composé de professionnels du bâtiment de second oeuvre et de particuliers entreprenant des travaux de construction et d'isolation, et celui des produits visés par la marque contestée étant constitué de professionnels de l'aménagement intérieur ou de solutions d'isolation très spécifiques, ainsi que des particuliers amateurs de décoration d'intérieur, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les publics de référence ne se recoupaient pas au moins partiellement, le second oeuvre s'entendant des travaux de finition, lesquels rejoignent l'aménagement intérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, et de l'article 9 du règlement 207/2009 ; 3) ALORS QUE la similitude des produits en présence s'apprécie en considération de tous les facteurs pertinents qui caractérisent le rapport entre les produits, lesquels incluent, en particulier, leur nature, leur destination, leur utilisation, ainsi que leur caractère concurrent ou complémentaire ; que des produits ou services sont complémentaires s'il existe un lien étroit entre eux en ce que l'un est essentiel ou significatif pour l'usage de l'autre, de sorte que les consommateurs peuvent penser que la responsabilité de la fourniture des produits ou de l'offre des services incombe à la même entreprise ; qu'en se bornant à énoncer, pour refuser de reconnaître aux produits en présence un caractère de complémentarité, que le fait qu'ils aient vocation à être posés sur des murs était insuffisant, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le fait que le papier peint soit mis en oeuvre au-dessus des matériaux et produits isolants visés par la demande d'enregistrement de la marque « Isover » pour leur conférer un aspect fini ne démontrait pas leur complémentarité, la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, et de l'article 9 du règlement 207/2009 ; 4) ALORS QU' au surplus, la cour d'appel a omis de comparer, comme il le lui était pourtant demandé, les « matériaux de construction » des marques premières avec les « tentures murales non en matières textiles ; papier peint » de la marque seconde (conclusions d'appel de la société Saint-Gobain Isover, § 148 à 151) ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 5) ALORS QUE le caractère distinctif de la marque antérieure et sa connaissance sur le marché doivent être pris en considération dans l'appréciation globale du risque de confusion ; que ce n'est qu'en l'absence de toute similitude entre les signes ou entre les produits en présence que la notoriété de la marque antérieure est sans effet ; qu'en énonçant, pour nier tout effet à la notoriété de la marque antérieure « Isover », qu'elle ne pouvait constituer qu'un facteur aggravant du risque de confusion qu'elle ne pouvait suffire à créer, la cour d'appel a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, ensemble l'article 9 du règlement 207/2009 ; 6) ALORS QUE la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'ayant admis, au stade de la comparaison des signes en présence, l'existence de ressemblances visuelles, phonétiques et conceptuelles, fussent-elles de faible ampleur, la cour d'appel s'est fondée, au stade de l'appréciation globale du risque de confusion, sur l'absence de similitudes verbale, visuelle et conceptuelle entre les signes ; qu'en énonçant ces motifs contradictoires, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 7) ALORS QU' en affirmant, pour écarter le risque de confusion, que les marques « Isover » étaient faiblement distinctives, dès lors que l'élément « Iso » évoque les produits d'isolation, tout en constatant que le syntagme « Isover » est composé de deux éléments allusifs accolés en dehors de toute règle grammaticale ou usage linguistique, présente un caractère arbitraire et ne décrit nullement un produit isolant se présentant sous la forme de laine de verre, étant précisé que les marques « Isover » désignent tous types de produits isolants non limités à la laine de verre, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, dont s'évinçait le caractère hautement distinctif des marques « Isover », a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, ensemble l'article 9 du règlement 207/2009 ; 8) ALORS, en toute hypothèse, QU' en se fondant, pour exclure le risque de confusion entre les signes en présence, sur le caractère prétendument faiblement distinctif des marques « Isover », dont elle a par ailleurs constaté la renommée, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, ensemble l'article 9 du règlement 207/2009. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (contrefaçon des marques « Isover » par usage du terme et du logo « Isocover ») La société Saint-Gobain Isover reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n° 1196948 « Isover » par l'usage du terme et du logo « Isocover », 1) ALORS QU' en matière de contrefaçon de marque, la similitude des produits en cause peut résulter de leur caractère complémentaire ; qu'en se bornant à énoncer, pour exclure le risque de confusion entre les marques «Isover » et le terme et le logo « Isocover », que les signes se distinguent en ce que, pour les marques premières, ils visent des produits d'isolation habituels et destinés aux travaux de second oeuvre et, pour la dénomination « Isocover » incriminée, des produits très spécifiques d'isolation aux ondes et à l'usage très restreint et technique, sans s'interroger sur leur complémentarité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, et de l'article 9 du règlement 207/2009 ; 2) ALORS QUE, pour exclure le risque de confusion entre les marques « Isover » et le terme et le logo « Isocover », la cour d'appel s'est référée à l'analyse des ressemblances entre les marques « Isover » et « Isocover » ; que la censure à intervenir sur le premier moyen entraînera la cassation du chef de dispositif critiqué, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; 3) ALORS, enfin, QU' en se bornant à affirmer que, compte tenu de leurs différences et de l'absence de risque de confusion pour le public concerné, l'usage du terme « Isocover », seul ou avec son logo, n'était pas constitutif de contrefaçon, sans procéder à l'appréciation globale du risque de confusion en tenant compte, notamment, de la notoriété des marques antérieures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, et de l'article 9 du règlement 207/2009. TROISIEME MOYEN DE CASSATION (contrefaçon des marques « Isover » par usage du nom de domaine <isocover.fr>) La société Saint-Gobain Isover reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de son action en contrefaçon des marques française n° 99776398 et de l'Union européenne n°1196948 « Isover » par l'usage du nom de domaine <isocover.fr>, ALORS QUE la cour d'appel a exclu tout risque de confusion entre les marques « Isover » et le nom de domaine <isover.fr> « pour les mêmes raisons que développées précédemment » ; que la censure à intervenir sur les deux premiers moyens entraînera la cassation du chef de dispositif critiqué, en application de l'article 624 du code de procédure civile. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (atteinte à la marque renommée « Isover ») La société Saint-Gobain Isover reproche à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de son action fondée sur l'atteinte à sa marque renommée « Isover », 1) ALORS QUE la protection conférée aux marques jouissant d'une renommée n'est pas subordonnée à la constatation d'un risque d'assimilation ou de confusion ; qu'il suffit que le degré de similitude entre une telle marque et le signe ait pour effet que le public concerné établit un lien entre le signe et la marque ; qu'en énonçant, pour écarter l'existence d'un tel lien entre la marque renommée « Isover » et les signes critiqués, qu'elle avait d'ores et déjà exclu, sur les griefs de contrefaçon, tout risque de confusion ou d'association, la cour d'appel qui a confondu l'établissement d'un lien avec une marque renommée et le risque de confusion ou d'association propre à la contrefaçon, a violé l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, ensemble l'article 9 du règlement 2009/207 ; 2) ALORS QUE l'atteinte à la marque renommée est caractérisée lorsque l'usage du signe sans juste motif tire indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque communautaire ou leur porte préjudice ; qu'en énonçant, pour exclure toute atteinte à la marque renommée « Isover », que la société Saint-Gobain Isover ne rapportait pas la preuve du profit indûment tiré par MM. [U], [Y] et [J], lesquels n'exploitent pas eux-mêmes le signe « Isocover », bien que MM. [U], [Y] et [J] aient toujours soutenu qu'ils commercialisaient leur produit isolant sous la marque « Isocover » (conclusions d'appel de MM. [U], [Y] et [J], p. 3), la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ; 3) ALORS QU' en toute hypothèse, en énonçant, pour exclure toute atteinte à la marque renommée « Isover », que la société Saint-Gobain ne rapportait pas la preuve du profit indûment tiré par MM. [U], [Y] et [J], dès lors qu'ils n'exploitaient pas eux-mêmes le signe « Isocover », bien qu'ils fussent titulaires de la marque et que M. [J] fût titulaire du nom de domaine <isocover.fr>, exploité par la société Isocover, dirigée par M. [Y], en sorte qu'ils tiraient profit de leur exploitation, la cour d'appel a énoncé un motif inopérant, privant sa décision de base légale au regard de l'article L. 713-5 du code de la propriété intellectuelle, interprété à la lumière de l'article 5 de la directive 2008/95, et de l'article 9 du règlement 2009/207. CINQUIEME MOYEN DE CASSATION (concurrence déloyale) La société Saint-Gobain Isover reproche encore à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de son action fondée sur les actes de concurrence déloyale commis par MM. [U], [Y] et [J], 1) ALORS QUE le nom de domaine, la dénomination sociale, l'enseigne et le nom commercial sont protégés par l'action en concurrence déloyale ; qu'en énonçant, pour écarter le risque de confusion entre les signes en présence, que les produits commercialisés par la société Saint-Gobain Isover, d'une part, et MM. [U], [Y] et [J], d'autre part, étaient différents, sans rechercher, comme elle y était invitée, s'ils n'étaient pas, à tout le moins, complémentaires, ce qui était de nature à induire le consommateur en erreur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1240 du code civil ; 2) ALORS QU' en énonçant, pour écarter tout risque de confusion avec les noms de domaine <isover.fr> et <isover.com> et l'enseigne « Isover », que le terme « Saint-Gobain » était systématiquement accolé à celui d'« Isover », bien que, dans les noms de domaine <isover.fr> et <isover.com> et l'enseigne « Isover », le terme « Saint-Gobain » fût absent, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1240 du code civil ; 3) ALORS, enfin, QU'il s'infère nécessairement d'actes de concurrence déloyale un trouble commercial générant un préjudice, fût-il seulement moral ; qu'en énonçant, pour rejeter l'action en concurrence déloyale de la société Saint-Gobain Isover, qu'en toute hypothèse, cette dernière ne démontrait pas le préjudice qu'elle avait subi, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 1240 du code civil. SIXIEME MOYEN DE CASSATION (nullité de la marque « Isocover ») La société Saint-Gobain Isover reproche enfin à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande en nullité de la marque française semi-figurative n° 4262247 « Isocover », 1) ALORS QUE, pour exclure que la marque « Isocover » porte atteinte aux marques antérieures « Isover » ou à la marque renommée éponyme, la cour d'appel a énoncé que, « comme indiqué précédemment, eu égard à l'absence de similitudes visuelles, sonores et conceptuelles entre les signes et de risque de confusion en conséquence pour le public concerné, l'atteinte à la marque "Isover" par la marque seconde n'est pas constituée » ; que la censure à intervenir sur les premier et quatrième moyens de cassation entraînera la cassation de ce chef de dispositif, en application de l'article 624 du code de procédure civile ; 2) ALORS QUE la société Saint-Gobain Isover invoquait, au soutien de sa demande d'annulation de la marque « Isocover », l'atteinte à l'ensemble des « signes distinctifs lui appartenant » (conclusions n° 2 de la société Saint-Gobain Isover, p. 41, § 169), incluant ses noms de domaine <isover.fr> et <isover.com> ainsi que l'enseigne «Isover », et sollicitait l'annulation de la marque litigieuse notamment en tant qu'elle portait atteinte aux noms de domaine <isover.fr> et <isover.com> et à l'enseigne « Isover » (dispositif des mêmes conclusions, p. 43) ; qu'en se bornant, pour rejeter la demande en nullité de la marque « Isocover », à rechercher si la marque litigieuse portait atteinte aux marques, à la dénomination sociale et au nom commercial de la société Saint-Gobain Isover, sans répondre au chef de conclusions tiré de l'atteinte à ses noms de domaine et à son enseigne, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle sans renvoi M. VIGNEAU, président Arrêt n° 28 F-D Pourvoi n° P 21-21.762 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 Mme [M] [H], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 21-21.762 contre l'arrêt rendu le 14 juin 2021 par la cour d'appel d'Agen (chambre civile), dans le litige l'opposant à la société Canadour-Coqadour, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Regis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ohl et Vexliard, avocat de Mme [H], de la SCP Spinosi, avocat de la société Canadour-Coqadour, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Regis, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Agen, 14 juin 2021), en 2011, Mme [H], qui exerçait une activité d'exploitation agricole, a conclu un contrat avec la société [F], en exécution duquel elle était chargée de gaver des canards que celle-ci lui fournissait. 2. La société [F] a mis fin au contrat en mars 2016 en cessant ses livraisons. 3. Le 6 juillet 2018, Mme [H] a assigné la société [F], notamment, en réparation de son préjudice pour rupture brutale de la relation commerciale établie. 4. La société Canadour-Coqadour, venant aux droits de la société [F], est intervenue volontairement à l'instance. Examen des moyens Sur le moyen relevé d'office 5. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu l'article L. 442-6 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, l'article D. 442-4 du même code, alors applicable, et l'article R. 311-3 du code de l'organisation judiciaire : 6. Il résulte de ces textes que seules les juridictions du premier degré spécialement désignées par le deuxième texte sont investies du pouvoir de statuer sur les litiges relatifs à l'application du premier, que les recours formés contre les décisions rendues par ces juridictions spécialisées sont portés devant la cour d'appel de Paris et que ceux formés contre les décisions rendues par des juridictions non spécialement désignées, quand bien même elles auraient statué sur de tels litiges, sont portés devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle elles sont situées. Il incombe alors à la cour d'appel de relever d'office, le cas échéant, la fin de non-recevoir tirée du défaut de pouvoir juridictionnel du premier juge pour statuer sur un litige relatif à l'application de l'article L. 442-6 du code de commerce, puis de statuer dans les limites de son propre pouvoir juridictionnel. 7. L'arrêt rejette la demande de Mme [H] d'indemnisation de son préjudice fondée sur l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019. 8. En statuant ainsi, sans relever d'office l'irrecevabilité des demandes fondées sur l'article L. 442-6 du code de commerce formées devant le tribunal de grande instance d'Auch, juridiction non spécialisée, la cour d'appel, qui était elle-même dépourvue de tout pouvoir juridictionnel pour statuer sur un litige portant sur l'application de ce texte, a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 1, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 10. La cassation prononcée n'implique pas, en effet, qu'il soit à nouveau statué sur le fond. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il statue sur la demande formée par Mme [H] sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce, l'arrêt rendu le 14 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Déclare irrecevables les demandes de Mme [H] fondées sur l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ; Condamne Mme [H] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant les juges du fond ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Ohl et Vexliard, avocat aux Conseils, pour Mme [H]. Mme [H] fait grief à l'arrêt attaqué, de l'avoir, par confirmation du jugement dont appel, déboutée de sa demande au titre de la rupture abusive des relations commerciales ; 1°/ Alors, d'une part, qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait par tout commerçant de rompre brutalement une relation commerciale établie sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant une durée minimale conforme aux usages ; que ce préavis ne peut courir qu'à compter de la notification qui en est faite par écrit ; que pour débouter Mme [H] de sa demande, la cour d'appel retient que la rupture des relations commerciales étant intervenue en mars 2016, trois mois après le début de l'arrêt-maladie et plusieurs mois avant la fin de son arrêt-maladie la rupture des relations commerciales ne peut être qualifiée de brutale et fautive, ni ouvrir droit à une indemnisation ; qu'en statuant ainsi sans constater qu'un préavis de rupture comportant une indication de durée avait été notifié à Mme [H], la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.442-6, I, 5° du code de commerce dans sa rédaction applicable, antérieure à celle issue de l'ordonnance n°209-359 du 24 avril 2019 ; 2°/ Alors, d'autre part, qu'une rupture unilatérale immédiate de la relation commerciale ne peut intervenir qu'en cas de force majeure ou d'inexécution suffisamment grave par l'autre partie de ses obligations ; que pour débouter Mme [H] de sa demande, la cour d'appel retient que compte tenu de son arrêt de maladie, Mme [H] était dans l'impossibilité de procéder elle-même à la prestation de service qui lui incombait et que de surcroît elle était passée outre au refus de [F] de les faire exécuter par un voisin, peu important à cet égard que ce gavage ait été effectué dans ses locaux et que celui-ci se soit vu confier directement et personnellement le gavage chez lui d'autres bandes par [F] ; qu'en se déterminant ainsi, sans préciser si le manquement qu'elle retenait était suffisamment grave pour justifier la rupture sans préavis des relations commerciales établies, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L.442-6, I, 5° du code de commerce dans sa rédaction applicable, antérieure à celle issue de l'ordonnance n°209-359 du 24 avril 2019 ; 3°/ Alors encore, à supposer adoptés les motifs des premiers juges, qu'en retenant, pour débouter Mme [H] de sa demande, que celle-ci ne proposait aucune durée de préavis, sans répondre au moyen de ses écritures d'appel par lequel elle faisait valoir que compte tenu de la durée des relations professionnelles entre les parties, la rupture aurait dû être précédée d'un préavis minimum de huit mois (conclusions d'appel de Mme [H], p. 20), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 563 du même code ; 4°/ Et alors enfin, et toujours à supposer adoptés les motifs des premiers juges, qu'en retenant, pour débouter Mme [H] de sa demande, que celle-ci ne produisait aucune attestation de son comptable pour permettre d'apprécier sa perte de revenu, sans prendre en considération l'attestation comptable (pièce n° 110), pièce nouvelle produite devant elle, la cour d'appel a de nouveau violé l'article 455 du code de procédure civile, ensemble l'article 563 du même code.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 27 F-D Pourvoi n° Z 21-18.299 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 La société Gervais transports, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° Z 21-18.299 contre l'arrêt rendu le 15 avril 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 5), dans le litige l'opposant à la société Hasbro European Trading Bv, dont le siège est [Adresse 1]), société de droit néerlandais, défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Regis, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ghestin, avocat de la société Gervais transports, de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société Hasbro European Trading Bv, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Regis, conseiller référendaire rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 avril 2021), la société Gervais transports s'est vue confier, à partir de 1996, par la société Hasbro France puis, à compter de 2013, par la société Hasbro European Trading (la société Hasbro), des missions de transports routiers sur le territoire français. 2. Cette relation a pris la forme d'une succession de contrats à durée déterminée d'un an, lesquels, à partir de 2010, ont été renouvelés chaque année, après une procédure d'appel d'offres. 3. Par un courriel du 22 août 2016, à l'issue d'une procédure d'appel d'offres, la société Hasbro a informé la société Gervais transports de l'arrêt de leur collaboration. 4. Soutenant que la société Hasbro avait rompu brutalement une relation commerciale établie, la société Gervais transports l'a assignée en réparation des préjudices subis. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. La société Gervais transports fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande d'indemnisation des préjudices découlant de la rupture brutale de la relation commerciale établie avec la société Hasbro, alors : « 1°/ qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que depuis le 1er juillet 1996, les sociétés Hasbro France puis Hasbro ont confié des prestations de transport à la société Gervais transports dans le cadre de contrats à durée déterminée du 1er juillet au 30 juin, constamment renouvelées y compris après les appels d'offres intervenus depuis 2011, qu'en l'état d'une "incorrection" de la procédure d'appel d'offre lancée en mars 2016 les prestations commerciales de messagerie ont été poursuivies à compter du 1er juillet 2016 jusqu'en septembre 2016 et que la rupture est intervenue par un courriel d'Hasbro du 22 août 2016 motivé par l'absence de compétitivité tarifaire de Gervais transports ; qu'il résulte encore des constatations de l'arrêt que la collaboration intervenue entre 1996 et 2016 avait généré pour Gervais transports un chiffre d'affaires annuel moyen de 798 436 euros ; qu'en cet état, en l'absence d'écrit faisant ainsi courir les délais de préavis, la cour d'appel devait imputer à Hasbro la rupture brutale des relations régulières, stables et significatives qu'elle avait établies avec Gervais transports ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du code commerce ; 2°/ qu'en l'état des relations contractuelles régulières, stables et significatives constatées entre juillet 1996 et septembre 2016, auxquelles il avait été mis fin par un courriel d'Hasbro du 22 août 2016 motivé par l'absence de compétitivité tarifaire de Gervais transports, la précarisation recherchée par les procédures d'appel d'offres annuelles entre 2010 et 2015 était inopérante ; qu'en jugeant tout au contraire que la circonstance que la relation se soit poursuivie entre les parties pour les prestations de messagerie de juillet à septembre 2016 était sans incidence sur la précarité de la relation commerciale, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du code commerce ; 3°/ que la brutalité de la rupture résulte de l'absence de préavis écrit ou de l'insuffisance de la durée de préavis au regard des relations commerciales antérieures ; qu'après avoir constaté des relations contractuelles régulières, stables et significatives entre juillet 1996 et septembre 2016, auxquelles un courriel d'Hasbro du 22 août 2016 motivé par l'absence de compétitivité tarifaire de Gervais transports, la cour d'appel devait s'interroger sur l'absence d'appel d'offres écrit constituant un préavis à la rupture des relations commerciales, qui aurait dû accompagner "l'appel d'offres complémentaire" allégué d'Hasbro pour justifier la précarité dont elle se prévalait ; qu'en s'abstenant de s'interroger sur l'absence d'écrit constitutif d'un préavis avant de rejeter la demande en indemnisation des préjudices découlant de la brutalité de la rupture, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du code commerce ; 4°/ que s'il permet de précariser la relation commerciale en présence d'un écrit constituant un préavis à la rupture des relations commerciales, l'appel d'offres n'écarte pas automatiquement le caractère établi d'une relation commerciale ; qu'en considérant, en l'absence d'écrits manifestant l'intention de ne pas poursuivre les relations commerciales dans les conditions antérieures et faisant ainsi courir les délais légaux de préavis, que le recours régulier à des appels d'offres était à lui seul de nature à conférer à la relation commerciale, quelle que soit sa durée, une précarité exclusive de toute rupture brutale, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du code commerce. » Réponse de la Cour 6. Après avoir énoncé que la relation commerciale établie doit présenter un caractère suffisamment prolongé, significatif et stable entre les parties, permettant à la victime de la rupture d'anticiper légitimement et raisonnablement pour l'avenir la persistance d'un flux d'affaires avec son partenaire commercial, et relevé que si, dans un premier temps, les relations entre les parties avaient été fixées par des contrats à durée déterminée d'un an, courant du [1er juillet] au 30 juin de l'année suivante, à compter de 2010, la société Hasbro a mis en oeuvre une procédure d'appels d'offres annuelle, à laquelle la société Gervais transports a systématiquement participé, l'arrêt retient que cette procédure a modifié la nature de la relation entre les parties en la rendant précaire et qu'elle a ainsi introduit, chaque année, dans cette relation, un aléa qui ne permettait pas à la société Gervais transports d'avoir une croyance légitime dans sa pérennité. 7. L'arrêt retient, ensuite, que la circonstance que la relation se soit poursuivie ponctuellement entre les parties, pour les seules prestations de messagerie, de juillet 2016 à septembre 2016, cependant que la société Gervais transports n'avait pas été retenue à la suite de l'appel d'offres de mars 2016, pour les prestations de transport, est également sans incidence sur la précarité de cette relation. 8. En l'état de ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer la recherche invoquée à la troisième branche, que ces constatations rendaient inopérante, a pu retenir que c'est sans engager sa responsabilité que la société Hasbro avait mis fin à la relation d'affaires en août 2016. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Gervais transports aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Gervais transports et la condamne à payer à la société Hasbro European Trading la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Ghestin, avocat aux Conseils, pour la société Gervais transports. La sté Gervais Transports fait grief à la cour d'appel de Paris de l'avoir déboutée de sa demande d'indemnisation des préjudices découlant de la brutalité de la rupture de ses relations commerciales établies avec la société Hasbro European Trading Bv ; 1/ Alors qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé, le fait de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que depuis le 1er juillet 1996, les sociétés Hasbro France puis Hasbro European Trading Bv ont confié des prestations de transport à la société Gervais Transports dans le cadre de contrats à durée déterminée du 1er juillet au 30 juin, constamment renouvelées y compris après les appels d'offres intervenus depuis 2011, qu'en l'état d'une « incorrection » de la procédure d'appel d'offre lancée en mars 2016 les prestations commerciales de messagerie ont été poursuivies à compter du 1er juillet 2016 jusqu' en septembre 2016 et que la rupture est intervenue par un courriel d'Hasbro European Trading Bv du 22 août 2016 motivé par l'absence de compétitivité tarifaire de Gervais Transports ; qu'il résulte encore des constatations de l'arrêt que la collaboration intervenue entre 1996 et 2016 avait généré pour Gervais Transports un chiffre d'affaires annuel moyen de 798.436 € ; qu'en cet état, en l'absence d'écrit faisant ainsi courir les délais de préavis, la cour d'appel devait imputer à Hasbro European Trading Bv la rupture brutale des relations régulières, stables et significatives qu'elle avait été établies avec Gervais Transports ; qu'en jugeant du contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6 1 5° du code commerce; 2/ Alors qu' en l'état des relations contractuelles régulières, stables et significatives constatées entre juillet 1996 et septembre 2016, auxquelles il avait été mis fin par un courriel d'Hasbro European Trading Bv du 22 août 2016 motivé par l'absence de compétitivité tarifaire de Gervais Transports, la précarisation recherchée par les procédures d'appel d'offres annuelles entre 2010 et 2015 était inopérante; qu'en jugeant tout au contraire que la circonstance que la relation se soit poursuivie entre les parties pour les prestations de messagerie de juillet à septembre 2016 était sans incidence sur la précarité de la relation commerciale, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6 1 5° du code commerce ; 3/ Alors que la brutalité de la rupture résulte de l'absence de préavis écrit ou de l'insuffisance de la durée de préavis au regard des relations commerciales antérieures ; qu'après avoir constaté des relations contractuelles régulières, stables et significatives entre juillet 1996 et septembre 2016, auxquelles un courriel d'Hasbro European Trading Bv du 22 août 2016 motivé par l'absence de compétitivité tarifaire de Gervais Transports, la cour d'appel devait s'interroger sur l'absence d'appel d'offres écrit constituant un préavis à la rupture des relations commerciales, qui aurait dû accompagner « l' appel d'offres complémentaire » allégué d'Hasbro European Trading Bv pour justifier la précarité dont elle se prévalait; qu'en s'abstenant de s'interroger sur l'absence d'écrit constitutif d'un préavis avant de rejeter la demande en indemnisation des préjudices découlant de la brutalité de la rupture, la cour d'appel n'a pas justifié légalement sa décision au regard de l'article L. 442-6 1 5° du code commerce ; 4/ Et alors que s'il permet de précariser la relation commerciale en présence d'un écrit constituant un préavis à la rupture des relations commerciales, l'appel d'offres n'écarte pas automatiquement le caractère établi d'une relation commerciale ; qu'en considérant, en l'absence d'écrits manifestant l'intention de ne pas poursuivre les relations commerciales dans les conditions antérieures et faisant ainsi courir les délais légaux de préavis, que le recours régulier à des appels d'offres était à lui seul de nature à conférer à la relation commerciale, quelle que soit sa durée, une précarité exclusive de toute rupture brutale, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6 1 5° du code commerce.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle et non-lieu à statuer M. VIGNEAU, président Arrêt n° 20 F-D Pourvois n° C 19-11.670 D 19-14.822 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 11 JANVIER 2023 I - 1°/ La société Pronal, société par actions simplifiée à associé unique, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ la société Strucflex, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3] (Tunisie), ont formé le pourvoi n° C 19-11.670 contre un arrêt n° RG 17/08138 rendu le 4 décembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 1), dans le litige les opposant à la société Simtech, société privée à responsabilité limitée de droit belge, dont le siège est [Adresse 1] (Belgique), en la personne de M. [J], défenderesse à la cassation. II - La société Simtech, société privée à responsabilité limitée de droit belge, a formé le pourvoi n° D 19-14.822 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Pronal, société par actions simplifiée à associé unique, 2°/ à la société Strucflex, société à responsabilité limitée, défenderesses à la cassation. Les demanderesses au pourvoi n° C 19-11.670 invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Michel-Amsellem, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat des sociétés Pronal et Strucflex, de la SCP Thomas-Raquin, Le Guerer, Bouniol-Brochier, avocat de la société Simtech, et l'avis de M. Debacq, avocat général, après débats en l'audience publique du 15 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Michel-Amsellem, conseiller rapporteur, Mme Darbois, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Jonction 1.En raison de leur connexité, les pourvois n° C 19-11.670 et D 19-14.822 sont joints. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 4 décembre 2018), la société de droit belge Simtech exerce une activité de conception, fabrication et commercialisation de produits à base de tissus enduits de caoutchouc et plastomère ou plastique pour l'industrie et la défense. 3. Soutenant détenir deux brevets relatifs à certains de ces produits, après autorisation judiciaire, elle a fait procéder à des saisies-contrefaçon dans les locaux de la société Pronal et de son distributeur, la société System Res. Puis, elle a poursuivi ces deux sociétés, ainsi que la société de droit tunisien Strucflex, filiale de la société Pronal, en contrefaçon de revendications de ses brevets ainsi qu'en concurrence déloyale et parasitaire. 4. Elle s'est, par la suite, désistée de son action contre la société System Res qui est devenue son distributeur. 5. Reconventionnellement, les sociétés Pronal et Strucflex ont soutenu que la société Simtech était dépourvue de droits sur les brevets qu'elle revendiquait et demandé la réparation de différents préjudices. Examen des moyens Sur le pourvoi n° C 19-11.670, en tant qu'il est formé par la société Strucflex Vu l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile : 6. Les sociétés Pronal et Strucflex, ainsi que la société Simtech, se sont pourvues en cassation contre l'arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 4 décembre 2018 qui, à la suite d'un premier arrêt rendu par elle, le 27 février 2018, rejetant leur incident de caducité de la déclaration d'appel tant à l'égard de la société Pronal que contre la société Strucflex, a statué au fond. 7. L'arrêt du 27 février 2018 a été cassé, mais seulement en ce qu'il a rejeté l'incident de caducité de la déclaration d'appel en tant que dirigée contre la société Strucflex, par un arrêt de la Cour de cassation (2e Civ., 9 juin 2022, pourvoi n° 19-11.671) qui, statuant à nouveau, a prononcé la caducité de la déclaration d'appel du 25 février 2015 en tant que dirigée contre la société Strucflex. 8. La cassation partielle de l'arrêt du 27 février 2018 entraîne, par voie de conséquence, et sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation de l'arrêt du 4 décembre 2018 qui en est la suite en ce qu'il concerne la société Strucflex. 9. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur le pourvoi n° C 19-11.670, en tant qu'il est formé par la société Strucflex contre l'arrêt du 4 décembre 2018. Sur le moyen unique, pris en sa quatrième branche, du pourvoi n° C 19-11.670, en tant qu'il est formé par la société Pronal Enoncé du moyen 10. La société Pronal fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages et intérêts formée contre la société Simtech, alors « que toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité de son auteur ; qu'en jugeant que le droit d'agir en justice ne dégénère en abus de droit que lorsque l'action en justice est intentée dans l'intention de nuire, de sorte qu'elle a rejeté l'existence d'un abus du droit d'agir en justice, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, devenu l'article 1240 du même code. » Réponse de la Cour Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil : 11. Selon ce texte, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. 12. Pour rejeter la demande de dommages et intérêts formée par la société Pronal pour abus du droit d'agir, l'arrêt, après avoir relevé que la société Simtech avait engagé une action en contrefaçon sur la base de brevets sur lesquels elle ne disposait pas de droits opposables à des tiers, retient que l'intention de nuire de cette société n'est pas établie. 13. En statuant ainsi, alors que toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité de son auteur, sans qu'il soit nécessaire que soit caractérisée une intention de nuire, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Portée et conséquences de la cassation 14. La cassation prononcée du chef de dispositif rejetant un chef de demande formé au titre de l'abus du droit d'agir en justice de la société Simtech dispense d'examiner les autres griefs du pourvoi n° C 19-11.670, ainsi que le pourvoi n° D 19-14.822, qui attaque un chef de dispositif s'y rattachant par un lien de dépendance nécessaire. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs et sur le moyen du pourvoi n° D 19-14.822, la Cour : Dit n'y avoir lieu à statuer sur le pourvoi n° C 19-11.670, en tant qu'il est formé par la société Strucflex ; Constate l'annulation de l'arrêt rendu le 4 décembre 2018, en ses dispositions relatives aux rapports entre les sociétés Simtech et Strucflex, par la cour d'appel de Paris ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive formée par la société Pronal contre la société Simtech, en ce qu'il condamne la société Simtech à payer à la société Pronal la somme de 100 000 euros et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile dans les rapports entre elles, l'arrêt rendu le 4 décembre 2018, entre les sociétés Simtech et Pronal, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les sociétés Simtech et Pronal dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la société Simtech aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Paris dans ses rapports avec la société Strucflex ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Simtech à payer à la société Pronal la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit au pourvoi n° C 19-11.670 par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour les sociétés Pronal et Strucflex. Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement déféré en ce qu'il a condamné la société SIMTECH à payer à titre de dommages et intérêts à la société PRONAL la somme de 850.000 euros, à la société STRUCFLEX la somme de 350.000 euros ; Aux motifs que « Considérant que les sociétés intimées soutiennent que les agissements procéduraux de la société SIMTECH sont constitutifs d'actes de concurrence déloyale dans la mesure où ils ont eu pour effet de les déstabiliser en les privant de leur distributeur SYSTEM RES, en permettant à l'appelante d'obtenir par la saisie-contrefaçon opérée toutes les informations commerciales et de savoir-faire de la société PRONAL, en permettant même le dépôt d'un brevet conjoint SIMTECH et SYSTEM RES quelques semaines après la rupture par cette dernière société du contrat de distribution exclusive la liant à la société PRONAL ; que les intimées avancent notamment que la société SIMTECH est complice de la rupture des relations commerciales entre les sociétés PRONAL et SYSTEM RES et qu'en contrepartie de cette rupture contractuelle, elle s'est désistée de ses demandes à l'encontre de la société SYSTEM RES, laquelle est devenue son distributeur et que la rupture du contrat de distribution exclusive, sans reprise du stock par SYSTEM RES, n'a été possible qu'à raison de l'aide apportée par SIMTECH à cette dernière ; qu'elles soulignent qu'il n'a pas été déféré à leur sommation de communiquer la transaction intervenue entre les sociétés SIMTECH et SYSTEM RES ; Que la société SIMTECH, répond que la cessation du contrat de distribution entre les sociétés PRONAL et SYSTEM RES ne saurait engager sa responsabilité dès lors qu'elle n'a exercé aucune pression sur la société SYSTEM RES qui pouvait librement rompre le contrat de distribution ; qu'elle observe que plusieurs mois avant d'être assignée en contrefaçon et les opérations de saisie-contrefaçon la concernant, la société SYSTEM RES a régulièrement notifié sa volonté de rompre le contrat à la société PRONAL, ayant des raisons légitimes de vouloir se départir de sa relation contractuelle avec PRONAL et STRUCFLEX du fait de la violation d'une clause d'exclusivité prévue au bénéfice de SYSTEM RES pour les palettiseurs, de défaut de qualité des poches à vide fournies par les intimées et du risque de contrefaçon dont elle avait été informée par ses soins ; que la société SIMTECH ajoute que les préjudices invoqués par les sociétés intimées sont inexistants dès lors notamment que les sociétés PRONAL et STRUCFLEX ont très rapidement retrouvé un distributeur, la société GROUPE RONDOT, ce qui a été constaté par procès-verbal en date du 2 juillet 2014, que la société PRONAL ne vendait aucun produit à SYSTEM RES et n'a donc personnellement subi aucun préjudice, qu'il n'y a pas eu de détournement d'un savoir-faire prétendu de la société PRONAL sur le MB15 puisque les saisies n'ont pas permis d'accéder à un quelconque savoir-faire sur ce matériau que la société PRONAL avait d'ailleurs antérieurement divulgué ; Considérant que la rupture des relations contractuelles entre la société PRONAL et la société SYSTEM RES résulte d'un courrier en date du 22 mars 2013 adressé par cette dernière à son fournisseur dans lequel elle évoque notamment le fait que la société SIMTECH revendique des droits, au titre de brevets déposés, sur des "poches automobiles pour four type ASAHI" fournies par la société PRONAL ; que comme le plaide la société SIMTECH, ce courrier de rupture est antérieur de près de deux mois à la saisie-contrefaçon opérée dans les locaux de la société SYSTEM RES (15 mai 2013) et de près de trois mois à l'assignation en contrefaçon qui lui a été délivrée ; qu'aucun acte de pression fautif de la société SIMTECH n'est démontré vis-à-vis de la société SYSTEM RES, cette démonstration ne pouvant résulter de l'information portée à la connaissance du distributeur d'un risque de contrefaçon - quand bien même cette contrefaçon n'a pas été reconnue dans le cadre de la présente procédure - ou du désistement de la société SIMTECH à l'égard de la société SYSTEM RES et de l'instauration de relations contractuelles entre les deux sociétés intervenue ultérieurement ; Que les demandes indemnitaires de la société PRONAL au titre d'un préjudice économique résultant, d'une part, du détournement de clientèle et de la perte de son réseau de distribution et, d'autre part, de la perte de marge sur les ventes des palettiseurs et des poches à vide, seront par conséquent rejetées ; Considérant cependant que l'engagement par la société SIMTECH d'une procédure en contrefaçon sur la base de brevets sur lesquels elle ne disposait pas de droits opposables à des tiers, en raison de l'absence d'inscription de la cession de ces brevets au registre tenu par l'INPI, et l'obtention, dans ces conditions, à l'encontre de la société PRONAL, d'une autorisation de procéder à une saisie-contrefaçon, qui constitue une mesure d'une exceptionnelle gravité puisque ouvrant l'accès, de façon non contradictoire, à des locaux, des produits et des documents d'une société, le cas échéant, comme en l'espèce, directement concurrente, révèlent, si ce n'est une intention de nuire caractérisant l'abus d'agir en justice, pour le moins, une imprudence ou une légèreté blâmables, alors qu'en la matière, la prudence et la rigueur doivent être de mise ; Qu'en l'occurrence, la saisie-contrefaçon réalisée dans les locaux de la société PRONAL a permis à la société SIMTECH d'accéder à des informations confidentielles, s'agissant notamment du matériau MB15 substituable au téflon dans la fabrication des poches à vide ; que la société SIMTECH conteste vainement le caractère innovant de ce matériau, qui a fait l'objet en 2010 d'une convention de financement de recherches entre la société PRONAL et OSEO, organisme privé bénéficiant l'une délégation de service public finançant les PME, notamment pour l'innovation ; que le caractère innovant de ce produit est du reste attesté par Mme [X], responsable matériau chez PRONAL (pièce 122) ; que la société SIMTECH ne démontre pas que le matériau MB15 ait été divulgué par PRONAL avant la présente procédure qu'elle a initiée ; que si la société SIMTECH a obtenu indûment des informations qui lui ont procuré un avantage dans le jeu de la concurrence s'exerçant à l'égard de la société PRONAL, la cour n'est toutefois pas mise à même d'apprécier le préjudice économique réellement souffert par la société PRONAL du fait de l'accès par la société SIMTECH au produit MB15 ; que dans un rapport aux fins de détermination des préjudices subis par le groupe PRONAL, Mme [K], expert-comptable et commissaire aux comptes, affirme que "Pronal, de par ses évolutions technologiques (FEP et MB15) et aussi grâce à un outil de fabrication compétitif chez STRUCFLEX, pouvait prétendre à conquérir, dès 2014, la moitié du marché des poches", mais qu'il n'est cependant pas établi que, comme l'affirme la société PRONAL, c'est grâce aux informations obtenues lors de la saisie-contrefaçon que les sociétés SIMTECH et SYSTEM RES ont pu conjointement déposer un brevet, en octobre 2014, concernant un "procédé pour la fermeture étanche d'un contenant destiné à être dépressurisé" ; Qu'il est néanmoins nécessairement résulté pour la société PRONAL qui a subi la saisie-contrefaçon effectuée le 16 mai 2013 un préjudice moral, d'autant que comme il vient d'être dit sa concurrente a eu accès à des informations confidentielles concernant le nouveau matériau MB15 ; que ce préjudice moral sera réparé par l'allocation de la somme de 100 000 Ä à titre de dommages et intérêts ; Que la société STRUCFLEX qui n'a pas subi de saisie-contrefaçon dans ses locaux sera déboutée de sa demande de ce chef ; Considérant que l'intention de nuire de la société SIMTECH n'étant pas établie, la demande au titre de la procédure abusive sera rejetée ; Considérant que le jugement sera réformé en ce sens sans qu'il soit besoin d'ordonner les mesures d'expertise et de sursis à statuer sollicitées à titre subsidiaire » ; 1°) Alors que, d'une part, le détournement de clientèle réalisé par des moyens critiquables, car contraire aux usages du commerce, constitue un acte de concurrence déloyale ; qu'en jugeant la société SIMTECH non fautive au titre la rupture des relations commerciales décidée par la société SYSTEM RES à l'encontre de la société PRONAL, lorsqu'elle constatait que, d'une part, la société SIMTECH avait informé la société SYSTEM RES d'un risque de contrefaçon commis par la société PRONAL et que, d'autre part, l'engagement de la procédure en contrefaçon par la société SIMTECH à l'encontre de la société PRONAL avait été le fruit, si ce n'est d'une intention de nuire, à tout le moins d'une imprudence ou d'une légèreté blâmable, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ; 2°) Alors que, d'autre part, le juge ne peut dénaturer les éléments de la cause ; qu'en l'espèce, selon les termes clairs et précis du courrier du 22 mars 2013, circonscrite à la commercialisation des « palettiseurs et dépalettiseurs et poches de verre », la résiliation décidée par la société SYSTEM RES ne visait nullement la commercialisation des « poches automobiles » ; qu'en jugeant cependant que « la rupture des relations contractuelles entre la société PRONAL et la société SYSTEM RES résulte d'un courrier en date du 22 mars 2013 », de sorte qu'elle donnait à cette résiliation une portée générale et écartait la responsabilité de la société SIMTECH au titre de la décision de la société SYSTEM RES de cesser toute relation commerciale avec la société PRONAL, la cour d'appel a dénaturé ce document et a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1192 du code civil ; 3°) Alors que, de troisième part, et en tout état de cause, en jugeant qu'aucun acte de pression fautif de la société SIMTECH n'est démontré vis-à-vis de la société SYSTEM RES au motif que la rupture des relations contractuelles entre les société PRONAL et SYSTEM RES serait antérieure à la saisie-contrefaçon litigieuse, sans rechercher, comme il lui était demandé (conclusions d'appel, p. 77), si cette saisie-contrefaçon avait eu pour effet de convaincre la société SYSTEM RES d'abréger le préavis contractuel d'une année à seulement trois mois, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ; 4°) Alors que, de quatrième part, toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité de son auteur ; qu'en jugeant que le droit d'agir en justice ne dégénère en abus de droit que lorsque l'action en justice est intentée dans l'intention de nuire, de sorte qu'elle a rejeté l'existence d'un abus du droit d'agir en justice, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ; 5°) Alors que, de cinquième part, toute faute dans l'exercice des voies de droit est susceptible d'engager la responsabilité de son auteur ; qu'en rejetant l'existence d'un abus du droit d'agir en justice, lorsqu'elle relevait l'imprudence et la légèreté blâmable de la société SIMTECH, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ; 6°) Alors que, de sixième part, le juge ne peut, sans commettre un déni de justice, refuser d'évaluer le montant du dommage dont il constate l'existence en son principe ; qu'en se déterminant par la circonstance que la cour n'est pas « mise à même d'apprécier le préjudice économique réellement souffert par la société PRONAL », lorsqu'elle constatait que « la société SIMTECH a obtenu indûment des informations qui lui ont procuré un avantage dans le jeu de la concurrence s'exerçant à l'égard de la société PRONAL », la cour d'appel, qui a refusé d'évaluer un dommage dont elle a pourtant constaté l'existence en son principe, a violé l'article 4 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation M. VIGNEAU, président Arrêt n° 14 F-D Pourvoi n° W 21-13.719 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 1°/ Le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, domicilié [Adresse 2], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 3], 2°/ le directeur régional des finances publiques des Pays de la Loire, domicilié [Adresse 4], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, ont formé le pourvoi n° W 21-13.719 contre l'arrêt rendu le 19 janvier 2021 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre), dans le litige les opposant : 1°/ à M. [N] [E], 2°/ à Mme [L] [E], tous deux domiciliés [Adresse 1], défendeurs à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Maigret, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques et du directeur régional des finances publiques des Pays de la Loire, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, de la SAS Hannotin, avocat de M. et Mme [E], après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Maigret, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Rennes, 19 janvier 2021), M. et Mme [E], assujettis à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), ont acquis des actions de la société Finaréa du Maine afin de bénéficier d'une réduction d'impôt sur le fondement de l'article 885-0, V bis du code général des impôts. 2. Remettant en cause cette réduction au motif que la société Finaréa du Maine ne pouvait pas être regardée comme une société holding animatrice de groupe, l'administration fiscale a adressé à M. et Mme [E] une proposition de rectification, puis a mis en recouvrement une imposition supplémentaire de 7 662 euros au titre de l'année 2009 et de 7 996 euros au titre de l'année 2010. 3. Après rejet de leur réclamation contentieuse, M. et Mme [E] ont assigné le directeur régional des finances publiques des Pays de la Loire en décharge des rappels d'ISF. Examen du moyen Enoncé du moyen 4. L'administration fiscale fait grief à l'arrêt de dire que les réponses ministérielles aux questions de MM. [P] et [K], parlementaires, publiées les 3 mai 2005 et 11 avril 2006, lui sont opposables, de prononcer la nullité de la procédure fiscale diligentée contre M. et Mme [E] et la décharge des compléments de droits et intérêts de retard mis à leur charge, alors : « 1°/ que, conformément aux dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, lorsqu'un redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; qu'il résulte de cette disposition et d'une jurisprudence constante que la garantie prévue au second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales bénéficie aux contribuables, sous la réserve notamment que le texte opposé exprime une doctrine postérieure aux impositions litigieuses ; qu'au cas particulier, en décidant, par motifs propres à propos des réponses du ministre aux parlementaires [P] et [K] qu' "ainsi, même si la loi TEPA qui a permis la réduction d'impôt de l'ISF est intervenue le 21 août 2007, postérieurement aux réponses du ministre, ces réponses apportent des précisions de portée générale sur le sens du texte fiscal en matière de délivrance d'attestations, texte qui n'est pas limité à l'impôt sur le revenu" alors que la doctrine invoquée est manifestement antérieure au texte litigieux, la cour n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses constatations et ainsi violé les dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; 2°/ que, conformément aux dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, lorsqu'un redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; qu'il résulte de ces dispositions et d'une jurisprudence constante que l'opposabilité d'une réponse ministérielle ne peut être invoquée que dans l'hypothèse où elle s'applique à la situation en cause ; que le litige concerne la remise en cause de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune dont les contribuables ont bénéficié au titre de l'année 2010 sur le fondement de l'article 885-0 V bis du code général des impôts ; qu'au cas particulier, seule une doctrine administrative se rapportant strictement à l'objet du litige pourrait être invoquée sur le fondement du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; qu'en décidant, par motifs propres et après avoir constaté que "les questions portaient sur la possibilité pour l'administration de contester la validité des reçus fiscaux délivrés au contribuable par les organismes auxquels il a fait des dons", que les réponses ministérielles aux parlementaires [P] et [K], publiées les 3 mai 2005 et 11 avril 2006, étaient opposables à l'administration dans un litige concernant l'ISF, la cour a n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses constatations et ainsi violé les dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 80 A, alinéa 2, du livre des procédures fiscales : 5. Il résulte de ce texte que lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, celle-ci ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. La doctrine formellement admise par l'administration ne peut cependant être invoquée que selon ses termes et sa teneur en vigueur à l'époque des impositions litigieuses. 6. Pour prononcer la nullité de la procédure fiscale diligentée contre M. et Mme [E] et les décharger des rehaussements d'ISF, après avoir relevé que les réponses ministérielles aux questions parlementaires de MM. [P] et [K], publiées les 3 mai 2005 et 11 avril 2006, faisaient référence à l'article 1768 quater du code général des impôts, l'arrêt retient, d'une part, que ce texte, général, n'était pas limité à l'impôt sur le revenu, à propos duquel les questions avaient été posées, et que si ces dispositions ont été abrogées à compter du 1er janvier 2006, elles ont été reprises dans les mêmes termes à l'article 1740 A du code général des impôts, d'autre part, que même si la loi n° 2007-1223 du 21 août 2007, qui a créé une réduction d'ISF, a été promulguée postérieurement aux réponses ministérielles, celles-ci apportaient des précisions de portée générale sur le sens du texte fiscal en matière de délivrance d'attestations, lequel n'est pas limité à l'impôt sur le revenu mais a vocation à s'appliquer également à la réduction d'ISF. 7. En statuant ainsi, alors que la doctrine formellement admise par l'administration ne peut être invoquée par un contribuable pour l'application d'un texte fiscal qui n'existait pas encore lorsqu'elle a été publiée et ne peut concerner que la situation strictement en cause, sans pouvoir être étendue à un autre impôt, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ; Condamne M. et Mme [E] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [E] et les condamne à payer au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques et du directeur régional des finances publiques des Pays de la Loire, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques. L'arrêt attaqué, critiqué par le directeur général des finances publiques, encourt la censure ; EN CE QU' il a dit que les réponses ministérielles aux questions des parlementaires « [P] » et « [K] » publiées au journal officiel de la République Française du 3 mai 2005 et du 11 avril 2006 étaient opposables à l'administration en l'espèce, prononcé la nullité de la procédure fiscale diligentée contre Madame [L] [E] et Monsieur [N] [E] et prononcé la décharge des compléments de droits et intérêts de retard mis à la charge des contribuables ; ALORS QUE, premièrement, conformément aux dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, lorsqu'un redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; qu'il résulte de cette disposition et d'une jurisprudence constante que la garantie prévue au second alinéa de l'article L. 80 A du L.P.F. bénéficie aux contribuables, sous la réserve notamment que le texte opposé exprime une doctrine postérieure aux impositions litigieuses ; qu'au cas particulier, en décidant, par motifs propres à propos des réponses du Ministre aux parlementaires « [P] » et « [K] » que « Ainsi, même si la loi TEPA qui a permis la réduction d'impôt de l'ISF est intervenue le 21 août 2007, postérieurement aux réponses du ministre, ces réponses apportent des précisions de portées générales sur le sens du texte fiscal en matière de délivrance d'attestations, texte qui n'est pas limité à l'impôt sur le revenu » alors que la doctrine invoquée est manifestement antérieure au texte litigieux, la cour a n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses constatations et ainsi violé les dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; ET ALORS QUE, deuxièmement, conformément aux dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, lorsqu'un redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente ; qu'il résulte de ces dispositions et d'une jurisprudence constante que l'opposabilité d'une réponse Ministérielle ne peut être invoquée que dans l'hypothèse où elle s'applique à la situation en cause ; que le litige concerne la remise en cause de la réduction d'impôt de solidarité sur la fortune dont les contribuables ont bénéficié au titre de l'année 2010 sur le fondement de l'article 885-0 V bis du C.G.I. ; qu'au cas particulier, seule une doctrine administrative se rapportant strictement à l'objet du litige pourrait être invoquée sur le fondement du second alinéa de l'article L. 80 A du L.P.F. ; qu'en décidant, par motifs propres et après avoir constaté que « les questions portaient sur la possibilité pour l'administration de contester la validité des reçus fiscaux délivrés au contribuable par les organismes auxquels il a fait des dons », que les réponses Ministérielles aux parlementaires « [P] » et « [K] », publiées les 3 mai 2005 et 11 avril 2006 étaient opposables à l'administration dans un litige concernant l'impôt de solidarité sur la fortune, la cour a n'a pas tiré les conséquences légales s'évinçant de ses constatations et ainsi violé les dispositions du second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales.
INCA/JURITEXT000046990069.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 15 F-D Pourvoi n° S 21-10.035 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 La société Tarita, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 21-10.035 contre l'arrêt rendu le 8 octobre 2020 par la cour d'appel de Papeete (chambre commerciale), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [Y] [D], domicilié [Adresse 2], pris en qualité d'administrateur provisoire de la société Te Puna, 2°/ à M. [K] [M], domicilié [Adresse 4], 3°/ à la société Vaipahu 2, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 4], 4°/ à Mme [H] [P], domiciliée [Adresse 1], 5°/ à la société Te Puna, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défendeurs à la cassation. M. [M], Mme [P] et la société Vaipahu 2 ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Les demandeurs au pourvoi incident invoquent, à l'appui de leur recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Tarita, de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [M], de Mme [P] et de la société Vaipahu 2, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. [D], ès qualités, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Papeete, 8 octobre 2020), la société par actions simplifiée Te Puna, qui a pour président M. [M], est détenue par la société Vaihapu 2, laquelle a pour associés M. [M] et Mme [P], et par la société Tarita. 2. Le 9 décembre 2004, souhaitant vendre les actions qu'elle détenait dans le capital social de la société Te Puna à la société Star, au prix nominal minimum de 500 francs des collectivités françaises du Pacifique, la société Tarita a, conformément aux statuts de la société Te Puna, sollicité l'agrément de cette dernière. 3. Le 15 février 2005, l'assemblée générale extraordinaire de la société Te Puna a refusé d'agréer cette cession et demandé à ce que soit mise en oeuvre la procédure prévue à l'article 1843-4 du code civil pour déterminer la valeur des droits sociaux. Le 16 février 2005, la société Te Puna a notifié à la société Tarita son refus d'agrément. 4. Le 13 mai 2005, la société Te Puna et M. [M] ont saisi, en référé, le président d'un tribunal de commerce d'une demande de mise sous séquestre des actions de cette société détenues par la société Tarita. La société Te Puna et M. [M] ont, en cours d'instance, demandé, sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, l'évaluation par un expert de la valeur des titres de la société Te Puna détenus par la société Tarita. Une ordonnance du 28 novembre 2005 a accueilli ces demandes. L'expert a déposé son rapport le 10 juillet 2007. 5. A l'occasion d'une nouvelle instance l'opposant à la société Te Puna et à M. [M], la société Tarita a demandé la levée du séquestre et la condamnation de la société Te Puna à lui payer le prix de cession des actions qu'elle détenait dans le capital social de cette dernière, tel que fixé par l'expert désigné sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil. La société Vaihapu 2 et Mme [P] sont intervenues volontairement à la procédure. 6. La société Tarita ayant, au cours de cette même instance, demandé la désignation d'un administrateur judiciaire provisoire de la société Te Puna, M. [D] a été nommé à ces fonctions par ordonnance du 11 février 2008. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi incident, ci-après annexé 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le premier moyen du pourvoi principal, pris en sa première branche Enoncé du moyen 8. La société Tarita fait grief à l'arrêt de dire que l'agrément au projet de cession des actions de la société Te Puna détenues par la société Tarita devait être considéré comme donné, et que la société Tarita pourrait céder ses actions dans les conditions du projet de cession notifié le 9 décembre 2004 à la société Te Puna, alors « que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'il était constant en l'espèce que la société Te Puna, après avoir refusé d'agréer la cession par la société Tarita de ses actions à la société Star, avait sollicité le séquestre des actions de la société Tarita afin d'en empêcher la cession, lequel séquestre avait été ordonné par une ordonnance du 28 novembre 2005 ; que la société Te Puna avait parallèlement fait part de sa volonté de racheter les actions, par courrier du 4 avril 2005, et avait demandé la nomination d'un expert aux fins d'évaluer les actions détenues par la société Tarita ; qu'en disant cependant qu'à défaut de rachat des actions détenues par la société Tarita dans le délai de deux mois prévu par les statuts et l'article L. 228-24 du code de commerce, et faute de demande de prorogation de ce délai, la société Te Puna était réputée avoir agréé la cession, quand le fait d'avoir fait séquestrer les actions en cause, interdisant de fait à la société Tarita de procéder à leur cession, et le fait d'avoir sollicité leur évaluation à dire d'expert, valait engagement de la société Te Puna de les racheter au prix fixé par l'expert désigné, peu important l'expiration des délais prévus par les textes et ses statuts pour ce faire, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, et violé par fausse application l'article L. 228-24 du code de commerce, ensemble, par refus d'application, l'article 1134, devenu 1103 et 1104, du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 : 9. Selon ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. 10. Pour rejeter la demande de la société Tarita aux fins de voir condamner la société Te Puna à lui payer le prix de cession des actions qu'elle détient dans le capital de cette société, tel que fixé par l'expert désigné sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, l'arrêt relève que les statuts de la société Te Puna stipulent qu'en cas de refus d'agrément, la société doit, dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de refus, soit faire racheter les actions dont la cession était envisagée par un ou plusieurs associés, soit procéder elle-même à ce rachat, que le prix de rachat des actions du cédant est fixé d'un commun accord et, à défaut, dans les conditions prévues à l'article 1843-4 du code civil, et que, si à l'expiration de ce délai de deux mois, le rachat n'est pas réalisé, l'agrément est considéré comme donné, ce délai pouvant toutefois être prolongé par ordonnance du président du tribunal de commerce statuant en la forme des référés, le cédant et le cessionnaire dûment appelé. L'arrêt relève, ensuite, que, le 9 décembre 2004, la société Tarita a notifié à la société Te Puna son projet de céder les actions qu'elle détient dans le capital de cette dernière à la société Star, que, le 15 février 2005, la société Te Puna a refusé d'agréer cette cession, ce refus étant notifié le 16 février suivant à la société Tarita et que, le 13 mai 2005, M. [M] a demandé en référé la mise sous séquestre des actions de la société Te Puna détenues par la société Tarita puis, ultérieurement, l'évaluation par un expert de leur valeur. L'arrêt retient qu'en application de la clause statutaire, les parties devaient se mettre d'accord sur le prix de rachat au plus tard le 15 mai 2005, ou, à tout le moins, sur le principe d'une expertise dans ce délai, l'application stricte de la clause prévue dans les statuts leur imposant même, dans ce dernier cas, d'obtenir une prolongation du délai par ordonnance du président du tribunal de commerce statuant sur requête et que, s'il résulte de l'ordonnance de référé du 28 novembre 2005 qu'une action a été introduite le 13 mai 2005 par M. [M] et la société Te Puna, celle-ci ne portait pas sur une expertise, laquelle sera demandée par la suite, soit nécessairement après le 15 mai 2005, et qu'ainsi, ni la société Te Puna ni la société Tarita n'ont sollicité judiciairement et conformément aux statuts la prolongation du délai pour prévoir le rachat par la société Te Puna des actions que la société Tarita souhaitait céder. L'arrêt en déduit que l'agrément doit être considéré comme donné, faute pour la société Te Puna d'avoir sollicité la prolongation du délai prévu par les statuts et d'avoir réalisé le rachat prévu en cas de refus d'agrément, aucun accord sur le principe du rachat, sur le prix ou sur la mise en oeuvre de la procédure de l'article 1843-4 du code civil n'étant intervenu. 11. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations qu'après avoir refusé d'agréer la cession, par la société Tarita, de ses actions à la société Star, la société Te Puna avait demandé en référé la mise sous séquestre de ces actions et la désignation d'un expert sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil pour déterminer leur valeur, ce dont il se déduisait que la société Te Puna avait manifesté son intention d'acquérir les titres détenus par la société Tarita à un prix fixé par l'expert désigné, ce que la société Tarita avait accepté, de sorte que l'accord s'était fait sur la chose et sur les modalités de détermination du prix, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que, conformément aux statuts de la société Te Puna, l'agrément au projet de cession des actions de la société Te Puna détenues par la société Tarita à l'EURL Star doit être considéré comme donné et que la société Tarita pourra céder ses actions dans les conditions du projet de cession notifié le 9 décembre 2004 à M. [M], et en ce qu'il statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 8 octobre 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Papeete ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa ; Condamne M. [D], en sa qualité d'administrateur provisoire de la société Te Puna, M. [M], Mme [P] et la société Vaipahu 2 aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [D], ès qualités, M. [M], Mme [P] et la société Vaipahu 2 et condamne M. [D], ès qualités, à payer à la société Tarita la somme de 1 500 euros, et M. [M], Mme [P] et la société Vaipahu 2 à lui payer la somme globale de 1 500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Tarita. PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Tarita fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que l'agrément au projet de cession des actions de la société Te Puna détenues par la société Tarita devait être considéré comme donné, et que la société Tarita pourrait céder ses actions dans les conditions du projet de cession notifié le 9 décembre 2004 à la société Te Puna ; 1) ALORS QUE les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites ; qu'il était constant en l'espèce que la société Te Puna, après avoir refusé d'agréer la cession par la société Tarita de ses actions à la société Star, avait sollicité le séquestre des actions de la société Tarita afin d'en empêcher la cession, lequel séquestre avait été ordonné par une ordonnance du 28 novembre 2005 ; que la société Te Puna avait parallèlement fait part de sa volonté de racheter les actions, par courrier du 4 avril 2005, et avait demandé la nomination d'un expert aux fins d'évaluer les actions détenues par la société Tarita ; qu'en disant cependant qu'à défaut de rachat des actions détenues par la société Tarita dans le délai de deux mois prévu par les statuts et l'article L. 228-24 du code de commerce, et faute de demande de prorogation de ce délai, la société Te Puna était réputée avoir agréé la cession, quand le fait d'avoir fait séquestrer les actions en cause, interdisant de fait à la société Tarita de procéder à leur cession, et d'avoir sollicité leur évaluation à dire d'expert, valait engagement de la société Te Puna de les racheter au prix fixé par l'expert désigné, peu important l'expiration des délais prévus par les textes et ses statuts pour ce faire, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants, et violé par fausse application l'article L. 228-24 du code de commerce, ensemble, par refus d'application, l'article 1134 devenu 1103 et 1104 du code civil ; 2) ALORS QUE subsidiairement, nul ne peut se contredire aux dépens d'autrui ; qu'il était constant que la société Te Puna, après avoir refusé d'agréer la cession de ses actions par la société Tarita à la société Star, avait sollicité et obtenu le séquestre desdites actions, et demandé la désignation d'un expert pour en fixer la valeur sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, optant ainsi clairement pour le rachat par la société des actions détenues par la société Tarita, ce qu'elle lui avait en outre confirmé par lettre du 4 avril 2005 ; qu'en énonçant que faute d'avoir sollicité la prolongation du délai prévue par l'article 11 des statuts, aucun accord n'était intervenu sur le principe du rachat, sur le prix ou sur la mise en oeuvre de la procédure de l'article 1843-4 du code civil, pour dire, 16 ans après le projet de cession auquel la société Te Puna n'avait cessé de faire obstacle, que l'agrément à ce projet de cession devait être considéré comme donné, la cour d'appel a méconnu le principe susvisé ; 3) ALORS en tout état de cause QUE seul le cédant peut se prévaloir de ce que la société n'a pas racheté ses actions dans le délai de l'article L. 128-24 du code de commerce pour demander qu'il soit jugé que l'agrément est réputé donné ; qu'en disant que l'agrément devait être considéré comme donné, faute qu'ait été sollicitée la prolongation du délai prévue par l'article 11 des statuts, quand la société Tarita demandait la confirmation du jugement ayant dit la société Te Puna tenue de racheter ses actions au prix qui avait été fixé par expert sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil selon décision rendue à la requête de Te Puna qui avait refusé son agrément au projet de cession notifié par la société Tarita, la cour d'appel a violé le texte susvisé. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) La société Tarita fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de sa demande tendant à voir ordonner la dissolution de la société Te Puna ; ALORS QUE la mésentente entre associés est une cause de dissolution lorsqu'elle paralyse le fonctionnement de la société ; que la société Tarita faisait valoir, en l'espèce, que la société Te Puna était dirigée par un administrateur provisoire, en la personne de M. [D], depuis le 11 février 2008, et que celui-ci avait lui-même sollicité dès le mois de septembre 2008 la dissolution de la société pour mésentente grave entre les associés, aggravée ensuite par les malversations de M. [M], qui n'avait pas hésité à utiliser de faux statuts ; qu'en se bornant à énoncer, pour rejeter cette demande après avoir constaté l'existence de plusieurs éléments de blocage de fonctionnement de la société Te Puna, résultant notamment de diverses procédures judiciaires, que sa décision offrant à la société Tarita la possibilité de vendre ses actions à la société Star était de nature à mettre fin à cette situation de blocage, sans rechercher si sa décision, disant que la société Tarita pourrait céder ses actions à la société Star conformément au projet de cession notifié le 9 décembre 2004, était susceptible d'aboutir effectivement à une telle cession, plus de 16 ans plus tard, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1844-7, 5° du code civil. Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour M. [M], Mme [P] et la société Vaipahu 2. M. [K] [M], la société Vaipahu 2 et Mme [H] [P] FONT GRIEF à l'arrêt attaqué, confirmatif sur ce point, d'avoir rejeté leurs demandes tendant à ce qu'il soit dit et jugé que la délibération de l'assemblée générale des associés de la société Te Puna du 6 août 2004 était nulle en ce qu'elle ne fait état que d'un associé unique alors qu'à cette date elle comptait deux associés et en ce qu'elle distribue sans cause des dividendes à la société Tarita porteuse pour partie des actions de M. [M] et que la société Tarita soit condamnée à rembourser à la société Te Puna la somme de 120 000 000 francs CFP représentant le montant des dividendes indûment perçus ; ALORS QUE le juge ne peut, sans méconnaître l'objet du litige, écarter un fait qui n'est pas contesté ; que M. [M], la société Vaipahu 2 et Mme [P] ont fait valoir qu'à la suite de l'échec de l'opération de portage, la société Tarita avait rétrocédé le 5 août 2004 les actions de la société Te Puna qu'elle avait reçues de M. [M] et de Mme [P] à la société Vaipahu 2 (conclusions de M. [M] et de la société Vaipahu 2 du 5 janvier 2015, cf. prod.) ; que la société Tarita a reconnu ce fait (conclusions d'appel de la société Tarita du 26 mars 2020, p. 6, in fine et p. 7, § 1 à 3, cf. prod. 3 à l'appui du mémoire ampliatif) ; que pour juger que la délibération de l'assemblée générale des associés de la société Te Puna était régulière, la cour d'appel a retenu qu'il n'était pas établi que la rétrocession ait été effectuée au profit de la société Vaipahu 2 ; qu'en statuant ainsi, elle a méconnu les termes du litige en violation de l'article 3 du code de procédure civile de la Polynésie française.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 1 F-D Pourvoi n° H 21-15.385 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 1°/ M. [N] [H], domicilié [Adresse 1], 2°/ M. [N] [H], agissant en qualité de représentant légal de Mme [Y] [H], 3°/ M. [N] [H], domicilié [Adresse 1], agissant en qualité de représentant légal de Mme [O] [H], 4°/ M. [Z] [P], 5°/ Mme [W] [D], épouse [P], domiciliés tous deux [Adresse 3], agissant tant en leurs noms personnels, qu'en leur qualité d'ayants droit de [I] [P], 6°/ M. [V] [P], domicilié [Adresse 4], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ayant droit de [I] [P], 7°/ Mme [A] [P], domiciliée [Adresse 1], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ayant droit de [I] [P], 8°/ M. [S] [P], domicilié [Adresse 7], agissant tant en son nom personnel qu'en sa qualité d'ayant droit de [I] [P], 9°/ Mme [T] [F], épouse [P], domiciliée [Adresse 5], ont formé le pourvoi n° H 21-15.385 contre l'arrêt rendu le 18 mars 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 9), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Compagnie de participations commerciales industrielles et financières - Pacifico, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ à la société Etablissements Maurel & Prom, société anonyme, dont le siège est [Adresse 6], défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de M. [H], de MM. [Z], [V] et [S] [P] et de Mmes [W] et [A] [P], et de Mme [T] [P], de Me Laurent Goldman, avocat de la société Etablissements Maurel & Prom, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Compagnie de participations commerciales industrielles et financières - Pacifico, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 mars 2021) et les productions, par une décision du 13 novembre 2015, l'Autorité des marchés financiers a approuvé la fusion-absorption de la société MPI par la société Maurel & Prom (la société M&P), disant n'y avoir obligation, pour la société M&P, de lancer une offre publique de retrait. 2. L'opération a été votée lors des assemblées générales des sociétés MPI et M&P du 17 décembre 2015. Les publications au registre du commerce et des sociétés ont été effectuées en février 2016. 3. Le 24 août 2016, la société Pacifico, principal actionnaire de la société M&P, a cédé l'ensemble des titres qu'elle détenait dans le capital de celle-ci. 4. Le 7 mars 2016, soutenant que la société Pacifico, détenant plus de 30 % des droits de vote de la société MPI, aurait dû déclencher une offre publique d'achat et que la parité de fusion retenue leur avait causé un préjudice, MM. [Z], [V] et [S] [P] et Mmes [W], [A] et [T] [P] (les consorts [P]) ainsi que [I] [P], M. [H] et Mmes [Y] et [O] [H] (les consorts [H]), actionnaires minoritaires des sociétés MPI et M&P ont assigné celles-ci et la société Pacifico en annulation des assemblées générales des sociétés MPI et M&P du 17 décembre 2015. 5. [I] [P] étant décédé en cours d'instance, M. [Z] [P], M. [V] [P], M. [S] [P], Mme [W] [P] et Mme [A] [P] ont repris l'instance en ses lieu et place. Examen des moyens Sur les quatrième et cinquième moyens, ci-après annexés 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. Les consorts [H] et [P] font grief à l'arrêt de constater que leur demande de production de pièces n'était plus soutenue, alors « que, dans leurs dernières écritures d'appel, en date du 4 janvier 2021, les consorts [H] sollicitaient la production forcée par Pacifico de toutes les pièces permettant de constater les transferts des actions M&P entre les années 2009 et 2015 et demandait à la cour de tirer les conséquences qui s'imposaient en cas de refus de produire ; que cette demande figurait dans la discussion et dans le dispositif de leurs conclusions ; que toutefois, pour statuer comme ils l'ont fait, les juges du second degré ont relevé que "la demande de production de pièces n'est plus soutenue" ; qu'en statuant de la sorte, les juges du fond ont dénaturé les conclusions en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause. » Réponse de la Cour 8. Après avoir retenu qu'il est légal et de pratique courante pour un actionnaire d'effectuer des mouvements de titres du nominatif au porteur afin d'éviter d'acquérir les droits de vote double attachés aux actions nominatives pour ne pas franchir certains seuils de droits de vote, l'arrêt relève que sont produits aux débats les documents de référence de la société M&P sur la structure de son actionnariat, faisant apparaître que la société Pacifico n'a jamais détenu plus de 30 % des droits de vote avant la fusion. 9. La cour d'appel a, par ces seuls motifs dont il résulte que les pièces versées aux débats étaient suffisantes pour lui permettre d'apprécier le bien-fondé des demandes d'annulation de la résolution 1A de l'assemblée générale de la société M&P du 17 décembre 2015 et des opérations de fusion-absorption fondées sur l'absence de déclaration de franchissement de seuil, légalement justifié sa décision de ce chef. 10. Le moyen, inopérant en ce qu'il attaque des motifs erronés mais surabondants, ne peut donc être accueilli. Et sur les deuxième et troisième moyens, réunis Enoncé des moyens 11. Par leur deuxième moyen, les consorts [H] et [P] font grief à l'arrêt de dire irrecevable comme prescrite l'action fondée sur l'abus de majorité, alors : « 1°/ que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; qu'en considérant que la demande fondée sur un abus de majorité et visant l'anéantissement de la fusion-absorption de MPI par M&P était prescrite au motif que cette contestation n'avait pas été soulevée dans l'assignation du 7 mars 2016, mais pour la première fois par conclusions du 28 février 2019, sans s'interroger sur le point de savoir si, comme le faisaient valoir les consorts [H] et [P], les demandes telles que formulées dans l'assignation n'avaient pas également pour but l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2241 du code civil ; 2°/ que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; que la Cour d'appel a considéré que ce n'est que par conclusions en date du 28 février 2019 que les consorts [H] et [P] ont pour la première fois formulé une demande tendant à la nullité de la fusion-absorption de MPI par M&P sur le fondement d'un abus de majorité ; qu'en statuant ainsi alors qu'elle décidait par ailleurs que la demande en nullité formulée par les consorts [H] et [P] dès l'assignation du 7 mars 2016 devait être rejetée quand bien même la société Pacifico avait violé ses obligations résultant du dépassement du seuil de 30 % dès lors que cette violation n'avait eu aucun effet sur la régularité de l'assemblée générale et de la résolution relative à la fusion, ce dont il résultait nécessairement que la demande fondée sur le franchissement de seuil visait également à l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a violé l'article 2241 du code civil. » 12. Par leur troisième moyen, les consorts [H] et [P] font grief à l'arrêt de dire irrecevables comme prescrites les actions en nullité des résolutions 2A et 1A des assemblées générales mixtes des sociétés M&P et MPI fondées sur la comptabilisation des votes, alors : « 1°/ que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; qu'en considérant que la demande fondée sur la violation des règles régissant les droits de vote formulée pour la première fois par conclusions du 11 octobre 2018 était prescrite au motif qu'elle visait l'annulation des résolutions approuvant la fusion-absorption de MPI par M&P, quand l'assignation, déposée dans le délai de prescription, ne visait que l'annulation des assemblées générales au cours desquelles ces résolutions ont été approuvées, sans s'interroger sur le point de savoir si, comme le faisaient valoir les consorts [H] et [P], les demandes telles que formulées dans l'assignation n'avaient pas également pour but l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2241 du code civil ; 2°/ que si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; que la cour d'appel a considéré que ce n'est que par conclusions en date du 11 octobre 2018 que les consorts [H] et [P] ont pour la première fois formulé une demande tendant à la nullité de la fusion-absorption de MPI par M&P [fondée sur la violation des règles régissant les droits de vote] ; qu'en statuant ainsi alors qu'elle décidait par ailleurs que la demande en nullité formulée par les consorts [H] et [P] dès l'assignation du 7 mars 2016 devait être rejetée quand bien même la société Pacifico avait violé ses obligations résultant du dépassement du seuil de 30 % dès lors que cette violation n'avait eu aucun effet sur la régularité de l'assemblée générale et la résolution relative à la fusion, ce dont il résultait nécessairement que la demande fondée sur le franchissement de seuil visait également à l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a violé l'article 2241 du code civil ; 3°/ que la recevabilité d'une action en justice ne peut être subordonnée à la démonstration préalable de son bien-fondé ; que si l'article L. 233-14 du code de commerce ne sanctionne le défaut de déclaration de franchissement de seuil que par la privation des droits de vote attachés aux actions excédant la fraction qui n'a pas été régulièrement déclarée pour toute assemblée d'actionnaires qui se tiendrait jusqu'à l'expiration d'un délai de deux ans suivant la date de régularisation de la notification et que l'absence de dépôt d'un projet d'offre publique d'achat n'est pas non plus systématiquement sanctionnée par l'annulation des assemblées générales, les consorts [H] et [P] développaient un argumentaire visant à démontrer que les violations invoquées devaient en l'espèce entraîner la nullité des assemblées générales du 17 décembre 2015 et, par conséquence, de l'opération de fusion adoptée durant ces assemblées ; qu'en considérant que les demandes fondées sur la violation par Pacifico de ses obligations découlant du franchissement de seuil n'avaient pas pour but l'annulation de la fusion, à raison de la nature des sanctions prévues, la cour d'appel a préjugé du bien-fondé de l'action pour exclure son effet interruptif de prescription ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 2241 du code civil et 122 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 13. Selon l'article 2243 du code civil, l'interruption de la prescription résultant de la demande en justice est non avenue si celle-ci est définitivement rejetée. 