Mishnah Moed Katan משנה מועד קטן Le Talmud de Jérusalem, traduit par Moise Schwab, 1878-1890 [fr] https://www.nli.org.il/he/books/NNL_ALEPH002182155/NLI Mishnah Moed Katan Chapter 1 Il est permis d’arroser un champ desséché1 A défaut de ce soin, le champ serait perdu. Cf. (Sheviit 2, 2)., ou rocailleux, aux jours de demi-fête et même la 7e année agraire, soit d’une source qui jaillit là pour la 1re fois, soit d’une source qui a déjà son cours; mais ni avec de l’eau de pluie, ni d’un puits très profond, chlwn. Il est interdit aussi d’établir des cavités au pied des ceps de vigne (pour conserver l’humidité). R. Eliézer b. Azaria dit: en principe, on ne devra pas creuser de canal aux jours intermédiaires de fête, ni à la 7e année de repos agraire; les autres sages l’autorisent à la 7e année, et ils permettent de réparer aux jours de demi-fête ce qui a été détérioré (et pourrait se perdre davantage), comme les dégâts survenus (amas de corps étrangers) aux récipients d’eau sur la place publique, et les nettoyer. On peut réparer2 Cf. (Sheqalim 1, 1) les routes et les voies publiques, ainsi que les emplacements des bains officiels; on procède à tous les travaux publics (en raison de la plus grande fréquence des voyageurs); on renouvelle la démarcation des tombes par une ligne de chaux. Enfin, des messagers du tribunal vont examiner si l’avis sur les hétérogènes a été suivi. –3 La 1re partie de la Guemara à ce est traduite (Sheviit 3, 2). R. Eliézer b. Jacob dit: il est permis de conduire l’eau d’un arbre à un autre, à condition de ne pas arroser tout le champ. Des semences non humectées avant la fête ne devront pas être arrosées pendant la demi-fête; les autres sages permettent d’arroser en tous cas. Il est permis de chasser les taupes et les mulots, soit des potagers, soit des champs de blé, en modifiant un peu le procédé habituel, aux jours de demi-fête et la 7e année agraire; selon les autres sages, on procédera dans le potager comme d’ordinaire (c’est sans profit pour la culture), et dans le champ de blé, on modifiera le mode d’action. Il est permis d’emplir avec des pierres isolées (sans ciment) une brèche d’un mur, aux jours de fête, et la 7e année on construira selon l’habitude. R. Meir dit: il est permis au cohen de visiter les plaies en principe, si c’est pour alléger (pour pouvoir, le cas échéant, déclarer l’homme pur), mais non pour le condamner; selon les autres sages, le cohen ne devra énoncer aucun jugement, ni favorable, ni défavorable. R. Meir dit aussi: il est permis à l’homme de recueillir les ossements de ses parents afin de les ensevelir, car c’est pour le fils une satisfaction (de calme); R. Yossé l’interdit, parce que cet acte suscite le deuil. Pendant 30 jours avant la fête, on ne devra pas susciter d’oraison funèbre4 Les commentaires rappellent l'usage des pleureurs. en l’honneur d’un mort, ni le déplorer. A la demi-fête, on ne creusera pas de caveau sépulcral ni un tombeau; mais il est permis de les approprier, ou d’établir un étang, ainsi qu’une bière à l’usage d’un mort se trouvant dans la même cour (non ailleurs). R. Juda le défend, si l’on n’a pas auprès de soi les planches nécessaires. Il n’est pas d’usage d’épouser une femme à la demi-fête, ni vierge, ni veuve, ni de contracter un lévirat, car ce serait une superfêtation de 2 joies; mais on peut reprendre une répudiée (la joie n’est pas si grande), et les femmes peuvent vaquer à leur toilette pendant ces jours; selon R. Juda, elles ne doivent pas s’enduire de chaux (pour s’épiler), car cela les enlaidit. Tout simple israélite (non ouvrier) peut coudre en ces jours comme d’ordinaire; un ouvrier devra faire des points irréguliers5 Littéral.: en dents de chien.. On pourra aussi tresser les cordages ou le filet, soutenant les lits. R. Yossé permet aussi de les tendre (pour mieux les fixer). Il est permis d’ériger pendant la demi-fête un poële, ou un four. Selon R. Juda, on ne devra pas en principe