Mishnah Peah משנה פאה Le Talmud de Jérusalem, traduit par Moise Schwab, 1878-1890 [fr] https://www.nli.org.il/he/books/NNL_ALEPH002182155/NLI Mishnah Peah Chapter 1 Les devoirs dont l’accomplissement n’a pas de limites déterminées (par la Loi) sont1 Comme ces objets n'ont pas de limites fixées légalement, les rabbins leur en ont tracé. Mais, à la vérité, il y en a encore d'autres dont la quantité n'est pas précisée et dont les exemples seront invoqués dans la Guemara ci-après, au où parle R. Berakhia. Cf. Babli, Hulin 137b. Tous ce paragraphe fait partie des prières quotidiennes du matin.: l’abandon de l’angle du champ aux pauvres lors de la moisson2 "Il est dit en (Lv 19, 9) et 10, que lors de la moisson il ne faut pas raser le champ en ses moindres recoins, mais abandonner l'angle au pauvre et à l'étranger. On comprend le sentiment d'humanité qui a dicté à Moïse ce devoir de charité et de fraternité: il donne une place à l'infortuné dans la récolte du riche. Cf. (Lv 23, 22); (Dt 24, 19) et suiv."; l’offrande des prémices3 Voir (Ex 23, 19), et (Dt 26, 1-11). En Palestine, les prémices des produits de la terre devaient être apportées au Temple de Jérusalem, offerts à Dieu en présence du sacerdote, et accompagnés d'une formule d'hommage envers le créateur. Après l'accomplissement de cette cérémonie, on pouvait consommer ces produits sur place. Du reste, le traité Bikurim (des prémices), le dernier de la 1ère série de la Mishna, donne à ce sujet des détails développés.; le sacrifice offert au Temple (de Jérusalem) lors des trois visites prescrites4 Trois fois par an, aux fêtes de Pâques, de Pentecôte et des Tabernacles, les Israélites se rendaient à Jérusalem et y offraient un don proportionnel à leur moyens (Dt16, 16-17). Cet usage est encore symbolisé de nos jours à chaque fête juive par la cérémonie du MATANAT YAD célébrée dans les temples actuels. Cf. (Hagiga 1, 1); la bienfaisance5 Dans ces œuvres charitables, comme on le voit par la suite, il n'est question que de démarches personnelles à faire., et l’étude de la Loi6 Il faut la méditer jour et nuit. Voir (Jos 1, 8).. Les devoirs qui donnent à l’homme une jouissance dans ce monde et dont la récompense principale est réservée pour la vie future, sont7 "Cf. Babli, Kidushin, 39b; Shabat 127a.": la piété filiale, la bienfaisance, la fréquentation assidue des écoles religieuses, l’hospitalité, la sollicitude pour les malades, la dotation des fiancés, les derniers honneurs dus aux morts, le recueillement dans la prière, le rétablissement de la paix entre l’homme et son prochain8 Voir (Ps 34, 15), et (Pr 21, 21).. Mais le devoir le plus important est l’étude de la Loi, et il équivaut à tous les autres. Il ne faut pas que la part de la pea soit inférieure au 60ème du champ entier9 Voir Hulin 137b. Les sages ont fixé la mesure d'un devoir prescrit par la Loi sans limites., bien que l’on ait dit qu’il n’y a pas de mesure pour cela; tout dépend de la grandeur du champ, du nombre des pauvres et de la grosseur des grains de blé (ou, selon d’autres, de l’étendue des sentiments de compassion qui animent le propriétaire envers le pauvre). On peut prélever cette part10 Voir Torath Cohanim, sur la section Kedoschim., même au commencement du champ et au milieu (et non pas seulement à l’angle). Selon R. Simon, cela suffit, pourvu qu’à la fin on complète la part réglementaire (le 60ème). Selon R. Juda, il importe de laisser (à la fin) au moins un épi (en y ajoutant, pour la quantité légale, ce qu’on aurait laissé au commencement ou au milieu); si l’on n’a pas fait cela, les parts antérieures sont pour ainsi dire nulles et abandonnées à tout venant11 Voir plus loin, (6, 1) (aux riches et aux pauvres, et le devoir de la pea ne se trouverait pas rempli). Voici la règle générale12 "Comp. Shabat 68a; Pessahim 56b; Nida, 50a.": il faut prélever la pea sur tout ce qui est comestible, que l’on garde (qui n’est pas déjà abandonné), qui croît sur la terre (excepté les champignons), que l’on recueille d’un coup13 Il n'en est pas de même des figues ou d'autres fruits de ce genre, qui ne mûrissent que peu à peu. et ce que l’on réunit pour le conserver (à l’exclusion des légumes verts). Dans cette règle, on comprend les blés et les légumes secs. Les arbres suivants14 Ils remplissent toutes les conditions entraînant la péa. sont compris dans cette règle: le cornouiller15 Telle est la traduction de Bertinoro. Selon Maïmonide, c'est ce qui sert à tanner, rhus coriaria. Voir (Maasserot 1, 2), (Demaï 1, 1), où s'agit peut être de la baie rouge., le caroubier, le noyer, l’amandier, la vigne, le grenadier, l’olivier et le palmier. Lorsque la pea n’a pas été prélevée sur les produits encore attachés à la terre, on la prélève toujours plus tard jusqu’à ce que les fruits soient mis en tas16 "Voir Mishna, (Maaserot 1, 6); Babli, (Baba Metsia 88a). Selon l'hypothèse de Frankel sur ce passage, il faut ajouter ici: "" on la prélèvé sur l'abandon. """. Jusque-là, on est dispensé d’en prélever la dîme17 Après ce moment, on ne prélève la péa qu'après la trouma et la dîme.. Jusqu’à ce moment aussi, on est dispensé de la dîme sur ce qui est abandonné au premier venu18 Ci-après, (6, 1) ( 19b) Cf. Babli, (Pessahim 57a).. Il en est de même de ce que l’on donne à manger aux bêtes de somme, aux animaux sauvages, aux oiseaux. D’après R. aqiba, la même règle s’applique à ce que l’on prend de la grange pour semer19 Selon lui, la loi n'exige les prélèvements que sur ce qui sert de nourriture.. Si un sacerdote ou un lévite achète des blés en grange, ils peuvent jouir de la part de dîme, aussi longtemps que le blé n’est pas entassé20 