14. L'arrêt, qui constate que les consorts [H] et [P] ne sollicitent plus, en appel, la nullité des assemblées générales des sociétés MIP et M&P ayant statué sur la fusion-absorption, n'infirme pas le jugement en tant qu'il a rejeté cette demande, formulée dans l'assignation du 7 mars 2016. 15. Il en résulte que ce rejet est devenu irrévocable et que l'interruption de la prescription, par l'assignation du 7 mars 2016, était non avenue à la date du 11 octobre 2018. 16. Par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, dans les conditions prévues par les articles 620, alinéa 1er, et 1015 du code de procédure civile, l'arrêt se trouve légalement justifié en ce qu'il déclare irrecevables comme prescrites les demandes d'annulation des résolutions 2A et 1A des assemblées générales des sociétés MPI et M&P du 17 décembre 2015 fondées sur la comptabilisation des votes et sur l'abus de majorité. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [Z] [P], M. [V] [P], M. [S] [P], Mme [W] [P], Mme [A] [P], en leur nom personnel et en qualité d'ayant droit de [I] [P], Mme [T] [P], M. [H], en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de Mmes [Y] et [O] [H], aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [Z] [P], M. [V] [P], M. [S] [P], Mme [W] [P], Mme [A] [P], en leur nom personnel et en qualité d'ayants droit de [I] [P], Mme [T] [P], M. [H], en son nom personnel et en sa qualité de représentant légal de Mmes [Y] et [O] [H], et les condamne à payer aux sociétés Compagnie de participations commerciales industrielles et financières - Pacifico et Etablissements Maurel & Prom la somme globale de 3 000 euros chacune ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour M. [H], de MM. [Z], [V] et [S] [P] et de Mmes [W] et [A] [P], agissant tant en leurs noms personnels qu'en leurs qualités d'ayants droit de [I] [P], et de Mme [T] [P]. PREMIER MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué, critiqué par les consorts [H], encourt la censure ; EN CE QU' il a constaté que la demande de production de pièces formulée par les consorts [H] n'était plus soutenue ; ALORS QUE dans leurs dernières écritures d'appel, en date du 4 janvier 2021, les consorts [H] sollicitaient la production forcée par PACIFICO de toutes les pièces permettant de constater les transferts des actions MAUREL & PROM entre les années 2009 et 2015 et demandait à la Cour de tirer les conséquences qui s'imposaient en cas de refus de produire ; que cette demande figurait dans la discussion et dans le dispositif de leurs conclusions (conclusions du 4 janvier 2021, motifs p. 53 § 6-7 et dispositif p. 58 pt. 1) ; que toutefois, pour statuer comme ils l'ont fait, les juges du second degré ont relevé que « la demande de production de pièces n'est plus soutenue » (arrêt p. 7 § 3 et p. 13 § 4) ; qu'en statuant de la sorte, les juges du fond ont dénaturé les conclusions en violation du principe selon lequel le juge ne doit pas dénaturer les documents de la cause. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué, critiqué par les consorts [H] et [P], encourt la censure ; EN CE QUE, confirmant le jugement, il a dit irrecevable comme prescrite l'action fondée sur l'abus de majorité ; ALORS QUE, premièrement, si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; qu'en considérant que la demande fondée sur un abus de majorité et visant l'anéantissement de la fusion-absorption de MPI par MAUREL & PROM était prescrite au motif que cette contestation n'avait pas été soulevée dans l'assignation du 7 mars 2016, mais pour la première fois par conclusions du 28 février 2019, sans s'interroger sur le point de savoir si, comme le faisaient valoir les consorts [H] et [P], les demandes telles que formulées dans l'assignation n'avaient pas également pour but l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2241 du Code civil ; ALORS QUE, deuxièmement, si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; que la Cour d'appel a considéré que ce n'est que par conclusions en date du 28 février 2019 que les consorts [H] et [P] ont pour la première fois formulé une demande tendant à la nullité de la fusion-absorption de MPI par MAUREL & PROM sur le fondement d'un abus de majorité ; qu'en statuant ainsi alors qu'elle décidait par ailleurs que la demande en nullité formulée par les consorts [H] et [P] dès l'assignation du 7 mars 2016 devait être rejetée quand bien même la société PACIFICO avait violé ses obligations résultant du dépassement du seuil de 30 % dès lors que cette violation n'avait eu aucun effet sur la régularité de l'assemblée générale et de la résolution relative à la fusion, ce dont il résultait nécessairement que la demande fondée sur le franchissement de seuil visait également à l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a violé l'article 2241 du Code civil. TROISIEME MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué, critiqué par les consorts [H] et [P], encourt la censure ; EN CE QU'il a dit irrecevables comme prescrites les actions en nullité des résolutions 2A et 1A des assemblées générales mixtes des sociétés MAUREL & PROM et MPI fondées sur la comptabilisation des votes ; ALORS QUE, premièrement, si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; qu'en considérant que la demande fondée sur la violation des règles régissant les droits de vote formulée pour la première fois par conclusions du 11 octobre 2018 était prescrite au motif qu'elle visait l'annulation des résolutions approuvant la fusion-absorption de MPI par MAUREL & PROM, quand l'assignation, déposée dans le délai de prescription, ne visait que l'annulation des assemblées générales au cours desquelles ces résolutions ont été approuvées, sans s'interroger sur le point de savoir si, comme le faisaient valoir les consorts [H] et [P], les demandes telles que formulées dans l'assignation n'avaient pas également pour but l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2241 du Code civil ; ALORS QUE, deuxièmement, si, en principe, l'interruption de la prescription ne peut s'étendre d'une action à une autre, il en est autrement lorsque les deux actions, bien qu'ayant une cause distincte, tendent à un seul et même but ; que la Cour d'appel a considéré que ce n'est que par conclusions en date du 11 octobre 2018 que les consorts [H] et [P] ont pour la première fois formulé une demande tendant à la nullité de la fusion-absorption de MPI par MAUREL & PROM ; qu'en statuant ainsi alors qu'elle décidait par ailleurs que la demande en nullité formulée par les consorts [H] et [P] dès l'assignation du 7 mars 2016 devait être rejetée quand bien même la société PACIFICO avait violé ses obligations résultant du dépassement du seuil de 30 % dès lors que cette violation n'avait eu aucun effet sur la régularité de l'assemblée générale et la résolution relative à la fusion, ce dont il résultait nécessairement que la demande fondée sur le franchissement de seuil visait également à l'anéantissement de la fusion, la cour d'appel a violé l'article 2241 du Code civil ; ALORS QUE, troisièmement, la recevabilité d'une action en justice ne peut être subordonnée à la démonstration préalable de son bien-fondé ; que si l'article L. 233-14 du Code de commerce ne sanctionne le défaut de déclaration de franchissement de seuil que par la privation des droits de vote attachés aux actions excédant la fraction qui n'a pas été régulièrement déclarée pour toute assemblée d'actionnaires qui se tiendrait jusqu'à l'expiration d'un délai de deux ans suivant la date de régularisation de la notification et que l'absence de dépôt d'un projet d'offre publique d'achat (OPA) n'est pas non plus systématiquement sanctionnée par l'annulation des assemblées générales, les consorts [H] et [P] développaient un argumentaire visant à démontrer que les violations invoquées devaient en l'espèce entraîner la nullité des assemblées générales du 17 décembre 2015 et, par conséquence, de l'opération de fusion adoptée durant ces assemblées (assignation du 7 mars 2016, p. 8-10 ; conclusions des consorts [H] du 4 janvier 2021, p. 34-36 ; conclusions des consorts [P] du 5 janvier 2021, p. 30-31 et 35-36) ; qu'en considérant que les demandes fondées sur la violation par PACIFICO de ses obligations découlant du franchissement de seuil n'avaient pas pour but l'annulation de la fusion, à raison de la nature des sanctions prévues, la cour d'appel a préjugé du bien-fondé de l'action pour exclure son effet interruptif de prescription ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé les articles 2241 du code civil et 122 du code de procédure civile. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué, critiqué par les consorts [H] et [P], encourt la censure ; EN CE QUE, confirmant le jugement, il a débouté les consorts [H] et [P] de leurs demandes en nullité des délibérations des assemblées générales et des opérations de fusion-absorption fondées sur le franchissement de seuil, et il a débouté les consorts [H] et [P] de leurs demandes de dommages et intérêts ; ALORS QUE, premièrement, il résulte de l'article L. 433-3 I du Code monétaire et financier que tout actionnaire d'une société dont le siège social est établi en France, et dont les actions sont admises aux négociations sur un marché réglementé d'un Etat membre de l'Union européenne, venant à détenir, directement ou indirectement, plus des trois dixièmes du capital ou des droits de vote est tenu d'en informer immédiatement l'Autorité des marchés financiers et de déposer un projet d'offre publique en vue d'acquérir une quantité déterminée des titres de la société ; que la violation de cette obligation peut participer d'une fraude aux droits des actionnaires minoritaires justifiant l'annulation de l'assemblée générale ayant donné lieu à la fraude de même que l'attribution de dommages-intérêts aux actionnaires minoritaires lésés ; qu'en rejetant les demandes en ce sens des consorts [H] et [P] au motif péremptoire que « la violation de cette obligation n'a eu aucun effet sur l'assemblée générale et sur les résolutions qui ont été adoptées » (arrêt p. 12 § 3), la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; ALORS QUE, deuxièmement, et à tout le moins, les consorts [H] et [P] faisaient valoir que le dépôt d'une offre publique d'achat aurait conduit à l'ajournement des assemblées générales du 17 décembre 2015 ayant décidé de la fusion-absorption et leur auraient permis de se faire racheter leurs actions par la société PACIFICO, à des conditions beaucoup plus avantageuses ; qu'ils faisaient encore valoir que c'est dans le but d'éviter un tel rachat que la société PACIFICO, consciente du dépassement de seuil, avait sciemment manqué à ses obligations de déclaration et de dépôt d'une offre publique d'achat et permis ainsi la fusion des sociétés MPI et MAUREL & PROM, dans le seul intérêt de cette dernière et de ses actionnaires majoritaires, de manière frauduleuse ; qu'en considérant cependant que la violation par la société PACIFICO de ses obligations n'avait eu aucun effet sur les résolutions adoptées, et qu'il n'en était résulté aucun préjudice pour les actionnaires minoritaires, sans répondre aux conclusions des consorts [H] et [P], la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; ALORS QUE, troisièmement, il résulte de l'article L. 433-3 I alinéa 4 du Code monétaire et financier que le règlement général de l'Autorité des marchés financiers fixe les conditions dans lesquelles l'autorité peut accorder une dérogation à l'obligation de déposer un projet d'offre publique ; que cette possibilité de dérogation n'est toutefois ni automatique, ni de droit ; qu'à considérer que la Cour d'appel a rejeté les demandes des consorts [H] et [P] aux motifs que l'obligation de déposer une offre publique en cas de dépassement du seuil de 30 % du capital ou des droits de vote est tempérée par plusieurs exceptions et dérogations et qu'il appartient à l'AMF de déterminer si l'actionnaire qui dépasse ce seuil est tenu ou non de procéder à une offre publique (arrêt p. 12 § 2), que le franchissement de seuil est principalement dû au retard dans la tenue des assemblées générales et que si celles-ci avaient eu lieu à la date prévue du 7 décembre il n'y aurait eu aucun franchissement de seuil, ou encore que le franchissement de seuil a été très bref (arrêt p. 11 in fine), quand elle relevait qu'en l'espèce l'AMF ne s'était pas prononcée sur le franchissement de seuil qui ne lui avait pas été soumis et notamment sur la nécessité de déposer une offre publique d'acquisition (arrêt p. 11 § 5), la Cour d'appel a violé l'article L. 433-3 I du Code monétaire et financier. CINQUIEME MOYEN DE CASSATION L'arrêt attaqué, critiqué par les consorts [H] et [P], encourt la censure ; EN CE QUE, confirmant le jugement, il a débouté les consorts [H] et [P] de leurs demandes en nullité des délibérations des assemblées générales et des opérations de fusion-absorption fondées sur le franchissement de seuil, et il a débouté les consorts [H] et [P] de leurs demandes de dommages et intérêts ; ALORS QUE, les consorts [H] et [P] faisaient valoir, aux termes d'une démonstration détaillée, que la société PACIFICO avait, postérieurement à la fusion, et à tout le moins au 24 décembre 2015, dépassé le seuil des 30 % des droits de vote dans la société MAUREL & PROM sans pour autant déposer une offre publique d'achat, de sorte qu'elle avait violé les obligations pesant sur elle au titre de l'article L. 433-3 I du Code monétaire et financier (conclusions des consorts [H] p. 48-49 ; conclusions des consorts [P], p. 40) ; que pour conclure à l'absence de dépassement du seuil après la fusion, la Cour d'appel s'est contentée de relever que « le document de référence de M&P sur la structure de l'actionnariat au 31/01/2016 montre que Pacifico détient 24,53 % et non plus de 31 % » (arrêt p. 13 § 1) ; qu'en statuant ainsi, par des motifs impropres à exclure qu'entre le 23 décembre 2015, date de la fusion, et le 31 janvier 2016, la société PACIFICO avait dépassé le seuil des 30 %, la Cour d'appel a violé l'article L. 433-3 I du Code monétaire et financier.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : SH COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Irrecevabilité M. VIGNEAU, président Arrêt n° 13 F-D Pourvois n° R 21-19.464 Y 21-20.529 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 1°/ M. [B] [X], 2°/ Mme [F] [I], épouse [X], tous deux domiciliés [Adresse 2], ont formé les pourvois n° R 21-19.464 et Y 21-20.529 contre un jugement rendu le 19 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Niort, dans le litige les opposant à la Caisse régionale de crédit agricole mutuel (CRCAM) de Charente-Maritime Deux-Sèvres, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de M. Boutié, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de M. et Mme [X], de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Charente-Maritime Deux-Sèvres, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Boutié, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° 21-19.464 et 21-20.529 sont joints. Recevabilité des pourvois contestée par la défense Vu les articles 40 et 605 du code de procédure civile : 2. Il résulte de ces dispositions que le jugement du tribunal judiciaire qui statue sur une demande indéterminée est susceptible d'appel et que le pourvoi en cassation n'est pas ouvert à l'encontre d'une telle décision. 3. M. et Mme [X] se sont pourvus en cassation contre un jugement du tribunal judiciaire tendant notamment à la condamnation de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel de Charente-Maritime Deux-Sèvres à procéder à une reddition des relevés de comptes définitifs et à annuler leur inscription au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers. 4. Ces demandes, qui tendent à mettre à la charge de la société défenderesse des obligations de faire, présentent un caractère indéterminé. 5. Ce jugement, inexactement qualifié en dernier ressort, étant susceptible d'appel, les pourvois ne sont pas recevables. PAR CES MOTIFS, la Cour : DÉCLARE IRRECEVABLES les pourvois ; Condamne M. et Mme [X] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 12 F-D Pourvoi n° T 20-21.118 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 Mme [Y] [E], épouse [J], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° T 20-21.118 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant : 1°/ au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, domicilié en ses bureaux, pôle fiscal parisien 1, pôle juridictionnel judiciaire, [Adresse 1], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, 2°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [E], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et du directeur général des finances publiques, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2020), le 21 octobre 2011, à la suite du contrôle de ses déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les années 2005 à 2008, Mme [E] a fait l'objet d'une proposition de rectification portant réintégration, dans la base imposable, de la valeur des participations détenues dans les sociétés BSA, Sofina, Jema 1 et Jema 2, au motif qu'elles ne constituaient pas des biens professionnels exonérés. 2. A la suite du rejet partiel de sa réclamation contentieuse, Mme [E], se prévalant des dispositions de l'article 885 O bis du code général des impôts, a assigné l'administration fiscale en décharge totale des suppléments d'impôts rappelés. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. Mme [E] fait grief à l'arrêt de prononcer le dégrèvement des droits d'ISF mis à sa charge au titre de l'année fiscale 2008 et, statuant à nouveau de ce chef, de rejeter sa demande de dégrèvement au titre de cette année, alors : « 1°/ que l'article 885 O bis du code général des impôts, dans sa version applicable au cours des années en litige, subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de présidente du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et du reste expressément reconnu par l'administration fiscale dans ses conclusions d'appel que Mme [E] avait successivement perçu de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115 000 euros en 2003, 128 000 euros en 2004, 149 500 euros en 2005, 178 000 euros en 2006, 237 000 euros en 2007, les parties ne s'opposant que sur la qualification juridique de ces sommes, puisque l'administration soutenait qu'elles représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du conseil de surveillance de la société BSA de Mme [E], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de président du conseil de surveillance ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions (article L. 225-84 du même code), la cour d'appel a constaté qu'au cours des années en litige, Mme [E] n'avait reçu aucune rémunération correspondant à des jetons de présence et que l'administration fiscale n'était pas fondée à se substituer à l'assemblée générale de la société BSA, seule compétente pour décider d'une attribution de jetons de présence aux membres du conseil de surveillance ; que la cour d'appel a néanmoins considéré que, dès lors que le conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [E] une rémunération annuelle de 91 469 euros (600 000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91 469 euros perçue par Mme [E] au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée au "montant réel" de 237 000 euros que la société BSA lui avait versée en 2007, était inférieure au seuil de la moitié du montant total de revenus, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'ISF de l'année 2008 ; qu'en se prononçant de la sorte, cependant que ni l'administration ni Mme [E] n'avaient prétendu que la somme de 237 000 euros versée par la société BSA à cette dernière au cours de l'année 2007 aurait été composée de rémunérations de natures distinctes venant rétribuer des fonctions ou des services distincts et qu'il n'était en particulier soutenu par aucune des parties que ces sommes auraient été, fût-ce pour partie, composées de rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions en application de l'article L. 225-84 du code de commerce, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il ressortait des conclusions d'appel de l'administration fiscale et de celles de Mme [E] que les deux parties s'accordaient sur la circonstance que celle-ci avait perçu de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115 000 euros en 2003, 128 000 euros en 2004, 149 500 euros en 2005, 178 000 euros en 2006, 237 000 euros en 2007 et ne s'opposaient que sur leur qualification juridique, l'administration soutenant que ces sommes représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du conseil de surveillance de la société BSA de Mme [E], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de présidente de ce conseil de surveillance ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel la somme de 237 000 euros versée en 2007 par la société BSA à Mme [E] n'aurait rémunéré sa fonction de présidente du conseil de surveillance qu'à hauteur d'un montant de 91 469 euros correspondant à la rémunération initiale qui lui avait été attribuée à ce titre lors de son entrée en fonction en 2000, sans provoquer les explications contradictoires des parties sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3°/ que l'article 885 O bis du code général des impôts, dans sa version applicable au cours des années en litige, subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de président du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les cédules qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et expressément admis par l'administration fiscale que la somme de 237 000 euros perçue par Mme [E] en 2007 avait représenté dans son intégralité une rémunération versée à l'intéressée par la société BSA ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions, la cour d'appel a considéré que, dès lors que le conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [E] une rémunération annuelle de 91 469 euros (600 000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91 469 euros perçue par Mme [E] au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée au "montant réel" de 237 000 euros que la société BSA lui avait versée en 2007, était inférieure au seuil de la moitié du montant total de revenus, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'ISF de l'année 2008 ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir pourtant elle-même relevé que Mme [E] n'avait reçu de la société BSA aucune rémunération correspondant à des jetons de présence au cours des années en litige, la cour d'appel, qui n'a ni précisé la nature des sommes que la société BSA avait versées en 2007 à Mme [E] au-delà du montant de 91 469 euros et jusqu'à la somme de 237 000 euros, ni déterminé la catégorie dans laquelle ces sommes versées par la société BSA en 2007 à Mme [E] comprises entre 91 469 euros et 237 000 euros étaient imposables, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 885 O bis du code général des impôts. » Réponse de la Cour 4. Il résulte de l'article 885 O bis du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003, applicable au litige, que les parts et actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option, sont considérées comme des biens professionnels si leur propriétaire exerce de façon effective les fonctions de président du conseil de surveillance et perçoit à ce titre une rémunération normale, qui doit représenter plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du même code. 5. En premier lieu, saisie de la question de l'applicabilité aux titres détenus par Mme [E] du bénéfice de l'exonération de l'ISF prévue à l'article 885 O bis du code général des impôts, c'est sans méconnaître l'objet du litige, ni violer le principe de la contradiction, mais en se bornant à examiner, sans introduire de nouveaux éléments de fait dans le débat, si les conditions d'application de ce texte étaient réunies, que la cour d'appel a retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve, que Mme [E] ne justifiait avoir reçu, en 2007, une rémunération rétribuant son activité de présidente du conseil de surveillance de la société BSA qu'à hauteur de la somme de 91 469 euros. 6. En second lieu, ayant constaté que Mme [E] soutenait avoir perçu de la société BSA, à titre de rémunération de ses fonctions de présidente du conseil de surveillance de cette société, la somme de 237 000 euros en 2007, et retenu qu'elle ne justifiait avoir été rémunérée au titre desdites fonctions qu'à concurrence de la somme de 91 469 euros cette même année, ce dont il ressortait que Mme [E] ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de ce que ses fonctions de présidente du conseil de surveillance de la société BSA avaient donné lieu à une rémunération représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels elle était soumise à l'impôt sur le revenu dans les catégories visées au 1°, alinéa 2, de l'article 885 O bis du code général des impôts, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [E] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [E] et la condamne à payer au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de [Localité 4], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et au directeur général des finances publiques la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour Mme [E]. Madame [Y] [E], épouse [J], fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement entrepris en tant qu'il avait prononcé le dégrèvement des droits d'impôt de solidarité sur la fortune mis à sa charge au titre de l'année fiscale 2008 et, statuant à nouveau de ce chef, de l'avoir déboutée de sa demande de dégrèvement au titre de cette année ; 1. ALORS QUE l'article 885 O bis du code général des impôts dans sa version applicable au cours des années en litige subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de présidente du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et du reste expressément reconnu par l'administration fiscale dans ses conclusions d'appel (p. 14) que Mme [Y] [E] avait successivement perçu de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115.000 € en 2003, 128.000 € en 2004, 149.500 € en 2005, 178.000 € en 2006, 237.000 € en 2007, les parties ne s'opposant que sur la qualification juridique de ces sommes, puisque l'administration soutenait qu'elles représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du Conseil de surveillance de la société BSA de Mme [E], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de président du Conseil de surveillance ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions (article L. 225-84 du même code), la cour d'appel a constaté qu'au cours des années en litige, Madame [E] n'avait reçu aucune rémunération correspondant à des jetons de présence et que l'administration fiscale n'était pas fondée à se substituer à l'assemblée générale de la société BSA, seule compétente pour décider d'une attribution de jetons de présence aux membres du Conseil de surveillance ; que la cour d'appel a néanmoins considéré que, dès lors que le Conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [E] une rémunération annuelle de 91.469 € (600.000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du Conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91.469 euros perçue par Mme [E] au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée au « montant réel » de 237.000 euros que la société BSA lui avait versée en 2007, était inférieure au seuil de la moitié du montant total de revenus, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune de l'année 2008 ; qu'en se prononçant de la sorte, cependant que ni l'administration, ni Mme [E], n'avait prétendu que la somme de 237.000 euros versée par la société BSA à cette dernière au cours de l'année 2007 aurait été composée de rémunérations de natures distinctes venant rétribuer des fonctions ou des services distincts et qu'il n'était en particulier soutenu par aucune des parties que ces sommes auraient été, fût-ce pour partie, composées de rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions en application de l'article L. 225-84 du code de commerce, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 2. ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il ressortait des conclusions d'appel de l'administration fiscale (pp. 14-15) et de celles de Mme [Y] [E] (pp. 8 et s.) que les deux parties s'accordaient sur la circonstance que celle-ci avait perçue de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115.000 € en 2003, 128.000 € en 2004, 149.500 € en 2005, 178.000 € en 2006, 237.000 € en 2007 et ne s'opposaient que sur leur qualification juridique, l'administration soutenant que ces sommes représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du Conseil de surveillance de la société BSA de Mme [E], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de présidente de ce Conseil de surveillance ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel la somme de 237.000 euros versée en 2007 par la société BSA à Mme [E] n'aurait rémunéré sa fonction de présidente du conseil de surveillance qu'à hauteur d'un montant de 91.469 euros correspondant à la rémunération initiale qui lui avait été attribuée à ce titre lors de son entrée en fonction en 2000, sans provoquer les explications contradictoires des parties sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3. ALORS, en toute hypothèse, QUE l'article 885 O bis du code général des impôts dans sa version applicable au cours des années en litige subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de président du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les cédules qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et expressément admis par l'administration fiscale que la somme de 237.000 euros perçue par Mme [E] en 2007 avait représenté dans son intégralité une rémunération versée à l'intéressée par la société BSA ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions, la cour d'appel a considéré que, dès lors que le Conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [E] une rémunération annuelle de 91.469 € (600.000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du Conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91.469 euros perçue par Mme [E] au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée au « montant réel » de 237.000 euros que la société BSA lui avait versée en 2007, était inférieure au seuil de la moitié du montant total de revenus, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune de l'année 2008 ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir pourtant elle-même relevé que Mme [E] n'avait reçu de la société BSA aucune rémunération correspondant à des jetons de présence au cours des années en litige, la cour d'appel, qui n'a ni précisé la nature des sommes que la société BSA avait versées en 2007 à Mme [E] au-delà du montant de 91.469 euros et jusqu'à la somme de 237.000 euros, ni déterminé la catégorie dans laquelle ces sommes versées par la société BSA en 2007 à Mme [E] comprises entre 91.469 euros et 237.000 euros étaient imposables, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 885 O bis du code général des impôts.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 2 F-D Pourvoi n° J 20-18.051 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 1°/ la société SCS Financière, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], 2°/ M. [X] [H], domicilié [Adresse 1], 3°/ la société Financière Asappro, société civile, dont le siège est [Adresse 3], ont formé le pourvoi n° J 20-18.051 contre l'arrêt rendu le 26 mai 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Magellan Consulting, société par actions simplifiée, 2°/ à la société Asappro - J2C, société anonyme, anciennement dénommée Asappro, ayant toutes les deux leur siège [Adresse 2], défenderesses à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lefeuvre, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [H] et des sociétés SCS Financière et Financière Asappro, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat des sociétés Magellan Consulting et Asappro - J2C, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Lefeuvre, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 mai 2020), par un acte du 30 mars 2015, les sociétés SCS Financière et Financière Asappro ont cédé à la société Magellan Consulting un certain nombre d'actions de la société Asappro, devenue la société J2C, dont M. [H] était le président-directeur général. Ce contrat prévoyait un engagement de collaboration de M. [H] avec la société Asappro, sanctionné, en cas de cessation de la collaboration entre la société SCS Financière et la société Asappro, par l'obligation de céder la totalité des actions encore détenues au capital de la société Asappro moyennant un certain prix et par une clause pénale, si l'événement à l'origine de la cessation de la collaboration intervenait dans les douze mois suivant la date de la réalisation de la cession. 2. Par une lettre du 7 mars 2016, la société Magellan Consulting a notifié à M. [H] la mise en oeuvre des sanctions prévues au contrat de cession et l'a enjoint de payer la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale et de retourner deux ordres de virement portant sur les actions que les sociétés SCS Financière et Financière Asappro détenaient encore dans le capital de la société Asappro. 3. M. [H] n'ayant pas accepté ces demandes, la société Magellan Consulting l'a assigné, ainsi que la société SCS Financière, aux fins de voir constater la validité de la cession forcée, au prix de un euro par titre, des actions que les sociétés SCS Financière et Financière Asappro détenaient encore dans le capital de la société Asappro et de voir condamner M. [H] et la société SCS Financière au paiement de la somme prévue par la clause pénale. La société Financière Asappro est intervenue volontairement à la procédure. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches, et sur le second moyen, ci-après annexés 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en sa première branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de dire valable la cession forcée des titres détenus par la société SCS Financière dans la société Asappro et régulière l'inscription de ces titres dans le registre des mouvements de titres de la société Asappro au profit de la société Magellan Consulting et de rejeter les demandes de dommages et intérêts de M. [H] et des sociétés SCS Financière et Financière Asappro 5. Les motifs critiqués ne fondent pas la disposition attaquée. Le moyen est donc irrecevable. Mais sur ce moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner in solidum M. [H] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale Enoncé du moyen 6. M. [H] et les sociétés SCS Financière et Financière Asappro font grief à l'arrêt de condamner in solidum M. [H] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale, alors « que la clause pénale ne peut s'appliquer que si le débiteur de l'obligation contractuelle qui sert de base à la clause a été mis en demeure par le créancier d'exécuter cette obligation contractuelle ; qu'une mise en demeure de s'acquitter d'une clause pénale ne constitue pas une mise en demeure d'exécuter l'obligation contractuelle servant de base à cette clause, surtout lorsque le débiteur de l'obligation contractuelle et le débiteur de la clause pénale sont des personnes juridiques distinctes ; qu'en considérant que, "étant constant que la société SCS Financière a cessé de rendre la prestation qu'elle devait et ce dans les douze mois de la date de la cession, la clause pénale [prévoyant le versement par M. [H] d'une somme de 200 000 euros] était acquise au jour où la société Magellan consulting a mis en demeure M. [H] de devoir s'en acquitter", la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, dont il résultait que, dans le courrier de "mise en demeure" du 7 mars 2016, la société Magellan Consulting avait seulement mis en demeure M. [H] de s'acquitter de la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale, ce qui ne pouvait pas équivaloir à une mise en demeure de la société SCS Financière de fournir la prestation prévue par le contrat, et a violé l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 7. Les sociétés J2C et Magellan Consulting contestent la recevabilité du moyen. Elles soutiennent qu'il est nouveau et mélangé de fait et de droit, M. [H] et la société SCS Financière n'ayant pas soutenu qu'ils n'avaient pas été mis en demeure d'exécuter l'obligation contractuelle de collaborer avec la société Asappro. 8. Cependant, le moyen est né de la décision attaquée. 9. Il est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu l'article 1230 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 : 10. Aux termes de ce texte, soit que l'obligation primitive contienne, soit qu'elle ne contienne pas un terme dans lequel elle doive être accomplie, la peine n'est encourue que lorsque celui qui s'est obligé soit à livrer, soit à prendre, soit à faire, est en demeure. 11. Pour condamner in solidum M. [H] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale, l'arrêt retient que la société SCS Financière ayant cessé de rendre les prestations qu'elle devait, et ce, dans les douze mois de la date de la cession, la clause pénale était acquise au jour où la société Magellan Consulting avait mis M. [H] en demeure de devoir s'en acquitter. 12. En se déterminant ainsi, sans constater, ainsi qu'il lui incombait, que la société Magellan Consulting avait mis la société SCS Financière en demeure d'exécuter son obligation de collaborer avec la société Asappro ou que, l'inexécution étant définitive, elle était dispensée de toute mise en demeure, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum M. [H] et la société SCS Financière à payer à la société Magellan Consulting la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale, l'arrêt rendu le 26 mai 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne les sociétés J2C et Magellan Consulting aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par les sociétés J2C et Magellan Consulting et les condamne à payer à M. [H] et aux sociétés SCS Financière et Financière Asappro la somme globale de 3 000 euros ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour M. [H] et les sociétés SCS Financière et Financière Asappro. PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [H] et la société SCS Financière font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés in solidum à payer à la société Magellan consulting la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale, d'avoir dit valable la cession forcée des 102 titres détenues par la société SCS Financière dans la société Asappro au prix d'un euro par titre et régulière l'inscription de ces titres dans le registre des mouvements de titres de la société Asappro au profit de la société Magellan consulting et d'avoir débouté M. [H] et les sociétés SCS Financière et Financière Asappro de leurs demandes de dommages-intérêts ; 1°) ALORS QUE la clause pénale ne peut s'appliquer que si le débiteur de l'obligation contractuelle qui sert de base à la clause a été mis en demeure par le créancier d'exécuter cette obligation contractuelle ; qu'une mise en demeure de s'acquitter d'une clause pénale ne constitue pas une mise en demeure d'exécuter l'obligation contractuelle servant de base à cette clause, surtout lorsque le débiteur de l'obligation contractuelle et le débiteur de la clause pénale sont des personnes juridiques distinctes ; qu'en considérant que, « étant constant que la société SCS Financière a cessé de rendre la prestation qu'elle devait et ce dans les douze mois de la date de la cession, la clause pénale [prévoyant le versement par M. [H] d'une somme de 200 000 euros] était acquise au jour où la société Magellan consulting a mis en demeure M. [H] de devoir s'en acquitter », la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, dont il résultait que, dans le courrier de « mise en demeure » du 7 mars 2016 (pièce n° 5), la société Magellan consulting avait seulement mis en demeure M. [H] de s'acquitter de la somme de 200 000 euros au titre de la clause pénale (arrêt, p. 4 § 4), ce qui ne pouvait pas équivaloir à une mise en demeure de la société SCS Financière de fournir la prestation prévue par le contrat, et a violé l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QU'en tout état de cause, pour apprécier le caractère excessif d'une clause pénale, le juge doit se placer à la date de sa décision ; qu'à l'appui de sa demande de réduction du montant de la clause pénale, M. [H] faisait valoir qu'il avait été victime d'un accident vasculaire cérébral qui l'avait laissé gravement handicapé et qu'à la suite d'examens médicaux intervenus le 27 juillet 2016, son assureur avait fixé son taux d'invalidité fonctionnelle à 60 % et son taux d'invalidité professionnelle à 80 %, et lui avait octroyé une rente invalidité à 100 % (conclusions, p. 13) ; qu'en se bornant à relever, pour refuser de modérer le montant de la clause pénale, que M. [H] était « demeuré taisant quant aux motifs de la cessation des prestations » et n'avait pris « aucune disposition pour en réduire les effets sans justifier de son impossibilité de le faire en se bornant à produire des arrêts de travail avec autorisations de sortie », la cour d'appel s'est placée, non pas à la date de sa décision, mais à la date à laquelle la société Magellan consulting avait mis en demeure M. [H] de s'acquitter de la clause pénale (le 7 mars 2016), a violé l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; 3°) ALORS QUE, même si, à la date à laquelle la société SCS Financière a cessé de fournir la prestation prévue par le contrat, M. [H] ne s'était pas vu reconnaître par la Sécurité sociale une incapacité physique de plus de 50 % de sorte que la clause pénale était susceptible d'être appliquée, son état de santé constituait un élément que le juge était autorisé à prendre en considération dans l'exercice de son pouvoir de modération du montant de la clause pénale ; qu'ayant constaté que « l'invalidité permanente » de M. [H] avait été « admise? par un assureur privé dont le médecin conseil a estimé le taux d'invalidité fonctionnelle à 60 % et le taux d'invalidité à 80 %... à compter du 1er août 2016 », la cour d'appel, qui n'a pas recherché si, comme l'avait retenu le jugement dont les exposantes demandaient subsidiairement confirmation sur ce point, les documents produits aux débats, les arrêts de travail répétés fournis par M. [H] et le constat d'invalidité dressé par l'assureur privé en août 2016 ne constituaient pas des éléments sérieux de présomption de la gravité de l'état de santé de M. [H] à l'époque des faits, de nature à rendre manifestement excessive la clause pénale, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1152 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016. SECOND MOYEN DE CASSATION La société SCS Financière fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit valable la cession forcée des 102 titres qu'elle détenait dans la société Asappro au prix d'un euro par titre et régulière l'inscription de ses titres dans le registre des mouvements de titres de la société Asappro au profit de la société Magellan consulting et de l'avoir déboutée de sa demande tendant à la condamnation de la société Magellan consulting à lui payer la somme de 102 000 euros en réparation de son préjudice économique ; 1°) ALORS QU'une stipulation contractuelle obligeant une partie, en cas d'inexécution d'une autre obligation prévue au contrat, à céder les actions qu'il détient dans une société n'autorise pas son cocontractant à procéder, sans son accord, au transfert des actions, mais seulement à demander au juge la cession forcée de ces actions ; que la cour d'appel a constaté qu'en vertu de l'acte de cession, si la prestation de la société SCS Financière venait à s'arrêter, celle-ci s'exposait à l'obligation de céder la totalité des actions qu'il détiendrait encore au capital de la société Asappro ; que la société SCS Financière faisait valoir que la société Magellan consulting ne justifiait d'aucun ordre de mouvement en sa faveur pour les 102 actions de la société Asappro qu'elle détenait et que le transfert des titres le 31 mars 2016 n'était, par conséquent, pas valable (conclusions, p. 16 § 3-4) ; qu'en considérant que, malgré « l'absence de signature d'un ordre de transfert de la société SCS Financière », la « cession forcée » de ces actions opérée par la société Magellan consulting était valable et l'inscription de ces actions dans le registre de mouvement de titres était régulière, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QU'en en déduisant que la société Magellan consulting n'avait commis aucune faute engageant sa responsabilité et en déboutant la société SCS Financière de sa demande en réparation du préjudice économique subi du fait que la société Magellan consulting s'était d'autorité considérée comme propriétaire des actions susceptibles d'être transférées en cas d'application de la clause pénale, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation M. VIGNEAU, président Arrêt n° 16 F-D Pourvoi n° T 21-20.225 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 L'Association départementale APAJH de la Réunion, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-20.225 contre l'arrêt rendu le 19 février 2021 par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion (chambre civile TGI), dans le litige l'opposant à la société Bred banque populaire, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Boutié, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'Association départementale APAJH de la Réunion, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Bred banque populaire, et l'avis de Mme Gueguen, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Boutié, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis de La Réunion, 19 février 2021), rendu sur renvoi après cassation (Com., 28 mars 2018, pourvoi n° 16-23.798), soutenant que la société Banque populaire Bred (la banque) lui avait proposé, en vue de financer un projet immobilier, la souscription d'un crédit-bail immobilier à taux variable adossé à un contrat de swap permettant un échange du taux variable en taux fixe, qui avait été conclu tandis que le crédit-bail ne l'avait pas été, l'Association départementale APAJH de la Réunion (l'APAHJ) a assigné la banque en annulation, pour défaut de cause et d'objet, du contrat swap et en remboursement de la somme déjà payée. La banque s'y est opposée au motif que chacun des contrats, autonomes, avait une cause indépendante. Examen des moyens Sur le premier moyen, ci-après annexé 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le second moyen, pris en sa quatrième branche Enoncé du moyen 3. L'APAJH fait grief à l'arrêt attaqué de rejeter ses demandes, alors « qu'elle faisait encore valoir qu'elle n'avait jamais auparavant conclu de contrat de swap, qu'elle était une association à but non lucratif nullement rompue au monde des affaires et que s'il lui était arrivé de porter des projets importants, c'était dans le cadre d'aides publiques ; qu'en énonçant, pour dire que la banque n'avait pas manqué à son obligation d'information et de conseil à l'occasion de la conclusion du contrat de swap du 10 septembre 2010, qu'il n'était pas contesté que, préalablement à l'opération en cause, l'APAJH avait déjà conclu ''en 2010'' une offre de crédit-bail assortie d'un swap de taux, dont elle n'avait pas contesté la validité malgré la caducité du contrat de crédit-bail, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 4 du code de procédure civile : 4. Selon ce texte, l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. 5. Pour rejeter les demandes de l'APAJH, l'arrêt relève qu'il n'est pas contesté qu'en 2010, préalablement à l'opération immobilière envisagée, l'APAJH avait déjà conclu une offre de contrat de crédit-bail immobilier FRUCTICOM assorti d'un swap de taux à l'occasion d'une autre opération concernant le transfert d'un centre médico-psycho-pédagogique. 6. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, l'APAJH soutenait ne pas être rompue à la mécanique du swap pour ne pas en avoir conclu par le passé, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 19 février 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion autrement composée ; Condamne la société Bred banque populaire aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Bred Banque populaire et la condamne à payer à l'Association départementale APAJH de la Réunion la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour l'Association départementale APAJH de la Réunion. PREMIER MOYEN DE CASSATION L'Apajh fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables les conclusions qu'elle avait signifiées le 26 octobre 2018 et de l'avoir déboutée de l'intégralité de ses demandes ; ALORS QUE l'Apajh faisait valoir, dans ses conclusions du 14 août 2019, que l'avis de fixation qui lui avait été notifié par le greffe le 17 octobre 2018 mentionnait qu'elle disposait pour notifier ses conclusions d'un délai de deux mois, et d'un délai supplémentaire d'un mois pour les signifier aux parties n'ayant pas constitué avocat ; qu'il en résultait qu'elle avait légitimement pu penser que ce délai courait à compter de l'avis de fixation ; qu''en énonçant seulement, pour dire irrecevables les conclusions de l'Apajh, qu'elles avaient été signifiées à la Bred le 26 octobre 2018, soit plus de trois mois après la déclaration de saisine du 25 juillet 2018, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile. SECOND MOYEN DE CASSATION (subsidiaire) L'Apajh fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir déboutée de l'intégralité de ses demandes ; 1) ALORS QUE l'indivisibilité de deux conventions s'apprécie au regard de la commune intention des parties ; que la cour d'appel a constaté que le contrat de swap avait été envisagé à l'origine pour couvrir un contrat de prêt à taux variable ; qu'en se bornant à énoncer, pour écarter en l'espèce toute indivisibilité entre le contrat d'échange de taux et l'offre de crédit-bail immobilier, qu'ils n'avaient pas été « conclus » de façon simultanée, qu'ils ne faisaient pas référence l'un à l'autre, et que la validité de l'un n'était pas subordonnée à la conclusion de l'autre, tandis que leurs conditions de résiliation étaient différentes, toutes circonstances inopérantes dès lors notamment que le contrat de crédit-bail n'avait en réalité jamais été conclu, et sans rechercher si l'Apajh n'avait pas pu légitimement penser que le contrat de swap était demeuré dans la dépendance du contrat de crédit-bail envisagé, qui n'avait pas connu de suites, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 devenu 1103 du code de procédure civile ; 2) ALORS QUE le projet de financement en crédit-bail adressé par la Bred à l'Apajh le 13 avril 2010 stipulait, en page 4 sous la rubrique « loyers à taux variable » que « cette opération pourra faire l'objet d'un swap taux fixe Bred » ; que le contrat de swap stipulait quant à lui « « vous êtes en train de financer la construction d'une nouvelle maison d'accueil (?) ; vous financez ce projet sur 15 ans via un crédit-bail immobilier (?) vous souhaitez vous prémunir contre les variations de taux (?) vous souhaitez des solutions simples (le taux fixe) (?) ; une réponse simple » ; qu'en énonçant, pour dire que les contrats de financement et de swap étaient autonomes, qu'il n'était fait aucune référence au contrat de swap dans le projet de contrat de crédit-bail, ni au contrat de crédit-bail dans le contrat de swap, la cour d'appel a méconnu le principe de l'obligation faite au juge de ne pas dénaturer les documents de la cause ; 3) ALORS QUE l'Apajh produisait le contrat de swap de taux, auquel était annexé un descriptif énonçant notamment « vous êtes en train de financer la construction d'une nouvelle maison d'accueil (?) ; vous financez ce projet sur 15 ans via un crédit-bail immobilier (?) vous souhaitez vous prémunir contre les variations de taux (?) vous souhaitez des solutions simples (le taux fixe) (?) ; une réponse simple » ( suivait une simulation portant sur les conditions du swap) ; qu'en énonçant qu'il n'était fait aucune référence au contrat de crédit-bail dans le contrat de swap, pour en déduire qu'il s'agissait de deux contrats autonomes et que la caducité de l'un n'entraînait pas celle de l'autre, sans rechercher si ces mentions figurant dans un document annexé au contrat de swap n'étaient pas de nature à établir que les parties avaient eu l'intention de lier les deux contrats, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard au regard de l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 12 février 2016 ; 4) ALORS QUE l'Apajh faisait encore valoir qu'elle n'avait jamais auparavant conclu de contrat de swap, qu'elle était une association à but non lucratif nullement rompue au monde des affaires, et que s'il lui était arrivé de porter des projets importants, c'était dans le cadre d'aides publiques ; qu'en énonçant, pour dire que la banque n'avait pas manqué à son obligation d'information et de conseil à l'occasion de la conclusion du contrat de swap du 10 septembre 2010, qu'il n'était pas contesté que préalablement à l'opération en cause, l'Apajh avait déjà conclu « en 2010 » une offre de crédit-bail assortie d'un swap de taux, dont elle n'avait pas contesté la validité malgré la caducité du contrat de crédit-bail, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé les articles 4 et 455 du du code de procédure civile ; 5) ALORS QUE l'Apajh faisait encore valoir que la banque avait manqué non seulement à son devoir d'information et de mise en garde mais aussi à son devoir de conseil en ne lui proposant pas d'emblée un contrat à taux fixe, comme celui qu'elle avait finalement conclu pour financer son projet ; qu'elle ajoutait que la souscription d'un swap était en l'espèce du seul intérêt de la banque, laquelle faisait par ailleurs partie du même groupe que Natixis, et qu'elle-même était une association à but non lucratif nullement rompue au monde des affaires ; qu'en se bornant à énoncer, pour écarter ce moyen, que l'Apajh était un client averti et avait déjà conclu des contrats de swap, et qu'elle avait été suffisamment informée des modalités de fonctionnement d'un tel contrat, sans rechercher si la banque avait rempli son devoir de conseil au regard du caractère opportun et approprié de souscrire un contrat de swap dans le cadre du projet envisagé et au regard des taux en vigueur à la date de cette souscription, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 devenu 1231-1 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation sans renvoi M. VIGNEAU, président Arrêt n° 10 F-D Pourvoi n° E 20-10.112 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 La société Centrale automobile Strasbourg (CAS), société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 20-10.112 contre l'arrêt rendu le 7 novembre 2019 par la cour d'appel de Colmar (2e chambre civile, section A), dans le litige l'opposant au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, domicilié en ses bureaux, pôle fiscal parisien 1, pôle juridictionnel, [Adresse 1], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, défendeur à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de la société Centrale automobile Strasbourg, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et l'avis de M. Crocq, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 7 novembre 2019), le 15 septembre 2010, les membres de la famille [N], associés de la société civile immobilière GJH [Localité 3] (la société GJH), ont conclu avec la société Centrale automobile Strasbourg (la société CAS) une convention destinée à permettre le financement de la construction, sur un terrain appartenant à la société GJH, d'un immeuble devant être donné en location à la société CAS. Il était convenu qu'une certaine somme soit « confiée » par la société CAS aux associés de la société GJH, à charge pour ces derniers de souscrire à une augmentation de capital de la société GJH par augmentation de la valeur nominale unitaire des parts et de constituer, au profit de la société CAS, un usufruit temporaire sur lesdites parts. 2. Le 5 décembre 2013, soutenant que les actes passés en exécution de la convention du 15 septembre 2010 réalisaient une cession d'usufruit de parts sociales taxable au titre du droit d'enregistrement prévu à l'article 726, I, 2°, du code général des impôts, l'administration fiscale a notifié à la société CAS une proposition de rectification portant rappel de droits. 3. Après le rejet de sa réclamation, la société CAS a assigné l'administration fiscale en décharge des droits d'enregistrement mis en recouvrement. Sur le moyen relevé d'office 4. Après avis donné aux parties conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application de l'article 620, alinéa 2, du même code. Vu l'article 726 du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009, et l'article 578 du code civil : 5. Selon le premier de ces textes, les cessions de droits sociaux sont soumises à un droit d'enregistrement proportionnel. 6. Aux termes du second, l'usufruit est le droit de jouir des choses dont un autre a la propriété, comme le propriétaire lui-même, mais à la charge d'en conserver la substance. Il en résulte que l'usufruitier de parts sociales ne peut se voir reconnaître la qualité d'associé, qui n'appartient qu'au nu-propriétaire, de sorte que la cession de l'usufruit de droits sociaux ne peut être qualifiée de cession de droits sociaux. 7. Pour rejeter la demande de la société CAS en décharge des droits d'enregistrement, l'arrêt retient que l'opération litigieuse, vue sous l'angle des rapports entre les associés de la société GJH et la société CAS, réalise une cession de la valeur de l'usufruit des parts sociales de la société GJH, entrant dans le champ d'application de l'article 726, I, 2°, du code général des impôts. 8. En statuant ainsi, alors que la cession de l'usufruit de droits sociaux, qui n'emporte pas mutation de la propriété des droits sociaux, n'est pas soumise au droit d'enregistrement applicable aux cessions de droits sociaux, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 9. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 10. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. 11. Il résulte de ce qui précède que la constitution au profit de la société CAS de l'usufruit sur les parts sociales de la société GJH, réalisée en exécution de la convention du 15 septembre 2010, n'est pas soumise au droit d'enregistrement proportionnel de 5 % prévu à l'article 726, I, 2°, du code général des impôts. 12. En conséquence, il y a lieu d'annuler la décision du 22 janvier 2015 rejetant la réclamation de la société CAS et de confirmer le jugement uniquement en tant qu'il prononce la décharge des droits d'enregistrement mis en recouvrement le 24 septembre 2014 contre cette société et qu'il condamne la direction générale des finances publiques prise en la personne du directeur régional de la région Grand Est et du département du Bas-Rhin à payer à la société CAS la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les griefs du pourvoi, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 novembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Annule la décision du 22 janvier 2015 rejetant la réclamation de la société Centrale automobile Strasbourg ; Confirme le jugement uniquement en tant qu'il prononce la décharge des droits d'enregistrement mis en recouvrement le 24 septembre 2014 contre la société Centrale automobile Strasbourg et qu'il condamne la direction générale des finances publiques prise en la personne du directeur régional de la région Grand Est et du département du Bas-Rhin à payer à la société Centrale automobile Strasbourg la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, aux dépens, en ce compris ceux exposés devant les juges du fond ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Marlange et de La Burgade, avocat aux Conseils, pour la société Centrale automobile Strasbourg. Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR rejeté la contestation de la société anonyme Centrale Automobile Strasbourg à l'encontre de la rectification opérée par l'administration fiscale et de l'avis de mise en recouvrement du 24 septembre 2014 ; AUX MOTIFS QUE « Sur la procédure Aux termes de l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, afin d'en restituer le véritable caractère, l'administration est en droit d'écarter, comme ne lui étant pas opposables, les actes constitutifs d'un abus de droit, soit que ces actes ont un caractère fictif, soit que, recherchant le bénéfice d'une application littérale des textes ou de décisions à l'encontre des objectifs poursuivis par leurs auteurs, ils n'ont pu être inspirés par aucun autre motif que celui d'éluder ou d'atténuer les charges fiscales que l'intéressé, si ces actes n'avaient pas été passés ou réalisés, aurait normalement supportées eu égard à sa situation ou à ses activités réelles. En l'espèce, l'administration n'a pas invoqué le caractère fictif de l'un quelconque des actes conclus en application de la convention du 15 septembre 2010. Elle n'a pas non plus dénoncé un montage constitutif d'une fraude à la loi, au sens du texte légal précité, c'est-à-dire l'utilisation de procédés légaux détournés de leur finalité dans le but exclusif de bénéficier d'un avantage fiscal. En effet, l'administration n'a pas prétendu que les actes passés, que ce soit le versement de la somme de 3 550 000 euros par la société CAS aux associés de la SCI, la souscription par ceux-ci à une augmentation de capital de la SCI à hauteur de 3 625 000 euros et la constitution d'un usufruit des parts sociales au profit de la société CAS, ne correspondaient pas à l'objectif économique recherché par les parties, à savoir le financement de la construction d'un immeuble sur le terrain appartenant à la SCI, au moyen de capitaux apportés en plus grande partie par la société CAS, sans attribution à celle-ci de nouvelles parts sociales de la SCI, afin que la répartition du capital social demeure inchangée entre les membres de la famille [N]. L'administration a seulement considéré que ces actes faisaient apparaître l'existence d'une cession de l'usufruit des parts sociales entre les associés de la SCI et la société CAS. Ce faisant, elle a rétabli la véritable qualification de l'opération, qui était au demeurant celle adoptée par les parties elles-mêmes dans l'acte notarié de reconnaissance de dette du 25 octobre 2010, la rectification ultérieure de cet acte pour les seuls besoins de la cause étant sans emport, outre qu'il n'y a pas lieu de s'arrêter à la distinction entre "constitution" et "cession" d'usufruit, comme il sera vu ci-après. La requalification d'un acte ne constituant pas la dénonciation d'un abus de droit lorsque l'acte requalifié n'a pas été détourné de sa finalité voulue par législateur et conclu dans un but exclusivement fiscal, l'administration n'était pas tenue, en l'espèce, de respecter la procédure prévue en cas d'abus de droit. La procédure est donc régulière et le jugement déféré doit être infirmé. Sur le fond. Aux termes de l'article 726, I, 2° du code général des impôts, les cessions de droits sociaux sont soumises à un droit d'enregistrement dont le taux est fixé à 5 % pour les cessions de participations dans les personnes morales à prépondérance immobilière. La constitution d'usufruit se distingue de la cession d'usufruit en ce qu'elle intervient concomitamment au démembrement de propriété, alors que la cession suppose que le démembrement existait antérieurement. Dans le premier cas, l'usufruit, qui était englobé dans la pleine propriété, est détaché de la nue propriété pour être cédé au bénéficiaire de la constitution d'usufruit. La constitution d'usufruit réalise donc bien une cession, en ce que la valeur de l'usufruit est transférée du patrimoine du constituant à celui de l'usufruitier. Elle entre donc dans les prévisions du texte fiscal précité applicable aux cessions de droits sociaux. Dès lors, il est sans incidence qu'en l'espèce, l'opération litigieuse ait consisté en une constitution d'usufruit et non en une cession d'un usufruit préexistant. Pour être taxable en vertu de l'article 726, I, du code général des impôts, la cession de droits sociaux doit correspondre au transfert effectif de la valeur des droits sociaux d'un patrimoine vers l'autre, moyennant le paiement d'un prix qui est l'assiette de la taxation. En l'espèce, il est incontestable que la valeur de l'usufruit des parts de la SCI GJH [Localité 3] a quitté le patrimoine des membres de la famille [N] pour rejoindre celui de la société CAS. Comme le fait observer l'administration, cette valeur (3 550 000 euros) a été comptabilisée par la société CAS dans ses actifs, dans un compte "titres immobilisés". Pour nier l'existence d'une cession, la société CAS fait valoir que la somme de 3 550 000 euros versée par elle n'est pas demeurée dans le patrimoine des associés de la SCI, qu'elle leur avait seulement été "confiée" pour souscrire à une augmentation de capital de la SCI et que, dès lors, il ne s'agissait pas d'un prix. L'opération consisterait ainsi en un apport à la SCI réalisé par la société CAS, par l'intermédiaire des associés, rémunéré par l'attribution de droits en usufruit sur les parts sociales. Cette analyse est erronée en ce qu'elle considère que les associés n'ont joué qu'un rôle de simple intermédiaire dans une opération qui concernait la SCI et la société CAS. Or, cette opération n'était pas neutre à leur égard. En effet, d'une part les associés se sont dépouillés de l'usufruit de leurs parts sociales, d'autre part la valeur nominale de leurs parts est passée, après réalisation de l'augmentation de capital de la SCI, de 100 euros à 36 350 euros. En outre, l'usufruit étant temporaire et limité à quinze ans, les associés ont vocation à récupérer à terme la pleine propriété des parts sociales, de sorte qu'ils sont les bénéficiaires ultimes du versement, par la société CAS, de la somme de 3 550 000 euros, laquelle constitue donc bien un prix, contrepartie de l'usufruit constitué en faveur de la société CAS. Vue sous l'angle des rapports entre les associés de la SCI et la société CAS, l'opération litigieuse réalise donc une cession de la valeur de l'usufruit des parts sociales de la SCI. Dès, lors, la rectification opérée par l'administration est fondée et il convient de débouter la société CAS de ses prétentions » (arrêt attaqué, pp. 4-6) ; ALORS QUE 1°) le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit clair et précis qui lui est soumis ; qu'en l'espèce, la convention conclue entre les associés de la SCI GJH [Localité 3] et la société Centrale Automobile Strasbourg le 15 septembre 2010 précise que la société CAS « confierait les fonds susvisés aux Membres de la famille [N] à charge pour ces derniers de souscrire à une augmentation de capital de la Société d'un montant global de 3.625.000 euros. En contrepartie, les Membres de la famille [N] constitueraient un usufruit temporaire sur les parts de la Société au profit de la CAS » (acte p. 2, antépénultième et pénultième alinéa) ; qu'il en résulte que cette convention avait pour objet d'organiser la réalisation d'un apport de fonds en vue d'une augmentation de capital au sein de la SCI GJH [Localité 3] en contrepartie d'un usufruit temporaire sur les parts sociales au profit de la société CAS ; qu'en retenant pourtant que cette convention réalisait une cession d'usufruit des parts sociales, la cour d'appel a dénaturé ladite convention, en violation du principe susvisé ; ALORS, subsidiairement, QUE 2°), la cession d'usufruit des parts sociales suppose le transfert d'un usufruit préalablement constitué en contrepartie d'un prix fixé entre les parties ; que ne constitue donc pas une cession d'usufruit la constitution d'usufruit réalisée en rémunération d'un apport de fonds dans le cadre d'une augmentation de capital d'une société ; qu'en affirmant que la constitution d'usufruit réaliserait une cession au seul prétexte que la valeur de l'usufruit aurait été transférée du patrimoine du constituant à celui de l'usufruitier, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions p. 10, al. 10), si la contrepartie de la constitution d'usufruit était un apport de fonds dans le cadre d'une augmentation de capital et non le versement d'un prix, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1583 du code civil et de l'article 726, I, 2° du code général des impôts ; ALORS, subsidiairement, QUE 3°), l'administration fiscale se fonde implicitement mais nécessairement sur le terrain de l'abus de droit lorsqu'elle entend soumettre à des droits d'enregistrement la cession de l'usufruit de parts sociales d'une société qu'elle estime avoir été dissimulée sous couvert de constitution d'usufruit ; qu'en jugeant que l'administration fiscale s'était bornée à rétablir la véritable qualification de l'opération, en considérant que les actes conclus en application de la convention du 15 septembre 2010 faisaient apparaître l'existence d'une cession de l'usufruit des parts sociales entre les associés de la SCI GJH [Localité 3] et la société Centrale Automobile Strasbourg (cf. arrêt attaqué, p. 5, §. 1er), en sorte qu'elle n'était pas tenue de respecter la procédure prévue en cas d'abus de droit (cf. arrêt attaqué, p. 5, §. 2), la cour d'appel a violé l'article L. 64 du livre des procédures fiscales.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 11 F-D Pourvoi n° S 20-21.117 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 Mme [Y] [L], épouse [K], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° S 20-21.117 contre l'arrêt rendu le 21 septembre 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant : 1°/ au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, domicilié en ses bureaux, pôle fiscal parisien 1, pôle juridictionnel judiciaire, [Adresse 1], agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, 2°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 2], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Tostain, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mme [L], de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et du directeur général des finances publiques, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Tostain, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 septembre 2020), le 21 octobre 2011, à la suite du contrôle de ses déclarations d'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) pour les années 2009 et 2010, Mme [L] a fait l'objet d'une proposition de rectification portant réintégration, dans la base imposable, de la valeur des participations détenues dans les sociétés BSA, Sofina, Jema 1 et Jema 2, au motif qu'elles ne constituaient pas des biens professionnels exonérés. 2. A la suite du rejet partiel de sa réclamation contentieuse, Mme [L] se prévalant des dispositions de l'article 885 O bis du code général des impôts, a assigné l'administration fiscale en décharge totale des suppléments d'impôts rappelés. Examen du moyen Enoncé du moyen 3. Mme [L] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à voir prononcer le dégrèvement des suppléments d'ISF, en droits et intérêts, mis à sa charge et maintenus au titre des années 2009 et 2010, alors : « 1°/ que l'article 885 O bis du code général des impôts, dans sa version applicable au cours des années en litige, subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de président du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et du reste expressément reconnu par l'administration fiscale dans ses conclusions d'appel que Mme [L] avait successivement perçu de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115 000 euros en 2003, 128 000 euros en 2004, 149 500 euros en 2005, 178 000 euros en 2006, 237 000 euros en 2007, 389 000 euros en 2008 et 403 000 euros en 2009, les parties ne s'opposant que sur la qualification juridique de ces sommes, puisque l'administration soutenait qu'elles représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du conseil de surveillance de la société BSA de Mme [L], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de président du conseil de surveillance ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions (article L. 225-84 du même code), la cour d'appel a constaté qu'au cours des années en litige, Mme [L] n'avait reçu aucune rémunération correspondant à des jetons de présence et que l'administration fiscale n'était pas fondée à opérer une telle requalification au vu d'un courrier interne de la société qui ne pouvait se substituer à l'assemblée générale de la société BSA, seule compétente pour décider d'une attribution de jetons de présence aux membres du conseil de surveillance ; que la cour d'appel a néanmoins considéré que, dès lors que le conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [L] une rémunération annuelle de 91 469 euros (600 000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91 469 euros perçue par Mme [L] au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée aux "montants versés réellement" par la société BSA en 2008 et 2009, soit 389 000 et 403 000 euros, était inférieure au seuil de la moitié du montant total des revenus à raison desquels l'intéressée était soumise à l'impôt sur le revenu, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'ISF des années 2009 et 2010 ; qu'en se prononçant de la sorte, cependant que ni l'administration ni Mme [L] n'avaient prétendu que les sommes de 389 000 et 403 000 euros versées par la société BSA à cette dernière au cours des années 2008 et 2009 auraient été composées de rémunérations de natures distinctes venant rétribuer des fonctions ou des services distincts et qu'il n'était en particulier soutenu par aucune des parties que ces sommes auraient été, fût-ce pour partie, composées de rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions en application de l'article L. 225-84 du code de commerce, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il ressortait des conclusions d'appel de l'administration fiscale et de celles de Mme [L] que les deux parties s'accordaient sur la circonstance que celle-ci avait perçu de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115 000 euros en 2003, 128 000 euros en 2004, 149 500 euros en 2005, 178 000 euros en 2006, 237 000 euros en 2007, 389 000 euros en 2008 et 403 000 euros en 2009 et ne s'opposaient que sur leur qualification juridique, l'administration soutenant que ces sommes représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du conseil de surveillance de la société BSA de Mme [L], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de président de ce conseil de surveillance ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel les sommes de 389 000 euros et 403 000 euros versées en 2008 et 2009 par la société BSA à Mme [L] n'auraient rémunéré sa fonction de présidente du conseil de surveillance qu'à hauteur d'un montant de 91 469 euros correspondant à la rémunération initiale qui lui avait été attribuée à ce titre lors de son entrée en fonction en 2000, sans provoquer les explications contradictoires des parties sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3°/ que l'article 885 O bis du code général des impôts, dans sa version applicable au cours des années en litige, subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de président du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les cédules qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et expressément admis par l'administration fiscale que les sommes de 389 000 euros et 403 000 euros perçues par Mme [L] en 2008 et 2009 avaient représenté dans leur intégralité une rémunération versée à l'intéressée par la société BSA ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions, la cour d'appel a considéré que, dès lors que le conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [L] une rémunération annuelle de 91 469 euros (600 000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91 469 euros convenue au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée aux "montants versés réellement" par la société BSA à hauteur de 389 000 euros en 2008 et 403 000 euros en 2009, n'en représentait que moins de la moitié, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'ISF des années 2009 et 2010 ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir pourtant elle-même relevé que Mme [L] n'avait reçu de la société BSA aucune rémunération correspondant à des jetons de présence au cours des années en litige, la cour d'appel, qui n'a ni déterminé la nature des sommes que la société BSA avait versées en 2008 et 2009 à Mme [L] au-delà du montant de 91 469 euros et jusqu'à hauteur des sommes de 389 000 euros et 403 000 euros, ni précisé la catégorie dans laquelle ces sommes étaient imposables au titre de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 885 O bis du code général des impôts. » Réponse de la Cour 4. Il résulte de l'article 885 O bis du code général des impôts, dans sa rédaction issue de la loi n° 2003-721 du 1er août 2003, applicable au litige, que les parts et actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés, de plein droit ou sur option, sont considérées comme des biens professionnels si leur propriétaire exerce de façon effective les fonctions de président du conseil de surveillance et perçoit à ce titre une rémunération normale, qui doit représenter plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l'article 62 du même code. 5. En premier lieu, saisie de la question de l'applicabilité aux titres détenus par Mme [L] du bénéfice de l'exonération de l'ISF prévu à l'article 885 O bis du code général des impôts, c'est sans méconnaître l'objet du litige, ni violer le principe de la contradiction, mais en se bornant à examiner, sans introduire de nouveaux éléments de fait dans le débat, si les conditions d'application de ce texte étaient réunies, que la cour d'appel a retenu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation de la valeur et de la portée des éléments de preuve, que Mme [L] ne justifiait avoir reçu, en 2008 et 2009, une rémunération rétribuant son activité de présidente du conseil de surveillance de la société BSA qu'à hauteur de la somme de 91 469 euros. 6. En second lieu, ayant constaté que Mme [L] soutenait avoir perçu de la société BSA, à titre de rémunération de ses fonctions de présidente du conseil de surveillance de cette société, les sommes de 389 000 euros, en 2008, et de 403 000 euros, en 2009, et retenu qu'elle ne justifiait avoir été rémunérée au titre desdites fonctions qu'à concurrence de la somme de 91 469 euros pour chacune de ces années, ce dont il ressortait que Mme [L] ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de ce que ses fonctions de présidente du conseil de surveillance de la société BSA avaient donné lieu à une rémunération représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels elle était soumise à l'impôt sur le revenu dans les catégories visées au 1°, alinéa 2, de l'article 885 O bis du code général des impôts, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, a légalement justifié sa décision. 7. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [L] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [L] et la condamne à payer au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, agissant sous l'autorité du directeur général des finances publiques, et au directeur général des finances publiques la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour Mme [L]. Madame [Y] [L], épouse [K], fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir déboutée de ses demandes tendant à voir prononcer le dégrèvement des suppléments d'impôt de solidarité sur la fortune, en droits et intérêts, mis à sa charge et maintenus au titre des années 2009 et 2010 ; 1. ALORS QUE l'article 885 O bis du code général des impôts dans sa version applicable au cours des années en litige subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de président du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les catégories qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et du reste expressément reconnu par l'administration fiscale dans ses conclusions d'appel (p. 8) que Mme [Y] [L] avait successivement perçu de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115.000 € en 2003, 128.000 € en 2004, 149.500 € en 2005, 178.000 € en 2006, 237.000 € en 2007, 389.000 € en 2008 et 403.000 € en 2009, les parties ne s'opposant que sur la qualification juridique de ces sommes, puisque l'administration soutenait qu'elles représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du Conseil de surveillance de la société BSA de Mme [L], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de président du Conseil de surveillance ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions (article L. 225-84 du même code), la cour d'appel a constaté qu'au cours des années en litige, Madame [L] n'avait reçu aucune rémunération correspondant à des jetons de présence et que l'administration fiscale n'était pas fondée à opérer une telle requalification au vu d'un courrier interne de la société qui ne pouvait se substituer à l'assemblée générale de la société BSA, seule compétente pour décider d'une attribution de jetons de présence aux membres du Conseil de surveillance : que la cour d'appel a néanmoins considéré que, dès lors que le Conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [L] une rémunération annuelle de 91.469 € (600.000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du Conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91.469 euros perçue par Mme [L] au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée aux « montants versés réellement » par la société BSA en 2008 et 2009, soit 389.000 et 403.000 euros, était inférieure au seuil de la moitié du montant total des revenus à raison desquels l'intéressée était soumise à l'impôt sur le revenu, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune des années 2009 et 2010 ; qu'en se prononçant de la sorte, cependant que ni l'administration, ni Mme [L], n'avait prétendu que les sommes de 389.000 et 403.000 euros versées par la société BSA à cette dernière au cours des années 2008 et 2009 auraient été composées de rémunérations de natures distinctes venant rétribuer des fonctions ou des services distincts et qu'il n'était en particulier soutenu par aucune des parties que ces sommes auraient été, fût-ce pour partie, composées de rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions en application de l'article L. 225-84 du code de commerce, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 2. ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, il ressortait des conclusions d'appel de l'administration fiscale (pp. 14-15) et de celles de Mme [Y] [L] (pp. 8 et s.) que les deux parties s'accordaient sur la circonstance que celle-ci avait perçue de la part de la société BSA des rémunérations à hauteur des sommes de 115.000 € en 2003, 128.000 € en 2004, 149.500 € en 2005, 178.000 € en 2006, 237.000 € en 2007, 389.000 € en 2008 et 403.000 € en 2009 et ne s'opposaient que sur leur qualification juridique, l'administration soutenant que ces sommes représentaient dans leur intégralité des jetons de présence ne rémunérant que la qualité de membre du Conseil de surveillance de la société BSA de Mme [L], tandis que celle-ci faisait valoir que ces sommes constituaient la rémunération de sa fonction de président de ce Conseil de surveillance ; qu'en relevant d'office le moyen selon lequel les sommes de 389.000 € et 403.000 € versées en 2008 et 2009 par la société BSA à Mme [L] n'auraient rémunéré sa fonction de présidente du conseil de surveillance qu'à hauteur d'un montant de 91.469 euros correspondant à la rémunération initiale qui lui avait été attribuée à ce titre lors de son entrée en fonction en 2000, sans provoquer les explications contradictoires des parties sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 3. ALORS, en toute hypothèse, QUE l'article 885 O bis du code général des impôts dans sa version applicable au cours des années en litige subordonne la qualification de biens professionnels des parts ou actions de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés à la condition que la fonction de président du conseil de surveillance exercée par leur propriétaire donne lieu à une rémunération normale représentant plus de la moitié des revenus à raison desquels l'intéressé est soumis à l'impôt sur le revenu dans les cédules qu'il énumère ; qu'en l'espèce, il était constant et expressément admis par l'administration fiscale que les sommes de 389.000 € et 403.000 € perçues par Mme [L] en 2008 et 2009 avaient représenté dans leur intégralité une rémunération versée à l'intéressée par la société BSA ; qu'après avoir justement énoncé que le président du conseil de surveillance d'une société anonyme peut percevoir trois types de rémunérations, à savoir des jetons de présence fixés par l'assemblée générale, en tant que membre du conseil de surveillance (article L. 225-83 du code de commerce), une rémunération en contrepartie de l'activité exercée en tant que président de ce conseil (article L. 225-81 du même code) et, enfin, des rémunérations exceptionnelles pour mandats ou missions, la cour d'appel a considéré que, dès lors que le Conseil de surveillance avait, par délibération du 3 novembre 2000, attribué à Mme [L] une rémunération annuelle de 91.469 € (600.000 francs) en contrepartie de ses fonctions de présidente du Conseil de surveillance, sans en indexer le montant, ni renouveler et mettre à jour cette rémunération au terme de son premier mandat, il convenait d'en déduire que cette rémunération annuelle de 91.469 euros convenue au titre de sa fonction de présidente du conseil de surveillance, rapportée aux « montants versés réellement » par la société BSA à hauteur de 389.000 € en 2008 et 403.000 € en 2009, n'en représentait que moins de la moitié, de sorte que cette dernière ne pouvait se prévaloir de la qualification de biens professionnels au titre de l'impôt de solidarité sur la fortune des années 2009 et 2010 ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir pourtant elle-même relevé que Mme [L] n'avait reçu de la société BSA aucune rémunération correspondant à des jetons de présence au cours des années en litige, la cour d'appel, qui n'a ni déterminé la nature des sommes que la société BSA avait versées en 2008 et 2009 à Mme [L] au-delà du montant de 91.469 euros et jusqu'à hauteur des sommes de 389.000 € et 403.000 €, ni précisé la catégorie dans laquelle ces sommes étaient imposables au titre de l'impôt sur le revenu des personnes physiques, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 885 O bis du code général des impôts.