marteler les meules du moulin (usées, trop lisses). En ces jours, on peut édifier une balustrade au toit ou à un balcon, d’une façon grossière, non un ouvrage d’artiste (en règle). Il est permis d’enduire les fentes avec du ciment, ou faire passer sur les sinuosités le cylindre niveleur, soit avec la main, soit avec le pied, mais sans employer la truelle (ou le levier, moclo"). Il est permis, pendant une demi-fête, de réparer le gond d’une porte, ou le pivot, ou la poutre servant de pilier, ou la serrure, ou la clef, qui seraient brisées, à condition de ne pas réserver d’avance cette réparation à faire pendant les jours de demi-fête (en raison des loisirs prévus). Il est permis de mariner à ce moment des aliments qui seront suffisamment préparés pour être mangés avant la fin de la fête. Chapter 2 Si quelqu’un a retourné ses olives pour la pression (dernière opération avant la fabrication de l’huile, sous peine de perte totale), et qu’il lui survient un deuil, ou un accident, ou si des ouvriers qui lui ont promis de travailler pour lui, manquent à leur parole, le propriétaire pourra charger le pressoir de la première poutre1 C'est suffisant pour susciter un peu d'écoulement, quoiqu'incomplet., et la laisser ainsi jusqu’après la fête; tel est l’avis de R. Juda. Selon R. Yossé, on pourra en ce cas verser toutes les olives au pressoir, achever la compression2 Littéral.: laisser couler. V. (Shabat 19, 3)., puis boucher les tonneaux, le tout comme d’ordinaire. De même, si quelqu’un a son vin dans la cuve (où il ne court plus de risque), et qu’il lui survient un deuil ou un accident, ou si les ouvriers qui ont promis de venir travailler pour lui, manquent à leur parole, le propriétaire pourra faire couler le vin dans les pièces, achever cette opération, et boucher les tonneaux comme d’ordinaire. Tel est l’avis de R. Yossé. Selon R. Juda, on se contentera de couvrir la cuve avec des lattes, pour que le vin n’aigrisse pas. Il est permis de rentrer ses fruits des champs par crainte des voleurs, ou retirer le lin de la saumure, pour qu’il ne se perde pas, à condition de ne pas réserver d’avance cet ouvrage pour l’accomplir à la demi-fête. Pour tout travail analogue, si l’on s’est appliqué à l’ajourner jusqu’en ces jours, il sera interdit, quelle que soit la perte (le tribunal abandonnera le montant en cas de fait accompli). On n’acquerra à ce moment des maisons, des esclaves, ou des animaux, que pour les besoins de la fête, ou si c’est pour procurer des vivres au vendeur qui n’a pas de quoi manger. On ne devra pas déménager d’une maison à l’autre, mais dans la cour de la même maison, ni apporter des outils d’un atelier; mais si le propriétaire éprouve des craintes à leur égard, il pourra les porter dans une autre cour. Il est permis en ces jours de couvrir les fruits secs avec de la paille; R. Juda permet aussi de les entasser. Les marchands de fruits, ou d’habits, ou d’ustensiles, pourront vendre à l’écart pour les besoins de la fête. Les chasseurs (ou pêcheurs), les fabricants de bouillies et de pâte égrenée, agiront de même pour les besoins de la fête. Selon R. Yossé, ceux-ci se sont imposé la sévérité de ne rien vendre du tout. Chapter 3 Voici les personnes qui peuvent, à la demi-fête, se faire raser: celui qui arrive d’une province d’outre-mer, ou de la captivité, ou qui sort de prison pour une pénalité, ou celui qui est libéré par les sages de l’exclusion prononcée contre lui, ou celui qui vient d’être relevé d’un vœu par un sage qu’il a consulté, ou le naziréen au bout de son temps d’engagement, ou le lépreux guéri de son impureté et devenu pur. Les suivants peuvent laver leur linge à la demi-fête: celui qui vient d’un pays d’outre-mer, ou de la captivité, ou de la prison, ou l’homme banni d’abord, puis délivré de l’exclusion par les sages, ou l’individu libéré de son vœu, les essuie-mains, les serviettes du barbier, les serviettes pour s’éponger après la bain, ainsi que