Après cela, ils sont pour ainsi dire frappés d'une amende pour avoir voulu enlever la part due à leurs frères.. Si quelqu’un déclare ses produits sacrés (avant qu’ils aient été passibles de la dîme) et qu’ensuite il les rachète, il est tendu d’en prélever la dîme (si ces produits étaient encore debout ou en gerbes); il n’y est plus tenu dès que le trésorier des saintetés en a fait un tas21 Cf. Babli. (Menahot 67a).. Chapter 2 Les objets suivants1 "Babli, (Baba Qama 61a); (Baba Batra 55b); (Menahot 71b); Torath Cohanim, section Kedoschim ou (Lv 19)." servent de séparation entre deux champs (et entraînent pour chacun d’eux l’obligation de la pea): un cours d’eau, un canal, un chemin particulier (de 4 coudées de large), une grande route (large de 16 coudées), un sentier général ou particulier2 Voir Baba Batra 99b., qui est aussi bien établi en été qu’en hiver, un champ en friche3 Dans ce sens le mot Bôr est employé par le traducteur chaldéen Onkelos, (Gn 47, 19)., un autre nouvellement cultivé4 Ce terme de Nir se retrouve dans (Jr 4, 3)., ou un terrain contenant d’autres semences. Quant à la partie fauchée pour servir de pâturage, c’est une séparation selon l’avis de R. Meir; mais, selon les autres sages, cette dernière séparation n’est réelle que si cette portion agraire a été de nouveau labourée (ce qui ressemblerait à l’un des cas précités, au Nir). Le cours d’eau sert de séparation entre deux champs, selon R. Juda, s’il est d’une largeur telle que l’on ne puisse pas, en se plaçant au milieu, moissonner à la fois les 2 rives, sans se déranger. Si au milieu des champs il y a des hauteurs tellement escarpées qu’on peut les couper à la hache5 Expression prise dans (Is 7, 25). Comp. Frankel, (Darkhéla-Mischna, 4, 43), et fussent-elles inabordables au bœuf muni d’instruments aratoires, le champ n’en est pas divisé, et il suffit de donner une seule fois la pea pour le tout. Tout cela sert de séparation entre les champs ensemencés; mais entre les plantations d’arbres, il faudrait comme division un mur (d’au moins 10 palmes de haut); et même cette dernière séparation est annulée si, par dessus le mur, les branchages des arbres6 Cette expression se retrouve dans (Jg 3, 26). Comp. Ci-après, (Kilayim 3, 5) s’entremêlent, et l’on donne une pea pour le tout. Les caroubiers7 Ils sont très élevés. V. (Baba Batra 2, 7) doivent être comptés comme réunis (pour ne donner qu’une pea) dès que d’un arbre on peut voir l’autre8 C'est qu'apparemment ils sont toujours séparés par un grand intervalle. (malgré toutes les séparations). R. Gamliel dit: chez mon père, on avait l’habitude de donner spécialement la pea pour chaque côté d’oliviers plantés et une autre pour tous les caroubiers placés en vue les uns des autres. R. Eliézer, fils de Sadok, dit au nom de ce dernier qu’une pea suffit pour tous les caroubiers qui se trouvaient dans la ville. Si l’on sème une espèce dans un champ, bien que l’on en fasse 2 granges, on n’en donne pourtant la pea qu’une fois; si l’on y sème 2 espèces, en fit-on un seul monceau, il faut donner pour chacune la pea. Mais si l’on y sème, p. ex., deux espèces de froment9 C'est-à-dire, en général, 2 espèces de même nature, mais différent de qualité ou de couleur. Voir (Baba Batra 5, 6), il faut en donner 2 fois la pea si on les sépare en deux granges10 La première est un peu verte, la seconde plus mûre et plus sèche., mais non au cas contraire. Il arriva à R. Simon habitant de Miçpa147Voir Derenbourg, Essai, etc., p. 254., lorsqu’il eut ensemencé (2 espèces de blé dans son champ), de demander à R. Gamliel ce qu’il y avait à faire en ce cas (pour la pea). Comme ce rabbin ne savait que répondre, ils se sont rendus tous deux dans la chambre du tribunal148Littéralement: la salle des pierres de taille. Au sud du Temple, il y avait la salle des séances du Sanhédrin. pour demander la solution. -Je sais, dit Nahum le scribe149Il y a dans le texte: libellarius. Voir Babli, (Nazir 56b). d’après R. Measha, lequel le tenait de mon père, celui-ci des couples savants150On nomme ainsi ceux qui, à partir de Simon le juste, transmettaient les traditions. Voir Pirké (Avot, 1, 1) et suiv. et ces derniers prophètes, qu’en vertu d’une prescription ou tradition mosaïque sur le mont Sinaï, si l’on sème dans son champ deux sortes de froments, il faut en donner deux fois la pea lorsqu’on les sépare en deux granges, mais non au cas contraire. Un champ qui a été moissonné par des idolâtres, ou dévasté par des brigands, lhsto", ou qui a été rongé11 Ce terme est usité pour le porc, (Ps 80, 14). par des fourmis, ou qui a été ravagé soit par un orage, soit par des animaux, est dispensé de l’obligation de la pea12 Voir Sifri sur (Lv 19, 19).. Si, après avoir moissonné la moitié, les brigands ont enlevé le reste, on est aussi dispensé de ce prélèvement, car l’obligation de ce devoir n’incombe qu’aux derniers épis qui sont debout (et non s’ils ont été dérobés, si l’on a été privé de la moisson). Si les brigands ont moissonné la moitié du champ et que le propriétaire en cueille ensuite l’autre moitié, il doit donner la pea sur le reste qu’il a recueilli; si l’on coupe la moitié et que l’on vende le reste, l’acheteur est tenu de donner la pea sur le tout13 Parce qu'en vendant le reste, il semble avoir transmis à l'acquéreur l'obligation de la péa.; si, après avoir moissonné une moitié, on consacre l’autre moitié comme sainteté, celui qui la rachète des mains du trésorier des saintetés donne la pea pour le tout (même pour la moitié coupée par celui qui l’a consacrée). Chapter 3 Quant aux carrés de blé1 Littéralement: en forme de briques, oblongs., qui sont