INCA/JURITEXT000046990071.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 17 F-D Pourvoi n° H 20-17.658 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 1°/ La société Fiducial gérance, société anonyme, 2°/ la société Fiducial Real Estate, société anonyme, ayant toutes deux leur siège [Adresse 2], ont formé le pourvoi n° H 20-17.658 contre l'arrêt rendu le 18 mai 2020 par la cour d'appel de Versailles (12e chambre), dans le litige les opposant à M. [P] [I], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation. M. [I] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Les demanderesses au pourvoi principal invoquent, à l'appui de leur recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat des sociétés Fiducial gérance et Fiducial Real Estate, de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. [I], et l'avis de M. Lecaroz, avocat général, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles,18 mai 2020), en application d'une lettre d'engagement du 30 septembre 2010, signée avec la société Uffi Participations, M. [I] est devenu, à compter du 4 novembre 2010, président directeur général de la société anonyme Uffi Real Asset Management (la société Uffi Ream) moyennant une rémunération annuelle fixe de 200 000 euros et une part variable pouvant aller jusqu'à 100 000 euros. Par avenants des 11 octobre 2010 et 25 août 2011, une indemnité contractuelle de rupture a été stipulée au bénéfice de M. [I]. Par protocole du 23 mars 2012, la société Uffi Participations à cédé les actions de la société Uffi Ream à la société Fiducial Real Estate, le protocole stipulant que cette dernière reprenait les engagements que la société Uffi Participations avait souscrits à l'égard de M. [I]. La société Uffi Ream, devenue Fiducial gérance, ayant été transformée en société anonyme avec directoire, M. [I] a été nommé, le 30 septembre 2013, président du directoire. La société Fiducial gérance redevenant une société anonyme avec conseil d'administration, M. [I] a été désigné, le 30 juin 2015, directeur général. 2. Le conseil d'administration de la société Fiducial gérance ayant mis fin à son mandat, M. [I] a assigné en référé les sociétés Fiducial gérance et Fiducial Real Estate en paiement de l'indemnité de rupture devant le président d'un tribunal de commerce, lequel s'est déclaré « incompétent ». Les sociétés Fiducial Real Estate et Fiducial gérance ont ensuite assigné M. [I] devant un tribunal de commerce aux fins de voir constater l'absence de ratification de la lettre d'engagement par l'assemblée générale de la société Uffi Ream, dire que le versement d'une indemnité de rupture ne pouvait leur être opposé et obtenir la condamnation de M. [I] à leur rembourser la somme de 254 093 euros au titre des rémunérations indûment perçues pour l'année 2012. M. [I] s'est opposé à cette demande. Examen des moyens Sur le premier moyen du pourvoi principal et sur le moyen du pourvoi incident, ci-après annexés 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le troisième moyen du pourvoi principal Enoncé du moyen 4. La société Fiducial gérance et la société Fiducial Real Estate font grief à l'arrêt de limiter à 253 093 euros la somme que M. [I] doit restituer à la société Fiducial gérance au titre de la rémunération perçue en 2012, alors « que la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a indiqué dans ses motifs que M. [I] devait restituer à la société Fiducial gérance la somme de 254 093 euros ; qu'en limitant néanmoins cette somme, dans son dispositif, au seul montant de 253 093 euros, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 5. La contradiction alléguée par le moyen procède d'une erreur purement matérielle commise dans la rédaction de l'arrêt, dont la rectification sera ci-après ordonnée en application de l'article 462 du code de procédure civile. 6. Le moyen ne peut donc être accueilli. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal Enoncé du moyen 7. La société Fiducial gérance et la société Fiducial Real Estate font grief à l'arrêt de dire que la société Fiducial gérance doit rembourser à M. [I] la somme de 253 093 euros en application de l'action in rem verso, alors « que la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de ses conclusions d'appel, M. [I] demandait la réformation du jugement entrepris, à la seule exception du chef [de dispositif] ayant condamné la société Fiducial Real Estate à lui payer la somme de 290 700 euros au titre de l'indemnité de départ, et ne demandait pas de condamnation de la société Fiducial gérance à lui rembourser une somme en application de l'action in rem verso ; qu'en condamnant la société Fiducial gérance à rembourser à M. [I] la somme de 253 093 euros sur le fondement de l'action in rem verso, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 954, alinéa 3, du code de procédure civile : 8. Selon ce texte, la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions. 9. Pour condamner la société Fiducial gérance à rembourser à M. [I] la somme de 254 093 euros, l'arrêt, après avoir retenu que ce dernier avait perçu la même somme en 2012 au titre de la rémunération de ses fonctions de président directeur général, mais que cette rémunération n'ayant pas été décidée par le conseil d'administration, en violation des dispositions des articles L. 225-47 et L. 225-53 du code de commerce, la société Fiducial gérance était en droit d'en réclamer le remboursement, retient que M. [I] est fondé à en obtenir le remboursement sur le fondement de l'enrichissement sans cause. 10. En statuant ainsi, en accueillant une prétention qui ne figurait pas dans le dispositif des conclusions de M. [I], la cour d'appel a violé le texte susvisé. Et sur le quatrième moyen, pris en ses trois branches, du pourvoi principal Enoncé du moyen 11. La société Fiducial gérance et la société Fiducial Real Estate font grief à l'arrêt de condamner la société Fiducial gérance à verser à M. [I] la somme de 75 000 euros au titre de sa part variable de rémunération, alors : « 1°/ que le conseil d'administration de la société détermine la rémunération du président ; qu'en l'espèce, il était constant que M. [I] avait été président directeur général de la société Uffi Ream, devenue Fiducial gérance, jusqu'au 30 septembre 2013 ; que pour admettre le principe d'une rémunération variable due par la société Fiducial gérance à M. [I], et condamner la société à payer à ce titre la somme de 75 000 euros, la cour d'appel s'est fondée sur les stipulations de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 de la société Uffi Participations ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence, qui était contestée, d'une décision du conseil d'administration de la société Uffi Ream, devenue Fiducial gérance, déterminant une rémunération variable au bénéfice de son président directeur général M. [I], la cour d'appel a violé l'article L. 225-47 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige ; 2°/ que le conseil de surveillance fixe le mode et le montant de la rémunération de chacun des membres du directoire qu'il a nommés ; qu'en l'espèce, il était constant que M. [I] avait été président du directoire de la société Fiducial gérance, du 30 septembre 2013 au 30 juin 2015 ; que pour admettre le principe d'une rémunération variable due par la société Fiducial gérance à M. [I], et condamner la société à payer à ce titre la somme de 75 000 euros, la cour d'appel s'est fondée sur les stipulations de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 de la société Uffi Participations ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence, qui était contestée, d'une décision du conseil de surveillance de la société Fiducial gérance déterminant une rémunération variable au bénéfice de son président du directoire M. [I] la cour d'appel a violé l'article L. 225-63 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige ; 3°/ que le conseil d'administration de la société détermine la rémunération du directeur général ; qu'en l'espèce, il était constant que M. [I] avait été directeur général de la société Fiducial gérance, du 30 juin 2015 au 30 juin 2016 ; que pour admettre le principe d'une rémunération variable due par la société Fiducial gérance à M. [I], et condamner la société à payer à ce titre la somme de 75 000 euros, la cour d'appel s'est fondée sur les stipulations de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 de la société Uffi Participations ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence, qui était contestée, d'une décision du conseil d'administration de la société Fiducial gérance déterminant une rémunération variable au bénéfice de son directeur général M. [I], la cour d'appel a violé l'article L. 225-53 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 12. M. [I] conteste la recevabilité du moyen. Il prétend qu'il est contraire aux écritures d'appel des sociétés Fiducial gérance et Fiducial Real Estate, qui soutenaient que le conseil d'administration et le conseil de surveillance de la société Uffi Ream, devenue Fiducial gérance, avaient admis le principe d'une rémunération variable de M. [I]. 13. Cependant, le moyen, qui soutient que la cour d'appel n'a pas constaté l'existence de décisions du conseil d'administration et du conseil de surveillance de la sociétés Uffi Ream, devenue Fiducial gérance, attribuant une rémunération variable en exécution de l'engagement souscrit au bénéfice de M. [I] dans les conditions prévues par la lettre d'engagement du 30 septembre 2010, n'est pas contraire aux écritures d'appel des sociétés Fiducial gérance et Fiducial Real Estate, par lesquelles celles-ci faisaient valoir que lesdits conseils d'administration et de surveillance avaient uniquement décidé d'attribuer à M. [I] une part variable représentant un treizième mois. 14. Le moyen est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu les articles L. 225-47 et L. 225-63 du code de commerce, dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 : 15. Il résulte du premier de ces textes que le conseil d'administration d'une société anonyme a une compétence exclusive pour déterminer la rémunération du président. 16. Il résulte du second que le conseil de surveillance a une compétence exclusive pour déterminer la rémunération des membres du directoire. 17. Pour condamner la société Fiducial gérance à verser à M. [I] la somme de 75 000 euros au titre de sa part variable de rémunération pour les années 2013 à 2015, l'arrêt retient qu'il ressort de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 que le principe de versement d'une part variable complémentaire de rémunération de M. [I] a été pris à l'initiative de la société Uffi Participations, qu'elle devait être d'un montant annuel brut maximum de 100 000 euros, déterminée sur la base de critères quantitatifs et qualitatifs définis ultérieurement et devait être payable un mois après l'approbation des comptes. Il en déduit que les sociétés Fiducial gérance et Fiducial Real Estate ne peuvent contester le principe de son versement. 18. En statuant ainsi, après avoir constaté que M. [I] avait été président directeur général de la société Uffi Ream jusqu'au 30 septembre 2013, puis président du directoire de cette société, devenue Fiducial gérance, du 30 septembre 2013 au 30 juin 2015, enfin directeur général de la même société du 30 juin 2015 au 30 juin 2016, la cour d'appel, qui s'est fondée sur la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 sans constater l'existence de décisions du conseil d'administration et du conseil de surveillance de ladite société déterminant la rémunération variable de M. [I] dans les conditions prévues par cette lettre d'engagement, a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : RECTIFIE l'arrêt n° RG 18/05463 rendu le 18 mai 2020 par la cour d'appel de Versailles ; REMPLACE, dans son dispositif, « Dit que M. [I] doit restituer à la société Fiducial Gerance la somme de 253 093 euros à la société Fiducial gérance au titre de la rémunération 2012 » par « Dit que M. [I] doit restituer à la société Fiducial gérance la somme de 254 093 euros à la société Fiducial gérance au titre de la rémunération 2012 » ; DIT que le présent arrêt sera transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt rectifié ; REJETTE le pourvoi incident ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il condamne la société Fiducial gérance à verser à M. [I] la somme de 75 000 euros au titre de sa part variable de rémunération, et en ce qu'il dit que la société Fiducial gérance doit rembourser à M. [I] la somme de 254 093 euros en application de l'action de in rem verso et statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 18 mai 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris ; Condamne M. [I] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [I] et le condamne à payer à la société Fiducial gérance et la société Fiducial Real Estate la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour les sociétés Fiducial gérance et Fiducial Real Estate. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la société Fiducial Real Estate à payer à M. [P] [I] la somme en principal de 290 700 euros au titre de l'indemnité de départ, AUX MOTIFS QUE « Sur l'inexistence de l'engagement litigieux : Par lettre du 30 septembre 2010, la société Uffi Participations propose notamment à M. [I] d'intégrer le groupe Uffi sous les conditions suivantes : -pour une durée indéterminée à compter de novembre 2010 ou à la date où il sera délié de tout autre engagement, -pour une rémunération forfaitaire fixe annuelle brute fixe au titre des différentes fonctions de mandataire social de 200000 € payable en 13 mensualités, - une rémunération complémentaire variable d'un montant brut maximum de 100000 € qui sera déterminée sur la base de critères quantitatifs et qualitatifs qui seront définis ultérieurement et payable un mois après l'approbation des comptes. Il est indiqué au bas de la lettre d'engagement signée de M. [X] [O] président et de M. [J] [T] directeur général de la société Uffi Participations et de M. [I] que les termes de la présente proposition seront ratifiés, une fois celle-ci acceptée, par la prochaine assemblée générale de la société Uffi R.e.a.m. Par annexe au contrat du 30 septembre 2010 datée du 11 octobre 2010, M. [O] et M. [T] de la société Uffi Participations précisent que l'indemnité contractuelle de rupture sera : -après six mois de présence dans l'entreprise et jusqu'à 24 mois de présence, égale à douze mois de rémunération fixe brute, -après 24 mois de présence , sera égale à 24 mois de rémunération fixe calculée à l'identique de la clause précédente. Il est précisé que l'indemnité ne sera versée qu'en cas de rupture du mandat à l'initiative de la société (ou de toutes sociétés du Groupe ) dont M. [I] sera le mandataire social hors les cas de faute grave et lourde ou force majeure. L'avenant du 25 août 2011, prévoit que l'indemnité est ramenée à 18 mois de rémunération. Il est indiqué que ces dispositions annulent et remplacent la mesure qui était applicable pour tout départ non volontaire intervenant dans un délai supérieur à 24 mois à compter de l'arrivée chez UFFI. Il ressort du protocole de cession du 23 mars 2012 entre la société Uffi Participations et la société Fiducial Royal Estate que la société Fiducial Royal Estate déclare reprendre à sa charge l'intégralité des engagements financiers souscrits par le cédant 'Uffi Participations' envers M. [I] et figurant en annexe 5. L'annexe 5 regroupe les engagements du Cédant à l'égard de M. L. s'agissant des engagements des 30 septembre 2010, 11 octobre 2010 et 25 août 2011. La société Fiducial Royal Estate fait valoir que la société Uffi Participations n'était pas engagée dès lors qu'aucune assemblée générale de la société Uffi Ream n'est intervenue pour ratifier les termes de la rémunération de M. [I], qu'elle ne peut être davantage tenue que la société Uffi Participations d'une indemnité de rupture dont les modalités devaient être ratifiées par la société Uffi R.e.a.m, qu'elle était persuadée que cette ratification était intervenue , que les conditions posées par les articles L 225-47 alinéa 1 du code de commerce et L 225-53 alinéa 3 du code de commerce n'ont pas été respectées lesquelles disposent que la rémunération du président ou du directeur général est fixée en conseil d'administration, que les indemnités de départ sont soumises aux conditions fixées aux articles L 225-46 et L 225-84 du code de commerce. Si la société Uffi Ream devenue Fiducial Gerance ne peut être tenue des engagements souscrits par la société Uffi Participations, en revanche la société Fiducial Real Estate en sa qualité de cessionnaire au protocole de cession s'est engagée à reprendre les engagements de la société Uffi Participations pris envers M. [I]. Elle fait état de ce que cet engagement n'est pas valable dans la mesure où il n'y a pas eu de ratification par le conseil d'administration de la société Uffi Ream alors qu'en application des articles L 225-47 et suivants du code de commerce les conventions sont soumises à la ratification par le conseil d'administration de la société. Contrairement à ce que soutient M. [I], ces dispositions s'appliquent aux sociétés anonymes y compris les sociétés non cotées et donc à la société Uffi Ream devenue Fiducial Gerance. L'article L 225-47 du code de commerce dispose que le conseil d'administration élit parmi ses membres un président qui est à peine de nullité de la nomination une personne physique. Il détermine sa rémunération 'dans les conditions prévues à l'article L 225-37-2. L'article L 225-37-2 énonce les conditions dans lesquelles les rémunérations et tous autres avantages attribuables aux président, directeurs généraux en raison de leur mandat à savoir que le projet de résolution du conseil d'administration doit être soumis à l'approbation par l'assemblée générale. Il convient de constater que les rémunérations et autres indemnités accordées à M. [I] par la société Uffi Participations n'ont été ratifiées ni par le conseil d'administration, ni par une assemblée générale de la société Uffi Ream, le procès-verbal de l'assemblée générale du 29 décembre 2010 se limitant à ratifier la cooptation de M. [I] en qualité d'administrateur ne remplissant pas les conditions requises alors que celles-ci sont soumises au régime des conventions réglementées. Contrairement aux dispositions de l'article L225-38 du même code concernant la convention intervenant directement ou par personne interposée les conventions intervenues entre la société Uffi Participations et M. [I] n'ont été soumises à aucune autorisation préalable du conseil d'administration. Si M. [I] soutient que des délibérations du conseil d'administration sont intervenues, il expose ne pas en avoir la copie n'y ayant pas été convié de sorte qu'en tout état de cause, aucune preuve n'est rapportée de ce qu'une autorisation est intervenue. La société Fiducial Real Estate soutient qu'elle ne peut pas être tenue davantage que la société Uffi Participations qui selon elle n'était pas engagée du fait de l'absence de ratification par Uffi Ream, ne pouvant dès lors transmettre une charge financière qu'elle n'avait pas. Elle invoque l'article 8 du contrat de cession qui stipule qu'aucune autorisation ou formalité n'est nécessaire à l'accomplissement des opérations qui y sont projetées et en déduit que le contrat ne lui est pas non plus applicable puisque la ratification fait défaut. Elle fait valoir que la prise en charge de l'indemnité de rupture par elle-même du fait de son inopposabilité à la société Fiducial Gerance serait contraire à son intérêt social dès lors que cette charge la conduirait à supporter une charge indue par sa filiale qui cause un préjudicie aux actionnaires de Fiducial Real Estate. Mais comme le relève M. [I], il peut être déduit du même article 8 que la société Uffi Participations a déclaré que toutes les formalités étaient en règle et que dès lors l'absence de ratification ne peut être invoquée au regard des affirmations de la société Uffi Participations. Il ressort de ce qui précède que c'est en toute connaissance de cause que la société Fiducial Real Estate a repris les engagements de la société Uffi Participations à l'égard de M. [I] ceux-ci figurant à l'annexe 5 du protocole de cession et elle ne peut dès lors alléguer d'un prétendu préjudice financier. Elle doit respecter ses engagements à l'égard de M. [I] sans plus pouvoir critiquer les conditions du contrat initial. En tout état de cause, les sociétés appelantes demandent que 'l'engagement juridique pris par M. [O] ne peut produire d'effet juridique et que la société Fiducial Gerance n'est pas redevable de l'indemnité de départ accordée par le tribunal à M. [I] ' mais comme il a été vu précédemment, la société Fiducial Gerance n'est pas tenue de verser l'indemnité de départ, seule la société Fiducial Real Estate y étant tenue. Au surplus, M. [I] fait valoir que si l'absence d'approbation par le conseil d'administration et l'assemblée générale était susceptible d'entraîner la nullité des engagements souscrits, l'action en nullité se prescrit par trois ans à compter de la date de la convention en application de l'article L 225-42 du code de commerce, les sociétés appelantes lui opposant l'adage selon lequel 'si l'action est prescriptible, l'exception est perpétuelle'. La discussion est inopérante sur ce point dans la mesure où la cour constate que les sociétés appelantes ne tirent pas comme conséquence de l'absence de ratification la nullité des engagements conclus et repris dans l'annexe 5 du protocole de cession dans le dispositif de leurs dernières conclusions. Elles ne font pas en outre état des conséquences dommageables pour elles alors que c'est une condition posée par l'article L 225-47 du code de commerce pour que la nullité soit encourue. Il convient donc en conséquence de retenir que la société Fiducial Real Estate a repris les engagements de la société Uffi Participations auxquels elle s'était engagée à l'égard de M. [I], que les sociétés Uffi Participations et Uffi Ream font partie du même groupe Uffi, que pour se soustraire au versement d'une indemnité de départ, la société Fiducial Real Estate ne peut invoquer l'absence de ratification par le conseil d'administration et même par l'assemblée générale de la société Uffi Ream dans la mesure où elle s'est portée fort des engagements de la société Uffi Participations à l'égard d'un tiers en la personne de M. [I]. En outre si M. [I] ne démontre pas que les indemnités allouées caractérisaient une condition substantielle de son accord, il n'en demeure pas moins que le groupe Uffi par l'intermédiaire de la société Uffi Participations prenait le soin de noter 'que conscient du caractère exposé du poste de Président Directeur Général d'Uffi ream, de votre investissement personnel dans ces fonctions et des conséquences néfastes qu'une séparation à l'initiative du Groupe Uffi serait susceptible d'engendrer, ce préjudice moral et de carrière sera réparé par le versement d'une indemnité contractuelle de rupture'. Sur la rupture du mandat ou son non-renouvellement : Les sociétés appelantes font valoir qu'il ressort de la lettre du 25 août 2011 que l'indemnité était prévue au cas de départ non volontaire, qu'il ne s'agit pas en l'espèce de volonté de la part de la société Fiducial Gerance de mettre fin au contrat en cours mais simplement d'un contrat qui est arrivé à échéance, qu'il convient de se référer à la lettre du 11 octobre 2010 qui prévoit une indemnité de rupture au cas d'une séparation à l'initiative du Groupe Uffi , étant ajouté que cette indemnité sera versée qu'en cas de 'rupture de votre mandat de la société hors les cas de faute lourde et de faute grave ou force majeure'. Dès lors, elles en déduisent que les notions de rupture et de non-renouvellement sont distinctes, que M. [I] n'aurait pas droit en l'espèce à l'indemnité de rupture qui était prévue dans la mesure où son mandat est seulement arrivé à échéance et n'a pas été renouvelé. M. [I] rétorque que le terme 'rupture' ne s'oppose pas à celui de 'non renouvellement', le terme rupture étant employé dans son sens commun, 'tout départ non volontaire' étant évoqué. Il ressort du préambule de la lettre du 11 octobre 2010 que l'indemnité contractuelle de rupture est prévue constatant 'le caractère exposé du poste de président de directeur général d'Uffi Ream, de l'investissement personnel dans les fonctions et des conséquences néfastes qu'une séparation serait susceptible d'engendrer à l'initiative du groupe Uffi', que dès lors, celle-ci est versée pour compenser les aléas et difficultés à venir. L'engagement souscrit doit donc être interprété au regard de la commune intention des parties. Il convient de considérer que le non renouvellement correspond à un départ non volontaire, que le terme rupture employé dans la lettre du 11 octobre 2010 n'est pas littéralement repris dans l'avenant du 25 août 2011 et ce même s'il est expressément prévu dans la lettre du 11 octobre 2010 l'envoi d'une lettre indiquée comme étant de rupture. De plus, c'est à juste titre que les premiers juges ont considéré que M. [I] étant nommé pour des mandats renouvelables d'un an, les engagements pris sur le versement d'une indemnité seraient sans effet si l'indemnité ne devait pas être versée au cas de non renouvellement de mandat. En conséquence, le non renouvellement du mandat étant à l'initiative du groupe Uffi, M. [I] doit pouvoir prétendre au versement d'une indemnité s'agissant d'un départ non volontaire n'ayant pas lieu de s'arrêter à la lettre du terme 'rupture'. Sur la caducité de l'engagement : Les sociétés appelantes font valoir que l'engagement du 30 septembre 2010 avait été pris à l'égard de M. [I] en qualité de président directeur général de la société Uffi Ream, que suite à l'adoption du régime du directoire et du conseil de surveillance à l'issue de la fusion absorption de la société Uffi Ream par la société Fiducial Gerance M. [I] est devenu président du directoire. Elles en concluent que les engagements pris auprès de M. [I] en qualité de président directeur général sont devenus caducs d'autant que les nouveaux mandats de M. [I] étaient à durée déterminée. Cependant, il convient de rappeler que dans le cadre du protocole de cession du 23 mars 2012, la société Fiducial Real Estate s'engage à la date de réalisation à reprendre à sa charge les engagements souscrits par le cédant envers M. [I], que les sociétés appelantes ne peuvent soutenir dès lors que la qualité de M. [I] ayant changé suite à la fusion absorption les engagements souscrits seraient devenus caducs sauf à ajouter une condition qui n'est pas prévue par le contrat. En conséquence, il ressort de ce qui précède que la société Fiducial Real Estate est tenue de régler à M. [I] le montant de l'indemnité de non renouvellement de son mandat. Sur la demande en paiement de l'indemnité de non renouvellement : M. [I] conclut à l'infirmation du jugement entrepris qui a fixé son indemnité de non renouvellement de mandat à la somme de 200000 € alors qu'il estime qu'elle doit être fixée à 450000 € soit (300000 € / 12) x18 mois dans la mesure où il convient de prendre en compte tant la part fixe de sa rémunération que la part variable. Il ressort de l'annexe au contrat du 30 septembre 2019 datée du 11 octobre 2010 que l'indemnité contractuelle de rupture est fixée 'après six mois de présence dans l'entreprise jusqu'à 24 mois de présence, à 12 mois de rémunération fixe brute (ceci n'inclura pas les rémunérations complémentaires garanties ou variables qui pourront vous être versées). Il est précisé dans l'avenant du 25 août 2011 que le montant de l'indemnité est portée à 18 mois de rémunération, les autres dispositions de l'annexe restant inchangées. M. [I] ne peut prétendre qu'il fallait prendre en compte au terme de la lettre du 25 août 2011 la totalité de la rémunération (part fixe et part variable) dans la mesure où aucune précision n'était donnée quant à l'assiette de ces 18 mois alors qu'il est expressément précisé que les autres dispositions du 10 octobre 2010 restent inchangées. C'est donc à juste titre que les premiers juges ont fixé L'indemnité de départ à la charge de la société Fiducial Real Estate à la somme de 290700 €. Le jugement est confirmé de ce chef », ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT et PARTIELLEMENT ADOPTES QUE « Sur la condition suspensive attachée à la validité de l'indemnité de Rupture : Attendu que FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE demandent à ce tribunal de juger que le droit à une indemnité contractuelle de rupture dont M. [I] cherche à se prévaloir était subordonné à une condition suspensive, en l'occurrence sa ratification par la prochaine assemblée générale d'UFFI REAM, et que faute d'une telle ratification l'engagement litigieux a failli, Attendu que M. [I] fait valoir qu'en l'espèce la ratification par l'assemblée générale de d'UFFI REAM n'est pas une condition suspensive mais une simple modalité d'exécution sans effet sur l'exécution du contrat, Attendu que l'article 1134 ancien du code civil dispose que « Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites... Elles doivent être exécutées de bonne foi », Attendu que l'obligation contractée sous une condition suspensive est celle qui dépend ou d'un événement futur et incertain, ou d'un événement actuellement arrivé, mais encore inconnu des parties. Dans le premier cas, l'obligation ne peut être exécutée qu'après l'événement. Dans le second cas, l'obligation a son effet du jour où elle a été contractée. Attendu que par une lettre en date du 30 septembre 2010, co-signée par le président et le directeur général d'UFFI PARTICIPATIONS, MM. [V] [O] et [J] [T], M. [I] s'est vu proposé de rejoindre le Groupe UFFI en qualité de président directeur général d'UFFI REAM, cette lettre fixant notamment son statut et les conditions de sa rémunération et ses possibilités d'investir au sein du Groupe UFFI, Attendu que par un document intitulé « Annexe au contrat du 30 septembre 2010 » en date du 11 octobre 2010, co-signé par le président et le directeur général d'UFFI PARTICIPATIONS, M. [I] s'est vu reconnaître le droit à une « « indemnité de départ » et que par lettre en date du 25 août 2011 adressée par M. [I] à ces derniers ceux-ci ont donné leur accord pour que le montant de cette indemnité fixé par « l'annexe » du 10 octobre 2010 soit ramené à 18 mois de rémunération, Attendu que la lettre du 30 septembre 2010 stipule dans un paragraphe autonome - typographiquement séparé des termes de la proposition de statut et de rémunération par un jardin - « Que les termes de la présente proposition seront ratifiés, une fois que vous l'aurez acceptée, par la prochaine assemblée générale de la société UFFI REAM. La présente proposition restera valable jusqu'au 15 octobre 2010. Passé cette date, faute d'acceptation elle deviendra caduque de plein droit », Attendu que M. [I] a été nommé président directeur général d'UFFI REAM le 4 novembre 2010 après avoir été coopté administrateur et que cette cooptation a été, conformément aux dispositions du code de commerce, ratifiée par l'assemblée générale d'UFFI REAM, Attendu que la lettre du 30 septembre 2010, son annexe du 11 octobre 2010 et l'avenant du 25 août 2011 forment un tout qui définit le statut et les conditions de rémunération et autres avantages accordés à M. [I] à raison de l'exercice de son mandat social au sein du Groupe UFFI, Attendu que la lettre du 25 août 2011 avenant à l'accord du 10 octobre 2010 ne fait nulle mention d'une obligation de ratification, Attendu que l'assemblée générale d'une société anonyme non cotée n'est pas compétente pour se prononcer sur les éléments de rémunération des dirigeants mandataires sociaux comme le souligne dans leurs conclusions les demanderesses, pas plus qu'elle n'est compétente pour nommer le président directeur général de la société, Attendu que la lettre du 30 septembre 2010 qui définit notamment le statut de M. [I], a reçu application notamment en ce qui concerne ses dispositions relatives à la nomination de M. [I], en tant que président directeur général d'UFFI REAM et à sa rémunération, qu'en conséquence la ratification de ses termes par l'assemblée générale des actionnaires d'UFFI REAM n'était pas constitutive d'une condition suspensive, mais était une simple modalité d'exécution sans effet sur le contrat, En conséquence le tribunal déboutera les défenderesses de leur demande au titre d'un défaut de ratification, Sur le défaut d'autorisation des conseils d'administration d'UFFI REAM et d'UFFI PARTICIPATIONS du versement d'une Indemnité de Rupture : Attendu que FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE font valoir que l'engagement de versement de l'Indemnité de Rupture n'a été autorisé ni par le conseil d'administration d'UFFI REAM/FIDUCIAL GERANCE, ni par celui d'UFFI PARTICIPATIONS ou celui de FIDUCIAL REAL ESTATE, et qu'en conséquence il ne leur est pas opposable, Attendu que l'article 225-42-1 du code de commerce prévoit que c'est dans les seules sociétés cotées que les engagements pris au bénéfice de leurs présidents, directeurs généraux par la société elle-même ou toute société qui la contrôle, et correspondant à des indemnités ou des avantages dus à raison de la cessation de ces fonctions, sont soumis aux dispositions des articles L.225-38, L 225-40 à L 225-42 dudit code, Attendu que le tribunal relève de la lecture de l'annexe du 10 octobre 2010 que l'Indemnité de Rupture : - a pour finalité de réparer « des conséquences néfastes qu'une séparation à l'initiative du Groupe UFFI serait susceptible d'engendrer », - « ne sera versée qu'en cas de rupture de ... mandat à l'initiative de la société (ou de toutes sociétés du Groupe dont vous seriez mandataire social) », Attendu que cet accord a été signé, comme l'avenant du 25 août 2011, par MM. [O] et [T], respectivement président et directeur général d'UFFI PARTICIPATIONS, agissant au nom et pour le compte de cette dernière société, Attendu qu'il ressort du texte de ces accords qu'UFFI PARTICIPATIONS, société faîtière du Groupe UFFI, s'est engagée non pas à se porter fort du versement de l'Indemnité de Rupture par UFFI REAM ou de la reprise de cet engagement par cette dernière, mais à verser elle-même cette indemnité à M. [I] au cas où il viendrait à sortir du Groupe UFFI à son initiative, Attendu qu'UFFI REAM n'étant pas une société dont les actions sont inscrites sur un marché réglementé cet engagement de versement d'une Indemnité de Rupture à son président a pu être valablement pris par UFFI PARTICIPATIONS, sa société mère, sous la seule signature conjointe du président et du directeur général de cette dernière, Attendu que le paragraphe « 4. 5 Reprise des engagements du Cédant par le Cessionnaire » du protocole de cession du 23 mars 2012 stipule que « à la date de réalisation, le Cessionnaire reprendra à sa charge l'intégralité des engagements financiers souscrits par le Cédant envers M. [P] [I] et figurant en Annexe 5 », Attendu qu'il n'est pas contesté que l'engagement relatif à l'Indemnité de Rupture s'inscrit dans le cadre des engagements financiers souscrits envers M. [I], Attendu que le tribunal relève que l'engagement de verser une indemnité de rupture à M. [I] a été valablement souscrit par UFFI PARTICIPATIONS et qu'il pouvait donc être repris par un tiers et qu'ainsi aux termes du protocole du 23 mars 2012, FIDUCIAL REAL ESTATE s'est engagée à le reprendre, acceptant ainsi qu'il lui soit rendu opposable, En conséquence, le tribunal déboutera FIDUCIAL REAL ESTATE de sa demande de lui voir déclarer inopposable l'engagement de versement d'une Indemnité de Rupture à M. [I] ; Sur la portée de l'engagement : Attendu que FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE font valoir que l'engagement est en l'espèce inapplicable car il vise les situations de rupture de mandat à l'initiative de la société, or le mandat social de M. [I] n'a pas fait l'objet d'une rupture, il a fait seulement l'objet d'un non-renouvellement lorsqu'il est arrivé à son terme, Attendu que M. [I] fait valoir que le non-renouvellement de son mandat social s'analyse comme une cause de départ du groupe ouvrant droit au paiement de l'indemnité de rupture, Attendu que l'accord du 10 octobre 2010 stipule que l'indemnité, dénommée par les accords « indemnité de départ » ou encore « indemnité contractuelle de rupture », « ne vous [M. [I]] sera versée qu'en cas de rupture de votre mandat à l'initiative de la société (ou de toutes sociétés du Groupe dont vous seriez mandataire social) hors les cas de faute grave ou lourde ou force majeure », Attendu que l'avenant du 25 août 2011 qui réduit à 18 mois le montant de l'indemnité stipulé à l'accord 10 octobre, précise que « cette disposition annule et remplace la mesure qui était applicable pour tout départ non volontaire intervenant dans un délai supérieur à 24 mois de mon arrivée chez UFFI [c.à.d. l'arrivée de M. [I]] », Attendu que le tribunal relève ainsi : i) que l'engagement s'applique quelle que soit la nature du mandat social auquel il est mis fin, ce qui importe c'est la sortie du Groupe, ii) que M. [I] était nommé pour des mandats renouvelables d'un an, ce qui aurait rendu sans véritable effet un engagement portant sur une Indemnité qui ne serait pas due dans le cas d'un non-renouvellement de mandat, iii) que si la rédaction de l'accord du 10 octobre 2010 peut néanmoins laisser la place à un doute puisqu'il parle de « rupture de mandat », l'avenant du 25 août 2011 dissipe toute ambiguïté en ce qu'il prévoit que l'indemnité est « due pour tout départ non volontaire », Attendu qu'un non-renouvellement de mandat s'analyse en un départ non volontaire au sens des accords et qu'en l'occurrence le conseil d'administration de FIDUCIAL GERANCE composé d'administrateurs représentant FIDUCIAL REAL ESTATE a décidé de ne pas renouveler le mandat de directeur général de M. [I], entrainant son départ du Groupe, En conséquence, le tribunal déboutera FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE de leur demande de voir déclarer inapplicable l'engagement de versement d'une indemnité de rupture à M. [I] du fait du non renouvellement de son mandat social ; Sur la violation du principe de la liberté de non renouvellement des dirigeants : Attendu que FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE font valoir que l'engagement doit être déclaré non écrit car il est contraire au principe de la liberté de non renouvellement des dirigeants sociaux assimilable au principe de leur libre révocabilité, Attendu que M. [I] conteste que son Indemnité de Rupture constitue une charge pour les défenderesses susceptible de restreindre leur liberté de le révoquer, Attendu que le versement d'une indemnité de départ conventionnelle qui représente une charge financière ou une contrainte pour la société ou pour un associé majoritaire peut être de nature à entraver la libre révocation du dirigeant et est par conséquent réputée non écrite, Attendu que le tribunal relève des pièces versées aux débats que la société FIDUCIAL REAL ESTATE réalise plus de 70 millions d'euros de chiffre d'affaires et que l'indemnité litigieuse d'un montant de 300 000 €, ne représente que 0,4 % du chiffre d'affaires, qu'ainsi son paiement n'est en aucune manière de nature à limiter la possibilité pour le conseil d'administration de FIDUCIAL GERANCE composé de représentants de son actionnaire FIDUCIAL REAL ESTATE de ne pas renouveler le mandat de directeur général de M. [I], En conséquence, le tribunal déboutera FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE de leur demande de voir réputé non écrit l'engagement litigieux, Sur le non cumul d'une indemnité de départ et d'un droit à une retraite : Attendu que FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE entendent se prévaloir des dispositions de l'article 24.5.1 § 4 du code AFEP-MEDEF qui prévoit que « le versement d'indemnités de départ à un dirigeant mandataire social exécutif doit être exclu s'il ... a la possibilité de faire valoir ses droits à la retraite », Attendu que le Code AFEP-MEDEF est applicable aux seules sociétés cotées qui l'ont retenu comme référentiel de gouvernance et que ses dispositions constituent des recommandations dont l'application peut être écartée sous réserve d'en justifier, Attendu que FIDUCIAL REAL ESTATE a repris aux termes du protocole du 23 mars 2012 l'engagement de versement d'une indemnité de rupture souscrit par UFFI PARTICIPATIONS à l'égard de M. [I], sans avoir soulevé la moindre réserve ou contestation, En conséquence, le tribunal dira que FIDUCIAL REAL ESTATE ne saurait valablement invoquer les dispositions du code AFEP MEDEF, qui ne prévoient que des recommandations, ou l'appréciation négative de ses actionnaires ou du fisc, pour se dégager d'un engagement, qui n'est même pas visé par les recommandations dudit code puisqu'il porte sur une indemnité due non pas à un dirigeant de société cotée mais au directeur général d'une filiale non cotée ; Sur le montant de l'indemnité : Attendu que M. [I] demande à ce que FIDUCIAL REAL ESTATE et FIDUCIAL GERANCE, ou l'une à défaut de l'autre, soit condamnée à lui payer la somme de 450 000 € avec intérêt au taux légal à compter du 30 juin 2016 et anatocisme, au titre de l'indemnité de 18 mois de rémunération (fixe et variable) prévue au contrat, Attendu que les défenderesses font valoir qu'en tout état de cause l'engagement ne saurait porter que sur la part fixe de la rémunération, Attendu que l'avenant du 25 août 2011 prévoit que l'indemnité sera portée à 18 mois de rémunération et précise que « les autres dispositions de l'annexe restent inchangées ». Attendu que l'annexe du 10 octobre 2010 précise que l'indemnité est calculée à partir de rémunérations fixes brutes (ceci n'inclura pas les rémunérations complémentaires garanties ou variables qui pourront être versées), Attendu qu'il ressort des pièces versées aux débats que le conseil d'administration du mars 2016 a fixé la rémunération mensuelle de son directeur général M. [I] à 16 150 € par mois, inchangée par rapport à celle fixée par le conseil de surveillance, Attendu que l'engagement de versement d'une indemnité de rupture n'est opposable qu'à FIDUCIAL REAL ESTATE, ainsi qu'il a été exposé ci-dessus, En conséquence, le tribunal condamnera cette dernière à verser à M. [I] la somme en principal de 290 700 € (16 150 € x 18) assortie des intérêts de retard au taux légal à compter du 30 juin 2016 à titre d'Indemnité de Rupture, déboutant pour le surplus », 1) ALORS QUE toute convention intervenant directement ou par personne interposée entre la société et son directeur général doit être soumise à l'autorisation préalable du conseil d'administration ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que, contrairement à ce qu'imposaient les dispositions de l'article L. 225-38 du code de commerce, les conventions entre la société Uffi Participations et M. [I] n'avaient pas été soumises à autorisation préalable du conseil d'administration ; qu'en retenant néanmoins que la société Fiducial Real Estate avait repris les engagements de la société Uffi Participations à l'égard de M. [I], quand il s'évinçait des constatations précitées qu'aucun engagement n'avait été valablement souscrit, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ces constatations et a violé l'article L.225-38 du code de commerce. 2) ALORS QUE le cessionnaire qui s'engage à reprendre des engagements du cédant envers un tiers, ne peut pas être tenu davantage que ne l'était le cédant lui-même ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté qu'il ressortait du protocole de cession du 23 mars 2012 que la société Fiducial Real Estate s'engageait à reprendre à sa charge l'intégralité des engagements financiers souscrits par la société Uffi Participations envers M. [I] ; que la cour d'appel a ensuite retenu que les conventions entre la société Uffi Participations et M. [I] n'avaient pas été soumises à autorisation préalable du conseil d'administration, en méconnaissance de l'article L.225-38 du code de commerce ; qu'en retenant néanmoins, pour condamner la société Fiducial Real Estate à payer une indemnité de rupture à M. [I], que la société Fiducial Real Estate avait repris les engagements de la société Uffi Participations à l'égard de M. [I], la cour d'appel, qui a fait peser sur le cessionnaire davantage d'obligations que sur le cédant, a violé l'article 1134, devenu 1103, du code civil. 3) ALORS, en tout état de cause, QUE l'engagement de verser une indemnité de rupture à une personne en sa qualité de président directeur général d'une société anonyme devient caduc dès lors que les organes de direction de cette société changent, faisant disparaitre le mandat de président directeur général pour lui substituer une autre forme de dirigeant ; qu'en l'espèce, les sociétés Fiducial Real Estate et Fiducial Gérance faisaient valoir dans leurs conclusions d'appel (pages 20 et 21) que le mandat de M. [I] de président directeur général de la société Uffi REAM avait pris fin le 30 septembre 2013 lors de l'adoption du régime du directoire et du conseil de surveillance intervenue à l'issue de la fusion absorption par la société Uffi REAM de la société Fiducial Gérance, M. [I] devenant président du directoire, de sorte que l'engagement pris de lui verser une indemnité de rupture en qualité de président directeur général était devenu caduc ; que la cour d'appel a refusé d'admettre que l'engagement était devenu caduc lors du changement de qualité de M. [I], au seul motif que dans le cadre du protocole de cession du 23 mars 2012 la société Fiducial Real Estate s'était engagée à cette date à reprendre à sa charge les engagements souscrits envers M. [I] ; qu'en se déterminant ainsi, par un motif impropre à écarter la caducité en ce qu'il se rapporte à un événement antérieur au changement de qualité de M. [I] qui était survenu le 30 septembre 2013, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, devenu 1103, du code civil. DEUXIÈME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que la société Fiducial Gérance doit rembourser à M. [I] la somme de 253 093 € en application de l'action in rem verso, AUX MOTIFS QUE « Quant à l'action in rem verso par laquelle M. [I] sollicite le remboursement de la somme en retour, elle ne peut être exercée au cas de faute de l'appauvri. Cependant, si les sociétés appelantes lui reprochent de ne pas avoir fait inscrire à l'ordre du jour le vote relatif à sa rémunération au conseil d'administration de la société Uffi Ream devenue Fiducial Gerance alors qu'il en était le président, elles ne la caractérisent pas pour autant, l'ordre du jour du conseil d'administration pouvant être établi par le président du conseil d'administration mais pas exclusivement de sorte que l'absence de mention de vote de la rémunération à l'ordre du jour ne peut lui être imputable pour se soustraire à l'action in rem verso. Dès lors il convient de dire que M. [I] doit restituer à la société Fiducial Gerance la somme de 254093 € au titre de la rémunération 2012 et que la société Fiducial Gerance doit rembourser à M. [I] la même somme en application de l'action in rem verso », 1) ALORS QUE la cour d'appel ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ; qu'en l'espèce, dans le dispositif de ses conclusions d'appel (cf. production n°3, pages 47 et 48), M. [I] demandait la réformation du jugement entrepris, à la seule exception du chef ayant condamné la société Fiducial Real Estate à lui payer la somme de 290 700 € au titre de l'indemnité de départ, et ne demandait pas de condamnation de la société Fiducial Gérance à lui rembourser une somme en application de l'action in rem verso ; qu'en condamnant la société Fiducial Gérance à rembourser à M. [I] la somme de 253 093 € sur le fondement de l'action in rem verso, la cour d'appel a violé l'article 954 du code de procédure civile. 2) ALORS QUE l'action de in rem verso ne peut pas être exercée lorsque l'enrichissement ou l'appauvrissement trouvent leur cause dans une disposition légale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a préalablement retenu que la rémunération perçue par M. [I] pour l'année 2012 était irrégulière faute de décision préalable du conseil d'administration, en application des articles L.225-47 et L.225-53 du code de commerce, et que par conséquent la société Fiducial Gérance était en droit d'en réclamer le remboursement ; qu'elle a ensuite jugé que la société Fiducial Gérance devait elle-même rembourser la même somme à M. [I] en application de l'action de in rem verso ; qu'en statuant ainsi, quand il résultait de ses propres constatations que l'appauvrissement de M. [I] trouvait sa cause dans les dispositions des articles L.225-47 et L.225-53 du code de commerce qui n'admettent que soit versée une rémunération au président directeur général que si celle-ci a été votée par le conseil d'administration, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations au regard de l'article 1371 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble des principes qui régissent l'enrichissement sans cause. 3) ALORS QUE le président du conseil d'administration organise et dirige les travaux de celui-ci, de sorte qu'il lui appartient d'en fixer l'ordre du jour ; que commet une négligence fautive le président qui ne porte pas la question de sa rémunération à l'ordre du jour du conseil d'administration, d'autres personnes auraient-elles le pouvoir de déterminer conjointement cet ordre du jour ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a relevé qu'il était reproché à M. [I] de ne pas avoir fait inscrire à l'ordre du jour du conseil d'administration de la société Uffi REAM, devenue ensuite Fiducial Gérance, le vote relatif à sa rémunération, dont il était le président directeur général durant l'exercice 2012 ; qu'en retenant néanmoins que la faute de M. [I] n'était pas caractérisée, au motif que l'ordre du jour du conseil d'administration pouvait être établi par le président du conseil d'administration mais pas exclusivement de sorte que l'absence de mention de vote de la rémunération à l'ordre du jour ne pouvait lui être imputable, la cour d'appel a violé l'article L.225-51 du code de commerce. 4) ALORS QUE l'action de in rem verso ne peut aboutir lorsque l'appauvrissement est dû à la faute de l'appauvri ; qu'en l'espèce, la société Fiducial Gérance faisait valoir dans ses conclusions d'appel (pages 22 à 24) que M. [I] avait commis une négligence coupable en ne portant pas la question de sa rémunération au titre de l'exercice 2012 à l'ordre du jour du conseil d'administration de la société Uffi REAM, devenue ensuite Fiducial Gérance, alors qu'il en était le président directeur général et que, par conséquent, son action de in rem verso ne pouvait pas aboutir ; qu'en relevant, pour condamner la société Fiducial Gérance à rembourser à M. [I] la somme de 254 093 € sur le fondement de l'action de in rem verso, que l'ordre du jour du conseil d'administration pouvait être établi par le président du conseil d'administration mais pas exclusivement, de sorte que l'absence de mention de vote de la rémunération à l'ordre du jour ne pouvait lui être imputable, motif impropre à écarter l'existence d'une faute de l'appauvri, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1371 du code civil, dans sa rédaction applicable au litige, ensemble des principes qui régissent l'enrichissement sans cause. TROISIÈME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR dit que M. [I] doit restituer à la société Fiducial Gérance la somme de seulement 253 093 € au titre de la rémunération 2012, AUX MOTIFS QUE « Il est établi que M. [I] a perçu la somme de 254093 € en 2012, que la rémunération n'a pas été votée par le conseil d'administration de la société Uffi Ream », ET QUE « Dès lors il convient de dire que M. [I] doit restituer à la société Fiducial Gerance la somme de 254093 € au titre de la rémunération 2012 », ALORS QUE la contradiction entre les motifs et le dispositif équivaut à une absence de motifs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a indiqué dans ses motifs que M. [I] devait restituer à la société Fiducial Gérance la somme de 254 093 € ; qu'en limitant néanmoins cette somme, dans son dispositif, au seul montant de 253 093 €, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. QUATRIÈME MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à la décision attaquée d'AVOIR condamné la société Fiducial Gérance à verser à M. [I] la somme de 75 000 € au titre de sa part variable de rémunération, AUX MOTIFS QUE « Si les sociétés appelantes concluent à la confirmation du jugement dont appel qui a débouté M. [I] de sa demande de rémunération sur part variable, M. [I] conclut à l'infirmation du jugement et sollicite la somme de 350000 € en règlement de la part variable de sa rémunération. Il indique avoir contribué à la bonne évolution de la société, fait valoir qu'une progression de 15% du chiffre d'affaires est à noter, qu'il n'a pas renoncé à solliciter cette part variable de sa rémunération. Il ressort de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 que le principe de versement d'une part variable complémentaire de rémunération de M. [I] a été pris à l'initiative de la société Uffi Participations, qu'elle est d'un montant annuel brut maximum de 100000 € et sera déterminée sur la base de critères quantitatifs et qualitatifs qui seront définis ultérieurement et payables un mois après l'approbation des comptes. Les sociétés appelantes ne peuvent contester le principe de son versement. M. [I] indique avoir reçu une part variable uniquement en 2012 par l'ancien actionnaire à hauteur de 50000 €. En ce qui concerne le quantum, faute de critères qualificatifs et quantitatifs qui devaient être établis ultérieurement, chacune des parties s'étant rendues fautives dans l'absence de détermination de ces critères, la part variable de rémunération sur trois ans sera fixée non pas à un mois de rémunération mais à 25000 € par an sur trois ans, la dernière année 2016 n'étant pas prise en compte s'agissant de l'année où M. [I] n'a pas été renouvelé dans son mandat soit la somme de 75000 €. La société Fiducial Gerance sera condamnée à verser la somme de 75000 € au titre de la part variable de rémunération à M. [I] », 1) ALORS QUE le conseil d'administration de la société détermine la rémunération du président ; qu'en l'espèce, il était constant (cf. exposé des faits page 2 de l'arrêt) que M. [I] avait été président directeur général de la société Uffi REAM, devenue Fiducial Gérance, jusqu'au 30 septembre 2013 ; que pour admettre le principe d'une rémunération variable due par la société Fiducial Gérance à M. [I], et condamner la société à payer à ce titre la somme de 75 000 €, la cour d'appel s'est fondée sur les stipulations de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 de la société Uffi Participations ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence, qui était contestée, d'une décision du conseil d'administration de la société Uffi REAM, devenue Fiducial Gérance, déterminant une rémunération variable au bénéfice de son président directeur général M. [I]la cour d'appel a violé l'article L.225-47 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige. 2) ALORS QUE le conseil de surveillance fixe le mode et le montant de la rémunération de chacun des membres du directoire qu'il a nommés ; qu'en l'espèce, il était constant (cf. exposé des faits page 2 de l'arrêt) que M. [I] avait été président du directoire de la société Fiducial Gérance, du 30 septembre 2013 au 30 juin 2015 ; que pour admettre le principe d'une rémunération variable due par la société Fiducial Gérance à M. [I], et condamner la société à payer à ce titre la somme de 75 000 €, la cour d'appel s'est fondée sur les stipulations de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 de la société Uffi Participations ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence, qui était contestée, d'une décision du conseil de surveillance de la société Fiducial Gérance déterminant une rémunération variable au bénéfice de son président du directoire M. [I] la cour d'appel a violé l'article L.225-63 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige. 3) ALORS QUE le conseil d'administration de la société détermine la rémunération du directeur général ; qu'en l'espèce, il était constant (cf. exposé des faits page 2 de l'arrêt) que M. [I] avait été directeur général de la société Fiducial Gérance, du 30 juin 2015 au 30 juin 2016 ; que pour admettre le principe d'une rémunération variable due par la société Fiducial Gérance à M. [I], et condamner la société à payer à ce titre la somme de 75 000 €, la cour d'appel s'est fondée sur les stipulations de la lettre d'engagement du 30 septembre 2010 de la société Uffi Participations ; qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence, qui était contestée, d'une décision du conseil d'administration de la société Fiducial Gérance déterminant une rémunération variable au bénéfice de son directeur général M. [I], la cour d'appel a violé l'article L.225-53 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige. Moyen produit au pourvoi incident par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils pour M. [I]. M. [I] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande tendant à voir condamner solidairement la société Fiducial Real Estate et la société Fiducial Gérance à lui payer la somme de 212.500 euros avec intérêts au taux légal et anatocisme à compter du jugement à intervenir, au titre du préjudice lié à son départ précipité à la retraite ; 1°) Alors que l'objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; que dans ses écritures, si M. [I] dénonçait la teneur des arguments invoqués par la société Fiducial Real Estate dans le cadre de la procédure pour se soustraire à ses engagements, la demande indemnitaire qu'il formulait tendait à la réparation du « préjudice lié au refus de [lui] verser (?) les sommes auxquelles il a droit » ; que M. [I] faisait valoir que ce refus lui avait causé un préjudice considérable dès lors qu'il s'était brutalement retrouvé sans ressource, dans l'impossibilité de faire face à ses charges courantes et qu'il avait dû prendre sa retraite immédiatement, sans pouvoir attendre pour bénéficier du taux plein ; que pour débouter M. [I] de sa demande indemnitaire, la cour d'appel a retenu qu'il se plaignait « du comportement des sociétés appelantes à son égard dans leur refus de lui verser les indemnités qu'il estimait lui devoir être dues », mais qu'il n'établissait pas à la charge des sociétés appelantes, « la mauvaise foi, l'intention de nuire ou la légèreté blâmable susceptible d'ouvrir droit à l'allocation de dommages-intérêts pour procédure abusive » ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a traité comme une demande indemnitaire pour abus du droit d'agir ce qui était une demande indemnitaire fondée sur la responsabilité contractuelle, tendant à la réparation du préjudice résultant de la faute commise par la société Fiducial Real Estate en raison de l'inexécution de son engagement envers M. [I] ;que la cour d'appel a ainsi méconnu les termes du litige, en violation de l'article 4 du code de procédure civile ; 2°) Alors que l'inexécution d'un engagement constitue une faute donnant lieu à indemnisation si elle a causé un préjudice ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que la société Fiducial Real Estate avait méconnu son engagement en ne versant pas à M. [I] l'indemnité de rupture prévu par l'engagement initialement pris par la société Uffi Participations qu'elle avait repris ; qu'en déboutant M. [I] de sa demande indemnitaire sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée (conclusions d'appel de M. [I] pages 45 et 46), si le non-respect de cet engagement par la société Fiducial Real Estate avait causé à M. [I] un préjudice considérable dès lors que celui-ci s'était brutalement retrouvé sans ressource, dans l'impossibilité de faire face à ses charges courantes et qu'il avait dû prendre sa retraite immédiatement, sans pouvoir attendre pour bénéficier du taux plein, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016 applicable à la cause, devenu article 1231-1 du même code.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Rejet M. VIGNEAU, président Arrêt n° 3 F-D Pourvois n° C 20-17.332 E 20-17.334 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 I - La société Massis import export Europe, société à responsabilité limitée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° C 20-17.332 contre un arrêt n° RG 18/23115 rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 10), dans le litige l'opposant : 1°/ au ministre des finances des comptes publics, domicilié [Adresse 2], agissant au nom de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières (DRNRED), 2°/ à la société Transports P. Fatton, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], 3°/ à M. [S] [B], domicilié [Adresse 4], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe, défendeurs à la cassation. II - La société Massis import export Europe, société à responsabilité limitée unipersonnelle, a formé le pourvoi n° E 20-17.334 contre un arrêt n° RG 18/23083 rendu le 2 mars 2020 par la même cour d'appel, dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Transports P. Fatton, société anonyme, 2°/ à M. [S] [B], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe, défendeurs à la cassation. M. [B], ès qualités, a formé un pourvois incident contre chaque arrêt. La demanderesse au pourvoi principal et le demandeur au pourvoi incident n° C 20-17.332 invoquent, à l'appui de leur recours, deux moyens de cassation identiques, annexés au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi principal et le demandeur au pourvoi incident n° E 20-17.334 invoquent, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation identique, annexé au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Daubigney, conseiller, les observations de la SCP Spinosi, avocat de la société Massis import export Europe et de M. [B], ès qualités, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat du ministre des finances des comptes publics, agissant au nom de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Transports P. Fatton, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Daubigney, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° C 20-17.332 et E 20-17.334 sont joints. Faits et procédure 2. Selon les arrêts attaqués (Paris, 2 mars 2020, n° RG 18/23115 et n° RG 18/23083), la société Massis import export Europe (la société Massis), fournisseur et entrepositaire agréé de tabac à narguilé, importe des tabacs de pays tiers à l'Union européenne par l'intermédiaire de la société Transports P. Fatton (la société Fatton), commissionnaire en douanes. 3. Le 27 mai 2016, l'administration des douanes a notifié à la société Massis un avis de résultat d'enquête l'informant qu'elle envisageait de lui notifier des infractions de fausse déclaration de valeur en douane et d'irrégularité de nature à compromettre le recouvrement des droits et taxes. Celle-ci a produit des observations le 1er juillet 2016. 4. Après avoir, par lettre du 7 juillet 2016, informé la société Massis du rejet de ses observations, l'administration des douanes lui a, le 21 juillet 2016, notifié un procès-verbal d'infractions puis a émis à son encontre un avis de mise en recouvrement (AMR) des droits éludés. 5. L'administration des douanes ayant rejeté sa contestation, la société Massis l'a assignée en annulation de l'AMR, et la société Fatton en garantie. 6. Le 5 janvier 2017, la société Massis a assigné la société Fatton devant un tribunal de commerce afin de la voir condamner à lui fournir une caution bancaire du montant de l'AMR. 7. Un jugement du 28 novembre 2018 a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis, M. [B] étant désigné mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan. Examen des moyens Sur le second moyen des pourvois principal et incident n° C 20-17.332, ci-après annexés 8. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches, des pourvois principal et incident n° C 20-17.332 rédigés en termes identiques, réunis Enoncé du moyen 9. La société Massis et M. [B], ès qualités, font grief à l'arrêt de déclarer régulier l'AMR du 8 août 2016, alors : « 1°/ qu'en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaître utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à trente jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016, dans un délai qui avait paru suffisant, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que le courrier du 7 juillet 2016 se bornait à indiquer de manière laconique que "les objections formulées ne sont pas de nature à remettre en cause les infractions ou la liquidation supplémentaire constatées par les enquêteurs de la IIème division d'enquête", de sorte qu'il ne pouvait s'agir d'une réponse motivée, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et le principe du contradictoire et l'article 6 de la Conventionde sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; 2°/ qu'en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaître utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à trente jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagées, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016, puis de manière motivée dans le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que l'administration n'avait répondu de manière motivée au courrier du 7 juillet 2016 que dans le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016, et non avant que ne soit dressé cet acte faisant grief, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et du contradictoire et l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. » Réponse de la Cour 10. Il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que fait partie intégrante du respect des droits de la défense le droit d'être entendu, qui garantit à toute personne la possibilité de faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue au cours de la procédure administrative, avant l'adoption de toute décision susceptible d'affecter de manière défavorable ses intérêts. Selon cette jurisprudence, la règle selon laquelle le destinataire d'une décision faisant grief doit être mis en mesure de faire valoir ses observations avant que celle-ci soit prise a pour but de mettre l'autorité compétente à même de tenir utilement compte de l'ensemble des éléments pertinents (arrêts du 18 décembre 2008, Sopropé, C-349/07, points 37 et 49, du 5 novembre 2014, Mukarubega, C-166/13, points 46 et 47, et du 16 octobre 2019, Glencore Agriculture Hungary, C-189/18, point 41). 11. Après avoir énoncé que, selon l'article 67 A du code des douanes, dans sa version issue de la loi n° 2009-1674 du 30 décembre 2009 alors applicable, la personne à qui est notifiée une décision qui lui fait grief dispose d'un délai de trente jours pour produire des observations, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que la société Massis a, le 1er juillet 2016, fait valoir ses observations à l'avis de résultat d'enquête que l'administration des douanes lui avait adressé le 27 mai 2016 et que l'administration des douanes les a explicitement rejetées par lettre du 11 juillet 2016. 12. L'arrêt relève encore que, lors de la notification du procès-verbal d'infractions au représentant légal de la société Massis, l'administration des douanes avait précisément repris les observations de cette dernière, motivant en fait et en droit les raisons pour lesquelles elle les rejetait, et retient que de nouvelles observations écrites auraient pu être produites par la société Massis à cette occasion et jusqu'à l'émission de l'AMR, intervenue le 8 août 2016. 13. De ces énonciations, constatations et appréciations, la cour d'appel a exactement déduit que le droit à être entendu prévu à l'article 67 A du code des douanes et les droits de la défense avaient été respectés. 14. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le premier moyen, pris en sa troisième branche, des pourvois principal et incident n° 20-17.332 rédigés en termes identiques, réunis Enoncé du moyen 15. La société Massis et M. [B], ès qualités, font grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant déclaré régulier l'AMR du 8 août 2016 en la forme et sur le fond, alors « que les droits de la défense et de l'égalité des armes impliquent que le redevable soit informé de toute discussion de l'administration des douanes avec un tiers qui serait de nature à modifier ses droits, obligations et recours éventuel ; qu'en l'espèce, en jugeant que le fait que la société Massis n'ait pas été associée aux échanges entre l'administration des douanes et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane n'était pas de nature à entraîner la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016, la cour d'appel a violé le principe du respect des droits de la défense ensemble celui de l'égalité des armes. » Réponse de la Cour 16. Selon la jurisprudence constante de la Cour de justice, une violation des droits de la défense, en particulier du droit d'être entendu, n'entraîne l'annulation de la décision prise au terme de la procédure administrative en cause que si, en l'absence de cette irrégularité, cette procédure pouvait aboutir à un résultat différent (arrêt du 18 juin 2020, Commission/RQ, C-831/18 P, point 105). 17. La Cour de justice a également jugé que l'opérateur qui a recours à un commissionnaire en douane, que ce soit dans le cadre d'une représentation directe ou indirecte, est en toute hypothèse débiteur de la dette douanière à l'égard des autorités douanières (arrêt du 13 septembre 2007, Common Market Fertilizers/Commission, C-443/05 P, point 186). 18. Ayant énoncé qu'un commissionnaire en douane agissant en représentation directe de la société importatrice n'est pas tenu au paiement de la dette douanière, et relevé que la société Massis agissait comme déclarant et était ainsi débitrice de la dette douanière, la cour d'appel en a exactement déduit que le fait que l'administration des douanes n'ait pas associé la société Massis à ses échanges avec la société Fatton était sans incidence sur la régularité de la procédure suivie à l'encontre de la première. 19. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le moyen des pourvois principal et incident n° E 20-17.334 rédigés en termes identiques, réunis Enoncé du moyen 20. La société Massis et M. [B], ès qualités, font grief à l'arrêt de confirmer le jugement ayant rejeté la demande de la société Massis de sa demande tendant à ce que la société Fatton fournisse des garanties pour le paiement de la dette douanière mise en recouvrement, alors que « la cassation entraîne l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en cassant l'arrêt rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (RG n° 18/23115), dans le cadre du pourvoi n° C 20-17.332, du chef du dispositif ayant mis hors de cause la société Fatton, la Cour de cassation censurera l'arrêt attaqué ayant rejeté les demandes de fourniture de garanties relatives aux dettes douanières dont se trouve tenue la société Fatton, ensemble avec la société Massis, et ce en application de l'article 625 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 21. Le pourvoi formé contre l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 2 mars 2020 (RG n° 18/23115) étant rejeté, le moyen unique du pourvoi n° 20-17.334 est sans objet. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois principal et incident n° C 20-17.332 et les pourvois principal et incident n° E 20-17.334, formés par la société Massis import export Europe et par M. [B], en sa qualité de mandataire judiciaire et commissaire à l'exécution du plan de cette société ; Condamne la société Massis import export Europe et M. [B], ès qualités, aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par la société Massis import export Europe et M. [B], ès qualités, et les condamne à payer au ministre des finances, au nom de la direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières, la somme globale de 3 000 euros, et à la société Transports P. Fatton la somme globale de 2 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt. Moyens identiques produits AUX POURVOIS PRINCIPAL ET INCIDENT n° C 20-17.332 par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Massis import export Eu rope et pour M. [B], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe. PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant déclaré régulier l'avis de mise en recouvrement n° 2016/29 du 8 août 2016 en la forme et sur le fond ; Aux motifs que, « Maître [T] [U]-Selarl 2m&associés, ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe doit être mise hors de cause puisque le jugement prononcé le 28 novembre 2018 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère qui a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis Import Export Europe a mis fin à ses fonctions. A) Sur la procédure La société Massis Import Export Europe dite ci-après société Massis Distribution et les organes de sa procédure collective de sauvegarde demandent à la cour d'annuler la procédure de recouvrement en raison des violations suivantes au principe du contradictoire : * La DNRED a fait preuve d'opacité dans la phase dite du droit d'être entendu (DEE) en dissimulant à la société MASSIS des échanges majeurs avec la société FATTON qui font grief. * Après avoir pris connaissance des observations de la société MASSIS, la DNRED n'a pas motivé sa future prise de décision avant la notification d'infractions. * La DNRED a, sciemment, créé un effet de surprise dans le procès-verbal de notification d'infraction alors que la procédure contradictoire du DEE vise à l'empêcher. * La société MASSIS se trouvant seule débitrice au regard du procès-verbal, a dû répliquer « à chaud » à la fin de l'acte. Il est également soutenu que la DNRED a manqué à son obligation de notifier la dette douanière au déclarant en douane ayant agi dans le cadre d'un mandat de représentation indirecte. Est également invoquée l'impossibilité pour la Douane de statuer sur la contestation administrative contre l'AMR en cas de saisine de la CCED (commission de conciliation et d'expertise douanière). Selon la directrice de la DNRED, les contestations ainsi soulevées ne seraient pas fondées. Ceci étant observé, par de justes motifs que la cour adopte, les premiers juges, faisant application des articles 67 A à 67 D du code des douanes dans leur rédaction applicable au litige ont jugé que la procédure douanière mise en oeuvre n'avait pas porté atteinte au principe du contradictoire ; que la société Massis Distribution avait bénéficié du droit d'être entendue puisqu'elle avait reçu l'avis de résultat d'enquête le 7 juin 2016 et y avait répondu par courrier daté du 1er juillet 2016. Par courrier du 7 juillet 2016, la DNRED y a répondu dans un délai qui lui est apparu suffisant. Il a été également justement relevé que le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016 répond aux observations formulées par le conseil de la société Massy Distribution. Il a ainsi été caractérisé que le contradictoire avait été respecté dans la phase antérieure à l'émission de l'AMR le 8 août 2016. La société Massis Distribution est mal fondée à reprocher à la DNRED un défaut de réponse motivée avant la rédaction du procès-verbal de notification d'infractions. Il doit ensuite être relevé que la société Fatton verse aux débats la représentation en douane qui lui a été consentie par la société Massis Distribution à effet du 20 janvier 2009 qui mentionne qu'elle relève de la représentation directe conformément à l'article 5.2 1er alinéa du code des douanes communautaire. Il s'en déduit que la société Patton n'est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à soutenir que la DNRED aurait vicié la procédure de contrôle en refusant sciemment de retenir la responsabilité financière, pénale et douanière de la société Transports Fatton alors qu'elle agissait comme « déclarant » et donc, inévitablement codébiteur de la dette douanière au regard du code des douanes communautaires et qu'en refusant d'appliquer la responsabilité solidaire de la société Transports Fatton, la DNRED s'est sciemment privée du droit de recouvrer la dette auprès du déclarant et donc débiteur de la dette douanière et aurait ainsi porté atteinte à la protection des intérêts financiers de l'Union européenne. Si la société Massis Distribution n'a pas été associée aux échanges passés entre la DNRED et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane, cette circonstance n'est pas de nature à entraîner la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016. Sur le grief relatif au fait que la DNRED a statué sur la contestation de l'AMR alors que la société Massis Distribution l'avait avisée le 24 août 2016 de ce qu'elle saisissait la commission de conciliation et d'expertise douanière (CCED), les premiers juges ont également justement relevé qu'il résultait de la combinaison des articles 345 alinéa 4 et 346 du code des douanes que "l'avis de mise en recouvrement peut être délivré avant la saisine de cette commission et avant qu'il n'ait été statué sur le recours éventuellement formé." Il se déduit de ce qui précède que les contestations de la société Massis Distribution sur la régularité de la procédure doivent être rejetées ainsi que sa demande d'annulation de l'AMR n° 2016/29 pour violation du principe du contradictoire » ; Et par motifs adoptés des premiers juges : « II - Sur la régularité de la procédure douanière 1° Sur la violation du principe du contradictoire En vertu du principe du respect des droits de la défense, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaître utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable. En application des articles 67 A à 67 D du Code des douanes, dans leur version applicable aux faits de l'espèce, ce délai est fixé à 30 jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations dans le délai imparti. Le non-respect des droits de la défense entraîne la nullité de l'AMR. Force est de constater en l'espèce que le droit d'être entendu de la société MASSIS DISTRIBUTION a été respecté par l'administration des douanes puisque par courrier du 27 mai 2016, reçu le 7 juin 2016, cette dernière lui a adressé un avis de résultat d'enquête dans les formes prescrites par les dispositions précitées, et il n'est pas contesté que les actes de procédure figuraient en pièces annexes (pièce n° C 2 en demande). La société MASSIS DISTRIBUTION avait donc jusqu'au 7 juillet 2016 pour communiquer ses observations écrites à l'administration, ce qu'elle a fait le 29 juin 2016 (sa pièce n° 3). Contrairement à ce qui est allégué, les observations de la demanderesse ne sont pas restées sans réponse, puisqu'une lettre de l'administration des douanes rejetant explicitement les observations formulées dans son courrier du 29 juin 2016 lui a été adressée le 11 juillet 2016 (pièce n° 4 en demande). Par ailleurs, l'analyse du procès-verbal de notification d'infractions, établi le 21 juillet 2016 (soit 18 jours avant l'émission de l'avis de mise en recouvrement litigieux) par l'administration des douanes en présence du conseil chargé de la défense des intérêts de la société MASSIS DISTRIBUTION, par l'intermédiaire de son représentant légal, permet de considérer que l'administration des douanes a dûment tenu compte de ces observations puisque, reprenant point par point les observations formulées par la demanderesse dans son courrier du 29 juin 2016 auquel elle se réfère explicitement au paragraphe III du PV intitulé "Constatations du service" (pièce n° 5 en demande), elle motive en fait et en droit tes raisons pour lesquels elle n'entend pas remettre en cause les conclusions de l'enquête. De plus, il a même été permis à la demanderesse à cette occasion de formuler de nouveau ses observations par écrit, étant précisé par ailleurs que le droit d'être entendu tel que prévu par le Code des douanes au visa des dispositions précitées n'impose à l'administration aucun formalisme particulier à la réponse à apporter aux observations formulées par le redevable. Par conséquent, la société MASSIS DISTRIBUTION a bien été mise en mesure, avant l'émission de l'AMR en date du 8 août 2016, d'être utilement entendue par les autorités douanières, compte tenu de ce qui précède, et notamment du délai écouté entre la date de la notification de l'avis de résultat d'enquête du 7 juin 2016 et la date à laquelle l'administration a pris sa décision (soit deux mois au total). Dès lors, le moyen soulevé par la demanderesse tiré de la violation du principe général du respect des droits de la défense sera rejeté par le tribunal. 2° Sur la saisine de la CCED La société MASSIS DISTRIBUTION fait encore grief à l'administration des douanes d'avoir émis un AMR le 8 août 2016 alors, pourtant, qu'elle l'avait informée de la saisine de la Commission de Conciliation d'Expertise Douanière (CCED) le 24 août 2016 et que celle-ci n'a encore notifié aucun avis aux parties à ce jour. Il résulte, toutefois, de la combinaison de l'article 345 alinéa 4 du Code des douanes, selon lequel les recours prévus aux articles 346 et 347 ne suspendent pas l'exécution de l'avis de mise en recouvrement, et de l'article 346 du même code, qui a trait à la contestation de la créance devant être adressée à l'autorité ayant signé l'AMR et au délai donné au directeur régional des douanes pour statuer sur cette contestation, notamment en cas de saisine de la commission précité, que l'avis de mise en recouvrement peut être délivré avant la saisine de cette commission et avant qu'il n'ait été statué sur le recours éventuellement formé. Ce grief sera donc également rejeté. Enfin, il convient de souligner que l'avis de mise en recouvrement émis par l'administration des douanes n'encourt pas la nullité, nonobstant l'inexactitude de la dénomination sociale de la demanderesse qui y est renseignée, dès lors que cette dernière ne conteste pas l'avoir reçu à l'adresse indiquée et qu'il est établi qu'elle a été dûment informée du fait générateur de la créance lors de la signification du procèsverbal de constatation d'infractions visé par l'AMR, mentionnant sa véritable dénomination sociale (en l'occurrence, MASSIS IMPORT EXPORT EUROPE) et non plus seulement son nom d'enseigne (MASSIS DISTRIBUTION). Aucune confusion de débiteurs n'est donc rendue possible. Compte tenu de l'ensemble des motifs qui précèdent, l'AMR n° 2016/29 du 8 août 2016 sera déclaré régulier en la forme » (jugement, p. 8 et s.) ; Alors que, de première part, en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaitre utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à 30 jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaitre la décision envisagées, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaitre ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016 dans un délai qui avait paru suffisant, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que le courrier du 7 juillet 2016 se bornait à indiquer de manière laconique que « les objections formulées ne sont pas de nature à remettre en cause les infractions ou la liquidation supplémentaire constatées par les enquêteurs de la IIème division d'enquête », de sorte qu'il ne pouvait s'agir d'une réponse motivée, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et le principe du contradictoire et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; Alors que, de deuxième part, en application du principe du respect des droits de la défense et du contradictoire, le destinataire d'un acte de l'administration lui faisant grief doit être en mesure de faire connaitre utilement son point de vue, en connaissance de cause, et dans un délai raisonnable ; qu'en application des articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction applicable au litige, ce délai est fixé à 30 jours à compter de la notification ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaitre la décision envisagées, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée, ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaitre ses observation dans le délai imparti ; que l'administration des douanes doit répondre à l'intéressé par une décision motivée sur les raisons pour lesquelles elle estime justifié le maintien de la décision lui faisant grief, et ce avant que ne soit dressé le procès-verbal de notification d'infractions, qui est précisément l'acte final faisant grief ; qu'en l'espèce, à l'avis de résultat de l'enquête du 7 juin 2016, la société Massis avait répondu par courrier du 1er juillet 2016, aux termes duquel elle remettait en cause point par point les conclusions de l'enquête qui lui avait été adressée ; que la cour d'appel a jugé que l'administration avait répondu à ce courrier du 1er juillet 2016, par courrier du 7 juillet 2016, puis de manière motivée dans le procès-verbal de notification d'infractions du 2 juillet 2016, de sorte que le respect du contradictoire avait été respectée ; qu'en statuant ainsi, cependant que l'administration n'avait répondu de manière motivée au courrier du 7 juillet 2016 que dans le procès-verbal de notification d'infractions du 21 juillet 2016 et non avant que ne soit dressé cet acte faisant grief, la cour d'appel a violé les articles 67 A à 67 D du code des douanes, dans leur rédaction alors applicable, ensemble les droits de la défense et du contradictoire et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ; Alors que, de troisième part, les droits de la défense et de l'égalité des armes impliquent que le redevable soit informé de toute discussion de l'administration des douanes avec un tiers qui serait de nature à modifier ses droits, obligations et recours éventuel ; qu'en l'espèce, en jugeant que le fait que la société Massis n'ait pas été associée aux échanges entre la DNRED et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane n'était pas de nature à entrainer la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016, la cour d'appel a violé le principe du respect des droits de la défense ensemble celui de l'égalité des armes. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande en garantie de la société Massis à l'encontre de la société Fatton ; Aux motifs que, « Il doit ensuite être relevé que la société Fatton verse aux débats la représentation en douane qui lui a été consentie par la société Massis Distribution à effet du 20 janvier 2009 qui mentionne qu'elle relève de la représentation directe conformément à l'article 5.2 1er alinéa du code des douanes communautaire. Il s'en déduit que la société Patton n'est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à soutenir que la DNRED aurait vicié la procédure de contrôle en refusant sciemment de retenir la responsabilité financière, pénale et douanière de la société Transports Fatton alors qu'elle agissait comme « déclarant » et donc, inévitablement codébiteur de la dette douanière au regard du code des douanes communautaires et qu'en refusant d'appliquer la responsabilité solidaire de la société Transports Fatton, la DNRED s'est sciemment privée du droit de recouvrer la dette auprès du déclarant et donc débiteur de la dette douanière et aurait ainsi porté atteinte à la protection des intérêts financiers de l'Union européenne. Si la société Massis Distribution n'a pas été associée aux échanges passés entre la DNRED et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane, cette circonstance n'est pas de nature à entraîner la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l'émission de l'AMR du 8 août 2016. (?) Ainsi que ci-dessus relevé, la société Patton (sic) est intervenue dans le cadre d'une représentation directe au sens de l'article 5-2 du code des douanes communautaire. Il s'en déduit que la société Patton (sic) n'est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à appeler en garantie la société Patton (sic) » ; Et par motifs des premiers juges, éventuellement adoptés : « En application de l'article 331 du Code de procédure civile, un tiers peut être mis en cause aux fins de condamnation par toute partie qui est en droit d'agir contre lui à titre principal. Il peut également être mis en cause par la partie qui y a intérêt, afin de lui rendre commun le jugement. Faisant valoir que la société TRANSPORTS P. FATTON a agi suivant le mode de représentation indirecte lors du dédouanement des marchandises litigieuses, la société MASSIS DISTRIBUTION sollicite du tribunal que cette dernière soit tenue de garantir la dette douanière et fiscale dont elle serait redevable. S'opposant à ladite prétention, la SA TRANSPORTS P. FATTON soutient a contrario avoir agi suivant le mode de représentation directe, et fournit le mandat de représentation, signé le 20 janvier 2009, en vertu duquel elle tient ses seuls engagements à l'égard de la société MASSIS DISTRIBUTION pour l'accomplissement des formalités douanières. Aux termes de l'article 5 paragraphes 1 et 2 du Code des douanes communautaires, toute personne peut se faire représenter auprès des autorités douanières pour l'accomplissement des actes et formalités prévus par la réglementation douanière. La représentation peut être directe, dans ce cas le représentant agit au nom et pour le compte d'autrui ou indirecte, dans ce cas le représentant agit en son nom propre, mais pour le compte d'autrui. Les Etats membres peuvent se réserver le droit de faire, sur leur territoire, des déclarations en douane selon soit la modalité de la représentation directe, soit celle de la représentation indirecte, de sorte que le représentant doit être un commissionnaire en douane y exerçant sa profession. En cas de représentation indirecte, celui qui a déclaré en son nom propre demeure tenu solidairement avec celui pour le compte de qui il a effectué la déclaration de la dette douanière. Il en est autrement en cas de représentation directe. En l'espèce, il est constant que la SA TRANSPORTS P. FATTON a procédé aux déclarations en douane des marchandises litigieuses en sa qualité de commissionnaire de transport agréé en douane, entre le 13 juillet 2012 et le 11 avril 2016. II n'est pas non plus contesté qu'au cours de la période non prescrite du contrôle douanier, la société TRANSPORTS P. FATTON a effectué 41 déclarations sous le code de la représentation indirecte (code 3), et seulement 3 déclarations sous le code de la représentation directe (code 2). Il est par ailleurs acquis qu'après avoir pris connaissance du mandat de représentation que lui a communiqué la SA TRANSPORTS P. FATTON le 1er juillet 2016 par courrier recommandé, la Douane a fait fi de ces déclarations quant à son habilitation, considérant qu'il s'agissait là d'une erreur purement matérielle et a abandonné toutes poursuites en recouvrement de la dette douanière à son encontre (sa pièce annexe n° 3). La société MASSIS DISTRIBUTION fait alors grief à la Douane d'avoir mis fin à la procédure de recouvrement à l'encontre de la société TRANSPORTS P. FATTON, au motif que l'inexactitude des mentions contenues dans les déclarations en douane engage la responsabilité du déclarant considéré alors comme le débiteur de la dette douanière, en application des articles 101-1 des DAC, 95-3 du Code des douanes national et 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires. Sur ce point, s'il est en effet admis que l'exactitude des mentions contenues dans les déclarations en douane sont certifiées sincères et engagent comme tel la responsabilité du déclarant sur le fondement des textes visés par la demanderesse dans ses dernières conclusions, encore faut-il que ce dernier ait agi en son nom propre et pour le compte d'autrui, comme il s'agit en cas de représentation indirecte. L'article 26 de l'arrêté du 22 décembre 1998, pris en application du Code des douanes et relatif aux personnes habilitées à déclarer les marchandises en détail et à l'exercice de la profession de commissionnaire en douane, rappelle en effet que si le commissionnaire en douane agit en son nom propre, il le fait en qualité de déclarant en douane. S'il agit au contraire au nom et pour le compte de la personne habilitée à déclarer en douane, il te fait en qualité de simple mandataire, et n'est donc de ce fait pas tenu de la dette douanière au sens de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires qui dispose que le débiteur est le déclarant. D'où la nécessité pour celui qui agit pour le compte d'autrui de préciser dans la déclaration en douane de quel type de représentation il s'agit. Pour autant, et contrairement aux procès-verbaux de constat qui font foi jusqu'à inscription en faux, la déclaration en douane ne fait foi que jusqu'à preuve contraire à l'égard des autorités douanières puisque la réglementation douanière autorise le représentant à la rectifier, voire même l'invalider, après acceptation de celle-ci par les autorités douanières en cas d'inexactitude ou erreur manifeste en application des articles 65 et 66 du Code des douanes communautaire. Ces textes semblent avoir été institués par le législateur pour combattre la simple présomption posée à l'article 5 paragraphe 4 du même code. D'ailleurs, force est de constater en l'espèce que l'administration des douanes a changé de position en abandonnant les poursuites à l'égard de la société TRANSPORTS P. FATTON bien avant qu'un procès-verbal de constat d'infractions ne lui soit notifié, ceci sur présentation par cette dernière de son mandat de représentation par courrier recommandé du 1er juillet 2016 (pièce annexe n° 2 de la DNRED). Il ressort ainsi de la lecture du mandat produit par la SA TRANSPORTS P. FATTON, à effet au 20 janvier 2009, que la société MASSIS IMPORT EXPORT EUROPE a donné pouvoir à "la société FATTON agréée n° A 2143 pour (la) représenter auprès de l'Administration des Douanes dans le cadre de la représentation directe conformément à l'article 5.2.1er alinéa du Code des Douanes Communautaire". Il précise également que ladite société est habilitée à "signer en (son) nom et pour (son) compte toutes déclarations de douane à l'importation et à l'exportation". En outre, ce même contrat renvoie expressément aux conditions générales de vente de la Fédération des Entreprises de Transport et Logistique de France (TLF) qui indique à l'article 6.6 que "Le commissionnaire en douane agréé dédouane sous le mode de la représentation directe, conformément à l'article 5 du Code des Douanes Communautaire" (sa pièce n° 1 et pièce annexe n° 2 de la DNRED). Ce contrat n'ayant pas été remis en cause par les parties prenantes depuis sa signature, il constitue un fait social opposable erga omnes par opposition aux simples déclarations en douane dont ta force probante s'en trouve amoindrie. Dans ces conditions, il est incontestable que la société TRANSPORTS P. FATTON a agi, non pas en qualité de représentant indirect mais au contraire en qualité de simple mandataire ou représentant direct, et n'est donc pas, de ce fait, tenue au paiement de la dette douanière en tant que coobligée au sens des dispositions de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires, visées à tort par la demanderesse dans ses dernières conclusions. Compte tenu de ce qui précède, il est donc établi que l'administration des douanes n'avait pas l'obligation de notifier la dette douanière au commissionnaire en douane dont la société MASSIS DISTRIBUTION est seule redevable, et à laquelle le commissionnaire n'est pas solidairement tenu. D'ailleurs, l'administration des douanes ne formule aucune demande à l'encontre de société TRANSPORTS P. FATTON dans ses dernières écritures, et rappelle à juste titre qu'elle n'est saisie que de l'AMR n° 2016/29 qui a seulement été notifié à la société MASSIS DISTRIBUTION pour les mêmes raisons que celles précédemment exposées. Dès lors, l'appel en garantie formé par la société MASSIS DISTRIBUTION ne peut être que rejeté, et la société TRANSPORTS P. FATTON, mise hors de cause » ; Alors que, d'une part, le défaut de réponse à conclusions équivaut au défaut de motif ; qu'en l'espèce, la société Massis faisait régulièrement valoir dans ses conclusions d'appel que le contrat de mandat signé le 20 janvier 2009, la liant à la société Fatton et stipulant une représentation directe, avait fait l'objet d'une novation entre les parties, en un contrat de représentation indirecte (conclusions, pp. 40-41) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen opérant, car de nature à justifier l'appel en garantie dirigée contre la société Fatton, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; Alors que, d'autre part, la cassation entraine, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en cassant l'arrêt attaqué, la Cour de cassation censurera l'arrêt rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (RG n° 18/23083) ayant rejeté les demandes de fourniture de garanties relatives aux dettes douanières dont se trouve solidairement tenue la société Fatton avec la société Massis, et ce en application de l'article 625 du code de procédure civile. Moyen identique produit AUX POURVOIS PRINCIPAL ET INCIDENT n° E 20-17.334 par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour la société Massis import export Europe et M. [B], pris en qualité de mandataire judiciaire et de commissaire à l'exécution du plan de la société Massis import export Europe. Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant débouté la société Massis et Me [B] es qualités de leur demande tendant à ce que la société Fatton fournisse des garanties pour le paiement de la dette douanière mise en recouvrement à hauteur de 6.845.983 euros ; Aux motifs que, « Maître [T] [U]-Selarl 2m&associés, ès qualités d'administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe doit être mise hors de cause puisque le jugement prononcé le 28 novembre 2018 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère qui a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis Import Export Europe a mis fin à ses fonctions. Par arrêt prononcé ce jour (le 9 mars 2020, 18/23115) la cour d'appel de Paris a jugé que la société Patton était intervenue dans le cadre d'une représentation directe au sens de l'article 5-2 du code des douanes communautaire et qu'il s'en déduisait que la société Patton n'était pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l'article 201 3°) du même code. Il a été jugé que la société Massis Distribution était mal fondée à appeler en garantie la société Patton, l'arrêt confirmant le jugement déféré ayant mis hors de cause la Société Transports P. Fatton. Il se déduit de cette décision que la société Massy Distribution est mal fondée à demander à la société Fatton de fournir des garanties relatives à sa dette douanière puisque la société Fatton n'y est pas tenue ; que le jugement déféré doit être confirmé » ; Et par motifs éventuellement adoptés des premiers juges : « Faisant valoir que la société TRANSPORTS P. FATTON était codébitrice solidaire de la dette douanière dont elle est redevable à hauteur de 6.845.983€ au titre de L'AMR 11 0 2016/29 du 8 août 2016, et ce en application de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaire, la société MASSIS DISTRIBUTION l'a assignée à jour fixe devant le tribunal de commerce de Lyon, par exploit d'huissier du 5 janvier 2017, afin qu'elle fournisse, sous astreinte, au comptable des douanes chargé du recouvrement une garantie pour suspendre l'exécution de l'AMR en attendant l'issue de la présente instance introduite par-devant le tribunal de céans par exploits du 26 décembre 2016. Considérant les demandes formées identiques devant les deux juridictions, le tribunal de commerce de Lyon s'est déclaré incompétent au profit de la juridiction de céans par jugement rendu le 27 septembre 2017. Ce jugement de renvoi a certes été confirmé en appel mais la Cour d'appel de Lyon a toutefois considéré que les deux procédures ne visaient pas le même objet. En effet, force est de constater que la présente instance vise à rechercher la responsabilité de la société TRANSPORTS P. FATTON en cas de condamnation prononcée à l'encontre de la demanderesse (instance ouverte sous le R.G. n° 17/01492), alors que la procédure devant la juridiction commerciale portait sur l'exigence au profit de MASSIS DISTRIBUTION d'une caution ou d'une autre garantie immédiate à fournir par cette dernière eu égard au caractère exécutoire constitué par l'AMR (instance ouverte sous le R.G. n° 18/01649). A cela, il convient d'ailleurs de préciser que dans l'une ou l'autre de ces procédures, aucune faute n'est reprochée par la société MASSIS DISTRIBUTION à la société TRANSPORTS P. FATTON dans les déclarations effectuées ou, plus généralement, dans le cadre du mandat exercé par cette dernière. C'est exclusivement en sa qualité de commissionnaire en douanes ayant déclaré sous le régime de la représentation indirecte que sa responsabilité est recherchée ainsi que le souligne la demanderesse elle-même dans ses deux derniers jeux de conclusions qu'elle a versés concomitamment à la procédure par voie de notification par RPVA le 4 mai 2018. La société MASSIS DISTRIBUTION n'a pas maintenu sa demande de garanties sous astreinte à l'encontre de la société TRANSPORTS P. FATTON dans ses dernières conclusions notifiées par RPVA te 12/06/2018 dans la présente procédure ouverte sous le R.G. n° 18/01649, ni n'a repris cette demande à l'audience de plaidoiries qui s'est tenue le 25 juin 2018 devant la formation collégiale de la 3ème chambre civile du tribunal de grande instance de Créteil. Partant, elle est réputée avoir abandonnée ladite prétention sans qu'il y ait lieu pour le tribunal d'avoir à statuer sur celle-ci, étant rappelé qu'il s'agit d'une procédure orale et que le tribunal est tenu par les dernières écritures et les observations formées par le requérant à l'audience. Surabondamment, il est rappelé que par jugement rendu le même jour dans l'affaire n° 17/1492, le tribunal a mis hors de cause la société TRANSPORTS P. FATTON dans le recouvrement de la dette douanière au motif que celle-ci a agi suivant le mode de représentation directe lors du dédouanement de la marchandise litigieuse, et que de ce fait elle n'est pas tenue au paiement de la dette douanière en tant que coobligée, au sens de l'article 201 paragraphe 3 du Code des douanes communautaires. Or, l'action de la demanderesse qui consiste à contraindre la société TRANSPORTS P. FATTON à fournir une caution ou autres garanties sous astreinte, vise l'obtention d'un sursis de paiement auprès du comptable des douanes chargé du recouvrement de la créance douanière. L'article 348 du Code des douanes prévoit en effet la possibilité pour le redevable de bénéficier d'un sursis à paiement. Toutefois, une telle mesure n'est rendue possible que sur autorisation de l'administration des douanes, après que celui-ci en a expressément formulé la demande dans sa contestation de l'AMR et qu'il a présenté des garanties suffisantes (sous la forme de caution, consignation, valeurs mobilières, affectations hypothécaires ou encore nantissements de fonds de commerce) destinées à assurer le recouvrement de la créance contestée. En outre, si rien ne s'oppose à ce qu'un commissionnaire en douane acquitte les droits en lieu et place du débiteur, et, sur ce fondement, mette en place les garanties prévues par l'article 348 du code précité, encore faut-il que celui-ci ait pris volontairement l'engagement de le faire, d'une part, et que, d'autre part, le sursis au paiement de la dette soit accordé à l'importateur par l'administration des douanes. Tel n'est pas non plus le cas en l'espèce. En effet, s'il est bien établi que la société MASSIS DISTRIBUTION a formulé une demande de sursis à paiement dans la lettre de contestation de l'avis de mise en recouvrement n° 2016/29 qu'elle adressait à la recette régionale des douanes le 24 août 2016 (sa pièce n° 7), elle ne rapporte pas la preuve que cette dernière a répondu favorablement à sa demande ni celle d'un éventuel engagement formellement pris par la société TRANSPORTS P. FATTON sur ta mise en place des garanties prévues par l'article 348 du Code des douanes. En tout état de cause, l'article 348 alinéa 1 er du même code précise que le redevable peut être autorisé à différer le paiement de la créance jusqu'à l'issue du litige, donc avant que le tribunal n'ait statué sur le fond. Par conséquent, l'utilité de recourir à cette voie de recours ne présente plus aucun intérêt à ce stade de la procédure. Cet unique moyen soulevé par les parties sera donc rejeté » (jugement, p. 5 et s.) ; Alors que, la cassation entraine l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; qu'en cassant l'arrêt rendu le 2 mars 2020 par la cour d'appel de Paris (RG n° 18/23115), dans le cadre du pourvoi n° C 20-17.332, du chef du dispositif ayant mis hors de cause la société Fatton, la Cour de cassation censurera l'arrêt attaqué ayant rejeté les demandes de fourniture de garanties relatives aux dettes douanières dont se trouve tenue la société Fatton, ensemble avec la société Massis, et ce en application de l'article 625 du code de procédure civile.