les hommes ou femmes atteints de gonorrhée, ou celles qui ont eu leurs menstrues, ou celles qui relèvent de couches, enfin tous ceux qui passent de l’impureté à l’état pur; il leur est permis de laver, tandis qu’à toute autre personne c’est défendu. Les actes suivants pourront être écrits à la demi-fête: les contrats de mariage, les actes de divorce, les déclarations d’acquit, les dispositions testamentaires, diaqhch les donations, les réserves judiciaires, prosbolh, des lettres d’estimation, des écrits au sujet de l’alimentation (d’une parente), des actes d’opposition au lévirat, ou d’autres refus de mariage, des décisions d’arbitres, des arrêts de tribunal, enfin la correspondance pour des pleins pouvoirs (ou: amicale). On ne devra pas, pendant la demi-fête, écrire des contrats de dette; mais si le prêteur n’ajoute pas foi sans cela à l’emprunteur, ou s’il n’a pas de quoi manger, celui-ci pourra écrire. On ne devra écrire à ce moment, ni des rouleaux de la loi, ni des phylactères, ni des mezouzôth, ni même corriger une seule lettre dans le rouleau servant à la lecture officielle. Selon R. Juda, il est permis d’écrire des phylactères ou des mezouzoth pour son propre usage, et tisser de la laine sur ses genoux pour fabriquer les Tsitsith (franges du vêtement d’office). Si l’on a enterré un parent 3 jours avant une fête, celle-ci dispense du deuil de la première semaine; si l’enterrement a eu lieu 8 jours auparavant, la fête dispense du cérémonial de deuil en usage pendant le 1er mois. Or, voici la règle: le samedi compte dans la huitaine de deuil, sans causer d’interruption; tandis que les jours de fête interrompent le deuil et ne comptent pas comme tels (en cas d’inobservance, on commencera après). R. Eliézer dit: depuis la destruction du Temple, la fête de Pentecôte est considérée comme le Shabat (par rapport au deuil). R. Gamliel dit: le nouvel-an et le jour du grand pardon sont considérés comme fêtes. Les autres sages n’adoptent ni cet avis, ni l’autre; selon eux, la Pentecôte est tenue pour une fête, mais le nouvel-an et le jour du grand-pardon sont considérés comme Shabat. En ces jours, on ne déchirera pas les vêtements, on ne mettra pas les épaules à nu (autre signe de deuil), et on n’apportera pas le festin funèbre, sauf aux proches parents d’un défunt; en outre, on les fera manger seulement sur un sopha droit (non renversé, comme c’est l’usage en ce cas). On ne portera pas le repas dans la maison d’un homme en deuil, ni sur une table, ni dans une écuelle (scutella), ni dans une tasse (canon?), mais dans des paniers d’osier tressé (pour ne pas exposer les pauvres à rougir); et on ne dira pas en ces jours la prière des affligés; mais on se mettra en rangée, on énoncera les consolations, puis on congédiera la foule. On n’exposera pas une bière en public, pour ne pas propager les idées de deuil, en ces jours, et jamais celle d’une femme, par question de convenances. En ces jours, les pleureuses peuvent faire entendre leurs cris, non battre des mains; selon R. Ismaël, les personnes les plus proches de la bière frappent des mains1 Pour ces usages, empruntés évidemment aux cérémonies funèbres des Egyptiens, voir entr'autres Schiaparelli, Il libro dei funerali, t. 1, p. 4 et suiv.. Aux jours de néoménie, de Hanuka, ou de Purim, les pleureuses gémissent et frappent des mains l’une contre l’autre, mais ne doivent pas chanter d’élégies. Une fois le mort enterré, on ne devra plus, ni pousser des plaintes, ni frapper des mains. La plainte consiste en ce que toutes gémissent à la fois; le chant de lamentations consiste dans la strophe dite par l’une des présentes, à laquelle toutes les autres répondent, comme il est dit (Jr 9, 19): Enseignez à vos fils les lamentations, et qu’une femme dise à l’autre les chants de plainte. —Mais, à l’avenir on applique ces mots (Is 25, 8): La mort a désormais englouti pour la dernière fois, et Dieu sèche les larmes de chaque visage, etc..