plantés entre les oliviers (ou tous autres arbres), il faut, selon l’école de Shammaï prélever la pea sur chacun d’eux; d’après l’école de Hillel, il suffit d’un seul prélèvement pour le tout. Mais les premiers reconnaissent que si les extrémités des diverses plantations se touchent2 P. ex. si ce champ est entouré d'une double rangée d'arbres., un seul prélèvement suffit pour le tout. Celui qui coupe les parties mûres de son champ3 Littéralement: qui le t'achète comme la peau du tigre, en enlevant certaines parties. Comp. Menahot 71b., et laisse debout les épis trop verts doit, selon R. aqiba, prélever la pea pour chaque fois; d’après les sages, un seul prélèvement suffit pour le tout. Toutefois ceux-ci reconnaissent, comme R. aqiba, que celui qui sème de l’anet4 Pour ce terme, Maïmonide a un mot que le Kamous traduit par: Anetum graveolens., ou de la moutarde (sénevé, senapa), en trois endroits différents, devra donner la pea autant de fois. Celui qui trie les oignons5 Littéralement: qui rase la place., dispose ceux qui sont frais pour les vendre au marché et conserve les secs pour les mettre au grenier, doit donner une pea spéciale pour chaque catégorie (parce qu’elles forment pour ainsi dire 2 espèces). Cette distinction s’applique aussi aux petits pois et à la vigne. Celui qui émonde6 Cf. ci-après, (Sheviit 4, 4) son champ d’oignons (en enlève les petits pour laisser grandir les autres), ne prélève la pea pour le reste que sur ce qui est enfoui (les oignons arrachés dans un but d’agronomie ne constituent pas une récolte). Si on enlève les produits d’une seule catégorie (dans un but uniforme), il faut prélever la pea sur ce qui reste pour le tout. Les oignons mères (contenant les semences) sont susceptibles de l’obligation de la pea. R. Yossé les en dispense (à cause de leur peu de durée). Quand aux plants d’oignons, qui se trouvent situés entre les champs de verdure7 "Talmud babli, (Hulin 134a); (Nida 50a).", ils sont soumis chacun séparément à la pea, selon R. Yossé; mais d’après les autres sages, un seul prélèvement suffit pour tout. Lorsque des frères ont partagé leur héritage, ils donnent chacun la pea. Lorsqu’ils s’associent, ils n’en donnent qu’une. Si deux personnes ont acheté un arbre en commun ils n’en donnent la pea qu’une fois; si chacun a pris pour lui un côté seul, chacun donnera aussi la pea. Celui qui vend des arbres séparés dans son champ fera donner la pea pour chacun d’eux8 Bien entendu à la charge de l'acquéreur. Voir (Hulin 138a).. Toutefois, dit R. Juda, cela n’a lieu que si le propriétaire n’a pas gardé un seul arbre; mais s’il y a un reste, une pea seule suffit pour le tout. R. Eliézer dit: un terrain susceptible de contenir un quart de cab9 Soit un carré d'environ 10 coudées _. est soumis à la pea; selon R. Josué, il devra pouvoir produire deux saas; selon R. Tarfon, il devra former un carré de 6 palmes; selon R. Juda ben Bethera, il faut qu’il soit assez grand pour fournir deux moissons, et son avis sert de règle. Selon R. aqiba, quelque petit que soit un terrain, il entraîne le devoir de la pea et des prémices10 "Comp. Baba Batra 24a et 150a; Qidushin 26a.". Il peut donner lieu à la rédaction d’un acte hypothèqué11 Pros Bolé: sujet de contestation. Voir plus loin, (Sheviit 10, 3).; et l’on peut, avec ce terrain, acheter des biens mobiliers, que l’on acquière, soit contre argent, soit par un acte d’acquisition, soit par la prise de possession12 Ces diverses sortes d'achat sont précisées en Qidushin 1.. Si un moribond lègue ses biens, le legs est valable dès qu’il garde un petit terrain (200); lorsqu’il n’a rien gardé, il peut reprendre son bien (s’il guérit). Si quelqu’un lègue ses biens à ses fils et un petit terrain à sa femme, elle perd sa dot. Selon R. Yossé, elle la perd aussi si elle a accepté (comme une associée) la même part que les enfants, bien que le mari ne l’eût pas prescrit. Si un esclave reçoit, par legs, tous les biens de son maître, il devient affranchi, à la condition qu’il ne reste pas le moindre terrain. Selon R. Simon, il est même en tous cas affranchi, à moins que le maître n’ait dit: tous mes biens sont donnés à un tel, mon serviteur, à l’exception d'une faible partie, fût-ce la dix-millième. Chapter 4 La pea doit être donnée sur ce qui est adhérent à la terre. Pour la vigne suspendue1 "En espalier. Pour ce terme, voir (Jr 11, 16); (Ez 16, 6). Thorath Cohanim sur Kedoschim, (Lv 19).", ou pour le palmier, le propriétaire cueille les produits, descend et les distribue aux pauvres. R. Simon applique aussi cette règle aux noyers lisses (ou chauves, sur lesquels il serait dangereux de grimper). Y eut-il 99 personnes sur le champ demandant le partage de la pea et une seule demandant son abandon sur place, il faut écouter ce dernier avis, parce qu’il est conforme à la règle.2 "Il est dit en (Lv 19, 9) et 10, que lors de la moisson il ne faut pas raser le champ en ses moindres recoins, mais abandonner l'angle au pauvre et à l'étranger. On comprend le sentiment d'humanité qui a dicté à Moïse ce devoir de charité et de fraternité: il donne une place à l'infortuné dans la récolte du riche. Cf. (Lv 23, 22); (Dt 24, 19) et suiv." Cependant, pour la haute vigne et le palmier, il n’en est pas ainsi (c’est l’inverse). Y eut-il 99 personnes sur le champ demandant l’abandon de la pea sur place et une seule demandant le partage, il faut écouter ce dernier avis, parce qu’il est conforme à la règle. Si un pauvre, après avoir pris une part de pea3 Baba Metsia, 10a., la jette sur le reste (pour se l’approprier), cela ne l’avance à rien (et il n’aura rien). S’il s’est jeté sur elle, ou s’il a