INCA/JURITEXT000046990061.xml
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. FB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Annulation et non-lieu à statuer M. VIGNEAU, président Arrêt n° 6 F-D Pourvois n° M 21-16.608 F 21-17.638 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 I - 1°/ M. [Z] [X], domicilié [Adresse 8], 2°/ Mme [F] [X], domiciliée [Adresse 1], 3°/ la société Intégrale, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 5], 4°/ la société Intégrale Prépa, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 7], ont formé le pourvoi n° M 21-16.608 contre un arrêt rendu le 13 avril 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 5, chambre 8), dans le litige les opposant : 1°/ à M. [U] [H], domicilié [Adresse 4], 2°/ à Mme [C] [E], domiciliée [Adresse 2], 3°/ à [M] [D], ayant été domicilié [Adresse 3], décédé, 4°/ à Mme [G] [D], domiciliée [Adresse 3], 5°/ à M. [T] [D], domicilié [Adresse 6], 6°/ à Mme [N] [D], 7°/ à Mme [K] [D], domiciliées toutes deux [Adresse 3], tous quatre pris en qualité d'héritiers de [M] [D], décédé, défendeurs à la cassation. II - 1°/ [M] [D], 2°/ Mme [G] [D], 3°/ M. [T] [D], 4°/ Mme [N] [D], 5°/ Mme [K] [D], tous quatre pris en qualité d'héritiers de [M] [D], ont formé le pourvoi n° F 21-17.638 contre le même arrêt rendu, dans le litige les opposant : 1°/ à M. [U] [H], 2°/ à Mme [C] [E], 3°/ à M. [Z] [X], 4°/ à Mme [F] [X], 5°/ à la société Intégrale, société par actions simplifiée, 6°/ à la société Intégrale prépa, société par actions simplifiée, défendeurs à la cassation. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Ducloz, conseiller, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [Z] [X], de Mme [F] [X] et des sociétés Intégrale et Intégrale Prépa, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de [M] [D], de Mmes [G], [N] et [K] [D] et de M. [T] [D], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de Mme [E], de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de M. [H], après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Ducloz, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Reprise d'instance 1. Il est donné acte à Mmes [G], [N] et [K] [D] et à M. [T] [D] (les consorts [D]) de ce qu'ils reprennent l'instance en leur qualité d'héritiers de [M] [D], décédé le 21 mai 2022. Jonction 2. En raison de leur connexité, les pourvois n° M 21-16.608 et F 21-17.638 sont joints. Vu l'article 625, alinéa 2, du code de procédure civile : 3. En vertu de ce texte, la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire. 4. Les consorts [D], M. [Z] [X] et Mme [F] [X] (les consorts [X]) ainsi que les sociétés Intégrale et Intégrale prépa se sont pourvus en cassation contre l'arrêt rendu le 13 avril 2021 par la cour d'appel de Paris en ce qu'il déclare prescrite l'action de la société Intégrale et des consorts [X] tendant à l'annulation de l'apport partiel d'actifs de la société Intégrale à la société Intégrale prépa, rejette la demande de la société Intégrale et des consorts [X] d'annulation des cessions d'actions Intégrale prépa à M. [H] et à Mme [E], de l'apport en industrie de M. [H] à la société Intégrale prépa et des actes y afférents et subséquents sous leur signature depuis l'assemblée générale du 10 février 2016, rejette leur demande de restitution des dividendes perçus par M. [H] et Mme [E] et dit n'y avoir lieu à annulation des 2 050 actions émises en rémunération de l'apport partiel d'actif, à reversement à la société Intégrale par Mme [E] et M. [H] de tout dividende qu'ils auraient reçu de la société Intégrale prépa, à reversement à la société Intégrale par le séquestre de tout dividende séquestré, et à mainlevée du séquestre pour annulation des actions par la société Intégrale. 5. La cassation du chef de dispositif de l'arrêt du 29 décembre 2020 déclarant irrecevable l'action de [M] [D] en nullité de l'apport partiel d'actifs de la société Intégrale à la société Intégrale prépa, prononcée par la Cour de cassation par un arrêt du 4 janvier 2023 (pourvois n° 21-10.609 et 21-12.515), entraîne l'annulation, par voie de conséquence, de l'ensemble des chefs de dispositif de l'arrêt critiqués par les pourvois, qui s'y rattachent par un lien de dépendance nécessaire. 6. Il n'y a dès lors pas lieu de statuer sur les pourvois. PAR CES MOTIFS, la Cour : CONSTATE l'annulation, par voie de conséquence, de l'arrêt (n° RG : 19/13420) rendu le 13 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris, en tant qu'il confirme le jugement en ce qu'il a déclaré prescrite l'action de la société Intégrale et des consorts [X] tendant à l'annulation de l'apport partiel d'actifs par la société Intégrale à la société Intégrale prépa, rejette la demande de la société Intégrale, de M. [Z] [X] et de Mme [F] [X] d'annulation des cessions d'actions Intégrale prépa à M. [H] et Mme [E], de l'apport en industrie de M. [H] à la société Intégrale prépa et des actes y afférents et subséquents sous leur signature depuis l'assemblée générale du 10 février 2016, rejette leur demande de restitution des dividendes perçus par M. [H] et Mme [E], dit n'y avoir lieu d'annuler les 2 050 actions émises en rémunération de l'apport partiel d'actif, d'ordonner le reversement à la société Intégrale par Mme [E] et M. [H] de tout dividende qu'ils auraient reçu de la société Intégrale prépa, d'ordonner le reversement à la société Intégrale par le séquestre de tout dividende séquestré, d'ordonner la mainlevée du séquestre pour annulation des actions par la société Intégrale, et statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile ; DIT n'y avoir lieu de statuer sur les pourvois ; Condamne M. [H] et Mme [E] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation M. VIGNEAU, président Arrêt n° 4 F-D Pourvoi n° W 21-14.547 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 1°/ la société Indoro France, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ M. [K] [O], domicilié [Adresse 5], 3°/ M. [E] [H], domicilié [Adresse 4] (Chine), 4°/ la société Exclusive Investments, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], ont formé le pourvoi n° W 21-14.547 contre l'arrêt rendu le 6 janvier 2021 par la cour d'appel de Besançon (1re chambre civile et commerciale), dans le litige les opposant à la société Haussmann expertise et audit, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Ponsot, conseiller, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat des sociétés Indoro France et Exclusive Investments et de MM. [O] et [H], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Haussmann expertise et audit, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Ponsot, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Besançon, 6 janvier 2021), la société Indoro France (la société Indoro), ayant pour président M. [H], pour directeur général M. [O] et pour actionnaire unique la société Exclusive Investments, a, dans le courant de l'année 2017, désigné M. [N] en qualité de commissaire aux comptes titulaire et la société Haussmann expertise & audit (la société Haussmann), dirigée par son gendre, M. [Y], en qualité de commissaire aux comptes suppléant. 2. Le 5 octobre 2018, après avoir procédé à la certification des comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2017, M. [N] a démissionné pour des raisons personnelles. 3. La société Indoro s'est alors rapprochée de la société Haussmann afin d'établir une lettre de mission pour l'exercice 2018 et convenir des honoraires. 4. Par suite d'un désaccord sur le montant des honoraires réclamés, la société Indoro a saisi un tribunal de commerce d'une demande de relèvement de fonctions de ce commissaire aux comptes. Examen des moyens Sur le troisième moyen, ci-après annexé 5. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 6. La société Indoro, MM. [O] et [H] et la société Exclusive Investments font grief à l'arrêt de rejeter leur demande en relèvement de fonction de commissaire aux comptes dirigé contre la société Haussmann, alors « que, comme tout prestataire, le commissaire aux comptes a l'obligation d'informer son client quant aux honoraires qu'il souhaite recevoir en contrepartie de sa prestation ; qu'à ce titre, il appartient au commissaire aux comptes de renseigner son client quant à la possibilité d'une négociation du taux horaire, telle que prévue par l'article R. 823-15 du code de commerce ; qu'en s'abstenant de rechercher, quand ils y étaient invités, si le commissaire aux comptes avait satisfait à cette obligation, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L. 823-7 et R. 823-15 du code de commerce, le second dans sa rédaction antérieure au décret n° 2020-292 du 21 mars 2020. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 823-7 et R. 823-15 du code de commerce : 7. Selon le premier de ces textes, en cas de faute ou d'empêchement, les commissaires aux comptes peuvent être relevés de leurs fonctions avant l'expiration normale de celles-ci, sur décision de justice, à la demande, notamment, de l'organe chargé de la direction ou d'un ou plusieurs associés représentant au moins 5 % du capital social. 8. Il résulte du second que, pour les missions de certification des comptes, les honoraires sont librement fixés d'un commun accord entre le commissaire aux comptes et l'entité contrôlée, préalablement à l'exercice de la mission. 9. Pour rejeter la demande en relèvement de fonction de commissaire aux comptes dirigée contre la société Haussmann, l'arrêt retient qu'un litige sur les honoraires réclamés par le commissaire aux comptes relève de la procédure spécifique prescrite aux articles R. 823-18 et suivants du code de commerce. 10. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la société Haussmann n'avait pas affirmé à la société Indoro que les honoraires réclamés relevaient d'un barème légal, cependant qu'ils sont librement convenus entre les parties, et, à supposer ce fait établi, si elle n'avait pas cherché à induire en erreur son cocontractant et, ce faisant, n'avait pas commis un manquement à l'obligation de probité, de nature à justifier le relèvement de ses fonctions de commissaire aux comptes, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 6 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Besançon ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ; Condamne la société Haussmann expertise & audit aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Haussmann expertise & audit et la condamne à payer à la société Indoro France, à MM. [O] et [H] et à la société Exclusive Investments la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour les sociétés Indoro France et Exclusive Investments et MM. [O] et [H]. PREMIER MOYEN DE CASSATION L'arrêt infirmatif attaqué, critiqué par M. [O], M. [H], la SA EXCLUSIVE INVESTMENTS et la société INDORO FRANCE encourt la censure ; EN CE QU' il a rejeté la demande en relèvement de fonction de commissaire aux comptes dirigé contre la société HAUSSMANN EXPERTISE ET AUDIT ; ALORS QUE, premièrement, une faute commise par le commissaire aux comptes lors de son entrée en fonction, telle que la collusion avec le commissaire aux comptes précédemment en place, est au nombre des fautes susceptibles de justifier le relèvement ; qu'en décidant le contraire, les juges du second degré ont violé les articles L. 823-1 et L. 823-7 du code de commerce ; ALORS QUE, deuxièmement, vainement objecterait-on que les juges du second degré ont encore relevé que les liens d'alliance existant entre le commissaire aux comptes titulaire et son suppléant ne sont pas de nature à porter atteinte à l'indépendance que ces derniers doivent conserver à l'égard de la société qu'ils contrôlent ; qu'en effet, un tel motif, répondant à la contestation des demandeurs au relèvement fondée sur les dispositions de l'article L. 822-10 du code de commerce, ne saurait conférer une base légale à l'arrêt, dès lors qu'il ne dit rien de la collusion entre le commissaire aux comptes titulaire et son suppléant ; qu'à cet égard, l'arrêt doit être censuré pour défaut de base légale des articles L. 823-1 et L. 823-7 du code de commerce. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION L'arrêt infirmatif attaqué, critiqué par M. [O], M. [H], la SA EXCLUSIVE INVESTMENTS et la société INDORO FRANCE encourt la censure ; EN CE QU' il a rejeté la demande en relèvement de fonction de commissaire aux comptes dirigé contre la société HAUSSMANN EXPERTISE & AUDIT ; ALORS QUE, premièrement, comme tout prestataire, le commissaire aux comptes a l'obligation d'informer son client quant aux honoraires qu'il souhaite recevoir en contrepartie de sa prestation ; qu'à ce titre, il appartient au commissaire aux comptes de renseigner son client quant à la possibilité d'une négociation du taux horaire, telle que prévue par l'article R. 823-15 du code de commerce ; qu'en s'abstenant de rechercher, quand ils y étaient invités (conclusions du 23 octobre 2020, p. 17-18 et 19-20), si le commissaire aux comptes avait satisfait à cette obligation, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L. 823-7 et R. 823-15 du code de commerce, le second dans sa rédaction antérieure au décret n° 2020-292 du 21 mars 2020 ; ALORS QUE, deuxièmement, le commissaire aux comptes doit satisfaire à son obligation d'information quant aux honoraires, peu important qu'une procédure particulière soit prévue pour régler les différends susceptibles de surgir quant au montant des honoraires réclamés ; qu'à cet égard, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des articles L. 823-7 et R. 823-15 du code de commerce, le second dans sa rédaction antérieure au décret n° 2020-292 du 21 mars 2020, ensemble les articles R. 823-18 à R. 823-20 du code de commerce. TROISIEME MOYEN DE CASSATION L'arrêt infirmatif attaqué, critiqué par M. [O], M. [H], la SA EXCLUSIVE INVESTMENTS et la société INDORO FRANCE encourt la censure ; EN CE QU' il a rejeté la demande en relèvement de fonction de commissaire aux comptes dirigé contre la société HAUSSMANN EXPERTISE & AUDIT ; ALORS QUE, premièrement, s'agissant de ses honoraires, le commissaire aux comptes doit faire preuve de mesure et le montant des honoraires doit être en proportion de l'importance et de la difficulté des diligences ; qu'en s'abstenant de se prononcer sur ce point (v. conclusions du 23 octobre 2020, p. 17, in fine et p. 20, § 8-9), les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles L. 822-3 et L. 823-7 du code de commerce ; ALORS QUE, deuxièmement, en opposant, pour ne pas se prononcer sur le point de savoir si le commissaire aux comptes avait commis une faute en sollicitant des honoraires excessifs, l'existence d'une procédure particulière prévue pour régler les différends susceptibles de surgir quant au montant des honoraires réclamés, les juges du fond ont statué au bénéfice d'un motif inopérant et ainsi violé les articles L. 822-3 et L. 823-7 du code de commerce, ensemble les articles R. 823-18 à R. 823-20 du code de commerce ; ALORS QUE, troisièmement, en s'abstenant de rechercher, comme il était demandé, si M. [Y] n'a pas commis une faute en affirmant que le président de la compagnie régionale a été saisi, quand aucune saisie n'était intervenue (conclusions du 23 octobre 02020, p. 19-11), les juges du fond ont violé l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 8 F-D Pourvoi n° V 21-15.742 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 Mme [O] [G], épouse [L], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 21-15.742 contre l'arrêt rendu le 25 mars 2021 par la cour d'appel de Lyon (3e chambre A), dans le litige l'opposant à la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Est Champagne, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Guerlot, conseiller référendaire, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de Mme [L], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Est Champagne, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, M. Guerlot, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 25 mars 2021), par un acte du 6 août 2008, la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Est Champagne (la banque) a consenti à la société VAEB un prêt d'un montant de 500 000 euros, remboursable en quatre-vingt-quatre mois au taux de 5,80 % l'an, garanti par le cautionnement du même jour de sa dirigeante, Mme [L], dans la limite de 650 000 euros et pour une durée de neuf ans. La société VAEB ayant été mise en redressement puis liquidation judiciaires, la banque a assigné en paiement Mme [L]. Examen des moyens Sur le second moyen, ci-après annexé 2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais, sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. Mme [L] fait grief à l'arrêt de la condamner en sa qualité de caution au paiement de la somme de 146 417,97 euros, outre les intérêts au taux conventionnel de 5,80 % l'an à compter du 22 novembre 2017, et de rejeter ses demandes indemnitaires à hauteur de 146 417,97 euros et de 3 000 euros, alors « que le juge doit, en toutes circonstances, observer et faire observer le principe de la contradiction ; qu'en faisant application de l'article 2313 du code civil énonçant que la caution ne peut opposer au créancier les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur, sans que les parties aient été mises à même de discuter la mise en oeuvre de cette règle dont la cour d'appel relevait d'office l'application, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 16 du code de procédure civile : 4. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. 5. Pour rejeter les demandes de Mme [L] en paiement de dommages et intérêts fondées sur le manquement de la banque à son obligation d'information prévue aux articles L. 311-12 et L. 312-9 du code de la consommation, dans leur version applicable au litige, l'arrêt, après avoir énoncé que, si en application de l'article 2313 du code civil, la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal et qui sont inhérentes à la dette, elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur, retient que le formalisme attaché au contrat de crédit constitue une exception purement personnelle au débiteur principal, procédant de sa qualité de consommateur auquel un professionnel a fourni un service et qu'il ne peut être opposé au créancier par la caution. 6. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur le moyen tiré de l'application de l'article 2313 du code civil, qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme [L] de ses demandes de dommages et intérêts de 146 417,97 euros, au titre du devoir de mise en garde, et de 3 000 euros, au titre d'un préjudice moral, et statue sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 25 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon autrement composée ; Condamne la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Est Champagne aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Caisse régionale de crédit agricole mutuel Centre Est Champagne et la condamne à payer à Mme [L] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat aux Conseils, pour Mme [L]. PREMIER MOYEN DE CASSATION Mme [L] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée en sa qualité de caution au paiement de la somme de 146 417,97 € outre les intérêts au taux conventionnel de 5,80 % l'an à compter du 22 novembre 2017, et de l'avoir déboutée de ses propres demandes indemnitaires à hauteur de 146 417,97 € et de 3 000 €, alors : 1°) d'une part, que le juge doit, en toutes circonstances, observer et faire observer le principe de la contradiction ; qu'en faisant application de l'article 2313 du code civil énonçant que la caution ne peut opposer au créancier les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur, sans que les parties aient été mises à même de discuter la mise en oeuvre de cette règle dont la cour d'appel relevait d'office l'application, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 2°) que Mme [L] soutenait dans ses conclusions (p. 5 à 10, 13) que son moyen selon laquelle aucune notice d'assurance ne lui avait été remise au moment de la souscription du prêt, ni n'avait été annexée au prêt, s'évinçait du fait que la banque avait communiqué par courrier officiel de son conseil (prod. n° 5 : pièce d'appelant n° 17), en réponse à sa sommation de communiquer (prod. n° 6 : pièce d'appelant n° 14), tous les exemplaires originaux de la demande d'adhésion à l'assurance emprunteur de groupe en date du 29 juillet 2008 (prod. n° 4 : pièce d'intimée n° 4) ; qu'en jugeant néanmoins par une simple affirmation qu'aucun des manquements allégués par Mme [L] n'était démontré, sans répondre à son moyen opérant dont il résultait que la banque avait conservé par-devers elle l'intégralité de la demande d'adhésion incluant l'éventuelle notice d'assurance qui aurait dû être remise à l'adhérente ou annexée au prêt, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 3°) au surplus, qu'il résultait tant de l'original de la demande d'adhésion à l'assurance emprunteur de groupe en date du 29 juillet 2008 (prod. n° 4 : pièce d'intimée n° 4) que de la seconde demande d'adhésion en date du 30 octobre 2008 (prod. n° 7 : pièce d'appelant n° 12) que ces documents ne comportaient pas de notice d'assurance, mais uniquement les conditions générales proprement dites dans leur globalité et « valant notice d'assurance » ; qu'en jugeant néanmoins qu'aucun des manquements allégués par Mme [L] n'était démontré, la cour d'appel a méconnu le sens clair et précis des documents d'adhésion à l'assurance emprunteur des 29 juillet 2008 et du 30 octobre 2008 et les a dénaturés ; 4°) subsidiairement, qu'en énonçant d'abord qu'aucun manquement par la banque au formalisme relatif au contrat de prêt n'était démontré, ce qui impliquait qu'une notice d'assurance en bonne et due forme avait été remise à l'adhérente au moment de la souscription du prêt et de l'assurance, puis en jugeant (arrêt, page 4) que « Mme [L] ne pouvait ignorer qu'aucune assurance ne garantissait le prêt au moment de la souscription de son engagement de caution », la cour d'appel s'est contredite et a violé l'article 455 du code de procédure civile ; SECOND MOYEN DE CASSATION Mme [L] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée en sa qualité de caution au paiement de la somme de 146 417,97 € outre les intérêts au taux conventionnel de 5,80 % l'an à compter du 22 novembre 2017, et de l'avoir déboutée de ses propres demandes indemnitaires à hauteur de 146 417,97 € et de 3 000 €, alors : 1°) que Mme [L] faisait valoir dans ses conclusions (p. 11 et 13) que la banque avait engagé sa responsabilité en ne l'informant pas de la situation de non-assurance de l'emprunteur quant à l'invalidité de première catégorie ni des risques qu'elle prenait en s'engageant comme caution d'un débiteur ainsi insuffisamment assuré ; que pour débouter la caution de ses demandes indemnitaires, la cour d'appel a jugé, d'une part, que les griefs tirés du non-respect par la banque du formalisme protecteur du code de la consommation s'analysaient en des exceptions irrecevables, d'autre part, que Mme [L] ne pouvait ignorer en sa double qualité de dirigeante de la société emprunteuse et de caution que l'assurance n'était pas en place au jour de la signature du cautionnement, et enfin, que le prêteur n'était pas tenu d'un devoir de mise en garde envers la caution ; qu'en statuant ainsi, sans répondre au moyen opérant de la caution dont il résultait que la banque avait manqué à son devoir d'information et de conseil en n'éclairant pas la caution sur l'insuffisance de couverture assurantielle de l'emprunteur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) que, à titre subsidiaire, il incombe au banquier de prouver qu'il s'est acquitté de son obligation d'information et de conseil à l'égard de la caution ; qu'en jugeant que Mme [L], caution non avertie, échouait à rapporter la preuve d'un défaut d'information de la banque, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1353 ensemble l'article 1231-1 du code civil ;
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant : COMM. CH.B COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 4 janvier 2023 Cassation partielle M. VIGNEAU, président Arrêt n° 9 F-D Pourvoi n° U 20-14.426 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 JANVIER 2023 La société Assurance mutuelle des motards (AMDM), société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 20-14.426 contre l'arrêt rendu le 14 janvier 2020 par la cour d'appel de Montpellier (2e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ au directeur général des finances publiques, domicilié [Adresse 1], 2°/ au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France, domicilié [Adresse 3], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Lion, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de la société Assurance mutuelle des motards, de la SCP Foussard et Froger, avocat du directeur général des finances publiques et du directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France, après débats en l'audience publique du 8 novembre 2022 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Lion, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Fornarelli, greffier de chambre, la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 14 janvier 2020), la société Assurance mutuelle des motards (la société d'assurances) est redevable de la taxe spéciale sur les conventions d'assurance (TSCA) prévue aux articles 991 et suivants du code général des impôts. 2. Le 13 décembre 2012, à la suite d'une vérification de sa comptabilité, l'administration fiscale lui a notifié une proposition de rectification au titre des exercices 2009 et 2010, au motif, notamment, que devait être appliqué à la garantie « équipement du conducteur », incluse dans les contrats d'assurance multirisques moto/scooter/auto qu'elle proposait, le taux de 18 % prévu à l'article 1001, 5° bis, du code général des impôts, et non le taux de droit commun de 9 %. Les droits ont été mis en recouvrement le 12 mai 2014. 3. Après rejet de sa réclamation par décision du 30 juillet 2015, la société d'assurances a saisi un tribunal de grande instance afin d'obtenir la nullité de la proposition de rectification et de l'avis de mise en recouvrement (AMR) ainsi que le dégrèvement des impositions. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le premier moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 5. La société d'assurances fait grief à l'arrêt de dire bien fondée la décision de rejet du 30 juillet 2015, relativement au taux de la TSCA applicable à la garantie « équipement du conducteur » fixé à 18 % et aux modalités de calcul de la rectification liée à la substitution du taux de 18 % au taux de 9 %, et de rejeter toutes autres demandes, alors « que la motivation de la proposition de rectification au regard des exigences des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales s'apprécie indépendamment de la régularité de l'avis de mise en recouvrement au regard de l'article R* 256-1 du livre des procédures fiscales ; que la mention d'un impôt imprécis ou inexistant dans l'avis de mise en recouvrement et dans la proposition de rectification à laquelle il renvoie est source de confusion et justifie la décharge de l'impôt réclamé ; qu'en l'espèce, la proposition de rectification du 13 décembre 2012 visait, au titre de l'impôt objet du rehaussement, la taxe sur les conventions d'assurance ; que l'avis de mise en recouvrement visait des "prélèvements sur les primes et cotisations de contrats d'assurance-vie" au lieu de la taxe sur les conventions d'assurance ; qu'en se référant à des "prélèvements sur les primes et cotisations de contrats d'assurance-vie", l'avis de mise en recouvrement visait ainsi des prélèvements qui sont imprécis ou inexistants ; que l'avis de mise en recouvrement a donc créé une confusion dans la mesure où il ne visait pas un texte ou un impôt applicable à la détermination des droits en cause ; qu'il en résultait une véritable contradiction entre l'impôt imprécis et inexistant, visé par l'avis de mise en recouvrement, et le texte de l'article 991 du code général des impôts, qui concerne la taxe sur les conventions d'assurance, visé clairement par la proposition de rectification ; qu'en jugeant néanmoins que l'avis de mise en recouvrement était régulier dans la mesure où celui-ci se référait expressément à la proposition de rectification du 13 décembre 2012, qui contenait l'énonciation précise des textes du code général des impôts fondant les rehaussements proposés et des montants des droits découlant de la rectification, la cour d'appel a violé les articles R. 256-1, L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales. » Réponse de la Cour Vu l'article R* 256-1 du livre des procédures fiscales : 6. Selon ce texte, l'AMR indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l'objet de cet avis et, lorsqu'il est consécutif à une procédure de rectification, fait référence à la proposition de rectification prévue à l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. 7. Pour rejeter la demande d'annulation de l'AMR du 12 avril 2014, l'arrêt, après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que si cet avis ne mentionne pas l'article 991 du code général des impôts, il se réfère expressément à la proposition de rectification du 13 décembre 2012, laquelle contient une énonciation précise des textes du code général des impôts fondant les rehaussements proposés, retient que la société d'assurances, qui ne justifie d'aucun grief résultant de l'absence de mention de ces textes, n'est pas fondée à invoquer l'irrégularité de l'AMR au regard des dispositions de l'article R* 256-1 du livre des procédures fiscales. 8. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si la référence, dans l'AMR, à des « prélèvements sur les primes et cotisations de contrats d'assurance-vie », n'était pas en contradiction avec la proposition de rectification, qui visait des rappels de TSCA, et de nature à créer une confusion sur la nature de l'imposition litigieuse, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit bien fondée la décision du 30 juillet 2015 de la direction générale des finances publiques, direction des vérifications nationales et internationales, par laquelle celle-ci a rejeté la réclamation contentieuse formée le 16 juillet 2014 par la mutuelle, relativement au taux de la TSCA applicable à la garantie « Equipement du conducteur » fixé à 18 % et aux modalités de calcul de la rectification liée à la substitution du taux de 18 % au taux de 9 %, rejette toutes autres demandes, et statue sur les dépens et sur l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 14 janvier 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ; Condamne le directeur général des finances publiques et le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par le directeur général des finances publiques et le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et les condamne à payer à la société Assurance mutuelle des motards la somme globale de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour la société Assurance mutuelle des motards. Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit bien fondée la décision du 30 juillet 2015 de la direction générale des finances publiques, direction des vérifications nationales et internationales, par laquelle celle-ci a rejeté la réclamation contentieuse formée le 16 juillet 2014 par l'Assurance Mutuelle des Motards, relativement au taux de la taxe sur les conventions d'assurance (TSCA) applicable à la garantie « Équipement du conducteur » fixé à 18 % et aux modalités de calcul de la rectification liée à la substitution du taux de 18 % au taux de 9 % et d'avoir rejeté toutes autres demandes, Aux motifs propres que « l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction en vigueur au moment de la mise en oeuvre de la procédure fiscale, dispose qu'à l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications et que lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire, l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai ; que le premier alinéa de l'article L. 57 énonce que l'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ; qu'il résulte de ces textes que la proposition de rectification doit indiquer le montant des droits, taxes et pénalités résultant de la rectification et être motivée afin de permettre au contribuable de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ; que, dans le cas présent, la proposition de rectification adressée le 13 décembre 2012 à la mutuelle comporte huit feuilles, comme indiqué sur la lettre avisant celle-ci, qu'elle dispose d'un délai de 30 jours pour faire part de ses observations, la huitième feuille, numérotée « 6 » en base de page, s'achevant par le paragraphe suivant : « Votre bonne foi n'étant pas mise en cause, les montants des droits, taxes et contributions supplémentaires qui vous sont proposées par la présente seront assorties de l'intérêt de retard au taux de 0,40 % par mois, conformément aux dispositions de l'article 1727 du code général des impôts » ; qu'il s'ensuit, contrairement à ce que soutient l'administration, que la feuille intitulée « conséquences financières du contrôle (article L. 48 du livre des procédures fiscales) » n'était pas jointe à la proposition de rectification ; que comme le retient à juste titre le premier juge, la proposition de rectification précise, en page 2, que le rappel des droits au titre de la TSCA est de 112 598 euros au titre de l'exercice 2009 et de 95 670 euros au titre de l'exercice 2010 et, en page 4 que le rappel des droits au titre de la taxe applicable à la garantie « Équipement conducteur » est de 327 225 euros au titre de l'exercice 2009 et de 369 412 euros au titre de l'exercice 2010, en sorte que le montant des droits résultant de la rectification se trouve précisément indiqué ; (?) ; que, pour le surplus, la mutuelle n'est pas fondée à invoquer l'irrégularité de l'avis de mise en recouvrement au regard des dispositions de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales, alors que celui-ci se réfère expressément à la proposition de rectification du 13 décembre 2012 qui contient l'énonciation précise des textes du code général des impôts fondant les rehaussements proposés et des montants des droits découlant de la rectification ; ». Et aux motifs adoptés que « la proposition qui lui a été adressée par l'administration fiscale le 13 décembre 2012 contient bien, conformément aux exigences de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales, le montant des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications envisagées, puisqu'elle précise, en page 2, que les montants de rappels de taxes sur les conventions d'assurance sont de 112 598 euros au titre de l'exercice 2009 et de 95 670 euros au titre de l'exercice 2010, en page 4, que les montants de rappels de taxes, suite à la rectification du taux appliqué à la garantie « équipement du conducteur » sont de 337 225 euros au titre de l'exercice 2009 et de 369 412 euros au titre de l'exercice 2010 et enfin, en page 6, que la bonne foi de la requérante n'est pas remise en cause, de sorte que les montants des droits, taxes et contributions supplémentaires proposés seront assorties d'un simple intérêt de retard au taux de 0,40 % par mois ; que si l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014 ne mentionne effectivement pas l'article 991 du code général des impôts, en revanche, il se réfère expressément à la proposition de rectification du 13 décembre 2012 laquelle contient une énonciation précise des articles de loi applicables ; qu'en conséquence, la société requérante ne justifie d'aucun grief résultant de l'absence de mention dans l'avis de mise en recouvrement du 12 mai 2014 de l'article susvisé du code général des impôts ». 1° Alors, en premier lieu, qu'il résulte des articles L. 48 et L. 57 du livre des procédures fiscales que la proposition de rectification doit indiquer le montant des droits, taxes et pénalités résultant de la rectification et être motivée afin de permettre au contribuable de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation ; que la proposition de rectification du 13 décembre 2012 indiquait, en page 2, que le rappel des droits au titre de la taxe sur les conventions d'assurance était de 112 598 euros au titre de l'exercice 2009 et de 95 670 euros au titre de l'exercice 2010 et, en page 4 que le rappel des droits au titre de la taxe applicable à la garantie « Équipement conducteur » était de 327 225 euros au titre de l'exercice 2009 et de 369 412 euros au titre de l'exercice 2010 ; que toutefois il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que, contrairement à ce que soutenait l'administration, la feuille intitulée « conséquences financières du contrôle (article L. 48 du livre des procédures fiscales) » n'était pas jointe à la proposition de rectification adressée le 13 décembre 2012 ; qu'ainsi, aucun tableau récapitulatif de l'ensemble des rectifications n'a été produit dans la proposition de rectification, parmi les huit feuilles qui sont parvenues à la société Assurance Mutuelle des Motards ; qu'en déclarant néanmoins que les exigences de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales avaient été respectées, la cour d'appel a violé ledit article ainsi que l'article L. 57 du livre des procédures fiscales. 2° Alors, en second lieu, que la motivation de la proposition de rectification au regard des exigences des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales s'apprécie indépendamment de la régularité de l'avis de mise en recouvrement au regard de l'article R. 256-1 du livre des procédures fiscales ; que la mention d'un impôt imprécis ou inexistant dans l'avis de mise en recouvrement et dans la proposition de rectification à laquelle il renvoie est source de confusion et justifie la décharge de l'impôt réclamé ; qu'en l'espèce, la proposition de rectification du 13 décembre 2012 visait, au titre de l'impôt objet du rehaussement, la taxe sur les conventions d'assurance ; que l'avis de mise en recouvrement visait des « prélèvements sur les primes et cotisations de contrats d'assurance-vie » au lieu de la taxe sur les conventions d'assurance ; qu'en se référant à des « prélèvements sur les primes et cotisations de contrats d'assurance-vie », l'avis de mise en recouvrement visait ainsi des prélèvements qui sont imprécis ou inexistants ; que l'avis de mise en recouvrement a donc créé une confusion dans la mesure où il ne visait pas un texte ou un impôt applicable à la détermination des droits en cause ; qu'il en résultait une véritable contradiction entre l'impôt imprécis et inexistant, visé par l'avis de mise en recouvrement et le texte de l'article 991 du code général des impôts, qui concerne la taxe sur les conventions d'assurance, visé clairement par la proposition de rectification ; qu'en jugeant néanmoins que l'avis de mise en recouvrement était régulier dans la mesure où celui-ci se référait expressément à la proposition de rectification du 13 décembre 2012 qui contenait l'énonciation précise des textes du code général des impôts fondant les rehaussements proposés et des montants des droits découlant de la rectification, la cour d'appel a violé les articles R. 256-1, L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit bien fondée la décision du 30 juillet 2015 de la direction générale des finances publiques, direction des vérifications nationales et internationales, par laquelle celle-ci a rejeté la réclamation contentieuse formée le 16 juillet 2014 par la mutuelle, relativement au taux de la taxe sur les conventions d'assurance (TSCA) applicable à la garantie « Équipement du conducteur » fixé à 18 % et aux modalités de calcul de la rectification liée à la substitution du taux de 18 % au taux de 9 %, et d'avoir rejeté toutes autres demandes, Aux motifs propres que « selon l'article 1001 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance est fixé (?) à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestre à moteur (5° bis) et à 9 % pour toutes autres assurances (6°) ; qu'en l'occurrence, l'article 3.4 des conditions générales du contrat d'assurance multirisque moto/scooter/auto, proposé par la mutuelle, dispose que sont garantis, lors d'un accident de la circulation avec le véhicule assuré, les effets vestimentaires de protection du conducteur, comprenant les vêtements spécialement adaptés pour la pratique du deux-roues (bottes, combinaison, pantalon, blouson, gants et protection dorsale), ainsi que le casque et sa visière, conçus et homologués pour la pratique du deux-roues, la personne assurée étant tout conducteur désigné aux conditions particulières ; que cette garantie « Équipement du conducteur » couvre les dommages causés aux équipements portés par le conducteur du véhicule assuré lors d'un accident de la circulation impliquant le véhicule assuré, que le conducteur soit le propriétaire ou pas du véhicule ; qu'elle ne peut donc jouer, comme le relève à juste titre le premier juge, qu'à l'occasion d'un accident mettant en cause un véhicule terrestre à moteur dans lequel le conducteur subit des dommages matériels consécutifs à une détérioration de ses effets vestimentaires ou de son casque et sa visière, portés lors de l'accident ; que la garantie ne peut jouer lorsque les dommages proviennent d'un sinistre ayant une autre cause que celle résultant d'un accident de la circulation, notamment du vol de l'équipement ou de sa dépréciation ; que la garantie « Équipement du conducteur », qu'elle soit mise en oeuvre concomitamment à la garantie responsabilité civile ou la garantie dommages matériels ou de façon distincte de ces deux garanties, lorsque les dommages sont exclusivement subis par des tiers ou que le propriétaire du véhicule assuré n'est pas le conducteur, ne peut jouer qu'à l'occasion d'un accident de la circulation dans lequel le conducteur subit des dommages affectant son équipement ; que la garantie « Équipement du conducteur » ne couvre pas, en effet, un risque distinct du risque automobile, cette garantie n'étant pas susceptible d'être mise en oeuvre en dehors d'un accident de la circulation, en sorte que le risque de dégradation de l'équipement du conducteur ayant pour fait générateur d'un tel accident entre nécessairement dans le cadre du 5° bis de l'article 1001 du code général des impôts, qui assujettit au taux de 18 % les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur ; que c'est par ailleurs, par des motifs pertinents, que le premier juge a considéré que si la garantie dommages corporels du conducteur bénéficie du taux de base réduit à 9 % en application de la doctrine de l'administration fiscale applicable aux périodes d'imposition en cause, il ne peut en être déduit que la garantie complémentaire « Équipement du conducteur » doit également bénéficier de ce taux, en l'absence d'une dérogation spécifique octroyée par l'administration » ; Et aux motifs adoptés que « le taux de 18 % s'applique à toute garantie liée de manière indissociable aux assurances de responsabilité civile ou de dommages garantissant les risques nés de l'usage d'un véhicule terrestre à moteur ; qu'en l'espèce, l'article 3.4 des conditions générales du contrat d'assurance multirisque moto/scooter/auto de la demanderesse énonce : « nous garantissons, lors d'un accident de la circulation avec votre véhicule assuré : les effets vestimentaires de protection du conducteur. Ils se composent des vêtements spécialement adaptés pour la pratique du deux-roues (bottes, combinaisons, pantalons, blousons, gants et protection dorsale), ainsi que le casque et sa visière, conçus et homologués pour la pratique du deux-roues » ; qu'il s'évince de ces dispositions contractuelles que la mise en jeu de la garantie « Équipement du conducteur » est conditionnée au constat préalable d'un accident de la circulation concernant le véhicule assuré ; que cette notion d'accident est ainsi définie dans le lexique annexé aux conditions générales du contrat : « événement non intentionnel, soudain, imprévu et extérieur à la victime ou aux biens endommagés et constituant la cause des dommages corporels ou matériels » ; que cette garantie complémentaire couvrant les dommages matériels subis par les équipements de protection du motard ne peut donc jouer qu'à l'occasion d'un sinistre mettant en cause un véhicule terrestre à moteur ; que le lien indissociable entre ces deux garanties est ainsi établi ; que le texte du 5° bis de l'article 1001 du code général des impôts est rédigé en termes assez larges puisqu'il vise à assujettir au taux de 18 % les assurances : « « (?) contre les risques de toute nature (?) » ; que le risque d'une dégradation subie par les équipements spéciaux du motard à l'occasion d'un accident de la circulation entre assurément dans le cadre de cette définition ; que bien que l'assurance individuelle « dommages corporels du conducteur » ait pu bénéficier du taux de taxe réduit à 9 % en application de la doctrine 7 I-55 applicable au cours des périodes d'imposition concernées, il ne peut en être déduit que la garantie complémentaire « Équipement du conducteur » doit également bénéficier de ce taux, en l'absence de dérogation spécifique octroyée par l'administration fiscale sur ce point ; que de surcroît ces deux dernières garanties ne sont aucunement indissociables ; qu'en effet, il est tout à fait envisageable qu'un accident de la circulation provoque des dommages matériels aux équipements du pilote sans pour autant leur occasionner des blessures corporelles, précisément grâce à la protection offerte par ses équipements spéciaux ; que, dans ces conditions, les éléments statistiques produits par la requérante au soutien de sa demande, à les supposer avérés, ne suffisent pas à démontrer le bien-fondé de ses prétentions sur ce point ; que de même afin de démontrer le caractère dissociable de ces garanties, la société demanderesse ne peut soutenir qu'« une chute en montant ou en descendant du véhicule peut provoquer des dommages et nécessiter la mise en jeu de la garantie « équipement du conducteur » sans mise en jeu des garanties principales », dès lors qu'il résulte des termes explicites des conditions générales qu'en l'absence d'accident, la garantie « équipement du conducteur » ne peut jouer » ; 1° Alors, en premier lieu, qu' en application de l'article 1001 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance est fixé à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestre à moteur (5° bis) et à 9 % pour toutes autres assurances (6°) ; qu'il convient d'appliquer le taux de 18 % à l'ensemble des garanties qui portent sur des risques indissociables par nature de ceux couverts par les garanties principales du contrat à savoir dommages matériels et responsabilité civile ; que l'arrêt relève que la garantie « Équipement du conducteur » peut être mise en oeuvre concomitamment à la garantie responsabilité civile ou la garantie dommages matériels ou de façon distincte de ces deux garanties, lorsque les dommages sont exclusivement subis par des tiers ou que le propriétaire du véhicule assuré n'est pas le conducteur ; que la garantie « Equipement du conducteur », qui vise les effets vestimentaires ou le casque et la visière du conducteur, couvre des risques autres que ceux qui sont couverts par les assurances de responsabilité civile ou de dommages garantissant les risques nés de l'usage d'un véhicule terrestre à moteur, même si elle intervient à la suite d'un accident automobile ; que le fait que cette garantie puisse jouer à l'occasion d'un litige mettant en cause un véhicule terrestre à moteur ne suffit pas à lier de manière indissociable son sort à celui de ces assurances ; qu'en jugeant que la garantie litigieuse constitue une assurance contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestre à moteur, au sens de l'article 1001, 5° bis du code général des impôts, en se fondant sur le seul critère de l'« accident de la circulation », insuffisant à démonter l'indissociabilité ou non entre les différentes garanties et sans relever que la garantie « Equipement du conducteur » litigieuse couvre des risques autres que ceux qui sont couverts par les assurances de responsabilité civile ou de dommages garantissant les risques nés de l'usage d'un véhicule terrestre à moteur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article précité ; 2° Alors, en second lieu, que selon l'article 1001 du code général des impôts, dans sa rédaction alors applicable, le tarif de la taxe spéciale sur les contrats d'assurance est fixé à 18 % pour les assurances contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestre à moteur (5° bis) et à 9 % pour toutes autres assurances (6°) ; que l'arrêt attaqué relève que sont garantis, lors d'un accident de la circulation avec le véhicule assuré, les effets vestimentaires de protection du conducteur, comprenant les vêtements spécialement adaptés pour la pratique du deux-roues (bottes, combinaison, pantalon, blouson, gants et protection dorsale), ainsi que le casque et sa visière, conçus et homologués pour la pratique du deux-roues, la personne assurée étant tout conducteur désigné aux conditions particulières ; que la circonstance que la garantie « Équipement du conducteur » ne peut jouer qu'à l'occasion d'un sinistre mettant en cause un véhicule terrestre à moteur ne suffit pas à lier de manière indissociable son sort à celui des assurances de dommages ; qu'en l'espèce, la garantie « Équipement du conducteur » couvre seulement les effets de protection du conducteur et ne couvre aucun élément du véhicule lui-même ; qu'il en résulte que la garantie « Équipement du conducteur » ne peut pas constituer une assurance contre les risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur, au sens de l'article 1001-5° bis du code général des impôts, qui est d'interprétation stricte, s'agissant d'un texte dérogatoire qui fixe un taux de 18 %, alors que le taux de droit commun est de 9 % ; qu' en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article précité.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 34 F-D Pourvoi n° W 21-22.022 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 1°/ la société Accepa, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 30], 2°/ M. [NX] [M], domicilié [Adresse 37], 3°/ Mme [L] [K], domiciliée [Adresse 47], 4°/ la société Aupaval, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 49], 5°/ M. [I] [J], domicilié [Adresse 10], 6°/ la société Barjanis, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 15], 7°/ la société B2C, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 46], 8°/ la société Barradounnes, dont le siège est [Adresse 54], 9°/ la société BCSJ, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 50], 10°/ la société Cateo, dont le siège est [Adresse 35], 11°/ la société Celineric Airport, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 36], 12°/ la société Cacalou, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 28], 13°/ la société Chomarat LMP, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 8], 14°/ la société Evan, société à responsabilité limitée, dont le siège est chez M. [B] [AK], [Adresse 18], 15°/ la société Grancher, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 42], 16°/ la société Gralpigi patrimoine, dont le siège est [Adresse 3], 17°/ la société Goussard, dont le siège est [Adresse 16], 18°/ la société Grenier et fils, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], 19°/ la société Immolauze, dont le siège est [Adresse 45], 20°/ la société Jalnis immobilier, dont le siège est [Adresse 11], 21°/ la société JFB, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 20], 22°/ la société Lauderdale, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 52], 23°/ la société Le Saint-Germain, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 31], 24°/ M. [V] [X], domicilié [Adresse 39], 25°/ la société LMP des Kars, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 7], 26°/ la société Les Clarines, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 13], 27°/ la société Mairesse LMP, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 27], 28°/ la société Mieli LMP, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 14], 29°/ M. [Y] [SL], domicilié [Adresse 48], 30°/ la société Menim, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], 31°/ la société Indivision [RR] [U] [GA] [UK], dont le siège est [Adresse 6], représentée par Mme [U] [RR] [JE], Mme [GA] [RR] [A] et M. [UK] [RR], venant aux droits de [Y] [RR], 32°/ la société Renaudeau, entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 4], 33°/ la société Seven Joval, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 32], 34°/ M. [S] [XO], domicilié [Adresse 26], 35°/ la société Turquin-Lucas LMP, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], 36°/ la société Tinon, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 19], 37°/ la société Philoucat, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 9], 38°/ la société CDRS, venant aux droits de la société RS3A, société à responsabilité limitée, dont le siège est chez M. [IU] [JO], [Adresse 53], 39°/ la société Romane, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 51], 40°/ la société Boisgrand, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 41], 41°/ la société Bel Enclos, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 33], 42°/ M. [Y] [EB], domicilié [Adresse 29], 43°/ la société Liesse patrimoine foncier, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 41], 44°/ la société Grichting LMP, société à responsabilité limitée, dont le siège est société Fiducys, [Adresse 41], 45°/ M. [IJ] [P], domicilié [Adresse 21], ont formé le pourvoi n° W 21-22.022 contre l'arrêt rendu le 22 juin 2021 par la cour d'appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige les opposant : 1°/ à M. [E] [R], domicilié [Adresse 25], 2°/ à la société [E] [R] et [T] [LN], anciennement dénommée société [R] [LY] [LN], notaires associés, société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 25], 3°/ à M. [SB] [D], domicilié [Adresse 57], 4°/ à [UA] [OH], ayant été domicilié [Adresse 58], décédé, 5°/ à M. [H] [BM], domicilié [Adresse 43], 6°/ à M. [N] [G], domicilié [Adresse 44], 7°/ à M. [W] [RG], domicilié [Adresse 12], 8°/ à la société Bougainvillée, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 22], 9°/ à la société Eden Life, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 34], 10°/ à la société Itineraire, société à responsabilité limitée, dont le siège est chez Mme [C] [GK], [Adresse 23], 11°/ à la société Istechtat, dont le siège est [Adresse 17], 12°/ à la société Jeanlyro, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 56], 13°/ à la société Lola, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 38], 14°/ à la société Les Prairies de Mansac, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 40], 15°/ à la société Nadehmag, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 55], 16°/ à la société [OH] [UA], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 58], représentée par [UA] [OH], 17°/ à la société Pasbrin, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 59], 18°/ à Mme [Z] [F], veuve [OH], domiciliée [Adresse 24], venant aux droits de son époux [UA] [OH], décédé, 19°/ à Mme [XE] [OH], domiciliée [Adresse 24], venant aux droits de son père, [UA] [OH], décédé, défendeurs à la cassation. M. [BM], les sociétés Eden Life, Istechtat et Jeanlyro, Mme [Z] [F] veuve [OH] et Mme [XE] [OH], venant toutes deux aux droits de [UA] [OH] ont formé un pourvoi incident contre le même arrêt. Les demandeurs aux pourvois principal et incident invoquent, chacun, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation identique annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat des sociétés Accepa, Aupaval, Barjanis, B2C, Barradounnes, BCSJ, Cateo, Celineric Airport, Cacalou, Chomarat LMP, Evan, Grancher, Gralpigi patrimoine, Goussard, Grenier et fils, Immolauze, Jalnis immobilier, JFB, Lauderdale, Le Saint-Germain, LMP des Kars, Les Clarines, Mairesse LMP, Mieli LMP, Menim, Indivision [RR] [U] [GA] [UK], venant aux droits de [Y] [RR], Renaudeau, Seven Joval, Turquin-Lucas LMP, Tinon, Philoucat, CDRS, Romane, Boisgrand, Bel Enclos, Liesse patrimoine foncier, Grichting LMP, Eden Life, Istechtat, Jeanlyro, MM. [M], [J], [X], [SL], [XO], [EB], [P], [UA] [OH], [BM], Mmes [K], [F], veuve [OH] et [OH], venant toutes deux aux droits de [UA] [OH], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [R] et de la société [E] [WU] [R] et [T] [LN], et l'avis de Mme Cazaux-Charles, avocat général, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Désistement partiel 1. Il est donné acte à M. [J] du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre M. [R] et la SCP [E] [WU] [R] et [T] [LN]. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Bordeaux, 22 juin 2021), la société Mérigest (le vendeur) a vendu en l'état futur d'achèvement des lots de copropriété dans une résidence de tourisme à des investisseurs qui s'engageaient à lui consentir un bail commercial sur les biens ainsi acquis. 3. Les actes authentiques de vente et de bail, dressés par M. [R] (le notaire), associé de la SCP [O] [R], [D] [LY] et [T] [LN] (la SCP), stipulaient que la dernière fraction du prix était payable lors du remboursement de la TVA et que le notaire constituait, avec les fonds provenant de ce remboursement, un compte séquestre garantissant au minimum le paiement d'une année de loyer hors taxes. 4. Toutefois, pour MM. [D], [P], [X], [XO], [RG], et pour les sociétés Accepta, Aupaval, Barjanis, Immolauze, Jeanlyro, Lola, Nadehmag, Philoucat, le notaire n'a dressé que l'acte authentique de vente qui prévoyait la constitution d'une garantie locative, sans préciser qu'elle serait constituée par les fonds provenant du remboursement de la TVA. 5. En vertu d'un mandat qui avait été consenti par les acquéreurs lors de la conclusion du contrat de réservation, le remboursement de la TVA a été versé par l'administration fiscale au vendeur, qui n'a pas constitué la garantie locative. Le vendeur ayant été placé en liquidation judiciaire, les acquéreurs ont déclaré des créances de loyers. 6. Invoquant des manquements du notaire à son obligation d'assurer l'efficacité des actes qu'il dresse, ainsi qu'à son devoir d'information et de conseil, les acquéreurs l'ont assigné en responsabilité avec la SCP. Examen des moyens Sur les moyens, pris en leur quatre branches, des pourvois principal et incident, rédigés en termes identiques et réunis, formés par M. [D], M. [P], M. [X], M. [XO], M. [RG], et les sociétés Accepta, Aupaval, Barjanis, Immolauze, Jeanlyro, Lola, Nadehmag, Philoucat, ci-après annexés 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur les moyens, pris en leur troisième branche, des pourvois principal et incident, rédigés en termes identiques et réunis, formés par M. [M], Mme [K], la société B2C, la société Barradounnes, la société BCSJ, la société Cateo, la société Celineric airport, la société Cacalou, la société Chomarat Lmp, la société Evan, la société Grancher, la société Gralpigi patrimoine, la société Goussard, la société Grenier et fils, la société Jalnis immobilier, la société JFB, la société Lauderdale, la société Le Saint Germain, la société Lmp Des Kars, la société les clarines, la société Mairesse Lmp, M. [SL], la société Mieli Lmp, la société Menim, Mme [U] [RR] [JE], Mme [GA] [RR] [A] et M. [UK] [RR] venant aux droits de [Y] [RR], la société Renaudeau, la société Seven Joval, la société Turquin-Lucas Lmp, la société Tinon, la société CRDS, la société Romane, la société Bel enclos, M. [EB], la société Liesse patrimoine foncier, la société Grichting Lmp Enoncé des moyens 8. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de rejeter leurs demandes d'indemnisation fondées sur la responsabilité délictuelle du notaire et de la SCP, alors « que le notaire qui instrumente un acte dans des conditions créant un lien de dépendance avec un acte antérieur est tenu d'examiner les termes de l'acte antérieur ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté d'une part que le mandat donné au notaire, au sein de l'acte authentique, renvoyait aux instructions données au vendeur en application d'un mandat préalablement consenti, dans un acte antérieur, par les investisseurs et d'autre part qu'une contradiction était susceptible d'affecter les deux mandats consentis successivement par les investisseurs ; qu'il en résultait que le notaire avait manqué à son devoir de conseil en n'examinant pas les termes de l'acte antérieur auquel était lié l'acte de vente qu'il instrumentait ; qu'en décidant le contraire, au motif inopérant que le mandat antérieur n'avait pas été communiqué au notaire, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 1382, devenu 1240, du code civil : 9. Il résulte de ce texte que le notaire qui prête son concours à l'établissement d'un acte dans des conditions créant un lien de dépendance avec un acte antérieur est tenu d'appeler l'attention des parties sur les stipulations de ce premier acte. 10. Pour écarter tout manquement du notaire à ses obligations, l'arrêt retient que, si les actes authentiques de vente et de bail commercial, qui prévoyaient un versement direct du remboursement de TVA par l'administration fiscale entre les mains du notaire et la séquestration par celui-ci de la part de ces fonds destinée à la constitution de la garantie locative, n'étaient pas compatibles avec les mandats donnés par les acquéreurs à un cabinet d'expertise comptable de procéder aux démarches de recouvrement de la TVA au bénéfice du vendeur, toutefois, d'une part, les acquéreurs ne démontraient pas que le notaire avait eu connaissance de ces mandats, qui n'étaient pas annexés aux contrats de réservation, d'autre part, le notaire avait inséré dans les actes de vente une clause purgeant toute contradiction éventuelle entre ceux-ci et les actes sous seing privé précédemment conclus. 11. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses propres constatations, d'une part, que, selon les termes de l'acte authentique de vente, les fonds provenant du remboursement de la TVA seraient versés au notaire par l'administration fiscale en vertu des instructions données par l'acquéreur aux termes du mandat conféré au vendeur, d'autre part, que l'article 23 du contrat de réservation mentionnait le pouvoir pour la récupération de la TVA parmi les pièces que le réservataire reconnaissait avoir reçu, de sorte qu'à supposer que ce pouvoir n'ait pas été annexé au contrat de réservation, le notaire ne pouvait en ignorer l'existence ni s'abstenir d'en demander la production, la cour d'appel, qui a statué par des motifs impropres à écarter le manquement du notaire à son obligation d'appeler l'attention des acquéreurs sur les stipulations des mandats antérieurs, a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : REJETTE le pourvoi principal formé par M. [D], M. [P], M. [X], M. [XO], M. [RG], et les sociétés Accepta, Aupaval, Barjanis, Immolauze, Lola, Nadehmag, Philoucat ; REJETTE le pourvoi incident formé par la société Jeanlyro ; CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes en paiement de dommages-intérêts formées à l'encontre de M. [R] et de la SCP [O] [R], [D] [LY] et [T] [LN] par M. [M], Mme [K], la société B2C, la société Barradounnes, la société BCSJ, la société Cateo, la société Celineric Airport, la société Cacalou, la société Chomarat Lmp, la société Evan, la société Grancher, la société Gralpigi patrimoine, la société Goussard, la société Grenier et fils, la société Jalnis immobilier, la société JFB, la société Lauderdale, la société Le Saint Germain, la société Lmp Des Kars, la société les clarines, la société Mairesse Lmp, M. [SL], la société Mieli Lmp, la société Menim, Mme [U] [RR] [JE], Mme [GA] [RR] [A] et M. [UK] [RR] venant aux droits de [Y] [RR], la société Renaudeau, la société Seven Joval, la société Turquin-Lucas Lmp, la société Tinon, la société CRDS, la société Romane, la société Bel enclos, M. [EB], la société Liesse patrimoine foncier, la société Grichting Lmp, l'arrêt rendu le 22 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ; Condamne in solidum M. [R] et de la SCP [O] [R], [D] [LY] et [T] [LN] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par M. [D], M. [P], M. [X], M. [XO], M. [RG], et les sociétés Accepta, Aupaval, Barjanis, Immolauze, Jeanlyro, Lola, Nadehmag, Philoucat ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [R] et de la SCP [O] [R], [D] [LY] et [T] [LN] et les condamne in solidum à payer la somme de 100 euros à chacune des parties suivantes : - M. [M], - Mme [K], - la société B2C, - la société Barradounnes, - la société BCSJ, - la société Cateo, - la société Celineric Airport, - la société Cacalou, - la société Chomarat Lmp, - la société Evan, - la société Grancher, - la société Gralpigi patrimoine, - la société Goussard, - la société Grenier et fils, - la société Jalnis immobilier, - la société JFB, - la société Lauderdale, - la société Le Saint Germain, - la société Lmp Des Kars, - la société les Clarines, - la société Mairesse Lmp, - M. [SL], - la société Mieli Lmp, - la société Menim, - Mme [U] [RR] [JE], - Mme [GA] [RR] [A] et M. [UK] [RR] venant aux droits de [Y] [RR], - la société Renaudeau, - la société Seven Joval, - la société Turquin-Lucas Lmp, - la société Tinon, - la société CRDS, - la société Romane, - la société Bel enclos, - M. [EB], - la société Liesse patrimoine foncier, - la société Grichting Lmp ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen identique produit au pourvoi principal par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour les sociétés Accepa, Aupaval, Barjanis, B2C, Barradounnes, BCSJ, Cateo, Celineric Airport, Cacalou, Chomarat LMP, Evan, Grancher, Gralpigi patrimoine, Goussard, Grenier et fils, Immolauze, Jalnis immobilier, JFB, Lauderdale, Le Saint-Germain, LMP des Kars, Les Clarines, Mairesse LMP, Mieli LMP, Menim, Indivision [RR] [U] [GA] [UK], venant aux droits de [Y] [RR], Renaudeau, Seven Joval, Turquin-Lucas LMP, Tinon, Philoucat, CDRS, Romane, Boisgrand, Bel Enclos, Liesse patrimoine foncier, Grichting LMP, MM. [M], [J], [X], [SL], [XO], [EB], [P] [UA] [OH], Mmes [K], et au pourvoi incident pour les sociétés Eden Life, Jeanlyro, Istechtat, M. [BM], Mmes [F], veuve [OH] et [OH], venant toutes deux aux droits de [UA] [OH] Les exposants font grief l'arrêt attaqué d'avoir rejeté leurs demandes de dommages et intérêts fondées sur la responsabilité délictuelle de Me [R] et de la SCP [R] [LN] ; 1°/ ALORS QUE le notaire doit veiller à l'utilité et à l'efficacité de l'acte qu'il reçoit et est tenu d'une obligation de conseil et de mise en garde envers les parties afin que les droits et obligations réciproquement contractés par elles répondent aux finalités révélées de leur engagement et soient assortis des stipulations propres à leur conférer leur efficacité ; qu'en l'espèce, il est constant d'une part que les parties s'étaient entendues pour qu'une garantie locative soit constituée entre les mains de Me [R] à partir des fonds provenant du remboursement par l'administration de la TVA et, d'autre part, que le vendeur a pu, conformément aux dispositions de l'acte, s'abstenir de constituer ladite garantie entre les mains de Me [R] ; qu'en s'abstenant de rechercher si le notaire n'avait pas manqué à son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte en n'y insérant pas une clause de nature à priver le vendeur de la faculté de détourner les fonds reçus de l'administration et qui devaient être remis entre les mains du notaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 2°/ ALORS QUE le notaire doit veiller à l'utilité et à l'efficacité de l'acte qu'il reçoit et est tenu d'une obligation de conseil et de mise en garde envers les parties afin que les droits et obligations réciproquement contractés par elles répondent aux finalités révélées de leur engagement et soient assortis des stipulations propres à leur conférer leur efficacité ; qu'en s'abstenant de rechercher si Me [R] avait mis en garde les exposants sur le risque de non constitution de la garantie en l'état de la rédaction de la clause insérée dans l'acte authentique, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 3°/ ALORS QUE le notaire qui instrumente un acte dans des conditions créant un lien de dépendance avec un acte antérieur est tenu d'examiner les termes de l'acte antérieur ; qu'en l'espèce la cour d'appel a constaté d'une part que le mandat donné au notaire, au sein de l'acte authentique, renvoyait aux instructions données au vendeur en application d'un mandat préalablement consenti, dans un acte antérieur, par les investisseurs et d'autre part qu'une contradiction était susceptible d'affecter les deux mandats consentis successivement par les investisseurs ; qu'il en résultait que le notaire avait manqué à son devoir de conseil en n'examinant pas les termes de l'acte antérieur auquel était lié l'acte de vente qu'il instrumentait ; qu'en décidant le contraire, au motif inopérant que le mandat antérieur n'avait pas été communiqué au notaire, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu l'article 1240, du code civil ; 4°/ ALORS QUE le notaire qui instrumente un acte dans des conditions créant un lien de dépendance avec un acte antérieur est tenu d'examiner les termes de l'acte antérieur ; qu'en ajoutant pour écarter tout manquement du notaire que l'acte de vente prévoyait que ses stipulations « annuleront et remplaceront toutes autres ayant pu intervenir antérieurement entre les parties .?. et notamment les dispositions du contrat préliminaire éventuellement en contradiction avec le présent acte authentique » quand cette stipulation ne pouvait pas avoir pour effet d'annuler le premier mandat consenti par les investisseurs, lors de la conclusion des conclusions de réservation, dès lors que l'acte authentique renvoyait expressément aux instructions contenues dans ce mandat, la cour d'appel qui s'est fondée sur une circonstance inopérante, a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 19 F-D Pourvoi n° N 21-23.256 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Carrare, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° N 21-23.256 contre l'arrêt rendu le 5 octobre 2021 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Bouygues bâtiment international, dont le siège est [Adresse 1], 2°/ à la société MJC2A, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en la personne de M. [U] [K], en qualité de mandataire liquidateur de la société Etudes et préfabrication industrielle EPI, défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Carrare, de la SCP Delamarre et Jehannin, avocat de la société MJC2A, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Bouygues bâtiment international, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 octobre 2021), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 26 novembre 2020, pourvois n° 19-23.379 et 19-23.243), la société Etudes et préfabrication industrielle (la société EPI), détenue à hauteur de 99 % par la société Bouygues bâtiment, devenue la société Bouygues bâtiment international (la société Bouygues), exerçait une activité de préfabrication industrielle d'éléments en béton dans des locaux faisant l'objet de deux contrats de crédit-bail immobilier conclus avec la société Financière Gaillon, devenue la société CMCIC Lease. 2. La société Bouygues a cédé la société EPI à la société Dal industries pour le prix d'un euro. 3. La société CMCIC Lease a refusé de décharger la société Bouygues de ses obligations envers elle au titre des contrats de crédit-bail. 4. Par acte du 2 mai 2002, la société EPI a acquis les biens immobiliers sur lesquels portaient les contrats de crédit-bail. 5. Par deux actes du même jour, elle a vendu un immeuble situé à [Adresse 5] à la société Carrare, filiale de la société Dal industries, et pris cet immeuble à bail commercial. 6. La société EPI a été mise en liquidation judiciaire le 31 mars 2003. 7. La société Bouygues a assigné la société Carrare, le liquidateur ad hoc de la société EPI et la société civile professionnelle Coudray-[K], aux droits de laquelle vient la société MJC2A, prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de cette société (le liquidateur), afin d'obtenir, sur le fondement de la fraude paulienne, la nullité de la vente et du bail commercial conclus le 2 mai 2002 entre la société Carrare et la société EPI et la réintégration dans le patrimoine de la société EPI de l'immeuble situé à [Adresse 4]. 8. Le liquidateur, a, par voie de conclusions, également exercé l'action paulienne contre la société Carrare. Examen des moyens Sur les deuxième et troisième moyens, ci-après annexés 9. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 10. La société Carrare fait grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande du liquidateur, alors « que constitue une intervention la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires ; qu'en affirmant, pour admettre la recevabilité de la demande formée par le liquidateur judiciaire à l'encontre de la société Carrare, qu'elle constituait « une demande incidente afin d'intervention à l'instance de son autre codéfendeur, laquelle peut être formée contre celui-ci par simples conclusions puisqu'il était déjà partie à l'instance principale », cependant que le liquidateur judiciaire n'était pas tiers mais partie à l'instance principale puisqu'il avait lui-même été assigné par la société Bouygues simultanément aux autres codéfendeurs, dont la société Carrare, au terme d'un même acte introductif d'instance, la cour d'appel a violé l'article 66 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 11. Selon l'article 66 du code de procédure civile, constitue une intervention la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires et, lorsque la demande émane du tiers, l'intervention est volontaire. 12. Selon l'article 63 du même code, l'intervention constitue une demande incidente. 13. Aux termes de l'article 68, alinéa 1er, du même code, les demandes incidentes sont formées à l'encontre des parties à l'instance de la même manière que sont présentés les moyens de défense. 14. Le liquidateur ayant été assigné par la société Bouygues en qualité de représentant du débiteur dessaisi et ayant exercé son action paulienne à l'encontre de la société Carrare en sa qualité de représentant des créanciers, agissant en leur nom et dans leur intérêt collectif, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que cette demande, présentée en une autre qualité, constituait une intervention à l'instance, laquelle pouvait être formée par simples conclusions. 15. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le quatrième moyen Enoncé du moyen 16. La société Carrare fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande subsidiaire en remboursement du prix de vente de 2 140 000 euros, augmenté des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2008, alors : « 1°/ que pour débouter la société Carrare de sa demande de remboursement du prix de vente au titre de la garantie d'éviction, la cour d'appel a affirmé que « le fait générateur de la créance de la société Carrare au titre de la garantie d'éviction » était « la commission de la fraude elle-même » de sorte qu'il s'agissait d'une créance antérieure à l'ouverture de la procédure collective de la société EPI qui aurait dû être déclarée au passif ; qu'en statuant ainsi, cependant que le fait générateur de la créance revendiquée au titre de la garantie d'éviction était l'autorisation judiciaire, accordée au liquidateur judiciaire, de poursuivre la vente forcée de l'immeuble litigieux, de sorte qu'il s'agissait d'une créance postérieure à l'ouverture de la liquidation judiciaire à l'égard de la société EPI, qui n'avait nul besoin d'être déclarée à la procédure collective, la cour d'appel a violé l'article 1626 du code civil, ensemble l'article L. 621-43 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 ; 2°/ que le liquidateur judiciaire représente à la fois la collectivité des créanciers à la procédure de liquidation judiciaire et le débiteur dessaisi ; qu'en l'espèce, la société Carrare avait formulé, à titre subsidiaire, une demande à l'encontre du liquidateur judiciaire, pris en sa qualité de représentant du débiteur vendeur, sur le fondement de la garantie d'éviction ; qu'en déboutant l'exposante de sa demande à ce titre, motif pris que la garantie d'éviction ne pouvait être due par le liquidateur judiciaire dès lors que celui-ci avait agi sur le fondement de la fraude paulienne en qualité de représentant des créanciers et non en qualité de représentant du débiteur, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision au regard de l'article 1626 du code civil, ensemble l'article L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 ; 3°/ que l'adage selon lequel « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude » fait seulement obstacle aux restitutions consécutives au prononcé de la nullité d'un acte pour immoralité de son objet ou de sa cause ; qu'il n'interdit nullement la restitution du prix au tiers acquéreur évincé, consécutivement à l'inopposabilité de la vente à raison d'une fraude paulienne ; qu'en se fondant sur cet adage, pour débouter la société Carrare de sa demande de restitution du prix de vente, cependant que la vente litigieuse n'avait pas été annulée en raison de l'immoralité de son objet ou de sa cause, la cour d'appel a violé l'article 1626 du code civil, ensemble l'adage selon lequel « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude. » Réponse de la Cour 17. La société Carrare n'ayant pas soutenu devant la cour d'appel que le fait générateur de la créance revendiquée au titre de la garantie d'éviction était l'autorisation judiciaire, accordée au liquidateur judiciaire, de poursuivre la vente forcée de l'immeuble litigieux, le moyen est de ce chef nouveau, mélangé de fait et de droit, et, partant irrecevable. 18. L'arrêt étant dès lors légalement justifié par les motifs relatifs au fait générateur de la créance de la société Carrare, vainement critiqués par la première branche, les deux autres griefs, qui sont dirigés contre des motifs surabondants, sont inopérants. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Carrare aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Carrare et la condamne à payer à la société Bouygues la somme de 5 000 euros et à la société MJC2A celle de 5 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, signé par M. Maunand, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller empêché, et signé et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Alain Bénabent , avocat aux Conseils, pour la société Carrare PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Carrare fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré recevable la demande soutenue par la SELARL MJC2A ès-qualités au titre de la fraude paulienne ; ALORS QUE constitue une intervention la demande dont l'objet est de rendre un tiers partie au procès engagé entre les parties originaires ; qu'en affirmant, pour admettre la recevabilité de la demande formée par le liquidateur judiciaire à l'encontre de la société Carrare, qu'elle constituait « une demande incidente afin d'intervention à l'instance de son autre codéfendeur, laquelle peut être formée contre celui-ci par simples conclusions puisqu'il était déjà partie à l'instance principale » (cf. arrêt p. 8, §2), cependant que le liquidateur judiciaire n'était pas tiers mais partie à l'instance principale puisqu'il avait lui-même été assigné par la société Bouygues Bâtiment International simultanément aux autres codéfendeurs, dont la société Carrare, au terme d'un même acte introductif d'instance (cf. prod. n° 7), la cour d'appel a violé l'article 66 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION (SUBSIDIAIRE) La société Carrare fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement rendu le 18 décembre 2017 par le Tribunal de commerce de Melun en ce qu'il a constaté que la vente de l'ensemble immobilier de Limoges Fourches par la SA Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI) à la SARL Carrare le 2 mai 2002 et la conclusion, le même jour, d'un bail commercial entre les mêmes parties, ont été réalisées en fraude des droits des créanciers de la SA Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI) et en ce qu'il a, en conséquence, déclaré inopposable à la procédure de liquidation judiciaire ouverte du chef de la société Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI), la vente intervenue le 2 mai 2002 entre cette dernière et la SARL Carrare portant sur un ensemble immobilier situé à [Adresse 4], cadastré [Cadastre 7] d'une contenance de 2 ha 48 ca 41 a et [Cadastre 6] d'une contenance de 44 ha et 80 ca, ainsi que le bail commercial conclu le 2 mai 2002 entre la SARL Carrare et la SA Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI), condamné la société Carrare à rembourser à la SCP Coudray-[K], devenue la SELARL MJC2A, ès-qualités de liquidateur de la SA Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI) le montant des loyers versés par la SA Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI) à la société Carrare, débouté la société Carrare de sa demande subsidiaire de remboursement du prix de vente de 2.140.000 euros, outre les intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2008 et, y ajoutant, autorisé la société MJC2A, ès-qualités, à poursuivre la vente forcée de l'immeuble situé à [Adresse 4], à concurrence du montant du passif de la société EPI; 1°/ ALORS QU'un acte ne peut être attaqué par l'action paulienne que s'il a entraîné un appauvrissement du débiteur ; que lorsque cet acte s'inscrit dans une opération globale, l'appauvrissement du débiteur doit s'apprécier par référence à sa situation patrimoniale telle qu'elle existait antérieurement à l'opération globale ; que pour retenir l'existence d'un appauvrissement de la société EPI, la cour d'appel a affirmé que «l'opération de revente de l'immeuble par la société EPI à la société Carrare et la conclusion le même jour d'un bail commercial entre les deux sociétés, immédiatement après l'acquisition faite par la société EPI de ce bien auprès du crédit-bailleur suite à la levée d'option d'achat, a eu pour effet un appauvrissement de la société EPI qui non seulement a supporté une partie du coût du débouclage des crédits-bails mais a été privée de la propriété de son immeuble qu'elle a dû louer à la société Carrare » (cf. arrêt p. 12, §2) ; qu'en se déterminant ainsi, par référence au seul impact, sur la situation patrimoniale de la société EPI, de la perte de propriété de l'immeuble, des loyers dus au titre du bail conclu sur ce même immeuble et de la fraction du coût du « débouclage » supporté par cette dernière, quand il lui appartenait de tenir compte de l'impact sur la situation patrimoniale du débiteur de l'opération globale de « débouclage », laquelle avait abouti, grâce au financement opéré par les sociétés du Groupe Dal de la levée d'option des crédits-bails souscrits par la société EPI, à une décharge totale de cette dernière de l'encours restant dû au titre des crédits-loyers, la cour d'appel a violé l'article 1167 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 2°/ ALORS QUE la cour d'appel a affirmé que « la commune intention des parties était de décharger la société Bouygues de ses engagements au titre [des contrats de crédits-bails] en sa qualité d'ancien associé de la SNC EPI pour les transférer à l'acquéreur, le groupe Dal Industries » (cf. arrêt p. 12, §3) ; que les engagements solidaires ainsi transférés consistaient en l'obligation de garantir le paiement, par la société EPI, des loyers dus par cette dernière au titre des crédits-bails qu'elle avait souscrits ; qu'ainsi, les sociétés du groupe Dal n'avaient pas vocation à supporter la charge définitive du coût des crédits-bails auquel seule la société EPI était tenue, de sorte que le paiement effectué par les sociétés du groupe Dal dans le cadre de l'opération de « débouclage » a été réalisé en exécution d'une obligation de garantie et n'était donc pas destiné à permettre à la société EPI d'intégrer à titre gratuit dans son patrimoine l'ensemble immobilier objet des crédits-bails ; qu'en retenant toutefois le contraire, la cour d'appel a méconnu les conséquences légales de ses constatations, en violation de l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 3°/ ALORS QU'il est interdit au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; que dans la lettre du 15 mars 2002 adressée par la société Bouygues Construction à la société Dal Industries il était expressément mentionné que «l'intention des parties [était] le transfert par le vendeur [la société Bouygues] à l'acquéreur [la société Dal Industries] des droits et obligations attachés au crédit-bailleur » et que, dans le cadre du schéma alternatif convenu entre les parties « si EPI était défaillant au titre de la réalisation des promesses concernant ses contrats (réalisation des promesses ou par défaut de réalisation des promesses, paiement des loyers), Bouygues Bâtiment serait substitué à EPI dans les droits de celleci au titre des crédits-bails » (cf. prod. n° 14) ; qu'en envisageant la substitution de la société Bouygues Bâtiment International à la société EPI « dans les droits de celle-ci au titre des crédits-bails », les parties avaient ainsi prévu la possibilité que la première devienne, à terme, propriétaire de l'ensemble immobilier objet des crédits-bails ; qu'en retenant que la société Carrare ne pouvait « exciper des termes de la lettre adressée par la société Bouygues à la société Dal Industries le 15 mars 2002 [que] l'intention des parties [était] le transfert par le vendeur à l'acquéreur des droits et obligations attachés aux crédits-bails puisque le vendeur, la société Bouygues, n'a[vait] jamais eu vocation à devenir au terme des contrats de crédits-bails propriétaire de l'ensemble immobilier » (cf. arrêt p. 12, §3), la cour d'appel a dénaturé ladite lettre en violation du principe suivant lequel il est interdit au juge de dénaturer les écrits qui lui sont soumis ; 4°/ ALORS QU'en affirmant, pour retenir l'existence d'un appauvrissement de la société EPI, que la société Carrare ne pouvait sérieusement soutenir que la contribution très majoritaire « du groupe Dal » (dont faisaient partie les sociétés Dal Industries et Carrare) à l'opération de « débouclage » des crédits-bails immobiliers était la contrepartie de l'acquisition de la propriété de l'immeuble dont s'agit puisque celle-ci s'était faite « par un tiers » (cf. arrêt p. 12, §3), cependant que la société Carrare faisait elle-même partie du groupe Dal et n'était donc pas un « tiers » par rapport à celui-ci, la Cour d'appel a violé l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 5°/ ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE après avoir relevé que seule la vente de l'ensemble immobilier, objet des crédits-bails, et la conclusion d'un bail commercial portant sur ce même ensemble immobilier étaient argués de fraude (cf. arrêt p. 11, §6), la cour d'appel a retenu l'existence d'un appauvrissement de la société EPI par référence aux pertes générées par « l'opération de débouclage et de cession » (cf. arrêt p. 12 §3) ; qu'en se déterminant ainsi, par référence à des pertes résultant de l'opération de « débouclage » en son ensemble, laquelle incluait le coût de la levée d'option, et non aux seules pertes résultant des actes de revente et de bail qui seuls étaient argués de fraude, la Cour d'appel a violé l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 6°/ ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHESE le défaut de réponse à conclusions équivaut à une absence de motifs ; qu'en se déterminant, pour retenir l'existence d'un appauvrissement de la société EPI, par référence aux conclusions de l'expert judiciaire, Monsieur [Z], ayant retenu que « l'opération de débouclage et de cession » avait généré « une perte sensiblement supérieure à l'économie de loyers » (cf. arrêt p. 12, §4), sans répondre au moyen soulevé par l'exposante faisant valoir, ainsi qu'il résultait des conclusions du rapport d'expertise lui-même, que la perte retenue par Monsieur [Z] était purement comptable et résultait de la différence mathématique entre le coût contractuel de la levée d'option des crédits-bails immobiliers (incluant principalement l'encours résiduel au titre des crédits-bails immobiliers) auquel la société EPI était tenue et la valeur vénale du bien, de sorte que cette perte aurait dû, dans tous les cas, être comptabilisée par la société EPI à l'occasion de la levée d'option des crédits-bails, même si elle n'avait pas été accompagnée de la revente immédiate de l'ensemble immobilier à la société Carrare (cf. conclusions p. 65), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 7°/ ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHSE le défaut de réponse à conclusions équivaut à une absence de motifs ; qu'en retenant que la revente de l'ensemble immobilier à la société Carrare constituait un acte d'appauvrissement de la société EPI puisqu'il avait dépossédé cette dernière d'un actif substantiel, sans répondre aux conclusions faisant valoir que le prix de vente était conforme à la valeur vénale du bien, ce que l'expert judiciaire, M. [Z], avait par ailleurs concédé dans son rapport (cf. conclusions p. 62 et prod. n° 11, p. 78, §3), la cour d'appel a derechef violé l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 8°/ ALORS QU'EN TOUTE HYPOTHSE tout jugement doit être motivé ; que les juges ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont fournis par les parties au soutien de leurs prétentions ; qu'en retenant, par des motifs éventuellement adoptés des premier juges, que le loyer annuel de 365.760 euros mis à la charge de la société EPI au titre du bail commercial consenti par la société Carrare était « totalement excessif » (cf. jugement p. 14, §7), sans s'expliquer sur le rapport produit par l'exposante, établi par Monsieur [F], expert en estimation immobilière agréé par la Cour de cassation, ayant estimé la valeur locative annuelle de l'immeuble à 370.000 euros (cf. prod. n° 10), la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 9°/ ALORS QU'un acte d'appauvrissement ne peut être attaqué par l'action paulienne que s'il a entraîné l'insolvabilité du débiteur ; que le constat d'un appauvrissement ne suffit pas à caractériser une insolvabilité ; que pour retenir l'insolvabilité de la société EPI à la date de conclusion de la vente et du bail argués de fraude, la cour d'appel a affirmé que « ces deux actes et notamment l'acte de vente qui a dépossédé la société EPI d'un actif substantiel l'ont incontestablement appauvrie et ont ainsi aggravé sa situation d'insolvabilité à tout le moins apparente au détriment de ses créanciers » (cf. arrêt p. 12, §5) ; qu'en déduisant ainsi l'insolvabilité de la société EPI du prétendu appauvrissement de cette dernière, la cour d'appel a violé l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 10°/ ALORS QU'un acte d'appauvrissement ne peut être attaqué par l'action paulienne que s'il a entraîné l'insolvabilité du débiteur ; que l'insolvabilité du débiteur doit être établie tant à la date des actes suspects qu'à celle à laquelle l'action paulienne est exercée ; que pour retenir l'état d'insolvabilité de la société EPI à la date de conclusion des actes litigieux, la cour d'appel a affirmé que « l'expert [Z] conclut que l'opération de débouclage et de cession a généré une perte sensiblement supérieure à l'économie de loyers et qu'ainsi la situation financière de la société EPI déjà précaire ne pouvait qu'être aggravée par cette situation, étant rappelé que la société EPI présentait au 31 décembre 2001 un résultat déficitaire de 1.858.000 euros » (cf. arrêt p. 12, §4) ; qu'en se déterminant ainsi, par référence à la situation déficitaire de la société, impropre à caractériser l'état d'insolvabilité de la société EPI au jour de la conclusion des actes litigieux, c'est-à-dire son incapacité à payer ses dettes existantes, la cour d'appel a violé l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 11°/ ALORS QU'au surplus, l'insolvabilité du débiteur doit être établie tant à la date des actes suspects qu'à celle à laquelle l'action paulienne est exercée ; qu'en affirmant que « dès le 1er novembre 2002, soit cinq mois après la vente et le bail commercial litigieux, la société EPI n'a plus été en mesure de régler ses loyers ce qui a entraîné la résiliation du bail constatée par ordonnance de référé rendue la veille de la déclaration de cessation des paiements et de l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire » (cf. arrêt p. 12, §6), la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser l'insolvabilité de la société EPI à la date de conclusion des actes litigieux, soit au 2 mai 2002, en violation de l'article 1167 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 12°/ ALORS QUE lorsque l'acte attaqué par le biais de l'action paulienne est un acte à titre onéreux, le créancier doit établir la complicité frauduleuse du tiers ; que celle-ci ne peut résulter que de la connaissance par le tiers de l'état d'insolvabilité du débiteur principal au moment de la conclusion de l'acte attaqué ; que pour retenir l'existence d'une telle complicité, la cour d'appel a affirmé que « l'identité de dirigeant entre la société Carrare et la société EPI, lequel n'ignorait ni la situation financière fragile de la société EPI ni la créance de la société Bouygues sur la société EPI résultant de l'acte de cession de créances conclu entre cellesci ni les emprunts contractés par cette dernière pour financer l'opération de débouclage suffit à démontrer que tant la débitrice que le tiers acquéreur avaient nécessairement conscience qu'en réduisant l'actif de la première, ils portaient atteinte aux intérêts de leurs créanciers » (cf. arrêt p. 12, dernier §) ; qu'en statuant ainsi, cependant que la connaissance de la fragilité financière du débiteur n'implique pas la conscience de l'état d'insolvabilité de ce dernier, la cour d'appel s'est déterminée par des motifs impropres à caractériser l'intention frauduleuse de la société Carrare et a violé l'article 1167 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause. TROISIEME MOYEN DE CASSATION (INFINIMENT SUBSIDIAIRE) La société Carrare fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement rendu le 18 décembre 2017 par le Tribunal de commerce de Melun en ce qu'il a condamné la SARL Carrare à rembourser à la SCP Coudray-[K], devenue la SELARL MJC2A, ès-qualités de liquidateur de la SA Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI), le montant des loyers versés par la SA Etudes et Préfabrication Industrielle (EPI) à la SARL Carrare ; 1°/ ALORS QUE l'inopposabilité de l'acte reconnu comme étant frauduleux dans le cadre d'une action paulienne n'a pas d'effet rétroactif ; qu'elle n'emporte pas restitution des sommes perçues en exécution dudit acte ; qu'en affirmant que le jugement devait être confirmé en ce qu'il avait condamné la société Carrare à restituer au liquidateur judiciaire le montant des loyers et indemnités d'occupation versés par la société EPI « en conséquence de l'inopposabilité du bail à la procédure collective » (cf. arrêt p. 13, §7), la cour d'appel, qui a attribué à l'inopposabilité un effet rétroactif dont elle est dépourvue, a violé l'article 1167 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause ; 2°/ ALORS QUE l'inopposabilité d'un acte résultant d'une action paulienne est sans effet entre les parties au contrat frauduleux ; qu'elle ne peut donc justifier la mise en oeuvre de restitutions lesquelles ne peuvent avoir lieu qu'entre les parties à un contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu que l'inopposabilité du bail au liquidateur judiciaire, justifiait que le montant des loyers payés à la société Carrare lui soit restitué (cf. arrêt p. 13, §7) ; qu'en déduisant ainsi une obligation de restitution inter partes de l'inopposabilité d'un acte dépourvu d'effet entre les parties, la cour d'appel a violé l'article 1167 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016, applicable à la cause. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION (INFINMENT SUBSIDIAIRE) La société Carrare fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement rendu le 18 décembre 2017 par le Tribunal de commerce de Melun en ce qu'il l'a déboutée de sa demande subsidiaire de remboursement du prix de vente de 2.140.000 euros, augmenté des intérêts au taux légal à compter du 31 mars 2008 ; 1°/ ALORS QUE pour débouter la société Carrare de sa demande de remboursement du prix de vente au titre de la garantie d'éviction, la Cour d'appel a affirmé que « le fait générateur de la créance de la société Carrare au titre de la garantie d'éviction » était « la commission de la fraude elle-même » de sorte qu'il s'agissait d'une créance antérieure à l'ouverture de la procédure collective de la société EPI qui aurait dû être déclarée au passif (cf. arrêt p. 14, §3) ; qu'en statuant ainsi, cependant que le fait générateur de la créance revendiquée au titre de la garantie d'éviction était l'autorisation judiciaire, accordée au liquidateur judiciaire, de poursuivre la vente forcée de l'immeuble litigieux, de sorte qu'il s'agissait d'une créance postérieure à l'ouverture de la liquidation judiciaire à l'égard de la société EPI, qui n'avait nul besoin d'être déclarée à la procédure collective, la cour d'appel a violé l'article 1626 du code civil, ensemble l'article L. 621-43 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 ; 2°/ ALORS QUE le liquidateur judiciaire représente à la fois la collectivité des créanciers à la procédure de liquidation judiciaire et le débiteur dessaisi ; qu'en l'espèce, la société Carrare avait formulé, à titre subsidiaire, une demande à l'encontre du liquidateur judiciaire, pris en sa qualité de représentant du débiteur vendeur, sur le fondement de la garantie d'éviction ; qu'en déboutant l'exposante de sa demande à ce titre, motif pris que la garantie d'éviction ne pouvait être due par le liquidateur judiciaire dès lors que celui-ci avait agi sur le fondement de la fraude paulienne en qualité de représentant des créanciers et non en qualité de représentant du débiteur, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à justifier sa décision au regard de l'article 1626 du code civil, ensemble l'article L. 622-9 du code de commerce, dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005 ; 3°/ ALORS QU'au surplus, l'adage selon lequel « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude » fait seulement obstacle aux restitutions consécutives au prononcé de la nullité d'un acte pour immoralité de son objet ou de sa cause ; qu'il n'interdit nullement la restitution du prix au tiers acquéreur évincé, consécutivement à l'inopposabilité de la vente à raison d'une fraude paulienne ; qu'en se fondant sur cet adage, pour débouter la société Carrare de sa demande de restitution du prix de vente, cependant que la vente litigieuse n'avait pas été annulée en raison de l'immoralité de son objet ou de sa cause, la cour d'appel a violé l'article 1626 du code civil, ensemble l'adage selon lequel « nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude ».
INCA/JURITEXT000046990232.xml
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 18 F-D Pourvoi n° K 21-23.254 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 M. [O] [H], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° K 21-23.254 contre l'arrêt rendu le 21 juillet 2021 par la cour d'appel de Montpellier (4e chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société [Localité 7], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], 2°/ à M. [Y] [U], domicilié [Adresse 4], 3°/ à la société Residea, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], représentée par son liquidateur amiable M. [L] [U], domicilié [Adresse 2] et par son mandataire ad hoc M. [Y] [U], domicilié [Adresse 3], 4°/ à Mme [F] [G], domiciliée [Adresse 6], prise en qualité de liquidateur judiciaire à la liquidation judiciaire de la société Solymer, société anonyme, et de mandataire ad hoc de la même société, 5°/ à la société Solymer, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], représentée par son mandataire ad hoc en exercice, M. [F] [G], défendeurs à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Farrenq-Nési, conseiller, les observations de la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. [H], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [U] et des sociétés [Localité 7] et Residea, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Farrenq-Nési, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 21 juillet 2021), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 25 juin 2020, pourvoi n° 19-15.788), la société Solymer, propriétaire de biens immobiliers destinés à l'exploitation de parcs résidentiels de loisirs par le biais de trois sociétés, dont la société [Localité 7], dans lesquelles elle était associée majoritaire et qui étaient gérées par sa propre gérante, Mme [C], a été condamnée, par une sentence arbitrale rendue exécutoire le 26 septembre 2002, à payer la somme de 505 311,33 euros à M. [U] et celle de 221 938,02 euros à la société Residea. 2. M. [U] et la société Residea ont procédé à la saisie conservatoire, convertie en saisie attribution le 2 décembre 2002, des parts et du compte courant d'associé détenus par la société Solymer dans la société [Localité 7]. 3. La société Solymer a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 20 juin 2006. 4. Par acte notarié du 12 juin 2003, réitéré le 3 décembre 2003, la société [Localité 7] a vendu à M. [H], concubin de Mme [C], un terrain de camping lui appartenant, dénommé « [Localité 7] », pour le prix de 1 350 000 euros, avec transfert immédiat de propriété. 5. M. [U] et la société Residea ont assigné la société [Localité 7] et M. [H] en annulation de cette vente, considérant qu'elle avait été effectuée en fraude de leurs droits. 6. La société [Localité 7] a également sollicité l'annulation de cette vente pour cause illicite. Examen des moyens Sur le premier moyen, pris en ses deuxième, troisième, quatrième, cinquième et sixième branches, et sur le troisième moyen, ci-après annexés 7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 8. M. [H] fait grief à l'arrêt de prononcer la nullité de l'acte de vente, alors « que la cause illicite d'un contrat rendant celui-ci nul ne peut consister dans une fraude aux droits des tiers au contrat, mais seulement dans une fraude à la loi ; qu'en se fondant néanmoins, pour annuler le contrat de vente concerné, sur l'existence d'un prétendu mobile frauduleux tendant à éviter le complet désintéressement des créanciers de la société venderesse, c'est-à-dire sur une fraude aux droits des tiers, cependant que seule une fraude à la loi aurait été de nature à justifier une telle annulation, la cour d'appel a violé l'article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-231 du 10 février 2016. » Réponse de la Cour 9. Il résulte des articles 1131 et 1133 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-231 du 10 février 2016, que l'obligation sans cause, pour une fausse cause ou sur une cause illicite, ne peut avoir aucun effet et que la cause est illicite quand elle est prohibée par la loi et quand elle est contraire aux bonnes moeurs ou à l'ordre public. 10. La cour d'appel a souverainement retenu que la cession à un prix inférieur de 873 000 euros au moins à la valeur du bien au jour de la vente avait pour mobile une fraude aux droits des créanciers, dont deux bénéficiaient d'une saisie attribution des parts sociales et du compte courant détenus par la société Solymer dans la société [Localité 7]. 11. Elle en a exactement déduit que l'acte de vente avait une cause illicite entraînant son annulation, le régime de la nullité encourue, comme la possibilité, pour des créanciers, d'invoquer la fraude paulienne étant sans incidence sur le caractère illicite de la cause découlant de la caractérisation d'une fraude. 12. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 13. M. [H] fait grief à l'arrêt de dire qu'il devait restituer l'immeuble à la société [Localité 7] ainsi que les loyers indûment perçus de la société Odalys à compter du 12 juin 2003 jusqu'au 1er janvier 2021 et de la condamner en conséquence, après compensation, à payer à la société [Localité 7] la somme de 2 766 814, 98 euros, alors « qu'en cas d'annulation d'un contrat du fait d'une collusion frauduleuse des deux parties, aucune restitution ne peut être ordonnée ; qu'en ordonnant néanmoins des restitutions réciproques en suite de l'annulation de la vente, quand elle avait précédemment estimé que les deux parties à ce contrat avaient été en collusion frauduleuse, la cour d'appel a violé les principes nemo auditur propriam turpitudinem allegans et in pari causa turpitudinis cessat repetitio. » Réponse de la Cour 14. Alors que la société [Localité 7] invoquait une cause illicite en raison d'une collusion frauduleuse entre le cédant et le cessionnaire, M. [H] n'a pas soutenu, dans ses conclusions d'appel, que, dans ce cas, aucune restitution ne pouvait être ordonnée, mais a rappelé le principe selon lequel la nullité d'un contrat pour cause illicite remet les parties dans leur état antérieur et a fondé le rejet de la demande de la société [Localité 7] en remboursement des loyers perçus sur sa qualité de co-auteur du dommage à défaut d'avoir recherché la responsabilité de sa gérante pour faute détachable de ses fonctions. 15. M. [H] n'est donc pas recevable à présenter devant la Cour de cassation un moyen contraire à ses propres écritures. 16. Le moyen est donc irrecevable. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [H] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat aux Conseils, pour M. [H] PREMIER MOYEN DE CASSATION Monsieur [H] reproche à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR prononcé la nullité de l'acte de cession, par la société [Localité 7] à monsieur [H], portant sur un ensemble immobilier sis [Adresse 8] et composé de parcelles de terrain à usage de camping ; 1°/ ALORS QUE la cause illicite d'un contrat, rendant celui-ci nul, ne peut consister dans une fraude aux droits des tiers au contrat, mais seulement dans une fraude à la loi ; qu'en se fondant néanmoins, pour annuler le contrat de vente concerné, sur l'existence d'un prétendu mobile frauduleux tendant à éviter le complet désintéressement des créanciers de la société venderesse (arrêt, p. 15, in fine, p. 16, in limine), c'est-à-dire sur une fraude aux droits des tiers, cependant que seule une fraude à la loi aurait été de nature à justifier une telle annulation, la cour d'appel a violé l'article 1131 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-231 du 10 février 2016 ; 2°/ ALORS QUE monsieur [H] avait fait valoir (conclusions, pp. 31 et s.) que la société mère de la société venderesse du bien concerné se trouvait, au moment de la vente, dans une situation financière critique rendant indispensable et urgente la vente conventionnelle d'un actif, une vente judiciaire, qui serait devenue inévitable en l'absence de conclusion du contrat, ne pouvant advenir qu'à un prix bien plus faible encore ; que la cour d'appel, pour retenir l'existence d'un mobile frauduleux de conclure le contrat de vente, a refusé de retenir que la société mère de la venderesse se trouvait dans une situation financière critique et, à cet effet, a relevé que la filiale venderesse aurait minoré son chiffre d'affaires déclaré à l'administration fiscale (arrêt, p. 15, quatrième alinéa) ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher si, même en l'état du chiffre d'affaires de la filiale, tel que redressé par l'administration fiscale, la société mère de la venderesse n'était pas en situation fortement dégradée et s'il n'en résultait pas que la vente contestée était exempte de toute fraude, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 ancien du code civil ; 3°/ ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QU'en se déterminant comme elle a fait (arrêt, eod. loc.), en considération du chiffre d'affaires de la filiale, élément impropre à caractériser la situation financière de la personne morale distincte qu'était la société mère, la cour d'appel a violé l'article 1131 ancien du code civil ; 4°/ ALORS QUE la vente d'un actif, conclue en vue de désintéresser les créanciers du vendeur, n'est pas frauduleuse du seul fait que le prix de vente ne permet pas de les désintéresser tous, cette absence de désintéressement intégral pouvant tenir au décalage objectif entre le prix de la chose vendue et le volume des dettes à éteindre ; qu'en se fondant néanmoins, pour en déduire l'existence d'un prétendu mobile frauduleux, sur le fait que le prix de la vente n'avait pas permis de désintéresser l'ensemble des créanciers de la cédante (arrêt, p. 15, alinéas cinquième et s.), la cour d'appel a violé l'article 1131 ancien du code civil ; 5°/ ALORS QUE pour contester la prétendue gestion de fait qui lui était imputée, monsieur [H] avait fait valoir (conclusions, p. 34) que les actes dont ses adversaires prétendaient déduire cette gestion de fait avaient été accomplis en exécution d'un mandat d'étendue limitée que lui avait confié la société Solymer, société mère de la société [Localité 7], venderesse, en vue de la réalisation de tâches ponctuelles telles que le suivi de travaux ; qu'en déduisant l'existence d'une gestion de fait, prétendument révélatrice d'une collusion frauduleuse entre la venderesse et monsieur [H], d'actes accomplis par celui-ci dans l'intérêt de la société [Localité 7] (arrêt, p. 16, dernier alinéa, p. 17, premier alinéa), sans rechercher si ces actes avaient été effectués par l'intéressé en qualité de mandataire de la société Solymer ou en son nom personnel, au-delà des pouvoirs que cette dernière lui avait conférés, seuls des actes personnels accomplis sans pouvoir par monsieur [H] étant de nature à caractériser une gestion de fait de sa part, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 ancien du code civil ; 6°/ ALORS QUE monsieur [H] avait fait valoir (conclusions, p. 35) que l'évaluation du bien vendu faite par l'expert judiciaire, et dont la société [Localité 7] prétendait déduire l'existence d'une minoration artificielle du prix de la vente, était dénuée de crédibilité, dès l'instant que l'expert avait commis deux erreurs méthodologiques consistant à ne pas s'être placé à la date de la cession, d'une part, pour avoir évalué le bien sans prendre en compte les travaux nécessaires à son entretien et à son amélioration, d'autre part, pour avoir fait abstraction du contexte difficile dans lequel la vente avait eu lieu et de la nécessité de céder rapidement le bien au premier acquéreur que se déclarerait intéressé ; qu'en se fondant (arrêt, p. 17, deuxième alinéa) sur l'évaluation de cet expert, ainsi que sur celles de trois experts officieux, pour en déduire que le prix de vente du bien aurait été fortement minoré et qu'il aurait donc existé une collusion frauduleuse entre venderesse et acquéreur, sans toutefois rechercher, comme elle y avait été invitée, quelle avait été la méthode de ces experts et, en particulier, sans s'assurer qu'ils s'étaient placés à la date de la cession pour porter leur appréciation, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1131 ancien du code DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Monsieur [H] reproche à l'arrêt infirmatif attaqué D'AVOIR dit qu'il devait restituer l'ensemble immobilier objet de l'acte de cession litigieux à la société [Localité 7] ainsi que les loyers indûment perçus par lui dans le cadre de la société Odalys à compter du 12 juin 2003 jusqu'au 1er janvier 2021, soit la somme de 4 116 814,98 € HT et D'AVOIR en conséquence, après compensation, condamné monsieur [H] à payer à la société [Localité 7] la somme de 2 766 814,98 € HT ; ALORS QU'en cas d'annulation d'un contrat du fait d'une collusion frauduleuse des deux parties, aucune restitution ne peut être ordonnée ; qu'en ordonnant néanmoins des restitutions réciproques en suite de l'annulation de la vente (arrêt, pp. 19 et 20), quand elle avait précédemment estimé (arrêt, pp. 14 à 17) que les deux parties à ce contrat avaient été en collusion frauduleuse, la cour d'appel a violé les principes nemo auditur propriam turpitudinem allegans et in pari causa turpitudinis cessat repetitio. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Monsieur [H] reproche à l'arrêt infirmatif attaqué DE L'AVOIR débouté de sa demande en remboursement du coût des travaux et de toutes dépenses, frais et charges engagés depuis l'acquisition pour l'amélioration et l'entretien du domaine ; ALORS QUE monsieur [H] sollicitait (conclusions, p. 40), non seulement la restitution du prix de vente, mais aussi celle des charges de toute nature qu'il avait assumées depuis l'acquisition litigieuse, et produisait, au soutien de cette demande, des pièces nombreuses, numérotées 47 à 55 sur le bordereau de communication annexé à ses conclusions en cause d'appel ; que pour retenir que monsieur [H] ne justifierait pas du coût des travaux et de toutes dépenses, frais et charges engagés, la cour d'appel a affirmé (arrêt, p. 20, premier alinéa, in fine) qu'il « lui appartenait de produire les documents nécessaires permettant à la cour de juger du bien fondé de cette demande » ; qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur la prétendue absence au dossier de pièces qui figuraient sur le bordereau de communication de pièces annexé aux dernières conclusions de monsieur [H] et dont la communication n'avait pas été contestée, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 33 F-D Pourvoi n° W 21-10.246 Aide juridictionnelle totale en défense au profit de M. [Y] [S]. Admission du bureau d'aide juridictionnelle près la Cour de cassation en date du 5 octobre 2021. R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 Mme [E] [H], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° W 21-10.246 contre l'arrêt rendu le 24 août 2020 par la cour d'appel de Nouméa (chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Banque de Nouvelle-Calédonie, dite BNC, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ à M. [Y] [S], domicilié [Adresse 1], défendeurs à la cassation. La société Banque de Nouvelle-Calédonie et M. [S] ont formé, chacun, un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Les demandeurs aux pourvois incidents invoquent, respectivement, à l'appui de leur recours, un moyen unique de cassation et deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, les observations de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de Mme [H], de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque de Nouvelle-Calédonie, de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de M. [S], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Nouméa, 24 août 2020), suivant offre acceptée le 19 février 2007, la société Banque de Nouvelle-Calédonie (la banque) a consenti un prêt immobilier à M. [S] et Mme [H] (les emprunteurs). 2. Le 11 décembre 2013, les emprunteurs ayant été défaillants dans le paiement des échéances à compter du 19 mars 2012, la banque a prononcé la déchéance du terme. 3. Les 10 et 11 février 2015, elle a assigné les emprunteurs en paiement du solde du prêt. Ceux-ci ont notamment invoqué la prescription de l'action. Examen des moyens Sur les premiers moyens, pris en leurs deuxième et troisième branches, du pourvoi principal de Mme [H] et du pourvoi incident de M. [S], rédigés en termes identiques et réunis Enoncé du moyen 4. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à la banque, d'une part, la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP à compter du 15 janvier 2015 et, d'autre part, la somme de 10 000 FCFP avec intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance, alors : « 2°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que l'action en paiement des mensualités impayées se prescrivait à compter de leurs échéances successives et que l'action en paiement du capital dû se prescrivait à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité, quand les parties étaient d'accord pour fixer le point de départ du délai de l'ensemble de l'action de la banque à la première échéance impayée au 19 mars 2012, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 3°/ que le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que conformément aux règles d'imputabilité des paiements, le règlement partiel du 7 janvier 2015 aurait éteint la dette relative aux échéances impayées avant la déchéance du terme du 11 décembre 2013 plutôt que le solde du prêt devenu exigible à cette date, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie. » Réponse de la Cour Vu l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie : 5. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. 6. Pour condamner les emprunteurs à payer à la banque une certaine somme en remboursement du solde du crédit immobilier qu'elle leur avait consenti, l'arrêt écarte la prescription de l'action en paiement en énonçant que la prescription applicable au prêt immobilier se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs échéances respectives et que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité. Elle ajoute que, conformément aux règles d'imputabilité des paiements, le règlement partiel du 7 janvier 2015 a éteint la dette relative aux échéances échues impayées, de sorte qu'il ne reste plus que le solde du capital devenu exigible. 7. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur ces moyens relevés d'office et relatifs à la détermination du point de départ du délai de prescription, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Sur le deuxième moyen du pourvoi principal Enoncé du moyen 8. Mme [H] fait grief à l'arrêt de la condamner solidairement avec M. [S] à payer à la banque la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP, alors « que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en considérant que la dette totale incluait des intérêts sur le solde du crédit impayé correspondant à la période allant du 11 décembre 2013, date de la déchéance du terme, au 14 janvier 2015, date de perception du règlement partiel, pour un montant de 1 805 884 FCFP que les premiers juges auraient omis de prendre en compte, sans répondre au moyen opérant de la débitrice selon lequel le contrat de prêt ne permettait pas que la banque puisse exiger des intérêts supplémentaires sur les échéances impayées de sorte que cette somme n'était pas due, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie. » Réponse de la Cour Vu l'article 455 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie : 9. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. Le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs. 10. Pour fixer le montant de la créance de la banque, l'arrêt retient que le premier juge a omis de prendre en compte dans le solde du crédit les intérêts déjà échus pour la période du 11 décembre 2013 au 14 janvier 2015 d'un montant de 1 805 884 FCFP. 11. En statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de Mme [H] qui soutenait que les clauses du contrat de prêt ne permettaient pas à la banque d'obtenir paiement d'intérêts courant sur les échéances impayées qui comprenaient une partie d'intérêts, de sorte que la somme de 1 805 884 FCFP n'était pas due, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé. Sur le troisième moyen du pourvoi principal de Mme [H] et le second moyen du pourvoi incident de M. [S], pris en leur deuxième branche, rédigés en termes identiques et réunis Enoncé du moyen 12. Les emprunteurs font grief à l'arrêt de les condamner solidairement à payer à la banque la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP, alors « que l'article 31 de la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 relative à l'information et à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier sanctionnant par la déchéance du droit aux intérêts le prêteur professionnel qui n'aurait pas respecté le formalisme prévu par l'article 5 de cette loi s'appliquait en Nouvelle-Calédonie en 2007 ; qu'en jugeant que cette sanction prévue en cas de violation du formalisme relatif à l'offre préalable ne s'appliquait pas en Nouvelle-Calédonie au motif qu'elle aurait seulement figuré dans un décret n° 87-344 du 21 mai 1987 qui ne s'appliquerait pas à ce territoire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ensemble l'article 6 de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de la consommation. » Réponse de la Cour Vu les articles 40 et 31 de la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 relative à l'information et à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier : 13. Selon le premier texte, les dispositions de la loi du 13 juillet 1979 sont applicables dans les territoires d'outre-mer. Il résulte du second que le prêteur qui ne respecte pas l'une des obligations prévues à l'article 5 de la même loi peut être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge. 14. Pour rejeter la demande des emprunteurs tendant à ce que la banque soit déchue de son droit aux intérêts contractuels en raison de l'irrégularité formelle de l'offre de crédit acceptée le 19 février 2007, l'arrêt énonce que, si le contrat est soumis à la loi du 11 juillet 1979, les sanctions prévues en cas de non-respect du formaliste de l'offre de crédit sont prévues par le décret du 21 mai 1987 qui n'a pas été étendu à la Nouvelle-Calédonie. 15. En statuant ainsi, alors que la loi précitée du 13 juillet 1979, applicable au territoire de la Nouvelle-Calédonie, qui était invoquée par les emprunteurs au soutien de leur demande, prévoyait, en son article 31, la sanction de la déchéance du droit aux intérêts en cas de méconnaissance par le prêteur du formalisme de l'offre de crédit défini à l'article 5, la cour d'appel a violé les textes susvisés, par refus d'application. Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi incident de la banque Enoncé du moyen 16. La banque fait grief à l'arrêt de condamner solidairement les emprunteurs à ne lui payer que la somme de 9 593 878 FCFP avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an à compter du 15 janvier 2015 sur la somme de 7 991 182 FCFP et la somme de 10 000 FCFP avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement, alors « qu'en condamnant les emprunteurs à ne payer à la banque au titre du capital et des intérêts de retard que la somme de 9 593 878 FCFP avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an à compter du 15 janvier 2015 sur la somme de 7 991 182 FCFP sans exposer le calcul justifiant le montant de la condamnation qu'elle prononçait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 455 du code de procédure civile : 17. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. 18. Pour condamner solidairement les emprunteurs à payer à la banque une certaine somme, l'arrêt énonce que la créance de la banque en principal et intérêts s'élève à la somme de 9 593 878 FCFP, le premier juge ayant omis de prendre en compte dans le solde du crédit restant dû avant règlement les intérêts déjà échus pour la période du 11 décembre 2013 au 14 janvier 2015 d'un montant de 1 805 884 FCFP. 19. En statuant ainsi, sans donner aucun motif à sa décision afin de justifier le calcul qu'elle retenait du montant de la créance de la banque, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 24 août 2020, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa autrement composée ; Condamne la société Banque de Nouvelle-Calédonie aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Banque de Nouvelle-Calédonie et la condamne à payer à Mme [H] la somme de 3 000 euros et à la SCP Bauer-Violas Feschotte-Desbois Sebagh la somme de 2 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits au pourvoi principal par la SAS Buk Lament-Robillot, avocat aux Conseils, pour Mme [H] PREMIER MOYEN DE CASSATION Mme [H] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée solidairement avec M. [S] à payer à la BNC, d'une part, la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts aux taux nominal de 6,04 % l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP à compter du 15 janvier 2015 et, d'autre part, la somme de 10.000 F CFP avec intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance ; 1°) ALORS QUE Mme [H] comme la banque fixaient le point de départ du délai de prescription de l'action de cette dernière à la date du 19 mars 2012 correspondant à la première échéance impayée ; qu'en considérant, pour retenir que l'action n'était pas prescrite, que l'action en paiement de mensualités impayées se prescrit à compter de leurs échéances successives et que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme puis que la déchéance du terme prononcée le 11 décembre 2013 avait rendu exigible l'ensemble de la dette comprenant les échéances impayées, le capital restant dû, les intérêts sur échéances impayées, l'indemnité de défaillance et les intérêts de retard, que le règlement partiel du 7 janvier 2015 à hauteur de 25.472.207 F CFP avait éteint la dette d'échéances impayées, de sorte que ne restait dû que le solde du capital devenu exigible et que l'action engagée le 11 février 2015 était antérieure à l'expiration du délai biennal au 14 décembre 2015, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, violant ainsi les articles 4 et 5 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 2°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que l'action en paiement des mensualités impayées se prescrivait à compter de leurs échéances successives et que l'action en paiement du capital dû se prescrivait à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité, quand les parties étaient d'accord pour fixer le point de départ du délai de l'ensemble de l'action de la banque à la première échéance impayée au 19 mars 2012, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 3°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que conformément aux règles d'imputabilité des paiements, le règlement partiel du 7 janvier 2015 aurait éteint la dette relative aux échéances impayées avant la déchéance du terme du 11 décembre 2013 plutôt que le solde du prêt devenu exigible à cette date, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 4°) ALORS QUE le juge ne peut statuer par pure affirmation ; qu'en affirmant que le règlement partiel du 7 janvier 2015 aurait éteint la dette relative aux échéances échues conformément aux règles d'imputabilité des paiements sans exposer même sommairement en quoi ces règles impliquaient que ce règlement avait éteint les dettes correspondant aux échéances impayées avant le 11 décembre 2013 plutôt que les dettes devenues exigibles à compter de la déchéance du terme à cette date, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Mme [H] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée solidairement avec M. [S] à payer à la BNC la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts aux taux nominal de 6,04 % l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP ; ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; qu'en considérant que la dette totale incluait des intérêts sur le solde du crédit impayé correspondant à la période allant du 11 décembre 2013, date de la déchéance du terme, au 14 janvier 2015, date de perception du règlement partiel, pour un montant de 1.805.884 f CFP que les premiers juges auraient omis de prendre en compte, sans répondre au moyen opérant de la débitrice selon lequel le contrat de prêt ne permettait pas que la banque puisse exiger des intérêts supplémentaires sur les échéances impayées de sorte que cette somme n'était pas due, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Mme [H] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée solidairement avec M. [S] à payer à la BNC la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts aux taux nominal de 6,04 % l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP ; 1°) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que la déchéance du droit aux intérêts prévue par la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 en cas de violation du formalisme relatif à l'offre préalable ne s'appliquait pas en Nouvelle-Calédonie au motif qu'elle aurait seulement figuré dans un décret n° 87-344 du 21 mai 1987 qui ne s'appliquerait pas à ce territoire , la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 2°) ALORS QUE l'article 31 de la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 relative à l'information et à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier sanctionnant par la déchéance du droit aux intérêts le prêteur professionnel qui n'aurait pas respecté le formalisme prévu par l'article 5 de cette loi s'appliquait en Nouvelle-Calédonie en 2007 ; qu'en jugeant que cette sanction prévue en cas de violation du formalisme relatif à l'offre préalable ne s'appliquait pas en Nouvelle-Calédonie au motif qu'elle aurait seulement figuré dans un décret n° 87-344 du 21 mai 1987 qui ne s'appliquerait pas à ce territoire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ensemble l'article 6 de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de la consommation ; 3°) ALORS QUE par application de l'article L. 743-3 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au 20 janvier 2006, étaient applicables en Nouvelle-Calédonie les dispositions des articles L. 313-1 à L. 313-5-2 du même code et notamment son article L. 313-4 lequel reprenait les dispositions des articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation relatifs au TEG dont la méconnaissance peut entraîner, sans recours à une disposition de nature réglementaire qui ne serait pas applicable en Nouvelle-Calédonie, la substitution rétroactive du taux légal au taux contractuel et la restitution par la banque de sommes trop versées par l'emprunteur ; qu'en écartant, implicitement mais nécessairement, la demande de Mme [H] tendant à la substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel et à la restitution des sommes versées en se fondant, d'une part, sur la circonstance que les dispositions du code de la consommation n'auraient été rendues applicables en Nouvelle-Calédonie qu'à compter du 1er mai 2011 et pour ses seules dispositions législatives et, d'autre part, que les sanctions au formalisme contractuel n'auraient été sanctionnées que par les dispositions réglementaires du décret du 21 mai 1987 dont l'application n'a pas été étendu à la Nouvelle-Calédonie, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 743-3 et L. 313-4 du code monétaire et financier, ensemble les dispositions des articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour la société Banque de Nouvelle-Calédonie dite BNC La banque de Nouvelle-Calédonie fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir condamné les deux emprunteurs solidairement à ne lui payer que la somme de 9 593 878 FCFP avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an à compter du 15 janvier 2015 sur la somme de 7 991 182 FCFP et la somme de 10 000 FCFP avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement entrepris ; alors 1/ que les intérêts au taux conventionnel sur le capital restant dû après déchéance du terme courent du jour du prononcé de la déchéance ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a condamné les emprunteurs à payer à la banque au titre du capital restant dû et des intérêts de retard la somme de 9 593 878 FCFP avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an à compter du 15 janvier 2015 sur la somme de 7 991 182 FCFP ; qu'en faisant courir les intérêts au taux conventionnel sur le capital à compter du 15 janvier 2015 après avoir constaté que la déchéance du terme avait été prononcée le 11 décembre 2013, la cour d'appel a violé les articles 1153 et 1134 du code civil en leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; alors 2/ qu'en condamnant les emprunteurs à ne payer à la banque au titre du capital et des intérêts de retard que la somme de 9 593 878 FCFP avec intérêts au taux nominal de 6,04 % l'an à compter du 15 janvier 2015 sur la somme de 7 991 182 FCFP sans exposer le calcul justifiant le montant de la condamnation qu'elle prononçait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat aux Conseils, pour M. [S] PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [Y] [S] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné solidairement avec Mme [E] [H] à payer à la BNC, d'une part, la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts aux taux nominal de 6,04% l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP à compter du 15 janvier 2015 et, d'autre part, la somme de 10.000 F CFP avec intérêts au taux légal à compter du jugement de première instance ; 1) ALORS QUE M. [Y] [S] comme la banque fixaient le point de départ du délai de prescription de l'action de cette dernière à la date du 19 mars 2012 correspondant à la première échéance impayée ; qu'en considérant, pour retenir que l'action n'était pas prescrite, que l'action en paiement de mensualités impayées se prescrit à compter de leurs échéances successives et que l'action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du terme puis que la déchéance du terme prononcée le 11 décembre 2013 avait rendu exigible l'ensemble de la dette comprenant les échéances impayées, le capital restant dû, les intérêts sur échéances impayées, l'indemnité de défaillance et les intérêts de retard, que le règlement partiel du 7 janvier 2015 à hauteur de 25 472 207 FCFP avait éteint la dette d'échéances impayées, de sorte que ne restait dû que le solde du capital devenu exigible et que l'action engagée le 11 février 2015 était antérieure à l'expiration du délai biennal au 14 décembre 2015, la cour d'appel a méconnu les termes du litige, violant ainsi les articles 4 et 5 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 2) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que l'action en paiement des mensualités impayées se prescrivait à compter de leurs échéances successives et que l'action en paiement du capital dû se prescrivait à compter de la déchéance du terme qui emporte son exigibilité, quand les parties étaient d'accord pour fixer le point de départ du délai de l'ensemble de l'action de la banque à la première échéance impayée au 19 mars 2012, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 3) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que conformément aux règles d'imputabilité des paiements, le règlement partiel du 7 janvier 2015 aurait éteint la dette relative aux échéances impayées avant la déchéance du terme du 11 décembre 2013 plutôt que le solde du prêt devenu exigible à cette date, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 4) ALORS QUE le juge ne peut statuer par pure affirmation ; qu'en affirmant que le règlement partiel du 7 janvier 2015 aurait éteint la dette relative aux échéances échues conformément aux règles d'imputabilité des paiements sans exposer, même sommairement, en quoi ces règles impliquaient que ce règlement avait éteint les dettes correspondant aux échéances impayées avant le 11 décembre 2013 plutôt que les dettes devenues exigibles à compter de la déchéance du terme à cette date, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie. SECOND MOYEN DE CASSATION M. [Y] [S] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamné solidairement avec Mme [E] [H] à payer à la BNC la somme de 9 593 878 FCFP, avec intérêts aux taux nominal de 6,04% l'an sur la somme de 7 991 878 FCFP ; 1) ALORS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en relevant d'office, sans avoir soumis ce moyen à la discussion des parties, que la déchéance du droit aux intérêts prévue par la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 en cas de violation du formalisme relatif à l'offre préalable ne s'appliquait pas en Nouvelle-Calédonie au motif qu'elle aurait seulement figuré dans un décret n° 87-344 du 21 mai 1987 qui ne s'appliquerait pas à ce territoire, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie ; 2) ALORS QUE l'article 31 de la loi n° 79-596 du 13 juillet 1979 relative à l'information et à la protection des emprunteurs dans le domaine immobilier sanctionnant par la déchéance du droit aux intérêts le prêteur professionnel qui n'aurait pas respecté le formalisme prévu par l'article 5 de cette loi s'appliquait en Nouvelle-Calédonie en 2007 ; qu'en jugeant que cette sanction prévue en cas de violation du formalisme relatif à l'offre préalable ne s'appliquait pas en Nouvelle-Calédonie au motif qu'elle aurait seulement figuré dans un décret n° 87-344 du 21 mai 1987 qui ne s'appliquerait pas à ce territoire, la cour d'appel a violé les textes susvisés ensemble l'article 6 de la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de la consommation ; 3) ALORS QUE par application de l'article L. 743-3 du code monétaire et financier, dans sa rédaction applicable au 20 janvier 2006, étaient applicables en Nouvelle-Calédonie les dispositions des articles L. 313-1 à L. 313-5-2 du même code et notamment son article L. 313-4 lequel reprenait les dispositions des articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation relatifs au TEG dont la méconnaissance peut entraîner, sans recours à une disposition de nature réglementaire qui ne serait pas applicable en Nouvelle-Calédonie, la substitution rétroactive du taux légal au taux contractuel et la restitution par la banque de sommes trop versées par l'emprunteur ; qu'en écartant, implicitement mais nécessairement, la demande de M. [S] tendant à la substitution du taux d'intérêt légal au taux d'intérêt conventionnel et à la restitution des sommes versées en se fondant, d'une part, sur la circonstance que les dispositions du code de la consommation n'auraient été rendues applicables en Nouvelle-Calédonie qu'à compter du 1er mai 2011 et pour ses seules dispositions législatives et, d'autre part, que les sanctions au formalisme contractuel n'auraient été sanctionnées que par les dispositions réglementaires du décret du 21 mai 1987 dont l'application n'a pas été étendue à la Nouvelle-Calédonie, la cour d'appel a violé les dispositions des articles L. 743-3 et L. 313-4 du code monétaire et financier, ensemble les dispositions des articles L. 313-1 et L. 313-2 du code de la consommation.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 22 F-D Pourvoi n° U 21-21.215 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Airbus Helicopters, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° U 21-21.215 contre l'arrêt rendu le 17 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-1), dans le litige l'opposant à la société Alelk Company For General Trading Ltd, société de droit irakien, dont le siège est [Adresse 2]), défenderesse à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Guihal, conseiller doyen, les observations de la SARL Ortscheidt, avocat de la société Airbus Helicopters, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Guihal, conseiller doyen rapporteur, M. Hascher, conseiller, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 17 juin 2021), la société Eurocopter, devenue Airbus Helicopters, a conclu avec la société irakienne Alelk Company For General Trading (Alelk) des contrats de consultant afin de l'assister dans la négociation de ventes d'hélicoptères au Gouvernement irakien. 2. La société Alelk a saisi le juge des référés d'une demande de condamnation de la société Airbus Helicopter à lui payer une provision à valoir sur des factures impayées. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 3. La société Airbus Helicopters fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Alelk Company for General Trading Ltd la somme provisionnelle de 2 165 590,59 euros représentant le montant des factures, assorti des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 6 décembre 2017, alors « que l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle, tant que le tribunal arbitral n'est pas constitué, à ce que le juge des référés accorde une provision en cas d'urgence, si l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si l'obligation de la société Airbus Helicopters de régler les factures de la société Alelk n'était pas sérieusement contestable dès lors que celle-ci n'avait pas établi de rapports d'activité écrits à la société Airbus Helicopters, comme le stipulaient les articles 2.3 du contrat du 8 décembre 2008, 3 Section b du contrat du 30 août 2013 et 2.3 du contrat du 4 juillet 2014, de sorte que cette dernière était contractuellement autorisée à retenir les paiement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 873 et 1449 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu les articles 1449 et 873 du code de procédure civile : 4. Le premier de ces textes dispose : « L'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle, tant que le tribunal arbitral n'est pas constitué, à ce qu'une partie saisisse une juridiction de l'Etat aux fins d'obtenir une mesure d'instruction ou une mesure provisoire ou conservatoire. Sous réserve des dispositions régissant les saisies conservatoires et les sûretés judiciaires, la demande est portée devant le président du tribunal de grande instance ou de commerce, qui statue sur les mesures d'instruction dans les conditions prévues à l'article 145 et, en cas d'urgence, sur les mesures provisoires ou conservatoires sollicitées par les parties à la convention d'arbitrage. » 5. Selon le second, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal de commerce peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. 6. Pour dire que l'obligation de la société Airbus Helicopter n'est pas sérieusement contestable, l'arrêt retient que la réalité des échanges commerciaux entre les parties est attestée, bien que le plus souvent sous forme elliptique, de part et d'autre. 7. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l'obligation de la société Airbus Helicopters n'était pas sérieusement contestable à défaut d'établissement par la société Alelk des rapports d'activité écrits auxquels les contrats subordonnaient le paiement des factures, la cour d'appel a privé sa décision de base légale. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne la société Alelk Company For General Trading aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Alelk Company For General Trading à payer à la société Airbus Helicopter la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Airbus Helicopters. La société Airbus Helicopters fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à la société Alelk Company for General Trading Ltd la somme provisionnelle de 2.165.590,59 euros représentant le montant des factures, assorti des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 6 décembre 2017 ; 1°) ALORS QUE l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle, tant que le tribunal arbitral n'est pas constitué, à ce que le juge des référés accorde une provision en cas d'urgence, si l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si l'obligation de la société Airbus Helicopters de régler les factures de la société Alelk n'était pas sérieusement contestable dès lors que celle-ci n'avait pas établi de rapports d'activité écrits à la société Airbus Helicopters, comme le stipulaient les articles 2.3 du contrat du 8 décembre 2008, 3 Section b du contrat du 30 août 2013 et 2.3 du contrat du 4 juillet 2014, de sorte que cette dernière était contractuellement autorisée à retenir les paiement, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 873 et 1449 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'en statuant comme elle l'a fait, aux motif inopérants que « la réalité des échanges commerciaux entre les parties est attestée, bien que le plus souvent sous forme elliptique de part et d'autre » (arrêt attaqué, p. 7 § 1) et que « la société Airbus Helicopters (SAS) est malvenue à émettre a posteriori une contestation sur les modalités d'exécution de contrats dont elle est elle-même l'instigatrice, qu'elle a exécutés de 2008 à 2016 sans mention, à quelque moment que ce soit, d'un différend quant aux obligations réciproques des parties, et dont elle ne conteste pas les bénéfices économiques générés à son profit » (arrêt attaqué, p. 7 § 4), la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 873 et 1449 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE le juge doit analyser, au moins sommairement, les pièces sur lesquelles il se fondent ; qu'en se prononçant comme elle l'a fait, motifs pris que « la réalité des échanges commerciaux entre les parties est attestée, bien que le plus souvent sous forme elliptique de part et d'autre » (arrêt attaqué, p. 7 § 1), sans préciser les pièces sur lesquelles elle se fondait, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QUE l'existence d'une convention d'arbitrage ne fait pas obstacle, tant que le tribunal arbitral n'est pas constitué, à ce que le juge des référés accorde une provision en cas d'urgence, si l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en statuant comme elle l'a fait sans rechercher, comme elle y était expressément invitée, si l'obligation à paiement des factures de la société Airbus Helicopters n'était pas sérieusement contestable eu égard, d'une part, à l'absence d'information reçue par la société Alelk du montant à facturer à réception par la société Airbus Helicopters des règlements des clients pour les contrats du 8 décembre 2008 et 4 juillet 2014 et, d'autre part, pour le contrat du 30 août 2013, à l'impossibilité d'établir l'existence d'une obligation contractuelle de paiement à la charge de la société Airbus Helicopters dès lors que les factures ne faisaient pas référence aux contrats commerciaux au titre desquels une commission serait due, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 873 et 1449 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 VB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 16 F-D Pourvoi n° C 21-21.982 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 1°/ M. [P] [E], 2°/ Mme [F] [G], épouse [E], domiciliés tous deux [Adresse 2], ont formé le pourvoi n° C 21-21.982 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2021 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre civile), dans le litige les opposant à la société [Adresse 1], société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Farrenq-Nési, conseiller, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. et Mme [E], de la SCP Foussard et Froger, avocat de la société [Adresse 1], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Farrenq-Nési, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 1er juillet 2021), la société [Adresse 1] (la venderesse) a conclu avec M. et Mme [E] (les acquéreurs) une promesse de vente d'une propriété, sous conditions suspensives. 2. En cas de réalisation des conditions suspensives, la signature de l'acte authentique de vente était fixée au plus tard au 10 août 2017, à l'exception du lot F. 3. Le 21 septembre 2017, les acquéreurs ont fait sommation à la venderesse d'avoir à comparaître devant notaire le 5 octobre 2017 ; à cette date le notaire a dressé un procès-verbal de carence en l'absence de la société [Adresse 1]. 4. Le 8 novembre 2017, les acquéreurs ont assigné à jour fixe la venderesse afin d'obtenir que la vente soit prononcée par décision de justice ainsi que le paiement de dommages et intérêts. 5. La venderesse a soulevé une fin de non-recevoir tirée de la forclusion de la demande en réalisation forcée de la vente. Examen des moyens Sur le second moyen Enoncé du moyen 6. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de dire que la défaillance de la condition suspensive liée à la mainlevée des inscriptions hypothécaires entraîne la caducité de la promesse et de rejeter leurs demandes, alors : « 1°/ que le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que dans leurs conclusions d'appel, les époux [E] faisaient valoir que la société [Adresse 1] ne pouvait valablement se prévaloir de la non-réalisation de la condition suspensive liée à la mainlevée des inscriptions supérieures au prix de vente dans la mesure où, en sollicitant la mainlevée totale de l'inscription qui portait sur le bien vendu mais également sur d'autres parcelles exclues de la vente, la société venderesse avait empêché l'accomplissement de la condition suspensive ; qu'en omettant de répondre à ce moyen des conclusions des époux [E], pourtant déterminant pour apprécier la caducité du compromis de vente du 8 juin 2017, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ qu'une partie est libre de renoncer à la condition stipulée dans son intérêt exclusif, tant que celle-ci n'est pas accomplie ; que cette renonciation peut être implicite et résulter d'un commencement d'exécution du contrat ; que, dans leurs conclusions d'appel, les époux [E] rappelaient, preuve à l'appui, que, par courrier du 3 août 2017, ils avaient fait part au notaire de la société venderesse de leur volonté de réitérer la vente et que, compte tenu du refus de ce dernier de rédiger un projet d'acte conforme au compromis conclu entre les parties, ils avaient sollicité leur propre notaire à cette fin ; que, de son côté, la cour d'appel a constaté que les époux [E] avaient procédé à des travaux et entreposer leurs effets personnels au sein de l'immeuble vendu, et qu'ils poursuivaient désormais l'exécution forcée de la vente ; qu'en se bornant à affirmer, pour retenir la caducité du compromis de vente et débouter les époux [E] de l'ensemble de leurs demandes, que la condition suspensive liée à la mainlevée des inscriptions grevant le bien n'avait pas été levée, sans rechercher si, par leur comportement, les époux [E], dans l'intérêt exclusif desquels ladite condition suspensive avait été stipulée, n'y avaient pas implicitement renoncé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304-4 du code civil. » Réponse de la Cour 7. La cour d'appel a relevé que la promesse de vente avait été conclue sous la condition suspensive que l'état hypothécaire ne révélât pas de saisies ou d'inscriptions dont la charge, augmentée du coût des radiations à effectuer, serait supérieure au prix, et pour lesquelles il n'aurait pas été obtenu de mainlevée ou de dispense de purge des hypothèques, et que le Crédit agricole, par lettre adressée le 28 septembre 2017 au notaire, avait refusé de donner mainlevée entière et définitive de l'inscription de privilège de prêteur de deniers prise à son profit le 20 mai 2016. 8. Les acquéreurs ayant soutenu, dans leurs conclusions d'appel, qu'une demande de mainlevée partielle de l'inscription ne les aurait pas privés du droit de réaliser la vente à leurs risques et périls sans se prévaloir d'une défaillance de la venderesse permettant de tenir la condition suspensive pour réalisée, les conclusions prétendument délaissées ne constituaient pas un moyen et la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, n'avait pas à y répondre. 9. Elle n'était pas non plus tenue de procéder à une recherche sur la renonciation des acquéreurs à une condition suspensive qui aurait été conclue dans leur intérêt exclusif, qui n'était pas demandée. 10. Ayant retenu que la clause était claire, que la venderesse avait tenté, conformément aux stipulations de la promesse, d'obtenir la mainlevée ou la dispense de purge des hypothèques sans y parvenir, la cour d'appel en a exactement déduit que la défaillance de la condition suspensive entraînait la caducité de la promesse de vente. 11. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le premier moyen 12. Les acquéreurs font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande visant à voir prononcer la vente forcée de l'immeuble pour cause de forclusion et de rejeter l'ensemble de leurs demandes, alors : « 1°/ que ne constitue pas une fin de non-recevoir conventionnelle, la clause contractuelle aux termes de laquelle les parties se bornent à convenir que « si l'une des parties au compromis de vente refuse de signer l'acte authentique, l'autre partie pourra saisir le tribunal compétent pour obtenir la vente forcée du bien dans le délai d'un mois suivant la constatation de ce refus » ; que, dans leurs conclusions d'appel, les époux [E] faisaient valoir que la clause du compromis de vente du 8 juin 2017, selon laquelle « si l'une des parties vient à refuser de signer l'acte authentique de vente, l'autre pourra saisir le tribunal compétent dans le délai d'un mois de la constatation du refus (mise en demeure non suivie d'effet, procès-verbal de non comparution) afin de faire constater la vente par décision de justice (?) », ne constituait pas une fin de non-recevoir, mais le rappel d'une simple opportunité laissée aux parties et non sanctionnée ; qu'en affirmant qu' « il est constant que la clause de la promesse de vente s'analyse en une fin de non-recevoir conventionnelle rendant irrecevable la saisine de la juridiction afin de faire constater la vente par décision de justice, en cas de refus de l'autre partie de réitérer, postérieurement au délai d'un mois suite à la constatation du refus », la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ; 2°/ que le juge est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle, dès lors qu'il dispose des éléments de fait et de droit pour le faire, et le cas échéant, d'en écarter l'application ; que la clause d'un compromis de vente conclu entre un vendeur professionnel et un acquéreur non-professionnel prévoyant, que « si l'une des parties vient à refuser de signer l'acte authentique de vente, l'autre pourra saisir le tribunal compétent dans le délai d'un mois de la constatation du refus (mise en demeure non suivie d'effet, procès-verbal de non comparution) afin de faire constater la vente par décision de justice (?) », crée un déséquilibre significatif au détriment de l'acquéreur non-professionnel, dès lors qu'en abrégeant de manière drastique le délai légal normalement prévu, elle rend bien plus difficile l'exercice de ses droits en justice ; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher si la clause du compromis de vente dont se prévalait la société [Adresse 1], selon laquelle « si l'une des parties vient à refuser de signer l'acte authentique de vente, l'autre pourra saisir le tribunal compétent dans le délai d'un mois de la constatation du refus (mise en demeure non suivie d'effet, procès-verbal de non comparution) afin de faire constater la vente par décision de justice (?) », ne créait pas au détriment des époux [E], acquéreurs non-professionnels, un déséquilibre significatif et ne revêtait pas ainsi un caractère abusif, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé l'article L. 212-1 du code de la consommation ; 3°/ que dans la procédure à jour fixe, la demande initiale, qui introduit l'instance et saisit la juridiction, n'est autre que la requête par laquelle le demandeur expose au juge ses prétentions et sollicite l'autorisation d'assigner la partie adverse à jour fixe ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le 5 octobre 2017, le notaire des époux [E] a adressé un procès-verbal constatant le refus de la société [Adresse 1] de réitérer la vente par acte authentique et que dès le 30 octobre 2017, les époux [E] ont présenté au président du tribunal de grande instance de Perpignan une requête aux fins d'être autorisés à assigner à jour fixe la société [Adresse 1] ; qu'à cette requête était jointe une assignation aux termes de laquelle les époux [E] demandaient au tribunal de constater que la vente de l'immeuble situé à Saint Jean-Laseille était définitive ; qu'en retenant, pour accueillir la fin de non-recevoir tirée de l'irrespect du délai d'un mois pour solliciter la vente forcée, que le tribunal de grande instance de Perpignan n'avait été saisi par les époux [E] que le 8 novembre 2017, date de l'assignation à jour fixe délivrée à la société [Adresse 1], la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles 53, 54 et 57 du code de procédure civile, ensemble l'article 840 du même code. » 13. Le second moyen étant rejeté, le premier moyen est devenu sans objet. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme [E] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [E] PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR déclaré irrecevable la demande des époux [E] visant à voir prononcer la vente forcée de l'immeuble pour cause de forclusion et de les AVOIR, en conséquence, déboutés de l'ensemble de leurs demandes ; AUX MOTIFS QUE, sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrespect du délai d'un mois pour solliciter la vente forcée, il résulte du compromis de vente signé par les parties le 8 juin 2017 que « si l'une des parties vient à refuser de signer l'acte authentique de vente, l'autre pourra saisir le tribunal compétent dans le délai d'un mois de la constatation du refus (mise en demeure non suivie d'effet, procès-verbal de non comparution) afin de faire constater la vente par décision de justice, la partie défaillante supportant les frais de justice, nonobstant la mise en oeuvre de la stipulation de pénalité stipulée aux présentes » ; qu'en l'espèce, il résulte des pièces versées aux débats que par sommation d'avoir à comparaître délivrée le 21 septembre 2017, Me [D] [X], notaire représentant M. et Mme [E], faisait sommation à la SARL [Adresse 1] de comparaître le 5 octobre 2017 en son office ; que le 5 octobre 2017, le notaire dressait un procès-verbal constatant l'absence du vendeur ; que le 30 octobre 2017, les époux [E] présentaient au présidence du tribunal de grande instance de Perpignan une requête aux fins d'être autorisés à assigner à jour fixe et après autorisation donnée le 2 novembre 2017, ils assignaient à jour fixe la SARL [Adresse 1], par acte délivré le 8 novembre 2017 en demandant au tribunal de constater que la vente de l'immeuble situé à Saint Jean Laseille par la SARL [Adresse 1] moyennant le prix de 305.000 euros est définitive ; que contrairement à ce que soutiennent les époux [E] faisant valoir que le compromis prévoyait simplement une possibilité pour une des parties de saisir le tribunal, opportunité qui n'était pas sanctionnée, il est constant que la clause de la promesse de vente s'analyse en une fin de non-recevoir conventionnelle rendant irrecevable la saisine de la juridiction afin de faire constater la vente par décision de justice, en cas de refus de l'autre partie de réitérer postérieurement au délai d'un mois suite à la constatation du refus ; que la SARL [Adresse 1] a refusé de réitérer la vente le 5 octobre 2017 ; qu'or, l'assignation, qui constitue la saisine du tribunal de grande instance de Perpignan aux fins que ce dernier constat que la vente de l'immeuble est définitive, n'a été délivrée que le 8 novembre 2017, soit plus d'un mois après le refus du vendeur de réitérer la vente constaté par Me [X] le 5 octobre 2017 ; que la demande des époux [E] visant à voir prononcer la vente forcée de l'immeuble est donc irrecevable pour cause de forclusion ; que le jugement sera donc informé de ce chef ; 1) ALORS QUE ne constitue pas une fin de non-recevoir conventionnelle, la clause contractuelle aux termes de laquelle les parties se bornent à convenir que « si l'une des parties au compromis de vente refuse de signer l'acte authentique, l'autre partie pourra saisir le tribunal compétent pour obtenir la vente forcée du bien dans le délai d'un mois suivant la constatation de ce refus » ; que, dans leurs conclusions d'appel, les époux [E] faisaient valoir que la clause du compromis de vente du 8 juin 2017, selon laquelle « si l'une des parties vient à refuser de signer l'acte authentique de vente, l'autre pourra saisir le tribunal compétent dans le délai d'un mois de la constatation du refus (mise en demeure non suivie d'effet, procès-verbal de non comparution) afin de faire constater la vente par décision de justice (?) », ne constituait pas une fin de nonrecevoir, mais le rappel d'une simple opportunité laissée aux parties et non sanctionnée (concl., p. 7 § 8 et p. 8 § 1) ; qu'en affirmant qu' « il est constant que la clause de la promesse de vente s'analyse en une fin de non-recevoir conventionnelle rendant irrecevable la saisine de la juridiction afin de faire constater la vente par décision de justice, en cas de refus de l'autre partie de réitérer, postérieurement au délai d'un mois suite à la constatation du refus » (arrêt, p. 6 § 2), la cour d'appel a violé l'article 122 du code de procédure civile ; 2) ALORS, en toute hypothèse, QUE le juge est tenu d'examiner d'office le caractère abusif d'une clause contractuelle, dès lors qu'il dispose des éléments de fait et de droit pour le faire, et le cas échéant, d'en écarter l'application ; que la clause d'un compromis de vente conclu entre un vendeur professionnel et un acquéreur nonprofessionnel prévoyant, que « si l'une des parties vient à refuser de signer l'acte authentique de vente, l'autre pourra saisir le tribunal compétent dans le délai d'un mois de la constatation du refus (mise en demeure non suivie d'effet, procès-verbal de non comparution) afin de faire constater la vente par décision de justice (?) », crée un déséquilibre significatif au détriment de l'acquéreur non-professionnel, dès lors qu'en abrégeant de manière drastique le délai légal normalement prévu, elle rend bien plus difficile l'exercice de ses droits en justice ; qu'en l'espèce, en s'abstenant de rechercher si la clause du compromis de vente dont se prévalait la société [Adresse 1], selon laquelle « si l'une des parties vient à refuser de signer l'acte authentique de vente, l'autre pourra saisir le tribunal compétent dans le délai d'un mois de la constatation du refus (mise en demeure non suivie d'effet, procès-verbal de non comparution) afin de faire constater la vente par décision de justice (?) », ne créait pas au détriment des époux [E], acquéreurs non-professionnels, un déséquilibre significatif et ne revêtait pas ainsi un caractère abusif, la cour d'appel, qui a méconnu son office, a violé l'article L. 212-1 du code de la consommation ; 3) ALORS, en toute hypothèse, QUE dans la procédure à jour fixe, la demande initiale, qui introduit l'instance et saisit la juridiction, n'est autre que la requête par laquelle le demandeur expose au juge ses prétentions et sollicite l'autorisation d'assigner la partie adverse à jour fixe ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que le 5 octobre 2017, le notaire des époux [E] a adressé un procès-verbal constatant le refus de la société [Adresse 1] de réitérer la vente par acte authentique et que dès le 30 octobre 2017, les époux [E] ont présenté au président du tribunal de grande instance de Perpignan une requête aux fins d'être autorisés à assigner à jour fixe la société [Adresse 1] (arrêt, p. 6 in fine) ; qu'à cette requête était jointe une assignation aux termes de laquelle les époux [E] demandaient au tribunal de constater que la vente de l'immeuble situé à Saint Jean-Laseille était définitive ; qu'en retenant, pour accueillir la fin de non-recevoir tirée de l'irrespect du délai d'un mois pour solliciter la vente forcée, que le tribunal de grande instance de Perpignan n'avait été saisi par les époux [E] que le 8 novembre 2017, date de l'assignation à jour fixe délivrée à la société [Adresse 1], la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales qui s'évinçaient de ses propres constatations, a violé les articles 53, 54 et 57 du code de procédure civile, ensemble l'article 840 du même code. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que la défaillance de la condition liée à la mainlevée des inscriptions hypothécaires entraîne la caducité du compromis de vente signé entre les parties le 8 juin 2017 et d'AVOIR, en conséquence, débouté les époux [E] de l'ensemble de leurs demandes ; AUX MOTIFS QUE, sur la condition suspensive à la mainlevée des inscriptions, le compromis de vente stipulait, sous l'intitulé « conditions suspensives de droit commun », la clause suivante : « Les présentes sont conclues sous les conditions suspensives suivantes (?) * que l'état hypothécaire ne révèle pas de saisies ou d'inscriptions dont la charge augmentée du coût des radiations à effectuer serait supérieure au prix, et pour lesquelles inscriptions il n'aurait pas été obtenu de mainlevée ou dispense de purge des hypothèques. Le vendeur déclare qu'à sa connaissance le bien a la situation hypothécaire suivante : PRIVILEGE DE PRETEUR DE DENIERS inscrits au service de la publicité foncière de PERPIGNAN 2ème avec d'autres parcelles non comprises aux présentes pour sûreté de la somme de 1 650 000 euros en principal et 330 000 euros pour frais et accessoires (date d'effet 30 mars 2019) » ; que d'une part, il convient de relever qu'il ne ressort pas de cette clause que l'état hypothécaire devrait révéler d'autres inscriptions que celles dont l'acquéreur a été informé ; que d'autre part, il résulte de la clause susvisée que la vente a été consentie sous la condition suspensive que l'état hypothécaire ne révèle pas de saisie ou d'inscriptions dont la charge augmentée du coût des radiations à effectuer serait supérieure au prix, et pour lesquelles inscriptions il n'aurait pas été obtenu de mainlevée ou dispense de purge des hypothèques ; qu'en l'espèce, par courrier adressé le 28 septembre 2017 à Maître [V], le Crédit Agricole indiquait : « Nous faisons suite à vos différentes demandes concernant la cession de diverses parcelles sises à [Localité 4], lieu-dit « La Cabane » moyennant un prix total de 305.500 euros dont 290.500 euros pour les immeubles. Nous vous informons par la présente de notre refus de donner mainlevée entière et définitive de l'inscription de privilège de prêteur de denier prise à notre profit le 20 mai 2016 » ; que par conséquent, le vendeur, conformément aux dispositions du compromis, a tenté d'obtenir la mainlevée ou la dispense de purge des hypothèques, ce qui a été refusé par le Crédit Agricole ; que la purge résultant des dispositions de l'article 2475 du code civil intervenant préalablement à la vente supposant un accord entre les créanciers et le débiteur est une procédure facultative qui nécessite l'accord du vendeur sans qu'il soit tenu d'y consentir ; que par ailleurs, si tout acquéreur a la possibilité, comme le souligne le courriel du Crédit Agricole du 22 décembre 2017, de recourir à la procédure de purge des hypothèques, cette procédure ne peut être mise en oeuvre que postérieurement à la vente alors même qu'en l'espèce, la condition suspensive devait s'accomplir avant la vente, sous peine de caducité du compromis ; qu'en tout état de cause, la condition suspensive prévue par la commune intention des parties était claire, la vente étant conclue sous la condition de l'obtention de la mainlevée ou de la dispense de purge des inscriptions dont le coût est supérieur au prix de vente, ce que la SARL [Adresse 1] n'a pas pu obtenir ; qu'enfin, comme le souligne l'appelante, la garantie hypothécaire prévue au compromis et aux termes de laquelle : « Le vendeur s'obligera, s'il existe un ou plusieurs créanciers hypothécaires inscrits à régler l'intégralité des sommes pouvant leur être encore dues, à rapporter à ses frais les certificats de radiation des inscriptions et à en justifier auprès de l'acquéreur » n'a vocation à s'appliquer que dans l'hypothèse d'une réitération de la vente qui n'est pas intervenue du fait de la défaillance de la condition suspensive ; que compte tenu de ces éléments, il convient de dire que la défaillance de la condition liée à la mainlevée des inscriptions hypothécaires entraîne la caducité du compromis de vente signé entre les parties le 8 juin 2017, sans qu'il soit besoin d'examiner le moyen tiré de la défaillance de la condition concernant le financement de l'opération ; que le jugement sera infirmé de ce chef ; que compte tenu de l'irrecevabilité de la demande tendant à voir prononcer la vente forcée de l'immeuble et de la caducité du compromis de vente, les demandes formulées par les époux [E] au titre de la clause pénale ou au titre des dommages-intérêts ne pourront qu'être rejetées, les époux [E] ne pouvant notamment pas faire état de l'inexécution par le vendeur de la garantie hypothécaire prévue au compromis désormais caduque pour solliciter une somme de 30.500 euros à titre de dommages et intérêts ; 1) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions équivaut à un défaut de motifs ; que dans leurs conclusions d'appel, les époux [E] faisaient valoir que la société [Adresse 1] ne pouvait valablement se prévaloir de la non-réalisation de la condition suspensive liée à la mainlevée des inscriptions supérieures au prix de vente dans la mesure où, en sollicitant la mainlevée totale de l'inscription qui portait sur le bien vendu mais également sur d'autres parcelles exclues de la vente, la société venderesse avait empêché l'accomplissement de la condition suspensive (concl., p. 5 § 3-4) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen des conclusions des époux [E], pourtant déterminant pour apprécier la caducité du compromis de vente du 8 juin 2017, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2) ALORS, en toute hypothèse, QU'une partie est libre de renoncer à la condition stipulée dans son intérêt exclusif, tant que celle-ci n'est pas accomplie ; que cette renonciation peut être implicite et résulter d'un commencement d'exécution du contrat ; que, dans leurs conclusions d'appel, les époux [E] rappelaient, preuve à l'appui, que, par courrier du 3 août 2017, ils avaient fait part au notaire de la société venderesse de leur volonté de réitérer la vente et que, compte tenu du refus de ce dernier de rédiger un projet d'acte conforme au compromis conclu entre les parties, ils avaient sollicité leur propre notaire à cette fin (concl., p. 2 § 5 et p. 3 § 2 ; prod.) ; que, de son côté, la cour d'appel a constaté que les époux [E] avaient procédé à des travaux et entreposer leurs effets personnels au sein de l'immeuble vendu, et qu'ils poursuivaient désormais l'exécution forcée de la vente (arrêt, p. 3 § 6 et 7) ; qu'en se bornant à affirmer, pour retenir la caducité du compromis de vente et débouter les époux [E] de l'ensemble de leurs demandes, que la condition suspensive liée à la mainlevée des inscriptions grevant le bien n'avait pas été levée, sans rechercher si, par leur comportement, les époux [E], dans l'intérêt exclusif desquels ladite condition suspensive avait été stipulée, n'y avaient pas implicitement renoncé, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1304-4 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 29 F-D Pourvoi n° T 21-18.247 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 M. [K] [Z], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 21-18.247 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2021 par la cour d'appel de Versailles (1re chambre, 1re section), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [W] [B], domiciliée [Adresse 3], notaire, 2°/ à Mme [S] [U], domiciliée [Adresse 1], avocate, défenderesses à la cassation. Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Kloda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [Z], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mmes [B] et [U], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Kloda, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 6 avril 2021), [M] [Z] est décédée le 28 décembre 2000, en laissant pour lui succéder son fils, M. [K] [Z], et son petit-fils, M. [Y] [Z], venant par représentation de son père, [J] [Z], prédécédé. 2. Un arrêt du 31 octobre 2005 a ordonné l'ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession. 3. Le 15 juillet 2010, Mme [B] (la notaire) a établi un acte de partage signé par les copartageants, M. [K] [Z] étant assisté de Mme [U] (l'avocate). 4. L'évaluation des parts de la société G. [Z] et cie n'a pas été réalisée conformément aux dispositions de l'article 860 du code civil, ce qui a eu pour conséquence de diminuer la somme à rapporter à la succession par M. [Y] [Z] au titre des parts reçues en donation le 21 septembre 1999 et cédées le 31 août 2007 et de majorer celle que M. [K] [Z] devait rapporter à la succession. 5. M. [K] [Z] a assigné la notaire et l'avocate en responsabilité et indemnisation. Examen des moyens Sur les premier et deuxième moyens, pris en leurs deuxième, troisième, cinquième et sixième branches, rédigés en termes identiques et réunis, ci-après annexés 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur les premier et deuxième moyens, pris en leurs première et quatrième branches, rédigés en termes identiques et réunis Enoncé du moyen M. [K] [Z] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors : « 1°/ que le préjudice résultant d'une perte de chance doit être indemnisé, sauf si cette perte de chance était illusoire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que l'avocate, représentant M. [K] [Z], et la notaire, rédactrice de l'acte de partage amiable de la succession de [M] [Z], n'avaient pas informé leur client des dispositions de l'article 860 du code civil, prévoyant notamment que le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, ou à la date de l'aliénation s'il a été vendu, en application duquel les titres de la société G. [Z] détenus par M. [Y] [Z] auraient dû être évalués à 488 500 euros, soit leur prix de cession en août 2007, non à hauteur de leur valeur au moment de la donation, soit 108 640 euros, valeur retenue dans l'acte de partage ; que pour dire que ces fautes n'avaient pas causé de préjudice à M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu que l'évaluation des titres de la société G. [Z] avait été âprement débattue avant la conclusion de l'acte de partage, et estimé que le maintien des prétentions de M. [K] [Z] d'une évaluation supérieure à celle retenue dans l'acte l'aurait exposé à la poursuite d'une action judiciaire qu'il ne souhaitait absolument pas, ce qui de plus aurait de fait immobilisé les 1190 actions qu'il entendait pourtant revendre et que de plus, il n'était pas démontré qu'un partage judiciaire aurait tourné à son avantage au regard des contestations qu'aurait pu soulever M. [Y] [Z], de sorte qu'il n'était pas plus démontré que pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [K] [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, vu l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire dans le cadre duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à exclure toute perte de chance indemnisable de M. [K] [Z] qui, mieux informé, aurait pu refuser de conclure l'acte de partage amiable et engager une action en partage judiciaire qui aurait pu lui être plus favorable, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 4°/ que le juge saisi d'une demande de réparation du préjudice résultant d'une perte de chance doit l'indemniser au regard de la probabilité de survenance de l'événement favorable dont a été privée la victime ; que pour rejeter les demandes indemnitaires présentées par M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu que la question de l'évaluation du prix des titres de la société G. [Z] avait été discutée entre les co-héritiers préalablement à la conclusion de l'acte de partage du 15 juillet 2010, et que M. [K] [Z] avait renoncé en signant l'acte à ses prétentions à un prix plus élevé, l'avocate soutenant que le maintien des exigences de M. [K] [Z] l'aurait exposé à la poursuite d'une action judiciaire qu'il ne souhaitait absolument pas, ce qui de plus aurait de fait immobilisé les 1190 actions qu'il entendait pourtant revendre, et par motifs éventuellement adoptés, que c'est en toute connaissance de cause que M. [K] [Z] a accepté la valorisation forfaitaire des parts de la société G. [Z] telle qu'effectuée dans l'acte de partage ainsi que cela est d'ailleurs expressément relevé dans l'acte ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à établir que même mieux informé quant à la valeur réelle des titres détenus par M. [Y] [Z], M. [K] [Z] aurait néanmoins consenti à l'acte de partage signé le 15 juillet 2010 et renoncé à un partage judiciaire, la cour d'appel a encore méconnu l'article 1382, devenu 1240, du code civil. » Réponse de la Cour 7. Il résulte de l'article 1382, devenu 1240, du code civil que la circonstance qu'un professionnel du droit ait manqué à son devoir d'information n'implique pas nécessairement qu'il en résulte un préjudice et que seule la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable constitue une perte de chance réparable. 8. Après avoir retenu le manquement de la notaire et de l'avocate à leur devoir de conseil, l'arrêt énonce que le partage transactionnel résulte d'un équilibre global entre les exigences respectives des héritiers d'une succession ouverte dix ans auparavant, que M. [Y] [Z] n'aurait pas accepté l'application de l'article 860 du code civil sans exiger de concessions de la part de M. [K] [Z], au titre de la valorisation des meubles qui n'avaient pas été inventoriés, des intérêts légaux dûs sur les sommes que celui-ci avait été condamné à régler à la succession et au titre des dividendes sur ses parts sociales, sans qu'il soit démontré que son copartageant aurait été tenu à un tel rapport pour les actions qu'il avait revendues, et que M. [K] [Z] ne souhaitait pas un partage judiciaire qui aurait immobilisé ses parts sociales. Il en déduit qu'il n'est pas démontré que, pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, compte tenu de l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire à l'occasion duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir. 9. La cour d'appel a pu en déduire que la perte de chance, pour M. [K] [Z], d'obtenir un partage plus avantageux, n'était pas caractérisée. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. [K] [Z] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. Le conseiller referendaire rapporteur le president Le greffier de chambre MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour M. [Z] PREMIER MOYEN DE CASSATION M. [K] [Z] fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué de l'avoir débouté de ses demandes dirigées contre Me [W] [B], notaire ; 1°) ALORS QUE le préjudice résultant d'une perte de chance doit être indemnisé, sauf si cette perte de chance était illusoire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Me [U], avocat représentant M. [K] [Z], et Me [B], rédacteur de l'acte de partage amiable de la succession de Mme [M] [Z], n'avaient pas informé leur client des dispositions de l'article 860 du code civil, prévoyant notamment que le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, ou à la date de l'aliénation s'il a été vendu, en application duquel les titres de la société G. [Z] détenus par M. [Y] [Z] auraient dû être évalués à 488.500 €, soit leur prix de cession en août 2007, non à hauteur de leur valeur au moment de la donation, soit 108.640 €, valeur retenue dans l'acte de partage ; que pour dire que ces fautes n'avaient pas causé de préjudice à M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu que l'évaluation des titres de la société G. [Z] avait été âprement débattue avant la conclusion de l'acte de partage, et estimé que le maintien des prétentions de M. [K] [Z] d'une évaluation supérieure à celle retenue dans l'acte « l'aurait exposé à la poursuite d'une action judiciaire qu'il ne souhaitait absolument pas, ce qui de plus aurait de fait immobilisé les 1190 actions qu'il entendait pourtant revendre » (arrêt, p. 9, dernier §) et que de plus, il n'était pas démontré qu'un partage judiciaire aurait « tourné à [son] avantage » au regard des contestations qu'aurait pu soulever M. [Y] [Z], de sorte qu'il n'était « pas plus démontré que pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, vu l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire dans le cadre duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir » ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à exclure toute perte de chance indemnisable de M. [K] [Z] qui, mieux informé, aurait pu refuser de conclure l'acte de partage amiable et engager une action en partage judiciaire qui aurait pu lui être plus favorable, la cour d'appel a violé l'article 1382 (devenu 1240) du code civil ; 2°) ALORS QUE s'il incombe au demandeur de rapporter la preuve de l'existence du préjudice dont il sollicite l'indemnisation, la charge de la preuve du caractère dépourvu de sérieux de la perte de chance pèse sur le défendeur ; que pour dire que les fautes respectivement commises par Me [U] et par Me [B] n'avaient causé aucun préjudice à M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu qu'il n'était pas démontré que le partage judiciaire, faisant une application stricte des dispositions de l'article 860 du code civil, aurait « tourné à l'avantage de M. [[K]] [Z] alors que le partage transactionnel signé le 15 juillet 2010, issu d'une succession ouverte 10 ans auparavant, résulte au contraire d'un équilibre global entre les exigences respectives des cohéritiers conquis au terme d'âpres et longues négociations ainsi qu'il en résulte des nombreuses pièces produites aux débats », et qu'il n'était pas non plus démontré « que pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, vu l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire dans le cadre duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir » ; qu'en statuant ainsi, quand il appartenait au défendeur de démontrer que la chance perdue par M. [K] [Z] était en réalité dépourvue de tout caractère sérieux, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 (désormais 1353) du code civil ; 3°) ALORS QUE le juge saisi d'une demande de réparation du préjudice résultant d'une perte de chance doit l'indemniser au regard de la probabilité de survenance de l'événement favorable dont a été privée la victime ; que, pour rejeter les demandes indemnitaires de M. [K] [Z], la cour d'appel a considéré qu'il n'était pas démontré que le partage judiciaire, faisant une application stricte des dispositions de l'article 860 du code civil, aurait « tourné à l'avantage de M. [[K]] [Z] » et en conséquence qu'il n'était pas démontré que « pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, vu l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire dans le cadre duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir » ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher concrètement quelles auraient été les chances de succès et les incidences financières des contestations qu'aurait pu émettre M. [Y] [Z] dans le cadre d'un partage judiciaire, afin d'évaluer le quantum de la perte de chance subie par M. [K] [Z], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 (devenu 1240) du code civil ; 4°) ALORS QUE le juge saisi d'une demande de réparation du préjudice résultant d'une perte de chance doit l'indemniser au regard de la probabilité de survenance de l'événement favorable dont a été privée la victime ; que pour rejeter les demandes indemnitaires présentées par M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu que la question de l'évaluation du prix des titres de la société G. [Z] avait été discutée entre les co-héritiers préalablement à la conclusion de l'acte de partage du 15 juillet 2010, et que M. [K] [Z] avait renoncé en signant l'acte à ses prétentions à un prix plus élevé, Me [U] soutenant que le maintien des exigences de M. [K] [Z] « l'aurait exposé à la poursuite d'une action judiciaire qu'il ne souhaitait absolument pas, ce qui de plus aurait de fait immobilisé les 1190 actions qu'il entendait pourtant revendre », et par motifs éventuellement adoptés, que « c'est en toute connaissance de cause que M. [Z] a accepté la valorisation forfaitaire des parts de la société G. [Z] telle qu'effectuée dans l'acte de partage ainsi que cela est d'ailleurs expressément relevé dans l'acte » ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à établir que même mieux informé quant à la valeur réelle des titres détenus par M. [Y] [Z], M. [K] [Z] aurait néanmoins consenti à l'acte de partage signé le 15 juillet 2010 et renoncé à un partage judiciaire, la cour d'appel a encore méconnu l'article 1382 (devenu 1240) du code civil ; 5°) ALORS ENFIN QUE l'autorité de chose jugée attachée à une décision de justice interdit que celle-ci soit ultérieurement remise en cause ; qu'en retenant, pour rejeter les demandes indemnitaires formées par M. [K] [Z], que dans le cadre d'un éventuel partage judiciaire, M. [Y] [Z] aurait pu solliciter les intérêts au taux légal afférents aux sommes dont M. [K] [Z] avait été condamné à faire le rapport par arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 24 novembre 2008, quand cette décision devenue définitive ne faisait pas état de ces intérêts au titre des sommes rapportables par M. [K] [Z], et avait fixé de manière définitive la somme devant être rapportée à la succession par M. [K] [Z] à la somme de 341.555,38 €, la cour d'appel a violé les articles 4 et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 (devenu 1355) du code civil ; 6°) ALORS, ENFIN, QUE M. [K] [Z] faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 6) que M. [Y] [Z] avait perçu en 2007 la somme de 126.984 € à titre de dividendes sur les titres de la société G. [Z] qu'il avait reçus en donation de sa grand-mère en 1999 ; qu'en se bornant à retenir que « si M. [Z] fait valoir que le rapport en aurait également été dû par [Y] [Z], l'acte de cession du 31 août 2007 (pièce n°11 de M [Z]) par lequel [Y] [Z] a vendu ses actions, stipule que l'acheteur aura droit aux dividendes à compter du 31 août 2007. Le montant des dividendes de 126 984 euros avancé par M. [Z] ne résultant d'aucun commencement de preuve, il n'est pas démontré que ces éventuels dividendes se seraient compensés avec ceux perçus par M. [Z] lui-même pour un montant non contesté de 75 550 euros en 2007 », sans avoir égard aux dividendes perçus par M. [Y] [Z] avant la cession, qu'il lui appartenait de prendre en compte, la cour d'appel a violé l'article 1382 (devenu 1240) du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION M. [K] [Z] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir débouté de ses demandes dirigées contre Me [S] [U], avocat, 1°) ALORS QUE le préjudice résultant d'une perte de chance doit être indemnisé, sauf si cette perte de chance était illusoire ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que Me [U], avocat représentant M. [K] [Z], et Me [B], rédacteur de l'acte de partage amiable de la succession de Mme [M] [Z], n'avaient pas informé leur client des dispositions de l'article 860 du code civil, prévoyant notamment que le rapport est dû de la valeur du bien donné à l'époque du partage, ou à la date de l'aliénation s'il a été vendu, en application duquel les titres de la société G. [Z] détenus par M. [Y] [Z] auraient dû être évalués à 488.500 €, soit leur prix de cession en août 2007, non à hauteur de leur valeur au moment de la donation, soit 108.640 €, valeur retenue dans l'acte de partage ; que pour dire que ces fautes n'avaient pas causé de préjudice à M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu que l'évaluation des titres de la société G. [Z] avait été âprement débattue avant la conclusion de l'acte de partage, et estimé que le maintien des prétentions de M. [K] [Z] d'une évaluation supérieure à celle retenue dans l'acte « l'aurait exposé à la poursuite d'une action judiciaire qu'il ne souhaitait absolument pas, ce qui de plus aurait de fait immobilisé les 1190 actions qu'il entendait pourtant revendre » (arrêt, p. 9, dernier §) et que de plus, il n'était pas démontré qu'un partage judiciaire aurait « tourné à [son] avantage » au regard des contestations qu'aurait pu soulever M. [Y] [Z], de sorte qu'il n'était « pas plus démontré que pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, vu l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire dans le cadre duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir » ; qu'en statuant par de tels motifs, impropres à exclure toute perte de chance indemnisable de M. [K] [Z] qui, mieux informé, aurait pu refuser de conclure l'acte de partage amiable et engager une action en partage judiciaire qui aurait pu lui être plus favorable, la cour d'appel a violé l'article 1147 (devenu 1231-1) du code civil ; 2°) ALORS QUE s'il incombe au demandeur de rapporter la preuve de l'existence du préjudice dont il sollicite l'indemnisation, la charge de la preuve du caractère dépourvu de sérieux de la perte de chance pèse sur le défendeur ; que pour dire que les fautes respectivement commises par Me [U] et par Me [B] n'avaient causé aucun préjudice à M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu qu'il n'était pas démontré que le partage judiciaire, faisant une application stricte des dispositions de l'article 860 du code civil, aurait « tourné à l'avantage de M. [[K]] [Z] alors que le partage transactionnel signé le 15 juillet 2010, issu d'une succession ouverte 10 ans auparavant, résulte au contraire d'un équilibre global entre les exigences respectives des cohéritiers conquis au terme d'âpres et longues négociations ainsi qu'il en résulte des nombreuses pièces produites aux débats », et qu'il n'était pas non plus démontré « que pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, vu l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire dans le cadre duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir » ; qu'en statuant ainsi, quand il appartenait au défendeur de démontrer que la chance perdue par M. [K] [Z] était en réalité dépourvue de tout caractère sérieux, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 (désormais 1353) du code civil ; 3°) ALORS QUE le juge saisi d'une demande de réparation du préjudice résultant d'une perte de chance doit l'indemniser au regard de la probabilité de survenance de l'événement favorable dont a été privée la victime ; que, pour rejeter les demandes indemnitaires de M. [K] [Z], la cour d'appel a considéré qu'il n'était pas démontré que le partage judiciaire, faisant une application stricte des dispositions de l'article 860 du code civil, aurait « tourné à l'avantage de M. [[K]] [Z] » et en conséquence qu'il n'était pas démontré que « pleinement informé du contenu des dispositions de l'article 860 du code civil, M. [Z] n'aurait pas signé l'acte de partage du 15 juillet 2010, vu l'aléa que présentait en particulier pour lui un partage judiciaire dans le cadre duquel son cohéritier disposait de nombreux arguments à faire valoir » ; qu'en statuant de la sorte, sans rechercher concrètement quelles auraient été les chances de succès et les incidences financières des contestations qu'aurait pu émettre M. [Y] [Z] dans le cadre d'un partage judiciaire, afin d'évaluer le quantum de la perte de chance subie par M. [K] [Z], la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 (devenu 1231-1) du code civil ; 4°) ALORS QUE le juge saisi d'une demande de réparation du préjudice résultant d'une perte de chance doit l'indemniser au regard de la probabilité de survenance de l'événement favorable dont a été privée la victime ; que pour rejeter les demandes indemnitaires présentées par M. [K] [Z], la cour d'appel a retenu que la question de l'évaluation du prix des titres de la société G. [Z] avait été discutée entre les co-héritiers préalablement à la conclusion de l'acte de partage du 15 juillet 2010, et que M. [K] [Z] avait renoncé en signant l'acte à ses prétentions à un prix plus élevé, Me [U] soutenant que le maintien des exigences de M. [K] [Z] « l'aurait exposé à la poursuite d'une action judiciaire qu'il ne souhaitait absolument pas, ce qui de plus aurait de fait immobilisé les 1190 actions qu'il entendait pourtant revendre », et par motifs éventuellement adoptés, que « c'est en toute connaissance de cause que M. [Z] a accepté la valorisation forfaitaire des parts de la société G. [Z] telle qu'effectuée dans l'acte de partage ainsi que cela est d'ailleurs expressément relevé dans l'acte » ; qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à établir que même mieux informé quant à la valeur réelle des titres détenus par M. [Y] [Z], M. [K] [Z] aurait néanmoins consenti à l'acte de partage signé le 15 juillet 2010 et renoncé à un partage judiciaire, la cour d'appel a encore méconnu l'article 1147 (devenu 1231-1) du code civil ; 5°) ALORS ENFIN QUE l'autorité de chose jugée attachée à une décision de justice interdit que celle-ci soit ultérieurement remise en cause ; qu'en retenant, pour rejeter les demandes indemnitaires formées par M. [K] [Z], que dans le cadre d'un éventuel partage judiciaire, M. [Y] [Z] aurait pu solliciter les intérêts au taux légal afférents aux sommes dont M. [K] [Z] avait été condamné à faire le rapport par arrêt de la cour d'appel d'Orléans du 24 novembre 2008, quand cette décision devenue définitive ne faisait pas état de ces intérêts au titre des sommes rapportables par M. [K] [Z], et avait fixé de manière définitive la somme devant être rapportée à la succession par M. [K] [Z] à la somme de 341.555,38 €, la cour d'appel a violé les articles 4 et 480 du code de procédure civile, ensemble l'article 1351 (devenu 1355) du code civil ; 6°) ALORS, ENFIN, QUE M. [K] [Z] faisait valoir (ses conclusions d'appel, p. 6) que M. [Y] [Z] avait perçu en 2007 la somme de 126.984 € à titre de dividendes sur les titres de la société G. [Z] qu'il avait reçus en donation de sa grand-mère en 1999 ; qu'en se bornant à retenir que si M. [Z] fait valoir que le rapport en aurait également été dû par [Y] [Z], l'acte de cession du 31 août 2007 (pièce n°11 de M [Z]) par lequel [Y] [Z] a vendu ses actions, stipule que l'acheteur aura droit aux dividendes à compter du 31 août 2007. Le montant des dividendes de 126 984 euros avancé par M. [Z] ne résultant d'aucun commencement de preuve, il n'est pas démontré que ces éventuels dividendes se seraient compensés avec ceux perçus par M. [Z] lui-même pour un montant non contesté de 75 550 euros en 2007, sans avoir égard aux dividendes perçus par M. [Y] [Z] avant la cession, qu'il lui appartenait de prendre en compte, la cour d'appel a violé l'article 1147 (devenu 1231-1) du code civil. Le greffier de chambre
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 31 F-D Pourvoi n° N 21-14.033 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Eco environnement, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° N 21-14.033 contre l'arrêt rendu le 7 janvier 2021 par la cour d'appel de Douai (chambre 1 - section 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [R] [K], 2°/ à Mme [L] [Y], épouse [K], domiciliés tous deux [Adresse 2], 3°/ à la société Cofidis, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], défendeurs à la cassation. La société cofidis a formé un pourvoi incident contre le même arrêt. La demanderesse, au pourvoi principal invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. La défenderesse invoque, à l'appui de son pourvoi incident, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Champ, conseiller référendaire, les observations de la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat de la société Eco environnement, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Cofidis, de Me Occhipinti, avocat de M. et Mme [K], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Champ, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 7 janvier 2021), M. [K] a conclu hors établissement avec la société Eco environnement (le vendeur) un contrat de vente portant sur la fourniture et l'installation de panneaux photovoltaïques et d'un chauffe-eau thermodynamique, financés par un crédit souscrit avec Mme [K] (les acquéreurs), auprès de la société Cofidis (la banque). 2. Invoquant diverses irrégularités affectant le bon de commande, les acquéreurs ont assigné le vendeur et la banque en annulation des contrats de vente et de crédit. Examen des moyens Sur les moyens, pris en leurs deuxième et quatrième branches, du pourvoi principal et du pourvoi incident, rédigés en termes identiques et réunis, ci-après annexés 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur les moyens, pris en leur première branche, du pourvoi principal et du pourvoi incident, rédigés en termes identiques et réunis Enoncé du moyen 4. Le vendeur et la banque font grief à l'arrêt de prononcer la nullité du contrat de vente, alors « que s'il résulte des articles L. 221-9, L. 221-5 et L. 111-1 du code de la consommation que les contrats conclus hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté comportant notamment, à peine de nullité, le prix du bien ou du service, aucune disposition réglementaire ou légale n'interdit la stipulation d'un prix global et n'impose de décomposer, lorsque la vente porte sur une installation photovoltaïque, les coûts respectifs des panneaux et des travaux de pose ; que pour prononcer la nullité du contrat, l'arrêt retient que les mentions du bon de commande sont « insuffisantes pour satisfaire à l'exigence d'indication du prix des biens et du service », motifs pris de ce que le bon de commande ne « comporte qu'un prix global correspondant au capital financé, sans décomposition entre le coût des panneaux et celui des travaux de pose » ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, et violé l'article L. 221-9 du code de la consommation, ensemble les articles L. 221-5 et L. 111-1 du même code. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 111-1, 2° du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure celle issue de la loi n° 2020-105 du 10 février 2020 : 5. Selon ce texte, les opérations de démarchage à domicile font l'objet d'un contrat qui mentionne notamment, à peine de nullité, le prix du bien ou du service. 6. Pour prononcer l'annulation des contrats de vente et constater en conséquence l'annulation des contrats de crédit, l'arrêt retient que le bon de commande ne comporte qu'un prix global sans indication de la part respective du coût des panneaux et de celui des travaux de pose. 7. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé le texte susvisé. Et sur les moyens, pris en leur troisième branche, du pourvoi principal et du pourvoi incident, rédigés en termes identiques et réunis, Vu l'article 16 du code de procédure civile : 8. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. 9. Pour prononcer l'annulation du contrat de vente et constater en conséquence l'annulation du contrat de crédit, l'arrêt retient que le bon de commande comporte un bordereau de rétractation, non conforme aux exigences légales, dès lors qu'il est situé au verso de la partie du formulaire comportant les coordonnées du vendeur. 10. En statuant ainsi, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur le moyen relevé d'office et tiré de l'irrégularité du bordereau de rétractation, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 janvier 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ; Condamne M. et Mmer [K] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes de M. et Mme [K] et les condamne à payer à la société Eco environnement et in solidum à la société Cofidis chacune la somme de 1 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. Le conseiller referendaire rapporteur le president Le greffier de chambre MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit, au pourvoi principal, par la SCP Fabiani, Luc-Thaler et Pinatel, avocat aux Conseils, pour la société Eco environnement La société Eco Environnement fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 28 décembre 2016 entre M. [K] et la société Eco Environnement ; Alors, premièrement, que s'il résulte des articles L. 221-9, L. 221-5 et L. 111-1 du code de la consommation que les contrats conclus hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté comportant notamment, à peine de nullité, le prix du bien ou du service, aucune disposition réglementaire ou légale n'interdit la stipulation d'un prix global et n'impose de décomposer, lorsque la vente porte sur une installation photovoltaïque, les coûts respectifs des panneaux et des travaux de pose ; que pour prononcer la nullité du contrat, l'arrêt retient que les mentions du bon de commande sont « insuffisantes pour satisfaire à l'exigence d'indication du prix des biens et du service », motifs pris de ce que le bon de commande ne « comporte qu'un prix global correspondant au capital financé, sans décomposition entre le coût des panneaux et celui des travaux de pose » (arrêt p. 6 § 10) ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, et violé l'article L. 221-9 du code de la consommation, ensemble les articles L. 221-5 et L. 111-1 du même code ; Alors, deuxièmement, que le juge est tenu en toutes circonstances de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction ; que pour prononcer la nullité du contrat de vente du 28 décembre 2016, l'arrêt attaqué retient « qu'il résulte de l'examen du bon de commande qu'aucune mention ne vient expliciter les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des panneaux photovoltaïques et du chauffe-eau thermodynamique ainsi que la date de fin d'exécution de son installation » (arrêt p. 6, § 9) ; qu'en se déterminant ainsi, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur cette prétendue irrégularité soulevée d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; Alors, troisièmement, que le juge est tenu en toutes circonstances de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction ; que pour prononcer la nullité du contrat de vente du 28 décembre 2016, l'arrêt attaqué retient « que si le contrat comporte un bordereau de rétractation, celui-ci n'est toutefois pas conforme aux exigences légales dès lors qu'il est situé directement au verso du formulaire comportant les conditions générales du contrat et qu'il s'ensuit qu'en cas d'utilisation de cette faculté, le consommateur détruirait l'instrumentum du contrat qui perdrait ainsi totalement sa valeur probante » (arrêt p. 11, § 9) ; qu'en se déterminant ainsi, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur cette prétendue irrégularité soulevée d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; Alors, quatrièmement, et en toute hypothèse, que l'absence d'information sur le délai d'exécution du contrat prévue par l'article L. 111-1, 3° du code de la consommation n'est pas sanctionnée par la nullité, le consommateur bénéficiant dans cette occurrence d'une sanction spécifique, qui réside dans l'obligation pour le professionnel de s'exécuter dans un délai fixé à titre subsidiaire par l'article L. 216-1 du même code; qu'en retenant, pour prononcer la nullité du contrat de vente du 28 décembre 2016, « qu'il résulte de l'examen du bon de commande qu'aucune mention ne vient expliciter les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des panneaux photovoltaïques et du chauffe-eau thermodynamique ainsi que la date de fin d'exécution de son installation » (arrêt p. 6, § 9), la cour d'appel a violé l'article L. 111-1 du code de la consommation ; Alors, enfin, et subsidiairement, que l'exécution volontaire d'un contrat de vente conclu lors d'un démarchage, en connaissance des vices affectant le bon de commande, vaut confirmation du contrat et prive l'acquéreur de la possibilité de se prévaloir des nullités formelles invoquées, et que la connaissance des vices peut résulter de la reproduction au verso du bon de commande, après les conditions générales de vente, des dispositions légales qui auraient dû être respectées ; qu'en retenant au contraire que « le fait que les conditions générales figurant au verso sur le bon de commande se bornent à reprendre les dispositions du code de la consommation est insuffisant à révéler à l'emprunteur les vices affectant ce bon » (arrêt p. 7, § 2), la cour d'appel a violé l'article 1338 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 10 février 2016, ensemble l'article 1182 du code civil. Moyens annexes, au pourvoi incident, pour la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat au conseil, pour la société cofidis PREMIER MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu par le tribunal d'instance de Lille le 5 octobre 2018 qui a prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 28 décembre 2016 entre M. [K] et la société Eco Environnement. ALORS DE PREMIERE PART QUE s'il résulte des articles L. 221-9, L. 221-5 et L. 111-1 du code de la consommation que les contrats conclus hors établissement doivent faire l'objet d'un contrat écrit daté comportant notamment, à peine de nullité, le prix du bien ou du service, aucune disposition réglementaire ou légale n'interdit la stipulation d'un prix global et n'impose de décomposer, lorsque la vente porte sur une installation photovoltaïque, les coûts respectifs des panneaux et des travaux de pose ; que pour prononcer la nullité du contrat, l'arrêt retient que les mentions du bon de commande sont « insuffisantes pour satisfaire à l'exigence d'indication du prix des biens et du service », motifs pris de ce que le bon de commande ne « comporte qu'un prix global correspondant au capital financé, sans décomposition entre le coût des panneaux et celui des travaux de pose » (arrêt p. 6 § 10) ; qu'en se déterminant ainsi, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, et violé l'article L. 221-9 du code de la consommation, ensemble les articles L. 221-5 et L. 111-1 du même code ; ALORS DE DEUXIEME PART QUE le juge est tenu en toutes circonstances de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction ; que pour prononcer la nullité du contrat de vente du 28 décembre 2016, l'arrêt attaqué retient « qu'il résulte de l'examen du bon de commande qu'aucune mention ne vient expliciter les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des panneaux photovoltaïques et du chauffe-eau thermodynamique ainsi que la date de fin d'exécution de son installation » (arrêt p. 6, § 9) ; qu'en se déterminant ainsi, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur cette prétendue irrégularité soulevée d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; ALORS DE TROISIEME PART QUE le juge est tenu en toutes circonstances de faire observer et d'observer lui-même le principe de la contradiction ; que pour prononcer la nullité du contrat de vente du 28 décembre 2016, l'arrêt attaqué retient « que si le contrat comporte un bordereau de rétractation, celui-ci n'est toutefois pas conforme aux exigences légales dès lors qu'il est situé directement au verso du formulaire comportant les conditions générales du contrat et qu'il s'ensuit qu'en cas d'utilisation de cette faculté, le consommateur détruirait l'instrumentum du contrat qui perdrait ainsi totalement sa valeur probante » (arrêt p. 11, § 9) ; qu'en se déterminant ainsi, sans inviter préalablement les parties à présenter leurs observations sur cette prétendue irrégularité soulevée d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; ALORS DE QUATRIEME PART, et en toute hypothèse, QUE, l'absence d'information sur le délai d'exécution du contrat prévue par l'article L. 111-1, 3° du code de la consommation n'est pas sanctionnée par la nullité, le consommateur bénéficiant dans cette occurrence d'une sanction spécifique, qui réside dans l'obligation pour le professionnel de s'exécuter dans un délai fixé à titre subsidiaire par l'article L. 216-1 du même code ; qu'en retenant, pour prononcer la nullité du contrat de vente du 28 décembre 2016, « qu'il résulte de l'examen du bon de commande qu'aucune mention ne vient expliciter les conditions d'exécution du contrat, notamment les modalités et le délai de livraison des panneaux photovoltaïques et du chauffe-eau thermodynamique ainsi que la date de fin d'exécution de son installation » (arrêt p. 6, § 9), la cour d'appel a violé l'article L. 111-1 du code de la consommation ; ALORS DE CINQUIEME ET DERNIERE PART, et subsidiairement, QUE l'exécution volontaire d'un contrat de vente conclu lors d'un démarchage, en connaissance des vices affectant le bon de commande, vaut confirmation du contrat et prive l'acquéreur de la possibilité de se prévaloir des nullités formelles invoquées, et que la connaissance des vices peut résulter de la reproduction au verso du bon de commande, après les conditions générales de vente, des dispositions légales qui auraient dû être respectées ; qu'en retenant au contraire que « le fait que les conditions générales figurant au verso sur le bon de commande se bornent à reprendre les dispositions du code de la consommation est insuffisant à révéler à l'emprunteur les vices affectant ce bon » (arrêt p. 7, § 2), la cour d'appel a violé l'article 1182 du code civil. SECOND MOYEN DE CASSATION Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement rendu par le tribunal d'instance de Lille le 5 octobre 2018 en ce qu'il a constaté la nullité du contrat du contrat de crédit affecté n° 1494038801 conclu le 28 décembre 2016 ; ALORS QUE la cassation qui interviendra du chef de dispositif attaqué par le premier moyen de cassation entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif visé par le second moyen de cassation qui en dépend. Le greffier de chambre