étendu son talit (manteau) sur elle (dans le même but), on la lui retire. Il en est de même pour les épis délaissés ou oubliés (appartenant également aux pauvres). On ne doit pas couper la pea avec des faux, ni l’extraire à coups de hache, de crainte qu’il n’y ait des rixes dangereuses parmi les pauvres. Trois fois par jour, le matin, à midi et avant le soir, les pauvres peuvent demander leur part au propriétaire4 "Selon Maïmonide, il s'agit des demandes; mais, selon le Talmud, le propriétaire est tenu de se présenter.". Selon R. Gamliel, on a fixé ce nombre, pour que le propriétaire ne se présente pas moins souvent; et, selon R. aqiba, pour qu’il ne le dépasse pas. Chez les gens de Beth-Nemer (Jos 13, 27), on divisait la moisson en séries, par une corde, et on laissait la pea sur chaque portion ainsi délimitée5 De cette façon, les pauvres, sans attendre, prélevaient de suite leur part. Littéral: de chaque sillon ugmos (avec ellision du g. Un étranger idolâtre, qui après avoir moissonné son champ, s’est converti au Judaïsme, est dispensé de prélever les diverses parts des pauvres, comme cueillette, oubli et pea6 Au moment de la moisson, qui est l'instant de l'échéance, il n'était pas encore Juif.. Selon R. Juda, il est tenu de donner la part d’oubli, parce que l’on prélève cette portion sur le blé en gerbes (or, à ce moment, il était déjà juif). Si, après avoir déclaré sacré le blé sur pied, on le rachète dans le même état, on est tenu de prélever les diverses parts des pauvres. Si la déclaration a eu lieu pour le blé en gerbes et le rachat de même, l’obligation subsiste. Mais, si après avoir déclaré le blé sacré lorsqu’il était sur pied7 Et il a été coupé par le trésorier des saintetés., on le rachète en gerbes, on est dispensé des prélèvements; puisqu’au moment où l’obligation subsistait, le blé en était dispensé (par son caractère sacré). De même8 Au (Halla 3, 4), ce se retrouve textuellement., celui qui déclare ses fruits sacrés avant qu’ils aient passé par la période où ils sont soumis à l’obligation de la dîme, puis les rachète, est obligé de prélever la part des lévites sur ses produits9 L'obligation n'a commencé qu'après le temps du rachat.; ou si on les consacre après cette période et qu’ensuite on les rachète, on est aussi tenu aux prélèvements. S’ils ont été consacrés avant l’achèvement des travaux préparatoires (constituant l’obligation), que le trésorier des dépôts sacrés ait terminé ce travail, et qu’ensuite on les ait rachetés, ces produits sont dispensés de toutes les parts, puisqu’au moment où ils eussent été passibles de prélèvements, ils en étaient dispensés par leur caractère sacré. Si quelqu’un (qui n’est pas pauvre) recueille la pea et déclare vouloir la donner à tel ou tel pauvre, il peut lui donner cette destination, selon R. Eliézer; mais, selon les autres sages, il faut qu’il la remette au premier pauvre présent. Le glanage, la gerbe oubliée et la pea du champ d’un païen10 Le Talmud dit en quel cas cela a lieu. Voir Gitin 44a. sont passibles du droit de dîme (comme ses autres biens), à moins que le propriétaire n’en ait abandonné les produits (tout ce qui est abandonné en est dispensé11 Comp. (6, 1). Qu’appelle-t-on leket12 "(Lv 19, 9); Babli, Betsa, 35b." (comment définir ce précepte spécial accordant une nouvelle part au pauvre)? ce qu’on laisse tomber de la main, au moment de la moisson. Si un moissonneur, au moment de couper une poignée pleine, ou de l’arracher, est piqué par un chardon, et qu’il laisse tomber ce qu’il tenait à la main, cela reste cependant au propriétaire13 C'est un déchet involontaire.. Ce qui tombe du milieu de la main ou du creux de la faux, est aux pauvres; mais ce qui tombe derrière la main ou la faux (par un mouvement involontaire) appartient au propriétaire. Ce qui est au bout des doigts (par la main pleine), ou au commencement de la faux, appartient aux pauvres, selon R. Ismaël; selon R. aqiba, c’est au propriétaire. Ce qui est amassé par les fourmis dans leurs trous, appartient au propriétaire, aussi longtemps que les épis sont sur pied (jusque-là, les pauvres n’y ont pas encore droit). Après que la moisson a été effectuée, les grains supérieurs (dont la chute est récente) appartiennent aux pauvres. Mais les inférieurs (de provenance antérieure) appartiennent au propriétaire. Selon R. Meir, le tout est aux pauvres, car ce qui est douteux leur revient. Chapter 5 Si, dans un champ, on a placé le monceau de gerbes à un endroit non encore exploré par les pauvres (ce qui leur serait préjudiciable), tout ce qui touche la terre et la couvre immédiatement appartient aux pauvres (à titre d’amende1 Mishna, (Eduyot 2, 4)). Si le vent, soufflant sur les gerbes, les pousse dans un tel endroit2 "Babli, Sheqalim, 3a; Baba Metsia 105a.", on estime combien le glanage aurait pu produire, et on le distribue aux pauvres; selon R. Simon b. Gamliel, on leur donne selon ce qui tombe habituellement (sans autre estimation, soit 4 cabs par cour). S’il reste, sur un champ moissonné, un épi non coupé, mais dont le bout de la tige touche une gerbe de blé sur pied, il appartient au propriétaire, dans le cas seul où il serait possible de le couper en même temps que le reste, mais non au cas contraire. Si un épi de glanage (appartenant de droit au pauvre) s’est égaré dans un monceau, le propriétaire prélève la dîme en prenant un épi quelconque, et il rend ensuite au pauvre ce qui lui revient3 Il ne fera tort ni au pauvre, ni au lévite.. Mais, objecta R. Eliézer4 Il se rapporte à ce qu'il a dit plus haut, (4, 9), comment le pauvre peut-il prétendre à l’échange d’un objet qui ne lui appartient pas? C’est que le propriétaire est censé lui céder ses droits sur le monceau entier, puis il prélève la dîme, et retire enfin un épi qu’il lui donne. Selon R. Meir, on ne doit pas rouler l’eau des puits5 "On sait que dans les campagnes d'Orient, il faut arroser en apportant l'eau dans des tonnes et les rouler sur le champ. - Le mot TPH, qui signifie d'ordinaire palme, est ici diversement interprété: Les uns le traduisent par poulie, servant à amener l'eau pour arroser. D'autres, comme Maïmonide, y voient le nom d'une graine dangereuse, assez semblable à l'orge, qui pourrait nuire à la santé des pauvres lorsqu'ils viennent glaner. Ce célèbre médecin dit que ses confrères appelaient cette plante en arabe d'un mot qui est traduit par Freytag dans son Lexicon: grana Cnici (Dioscorides, 4, 190); Carthamus tinctor (Forsk. Flores aegypt. Ar., 73). ou attractylis (Golius ex Dioscoride, 3, 107. Cf. Avicennae Canon, 1. 2, p. 245). Cette explication est d'autant plus plausible, que le terme se retrouve dans le sens générique de graine en (Kilayim 1, 1) (voir aussi (ci-après 6, 7)). Il serait inexact de le traduire comme Surenhuys par panicum ou meliné en grec,en latin melica milii genus (Golius). Cf. Sprenger, Rei herb., p. 246." (pour arroser le champ avant le glanage) jusqu’à le couvrir d’une palme d’eau (ce serait préjudiciable aux pauvres); selon les autres sages c’est permis, car le propriétaire peut restituer aux pauvres ce qui leur est dû en dédommagement. Si un propriétaire voyage d’un endroit à un autre6 Voir Hulin 130b. et qu’en route il se trouve dans la nécessité d’avoir recours au glanage, aux épis oubliés, à la pea et à la dîme des pauvres, il peut s’en nourrir; et lorsqu’il rentre chez lui, il restitue aux pauvres une quantité égale à celle qu’il a consommée. Tel est l’avis de R. Eliezer; mais, selon les autres sages, il était pauvre, dénué de tout, au moment de son isolement (et par conséquent il n’est tenu à aucune restitution). Si quelqu’un échange ses produits contre ceux qu’un pauvre a reçus à titre de droit, ce qu’il reçoit du pauvre est dispensé de tout prélèvement; mais, avant de donner les siens au pauvre, il doit en prélever la part due. Si deux pauvres ont ensemble un champ en fermage (de sorte que leur part attributive les constitue propriétaires), chacun donne à son compagnon, pour sa part, la dîme des pauvres. Si un pauvre est chargé comme fermier de moissonner un champ, il lui est interdit de prendre du glanage, de l’oubli, de la pea et de la dîme des pauvres (parce qu’il travaille à gages). Toutefois, dit R. Juda, cette défense n’existe que si le pauvre en a été chargé, moyennant une part du produit, la moitié, le tiers ou le quart (des biens supposés encore sur pied); mais si le propriétaire lui a concédé le tiers de la moisson (et non de ce qui est debout), il lui est permis de prendre du glanage, des épis oubliés, ou de la pea (droits s’exerçant sur le blé qui est debout); mais il lui est interdit de prendre de la dîme des pauvres (prélevée sur la récolte). Si quelqu’un vend son champ de blé, il est permis au vendeur (s’il est pauvre) de prendre les dites parts7 Il n'est pas tenu de les prélever au préalable., mais non à l’acquéreur. Aux ouvriers que l’on engage pour la moisson, l’on ne peut pas imposer la condition que leurs fils les suivront pour enlever ce qui tomberait à terre8 L'ouvrier exigerait moins de salaire., ni empêcher les pauvres de glaner, ni le permettre à l’un de préférence à d’autres, ni aider l’un d’eux. Ce serait dérober aux pauvres ce qui leur revient. C’est pourquoi il est dit (Pr 22, 28); (Pr 23, 10): Ne recule pas la limite de ceux qui montent9 "Voir même série, (Sota 4, 3) ( 19c); Yalkout sur l'Ecclésiaste, 14 (n° 969)." (euphémisme pour désigner le pauvre). Sur une berge a été oubliée par les ouvriers, mais trouvée par le propriétaire, et vice-versa, ou si les pauvres l’ont cachée, soit en se plaçant devant elle, soit en la couvrant d’issues de paille10 Voir Siffri sur la section Ki-Thetsé, babli, Sota 45a., elle n’est pas considérée comme oubli (et revient à son maître). Si l’on entasse les épis en formes hautes, ressemblant à des casques, ou en formes liées du bas11 Selon le Mischné aroukha, il s'agit de gerbes placées par le propriétaire à l'entrée, en signe de bonheur, de réussite., ou en ronds (comme des gâteaux), ou en simples gerbes, les droits d’oubli ne s’exercent pas sur ces monceaux; mais, si on les porte de là en grange, ce droit s’exerce de nouveau. “Si, au contraire, on réunit les gerbes (sans forme) pour les battre, le droit d’oubli subsiste; mais il n’existe plus, si les blés sont transportés de là pour être mis en grange. Voici quelle est la règle: si l’on réunit les gerbes dans un endroit où devra s’achever l’élaboration du blé, le droit d’oubli existe, mais il cesse si, après réflexion faite, on le porte de là en grange; si, au contraire, le blé n’est entassé qu’en lieu provisoire, le droit d’oubli ne s’exerce pas encore, mais il commence au moment de l’entrée du blé en grange. Chapter 6 L’école de Shammaï dit1 "Babli (Baba Metsia 30b); (Eduyot 4, 3) et 4.": si l’on a abandonné des produits aux pauvres seuls, l’abandon est réel (et l’on est dispensé de la dîme); selon l’école de Hillel, les produits ne sont considérés comme tels que s’ils sont aussi bien abandonnés aux riches qu’aux pauvres, comme cela a lieu pour les fruits de la shemita (7ème année de repos). Si toutes les gerbes du champ ont chacune la mesure d’un cab et que l’une d’elles ayant la mesure de quatre cabs ait été oubliée, elle n’est pas considérée comme oubli (laissée aux pauvres), selon