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 17 F-D Pourvoi n° E 21-22.467 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 Mme [I] [P], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° E 21-22.467 contre l'arrêt rendu le 30 mars 2021 par la cour d'appel de Fort-de-France (chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société [K] et [S] [E], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 1], notaire, 2°/ à Mme [S] [Z], domiciliée [Adresse 7], 3°/ à Mme [W] [Z], domiciliée [Adresse 6], toutes deux prises en qualité d'héritières de [R] [N] épouse [P], décédée, défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Farrenq-Nési, conseiller, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de Mme [P], de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [K] et [S] [E], de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mmes [S] et [W] [Z], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Farrenq-Nési, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Fort-de-France, 30 mars 2021), Mme [P] a assigné [R] [N], veuve [P], à laquelle son mari [L] [P] avait fait don de la pleine propriété de l'universalité de ses biens, en résolution, pour défaut de paiement du prix, de la vente de la parcelle située sur la commune de Sainte-Marie, cadastrée section [Cadastre 4], qu'elle leur avait consentie le 4 avril 1974, sollicitant la restitution du bien et le paiement de dommages et intérêts. 2. Elle a appelé en intervention forcée devant la cour d'appel la société civile professionnelle [K] et [S] [E], en sa qualité de successeur du notaire rédacteur de l'acte de vente en cause. 3. [R] [N] a soulevé une fin de non-recevoir tirée de la prescription de cette action. 4. [R] [N] est décédée le 3 mai 2021 et l'instance a été poursuivie par ses héritières, Mmes [S] et [W] [Z]. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 5. Mme [P] fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande en résolution de la vente, alors : « 1°/ que l'action en résolution d'un contrat de vente engagée par le vendeur, dont l'objet est la restitution d'un bien immobilier, est une action réelle immobilière soumise à un délai de prescription trentenaire ; qu'en déclarant cependant prescrite l'action en résolution de la vente engagée par Mme [I] [P], tendant à la restitution d'un bien immobilier vendu en fraude de ses droits et sans versement d'une contrepartie financière, aux motifs que cette action était « une action personnelle, soumise au délai de prescription quinquennal », tandis qu'il s'agissait d'une action réelle immobilière soumise à un délai de prescription trentenaire, non échu à la date de l'acte introductif d'instance le 17 septembre 2015, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil par fausse application, et l'article 2227 par refus d'application ; 2°/ que le délai de prescription d'une action personnelle se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu les faits lui permettant de l'exercer, ce qui suppose la connaissance de la nécessité d'une telle action au regard des prétentions des autres parties ; qu'en jugeant cependant que le délai de prescription quinquennal de l'action de Mme [I] [P], tendant à la résolution du contrat de vente, avait commencé à courir au plus tard le 17 février 2003, date à laquelle M. [L] [P] avait déclaré ne jamais avoir versé le prix de cession visé dans le contrat de vente, sans rechercher si, du fait de cette déclaration, Mme [I] [P], convaincue de ses droits et de leur reconnaissance par les tiers, n'avait mesuré la nécessité d'agir en résolution de la vente qu'à compter du jour où, malgré les déclarations de son époux, Mme [N] s'était opposée à toute restitution de son bien immobilier, ce dont il résultait que son action n'était pas prescrite le 17 septembre 2015, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ; 3°/ que l'application d'un délai de prescription à une action réelle immobilière, tendant à la restitution d'un bien cédé en fraude des droits du vendeur, ne peut conduire à déclarer l'action irrecevable qu'à la condition que l'atteinte ainsi portée aux droits de propriété et d'accès à un tribunal du vendeur soit nécessaire et proportionnée au regard du but légitime poursuivi ; qu'en déclarant cependant irrecevable l'action en résolution de la vente immobilière de Mme [I] [P], tendant à la restitution d'une parcelle cédée en fraude de ses droits sur le fondement d'actes authentiques falsifiés, aux motifs qu'elle était prescrite, sans rechercher si l'atteinte ainsi portée aux droits de propriété de Mme [I] [P] et à son droit d'accès à un tribunal était nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi, la cour d'appel a donc violé les articles 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel à ladite convention. » Réponse de la Cour 6. Il est jugé que la résolution d'une vente pour défaut de paiement du prix par l'acquéreur tend à sanctionner une obligation de nature personnelle, de sorte qu'elle est soumise à la prescription de l'article 2224 du code civil (3e Civ., 2 mars 2022, pourvoi n° 20-23.602, publié). 7. La cour d'appel, par motifs propres et adoptés, a retenu à bon droit que l'action engagée par Mme [P] ne portant pas sur un droit de propriété afférent à un bien immobilier qu'il s'agirait de reconnaître ou de protéger, mais tendant à l'anéantissement d'une vente fondée sur le défaut de paiement du prix, n'était pas une action réelle immobilière, mais une action personnelle, soumise au délai de prescription quinquennale tel que défini par les nouvelles dispositions de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008. 8. Elle en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à des recherches sur la date à laquelle Mme [P] avait pu percevoir la nécessité d'agir et sur l'atteinte disproportionnée portée à ses droits qui n'étaient pas demandées, que, quand bien même le délai de prescription de l'action en résolution de la vente conclue le 4 avril 1974, antérieurement fixé à trente ans, aurait été interrompu par la reconnaissance, par [L] [P], du non-paiement du prix de vente, l'action en résolution aurait du être introduite avant le 19 juin 2013, de sorte que, l'ayant été le 17 septembre 2015, elle était prescrite. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le second moyen Enoncé du moyen 10. Mme [P] fait grief à l'arrêt de la condamner à payer des dommages et intérêts pour procédure abusive, alors : « 1°/ que le caractère infondé d'une action en justice ne suffit pas, à lui seul, à caractériser une faute faisant dégénérer en abus l'action en justice, laquelle implique d'établir que le demandeur a agi de mauvaise foi, avec intention de nuire ou légèreté blâmable ou encore à la suite d'une erreur grossière équivalente au dol ; qu'en condamnant cependant Mme [I] [P] à payer à Mme [N] la somme de 10 000 euros au titre de la faute qu'elle aurait commise en agissant en résolution de la vente, aux seuls motifs que l'acte de vente du 4 avril 1974 comprenait une clause de renonciation à agir en résolution de la vente, tandis que la seule existence de cette clause, comprise dans un acte dont le contenu était contesté par Mme [I] [P], n'établissait pas la mauvaise foi de cette dernière, la cour d'appel a donc statué par des motifs impropres à caractériser une faute faisant dégénérer en abus l'action en justice de Mme [I] [P], violant ainsi l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ; 2°/ qu'en condamnant Mme [I] [P] à payer à Mme [N] la somme de 10 000 euros au titre de la faute qu'elle aurait commise en agissant en résolution de la vente, aux motifs que l'acte de vente du 4 avril 1974 comprenait une clause de renonciation à agir en résolution de la vente et que Mme [I] [P] n'avait jamais contesté les droits de M. [L] [P] et Mme [N], sans rechercher si, précisément, Mme [I] [P] avait sollicité en justice la reconnaissance de son droit de propriété sur la parcelle [Cadastre 5] dès que les époux [P] et [N] lui en avaient refusé l'accès, ce qui témoignait de ce qu'elle était convaincue de l'étendue de ses droits et du bien-fondé de son action en résolution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code. » Réponse de la Cour 11. La cour d'appel a constaté que Mme [P] n'avait jamais contesté, avant l'instance d'appel, la validité de son engagement, ni même allégué un quelconque faux en écriture à l'égard de l'acte notarié de vente signé le 4 avril 1974. 12. Ayant relevé que cet acte prévoyait non seulement que Mme [P] donnait quittance au vendeur du paiement du prix de 1 500 euros, payé antérieurement à l'acte et hors la comptabilité du notaire, mais encore que celle-ci renonçait à exercer toute action en résolution de la vente à l'égard des acquéreurs, la cour d'appel a pu en déduire, sans être tenue de procéder à une recherche sur des procédures antérieures engagées par Mme [P] que ses constatations rendaient inopérante, que son action devait être considérée comme fautive et abusive. 13. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [P] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes formées par Mme [P] et par la société civile professionnelle [K] et [S] [E] et condamne Mme [P] à payer à Mmes [S] [Z] et [W] [Z] la somme globale de 3 000 euros. Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat aux Conseils, pour Mme [P] PREMIER MOYEN DE CASSATION : Madame [I] [P] fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable son action tendant à obtenir la résolution de la vente du 4 avril 1974 pour non-paiement du prix, la restitution de la parcelle cadastrée [Cadastre 3] sur la commune de Sainte-Marie, et la condamnation de Madame [N] à lui payer la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts, et d'avoir déclaré irrecevable la demande en nullité de la vente pour défaut de signature ; 1°) ALORS QUE l'action en résolution d'un contrat de vente engagée par le vendeur, dont l'objet est la restitution d'un bien immobilier, est une action réelle immobilière soumise à un délai de prescription trentenaire ; qu'en déclarant cependant prescrite l'action en résolution de la vente engagée par Madame [I] [P], tendant à la restitution d'un bien immobilier vendu en fraude de ses droits et sans versement d'une contrepartie financière, aux motifs que cette action était « une action personnelle, soumise au délai de prescription quinquennal » (arrêt, p. 7 § 4), tandis qu'il s'agissait d'une action réelle immobilière soumise à un délai de prescription trentenaire, non échu à la date de l'acte introductif d'instance le 17 septembre 2015, la cour d'appel a violé l'article 2224 du code civil par fausse application, et l'article 2227 par refus d'application ; 2°) ALORS, subsidiairement, QUE le délai de prescription d'une action personnelle se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu les faits lui permettant de l'exercer, ce qui suppose la connaissance de la nécessité d'une telle action au regard des prétentions des autres parties ; qu'en jugeant cependant que le délai de prescription quinquennal de l'action de Madame [I] [P], tendant à la résolution du contrat de vente, avait commencé à courir au plus tard le 17 février 2003, date à laquelle M. [L] [P] avait déclaré ne jamais avoir versé le prix de cession visé dans le contrat de vente (arrêt, p. 7 § 4), sans rechercher si, du fait de cette déclaration, Madame [I] [P], convaincue de ses droits et de leur reconnaissance par les tiers, n'avait mesuré la nécessité d'agir en résolution de la vente qu'à compter du jour où, malgré les déclarations de son époux, Madame [N] s'était opposée à toute restitution de son bien immobilier, ce dont il résultait que son action n'était pas prescrite le 17 septembre 2015, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2224 du code civil ; 3°) ALORS, en toute hypothèse, QUE l'application d'un délai de prescription à une action réelle immobilière, tendant à la restitution d'un bien cédé en fraude des droits du vendeur, ne peut conduire à déclarer l'action irrecevable qu'à la condition que l'atteinte ainsi portée aux droits de propriété et d'accès à un tribunal du vendeur soit nécessaire et proportionnée au regard du but légitime poursuivi ; qu'en déclarant cependant irrecevable l'action en résolution de la vente immobilière de Madame [I] [P], tendant à la restitution d'une parcelle cédée en fraude de ses droits sur le fondement d'actes authentiques falsifiés, aux motifs qu'elle était prescrite, sans rechercher si l'atteinte ainsi portée aux droits de propriété de Madame [I] [P] et à son droit d'accès à un tribunal était nécessaire et proportionnée au but légitime poursuivi, la cour d'appel a donc violé les articles 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble l'article 1er du premier protocole additionnel à ladite convention. SECOND MOYEN DE CASSATION : Madame [I] [P] fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à Madame [R] [N] la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ; 1°) ALORS QUE le caractère infondé d'une action en justice ne suffit pas, à lui seul, à caractériser une faute faisant dégénérer en abus l'action en justice, laquelle implique d'établir que le demandeur a agi de mauvaise foi, avec intention de nuire ou légèreté blâmable ou encore à la suite d'une erreur grossière équivalente au dol ; qu'en condamnant cependant Madame [I] [P] à payer à Madame [N] la somme de 10.000 euros au titre de la faute qu'elle aurait commise en agissant en résolution de la vente, aux seuls motifs que l'acte de vente du 4 avril 1974 comprenait une clause de renonciation à agir en résolution de la vente (arrêt, p. 8 § 4), tandis que la seule existence de cette clause, comprise dans un acte dont le contenu était contesté par Madame [I] [P], n'établissait pas la mauvaise foi de cette dernière, la cour d'appel a donc statué par des motifs impropres à caractériser une faute faisant dégénérer en abus l'action en justice de Madame [I] [P], violant ainsi l'article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code ; 2°) ALORS, en outre, QU'en condamnant Madame [I] [P] à payer à Madame [N] la somme de 10.000 euros au titre de la faute qu'elle aurait commise en agissant en résolution de la vente, aux motifs que l'acte de vente du 4 avril 1974 comprenait une clause de renonciation à agir en résolution de la vente (arrêt, p. 8 § 4) et que Madame [I] [P] n'avait jamais contesté les droits de M. [L] [P] et Madame [N] (arrêt, p. 8 § 3), sans rechercher si, précisément, Madame [I] [P] avait sollicité en justice la reconnaissance de son droit de propriété sur la parcelle [Cadastre 5] dès que les époux [P] et [N] lui en avaient refusé l'accès, ce qui témoignait de ce qu'elle était convaincue de l'étendue de ses droits et du bien-fondé de son action en résolution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1240 du même code.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet M. CHAUVIN, président Arrêt n° 23 F-D Pourvoi n° Z 21-13.055 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Trema Finances, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 21-13.055 contre l'arrêt rendu le 10 novembre 2020 par la cour d'appel d'Angers (chambre A civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [H] [W]-[G], domiciliée [Adresse 2], 2°/ à la société Stéphane Sladek - [H] [W]-[G] - [G] société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 2], notaire, défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, les observations de la SCP Richard, avocat de la société Trema Finances, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de Mme [W]-[G] et de la société Stéphane Sladek - [H] [W]-[G] - [G], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Angers, 10 novembre 2020), le 7 mai 2010, la société Trema Finances (la société) a donné pouvoir à M. [O] d'assurer la gestion d'un compte qu'elle avait ouvert le 15 avril 2010 à des fins spéculatives. 2. M. [O] s'est engagé envers la société à lui verser la différence entre la somme initiale de 2 000 000 euros déposée sur le compte et le solde de ce compte au cas où, au 31 décembre 2011, il serait inférieur à 2 000 000 euros. 3. Suivant acte authentique reçu le 3 juin 2010 par Mme [W]-[G] (le notaire), notaire associé de la société civile professionnelle Sladek - [W]-[G] - [G] (la SCP), Mme [O] s'est portée caution hypothécaire de l'obligation de M. [O] envers la société. 4. Exposant que M. [O] n'avait pas honoré son engagement et que les immeubles hypothéqués étaient grevés d'un bail emphytéotique, la société a assigné le notaire et la SCP en responsabilité et indemnisation. Examen du moyen Enoncé du moyen 5. La société fait grief à l'arrêt de limiter à la somme de 1 000 000 d'euros la condamnation du notaire et de la SCP à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi en raison de l'impossibilité de se voir restituer les fonds qu'elle avait confiés à M. [O], alors : « 1°/ que le dommage résultant de l'inefficacité de la sûreté garantissant la restitution des fonds est constitué par la perte des fonds et non par une perte de chance de se les voir restituer, dès lors qu'une sûreté efficace aurait permis cette restitution ; qu'en décidant néanmoins que l'inefficacité de la sûreté stipulée dans l'acte notarié, résultant de la faute commise par le notaire, avait uniquement entraîné une perte de chance, pour la société, de se voir restituer les fonds, et non pas la perte des fonds elle-même, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°/ que, subsidiairement, en affirmant, pour décider qu'il était peu probable que la société, même informée de l'inefficacité de la garantie hypothécaire, ait mis un terme à l'opération spéculative et récupéré les fonds investis avant la signature de l'acte notarié, le 3 juin 2010, qu'elle avait effectué des versements sur le compte le 4 mai 2010 et qu'elle avait octroyé à M. [O] un mandat simple de gestion le 7 mai 2010, mais que l'existence d'une garantie hypothécaire n'avait été évoquée que dans un courriel du 14 mai 2010 adressé au notaire, ce courriel faisant référence à une conversation téléphonique du 12 mai 2010, la cour d'appel, qui s'est ainsi prononcée par des motifs impropres à établir que, même informée de l'inefficacité de la garantie proposée par M. [O], il n'était pas certain que la société ait mis un terme à l'opération spéculative et procédé au retrait des fonds versés, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble le principe d'une réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime. » Réponse de la Cour 6. La cour d'appel a retenu que, par un arrêt devenu irrévocable, le notaire, en omettant d'informer la société de l'existence du bail emphytéotique grevant les immeubles affectés en hypothèque, avait méconnu son devoir d'information et de conseil et non pas son obligation d'assurer l'efficacité de l'acte. 7. Elle a relevé que la société s'était engagée sans émettre aucune réserve, ni poser aucune condition, dans l'opération en cause, en effectuant un versement d'un million d'euros, équivalent à la moitié de l'investissement prévu, sur un compte dont elle avait confié la gestion à M. [O], avant que ne soit demandée la mise en place d'une garantie et, a fortiori, avant que le notaire n'ait reçu des éléments d'information sur les biens proposés en garantie. 8. Elle a pu en déduire que le préjudice causé par la faute du notaire consistait en une perte de chance de mettre un terme à l'opération, de récupérer les fonds investis avant la signature de l'acte du 3 juin 2010 et de ne pas verser le surplus. 9. Le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé en sa seconde. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la société Trema Finances aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Trema Finances et la condamne à payer à Mme [H] [W]-[G] et à la SCP Sladek - [W]-[G] - [L] la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Richard, avocat aux Conseils, pour la société Trema Finances. La Société TREMA FINANCES FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 1.000.000 d'euros la condamnation de Maître [W]-[G] et de la SCP SLADEK - [W]-[G] – [G] à l'indemniser du préjudice qu'elle a subi en raison de l'impossibilité de se voir restituer les fonds qu'elle avait confiés à Monsieur [C] [O] ; 1°) ALORS QUE le dommage résultant de l'inefficacité de la sûreté garantissant la restitution des fonds est constitué par la perte des fonds et non par une perte de chance de se les voir restituer, dès lors qu'une sûreté efficace aurait permis cette restitution ; qu'en décidant néanmoins que l'inefficacité de la sûreté stipulée dans l'acte notarié, résultant de la faute commise Maître [W]-[G], avait uniquement entraîné une perte de chance, pour la Société TREMA FINANCE, se voir restituer les fonds, et non pas la perte des fonds elle-même, la Cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QUE, subsidiairement, en affirmant, pour décider qu'il était peu probable que la Société TREMA FINANCES, même informée de l'inefficacité de la garantie hypothécaire, ait mis un terme à l'opération spéculative et récupéré les fonds investis avant la signature de l'acte notarié, le 3 juin 2010, qu'elle avait effectué des versements sur le compte le 4 mai 2010 et qu'elle avait octroyé à Monsieur [O] un mandat simple de gestion le 7 mai 2010, mais que l'existence d'une garantie hypothécaire n'avait été évoquée que dans un courriel du 14 mai 2010 adressé à Maître [W]-[G], ce courriel faisant référence à une conversation téléphonique du 12 mai 2010, la Cour d'appel, qui s'est ainsi prononcée par des motifs impropres à établir que, même informée de l'inefficacité de la garantie proposée par Monsieur [O], il n'était pas certain que la Société TREMA FINANCES ait mis un terme à l'opération spéculative et procédé au retrait des fonds versés, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble le principe d'une réparation intégrale du préjudice sans perte ni profit pour la victime.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle Mme TEILLER, président Arrêt n° 21 F-D Pourvoi n° H 21-18.996 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société JEG, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° H 21-18.996 contre l'arrêt rendu le 18 mai 2021 par la cour d'appel de Chambéry (chambre civile, 1re section), dans le litige l'opposant : 1°/ à la société Axa France IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], 2°/ à la société MJ Synergie, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], pris en qualité de mandataire ad'hoc de la société Osmose Bois, liquidée, défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société JEG, de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Axa France IARD, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 18 mai 2021), la société JEG a entrepris des travaux de rénovation et d'extension dans un hôtel. Elle a confié la maîtrise d'oeuvre de l'opération à la société Osmose bois, assurée auprès de la société Axa France IARD (la société Axa). Le lot électricité a été attribué à la société Axiocom. 2. En raison de différends nés entre les sociétés Axiocom et JEG, la première a notifié à la seconde son refus de réaliser la seconde tranche des travaux d'électricité. 3. La société Axiocom a assigné la société JEG pour obtenir le paiement de plusieurs factures. La société JEG a demandé la fixation de ses créances contre les sociétés Osmose bois et Axiocom, placées en liquidation judiciaire en cours d'instance, au titre de la reprise de désordres, d'un surcoût de travaux et de la réparation de divers préjudices. Examen des moyens Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Mais sur le troisième moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 5. La société JEG fait grief à l'arrêt de dire que la société Axa ne lui doit pas sa garantie et de rejeter ses demandes dirigées contre cette société, alors « que le juge ne peut pas statuer par un motif inopérant ; qu'en l'espèce, la société Jeg, exerçant l'action directe contre l'assureur du maître d'oeuvre, soutenait que le maître d'oeuvre, placé depuis en liquidation judiciaire, n'avait pas valablement signé les conditions particulières dont l'assureur entendait se prévaloir pour échapper à l'action exercée à son encontre ; qu'en se bornant à affirmer, pour retenir que les conditions particulières et générales de la police d'assurance du 3 août 2007 avaient été régulièrement signées, que ladite police d'assurance n'était pas contestée par l'assuré, motif inopérant à exclure la contestation de l'exposante, et sans examiner plus avant cette contestation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 455 du code de procédure civile : 6. Selon ce texte, tout jugement doit être motivé. 7. Pour faire application des conditions particulières et générales d'une police d'assurance produite par la société Axa, l'arrêt retient que cette police a été signée par l'assurée, désignée dans le contrat comme étant la société Osmose bois, et qu'elle n'a pas été contestée par celle-ci. 8. En statuant ainsi, par un motif insuffisant à établir que cette société était la signataire des conditions particulières de la police dont l'assureur se prévalait, ce que contestait le maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la société Axa ne doit pas sa garantie à la société JEG et rejette les demandes de celle-ci contre la société Axa, en ce comprises celles qui concernent les frais irrépétibles et les dépens, l'arrêt rendu le 18 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ; Condamne la société Axa France IARD aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Axa France IARDet la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société JEG ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société JEG PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Jeg fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a fixé le montant de la créance de la société Jeg sur la société Osmose bois au titre de l'indemnisation des préjudices résultants du défaut de surveillance du chantier à 32 808,43 euros hors taxes, ALORS QUE le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; que dans ses conclusions d'appel, la société Jeg faisait valoir que les premiers juges avaient limité le montant de sa créance sur la société Osmose bois à la somme de 32 808,43 euros hors taxes correspondant aux travaux de reprise des désordres et n'avaient pris en compte ni les différences quantitatives et erreurs de facturation évaluées à 20 507,96 euros, ni la fourniture et la pose d'un câble d'alimentation omis par la société Axiocom pour une somme de 2 960 euros ; qu'en se bornant à adopter les motifs des premiers juges, qui n'avaient rien dit sur ces chefs de préjudice, et sans se prononcer elle-même sur ces chefs de préjudice en lien de causalité avec le défaut de surveillance du chantier, la cour d'appel a entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusions et violé l'article 455 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION La société Jeg fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a rejeté sa demande aux fins de voir condamner la société Osmose bois au titre de l'indemnisation du surcoût engendré par le refus de la société Axiocom d'effectuer la seconde tranche de travaux, ALORS QUE tout antécédent nécessaire du dommage en est la cause ; que, dès lors, en affirmant qu'aucun lien de causalité n'était établi entre le refus de la société Axiocom de poursuivre la seconde tranche du chantier et les manquements du maître d'oeuvre, la société Osmose bois, après avoir pourtant constaté que la société Axiocom avait dénoncé le contrat « au vu des événements et de la situation actuelle concernant le chantier » auxquels la société Osmose bois avait nécessairement contribué par ses carences, dûment relevées par les juges, dans le suivi de chantier et le contrôle des facturations, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, violant ainsi l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. TROISIEME MOYEN DE CASSATION La société Jeg fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement en ce qu'il a condamné la société Axa France Iard à payer à la société Jeg la somme de 32 808,43 euros, d'AVOIR dit que la société Axa France Iard ne doit pas sa garantie à la société Jeg, au titre de la police d'assurance souscrite par la société Osmose Bois le 3 août 2007 et d'AVOIR débouté la société Jeg de toutes ses demandes dirigées contre la société Axa France Iard, 1°) ALORS QUE le juge ne peut pas statuer par un motif inopérant ; qu'en l'espèce, la société Jeg, exerçant l'action directe contre l'assureur du maître d'oeuvre, soutenait que le maître d'oeuvre, placé depuis en liquidation judiciaire, n'avait pas valablement signé les conditions particulières dont l'assureur entendait se prévaloir pour échapper à l'action exercée à son encontre ; qu'en se bornant à affirmer, pour retenir que les conditions particulières et générales de la police d'assurance du 3 août 2007 avaient été régulièrement signées, que ladite police d'assurance n'était pas contestée par l'assuré, motif inopérant à exclure la contestation de l'exposante, et sans examiner plus avant cette contestation, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE, à tout le moins, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, la société Axa France Iard faisait simplement valoir que la police d'assurance en date du 3 août 2007 versée aux débats était signée ; que dès lors, en affirmant, pour retenir que les conditions particulières et générales de la police d'assurance du 3 août 2007 avaient été régulièrement signées, que ladite police d'assurance n'était pas contestée par l'assuré, la société Osmose bois, la cour d'appel a relevé d'office un moyen sur lequel les parties n'ont pas été invitées à s'expliquer, violant ainsi l'article 16 du code de procédure civile ; 3°) ALORS QUE la renonciation à un droit ne se présume pas et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté d'y renoncer ; que dès lors, en affirmant, pour retenir l'application de la police d'assurance en date du 3 août 2007, que cette police n'était pas contestée par la société Osmose bois, nonobstant le fait que le liquidateur judiciaire de cette société n'avait pas constitué avocat tant en première instance qu'en appel et qu'aucun élément de preuve ne venait corroborer cette prétendue absence de contestation de l'assuré, la cour d'appel s'est prononcée par un motif impropre à caractériser la renonciation non équivoque de la société Osmose bois au droit de contester l'application de cette police d'assurance plus restrictive que la précédente, et a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION La société Jeg fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement en ce qu'il a condamné la société Axa France Iard à payer à la société Jeg la somme de 32 808,43 euros, d'AVOIR dit que la société Axa France Iard ne doit pas sa garantie à la société Jeg, au titre de la police d'assurance souscrite par la société Osmose Bois le 3 août 2007 et d'AVOIR débouté la société Jeg de toutes ses demandes dirigées contre la société Axa France Iard, 1°) ALORS QUE l'assureur est tenu de mettre en garde l'assuré contre les conséquences d'une déclaration inexacte des activités, objet de la garantie contractuelle, lorsqu'il a des raisons de suspecter que l'assuré a effectué une déclaration incomplète ; que, dès lors, en affirmant, pour écarter tout manquement de la société Axa France Iard à son obligation d'information et de conseil à l'égard de la société Osmose bois, que l'activité déclarée relève de la seule responsabilité de l'assuré, sans rechercher si, au regard des circonstances et notamment de la souscription de deux contrats le 20 juillet 2007 et le 3 août 2007 ne mentionnant pas les mêmes activités déclarées, la société Axa France Iard n'avait pas des raisons de suspecter que la société Osmose bois avait effectué une déclaration d'activité incomplète, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; 2°) ALORS QUE, en tout état de cause, l'assureur est tenu d'éclairer l'assuré sur l'adéquation des risques couverts par les stipulations du contrat à la situation personnelle de cet assuré ; qu'en se bornant à affirmer, pour écarter tout manquement de la société Axa France Iard à son obligation d'information et de conseil à l'égard de la société Osmose bois, que l'activité déclarée relève de la seule responsabilité de l'assuré, sans rechercher si l'assureur avait éclairé la société Osmose bois sur l'adéquation des risques couverts à sa situation personnelle, ce qui était contesté, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 ; 3°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; que, dès lors, en retenant, pour écarter toute réparation du préjudice de la société Jeg au titre du manquement de la société Axa France Iard à son obligation précontractuelle d'information et de conseil, qu'il s'agirait d'un préjudice de perte de chance pour lequel aucune demande n'avait été formulée, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur un moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QUE les juges du fond ne peuvent refuser d'évaluer le préjudice dont ils constatent l'existence dans son principe ; que la cour d'appel a constaté l'existence d'un préjudice de perte de chance causé à la société Jeg ; qu'en refusant d'évaluer ce préjudice dont elle avait constaté l'existence, la cour d'appel a violé l'article 4 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Radiation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 25 F-D Pourvoi n° T 21-12.290 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société SVH énergie, société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 1], venant aux droits de la société GSE intégration, anciennement dénommée SVH énergie, a formé le pourvoi n° T 21-12.290 contre l'arrêt rendu le 9 novembre 2020 par la cour d'appel de Toulouse (1re chambre, section 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [M] [B], 2°/ à M. [O] [X], tous deux domiciliés [Adresse 2], défendeurs à la cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de la société SVH énergie, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu les articles 376, 381 et 470 du code de procédure civile : 1. Par arrêt du 29 juin 2022, la première chambre civile de la Cour de cassation, constatant l'interruption de l'instance consécutive à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société SVH énergie, a imparti aux parties et aux organes de la procédure collective un délai de trois mois pour effectuer les diligences nécessaires à la reprise de l'instance et dit qu'à défaut de leur accomplissement dans ce délai, la radiation du pourvoi serait prononcée. 2. Ces diligences n'ayant pas été accomplies, il convient de radier l'affaire. PAR CES MOTIFS, la Cour : PRONONCE la radiation du pourvoi n° T 21-12.290 ; Réserve les dépens ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 MY1 COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation M. CHAUVIN, président Arrêt n° 24 F-D Pourvois n° X 21-17.377 N 21-23.394 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 I - 1°/ M. [Z] [X], domicilié 2°/ Mme [S] [P], épouse [X], tous deux domiciliés [Adresse 1], ont formé le pourvoi n° X 21-17.377 contre un arrêt rendu le 1er avril 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-4), dans le litige les opposant à la société MCS & associés, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défendeur à la cassation. II - La société Les Pins Maritimes, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° N 21-23.394 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant : 1°/ à la société MCS & associés, société par actions simplifiée 2°/ à M. [Z] [X], 3°/ à Mme [S] [P], épouse [X], défendeurs à la cassation. Les demandeurs au pourvoi n° X 21-17.377 invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen de cassation annexés au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi n° N 21-23.394 invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de M. [X], de la société Les Pins Maritimes, de Mme [P], de la SCP Yves et Blaise Capron, avocat de la société MCS & associés, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° X 21-17.377 et N 21-23.394 sont joints. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er avril 2021), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 21 novembre 2019, pourvoi n° 18-20.356), par acte authentique du 22 novembre 1989, M. et Mme [X] (les emprunteurs) ont acquis un immeuble financé par un prêt consenti par la caisse régionale de Crédit agricole des Alpes-Maritimes (la banque), qui a inscrit un privilège de prêteur de deniers et une hypothèque conventionnelle en garantie de ce prêt. 3. Les échéances n'étant plus remboursées, la banque s'est prévalue de la déchéance du terme. 4. Les emprunteurs ont vendu l'immeuble à la société Les Pins Maritimes (la SCI), qui a mis en oeuvre la procédure de purge. 5. Soutenant que la créance de la banque était prescrite, les emprunteurs et la SCI l'ont assignée en constatation de la prescription. 6. La société MCS et associés est venue aux droits de la banque. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi n° X 21-17.377 et le moyen du pourvoi n° N 21-23.394, pris en leur seconde branche, rédigés en termes identiques, Enoncé du moyen 7. Les emprunteurs et la SCI font grief à l'arrêt de dire que la créance résultant du prêt du 22 novembre 1989 n'est pas prescrite, alors « que la prescription n'est pas interrompue par l'assignation signifiée par la partie qui s'en prévaut à celui contre lequel elle prétend avoir prescrit ; qu'en décidant en l'espèce qu'il n'y avait pas de prescription de la créance résultant de l'acte de prêt du 22 novembre 1989 à la date de l'introduction de la demande, formée le 30 juin 2014 par les emprunteurs, tendant à voir déclarer la créance de la banque prescrite et que cette demande avait « suspendu » la prescription jusqu'à l'extinction de l'instance, la cour d'appel, qui a fait produire un effet suspensif de la prescription à un acte émanant du débiteur s'en prévalant à l'encontre du créancier, a violé les articles 2241 et 2242 du code civil. » Réponse de la Cour Vu les articles 2241 et 2242 du code civil : 8. Il résulte de ces textes que l'interruption résultant d'une demande en justice ne produit ses effets jusqu'à l'extinction de l'instance que si la demande a été formée par le créancier auprès du débiteur prescrivant contre lui. 9. Pour dire non prescrite la créance résultant du prêt du 22 novembre 1989, l'arrêt retient que la demande en justice des emprunteurs et de laSCI a suspendu la prescription jusqu'à l'extinction de l'instance. 10. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a fait produire un effet sur le cours de la prescription à une demande qui n'était pas formée par le créancier auprès du débiteur prescrivant contre lui, a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne la société MCS et associés aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société MCS et associés et la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à M. et Mme [X] et à la société Les Pins Maritimes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit par la SCP Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [X], demandeurs au pourvoi n° X 21-17.377. M. et Mme [X] font grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que la créance résultant de l'acte de prêt consenti par acte authentique du 22 novembre 1989 n'était pas prescrite, 1) ALORS QUE la prescription n'est pas interrompue par l'assignation signifiée par la partie qui s'en prévaut à celui contre lequel elle prétend avoir prescrit ; qu'en décidant en l'espèce qu'il n'y avait pas de prescription de la créance résultant de l'acte de prêt du 22 novembre 1989 à la date de l'introduction de la demande, formée le 30 juin 2014 par M. et Mme [X], tendant à voir déclarer la créance de la banque prescrite et que cette demande avait « suspendu » la prescription jusqu'à l'extinction de l'instance, la cour d'appel qui a fait produire un effet interruptif de la prescription à un acte émanant du débiteur s'en prévalant à l'encontre du créancier, a violé les articles 2241 et 2242 du code civil. 2) ALORS QUE, subsidiairement, la prescription n'est pas interrompue par l'assignation signifiée par la partie qui s'en prévaut à celui contre lequel elle prétend avoir prescrit ; qu'en décidant en l'espèce qu'il n'y avait pas de prescription de la créance résultant de l'acte de prêt du 22 novembre 1989 à la date de l'introduction de la demande, formée le 30 juin 2014 par M. et Mme [X], tendant à voir déclarer la créance de la banque prescrite et que cette demande avait « suspendu » la prescription jusqu'à l'extinction de l'instance, la cour d'appel, qui a fait produire un effet suspensif de la prescription à un acte émanant du débiteur s'en prévalant à l'encontre du créancier, a violé les articles 2241 et 2242 du code civil. Moyen produit par la SCP Doumic-Seiller, avocat aux Conseils, pour la SCI Les Pins Maritimes demanderesse au pourvoi n° N 21-23.394. La SCI les Pins Maritimes fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir décidé que la créance résultant de l'acte de prêt consenti par acte authentique du 22 novembre 1989 n'était pas prescrite, 1) ALORS QUE la prescription n'est pas interrompue par l'assignation signifiée par la partie qui s'en prévaut à celui contre lequel elle prétend avoir prescrit ; qu'en décidant en l'espèce qu'il n'y avait pas de prescription de la créance résultant de l'acte de prêt du 22 novembre 1989 à la date de l'introduction de la demande, formée le 30 juin 2014 par la SCI Les Pins Maritimes et M. et Mme [X], tendant à voir déclarer la créance de la banque prescrite et que cette demande avait « suspendu » la prescription jusqu'à l'extinction de l'instance, la cour d'appel qui a fait produire un effet interruptif de la prescription à un acte émanant du débiteur s'en prévalant à l'encontre du créancier, a violé les articles 2241 et 2242 du code civil. 2) ALORS QUE, subsidiairement, la prescription n'est pas interrompue par l'assignation signifiée par la partie qui s'en prévaut à celui contre lequel elle prétend avoir prescrit ; qu'en décidant en l'espèce qu'il n'y avait pas de prescription de la créance résultant de l'acte de prêt du 22 novembre 1989 à la date de l'introduction de la demande, formée le 30 juin 2014 par la SCI Les Pins Maritimes et M. et Mme [X], tendant à voir déclarer la créance de la banque prescrite et que cette demande avait « suspendu » la prescription jusqu'à l'extinction de l'instance, la cour d'appel, qui a fait produire un effet suspensif de la prescription à un acte émanant du débiteur s'en prévalant à l'encontre du créancier, a violé les articles 2241 et 2242 du code civil. Le greffier de chambre
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 20 F-D Pourvoi n° Y 21-18.045 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 M. [G] [W], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 21-18.045 contre l'arrêt rendu le 9 juillet 2020 par la cour d'appel de Chambéry (2e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [J] [P], épouse [W], domiciliée [Adresse 2], 2°/ au Crédit immobilier de France développement, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], venant aux droits de la société Crédit immobilier de France Rhône-Alpes-Auvergne, défendeurs à la cassation. La société Crédit immobilier de France développement a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ; Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. [W], de la SCP Piwnica et Molinié, avocat du Crédit immobilier de France développement, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 9 juillet 2020), M. et Mme [W] ont conclu avec la société Bati Sud-Est un contrat portant sur la construction d'une maison d'habitation. Pour financer les travaux, ils ont contracté deux prêts notariés auprès de la société Crédit immobilier de France développement (la société CIFD). 2. Le chantier ayant été interrompu, malgré plusieurs mises en demeure infructueuses des maîtres de l'ouvrage, M. [W] a assigné la société CIFD en indemnisation de ses préjudices. Examen des moyens Sur le moyen, pris en ses première et troisième branches, du pourvoi incident, ci-après annexé 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui sont irrecevables. Sur le moyen, pris en sa deuxième branche, du pourvoi incident, dont l'examen est préalable Enoncé du moyen 4. La société CIFD fait grief à l'arrêt de dire qu'elle a commis une faute dans l'octroi des prêts ayant entraîné une perte de chance de 50 % pour M. et Mme [W] de ne pas contracter et de la condamner à payer à M. [W] des sommes au titre des préjudices matériel et moral, alors « que satisfait à son obligation de mise en garde, le prêteur de deniers qui émet deux offres de prêt puis deux contrats sous seing privé de prêt portant une clause claire et précise avertissant l'emprunteur que le contrat de construction souscrit par ce dernier ne lui permet pas de bénéficier de la protection instituée par les articles L. 230-1 et suivants et les articles R. 231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation relatifs aux contrats de construction de maison individuelle, et notamment, de la garantie de livraison à prix et délais convenus, et précisant que l'emprunteur a été informé des conséquences préjudiciables que pouvait entraîner ce défaut de protection légale ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que le CIFD avait manqué à son obligation d'information et de mise en garde et engagé sa responsabilité, que la clause d'information sur l'absence de garantie ne suffisait pas à l'exonérer de sa responsabilité, sans préciser pour quel motif la clause était insuffisante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction applicable. » Réponse de la Cour 5. La cour d'appel a retenu, d'une part, que le contrat conclu par M. et Mme [W] et la société Bati Sud-Est était un contrat de construction de maison individuelle et qu'une consultation, même rapide, du marché et du descriptif des lots suffisait à un banquier normalement diligent, professionnel du financement de la construction, pour s'apercevoir que la réglementation s'appliquant à un tel contrat n'était pas respectée et, d'autre part, qu'il ne pouvait être suppléé aux carences du contrat par l'insertion dans les actes de prêt d'une clause indiquant à l'emprunteur qu'il ne bénéficiait pas des garanties afférentes au contrat de construction de maison individuelle. 6. Elle a ainsi légalement justifié sa décision. Sur le moyen du pourvoi principal Enoncé du moyen 7. M. [W] fait grief à l'arrêt de limiter à une certaine somme la condamnation de la société CIFD au titre du préjudice matériel, alors : « 1°/ qu'il existe un lien de causalité entre le manquement du banquier à son devoir d'information et de conseil quant à l'absence de garantie de livraison et le coût des emprunts souscrits pour faire face aux travaux nécessaires à l'achèvement de la construction ; que, pour déterminer l'étendue du préjudice subi par les époux [W], la cour d'appel a pris en considération les frais financiers supplémentaires afférents au seul prêt de 72 218 euros au motif que « les autres prêts dont il est fait état sont postérieurs » ; qu'en se déterminant par ce motif inopérant, lorsqu'il lui appartenait de rechercher si ces prêts n'avaient pas été conclus pour faire face aux travaux nécessaires à l'achèvement de la construction, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1147 et 1151 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; 2°/ que s'ils avaient reçu les conseils appropriés, Monsieur [W] et son épouse auraient pu, soit renoncer à souscrire le prêt, soit régulariser un contrat de construction de maison individuelle avec garantie de livraison ; qu'ayant constaté que le préjudice allégué ressortait aux sommes qu'ils avaient exposées du fait de l'absence de garantie de livraison, la cour d'appel qui a ainsi mis en évidence que le préjudice allégué et effectivement subi par Monsieur [W] consistait en la perte de chance de régulariser un contrat de construction de maison individuelle avec garantie de livraison, ne pouvait apprécier l'étendue de ce préjudice au regard de la probabilité qu'auraient eu les emprunteur « de n'avoir pas contracté les deux prêts souscrits » ; qu'en statuant par un tel motif inopérant, sans rechercher quelle était la probabilité qu'ils aient pu régulariser un contrat de construction de maison individuelle avec garantie de livraison, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. » Réponse de la Cour 8. D'une part, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation du préjudice subi par M. [W] que la cour d'appel a considéré que le coût de certains prêts souscrits par lui ne devait pas être pris en compte pour l'évaluation de ce préjudice. 9. D'autre part, ayant retenu que le préjudice allégué par M. [W] résultait de l'absence de garantie de livraison et que le prix de la villa à construire avait été fixé à un montant inférieur à celui qu'il aurait été dans un contrat de construction de maison individuelle, ce qui constituait pour un emprunteur une incitation sérieuse à vouloir prendre le risque de renoncer à la garantie de livraison, elle a légalement justifié sa décision d'évaluer à 50 % la perte de chance de bénéficier de cette garantie. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Condamne M. [W] aux dépens du pourvoi principal et la société Crédit immobilier de France développement à ceux du pourvoi incident ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour M. [W] Monsieur [W] fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir condamné la société Crédit Immobilier de France Développement à lui payer la seule somme de 51 380,16 euros au titre de son préjudice matériel ; Alors, d'une part, qu'il existe un lien de causalité entre le manquement du banquier à son devoir d'information et de conseil quant à l'absence de garantie de livraison et le coût des emprunts souscrits pour faire face aux travaux nécessaires à l'achèvement de la construction ; que, pour déterminer l'étendue du préjudice subi par les époux [W], la cour d'appel a pris en considération les frais financiers supplémentaires afférents au seul prêt de 72 218 euros au motif que « les autres prêts dont il est fait état sont postérieurs » ; qu'en se déterminant par ce motif inopérant, lorsqu'il lui appartenait de rechercher si ces prêts n'avaient pas été conclus pour faire face aux travaux nécessaires à l'achèvement de la construction, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard des articles 1147 et 1151 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; Alors, d'autre part, que, s'ils avaient reçu les conseils appropriés, Monsieur [W] et son épouse auraient pu, soit renoncer à souscrire le prêt, soit régulariser un contrat de construction de maison individuelle avec garantie de livraison ; qu'ayant constaté que le préjudice allégué ressortait aux sommes qu'ils avaient exposées du fait de l'absence de garantie de livraison, la cour d'appel qui a ainsi mis en évidence que le préjudice allégué et effectivement subi par Monsieur [W] consistait en la perte de chance de régulariser un contrat de construction de maison individuelle avec garantie de livraison, ne pouvait apprécier l'étendue de ce préjudice au regard de la probabilité qu'auraient eu les emprunteur « de n'avoir pas contracté les deux prêts souscrits » ; qu'en statuant par un tel motif inopérant, sans rechercher quelle était la probabilité qu'ils aient pu régulariser un contrat de construction de maison individuelle avec garantie de livraison, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 ; Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Crédit immobilier de France développement Le Crédit Immobilier de France Développement fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit qu'il avait commis une faute dans l'octroi des prêts ayant entraîné une perte de chance de 50% pour les époux [W] de ne pas contracter et de l'AVOIR en conséquence condamné à payer à M. [W] la somme de 51.380,16 euros au titre du préjudice matériel et celle de 10.000 euros au titre du préjudice moral ; 1/ ALORS QUE la banque dispensatrice de crédit, qui n'a pas à s'immiscer dans les affaires de son client pour apprécier l'opportunité des opérations auxquelles il procède, est tenue non d'une obligation de conseil envers les emprunteurs, sauf si elle en a pris l'engagement, mais seulement d'une obligation d'information sur les caractéristiques du prêt qu'elle leur propose de souscrire afin de leur permettre de s'engager en toute connaissance de cause, ainsi que d'une obligation de mise en garde sur le risque lié à l'endettement ; qu'en retenant que le CIFD avait manqué envers les emprunteurs à son obligation d'information et de mise en garde sur l'absence de garantie de livraison de l'entrepreneur, quand elle avait attiré l'attention de ces derniers dans les deux offres de prêts puis dans les deux actes sous seing privé de prêt sur le fait que l'emprunteur ne bénéficiait pas de la protection instituée par les articles L.230-1 et suivants et les articles R 231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation relatifs aux contrats de construction de maison individuelle, et notamment, de la garantie de livraison à prix et délais convenus, et les avait informés des conséquences préjudiciables que pouvait entraîner ce défaut de protection légale, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable ; 2/ ALORS QUE satisfait à son obligation de mise en garde, le prêteur de deniers qui émet deux offres de prêt puis deux contrats sous seing privé de prêt portant une clause claire et précise avertissant l'emprunteur que le contrat de construction souscrit par ce dernier ne lui permet pas de bénéficier de la protection instituée par les articles L.230-1 et suivants et les articles R. 231-1 et suivants du code de la construction et de l'habitation relatifs aux contrats de construction de maison individuelle, et notamment, de la garantie de livraison à prix et délais convenus, et précisant que l'emprunteur a été informé des conséquences préjudiciables que pouvait entraîner ce défaut de protection légale ; qu'en se bornant à énoncer, pour dire que le CIFD avait manqué à son obligation d'information et de mise en garde et engagé sa responsabilité, que la clause d'information sur l'absence de garantie ne suffisait pas à l'exonérer de sa responsabilité, sans préciser pour quel motif la clause était insuffisante, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 du code civil, dans leur rédaction applicable ; 3/ ALORS en tout état de cause QUE seul peut être mis à la charge de l'auteur d'une faute le préjudice qui, sans ce manquement, aurait pu être évité ; qu'en retenant, pour condamner le CIFD à réparer le préjudice constitué de la perte de chance de ne pas contracter, que la banque avait manqué à son obligation d'information et de mise en garde, engageant ainsi sa responsabilité, cependant qu'elle constatait que le notaire avait pris le soin de mentionner dans l'acte authentique de prêt qu'il avait informé expressément les époux [W] de l'absence de garantie de livraison malgré son caractère obligatoire, ce dont il résultait que la faute de la banque, à la supposer constituée, ne pouvait être la cause du préjudice, les emprunteurs ayant été suffisamment informés par le notaire de l'absence de garantie de livraison et ayant déclaré accepter le risque en découlant, la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 27 F-D Pourvoi n° J 21-16.859 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 Mme [C] [P], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° J 21-16.859 contre le jugement rendu le 19 mars 2021 par la juridiction de proximité de [Localité 3] (président), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [B] [S], 2°/ à Mme [I] [V], épouse [S], domiciliées toutes deux [Adresse 1], défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Zribi et Texier, avocat de Mme [P], de la SCP L. Poulet-Odent, avocat de Mme [S] et de Mme [V], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (tribunal de proximité de [Localité 3], 19 mars 2021), rendu sur renvoi après cassation (1re Civ., 9 mai 2019, pourvoi n° 18-14.930), le 15 octobre 2015, Mme [I] [S] a inscrit sa fille [B] à une préparation annuelle aux concours d'entrée aux écoles de commerce organisée par l'EIRL [C] [P]. 2. L'article 2 de la facture valant convention stipulait que le prix de la préparation réservée, d'un montant de 3 565 euros, était dû par le participant dans son intégralité, sans possibilité de remboursement. 3. Mme [B] [S] a renoncé à cette préparation. 4. Mme [P], gérante de l'EIRL [C] [P], ayant refusé de restituer le coût de l'inscription, Mme [B] [S] l'a assignée en remboursement et en dommages-intérêts. 5. Mme [I] [S] est intervenue volontairement à l'instance. Examen des moyens Sur le premier moyen, ci-après annexé 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le deuxième moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 7. Mme [P] fait grief au jugement de déclarer non écrit l'article 2 de la convention conclue entre les parties, puis de constater que le contrat ne peut subsister sans cette clause et de la condamner en conséquence à payer aux consorts [S] la somme de 3 565 euros, alors « que seule est abusive la clause qui a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat ; que tel n'est pas le cas de la clause qui prévoit un paiement intégral pour tout cours, toute préparation ou tout stage réservé par le participant, sans remboursement possible en cas d'abandon ultérieur, laquelle n'interdit nullement au consommateur ou non-professionnel de rompre le contrat selon les règles de droit commun en la matière ; qu'en jugeant le contraire, le tribunal a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation. » Réponse de la Cour 8. Ayant relevé que la clause litigieuse prévoyait un paiement intégral du prix de la préparation, sans aucune résiliation possible pour motif légitime ou impérieux, le tribunal en a justement déduit que celle-ci créait, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. 9. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa seconde branche Enoncé du moyen 10. Mme [P] fait le même grief au jugement, alors « que le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans ces clauses ; qu'en se bornant à affirmer que le contrat ne peut subsister sans l'article 2 de la convention d'inscription, prévoyant un paiement intégral pour tout cours, toute préparation ou tout stage réservé par le participant, sans remboursement possible, quand, même sans cette clause, le contrat pouvait subsister, en ce qu'il constatait l'accord des parties sur la prestation de service promise et le prix convenu, le tribunal a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation. » Réponse de la Cour Vu l'article L. 132-1, alinéa 8, du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 : 11. Il résulte de ce texte que, lorsque sont jugées abusives certaines des clauses d'un contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, celui-ci reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans lesdites clauses. 12. Pour dire que le contrat d'enseignement ne peut subsister sans la clause réputée non écrite, le jugement retient que la juridiction n'a pas vocation à rédiger les clauses d'un contrat litigieux, mais simplement à constater que celui-ci ne peut subsister en l'état. 13. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser l'impossibilité du contrat à subsister sans la clause réputée non écrite, le tribunal a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il constate que le contrat ne peut subsister en l'état et le déclare nul et de nul effet, et condamne Mme [C] [P] à régler aux consorts [S] la somme de 3 565 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision, le jugement rendu le 19 mars 2021, entre les parties, par le tribunal de proximité de [Localité 3] ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de Toulouse ; Condamne Mmes [I] et [B] [S] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mmes [I] et [B] [S] et les condamne à payer à Mme [P] la somme globale de 1 500 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. Le conseiller referendaire rapporteur le president Le greffier de chambre MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Zribi et Texier, avocat aux Conseils, pour Mme [P] PREMIER MOYEN DE CASSATION Mme [P] fait grief au jugement attaqué D'AVOIR déclaré recevable l'action de [B] [S] et DE L'AVOIR, en conséquence, condamnée à payer à celle-ci la somme de 3 565 €, outre une somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile ; ALORS QUE l'action tendant à voir déclarer une clause abusive n'appartient, hors l'action ouverte à certaines associations, qu'au consommateur qui figure au contrat en tant que partie ; qu'en déclarant recevable l'action de Mme [B] [S], quand celle-ci n'était pas partie au contrat, conclu par sa mère, Mme [I] [S], le tribunal a violé l'article 122 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION Mme [P] fait grief au jugement attaqué D'AVOIR déclaré non écrit l'article 2 de la convention conclue entre les parties, puis constaté que le contrat ne peut subsister sans cette clause et DE L'AVOIR, en conséquence, condamnée à payer aux consorts [S] la somme de 3 565 € ; 1°) ALORS QUE seule est abusive la clause qui a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat ; que tel n'est pas le cas de la clause qui prévoit un paiement intégral pour tout cours, toute préparation ou tout stage réservé par le participant, sans remboursement possible en cas d'abandon ultérieur, laquelle n'interdit nullement au consommateur ou non-professionnel de rompre le contrat selon les règles de droit commun en la matière ; qu'en jugeant le contraire, le tribunal a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation ; 2°) ALORS, en toute hypothèse, QUE le contrat reste applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans ces clauses ; qu'en se bornant à affirmer que le contrat ne peut subsister sans l'article 2 de la convention d'inscription, prévoyant un paiement intégral pour tout cours, toute préparation ou tout stage réservé par le participant, sans remboursement possible, quand, même sans cette clause, le contrat pouvait subsister, en ce qu'il constatait l'accord des parties sur la prestation de service promise et le prix convenu, le tribunal a violé l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation. TROISIEME MOYEN DE CASSATION Mme [P] fait grief au jugement attaqué DE L'AVOIR condamnée à payer aux consorts [S] la somme de 3 565 € ; ALORS QUE tout entrepreneur individuel peut affecter à son activité professionnelle un patrimoine séparé de son patrimoine personnel, sans création d'une personne morale ; qu'en condamnant Mme [P] à payer aux consorts [S] la somme de 3 565 €, sans cantonner cette obligation au seul patrimoine affecté à l'entreprise individuelle à responsabilité limitée dont il a constaté l'existence, le tribunal a violé l'article 526-6, alinéa 1er, du code de commerce. Le greffier de chambre
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle sans renvoi Mme TEILLER, président Arrêt n° 22 F-D Pourvoi n° C 21-20.418 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Allianz IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° C 21-20.418 contre l'arrêt rendu le 2 juin 2021 par la cour d'appel de Lyon (8e chambre), dans le litige l'opposant : 1°/ au syndicat des copropriétaires de la résidence les Terrasses de Calvi, dont le siège est [Adresse 5], représenté par son syndic la société Balagne Immobilier, domicilié [Adresse 3], 2°/ à la société Corin, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 7], venant aux droits de la société Sodeca, 3°/ à la société MMA IARD, société anonyme, 4°/ à la société MMA IARD assurances mutuelles, toutes deux ayant leur siège [Adresse 2], 5°/ à la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole Groupama méditerranée, dont le siège est [Adresse 8], 6°/ à la société Corse Ingénierie, société à responsabilité limitée, dont le siège est chez M. [B], [Adresse 6], 7°/ à la société Holding Socotec, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat de la société Allianz IARD, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société MMA IARD et de société MMA IARD assurances mutuelles, de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Corin, de la SCP Marc Lévis, avocat de la caisse régionale d'assurance mutuelle agricole Groupama méditerranée, de la SCP Spinosi, avocat du syndicat des copropriétaires de la résidence les Terrasses de Calvi, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Le Syndicat des copropriétaires de la résidence « Les terrasses de Calvi » a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ; La société Corin a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Le Syndicat des copropriétaires de la résidence « Les terrasses de Calvi », demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; La société Corin, demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation également annexé au présent arrêt ; Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 2 juin 2021), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 25 juin 2020, pourvoi n° 19-13.752), la société civile immobilière Les Terrasses de Calvi (la SCI), aux droits de laquelle vient la société Corin, a fait édifier un immeuble, achevé en 1995, soumis au statut de la copropriété. 2. Sont intervenues à l'acte de construire la société Agostini, en qualité d'entreprise générale, assurée auprès de la société Mutuelles du Mans assurances IARD (la société MMA), la société Corse ingénierie, assurée auprès de la société Groupama Méditerranée (la société Groupama) et la société Socotec, chargée d'une mission de contrôle technique. 3. Une assurance dommages-ouvrage a été souscrite auprès de la société AGF, aux droits de laquelle vient la société Allianz IARD (la société Allianz). 4. Se plaignant de désordres affectant les parties communes et privatives, la société Balagne immobilier, syndic de la copropriété, a, après expertise, assigné la SCI et la société Allianz en indemnisation des préjudices. 5. La société Allianz a appelé à l'instance les sociétés MMA, Corse ingénierie, Groupama et Socotec. 6. Le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi (le syndicat des copropriétaires) est intervenu volontairement à l'instance. Examen des moyens Sur le premier moyen du pourvoi principal de la société Allianz Enoncé du moyen 7. La société Allianz fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevable sa demande tendant à voir déclarer irrecevable l'appel en garantie formée contre elle, en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage, par la société Corin et de la condamner solidairement avec celle-ci à payer une certaine somme au syndicat des copropriétaires au titre des travaux de reprise des dommages de nature décennale, alors : « 1°/ que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; qu'en déclarant irrecevable la demande de la société Allianz Iard visant à faire juger irrecevables les demandes de la société Corin à son encontre au motif que « la décision du 19 décembre 2018 de la cour d'appel de Bastia, qui a infirmé la décision du 24 avril 2012 du tribunal de grande instance de Bastia déclarant la société Balagne Immobilier [syndic représentant le syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi] irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir - a acquis, par application des dispositions de l'article 1351 du code civil, l'autorité de la chose jugée et est devenue irrévocable », quand la décision du 19 décembre 2018 n'a aucunement tranché dans son dispositif la question de la qualité à agir de la société Corin, venant aux droits de la SCI Les Terrasses de Calvi, la cour d'appel a violé l'article 1351, devenu 1355, du code civil ; 2°/ que le juge ne peut dénaturer les écrits clairs et précis qui leur sont soumis ; que la décision du 19 décembre 2018 de la cour d'appel de Bastia a infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré la SARL Balagne Immobilier irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir et, statuant à nouveau de ce chef, a dit le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi, valablement mandaté ; que dès lors, en considérant que cette décision, statuant sur la qualité à agir du syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi, s'appliquait à la société Corin, venant aux droits, non pas de ce syndicat, mais de la SCI Les Terrasses de Calvi, la cour d'appel a dénaturé cette décision violant l'interdiction faite au juge de dénaturer les écrits et les documents de la cause ; 3°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui- même le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, aucune des parties ne sollicitait que la société Allianz soit déclarée irrecevable en sa demande d'irrecevabilité quant aux demandes formées par la société Corin à son encontre et aucune ne prétendait que l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 19 décembre 2018 ayant admis la qualité à agir de la société Balagne Immobilier aurait interdit d'examiner la question de la qualité à agir de la société Corin ; que dès lors, en soulevant d'office l'autorité de la chose jugée attachée à la décision du 19 décembre 2018 ayant admis la qualité à agir de la société Balagne Immobilier pour déclarer irrecevable la demande de la société Allianz tendant à faire constater l'irrecevabilité pour défaut de qualité d'agir de la société Corin, sans inviter les parties à présenter leurs observations à cet égard, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile. » Réponse de la Cour 8. En premier lieu, la cour d'appel ayant rejeté l'appel en garantie formé par la société Corin à l'encontre de la société Allianz, celle-ci ne justifie d'aucun intérêt à la cassation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré irrecevable la fin de non-recevoir qu'elle opposait à cet appel en garantie, qui ne lui fait pas grief. 9. En second lieu, le moyen, en ce qu'il critique exclusivement des motifs se rapportant à la fin de non-recevoir que la société Allianz opposait à l'appel en garantie de la société Corin, qui ne fondent pas la condamnation prononcée contre la société Allianz, en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage, au bénéfice du syndicat des copropriétaires, laquelle est soutenue par des motifs distincts, est inopérant. 10. Le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus. Sur le troisième moyen du pourvoi principal de la société Allianz, en ce qu'il vise la disposition de l'arrêt infirmant le chef du jugement ayant déclaré sans objet l'appel en garantie formé par la société Corin à l'encontre de la société Allianz Enoncé du moyen 11. La société Allianz fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il déclare sans objet l'appel en garantie formé par la société Corin à l'encontre de la société Allianz, alors : « 1°/ que l'ambiguïté ou l'inintelligibilité des motifs équivaut à leur absence ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que c'est la société Balagne, syndic de copropriété agissant pour le syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi, qui avait formalisé une déclaration de sinistre auprès de la compagnie Allianz, au titre de l'assurance dommages-ouvrage, la cour d'appel en a déduit que le jugement du 24 avril 2012 du tribunal de grande instance de Bastia devait être infirmé en ce qu'il a déclaré sans objet l'appel en garantie par la société Corin - venant aux droits de la SCI Les Terrasses de Calvi (SCI constituant une entité distincte du syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi) - de l'assureur, la société Allianz ; qu'après avoir constaté que la garantie de la société Allianz était recherché comme assureur dommages-ouvrage et que le contrat était donc attaché à la chose garantie, la cour d'appel rattache la garantie de l'assureur à la personne du souscripteur en visant à de multiples reprises « la société Corin et « son assureur », la société Allianz » ; qu'en statuant ainsi par des motifs ne permettant pas de déterminer sur le fondement de quelle demande, entre celle du propriétaire bénéficiaire de l'assurances dommages-ouvrage et celle du souscripteur de l'assurance, qui avait perdu le droit de s'en prévaloir après avoir aliéné le bien sur lequel elle portait, la cour d'appel avait retenu la garantie de la société Allianz, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 2°/ que l'assurance de dommages obligatoire est une assurance de choses dont le bénéfice se transmet à l'acquéreur de l'immeuble ; qu'après avoir constaté que la garantie de la société Allianz était recherchée en tant qu'assureur dommages-ouvrage, la cour d'appel a infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré sans objet l'appel en garantie par la société Corin de l'assureur ; qu'en statuant ainsi alors qu'il résultait nécessairement de ses propres constatations que du fait de l'aliénation de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires était le bénéficiaire de l'assurance dommages-ouvrage et que la société Corin, venant aux droits de la SCI Les Terrasses de Calvi, ne pouvait donc plus solliciter la garantie de la société Allianz, que ce soit en tant que souscripteur ou en tant que maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1 et L. 121-10 du Code des assurances ; 3°/ que la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que pour affirmer que la compagnie Allianz ne pouvait dénier sa garantie, la cour d'appel a relevé que la société Balagne, syndic de copropriété agissant pour le compte du syndicat des copropriétaires, avait formalisé auprès de la compagnie Allianz une déclaration de sinistre au titre de l'assurance dommages-ouvrage ; que dès lors, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré les demandes du syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi recevables à l'égard de la compagnie Allianz emportera la cassation par voie de conséquence de la décision ayant condamné la société Allianz, solidairement avec la société Corin venant aux droits de la société Sodéca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires de la Résidence « Les Terrasses de Calvi », la somme totale de 261 584,50 euros TTC - au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 octobre 2006, en vertu de l'article 625 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 12. D'une part, la cour d'appel ayant rejeté l'appel en garantie formé par la société Corin à l'encontre de la société Allianz, celle-ci ne justifie d'aucun intérêt à la cassation de l'arrêt en ce qu'il a infirmé le jugement ayant déclaré sans objet ledit appel en garantie, ce chef de dispositif ne lui faisant pas grief. 13. D'autre part, la cour d'appel ayant, par disposition infirmative, condamné la société Corin à payer au syndicat des copropriétaires une certaine somme à titre de réparation, l'infirmation du chef de dispositif du jugement qui, après avoir déclaré irrecevables les demandes principales, a dit sans objet les appels en garantie, se trouve légalement justifié. 14. Le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus. Sur le moyen du pourvoi incident de la société Corin Enoncé du moyen 15. La société Corin fait grief à l'arrêt de rejeter ses appels en garantie au titre de la condamnation à indemnisation des désordres de nature décennale prononcée contre elle, solidairement avec la société Allianz, au profit du syndicat des copropriétaires, alors « que tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait déclaré sans objet l'appel en garantie, par la société Corin, de la société Allianz IARD, et en condamnant cette dernière, solidairement avec la société Corin, venant aux droits de la société Sodeca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires la somme totale de 261 584,50 euros au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, puis en rejetant les appels en garantie, sans répondre aux conclusions d'appel de la société Corin faisant valoir que la garantie de la société Allianz IARD était due à son profit ce qui supposait, soit la condamnation de la société Allianz IARD uniquement, soit la garantie à son profit, et non pas une seule condamnation solidaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 16. En application de l'article L. 242-1 du code des assurances, l'assurance de dommages-ouvrage, qui est une assurance de choses, bénéficie au maître de l'ouvrage ou aux propriétaires successifs ou à ceux qui sont subrogés dans leurs droits. 17. Il est ainsi jugé qu'après l'aliénation de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires est le bénéficiaire de l'assurance dommages-ouvrage et que le maître de l'ouvrage condamné à réparation de désordres de nature décennale est sans recours ni garantie à l'encontre de l'assureur dommages-ouvrage, sauf subrogation légale dans les droits de l'acquéreur (3e Civ., 20 octobre 2004, pourvoi n° 03-13.599, Bull. 2004, III, n° 173). 18. La cour d'appel, devant laquelle la société Corin ne se prévalait pas de la subrogation légale dans les droits du syndicat des copropriétaires et qui n'était pas tenue de répondre à des conclusions que ses constatations rendaient inopérantes, a relevé que l'assurance de dommages-ouvrage bénéficiait, par l'effet de la vente, au syndicat des copropriétaires qui avait déclaré le sinistre à l'assureur et en a exactement déduit que l'appel en garantie de la société Corin à l'encontre de la société Allianz ne pouvait être accueilli. 19. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le deuxième moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal de la société Alianz Enoncé du moyen 20. La société Allianz fait grief à l'arrêt d'infirmer le jugement en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes du syndicat des copropriétaires à son encontre et de la condamner, solidairement avec la société Corin, à payer à celui-ci une certaine somme au titre des travaux de reprise des dommages de nature décennale, alors « que la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; en l'espèce, par arrêt du 25 juin 2020, la troisième chambre civile de la Cour de cassation (n° 19-13.752) a cassé et annulé l'arrêt rendu par la cour d'appel de Bastia le 19 décembre 2018, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires de La résidence Les terrasses de Calvi contre la société Corin (venant au droit de la SCI Les Terrasses de Calvi) ; il s'ensuit que le chef de dispositif de l'arrêt du 19 décembre 2018 ayant confirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes du syndicat des copropriétaires à l'égard de la compagnie Allianz est devenu irrévocable ; que dès lors, en affirmant qu'en assignant, le 31 octobre 2006, la société Allianz le syndicat des copropriétaires n'était nullement forclos dans son action à son encontre, la cour d'appel a violé l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Recevabilité du moyen 21. La société Corin conteste la recevabilité du moyen au motif de sa nouveauté. 22. Toutefois, le moyen tiré de la violation de l'article 624 du code de procédure civile, par méconnaissance de la portée de la cassation partielle prononcée, peut être invoqué pour la première fois devant la Cour de cassation, quand au cours d'une même instance, il est statué sur un chef de dispositif non atteint par la cassation prononcée et passé en force de chose jugée. 23. Le moyen, né de la décision attaquée, est donc recevable. Bien-fondé du moyen Vu l'article 624 du code de procédure civile : 24. Aux termes de ce texte, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire. 25. Pour condamner la société Allianz, « solidairement » avec la société Corin, à payer au syndicat des copropriétaires une certaine somme au titre de la réparation des désordres de nature décennale, l'arrêt retient que celui-ci, en assignant, le 31 octobre 2006, la société Corin et l'assureur dommages-ouvrage, n'était nullement forclos à leur encontre. 26. En statuant ainsi, alors que la cassation partielle de l'arrêt du 19 décembre 2018 de la cour d'appel de Bastia, seulement en ce que celui-ci a déclaré irrecevable, pour forclusion, la demande du syndicat des copropriétaires contre la société Corin, ne s'étendait pas au chef de dispositif de cet arrêt déclarant irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires contre la société Allianz, en sa qualité d'assureur dommages-ouvrage, duquel il n'était pas indivisible et qui était soutenu par des motifs distincts, tirés de la prescription biennale de l'article L. 114-1 du code des assurances, de sorte qu'il était devenu irrévocable, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Et sur le moyen du pourvoi incident du syndicat des copropriétaires Enoncé du moyen 27. Le syndicat des copropriétaires fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre de l'indemnisation des frais relatifs aux béquilles des portes, alors « que les juges du fond ne doivent pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; qu'en affirmant, pour rejeter la demande d'indemnisation pour défectuosité des béquilles de portes, que, dans son rapport, l'expert judiciaire ne décrit nullement le désordre n° 4 comme étant caractérisé par la défectuosité « des béquilles des portes palières » mais comme étant un défaut de poignées PVC des portes palières, quand l'expression « béquille de porte » ne désigne rien d'autre qu'une poignée de porte en termes techniques, la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise judiciaire, en violation du principe susvisé. » Réponse de la Cour Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis : 28. Pour rejeter la demande du syndicat des copropriétaires au titre des béquilles des portes palières, l'arrêt retient que, dans son rapport, l'expert ne décrit pas le désordre n° 4 comme étant caractérisé par la défectuosité des « béquilles des portes palières », mais comme étant un défaut de poignées PVC des portes palières. 29. En statuant ainsi, alors que, dans ses conclusions d'appel, le syndicat des copropriétaires invoquait, au titre du désordre n° 4, la défectuosité des béquilles de portes palières pour un coût réparatoire de 5 049,42 euros en précisant que la cause des désordres résultait du caractère inadapté et de la mauvaise qualité des poignées, quand le rapport d'expertise indiquait, au titre de ce même désordre, sous l'intitulé « défaut des poignées PVC des portes palières » que la cause des désordres provenait de l'inadaptation et de la mauvaise qualité des poignées, la cour d'appel qui a dénaturé les termes explicites et précis du rapport d'expertise, a violé le principe susvisé. Portée et conséquences de la cassation 30. Tel que suggéré par le mémoire ampliatif et après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile. 31. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond. 32. Les demandes du syndicat des copropriétaires contre la société Allianz, qui se heurtent à l'autorité de la chose jugée attachée au dispositif de l'arrêt de la cour d'appel de Bastia du 19 décembre 2018, non atteint par la cassation partielle prononcée par l'arrêt du 25 juin 2020, en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires contre celle-ci,sont irrecevables. 33. L'expert ayant évalué la réparation des désordres affectant les poignées des portes palières à la somme, non contestée, de 5 049,42 euros, il sera fait droit à la demande du syndicat des copropriétaires de ce chef à hauteur de cette somme. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs,la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Allianz IARD, solidairement avec la société Corin, venant aux droits de la société civile immobilière Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi la somme totale de 261 584,50 euros au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 octobre 2006, en ce qu'il rejette la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi au titre de l'indemnisation des frais relatifs aux béquilles des portes et en ce qu'il condamne la société Allianz IARD, in solidum avec la société Corin, aux dépens et à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 2 juin 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; DIT n'y avoir lieu à renvoi ; Déclare irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi à l'encontre de la société Allianz IARD au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale ; Condamne la société Corin, venant aux droits de la société civile immobilière Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi la somme de 5 049,42 euros, augmentée de l'intérêt au taux légal à compter du 31 octobre 2006, au titre de l'indemnisation des frais relatifs aux béquilles des portes ; Dit que les dépens exposés en première instance et en appel par la société Allianz IARD seront supportés par le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi ; Rejette les demandes d'indemnités formées en application de l'article 700 du code de procédure civile par ou à l'encontre de la société Allianz IARD au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel ; Dit n'y avoir lieu de modifier les autres dispositions de l'arrêt relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile ; Condamne le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi aux dépens du pourvoi exposés par la société Allianz IARD et la société Corin aux dépens du pourvoi exposés par le syndicat des copropriétaires et dit que la société Corin supportera la charge des dépens afférents à son pourvoi ; En application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Duhamel-Rameix-Gury-Maitre, avocat aux Conseils, pour la société Allianz IARD (demanderesse au pourvoi principal) PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Allianz Iard FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevable sa demande de déclarer irrecevable la demande de garantie dirigée par la société Corin à l'encontre de la société Allianz, ès-qualités d'assureur-dommage pour défaut de qualité à agir et d'avoir condamné la société Allianz, solidairement avec la société Corin venant aux droits de la société Sodéca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires de la Résidence « Les Terrasses de Calvi », la somme totale de 261 584,50 euros TTC - au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 octobre 2006 ; 1°) ALORS QUE l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet d'un jugement et a été tranché dans son dispositif ; qu'en déclarant irrecevable la demande de la société Allianz Iard visant à faire juger irrecevables les demandes de la société Corin à son encontre au motif que « la décision du 19 décembre 2018 de la Cour d'appel de Bastia, qui a infirmé la décision du 24 avril 2012 du Tribunal de grande instance de Bastia déclarant la société Balagne Immobilier [syndic représentant le syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi] irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir - a acquis, par application des dispositions de l'article 1351 du Code civil, l'autorité de la chose jugée et est devenue irrévocable » (arrêt, p. 16) quand la décision du 19 décembre 2018 (production n°9) n'a aucunement tranché dans son dispositif la question de la qualité à agir de la société Corin, venant aux droits de la SCI Les Terrasses de Calvi, la cour d'appel a violé l'article 1351, devenu 1355, du Code civil ; 2°) ALORS QUE le juge ne peut dénaturer les écrits clairs et précis qui leur sont soumis ; que la décision du 19 décembre 2018 de la Cour d'appel de Bastia (production n°9) a infirmé le jugement du Tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré la SARL Balagne Immobilier irrecevable en ses demandes pour défaut de qualité à agir et, statuant à nouveau de ce chef, a dit le syndicat des copropriétaires de la résidence Les Terrasses de Calvi, valablement mandaté ; que dès lors, en considérant que cette décision, statuant sur la qualité à agir du syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi, s'appliquait à la société Corin, venant aux droits, non pas de ce syndicat, mais de la SCI Les Terrasses de Calvi, la cour d'appel a dénaturé cette décision violant l'interdiction faite au juge de dénaturer les écrits et les documents de la cause ; 3°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer luimême le principe de la contradiction ; qu'en l'espèce, aucune des parties ne sollicitait que la société Allianz soit déclarée irrecevable en sa demande d'irrecevabilité quant aux demandes formées par la société Corin à son encontre et aucune ne prétendait que l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 19 décembre 2018 ayant admis la qualité à agir de la société Balagne Immobilier aurait interdit d'examiner la question de la qualité à agir de la société Corin ; que dès lors, en soulevant d'office l'autorité de la chose jugée attachée à la décision du 19 décembre 2018 ayant admis la qualité à agir de la société Balagne Immobilier pour déclarer irrecevable la demande de la société Allianz tendant à faire constater l'irrecevabilité pour défaut de qualité d'agir de la société Corin, sans inviter les parties à présenter leurs observations à cet égard, la cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION : La société Allianz Iard FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes du syndicat des copropriétaires à l'égard de la compagnie Allianz et d'avoir condamné la société Allianz, solidairement avec la société Corin venant aux droits de la société Sodéca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires de la Résidence « Les Terrasses de Calvi », la somme totale de 261 584,50 euros TTC - au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 octobre 2006 ; 1°) ALORS QUE la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce ; en l'espèce, par arrêt du 25 juin 2020, la troisième Chambre civile de la Cour de cassation (n°19-13.752 ; production n°10) a cassé et annulé l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Bastia le 19 décembre 2018, mais seulement en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande du syndicat des copropriétaires de La résidence Les terrasses de Calvi contre la société Corin (venant au droit de la SCI Les Terrasses de Calvi) ; il s'ensuit que le chef de dispositif de l'arrêt du 19 décembre 2018 ayant confirmé le jugement du Tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes du syndicat des copropriétaires à l'égard de la compagnie Allianz est devenu irrévocable ; que dès lors, en affirmant qu'en assignant, le 31 octobre 2006, la société Allianz le syndicat des copropriétaires n'était nullement forclos dans son action à son encontre, la cour d'appel a violé l'article 624 du Code de procédure civile ; 2°) ALORS QU'en toute hypothèse, toutes actions dérivant d'un contrat d'assurance sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance ; qu'il résulte des constatations de la cour d'appel que le syndic agissant pour le compte des copropriétaires a saisi le juge des référés par assignation du 10 mars 1999 et que ce dernier a rendu son ordonnance confiant l'expertise à M. [L] le 16 juin 1999 (arrêt, p. 3, p. 16 et p. 28) ; qu'elle a en justement déduit que l'ordonnance du juge des référés faisait partir un nouveau délai de prescription à compter du 16 juin 1999 ; qu'il s'en déduit que le délai pour agir contre la société Allianz, dont la cour d'appel a constaté qu'elle devait sa garantie comme assureur dommagesouvrage (arrêt, p. 3, p. 27-28) expirait le 16 juin 2001 ; que dès lors, en affirmant qu'en assignant le 31 octobre 2006, la société Allianz, le syndicat des copropriétaires n'était nullement forclos dans son action à son encontre, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article L. 114-1 du Code des assurances. TROISIEME MOYEN DE CASSATION : La société Allianz Iard FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré sans objet l'appel en garantie par la société Corin de l'assureur, la société Allianz et de l'avoir condamnée, solidairement avec la société Corin venant aux droits de la société Sodéca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires de la Résidence « Les Terrasses de Calvi », la somme totale de 261 584,50 euros TTC - au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 octobre 2006 ; 1°) ALORS QUE l'ambiguïté ou l'inintelligibilité des motifs équivaut à leur absence ; qu'en l'espèce, après avoir constaté que c'est la société Balagne, syndic de copropriété agissant pour le syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi, qui avait formalisé une déclaration de sinistre auprès de la compagnie Allianz, au titre de l'assurance dommages-ouvrage (arrêt, p. 28), la cour d'appel en a déduit que le jugement du 24 avril 2012 du tribunal de grande instance de Bastia devait être infirmé en ce qu'il a déclaré sans objet l'appel en garantie par la société Corin - venant aux droits de la SCI Les Terrasses de Calvi (SCI constituant une entité distincte du syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi) - de l'assureur, la société Allianz (arrêt, p. 28) ; qu'après avoir constaté que la garantie de la société Allianz était recherché comme assureur dommages-ouvrage et que le contrat était donc attaché à la chose garantie (arrêt, p. 27-28), la cour d'appel rattache la garantie de l'assureur à la personne du souscripteur en visant à de multiples reprises « la société Corin et « son assureur », la société Allianz » (arrêt, p. 17, p. 28, p. 44) ; qu'en statuant ainsi par des motifs ne permettant pas de déterminer sur le fondement de quelle demande, entre celle du propriétaire bénéficiaire de l'assurances dommages-ouvrage et celle du souscripteur de l'assurance, qui avait perdu le droit de s'en prévaloir après avoir aliéné le bien sur lequel elle portait, la cour d'appel avait retenu la garantie de la société Allianz, la cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE l'assurance de dommages obligatoire est une assurance de choses dont le bénéfice se transmet à l'acquéreur de l'immeuble ; qu'après avoir constaté que la garantie de la société Allianz était recherchée en tant qu'assureur dommagesouvrage (arrêt, p. 27), la cour d'appel a infirmé le jugement du tribunal de grande instance de Bastia du 24 avril 2012 en ce qu'il a déclaré sans objet l'appel en garantie par la société Corin de l'assureur (arrêt, p. 28) ; qu'en statuant ainsi alors qu'il résultait nécessairement de ses propres constatations que du fait de l'aliénation de l'immeuble, le syndicat des copropriétaires était le bénéficiaire de l'assurance dommages-ouvrage et que la société Corin, venant aux droits de la SCI Les Terrasses de Calvi, ne pouvait donc plus solliciter la garantie de la société Allianz, que ce soit en tant que souscripteur ou en tant que maître de l'ouvrage, la cour d'appel a violé les articles L. 242-1 et L. 121-10 du Code des assurances ; 3°) ALORS QUE la cassation entraîne, sans qu'il y ait lieu à une nouvelle décision, l'annulation par voie de conséquence de toute décision qui est la suite, l'application ou l'exécution du jugement cassé ou qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire ; que pour affirmer que la compagnie Allianz ne pouvait dénier sa garantie, la cour d'appel a relevé que la société Balagne, syndic de copropriété agissant pour le compte du syndicat des copropriétaires, avait formalisé auprès de la compagnie Allianz une déclaration de sinistre au titre de l'assurance dommagesouvrage (arrêt, p. 28) ; que dès lors, la cassation de l'arrêt en ce qu'il a déclaré les demandes du syndicat des copropriétaires de la Résidence les Terrasses de Calvi recevables à l'égard de la compagnie Allianz emportera la cassation par voie de conséquence de la décision ayant condamné la société Allianz, solidairement avec la société Corin venant aux droits de la société Sodéca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires de la Résidence « Les Terrasses de Calvi », la somme totale de 261 584,50 euros TTC - au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, outre les intérêts au taux légal à compter de l'assignation du 31 octobre 2006, en vertu de l'article 625 du Code de procédure civile. Moyen produit par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour la société Corin (demanderesse au pourvoi incident) La société Corin fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR, infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait déclaré sans objet l'appel en garantie, par la société Corin, de la société Allianz IARD, et condamnant cette dernière, solidairement avec la société Corin, venant aux droits de la société Sodeca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires la somme totale de 261.584,50 € au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, rejeté les appels en garantie ; ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motif ; qu'en infirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait déclaré sans objet l'appel en garantie, par la société Corin, de la société Allianz IARD, et en condamnant cette dernière, solidairement avec la société Corin, venant aux droits de la société Sodeca, elle-même venant aux droits de la société Les Terrasses de Calvi, à payer au syndicat des copropriétaires la somme totale de 261.584,50 € au titre de l'indemnisation du coût des travaux de reprise des dommages relevant de la garantie décennale, puis en rejetant les appels en garantie, sans répondre aux conclusions d'appel de la société Corin faisant valoir que la garantie de la société Allianz IARD était due à son profit ce qui supposait, soit la condamnation de la société Allianz IARD uniquement, soit la garantie à son profit, et non pas une seule condamnation solidaire, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit par la SCP Spinosi, avocat aux Conseils, pour le syndicat des copropriétaires de la résidence les Terrasses de Calvi (demandeur au pourvoi incident) Le syndicat des copropriétaires de la résidence Les terrasses de Calvi fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté sa demande au titre de l'indemnisation des frais relatifs aux des béquilles de portes ; Alors que les juges du fond ne doivent pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; qu'en affirmant, pour rejeter la demande d'indemnisation pour défectuosité des béquilles de portes, que, dans son rapport, l'expert judiciaire ne décrit nullement le désordre n° 4 comme étant caractérisé par la défectuosité « des béquilles des portes palières » mais comme étant un défaut de poignées PVC des portes palières, quand l'expression « béquille de porte » ne désigne rien d'autre qu'une poignée de porte en termes techniques, la cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise judiciaire, en violation du principe susvisé.