Shammaï; mais, selon Hillel, elle est classée comme telle. Une gerbe adossée, soit à la palissade2 La racine GFH se retrouve dans (Ne 7, 5) v3. d’un jardin (ou pierres posées l’une sur l’autre sans ciment), soit aux monceaux destinés à être battus, soit auprès des bœufs d’attelage, soit auprès des instruments aratoires, n’est pas considérée comme oubliée, selon l’école de Shammaï3 Ces objets servent à la rappeler au souvenir du propriétaire., mais elle l’est selon Hillel. Pour les extrémités des rangées de gerbes (en ce qui concerne l’oubli), on se dirige d’après celle qui est placée vis-à-vis (et l’on décide, d’après cela, si elle avait été oubliée ou non). Quant à la gerbe que l’on avait déjà en main pour la transporter en ville et que l’on a ensuite oubliée, l’on est unanime à ne pas la considérer comme oubliée. Voici la règle à adopter en fait d’extrémités des rangées (afin de décider pour les cas douteux d’oubli): lorsque 2 hommes se placent au milieu d’une rangée pour commencer la moisson, dont l’un se tourne vers le nord et l’autre vers le midi et qu’ils aient oublié tous deux une gerbe devant eux et une autre derrière eux, ce qui était devant eux, est considéré comme oubli (et revient aux pauvres), mais non ce qui était derrière eux (l’un comptait sur l’autre, et l’on peut le reprendre). Si une personne seule a commencé la moisson en tête d’une ligne et qu’elle ait oublié des épis en avant et en arrière, ce qu’elle aura laissé au-devant n’est pas un oubli, mais en arrière c’en est un4 Babli, Baba Metsia 11a., en vertu du précepte biblique: tu ne retourneras pas en arrière. Voici donc la règle générale: s’il faut retourner, c’est un oubli, et non au cas contraire. Si deux gerbes ont été omises, elles sont considérées comme oubli5 "Babli, Baba Batra 72b; Sanhedrin, 88a."; mais, s’il y en a trois, ce n’est plus un oubli. De même, 2 tas d’olives ou de caroubes passent pour oubli, mais non s’il y en a 3; de même, 2 touffes de lin sont un oubli, non 3; 2 grains de raisin, ou 2 épis constituent le glanage (appartiennent aussi aux pauvres), mais non 3. Tel est l’avis de Hillel. Pour tous ces cas, Shammaï dit, au contraire, que si même 3 de chacun de ces objets sont réunis, ils appartiennent encore aux pauvres (à titre d’oubli); il en faut 4 pour que cela reste au propriétaire. Si une gerbe contient la matière de deux saas et qu’elle ait été omise, elle ne tombe pas sous la loi de l’oubli, si 2 gerbes oubliées forment ensemble cette même quantité, elles doivent appartenir au propriétaire, selon R. Gamliel; mais, selon les autres sages, elles appartiennent aux pauvres. Cependant, objecta R. Gamliel, est-ce que le droit du propriétaire augmente en raison du nombre des gerbes omises, ou au contraire diminue-t-il en ce cas (puisque cette même quantité, en une seule gerbe, serait restée sa propriété)? Son droit s’en augmente, répondirent-ils; - quoi, répliqua-t-il alors, si l’on a une gerbe de la contenance de deux saas et qu’on l’oublie, elle n’est pas considérée comme abandonnée, à plus forte raison ne doit-il pas en être de même pour deux gerbes petites comme des bottes? – Non, lui répondirent-ils, c’est qu’une gerbe assez forte pour avoir cette quantité est considérée comme du blé à battre; tandis que 2 gerbes, bien moins forte séparément, ressemblent à des touffes ou bottes (et sont un oubli). Si des épis sur pied, représentant la valeur de 2 saa ont été oubliés, ils restent à leur maître. Si, en réalité, l’on n’y retrouvait pas la quantité de 2 saa, mais que le nombre des épis aurait pu fournir cette quantité, le produit définitif ne serait-il que de la valeur du typha (ou blé inférieur), on le considère comme les plus gros grains d’orge (et ce n’est pas un oubli). Reprise. Le blé sur pied, près duquel serait appuyée une gerbe oubliée, protège contre la loi sur l’oubli et la gerbe et les épis sur pied; tandis qu’une gerbe (même non oubliée) ne peut pas offrir le même avantage à l’inverse6 C'est-à-dire, elle ne prémunit pas même ce qui est sur pied.. Quelle étendue doit avoir le blé sur pied pour servir d’appui protecteur à la gerbe? Très peu fût-ce un épi seul qui n’ait pas été oublié. Une mesure de blé coupé ne peut être évaluée comme jointe à telle autre mesure encore adhérente à la terre, pour former ensemble (en cas d’oubli des deux) la quantité réglementaire de deux saa (ainsi soustraire à la loi sur l’oubli): elles appartiennent aux pauvres, et la même règle s’applique aux arbres fruitiers. Les porreaux et les oignons ne peuvent être joints (pour former ladite quantité); selon R. Yossé, on n’empêche la jonction que si le droit du pauvre survient entre les deux opérations (l’enlèvement de l’un et la moisson de l’autre). Si l’on coupe du blé vert pour servir de fourrage, ou pour le tresser en cordes à gerbes, ou si l’on coupe des porreaux verts comme liens, ou si l’on réunit en bottes divers paquets d’oignons7 Rashi, en Nedarim 38b, traduit louf par lupin., ce qui est oublié n’est pas perdu8 On réunit les petites bottes en grandes.. Quant aux objets enfouis en terre, par exemple, l’oignon, la ciboule ou le porreau, le droit d’oubli ne s’exerce pas sur eux, selon R. Juda; mais il subsiste selon les autres sages. Pour celui qui moissonne ou qui met en gerbe la nuit, comme pour l’aveugle, le droit d’oubli subsiste. S’il avait l’intention de ne prendre que le gros, ce droit d’oubli ne s’exercera pas non plus sur le petit. Mais si l’on exprime la condition de prendre ce que l’on aura oublié, ce droit s’exerce de nouveau (et la condition s’annule). Chapter 7 Tout olivier qui, par son nom spécial dans le champ, est notoire, fut-ce seulement celui dont l’huile dégoutte de temps en temps1 "Netoufa peut désigner un nom de lieu. Voir (Esd 2, 22); (Ne 7, 26)." et qui a été oublié, n’est pas tenu comme oubli (abandonné légalement). Toutefois, cette exception n’a lieu que si cet arbre se distingue, soit par le nom, soit par les produits, soit par l’emplacement. Il est désigné par le nom s’il se nomme (par exemple) Shifkhôni2 Ce sont peut-être aussi des noms de localités, comme le remarque Maïmonide. Voir Neubauer, Géographie, p. 128. (verseur, qui répand le trop plein de ses olives), ou baïshoni (honteux). On le distingue par ses fruits lorsqu’il produit beaucoup; et par sa place, s’il se trouve situé du côté du pressoir ou de la brèche. Quant aux autres oliviers, si l’on en oublie deux, l’oubli subsiste, mais non pour trois. Selon R. Yossé, il n’y a nul droit d’oubli pour les olives. Si un olivier se trouve placé entre trois rangées appartenant à deux carrés de champs et qu’il a été oublié, il ne tombe pas sous la loi sur l’oubli; de même, ce qui aurait été oublié sur un olivier contenant 2 saa n’est pas perdu pour le propriétaire. Toutefois cette dispense a seulement lieu aussi longtemps que l’on n’a pas commencé la récolte; mais une fois qu’elle est commencée, fût-ce même l’olivier dont l’huile dégoutte de temps en temps, le droit d’oubli subsiste. Aussi longtemps que le propriétaire a des olives au-dessus de lui (au bas de l’arbre), il possède celles qui sont suspendues au-dessus de sa tête adhérentes à l’arbre3 Comp. Gitin 61a.. Selon R. Meir, le droit des pauvres sur les restes ne s’exerce que lorsque le propriétaire, après avoir fouillé tous les coins de l’arbre avec une gaule, l’a quitté. Qu’appelle-t-on péret? (autre droit des pauvres, (Lv 19, 10) Les grains qui tombent à terre au moment de la vendange. Si un vigneron coupe une grappe entourée de feuilles et qu’en voulant la débarrasser de ces feuilles, il la laisse tomber à terre et elle s’égrène, elle reste pourtant au propriétaire (elle ne s’est éparpillée qu’après la récolte). Par contre, si quelqu’un voulait placer un panier sous la vigne au moment de la vendange (pour recueillir les grains), il volerait les pauvres. C’est pourquoi il est dit: tu n’empiéteras pas sur la limite de ceux qui montent ou les pauvres4 V. ci-dessus, (5, 6).. Quelles sont les parts réservées aux pauvres sous le titre d’Olelot ? Les petites grappes qui ne sont ni catef, ni natef (ni amassées comme une charge sur l’épaule, catef, ni ayant tant de grains au bas que le bout du cep se ploie, natef). Si l’une de ces 2 conditions existe, le fruit appartient au propriétaire; si c’est douteux, il appartient aux pauvres. Quant à la série des grappes qui se trouvent suspendues au cep courbé, de telle sorte que le même coup de serpe les abatte, elles appartiennent au propriétaire; à défaut de cette condition, elles sont aux pauvres. Les grains isolés de la vigne sont considérés comme grappe selon R. Juda (et appartiennent au propriétaire) . mais, selon les autres sages, c’est de l’olelot (appartenant aux pauvre). Celui qui émonde5 Comp. ci-après, (Sheviit 4, 4) la vigne (lorsque les grappes sont touffues) doit faire pour la part réservée aux pauvres la même opération que pour la sienne6 Babli, Moed Qatan. 4b.. Tel est l’avis de R. Juda; mais, selon R. Meir, cela ne lui est permis que pour ses ceps, non pour ceux des pauvres. Quant à la vigne qui est dans sa 4ème année de plantation (sacrée), l’on n’est pas tenu, d’après l’école de Shammaï, de prélever le cinquième de ses produits7 "En les rachetant, pour les manger hors de Jérusalem. Voir (Maasser Sheni 5, 3); (Eduyot 4, 5)", ni de les enlever de la maison (c’est dû pour les dîmes ordinaires, la veille de Pâques des années 4ème et 7ème); mais, selon Hillel, c’est obligatoire. L’école de Shammaï dit encore: pour cette vigne, le droit des pauvres sur les grains tombés et le grappillage subsiste en faveur des pauvres qui rachètent pour eux-mêmes ces fruits d’origine sacrée; mais, selon Hillel, tout droit être porté au pressoir (comme deuxième dîme). Lorsqu’une vigne tout entière se compose d’olelot (petites grappes dues aux pauvres), elle appartient, selon R. Eliezer, au propriétaire; selon R. aqiba, elle est aux pauvres. R. Eliezer appuie son avis sur l’interprétation suivante: lorsque tu vendangeras ta vigne, est-il dit (Dt 24, 21), tu ne grappilleras pas; or, s’il n’y a pas de vendange, il ne peut y avoir d’olelot. R. aqiba se justifie ainsi: tu ne grappilleras pas, est-il dit (Lv 19) fussent toutes les grappes des olelot. – Mais s’il en est ainsi, répliqua l’interlocuteur, que signifie le commencement du verset? C’est seulement pour dire que la part des pauvres n’est pas due avant la vendange (mais dès qu’elle commence). Si l’on déclare sa vigne consacrée, avant de pouvoir distinguer combien d’olelot elle contient, elles n’appartiennent pas aux pauvres; mais si l’on en connaissait déjà le nombre, elles reviennent aux pauvres8 On ne peut pas consacrer ce qui leur revient.. Selon R. Yossé, ils doivent donner au trésor sacré le surcroît de leur valeur (depuis la consécration). Qu’appelle-t-on oubli des ceps9 "Le terme chaldéen ""aris, analogue à l'hébreu arish, lit (Ct 1, 16), a ici le sens de tiges superposées, suspendues." en tige? Ce que l’on ne peut plus atteindre en étendant la main. Quant aux ceps couchés à terre, les fruits sont déclarés oubliés, dès qu’on a passé auprès d’eux. Chapter 8 A partir de quel moment1 Babli, (Taanit 61), Baba Metsia 21c. est-il permis à chacun de glaner aux champs? A partir du moment où vieillards et retardataires, appuyés sur des bâtons, quittent