INCA/JURITEXT000046990237.xml
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 VB COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 23 F-D Pourvoi n° G 21-23.689 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 1°/ M. [Y] [M], 2°/ Mme [Z] [O], épouse [M], domiciliés tous deux [Adresse 1], ont formé le pourvoi n° G 21-23.689 contre l'arrêt rendu le 28 mai 2020 par la cour d'appel d'Amiens (1re chambre civile), dans le litige les opposant au syndicat des copropriétaires [Adresse 2], dont le siège est [Adresse 2], représenté par son syndic la société Bruyer sokal immobilier, dont le siège est [Adresse 3], défendeur à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de M. et Mme [M], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Amiens, 28 mai 2020), M. et Mme [M] sont propriétaires d'un immeuble à usage de commerce et d'habitation, loué à un preneur selon un bail commercial, qui jouxte la propriété du syndicat des copropriétaires [Adresse 2] (le syndicat des copropriétaires). 2. Sur assignation du preneur, qui se plaignait d'une humidité affectant la cage d'escalier de l'immeuble donné à bail, un jugement du 5 mai 2011, confirmé par un arrêt du 11 février 2014, a condamné M. et Mme [M], sous astreinte, à faire exécuter les travaux décrits par l'expert désigné dans cette instance. 3. Par acte du 6 février 2014, M. et Mme [M] ont assigné le syndicat des copropriétaires en bornage devant un tribunal d'instance, qui s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance. 4. Un jugement mixte du 28 janvier 2016 a rejeté la demande d'homologation du procès-verbal de bornage produit par M. et Mme [M] et ordonné le bornage judiciaire des fonds contigus, le géomètre-expert désigné à cette fin ayant déposé son rapport le 24 mai 2016. 5. Sur reprise d'instance, M. et Mme [M] ont sollicité, par conclusions additionnelles du 5 mai 2017, sur le fondement des articles 655 et 1382, devenu 1240 du code civil, et en imputant l'absence d'étanchéité du mur mitoyen aux travaux de reconstruction entrepris par le syndicat des copropriétaires voisin, la condamnation de celui-ci à exécuter des travaux de reprise et à réparer leurs préjudices. Le syndicat des copropriétaires a opposé à ces demandes une fin de non-recevoir tirée de la prescription. Examen des moyens Sur le second moyen, pris en ses deux premières branches, ci-après annexé 6. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le premier moyen Enoncé du moyen 7. M. et Mme [M] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevables comme prescrites leurs demandes indemnitaires, alors : « 1°/ que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître l'ensemble des faits lui permettant de l'exercer ; que la cour d'appel, qui se borne à constater que Monsieur et Madame [M] avaient eu connaissance dès 1995 et en dernier lieu en 2009, du défaut d'entretien du mur mitoyen dont la dégradation est à l'origine des préjudices dont ils sollicitaient la réparation, défaut d'entretien qui n'est susceptible de caractériser que la connaissance par les exposants du caractère fautif du comportement du syndicat des copropriétaires, sans s'expliquer, comme elle y était expressément invitée par les écritures d'appel des exposants, sur la date à laquelle ces préjudices étaient apparus et leur avaient été révélés, selon eux postérieurement à 2013, a privé sa décision de base légale au regard des articles 2224 et 1240 du code civil; 2°/ que la circonstance relevée par les premiers juges, que Monsieur et Madame [M] auraient été convaincus « dès l'origine » du caractère mitoyen du mur, n'est elle-même susceptible de caractériser que la connaissance par les exposants du caractère fautif de l'abstention du syndicat des copropriétaires à remédier aux désordres affectant celui-ci de son fait ; qu'en statuant par ce seul motif, sans à nouveau s'expliquer, comme elle y était expressément invitée par les écritures d'appel des exposants, sur la date à laquelle les préjudices consécutifs à la dégradation du mur dont ils sollicitaient la réparation étaient apparus et leur avaient été révélés, selon eux postérieurement à 2013, a privé sa décision de base légale au regard des articles 2224 et 1240 du code civil ; 3°/ qu'en toute hypothèse, en s'abstenant de rechercher, comme elle y était également invitée, si le fait que la contradiction apportée par le syndicat des copropriétaires au caractère mitoyen du mur et le caractère non immédiatement « intuitif » de cette qualification, de l'aveu même du syndicat des copropriétaires, ne justifiaient pas que Monsieur et Madame [M], comme ils le soutenaient, n'aient pu avoir une connaissance suffisamment certaine de cette qualification que par les constatations de l'expert-géomètre qu'ils avaient sollicité puis de l'expert judiciaire, moins de cinq ans avant l'introduction de leur demande, de sorte que la prescription n'avait pu courir à leur encontre avant la communication de ces rapports, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2224 et 1240 du code civil ; 4°/ que Monsieur et Madame [M] se prévalaient expressément, à l'appui de leurs écritures d'appel, délaissées de ce chef, de ce qu'en toute hypothèse le syndicat des copropriétaires avait au moins implicitement renoncé à se prévaloir de la prescription éventuelle de leur action ; que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce chef pertinent des écritures d'appel de Monsieur et Madame [M] a, quel qu'en ait été le mérite, entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusion et l'a donc privé de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 8. En premier lieu, la cour d'appel, qui a constaté que les dommages affectant le mur mitoyen, dont M. et Mme [M] sollicitaient réparation, résultaient de la mauvaise exécution de l'enduisage du mur pignon et de l'absence de complexe d'étanchéité lors de travaux de reconstruction de l'immeuble voisin entrepris par le syndicat des copropriétaires en 1984 et 1985, a souverainement retenu, par motifs propres et adoptés, que ceux-ci avaient eu connaissance du problème d'humidité affectant le mur et du défaut d'entretien de celui-ci, imputable au syndicat des copropriétaires, dès les rapports d'expertise amiable de M. [S] et du cabinet Jubert-Hachet en 1995 et en dernier lieu par l'expertise [I] en 2009. 9. Ayant ainsi fait ressortir que la manifestation du dommage résultant du défaut d'entretien du mur mitoyen par le syndicat des copropriétaires, peu important que celui-ci eût contesté cette mitoyenneté dès lors qu'elle fondait leurs prétentions, avait été connue de M. et Mme [M] à la première de ces dates, elle en a justement déduit, sans être tenue de procéder à d'autres recherches, que leurs demandes indemnitaires, formées par conclusions additionnelles dans le cours d'une instance engagée après l'expiration du délai de cinq ans courant à compter de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008, étaient tardives. 10. En second lieu, en retenant que les demandes indemnitaires de M. et Mme [M] étaient prescrites, la cour d'appel a répondu, en les écartant, aux conclusions qui se bornaient à invoquer, au titre d'une éventuelle renonciation tacite du syndicat des copropriétaires à se prévaloir de la prescription, laquelle doit être non équivoque, deux devis de travaux réparatoires établis à sa demande aux mois de novembre 2013 et juin 2014, dont ils précisaient qu'ils n'avaient connu aucune suite et dont il n'était pas soutenu qu'ils fussent accompagnés d'une reconnaissance de responsabilité. 11. Elle a, ainsi, légalement justifié sa décision. Sur le second moyen, pris en ses troisième et quatrième branches Enoncé du moyen 12. M. et Mme [M] font grief à l'arrêt de les condamner à rembourser à la copropriété la moitié des travaux que celle-ci a été condamnée à effectuer sous astreinte, alors : « 3°/ que le propriétaire d'un mur mitoyen doit supporter seul les frais de la réparation de ce mur lorsque les réparations sont rendues nécessaires par son fait ; que la cour d'appel qui a constaté que « l'origine des désordres est manifestement la reconstruction imparfaite l'immeuble appartenant à la copropriété en 1984/1985 », ne pouvait mettre à la charge de Monsieur et Madame [M] la moitié des frais de réparation de ces désordres, sur la seule constatation qu'ils avaient tardé près de 10 ans « pour arguer de la mitoyenneté du mur », dont il ne résulte pas l'existence d'un comportement fautif ayant pu contribuer pour partie auxdits désordres, dont le syndicat des copropriétaires soutenait qu'ils n'avaient pas évolués depuis 1995, sans priver sa décision de base légale au regard des articles 655 et 1240 du code civil ; 4°/ qu'en statuant de la sorte, quand il résultait tant des motifs propres de l'arrêt que des motifs repris des premiers juges que l'origine des désordres résidait dans le fait du syndicat des copropriétaires ou de ses auteurs et que les travaux de réparation ne pouvaient être faits que depuis la copropriété, sans rechercher si ces circonstances, dont il résultait que Monsieur et Madame [M] n'avaient pas la possibilité matérielle de procéder à quelques travaux de réparation par eux-mêmes, et que ces travaux incombaient exclusivement au syndicat des copropriétaires, n'étaient pas susceptibles de retirer à leur inertie prétendue tout caractère fautif, la cour d'appel a de plus fort privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées. » Réponse de la Cour 13. Ayant, par motifs adoptés, retenu que la demande de M. et Mme [M] tendant à ce que les travaux de réparation du mur mitoyen soient entièrement pris en charge, à titre indemnitaire, par le syndicat des copropriétaires, était prescrite, et exactement relevé que chacun des copropriétaires du mur litigieux demeurait tenu, en application de l'article 655 du code civil, par l'obligation réelle d'entretien et de réparation édictée par ce texte, la cour d'appel, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, en a justement déduit que M. et Mme [M] devaient être condamnés à supporter pour moitié le coût des travaux réparatoires. 14. Elle a ainsi légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme [M] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [M] PREMIER MOYEN DE CASSATION Monsieur et Madame [M] font grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré irrecevables comme prescrites leurs demandes pécuniaires ; Alors, de première part, que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître l'ensemble des faits lui permettant de l'exercer ; que la cour d'appel, qui se borne à constater que Monsieur et Madame [M] avaient eu connaissance dès 1995 et en dernier lieu en 2009, du défaut d'entretien du mur mitoyen dont la dégradation est à l'origine des préjudices dont ils sollicitaient la réparation, défaut d'entretien qui n'est susceptible de caractériser que la connaissance par les exposants du caractère fautif du comportement du syndicat des copropriétaires, sans s'expliquer, comme elle y était expressément invitée par les écritures d'appel des exposants, sur la date à laquelle ces préjudices étaient apparus et leur avaient été révélés, selon eux postérieurement à 2013, a privé sa décision de base légale au regard des articles 2224 et 1240 du code civil ; Alors, de deuxième part, que la circonstance relevée par les premiers juges, que Monsieur et Madame [M] auraient été convaincus « dès l'origine » du caractère mitoyen du mur, n'est elle-même susceptible de caractériser que la connaissance par les exposants du caractère fautif de l'abstention du syndicat des copropriétaires à remédier aux désordres affectant celui-ci de son fait ; qu'en statuant par ce seul motif, sans à nouveau s'expliquer, comme elle y était expressément invitée par les écritures d'appel des exposants, sur la date à laquelle les préjudices consécutifs à la dégradation du mur dont ils sollicitaient la réparation étaient apparus et leur avaient été révélés, selon eux postérieurement à 2013, a privé sa décision de base légale au regard des articles 2224 et 1240 du code civil ; Alors, de troisième part, qu'en toute hypothèse, en s'abstenant de rechercher, comme elle y était également invitée, si le fait que la contradiction apportée par le syndicat des copropriétaires au caractère mitoyen du mur et le caractère non immédiatement « intuitif » de cette qualification, de l'aveu même du syndicat des copropriétaires, ne justifiaient pas que Monsieur et Madame [M], comme ils le soutenaient, n'aient pu avoir une connaissance suffisamment certaine de cette qualification que par les constatations de l'expert-géomètre qu'ils avaient sollicité puis de l'expert judiciaire, moins de cinq ans avant l'introduction de leur demande, de sorte que la prescription n'avait pu courir à leur encontre avant la communication de ces rapports, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 2224 et 1240 du code civil ; Alors, de quatrième part, que Monsieur et Madame [M] se prévalaient expressément, à l'appui de leurs écritures d'appel, délaissées de ce chef, de ce qu'en toute hypothèse le syndicat des copropriétaires avait au moins implicitement renoncé à se prévaloir de la prescription éventuelle de leur action ; que la cour d'appel qui n'a pas répondu à ce chef pertinent des écritures d'appel de Monsieur et Madame [M] a, quel qu'en ait été le mérite, entaché son arrêt d'un défaut de réponse à conclusion et l'a donc privé de motif en violation de l'article 455 du code de procédure civile ; SECOND MOYEN DE CASSATION Monsieur et Madame [M] font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnés à rembourser à la copropriété de l'immeuble [Adresse 2] la moitié du coût des travaux que celui-ci était condamné à effectuer sous astreinte ; Alors, de première part, que l'autorité de chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement et qu'il faut que la demande soit entre les mêmes parties ; qu'en se fondant sur l'affirmation de l'arrêt du 11 février 2014 suivant laquelle la réparation du mur mitoyen est à la charge de tous ceux qui y ont droit, alors que cette décision a été rendue dans les seuls rapports entre Monsieur et Madame [M] et leur locataire sans que le syndicat des copropriétaires y soit partie, la cour d'appel a méconnu les limites de l'autorité de chose jugée de cette décision et violé l'article 1351, désormais 1355 du code civil ; Alors que seul ce qui est tranché dans le dispositif d'un jugement est revêtu de l'autorité de chose jugée ; qu'en se fondant sur les seuls motifs de l'arrêt précité du 11 février 2014, dépourvus de toute autorité de chose jugée, la cour d'appel a méconnu l'article 480 du code de procédure civile ; Alors, de troisième part, que le propriétaire d'un mur mitoyen doit supporter seul les frais de la réparation de ce mur lorsque les réparations sont rendues nécessaires par son fait ; que la cour d'appel qui a constaté que « l'origine des désordres est manifestement la reconstruction imparfaite l'immeuble appartenant à la copropriété en 1984/1985 », ne pouvait mettre à la charge de Monsieur et Madame [M] la moitié des frais de réparation de ces désordres, sur la seule constatation qu'ils avaient tardé près de 10 ans « pour arguer de la mitoyenneté du mur », dont il ne résulte pas l'existence d'un comportement fautif ayant pu contribuer pour partie auxdits désordres, dont le syndicat des copropriétaires soutenait qu'ils n'avaient pas évolués depuis 1995, sans priver sa décision de base légale au regard des articles 655 et 1240 du code civil ; Alors, de quatrième part, qu'en statuant de la sorte, quand il résultait tant des motifs propres de l'arrêt que des motifs repris des premiers juges que l'origine des désordres résidait dans le fait du syndicat des copropriétaires ou de ses auteurs et que les travaux de réparation ne pouvaient être faits que depuis la copropriété, sans rechercher si ces circonstances, dont il résultait que Monsieur et Madame [M] n'avaient pas la possibilité matérielle de procéder à quelques travaux de réparation par eux-mêmes, et que ces travaux incombaient exclusivement au syndicat des copropriétaires, n'étaient pas susceptibles de retirer à leur inertie prétendue tout caractère fautif, la cour d'appel a de plus fort privé sa décision de base légale au regard des dispositions précitées ;
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 28 F-D Pourvoi n° X 21-17.745 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Sud-Rhône-Alpes, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° X 21-17.745 contre l'arrêt rendu le 6 avril 2021 par la cour d'appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [F] [O], domicilié [Adresse 2], 2°/ à [K] [Z], épouse [O], décédée 3°/ à M. [H] [O], domicilié [Adresse 3], agissant tous deux en leur nom propre et leur en qualité d'héritier de [K] [Z] épouse [O], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Dumas, conseiller référendaire, les observations de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Sud-Rhône-Alpes, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de MM. [H] et [F] [O], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Dumas, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Reprise d'instance 1. Il est donné acte à MM. [F] et [H] [O] de leur reprise d'instance en qualité d'héritiers de [K] [Z], décédée le [Date décès 4] 2022. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 6 avril 2021), par acte sous seing privé du 7 septembre 2012, la caisse régionale de Crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes (la banque) a consenti à M. et Mme [O] (les emprunteurs) trois prêts immobiliers. 3. En raison d'échéances impayées, la banque a prononcé la déchéance du terme et assigné les emprunteurs en paiement, lesquels ont invoqué le manquement de la banque à son devoir de mise en garde. Examen du moyen Sur le moyen, en ce qu'il fait grief à l'arrêt d'accorder aux emprunteurs un délai de grâce pour s'acquitter de leur dette résiduelle et de leur allouer une certaine somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile Enoncé du moyen 4. La banque fait grief à l'arrêt d'accorder aux emprunteurs un délai de grâce pour s'acquitter de leur dette résiduelle et de leur allouer une certaine somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, alors : « 1°/ que, lorsqu'à la date de la conclusion du contrat, le crédit est adapté au regard des capacités financières de l'emprunteur et au risque de l'endettement né de l'octroi du prêt, le banquier qui n'est pas tenu de s'immiscer dans les affaires de son client, n'est tenu d'aucun devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur ; que dans l'appréciation des capacités financières de l'emprunteur et du risque d'endettement né de l'octroi du prêt litigieux, les juges du fond doivent prendre en compte la valeur de l'ensemble des éléments du patrimoine notamment immobilier dont dispose l'emprunteur et garantissant le remboursement du prêt; Que la Caisse exposante avait fait valoir et démontré qu'au moment de l'octroi des prêts litigieux les emprunteurs, comme ils l'avaient déclaré, étaient propriétaires d'un patrimoine immobilier dont la valeur nette suffisait à elle seule à couvrir l'ensemble du prêt qu'ils avaient sollicité ; que ce patrimoine était constitué d'un appartement F5, d'un garage et d'un galetas, faisant à l'époque l'objet d'un mandat de vente à hauteur de la somme de 160.000 euros nette vendeur ainsi que d'une cave et d'un terrain sur lequel les emprunteurs, avec le financement litigieux, souhaitaient édifier une maison d'habitation ; qu'en retenant que compte tenu des faibles ressources des emprunteurs « l'opération présentait dès l'origine un risque de non remboursement indépendant des difficultés que les emprunteurs ont par la suite rencontrées dans la vente du bien immobilier » et que « c'est en vain que le Crédit Agricole argumente sur le patrimoine immobilier des époux [O] alors que celui-ci était de fait immobilisé par l'opération puisque l'appartement devait être vendu pour acquitter le prêt relais et la parcelle de terrain utilisée pour la construction de l'habitation. » pour en déduire que « En dehors de leurs revenus les époux [O] ne disposaient ainsi d'aucun autre bien pour répondre de l'opération », la cour d'appel qui n'a pas apprécié les capacités financières des emprunteurs et le risque d'endettement né de l'octroi du prêt litigieux, en tenant compte de la valeur de l'ensemble des éléments du patrimoine immobilier déclarés par les emprunteurs et dont elle constatait la réalité, a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du-dit code ; 2°/ que le risque objet du devoir de mise en garde du banquier dispensateur de crédit n'est pas celui de non-remboursement du prêt, inhérent à toute opération de crédit, mais celui né de l'inadaptation du crédit aux capacités financières de l'emprunteur et d'un endettement excessif ou caractérisé ; qu'en retenant au seul regard des revenus déclarés par les emprunteurs que « l'opération présentait dès l'origine un risque de non remboursement indépendant des difficultés que les emprunteurs ont par la suite rencontrées dans la vente du bien immobilier » pour conclure au manquement de la banque à son devoir de mise en garde, la cour d'appel qui ne s'est pas prononcée en considération d'un risque d'endettement excessif ou caractérisé préalablement établi, mais seulement d'un risque de non-remboursement du crédit, a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du-dit code ; 3°/ qu'en l'absence d'anomalie apparente la banque n'est pas tenue de vérifier l'exactitude des éléments déclarés par les candidats emprunteurs quant à la consistance et la valeur de leur patrimoine notamment immobilier ; que la caisse exposante avait fait valoir qu'au soutien de leur demande de financement, les époux [O] avaient déclaré disposer d'un patrimoine immobilier constitué notamment d'un appartement F5, d'un garage et d'un galetas évalué à la somme de 160.000 euros ainsi que cela ressortait du mandat de vente qu'ils avaient donné à un agent immobilier et dont ils justifiaient ; qu'en relevant « qu'il n'est produit aucune fiche de renseignement sur la situation patrimoniale et financière des emprunteurs », la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du-dit code. » Réponse de la Cour 5. Les motifs critiqués par le moyen n'étant pas le soutien des chefs de dispositif accordant un délai de grâce aux emprunteurs pour s'acquitter de leur dette résiduelle et condamnant la banque au paiement d'une certaine somme au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ce moyen est inopérant. Mais sur le moyen, pris en sa première branche, en ce qu'il fait grief à l'arrêt de condamner la banque à payer aux emprunteurs une certaine somme au titre du manquement à son devoir de mise en garde Enoncé du moyen 6. La banque fait grief à l'arrêt de la condamner à payer aux emprunteurs une certaine somme au titre du manquement à son devoir de mise en garde, alors « que, lorsqu'à la date de la conclusion du contrat, le crédit est adapté au regard des capacités financières de l'emprunteur et au risque de l'endettement né de l'octroi du prêt, le banquier qui n'est pas tenu de s'immiscer dans les affaires de son client, n'est tenu d'aucun devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur ; que dans l'appréciation des capacités financières de l'emprunteur et du risque d'endettement né de l'octroi du prêt litigieux, les juges du fond doivent prendre en compte la valeur de l'ensemble des éléments du patrimoine notamment immobilier dont dispose l'emprunteur et garantissant le remboursement du prêt; que la Caisse exposante avait fait valoir et démontré qu'au moment de l'octroi des prêts litigieux les emprunteurs, comme ils l'avaient déclaré, étaient propriétaires d'un patrimoine immobilier dont la valeur nette suffisait à elle seule à couvrir l'ensemble du prêt qu'ils avaient sollicité ; que ce patrimoine était constitué d'un appartement F5, d'un garage et d'un galetas, faisant à l'époque l'objet d'un mandat de vente à hauteur de la somme de 160.000 euros nette vendeur ainsi que d'une cave et d'un terrain sur lequel les emprunteurs, avec le financement litigieux, souhaitaient édifier une maison d'habitation ; qu'en retenant que compte tenu des faibles ressources des emprunteurs « l'opération présentait dès l'origine un risque de non remboursement indépendant des difficultés que les emprunteurs ont par la suite rencontrées dans la vente du bien immobilier » et que « c'est en vain que le Crédit Agricole argumente sur le patrimoine immobilier des époux [O] alors que celui-ci était de fait immobilisé par l'opération puisque l'appartement devait être vendu pour acquitter le prêt relais et la parcelle de terrain utilisée pour la construction de l'habitation. » pour en déduire que « En dehors de leurs revenus les époux [O] ne disposaient ainsi d'aucun autre bien pour répondre de l'opération », la cour d'appel qui n'a pas apprécié les capacités financières des emprunteurs et le risque d'endettement né de l'octroi du prêt litigieux, en tenant compte de la valeur de l'ensemble des éléments du patrimoine immobilier déclarés par les emprunteurs et dont elle constatait la réalité, a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du-dit code. » Réponse de la Cour Vu l'article 1147 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : 7. Le risque d'endettement excessif né de l'octroi d'un prêt s'apprécie au regard de l'ensemble du patrimoine mobilier et immobilier de l'emprunteur au jour de la souscription du prêt. 8. Pour condamner la banque à payer une certaine somme au titre du manquement à son devoir de mise en garde, l'arrêt retient que, compte tenu des faibles ressources des emprunteurs, l'opération présentait dès l'origine un risque de non-remboursement, sans que la banque puisse tirer argument de la consistance du patrimoine immobilier de ses clients, dès lors que celui-ci était immobilisé par l'opération, l'appartement devant être vendu pour acquitter le prêt relais et la parcelle de terrain utilisée pour la construction de l'habitation. 9. En statuant ainsi, sans tenir compte, dans l'appréciation du risque d'endettement excessif, du patrimoine immobilier des emprunteurs au jour de la souscription des prêts litigieux, la cour d'appel a violé le texte susvisé. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Crédit agricole mutuel Sud Rhône-Alpes à payer à M. et Mme [O] la somme de 90 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par le manquement au devoir de mise en garde, l'arrêt rendu le 6 avril 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ; Condamne MM. [F] et [H] [O] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. Le conseiller referendaire rapporteur le president Le greffier de chambre MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour la caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) Sud-Rhône-Alpes LE POURVOI REPROCHE À L'ARRÊT INFIRMATIF ATTAQUÉ D'AVOIR condamné la Caisse exposante à payer aux époux [O] la somme de 90.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice causé par le manquement de la banque à son obligation de mise en garde, accordé à ces derniers un délai de grâce de 15 mois pour s'acquitter de leur dette résiduelle et de l'avoir condamnée à payer 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ; 1°) ALORS QUE lorsqu'à la date de la conclusion du contrat, le crédit est adapté au regard des capacités financières de l'emprunteur et au risque de l'endettement né de l'octroi du prêt, le banquier qui n'est pas tenu de s'immiscer dans les affaires de son client, n'est tenu d'aucun devoir de mise en garde à l'égard de l'emprunteur ; que dans l'appréciation des capacités financières de l'emprunteur et du risque d'endettement né de l'octroi du prêt litigieux, les juges du fond doivent prendre en compte la valeur de l'ensemble des éléments du patrimoine notamment immobilier dont dispose l'emprunteur et garantissant le remboursement du prêt ; Que la Caisse exposante avait fait valoir et démontré qu'au moment de l'octroi des prêts litigieux les emprunteurs, comme ils l'avaient déclaré, étaient propriétaires d'un patrimoine immobilier dont la valeur nette suffisait à elle seule à couvrir l'ensemble du prêt qu'ils avaient sollicité ; que ce patrimoine était constitué d'un appartement F5, d'un garage et d'un galetas, faisant à l'époque l'objet d'un mandat de vente à hauteur de la somme de 160.000 euros nette vendeur ainsi que d'une cave et d'un terrain sur lequel les emprunteurs, avec le financement litigieux, souhaitaient édifier une maison d'habitation ; qu'en retenant que compte tenu des faibles ressources des emprunteurs « l'opération présentait dès l'origine un risque de non remboursement indépendant des difficultés que les emprunteurs ont par la suite rencontrées dans la vente du bien immobilier » et que « c'est en vain que le Crédit Agricole argumente sur le patrimoine immobilier des époux [O] alors que celui-ci était de fait immobilisé par l'opération puisque l'appartement devait être vendu pour acquitter le prêt relais et la parcelle de terrain utilisée pour la construction de l'habitation. » pour en déduire que « En dehors de leurs revenus les époux [O] ne disposaient ainsi d'aucun autre bien pour répondre de l'opération », la cour d'appel qui n'a pas apprécié les capacités financières des emprunteurs et le risque d'endettement né de l'octroi du prêt litigieux, en tenant compte de la valeur de l'ensemble des éléments du patrimoine immobilier déclarés par les emprunteurs et dont elle constatait la réalité, a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du-dit code ; 2°) ALORS QUE le risque objet du devoir de mise en garde du banquier dispensateur de crédit n'est pas celui de non-remboursement du prêt, inhérent à toute opération de crédit, mais celui né de l'inadaptation du crédit aux capacités financières de l'emprunteur et d'un endettement excessif ou caractérisé ; qu'en retenant au seul regard des revenus déclarés par les emprunteurs que « l'opération présentait dès l'origine un risque de non remboursement indépendant des difficultés que les emprunteurs ont par la suite rencontrées dans la vente du bien immobilier » pour conclure au manquement de la banque à son devoir de mise en garde, la cour d'appel qui ne s'est pas prononcée en considération d'un risque d'endettement excessif ou caractérisé préalablement établi, mais seulement d'un risque de non-remboursement du crédit, a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 dudit code ; 3°) ALORS QU' en l'absence d'anomalie apparente la banque n'est pas tenue de vérifier l'exactitude des éléments déclarés par les candidats emprunteurs quant à la consistance et la valeur de leur patrimoine notamment immobilier ; que la caisse exposante avait fait valoir qu'au soutien de leur demande de financement, les époux [O] avaient déclaré disposer d'un patrimoine immobilier constitué notamment d'un appartement F5, d'un garage et d'un galetas évalué à la somme de 160.000 euros ainsi que cela ressortait du mandat de vente qu'ils avaient donné à un agent immobilier et dont ils justifiaient ; qu'en relevant « qu'il n'est produit aucune fiche de renseignement sur la situation patrimoniale et financière des emprunteurs », la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-1 du-dit code ; Le greffier de chambre
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle Mme TEILLER, président Arrêt n° 30 F-D Pourvoi n° J 21-23.414 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La Société travaux bâtiments (STB), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° J 21-23.414 contre l'arrêt rendu le 13 juillet 2021 par la cour d'appel de Grenoble (2e chambre civile), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [F] [E], domiciliée [Adresse 1], 2°/ à M. [B] [Z], domicilié [Adresse 2], exerçant sous le nom commercial [Z] Bâtiment services, défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société travaux bâtiments, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 13 juillet 2021), rendu en référé, Mme [E] a confié à M. [Z] des travaux de rénovation d'un bâtiment. 2. Les travaux de démolition, maçonnerie, charpente, couverture et carrelage ont été exécutés par la Société travaux bâtiments (STB). 3. Se plaignant de malfaçons, Mme [E] a assigné M. [Z] et la STB en référé aux fins de provision et subsidiairement d'expertise. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche Enoncé du moyen 4. La STB fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec M. [Z], à verser à titre provisionnel à Mme [E], à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, la somme de 180 000 euros, dans la limite pour elle de 100 000 euros, alors « que le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable; que le caractère non sérieusement contestable de l'obligation suppose que le fondement de cette obligation soit déterminé; qu'en l'espèce, en énonçant que la société STB était responsable envers Mme [E] des dommages affectant les ouvrages qu'elle avait réalisés sur le chantier, quel qu'en soit le fondement contractuel ou délictuel, pour ensuite la condamner, in solidum avec M. [Z], à lui verser à titre provisionnel la somme de 100 000 euros, en ce que son droit à indemnisation était incontestable au regard des graves malfaçons, non conformités et non-façons résultant des pièces versées par elle, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'existence d'une obligation non sérieusement contestable et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 835, alinéa 2, anciennement 809, alinéa 2, du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 835, alinéa 2, du code de procédure civile : 5. Selon ce texte, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. 6. Pour condamner l'entrepreneur à verser une provision au maître de l'ouvrage, l'arrêt énonce que la STB est responsable envers Mme [E], quel qu'en soit le fondement, contractuel ou quasi-délictuel, des dommages affectant les ouvrages qu'elle a réalisés sur le chantier. 7. En se déterminant ainsi, par des motifs qui ne mettent pas la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'existence d'une obligation non sérieusement contestable, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. Portée et conséquences de la cassation 8. La cassation ne s'étend pas à la condamnation prononcée contre M. [Z]. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société STB à verser à Mme [E] une provision de 100 000 euros à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, l'arrêt rendu le 13 juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Grenoble ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Chambéry ; Condamne Mme [E] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la Société travaux bâtiments ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société STB La société STB FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée, in solidum avec M. [B] [Z], à verser à titre provisionnel à Mme [F] [E], à valoir sur l'indemnisation de son préjudice, la somme de 180 000 euros, dans la limite pour elle de 100 000 euros ; 1) ALORS QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; que le caractère non sérieusement contestable de l'obligation suppose que le fondement de cette obligation soit déterminé ; qu'en l'espèce, en énonçant que la société STB était responsable envers Mme [F] [E] des dommages affectant les ouvrages qu'elle avait réalisés sur le chantier, quel qu'en soit le fondement contractuel ou délictuel, pour ensuite la condamner, in solidum avec M. [B] [Z], à lui verser à titre provisionnel la somme de 100 000 euros, en ce que son droit à indemnisation était incontestable au regard des graves malfaçons, non conformités et non-façons résultant des pièces versées par elle, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle sur l'existence d'une obligation non sérieusement contestable et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 835, alinéa 2, anciennement 809, alinéa 2, du code de procédure civile ; 2) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le prononcé, par le juge des référés saisi d'un référé-provision, d'une mesure d'expertise en vue de rechercher les éléments permettant de déterminer la responsabilité éventuelle du défendeur, établit le caractère sérieusement contestable de l'obligation invoquée par le demandeur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a ordonné une mesure d'expertise visant à inventorier les malfaçons, les non conformités contractuelles et les non-façons invoquées par Mme [F] [E] et à chiffrer le cas échéant le coût de reprise dans les règles de l'art en prenant en compte les impératifs résultant des prescriptions administratives ; qu'en condamnant, dans le même temps, in solidum, la société STB et M. [B] [Z] à lui verser à titre provisionnel la somme de 180 000 euros, pour la société STB dans la limite de 100 000 euros, en ce que son droit à indemnisation était incontestable au regard des graves malfaçons, non conformités et non-façons résultant des pièces versées par elle, la cour d'appel a violé l'article 835, alinéa 2, anciennement 809, alinéa 2, du code de procédure civile ; 3) ALORS, AU SURPLUS, QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier que dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable ; qu'en l'espèce, la société STB contestait toute obligation au titre des malfaçons, non conformités et non-façons invoquées par Mme [F] [E], en ce que certains des désordres étaient inexistants – tel le désordre affectant la charpente –, en ce que d'autres ne lui étaient pas imputables – tels le tuyau bouché et le raccordement au tout-à-l'égout, la présence de gravats, l'absence de fenêtre pour la baie vitrée, les désordres relatifs à la terrasse extérieure, à la façade et aux autres lots, l'infiltration d'eau au rez-de-chaussée, les dommages relatifs aux peintures, à la toile de verre et aux finitions, et les désordres relatifs à l'enduit de façade et aux incohérences graphiques –, et en ce que d'autres encore avaient fait l'objet de reprises – les défauts de planéité du carrelage ; qu'en retenant qu'il résultait des pièces produites par Mme [F] [E] que les travaux confiés à M. [B] [Z], dont certains réalisés par la société STB, comportaient de façon évidente de multiples, pour certaines graves, malfaçons et/ou non-conformités contractuelles et aux règles de l'art, ainsi que des non-façons, rendant incontestable le droit à indemnisation provisionnelle de Mme [F] [E], sans se prononcer sur les contestations élevées par la société STB quant à la réalité et à l'imputabilité des désordres en cause et sans rechercher si certains d'entre eux n'avaient pas fait l'objet de travaux de reprise, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 835, alinéa 2, anciennement 809, alinéa 2, du code de procédure civile ; 4) ALORS, ENCORE, QUE le juge des référés ne peut accorder une provision au créancier qu'à la mesure du caractère non sérieusement contestable de l'obligation ; qu'en l'espèce, en se bornant, pour condamner la société STB à verser à Mme [F] [E], in solidum avec M. [B] [Z], la somme de 100 000 euros à titre provisionnel, à relever la nécessité de démolir et refaire la plus grande partie des travaux mal faits, l'existence d'un trop-perçu sur les travaux non faits et l'existence d'un préjudice financier tenant à ce que Mme [F] [E] avait dû se loger ailleurs, sans relever de façon exhaustive les travaux mal faits ni préciser ceux d'entre eux qui devaient donner lieu à démolition avant réfection, sans indiquer le détail du trop-perçu au regard des travaux non faits, et sans se prononcer sur les frais de logement que Mme [F] [E] avait été contrainte d'exposer, la cour d'appel, qui n'a pas justifié que la provision accordée couvrait la seule part non sérieusement contestable de l'obligation, a violé l'article 835, alinéa 2, anciennement 809, alinéa 2, du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 31 F-D Pourvoi n° Z 21-23.014 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Charlie Leisure Group France, venant aux droits de la société Financière Vissuzaine, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Z 21-23.014 contre l'arrêt rendu le 10 juin 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 1-3), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [U] [P], épouse [I] [J], domiciliée [Adresse 4], 2°/ à M. [T] [O], domicilié [Adresse 6], 3°/ à la société MMA IARD, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], 4°/ à la Société d'exploitation des établissements (SEE) Chretienneau, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 5], 5°/ à M. [T] [X], domicilié [Adresse 3], défendeurs à la cassation. La société MMA IARD a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ; M. [X] a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ; Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; La société MMA IARD, demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; M. [X], demandeur au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Jean-Philippe Caston, avocat de la société Charlie Leisure Group France et de M. [X], de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la société MMA IARD, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de Mme [I] [J], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 juin 2021), par acte notarié du 2 juin 2006, M. [O] a vendu un appartement, situé au premier étage d'un immeuble, à la société Financière Vissuzaine, aux droits de laquelle est venue la société Charlie Leisure Group France, qui a confié la réalisation de travaux de rénovation à la société d'exploitation des établissements Chretienneau (la société Chretienneau), assurée par la société MMA IARD. 2. Cet appartement a été vendu, par acte notarié du 7 juin 2012, à M. [X]. 3. Se plaignant de l'apparition de fissures dans son appartement, situé au dessus de celui de M. [X], Mme [I] [J], devenue nue-propriétaire de l'appartement de Mme [Y] suivant acte de donation du 21 mai 2012, l'a, après expertise, assigné en indemnisation de ses préjudices. 4. M. [X] et la société Charlie Leisure Group France ont appelé en garantie M. [O], la société Chretienneau et la société MMA IARD. Examen des moyens Sur le moyen du pourvoi principal de la société Charlie Leisure Group France et sur le moyen des pourvois incidents de M. [X] et de la société MMA IARD, rédigés en termes similaires, réunis Enoncé du moyen 5. Par son moyen, la société Charlie Leisure Group France fait grief à l'arrêt de la condamner, in solidum avec M. [X], dans la limite de 20 %, à payer à Mme [I] [J] une certaine somme en réparation de ses préjudices matériel et de jouissance, alors : « 1°/ que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, de même que du dommage causé par sa faute, sans préciser en quoi ces troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 2°/ que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'au demeurant, en retenant ainsi, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, de même que du dommage causé par sa faute, sans également caractériser l'existence d'une faute imputable à la société Charlie Leisure Group France, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 3°/ que tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions d'appel, la société Charlie Leisure Group France faisait valoir, pour solliciter sa mise hors de cause, que les désordres avaient pour origine la vétusté de l'immeuble, d'autres appartements que celui de Mme [I] [J] étant également affectés ; qu'en ne répondant par aucun motif à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » 6. Par son moyen, M. [X] fait grief à l'arrêt de le condamner in solidum avec la société Charlie Leisure Group France à payer à Mme [I] [J] une certaine somme en réparation de ses préjudices matériel et de jouissance, alors : « 1°/ que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, pour condamner M. [X] sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que la société Charlie Leisure Group France avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, sans préciser en quoi ces troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 2°/ que tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ;que, dans ses conclusions d'appel, M. [X] faisait valoir, pour solliciter le rejet des demandes de Mme [I] [J], qu'il n'était aucunement à l'origine des désordres litigieux, qui trouvaient leur source dans la vétusté de l'immeuble, d'autres appartements que celui de Mme [I] [J] étant également affectés ; qu'en ne répondant par aucun motif à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » 7. Par son moyen, la société MMA IARD fait grief à l'arrêt de condamner in solidum M. [X] et la société Charlie Leisure Group France à payer à Mme [I] [J] une certaine somme en réparation de ses préjudices matériel et de de jouissance et en conséquence, de la condamner, in solidum avec d'autres intervenants, à les garantir des condamnations prononcées au profit de Mme [I] [J], alors : « 1° / que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, sans préciser en quoi ces troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 2°/ que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, et en des termes purement généraux, pour condamner M. [X] sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que « le propriétaire actuel doit répondre des troubles anormaux de voisinage même s'ils sont imputables à son auteur ou aux propriétaires antérieurs à celui-ci, les troubles anomaux subis par sa voisine trouvant leur origine dans son appartement », sans préciser en quoi lesdits troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 3°/ que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en retenant, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement de la faute, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 %, et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, de même que du dommage causé par sa faute, sans caractériser la faute qui serait imputable à la société Charlie Leisure Group France, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 4°/ que tout jugement doit être motivé, et que la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; que, dans le jugement du 18 juillet 2017, dont la société MMA IARD demandait la confirmation, le tribunal de grande instance de Draguignan avait énoncé, pour limiter la condamnation, que « la lecture du rapport d'expertise judiciaire ne permet pas de retenir que les dommages trouvent leur origine pour leur totalité dans le fonds voisin situé en-dessous alors, que cela a pu être développé ci-avant, les autres appartements du deuxième étage de même que celui du premier étage présentaient des phénomènes d'affaissement de planchers et de fissurations, dont l'origine pouvait résider dans la vétusté de l'immeuble, la réalisation de travaux de démolition d'éléments porteurs et de cloisons, de surcharges ponctuelles sur les anciens planchers, de modification des réseaux d'eaux usées» ; qu'en infirmant le jugement déféré sur ce point sans réfuter les motifs des premiers juges, que la société MMA IARD s'était appropriée, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 8. En premier lieu, ayant constaté que les cloisons d'immeubles anciens, conçues à l'origine comme non porteuses, devenaient porteuses avec le temps, que le remplacement de ces cloisons par du prégymétal dans l'appartement du premier étage avait entraîné, dans celui situé au-dessus, un fléchissement des planchers, particulièrement flagrant au niveau de la cloison longeant le couloir et une modification des assises des cloisons, engendrant des fissures sur les cloisons et au plafond, que les meubles intégrés de cet appartement avaient bougé par rapport à leur assise et que les portes des chambres et de la salle de bain ne fermaient plus, la cour d'appel, réfutant les motifs des premiers juges, en a souverainement déduit que les désordres constatés dans l'appartement de Mme [I] [J] excédaient les inconvénients normaux de voisinage. 9. En second lieu, ayant retenu que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien et que l'ancien propriétaire ayant causé, par ses travaux, ces troubles, engageait sa responsabilité sur le même fondement, puis ayant constaté que la société Charlie Leisure Group France avait fait démolir par la société Chretienneau, les cloisons des toilettes et de la salle de bain, devenues porteuses avec le temps, et que leur suppression avait causé, en partie, des désordres dans l'appartement situé au-dessus, la cour d'appel, qui n'avait pas à caractériser une faute, en a exactement déduit, répondant aux conclusions prétendument délaissées, que M. [X], en tant que propriétaire actuel de l'appartement du premier étage et la société Charlie Leisure Group France, en tant que maître de l'ouvrage des travaux réalisés par la société Chretienneau, étaient responsables in solidum des troubles excédant les inconvénients normaux de voisinage subis par Mme [I] [J]. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE les pourvois ; Condamne chaque demandeur aux dépens afférents à son pourvoi ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Charlie Leisure Group France à payer à Mme [P], épouse [I] [J] la somme de 3 000 euros et rejette les autres demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour la société Charlie Leisure Group France La société Charlie Leisure Group France fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamnée, in solidum avec M. [X], dans la limite de 20 %, à payer à Mme [I] [J] la somme de 30.536 € en réparation de son préjudice matériel, ainsi que celle de 8.248,80 € en réparation de son préjudice de jouissance ; 1°) ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, de même que du dommage causé par sa faute, sans préciser en quoi ces troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 2°) ALORS QUE tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'au demeurant, en retenant ainsi, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, de même que du dommage causé par sa faute, sans également caractériser l'existence d'une faute imputable à la société Charlie Leisure Group France, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 3°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions d'appel, la société Charlie Leisure Group France faisait valoir, pour solliciter sa mise hors de cause, que les désordres avaient pour origine la vétusté de l'immeuble, d'autres appartements que celui de Mme [I] [J] étant également affectés ; qu'en ne répondant par aucun motif à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi incident par la SARL Le Prado-Gilbert, avocat aux Conseils, pour la société MMA IARD La société MMA IARD reproche à l'arrêt attaqué, D'AVOIR condamné in solidum M. [X] et la société Charlie Leisure Group France, cette dernière dans la limite de 20 %, à payer à Mme [I] [J] la somme de 30 536 euros en réparation de son préjudice matériel, et D'AVOIR condamné in solidum M. [X] et la société Charlie Leisure Group France, cette dernière toujours dans la limite de 20 %, à payer à Mme [I] [J] la somme de 8 248,80 euros en réparation de son préjudice de jouissance ; et, en conséquence, DE L'AVOIR condamnée in solidum avec la société Charlie Leisure Group France et la société d'exploitation des établissements Chretienneau, dans la limite de 20 % des condamnations prononcées au profit de Mme [I] [J], à garantir M. [X] des condamnations prononcées contre lui, et DE L'AVOIR condamnée in solidum avec la société d'exploitation des établissements Chretienneau à garantir la société Charlie Leisure Group France des condamnations prononcées contre elle, dans la limite de 20 % des condamnations prononcées au profit de Mme [I] [J], au titre des préjudices matériel et immatériel ; 1°) ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, sans préciser en quoi ces troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 2°) ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, et en des termes purement généraux, pour condamner M. [X] sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que « le propriétaire actuel doit répondre des troubles anormaux de voisinage même s'ils sont imputables à son auteur ou aux propriétaires antérieurs à celui-ci, les troubles anomaux subis par sa voisine trouvant leur origine dans son appartement », sans préciser en quoi lesdits troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 3°) ALORS QUE tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ; qu'en retenant, pour condamner la société Charlie Leisure Group France sur le fondement de la faute, que l'expert judiciaire avait justement relevé que cette société avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 %, et que le propriétaire actuel devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, de sorte qu'en tant que maître d'ouvrage, elle était responsable du trouble dont elle était l'auteur, de même que du dommage causé par sa faute, sans caractériser la faute qui serait imputable à la société Charlie Leisure Group France, la cour d'appel a violé l'article 1382, devenu 1240, du code civil ; 4°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé, et que la partie qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s'en approprier les motifs ; que, dans le jugement du 18 juillet 2017, dont la société MMA IARD demandait la confirmation, le tribunal de grande instance de Draguignan avait énoncé, pour limiter la condamnation, que « la lecture du rapport d'expertise judiciaire ne permet pas de retenir que les dommages trouvent leur origine pour leur totalité dans le fonds voisin situé en-dessous alors, que cela a pu être développé ci-avant, les autres appartements du deuxième étage de même que celui du premier étage présentaient des phénomènes d'affaissement de planchers et de fissurations, dont l'origine pouvait résider dans la vétusté de l'immeuble, la réalisation de travaux de démolition d'éléments porteurs et de cloisons, de surcharges ponctuelles sur les anciens planchers, de modification des réseaux d'eaux usées (rapport [F] du 18 septembre 2006 lequel sera repris par l'expert judiciaire en page 8) » ; qu'en infirmant le jugement déféré sur ce point sans réfuter les motifs des premiers juges, que la société MMA IARD s'était appropriée, la cour d'appel a violé les articles 455 et 954 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Jean-Philippe Caston, avocat aux Conseils, pour M. [X] M. [X] fait grief à l'arrêt attaqué de l'AVOIR condamné, in solidum avec la société Charlie Leisure Group France, à payer à Mme [I] [J] la somme de 30.536 € en réparation de son préjudice matériel, ainsi que celle de 8.248,80 € en réparation de son préjudice de jouissance ; 1°) ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu'en retenant, pour condamner M. [X] sur le fondement du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, que l'expert judiciaire avait justement relevé que la société Charlie Leisure Group France avait fait démolir, dans son appartement, les cloisons des WC et de la salle de bains, que sa participation aux désordres subis par Mme [I] [J] était de 20 % et que le propriétaire actuel -M. [X] devait répondre des troubles anormaux de voisinage provenant de son bien, de même que l'ancien propriétaire qui avait causé à son bien des dégâts excédant les troubles normaux de voisinage ou qui, par ses travaux, lui avait causé un dommage, sans préciser en quoi ces troubles avaient excédé les inconvénients normaux de voisinage, la cour d'appel a violé le principe susvisé ; 2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que le défaut de réponse aux conclusions constitue un défaut de motifs ; que, dans ses conclusions d'appel, M. [X] faisait valoir, pour solliciter le rejet des demandes de Mme [I] [J], qu'il n'était aucunement à l'origine des désordres litigieux, qui trouvaient leur source dans la vétusté de l'immeuble, d'autres appartements que celui de Mme [I] [J] étant également affectés ; qu'en ne répondant par aucun motif à ce moyen opérant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 33 F-D Pourvoi n° S 21-24.479 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 1°/ M. [X] [E], 2°/ Mme [I] [G], épouse [E], tous deux domiciliés [Adresse 2], ont formé le pourvoi n° S 21-24.479 contre l'arrêt rendu le 2 septembre 2021 par la cour d'appel de Montpellier (3e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Bleu Royal, société civile de construction vente, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de Me Balat, avocat de M. et Mme [E], de la SCP Richard, avocat de la société Bleu Royal, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 2 septembre 2021), par contrat préliminaire du 17 mars 2012, M. et Mme [E] ont réservé auprès de la société civile de construction-vente Bleu Royal (la SCCV) un appartement comprenant une mezzanine au sein d'une résidence. 2. La vente en l'état futur d'achèvement de cet appartement a été conclue, par acte authentique du 31 mai 2012. M. et Mme [E] ont signé le procès-verbal de livraison le même jour. 3. Se plaignant de la présence d'une poutre en béton traversant la mezzanine, non prévue sur le plan initial, les privant de 5,55 m² de surface, M. et Mme [E] ont, après expertise, assigné la SCCV en réparation de leurs préjudices. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 4. M. et Mme [E] font grief à l'arrêt de requalifier le contrat de vente en l'état futur d'achèvement du 31 mai 2012 en contrat de vente, alors « que la vente d'immeuble à construire, dont la vente d'immeuble en l'état futur d'achèvement constitue l'une des formes, suppose que l'immeuble n'existe pas encore ou n'est pas encore terminé ; qu'en affirmant, pour procéder à la requalification du contrat de vente en l'état futur d'achèvement du 31 mai 2012 en contrat de vente, que l'appartement litigieux était achevé lors de la signature du contrat définitif, sans constater que l'immeuble était achevé au jour du contrat préliminaire de réservation, en date du 17 mars 2012, qui constitue l'avant-contrat qui précède la vente d'immeuble à construire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1601-1 et 1601-3 du code civil et des articles L. 261-15 et R. 261-25 du code de la construction et de l'habitation. » Réponse de la Cour 5. Ayant relevé que M. et Mme [E] avaient réservé, par contrat préliminaire du 17 mars 2012, un appartement qui était déjà achevé, la cour d'appel, qui a procédé à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 6. M. et Mme [E] font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de dommages et intérêts au titre de la présence de la poutre en béton dans l'appartement, alors « que seule l'acceptation sans réserve de la chose vendue par l'acheteur lui interdit de se prévaloir d'un défaut de conformité ; qu'en considérant qu'une telle acceptation sans réserve des acquéreurs était intervenue en l'espèce, leur interdisant d'invoquer la non-conformité de l'appartement vendu aux plans annexés au contrat de réservation, au seul motif que M. et Mme [E] avaient visité, avant la signature de l'acte de vente, l'appartement témoin meublé à vocation commerciale, lequel contenait la poutre non mentionnée dans les plans qui leur avaient été remis, la cour d'appel n'a pas caractérisé une acceptation claire et non équivoque par M. et Mme [E] du bien vendu et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1604 du code civil. » Réponse de la Cour 7. Ayant constaté que M. et Mme [E] avaient visité l'appartement alors qu'il était achevé et n'avaient pu ignorer la présence de la poutre litigieuse, qu'ils avaient signé l'acte notarié de vente le 31 mai 2012 et le procès-verbal de livraison le même jour puis retenu que cette simultanéité confirmait qu'à la date de signature de l'acte de vente, ils avaient accepté en l'état le bien vendu et que cette réception sans réserve de la chose vendue avait couvert ses défauts apparents de conformité tels que ceux liés à la présence de la poutre, ce dont il résultait qu'ils avaient accepté de manière claire et non équivoque le bien vendu, la cour d'appel, procédant à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision. Sur le troisième moyen 8. M. et Mme [E] font grief à l'arrêt de déclarer irrecevable leur demande relative à un défaut de contenance de l'appartement vendu, alors « que la cassation qui interviendra sur le premier moyen de cassation, qui conteste la requalification du contrat de vente en état futur d'achèvement du 31 mai 2012 en contrat de vente, entraînera par voie de conséquence et par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt attaqué en ce que, faisant application de dispositions non applicables au contrat de vente en l'état futur d'achèvement, en l'occurrence l'article 46 de la loi n° 65-557 du 13 juillet 1965, la cour d'appel a opposé aux acquéreurs la forclusion prévue par ce texte. » Réponse de la Cour 9. La cassation n'étant pas prononcée sur le premier moyen, le grief, tiré d'une annulation par voie de conséquence, est devenu sans portée. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme [E] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par Me Balat, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [E], PREMIER MOYEN DE CASSATION M. et Mme [E] reprochent à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir requalifié le contrat de vente en état futur d'achèvement du 31 mai 2012 en contrat de vente ; ALORS QUE la vente d'immeuble à construire, dont la vente d'immeuble en l'état futur d'achèvement constitue l'une des formes, suppose que l'immeuble n'existe pas encore ou n'est pas encore terminé ; qu'en affirmant, pour procéder à la requalification du contrat de vente en état futur d'achèvement du 31 mai 2012 en contrat de vente, que l'appartement litigieux était achevé lors de la signature du contrat définitif, sans constater que l'immeuble était achevé au jour du contrat préliminaire de réservation, en date du 17 mars 2012, qui constitue l'avant-contrat qui précède la vente d'immeuble à construire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1601-1 et 1601-3 du code civil et des articles L. 261-15 et R. 261-25 du code de la construction et de l'habitation. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION M. et Mme [E] reprochent à l'arrêt infirmatif attaqué de les avoir déboutés de leur demande formée contre la SCCV Bleu Royal concernant les conséquences dommageables liées à la présence de la poutre en béton dans l'appartement ; ALORS QUE seule l'acceptation sans réserve de la chose vendue par l'acheteur lui interdit de se prévaloir d'un défaut de conformité ; qu'en considérant qu'une telle acceptation sans réserve des acquéreurs était intervenue en l'espèce, leur interdisant d'invoquer la non-conformité de l'appartement vendu aux plans annexés au contrat de réservation, au seul motif que M. et Mme [E] avaient visité, avant la signature de l'acte de vente, « l'appartement témoin meublé à vocation commerciale », lequel contenait la poutre non mentionnée dans les plans qui leur avaient été remis, la cour d'appel n'a pas caractérisé une acceptation claire et non équivoque par les époux [E] du bien vendu et a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1604 du code civil. TROISIEME MOYEN DE CASSATION M. et Mme [E] reprochent à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit irrecevable en raison de la forclusion la demande formée contre la SCCV Bleu Royal relative à un défaut de contenance de l'appartement vendu ; ALORS QUE la cassation qui interviendra sur le premier moyen de cassation, qui conteste la requalification du contrat de vente en état futur d'achèvement du 31 mai 2012 en contrat de vente, entraînera par voie de conséquence et par application des dispositions de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation de l'arrêt attaqué en ce que, faisant application de dispositions non applicables au contrat de vente en l'état futur d'achèvement, en l'occurrence l'article 46 de la loi n° 65-557 du 13 juillet 1965, la cour d'appel a opposé aux acquéreurs la forclusion prévue par ce texte.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 32 F-D Pourvoi n° S 21-23.214 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 1°/ Mme [L] [V], 2°/ M. [P] [V], tous deux domiciliés [Adresse 1], ont formé le pourvoi n° S 21-23.214 contre l'arrêt rendu le 15 juin 2021 par la cour d'appel de Grenoble (2e chambre civile), dans le litige les opposant à la Société française de maisons individuelles (SFMI), société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Vernimmen, conseiller référendaire, les observations de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. et Mme [V], de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la Société française de maisons individuelles, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Vernimmen, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 15 juin 2021), rendu en référé, par contrat du 20 décembre 2016, M. et Mme [V] ont confié à la société ADAG, aux droits de laquelle vient la Société française de maisons individuelles (la SFMI), la construction d'une maison à usage d'habitation. 2. Le 31 juillet 2019, la SFMI a procédé à un appel de fonds, représentant 95 % du prix, que M. et Mme [V] n'ont pas payé. 3. La réception des travaux n'est pas intervenue et le solde du prix n'a pas été payé. 4. Par acte du 19 mai 2020, M. et Mme [V] ont assigné la SFMI en référé aux fins d'expertise. 5. Reconventionnellement, la SFMI a sollicité la condamnation de M. et Mme [V] au paiement, à titre provisionnel, de l'appel de fonds représentant 95 % du prix et des pénalités de retard. Examen du moyen Enoncé du moyen 6. M. et Mme [V] font grief à l'arrêt de les condamner in solidum à payer à la SFMI une provision correspondant à la fraction des 95 % du prix, outre des pénalités contractuelles de retard de 1 % par mois sur cette somme à compter du 29 août 2019 et jusqu'à complet paiement, alors : « 1°/ que le maître de l'ouvrage est fondé à refuser le paiement de la fraction du prix correspondant à une partie de l'ouvrage qui n'est pas réalisée ; qu'en retenant, pour condamner M. et Mme [V] à verser à titre provisionnel l'appel de fonds correspondant à la fraction de 75 à 95 % du prix convenu, que « l'argument du non-branchement de la pompe à chaleur est inopérant en ce qu'une telle opération aurait pu être effectuée en moins d'une journée si les maîtres de l'ouvrage n'avaient pas fait obstruction au paiement des sommes régulièrement dues au vu de l'avancement des travaux », quand les maîtres de l'ouvrage étaient fondés à subordonner le paiement de la fraction de 95 % du prix à l'achèvement préalable du chauffage, et donc de refuser de la verser tant que la pompe à chaleur n'était pas opérationnelle, la cour d'appel a violé l'article R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 835 du code de procédure civile ; 2°/ qu' en toute hypothèse, le juge des référés ne peut condamner une partie à payer une dette sérieusement contestable ; qu'en retenant, pour condamner M. et Mme [V] à verser à titre provisionnel l'appel de fonds correspondant à la fraction de 75 à 95 % du prix convenu, que « l'argument du non-branchement de la pompe à chaleur est inopérant en ce qu'une telle opération aurait pu être effectuée en moins d'une journée si les maîtres de l'ouvrage n'avaient pas fait obstruction au paiement des sommes régulièrement dues au vu de l'avancement des travaux », cependant que l'absence de mise en route du chauffage, à l'achèvement duquel est subordonné le versement de la fraction de 95 % du prix, rendait contestable la demande en paiement de cette fraction du prix, la cour d'appel a violé l'article R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 835 du code de procédure civile ; 3°/ qu'en toute hypothèse, en reconnaissant, d'une part,« le non- branchement de la pompe à chaleur », tout en retenant, d'autre part, que « le constructeur justifie de l'état d'avancement des travaux et notamment l'achèvement des travaux d'équipement, de plomberie, de menuiserie, de chauffage », la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ; 4°/ qu'en toute hypothèse, l'article 23 du contrat de construction de maison individuelle prévoyait que le prix était dû à l'expiration d'un délai de quinze jours courant « à compter de la visite de chantier effectuée pour contrôler l'état d'avancement du chantier » ; qu'en jugeant non sérieusement contestable l'exigibilité de l'appel de fonds litigieux à compter de la date de réception de la mise en demeure de le régler, sans rechercher, comme elle y était invitée, si la vaine demande de M. et Mme [V] d'une visite de contrôle du chantier ne rendait pas l'exigibilité de cet appel de fonds à compter de cette date sérieusement contestable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, devenu 1103, du code civil, ensemble l'article 835 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 7. En premier lieu, ayant constaté que la maison, en très bon état, était prête à être livrée dans le délai contractuel, que le constructeur justifiait de l'état d'avancement des travaux, notamment l'achèvement de ceux d'équipement, de plomberie, de menuiserie, de chauffage et de revêtements extérieurs, et que les maîtres de l'ouvrage avaient pris possession de la maison en période de congé d'hiver puis retenu que les contestations qu'ils avaient émises ne présentaient pas un degré de sérieux permettant de considérer qu'elle était inhabitable et que l'argument du non-branchement de la pompe à chaleur était inopérant en ce qu'une telle opération aurait pu être effectuée en moins d'une journée si les maîtres de l'ouvrage n'avaient pas fait obstruction au paiement des sommes dues au vu de l'avancement des travaux, la cour d'appel a pu, sans se contredire, en déduire que M. et Mme [V] devaient être condamnés, à titre provisionnel, au paiement de l'appel de fonds et des pénalités contractuelles de retard. 8. En second lieu, M. et Mme [V] n'ayant pas soutenu, dans leur conclusions d'appel, que l'exigibilité de l'appel de fond était subordonnée à la demande de visite de contrôle de chantier prévue à l'article 23 du contrat de construction de maison individuelle ni que le fait de ne pas avoir accepté la tenue de cette réunion rendait leur obligation de paiement sérieusement contestable, la cour d'appel n'était pas tenue de procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée. 9. En l'état de ces appréciations et énonciations, elle a pu en déduire que l'obligation de paiement incombant à M. et Mme [V] ne se heurtait à aucune contestation sérieuse et que la demande de provision de la société SFMI devait être accueillie. 10.Elle a ainsi légalement justifié sa décision. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne M. et Mme [V] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. et Mme [V] et les condamne in solidum à payer à la Société française de maisons individuelles la somme de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [V] Les époux [V] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé l'ordonnance entreprise quant au rejet de la demande de provision formulée par la SAS Société française de maisons individuelles et au rejet de l'application des pénalités contractuelles de retard, de les AVOIR condamnés in solidum à payer à la SAS Société française de maisons individuelles la somme de 34 442,44 euros à titre provisionnel et d'AVOIR dit que les pénalités contractuelles de retard de 1 % par mois s'appliqueraient sur cette somme à compter du 29 août 2019 et jusqu'à complet paiement ; 1° ALORS QUE le maître de l'ouvrage est fondé à refuser le paiement de la fraction du prix correspondant à une partie de l'ouvrage qui n'est pas réalisée ; qu'en retenant, pour condamner les époux [V] à verser à titre provisionnel l'appel de fonds correspondant à la fraction de 75 à 95 % du prix convenu, que « l'argument du non-branchement de la pompe à chaleur est inopérant en ce qu'une telle opération aurait pu être effectuée en moins d'une journée si les maîtres de l'ouvrage n'avaient pas fait obstruction au paiement des sommes régulièrement dues au vu de l'avancement des travaux » (arrêt, p. 6, in fine), quand les maîtres de l'ouvrage étaient fondés à subordonner le paiement de la fraction de 95 % du prix à l'achèvement préalable du chauffage, et donc de refuser de la verser tant que la pompe à chaleur n'était pas opérationnelle, la cour d'appel a violé l'article R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 835 du code de procédure civile ; 2° ALORS QU'en toute hypothèse, le juge des référés ne peut condamner une partie à payer une dette sérieusement contestable ; qu'en retenant, pour condamner les époux [V] à verser à titre provisionnel l'appel de fonds correspondant à la fraction de 75 à 95 % du prix convenu, que « l'argument du non-branchement de la pompe à chaleur est inopérant en ce qu'une telle opération aurait pu être effectuée en moins d'une journée si les maîtres de l'ouvrage n'avaient pas fait obstruction au paiement des sommes régulièrement dues au vu de l'avancement des travaux » (arrêt, p. 6, in fine), cependant que l'absence de mise en route du chauffage, à l'achèvement duquel est subordonné le versement de la fraction de 95 % du prix, rendait contestable la demande en paiement de cette fraction du prix, la cour d'appel a violé l'article R. 231-7 du code de la construction et de l'habitation, ensemble l'article 835 du code de procédure civile ; 3)° ALORS QU'en toute hypothèse, en reconnaissant, d'une part, « le non-branchement de la pompe à chaleur », tout en retenant, d'autre part, que « le constructeur justifie de l'état d'avancement des travaux et notamment l'achèvement des travaux d'équipement, de plomberie, de menuiserie, de chauffage », la cour d'appel, qui s'est contredite, a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ; 4°) ALORS QU'en toute hypothèse, l'article 23 du contrat de construction de maison individuelle prévoyait que le prix était dû à l'expiration d'un délai de quinze jours courant « à compter de la visite de chantier effectuée pour contrôler l'état d'avancement du chantier » ; qu'en jugeant non sérieusement contestable l'exigibilité de l'appel de fonds litigieux à compter de la date de réception de la mise en demeure de le régler, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions des époux [V], p. 6 à 9), si la vaine demande des époux [V] d'une visite de contrôle du chantier ne rendait pas l'exigibilité de cet appel de fonds à compter de cette date sérieusement contestable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, devenu 1103, du code civil, ensemble l'article 835 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 28 F-D Pourvoi n° V 21-24.275 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La commune de [Localité 5], représentée par son maire en exercice, domicilié en cette qualité, [Adresse 3], a formé le pourvoi n° V 21-24.275 contre le jugement rendu le 8 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Marseille (juridiction de l'expropriation des Bouches-du-Rhône), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [Y] [M], épouse [O], 2°/ à Mme [D] [O], toutes deux domiciliées [Adresse 4], défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de Me Haas, avocat de la commune de [Localité 5], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de Mmes [Y] et [D] [O], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon le jugement attaqué (juridiction de l'expropriation des Bouches-du-Rhône, 8 septembre 2021), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 10 décembre 2020, pourvoi n° 19-22.738), [L] [O], propriétaire de deux parcelles situées dans le périmètre d'un projet d'aménagement déclaré d'utilité publique, a fait valoir son droit de délaissement en application de l'article L. 241-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, par une lettre adressée à la commune de [Localité 5] le 15 novembre 2013. 2. A la requête de Mmes [Y] et [D] [O] (les consorts [O]), agissant en leur qualité d'ayants droit de [L] [O], décédé, la juridiction de l'expropriation a, par un jugement du 13 juin 2018, fixé le prix des terrains délaissés. 3. Les consorts [O] ont saisi le juge de l'expropriation d'une requête en rectification du jugement, sur le fondement de l'article 462 du code de procédure civile. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé 4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le moyen, pris en ses deuxième à quatrième branches Enoncé du moyen 5. La commune de [Localité 5] fait grief au jugement de rectifier le dispositif du jugement du 13 juin 2018 en y ajoutant la mention suivante : « ordonne le transfert de propriété des parcelles cadastrées commune de [Localité 5] section CT numéro [Cadastre 1] et [Cadastre 2] d'une contenance respective de 8 160 m² et 15 800 m², soit un total de 23 960 m² au bénéfice de la commune de [Localité 5] », alors : « 2°/ que jusqu'au transfert de propriété prononcé par le juge de l'expropriation, le propriétaire ne bénéficie d'aucun droit acquis irrévocable à l'acquisition de son bien et le bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique peut renoncer à l'expropriation ; qu'en se fondant, pour réparer la prétendue omission matérielle relative au prononcé du transfert de propriété, au profit de la commune de [Localité 5], des parcelles appartenant à Mmes [O], sur la circonstance qu'il ne disposerait d'aucune marge d'appréciation quant audit transfert de propriété qui est induit par sa saisine, quand une telle circonstance était inopérante dès lors que, tant que le transfert de propriété n'avait pas été prononcé par le juge, la commune pouvait renoncer à son projet, le juge de l'expropriation a violé les articles L. 241-1 et L. 241-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ensemble l'article 462 du code de procédure civile ; 3°/ que la commune de [Localité 5] avait, preuve à l'appui, fait valoir que le mémoire de saisine de la juridiction de l'expropriation déposé par Mmes [O] ne contenait aucune demande relative au transfert de propriété des parcelles litigieuses et que seul ce mémoire saisit ladite juridiction ; qu'en ajoutant au dispositif de son précédent jugement la mention du transfert de propriété, au profit de la commune de [Localité 5], des parcelles appartenant à Mmes [O], au motif que le courrier du 19 décembre 2016 auquel était joint le mémoire de saisine de la juridiction de l'expropriation « visa[it] l'article L. 241-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique "en vue de prononcer le transfert de propriété et fixer le montant des indemnités de dépossession afférentes à ces parcelles" » et que le mémoire en réponse déposé par la commune de [Localité 5] le 2 juin 2017 « faisa[it] expressément référence à la procédure de délaissement en cours », sans répondre au moyen déterminant tiré de ce qu'un tel transfert n'avait pas été sollicité par Mmes [O] dans le cadre du mémoire par lequel elles avaient saisi la juridiction de l'expropriation, le juge de l'expropriation a violé l'article 455 du code de procédure civile ; 4°/ en tout état de cause, que si les omissions matérielles affectant une décision peuvent être rectifiées par la juridiction qui l'a rendue, celle-ci ne peut modifier les droits et obligations reconnus aux parties par cette décision ; qu'en ajoutant au dispositif de son précédent jugement la mention du transfert de propriété, au profit de la commune de [Localité 5], des parcelles appartenant à Mmes [O], le juge de l'expropriation qui, sous couvert de réparer l'omission matérielle alléguée, a modifié les droits et obligations des parties tels qu'ils avaient été fixés par sa précédente décision, a violé l'article 462 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour 6. Aux termes de l'article L. 241-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, lorsqu'un délai d'un an s'est écoulé à compter de la publication d'un acte portant déclaration d'utilité publique d'une opération, les propriétaires des biens à acquérir compris dans cette opération peuvent mettre en demeure l'expropriant au bénéfice duquel la déclaration d'utilité publique est intervenue de procéder à l'acquisition de leur bien dans un délai de deux ans à compter du jour de la demande. 7. Selon l'article L. 241-2 du même code, à défaut d'accord amiable à l'expiration du délai fixé à l'article L. 241-1, le juge, saisi par le propriétaire, prononce le transfert de propriété et fixe le prix du terrain comme en matière d'expropriation. 8. Il en résulte que, lorsqu'il est saisi en application de ces textes par le propriétaire qui, ayant exercé son droit de délaissement, a nécessairement requis l'acquisition de ses biens, le juge doit prononcer, au besoin d'office, le transfert de propriété des biens délaissés. 9. Le juge de l'expropriation, devant qui la commune de [Localité 5] n'avait pas indiqué avoir renoncé au projet déclaré d'utilité publique, a exactement énoncé qu'il ne disposait d'aucune marge d'appréciation quant au transfert de propriété induit par sa saisine et en a déduit, à bon droit, sans être tenu de répondre à des conclusions inopérantes selon lesquelles le transfert de propriété n'avait pas été expressément requis par le mémoire ayant saisi la juridiction en fixation du prix des biens délaissés, que l'absence de prononcé de ce transfert résultait d'une simple omission matérielle qu'il pouvait rectifier, sans modifier les droits et obligations des parties tels qu'ils avaient été fixés par sa précédente décision. 10. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne la commune de [Localité 5] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la commune de [Localité 5] et la condamne à payer à Mmes [Y] [M], épouse [O] et [J] [O] la somme globale de 3 000 euros ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par Me Haas, avocat aux Conseils, pour la commune de [Localité 5] La commune de [Localité 5] fait grief au jugement attaqué D'AVOIR rectifié le dispositif du jugement du 13 juin 2018 en y ajoutant la mention suivante : « ordonne le transfert de propriété des parcelles cadastrées commune de [Localité 5] section CT numéro [Cadastre 1] et [Cadastre 2] d'une contenance respective de 8 160 m² et 15 800 m², soit un total de 23 960 m² au bénéfice de la commune de [Localité 5] » ; ALORS, 1°), QUE la décision portant transfert de propriété est rendue par le juge au vu des pièces constatant que les formalités prescrites par le livre Ier du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ont été accomplies ; qu'en ajoutant au dispositif de son précédent jugement la mention du transfert de propriété, au profit de la commune de [Localité 5], des parcelles appartenant à Mmes [O], au motif qu'il ne disposait d'aucune marge d'appréciation quant audit transfert de propriété qui est induit par sa saisine, sa fonction juridictionnelle étant la seule fixation du prix, et que ses compétences en matière de fixation du prix et de transfert de propriété étaient liées, quand il ne peut prononcer un tel transfert qu'après s'être assuré que les formalités légales afférentes à la procédure d'expropriation ont été accomplies, le juge de l'expropriation a violé les articles L. 220-2, L. 241-1 et L. 241-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ensemble l'article 462 du code de procédure civile ; ALORS, 2°), QUE jusqu'au transfert de propriété prononcé par le juge de l'expropriation, le propriétaire ne bénéficie d'aucun droit acquis irrévocable à l'acquisition de son bien et le bénéficiaire de la déclaration d'utilité publique peut renoncer à l'expropriation ; qu'en se fondant, pour réparer la prétendue omission matérielle relative au prononcé du transfert de propriété, au profit de la commune de [Localité 5], des parcelles appartenant à Mmes [O], sur la circonstance qu'il ne disposerait d'aucune marge d'appréciation quant audit transfert de propriété qui est induit par sa saisine, quand une telle circonstance était inopérante dès lors que, tant que le transfert de propriété n'avait pas été prononcé par le juge, la commune pouvait renoncer à son projet, le juge de l'expropriation a violé les articles L. 241-1 et L. 241-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique, ensemble l'article 462 du code de procédure civile ; ALORS, 3°), QUE la commune de [Localité 5] avait, preuve à l'appui, fait valoir que le mémoire de saisine de la juridiction de l'expropriation déposé par Mmes [O] ne contenait aucune demande relative au transfert de propriété des parcelles litigieuses et que seul ce mémoire saisit ladite juridiction (v. production n° 7, p. 2, in fine) ; qu'en ajoutant au dispositif de son précédent jugement la mention du transfert de propriété, au profit de la commune de [Localité 5], des parcelles appartenant à Mmes [O], au motif que le courrier du 19 décembre 2016 auquel était joint le mémoire de saisine de la juridiction de l'expropriation " visa[it] l'article L. 241-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique "en vue de prononcer le transfert de propriété et fixer le montant des indemnités de dépossession afférentes à ces parcelles" " et que le mémoire en réponse déposé par la commune de [Localité 5] le 2 juin 2017 " faisa[it] expressément référence à la procédure de délaissement en cours ", sans répondre au moyen déterminant tiré de ce qu'un tel transfert n'avait pas été sollicité par Mmes [O] dans le cadre du mémoire par lequel elles avaient saisi la juridiction de l'expropriation, le juge de l'expropriation a violé l'article 455 du code de procédure civile ; ALORS, 4°) et en tout état de cause, QUE si les omissions matérielles affectant une décision peuvent être rectifiées par la juridiction qui l'a rendue, celle-ci ne peut modifier les droits et obligations reconnus aux parties par cette décision ; qu'en ajoutant au dispositif de son précédent jugement la mention du transfert de propriété, au profit de la commune de [Localité 5], des parcelles appartenant à Mmes [O], le juge de l'expropriation qui, sous couvert de réparer l'omission matérielle alléguée, a modifié les droits et obligations des parties tels qu'ils avaient été fixés par sa précédente décision, a violé l'article 462 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 MF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle Mme TEILLER, président Arrêt n° 29 F-D Pourvoi n° U 21-20.801 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 1°/ la société Arte charpentier architectes, société anonyme, dont le siège est [Adresse 8], 2°/ la société Mutuelle des architectes français, société d'assurance mutuelle à cotisations variables, dont le siège est [Adresse 2], prise en sa qualité d'assureur de la société Arte charpentier architectes, ont formé le pourvoi n° U 21-20.801 contre l'arrêt rendu le 5 mai 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 5), dans le litige les opposant : 1°/ à la société Betom ingenierie, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 4], 2°/ à la société Nacarat, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 6], venant aux droits de la société Touzet Gaillard, 3°/ à la société Abeille IARD et Vie, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], anciennement Aviva assurances, 4°/ à la société Engie énergie services, société anonyme, dont le siège est [Adresse 10], 5°/ à la société XL Catlin Services SE, dont le siège est [Adresse 7], Société européenne, venant aux droits de la société XL Insurance Company Limited, prise en sa qualité d'assureur de la société Cofathec, aux droits de laquelle vient la société Engie énergie services, 6°/ à la société Generali vie, société anonyme, dont le siège est [Adresse 3], venant aux droits de la société SA Foncière Burho, venant elle-même aux droits de la société Touzet, 7°/ à la société Delphi acoustique et ingenierie, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 11], 8°/ à la société Deseez Warwicker Partners DWP Building services Consultants, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 9], 9°/ à la société Socotec construction, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 5], venant aux droits de la Socotec, défenderesses à la cassation. La société Betom ingenierie a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt ; La société Nacarat a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident éventuel contre le même arrêt ; Les sociétés Engie énergie services et XL Catlin services SE ont formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident contre le même arrêt ; La société Delphi acoustique et ingenierie a formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi provoqué contre le même arrêt ; Les demandeurs au pourvoi principal invoque, à l'appui de leur recours, quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ; La société Betom ingenierie, demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; La société Nacarat, demanderesse au pourvoi incident éventuel invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; Les sociétés Engie énergie services et XL Catlin services SE, demanderesses au pourvoi incident invoquent, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; La société Delphi acoustique et ingenierie, demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ; Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Zedda, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de la société Arte charpentier architectes, de la société Mutuelle des architectes français et de la société Delphi acoustique et ingenierie, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société Nacarat, de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Engie énergie services et de la société XL Catlin Services SE, de la SCP Gadiou et Chevallier, avocat de la société Betom ingenierie, de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Generali vie, de la SCP Sevaux et Mathonnet, avocat de la société Abeille IARD et Vie, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Zedda, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Désistement partiel 1. Il est donné acte à la société Arte Charpentier architectes (la société Arte Charpentier) et à la Mutuelle des architectes français (la MAF) du désistement de leur pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Aviva assurances, aujourd'hui dénommée Abeille IARD et vie. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 5 mai 2021), la société Touzet Gaillard, aux droits de laquelle vient la société Nacarat, a fait construire un immeuble à usage de bureaux qu'elle a vendu en l'état futur d'achèvement à la société Touzet, aux droits de laquelle sont venues la société Foncière-Burho puis la société Generali vie. 3. La maîtrise d'oeuvre de conception a été confiée à la société Arte Charpentier assurée auprès de la MAF. 4. La société Arte Charpentier a sous-traité des études acoustiques à la société Delphi acoustique et des études techniques de chauffage, ventilation et climatisation à la société Deseez Warwicker Partners (la société DWP). 5. La conception du lot chauffage, ventilation et climatisation a été confiée à la société Betom ingénierie et la réalisation de ce lot à la société Cofatech services, aux droits de laquelle vient la société GDF Suez énergie services, aujourd'hui dénommée Engie énergie services, assurée auprès de la société XL Insurance Company Limited, aux droits de laquelle vient la société XL Catlin Services. 6. Le contrôle technique a été confié à la société Socotec, aux droits de laquelle vient la société Socotec construction. 7. La réception est intervenue le 31 août 2001 et la livraison à l'acquéreur le 6 septembre 2001, avec réserves. 8. Se prévalant de nuisances sonores dénoncées par des riverains dès juillet 2001, l'acquéreur a mis le vendeur en demeure de mettre les installations de climatisation en conformité. Une expertise a été ordonnée le 7 juin 2005 à la demande de l'acquéreur. A la demande d'autres parties, elle a été rendue commune à la société Arte Charpentier et à la MAF le 7 octobre 2005 puis à la société Delphi acoustique le 5 février 2008. 9. L'acquéreur a assigné le vendeur au fond par acte du 20 juin 2005 et les constructeurs et leurs assureurs ont été appelés à l'instance. Examen des moyens Sur les moyens des pourvois incidents des sociétés Nacarat, Betom ingénierie, Engie énergie services et XL Catlin Services, ci-après annexés 10. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation. Sur le quatrième moyen du pourvoi principal et sur le quatrième moyen du pourvoi provoqué de la société Delphi acoustique, rédigés en termes identiques, réunis Enoncé du moyen 11. Par leur quatrième moyen, la société Arte Charpentier et la MAF font grief à l'arrêt de les condamner, dans la proportion qu'il fixe, à garantir la société Nacarat des condamnations prononcées à son encontre, alors « que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la société Arte Charpentier et la Maf sollicitaient la garantie de la société Nacarat pour avoir vendu des équipements non conformes à la réglementation et aux engagements pris dans l'acte de vente ; qu'en jugeant que la société Nacarat devait être intégralement garantie des condamnations prononcées à son encontre, sans répondre aux conclusions invoquant sa faute, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. » 12. Par son quatrième moyen, la société Delphi acoustique fait le même grief à l'arrêt. Réponse de la Cour 13. Par motifs adoptés, la cour d'appel a retenu qu'il n'était pas prouvé que le manquement du vendeur à ses obligations contractuelles fût en lien avec le préjudice invoqué par l'acquéreur. Elle a ensuite condamné le vendeur pour défaut de délivrance conforme en énonçant que ce fondement ne supposait pas la démonstration d'une faute ni d'un préjudice. 14. Elle a, ainsi, répondu aux conclusions de la société Arte Charpentier, de la MAF et de la société Delphi ingénierie, qui demandaient la garantie de la société Nacarat pour avoir vendu des équipements non conformes à la réglementation et aux engagements pris dans l'acte de vente en l'état futur d'achèvement. 15. Le moyen n'est donc pas fondé. Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal et sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi provoqué de la société Delphi acoustique, rédigés en termes similaires, réunis Enoncé des moyens 16. Par leur premier moyen, la société Arte Charpentier et la MAF font grief à l'arrêt de les condamner, in solidum avec la société Delphi acoustique, la société Nacarat et la société Betom ingénierie, à payer diverses sommes à la société Generali vie, alors « qu'une citation en justice n'interrompt le délai de forclusion ou de prescription qu'au profit de celui qui la diligente ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que l'action en responsabilité contractuelle exercée par la société Generali Vie contre la société Arte Charpentier et la Maf n'était pas prescrite, bien qu'exercée le 12 mars 2013, plus de 10 ans après la réception, au motif qu'à la demande de la société Touzet Gaillard, les opérations d'expertises avaient été déclarées commune à la société Arte Charpentier et à la Maf par ordonnance du 7 octobre 2005 et que les actes interruptifs de prescription accomplis par la société Touzet Gaillard avaient profité à la société Generali Vie ; qu'en statuant ainsi, quand l'assignation en référé-expertise délivrée par la société Touzet Gaillard afin d'étendre les opérations d'expertise à des locateurs d'ouvrages n'avait pu avoir pour effet d'interrompre le délai de prescription de l'action de la société Generali Vie à l'encontre des mêmes locateurs d'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008. » 17. Par son premier moyen, la société Delphi acoustique fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum avec la société Arte Charpentier, la MAF, la société Nacarat et la société Betom Ingénierie, à payer diverses sommes à la société Générali Vie, alors « qu'une citation en justice n'interrompt le délai de forclusion ou de prescription qu'au profit de celui qui la diligente ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que l'action en responsabilité délictuelle exercée par la société Generali Vie contre la société Delphi Acoustique n'était pas prescrite, bien qu'exercée le 12 mars 2013, plus de 10 ans après la réception, au motif qu'à la demande de la société Touzet Gaillard, les opérations d'expertises avaient été déclarées commune à la société Delphi Acoustique par ordonnance du 7 octobre 2005 et que les actes interruptifs de prescription accomplis par la société Touzet Gaillard avaient profité à la société Generali Vie ; qu'en statuant ainsi, quand l'assignation en référé-expertise délivrée par la société Touzet Gaillard afin d'étendre les opérations d'expertise à des locateurs d'ouvrages n'avait pu avoir pour effet d'interrompre le délai de prescription de l'action de la société Generali Vie à l'encontre des mêmes locateurs d'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008. » Réponse de la Cour Vu l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 : 18. Il résulte de ce texte qu'une citation en justice n'interrompt la prescription que si elle a été signifiée par le créancier lui-même au débiteur se prévalant de la prescription. 19. Pour déclarer recevables les demandes de la société Generali vie contre la société Arte Charpentier, la MAF et la société Delphi acoustique, l'arrêt énonce que les actes interruptifs de prescription accomplis par le maître de l'ouvrage vendeur en état futur d'achèvement profitent à ses acquéreurs successifs, de sorte que l'action n'était pas prescrite comme ayant été introduite par assignation au fond moins de dix ans après l'assignation en déclaration d'opérations d'expertise communes. 