le champ (alors, le regain des pauvres est ramassé). On peut relever les grains et les olelot des vignes, lorsque les pauvres les ont parcourues deux fois2 "Ruth en glanant, "" aallet revint "" (2, 3).". Enfin, l’on peut secouer une dernière fois les oliviers, lorsque la seconde pluie d’hiver est tombée (vers la fin du mois de Heshwan). Mais, objecta R. Juda, n’y a-t-il pas certaines gens qui cueillent seulement leurs olives à cette époque? (En ce cas, n’y aurait-il pas préjudice pour les pauvres?) En effet, il faut attendre, en ce cas, que le pauvre quitte les oliviers sans en rapporter plus de 4 assarias3 Voir t. 1er de notre traduction, p. 445, note 2. (mesures). On ajoute foi aux assertions des pauvres, lorsqu’ils déclarent que tel fruit fait partie du glanage, de l’oubli, ou de la pea4 "Et la dîme n'est pas due; comp. (Halla 1, 2)", aussi longtemps que dure la moisson; pour la dîme des pauvres, ils sont dignes de foi chaque année où celle-ci est due (3ème et 6ème). Aux lévites on ajoute toujours foi (pour la 1ère dîme); mais, bien entendu, seulement pour les objets qu’il est d’usage de leur remettre5 Voir le suivant.. On ajoute foi aux pauvres pour le froment6 S'ils disent que c'est la dîme des pauvres, ou de leurs autres droits, on les croit., mais non pour la farine, ni pour le pain7 Ce n'est pas l'usage de le leur donner ainsi.. On les croit pour l’orge (ou riz) lorsqu’il est encore dans les épis, mais non lorsque ce blé est en grains, soit cru, soit cuit. On les croit pour les haricots, mais non pour la farine qui en proviendrait et formerait des boulettes, soit crues, soit cuites. On accueille comme vraie l’assertion du pauvre lorsqu’il dit, pour de l’huile, qu’elle provient de la dîme qui lui est due; mais on ne le croit pas, lorsqu’il dit qu’elle provient de son glanage8 Littéralement: extraite des olives obtenues en secouant l'arbre, en le battant, contre son habitude. A l'araméen NKF (Is 10, 34) (la quantité serait trop petite, pour qu’il y ait lieu d’en fabriquer). On ajoute foi au pauvre lorsqu’il dit que tel légume vert cru est à lui, mais non s’il est cuit, à moins qu’il y en ait peu, car c’est l’habitude des maîtres de maison (en cas d’oubli) de prélever parfois sur la marmite pour le pauvre. Lorsqu’on donne la part des pauvres en grange, on ne donne pas moins d’un demi cab de froment, ou d’un cab d’orge9 A chacun. Voir Babli, Eruvin 29a.; même pour ce dernier, on ne donne, selon R. Meir, qu’un demi cab. Pour le coriandre, c’est un cab et demi; pour les figues sèches et pressées, un cab ou le poids d’un mané; selon R. aqiba, la moitié suffit. Pour le vin, c’est un demi-loug; selon R. aqiba, c’est le quart. Pour l’huile, c’est le quart; selon R. aqiba, c’est le huitième. Quant aux autres fruits, il faut en donner suffisamment au pauvre, pour qu’au cas où il les vend, il ait de quoi manger deux fois. La règle prescrite l’est à égal titre pour les sacerdotes, les lévites, ou les Israélites (qui sont pauvres). Si un propriétaire, avant de donner la part des pauvres, désire en réserver pour ceux qu’il protège, il peut garder une moitié et répartir l’autre moitié; s’il en a peu, il le leur remet et leur abandonne le partage. Au pauvre qui voyage d’un endroit à l’autre10 "Voir Shabat 118a; Baba Batra 9a." on ne donne pas moins de pain que ce que l’on peut avoir pour un pondion11 Il vaut un 1/2 Zouz, ou le 48ème du sicle., lorsque les quatre saa valent un sicle12 Baba Batra 8b.. S’il passe la nuit, on ajoute ce qu’il faut pour dormir; s’il passe le samedi, on lui donne les trois repas de ce jour. Celui qui a de quoi faire deux repas ne doit pas recourir à la marmite des pauvres. Celui qui a pour 15 jours à manger ne droit rien accepter de la caisse des pauvres. Pour l’encaissement13 Soit 4 dinars, valant chacun 6 zouz ou ensemble 24 zouz, selon Maïmonide, ou le 1/2 cab., il doit y avoir deux personnes, pour la distribution. Lorsque l’on possède 200 zouz (de quoi se suffire un an), on ne doit prendre ni du glanage, ni de l’oubli, ni de la pea, ni de la dîme des pauvres14 Babli, Sota 21b.. S’il manquait seulement un dinar à cette somme, et y eut-il mille personnes lui donnant à la foi, il peut participer à ces distributions. Si cet argent est mis en gage chez un créancier ou pour la dot de sa femme, il le peut aussi. Il n’est pas tenu non plus15 Ketubot 68a., pour compléter cette somme, de vendre sa maison, ni ses meubles, ni ses ustensiles. Si l’on possède 50 zouz et qu’il servent à faire le commerce16 Voir Mekhilta, ou commentaire Midrashique de l'(Ex sect. Mischpatim, 20a., il n’est permis de prendre aucune desdites parts. Celui qui n’est pas dans le besoin et prend cependant, ne mourra pas et ne deviendra pas vieux avant d’avoir réellement besoin du secours de ses frères. Celui qui fait le contraire, qui ne prend rien, bien qu’il soit dans la misère (et se suffit par sont travail) deviendra tellement riche, à la fin de ses jours, qu’il pourra encore nourrir d’autres. De lui il est dit (Jr 17, 7): Heureux l’homme qui se fie à Dieu. Il en est de même du juge qui rend justice sincèrement. Celui qui n’est ni bancal, ni aveugle, ni boiteux, et se donne pour tel (afin de mendier), ne mourra pas avant d’être atteint d’une de ces infirmités. Aussi, est-il dit: Celui qui cherche le mal en sera frappé (Pr 11, 27). Mais, du juge intègre, il est dit: tu poursuivras l’équité (Dt 16, 20). Tout juge qui accepte des dons corrupteurs et fausse le jugement17 Tossefta à Pea 4., ne mourra pas avant d’être frappé de cécité, comme il est dit (Lv 23, 28): tu ne prendra pas de l’argent corrupteur, car il aveugle les plus clairvoyants.