20. En statuant ainsi, alors que les assignations délivrées par le vendeur après la vente aux fins de voir déclarer les opérations d'expertise communes aux constructeurs n'avaient pu interrompre la prescription au profit de l'acquéreur, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Et sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi principal et sur les deuxième et troisième moyens du pourvoi provoqué de la société Delphi acoustique, rédigés en termes similaires, réunis Enoncé des moyens 21. Par leur deuxième moyen, la société Arte Charpentier et la MAF font grief à l'arrêt de mettre hors de cause la société DWP, après avoir déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre cette société, alors « que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, de sorte que pour une prescription en cours, le délai quinquennal issu de l'article 2224 du code civil ne peut commencer à courir que le 19 juin 2008 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre la société DWP par assignation du 18 juin 2013, en retenant que le point de départ du délai de prescription de l'action de la société Arte Charpentier et de la Maf devait être situé à la date à laquelle elles avaient été assignées en référé expertise, et qu'elles avaient agi le 18 juin 2013 alors qu'elles avaient été mises en cause par assignation devant le juge des référés ayant donné lieu à une ordonnance d'expertise commune du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors que le délai de prescription avait commencé à courir le 19 juin 2008, la cour d'appel a violé l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2224 du code civil. » 22. Par leur troisième moyen, la société Arte Charpentier et la MAF font grief à l'arrêt de mettre hors de cause la société Socotec construction, après avoir déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre cette société, alors « que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, de sorte que pour une prescription en cours, le délai quinquennal issu de l'article 2224 du code civil ne peut commencer à courir que le 19 juin 2008 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre la société Socotec par assignation du 18 juin 2013, en retenant que le point de départ du délai de prescription de l'action de la société Arte Charpentier et de la Maf devait être situé à la date à laquelle elles avaient été assignées en référé expertise, et qu'elles avaient agi le 18 juin 2013 alors qu'elles avaient été mises en cause par assignation devant le juge des référés ayant donné lieu à une ordonnance d'expertise commune du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors que le délai de prescription avait commencé à courir le 19 juin 2008, la cour d'appel a violé l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2224 du code civil. » 23. Par ses deuxième et troisième moyens, la société Delphi acoustique fait les mêmes griefs à l'arrêt. Réponse de la Cour Vu l'article L. 110-4, I, du code de commerce et l'article 26, II, de la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 : 24. Aux termes du premier de ces textes, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 17 juin 2008, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivaient par dix ans si elles n'étaient pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes. Ce délai a été réduit à cinq ans par la loi précitée. 25. Selon le second, les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de la loi, sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. 26. Pour mettre hors de cause la société Socotec construction et la société DWP, l'arrêt énonce que la prescription du recours d'un constructeur contre un autre relève des dispositions de l'article 2224 du code civil selon lesquelles les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. 27. Il constate, ensuite, que la société Arte Charpentier, la MAF et la société Delphi acoustique ont formé leurs appels en garantie plus de cinq ans après qu'elles ont été assignées en référé aux fins de leur voir déclarer communes les opérations d'expertise, de sorte que leurs recours sont prescrits. 28. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que les appels en garantie avaient été formés contre les société Socotec construction et DWP le 18 juin 2013, moins de dix ans après les assignations délivrées à la société Arte Charpentier, la MAF et la société Delphi acoustique et moins de cinq ans après l'entrée en vigueur, le 19 juin 2008, de la loi du 17 juin 2008 ayant réduit le délai de prescription, de sorte que les actions n'étaient pas prescrites, la cour d'appel a violé les textes susvisés. Portée et conséquences de la cassation 29. La cassation de la condamnation prononcée contre les sociétés Arte Charpentier, Delphi acoustique et la MAF au profit de la société Generali vie n'atteint pas celle prononcée contre les sociétés Nacarat et Betom ingénierie qui ne se sont pas associées au pourvoi principal ni au pourvoi provoqué de la société Delphi acoustique. Mise hors de cause 30. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il y a lieu de mettre hors de cause les sociétés Nacarat et Abeille IARD et vie dont la présence n'est pas nécessaire devant la cour d'appel de renvoi. 31. En application de l'article 625 du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de mettre hors de cause la société Generali vie, dont la présence est nécessaire devant la cour d'appel de renvoi. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il : - condamne les sociétés Arte Charpentier architectes, Delphi acoustique et la Mutuelle des architectes français, celle-ci dans la limite de ses obligations contractuelles, à verser à la société Generali vie les sommes de : - 631 106 euros, coût des travaux de mise aux normes, - 42 410 euros HT, 11 500 euros HT et 15 400 euros HT, à titre d'honoraires, - 15 777,65 euros HT, coût de l'assurance dommages ouvrage, sommes indexées sur l'indice du coût de la construction BT01 entre le 1er juin 2011 et le jour du jugement et augmentées de la TVA en vigueur au jour du jugement, - Prononce la mise hors de cause des sociétés Deseez Warwicker Partners et Socotec construction, l'arrêt rendu le 5 mai 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Met hors de cause les sociétés Nacarat et Abeille IARD et vie ; Dit n'y avoir lieu de mettre hors de cause la société Generali vie ; Condamne les sociétés Generali vie, Socotec construction et Deseez Warwicker Partners aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour la société Arte charpentier architectes et la société Mutuelle des architectes français (demandeurs au pourvoi principal) PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Arte Charpentier et la Maf font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnées, in solidum avec la société Delphi Acoustique, la société Nacarat et la société Betom Ingénierie, à payer à la société Générali Vie les sommes de 631 106 euros HT au titre des travaux de mises aux normes, celles de 42 410 euros HT, 11 500 euros HT et 15 400 euros HT à titre d'honoraires et celle de 15 777,65 euros pour le coût de l'assurance dommages-ouvrage ; 1/ Alors qu'une citation en justice n'interrompt le délai de forclusion ou de prescription qu'au profit de celui qui la diligente ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que l'action en responsabilité contractuelle exercée par la société Generali Vie contre la société Arte Charpentier et la Maf n'était pas prescrite, bien qu'exercée le 12 mars 2013, plus de 10 ans après la réception, au motif qu'à la demande de la société Touzet Gaillard, les opérations d'expertises avaient été déclarées commune à la société Arte Charpentier et à la Maf par ordonnance du 7 octobre 2005 et que les actes interruptifs de prescription accomplis par la société Touzet Gaillard avaient profité à la société Generali Vie (arrêt p. 13) ; qu'en statuant ainsi, quand l'assignation en référé-expertise délivrée par la société Touzet Gaillard afin d'étendre les opérations d'expertise à des locateurs d'ouvrages n'avait pu avoir pour effet d'interrompre le délai de prescription de l'action de la société Generali Vie à l'encontre des mêmes locateurs d'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ; 2/ Alors que les ordonnances de référé déclarant commune à d'autres constructeurs une mesure d'expertise précédemment ordonnée n'ont pas d'effet interruptif de prescription ou de forclusion à l'égard de ceux qui n'étaient parties qu'à l'ordonnance initiale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé que l'action en responsabilité contractuelle exercée par la société Generali Vie contre la société Arte Charpentier et la Maf n'était pas prescrite, bien qu'exercée plus de 10 ans après la réception, au motif qu'à la demande de la société Touzet Gaillard, les opérations d'expertises avaient été déclarées communes à la société Arte Charpentier et à la Maf par ordonnance du 7 octobre 2005 et que les actes interruptifs de prescription accomplis par la société Touzet Gaillard avaient profité à la société Generali Vie ; qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance de référé ayant rendu communes les opérations d'expertise à la société Arte Charpentier et la Maf à la demande de la société Touzet Gaillard n'avait pu produire d'effet interruptif à l'égard de la société Generali Vie, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil ; 3/ Alors que le juge ne peut relever un moyen d'office sans avoir invité préalablement les parties à formuler leurs observations sur son bien-fondé ; qu'en l'espèce, la cour a retenu, pour juger que l'action exercée par la société Generali à l'encontre de la société Arte Charpentier et de la Maf n'était pas prescrite, que le délai d'action ayant couru à compter de la réception avait été interrompu par la société Touzet Gaillard à l'initiative de laquelle les opérations d'expertise avaient été rendues communes à la société Arte Charpentier et à la Maf, par ordonnance de référé du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, par un moyen qu'elle a relevé d'office, sans avoir invité préalablement les parties à formuler leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION La société Arte Charpentier et la Maf font grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause de la société Deseez Warwicker Partners, après avoir déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre cette société ; Alors que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, de sorte que pour une prescription en cours, le délai quinquennal issu de l'article 2224 du code civil ne peut commencer à courir que le 19 juin 2008 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre la société DWP par assignation du 18 juin 2013, en retenant que le point de départ du délai de prescription de l'action de la société Arte Charpentier et de la Maf devait être situé à la date à laquelle elles avaient été assignées en référé expertise, et qu'elles avaient agi le 18 juin 2013 alors qu'elles avaient été mises en cause par assignation devant le juge des référés ayant donné lieu à une ordonnance d'expertise commune du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors que le délai de prescription avait commencé à courir le 19 juin 2008, la cour d'appel a violé l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2224 du code civil. TROISIEME MOYEN DE CASSATION La société Arte Charpentier et la Maf font grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause de la société Socotec Construction, après avoir déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre cette société ; Alors que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, de sorte que pour une prescription en cours, le délai quinquennal issu de l'article 2224 du code civil ne peut commencer à courir que le 19 juin 2008 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre la société Socotec par assignation du 18 juin 2013, en retenant que le point de départ du délai de prescription de l'action de la société Arte Charpentier et de la Maf devait être situé à la date à laquelle elles avaient été assignées en référé expertise, et qu'elles avaient agi le 18 juin 2013 alors qu'elles avaient été mises en cause par assignation devant le juge des référés ayant donné lieu à une ordonnance d'expertise commune du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors que le délai de prescription avait commencé à courir le 19 juin 2008, la cour d'appel a violé l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2224 du code civil. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION La société Arte Charpentier et la Maf font grief à l'arrêt attaqué de les avoir condamnées, à hauteur de 30%, à garantir la société Nacarat des condamnations prononcées à son encontre ; Alors que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la société Arte Charpentier et la Maf sollicitaient la garantie de la société Nacarat pour avoir vendu des équipements non conformes à la réglementation et aux engagements pris dans l'acte de vente (concl. d'appel, p. 16) ; qu'en jugeant que la société Nacarat devait être intégralement garantie des condamnations prononcées à son encontre, sans répondre aux conclusions invoquant sa faute, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit par la SCP Gadiou et Chevallier, avocat aux Conseils, pour la société Betom ingenierie (demanderesse au pourvoi incident éventuel) La société BETOM INGENIERIE fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée, in solidum avec le Cabinet ARTE CHARPENTIER, la société DELPHI ACOUSTIQUE et la MAF, à payer à la société GENERAL VIE les sommes de 631 106 € H.T., coût des travaux de mise aux normes, 42 410 € H.T., 11 500 € H.T. et 15 400 € H.T. à titre d'honoraires et de 15 777,65 € H.T., coût de l'assurance dommages-ouvrage, sommes indexées sur l'indice du coût de la construction BT 01 entre le 1er juin 2011 et le jour du jugement et augmentées de la TVA en vigueur au jour du jugement ; ALORS QUE n'est pas réparable le préjudice éventuel constitué par un simple risque tant qu'il ne s'est pas réalisé ; qu'en déclarant réparable au titre des troubles du voisinage dont la société BETOM INGENIERIE doit garantie « le fait pour le propriétaire de l'immeuble d'avoir à répondre envers les voisins d'émergences sonores excessives », sans constater l'existence d'une quelconque instance introduite par ces « voisins », la cour d'appel a violé l'article 1147 du code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce. Moyen produit par la SCP Alain Bénabent, avocat aux Conseils, pour la société Nacarat (demanderesse au pourvoi incident éventuel) La société Nacarat fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée à payer à la SA Generali Vie les sommes de 631 106 euros HT, coût des travaux de mise aux normes, 42 410 euros HT, 11 500 euros HT et 15 400 euros HT à titre d'honoraires et de 15 777,65 euros HT, coût de l'assurance dommages ouvrage, sommes indexées sur l'indice du coût de la construction BT 01 entre le 1er juin 2011 et le jour du jugement et augmentées de la TVA en vigueur au jour du jugement ; AU MOTIF ESSENTIEL QUE « le fait pour le propriétaire de l'immeuble d'avoir à répondre envers les voisins d'émergences sonores excessives et dépassant les seuils autorisés par la réglementation sur les établissements classés pour la protection de l'environnement, qu'il soit actuel ou futur, constitue un préjudice certain » ; ALORS QUE n'est pas réparable le préjudice éventuel constitué par un simple risque tant qu'il ne s'est pas réalisé ; qu'en déclarant réparable au titre des troubles de voisinage dont la société Nacarat doit garantie « le fait pour le propriétaire de l'immeuble d'avoir à répondre envers les voisins d'émergences sonores excessives » sans constater l'existence d'une quelconque instance introduite par ces « voisins », la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil dans sa rédaction applicable à l'espèce. Moyen produit par la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat aux Conseils, pour la société Engie énergie services et de la société XL Catlin Services SE (demanderesses au pourvoi incident) Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR condamné la SA ENGIE ENERGIE SERVICES et son assureur la société XL CATLIN SERVICES à hauteur de 40 %, à garantir la SAS NACARAT au titre des condamnations prononcées à son encontre en principal, intérêts, frais irrépétibles et dépens d'appel et de première instance, en ce compris les frais d'expertise judiciaire ; ALORS QUE n'est pas réparable le préjudice éventuel constitué par un simple risque tant qu'il ne s'est pas réalisé ; qu'en déclarant réparable au titre des troubles de voisinage « le fait pour le propriétaire de l'immeuble d'avoir à répondre envers les voisins d'émergences sonores excessives et dépassant les seuils autorisés par la réglementation sur les établissements classés pour la protection de l'environnement, qu'il soit actuel ou futur, constitue un préjudice certain » (arrêt, p. 15, al. 2, in fine), sans constater l'existence d'une quelconque instance introduite par ces « voisins », la cour d'appel n'a pas légalement justifié son arrêt au regard de la règle de la réparation intégrale qui veut que seul un préjudice certain peut donner lieu à réparation. Moyens produits par la SAS Boulloche, Colin Stoclet et Associés, avocat aux Conseils, pour la société Delphi acoustique et ingenierie (demanderesse au pourvoi provoqué) PREMIER MOYEN DE CASSATION La société Delphi Acoustique fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée, in solidum avec la société Arte Charpentier, la Maf, la société Nacarat et la société Betom Ingénierie, à payer à la société Générali Vie les sommes de 631 106 euros HT au titre des travaux de mises aux normes, celles de 42 410 euros HT, 11 500 euros HT et 15 400 euros HT à titre d'honoraires et celle de 15 777,65 euros pour le coût de l'assurance dommages-ouvrage ; 1/ Alors qu'une citation en justice n'interrompt le délai de forclusion ou de prescription qu'au profit de celui qui la diligente ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que l'action en responsabilité délictuelle exercée par la société Generali Vie contre la société Delphi Acoustique n'était pas prescrite, bien qu'exercée le 12 mars 2013, plus de 10 ans après la réception, au motif qu'à la demande de la société Touzet Gaillard, les opérations d'expertises avaient été déclarées commune à la société Delphi Acoustique par ordonnance du 7 octobre 2005 et que les actes interruptifs de prescription accomplis par la société Touzet Gaillard avaient profité à la société Generali Vie (arrêt p. 15 & 16) ; qu'en statuant ainsi, quand l'assignation en référé-expertise délivrée par la société Touzet Gaillard afin d'étendre les opérations d'expertise à des locateurs d'ouvrages n'avait pu avoir pour effet d'interrompre le délai de prescription de l'action de la société Generali Vie à l'encontre des mêmes locateurs d'ouvrage, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 17 juin 2008 ; 2/ Alors que les ordonnances de référé déclarant commune à d'autres constructeurs une mesure d'expertise précédemment ordonnée n'ont pas d'effet interruptif de prescription ou de forclusion à l'égard de ceux qui n'étaient parties qu'à l'ordonnance initiale ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a estimé que l'action en responsabilité délictuelle exercée par la société Generali Vie contre la société Delphi Acoustique n'était pas prescrite, bien qu'exercée plus de 10 ans après la réception, au motif qu'à la demande de la société Touzet Gaillard, les opérations d'expertises avaient été déclarées communes à la société Delphi Acoustique par ordonnance du 7 octobre 2005 et que les actes interruptifs de prescription accomplis par la société Touzet Gaillard avaient profité à la société Generali Vie ; qu'en statuant ainsi, alors que l'ordonnance de référé ayant rendu communes les opérations d'expertise à la société Delphi Acoustique à la demande de la société Touzet Gaillard n'avait pu produire d'effet interruptif à l'égard de la société Generali Vie, la cour d'appel a violé l'article 2244 du code civil ; 3/ Alors que le juge ne peut relever un moyen d'office sans avoir invité préalablement les parties à formuler leurs observations sur son bien-fondé ; qu'en l'espèce, la cour a retenu, pour juger que l'action exercée par la société Generali à l'encontre de la société Delphi Acoustique n'était pas prescrite, que le délai d'action ayant couru à compter de la réception avait été interrompu par la société Touzet Gaillard à l'initiative de laquelle les opérations d'expertise avaient été rendues communes à la société Delphi Acoustique, par ordonnance de référé du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, par un moyen qu'elle a relevé d'office, sans avoir invité préalablement les parties à formuler leurs observations, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ; 4/ Alors que n'est pas réparable le préjudice éventuel constitué par un simple risque tant qu'il ne s'est pas réalisé ; qu'en déclarant réparable au titre des troubles de voisinage « le fait pour le propriétaire de l'immeuble d'avoir à répondre envers les voisins d'émergences sonores excessives », sans constater l'existence d'une quelconque instance introduite par ces « voisins », la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance février 2016. DEUXIEME MOYEN DE CASSATION La société Delphi Acoustique fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause de la société Deseez Warwicker Partners, après avoir déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre cette société ; Alors que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, de sorte que pour une prescription en cours, le délai quinquennal issu de l'article 2224 du code civil ne peut commencer à courir que le 19 juin 2008 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre la société DWP par assignation du 18 juin 2013, en retenant que le point de départ du délai de prescription de l'action de la société Delphi Acoustique devait être situé à la date à laquelle elle avait été assignée en référé expertise, et qu'elle avait agi le 18 juin 2013 alors qu'elle avait été mise en cause par assignation devant le juge des référés ayant donné lieu à une ordonnance d'expertise commune du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors que le délai de prescription avait commencé à courir le 19 juin 2008, la cour d'appel a violé l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2224 du code civil. TROISIEME MOYEN DE CASSATION La société Delphi Acoustique fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir prononcé la mise hors de cause de la société Socotec Construction, après avoir déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre cette société ; Alors que les dispositions de la loi du 17 juin 2008 qui réduisent la durée de la prescription s'appliquent aux prescriptions à compter du jour de l'entrée en vigueur de cette loi, de sorte que pour une prescription en cours, le délai quinquennal issu de l'article 2224 du code civil ne peut commencer à courir que le 19 juin 2008 ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a déclaré irrecevable comme prescrit l'appel en garantie formé contre la société Socotec par assignation du 18 juin 2013, en retenant que le point de départ du délai de prescription de l'action de la société Delphi Acoustique devait être situé à la date à laquelle elle avait été assignée en référé expertise, et qu'elle avait agi le 18 juin 2013 alors qu'elle avait été mise en cause par assignation devant le juge des référés ayant donné lieu à une ordonnance d'expertise commune du 7 octobre 2005 ; qu'en statuant ainsi, alors que le délai de prescription avait commencé à courir le 19 juin 2008, la cour d'appel a violé l'article 26 de la loi du 17 juin 2008, ensemble l'article 2224 du code civil. QUATRIEME MOYEN DE CASSATION La société Delphi Acoustique fait grief à l'arrêt attaqué de l'avoir condamnée, à hauteur de 20 %, à garantir la société Nacarat des condamnations prononcées à son encontre ; Alors que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties ; qu'en l'espèce, la société Delphi Acoustique sollicitait la garantie de la société Nacarat pour avoir vendu des équipements non conformes à la réglementation et aux engagements pris dans l'acte de vente (concl. d'appel, p. 16) ; qu'en jugeant que la société Nacarat devait être intégralement garantie des condamnations prononcées à son encontre, sans répondre aux conclusions invoquant sa faute, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle Mme TEILLER, président Arrêt n° 27 F-D Pourvoi n° M 21-22.174 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Starlight, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° M 21-22.174 contre l'arrêt rendu le 1er juillet 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre 3-3), dans le litige l'opposant : 1°/ à la Caisse de crédit mutuel de Cannes centre Croisette, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée Caisse de crédit mutuel Cannes Les Allées, 2°/ à la société [U] [I] [Y], société civile professionnelle, dont le siège est [Adresse 3], anciennement dénommée société civile professionnelle [G] Marion [U], 3°/ à M. [T] [G], domicilié [Adresse 3], défendeurs à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat de la société Starlight, de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la Caisse de crédit mutuel de Cannes centre Croisette, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Désistement partiel 1. Il est donné acte à la société civile immobilière Starlight (la SCI) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société civile professionnelle [U] [I] [Y] et M. [G]. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 1er juillet 2021), par acte notarié du 5 janvier 2004, Mme [J] et M. [B] ont constitué la SCI, la première étant titulaire de cent trente-cinq parts sociales et le second, désigné en qualité de gérant, de quinze parts. Le 15 janvier 2004, la SCI a acquis un bien immobilier. 3. En 2007, la Caisse de crédit mutuel Cannes les Allées (la banque) a consenti à la SCI, représentée par son gérant, un prêt relais d'un montant de 384 000 euros, garanti par une inscription d'hypothèque sur le bien dont la SCI était propriétaire. 4. Les échéances du prêt n'ayant pas été réglées, la banque a, selon commandement de payer valant saisie du 2 juillet 2010, engagé une procédure de saisie immobilière à l'encontre de la SCI. 5. Mme [J], qui soutenait que les fonds avaient été détournés au profit de M. [B], a été désignée en qualité de nouvelle gérante. 6. La SCI a assigné la banque en radiation de l'hypothèque, puis a formé, des demandes d'annulation ou de déclaration d'inopposabilité du prêt et de tous les actes subséquents, notamment de l'inscription d'hypothèque. Examen du moyen Sur le moyen, pris en sa deuxième branche Enoncé du moyen 7. La SCI fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « qu'une société civile immobilière n'est pas tenue par les actes passés en son nom par son gérant, qui a détourné ses pouvoirs pour souscrire, dans son intérêt personnel, un prêt et affecter hypothécairement le seul immeuble de la société à son remboursement, actes de nature à compromettre son existence et donc contraire à son intérêt social ; que, pour estimer que la SCI Starlight avait été valablement engagée par son gérant envers la banque prêteuse de deniers, la cour d'appel s'est fondée sur les pouvoirs que lui conféraient ses statuts et sur la définition de son objet social, lesdits statuts ayant été « fournis » à la Caisse de Crédit mutuel par son gérant ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le détournement de pouvoir commis par le gérant pour souscrire le prêt litigieux dans son seul intérêt n'était pas contraire à l'intérêt social de la SCI Starlight, eu égard au montant du prêt souscrit et à l'inscription hypothécaire prise sur son seul immeuble, ce qui était de nature à compromettre son existence, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1849, alinéa 1, du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 1849, alinéa 1er, du code civil : 8. Selon ce texte, dans les rapports avec les tiers, le gérant engage la société pour les actes entrant dans l'objet social. 9. Les actes accomplis par le gérant ne peuvent engager la société si, étant de nature à compromettre son existence même, ils sont contraires à l'intérêt social, y compris lorsqu'ils entrent dans son objet statutaire. 10. Pour rejeter les demandes de la SCI, l'arrêt retient qu'il n'est pas établi que, lors de la conclusion de la convention, la banque pouvait avoir connaissance de la fraude réalisée par celui qui était alors réellement le gérant statutairement désigné, que les actes litigieux entrent dans l'objet social défini par les statuts et que la SCI, qui ne saurait se référer, pour invoquer l'intérêt social, à des dispositions qui ne concernent que les rapports entre associés, n'est pas fondée à solliciter la nullité du prêt immobilier conclu avec la banque. 11. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si le prêt souscrit n'était pas contraire à l'intérêt social de la SCI, eu égard au montant de l'emprunt et à l'inscription hypothécaire prise sur son seul immeuble, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour : CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déclare irrecevable la mise en cause en appel de M. [G] et de la société civile professionnelle [U] [I] [Y], l'arrêt rendu le 1er juillet 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Condamne la Caisse de crédit mutuel Cannes les Allées aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Caisse de crédit mutuel Cannes les Allées et la condamne à payer à la société civile immobilière Starlight la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYEN ANNEXE au présent arrêt Moyen produit par la SARL Cabinet Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour la société Starlight La SCI Starlight fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué de l'avoir déboutée de l'ensemble de ses demandes ; Alors 1°) que le mandant n'est pas tenu des actes faits par son mandataire au-delà du pouvoir qui lui a été donné, l'acte ainsi conclu lui étant inopposable, ce qui est le cas du prêt souscrit au nom d'une société civile immobilière par son gérant, au moyen d'un détournement de pouvoirs, dans son seul intérêt personnel, et de l'affectation hypothécaire du seul immeuble détenu par la société au remboursement dudit prêt ; que, pour estimer que la SCI Starlight avait été valablement engagée par son gérant envers la banque prêteuse de deniers, la cour d'appel s'est fondée sur les pouvoirs que lui conféraient ses statuts et sur la définition de son objet social, lesdits statuts – falsifiés – ayant été « fournis » à la Caisse de Crédit mutuel par son gérant ; qu'en statuant ainsi, sans se prononcer sur le détournement de pouvoirs invoqué par la SCI Starlight, dont le gérant avait agi dans son seul intérêt personnel, ce qui ressortait des propres termes de la plainte pour faux, usage de faux et abus de confiance, déposée par la Caisse de Crédit mutuel contre celui-ci, mentionnant que « M. [B] a fourni des statuts falsifiés afin d'obtenir (?) un prêt consenti au nom de la SCI Starlight dont il appert qu'il n'était finalement qu'un associé minoritaire (?) ; également, les paraphes et signatures ont été falsifiés sur l'ensemble des pages des statuts remis ; il ne fait aucun doute que M. [B] est à l'origine de la falsification dans la mesure où ledit prêt litigieux lui profite directement » (concl., p. 18 s.), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1998 du code civil ; Alors 2°) qu'une société civile immobilière n'est pas tenue par les actes passés en son nom par son gérant, qui a détourné ses pouvoirs pour souscrire, dans son intérêt personnel, un prêt et affecter hypothécairement le seul immeuble de la société à son remboursement, actes de nature à compromettre son existence et donc contraire à son intérêt social ; que, pour estimer que la SCI Starlight avait été valablement engagée par son gérant envers la banque prêteuse de deniers, la cour d'appel s'est fondée sur les pouvoirs que lui conféraient ses statuts et sur la définition de son objet social, lesdits statuts ayant été « fournis » à la Caisse de Crédit mutuel par son gérant ; qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le détournement de pouvoir commis par le gérant pour souscrire le prêt litigieux dans son seul intérêt n'était pas contraire à l'intérêt social de la SCI Starlight, eu égard au montant du prêt souscrit et à l'inscription hypothécaire prise sur son seul immeuble, ce qui était de nature à compromettre son existence (concl., p. 21-22), la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1849, alinéa 1, du code civil ; Alors 3°) et en toute hypothèse que le caractère illicite du motif déterminant du contrat en entraine l'annulation pour cause illicite ; que, pour refuser d'annuler le prêt litigieux et l'affectation hypothécaire prise sur l'immeuble appartenant à la SCI Starlight, la cour d'appel a énoncé que « la cause du prêt, destiné à la réalisation d'une opération immobilière, ne saurait être qualifiée d'illicite » ; qu'en se bornant ainsi à envisager objectivement la cause du prêt litigieux, sans prendre en considération l'illicéité de son motif déterminant, invoquée devant elle, à savoir la volonté frauduleuse de son gérant de souscrire un prêt dans son propre intérêt, en méconnaissance de l'intérêt social de la SCI Starlight, pour détourner à son profit les sommes empruntées, la cour d'appel a violé les articles 1131 et 1133 du code civil, dans leurs rédactions antérieures à celles issues de l'ordonnance du 10 février 2016.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation partielle Mme TEILLER, président Arrêt n° 26 F-D Pourvois n° P 21-23.786 U 21-23.791 JONCTION R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 I- Mme [F] [E], domiciliée [Adresse 3], a formé le pourvoi n° P 21-23.786 contre un arrêt rendu le 2 septembre 2021 par la cour d'appel de Paris (pôle 4 - chambre 7), dans le litige l'opposant à la Société de requalification des quartiers anciens (SOREQA), société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation. II- La Société de requalification des quartiers anciens, a formé le pourvoi n° U 21-23.791 contre le même arrêt rendu, dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [F] [E], 2°/ au commissaire du gouvernement représenté par le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris, domicilié [Adresse 4], défendeurs à la cassation. La demanderesse au pourvoi n° P 21-23.786 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. La demanderesse au pourvoi n° U 21-23.791 invoque, à l'appui de son recours, le moyen de cassation annexé au présent arrêt. Les dossiers ont été communiqués au procureur général. Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, les observations de la SCP Foussard et Froger, avocat de la Société de requalification des quartiers anciens, de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de Mme [E], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Jonction 1. En raison de leur connexité, les pourvois n° P 21-23.786 et U 21-23.791 sont joints. Faits et procédure 2. L'arrêt attaqué (Paris, 2 septembre 2021) fixe les indemnités revenant à Mme [E], à la suite de l'expropriation, au profit de la Société de requalification des quartiers anciens (la SOREQA), de plusieurs lots de copropriété lui appartenant. Examen des moyens Sur le second moyen du pourvoi de Mme [E] et sur le moyen du pourvoi de la SOREQA, ci-après annexés 3. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le second moyen du pourvoi de Mme [E], qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation, et sur le moyen du pourvoi de la SOREQA, qui est irrecevable. Mais sur le premier moyen du pourvoi de Mme [E] Enoncé du moyen 4. Mme [E] fait grief à l'arrêt de fixer comme il le fait les indemnités dues par la SOREQA au titre de la dépossession du lot n° 24 de l'immeuble sis [Adresse 1], alors « que la juridiction qui fixe le montant des indemnités d'expropriation doit tenir compte de la situation locative de l'immeuble à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété et, le cas échéant, de la nature juridique de l'occupation ; que, pour fixer l'indemnité d'expropriation du lot n° 24 en valeur occupée, avec le même abattement de 20 % que pour le lot n° 29 loué, l'arrêt attaqué a retenu que la décision d'expulsion était indifférente et que l'occupant avait accepté un relogement de la part de l'expropriante ; qu'en refusant ainsi de tenir compte de la nature juridique de l'occupation, sans droit ni titre, excluant toute obligation de relogement à la charge de l'expropriante, la cour d'appel a violé les articles L. 321-1 et L. 322-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. » Réponse de la Cour Vu les articles L. 321-1 et L. 322-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique : 5. Aux termes du premier de ces textes, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation. 6. Selon le second, le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété. 7. Pour fixer un abattement identique sur la valeur du lot numéro 24, occupé sans droit ni titre, et sur celle du lot numéro 29, faisant l'objet d'une location, l'arrêt retient qu'à la date de l'ordonnance d'expropriation, le lot numéro 24 était occupé, la décision d'expulsion étant indifférente, et qu'il convient de fixer un abattement habituel de 20 %. 8. En statuant ainsi, alors que l'abattement ne peut être le même selon que le bien exproprié est occupé en vertu d'un titre ouvrant droit à un relogement, ou fait l'objet d'une occupation sans droit ni titre ne conférant pas un tel droit, la cour d'appel a violé les textes susvisés. PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il fixe l'indemnité due à Mme [E] pour la dépossession du lot numéro 24 à la somme de 35 280 euros au titre de l'indemnité principale en valeur vénale occupée et à la somme de 4 528 euros au titre de l'indemnité de remploi, l'arrêt rendu le 2 septembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; Remet, sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ; Condamne la Société de requalification des quartiers anciens aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la Société de requalification des quartiers anciens et la condamne à payer à Mme [E] la somme de 3 000 euros ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits au pourvoi n° P 21-23.786 par la SARL Le Prado - Gilbert, avocat aux Conseils, pour Mme [E] PREMIER MOYEN DE CASSATION Mme [F] [E] reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé l'indemnité lui étant due par la SOREQA au titre de la dépossession foncière du lot n° 24 de l'immeuble sis [Adresse 1] à 35 280 euros en valeur vénale occupée au titre de l'indemnité principale et 4 528 euros au titre de l'indemnité de remploi ; ALORS QUE la juridiction qui fixe le montant des indemnités d'expropriation doit tenir compte de la situation locative de l'immeuble à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété et, le cas échéant, de la nature juridique de l'occupation ; que, pour fixer l'indemnité d'expropriation du lot n° 24 en valeur occupée, avec le même abattement de 20 % que pour le lot n° 29 loué, l'arrêt attaqué a retenu que la décision d'expulsion était indifférente et que l'occupant avait accepté un relogement de la part de l'expropriante ; qu'en refusant ainsi de tenir compte de la nature juridique de l'occupation, sans droit ni titre, excluant toute obligation de relogement à la charge de l'expropriante, la cour d'appel a violé les articles L. 321-1 et L. 322-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique. SECOND MOYEN DE CASSATION Mme [F] [E] reproche à l'arrêt attaqué D'AVOIR fixé l'indemnité due par la SOREQA lui revenant au titre de la dépossession foncière des lots n° 24, 25, 26, 27 et 29 de l'immeuble sis [Adresse 1] comme suit : - Lot n° 24 : indemnité principale 35 280 euros en valeur vénale occupée Indemnité de remploi : 4 528 euros - Lot n° 25 : indemnité principale 56 000 euros en valeur vénale libre Indemnité de remploi : 6 600 euros - Lot n° 26 : indemnité principale 58 800 euros en valeur vénale libre Indemnité de remploi : 6 880 euros - Lot n° 27 : indemnité principale 84 700 euros en valeur vénale libre Indemnité de remploi : 9 470 euros - Lot n° 29 : indemnité principale 29 120 euros en valeur vénale occupée Indemnité de remploi : 3 912 euros. 1°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé, et la contradiction entre les motifs équivaut à un défaut de motifs ; que la cour d'appel, pour fixer les indemnités principales et les indemnités de remploi revenant à Mme [E], sur la base d'une valeur libre de 7 000 euros le mètre carré, a pris en considération la moyenne des seuls cinq termes de références proposés par le commissaire du gouvernement, soit 7 137,20 euros le mètre carré, inférieurs à ceux produits par Mme [E] aboutissant une moyenne de 11 026,41 euros par mètre carré pour des biens libres d'occupation, en retenant que les références de Mme [E] ne correspondaient pas à la totalité du marché au regard des références du commissaire du gouvernement et devaient être adaptées aux caractéristiques particulières des lots de celle-ci ; qu'en statuant ainsi, tout en énonçant que « les références invoquées par Mme [E] seront retenues comme étant comparables », la cour d'appel, qui s'est contredite, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ; 2°) ALORS QUE tout jugement doit être motivé ; que, pour fixer les indemnités principales et les indemnités de remploi revenant à Mme [E] sur la base d'une valeur libre de 7 000 euros le mètre carré, la cour d'appel a pris en considération la moyenne des seuls cinq termes de références proposés par le commissaire du gouvernement, soit 7 137,20 euros le mètre carré, inférieurs à ceux produits par Mme [E] aboutissant une moyenne de 11 026,41 euros par mètre carré pour des biens libres d'occupation ; qu'en statuant ainsi sans expliquer en quoi les cinq références du commissaire du gouvernement étaient toutes préférables aux dix références retenues de Mme [E] au regard des éléments de plus-value et facteurs de dépréciation pris en considération, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile. Moyen produit au pourvoi n° U 21-23.791 par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la Société de requalification des quartiers anciens L'arrêt attaqué par la société SOREQA encourt la censure ; EN CE QU'il a fixé l'indemnité due par la société SOREQA à Mme [F] [E], pour le lot n° 24 de l'immeuble du [Adresse 1], à la somme de 35.280 euros au titre de l'indemnité principale et de 4.528 euros au titre l'indemnité de remploi, et pour le lot n° 29 de cet immeuble, à la somme de 29.120 euros au titre de l'indemnité principale, et de 3.912 euros au titre de l'indemnité de remploi ; ALORS QU'en application de la procédure de résorption de l'habitat insalubre, lorsque le bien est visé par un arrêté de péril, un arrêté de mise en sécurité ou un arrêté de traitement de l'insalubrité, et qu'il a été prescrit sa démolition ou une interdiction définitive d'habiter, l'indemnité d'expropriation doit correspondre à la valeur du terrain nu, déduction faite des frais de démolition ; que lorsque la procédure d'expropriation, engagée sur le fondement du droit commun, concerne à la fois des biens frappés d'insalubrité et d'autres logements salubres, les juges doivent mettre en oeuvre cette méthode d'évaluation à l'égard des biens insalubres ; qu'en l'espèce, il ressort des propres constatations des juges que les lots n° 24 et 29 avaient fait l'objet d'un arrêté d'insalubrité portant interdiction définitive d'habiter ; qu'en décidant néanmoins de faire application, pour l'évaluation de ces lots, de la méthode par comparaison, quand il résultait de ces constatations que ces deux lots ne pouvaient être évalués que selon la méthode de la récupération foncière, la cour d'appel a violé les articles L. 511-1 et L. 511-6 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rectification d'erreur matérielle Mme TEILLER, président Arrêt n° 34 F-D Requête n° K 19-14.253 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La troisième chambre civile de la Cour de cassation, se saisissant d'office, conformément à l'article 462 du code de procédure civile, d'une rectification d'erreur matérielle de l'arrêt n° 240 F-D rendu le 19 mars 2020 par la troisième chambre civile de la Cour de cassation sur le pourvoi n° K 19-14.253 en cassation d'une ordonnance rendue le 25 janvier 2019 par le juge de l'expropriation du département de la Drôme siégeant au tribunal de grande instance de Valence ; Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Djikpa, conseiller référendaire, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Djikpa, conseiller référendaire rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen et Mme Besse, greffier de chambre, Vu les avis donnés aux parties ; Vu les articles 461 et 462 du code de procédure civile ; La troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. 1. Selon le premier de ces textes, il appartient à tout juge d'interpréter sa décision si elle n'est pas frappée d'appel. 2. Selon le second, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande. Le juge est saisi par simple requête de l'une des parties, ou par requête commune ; il peut aussi se saisir d'office. 3. M. [Y] a déposé une requête en interprétation de l'arrêt n° 240 F-D du 19 mars 2020, pourvoi n° K 19-14.253, afin qu'il soit dit qu'il doit s'interpréter comme ayant condamné le département de la Drôme, ou subsidiairement, le préfet de la Drôme, aux dépens et au paiement d'une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. 4. Les énonciations de l'arrêt, qui « condamne le département de la Drôme » ne présentent aucune ambiguïté, de sorte qu'il n'y a pas lieu à interprétation. 5. Toutefois, une erreur matérielle a été commise dans la rédaction de l'arrêt en ce qu'il condamne le département de la Drôme aux dépens et au paiement d'une indemnité de procédure, alors que cette demande était formée contre la commune de Saint-Julien-en-Vercors, bénéficiaire de l'ordonnance attaquée, et que le département de la Drôme n'était pas partie à l'instance. 6. Il y a lieu de réparer cette erreur. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE la requête en interprétation ; RECTIFIE l'arrêt n° 240 F-D rendu le 19 mars 2020 ; Dit que, en son dispositif, « condamne le département de la Drôme » est remplacé par « condamne la commune de Saint-Julien-en-Vercors » ; Laisse les dépens à la charge du Trésor public ; Dit que le présent arrêt sera transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt rectifié ; Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 SG COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Cassation Mme TEILLER, président Arrêt n° 25 F-D Pourvoi n° F 21-16.143 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La société Golf - Resort "Terre Blanche", société par actions simplifiée unipersonnelle, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° F 21-16.143 contre l'arrêt rendu le 9 mars 2021 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (chambre1-1), dans le litige l'opposant : 1°/ à M. [B] [K], 2°/ à Mme [X] [G], épouse [K], tous deux domiciliés [Adresse 1] (Royaume-Uni), 3°/ à la société [N] [U]-[A] [Y] notaires associés d'une société d'exercice libéral par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], anciennement dénommée [V] [Z] [T]-[N] [U] notaires associés, 4°/ à M. [V] [Y], 5°/ à Mme [P] [T], 6°/ à M. [N] [U], tous trois domiciliés [Adresse 2], défendeurs à la cassation. M. et Mme [K] ont formé, par un mémoire déposé au greffe, un pourvoi incident éventuel et un pourvoi provoqué éventuel contre le même arrêt ; La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, un moyen de cassation annexé au présent arrêt ; Les demandeurs au pourvoi incident et provoqué invoquent, à l'appui de chaque recours, un moyen de cassation annexés au présent arrêt ; Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Abgrall, conseiller, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Golf - Resort Terre Blanche, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [N] [U]-[A] [Y] notaires associés, de M. [Y], de Mme [T], de M. [U], de la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat de M. et Mme [K], après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, Mme Abgrall, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Désistement partiel 1. Il est donné acte à la société Golf Resort Terre Blanche (la société GRTB) du désistement de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société d'exercice libéral par actions simplifiée [N] [U] - [A] [Y], M. [Y], Mme [T] et M. [U]. Faits et procédure 2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 9 mars 2021), par acte authentique du 24 juin 2005, la société GRTB a vendu à M. et Mme [K] une parcelle dépendant du domaine de Terre Blanche et le droit de bâtir une surface hors oeuvre nette de 445 m² moyennant le prix de 1 400 000 euros. 3. Cette parcelle est située dans le périmètre de la zone d'aménagement concerté de Terre Blanche dont la société GRTB est l'aménageur et qui a fait l'objet d'un cahier des charges de cession des terrains (CCCT) le 6 décembre 2001, publié le 2 septembre 2002. 4. Par acte du 18 mai 2015, la société GRTB, exposant que M. et Mme [K] n'avaient pas respecté les délais de dépôt de leur demande de permis de construire et d'achèvement des travaux prévus à l'article 7 de ce cahier des charges, les a assignés en paiement de la clause pénale prévue à l'article 8 du CCCT. 5. M. et Mme [K] ont appelé en garantie la société civile professionnelle [V] [Z] [T]- [N] [U], devenue la société d'exercice libéral par actions simplifiée [N] [U] - [A] [Y], et M. [Y], Mme [T] et M. [U], notaires. Examen des moyens Sur le moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal Enoncé du moyen 6. La société GRTB fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors « qu'un acte a valeur contractuelle dès lors que les parties en ont ainsi convenu et que cet acte a été communiqué à chacune des parties ; que pour dire que l'article 8 du Cahier des Charges de Cession des Terrains, prévoyant le versement d'une indemnité par l'acquéreur en cas de non-respect des délais imposés pour le dépôt du permis de construire et l'achèvement des travaux, ne pouvait être opposé aux époux [K], la cour d'appel a retenu que le préambule de ce cahier des charges prévoyait que ses prescriptions seraient « insérées intégralement par les soins du notaire ou de la partie la plus diligente » dans tout acte de vente, et a considéré que « le justificatif de la remise d'un exemplaire du cahier des charges de cession des terrains avec son annexe au représentant des acquéreurs n'est pas suffisant, au regard de l'exigence posée par le cahier des charges de cession des terrains lui-même », de même que la référence au Cahier des Charges de la ZAC figurant aux pages 5, 60 et 69 de l'acte de vente, et la mention en page 98, une clause pénale devant être stipulée de manière claire et apparente dans l'acte lui-même ; qu'en statuant de la sorte, quand l'acte de vente stipulait que la vente avait lieu aux charges et conditions résultant notamment du Cahier des Charges de Cession des Terrains, l'acquéreur, qui avait reconnu avoir reçu copie de ce cahier des charges, s'étant engagé à en exécuter toutes les obligations en résultant, ce qui implique que l'ensemble des clauses du cahier des charges avaient valeur contractuelle, nonobstant l'absence de reprise in extenso dans l'acte de vente, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2015 (désormais l'article 1103 du code civil, ensemble l'article L. 311-6 du code de l'urbanisme. » Réponse de la Cour Vu l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 : 7. Selon ce texte, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. 8. Pour déclarer l'article 8 du CCCT inopposable à M. et Mme [K], l'arrêt retient que le préambule de ce document établi par acte notarié prévoit que les prescriptions qu'il contient seront insérées intégralement par les soins du notaire ou de la partie la plus diligente, dans tout acte translatif de propriété, qu'il s'agisse d'une première cession ou de cessions successives, que si l'acte authentique de vente du 24 juin 2005 reproduit en page 6 l'article 7 du CCCT fixant les délais pour obtenir le permis de construire et terminer la construction, l'article 8 déterminant la clause pénale n'y figure pas, que l'acte de vente ne mentionne l'annexion d'aucun document et qu'une clause pénale doit être stipulée de manière claire et apparente dans l'acte lui même. 9. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté, d'une part, que l'acte de vente du 24 juin 2005 contenait en page 98 la mention selon laquelle l'acquéreur déclarait, avoir parfaite connaissance des clauses et conditions contenues dans le CCCT, des statuts de l'association syndicale libre du domaine de Terre Blanche et du cahier des charges du règlement de l'ensemble immobilier du domaine de Terre Blanche, adhérer aux clauses et conditions desdits documents, et s'obliger à en exécuter toutes les obligations en résultant et, d'autre part, qu'il était justifié qu'un exemplaire de ce document avait été remis au représentant de M. et Mme [K], la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé. Sur le moyen du pourvoi incident éventuel Enoncé du moyen 10. M et Mme [K] font grief à l'arrêt de déclarer recevable la demande de la société GRTB, alors « que l'action en paiement d'une clause pénale, clause qui a pour objet de fixer par avance le montant des dommages-intérêts dus par l'une des parties en cas d'inexécution de ses obligations contractuelles, n'est pas une action réelle immobilière, peu important que l'obligation dont elle sanctionne l'inexécution soit de nature réelle, en sorte qu'elle ne saurait être soumise au délai de prescription trentenaire applicable aux actions réelles immobilières ; qu'en retenant néanmoins, pour déclarer recevable l'action de la société Golf Resort « Terre Blanche » en paiement de la clause pénale prévue par l'article 8 du cahier des charges de cession des terrains, que cette action est liée à l'inexécution d'une obligation contractuelle réelle, consistant en l'obligation de construire dans un certain délai, et relève ainsi de la prescription trentenaire, la cour d'appel a violé l'article 1152 alinéa 1er du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-5 du même code, ensemble les articles 2224 et 2227 du code civil. » Réponse de la Cour Vu l'article 2224 du code civil : 11. Aux termes de ce texte, les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer. 12. Pour déclarer recevable l'action de la société GRTB, l'arrêt retient que l'obligation de construire dans un certain délai est une charge imposée à un lot pour l'usage et l'utilité des autres lots dont les propriétaires ne veulent pas subir trop longtemps les inconvénients liés aux travaux, et donc une servitude à caractère réel et immobilier, qu'il s'agit d'une obligation commune à tous les acquéreurs incluse dans un cahier des charges et non d'une obligation à caractère personnel spécialement souscrite dans l'acte d'acquisition, et que l'action en paiement d'une clause pénale liée à l'inexécution de cette obligation contractuelle réelle, relève de la prescription trentenaire. 13. En statuant ainsi, alors que la demande en paiement d'une clause pénale, qui ne tend qu'au paiement de dommages-intérêts dont le montant a été forfaitairement prévu au contrat, est de nature personnelle, quelle que soit la nature de l'obligation dont la clause sanctionne le non-respect, la cour d'appel a violé le texte susvisé. Et sur le moyen du pourvoi provoqué éventuel Enoncé du moyen 14. M et Mme [K] font grief à l'arrêt de déclarer sans objet le recours en garantie exercé contre la société d'exercice libéral par actions simplifiée [N] [U] - [A] [Y], M. [Y], Mme [T] et M. [U], alors « que l'éventuelle cassation à intervenir de l'arrêt en ce qu'il a débouté la société Golf Resort « Terre Blanche » de ses demandes dirigées contre les époux [K] ainsi que le rejet du pourvoi incident portant sur la prescription de l'action ou une cassation ordonnée avec renvoi sur le fondement de ce pourvoi incident, entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif ayant déclaré sans objet le recours en garantie formé par ces derniers à l'encontre des notaires, en application de l'article 624 du code de procédure civile. » Réponse de la Cour Vu l'article 624 du code de procédure civile : 15. Aux termes de ce texte, la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l'arrêt qui la prononce. Elle s'étend également à l'ensemble des dispositions du jugement cassé ayant un lien d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire. 16. La cassation, prononcée sur le moyen du pourvoi principal et sur celui du pourvoi incident éventuel, entraîne la cassation, par voie de conséquence, du chef de dispositif déclarant sans objet le recours en garantie exercé par M. et Mme [K] contre la société d'exercice libéral par actions simplifiée [N] [U] - [A] [Y], M. [Y], Mme [T] et M. [U], qui entretient un lien de dépendance nécessaire avec les chefs de dispositif cassés. PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du moyen du pourvoi principal, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 mars 2021, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence autrement composée ; Laisse à chacune des parties la charge des dépens par elle exposés ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes. Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat aux Conseils, pour la société Golf - Resort Terre Blanche La société GRTB fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté ses demandes dirigées contre les époux [K], 1°) ALORS QU' un acte a valeur contractuelle dès lors que les parties en ont ainsi convenu et que cet acte a été communiqué à chacune des parties ; que pour dire que l'article 8 du Cahier des Charges de Cession des Terrains, prévoyant le versement d'une indemnité par l'acquéreur en cas de non-respect des délais imposés pour le dépôt du permis de construire et l'achèvement des travaux, ne pouvait être opposé aux époux [K], la cour d'appel a retenu que le préambule de ce cahier des charges prévoyait que ses prescriptions seraient " insérées intégralement par les soins du notaire ou de la partie la plus diligente " dans tout acte de vente, et a considéré que " le justificatif de la remise d'un exemplaire du cahier des charges de cession des terrains avec son annexe au représentant des acquéreurs n'est pas suffisant, au regard de l'exigence posée par le cahier des charges de cession des terrains lui-même ", de même que la référence au Cahier des Charges de la ZAC figurant aux pages 5, 60 et 69 de l'acte de vente, et la mention en page 98, une clause pénale devant être stipulée de manière claire et apparente dans l'acte lui-même ; qu'en statuant de la sorte, quand l'acte de vente stipulait que la vente avait lieu aux charges et conditions résultant notamment du Cahier des Charges de Cession des Terrains, l'acquéreur, qui avait reconnu avoir reçu copie de ce cahier des charges, s'étant engagé à en exécuter toutes les obligations en résultant, ce qui implique que l'ensemble des clauses du cahier des charges avaient valeur contractuelle, nonobstant l'absence de reprise in extenso dans l'acte de vente, la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2015 (désormais l'article 1103 du code civil, ensemble l'article L. 311-6 du code de l'urbanisme ; 2°) ALORS, DE SURCROÎT, QUE le Cahier des Charges de Cession des Terrains se bornait à indiquer dans son préambule que " les prescriptions du présent Cahier des Charges de Cession des Terrains seront insérées intégralement par les soins du notaire ou de la partie la plus diligente, dans tout acte translatif de propriété ou locatif des terrains ou des constructions, qu'il s'agisse soit d'une première cession ou location, soit de cessions ou de locations successives " sans prévoir de sanction en cas d'inexécution de cette clause ni exclure que l'incorporation des clauses du cahier des charges au contrat translatif de propriété puisse prendre la forme d'une mention dans cet acte, accompagnée de la remise du cahier des charges à l'acquéreur ; qu'en jugeant néanmoins que faute de retranscription de l'article 8 du Cahier des Charges dans l'acte de vente lui-même, cet article n'était pas opposable aux époux [K], la cour d'appel a derechef violé l'article 1134 (désormais 1103) du code civil, ensemble l'article L. 311-6 du code de l'urbanisme ; 3°) ALORS EN TOUT ETAT DE CAUSE QU' en déduisant l'inopposabilité de l'article 8 du Cahier des Charges de Cession des Terrains aux époux [K] du non-respect de la clause de ce cahier des charges prévoyant que les prescriptions de ce dernier seraient insérées intégralement par les soins du notaire ou de la partie la plus diligente, dans tout acte translatif de propriété ou locatif des terrains ou des constructions, la cour d'appel a violé l'article 1134 (désormais 1103) du code civil. Moyen produit au pourvoi incident éventuel par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [K] Les époux [K] font grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR infirmé le jugement déféré en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes formées par la SAS Golf Resort " Terre Blanche " et, statuant à nouveau de ce chef, d'AVOIR déclaré recevables les demandes formées par la société Golf Resort " Terre Blanche " ; ALORS QUE l'action en paiement d'une clause pénale, clause qui a pour objet de fixer par avance le montant des dommages-intérêts dus par l'une des parties en cas d'inexécution de ses obligations contractuelles, n'est pas une action réelle immobilière, peu important que l'obligation dont elle sanctionne l'inexécution soit de nature réelle, en sorte qu'elle ne saurait être soumise au délai de prescription trentenaire applicable aux actions réelles immobilières ; qu'en retenant néanmoins, pour déclarer recevable l'action de la société Golf Resort " Terre Blanche " en paiement de la clause pénale prévue par l'article 8 du cahier des charges de cession des terrains, que cette action est liée à l'inexécution d'une obligation contractuelle réelle, consistant en l'obligation de construire dans un certain délai, et relève ainsi de la prescription trentenaire, la cour d'appel a violé l'article 1152 alinéa 1er du code civil dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, devenu l'article 1231-5 du même code, ensemble les articles 2224 et 2227 du code civil. Moyen produit au pourvoi provoqué éventuel par la SCP Claire Leduc et Solange Vigand, avocat aux Conseils, pour M. et Mme [K] Les époux [K] font grief à l'arrêt attaqué, confirmatif sur ce point, d'AVOIR déclaré sans objet le recours en garantie qu'ils ont exercé à l'encontre de la société [N] [U] - [A] [Y] notaires associés, anciennement dénommée [V] [Y] - [P] [T] - [N] [U] notaires associés, de Me [V] [Y], de Me [P] [T] et de Me [N] [U] ; ALORS QUE l'éventuelle cassation à intervenir de l'arrêt en ce qu'il a débouté la société Golf Resort " Terre Blanche " de ses demandes dirigées contre les époux [K] ainsi que le rejet du pourvoi incident portant sur la prescription de l'action ou une cassation ordonnée avec renvoi sur le fondement de ce pourvoi incident, entraînera la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif ayant déclaré sans objet le recours en garantie formé par ces derniers à l'encontre des notaires, en application de l'article 624 du code de procédure civile.
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LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 3 JL COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rejet Mme TEILLER, président Arrêt n° 24 F-D Pourvoi n° G 21-23.735 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 Mme [W] [J], épouse [Z], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° G 21-23.735 contre l'arrêt rendu le 8 juillet 2021 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 1), dans le litige l'opposant : 1°/ à Mme [K] [M], domiciliée [Adresse 1], 2°/ à la société Liberté 25, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 3], défenderesses à la cassation. La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Boyer, conseiller, les observations de la SARL Cabinet Briard, avocat de Mme [J], de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de Mme [M] et de la société Liberté 25, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents Mme Teiller, président, M. Boyer, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre, la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Faits et procédure 1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 8 juillet 2021), par acte du 14 novembre 2014, Mme [M] a donné à bail commercial un local à usage de bureaux à Mme [J], agissant tant à titre personnel qu'au nom et pour le compte de la société Esthetic formation que celle-ci se réservait de constituer ultérieurement, le bail comportant une clause de substitution au bénéfice de la société dès son immatriculation au registre du commerce et des sociétés et Mme [J] se portant caution solidaire des engagements de la société Esthetic formation à l'égard de la bailleresse. 2. La société Esthetic formation a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 20 mai 2015. 3. Le 17 mai 2018, la bailleresse a délivré à la société Esthetic formation un commandement de payer les loyers échus, visant la clause résolutoire, dénoncé à Mme [J] en sa qualité de caution. 4. Par jugement du 11 juin 2018, la société Esthetic formation a été mise en redressement judiciaire. 5. Le 24 juillet 2018, un second commandement de payer, visant la clause résolutoire, a été délivré à M. [N], pris en sa qualité de mandataire judiciaire. 6. Par jugement du 14 novembre 2018, la procédure ouverte à l'égard de la société Esthetic formation a été convertie en liquidation judiciaire et M. [N], agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire, a notifié à la bailleresse la résiliation du bail commercial pour le compte exclusif de la société sous procédure collective. 7. Par lettre du 15 novembre 2018, Mme [J], se prévalant de la qualité de preneur du local commercial, a revendiqué le bénéfice du pacte de préférence stipulé au contrat de bail, en cas de vente de l'immeuble. 8. Le 10 janvier 2019, Mme [J] a été expulsée des locaux donnés à bail. 9. Sur assignation en référé délivrée par Mme [J] aux fins de voir constater sa qualité de locataire et la voie de fait dont elle s'estimait victime, par arrêt infirmatif du 23 mai 2019, la cour d'appel a dit que la qualité de locataire de celle-ci se heurtait à une contestation sérieuse, que son expulsion constituait une voie de fait et a ordonné sa réintégration sous astreinte. 10. Par acte du 5 juin 2019, Mme [M] et la société civile immobilière Liberté 25, qui avait acquis les locaux litigieux par acte du 22 mars 2019, ont assigné Mme [J] aux fins, notamment, de voir juger que seule la société Esthetic formation était titulaire du bail commercial et bénéficiaire du pacte de préférence. Mme [J] a sollicité, reconventionnellement, la nullité de la vente intervenue en méconnaissance du pacte de préférence stipulé en sa faveur et réparation de ses préjudices. Examen des moyens Sur le premier moyen Enoncé du moyen 11. Mme [J] fait grief à l'arrêt de dire qu'elle n'a pas la qualité de preneur ou de co-preneur, de dire, en conséquence, qu'elle ne peut revendiquer à son profit le pacte de préférence stipulé au contrat de bail et de rejeter ses demandes reconventionnelles relatives à la nullité de la vente, alors : « 1°/ que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis, qu' aux termes de l'article B-21 du bail commercial conclu le 14 novembre 2014 : « Les parties conviennent qu'en cas de mise en vente par Mme [K] [M], propriétaire de l'immeuble objet des présentes, Mme [W] [Z] aura priorité et préférence pour l'acquisition dudit immeuble, à prix égal à toute offre sincère et réelle qui serait faite à Mme [K] [M] ou ses représentants, et acceptés par eux. L'offre obtenue devra être signifiée à Mme [W] [Z] ou ses ayants-droit, preneur aux présentes, par lettre recommandée avec accusé de réception, dont copie sera adressée également à la société Sergic, négociateur et rédacteur des présentes, ou par ministère d'huissier de justice. Mme [W] [Z], preneur, aura un délai de quinze jours à compter de la date d'expédition de la lettre recommandée ou de la signification par acte extrajudiciaire pour prendre parti, tant directement qu'indirectement. En cas de non réponse dans le délai indiqué, Mme [W] [Z] sera réputée ne pas donner suite et renoncer à cet achat et Mme [K] [M] ou ses représentants pourraient réaliser la vente de l'immeuble à qui bon leur semblerait au prix signifié. En cas d'acceptation soit par lettre recommandée avec accusé de réception, postée dans les délais, soit par ministère d'huissier de justice dans les délais également, Mme [W] [Z] alors acquéreur, devra consigner dans le délai de dix jours de leur acceptation chez le notaire désigné par Mme [K] [M] dans leur signification, une somme égale à 10 % du prix et ce, à titre d'arrhes, dans les termes de l'article 1590 du code civil, le solde du prix et la totalité des frais d'actes seront régularisés à première demande du notaire. Les honoraires de négociation, qui seront dans ce cas dus à la société Sergic Entreprises, seront à la charge de l'acquéreur à hauteur de 5 % hors taxes du prix de vente et payables à la signature des actes authentiques » ; qu'en énonçant que « certes, Mme [Z] a pu tirer de cette formulation la conclusion que le bail lui offrait le bénéfice du pacte de préférence, ceci est cependant en contradiction avec la commune intention des parties d'investir la société Esthetic formation seule du bénéfice du bail après son immatriculation et incompatible avec l'absence de qualité de copreneur » quand Mme [W] [J], épouse [Z], était expressément désignée comme bénéficiaire du pacte de préférence, la cour d'appel a dénaturé la clause B-21 du bail conclu le 14 novembre 2014 et a violé le principe susvisé ; 2°/ qu'en matière de bail commercial la cotitularité du bail n'est subordonnée à aucune stipulation expresse en ce sens ; qu'en déniant à Mme [W] [J], épouse [Z], la qualité de preneur au bail aux motifs « qu'en l'absence de disposition légale relative à la cotitularité dans le régime des baux commerciaux, celle-ci ne peut résulter que d'une disposition expresse du bail », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble l'article 1714 du même code ; 3°/ qu'il ressort des constatations de l'arrêt que « le bail commercial du 14 novembre 2014 a été régularisé entre, d'une part, Mme [K] [M], dénommée « le bailleur », et Mme [W] [Z], « agissant tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte de la société Esthetic formation, qu'elle se réserve de constituer ultérieurement et pour laquelle elle sera caution personnelle », dénommée « le preneur » et qu'en page 2 du bail il était précisé : « Par la présente, Mme [K] [M] accorde un bail à loyer à Mme [W] [Z] née [J] qui accepte en son nom et pour le compte de la société Esthetic formation en cours de constitution les lieux ci-après désignés (...) ; qu'il s'évince encore des constatations de l'arrêt que la société Esthetic formation a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 20 mai 2015 avec un début d'activité déclaré au 28 avril 2015 ; qu'en déniant néanmoins à Mme [W] [J], épouse [Z], la qualité de preneur au bail aux motifs qu'en l'espèce, aucun élément n'indique que la bailleresse a entendu louer son bien à plusieurs personnes cotitulaires du bail, l'acte étant intégralement rédigé en se référant à la mention « le preneur » quand, à la date de la conclusion du bail, le 14 novembre 2014, Mme [W] [J], épouse [Z], « agissant en son nom personnel » se voyait reconnaître la qualité de preneur et bénéficiait à ce titre du pacte de préférence institué dans le contrat de bail et qu'il ne résultait d'aucune autre stipulation du bail que la constitution ultérieure de la société Esthetic formation lui aurait fait perdre cette qualité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble l'article 1714 du même code, 4°/ que les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant qu'elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment responsables des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société ; que la reprise des engagements par la société ne prive pas le preneur, qui conclut le bail commercial tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte de la société, du bénéfice du pacte de préférence stipulé dans le bail en sa qualité de preneur ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt qu'il était stipulé à l'article B-21 du bail commercial conclu le 14 novembre 2014 que « les parties conviennent qu'en cas de mise en vente par Mme [K] [M], propriétaire de l'immeuble objet des présentes, Mme [W] [Z], preneur, aura la priorité et préférence pour l'acquisition de l'immeuble à prix égal à toute offre sincère et réelle qui serait faite à Mme [K] [M] ou ses représentants, et acceptée par eux » ; qu'en relevant que « certes, Mme [Z] a pu tirer de cette formulation la conclusion que le bail lui offrait le bénéfice du pacte de préférence ; ceci est cependant en contradiction avec la commune intention des parties d'investir la société Esthetic formation seule du bénéfice du bail après son immatriculation et incompatible avec l'absence de qualité de copreneur » puis en ajoutant que la société Esthetic formation a été constituée le 20 mai 2015 sous forme de SAS dirigée par Mme [J], et qu'à compter de ce jour, la société Esthetic Formation est réputée avoir été la seule titulaire du bail pour en déduire que « Mme [W] [J], épouse [Z] n'a pas la qualité de preneur au bail et ne peut donc prétendre au bénéfice du pacte de préférence prévu au bail » quand la reprise des engagements par la société Esthetic formation, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 20 mai 2015, n'avait pas eu pour effet de priver Mme [W] [J], épouse [Z], du bénéfice du droit de préférence qui lui était reconnu en sa qualité de preneur par l'article B-21 du bail commercial conclu le 14 novembre 2014, la cour d'appel a violé l'article L. 210-6 du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause. » 5°/ qu'il ressort des constatations de l'arrêt que « le bail commercial du 14 novembre 2014 a été régularisé entre, d'une part, Mme [K] [M], dénommée « le bailleur », et Mme [W] [Z], « agissant tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte de la société Esthetic formation, qu'elle se réserve de constituer ultérieurement et pour laquelle elle sera caution personnelle », dénommée « le preneur » ; qu'en énonçant que « Mme [W] [J], épouse [Z] n'a pas la qualité de preneur au bail et ne peut donc prétendre au bénéfice du pacte de préférence prévu au bail » aux motifs qu' « il sera relevé que l'engagement de caution solidaire de Mme [Z] garantit les sommes dues par la société Esthetic formation et porte sur la totalité des loyers, inversement, aucune garantie n'est prise par la bailleresse à l'égard de Mme [Z], qu'il s'en déduit que celle-ci n'est débitrice d'aucun loyer envers Mme [M], qu'aucune disposition n'a été prise pour envisager sa contribution au paiement du loyer en cas de défaillance de la société Esthetic formation hormis l'hypothèse où celle-ci ne serait pas formée, qu'il y a lieu d'en déduire que la bailleresse n'a pas entendu accorder le bail à deux copreneurs, qu'au surplus, entre la signature du bail le 14 novembre 2014 et le 15 novembre 2018, durant quatre années d'exécution du bail, Mme [Z] n'a manifesté aucune volonté d'être prise en compte comme cotitulaire de bail dans l'exécution du contrat et qu'en outre, l'état des lieux d'entrée a été dressé par huissier de justice le 21 novembre 2014 entre Mme [M] et la société « Esthetic formation », quand le bénéfice du pacte de préférence institué au profit de Mme [W] [J], épouse [Z], en sa qualité de preneur à la date de la conclusion du bail ne pouvait être atteint d'une manière quelconque par la constitution ultérieure de la société Esthetic formation et la reprise des engagements nés de la convention de bail, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs radicalement inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause. » Réponse de la Cour 12. La cour d'appel a constaté que le bail commercial régularisé entre Mme [M] et Mme [J], « agissant tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte de la société Esthetic formation, qu'elle se réserve de constituer ultérieurement et pour laquelle elle sera caution personnelle » indiquait, dans une clause B-26, que Mme [J] s'engageait « à faire toutes diligences pour requérir dans les meilleurs délais l'immatriculation de ladite société au registre du commerce et des sociétés » et que, dès sa constitution et son immatriculation, les engagements seraient réputés avoir été souscrits par celle-ci à la date de la signature. 13. Elle a encore constaté que le contrat avait été intégralement rédigé en se référant au preneur au singulier ("le preneur") sans qu'aucune de ses clauses n'évoque l'existence de deux cotitulaires du bail ou celle d'une obligation conjointe et solidaire entre eux. 14. Elle a relevé, en outre, que la stipulation suivant laquelle Mme [J] serait tenue d'exécuter le contrat dans le cas où, pour une raison quelconque, la société en cours de constitution ne serait pas immatriculée au registre du commerce et des sociétés dans un délai de six mois, serait privée d'intérêt dans l'hypothèse d'une cotitularité du bail bénéficiant à la société Esthetic formation et à Mme [J] à titre personnel. 15. Elle a pu déduire de ses constatations et énonciations, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la deuxième branche, par une interprétation souveraine du contrat, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté née du rapprochement de ses clauses rendait nécessaire, qu'il résultait de la commune volonté des parties que les locaux ne fussent donnés à bail qu'à un seul preneur, la société Esthetic formation se substituant, dès son immatriculation, à Mme [J], intervenue à l'acte sous le régime juridique des sociétés en formation, et que la clause B-21 du bail, stipulant un pacte de préférence en cas de vente de l'immeuble, ne pouvait bénéficier, une fois celle-ci immatriculée, qu'à la société preneuse, prise en la personne de sa dirigeante, et non à Mme [J], prise à titre personnel, de sorte que les demandes de celles-ci ne pouvaient être accueillies. 16. Le moyen n'est donc pas fondé. Sur le deuxième moyen Enoncé du moyen 17. Mme [J] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en réparation formées contre Mme [M], alors « que la seule constatation d'une expulsion constitutive d'une voie de fait ouvre droit à réparation ; qu'il s'évince des motifs de l'arrêt qu'il résulte des énonciations de l'arrêt de la cour d'appel du 23 mai 2019 que l'expulsion de Mme [Z] par Mme [M] et par la SCI Liberté 25 le 10 janvier 2019 est constitutive d'une voie de fait engageant leur responsabilité à son égard ; qu'en déboutant néanmoins Mme [J], épouse [Z], de sa demande en réparation des différents préjudices subis, consécutifs à cette expulsion, constitués de la perte d'exploitation, de la perte de chance de réaliser un chiffre d'affaires sur la période de janvier 2019 à décembre 2019, de la perte liée à la reconstitution du carnet de commandes et des frais engagés pour réaménager les lieux loués, aux motifs que le bail avait été résilié le 22 novembre 2018 par le mandataire judiciaire de la société Esthetic formation, que les locaux étaient redevenus libres de tout locataire et que Mme [J], épouse [Z], n'avait aucun titre pour s'y maintenir, quand il était constaté que l'expulsion de Mme [J], épouse [Z], effectuée le 10 janvier 2019 à l'initiative de Mme [K] [M] et de la SCI Liberté 25, était constitutive d'une voie de fait engageant leur responsabilité à son égard ainsi qu'il résultait des énonciations de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 23 mai 2019, d'où il résultait que Mme [J], épouse [Z], était fondée à obtenir réparation des préjudices générés par cette voie de fait, la cour d'appel a violé l'article 1240 du code civil. » Réponse de la Cour 18. La cour d'appel a, d'une part, constaté que l'arrêt rendu en référé le 23 mai 2019 avait ordonné, sous astreinte, la réintégration de Mme [J] des locaux dont elle avait été expulsée le 10 janvier 2019, faisant ainsi ressortir que le préjudice résultant de la voie de fait avait été réparé en nature, et, d'autre part, retenu que Mme [J] ne disposait d'aucun titre pour se maintenir dans les lieux après la résiliation du bail par le liquidateur judiciaire de la société Esthectic formation, de sorte qu'aucune demande de réparation d'un préjudice en lien avec une perte d'activité commerciale dans les locaux redevenus libres de tout locataire et sur lesquels elle ne disposait d'aucun droit, ne pouvait être accueillie. 19. Le moyen n'est donc pas fondé. PAR CES MOTIFS, la Cour : REJETTE le pourvoi ; Condamne Mme [J], épouse [Z] aux dépens ; En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [J] épouse [Z] et la condamne à payer la somme globale de 3 000 euros à Mme [M] et à la société civile immobilière Liberté 25 ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois. MOYENS ANNEXES au présent arrêt Moyens produits par la SARL Cabinet Briard, avocat aux Conseils, pour Mme [J] PREMIER MOYEN DE CASSATION Mme [W] [J], épouse [Z], fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement contradictoire rendu le 12 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Lille, en toutes ses dispositions sauf celles relatives à l'expulsion de Mme [W] [J], épouse [Z], aux indemnités d'occupation et aux dépens de l'instance de référé, et donc de l'avoir confirmé en ce que le tribunal de grande instance de Lille a dit que Mme [W] [J], épouse [Z], n'a pas la qualité de preneur ou de copreneur du bail consenti par Mme [K] [M] le 14 novembre 2014, dit en conséquence que Mme [W] [J], épouse [Z], ne peut revendiquer à son profit le pacte de préférence stipulé au contrat de bail du 14 novembre 2014, et débouté en conséquence Mme [W] [J], épouse [Z], de l'ensemble de ses demandes reconventionnelles relatives à la nullité de la vente, 1° Alors en premier lieu que le juge a l'obligation de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis, qu'aux termes de l'article B-21 du bail commercial conclu le 14 novembre 2014 : « Les parties conviennent qu'en cas de mise en vente par Mme [K] [M], propriétaire de l'immeuble objet des présentes, Mme [W] [Z] aura priorité et préférence pour l'acquisition dudit immeuble, à prix égal à toute offre sincère et réelle qui serait faite à Mme [K] [M] ou ses représentants, et acceptés par eux. L'offre obtenue devra être signifiée à Mme [W] [Z] ou ses ayants-droit, preneur aux présentes, par lettre recommandée avec accusé de réception, dont copie sera adressée également à la société Sergic, négociateur et rédacteur des présentes, ou par ministère d'huissier de justice. Mme [W] [Z], preneur, aura un délai de quinze jours à compter de la date d'expédition de la lettre recommandée ou de la signification par acte extrajudiciaire pour prendre parti, tant directement qu'indirectement. En cas de non réponse dans le délai indiqué, Mme [W] [Z] sera réputée ne pas donner suite et renoncer à cet achat et Mme [K] [M] ou ses représentants pourraient réaliser la vente de l'immeuble à qui bon leur semblerait au prix signifié. En cas d'acceptation soit par lettre recommandée avec accusé de réception, postée dans les délais, soit par ministère d'huissier de justice dans les délais également, Mme [W] [Z] alors acquéreur, devra consigner dans le délai de dix jours de leur acceptation chez le notaire désigné par Mme [K] [M] dans leur signification, une somme égale à 10 % du prix et ce, à titre d'arrhes, dans les termes de l'article 1590 du code civil, le solde du prix et la totalité des frais d'actes seront régularisés à première demande du notaire. Les honoraires de négociation, qui seront dans ce cas dus à la société Sergic Entreprises, seront à la charge de l'acquéreur à hauteur de 5 % hors taxes du prix de vente et payables à la signature des actes authentiques » ; qu'en énonçant que « certes, Mme [Z] a pu tirer de cette formulation la conclusion que le bail lui offrait le bénéfice du pacte de préférence, ceci est cependant en contradiction avec la commune intention des parties d'investir la société Esthetic Formation seule du bénéfice du bail après son immatriculation et incompatible avec l'absence de qualité de copreneur » quand Mme [W] [J], épouse [Z], était expressément désignée comme bénéficiaire du pacte de préférence, la cour d'appel a dénaturé la clause B-21 du bail conclu le 14 novembre 2014 et a violé le principe susvisé, 2° Alors en deuxième lieu qu'en matière de bail commercial la cotitularité du bail n'est subordonnée à aucune stipulation expresse en ce sens ; qu'en déniant à Mme [W] [J], épouse [Z], la qualité de preneur au bail aux motifs qu'en l'absence de disposition légale relative à la cotitularité dans le régime des baux commerciaux, celle-ci ne peut résulter que d'une disposition expresse du bail », la cour d'appel a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble l'article 1714 du même code, 3° Alors en troisième lieu qu'il ressort des constatations de l'arrêt que « le bail commercial du 14 novembre 2014 a été régularisé entre, d'une part, Mme [K] [M], dénommée « le bailleur », et Mme [W] [Z], « agissant tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte de la société Esthetic Formation, qu'elle se réserve de constituer ultérieurement et pour laquelle elle sera caution personnelle », dénommée « le preneur » et qu'en page 2 du bail il était précisé : « Par la présente, Madame [K] [M] accorde un bail à loyer à Madame [W] [Z] née [J] qui accepte en son nom et pour le compte de la société Esthetic Formation en cours de constitution les lieux ci-après désignés (...) ; qu'il s'évince encore des constatations de l'arrêt que la société Esthetic Formation a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 20 mai 2015 avec un début d'activité déclaré au 28 avril 2015 ; qu'en déniant néanmoins à Mme [W] [J], épouse [Z], la qualité de preneur au bail aux motifs qu'en l'espèce, aucun élément n'indique que la bailleresse a entendu louer son bien à plusieurs personnes cotitulaires du bail, l'acte étant intégralement rédigé en se référant à la mention « le preneur » quand, à la date de la conclusion du bail, le 14 novembre 2014, Mme [W] [J], épouse [Z], « agissant en son nom personnel » se voyait reconnaître la qualité de preneur et bénéficiait à ce titre du pacte de préférence institué dans le contrat de bail et qu'il ne résultait d'autre autre stipulation du bail que la constitution ultérieure de la société Esthetic Formation lui aurait fait perdre cette qualité, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause, ensemble l'article 1714 du même code, 4° Alors en quatrième lieu que les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant qu'elle ait acquis la jouissance de la personnalité morale sont tenues solidairement et indéfiniment responsables des actes ainsi accomplis, à moins que la société, après avoir été régulièrement constituée et immatriculée, ne reprenne les engagements souscrits. Ces engagements sont alors réputés avoir été souscrits dès l'origine par la société ; que la reprise des engagements par la société ne prive pas le preneur, qui conclut le bail commercial tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte de la société, du bénéfice du pacte de préférence stipulé dans le bail en sa qualité de preneur ; qu'il s'évince des constatations de l'arrêt qu'il était stipulé à l'article B-21 du bail commercial conclu le 14 novembre 2014 que « les parties conviennent qu'en cas de mise en vente par Mme [K] [M], propriétaire de l'immeuble objet des présentes, Madame [W] [Z], preneur, aura la priorité et préférence pour l'acquisition de l'immeuble à prix égal à toute offre sincère et réelle qui serait faite à Mme [K] [M] ou ses représentants, et acceptée par eux » ; qu'en relevant que « certes, Madame [Z] a pu tirer de cette formulation la conclusion que le bail lui offrait le bénéfice du pacte de préférence ; ceci est cependant en contradiction avec la commune intention des parties d'investir la société Esthetic Formation seule du bénéfice du bail après son immatriculation et incompatible avec l'absence de qualité de copreneur » puis en ajoutant que la société Esthetic Formation a été constituée le 20 mai 2015 sous forme de SAS dirigée par Mme [J], et qu'à compter de ce jour, la société Esthetic Formation est réputée avoir été la seule titulaire du bail pour en déduire que « Madame [W] [J], épouse [Z] n'a pas la qualité de preneur au bail et ne peut donc prétendre au bénéfice du pacte de préférence prévu au bail » quand la reprise des engagements par la société Esthetic Formation, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 20 mai 2015, n'avait pas eu pour effet de priver Mme [W] [J], épouse [Z], du bénéfice du droit de préférence qui lui était reconnu en sa qualité de preneur par l'article B-21 du bail commercial conclu le 14 novembre 2014, la cour d'appel a violé l'article L 210-6 du code de commerce, ensemble l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause. 5° Alors en cinquième lieu qu'il ressort des constatations de l'arrêt que « le bail commercial du 14 novembre 2014 a été régularisé entre, d'une part, Mme [K] [M], dénommée « le bailleur », et Mme [W] [Z], « agissant tant en son nom personnel qu'au nom et pour le compte de la société Esthetic Formation, qu'elle se réserve de constituer ultérieurement et pour laquelle elle sera caution personnelle », dénommée « le preneur » ; qu'en énonçant que « Madame [W] [J], épouse [Z] n'a pas la qualité de preneur au bail et ne peut donc prétendre au bénéfice du pacte de préférence prévu au bail » aux motifs qu'«il sera relevé que l'engagement de caution solidaire de Mme [Z] garantit les sommes dues par la société Esthetic Formation et porte sur la totalité des loyers, inversement, aucune garantie n'est prise par la bailleresse à l'égard de Mme [Z], qu'il s'en déduit que celle-ci n'est débitrice d'aucun loyer envers Mme [M], qu'aucune disposition n'a été prise pour envisager sa contribution au paiement du loyer en cas de défaillance de la société Esthetic Formation hormis l'hypothèse où celle-ci ne serait pas formée, qu'il y a lieu d'en déduire que la bailleresse n'a pas entendu accorder le bail à deux copreneurs, qu'au surplus, entre la signature du bail le 14 novembre 2014 et le 15 novembre 2018, durant quatre années d'exécution du bail, Mme [Z] n'a manifesté aucune volonté d'être prise en compte comme cotitulaire de bail dans l'exécution du contrat et qu'en outre, l'état des lieux d'entrée a été dressé par huissier de justice le 21 novembre 2014 entre Mme [M] et la société « Esthetic Formation » (sic) », quand le bénéfice du pacte de préférence institué au profit de Mme [W] [J], épouse [Z], en sa qualité de preneur à la date de la conclusion du bail ne pouvait être atteint d'une manière quelconque par la constitution ultérieure de la société Esthetic Formation et la reprise des engagements nés de la convention de bail, la cour d'appel s'est fondée sur des motifs radicalement inopérants et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil dans sa rédaction applicable en la cause. SECOND MOYEN DE CASSATION Mme [W] [J], épouse [Z], fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement contradictoire rendu le 12 septembre 2019 par le tribunal de grande instance de Lille, en toutes ses dispositions sauf celles relatives à l'expulsion de Mme [W] [J], épouse [Z], aux indemnités d'occupation et aux dépens de l'instance de référé, et donc de l'avoir confirmé en ce que le tribunal de grande instance de Lille l'a débouté de sa demande en réparation dirigée à l'encontre de Mme [K] [M], Alors que la seule constatation d'une expulsion constitutive d'une voie de fait ouvre droit à réparation ; qu'il s'évince des motifs de l'arrêt qu'il résulte des énonciations de l'arrêt de la cour d'appel du 23 mai 2019 que l'expulsion de Mme [Z] par Mme [M] et par la SCI Liberté 25 le 10 janvier 2019 est constitutive d'une voie de fait engageant leur responsabilité à son égard ; qu'en déboutant néanmoins Mme [J], épouse [Z], de sa demande en réparation des différents préjudices subis, consécutifs à cette expulsion, constitués de la perte d'exploitation, de la perte de chance de réaliser un chiffre d'affaires sur la période de janvier 2019 à décembre 2019, de la perte liée à la reconstitution du carnet de commandes et des frais engagés pour réaménager les lieux loués, aux motifs que le bail avait été résilié le 22 novembre 2018 par le mandataire judiciaire de la société Esthetic Formation, que les locaux étaient redevenus libres de tout locataire et que Mme [J], épouse [Z], n'avait aucun titre pour s'y maintenir, quand il était constaté que l'expulsion de Mme [J], épouse [Z], effectuée le 10 janvier 2019 à l'initiative de Mme [K] [M] et de la SCI Liberté 25, était constitutive d'une voie de fait engageant leur responsabilité à son égard ainsi qu'il résultait des énonciations de l'arrêt rendu par la cour d'appel de Douai le 23 mai 2019, d'où il résultait que Mme [J], épouse [Z], était fondée à obtenir réparation des préjudices générés par cette voie de fait, la cour d'appel a violé l'article 1240 du code civil.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rectification d'erreur matérielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 35 F-D Requête n° R 21-11.874 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La première chambre civile de la Cour de cassation se saisit d'office, conformément à l'article 462 du code de procédure civile, en vue de la rectification d'une erreur matérielle affectant la décision n° 545 F-D prononcée le 29 juin 2022 sur le pourvoi n° R 21-11.874 en cassation d'un arrêt rendu le 18 janvier 2021 par la cour d'appel de Nancy (chambre de l'exécution - JEX). La SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés et la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle ont été appelées. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de M. Bruyère, conseiller, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Bruyère, conseiller rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu l'article 462 du code de procédure civile : 1. Une erreur matérielle a été commise dans la rédaction de l'arrêt n° 545 F-D du 29 juin 2022, pourvoi n° R 21-11.874, en ce qui concerne le nom de l'avocat général ayant donné son avis. 2. Il y a lieu de réparer cette erreur. PAR CES MOTIFS, la Cour : RECTIFIE l'arrêt n° 545 F-D du 29 juin 2022, pourvoi n° R 21-11.874 ; REMPLACE en page 1 « l'avis de M. Poirret, avocat général » par « l'avis de Mme Marilly, avocate générale référendaire » ; LAISSE les dépens à la charge du Trésor public ; DIT que le présent arrêt sera transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt rectifié ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois.
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant : CIV. 1 CF COUR DE CASSATION ______________________ Audience publique du 11 janvier 2023 Rectification d'erreur matérielle M. CHAUVIN, président Arrêt n° 36 F-D Requête n° E 21-50.021 R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E _________________________ AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS _________________________ ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 11 JANVIER 2023 La première chambre civile de la Cour de cassation, a présenté le 5 octobre 2022, une requête aux fins de la rectification d'une erreur matérielle affectant la décision n° 696 F-D du 28 septembre 2022 sur le pourvoi n° E 21-50.021 dans une affaire opposant : - le procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, palais de justice de Paris, 6 boulevard du Palais, 75055 Paris cedex 01 à : - M. [M] [L], domicilié [Adresse 1]. La SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés a été appelée. Le dossier a été communiqué au procureur général. Sur le rapport de Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire, après débats en l'audience publique du 22 novembre 2022 où étaient présents M. Chauvin, président, Mme Robin-Raschel, conseiller référendaire rapporteur, Mme Guihal, conseiller doyen, et Mme Vignes, greffier de chambre, la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt. Vu l'article 462 du code de procédure civile : 1. Une erreur matérielle a été commise dans la rédaction de l'arrêt n° 696 du 28 septembre 2022, pourvoi n° 21-50.021, en ce qu'aux pages 2 et 3, il fait une référence erronée à la date de l'arrêt attaqué de la cour d'appel de Paris, qui est le 2 février 2021 et non le 22 mars 2016. 2. Il y a lieu de réparer cette erreur. PAR CES MOTIFS, la Cour : RECTIFIE l'arrêt n° 696 du 28 septembre 2022 ; REMPLACE, aux pages 2 et 3, « 22 mars 2016 » par « 2 février 2021 » ; Laisse les dépens à la charge du Trésor public ; Dit que le présent arrêt sera transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt rectifié ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze janvier deux mille vingt-trois.